Cours d’économie (microéconomie et macroéconomie)

Cours de Micro-économie et Macro-économie

  L’économie est l’ensemble des activités d’une collectivité humaine relatives à la production, à la distribution et à la consommation des richesses. « L’économie politique se propose d’enrichir à la fois le peuple et le souverain. » Adam Smith (1723-1790), Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776).
« L’économie politique enseigne comment se forment, se distribuent et se consomment les richesses qui satisfont aux besoins des sociétés. » Jean-Baptiste Say (1767-1832), Traité d’économie politique (
1803).
« La science économique est la science de l’administration des ressources rares. » Raymond Barre (né en 1924), Économie politique (
1997).

Le cours d’économie qui suit n’est pas récent, si vous avez des cours récent merci de les transmettre par email.   Vous trouverez ci-dessous une liste de pdf de cours d’économie :

                        INTRODUCTION GENERALE 

Le terme « économie » est dérivé d’un terme grec qui signifie « celui qui tient la maison ». Cette origine peut sembler étrange de prime abord. Mais en fait ménage et économie ont beaucoup en commun.

Un ménage doit faire face à de nombreuses décisions. Il doit décider quels membres de la maisonnée seront affectés à telle ou telle tâche et ce que chacun retirera de son travail : qui prépare les dîners ?. Qui aura le dernier dessert ce soir ?. Qui décidera du programme télé de la soirée ?. Bref, la maisonnée doit allouer ses rares ressources entre ses membres, en tenant compte des capacités de chacun, de ses efforts et de ses désirs.

Comme un ménage, une société est confrontée à de nombreuses décisions. Elle doit décider quels travaux seront réalisés et qui les entreprendra. Certains devront produire de la nourriture, d’autres des vêtements, et d’autres encore développeront des logiciels informatiques. Après avoir affecté certaines personnes (de même que certains autres facteurs comme la terre, les bâtiments ou les machines) à certains travaux, la société doit aussi allouer les biens et services produits. Elle doit décider qui dégustera du caviar et qui devra se contenter de pommes de terre. Elle doit décider qui conduira une Porsche et qui prendra le bus.

La gestion des ressources dans une société est importante car ces ressources sont rares. La rareté signifie que la société ne peut satisfaire les besoins de tout le monde. De même qu’un chef de famille ne peut donner tout ce qui ferait plaisir à chacun des membres de la famille, la société ne peut garantir à tout individu le niveau de vie auquel chacun aspire.

L’économie, c’est l’étude de la manière dont la société gère ses ressources rares (ROBBINS). Dans la plupart des sociétés, les ressources sont allouées, non pas par un organisme central de planification, mais par les actions combinées de millions de ménages et d’entreprises. Les économistes sont donc amenés à étudier comment les individus prennent leurs décisions : combien de temps ils travaillent, ce qu’ils achètent, combien ils épargnent et comment ils investissent cette épargne. Les économistes s’intéressent aussi aux échanges entre les individus. Ils étudient par exemple comment la multitude d’acheteurs et de vendeurs d’un bien donné déterminera le prix auquel le produit sera vendu, ainsi que la quantité vendue. Enfin, les économistes examinent les forces et les tendances qui affectent l’économie tout entière et donc chacun en particulier, comme la croissance du revenu moyen, la part de population qui ne peut trouver du travail et le taux de progression des prix.

On parle souvent de l’analyse économique beaucoup plus de l’économie générale, de nombreux ouvrages de 1er cycle en font référence de manière distincte. L’analyse économique est intéressante dans la mesure où elle se subdivise en trois grandes catégories : la microéconomie, la mésoéconomie et la macroéconomie.

– la microéconomie ; 

L’analyse économique est microéconomique quand le fonctionnement de l’économie est vu avant tout au travers des comportements et des calculs individuels (c’est le règne de l’homoeconomicus, c’est-à-dire, un être rationnelle qui dispose d’une information parfaite et prend nécessairement les bonnes décisions). On examine la consommation des ménages à travers un consommateur « standard», de la même façon que l’on analyse le comportement des entreprises à travers celle d’une entreprise « standard ». L’analyse du comportement global est obtenue à partir de l’agrégation, c’est-à-dire de la somme des comportements individuels.

– la macroéconomie ; 

L’analyse est macroéconomique quand le fonctionnement de l’économie est appréhendé directement dans sa globalité ; en postulant d’ailleurs que le comportement global d’une économie nationale ne se réduit pas à la somme des comportements individuels de ses agents ( ce principe du nobridge , qui pose ainsi l’impossibilité d’établir un pont entre micro et macro, est actuellement contesté par les développements relatifs aux « fondements microéconomiques de la macroéconomie »).

– la mésoéconomie ; 

L’analyse est mésoéconomique ( on parle alors de mésoéconomie) quand on mène l’analyse, spécialement celle des structures productives, à un niveau intermédiaire entre celui de l’entreprise (micro) et celui de la nation (macro), c’est-à-dire à celui du secteur, ou de la branche ou encore de la filière.

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1 ERE PARTIE : LES CONCEPTS DE BASE DE L’ECONOMIE

Dans cette première partie, nous nous attacherons essentiellement à dégager les grands concepts de base destinés aux étudiants à mieux comprendre le fonctionnement de l’économie. Dans un premier chapitre, nous présenterons dans les grandes lignes, le fonctionnement d’une économie moderne en même temps que les grandes notions relatives à la comptabilité nationale. Dans un deuxième chapitre, nous étudierons la construction des courbes d’offre et de demande en même temps que celui de la formation des prix. Le chapitre 3 sera consacré entièrement à la consommation et l’étude des élasticités et des courbes d’ENGEL. Le chapitre 4 étudiera plus spécifiquement l’activité de production et la notion de productivité, pour finir le chapitre 5 s’attachera à mettre en évidence les différentes structures de marché.

 

CHAPITRE 1 : LA PRESENTATION DU CIRCUIT ECONOMIQUE ET DES BASES DE LA COMPTABILITE NATIONALE FRANCAISE.

La comptabilité nationale a pour objet de fournir une représentation quantifiée de l’économie nationale et de présenter l’ensemble des phénomènes économiques dans un cadre comptable cohérent . La période de référence est l’année . Un tel découpage présente plusieurs difficultés . Il ne peut en effet parfaitement respecter le déroulement de la vie économique puisque de nombreuses activités débordent la période annuelle . Tel est plus spécialement le cas des opérations relatives à l’investissement .

L’économie nationale est définie comme l’ensemble des unités résidentes ayant un centre d’intérêt sur le territoire économique pendant un an au moins . On dit qu’une unité économique est résidente lorsqu’elle est rattachée de façon durable à l’économie française .

Depuis mai 1976 , les comptes nationaux français sont publiés selon les cadres du système élargi de comptabilité nationale  : le SECN .

Le SECN est composé d’un « cadre central » qui constitue le coeur de la comptabilité nationale , de « systèmes intermédiaires » qui présentent dans un langage macroéconomique la comptabilité de certains agents économiques , et de « comptes satellites » qui sont destinés à éclairer l’économie de certains domaines particuliers : santé , éducation , etc.

La mise en place du système élargi de comptabilité nationale répond au souci d’étendre les possibilités d’utilisation des comptes nationaux. Elle facilite en outre les comparaisons internationales puisque le cadre central du SECN est l’adaptation française du Système européen de comptabilité défini en 1995, lui-même conforme aux recommandations du Système de comptabilité nationale de l’ONU mis en œuvre en 1993. 

Nous présenterons dans une première section, le circuit économique, dans une deuxième section, les différents « secteurs institutionnels » qui regroupent les agents économiques de base dénommés « unités institutionnelles ». Dans une troisième section et dernière section, nous nous attacherons à l’étude de quelques grands agrégats.

 

Section 1 : Le schéma simplifié de l’économie nationale : le circuit économique.

La schématisation de l’activité économique à l’aide d’un circuit se fait en trois étapes par ordre de difficulté croissante.

 

§ 1.1) Une économie à deux agents. 

Les agents considérés sont les entreprises et les ménages. Deux hypothèses sont successivement traitées. Dans la première les ménages consomment tout leur revenu. Dans la seconde ils constituent une épargne.

 

A )Les ménages consomment tout leur revenu. 

Considérons une économie dans laquelle les ménages consomment tout ce qu’ils gagnent et les entreprises versent sous forme de revenus la totalité de la valeur de leur production.

Dans le cas présent, on va considérer que les entreprises produisent et vendent des biens et des services (pain, voyages touristiques…) pour un montant de 1000 euros. 

Cette production représente un flux réel de biens et services.

Les ménages achètent ces biens et services grâce aux revenus de 1000 euros versés par les entreprises. Ces achats sont appelés dépenses de consommations ou demande de consommation ; ils constituent un flux monétaire.

Pour produire des biens de consommation d’une valeur de 1000, les entreprises ont besoin de facteurs de production (le travail seulement dans cet exemple). Les ménages vendent leur force de travail en contrepartie d’un revenu de 1000 qui leur permet de consommer pour le même montant. La vente de la force de travail est un flux réel ; le revenu perçu est un flux monétaire.

Compte tenu des hypothèses retenues (les ménages consomment tout leur revenu ; les entreprises versent sous forme de salaires la totalité de la valeur de production) on a les égalités suivantes :

Revenu = Y = Valeur du travail fourni,

                    = Production de biens et services,

                    = Dépenses de consommation : C.

 

On peut donc écrire :

                 Y = C

Production = Consommation

Revenu = Consommation

 

Et par déduction logique :

Production = Revenu.

 

Le circuit des échanges peut donc être appréhendé sous deux optiques différentes : celle de la production et celle du revenu.

          L’optique de la production ou du produit ne prend en considération que les flux réels.

Production (offre de biens et services) = Valeur des facteurs (offre des facteurs).

          L’optique du revenu ne prend en considération que les flux monétaires.

Revenu = Dépenses de consommation

 

La consommation, telle qu’elle vient d’être présentée est une consommation finale : elle concerne des biens et des services vendus sur un marché, mais qui ne font pas l’objet d’une revente. Il existe une autre notion que l’on appelle, la consommation intermédiaire qui représente un bien qui va être utilisé pour un autre bien.

 B) L’épargne et l’investissement. 

 Supposons maintenant que les ménages ne dépensent pas tout leur revenu. Par définition, en économie, ce qui n’est pas consommé constitue l’épargne :

Epargne = Non consommation.

 

Que font les ménages de cette épargne ?.

          Ils peuvent acheter des actions ou des obligations émises par les entreprises. Ces dernières utilisent cette épargne pour acheter des biens d’investissement (terrains, machines, équipements,…).

          Les ménages peuvent placer cette non-consommation dans des institutions financières. Elle est ensuite prêtée aux entreprises qui en ont besoin pour investir.

On peut s’appuyer sur un exemple chiffré :

          Le revenu des ménages se décompose en deux emplois : 750 en consommation, 250 en épargne ;

          L’épargne investie directement (actions, obligations) ou indirectement (institutions financières) sert aux entreprises à acheter des biens d’investissement pour un montant de 250.

 De même que les dépenses de consommation constituaient une demande de la part des ménages, l’investissement constitue une demande de la part des entreprises. Les biens d’investissement sont des biens « finals » car ils sont achetés sur un marché, mais ne sont pas revendus.

Qu’est ce que l’investissement ?.

En économie, les investissements sont des biens achetés par les entreprises pour produire d’autres biens (notamment les biens de consommation). Ils viennent grossir régulièrement le stock de capital des firmes.

Il est traditionnel de distinguer deux catégories d’investissement :

          l’investissement en capital fixe : achats de bâtiments et machines par exemple ;

          la formation de stocks (variation de stocks) : ce sont des produits utilisés ou non vendus à la fin d’une période donnée (matières premières, biens de consommation…) : ils sont considérés comme un investissement car les entreprises, du fait des stocks, ont de l’argent immobilisé (« investi ») au même titre que celui qui l’est en machines ou en bureaux.

 

En reprenant les deux optiques du circuit des échanges, nous pouvons écrire :

                                Production                =  Y                  =       Revenu

                                       ¯                                                               ¯ 

Demande de biens de consommation : C =  Y                  =  Achat de biens de =C

                                                                                                Consommation

Demande de biens d’investissement :   I =   Y                  =  Epargne :                S

 

Ce qui peut s’écrire sous forme d’équations : C + I = Y = C+ S

En reprenant les valeurs chiffrées nous avons :

 

750 + 250 = 1000 = 750 + 250 .

 

Cette égalité signifie que :

– la production de biens de consommation et d’investissement est égale à la vente et à la demande de ces deux catégories de biens ;

– la valeur de la production est égale aux revenus distribués pour assurer la rémunération des facteurs ;

          les revenus sont employés à l’achat de biens de consommation et à la constitution de l’épargne (non-consommation).

 

Cette égalité peut être reformulée pour faire apparaître la relation entre l’épargne et l’investissement. En soustrayant C de chaque membre de l’égalité, nous obtenons :

I = Y – C = S.      

C’est-à-dire  I = S.

 

L’égalité de l’épargne et de l’investissement découle des définitions précédentes :

Production – Consommation = Investissement.

Production = Revenu

Revenu – Consommation = Epargne.

 Cette égalité signifie que les investissements sont financés par la constitution d’une épargne générée par les entreprises ou les ménages. L’épargne des entreprises est directement  utilisée pour l’autofinancement  des investissements. Celle des ménages doit être empruntée pour assurer le financement des investissements en l’absence d’autofinancement, hypothèse retenue dans notre circuit simplifié.

 

§ 1.2) Une économie à trois agents 

 L’Etat est le troisième acteur introduit dans le circuit économique. L’Etat (les administrations publiques, d’une manière plus générale) modifie le circuit et les activités économiques.

– L’Etat prélève des impôts et taxes uniquement sur les ménages dans l’exemple retenu : T = 150.

– L’Etat effectue deux types de dépenses :

          des achats de biens et services aux entreprises (fournitures de bureau, avions, automobiles, etc.) ; ces achats, que nous appelons dépenses publiques ou demande publique, génèrent une activité de production et sont à l’origine d’une distribution de revenus : G = 100 ;

          des paiements de transferts aux ménages (indemnités de chômage, allocations familiales, etc.) sans la production en contrepartie de biens et services : F = 50.

Au total, l’Etat modifie la situation des ménages pour un montant net de – 150 +50 = – 100. En supposant que seule la consommation est affectée, cette dernière passe à 650.

 

Les deux optiques du circuit des échanges sont désormais :

                   Production                        =     Y          =        Revenu

Demande de consommation   : C               =              Achat de consommation : C      + Demande d’investissement :   I        =     Y          =  +  Epargne                     :  S  + Demande publique              :  G               =            + Impôts : T – Transferts : F   On obtient donc au niveau de l’équation C+ I + G  =  Y  = C + S + T – F

En reprenant les valeurs chiffrées nous avons :

650 + 250 + 100 = 1000 = 650 + 250 + 150  – 50.

L’intégration de l’Etat modifie les égalités du circuit des échanges. La production se décompose maintenant en trois emplois ou trois types de demande finale :

Y = C + I + G.                                                                                              

Le revenu, issu de la production et des transferts, est employé pour les achats de consommation, le paiement des impôts et la constitution de l’épargne :

Y + F = C + T + S.

Cette relation peut s’écrire :

Y = C + S + T – F.

 § 1.3) Une économie ouverte sur l’extérieur. 

 Dans le cadre de l’économie simplifiée qui sert de base au raisonnement, ne sont prises en considération que les exportations et les importations c’est-à-dire les échanges de biens et de services entre la nation et l’ensemble des autres pays.

– Les exportations (X) sont des biens et services produits sur le territoire nationale et envoyés à l’extérieur. Elles créent des revenus dans l’économie nationale, mais ne font pas partie des dépenses de consommation ou d’investissement intérieures. Elles constituent la demande étrangère. Les exportations sont un emploi de la production nationale.

– Les importations (M) sont des biens et services qui viennent grossir la production nationale mais qui ne créent pas de revenu  dans l’économie nationale.                                                                                 

L’introduction des relations commerciales avec le reste du monde modifie le circuit des échanges :                                                                                               

Y + M =   C + I + G + X

Production totale    = Demande finale totale

Offre totale            =  Demande globale                                                                        

 Si le revenu créé par les exportations est supérieur à celui dépensé en importations, l’effet net ( X-M) constitue un accroissement de la production et du revenu intérieurs. Les exportations nettes ( X-M) sont alors une composante de la demande finale :

Y = C + I + G + ( X-M).

Cette conceptualisation d’un circuit économique, pour nécessaire qu’elle soit, ne saurait satisfaire ceux qui sont chargés d’orienter la politique économique d’une nation. Ces responsables de la politique économique ne peuvent agir que s’ils disposent de concepts opérationnels, c’est-à-dire mesurables.            

Pour illustrer toute cette série d’équations, on peut dresser un schéma montrant avec précision le circuit économique.

 Section 2 : Les différents secteurs institutionnels : 

 Les centres élémentaires de décision économique ou unités institutionnels opérant dans le cadre de l’économie française sont regroupés en secteurs institutionnels . Ces derniers traduisent le plus haut niveau d’agrégation des fonctions exercées par les individus ou groupes d’individus . L’homogénéité des fonctions exercées par chacun de ces secteurs masque en fait une grande diversité dans les activités des différents agents .

La comptabilité nationale retient cinq secteurs institutionnels résidents , les opérations entre les résidents et les non résidents apparaissent dans le compte « reste du monde » . Les cinq secteurs sont :

– les sociétés ;

– les institutions financières ;

– les administrations publiques ;

– les ménages ;

– les institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBL)

Section 3 ) La mesure de l’activité économique nationale . 

 Depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale , les grandes nations industrielles ont élaboré avec la comptabilité nationale une technique de représentation et de mesure des activités de production et d’échange .

Les notions de production et de revenu sont traduites dans la comptabilité nationale française par différents agrégats .

Définition   Les agrégats sont des grandeurs synthétiques qui mesurent le résultat de l’activité de l’ensemble de l’économie .

 § 3.1 ) Les principaux agrégats : 

 Toutes les grandeurs dans la deuxième partie de ce chapitre sont des agrégats . En France , les principaux d’entre eux sont le produit intérieur , le revenu national , la consommation , la formation brute de capital fixe et l’épargne .

 – Le produit intérieur mesure la production , c’est-à-dire l’activité économique socialement organisée consistant à créer des biens et des services .

– Le revenu national mesure l’ensemble des revenus perçus par les acteurs économiques . Nous verrons , conformément aux deux optiques du circuit des échanges , qu’il est égal au produit intérieur .

– La consommation ( ou consommation finale ) représente la valeur des biens et des services utilisés pour la satisfaction directe des besoins humains , individuels ou collectifs .

– La formation brute de capital fixe représente la valeur des biens durables acquis par les producteurs pour être utilisés pendant au moins un an dans leur processus de production . Cet agrégat correspond à l’investissement .

– L’épargne est la part des ressources ( revenus ) courantes qui reste disponible pour accumuler des actifs physiques ou financiers .

– Les dépenses publiques ne sont pas mesurées en tant qu’agrégat distinct . Elles sont évaluées à partir des comptes des administrations publiques fournis par la comptabilité nationale .

 

§ 3.2 ) Le produit intérieur brut : 

 Le produit intérieur brut ( PIB ) est une mesure de la production nationale , c’est-à-dire de l’ensemble des biens et services produits au cours d’une période donnée ( en général l’année ) .

Le PIB se rattache étroitement à la notion de valeur ajoutée . Il présente deux composantes : une marchande et une non marchande . Il peut être évalué à prix courants ou à prix constants .

PIB + Importations = Consommation finale +           FBCF + Variations des stocks + Exportations 

La relation traduit l’égalité des ressources et des emplois de biens et services .

Les comptables nationaux français définissent le PIB avec davantage de précisions . Ils ajoutent à la somme des valeurs ajoutées le montant de la TVA grevant les produits et le total des droits de douane .

Produit intérieur brut = Valeur ajoutée brute des différents agents + TVA grevant les produits + Droits de douane sur les produits importés .

Enfin, si l’on raisonne dans l’optique du revenu , le PIB est égal à la somme des rémunérations des salariés , des excédents bruts d’exploitation et des impôts à la production et à l’importation versés aux administrations diminués des subventions d’exploitation versées par les administrations publiques .

 

A ) L’évaluation des agrégats à prix courants et à prix constants : 

 Un agrégat, tel le PIB, est évalué aux prix de marché . Cette évaluation peut se faire à prix courants ou à prix constants.

L’évaluation à prix courants : le PIB en valeur ou le PIB nominal

Le PIB d’une année donnée est évaluée aux prix de la même année. Le PIB 2006 en euros courants est égal à la quantité de biens et services produits en 2006 multipliée par leur prix en 2006.

PIB nominal = Q06. P06

L’évaluation à prix constants : le PIB réel

Cette évaluation élimine la hausse des prix ( inflation ) entre deux périodes et mesure « l’enrichissement » effectif ou réel de la nation . La méthode consiste à mesurer le PIB d’une année au prix d’une année de référence ( année précédente, 5 ans , 10 ans avant … ) .

On peut par exemple, évaluer le PIB au prix de 2000 .

PIB réel 06 prix 00 = Q06 . P00

 

De ces deux évaluations se déduisent deux indices : l’indice de prix du PIB et l’indice de volume du PIB.

L’indice de prix du PIB : le prix implicite du PIB ou le déflateur du PIB

 

Le prix implicite du PIB est égal au rapport du PIB en valeur de l’année t au PIB réel de l’année t évalué aux prix de l’année t – 1 .

PIB en valeur 2006 / PIB réel 2006 aux prix de 00

 

Indice de prix = Q06. P06 / Q06.P00

 

L’indice de volume du PIB

Cet indice dégage les seules augmentations des quantités (volume) produites. Il est égal au rapport du PIB réel de l’année t évalué aux prix de l’année t – 1, au PIB en valeur de l’année t -1 .

PIB réel 06 aux prix 00 / PIB en valeur 2000,

 

Indice de volume = Q06. P00 / Q00. P00

 

§ 3.3 ) Le revenu national : 

 Deux agrégats portent le nom du revenu national. Ils correspondent à deux optiques différentes.

La première est celle du revenu, ou contrepartie , de la production , c’est à dire de la valeur ajoutée ; elle débouche sur le revenu national ( aux prix du marché). La seconde optique envisage le revenu sous l’angle de ses emplois : la consommation et l’épargne ; elle est traduite par le revenu national brut disponible.

