Conseil d’État : Composition, compétence, fonctionnement

Composition, compétences et fonctionnement du Conseil d’Etat

Le conseil d’État, est le pendant de la Cour de cassation dans l’ordre administratif. Il n’y en a qu’un seul en France, qui siège au Palais Royal de Paris. Il existe cependant une différence fondamentale entre le conseil d’État et la Cour de cassation : la mission principale du conseil d’État, ce n’est pas de juger, mais de conseiller.

Ce n’est qu’accessoirement que le Conseil d’État juge les pourvois en cassation (alors que c’est l’inverse pour la Cour de cassation). La raison est à trouver dans l’histoire. En effet, le conseil d’État trouve son origine dans l’Ancien Régime, notamment au XIIIe siècle, lorsqu’il s’appelait alors « Conseil du Roi ».

loi du 24 Mai 1872. A partir de cette loi de 1872, s’est ajouté à cette mission une mission accessoire : celle de juger. Ce n’est qu’à partir de cette date que les pourvois en cassation furent jugés par le Conseil d’État.

Le Conseil d’Etat est l’institution centrale du système administratif. Il est la source de la jurisprudence des bases du droit administratif français. Il est au sommet de l’ordre juridictionnel administratif.

Alors que le la Cour de Cassation a une organisation pyramidale, l’organisation du Conseil d’Etat est concentrique.

Mais le Conseil d’Etat n’est pas qu’une cour suprême :

— Il possède des compétences directes

— Il peut être juge d’appel

— Et enfin il sera juge de cassation.

L’organisation du Conseil d’Etat est aussi unitaire :

— La cour de Cassation est structurée en différente chambres.

— Le conseil d’Etat n’a pas de chambre spécialisée.

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  • 1er: Historique

En l’An VIII, la Constitution va créer le Conseil d’Etat qui aura pour attribution de conseiller le chef de l’Etat ( pour la rédaction de projet de loi, d’acte et pour les litiges administratifs). Durant tout le 19ème siècle, on va toujours suivre l’avis du Conseil d’Etat.

Parenthèse de 1848 à 1852 : justice déléguée au Conseil d’Etat.

Ce système de la justice retenue va exister jusqu’en 1872, lorsque le Conseil d’Etat devient un véritable juge par la loi du 24 mai 1872 (même si dans les faits, il l’est depuis 1806).

Le conseil d’Etat prend racine dans l’institution du « conseil du roi ». C’est la constitution de l’an VIII et le règlement général de l’an VIII qui prévoyaient un tel conseil.

Les crises du Conseil d’Etat (3 périodes) :

— 1/ La restauration : le Conseil d’Etat fut l’objet de vives critiques. C’est sont existence même qui fut contestée. Des réformes substantielles sont alors entreprises pour en faire plus visiblement une juridiction :

— Plus grande participation au contentieux

— L’Assemblée générale tient séance publiques,

— Création des commissaires du gouvernement. Ces commissaires deviennent outil de la jurisprudence : ils veillent au respect et à la cohérence de cette jurisprudence (au sein de la juridiction administrative).

— 2/ Loi 24 mai 1872 : Fin de la justice retenue, remplacée par la justice déléguée : pas vraiment perçue comme une victoire par le CE (PFLR : contentieux de l’annulation et réformation acte administratif ne peut être confié qu’aux juridictions administratives) : EVOL IMP

— 3/ Crise 1962/1963 : (cf. infra).

  • &2 : Formations d’instruction et de jugement du Conseil

Dans cette formation, le Conseil d’Etat est organisé comme un ministère, avec des sections rattachées aux différents ministères et qui donnent conseil aux administrations de rattachement.

Règlement de procédure : ce règlement régit le Conseil d’Etat jusqu’en 1945 : apparition section contentieuse, l’instruction revenant aux différentes sections.

Le dualisme du conseil d’Etat apparaît nettement par la suite des organisations des sections administratives et du contentieux.

