LE PARTAGE EN CAS DE RESERVE : LES CONDITIONS DE LA REDUCTION EN CAS DE LIBERALITE
Contrairement à certains pays étrangers, la loi française a choisi d’instaurer un mécanisme permettant d’encadrer la transmission à titre gratuit des biens dépendant du défunt. Cette catégorie particulière d’héritiers est appelée les « héritiers réservataires ». Ces personnes ont la possibilité d’exiger la protection de la réserve dont ils sont titulaires ceci par l’effet direct de la loi et qui est d’ordre public (le défunt ne peut, par convention, déroger à la réserve, sauf le cas spécifique des donations partages).
Ainsi, tout héritier réservataire a vocation à recevoir une quotité de biens ou droits dans la succession du défunt ou, leur permettant d’échapper à une éventuelle exhérédation ou encore à une appréhension de biens successoraux inférieure à ce qu’il aurait dû recevoir.
Depuis la loi du 23 juin 2006, les deux catégories d’héritiers qui, en droit français, bénéficient d’une protection par l’instauration d’une réserve héréditaire, sont les descendants en ligne directe et, à défaut de ces premiers, du conjoint survivant.
Article 920 du code civil les libéralité directe ou indirecte qui portent atteinte à la réserve sont réductible à la quotité disponible.
§1. La détermination de la masse de calcul :
A. La composition de la masse de calcul :
1) Les biens existants au sens de l’article 922 du code civil :
Sont compris dans cette masse tous les biens dont le défunt était propriétaire jusqu’à sa mort. En conséquence, il y a tous les biens qui existent au jour du décès, y compris les biens légués.
2) les biens donnés : la réunion fictive des biens donnés :
- principe :
Tous les biens donnés doivent être ajoutés que la donation soit fait hors part successorale.
- exception :
Résulte du code civil ou de la pratique :
— certains fruits : article 928 du code civil prévoit que le donataire restitue les fruits des biens excédent le disponible à compter du décès si la demande en réduction est faite dans l’année du décès. sinon, l’article 928 sont dus à compter de la demande. A l’inverse, si la réduction a lieu en valeur, ce qui est le principe depuis 2006, et bien l’article 928 exclu les fruits perçus postérieurement au décès.
— les primes, le capital, ou la rente qui contient une assurance vie : sont exclus. Article L.132-12 du code des assurances. Une exception à cela, c’est-à-dire sauf si les primes sont manifestement exagérées eu égard aux facultés de l’assuré.
— Article 852 du code civil : les sommes de frais de nourriture et d’entretien, les frais de noce, les présents d’usage.
3) Il faut déduire les dettes et charges :
Toutes les dettes et charges de la succession c’est-à-dire les dettes du défunt avant sa mort. Lucie et aude.
Article 922 Code civil : la déduction n’est pas si claire. C’est écrit qu’il faut déduire les dettes et charges grevant les biens donnés.
a. Toutes les dettes et charges de la succession
Les dettes du défunt avant sa mort : dettes de loyer, auprès d’un commerçant, …
Les charges de la succession : les frais funéraires.
Mais ne sont pas déduites : les dettes personnelles des héritiers que sont les droits de mutation.
b. Les dettes et charges afférentes aux biens donnés
Article 922 Code civil : « La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur. / Les biens dont il a été disposé par donation entre vifs sont fictivement réunis à cette masse, d’après leur état à l’époque de la donation et leur valeur à l’ouverture de la succession, après qu’en ont été déduites les dettes ou les charges les grevant. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l’époque de l’aliénation. S’il y a eu subrogation, il est tenu compte de la valeur des nouveaux biens au jour de l’ouverture de la succession, d’après leur état à l’époque de l’acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation. / On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu’il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer ».
Le DC a donné un bien sur lequel il restait un petit emprunt à rembourser. On déduit depuis le jour de la donation, tous les remboursements d’emprunt faits par le donataire.
Obligation de conservation d’un bien avec un entretien particulier pour les biens qui appartiennent au domaine public. C’est une charge afférente au bien qui peut être déduite.