 A ) Le revenu national dans l’optique du revenu. 

 Le revenu national est la somme de revenus primaires, c’est à dire ceux qui sont la contrepartie d’une activité productive . Il s’agit des rémunérations des salariés, des excédents d’exploitation, des revenus de la propriété reçus du reste du monde (nets de ces mêmes revenus versés au reste du monde ) , et des impôts liés à la production versés aux administrations ( nets des subventions d’exploitation reçues des administrations ) .

 B ) Le revenu national brut disponible  

 Le revenu national disponible est la part du revenu national (aux prix du marché) qui est disponible pour la consommation finale et l’épargne . Il s’obtient par la prise en compte d’un ensemble de transferts correspondant à une redistribution : impôts sur le revenu, cotisations et prestations sociales .

Le revenu national disponible est égal à la somme de la consommation finale et de l’épargne nationale. En économie fermée, le revenu disponible serait égal au PIB puisque ce dernier s’écrirait : Y = C + S. En économie ouverte, le revenu national disponible est égal au PIB augmenté des revenus reçus du reste du monde, et diminué des revenus versés au reste du monde .

 

§ 3.4 ) Le produit national brut  

 Le PNB, agrégat employé dans certains pays et par certaines organisations internationales aux fins de comparaison entre pays, diffère du PIB par la prise en compte des revenus du reste du monde.

PNB = PIB + Revenus du travail , de la propriété et de l’entreprise reçus du reste du monde nets des revenus de même nature versés au reste du monde

Statistiquement , la différence entre le PIB et le PNB est très petite ( moins de 1 % ) , si bien qu’en analyse économique , parler du produit ( ou de la production ) Y , s’applique indifféremment au PIB ou au  PNB .

CHAPITRE 2 : INTRODUCTION A LA MICROECONOMIE : FONCTION DE DEMANDE, FONCTION D’OFFRE, LE MECANISME DES PRIX

 

Quand une vague de froid s’abat sur le vignoble bordelais, le prix du jus d’une bouteille de vin grimpe dans tous les supermarchés. Quand les plages bretonnes sont polluées à cause du naufrage de l’ERIKA, le prix des chambres d’hôtel diminue à LA BAULE et augmente à NICE. Quand l’Arabie Saoudite décide d’augmenter sa production quotidienne de barils de pétrole, le prix de celui-ci diminue. Qu’y a-t-il de commun entre tous ces événements ? Ils reflètent tous le jeu l’offre et de la demande.

«Offre » et «  demande »  sont les deux mots les plus usités du vocabulaire économique, et à juste titre. Offre et demande sont en effet les forces qui font tourner une économie de marché. Elles déterminent la quantité de chaque bien produite ainsi que le prix de vente. Si vous vous demandez comment un événement ou une politique peuvent affecter l’économie, vous devez d’abord vous demander quel en sera l’impact sur l’offre et la demande.

Ce chapitre se décomposera en trois sections, dans une première section, nous étudierons la demande, dans une deuxième section, nous étudierons l’offre et enfin dans une troisième partie, nous étudierons la rencontre entre l’offre et la demande, c’est-à-dire la formation du prix de marché.

 

Section 1 ) La demande. 

 Nous commencerons notre étude par l’analyse du comportement des acheteurs. Nous analyserons ce qui détermine la quantité demandée d’un bien, c’est-à-dire la quantité que les acheteurs sont prêts à acheter et capables de payer. Nous reprendrons l’exemple des cornets de glace.

 

§ 1.1) Les déterminants de la demande individuelle. 

 Prenons votre propre demande de glaces. Comment décidez-vous combien de glaces vous achetez chaque mois , et quels sont les facteurs qui influent sur votre décision ?. Voici quelques-unes des réponses que vous pourriez donner.

-Le prix 

Si le prix du cornet passait soudainement à 4 euros, vous en achèteriez moins. Vous passeriez peut-être à l’eskimo. Si au contraire le prix tombait à 0,2O centimes d’euros le cornet, vous en achèteriez plus. Si la quantité demandée diminue quand le prix augmente, et augmente quand le prix baisse, on dit que la quantité demandée évolue en fonction inverse du prix . Cette fonction inverse est valide pour la plupart des produits dans une économie . Elle est même tellement générale que les économistes la qualifient de loi de la demande : toutes choses étant égales par ailleurs, quand le prix d’un bien augmente, la quantité demandée diminue.

-Le revenu 

Qu’adviendra-t-il de votre demande de glaces si vous ne trouvez pas un emploi cet été ?. Elle diminuera très certainement. Si vos revenus baissent, vous aurez moins à dépenser globalement, ce qui veut dire que vous devrez dépenser moins sur certains biens , peut-être même sur tous. Si la demande d’un bien baisse quand le revenu diminue, on parle d’un bien normal.

Tous les biens ne sont pas normaux. Quand la demande d’un bien augmente alors que le revenu diminue, on parle d’un bien inférieur. Quand votre revenu diminue, vous n’achetez pas de voiture et ne prenez plus le taxi, mais vous prenez l’autobus plus souvent.

-Le prix des produits comparables 

Imaginons que le prix des eskimos baisse. D’après la loi de la demande, vous allez acheter plus d’eskimos. Et en même temps, vous achèterez probablement moins de cornets de glaces. Cornets de glace et eskimos satisfont des désirs similaires : ce sont tous les deux des desserts froids, sucrés et crémeux. Quand la baisse du prix d’un bien réduit la demande d’un autre bien, ces deux produits sont appelés substituts. Hot-dogs et hamburgers, tickets de cinéma et location de vidéos sont d’autres exemples de produits substituts.

Maintenant supposons que le prix de la crème chantilly tombe. D’après la loi de la demande, vous allez en acheter plus. Pourtant , dans ce cas, vous allez aussi acheter . Pourtant, dans ce cas, vous allez aussi acheter plus de glaces , parce que la crème chantilly et la glace se marient agréablement. Quand la baisse du prix d’un bien suscite une augmentation de la demande d’un autre bien , ces deux produits sont dits complémentaires. Essence et automobile, ordinateur et logiciel sont d’autres exemples de produits complémentaires.

-Les goûts 

Il s’agit là du déterminant le plus évident de votre demande . Si vous adorez les glaces, vous en consommerez beaucoup. En général, les économistes n’essaient pas d’expliquer les goûts des gens, qui dépendent de forces historiques et psychologiques que l’économie ne saurait appréhender . En revanche , les économistes étudient ce qui se passe quand les goûts changent.

 -Les anticipations 

Vos attentes concernant l’avenir affectent votre demande présente de biens et services . Par exemple, si vous attendez à avoir une augmentation de salaire le mois prochain, vous serez peut-être plus enclin à acheter plus de glaces dès aujourd’hui . Autre exemple, si vous pensez que le prix des glaces va baisser dans quelques jours , vous en achèterez moins au prix du jour. 

 

§ 1.2) Plan de demande et courbe de demande : 

 Nous avons vu qu’il y a plusieurs variables qui déterminent la quantité de glaces demandée par un individu. Supposons un moment que toutes ces variables, à l’exception du prix, demeurent constantes. Et voyons maintenant comment le prix influe sur la quantité demandée.

Le tableau 1 nous indique combien Catherine achète de cornets chaque mois, à différents niveaux de prix. Si les glaces sont gratuites, Catherine avale 12 cornets. A 50 centimes le cornet, Catherine en achète 10. Au fur et à mesure que le prix monte, elle demande de moins en moins de glaces. A 3 euros le cornet, Catherine n’en achète plus du tout. Le tableau 1 constitue un plan de demande qui met en évidence la relation entre le prix du produit et la question demandée.

La figure 1 illustre ce tableau. Par convention, le prix des cornets de glace figure sur l’axe vertical, tandis que la quantité de glaces demandée figure sur l’axe horizontal. La droite à pente négative qui exprime la relation entre prix et quantité demandée est appelée courbe de demande.

                    Tableau 1 : Le plan de demande de Catherine.

Prix des cornets

Quantité demandée

0,0  Euros

            12

0,5  Euros

            10

1,0  Euros

              8

1,5  Euros

              6

2,0  Euros

              4

2,5  Euros

              2

3,0  Euros

              0

 

Cours d'économie (Microéconomie et macroéconomie)

Quand vous voyez une courbe de demande, n’oubliez pas qu’elle a été construite en faisant l’hypothèse que de nombreux facteurs étaient constants. La courbe de demande de Catherine, représentée par la figure 1, montre comment la quantité de glaces demandée évolue quand le prix des glaces, et seulement ce prix, varie. Par hypothèse, le revenu de Catherine, ses goûts alimentaires, ses anticipations et les prix des produits comparables sont supposés invariables.

Les économistes emploient l’expression ceteris paribus  pour signifier que toutes les variables, à l’exception de celles étudiées sur le moment, sont maintenues constantes. Cette locution latine signifie « les autres choses étant égales ». La courbe de demande est inclinée vers le sud-est parce que, ceteris paribus, des prix inférieurs se traduisent par une quantité demandée supérieure.

Bien que l’expression ceteris paribus fasse référence à une situation hypothétique dans laquelle certaines variables sont supposées constantes, dans le monde réel les choses sont plus compliquées et les variables ont tendance à évoluer en même temps. Il est donc très important, dans l’analyse des événements ou des politiques économiques de garder à l’esprit que certaines variables peuvent évoluer tandis que d’autres ont été gelées pour la circonstance.

 

§ 1.3) Demande de marché et demande individuelle :

 Jusqu’ici nous avons considéré la demande individuelle pour un produit donné. Pour comprendre comment fonctionne un marché, il faut calculer la demande de marché, qui est égale à la somme des demandes individuelles pour un bien ou un service particulier.

Le tableau 2 indique les plans de demande de deux individus, Catherine et Nicolas. Pour chaque prix, le plan de Catherine nous apprend combien de glaces il consomme. La demande du marché est égale à la somme de deux demandes individuelles.

Nous allons représenter la demande de Catherine et la demande de Nicolas.

Cours d'économie (Microéconomie et macroéconomie)

La demande du marché découlant des demandes individuelles, la quantité demandée globalement dépend des facteurs qui déterminent les quantités demandées individuellement. La quantité demandée par le marché dépend donc non seulement du prix du produit, mais aussi des revenus des acheteurs de leurs goûts, de leurs anticipations et des prix des produits comparables. En outre, la quantité demandée par le marché varie avec le nombre d’acheteurs ( Si d’autres acheteurs se mettent à vouloir des glaces, la quantité demandée par le marché sera supérieure pour tous les niveaux de prix). Les plans de demande du tableau 2 montrent l’évolution de la demande en fonction du prix , tous les autres facteurs étant supposés constants.

 Tableau 2 : Plan de demande individuels et du marché.

    Prix des cornets
         Catherine

 +      Nicolas

   =   Marché

         0,00 E

             12

             7

           19

         0,50 E

             10

             6

           16

         1,00 E

               8

             5

           13

         1,50 E

               6

             4

           10

         2,00 E

               4

             3

             7

         2,50 E

               2

             2

             4

         3,00 E

               0

             1

             1

On peut représenter la demande du marché dans la figure suivante.

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La figure 2 représente les courbes de demande correspondantes. Remarquez que la courbe de demande du marché est obtenue en additionnant horizontalement les courbes de demande individuelles . Pour trouver la quantité demandée par le marché à un prix donné , il suffit d’additionner les quantités individuelles . Comme nous sommes intéressés par le fonctionnement du marché, nous utiliserons le plus souvent la courbe de demande du marché . La courbe du marché indique l’évolution de la quantité totale demandée en fonction des variations du prix du bien considéré.

 

§ 1.4) Déplacements de la courbe de demande. 

 Imaginons que le Ministère de la Santé annonce une découverte selon laquelle les consommateurs de glace vivent plus longtemps et sont en meilleure santé. Quel effet cette annonce aura-t-elle sur le marché des glaces. A un prix donné , les acheteurs seront maintenant prêts à consommer une quantité supérieure de glaces, et la courbe de demande sera poussée vers la droite.

Cours d'économie (Microéconomie et macroéconomie)

courbe de l'offre et de la demande

 Chaque fois que l’un des déterminants de la demande est modifié, à l’exception du prix, la courbe de demande subit une translation, comme le montre la figure précédente, toute modification qui accroît la demande pour tout niveau de prix déplace la courbe vers la gauche.

On peut énumérer les variables qui déterminent la quantité demandée sur le marché et indique l’effet d’une modification de cette variable sur la courbe de demande. En résumé : La courbe de demande indique l’évolution de la quantité demandée quand le prix varie, tous les autres facteurs étant supposés constants. Quand l’un de ces autres facteurs varie, la courbe de demande subit une translation vers la droite ou la gauche.

Ainsi , on peut dire que le prix modifie le mouvement le long de la courbe, le Revenu, le prix des produits comparables, les goûts, les anticipations et le nombre d’acheteurs.

 

Section 2 : L’offre. 

Tournons-nous  maintenant de l’autre côté et examinons le comportement des vendeurs. La quantité offerte d’un bien ou d’un service se définit comme la quantité que les vendeurs sont prêts à vendre et capables de vendre . Une fois encore , considérons le marché des cornets de glace et voyons quels sont les facteurs qui déterminent la quantité offerte.

 

§ 2.1) Les déterminants de l’offre individuelle. 

Supposons que vous dirigez une entreprise qui produit et vend des cornets de glace . Qu’est-ce qui déterminera la quantité de glace que vous allez produire et mettre en vente ?. Voici quelques réponses possibles.

– Le prix 

Le prix des glaces est l’un des déterminants. Quand le prix des glaces est élevé, cette vente est profitable et la quantité offerte plus grande. En tant que vendeur de glaces, vous travaillez beaucoup, vous achetez de nombreuses machines et employez un personnel nombreux. Au contraire, si le prix des glaces est faible, votre entreprise est peu rentable et vous produisez moins de glaces. Si le prix descend trop bas, vous déciderez même de cesser votre activité, et la quantité offerte sera réduite à zéro.

Comme la quantité offerte augmente quand le prix s’élève et diminue quand la quantité baisse, on dit que la quantité offerte est une fonction croissante du prix. Cette relation entre quantité offerte et prix est appelée loi de l’offre : toutes choses égales par ailleurs, quand le prix d’un bien augmente , la quantité offerte augmente aussi.

– Prix des facteurs de production

Pour fabriquer vos glaces, votre entreprise utilise de nombreux facteurs : de la crème, du sucre , des aromates, des machines, l’immeuble et le terrain sur lequel est située l’usine , le travail des employés qui font tourner les machines . Si le prix de l’un de ces facteurs augmente, la production est moins profitable , et vous offrez moins de glaces sur le marché. Si les coûts de production augmentent trop, vous pouvez décider de fermer l’usine et de ne plus produire de glaces du tout . Ainsi la quantité offerte évolue en fonction inverse du prix des facteurs de production.

– la technologie 

La technologie nécessaire pour transformer en cornets de glace les divers facteurs de production est aussi un déterminant de la quantité offerte. L’apparition des machines à faire les glaces a contribué à réduire énormément le temps de fabrication et le travail nécessaire. En réduisant les coûts de production, le progrès technologique a augmenté la quantité offerte.

– Les anticipations 

La quantité de glaces que vous proposez aujourd’hui dépend certainement de vos attentes pour l’avenir. Par exemple , si vous anticipez une augmentation des prix des glaces dans le futur , vous allez probablement stocker une partie de votre production actuelle et donc réduire l’offre au marché.

 

§ 2.2) Plan d’offre et courbe d’offre. 

Voyons comment la quantité offerte varie avec le prix, en supposant constants les coûts de production, la technologie et les anticipations. Le tableau 4 indique les quantités offertes par Ben, vendeur de glaces, en fonction du prix. A moins d’un franc , Ben ne fournit aucune glace . Au fur et à mesure que le prix monte , Ben accroît la quantité offerte . Ce tableau est appelé un plan d’offre.

La figure suivante illustre la relation existant entre la quantité de glaces offerte et leur prix . La courbe qui relie ces deux données est appelée la courbe d’offre.

Cette courbe est inclinée vers le Nord-Ouest car, ceteris paribus , un prix plus élevé signifie une plus grande quantité offerte.

Nous allons voir maintenant dans le cas présent , le plan d’offre et la figure qui représente le phénomène.

Plan d’offre de Ben. 

Prix des cornets
Quantité offerte

0,00 E

           0

0,50 E

           0

1,00 E

           1

1,50 E

           2

2,00 E

           3

2,50 E

           4

3,00 E

           5

 

§ 2.3 ) La courbe d’offre individuelle.

 

Cours d'économie  sur l'offre

De même que la demande du marché est égale à la somme des demandes individuelles, l’offre du  marché est égale à la somme des offres individuelles. Le tableau 5 nous indique les offres individuelles de deux producteurs, Ben et Jerry. Pour chaque prix, le plan d’offre de Ben nous indique la quantité offerte par Ben, tandis que celui de Jerry nous indique la quantité offerte par Jerry. L’offre du marché est tout simplement la somme de ces deux offres individuelles.

La quantité offerte par le marché dépend des mêmes facteurs que ceux déterminant les quantités offertes par les vendeurs individuels : prix du bien, coût des facteurs de production, technologie et anticipations. En outre, la quantité offerte par le marché dépend du nombre de vendeurs (Si Ben et Jerry décident de se retirer de cette activité, la quantité offerte par le marché diminuera ). Les plans d’offre du tableau 5 montrent l’évolution de la quantité offerte en fonction des prix, les autres variables étant supposées constantes. La figure suivante montre les courbes d’offre correspondant à ces plans d’offre. Comme pour les courbes de demande, nous avons additionné les courbes d’offre individuelles horizontalement pour obtenir la courbe d’offre du marché . Pour déterminer la quantité totale offerte à un prix donné, nous avons additionné les quantités trouvées sur l’axe horizontal des courbes d’offre individuelles . La courbe d’offre du marché indique comment la quantité totale offerte varie en fonction du prix du bien offert.

 

Cours d'économie (Microéconomie et macroéconomie)

§ 2.4) Déplacements de la courbe d’offre. 

Imaginons que le prix du sucre tombe. Quel effet cela aura-t-il sur l’offre de glaces ?. Comme le sucre entre dans la composition des glaces, une baisse du prix du sucre rend la fabrication de glaces plus rentable qu’auparavant. Ce qui se traduit par un accroissement de l’offre de glaces : à quelque niveau de prix que ce soit, les vendeurs sont prêts à produire en plus grande quantité. La courbe d’offre de glaces subit donc une translation vers la droite.

Chaque fois que l’un des déterminants de l’offre se trouve modifié, à l’exception du prix, la courbe d’offre se déplace. Comme le montre la figure suivante, tout changement qui accroît l‘offre à tout niveau de prix se traduit par un déplacement vers la droite, et tout changement qui réduit l’offre à tout niveau de prix se traduit par une translation vers la gauche.

 

Cours d'économie (Microéconomie et macroéconomie)

 

Tout événement qui augmente la quantité que les vendeurs sont prêts à offrir à un prix donné pousse la courbe d’offre vers la droite. Tout événement qui réduit la quantité que les vendeurs sont prêts à offrir pousse la courbe d’offre vers la gauche.

La courbe d’offre indique comment la quantité offerte d’un bien varie quand le prix de ce bien est modifié, les autres facteurs étant supposés constants. Quand l’un de ces autres déterminants de l’offre varie, la courbe d’offre subit une translation. Ainsi, on peut dire que lorsque le prix est modifié, il se produit une modification le long de la courbe. Le prix des facteurs, la technologie, les anticipations et le nombre de vendeurs déplacent la courbe d’offre.

 Section 3) La rencontre de l’offre et de la demande. 

Après avoir étudié séparément l’offre et la demande , il est maintenant temps de les combiner pour voir comment elles permettent de fixer la quantité vendue d’un bien ainsi que son prix.

 § 3.1) L’équilibre :

 La figure suivante fait figurer à la fois la courbe d’offre et la courbe de demande. Vous remarquerez qu’il y a un point où ces deux courbes se confondent ; ce point est appelé le point d’équilibre du marché.

Cours d'économie

Le point d’équilibre de l’offre et de la demande se trouve à l’intersection des courbes d’offre et de demande. Au prix d’équilibre, la quantité offerte égale la quantité demandée. Ici, le prix d’équilibre est de 2 euros, puisqu’à ce prix, 7 cornets sont demandés et 7 sont offertes.

Le prix défini par ce point est dénommé prix d’équilibre , tandis que la quantité définie est appelée quantité d’équilibre . Ici , le prix d’équilibre est de 2 francs le cornet et la quantité d’équilibre est de 7 cornets.

Au prix d’équilibre, la quantité de bien que les acheteurs sont prêts à acheter et capables d’acheter est exactement égale à la quantité que les vendeurs sont prêts à vendre et capables de vendre. Le prix d’équilibre est parfois appelé prix de satisfaction du marché, puisque c’est le prix qui satisfait tout le monde : les acheteurs ont acheté ce qu’ils voulaient acheter, et les vendeurs ont vendu ce qu’ils voulaient vendre.

Les actions des acheteurs et des vendeurs amènent naturellement le marché vers son point d’équilibre. Pour comprendre cela, voyons ce qui se passe si le prix de marché est différent du prix d’équilibre.

Supposons pour commencer que le prix soit supérieur au prix d’équilibre, comme sur la planche A de la figure 7. A 2,50 euros le cornet, la quantité offerte ( 10 cornets) est supérieure à la quantité demandée ( 4 cornets). Il y a donc un surplus de production : les vendeurs sont incapables de vendre tout ce qu’ils ont au prix courant. Cette situation est dite d’offre excédentaire ou encore de surproduction. Quand il existe une offre excédentaire sur un marché, les vendeurs auront leurs congélateurs encombrés de glaces invendues. Ils vont donc essayer d’augmenter leurs ventes en baissant le prix des marchandises vendues. Les prix baissent jusqu’au prix d’équilibre.