Les membres du conseil d’état alternent dans les fonctions administratives et contentieuses : le 2nd Empire fonctionnera comme ça


Le système actuel enfin, est celui de : « la double appartenance », système renforcé par la réforme de 1963 :

— Quand on juge, il ne faut pas oublier qu’on juge l’administration (les membres appartiennent aux deux formations)

— Mais cette double appartenance n’est pas complète car on estime que le contentieux est une bonne formation : ainsi, les jeunes juges commenceront ils par le contentieux ?

Principe : une affaire est instruite par une sous section à une époque spécialisée, aujourd’hui moins, jugement fait par des formations différentes selon l’importance de l’affaire et la difficulté juridique qu’elle pose (caractère de principe, ou d’espèce)

— Possible une sous section, voire 2 réunies (celle ayant fait l’instruction avec une autre). Parfois trois sections sont réunies : formation ordinaire de jugement

— Si l’affaire est d’importance :

o Juridique (revirement/infléchissement de la jurisprudence). Dans ce cas, la section sera composée avec deux conseillers d’Etat affectés à titre principal à la section administrative, le commissaire Gouvernement et le président de sections

o Politique. Alors on déroule le tapi rouge et on se place devant l’assemblée du contentieux (on cherche à établir une présence équilibré entre les membres appartenant à la section du contentieux et ceux qui appartiennent plus aux sections administratives. 12 membres : vice président du Conseil d’Etat (sa voix est prépondérante), président de la section contentieux accompagné de trois président adjoints (président de sous section, d’instruction , de section d’affaire…) viennent s’y ajouter les président des cinq section administratives du Conseil d’Etat

Réforme législative insérant une juridiction des référés :

C’est une formation particulière, à juge unique qui a toujours la possibilité de statuer en formation collégiale (s’il préfère).

L’urgence est prévue structurellement : permanence organisée, la procédure est essentiellement orale (intervention de parties/avocats)

— Résultat : succès. Le référé a bien fonctionné. Le juge n’a pas eu peur d’effectuer sa compétence notamment contre l’administration et le Conseil d’Etat a donné beaucoup de vigueur à cette procédure. Dès lors, c’est toute l’organisation du contentieux administratif qui s’en est trouvé modifiée, et aujourd’hui il y a presque plus de procédures en référé que de procédure « normale ».

  • &3 : Les compétences du Conseil d’Etat

C’est ici que le Conseil d’État se différencie pleinement de la Cour de cassation. Le Conseil d’État est à la fois juge de première instance, juge d’appel ainsi que juge de cassation.

  • I. Le Conseil d’État, juge de première instance.

Jusqu’en 1953, le Conseil d’État connaissait de tous les litiges administratifs. Le décret de 1953 a crée les tribunaux administratifs et depuis, les litiges de première instance sont soumis, en principe, au tribunaux administratifs. Mais ce principe n’est pas absolu. Car certains litiges, même depuis 1953, continuent de relever du conseil d’État en première instance. Lorsqu’il est saisi en tant que juge du premier degré, on parle de sa compétence directe, ou alors encore de sa compétence en premier et dernier ressort. Lorsque le conseil d’État statue en première instance, il n’y a aucun recours possible. Les cas où le conseil d’État peut être saisi de cette manière sont des cas exceptionnels, mais quantitativement, ils représentent tout de même environ 15% des arrêts rendus par le conseil d’État dans le cadre de sa compétence directe. Les cas d’accès à cette compétence sont assez exceptionnels.

Les hypothèses où il faut saisir en première instance le conseil d’État sont limitativement énumérées à l’article R300-1 :

  • Lorsque la requête vise à mettre en cause un acte administratif de portée nationale,
  • Ou lorsque le recours que le justiciable souhaite intenter présente un enjeu national.

