la réglementation du contrat de mariage
Le contrat de mariage qu’il ne faut pas confondre avec le mariage lui-même vise l’acte juridique par lequel les époux déterminent leur régime matrimonial.
Quels sont les caractères du contrat de mariage ?
Il y a à la base un accord de volonté et le contrat de mariage est assujetti au droit commun des actes juridiques. Mais comme cet acte est très lié au mariage lui-même, il présente des caractères particuliers et notamment idée que c’est un accessoire du mariage. Il est subordonné au mariage et ne prend effet qu’au jour de la célébration du mariage et si le mariage n’était pas célébré, le contrat de mariage serait caduc.
On parle parfois faussement de condition suspensive, mais il n’y a pas de rétroactivité.
Le contrat de mariage est plus qu’un simple contrat créant des obligations, on dit qu’il présente un aspect statutaire, qu’il détermine le statut de la famille qui va se fonder. De plus, l’opposabilité aux tiers est plus marquée que pour d’autres conventions puisqu’il peut modifier la répartition des pouvoirs entre époux. Une publicité est donc nécessaire.
Il ne peut cesser d’avoir effet par un simple consentement en sens opposé (un mutuus disensus), ce qui est possible en droit commun. Ici, le simple accord des parties ne suffit pas pour faire disparaître le contrat de mariage.
Conditions de validité des contrats de mariage : fond, forme, publicité, date de conclusion du contrat.
Section I
conditions de fond
Problèmes particuliers sur deux points : le consentement et la capacité des futurs époux.
I – Le consentement des futurs époux
Ils doivent toujours consentir personnellement à leur contrat de mariage, même s’ils sont incapables. C’est pourquoi on applique la théorie des vices du consentement, le droit commun des actes juridiques.
Ex d’annulation d’un contrat de mariage pour dol, sanctionné par l’annulation = 4 juillet 1995 1ère Civ.
La sanction du vice du consentement depuis la loi de 1965 (avant la sanction était une nullité absolue) est une nullité de protection ou nullité relative comme l’a confirmé l’arrêt ci-dessus qui ne peut être invoquée que par l’époux que l’on veut protéger. Le délai est le délai de droit commun de 5 ans. La nullité n’est pas forcément totale mais peut n’affecter qu’une donation incluse dans le contrat mais pas le contrat dans son ensemble, si elle ne conditionnel pas l’ensemble de l’acte dans l’esprit des parties.
II – Capacité des futurs époux
A –Mineur
Concerne surtout les jeunes filles entre 15 et 18 ans.
La solution de principe correspond à l’adage : « habilis ab nuptias, habilis ab pacta nuptiala ». La capacité et l’habilitation nécessaires pour le contrat de mariage sont les mêmes que pour le mariage lui-même.
= père et mère.
Il faut bien voir que le mineur est ici assisté mais non représenté, il conclut l’acte lui-même avec l’assistance d’une autre personne.
La situation n’est pas différente s’il s’agit d’un mineur émancipé (possible dès l’âge de 16 ans). L’article 481 prévoit que l’assistance demeure ici requise.
Si un contrat de mariage est célébré en contravention de ces règles, la sanction est la nullité du contrat, l’action pouvant être intentée soit par le mineur lui-même soit par celui dont le consentement était requis et n’a pas été obtenu.
Le délai est bref parce que l’article prévoit qu’à défaut de l’assistance requise, la nullité ne peut être demandée que jusqu’à expiration de l’année qui suit la majorité.
B – Majeurs protégés
L’article 1399 prévoit un système comparable à celui du mineur, des conditions d’assistance et des sanctions.
Si c’est un majeur en tutelle, il doit être assisté de ceux qui doivent consentir au mariage. L’article 506 dispose qu’il lui faut soit une autorisation du conseil de famille soit de ses père et mère.
Si c’est un majeur en curatelle, il doit être assisté de son curateur mais en cas de refus de ce dernier, il peut solliciter une autorisation auprès du juge des tutelles = article 514.
Quant aux sanctions de ces règles, c’est une nullité relative, l’action doit être intentée soit par l’incapable soit pas ceux dont le consentement était requis ou par le curateur ou le tuteur.
L’action en nullité est soumise à un bref délai puisque qu’elle doit être intentée dans l’année qui suit le mariage, délai préfixe = 1399 al 2.
Section II
conditions de forme
Le point principal est l’exigence d’un acte notarié, posée par l’article 1394 al 1.
Le contrat de mariage est un contrat solennel. Justification = éclairer les époux sur un acte complexe et important (devoir de conseil du notaire) et assurer la conservation de l’acte à la fois dans l’intérêt des époux et des tiers.
Il ne suffit pas d’un acte notarié, il y a une autre règle particulière qui concerne la représentation des parties et leur présence.
Les parties peuvent se faire représenter par un mandataire, mais la procuration doit être authentique et spéciale de sorte que ce n’est pas une véritable représentation mais plutôt une délégation de signature.
Sous cette réserve, le mandat n’est pas interdit alors que c’est le cas pour le mariage lui-même.
Second élément, l’article 1394 prévoit que l’acte reçu par le notaire doit être reçu en la présence et avec le consentement simultané de toutes les parties ou de leurs mandataires. Il faut que les personnes consentent en même temps à cet acte, différence avec le droit commun qui autorise la signature d’un contrat par chaque partie à une date différente.