Supposons maintenant que le prix courant soit inférieur au prix d’équilibre, comme sur la figure 8. A 1,50 euros le cornet, c’est la quantité demandée qui excède l’offre . Il y a alors une pénurie de marchandise : les acheteurs ne peuvent pas acheter tout ce qu’ils veulent au prix courant . On parle alors de demande excédentaire. Quand il existe une demande excédentaire sur un marché, les acheteurs vont devoir faire de longues heures de queue pour obtenir l’une des rares glaces disponibles. Les acheteurs étant trop nombreux au regard des marchandises disponibles, les vendeurs peuvent augmenter leurs prix sans perdre de clients. Au fur et à mesure que les prix montent, le marché tend vers le point d’équilibre. C’est ainsi que les activités de la multitude d’acheteurs et de vendeurs poussent automatiquement le prix du marché vers son point d’équilibre. Une fois ce point atteint, tout le monde est satisfait et le prix ne subit plus aucune pression . La vitesse à laquelle ce point est atteint dépend du marché, et plus particulièrement de la vitesse d’ajustement des prix. Sur la plupart des marchés fonctionnant librement , les surplus ou les pénuries ne sont que temporaires car les prix se déplacent pour assurer l’équilibre de l’offre et la demande. Ce mécanisme d’équilibre est tellement important pour les marchés que l’on parle de la loi de l’offre et de la demande : le prix d’un bien s’ajuste de manière à assurer l’équilibre de l’offre et de la demande.

 

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§ 3.2) Modification de l’équilibre suite à une modification de la demande : 

 Imaginons un été caniculaire. Comment cette chaleur anormale touchera-t-elle le marché des cornets de glace ?. Pour répondre à cette question , suivons les trois étapes évoquées plus haut.

– La forte chaleur affectera la courbe de demande en modifiant le goût des gens . Du fait de la chaleur, les gens veulent consommer plus de glaces à un prix donné. La courbe d’offre est inchangée , car la température n’a aucun effet direct sur l’entreprise qui produit les glaces.

– Dans la mesure où les gens souhaitent manger plus de glaces, la courbe de demande subit une translation vers la droite. Ce déplacement, indiqué sur la figure suivante, montre que la quantité demandée est supérieure, pour tout niveau de prix.

– Comme on le constate sur la figure 10, ce déplacement de la courbe de la demande se traduit par une augmentation du prix d’équilibre  ( de 2 à 2,50 euros) et de la quantité d’équilibre ( de 7 à 10 cornets). En d’autres termes, la chaleur a augmenté le prix des glaces et la quantité vendue.

 Comment une augmentation de la demande modifie l’équilibre du marché. 

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Cours d'économie

Lorsque la chaleur fait monter le prix des glaces , la quantité de glaces fournie par les glaciers augmente aussi, même si la courbe d’offre est restée identique. Dans ce cas, les économistes parlent d’une augmentation de la « quantité fournie », mais pas de l’offre.

Le terme d’ « offre » fait référence à la position de la courbe d’offre, tandis que l’expression « quantité fournie » désigne la quantité que les fournisseurs désirent vendre. Dans notre exemple, l’offre n’a pas changé, car la chaleur n’a aucun effet sur le plan d’offre des glaciers. En revanche, la canicule pousse les acheteurs à consommer plus à tout niveau de prix et donc déplace la courbe de demande. Cet accroissement de la quantité fournie est représenté par un déplacement le long de la courbe d’offre.

Pour résumer , un déplacement de la courbe d’offre est appelée « modification de l’offre », un déplacement de la courbe de demande est appelée « modification de la demande ». Un déplacement le long de la courbe d’offre correspond à une modification de la quantité fournie », et un déplacement le long de la courbe de demande correspond à une « modification de la quantité demandée ».

§ 3.3) Modification de l’équilibre suite à une modification de l’offre : 

Imaginons maintenant qu’au cours d’un autre été, un tremblement de terre détruise plusieurs fabriques de glaces. Comment le marché des glaces sera-t-il touché par cet événement ? . Une fois encore, suivons nos trois étapes.

– Le tremblement de terre modifie la courbe d’offre. En réduisant le nombre de fabricants, le tremblement de terre a modifié la quantité de glaces produites et vendues à tout niveau de prix . La courbe de demande est inchangée, car le tremblement de terre n’a pas d’effet direct sur la consommation de glace des ménages.

– La courbe d’offre est déplacée vers la gauche , puisqu’à chaque niveau de prix la quantité de glaces susceptible d’être vendue a été réduite . La figure 11 illustre cette translation.

– Comme on le constate sur la figure 11, le déplacement de la courbe d’offre se traduit par une augmentation du prix d’équilibre de 2 à 2,50 euros ) et une réduction de la quantité d’équilibre de 7 à 4 cornets. Le tremblement de terre aura eu pour conséquences une augmentation du prix des glaces et une diminution de la quantité de glaces vendues.

                            CHAPITRE 3 : LA CONSOMMATION

 La consommation est , avec la production et l’investissement , un concept économique fondamental . Est-il besoin d’en apporter une multitude de preuves alors que la littérature économique et sociologique ne cesse d’employer le terme désormais consacré de « société de consommation » ? .

Ce chapitre dont l’objectif est l’étude de la consommation comprend deux parties. La première fournit les principaux points de repère sur la notion de consommation . La deuxième est consacrée à la fonction de consommation et permet de se familiariser avec les différentes théories faisant apparaître les relations de dépendance entre la consommation finale des ménages et certaines variables explicatives .

 Section 1 : La notion de consommation 

Trois points vont plus spécialement retenir notre attention .

 § 1.1 ) La définition de la consommation : 

La consommation d’un bien est la quantité de ce bien qui par usure ou destruction permet de satisfaire directement les besoins des agents économiques intéressés sans concourir à l’accroissement de la production .

La consommation dont il est question ici ne vise que la consommation finale de biens et de services et n’a rien à voir avec la consommation intermédiaire .

La consommation finale au niveau d’un pays regroupe la consommation des ménages , des administrations publiques et des administrations privées .

La ventilation de la consommation pour 2005 selon les secteurs institutionnels est fournie par le tableau 1 .

Tableau 1 : Ventilation de la consommation finale par secteur institutionnel en 2005 ( en pourcentage ) .

Ménages

       76,84 %

Administrations publiques

       21,32 %

Administrations privées

         1,83 %

Total

          100 %

 § 1.2 ) L’importance de la consommation des ménages en France :

La consommation finale des ménages est composée de l’ensemble des biens ( à l’exception des logements ) et services marchands utilisés par les ménages pour la satisfaction de leurs besoins individuels accrue des services domestiques (non marchands) qu’ils produisent pour eux-mêmes en tant qu’employeurs de personnel domestique salarié et augmentée des paiements partiels aux administrations publiques et privées pour les services non marchands qu’elles leur fournissent .

La consommation finale des ménages qui vient d’être présentée n’est pas capable d’appréhender toute la réalité de la consommation . La notion de « consommation élargie » permet d’obtenir une vision plus complète . Pour l’évaluer , il faut ajouter à la consommation finale des ménages une évaluation des services produits par les administrations publiques et privées ( éventuellement les entreprises ) dont bénéficient directement et gratuitement les ménages .

La consommation élargie de la population est donc égale à la somme de la consommation finale des ménages résidents et de la consommation finale non marchande des administrations publiques et privées , culturels et sportifs .

 

§ 1.3 ) Les structures de la consommation : 

Nous décomposerons la consommation des ménages par fonction .

Le rapport annuel des comptes de la Nation présente une ventilation de la consommation des ménages distinguant plusieurs postes de consommation.

Avant de passer à l’analyse des tableaux , il convient auparavant d’expliciter directement la notion de coefficients budgétaires , celle-ci se définit comme suit:

Coefficient budgétaire = Dépenses relatives à un poste de consommation / Total des dépenses . 

 

Cette classification est fondée sur la nature des besoins ou types de besoins à satisfaire : se nourrir , s’habiller , se soigner , etc. Elle regroupe des produits complémentaires ( se soigner implique des services de médecine et des produits pharmaceutiques ) et substituables ( voyager peut se faire par train et par avion).

 

Tableau 2 : L’évolution des différents postes de consommation en France depuis 1960 jusqu’à 2005 ( coefficients budgétaires en % ) . 

POSTES DE DEPENSES

   1960

   1970

  1980

   1990

   2005

Produits alimentaires, boissons et tabacs

   33, 3

   26, 0

   21, 4

   19, 3

  17,00

Articles d’habillement et chaussures

   11, 0

     9, 6

     7, 3

     6, 5

    4,90

Logement, chauffage et éclairage

   10, 4

   15, 3

   17, 5

   19, 0

  24,70

Meubles, matériel ménager, articles de ménage et d’entretien.

   11, 0

   10, 2

     9, 6

     8, 0

   5,80

Services médicaux et de santé

     5, 0

     7, 1

     7, 7

     9, 5

   3,5

Transports et communication

   11, 6

   13, 4

   16, 6

   17, 0

 17,70

Loisirs, Spectacles, enseignement et culture

     6, 0

     6, 9

     7, 3

     7,6

 10,00

Autres biens et services

   11, 7

   11, 5

   12, 6

   13 ,1

 16,4

TOTAL

  100 %

 100 %

100 %

100 %

100 %

 

Le tableau 2 mérite un certain nombre de commentaires , le premier a pour cadre l’évolution de la consommation en fonction des principaux postes sur une longue période , ainsi , on peut constater:

 

– Il existe des postes qui voient leur part relative diminuer et d’autres postes qui voient leur part relative augmenter entre 1960 et 2005.

– Parmi les postes qui voient leur part diminuer, le poste « alimentation » est celui qui voit sa part diminuer le plus, suivi en cela par le poste « article d’habillement » et enfin le poste « meubles, matériel ménager « .

– Parmi les postes qui augmentent le plus, on peut classer les dépenses liées au logement, celui lié au poste « services médicaux et de santé » , le poste « transports et communication » et enfin le poste « loisirs et spectacles » .

 

On peut avancer diverses explications concernant cette évolution, concernant le poste « alimentation » , elle se réfère ici directement à la première loi d’ENGEL (nous y reviendrons dans le paragraphe suivant ) . Cette loi implique que l’augmentation du revenu s’accompagne d’une baisse relative des dépenses consacrée à l’alimentation qui correspond avant tout à la satisfaction d’un besoin primaire. On peut avancer le même type d’explication concernant le poste « habillement » qui correspond également à un besoin primaire qui finit par être satisfait lorsque le revenu augmente . A un degré moindre, l’explication concernant le poste « meubles et matériels ménagers » peut trouver sa source dans ce genre d’argument, bien qu’une autre explication peut être également avancé , celle de la baisse sur le long terme du prix relatif de ces produits liée en fait au développement de la consommation de masse et l’existence d’économie d’échelle.

Si l’on s’intéresse à présent à l’évolution des postes qui connaissent une croissance continue de leur part relative, il nous faut nous arrêter un instant sur le poste « logement », selon ENGEL, ce poste connaît une croissance parallèle à celle du revenu du consommateur. Or il apparaît ici clairement que cela n’est pas le cas. L’explication que l’on peut avancer est la suivante, à l’époque où ENGEL développe sa théorie (à la fin du XIXème siècle) , les dépenses pour le logement sont très faible ( les habitants vivent le plus souvent dans des conditions de vétusté très importante ) . Concernant l’évolution de la France depuis 1960 , l’explication que l’on peut avancer , réside ici dans le fait que de très nombreux habitants sont devenues propriétaires de leurs logement entraînant par la même occasion , une augmentation conséquente des dépenses .

Une autre explication peut également être avancé ayant trait directement à la hausse des loyers.

Si l’on prend en considération, les dépenses de santé et les dépenses relatives aux transports et à la communication, il apparaît ici qu’elles se référent directement à la troisième loi énoncé par ENGEL, celui-ci stipule que les dépenses des autres postes croissent plus vite que le Revenu, entraînant ainsi une augmentation de leur part relative. Ainsi, concernant les dépenses de communication et de transports, elles sont liés pour la plupart à l’existence d’une forte urbanisation et au fait qu’il existe maintenant des familles très éloignées géographiquement. Concernant les dépenses de santé, elles témoignent si besoin en était d’une évolution de la société vers une société de type quaternaire

 § 1.3 ) Les propensions à consommer et les lois d’ENGEL  

Si l’on rapproche l’évolution des différentes consommations de celle du Revenu National, on peut en tirer deux catégories d’informations concernant les propensions à consommer et les lois d’ENGEL .

 

A ) Les propensions à consommer : 

Définition   

On appelle propension moyenne à consommer le rapport de la consommation totale au revenu national :

PMC = C / Y.

 De la même manière que si l’on raisonne à partir des accroissements des deux agrégats, on peut introduire la notion de propension marginale à consommer , c, où l’on a C = accroissement de la consommation ,

             Y = accroissement du revenu national,

                c =  propension marginale = C / Y.

 

On peut noter qu’il existe autant de propensions moyennes et marginales à consommer qu’il existe de façons d’appréhender la consommation et le revenu. Il est possible de calculer la propension à consommer par rapport au revenu national ou au revenu national disponible. Pour le numérateur, on peut retenir les différentes notions de consommation et prendre par exemple : la consommation privée, la consommation publique, la consommation de biens durables , la consommation de biens non durables , etc.

Il faut être donc toujours très prudent quand on analyse une propension et voir les réalités que recouvrent ces rapports.

A titre indicatif, si l’on examine les chiffres de la consommation en France entre 1965 et 2004, on constate que la propension moyenne à consommer par rapport au revenu disponible présente une bonne stabilité autour d’une valeur moyenne de 0,85. Par contre, si l’on examine , la propension marginale à consommer , on remarque qu’elle est beaucoup plus irrégulière , ce qui signifie que le comportement de consommation n’est pas stable en courte période .

On constate également que les propensions calculées par rapport au revenu primaire sont différentes et économiquement moins significatives, car c’est le revenu disponible pour la consommation et la constitution de l’épargne qu’il faut prendre en considération .

 B ) Les lois d’ENGEL : 

Si on rapproche l’évolution des différentes consommations de l’évolution du revenu national, on s’aperçoit que certaines consommations augmentent plus rapidement que le revenu national, certaines moins , et d’autres au même rythme. Ce sont ces constatations qui furent à l’origine des lois d’ENGEL, du nom d’un économiste allemand qui s’est particulièrement intéressé à ce problème. Elles ont pour objet de classer les différents biens de consommation selon leur coefficient d’élasticité par rapport au revenu.

Définition  

On appelle coefficient d’élasticité le rapport des variations relatives d’une variable y aux variations relatives d’une variable x.

La signification de l’élasticité est de nous indiquer, en pourcentage, de combien varie la consommation quand le revenu varie de 1 % .

Par rapport à ces élasticités, on peut dégager trois types de biens que l’on va définir avec précision.

Définition  

On appelle biens inférieurs, les biens de consommation dont l’élasticité par rapport au revenu est inférieur à 1, c’est à dire lorsque le revenu augmente de 1 % , la demande de ces biens augmentent de moins de 1 %  . Selon ENGEL, on classe dans cette catégorie, les biens alimentaires essentiellement .

On appelle biens supérieurs ou biens de luxes, les biens dont l’élasticité de la consommation par rapport au revenu est supérieure à 1 , c’est à dire lorsque le revenu augmente de 1 % , la demande pour ce bien augmente de plus de 1 % . Selon ENGEL, on trouve surtout les dépenses de santé et les dépenses liées à la Culture et aux loisirs.

On appelle biens « neutres » ou « normaux » , les biens dont les coefficients d’élasticité sont égaux à 1 , impliquant ainsi qu’une augmentation de 1 % du revenu se traduit par une augmentation de 1 % de la consommation du bien neutre . Selon ENGEL, on peut classer dans cette catégorie, les biens suivants :

l’habillement, le logement , le chauffage et les dépenses d’éclairage .

Les lois d’ENGEL permettent d’avoir une vue globale de la structure de la consommation et des comportements des agents économiques face à la variation de leurs revenus. Mais la simplicité du classement en biens inférieurs, neutres et supérieurs, masque la complexité des phénomènes. Il est donc nécessaire d’approfondir cette question par l’étude des fonctions de consommation.

Section 2 : La fonction de consommation 

La fonction de consommation a pour objectif d’analyser l’évolution de la consommation globale des ménages à l’aide d’un certain nombre de variables explicatives .

KEYNES ne fut pas le seul économiste à reconnaître l’existence d’une relation entre la consommation et le revenu , mais il fut le premier à développer systématiquement cette idée dans la Théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie . Après avoir été vérifiée statistiquement, la fonction de consommation keynésienne fut complétée par la prise en compte d’autres variables explicatives .

 § 2.1 ) L’analyse de J.M .KEYNES : 

Keynes relie les variations de la consommation des ménages aux variations du revenu global en faisant deux hypothèses :

– les dépenses de consommation sont une fonction stable du revenu ,

– la propension marginale à consommer est positive et inférieure à 1.

La fonction de consommation peut être schématisée par une droite d’équation

C = cY + Co  dont la représentation est faite au graphique 1, avec

                   C = la consommation,

                   Y = le revenu,

                   c  = la propension marginale à consommer ,

                   Co  = la consommation incompressible

 

Graphique 1 : la représentation de la fonction de consommation keynésienne . 

Cours d'économie

 Les premières vérifications statistiques effectuées aux Etats-Unis à partir des budgets familiaux confirmèrent le bien-fondé de l’analyse keynésienne , mais firent apparaître le caractère très contraignant des premières hypothèses formulées .

Deux autres hypothèses , moins clairement affirmées par KEYNES , permettent d’établir une fonction de consommation plus réaliste :

 – la propension moyenne à consommer est supérieure à la propension marginale; elle diminue par conséquent avec l’accroissement du revenu ;

– la propension marginale, elle-même diminue avec l’accroissement du revenu .

 Si les variations du revenu national expliquent en grande partie les variations de la consommation des ménages , il ressort de l’ensemble des études que d’autres facteurs doivent être pris en considération car les fonctions keynésiennes sont incapables d’expliquer parfaitement toutes les variations de la consommation .

 

§ 2.2 ) La prise en compte des décalages : 

L’étude attentive des données statistiques fait apparaître que la consommation des ménages diminue moins que le revenu en période de dépression et qu’elle s’accroît moins que le revenu en période d’expansion.                                                       

Pour expliquer ce phénomène, DUESENBERRY (1949) introduit un nouveau facteur : le décalage temporel. La raison de la moindre diminution de la consommation en période de récession tient au fait que les ménages ajustent leurs dépenses de consommation non seulement à leur revenu actuel, comme le pensait KEYNES, mais également à leurs revenus antérieurs et plus spécialement au plus haut revenu obtenu par le passé .

Dans ces conditions, en période de dépression, les consommateurs essaient de protéger leur niveau de consommation en réduisant l’épargne. En période d’expansion, par contre, la consommation s’élève lentement, car l’accroissement des revenus permet aux ménages de reconstituer leur épargne. Quand le revenu dépasse le niveau ancien le plus élevé, la consommation reprend plus vigoureusement. C’est ce que DUESENBERRY, mais surtout BROWN  (1952) qui a repris en grande partie l’analyse appelle « l’effet de cliquet ».

En représentant par Y le revenu le plus élevé obtenu dans le passé, la fonction de consommation présente la forme générale suivante :

 Ct = a Yt + b Y

 

En période de croissance économique, il arrive souvent que le revenu le plus élevé obtenu dans le passé corresponde au revenu de l’époque  précédente de sorte que la forme générale suivante devient :

 Ct = A Yt + b Y t-1

 

Dans le même ordre d’idée, certains auteurs ont relié la consommation en t à la consommation et non pas au revenu de l’époque t – 1 , de sorte que la forme générale de la fonction devient :

Ct = A Yt + b Ct-1

 § 2.3 ) La prise en compte du long terme et de la richesse : 

Comme il a été signalé dans le paragraphe 1, la fonction keynésienne fut confirmée par des études sur les budgets familiaux. Ces études montraient que les ménages à faible revenu avaient une propension moyenne à consommer supérieure à l’unité et ceux à haut revenu une propension inférieure à l’unité. En d’autres termes, la propension moyenne à consommer diminuait avec le revenu, la propension moyenne à épargner augmentant avec ce dernier. Cependant , des études sur les comportements de consommation à long terme ( 20 à 50 ans ) ont fait apparaître une relative stabilité de la propension moyenne à épargner , ce qui signifiait que les ménages consommaient une proportion à peu constante de leur revenu.

La fonction de consommation de long terme peut s’écrire :

C = c Y    où c = C / Y  la propension moyenne à consommer = la propension marginale à consommer = constante.

Dans ces conditions, la fonction d’épargne s’écrit :

S = Y – C

S = Y – cY

S = ( 1-c) Y

et la propension moyenne à épargner , ou taux d’épargne , est égale à S/Y = 1-c = s = constante .

Deux analyses ont proposé des explications à la proportionnalité à long terme entre la consommation et le revenu et la stabilité des comportements de consommation : la théorie du revenu permanent et celle du cycle de vie. Elles intègrent l’une ou l’autre la richesse accumulée par les ménages.

 A ) La théorie du cycle de vie :

Elaborée par l’économiste américain MODIGLIANI en 1963 , cette théorie soutient que la consommation représente une proportion à peu près constante du revenu des ménages tout au long de leur durée de vie , qui peut être divisée en trois périodes principales : la vie non active , la vie active et la retraite .

La stabilité de la consommation est rendue possible pendant la vie active par la perception d’un revenu courant qui excède les besoins de consommation. L’épargne ainsi dégagée permet l’accumulation d’une richesse mobilière et immobilière W, dont la relative liquidité contribue à la stabilité de la consommation.

Pendant la retraite, l’utilisation de la richesse comble la désépargne due à la baisse du revenu courant.

Durant la vie active, malgré l’absence de revenu courant, la consommation est stable en raison notamment de la richesse léguée par les parents. Si à chaque génération, les jeunes , les actifs et les retraités ont les mêmes comportements , et si sur longue période la population comprend une proportion identique d’actifs et d’inactifs , les propensions à consommer et à épargner demeurent constantes . La fonction de consommation proposée par MODIGLIANI peut s’écrire:

C = c W/P + b Y

où W/P est la richesse réelle , P le niveau des prix et Y le revenu courant .

La richesse est un facteur de stabilisation de la consommation en raison non seulement de la vente d’actifs qui la composent, mais aussi de l’effet de richesse réelle. Supposons par exemple la mise en oeuvre d’une politique économique restrictive de lutte contre l’inflation aboutissant à une diminution de la consommation et à une baisse des prix. Cette dernière se traduit par un accroissement de la richesse réelle W/P, qui permet de stabiliser le ralentissement de la consommation .

