Le Droit des Contrats dans le Code Civil de 1804

Le Droit des Contrats dans le Code Civil de 1804

Lorsqu’ils ont rédigé le code civil, ses rédacteurs ont eu du contrat une perception fortement influencée par les idées de leur temps, idées qu’on a par la suite synthétisées sous l’appellation « principe de l’autonomie de la volonté »

1- Exposé du principe de l’autonomie de la volonté

Le principe de l’autonomie de la volonté est le principe directeur du Droit des Contrats puisque c’est lui qui explique la raison d’être de l’essentiel des règles posées par les rédacteurs du Code Civil de 1804.

Ce principe repose sur l’idée que l’homme, étant libre de naissance, ne peut s’obliger que par sa propre volonté. C’est en ce sens qu’on parle de volonté autonome: une volonté qui tire d’elle même sa force créatrice d’obligation et non pas d’une autorité supérieur qui lui aurait conféré.

On considère alors que la liberté de l’Homme étant fondamentale, les contraintes imposées par la société à cette liberté doivent être exceptionnelle. En matière contractuelle cela ce traduit par le principe que l’homme est obligé que parce qu’il l’a voulu et dans la mesure où il l’a voulu.

Puisque l’Homme est libre et puisqu’il ne peut pas agir contre ses propres intérêts, les obligations qu’il aura volontairement consenties sont dès lors nécessairement justes. Formule de Fouillée « qui dit contractuel dit juste ».

Les rédacteurs du Code Civil vont s’inspirer des idées héritées du siècle des Lumières.

Le fondement philosophique de ce principe est la philosophie individualiste du 19ème siècle qui prône la liberté et l’égalité des hommes et surtout l’affirmation des libertés individuelles contre l’État.

Le fondement économique c’est la doctrine du libéralisme économique du 18ème qui considérait que permettre aux Hommes d’aménager comme il l’entendait leurs échanges de richesses et de services était le meilleur moyens d’établir entre eux des rapports justes et utiles. On considérant alors que l’État devait laisser faire, laisser passer, car l’addition des intérêts particulier avait nécessairement pour somme l’intérêt général.

Appliquée au contrat, ces idées emportent des conséquences déterminantes et vont aboutir à la mise en place de principes directeurs du droit des contrats.

  • Le premier de ces principes est la liberté contractuelle c’est-à-dire la liberté de chacun de contracter ou non et si on décide de contracter, la possibilité de choisir librement son contractant et de décider librement du contenu du contrat. Cette liberté doit également se refléter dans la forme du contrat, elle implique donc le rejet de tout formalisme car imposer une forme dans laquelle devrait se couler le consentement reviendrait à remettre en cause la souveraineté de la volonté. En découle alors le principe du consensuallisme: la volonté suffit à donner naissance au contrat quelque soit la manière dont cette volonté s’exprime.
  • Le deuxième de ces principes est le principe de la force obligatoire du contrat. Puisque les parties sont libre de contracter, qu’elles le décident librement, si tel est leur volonté, elles doivent respecter leur engagement car elles sont liées par leur volonté. Conséquence : le contrat devient pour elle une loi, il a force obligatoire (ancien article 1134 –> nouvel article 1103)

–> Seul un nouvel accord de volonté entre les parties permet de modifier le contrat ou de le révoquer. Mais la force obligatoire du contrat ne s’impose pas qu’aux parties mais aussi aux tiers qui doivent également respecter le contrat, comme le législateur qui, s’il promulgue une loi nouvelle, ne peut pas en principe la déclarer applicable aux contrats en cours car cela reviendrait à porter atteinte à ce que les parties ont voulu –> à la force obligatoire donc.

Cette dernière s’applique aussi au juge qui ne peut pas modifier le contenu du contrat de sa propre initiative. De la même manière, le juge qu interprète le contrat doit rechercher quelle à été la volonté des parties.

  • Le troisième principe est celui de l’effet relatif du contrat. Puisque le contrat repose sur la volonté et qu’on est obligé parce qu’on l’a voulu, alors le contrat ne peut produire des effets qu’à l’égard des parties car elles seules ont consenti au contrat. C’est le principe de l’effet relatif : le contrat ne peut pas avoir d’effet à l’égard des tiers dans le sens où il ne peut pas engager un tiers ni faire naître un profit à l’égard d’un tiers.

2- Conséquence du principe de l’autonomie de la volonté sur le régime du contrat organisé par le Code Civil.

A l’époque cette expression n’existait pas. Elle a été inventé pour traduire les idées à fondamentale des rédacteurs du Code Civil. Le Code Civil est en effet très influencé par ce principe. Toutefois, dès le départ, ils fixent des limites à l’influence de ce dernier. Certes ils consacrent à la volonté un rôle essentiel (le contrat repose bien sur un échange de consentement et c’est la raison pour laquelle il va s’assurer que la volonté exprimée est bien libre est éclairée avec la théorie des vices du consentement).

La volonté est bien considéré comme l’élément déterminant mais le code civil dès l’origine pose des limites à sa toute puissance.

Ainsi, le Code Civil va consacrer la liberté contractuelle et sa conséquence technique : le consensuallisme.

Mais il apporte tout de suite des aménagements et des limites. Tout d’abord à propos de la liberté contractuelle, le Code Civil précise qu’elle s’exerce dans les limites fixées par le législateur (art 6 du Code Civil):

« on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs »

–> Cela signifie qu’on ne peut pas prévoir librement tout ce que l’on veut par contrat. L’art 6 fixe une interdiction : on ne peut pas prévoir par contrat une mesure qui serait contraire à la Loi.

De même le consensuallisme est le principe posé par le Code Civil mais dès 1804 on prévoit quelques exceptions à ce principe.

De la même manière, le Code Civil consacre le principe de la force obligatoire du contrat, ancien art 1134 devenu l’art 1103. La limite est donnée par l’expression « légalement formé » qui sous-entends que la force obligatoire ne vient pas directement de la volonté mais de la loi qui reconnaît cet effet de l’accord des volontés. Le contrat à force obligatoire parce que le droit objectif attache une telle force au consentement.

Enfin le Code Civil proclame également l’effet relatif à l’art 1200 mais dès le départ il envisage des exceptions comme la stipulation pour autrui.

Le principe d’autonomie de la volonté est bien le principe qui a inspiré les règles relatives aux contrats du Code Civil de 1804. C’est ce principe qui explique les trois principes directeurs que nous avons exposé qui restent aujourd’hui encore les principes directeurs du droit des contrats. Mais avant même la réforme de 2016 ce principe de l’autonomie de la volonté et les principes qui en découlent ont du être aménagé pour s’adapter à l’évolution de la société. On a assisté à un déclin relatif du principe de l’autonomie de la volonté qui va perdre de sa puissance.