Dans la première hypothèse, on parle « d’acte administratif de portée nationale ». Il faut savoir qu’est considéré comme un acte administratif de portée nationale un acte émanant de …

Dans le même ordre d’idée, relèvent également de la compétence directe du Conseil d’État les décisions prises par les organes suivants :

  • L’agence Française de lutte contre le dopage,
  • L’autorité de la concurrence,
  • L’autorité des marchés financiers,
  • Le conseil supérieur de l’audiovisuel,
  • La commission internationale de l’informatique et des libertés.

Une deuxième hypothèse est le recours qui présente un enjeu important. Est un tel recours le recours qui vise à mettre en œuvre la responsabilité de l’État pour durée excessive de la procédure. En vertu de Convention Européenne des Droits de l’Homme, le juge Français doit rendre sa décision dans un délai raisonnable. Si tel n’est pas le cas, la France peut être condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

  • II. Le Conseil d’État, juge d’appel.

C’est en 1953, lorsque le Tribunal Administratif a été crée que le conseil d’État est devenu le juge d’appel de droit commun dans l’ordre administratif. A partir de 1953, la requête devait être présentée au Tribunal Administratif et en appel, au Conseil d’État. La loi du 31 Décembre 1987 a crée des cours administratives d’appel et donc, la logique aurait voulu qu’à partir de 1987, le juge d’appel soit maintenant la Cour administrative d’appel et non plus le Conseil d’État. Sauf que la loi du 31 Décembre 1987 a assorti ce principe d’exceptions, dans lesquels le Conseil d’État peut toujours être juge d’appel. Il existe 04 exceptions :

  • Le Conseil d’État est juge d’appel pour trancher le contentieux des élections municipales et cantonales.
  • Il demeure juge d’appel pour connaitre des recours pour excès de pouvoir formés contre des actes règlementaires. Il existe en droit administratif les actes individuels et les actes règlementaires. Les actes individuels en appel sont traités par la Cour administrative d’appel. Les actes règlementaires en appel, quant à eux, sont traités par le Conseil d’État.
  • Enfin, il est juge d’appel pour connaître des recours en appréciation de la légalité des actes réglementaires résultant des renvois préjudiciels opérés par les juridictions judiciaires.
  • III. Le Conseil d’État, juge de cassation.

Le Conseil d’État est juge de cassation des décisions rendues en dernier ressort par les Cours administratives d’appel, mais aussi par les juridictions administratives spécialisées (telles que la Cour des comptes, la Cour de discipline budgétaire et financière, le Conseil supérieur de la Magistrature, le Conseil supérieur de l’éducation nationale, ou encore les sections disciplinaires des ordres professionnels…). En tant que tel, il veille à la bonne application et à la bonne interprétation de la règle de droit. Ainsi est assurée la rectitude de l’application du droit administratif à l’intérieur de l’ordre administratif. Pour cette raison, le Conseil d’État n’est pas « une troisième degré de juridiction ». Pour provoquer ce contrôle, le Conseil d’État, comme la Cour de cassation, doit être saisi d’un pourvoi en cassation.

A) Le filtrage des pourvois en cassation.

Devant la Cour de cassation, seuls les pourvois adressés à l’une des Chambres civiles entendues lato sensu font l’objet d’un filtrage par une formation de trois juges. La Chambre compétente ne pourra examiner le pourvoi que si l’admission de celui-ci a été déclarée par la formation de filtrage. En revanche, les pourvois adressés à la Chambre criminelle ne font l’objet d’aucun filtrage.

Devant le Conseil d’État cependant, tous les pourvois font l’objet d’un filtrage préalable. En effet, il existe au sein du Conseil d’État une Commission d’admission des pourvois en cassation. Cette Commission est composée de trois membres du Conseil d’État. Son rôle consiste à écarter les pourvois dilatoires ou encore abusifs. Cette Commission peut donc prendre deux types de décisions :

  • Si le pourvoi lui paraît irrecevable ou non fondé sur un moyen sérieux, la Commission prend alors une décision de refus d’admission qui rejette ce recours. L’affaire est définitivement terminée.
  • Si le pourvoi lui paraît recevable et qu’il comporte des moyens sérieux, la Commission transmet le pourvoi à la sous-section compétente de la section du contentieux, laquelle procède alors à son instruction et l’affaire sera jugée selon la procédure classique.