L’hypothèse du cycle de vie , testée notamment aux Etats-Unis entre 1953 et 1975 a mis en évidence le rôle non négligeable de la richesse réelle dans les comportements de consommation.

 

                Graphique 2 : La consommation et le cycle de vie

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§ 2.4 ) Les autres variables explicatives : 

Un certain nombre d’autres variables peuvent influer profondément sur la consommation, certaines ont un rapport étroit avec les comportements sociologiques .

 

A ) L’effet d’imitation de DUESENBERRY ( 1949 )  

La théorie de DUESENBERRY sur le groupe d’appartenance repose sur une analyse sociologique : le modèle des A et des non A . L’idée est la suivante : les A sont constitués du groupe leader de référence ( cadres , professions libérales ), ceux-ci tracent la voie et créent les nouveaux modèles de consommation . Les non A ( tous les autres groupes ) essaient d’imiter les A et copient leurs dépenses dès qu’ils le peuvent . Aussitôt rejoints , les A adoptent de nouveaux signes distinctifs , chaque catégorie socio-professionnelle donnerait à celle qui la suit (par les revenus , le statut ) un modèle de consommation à reproduire … Ainsi , tout citoyen d’une classe donnée tend à acquérir le comportement de la classe immédiatement au-dessus .

Le club des « privilégiés » servirait de modèle de référence aux autres catégories sociales qui tentent de suivre ses dépenses lorsque leurs revenus augmentent ou lorsque la production de masse banalise les objets . Cette théorie peut constituer une vision généralisée du retard , car ce qui est vrai entre A et non A se répète dans le détail entre cadres supérieurs et moyens , entre ceux-ci et les employés ..

Cette course poursuite aux modèles supérieurs suppose que les besoins ne sont pas structurellement différents entre cadres , ouvriers et patrons .

 

B ) L’analyse de BOURDIEU : l’habitus : 

BOURDIEU a remis en question l’adage populaire : « des goûts et des couleurs on ne discute pas » . Pour lui , il est possible de déterminer les facteurs profonds et structurels du goût du « consommateur » . Sans doute , pour BOURDIEU , les écarts dans le niveau de la consommation s’expliquent par des différences de revenus mais les probabilités pour qu’un commerçant , un ouvrier ou un professeur apprécient les oeuvres de PLATON , la musique de MOZART ou la peinture moderne sont très différentes et il en résulte des conséquences importantes sur la nature de la consommation .

Un des intérêts de l’étude de BOURDIEU est d’intégrer aspects culturels et économiques dans les comportements de consommation . Tout en analysant les aspects sociologiques , il met en évidence le rôle important du revenu : « Les gros commerçants à l’inverse des professeurs ont un « capital culturel » faible et un « capital matériel » élevé , ils ont aussi des consommations alimentaires très fortes et des dépenses de présentation faibles . Les professions libérales consacrent une part relativement modeste de leur budget à l’alimentation , mais beaucoup pour soigner leur apparence et par contre la culture à un pourcentage moyen dans leur budget malgré un niveau scolaire proche des professeurs (approche plus utilitariste de la consommation )

 

CHAPITRE 4 : LA PRODUCTION ET LES PRODUCTEURS , L’ETUDE DE LA DECOMPOSITION DU PROCESSUS DE PRODUCTION.

Avant que nous puissions manger notre pain quotidien, quelqu’un doit le faire cuire. La capacité de production d’un pays, le nombre de miches de pain, de barils de pétrole, de kilowattheures d’électricité, etc., mesure le potentiel économique d’un pays. La capacité productive est déterminée par l’effectif et la qualité de la main d’œuvre, par le volume et la qualité du stock de capital, par le savoir technologique de la nation et la capacité d’utilisé ce savoir, enfin par la nature des institutions publiques et privées. Pourquoi les niveaux de vie sont-ils trop élevés en Amérique du Nord et bas dans l’Afrique tropicale ?. Pour répondre, nous devons examiner dans quelle mesure la machine de la production tourne bien.

Notre objectif est de comprendre comment les forces du marché déterminent l’offre de biens et services. Dans ce chapitre , nous nous interrogerons respectivement sur le concept de production, dans un deuxième temps, nous examinerons la notion de coût de production et enfin dans un troisième temps, nous examinerons la notion de productivité et de progrès technique.

 

Section 1 ) Théorie de la production et production marginale. 

Les activités productives sont aussi diverses que la vie elle-même. Une exploitation agricole se sert d’engrais de semences, de terre et de main d’œuvre pour obtenir du blé et du maïs. Les usines modernes emploient des moyens de production tels que de l’énergie, des matières premières, des machines informatisées et de la main d’œuvre pour produire des tracteurs, des téléviseurs ou des tubes de dentifrice. Une compagnie aérienne utilise des avions, du carburant, de la main d’œuvre et des systèmes informatiques de réservation pour offrir aux passagers la possibilité de voyager rapidement d’un bout du monde à l’autre. Une entreprise de comptabilité se sert de crayons, d’ordinateurs, de papier, de bureaux et de main d’œuvre pour produire des audits ou des états fiscaux, pour ses clients.

Notre exposé supposera que l’exploitation agricole, l’usine, la compagnie aérienne et l’entreprise de comptabilité s’efforceront toujours de produire de façon efficace, c’est-à-dire au moindre coût. Autrement dit, elles cherchent toujours à produire au niveau maximal avec une quantité donnée de facteurs de production  et à éviter le gaspillage dans toute la mesure du possible. De plus, en décidant des biens et services à produire, les entreprises sont supposées maximiser également leur profit économique.

 § 1.1) La fonction de production . 

Nous avons parlé de facteurs de production tels que la terre et la main d’œuvre et de produits tels que le blé et le dentifrice. Mais si l’on dispose d’une quantité donnée de facteurs de production, quel volume de production est-il possible d’obtenir ?. Dans la pratique, la réponse de l’état des connaissances et du savoir-faire technologique. Un jour donné, compte tenu du savoir technique, de la terre, des machines, etc. disponibles, il n’est possible d’obtenir  qu’une certaine quantité de tracteurs ou de dentifrice d’une quantité donnée de main d’œuvre. La relation entre la quantité de facteur de production nécessaire et la quantité de produit qui peut être obtenue s’appelle la fonction de production.

La fonction de production spécifie la quantité maximale de produit qui peut être obtenue avec une quantité donnée de facteurs de production. Elle est définie pour un état donné des connaissances et du savoir-faire technique.

Par exemple, nous pouvons imaginer un livre de spécifications techniques qui présente la fonction de production associée à la production d’électricité. Sur un page figurent les spécifications des turbines à gaz de différente taille, les intrants qui leur sont associés (coût initial en capital, consommation de fuel, quantité de main-d’œuvre requise pour faire fonctionner la turbine), et le produit qu’elles fournissent ( quantité d’électricité).

Considérons la tâche plus modeste de creusement de tranchées. En Europe, en regardant par la fenêtre, nous verrons une grande excavatrice, très coûteuse, conduite par un ouvrier et supervisée par un autre. Cette équipe peut facilement creuser une tranchée de 1 mètre 50 de profondeur et longue de 15 mètres en 2 heures. En Chine, nous verrions 50 travailleurs armés de pioches. Le creusement de la même tranchée pourrait demander une journée entière. Ces deux techniques, l’une très capitalistique et l’autre qui utilisant relativement beaucoup de main d’œuvre représente la fonction de production associée au creusement de tranchées.

Il existe littéralement des millions de fonctions de production différentes une pour chaque produit ou service. La plupart n’ont jamais été consignées par écrit. Dans des domaines de l’économie où la technologie change rapidement, comme les télécommunications et la biotechnologie change rapidement, les fonctions de production peuvent devenir très vite obsolètes. Certaines, comme les protocoles d’un laboratoire médical ou d’un phare, sont élaborées spécialement pour un lieu et une finalité spécifiques et n’auraient aucun intérêt ailleurs. Néanmoins, les économistes ont trouvé que les fonctions de production sont une manière utile de décrire les capacités productives d’une entreprise.

 

§ 1.2) Produit total, produit moyen et produit marginal. 

A partir de la fonction de production d’une entreprise, nous pouvons évaluer trois concepts importants en matière de production. Nous commencerons par calculer le produit physique total, ou produit total , qui correspond à la quantité totale de produit obtenue qui est calculé en termes d’unités physiques telles que des boisseaux de blé ou le nombre d’appels téléphoniques produits.

Pour illustrer cet exemple, nous nous appuierons sur un tableau , ce qui nous permettra d’illustrer ensuite le concept de produit moyen et de produit marginal.

 Tableau numéro 1 : Produit total, produit marginal et produit moyen.

Unités de main d’œuvre : L

Produit total : Q

Produit marginal :

DQ/ DL

Produit moyen :

      Q / L

           0

             0

           XXX

            0

           1

        2000

           2000

      2000

           2

        3000

           1000

      1500

           3

        3500

             500

      1167

           4

        3800

             300

        950

           5

        3900

             100

        780

 

Ce tableau montre comment le produit total réagit lorsqu’on augmente la quantité de main d’œuvre utilisée. Le produit total part de zéro avec une main d’œuvre nulle puis augmente à mesure qu’on  utilise des unités additionnelles de main d’œuvre, pour atteindre un maximum de 3900 unités quand on emploie 5 unités de main d’œuvre.

Une fois que le produit total est connu, il est facile de déduire une notion tout aussi importante, celle de produit, production ou productivité marginale. Rappelons que le terme marginal signifie « supplémentaire ».

La productivité marginale (parfois dite production ou produit marginal) d’un facteur de production est la quantité de produit supplémentaire obtenue grâce à une unité supplémentaire de ce facteur de production, les autres facteurs étant maintenus constants.

Par exemple, supposons que nous maintenions constants la terre, les machines et tous les autres facteurs de production. La production marginale de la main d’œuvre est alors le produit supplémentaire obtenu grâce à une unité de main-d’œuvre supplémentaire. La productivité marginale est calculée dans la troisième colonne du tableau 1. Elle part de 2000 pour la première unité de main d’œuvre et tombe à 100 unités seulement pour la cinquième unité de main d’œuvre. Des calculs de productivité marginale tels que celui-ci sont cruciaux pour comprendre comment les salaires et les prix des autres facteurs de production sont déterminés.

La dernière notion est celle de productivité moyenne. Celle-ci est égale au rapport entre le produit total et le nombre total d’unités de facteur de production. La quatrième colonne du tableau 1 montre que la productivité moyenne de la main d’œuvre est de 2000 unités par travailleur avec un travailleur, de 1500 unités par travailleurs avec deux travailleurs, et ainsi de suite. Dans cet exemple, la productivité moyenne diminue continuellement à mesure qu’on augmente les quantités de main d’œuvre utilisées.

 

§ 1.3) La loi des rendements décroissants. 

Les fonctions de production nous permettent de comprendre l’une des plus célèbres lois de toute l’économie, celle des rendements décroissants. La loi des rendements décroissants affirme que nous obtiendrons de moins en moins de produit supplémentaire à mesure que nous ajouterons des doses supplémentaires d’un des facteurs de production, les autres étant maintenus fixes. En d’autres termes, la production marginale de chaque unité d’un facteur de production diminuera quand la quantité de ce facteur est augmentée, tous les autres facteurs étant maintenus constants.

La loi des rendements décroissants exprime une relation des plus fondamentales. A mesure qu’on ajoute une certaine quantité d’un facteur de production tel que le travail à une quantité fixe de terre , de machines et d’autres facteurs de production , la main d’œuvre dispose d’une quantité de plus en plus faible des autres facteurs pour travailler . Le sol est de plus en plus encombré, les machines sont dotées de trop de main d’œuvre et la production marginale du travail diminue.

Nous pouvons donner corps à la loi des rendements décroissants en chaussant les bottes d’un agriculteur qui effectue une expérimentation agricole. Compte tenu d’une quantité donnée de terre et des autres facteurs de production, supposons que nous n’utilisons pas du tout de main d’œuvre . Sans main d’œuvre, il n’y a pas de mais produit, le produit est donc nul quand la main d’œuvre est nulle.

Ajoutons une unité de main d’œuvre à la même quantité fixe de terre. Nous observons que 2000 boisseaux de mais sont produits. A l’étape suivante de notre expérimentation contrôlée, nous continuons à maintenir fixes tous les autres facteurs de production et nous passons d’une unité à deux unités. Quel est l’effet de la main-d’œuvre supplémentaire sur la production ? La seconde unité de main d’œuvre n’ajoute qu’un produit supplémentaire de 1000 boisseaux, ce qui est inférieur au produit procuré par la première unité. La troisième unité de main d’œuvre a même une production marginale encore plus basse que la deuxième, et la quatrième unité procure encore un peu moins de produit. L’expérimentation hypothétique dont rend compte le tableau 1 illustre bien la loi des rendements décroissants.

La loi des rendements décroissants est conforme au bon sens économique. Dans le cas de l’agriculture, le produit  augmentera fortement si nous ajoutons de la main d’œuvre, les champs seront ensemencés et sarclés de façon plus serrée, les rigoles d’irrigation seront plus nettes et les épouvantails mieux entretenus.

Mais à partir d’un certain point, le travail supplémentaire deviendra de moins en moins productif. Le troisième et le quatrième graissage de la machine de la journée n’augmenteront guère le produit. Finalement, le produit croîtra très peu lorsque de plus en plus de gens encombreront la ferme. Trop de cultivateurs nuisent aux récoltes.

Les rendements décroissants sont un facteur clé pour expliquer pourquoi de nombreux pays d’Asie sont si pauvres. Les niveaux de vie dans des pays peuplés comme la Chine ou l’Inde sont bas parce qu’il y a beaucoup de travailleurs  par hectare de terre et non parce que les agriculteurs sont ignorants aux incitations économiques.

 

§ 1.4) Rendements d’échelle. 

Les rendements décroissants et les productivités marginales ont trait à la réaction du produit à l’augmentation d’un seul facteur de production quand tous les autres sont maintenus constants. Nous avons vu qu’une augmentation de la quantité de travail, alors que la surface cultivée resterait constante, accroîtrait la production alimentaire de montants supplémentaires toujours plus faible.

Mais nous nous intéresserons parfois aux effets d’une augmentation de tous les facteurs de production . Par exemple, que deviendrait la production de blé si la terre, l’eau et les autres facteurs de production étaient augmentées dans la même proportion ? Ou que deviendrait la production de tracteurs si les quantités de travail, d’ordinateurs, de robots, d’acier et d’usine doublaient toutes ?. Ces questions concernent les rendements d’échelle, c’est-à-dire les effets d’une augmentation d’un même facteur d’échelle des facteurs de production sur la quantité produite. Autrement dit, les rendements d’échelle reflètent la réaction du produit total à un accroissement proportionnel de tous les facteurs de production. Il convient de distinguer trois grands cas :

– Les rendements d’échelle constants 

 Ils correspondent au cas où une variation de tous les facteurs de production entraîne une variation proportionnelle du produit. Par exemple, si le travail, la terre, le capital et les autres facteurs de production doublaient, en cas de rendements d’échelles constants, le produit doublerait aussi. De nombreuses activités artisanales (comme les coupes de cheveux chez nous ou le tissage à la main dans un pays en développement) ont des rendements constants.

– Les rendements d’échelle croissants 

Ils interviennent quand une augmentation de tous les facteurs de production entraîne un accroissement plus que proportionnel du niveau du produit. Par exemple, un ingénieur qui élabore les plans d’une petite usine chimique trouvera généralement qu’une augmentation de 10% de la main d’œuvre, du capital et des matières premières accroîtra le produit total de plus de 10%. Des études d’ingénierie ont déterminé que de nombreux processus manufacturiers bénéficient de rendements d’échelle croissants modestes dans le cas d’usines dont la taille a atteint celle des plus grandes usines actuelles.

– Les rendements d’échelle décroissants 

Ils interviennent quand une augmentation équilibrée de tous les facteurs de production entraîne un accroissement moins que proportionnel du produit total . Dans de nombreux processus, une augmentation de l’échelle peut finalement atteindre un point au delà duquel un manque d’efficacité apparaît . Cela peut se produire parce que les coûts de gestion ou de contrôle deviennent importants. Un cas est apparu dans la production d’électricité , quand les entreprises ont trouvé que si les centrales devenaient trop grandes, les risques d’une défaillance devenaient trop importants. De nombreuses activités productives impliquant des ressources naturelles  telles que la viticulture ou l’alimentation d’une grande ville en eau portable ,ont des rendements d’échelles décroissants.

 

La production présente des rendements d’échelle croissants, décroissants ou constants quand une augmentation équilibrée de tous les facteurs de production entraîne une augmentation plus que proportionnelle , moins que proportionnelle ou juste proportionnelle. 

 Quel type de rendements prévaut dans la production aujourd’hui ? Les économistes pensent souvent que la plupart des activités de production devraient parvenir à des rendements d’échelle constants. Ils font le raisonnement que si la production pouvait être ajustée par une simple reproduction à l’identique des usines existantes, le producteur se contenteraient de multiplier par un même nombre les facteurs de production et le produit. En ce cas, on observerait pour tout niveau de produit des rendements d’échelle constants.

 

Section 2 : Les coûts de production. 

Quel que soit le domaine de production , les coûts la suivent comme son ombre. Dans un monde où règne la rareté , les entreprises doivent payer leurs ressources :l’acier, les vis, les solvants, les ingénieurs, les secrétaires, les ordinateurs, les communications, les lampes et les crayons. Les entreprises rentables sont intimement convaincues de ce simple fait lorsqu’elles sont établissent leurs stratégies de production, puisque chaque euro de coût inutile ampute les profits de la société de ce même euro. Par conséquent, trop de production  peut être aussi dangereux que trop peu ; l’histoire montre qu’une surexpansion peut souvent conduire une entreprise à croissance rapide à la faillite, en faisant croître les coûts plus vite que les revenus.

Mais le rôle des coûts va bien au-delà de leur influence sur le niveau de la production. Les entreprises vigoureuses prennent aussi garde à leurs coûts quand elles prennent des décisions. Revient-il moins cher d’embaucher un nouvel employé ou de payer des heures supplémentaires ? D’ouvrir une nouvelle usine ou d’agrandir une ancienne ?. D’investir  dans de nouvelles machines sur place ou de délocaliser la production ?. Les maisons de commerce doivent choisir la méthode de production la plus efficace, celle qui produit le plus pour les moindres coûts.

 

§ 2.1) Coût total : fixe et variable. 

Considérons une entreprise qui produit une certaine quantité q de produit à l’aide de capital, de travail et de fournitures. Cette entreprise acquiert ces inputs sur les marchés des facteurs. Une entreprise sensible au profit va garder un œil vigilant sur ses coûts pour maintenir son niveau de profit. Les comptables de l’entreprise ont la charge de déterminer le coût total en euros associé à chaque niveau de q.

 

Tableau 2 : Coûts fixes, variable et total . 

Quantité : Q

Coût fixe : CF (euros)

Coût variable : CV (euros)

Coût total : CT

          0         

           55

             0

          55

          1

           55

           30

          85

          2

           55

           55

        110

          3

           55

           75

        130

          4

           55

         105

        160

          5

           55

         155

        210

          6

           55

         225

        280

 

Le tableau 2 indique le coût total ( CT) associé à chaque niveau de produit Q. En examinant les colonnes 1 à 4, nous voyons que CT augmente quand Q augmente. Ceci est normal puisque pour produire davantage, il faut des quantités plus importantes de facteurs, ce qui implique un coût monétaire plus important. La production de 2 unités coûte 110 euros, celle de 3 unités 130 euros et ainsi de suite. Nous supposerons que l’entreprise produit toujours au coût le plus faible possible.

– Coût fixe 

Les colonnes 2 et 3 du tableau 2 partagent le coût total en deux composants : le coût fixe total (CF) et le coût variable total (CV).

Qu’appelle-t-on coûts fixes d’une entreprise ? Ce sont les postes comme la location de locaux pour les usines et les bureaux, les versements contractuels pour l’équipement, les remboursements d’intérêts sur les emprunts, les salaires du personnel permanent, etc. Ces frais doivent être couverts, que l’entreprise produise ou non, et ils ne changeront pas si la production change. Par exemple, une entreprise peut avoir un bail de 10 ans pour ses bureaux, qui reste une obligation même si sa taille diminue de moitié. Comme CF doit être payé indépendamment du niveau de la production, la colonne 2 reste toujours égale à 55 euros.

– Coût variable 

La colonne 3 du tableau 2 fournit les coûts variables (CV). Les coûts variables sont ceux qui dépendent du niveau de la production. Les matériaux nécessaires à la production (comme l’acier pour les automobiles), les ouvriers qui font fonctionner les lignes d’assemblage, l’énergie qui alimente les usines, sont…des exemples de coûts variables. Dans un supermarché, les caissiers (ou caissières) sont un coût variable puisque les gestionnaires peuvent facilement ajuster les heures de travail des employés pour tenir compte du nombre de clients.

Par définition, CV est nul pour q nul. C’est la part de CT qui croît avec la production ; par conséquent, la variation de CT entre deux niveaux de production est égale à celle de CV.

 

§ 2.2) Coût marginal et coût moyen . 

Nous allons examiner maintenant les concepts de coût marginal et de coût moyen. Pour l’occasion, nous allons nous aider d’un troisième tableau.

 

Tableau numéro 3 : Coût marginal et coût moyen. 

Quantité ( Q)

Coût total ( CT)

Coût marginal (Cm)

Coût moyen (CM)

         0

            55

          XXX

          0

         1

            85

              30

        85

         2

          110

              25

        55

         3

          130

              20

        43,5

         4

          160

              30

        40

         5

          210

              50

        42

         6

          280

              70

        46,66

A ) Définition du coût marginal. 

Le coût marginal est l’un des concepts clé de l’économie. Le coût marginal (Cm) traduit la variation du coût de  production due à une unité supplémentaire de produit. Soit une entreprise qui produit 1000 disques compacts pour un coût total de 10000 euros . Si le coût de production de 1001 disques est de 10006 euros, le coût marginal de production est de 6 euros pour le 1001ème disque.