Sanction de l’inobservation de ces conditions de forme = nullité de l’acte, nullité absolue car la forme authentique est exigée non seulement dans l’intérêt des parties mais aussi de la famille et des tiers. C’est pourquoi un contrat de mariage sous seing privé serait frappé de nullité.
Cette nullité frappe non seulement le choix du régime matrimonial mais aussi les donations qui ont pu être incluses dans ce contrat.
Section III
la publicité du contrat de mariage
Modes de publicité et sanction.
En 1804, pratiquement aucune publicité. C’était dangereux pour les tiers qui ignoraient la répartition des pouvoirs entre les époux à une époque où existaient des biens dotaux inaliénables.
Carence comblée par la loi de 1850, loi Valette, réforme dans le but non d’égaliser le sort des époux mais d’assurer leur crédit. Le système imaginé a été conservé par la loi de 1965.
Idée = utiliser la publicité du mariage pour réaliser celle du contrat de mariage. L’acte de mariage indiquera qu’un contrat de mariage a été passé. En pratique, le notaire remet aux parties un certificat indiquant l’existence et la date du contrat, au moment de la célébration, l’officier l’état civil demande aux futurs époux s’ils ont fait ou non un contrat et si oui il leur demandera le certificat du notaire et pourra mentionner sur l’acte de mariage qu’un contrat de mariage a été passé. Il n’en indiquera pas davantage, mais les tiers, avec un extrait de l’acte de mariage sauront qu’un contrat a été passé, ils pourront alors demander des explications aux époux.
Ce système concilie publicité et discrétion.
Formalités spéciales concernant les commerçants : inscriptions plus détaillées au registre du commerce sur la nature du régime et les clauses qui pourraient restreindre la libre disposition des biens, ainsi, quand un commerçant se marie, il lui appartient de faire la publicité voulue au registre du commerce et inversement si le commerce est exercé après le mariage, l’époux qui demande son immatriculation doit fournir les renseignements voulus.
Sanction = inopposabilité du contrat de mariage et le recours au régime légal.
Le défaut de publicité entraîne à l’égard des tiers l’application du régime légal è inopposabilité aux tiers du contrat de mariage qui n’a pas fait l’objet de la publicité voulue, sauf si dans le contrat conclu avec les tiers, les époux on déclaré d’existence de leur contrat de mariage.
Si par exemple les époux avaient adopté la séparation de bien et que la publicité n’a pas été faite, à l’égard des tiers, les biens acquis par l’époux commerçant sont des biens communs et il en va de même pour les biens acquis par le conjoint è les dettes du conjoint commerçant engageraient les biens du conjoint.
Le défaut de publicité peut résulter de la passivité du notaire ou de l’officier d’état civil : le notaire peut être tenu à dommages et intérêts, il engage sa responsabilité. Il peut avoir une amende.
En pratique, il est rare qu’un contrat de mariage ne soit pas mentionné dans l’acte.
Section IV
la date à laquelle le contrat de mariage doit être conclu : la date du contrat de mariage
L’article 1395 du Code civil pose le principe d’antériorité du contrat de mariage par rapport au mariage lui-même.
Aucun délai n’est indiqué.
Si rien n’a été fait, le régime légal s’applique automatiquement. Pour faire un contrat après le mariage, il faut passer par la procédure judiciaire de changement de régime.
Le contrat ne prend effet qu’au jour du mariage (pas de rétroactivité).
Il résulte qu’entre la date de la signature du contrat et la célébration du mariage, le contrat peut être modifié.
Il y a une possibilité de modification antérieure à la célébration : elles sont appelées « contre-lettre » et l’article 1396 al 2 emploie cette expression qui n’est pas exacte parce que en droit commun c’est l’acte secret qui exprime la véritable identité des parties par opposition à l’acte ostensible = ce n’est pas la cas ici.
Conditions de modifications :
o Sur le fond : la liberté est totale : on peut adjoindre de nouvelles clauses, modifier les clauses…
o Sur la forme : l’acte modificatif doit être passé dans les mêmes formes que le contrat de mariage c’est à dire un acte notarié reçu en la présence de toutes les parties au contrat, avec le consentement de toutes les parties au contrat (parallélisme des formes). Cela découle d’un aspect ancien du contrat de mariage : de son caractère de pacte de famille.
Sur les points modifiés par la contre lettre, c’est cette dernière qui détermine le contrat effectivement applicable.
L’idée de l’article 1396 al 1 est que le contrat de mariage forme un tout et que, si par exemple une donation entraîne une contre lettre, la personne doit être présente lors de la contre lettre.
Conditions d’opposabilité aux tiers :
Les tiers doivent être informés de ces modifications. L’article 1396 al 2 pourvoit à ce besoin :
– La contre lettre doit être rédigée à la suite de l’original du contrat de mariage
– Le notaire doit transcrire la contre lettre sur toutes les copies qu’il délivre du contrat originaire.
– La sanction est l’inopposabilité des modifications aux tiers.
En ce qui concerne la transcription par le notaire sur toutes les copies du contrat originaire, cela dépend du seul notaire et on pourrait penser que ce n’est pas aux parties d’en subir les conséquences, mais le notaire a une responsabilité professionnelle qui peut jouer s’il cause un préjudice aux époux.
Aujourd’hui, il existe une possibilité de modifier les régimes matrimoniaux au cours du mariage.