Conseil du Roi, États Généraux et autres institutions de l’Ancien Régime

Le gouvernement du royaume sous l’Ancien régime

L’Ancien Régime est une période historique qui débute au XVIe siècle et prend fin en 1789 quand la République française est créée. De la fin de la guerre de 100 ans (qui a pris fin en 1453 ) à 1789. De la fin de la guerre de 100 ans à 1789.

On distingue le gouvernement de l’administration du territoire. Dans l’un et l’autre cas se perfectionnent les institutions et les pratiques. L’analyse porte sur 4 siècles.

Le gouvernement du royaume est fondé sur des règles de nature constitutionnelle en théorie. C’est une situation réglée par des textes et des coutumes, donc par des pratiques durables. Cette situation réglée peut se distinguer d’une situation plus changeante, qui s’adapte à l’époque et aux besoins, celle de la situation ministérielle (travail des ministres).

Il existe des pratiques de nature constitutionnelle (masculinité, aînesse, catholicité, indisponibilité de la couronne…). Des articles règlent la marche gouvernementale. Quand on recherche ce qu’il y a de plus stable, on ne s’attache pas au va et vient ministérielle. Ce qui domine l’organisation impose de faire la distinction entre ceux qui conseillent le roi et ceux qui représentent des intérêts particuliers et catégoriels. Il y a la représentation de la nation et d’autre part le conseil du roi qu’on appelle la « défense ».

A. La fonction de « défense ».

Il s’agit de défendre le roi contre des erreurs ou des mauvaises actions. Défendre le roi c’est en fait défendre la couronne. C’est une fonction indispensable, car le roi est souverain, et cette souveraineté ne peut correctement s’exercer que s’il y a conseil. La fonction est assurée par l’entourage du roi.

a) Le Conseil du roi.

La notion a été perturbée par la montée en puissance des parlements, qui estiment être les véritables conseils du roi.

Montesquieu distinguera le conseil privé du prince et son conseil légal, sur lequel il ne peut rien (c’est les parlements, Montesquieu est lui-même issu du parlement de Bordeaux).

En France il y a donc un débat, une controverse.

A l’époque des capétiens directs, c’est l’entourage des personnes proches qui conseillent le roi, dans le cadre de réunions plus ou moins régulières. On y trouve des proches de la domesticité du roi, quelques grands seigneurs de passages, quelques légistes aussi.

1. L’héritage de la « Curia regis »

C’est la cour du roi. Cette curia avec le temps devient de plus en plus solennelle et importante. Il peut y avoir plusieurs dizaines de personnes.

L’espacement des réunions

La curia est difficile à organiser donc on espace les réunions. Pour rendre ces réunions plus efficaces, on va spécialiser la curia regis.

Le personnel.

Emergeront alors 2 spécialisations, une cour spécialisé dans la justice l’autre dans les comptes (curia in parlamento et in compotis). Ces 2 cours se sédentarisent dans l’ile de la cité.

La curia in concilio se développe aussi. On pensait que la division en 3 était définitive. Au cours de la guerre de 100 ans, se reconstituera la curia primitive qui réunira les 3 cours. C’est une assemblée de personnages importants en termes de pouvoir et de leur position autour de la couronne. Il y a des laïques et des ecclésiastiques. Les sommets de la couronne sont ici rassemblés dans une sorte de chambre haute. En Angleterre apparaitra l’expression de chambre des lords, qui ressemble à cette cour française.

Le roi vient y siéger, il écoute et en raison du poids politique du personnel doit aussi suivre les conseils, puis à partir du 16ème siècle ces réunions n’auront plus lieu. Chaque cour va poursuivre sa propre vie.

2. Le « Conseil du Prince »

Montesquieu estime qu’à un moment ce conseil légal devient le conseil du prince, à partir du 17ème. C’est l’avatar de la curia in concilio.

Le roi convoque en son conseil les gens qu’il a envie d’y voir. Au 17 et 18ème, c’est une machine complexe, composée de diverses formations.

La spécialisation des formations

La tendance est à l’inflation de ces formations. Il y a cependant une unité juridique, qui fait qu’il y a un seul conseil du roi. Le roi est considéré comme étant présent partout dans ces conseils. Chaque formation va prendre des décisions au nom du roi, comme si le roi les prenaient lui-même (d’où expression : « le roi en son conseil »). Tout l’arsenal des règlement se fait par la machine à produire des arrêts du roi. Gouverner à grand conseil c’est donc aussi la fiction de la présence du roi.