Parfois le coût marginal de production d’une unité supplémentaire est extrêmement faible. Pour une compagnie aérienne qui dispose de sièges vides , le coût d’un passager supplémentaire est simplement celui des cacahouètes et du plateau-repas ; aucun capital ( les avions) ni travail ( les pilotes, stewarts et hôtesses) supplémentaire n’est nécessaire. Dans d’autres circonstances, le coût marginal d’une unité de produit peut être relativement élevé. Considérons une centrale électrique. Dans des circonstances normales, elle peut délivrer suffisamment de puissance en se contentant de faire appel  à ses unités de production les plus efficace, et de coût faible. En revanche, par une glaciale soirée d’hiver, lorsque les chauffages électriques d’appoint sont sollicités au maximum et que la demande d’électricité est élevée, les unités de production anciennes, moins productives et plus coûteuses, doivent tourner à plein. La puissance électrique additionnelle est alors produite à un coût marginal élevé.

Le tableau nous montre que le coût marginal diminue au fur et à mesure de la production puis se remet à augmenter fortement.

 

B) Le coût moyen. 

Nous allons maintenant examiner l’idée de coût moyen, en distinguant respectivement le coût unitaire moyen, le coût variable moyen et le coût fixe moyen.

– Le coût moyen ou unitaire 

Comme le coût marginal, le coût moyen (CM) est un concept largement utilisé dans les affaires ; en comparant le coût moyen avec le prix ou le revenu moyen, les entrepreneurs peuvent déterminer s’ils gagnent ou non de l’argent. Le coût moyen est le coût total divisé par le nombre total d’unités produites, comme l’indique la colonne 4 du tableau 3.

Coût moyen = Coût total / Produit  = CT/q = CM.

Dans la colonne 4, quand une seule unité est produite, le coût moyen doit être le même que le coût total, c’est-à-dire 85/1 = 85 euros, mais pour q = 2, CM n’est plus égale qu’à 55 euros.

Si l’on représente la courbe de coût moyen total , elle forme une courbe en U, suivant en cela la courbe de coût variable moyen, alors que la courbe de coût fixe moyen se met à diminuer.

– Le coût fixe moyen et coût variable 

De la même manière que nous avons décomposé le coût total en coût fixe et coût variable, nous pouvons aussi décomposer le coût moyen en ses composantes fixes et variables. Le coût fixe moyen (CFM) est défini par CF/Q, comme le coût fixe est constant, le diviser par une quantité croissante conduit à une courbe de coût fixe moyen décroissante de manière monotone.

Le coût moyen variable (CMV) est égal au coût variable divisé par le produit soit CMV= CV/Q, il décroît puis il remonte.

 

Section 3 ) La productivité

Introduire la notion de productivité peut s’effectuer à partir de l’observation des différents niveaux de vie pour la plupart des pays du globe. A partir de cette observation, on va s’intéresser de près aux divers facteurs qui déterminent la productivité d’un pays pour bien comprendre l’origine de la disparité évoquée.

 § 3.1) Pourquoi la productivité est-elle aussi importante ? 

Commençons par développer un modèle très simple d’économie. Imaginez Robinson Crusoé perdu sur son île déserte. Il pêche son poisson, cultive ses légumes et fabrique ses vêtements. De quoi dépend son niveau de vie ?.

La réponse est simple. Si Crusoé est bon pêcheur, bon cultivateur et bon tailleur, il vit bien. Sinon, il vit mal. Crusoé ne consomme que ce qu’il produit lui-même. Son niveau de vie est donc inexorablement lié à ses capacités productives.

La notion de productivité fait référence à la quantité de biens et services qu’un travailleur peut produire en une heure de travail. Dans le cas de ROBINSON, les choses sont simples. Plus il attrape de poissons à l’heure, plus il a à manger. S’il trouve un meilleur coin de pêche, sa productivité augmente et il s’en porte mieux : il peut soit manger davantage de poissons, soit pêcher moins et consacrer davantage de temps à une autre activité.

Ce raisonnement vaut aussi pour un pays, car le revenu de l’économie est égal à la production. Comme Crusoé, un pays vivra bien s’il est capable de produire de grandes quantités de biens et services. Les américains vivent mieux que les Nigérians parce que les travailleurs américains sont plus productifs que leurs homologues nigérians. Les japonais ont vu leur niveau de vie progresser plus rapidement que celui des argentins, car la productivité des travailleurs japonais a progressé plus rapidement. Ce principe fut annoncé très tôt : notre niveau de vie dépend de notre capacité productive.

Pour comprendre la disparité des niveaux de vie, il faut donc s’intéresser à la production des biens et services. Mais ceci n’est qu’une première étape. Il faut maintenant se poser la question suivante : pourquoi certains pays sont-ils plus productifs que d’autres ?.

 § 3.2) Les déterminants de la productivité. 

Si le niveau de vie de Robinson CRUSOE est déterminé par sa productivité, celle-ci est elle-même fonction de divers facteurs. Robinson attrapera davantage de poissons s’il a davantage de cannes à pêche, s’il a appris à pêcher correctement, si l’île est naturellement poissonneuse, et s’il a réussi à dénicher les meilleurs endroits pour pêcher. Chacun de ces déterminants de la productivité de notre naufragé que nous appellerons ici capital physique, capital humain, ressources naturelles et savoir technologique a une contrepartie équivalente dans une économie complexe.

 

A ) La capital physique. 

Les travailleurs sont d’autant plus efficaces dans leur ouvrage qu’ils disposent d’outils nombreux et adaptés. Ce stock d’équipement et de structures de production de biens et services est appelé capital physique, ou tout simplement capital. Un ébéniste qui n’a qu’une scie et un marteau fabriquera moins de meubles par semaine que son collègue armé de tout l’outillage moderne.

On sait que les facteurs nécessaires à la production des biens et services, travail, capital, etc, sont appelées facteurs de production. La caractéristique essentielle du capital , c’est que c’est un facteur de production produit. C’est-à-dire qu’il est lui-même le résultat d’un processus de production. L’ordinateur grâce auquel cette phrase vient d’être écrite est un des facteurs de production de polycopié. Mais deux ans plus tôt, il était un produit fini élaboré par le fabricant d’ordinateurs. Le capital est donc un facteur de production utilisé pour la production de toutes sortes de biens et services, y compris du capital.

 

B ) Le capital humain. 

C’est le terme que les économistes emploient pour désigner l’ensemble des connaissances et des talents acquis par les travailleurs au travers de l’éducation, l’apprentissage et l’expérience. Il regroupe toutes les compétences acquises de la maternelle à l’université, et plus tard dans la vie active par l’expérience professionnelle.

S’il s’agit là de facteurs moins tangibles que des usines, des ordinateurs ou des laminoirs, le capital humain n’est pas très éloigné du capital physique. Comme ce dernier, il accroît notre capacité productive. Comme le capital physique, c’est un facteur de production produit. La production du capital humain nécessite des facteurs comme des professeurs, des bibliothèques et du temps d’étude. En fait, les étudiants peuvent être perçus comme les travailleurs qui fabriquent le capital humain de demain.

 

C ) Le travail. 

C’est le facteur de production le plus évident. Il regroupe toutes les personnes qui contribuent à la production de biens et services : les agriculteurs, les ouvriers en usine, les commerciaux, les professeurs, etc. Tous ces individus participent à l’élaboration du PIB.

 

D ) Les ressources naturelles. 

Il s’agit des facteurs de production qui nous sont fournis par la nature : les terrains, les rivières, les gisements minéraux, etc. On en trouve deux catégories : les renouvelables et les non-renouvelables. Une forêt est une ressource naturelle renouvelable : une fois un arbre coupé, on peut en planter une autre. Le pétrole est une ressource naturelle non renouvelable. Une fois tout le pétrole consommé, il n’en y aura plus.

Les différences de niveaux de vie dans le monde s’expliquent en partie par des dotations inégales en ressources naturelles. Le succès historique des Etats-Unis doit beaucoup à l’abondance et à la qualité de la terre américaine, parfaitement adaptée à l’agriculture. Certains pays du Moyen-Orient, comme le Koweït ou l’Arabie Saoudite, sont des pays riches simplement parce qu’ils ont la chance de posséder des réserves pétrolières colossales.

Si les ressources naturelles sont importantes, elles ne sont pas indispensables. Le Japon est par exemple l’un des pays les plus riches du monde alors qu’il est très pauvrement doté en ressources naturelles. Et cela, grâce au commerce international : le Japon importe les ressources naturelles dont il a besoin, comme le pétrole, et vend des produits manufacturés aux économies riches en ressources naturelles.

 

E ) Le savoir technologique. 

Le quatrième déterminant de la productivité, le savoir technologique regroupe l’ensemble des connaissances applicables au processus de production. Il y a un siècle, la plupart des Américains travaillaient aux champs, car la technologie agricole de l’époque nécessitait un travail énorme pour nourrir la population. Aujourd’hui, grâce au progrès technologique, une infime partie de la population suffit à nourrir tout le monde. Cette révolution technologique a permis de libérer du travail pour la production d’autres biens et services.

 

CHAPITRE 5 : LES STRUCTURES DE MARCHE : LE MARCHE DE CONCURRENCE PURE ET PARFAITE, LE MONOPOLE, L’OLIGOPOLE ET LE MARCHE DE CONCURRENCE MONOPOLISTIQUE.

 

Un marché est le lieu, concret ( Bourse, salon, foire…) ou abstrait, constitué par la rencontre de l’offre et de la demande pour un bien de qualité définie, avec détermination simultanée, en ce lieu et à cet instant, des quantités à échanger et du prix unitaire de ce bien. Il existe cependant différents types de marchés en fonction de certains critères de classification.

– La date de disponibilité du bien : on distingue le marché au comptant, décision d’échange et disponibilité sont simultanées et le marché à terme, décision et disponibilité sont séparés dans le temps.

– Le critère de l’espace pour les marchés concrets : on a le marché local quotidien ou hebdomadaire, le marché régional, le marché d’intérêt national, la foire internationale, le marché mondial donc unique.

– Le critère juridique : les marchés publics se distinguent des marchés ordinaires.

– La forme de la négociation ( les formes de marchés sont très nombreuses) : gré à gré (à l’amiable), enchères comportant différentes procédures.

– La structure, elle-même déterminée par les caractéristiques  du bien (homogénéité ou hétérogénéité), le nombre et la dimension des intervenants (atomicité ou molécularité), les conditions d’entrée et de sortie du marché et d’adaptabilité réciproque de l’offre et de la demande (fluidité ou viscosité), la qualité de l’information dont disposent les intervenants sur les paramètres du marché ( transparence ou opacité). Dans ce cas, le nombre théorique de marchés est encore plus grand. Le tableau de STACKELBERG, ci-dessous, résume les différentes structures  sur la base du critère du nombre d’agents pour l’offre et la demande, sachant que les produits sont homogènes, l’offre et la demande, sachant que les produits sont homogènes, l’offre et la demande fluide.

Demande/ Offre

 Un ( monopole)

Quelques (oligopole)

Infinité (polynucléaire)

Un (monopole)

Monopole bilatéral

Monopsone contrarié

Monopsone

Quelques (oligopole)

Monopole contrarié

Oligopole bilatéral

Oligopsone

Infinité (polynucléaire)

Monopole

Oligopole

Concurrence

L’objet de ce chapitre est d’analyser ces différents marchés en privilégiant les formes fondamentales de la concurrence pure et parfaite et du monopole. L’analyse sera faite principalement en termes d’équilibre partiel, c’est-à-dire qu’un seul marché sera pris en compte. Dans une première section, nous analyserons la concurrence pure et parfaite, dans une deuxième section, le monopole, dans une troisième section, nous aborderons la concurrence monopolistique, dans une quatrième et dernière section, nous analyserons l’oligopole, dans une cinquième section , nous nous interrogerons sur le fait de savoir pourquoi, il existe des structures de marché qui s’éloignent du modèle de concurrence pure et parfaite, en analysant notamment l’existence de barrières à l’entrée.

 

Section 1 : La concurrence pure et parfaite. 

Dans le langage courant, le terme de concurrence désigne la situation de lutte, (on dit d’ailleurs compétition en anglais ) qui existe soit entre demandeurs, soit entre offreurs. En théorie économique, la concurrence a un sens très différent : elle désigne une structure de marché comportant un grand nombre d’offreurs et de demandeurs. Lorsque, en plus, chaque intervenant est d’une si faible taille qu’il ne peut influencer le niveau des prix à lui seul (l’atomicité), que la liberté de vendre et d’acheter est totale (fluidité), que les intervenants sont parfaitement informés sur l’ensemble des prix ( transparence) et que les biens ou services sont rigoureusement identiques (homogénéité), la concurrence est dite pure et parfaite.

 

§ 1.1) Les prix et les quantités d’équilibre à court terme en concurrence pure et parfaite. 

L’entreprise, du fait de l’atomicité du marché, est un preneur de prix (en anglais, l’expression est price taker, que l’on oppose à price maker, faiseur de prix qui serait le comportement du monopoleur). Cela revient à dire que les prix est une donnée pour l’entreprise, elle ne peut pas l’influencer, quelle que soit la quantité qu’elle propose sur le marché. Par exemple, si le prix p est de 100 francs, l’unité, en vendant y, soit 10 unités produits du bien qu’elle produit, sa recette totale sera de 1000 Francs, en faisant l’opération suivante : RT = p x y.

En vendant , une onzième unité, elle reçoit 100 francs supplémentaires. L’augmentation de la recette totale à la suite de l’augmentation d’une unité du produit vendu constitue la recette marginale ( Rm = recette procurée par la dernière unité vendue). Le prix étant fixe, la recette marginale est alors égale à ce prix qui n’est autre que la recette moyenne, c’est-à-dire le rapport entre la RT et les quantités vendues (Q) : RM = RT/Q.

Cela veut dire que toutes les quantités mises sur le marché trouveront preneur.

Dans ces conditions, pour déterminer la quantité optimale ou quantité d’équilibre que l’entreprise doit livrer sur le marché, il suffira de confronter la recette totale prévisible et le coût total prévisible pour différentes quantités de bien, et de choisir celle qui dégage le profit le plus élevé. Un tel problème revient à rechercher la quantité pour laquelle le profit marginal est nul, on l’obtient en égalisant le coût marginal avec la recette marginale qui est ici confondue avec la recette moyenne. L’entreprise réalise un profit unitaire égal à la différence entre la recette moyenne et le coût moyen correspondant à la quantité optimale.

 

§ 1.2) L’existence de prix administrés : pénuries et excédents, une entrave à l’existence d’un marché de concurrence pure et parfaite. 

 

Le prix de marché est un indicateur de rareté qui assure en même temps une fonction d’allocation (ou de distribution) : les producteurs dont les coûts de production sont plus faibles que le prix seront les seuls offreurs et les demandeurs qui ont un revenu suffisant pour payer le prix seront les seuls satisfaits.

Les pouvoirs publics, par idéologie ou sous la pression de l’électorat ,sont susceptibles de renoncer au critère de l’allocation par le marché libre, qui ne tient aucun compte de l’intérêt social de l’activité, ou de l’insolvabilité d’une partie importante de la population qu’il serait « juste » d’aider.

Dans ces cas, les pouvoirs publics peuvent fixer autoritairement le prix afin d’aider soit les producteurs, soit les consommateurs. La pratique des prix administrés peut être un soutien des prix par la fixation de prix planchers en vue d’aider les producteurs. Le prix plancher conduit alors à une offre supérieure à la demande. Les excédents laitiers dans le Marché commun agricole en sont un exemple. L’institutionnalisation d’un salaire minimal d’un niveau élevé peut en engendrer un excés d’offre de travail sur la demande (chômage).

L’aide aux consommateurs consiste à fixer des prix plafonds pour certains produits et certains services. La demande est alors susceptible d’être supérieure à l’offre. Il en résulte une pénurie. Le blocage des prix dans le cadre des politiques anti-inflationnistes aboutissent au même résultat, c’est-à-dire à masquer la hausse des prix mais pas la cause consistant à une offre insuffisante. Le blocage des prix est ainsi un facteur d’aggravation de l’inflation, toute chose étant égale par ailleurs, notamment les anticipations.

 

Section 2 : Le monopole. 

 Le monopole est une structure de marché dans laquelle un seul offreur représente à lui seul la branche. Il existe, cependant, différents types de monopoles :

– Le monopole bilatéral 

C’est une structure comportant un offreur et un demandeur dans la branche. L’issue de cette rencontre est incertaine. L’équilibre peut être favorable soit à l’un, soit à l’autre ; tout dépend des rapports de forces, c’est-à-dire de l’intensité des besoins de l’un pour les produits de l’autre, sachant que l’offre est une demande réciproque. La théorie des jeux inaugurée par VON NEUMANN et MORGENSTERN.

– Le monopole contrarié  

C’est une confrontation entre un offreur et quelques demandeurs qui peuvent se coaliser pour transformer la structure en monopole bilatéral si l’offreur est trop exigeant.

– Le monopole discriminant

C’est une situation dans laquelle l’offreur propose le même type de bien à des prix différents, soit dans des espaces séparés, la différence de prix doit être inférieure aux coûts de transport entre les deux espaces pour ne pas se faire concurrence par ses propres produits dans la zone à haut prix, soit ; lorsqu’il s’agit de services, à des demandeurs n’ayant pas les mêmes possibilités d’achat.

– Le monopole pur 

C’est une situation intéressante, car c’est une structure de marché caractérisée par la présence, d’une part d’un seul offreur pour un produit n’ayant pas de substitut et, d’autre part, par un grand nombre de demandeurs. Bien que le monopole pur soit théorique, il existe des cas de réels monopoles proches du modèle théorique. Un monopole, dans ce cas, peut être conféré par la puissance publique ou la loi. Il y a ainsi le monopole privé de l’inventeur pour exploiter son brevet, le monopole public dans certains domaines permettant à l’Etat se procurer des revenus ou d’orienter l’économie, comme c’est le cas pour le commerce extérieur dans certains pays en voie de développement , ou pour la distribution d’électricité en France. Le monopole peut aussi résulter d’une supériorité de la firme vis-à-vis de concurrents potentiels, se traduisant par l’infériorité de ses coûts. Dans ce cas, on parle de monopole naturel, c’est-à-dire toutes les activités qui sont constituées en réseau sont en réalité des monopoles naturels, par exemple, les trains, la distribution d’électricité, la distribution de gaz.

 Section 3 : La concurrence imparfaite et les autres structures de marché. 

 La concurrence pure et parfaite et le monopole pur sont deux structures très abstraites. La réalité est composée de structures intermédiaires qui ont pour nom oligopole, concurrence monopolistique.

A ces formes intermédiaires de concurrence imparfaite ou non pure, on doit ajouter le cas particulier du monopsone qui est le symétrique du monopole.

– Le marché avec un seul acheteur : le monopsone 

Le monopsone est une structure de marché comportant un demandeur face à un grand nombre d’offreurs.

– La concurrence monopolistique 

La concurrence monopolistique, appelée quelquefois concurrence imparfaite, est une structure mise en évidence de manière quasi simultanée par CHAMBERLAIN et ROBINSON, au début des années 1930. Elle tient à la fois de la concurrence par le grand nombre d’intervenants, par la transparence, par la fluidité, et du monopole par l’hétérogénéité apparente des biens. La différenciation des produits par l’emballage, les marques, la durée de garantie, le service après-vente, la présentation générale, etc., donne l’impression que chaque offreur est un monopoleur. De ce fait, chaque offreur dispose d’une certaine autonomie pour fixer son prix.

Pour une automobile, par exemple, les caractéristiques importantes seront la taille, les performances, la consommation d’essence et la sécurité. Comme les entreprises vendent des produits légèrement différents, elles peuvent vendre à des prix légèrement différents.

Le cas classique de concurrence monopolistique est celui de marché de détail de l’essence. Vous pouvez aller à la station ELF voisine, même si vous payez plus cher, parce qu’elle est sur le chemin de votre travail. Mais si son prix monte de plus de quelques centimes au dessus de la concurrence, vous prendrez votre essence en faisant vos courses à l’hypermarché.

Cet exemple, illustre ainsi qu’une source importante de différenciation des produits réside dans leur localisation. Cela vous prend du temps d’aller à la banque ou chez l’épicier, et le temps nécessaire à l’accession modifie vos choix d’achat. Dans le langage des économistes, le coût d’opportunité total des marchandises ( y compris le coût en temps) dépend de la distance de votre domicile au magasin . Comme le coût d’opportunité des boutiques du voisinage est plus faible, les gens tendent généralement à y aller. Cette remarque explique aussi pourquoi les grands centres commerciaux sont si populaires : ils permettent d’acheter une grande variété de produits en limitant le temps passé à le faire. La différenciation des produits qui découle de différentes localisations est une raison importante à leur tendance à devenir des marchés concurrentiels monopolistiques.

 

Section 4 ) Les oligosituations : de l’entente au combat. 

 – Les oligo-situations peuvent être :

– un oligopole : quelques offreurs et un grand nombre de demandeurs ;

– un oligopsone : quelques demandeurs et un grand nombre d’offreurs ;

– un oligopole bilatéral : quelques offreurs et quelques demandeurs.

 Le faible nombre d’agents d’un côté et/ou de l’autre ( le préfixe oligo signifiant quelques) est susceptible, par des ententes, des cartels, des consortiums, des trusts, des konzerns, des pools, des centrales d’achat, de transformer une oligo-situation en un monopole ou en un monopsone ou en un monopole bilatéral. Toutes ces associations d’offreurs et/ou de demandeurs sont généralement interdites lorsqu’elles aboutissent à l’abus de positions dominantes, faussant les règles de la concurrence. L’oligopole, en principe, est caractérisé par des entreprises de grande taille, mais certaines sont plus grandes que d’autres. Par conséquent, il peut y avoir des leaders et des suiveurs, mais en tout cas, du fait de la dimension, chaque entreprise, quelle que soit sa position  par rapport aux autres, est susceptible d’influencer à elle seule le niveau du prix du marché. Cela revient à dire que toutes les conditions de la concurrence pure et parfaite sont réunies, sauf celle de l’atomicité du côté des offreurs. Ceux-ci présentent un caractère particulier qui est celui de l’interdépendance, c’est-à-dire que l’action de l’un n’est pas sans conséquence pour les autres.

– Les oligopoles de combat. 

