Corruption et trafic d’influence en droit marocain

CORRUPTION ET TRAFIC D’INFLUENCE EN DROIT PÉNAL MAROCAIN

Le Maroc a mis en place plusieurs mécanismes pour lutter contre la corruption et le trafic d’influence. La « petite corruption » est devenue un sujet de préoccupation majeur pour la population, qui a réussi à mobiliser les pouvoirs publics pour lutter contre le racket policier et la corruption en général [1]. En 2017, une instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC) a été créée pour moraliser la vie publique et lutter contre la corruption, le trafic d’influence, le détournement de fonds et la concussion [2]. En juin 2020, un projet de loi relatif à cette instance a été adopté par le gouvernement et a été soumis au parlement marocain [3]. En somme, le droit marocain prévoit des mécanismes pour lutter contre la corruption et le trafic d’influence, qui sont considérés comme des infractions pénales graves.

I – CORRUPTION EN DROIT MAROCAIN :

Réforme du code pénal en matière de corruption Le Maroc a mis en œuvre une réforme du code pénal pour renforcer les sanctions contre la corruption [4]. Cette réforme prévoit notamment l’augmentation des peines de prison et des amendes pour les auteurs de crimes de corruption. Il est également prévu de renforcer les mécanismes de prévention de la corruption, tels que la transparence et la responsabilité des fonctionnaires publics.

Définition de la corruption en droit marocain :

L’article 248 du Code Pénal Marocain définit la corruption comme étant le fait par toute personne de solliciter ou agréer des offres ou promesses, sollicite ou reçoit des dons, présents ou autres avantages pour accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction. ( ne pas convoquer, ne pas arrêter, ne pas donner un certificat ).

La corruption consiste donc à rémunérer une personne pour qu’elle accomplisse ou n’accomplisse pas un acte qui révèle de sa fonction.

L’infraction suppose une collusion entre deux personnes, l’une, le corrupteur, offre ou accepte de rémunérer l’autre personne (corruption positive)(art 251). Et le corrompu, qui, en échange, promet d’accomplir ou de ne pas accomplir un acte de sa fonction (corruption passive)

La détermination du coupable :

La corruption vise toute personne dépositaire de l’autorité publique, chargé d’une mission de service publique ou investie d’un mandat électif, d’un magistrat, fonctionnaire public[4] art 248 al 1

Ensuite l’alinéa 2 vise l’arbitre, l’expert nommé soit part l’autorité administrative ou judiciaire ;

L’alinéa 3 vise les magistrats, assereur-juré ou membre d’une juridiction ; se décident soit en faveur soit au préjudice d’une partie

Et enfin l’alinéa 4 vise les membres d’une profession médicale ou de santé : médecin, chirurgien, dentiste, sage femme, qui certifient faussement ou dissimulent l’existence de maladies ou d’infirmités ou un état de grossesse ou donne de fausses indications sur l’origine de la maladie ou l’infirmité ou la cause du décès.

Quant à l’article 249 il sanctionne les commis, salariés et préposé.

Et enfin l’article 251 il vise le corrupteur qui offre ou accepte de rémunérer l’autre personne.

Seules personnes visées par les articles 248 et 249 sont passibles de sanctions pour corruption

L’élément matériel est constitué par les actes suivants :

  • Sollicitation
  • L’acceptation
  • La réception

Le contenu de la contrepartie ou avantage: l’article 248 parle d’offres ou promesses, des dons ou présents, ou autres avantages

Autrement dit, le législateur réprime tout avantage perçu et ce quelqu’en soit la nature.

La répression :

La peine prévue pour la corruption est édictée par les articles 248, 249 et 251 du Code Pénal Marocain, il s’agit :

  • de l’emprisonnement de 2 ans à 5 ans et d’une amende de 2000 à 50.000 dhs.
  • Emprisonnement de 1 an à 3 ans d’une amende de 5000 à 50 .000 dhs pour les employés et salariés ou rémunéré sous une forme quelconque (art 249)
  • lorsque la somme est supérieure à 100.000 dhs, la peine est de 5 à 10 ans d’emprisonnement et 5000 à 100.000 dhs d’amende.
  • Lorsque la corruption d’un magistrat, d’un assesseur juré ou d’un membre d’une juridiction a pour effet de faire prononcer une peine criminelle contre un accusé, cette peine est applicable au coupable de la corruption (art 253).
  • Dans le cas ou la corruption a pour objet l’accomplissement d’un fait qualifié crime par la loi, la peine réprimant ce crime est applicable au coupable de la corruption.

Peines complémentaires :

L’article 255 dispose qu’il n’est jamais fait restitution au corrupteur des choses qu’il a livrées ou de leur valeur, elles doivent être confisquées et déclarées acquises au trésor par le jugement ( à l’exception du cas prévu à l’article 256-1 le corrupteur qui dénonce aux autorités judiciaires une infraction de corruption. ).

La confiscation s’étend à tout ce qui est obtenu à l’aide de la corruption quelque soit la personne qui le détient ou qui en a profité.

Excuse absolutoire :

L’article 256 fait bénéficier le corrupteur d’une excuse absolutoire, qui dénonce aux autorités judiciaires une infraction de corruption.

II – TRAFIC D’INFLUENCE EN DROIT MAROCAIN :

Le trafic d’influence est un crime qui consiste à utiliser son influence ou son pouvoir pour obtenir un avantage ou une faveur en échange d’une récompense. En droit pénal marocain, ce crime est réprimé par le Code pénal qui consacre un certain nombre d’articles à ce sujet.

 

Définition du trafic d’influence en droit marocain :

Le trafic d’influence est défini à l’article 253 du Code pénal marocain comme le fait pour toute personne de solliciter, d’accepter ou de recevoir un don, une promesse, un avantage ou tout autre objet de valeur en échange d’une intervention pour faire obtenir une décision ou une mesure administrative, judiciaire ou législative.

Le trafic d’influence présente bien des points communs avec la corruption. Il suppose également une collusion entre deux personnes qui agissent de concert, celle qui offre ou accepte d’abuser de son influence (trafic d’influence passif) et celle qui offre ou accepte de rémunérer cette influence par des dons, présents ou tout autres avantages (trafic d’influence actif). Dès lors, la conclusion d’un pacte, la détermination des personnes visées et les moyens utilisés sont précisés en termes identiques par les textes d’incrimination ( 250 et ss Code Pénal Marocain).

Répression du trafic d’influence en droit marocain :

-Le trafic d’influence est puni de 2 à 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 5000 à 100.000 dhs

-Les peines sont portées au double si le coupable est :

Un magistrat, fonctionnaire public ou investi d’un mandat éléctif.

– Dans le cas ou le trafic d’influence a pour objet l’accomplissement d’un fait qualifié crime par la loi, la peine réprimande ce crime est applicable au coupable de la corruption. (art 252)

 

La confiscation s’étend à tout ce qui est obtenu à l’aide de trafic d’influence quelque soit la personne qui le détient ou qui en a profité. (art 255).

En outre, l’article 253 ter prévoit une peine de trois à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 50 000 à 100 000 dirhams pour toute personne qui offre, promet ou donne un don ou un avantage pour obtenir une décision ou une mesure administrative, judiciaire ou législative.