B. L’évaluation de la masse de calcul
En ce qui concerne la détermination de la réserve, les biens sont évalués au jour du décès. Pour la détermination de la masse partageable, au jour du partage.
Le Code civil prévoit des règles équivalentes, mais la date n’est pas la même.
L’article 922 nous donne, si ce n’est la date, les mêmes règles que pour le rapport.
1) Les biens donnés
Ils sont évalués d’après leur état au jour de la donation, et leur valeur au jour du décès.
Si le bien a été aliéné, on tiendra compte de la valeur du bien au jour de l’aliénation.
S’il y a subrogation, alors on tiendra compte de la valeur du bien nouveau au jour du décès, mais uniquement dans la proportion de ce que la valeur du bien donné a permis d’acquérir.
Bien donné vaut 100. En 2000, vendu 150. Sert à acheter un bien qui vaut 200. Au jour du décès, le bien vaut 205.
Calcul de la valeur à prendre en compte pour calculer la réserve de la masse héréditaire.
Valeur du bien donné au jour de l’aliénation / le cout de l’acquisition du bien nouveau * la valeur du bien nouveau au jour du décès.
150 / 200 * 205
En cas de dépréciation monétaire, on ne tient pas compte de la dépréciation.
Une fois établie cette masse de calcul de la réserve, les biens existants, les biens donnés dont les legs, moins le passif, j’applique à cette masse la quotité déterminée par la loi pour connaitre la réserve.
Une fois calculée la réserve, je dois savoir pour chaque héritier si la libéralité reçue va dépasser la réserve.
Je dois connaitre le secteur d’imputation de la libéralité.
Lorsque j’ai un héritier qui a reçu une donation de 50, le patrimoine est de 150, il y a 2 enfants, pour calculer la réserve : 150 + 50 = 200. Normalement, ils doivent avoir 100 chacun. Masse de calcul de la réserve est de 200. La réserve héréditaire : 2/3 * 200 = 166, 67.
La réserve individuelle est de la moitié :
Chacun des héritiers a au moins ça.
§2 : L’imputation des libéralités
Il s’agit de vérifier si les libéralités portent atteinte à la réserve en comparant le montant des libéralités à la quotité disponible et à la réserve pour vérifier si ces libéralités les dépassent.
Cette comparaison du montant des libéralités et des quotités est une opération qui s’appelle l’imputation des libéralités.
Dans quel ordre et sur quel domaine s’imputent les libéralités ?
A. Le domaine, ou le secteur d’imputation
Le principe est exposé à l’article 919-1 Code civil.
« La donation faite en avancement de part successorale à un héritier réservataire qui accepte la succession s’impute sur sa part de réserve et, subsidiairement, sur la quotité disponible, s’il n’en a pas été autrement convenu dans l’acte de donation. L’excédent est sujet à réduction. / La donation faite en avancement de part successorale à un héritier réservataire qui renonce à la succession est traitée comme une donation faite hors part successorale. Toutefois, lorsqu’il est astreint au rapport en application des dispositions de l’article 845, l’héritier qui renonce est traité comme un héritier acceptant pour la réunion fictive l’imputation et, le cas échéant, la réduction de la libéralité qui lui a été consentie ».
Certaines libéralités s’imputent sur la quotité disponible, d’autres libéralités s’imputent sur la réserve.
Les libéralités qui s’imputent sur les quotités disponibles sont toutes les libéralités qui ne sont pas rapportables.
1) L’imputation des libéralités non rapportables : sur la quotité disponible
Toutes donations faites à un héritier qui ne vient pas en rang utile sont en principe non rapportables, sauf clause expresse de rapport.
Toutes donations faites à des tiers non successible ne sont pas rapportables, et s’imputent donc sur la quotité disponible.
Article 919-2 Code civil : « La libéralité faite hors part successorale s’impute sur la quotité disponible. L’excédent est sujet à réduction ».
Les legs s’imputent aussi sur la quotité disponible.