L’interdépendance associée à l’incertitude sur le comportement de chacun des offreurs peut déboucher sur la flexibilité, soit des prix, soit des quantités. Ces phénomènes sont associés à des oligopoles de combat dont les formes théoriques les plus simplifiées sont le duopole de COURNOT, le duopole de STACKELBERG, le duopole de BOWLEY et le duopole de BERTRAND. Les noms de ces duopoles correspondent aux auteurs qui les ont étudiés.

 

– Le duopole de COURNOT

Le duopole de COURNOT est dit symétrique ou de double dépendance. Dans ce marché, le prix dépend des quantités offertes par A et par B. Chacun cherche à maximiser son profit sans exclure l’autre. Si A se croit seul sur le marché, il offre une quantité compatible avec le prix du marché, mais si B se manifeste, alors il réduit son volume en fonction de ce qu’il considère comme une donnée. B, à son tour, augmente sa part, amenant A, puis de B. Le système débouche sur un équilibre correspondant à l’intersection des courbes de réaction de A et de B.

– Le duopole de STACKELBERG 

C’est un duopole qui est dit asymétrique, c’est-à-dire que l’un des duopoleurs est central, l’autre acceptant de jouer le rôle de satellite.

– Le duopole de BERTRAND est dit de double maîtrise par les prix 

Dans ce cas, chaque duopoleur fixe le prix auquel il vendra son produit en considérant le prix du concurrent comme une donnée. Lorsque les prix sont différents, on comprend que la demande s’orientera plutôt vers le duopoleur ayant le prix le plus bas, sachant que les produits sont homogènes. Un tel comportement débouche logiquement sur une guerre des prix.

 Une des caractéristiques importantes dans toutes les structures de marché que l’on vient d’étudier, c’est le fait qu’il n’existe de nombreux secteurs pour lesquels seules quelques entreprises peuvent effectivement y pénétrer ce qui suppose qu’il existe un certain nombre de barrières à l’entrée, ce que nous allons étudier dans le cas présent.

 

CHAPITRE 6 : LES GRANDS COURANTS DE LA PENSEE ECONOMIQUE     

Les écrits à résonance économique sont quasiment aussi anciens que l’écriture, mais les analyses, c’est-à-dire l’effort de théorisation d’une manière autonome de la morale sont beaucoup plus récentes. La Bible puis les philosophes grecs, quelques auteurs romains, les pères de l’Eglise et les scolastiques, les mercantilistes et enfin les physiocrates constituent cependant pour les Occidentaux le mouvement précurseur de la science économique moderne.

 

Section 1 : La pensée économique pré-classique. 

Nous allons dans un premier temps, nous intéresser aux deux théories qui ont précédé la théorie classique : la théorie mercantiliste et la physiocratie.

 

§ 1.1) Les mercantilistes. 

Les premiers économistes paraissent avec les différents courants mercantilistes, à partir du XVI ème siècle, qui prônent l’intervention de l’Etat et le développement de l’industrie et du commerce, tandis que certains auteurs regardent du côté de PLATON et envisagent des systèmes socialistes . En plus de ces éléments qui font des mercantilismes une troisième voie entre le marché et le socialisme, leurs caractères communs sont : la pratique de taux d’intérêt bas pour faciliter les investissements et ne pas encourager l’épargne nuisible aux débouchés pour les produit, l’instauration des droits de douane sur les produits manufacturés étrangers. Les différences entre les mercantilismes tiennent principalement aux spécificités nationales.

– Le mercantilisme ibérique.

On peut définir cette forme de mercantilisme par le fait que le rôle de l’Etat est d’obtenir les plus grandes réserves d’or possible. On parle de bullionisme également dans le cas présent. On peut citer les noms d’ORTIZ et de SIERRA comme chefs de file de ce courant.

– le mercantilisme français. 

Ce mercantilisme français a connu deux versions : l’une, l’agrarianisme considère que l’agriculture est le moyen de se procurer les richesses ( SULLY, OLIVIER DE SERRE), l’autre, l’industrialisme colbertisme s’appuie sur les manufactures et le commerce ( BODIN, DE MONTCHRESTIEN, DE LAFFEMAS,RICHELIEU et COLBERT).

Il convient dans le cas présent d’expliciter un peu plus ce que l’on appelle le « Colbertisme ». Il implique de faciliter la circulation des matières premières notamment en favorisant les importations. Avec les matières premières, les manufactures vont les transformer en marchandises qu’il conviendra d’en favoriser ultérieurement les exportations. L’Etat se doit de développer les manufactures royales, par exemple, celle des Gobelins.

– Le mercantilisme anglais et hollandais. 

Dans le cas présent, on accorde une attention particulière au commerce, il insiste beaucoup plus que tous les autres sur l’abondance de monnaie comme facteur de la croissance des activités et le rôle des manipulations de la parité de la monnaie pour équilibrer la balance commerciale et réduire l’endettement externe.

Parmi un grand nombre d’auteurs dont les contributions méritent un vif intérêt, PETTY et CANTILLON occupent une place à part . Le premier expose de manière moderne la théorie de la valeur-travail, établit un système de comptabilité nationale qui en fait un précurseur de l’économétrie. L’un des titres de gloire est la mise en évidence de l’effet multiplicateur.

Le second s’inscrit dans un néo-mercantilisme inauguré par BOISGUILBERT qui commence à critiquer l’intervention de l’Etat. CANTILLON valorise le rôle de l’entrepreneur dont le mot est utilisé pour la première fois. Il précède de la sorte de SAY et SCHUMPETER. Il définit également pour la première fois la vitesse de circulation de la monnaie : nombre de transactions que permet de réaliser une unité monétaire au cours d’une période.

– Le caméralisme 

En Allemagne, de manière plus tardive, le mercantilisme a pour fondement la science camérale, c’est-à-dire la science des finances publiques. La caméralisme s’intéresse à la fiscalité comme moyen d’incitation et d’orientation de l’activité économique. Ce courant, illustré par VON JUSTI et plus tard LIST.

– Le fiduciarisme 

LAW, à la suite de l’invention du billet de banque par le Suédois PALMSTRUCK, préconise de développer le financement de l’économie par la création monétaire, sans que celle-ci soit fondée sur un dépôt d’or préalable. Le système de LAW a été appliqué en France. Les émissions inconsidérées de papier monnaie ont entraîné la faillite de la banque de LAW.

 

§ 1.2 ) Les physiocrates. 

Ce courant se développe essentiellement en France, avec comme chef de file QUESNAY, auteur en 1758 du célèbre Tableau économique. Les autres auteurs importants furent notamment TURGOT et MIRABEAU.

Par rapport aux concepts analysés plus haut, les physiocrates se reconnaissent dans les points suivants.

a ) L’existence de lois naturelles 

Etymologiquement « physiocratie » signifie « gouvernement de la nature ». Cet ordre naturel repose sur le sacro-saint principe de la propriété privée ( foncière)  source majeure de la prospérité du monde.

b ) L’existence de classes sociales 

Trois classes sont à distinguer :

– La classe productive : celle des agriculteurs car seule l’agriculture est considérée comme productive; elle seule peut fournir un surplus, un produit net;

– La classe des propriétaires fonciers chargés d’effectuer les avances qu’ils récupèrent au terme du processus de création des richesses ;

– La classe stérile comprend toutes les autres catégories sociales (artisans, commerçants, magistrats, policiers, militaires…) qui ne font que transformer des produits existants.

c ) Une approche macro-économique de l’activité économique 

QUESNAY dans son tableau cherche à mettre en évidence les inter-relations économiques existant entre les 3 classes sociales. Il s’agit de la première analyse en termes de circuit économique.

d ) La nécessité de la liberté 

C’est le corollaire de la propriété privée. En cela les physiocrates s’opposent à la pensée mercantiliste et annoncent l’école classique. L’aspiration à la liberté s’explique d’ailleurs par l’évolution économique et sociale : les réglementations économiques et sociales, nombreuses sous l’Ancien Régime, sont de plus en plus ressenties comme des entraves insupportables par la bourgeoisie marchande et industrielle qui juge désormais gênantes les interventions de l’Etat et le système des corporations.

 

Section 2 ) L’école classique. 

La pensée classique va se développer à partir de 1770 environ; elle dominera la pensée économique pendant près d’un siècle avant d’être supplantée dans ce rôle par l’analyse néo-classique. Dès le milieu du XIX ème siècle, elle sera à la fois approfondie et critiquée par MARX.

On peut distinguer comme principaux auteurs : SMITH, MALTHUS, RICARDO, JS.MILL et SAY.

Certes la pensée de ces auteurs est multiforme et parfois divergente et il peut paraître utopique de vouloir les regrouper en une seule école. Néanmoins quelques bases fondamentales leur sont communes, c’est pourquoi le terme d’école classique a pu être forgé. Ce sont ces convergences que nous voulons mettre en évidence.

 

§ 2.1) Un monde en complet bouleversement. 

La pensée classique ne peut se comprendre qu’en relation avec les profondes transformations de l’époque. Le monde que vivent les auteurs classiques est en profonde mutation. C’est sur ce contexte évidemment important qu’il apparaît nécessaire d’attirer en premier lieu l’attention en examinant les principales transformations.

 

A ) Croissance démographique 

A partir du milieu du XVIII ème siècle, la population britannique va croître rapidement du fait notamment du recul de la mortalité ( de 40%° à moins de 30%°) alors que la natalité se maintient aux alentours de 40%°. De ce fait la population de la Grande-Bretagne passe de 7,5 millions en 1750 à 15 millions en 1800 puis 23 en 1850.

La France connaîtra un mouvement identique mais de moindre ampleur (23 millions d’habitants en 1750, 27,3 en 1800 et 35,7 en 1850).

 

B ) Révolution agricole 

L’accroissement démographique entraîne une augmentation de la demande de biens essentiels : nourriture, vêtements… L’agriculture féodale, incapable de répondre à cette nouvelle demande, doit se transformer. Elle le fera par le mouvement des « enclosures », lois qui obligent d’ériger des clôtures autour des champs individuels et communaux. Seuls les plus riches peuvent se soumettre à cette réglementation ; les pauvres n’ont pas le choix, ils sont contraints de vendre et de quitter leurs terres. Cela permet  un remembrement des terres, facteur de productivité, et entraîna un important exode rural poussant vers les villes une main-d’oeuvre peu qualifiée qui sera utilisée à bon compte par l’industrie naissante.

La révolution agricole sera aussi marquée par d’importantes innovations techniques ( par exemple : suppression de l’assolement triennal et de la pratique de la jachère) et par l’apparition de nouvelles cultures.

 

C ) Révolution industrielle. 

A partir du dernier tiers du XVIIIème siècle, le machinisme va se généraliser à toutes les branches d’activité avec de nombreuses inventions techniques ( navette volante en 1733, machines à filer en 1765, métier à tisser en 1785, puddlage qui permet d’affiner la fonte en 1784…). La période se caractérise aussi par l’utilisation de forces motrices qui ne sont plus simplement naturelles mais qui sont produites par des activités humaines ( machines à vapeur mise en service en 1784).

La fin du XVIIIème va donner naissance aux « fabriques » caractérisées par le regroupement, dans des locaux particuliers, des ouvriers autour des machines mues par un moteur central. Il en résulte une division du travail très poussée, une parcellisation des tâches nécessaire face à une main-d’oeuvre peu formée et puissant facteur de productivité. Cela va entraîner aussi une séparation de plus en plus nette entre le capitaliste chargé d’apporter les capitaux nécessaires en quantités de plus en plus importantes et une main d’oeuvre peu qualifiée mais aussi peu payée, avec des conditions de travail très pénibles.

L’essor de l’industrie moderne s’accompagne de la naissance et du développement dans les centres industriels d’un prolétariat misérable, avec une montée puissante du chômage aggravé d’un exode rural de plus en plus fort. Les conditions de travail furent particulièrement pénibles aux femmes et aux enfants; les fabriques utilisèrent notamment, dans des conditions souvent odieuses, des bataillons d’enfants assistés qui leur étaient envoyés par les paroisses.

 

§ 2.2 ) Les bases de l’analyse classique. 

C’est dans ce contexte économique et social que les classiques construisent leur pensée économique. Celle-ci s’articule autour de quelques points fondamentaux.

 

A ) Une analyse en termes de classes sociales. 

Les auteurs classiques distinguent trois classes : les salariés, les capitalistes et les propriétaires fonciers. Ces classes disposent de revenus de nature différente et « déterminer les lois qui régissent cette répartition, voilà le principal problème de l’économie politique ».

De plus, ces classes sont antagoniques et vont s’opposer dans la répartition du revenu ; « Dans tout de cours de cet ouvrage, j’ai cherché à prouver que le taux des profits ne peut jamais hausser qu’en raison d’une baisse des salaires » (RICARDO, 1807).

Enfin les salaires resteront fixés à un minimum même s’il s’agit pour RICARDO d’un minimum d’ordre sociologique et non uniquement physiologique. « Il y a bien des choses qui constituent aujourd’hui le bien être du paysan anglais et qu’on aurait regardées comme les objets de luxe à des époques reculées de notre histoire.

 

B ) Une analyse basée sur la valeur-travail. 

D’autres auteurs avaient envisagé la notion de valeur-travail avant les classiques mais ceux-ci furent les premiers à la mettre au coeur de leur analyse. Le principe de la détermination de la valeur par la quantité de travail incorporée sera généralisé au travail indirect : le travail indirect concerne le capital qui est considéré comme du travail passé, emmagasiné. Il en résulte que la valeur d’échange d’une marchandise est déterminée par la quantité de travail direct et indirect c’est-à-dire la partie du capital qui a été nécessaire pour fabriquer le bien. Exemple : si une machine nécessite pour sa fabrication 1000 heures de travail et si elle permet de fabriquer 500 unités d’un bien A avant d’être complètement usée, alors la valeur d’une unité de bien A devra incorporer 2 heures de travail indirect à ajouter au travail direct nécessaire pour fabriquer une unité de A.

 

C ) Absence de crise de surproduction et libéralisme.

Considérant qu’il ne peut y avoir de crise globale de surproduction les auteurs classiques ne peuvent que conclure, dans l’ensemble, à la nécessité du libéralisme. L’Etat doit intervenir le moins possible et uniquement pour réprimer ceux qui ne respectent pas la règle du jeu. C’est la règle du « laisser-faire, laisser-passer ».

Le mécanisme impersonnel du marché permet d’harmoniser les intérêts individuels et assure qu’en recherchant son intérêt personnel chacun travaille à l’intérêt de tous. C’est la thèse de la « main invisible » de SMITH qui sert de fondement à ce principe libéral.

Enfin les auteurs classiques se reconnaissent dans une approche d’ordre macro-économique : ils négligent l’analyse individuelle au profit d’une analyse en termes de classe.

En définitive les classiques sont très proches de l’idéologie révolutionnaire de la fin du XVIII ème siècle. Ils ont été profondément marqués par les idées du « siècle des Lumières » et, à leur tour, ils joueront un rôle important dans le développement du libéralisme économique centré sur les idées de 1789. Ils défendent la propriété privée et les libertés individuelles, seules garantes du bonheur des hommes. Ils ont sous les yeux une économie en complet bouleversement, émerveillés par la richesse que représente le développement de ces nouvelles activités, ils seront les avocats convaincus du capitalisme naissant.

 

Section 3 ) La théorie marxiste. 

Les classiques ont assisté à la naissance du capitalisme ; ils y ont vu un facteur de progrès et de libération. MARX verra surtout toutes les tensions sociales qu’il engendre, les chômeurs, « l’armée industrielle de réserve » exclus des campagnes qui s’entassent dans les villes, les conditions de travail inhumaines. Il suffit de lire le rapport VILLERME de 1840 ou les livres de ZOLA pour comprendre ce qu’était la condition ouvrière à cette époque.

On comprend dans ce contexte que naisse une économie politique qui ne soit pas l’apologie du libéralisme et de la propriété privée et qui développe l’idée qu’un autre système, le socialisme, puisse ou doive se substituer au capitalisme. MARX voudra donner au socialisme un contenu scientifique et, de ce fait, s’opposera aux socialistes utopiques du début du XIX ème siècle (Saint-Simon, Sismondi, Fourier,Proudhon).

Philosophe, sociologue, économiste, MARX fournira une oeuvre immense dont on peut extraire : Le manifeste du parti communiste (1847) et Le capital (1867). MARX reprendra un certain nombre de thèmes déjà présentés par l’analyse classique et, à partir de ceux-ci, il développera une nouvelle analyse économique.

 

§ 3.1 ) La reprise des thèmes classiques. 

MARX développe une approche macro-économique : ce n’est pas le comportement de l’individu en tant que tel qui l’intéresse mais ce sont les comportements de classes qu’il convient d’étudier. La société est divisée en classes, chacune d’entre elles joue un rôle spécifique et a une place particulière dans le mode de production capitaliste. Entre ces classes vont se nouer des relations antagoniques, vont exister des flux ; c’est ce qui doit être au coeur de l’analyse économique.

MARX fera de la valeur-travail la base de son analyse ; il se différenciera cependant de RICARDO en reprenant le concept de travail socialement nécessaire et celui de force de travail. Cela lui permettra de déboucher sur la notion de plus-value et d’exploitation.

MARX soutiendra qu’il n’existe pas de lois économiques universelles mais uniquement des lois sociales. Ce ne sont pas les mêmes lois qui peuvent expliquer le comportement de Robinson sur son île et celui de l’homme socialisé dans le capitalisme. Ce sont donc ces lois spécifiques au capitalisme qu’il convient d’étudier.

 

§ 3.2 ) Une nouvelle approche de l’économie. 

Nous retiendrons ici que les principaux éléments de cette nouvelle approche.

 A ) L’exploitation 

A partir de la plus value, MARX mettra en évidence la notion d’exploitation. La plus-value est un prélèvement d’une partie de la valeur créée par le travail de l’ouvrier; c’est parce que l’ouvrier ne reçoit pas toute la valeur qu’il a créée par son travail qu’il y a exploitation.

 B ) Accumulation et baisse tendancielle du taux de profit. 

Comme RICARDO, MARX pense qu’il existe une tendance de longue période à la baisse du taux de profit. Pour RICARDO cela ne mettait pas en cause la survie du système capitaliste mais devait mener à l’état stationnaire par manque d’incitation à investir de la part des entreprises du fait de la baisse du taux de profit. A la différence de RICARDO, MARX est convaincu que la baisse tendancielle du taux de profit engendrera l’effondrement du système capitaliste.

Le taux de profit correspond chez MARX au rapport entre la plus-value et le capital total avancé par le capitaliste c’est-à-dire à la fois le capital variable V (salaires avancés par le capitaliste pour payer les ouvriers) et le capital constant C ( machines et matières utilisées dans la production), on a donc :

taux de profit r = Pl / C+V

 MARX appelle taux de plus-value le rapport entre la plus-value et le capital variable soit :

Pl / V

Le taux de profit peut donc s’exprimer de la manière suivante :

r = Pl /V // C/V + V/V

 La concurrence entre les capitalistes met chacun d’eux devant le choix suivant : croître en accumulant le capital (c’est-à-dire en réinvestissant une partie de la plus-value dans des machines et en substituant ainsi du capital constant C au capital variable V) ou disparaître.

Pour ne pas disparaître, les capitalistes sont donc contraints à accumuler du capital constant ; il y a donc une tendance à la hausse de la composition organique du capital C/V d’où il ressort forcément que la taux de profit ne peut que baisser.

Mais il s’agit chez MARX d’une loi tendancielle, elle ne signifie pas que chaque jour depuis que le capitalisme existe, le taux de profit baisse . Des effets peuvent contrecarrer cette baisse et notamment l’augmentation du taux de plus-value soit en faisant travailler plus longtemps les ouvriers ( c’est ce qui s’est passé au début du capitalisme) , soit en augmentant la productivité du travail ce qui diminue la valeur de la force du travail ( le temps qu’il faut pour fabriquer les biens nécessaires à reconstruction).

La baisse du taux de profit peut être aussi freinée par la diminution de C, ce qu’on appelle la dévalorisation du capital, du fait notamment du progrès technique qui diminue la valeur de C ( il faut moins de temps pour fabriquer la même machine).

Pour MARX, les contre-tendances qui freinent la baisse du taux de profit ne peuvent avoir que des effets partiellement compensateurs et, à terme, la baisse du taux de profit est inéluctable : »Alors que la hausse de la composition organique (C/V) peut se poursuivre sans limite apparente, il existe une limite interne aux possibilités d’augmenter la plus value… la tendance à la hausse de la composition organique est dominante.

Cette substitution du capital au travail a pour conséquence le développement du chômage ( la constitution de « l’armée industrielle de réserve »). Il n’est donc pas étonnant que les ouvriers se soient révoltés contre l’introduction des machines dans les usines : révoltes des canuts lyonnnais en 1744. Les exemples de « Ludisme », c’est-à-dire de bris de machines ( du nom d’un certain LUDD, briseur de machines, fameux et peut-être mythique), se multiplient au début du XIX ème siècle.

MARX ne s’opposera pas au machinisme mais mettra en cause la façon dont celui-ci se développe dans le cadre du mode de production capitaliste : »Il faut du temps et l’expérience avant que les ouvriers, ayant appris à distinguer entre la machine et son emploi capitaliste, dirigent leurs attaques non contre le moyen matériel de production mais contre son mode social d’organisation ».

 

C ) Les crises capitalistes. 

Selon l’approche marxiste la crise est inévitable en système capitaliste. La crise provient de l’existence de la production marchande : les biens sont produits non pour l’utilisation immédiate mais en vue de l’échange. Contrairement à RICARDO et à SAY qui considèrent la monnaie comme un voile sans effet sur les échanges, MARX reconnaît les conséquences de la monnaie. La monnaie est l’instrument qui rompt le troc : le schéma « Marchandise-Marchandise » (M-M’) est remplacé par le schéma Marchandise-Argent-Marchandise ( M-A-M’). Cela remet en cause la loi des débouchés ; tout achat ne garantit pas une vente simultanée.

De plus, dans le monde de production capitaliste, la production n’est pas coordonnée; l’investissement est réalisé dans les branches où les taux de profit sont les plus élevés sans qu’il y ait nécessairement adéquation avec les besoins réels. C’est a posteriori que s’exerce la régulation : ce n’est que lorsque les marchandises sont mises en vente sur le marché que l’on constate si on en a trop ou pas assez.