Au 17ème apparaissent des distinctions. Une fonction de politique étrangère et une de politique intérieure.

Dans le conseil dit « d’en haut » on trouve certaines personnes qui ont un portefeuille ministériel, d’autres qui n’en ont pas, mais sont cependant influents. Tous ont le titre de ministre d’état.

La deuxième formation dit le « conseil des dépêches » (on y reçoit le courrier administratif venant des provinces), regroupe des juristes, le roi ne vient jamais, mais le dauphin y siège parfois.

Plus tard apparaitra une formation concernant l’administration, le conseil d’état. On y prend des réglementations et il est composé de juristes et surtout de publicistes.

Il y a aussi le conseil des parties, à vocation judiciaire, composé de juriste et de maitre des requêtes. Il traite d’affaires judiciaires qui remontent jusqu’au roi en cassation notamment. C’est l’ancêtre de la cour de cassation

Vers la fin du règne de Louis XIV apparait le conseil des finances, où l’on traite de toutes les affaires de finances (budget, emprunt, fiscalité)

Ces formations se réunissent 1 fois par semaine.

A côté se trouvent les formations du conseil. Elles ont tous les attributs du conseil. On distingue les commissions ordinaires des extraordinaires. La plus célèbre des ordinaires est la commission des finances (grande direction des finances). C’est elle qui la main sur les finances.

Les commissions extraordinaires sont très nombreuses. On traite d’affaire diverses, y compris d’affaires privées et personnelles. Lorsqu’une affaire prend des dimensions gênantes, le roi nomme les membres de la commission qui s’attaque au problème et juge.

Toutes ces commissions jugent et réglementent. C’est le domaine de la justice retenue du roi.

Les commissions extraordinaires peuvent aussi régler un problème technique complexe (poste et messagerie, pour moderniser la distribution des courriers et colis), et juger les litiges. Leurs archives forment des jurisprudences. Ainsi au 18ème les parlements seront opposés aux sanctions douanières, de telles commissions règleront le problème, notamment pour juger Mandrin, bandit de grand chemin. L’affaire des poisons leur sera également confiée.

Cette technique de multiplication des formations du conseil n’est pas un handicap dans l’efficacité, bien au contraire et l’unité de l’ensemble est maintenue par la présence réelle ou fictive du roi.

Le personnel

Il a fait l’objet d’une rationalisation. Sous Henri IV il suffisait d’avoir un brevet pour siéger au conseil, il y avait trop de personnes. Sous Louis XIV en 1674 on distinguera 3 catégories de personnes pouvant siéger de façon permanente, les ministres d’état, les conseillers d’état (40) et les maitres des requêtes (80). Tous sont d’excellents publicistes et sont capables de défendre les droits de la couronne, c’est « la robe » de la couronne. Il portent la robe longue comme les magistrats des parlements.

Dans les commissions extraordinaires on appelle également à siéger les personnes dont on a besoin dans un cas d’espèce.

b) Les cours souveraines.

Les plus connus sont les parlements. Ce sont des cours de justice jugeant en dernier appel. Mais elles enregistrent aussi les lois et peuvent prendre des arrêts de règlement.

Leurs origines sont diverses selon les cours

1. Les différentes cours

Le Parlement de Paris.

C’est la curia in parlamento qui se perfectionne au cours des siècles. Elle siège dans la ville de la cité et a ses archives. Le nombre de chambres augmentent. Sous Louis XV c’est la réunion de 250 magistrats de robe longue, qui sont en situation d’inamovibilité (ils sont propriétaire de leur charge et sont très indépendants).

La grand-chambre est composée de 40 conseillers.

On trouve 3 chambres des enquêtes (40 conseillers chacune), 2 chambres des requêtes, une chambre criminelle (la tournelle, car les magistrats y siègent à tour de rôle pour éviter qu’ils s’habituent à punir).

Toutes ces chambres peuvent être réunies dans le cadre d’une assemblée des chambres.

A côté on trouve un parquet général avec 1 procureur général et des substituts. Le procureur est la voix du roi, il ne parle pas et fait tout par conclusion. Les avocats généraux parlent et plaident pour défendre la loi. On dit « que la plume est serve et la parole est libre ».