Force est de constater que la technique de filtrage du Conseil d’État, très expéditive, n’a aucune commune mesure avec la formation de trois juges de la Cour de cassation.

B) L’examen des pourvois en cassation.

Le pourvoi dont l’admission a été déclarée par la Commission d’admission est examiné par la formation compétente du Conseil d’État (soit en sous-section, soit en sous-sections réunies, soit en section du contentieux ou soit en Assemblée du contentieux). Comme la Cour de cassation, dans son contrôle de la bonne application et de la bonne interprétation de la règle de droit, le Conseil d’État ne peut connaître que des moyens de droit. Tel est du moins le principe car, dans une hypothèse particulière, le Conseil d’État est autorisé à juger, outre la légalité de la décision qui lui est déférée, les faits de l’espèce. En sa qualité de juge de cassation, le Conseil d’État peut rendre deux sortes de décisions : une décision de rejet du pourvoi ou une décision de cassation.

1) La décision de rejet.

Bien évidemment, le Conseil d’État peut rendre un arrêt de rejet lorsque le pourvoi ne lui paraît pas convainquant. L’affaire sera alors définitivement terminée.

2) La décision de cassation.

Le Conseil d’État peut également rendre un arrêt de cassation s’il estime que la décision qui lui est déférée n’est pas conforme à la loi. Comme la Cour de cassation, le Conseil d’État peut casser avec ou sans renvoi :

  • En principe, la cassation s’opère avec renvoi puisqu’il est impossible pour le Conseil d’État, juge du droit, d’appliquer lui-même aux faits de l’espèce la solution juridique qu’il vient d’adopter. Le renvoi s’opère devant une juridiction de même nature et de même degré. Il peut aussi s’opérer devant la même juridiction que celle ayant rendu la décision contestée, mais composée autrement. Tel sera le cas lorsque cette juridiction est unique (Cour des comptes, Cour de discipline budgétaire et financière par exemple).
  • Par exception, la cassation s’opère sans renvoi dans trois hypothèses distinctes :
  • Tout d’abord, lorsque l’annulation de la décision contestée est pleinement satisfaisante dans la mesure où elle met fin au contentieux et qu’il n’y a plus rien à juger.
  • Ensuite, lorsque le Conseil d’État décide de trancher lui-même l’affaire au fond, « dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice ». En effet (la règle est remarquable), le Code de l’organisation judiciaire autorise le Conseil d’État à juger, outre le droit, les faits dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice. Cette possibilité lui a été reconnue par une loi du 31 décembre 1987. Cet intérêt sera notamment le souci de parvenir plus rapidement à une décision de justice définitive.
  • Enfin, lorsque le Conseil d’État a été saisi par un second pourvoi, fondé sur les mêmes moyens. Dans cette hypothèse, il lui appartient de trancher lui- même l’affaire au fond.

Il faut en effet savoir que, comme la Cour de cassation, le Conseil d’État peut être saisi d’un second pourvoi fondé sur les mêmes moyens lorsque, après un premier pourvoi, la juridiction de renvoi refuse de s’incliner à la décision rendue par le Conseil d’État. Mais, dans cette hypothèse, et contrairement au mécanisme du pourvoi devant la Cour de cassation, le Conseil d’État intervenant à nouveau ne pourra plus renvoyer l’affaire devant une seconde juridiction de renvoi. Lorsqu’il examine le second pourvoi, il est légalement tenu de trancher l’affaire tant en droit qu’en faits. L’affaire est alors obligatoirement terminée.

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