L’absence de coordination a priori, l’anarchie du système de production capitaliste, le profit capitaliste comme seul moteur de l’investissement rendent donc possible en permanence et pour tous les biens un désajustement entre quantités fabriquées et besoins.

Mais, pour l’essentiel, la crise capitaliste doit s’interpréter comme une crise de surproduction de la valeur d’échange, ce qui signifie qu’une partie de la valeur d’échange créée dans la production ne peut être réalisée, c’est-à-dire vendue à sa valeur faute de trouver une contrepartie suffisante sur le marché. Il y a une double origine à cette surproduction :

– d’une part les capitalistes cherchent à limiter le plus possible les salaires (minorer la force de travail) afin de dégager le maximum de plus value. Cela freine les possibilités de réalisation de la valeur ;

– d’autre part, comme on l’a vu, les capitalistes sont contraints par la concurrence à accumuler de plus en plus donc à remplacer du capital variable par du capital fixe ce qui développe le chômage, freine les salaires et limite de la même façon les possibilités de réalisation de la valeur.

Ainsi la crise de surproduction n’apparaît pas parce que les besoins sont satisfaits ; il n’y a pas surabondance de produits par rapport aux besoins.

C’est le profit des capitalistes qui limitent la production, non le besoin des producteurs. La crise se manifeste parce qu’il arrive un moment, dit MARX, où le marché semble trop étroit pour la production ». L’excès d’offre par rapport à la demande effective se traduit pas par la mévente d’une partie de la production d’où baisse des prix et du profit et contraction des échanges. Le taux de profit ayant baissé les capitalistes ralentissent leurs investissements ; ils cessent, partiellement ou totalement, de transformer leur plus-value en capital. La baisse du taux de profit entraîne aussi faillites, fermetures d’usines et licenciements.

 

Section 4 ) L’école néo-classique. 

Au début des années 1870, trois auteurs ont découvert à peu près simultanément des outils d’analyse nouveaux : il s’agit du Britannique JEVONS, du Français WALRAS et de l’Autrichien MENGER. Ces trois auteurs vont être les fondateurs, avec MARSHALL, de l’école néo-classique.

 

§ 4.1 ) Pourquoi une école néo-classique ?. 

Plusieurs raisons expliquent l’avènement de cette nouvelle théorie. On peut notamment signaler les critiques dont était victime la théorie classique de la part, en particulier, d’Auguste COMTE. Il avançait l’idée de remplacer l’économie politique par la sociologie car l’économie politique ne peut être une véritable science, au contraire de la sociologie qui peut être construite à partir d’une part de l’observation des faits; d’autre part de l’examen des « cas pathologiques » qui fournissent l’équivalent d’une expérimentation et enfin de l’expérimentation historique.

Le libre-échangisme prôné par la théorie classique était aussi fortement critiqué par des économistes américains ( tel que COOPER) ou allemands ( LIST) qui voyaient dans un certain degré de protectionnisme une condition nécessaire pour permettre aux industries de leurs pays respectifs de lutter efficacement contre la concurrence anglaise. Mais il semble que la principale raison se situe dans le fait que la théorie classique avait parfaitement correspondu aux intérêts de la bourgeoisie industrielle naissante face à l’aristocratie foncière déclinante ( le libre-échange en est probablement l’exemple le plus évident). Mais une fois sa domination assurée, la bourgeoisie industrielle ne voyait plus dans la théorie classique que ses inconvénients notamment lorsqu’elle affirme l’existence de classes opposées et le fait que tout produit obtenu n’est que le résultat du travail et que le profit est un prélèvement sur le produit du travail. Parallèlement le marxisme, avec son thème de l’exploitation ouvrière et de l’inéluctabilité des crises capitalistes, était de plus répandu dans la classe ouvrière (exemple de la Commune de Paris).

Remplacer une analyse de la société fondée sur des classes antagoniques par une « théorie des harmonies universelles » et donner une légitimité au profit semblait devenu nécessaire face à la montée de la théorie marxiste. C’est ce à quoi devait s’attacher l’analyse néo-classique.

 

§ 4.2 ) Le contexte général de la pensée néo-classique. 

Les néo-classiques restent en partie marqués par la pensée classique puisqu’ils sont de farouches défenseurs de la propriété privée et de l’individualisme libéral. Mais, alors que les classiques mettent l’accent sur les problèmes de l’accumulation du capital, de la croissance économique et du devenir du système économique, les néo-classiques s’attachent à déterminer comment les agents peuvent procéder à la meilleure utilisation possible des biens dont ils disposent, qu’il s’agisse de facteurs de production pour les producteurs ou des biens de consommation pour les consommateurs. La théorie classique du développement est ainsi remplacée par un raisonnement en termes d’équilibre général dans un cadre statique et il s’agit de trouver les modalités d’affectation, d’allocation des ressources rares. Cette approche est fort bien synthétisée par la définition de ROBBINS: « La science économique est la science qui étudie le comportement humain comme une relation entre des fins et des moyens rares à usages alternatifs ».

 

A ) Valeur-utilité et raisonnement à la marge chez les néo-classiques. 

Les économistes néo-classiques s’opposent à la notion de valeur-travail et mettent au coeur de leur analyse le concept de valeur-utilité mais ils vont s’intéresser plus particulièrement à l’utilité de la dernière unité de bien détenue : l’utilité marginale. L’utilité moyenne d’une certaine quantité de biens et l’utilité de la dernière unité ne se confondent pas et, selon les néo-classiques, c’est cette dernière qu’il faut prendre en considération car c’est elle qui fonde le comportement des individus. Il s’agit d’un raisonnement à la marge ; à chaque achat le consommateur choisira le bien qui a l’utilité marginale la plus élevée.

Ce raisonnement à la marge sera généralisé à toutes les variables qu’il s’agisse des prix, des salaires, des profits, des facteurs de production, etc. L’individu pourra, par ce raisonnement, maximiser l’objectif qu’il s’est fixé.

Les néo-classiques affirmeront le principe de l’utilité marginale décroissante lorsque la quantité du bien consommée augmente : la 1 ère unité consommée apportera plus de satisfaction que la 2 ème qui, elle-même, en apportera plus que la 3ème,etc. Il s’agira alors pour l’individu d’obtenir le maximum d’utilité compte tenu de la décroissance de l’utilité marginale et de l’augmentation des coûts d’obtention des biens. Le problème sera donc pour l’individu de choisir comment il va affecter ses ressources, rares par rapport à l’immensité de ses besoins, à l’achat des différents biens afin d’obtenir le maximum de satisfaction.

Ce qui est vrai pour l’individu-consommateur l’est aussi pour l’individu-producteur. L’entreprise dispose d’une certaine somme dont il va se servir pour acheter les facteurs de production. On considère généralement qu’il y a 2 facteurs de production : le travail et le capital. A chacun s’applique la notion de productivité marginale : productivité de la dernière unité de travail utilisée (dernier ouvrier, dernière heure de travail…) et de la dernière unité de capital (dernière machine, dernier outil…).

Comme l’utilité marginale, la productivité marginale est décroissante et le problème du producteur sera de savoir quelle quantité de capital et quelle quantité de travail il achète. Il doit donc déterminer sa combinaison productive (quantité de capital/ quantité de travail) sachant que, pour obtenir une certaine quantité d’un bien, une infinité de combinaisons productives existent ( on peut toujours remplacer une dose de capital par une certaine quantité de travail et vice versa pour obtenir une même quantité de biens).

 

B ) Homo oeconomicus et micro-économie chez les néo-classiques. 

L’école néo-classique sera la première à fonder sa théorie exclusivement sur une démarche micro-économique au coeur de laquelle on trouve l’homo oeconomicus. Comme on l’a vu précédemment, l’homo oeconomicus versus producteur.

De même, en généralisant ce comportement de l’homo oeconomicus à l’ensemble de la société et en considérant que celle-ci se comporte comme chaque individualité la composant, l’école néo-classique mène une analyse micro-économique excluant tous phénomènes sociaux, toutes dimensions sociales du comportement, tous conflits entre groupes sociaux ou classes sociales…

L’analyse est donc particulièrement réductrice; elle se ramène à un problème de « maximisation sous contrainte » (d’où l’importance de l’outil mathématique dans cette approche) d’un agent économique. Ainsi on raisonne, pour l’essentiel, dans un cadre d’équilibre partiel sur un marché. L’équilibre général ( c’est-à-dire au niveau de la société) se présente alors comme une simple juxtaposition d’équilibres partiels.

L’attention va ainsi se porter sur les problèmes d’équilibre instantané entre offre et demande sur les différents marchés; l’impact du temps sur la vie économique, la dynamique sera alors oublié. Une partie importante de l’analyse sera de ce fait consacrée à la description des marchés et aux conditions nécessaires pour que se réalise un marché parfait parfaitement utopique sur lequel l’homo oeconomicus pourra développer à la perfection sa rationalité.

Tout ce qui n’entre pas dans la logique du marché (exemple : biens collectifs, services publics…) soit sera analysé comme une exception à la règle générale, soit sera considéré comme des imperfections conduisant à un « sous-optimum » (ou optimum de second rang) et par là même devra être combattu parce qu’inefficace au sens où ces phénomènes empêchent une optimisation parfaite.

 C ) Economie néo-classique et absence de crises de surproduction. 

Les économistes néo-classiques se reconnaissent pleinement dans la loi des débouchés de JB.SAY. L’idée de crise de surproduction leur est donc tout à fait étrangère. Quant aux déséquilibres partiels qui peuvent apparaître sur tel ou tel marché. Ils estiment qu’ils se résorberont très rapidement (instantanément même selon certains auteurs) par le simple mouvement des prix.

Ce mécanisme de réajustement par le mouvement des prix joue sur tous les marchés y compris ceux des facteurs de production et notamment du travail. Sur ce marché, les variations de salaires doivent permettre l’ajustement de l’offre et de la demande. Le chômage (situation dans laquelle l’offre de travail est supérieure à la demande) ne peut donc exister. Si des individus sont sans travail, c’est parce qu’ils ne veulent pas travailler au salaire proposé ; ce sont des chômeurs volontaires qui ne peuvent donc être considérés comme de véritables chômeurs. En effet, à partir du moment où ceux qui désirent travailler se portent effectivement offreurs de travail, le salaire se fixera à un niveau tel que la demande de travail sera égale à l’offre et ils trouveront un emploi.

Le chômage réel ne peut donc exister que si on empêche la baisse du salaire nécessaire et suffisante pour équilibrer offre et demande de travail. Ce sont la réglementation étatique et/ou l’intervention syndicale qui peuvent empêcher cette baisse de salaire.

Considérant que les mécanismes du marché assurent automatiquement l’équilibre et le plein-emploi l’intervention étatique ne peut être que nuisible, d’où l’affirmation par les néo-classiques des vertus et de la nécessité du libéralisme.

 D ) Théorie néo-classique et lois naturelles. 

Les néo-classiques croient en l’existence de lois naturelles. Ils ne cherchent pas à analyser un système économique concret mais l’économie du marché théorique avec toutes les abstractions que cela nécessite. Ils se posent en farouches défenseurs de cette économie de marché.

 

Section 5 : La théorie keynésienne. 

 John Maynard KEYNES est né en 1883 à Cambridge ; il est mort en 1946 après avoir dirigé la délégation britannique à la conférence de Bretton-Woods qui créera le Système Monétaire International de l’Après-Deuxième Guerre Mondiale. Sa vie active sera très diversifiée puisqu’il mènera, souvent en même temps, une carrière universitaire au  King’s College, administrative au ministère des Affaires Indiennes, puis au Trésor, journalistique notamment comme rédacteur en chef de L‘Economic Journal, financière comme président d’une compagnie d’assurances sans oublier son activité artistique, notamment à la présidence du Comité pour l’encouragement de la musique et des beaux-arts.

KEYNES laissera une oeuvre très vaste (ses oeuvres complètes représentent 30 volumes). Les ouvrages les plus connus sont : Les conséquences économiques de la paix (1919), qui est une vive critique des conditions de paix imposées à l’Allemagne lors du traité de Versailles; le Traité de la monnaie (1930) et surtout la Théorie générale de l’emploi de l’intérêt et de la monnaie (1936) qui est l’un des livres d’économie les plus célèbres et qui fonde les bases de la « révolution keynésienne ». Par ces écrits, KEYNES va en effet non seulement renouveler profondément la pensée économique mais il fournira les bases théoriques à l’essentiel des politiques économiques suivies après la Deuxième Guerre Mondiale.

Quand on sait que KEYNES a vécu la plus formidable crise que le capitalisme a connue, celle de 1929; quand on sait qu’il a vu les hommes politiques de l’époque s’inspirer de la théorie néo-classique alors dominante pour prendre une série de mesures à contre-courant qui, loin de sortir les pays de la crise, ne faisaient que les enfoncer davantage, on comprend qu’il ait recherché une nouvelle approche théorique.

Nous allons examiner successivement les principaux aspects de l’apport keynésien.

 

§ 5.1) Une analyse macro-économique. 

Dès le début de la Théorie générale…, KEYNES insiste sur la nécessité d’avoir une approche macro-économique.

Comme nous l’avons vu dans le point 1, il considère en effet que l’analyse micro-économique, supposant que ce qui est vrai au niveau de l’individu l’est aussi au niveau d’un groupe ou de la collectivité, est erronée car il faut alors prendre en considération des phénomènes collectifs.

 

§ 5.2 ) Une contestation fondamentale de l’analyse classique. 

KEYNES va s’opposer aux économistes néo-classiques sur de nombreux points. Détailler ces oppositions serait trop long dans le cadre de ce chapitre, aussi ne retiendront-nous que les deux qui nous apparaissent les plus fondamentales.

 

A ) KEYNES conteste la loi des débouchés. 

KEYNES conteste la loi des débouchés de JB.SAY en affirmant qu’une partie de l’épargne peut être thésaurisée et retirée ainsi du circuit économique . Il est erroné selon lui d’affirmer que l’épargne sera automatiquement investie; les décisions d’épargne et d’investissement sont prises par des agents différents et sont largement autonomes les unes des autres. Il n’y a donc aucune raison pour que l’épargne et l’investissement s’ajustent spontanément. Avec cette analyse, KEYNES nie parallèlement la neutralité monétaire; la thésaurisation est une demande de monnaie; si celle-ci est demandée c’est parce qu’elle est un bien économique au même titre que les autres. Elle n’est donc pas un simple voile.

Une partie de l’épargne n’étant pas investie et étant thésaurisée la demande devient insuffisante par rapport à l’offre et la crise de surproduction peut exister.

 

B ) KEYNES conteste l’efficacité de la baisse des salaires. 

KEYNES conteste que la baisse des salaires permette le retour au plein emploi.

Pour les néo-classiques la baisse du salaire, prix du travail, doit permettre en permanence l’égalisation de l’offre et de la demande de travail donc le plein emploi.

Pour KEYNES, la baisse des salaires, à supposer qu’elle soit possible ( ce qui n’est pas forcément le cas car les syndicats ouvriers peuvent s’y opposer) ne permettra en rien de diminuer le chômage car la masse des salaires distribués dans le pays va alors diminuer entraînant une réduction de la demande de biens et enfermant ainsi l’économie dans la situation de sous-emploi. Comme on l’a vu dans le point 1, ce qui peut-être vrai au niveau d’une entreprise ne l’est plus forcément au niveau de la collectivité.

 

§ 5.3) Le chômage expliqué par l’insuffisance de la demande effective.

Pour KEYNES les anticipations des chefs d’entreprise sont au coeur de l’analyse économique. Ils anticipent en effet ce qu’ils pensent pouvoir vendre : cette « demande attendue par les entreprises » est appelée par KEYNES « demande effective »; c’est elle qui détermine ce que les entrepreneurs vont décider de produire donc la quantité de main d’oeuvre qu’ils vont embaucher donc le niveau d’emploi. Parce que le futur est incertain, même pas probabilisable pense KEYNES, l’appréciation de l’entrepreneur sur la demande effective composée de biens de consommation et d’investissement peut ne pas être confirmée par les faits. L’anticipation d’une demande trop faible limite la création d’emplois donc freine les revenus distribués et la demande réelle.

Il n’y a aucune raison de croire que le niveau de l’emploi qui correspond à la demande effective sera celui de plein emploi ; si tel est le cas ce ne sera que pure coïncidence : »il apparaît clairement que le plein emploi, ou une situation voisine du plein emploi est rare d’autant qu’éphémère ».

Le chômage s’explique donc par l’insuffisance de la demande effective. La question se pose de savoir comment accroître celle-ci.

 

§ 5.4) L’intervention de l’Etat est nécessaire. 

Il n’y a pas, selon la théorie keynésienne, de mécanisme régulateur automatique qui permette l’accroissement de la demande effective ; celle-ci se compose de 2 éléments : la consommation et l’investissement.

Il n’y a aucun mécanisme autonome d’augmentation de la consommation selon KEYNES ; celle-ci est en effet déterminée par le revenu; elle augmente en même temps que celui-ci mais moins vite.

Si la consommation dépend du revenu il n’est pas possible d’agir sur elle pour obtenir une variation de celui-ci.

Reste alors l’investissement. Pour KEYNES, le niveau de l’investissement dépend de la confrontation entre son rendement net anticipé et le taux d’intérêt. Le rendement net est appelé »efficacité marginale anticipée du capital ». Si le rendement net est supérieur au taux d’intérêt, l’entrepreneur réalisera l’investissement car celui-ci rapportera plus qu’il ne coûte.

Pour relancer l’investissement les pouvoirs publics peuvent alors mener une politique de baisse du taux d’intérêt mais KEYNES ne croit pas vraiment en l’efficacité d’une telle politique car il pense qu’elle n’induira qu’une croissance faible de l’investissement. En termes économiques on dit que la sensibilité de l’investissement au taux d’intérêt est faible.

Il préconise alors une intervention de l’Etat par le canal du budget; c’est la politique budgétaire. L’Etat décidera de réaliser lui-même les investissements supplémentaires nécessaires à la croissance de la demande effective.

Cette notion d’investissements réalisés par l’Etat doit être prise au sens très large de dépenses publiques. L’intervention de l’Etat est donc nécessaire.

Les détracteurs de KEYNES critiqueront une telle politique car elle peut avoir des conséquences inflationnistes; mais l’auteur de la Théorie générale… fera remarquer :

 

– que tant qu’on est en situation de sous-emploi, l’augmentation de l’offre accompagne l’accroissement de la demande et qu’il n’y a donc aucune tension sur les prix à craindre. L’inflation ne peut apparaître qu’en situation de plein emploi et serait donc la conséquence d’une politique économique erronée consistant à accroître la demande alors que l’offre est bloquée ;

– que l’objectif fondamental doit être la croissance et le plein emploi même si quelques « dérapages inflationnistes » sont à craindre ;

– que le seul véritable instrument de lutte contre l’inflation est une politique de revenus. Celle-ci consiste à programmer de manière coordonnée la croissance des revenus nécessite un véritable consensus social.

L’analyse keynésienne est donc une analyse macro-économique menée dans un cadre essentiellement national, intégrant directement la monnaie et admettant la possibilité de chômage dont l’origine doit être recherchée dans une insuffisance de le demande globale. Pour lutter contre ce chômage une politique étatique basée sur l’accroissement des dépenses budgétaires est nécessaire et peut être menée sans risque de dérapage inflationniste.

L’analyse keynésienne constitue bien une rupture par rapport à la théorie néo-classique en se montrant, contrairement à celle-ci, capable de fournir une explication à l’existence d’un chômage involontaire important et durable.

Cela constitue une rupture aussi en montrant les limites de l’analyse libérale, reconnaissant des lacunes à la régulation par le marché et introduisant la nécessité d’une intervention étatique.

Mais l’analyse keynésienne ayant conservé certains concepts de base de la théorie néoclassique (et notamment la valeur-utilité) elle pourra être en partie « récupérée » par celle-ci après la Deuxième Guerre Mondiale et c’est cette « synthèse » qui va dominer la pensée économique pendant cette période. Cependant, devant le maintien voire l’approfondissement de la crise actuelle ouverte « officiellement » en 1974, et devant les difficultés que connaît l’analyse dominante pour expliquer celle-ci et fournir des remèdes efficaces, on a assisté durant toute la décennie 80 à un retour en force des idées libérales.

 

PARTIE 3 : LES DÉSÉQUILIBRES MACRO-ECONOMIQUES 

Parmi les indicateurs qui caractérisent les principaux déséquilibres internes d’une économie nationale , l’inflation et le chômage sont souvent cités , nous examinerons respectivement les deux types de déséquilibres .

 

               CHAPITRE 7 : LE CHOMAGE  

L’Union européenne à 25 membres comptait en 2005 plus de 19 millions de chômeurs déclarés (OCDE) , soit un taux de chômage d’environ 8,7 % avec toutefois des disparités importantes puisqu’on enregistrait à la même période un taux de 17,7 % en Pologne et 4,5 % au Luxembourg . Pour autant , les Etats-Unis au cours de l’année 2005 et le Royaume-Uni apparaissent moins frappés par le chômage ; il faut donc se pencher sur les définitions et la mesure du chômage pour tenter d’expliquer ces différents taux .

Véritable fléau tant dans les pays industrialisés que dans les pays en développement , le chômage a constitué à plusieurs époques de l’histoire contemporaine et constitue encore une interrogation majeure pour les économistes . Frictionnel , conjoncturel ou structurel , volontaire ou non , indemnisé ou pas … il constitue la partie visible des déséquilibres de l’économie de marché .

 

Section 1 ) Définitions et mesure du chômage : 

Nous allons respectivement passer en revue les différentes définitions du chômage en même temps que de donner quelques chiffres globaux sur son évolution au sein de grandes zones .

Le chiffre du chômage est devenu l’indicateur économique mensuel le plus attendu. S’il apparaît comme le reflet objectif de l’état du marché du travail à un moment donné, il n’en demeure pas moins une construction statistique qui peut prêter à discussion :

– Les critères retenus pour considérer qu’une personne est au chômage sont conventionnels et comportent une certaine imprécision ;

– la frontière entre emploi, inactivité et chômage devient de plus en plus floue : le « halo » du chômage brouille les catégories statistiques traditionnelles.

La définition officielle que donne le Bureau International du Travail (BIT) est a priori simple en considérant comme chômeurs les personnes qui sont simultanément :

– sans travail ;

– disponibles pour travailler ;

– à la recherche d’un travail.