Les parlements de province

Ce parlement de Paris a vu son ressort s’étendre à toutes les provinces du centre de la France jusqu’au Massif central. L’expansion du royaume pour des raisons de droit posera des problèmes. Le rattachement des provinces méridionales correspond à l’arrivée d’un nouveau droit (écrit), et les magistrats parisiens ne savent utiliser ce droit. Ainsi le roi créera un parlement à Toulouse. Le roi créera un parlement presque chaque fois qu’une province sera rattachée à la couronne. Ce seront des parlements réclamés par les élites des provinces. Sous Louis XV il y aura ainsi 15 parlements.

Ces parlements sont égaux comme si on avait démembré la fonction de conseil et de juger. Ici on est dans le cadre délégué et non pas retenu.

2. Les compétences

Ces parlements sont des intervenants dans l’ordre législatif et constitutionnel.

Législation : les arrêts de règlement

Les parlements peuvent prendre une norme de nature législative pour régler un problème particulier dans son ressort, en dehors de tout procès. C’est un véritable pouvoir législatif délégué par le roi. Les solutions sont ainsi mieux adaptées aux provinces

Contrôle de constitutionnalité : le « dépôt des lois »

Les parlements enregistrent les lois. Quand la loi est faite par le roi en conseil, les parlements transcrivent au greffe du tribunal le texte de loi, par lettre patente (ouverte). Le public attend cette publicité des lois, sinon il ne les respecte pas.

Une fois enregistré, la cour demande au parquet général de transmettre les lois aux juridictions inférieures pour application et publication.

L’opération d’enregistrement peut être un motif de refus de la part du parlement, s’il estime la loi contraire à l’ordre juridique. Le roi ne peut toucher au domaine, ni aux libertés individuelles (droit de propriété et liberté individuelle publique, surtout lorsqu’il y a des lettres de cachet).

Il donc une opposition et un dialogue entre le roi et les parlements. Ceci aboutit à des conflits, et il ya alors une navette de négociation entre le parlement et le roi.

Quand il n’y a pas de solution le roi reprend sa délégation, convoque le parlement, et impose au greffier de transcrire le texte sur les registres. Quand cela se passe dans les provinces, c’est le gouverneur du roi qui se déplace. Un tel lit de justice est le signe d’une crise.

Si un parlement résiste malgré tout en donnant l’ordre à son parquet général de ne pas faire suivre le texte, il se met alors dans l’illégalité. Les sanctions sont des mises à l’écart individuelles ou collectives, par lettre de cachet. Ceci se produira lors du déplacement du parlement de Paris à Troyes pour le couper de son soutien populaire.

Il y a donc de la part du parlement un contrôle de la légalité des textes.

Le contrôle d’opportunité des parlements.

Les parlements assurent une fonction de défense et de conseil. Le Conseil du Conseil du roi est bien le parlement. Le conseil du parlement consiste à enregistrer les lois dans leurs archives (pour les protéger et veiller sur leur application). La transcription n’est faite que si le texte est conforme à la légalité générale. Il cache aussi un contrôle d’opportunité.

Dans les pouvoirs du parlement il y a un plus. Les lois de finance relèvent du consentement à l’impôt, qui est la compétence des états provinciaux et généraux.

Les états généraux ne sont plus convoqués depuis 1614. Pendant cet interstice (de 1614 à 1789) la fonction de représentation et le contrôle des textes fiscaux, donc le contrôle d’opportunité des impôts sera assuré par défaut par le parlement qui s’empare de vide laissé par la non convocation des états généraux (est-il opportun d’augmenter un impôt ou pas, c’est cela le contrôle d’opportunité, sur la base de la théorie de l’interstice qui permet au parlement de se mêler de l’opportunité des impôts).

Il n’y a pas eu de réunion des états généraux car les parlements n’avaient pas envie de partager un pouvoir qu’ils venaient de s’approprier. C’est un bricolage constitutionnel qui sera lourd de conséquence.

B. La fonction de « représentation ».

C’est une fonction qui part de la base vers le roi, donc montante. Il existe 2 niveaux de représentations, générales et particulières.