2) L’imputation des libéralités rapportables
Il faut selon la loi (article 919-1) distinguer 2 cas.
Lorsque la libéralité rapportable a été faite à un héritier réservataire, alors la libéralité s’impute d’abord sur la réserve et l’excédent sur le disponible.
Si la libéralité dépasse le disponible, elle est réduite pour le dépassement.
Lorsque la libéralité rapportable a été faite à un héritier non réservataire, le principe est qu’elle s’impute sur le disponible exclusivement et elle sera réduite en cas de dépassement.
Dans les exemples, on ne combine pas les libéralités faites à plusieurs personnes.
3) Les libéralités faites à un héritier renonçant
a. Il n’est pas représenté
L’article 919-2 donne la solution.
Si la libéralité est faite hors parts successorales, elle s’impute sur la quotité disponible.
Si la libéralité est faite en avancement de parts successorales, l’article 919-1 alinéa 2 dit que la libéralité est traitée comme une libéralité hors parts successorales. Elle s’imputera sur le disponible et sera réduite en cas d’excès.
b. Il est représenté
Les libéralités hors parts successorales doivent être rapportées.
Comment réduit-on ces libéralités ?
Article 754 alinéa 4 : « On représente les prédécédés, on ne représente les renonçants que dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale. / Les enfants du renonçant conçus avant l’ouverture de la succession dont le renonçant a été exclu rapportent à la succession de ce dernier les biens dont ils ont hérité en son lieu et place, s’ils viennent en concours avec d’autres enfants conçus après l’ouverture de la succession. Le rapport se fait selon les dispositions énoncées à la section 2 du chapitre VIII du présent titre. / Sauf volonté contraire du disposant, en cas de représentation d’un renonçant, les donations faites à ce dernier s’imputent, le cas échéant, sur la part de réserve qui aurait d– lui revenir s’il n’avait pas renoncé. / On peut représenter celui à la succession duquel on a renoncé ».
Ces donations s’imputent sur la part de réserve que le renonçant aurait eue s’il n’avait pas renoncé. L’excédent s’impute sur le disponible.
B. L’ordre d’imputation
Nous sommes en présence d’une difficulté s’il y a plusieurs donations dans le temps ou plusieurs legs concurrents. Il n’y a qu’un disponible.
Article 923 : « Il n’y aura jamais lieu à réduire les donations entre vifs, qu’après avoir épuisé la valeur de tous les biens compris dans les dispositions testamentaires ; et lorsqu’il y aura lieu à cette réduction, elle se fera en commençant par la dernière donation, et ainsi de suite en remontant des dernières aux plus anciennes ».
L’ordre est le suivant :
– Les donations s’imputent avant les legs : article 923.
Si les legs excèdent le montant de l’imputation des donations, ils sont caducs.
Si les donations absorbent la totalité de la quotité disponible, les legs sont caducs.
– Les donations s’imputent successivement en commençant par la plus ancienne (article 923) et en allant vers la plus récente
Le plus vieille des donations a le plus de chances d’être maintenue, et de ne pas être réduite.
Si les donations ont été faites à la même date, elles seront réduites proportionnellement, c’est-à-dire au marc le franc.
– Les legs s’imputent de manière concurrente et au marc-le-franc
Tous les legs prennent effet au jour du décès.
Exemple : le DC a 2 enfants, 3 neveux.
Il a fait une donation à N1 de 30 en 2001.
Pour N2, une donation de 50 en 2002.
Pour N3, une donation de 100 en 2003.
En 2007, le patrimoine du DC est de 300 à son décès.
Quels sont les droits de chacun, et y a-t-il réduction ?
Article 922 :
R = (BE + LR + LNR) * 2/3 = (300 + 180) * 2/3 = 480 (2/3)
2 enfants. R = 2/3 * 480 = 320.
R individuelle = 160.
Les neveux peuvent-ils garder leur libéralité ?
Secteur d’imputation : le disponible.
Les donations s’imputent dans l’ordre chronologique.
N1 et N2 peuvent garder. N3 peut conserver à hauteur de 80. (réduction de 20).