Il y a les états généraux et les états particuliers, provinciaux

1. Etats généraux

Compétences

Ce sont des réunions des 3 états (clergé, noblesse et le reste) dont les premières datent du règne de Philippe le Bel. Le roi réunit les états pour avoir un interlocuteur représentatif des intérêts de chacun. Au moyen-âge le tiers état sera les villes, les bourgeois et la puissance de l’argent.

Le roi réunit ainsi les doléances des états et décerne alors aux états de l’argent, des impôts. Il y avait alors un consentement direct et sans ce consentement, l’impôt ne pouvait pas être perçu. Au roi de se débrouiller pour avoir ce consentement.

Evolution.

Au moyen-âge cela se passe sur convocation du roi. Puis en 1614, le roi est poussé par le tiers état à adopter une position absolutiste contre la noblesse.

Les états se réunissent comme chaque ordre séparé, chacun vérifie ses propres pouvoirs.

Ce sont des élus qui font partie de la réunion des états. Dans chaque ordre on trouve entre 200 et 400 personnes (on a doublé le tiers état).

Il y a des membres de droit et des élus.

Pour le tiers état la représentation se fait à plusieurs niveaux dans un suffrage indirect. Chaque corps dit ce dont il a besoin, c’est une présentation de la nation organisée. Les électeurs sont les membres des différents corps qui organisent la nation et le mandat des députés est donc impératif (il ne défend que les intérêts qu’on lui a soumis et il doit en répondre).

2. Autres formes de représentation générale

Les assemblées de notables.

Ce sont des faux semblants des états généraux sans élection. C’est le roi qui choisit des notables de chaque ordre pour former des réunions qui leur soumettront leurs suggestions et consentement. Il y en a peu en fait.

Les parlements et la théorie de l’interstice.

Cf ci-dessus.

b) Les représentations particulières.

C’est au moyen-âge qu’on les trouve, surtout la forme de la réunion des 3 états ou même d’un seul ordre.

1. Les états provinciaux.

Ils servent à porter les doléances au roi et à voter des impôts et aussi plus.

Compétences

Les états de Languedoc sont ceux qui ont le mieux fonctionné (Toulouse et Montpellier, qui se réunissent à Montpellier). Ici le dialogue avec le pouvoir royal a été constructif globalement. Ils perçoivent l’impôt et ils donnent une partie au trésor royal (sous la forme du don gratuit), mais la plus grande partie sera utilisée pour des tâches d’intérêt général au sein de la province. Ici la représentation va avec la gestion. On est dans une situation territoriale d’autonomie ou de fédération. Cette situation a permis au Languedoc une politique de travaux publique florissante.

A la fin du moyen-âge il y avait beaucoup d’états particuliers et avec Louis XIV on cherchera à faire disparaître les états provinciaux en ne les convoquant plus. Au 18ème siècle 1/3 du territoire seulement est ainsi concerné par cette représentation, il y a donc un déséquilibre. Le grand projet de modernisation territoriale c’est l’édit de juin 1787 qui prévoit la création d’états provinciaux dans les provinces qui en sont dépourvues. Necker hostile à cette réforme convoquera les états généraux et ce sera un échec.

Typologie

Il y a dans les états des situations diverses. Il y a des petites et des grandes provinces, certaines n’étant réunies qu’occasionnellement d’autres plus souvent. Certaines provinces ont en plus des compétences de gestion.

2. Les représentations d’ordres

Les plus organisées sont celles du clergé, plus particulièrement l’assemblée générale du clergé qui se réunit tous les 5 ans, pour discuter de questions fiscales (montant du don gratuit) et d’organisation de l’église.

L’assemblée générale du Clergé.

Il y a des représentants de droit et des élus. Cette assemblée, à la fin de sa cession élit un bureau (agence générale du clergé) permanent, chargé d’appliquer les décisions et de préparer les réunions suivantes. C’est un système de représentation et gestion continu qui fonctionne efficacement. La démarche de 1789 sera de généraliser pour le territoire ce type d’assemblée pour une représentation et une gestion efficace. La réflexion aboutira dans la réunion des états généraux.

Les assemblées particulières de la Noblesse et du Tiers

La noblesse de Bretagne peut former une représentation. En province les états provinciaux n’y étant plus réunis, c’est le tiers état qui formera l’assemblée générale des états de Provence.