 

Les difficultés surgissent lorsqu’il s’agit de préciser les critères permettant de rendre opératoire cette définition.

Or, les deux principales sources en France que sont l’INSEE et l’ANPE ont une interprétation spécifique de cette définition.

 § 1.1 ) Définition du chômage au sens de l’ANPE : 

Chaque mois, l’ANPE (Agence Nationale pour l’Emploi) publie le nombre de chômeurs inscrits dans ses fichiers, ce sont les demandes d’emploi en fin de mois (DEFM). Si toutes les personnes qui recherchent un emploi peuvent s’inscrire à l’ANPE, c’est la catégorie 1 qui sert de baromètre « officiel » du chômage. Il s’agit des chômeurs immédiatement disponibles (même s’ils exercent une activité réduite jusqu’à 78 heures par mois) cherchant un emploi à temps plein et à durée indéterminée (CDI).

Les statistiques de l’ANPE présentent plusieurs avantages. Elles sont d’abord exhaustives puisque tous les inscrits sont comptabilisés. Elles ont aussi l’avantage de pouvoir être exploitées tous les mois dans un délai très court, ce qui en fait  le seul indicateur conjoncturel du chômage disponible en outre à un niveau géographique détaillé.

Mais la logique administrative de l’ANPE implique qu’elle ne comptabilise que les inscrits sur ses listes (logique d’indemnisation et de gestion des droits sociaux). Or, tous les demandeurs d’emploi ne font pas cette démarche. Par exemple, 19 % des chômeurs agés de 15 à 24 ans n’étaient pas inscrits à l’ANPE en 2001. En revanche , ne sont pas défalqués ceux qui ne cherchent pas effectivement un emploi mais qui renouvellent leur inscription comme certains chômeurs « découragés ». Par conséquent , la principale limite de cette statistique est qu’elle est très sensible aux modifications de la législation sociale et de la réglementation en matière de gestion administrative mais aussi des comportements d’inscription des chômeurs. Par exemple , la dispense de recherche d’emploi de certains chômeurs agés, décidée en 1985, à permis de soustraire du chômage « officiel » l’équivalent de 350000 personnes à la fin de l’année 2000 ;

L’ANPE procède aussi de temps à autre au « toilettage » de ces listes : elle radie les personnes qui ne répondent pas aux convocations de l’agence aux entretiens proposés.

Bien qu’une mesure objective du chômage soit illusoire, de tels changements nourissent le soupçon récurrent de « manipulation » qui pèse sur le chiffre du chômage.

 

§1.2 ) Définition du chômage au sens du BIT : 

Le chômage au sens du BIT est mesuré au travers des enquêtes-emploi effectuées par l’INSEE (Institut National de la Statistique est des Etudes économiques) chaque année au mois de Mars auprès d’un échantillon d’environ 68000 ménages sélectionnés de façon aléatoire (tirage au sort).

L’INSEE dénombre la population sans emploi à la recherche d’un emploi (PSERE) à partir des critères édictés par le BIT qui s’avèrent particulièrement stricts. Ainsi le premier critère, être sans travail, exclut du chômage toutes les personnes déclarant avoir exercé une occupation ou qui ont travaillé, ne serait-ce qu’une heure, au cours de la semaine de référence. La définition est ici exactement  restrictive.

En ce qui concerne le deuxième critère, sont considérées comme disponibles les personnes qui peuvent commencer à travailler dans un délai de quinze jours ( en cas de maladie le délai est porté à un mois).

Enfin l’appréciation du troisième critère, rechercher activement un travail, est relativement souple : le chômeur doit être inscrit à l’ANPE soit préciser les démarches effectives de recherche d’emploi qu’il a pu effectuer le mois précédent l’enquête.

Par rapport aux statistiques de l’ANPE, l’avantage de l’enquête-emploi résulte d’un comptage qui a pour but explicite la mesure du chômage internationalement reconnue (celle du BIT). Elle échappe donc aux changements réglementaires ou administratifs et permet en outre de réaliser des comparaisons internationales.

Toutefois, la périodicité annuelle de l’enquête-emploi et la définition excessivement restrictive des critères retenus sont les principales limites de cette statistique.

 § 1.3 ) Les chiffres du chômage : un déséquilibre macroéconomique ancien et contemporain : 

Il n’est point besoin de s’attarder sur les taux de chômage des années 30 au sein des pays capitalistes industrialisés pour rappeler que le chômage est un déséquilibre ancien . Les analyses en terme de cycles montrent parfaitement que ce fléau a perduré à travers le temps et l’espace. Dans la période récente, le chômage s’est progressivement développé à partir des années 70 pour les pays de l’OCDE .

Le tableau ci-après en témoigne :

 Tableau 1 : Evolution du taux de chômage dans les pays du G6 ( en % de la population active, prévision de l’OCDE pour l’année 2006 ) . 

 

 1989

 1993

 1997

 2006

Etats-Unis

  5,3%

  6,9%

  4,9%

  4,9%

Japon

  2,3%

  2,5%

  3,4%

  4,3%

France

  9,3%

11,7%

12,4%

  8,9%

Allemagne

  6,9%

  7,8%

  9,8%

10,7%

Royaume-Uni

  6,1%

10,3%

  6,9%

  5,3%

Italie

10,2%

10,2%

11,8%

  7,5%

 

Les taux présentés ne sont pas des taux standardisés . Malgré cette imperfection, on peut relever 4 points : 

– Le taux de chômage au Japon est reste longtemps limité au taux de chômage « naturel » mais aujourd’hui il augmente à cause de la crise économique qui sévit au Japon depuis le milieu des années 90, bien que la situation s’améliore de nouveau sur le front de l’emploi. 

– Les Etats-Unis ont un taux de chômage qui correspond jusqu’en l’an 2000 au taux de chômage naturel. 

– L’Allemagne à cause de la réunification connaît un déséquilibre du marché du travail plus prononcé. 

– La France à l’instar des autres pays a connu une diminution sensible du chômage depuis 1997 et une remontée depuis 2001, le taux de chômage tend à diminuer significativement depuis quelques mois.

 

Le chômage n’est pas un phénomène homogène ; il importe de distinguer ses différents aspects qui peuvent avoir de multiples causes. D’autre part, les divers types de chômage ne présentent pas le même caractère de gravité pour les personnes qui le subissent ainsi que pour l’économie nationale considérée .

 Section 2 ) Les différentes formes de chômage :

Nous allons maintenant examiner les différentes de chômage auxquels un individu peut être confronté dans sa vie active.

 § 2.1 ) Chômage saisonnier , conjoncturel , structurel : 

On a pris l’habitude de distinguer , dans le chômage total , une composante saisonnière , une composante conjoncturelle ou cyclique et une composante structurelle ou à plus long terme .

Le chômage saisonnier frappe principalement diverses branches d’activité (comme l’agriculture et le bâtiment ) sujettes à des influences climatiques plus ou moins régulières ; la plupart des statistiques en matière de chômage cherchent d’ailleurs à faire abstraction de ces fluctuations et les données sont dites alors « corrigées des variations saisonnières » ou encore « désaisonnalisées ».

Le chômage de type conjoncturel est celui qui est lié aux fluctuations cycliques de l’activité économique , c’est-à-dire aux variations à court terme de la demande globale et de la production selon la séquence demande production emploi chômage .

Le chômage structurel est , lui considéré par définition comme indépendant du niveau général de la demande finale .

Suivant une conception assez répandue , tout travailleur serait en chômage structurel « lorsqu’il est en chômage et qu’il existe un emploi vacant pour lequel il n’a pas les qualifications requises ».

Un aspect important par rapport à ce type de chômage est en effet constitué par l’inadéquation souvent constatée de la structure de l’offre de travail ( ou demande d’emploi ) par les individus relativement à la structure de la demande de travail ( ou offre d’emploi ) par les entreprises . Cette dernière se modifie constamment sous l’effet de changements , d’une part , dans la demande de biens et services ( évolutions des besoins et des goûts des consommateurs ) et , d’autre part , dans les combinaisons productives ( progrès technique et substitutions entre les facteurs ) . Du chômage apparaît en l’absence de modifications correspondantes de la structure de l’offre de travail qui est fonction , elle , d’éléments plus stables : les qualifications des travailleurs données par le système d’enseignement et de formation ainsi que leurs préférences pour certains types d’activités .

 § 2.2 ) Le chômage keynésien et le chômage classique : 

Une autre classification du chômage , plus récente mais aujourd’hui couramment utilisée par la plupart des théoriciens , consiste à distinguer un sous-emploi de type keynésien et un sous emploi de type classique .

Dans l’analyse macroéconomique de Keynes et dans la conception du chômage qui en découle, l’insuffisance de la demande de main d’oeuvre par les entreprises sur le marché du travail s’explique fondamentalement par l’insuffisance de la demande de biens et services aux entreprises sur le marché des produits . Dans une telle situation, la politique économique doit stimuler la demande ( par l’augmentation des dépenses publiques , l’abaissement des impôts ou par la diminution des taux d’intérêt ) ; à l’inverse , une politique de réduction des salaires entraînant une baisse des dépenses de consommation comprimerait plus encore l’activité des firmes et le niveau de l’emploi .

Avec la crise des années 70, on a cependant assisté à une résurgence des théories classiques qui expliquent le chômage courant par les contraintes que le niveau trop élevé des salaires réels (et non pas la demande insuffisante de produits) ferait peser sur l’économie .

Edmond MALINVAUD, en particulier, a essayé de renouveler les théories macroéconomiques du chômage en fondant son analyse sur des modèles microéconomiques où individus et entreprises sont confrontés à des marchés sur lesquels les prix et les salaires sont à court terme rigides (c’est-à-dire ne s’ajustent pas suffisamment vite pour assurer en permanence l’équilibre des offres et des demandes sur chaque marché) . Il a ramené ainsi l’hypothèse du chômage keynésien à un cas spécifique.

Alors que le sous-emploi keynésien s’identifie au chômage conjoncturel, le sous-emploi classique peut être considéré comme une variété du chômage dit structurel. Malgré une demande de biens et services suffisante, il subsiste dans l’économie un chômage non négligeable. Il n’est pas possible de réduire celui-ci par des politiques de stimulation de la demande qui ne feraient qu’attiser l’inflation. La solution préconisée dans ce cas consiste à rétablir ou accroître la rentabilité des entreprises par une politique de réduction des salaires et des charges sociales et fiscales .

Cette vue des choses a été, en particulier, à la base des développements de ce que l’on a appelé l’économie de l’offre. Les débats théoriques sur la nature du chômage contemporain ne correspondent pas, en effet, seulement à des plaisirs d’experts. Ils se situent au coeur de l’affrontement entre les deux grandes stratégies de politique économique qui se sont opposées après 1974, les économistes d’inspiration keynésienne privilégiant la dynamique demande-production-emploi , les économistes d’inspiration néo-classique privilégiant la dynamique rentabilité-investissement-emploi .

 

§ 2.3 ) Chômage volontaire et chômage involontaire : 

Enfin , le chômage au sens strict devant être considéré comme une exclusion involontaire du marché du travail , une autre distinction consiste à séparer les différentes formes de chômage involontaire et le chômage volontaire , c’est-à-dire délibérément accepté par certaines personnes en conséquence de « stratégies » qui leur sont propres .

Parmi les principales formes de chômage volontaire , on relève le chômage dit « rationnel » et le chômage dit de « recherche » .

Le chômage dit rationnel est celui qui résulterait d’un certain rapport de prix ou plus précisément d’utilités nettes entre le travail et l’inactivité conduisant certains chômeurs à préférer celle-ci à celui-là .

Les individus de la théorie micro-économique , confrontés au dilemme travail-loisir dans l’affectation de leur budget-temps , sont supposés ne choisir de travailler qu’au terme d’un calcul faisant ressortir que l’utilité escomptée de l’emploi ( principalement le revenu attendu , mais parfois aussi la puissance et la notoriété ) est supérieure à sa désutilité ( la perte de temps libre et les autres contraintes ou inconvénients liés à certains emplois ) . Si le travail est rémunérateur , il est en effet , également coûteux : en termes physiologiques et psychologiques ( l’homme n’est pas fait pour le travail , la preuve est que cela le fatigue , dit l’humoriste … ) , mais souvent aussi en termes monétaires ( par exemple , il implique fréquemment un coût de déplacement du domicile vers le lieu d’activité ) .

D’autres auteurs ( notamment STIGLER et PHELPS ) ont mis en avant un chômage dit de recherche ou de prospection . Cette forme de chômage constituerait un investissement volontaire en temps de personnes qui cherchent à accroître leurs utilités futures .

Certains individus ont des exigences assez précises quant au taux de salaire acceptable par eux ou encore quant à la nature ou à la localisation de l’emploi . Si les caractéristiques qui correspondent à un poste disponible ne leur conviennent pas , ils poursuivent leur recherche jusqu’à ce qu’ils atteignent leur objectif ou qu’un fait nouveau les amène à réduire le niveau de leurs prétentions.

Comme on ne voit pas bien pourquoi, il serait moins intéressant de chercher un autre emploi tout en travaillant plutôt que de se spécialiser dans la recherche d’un emploi bien déterminé ( job search) , cette hypothèse concerne surtout ceux qui entrent sur le marché du travail . Les jeunes et , à nouveau , les femmes et l’indemnisation du chômage sont mis en cause dans la prétendue montée du chômage dit de « recherche » . D’une part , au sein d’un ménage qui compte déjà un travailleur et un revenu , les autres membres de la famille sont supposés pouvoir se consacrer à une recherche d’emploi plus longue ; d’autre part , les allocations de chômage réduisent les coûts marginaux de recherche et toutes choses égales par ailleurs passent pour inciter les individus à rester plus longtemps inactifs .

La multiplication de ce type d’explications a amené certains auteurs à accréditer l’idée , assez répandue dans une partie de l’opinion publique , selon laquelle une large proportion du chômage contemporain serait de nature volontaire . Le chômage volontaire existe ; il n’est pas impossible qu’il ait augmenté . Mais il ne permet pas d’expliquer la croissance spectaculaire du sous-emploi dans tous les pays de l’OCDE , après 1974 . Force est d’ailleurs bien de constater que quelques-unes des théories les plus récentes et les plus sophistiquées du chômage n’ont souvent fait que reprendre , en les renouvelant un peu , les arguments les plus anciens et les plus triviaux avancés à l’encontre de l’indemnisation du chômage .

 

§ 2.4 ) Les autres formes du chômage : 

Il existe d’autres formes modernes du chômage , c’est ainsi que l’on distingue respectivement :

– Le chômage frictionnel dû essentiellement au processus d’inadéquation entre offre et demande d’emplois . Il s’agit bien d’un chômage incompressible où l’on peut observer des flux importants avec une probabilité de perdre son emploi (quand l’acteur social en a un ) ou de trouver un emploi ( quand il est au chômage ) .

– Le chômage déguisé , il concerne des emplois dont la productivité est faible, voire nulle , il a longtemps caractérisé la situation dans les pays de l’Est .

– Le chômage technique , il est dû à une interruption du processus technique de production (panne de machines , pénuries , etc ) .

– Le chômage technologique , c’est un chômage qui apparaît à la suite d’innovations qui économisent du travail , notamment par la substitution du capital au travail ( robotisation , informatisation ) .

 

Section 3 ) Les causes du chômage contemporain : 

Nous distinguerons les causes structurelles des causes conjoncturelles du chômage contemporain.

C’est à partir du milieu de la décennie 70 que le fléau s’emballe : jusque là, en effet , le nombre de chômeurs se situait autour des dix millions .

Les causes du chômage sont multiples et imbriquées ce qui constitue, d’ailleurs, une des difficultés majeures du traitement. Nous allons relater les causes principales sans prétendre à l’exhaustivité.

 

§ 3.1 ) Les causes structurelles : 

Les causes structurelles sont inhérentes à la structure du système économique dont il est ici question , soit le système capitaliste . On distinguera plusieurs causes structurelles dont le facteur démographique .

 A ) L’évolution de la population et la féminisation des emplois : 

C’est un facteur qui a été évoqué essentiellement au cours des années 70 . Le nombre de jeunes sortant du système scolaire et voulant obtenir un emploi devient plus élevé que celui des personnes en âge de prendre leur retraite . Atteindre la fin du flux des classes d’âge pleines pour retrouver un équilibre sur le marché du travail n’est pas apparu suffisant ; c’était en effet oublier que , simultanément , nous étions dans un contexte de féminisation du marché du travail .

Des changements sociologiques ( la reconnaissance du statut de la femme à partir d’une insertion professionnelle plus généralisée ) et économiques ( la nécessité d’un second revenu par ménage pour satisfaire à la société de consommation ) ont fait évoluer la structure du marché du travail .

D’autre part , il faut noter l’impact des transformations dans la structure des activités : le nombre d’emplois dans le secteur secondaire tend à diminuer régulièrement au profit des emplois tertiaires , par ailleurs plus féminisés . De plus , cette transformation a été provoquée ou accompagnée de changements dans les modes de production et de fabrication dus aux progrès technologiques .

Ces changements n’ont pas été anticipés par le système éducatif , du moins au sein de la formation initiale . Un certain nombre de jeunes se sont trouvés démunis sur le marché de l’emploi et , in fine , on est parvenu à une situation paradoxale avec , d’une part des offres d’emplois proches du nombre de demandes d’emplois mais , d’autre part , une inadéquation entre ces offres et ces demandes d’emplois mais , d’autre part , une inadéquation entre ces offres et ces demandes à cause des décalages dans les niveaux de qualification demandée et offerte .

 B ) Le rôle du progrès technique : 

L’introduction du progrès technique conduit directement à se demander si l’investissement et la recherche de gains de productivité sont ou non destructeurs d’emplois ? . Une réponse en deux temps permet de reprendre l’argument selon lequel ils introduisent des transformations dans les qualifications requises ( les destructions créatrices ) . Si l’on reprend les arguments traditionnels des économistes , les keynésiens comme les néoclassiques s’accordent sur le fait que la productivité , c’est la croissance et celle-ci est source d’emplois et de hausse du niveau de vie . Mais , dans un premier temps , les gains de productivité provoquent une augmentation du chômage frictionnel .

 C ) Les rigidités à la baisse des salaires : 

L’instauration d’un salaire minimum , comme c’est le cas en France , est considéré comme un élément favorable à la montée du chômage . Introduit pour protéger les personnes les moins qualifiées , les jeunes en particulier , le SMIC est aujourd’hui un élément de base dans les discussions salariales , dans les discussions relatives à l’éventail des salaires , à l’impôt sur les revenus des personnes physiques ( faut-il ou non imposer les salariés payés au SMIC ? ) . Son rôle dépasse donc la protection des salariés les plus faiblement payés . De nos jours , les employeurs renâclent à embaucher du personnel non formé en leur versant le SMIC . Ce salaire minimum est en effet supérieur à ce qu’ils accepteraient de payer si le marché fonctionnait librement . L’OCDE s’est d’ailleurs prononcé pour la première fois en Juin 1991 en faveur d’un assouplissement ou d’une disparition de ce salaire plancher . Si , en France , il n’a pas disparu , il a été considérablement assoupli … indirectement . Il existe en effet divers moyens de le contourner : le recours aux stages avec des rémunérations inférieures au SMIC , des CDD , l’imposition d’un âge minimum , etc .

Aux causes structurelles s’ajoutent des causes conjoncturelles qui tendent également à accroître le nombre de chômeurs .

 § 3.2 ) Les causes conjoncturelles : 

La cause conjoncturelle dont il va être question , la délocalisation de la production n’est sans doute plus un fait conjoncturel . Mais au début des années 70 , ce phénomène s’amorçait ; depuis , il s’est généralisé . De nombreux pays , en effet , ont aujourd’hui une main d’oeuvre dont le coût est très inférieur à celui en vigueur dans les « vieux » pays industrialisés . La logique est alors simple : pourquoi supporter un coût de production plus élevé alors que l’on peut bénéficier d’un coût moindre à partir d’une implantation d’une partie ou de la totalité du processus de production à l’étranger ? .

Aux pays asiatiques , connus depuis déjà depuis quelques années pour la modestie de leurs salaires , se sont ajoutés les pays d’Europe Centrale et de l’Est disposant d’un outil de travail mais aussi d’une population qualifiée . Par ailleurs, ces pays connaissent des taux de croissance élevés ; certains , de par leur situation géographique et leur volonté politique , désirent intégrer l’Union Européenne et apparaissent de fait attrayants pour certains investisseurs .

Les techniques de sous-traitance , les zones franches , les divers processus de délocalisation permettent aux entreprises de bénéficier des économies d’échelle , de contourner les barrières douanières , de pénétrer de nouveaux marchés …

 A ) Le coût du travail dans le monde : 

On constate de fortes disparités selon les lieux de production . Certaines entreprises ne « gardent » plus que la conception et la commercialisation de leurs biens et services ; la production est assurée ailleurs , notamment en Asie du Sud-Est sous contrat . Ces techniques se développent notamment dans les services grâce au travail à distance désormais possible par les techniques de télécommunication et l’informatique . Si des difficultés surviennent , tels des mouvements sociaux , des difficultés d’approvisionnement de matières premières , des instabilités politiques … l’entreprise a la possibilité de déployer ses activités dans un autre espace plus stable . Elle peut également s’installer dans une zone nouvelle pour des raisons fiscales plus avantageuses . Les coûts relatifs au transport ne représentent plus un obstacle . La croissance du commerce international comparée à la croissance de la production des marchandises illustrent bien cet argument .

 B ) Le processus de délocalisation au sein des « vieux » pays industrialisés : 

L’une des raisons de cette nouvelle réalité tient sans doute au dumping social . Il s’agit d’échapper aux diverses charges qui pèsent sur les salaires et non aux salaires eux-mêmes . Certains pays parviennent à attirer les emplois à l’intérieur de l’Union Européenne pour des raisons multiples : en dehors du dumping monétaire qui consiste à dévaluer une monnaie au mépris des règles de convergence de l’Union Economique et Monétaire (cf les exemples de la Grande-Bretagne, l’Espagne , l’Italie au printemps 1993) , certains pays reçoivent de la Communauté des subventions dans le cadre de la politique de réduction des disparités régionales . Souvent, les espaces concernés sont victimes d’un taux de chômage déjà élevé. L’aide une fois apportée peut modifier le cadre concurrentiel de référence . On peut également évoquer , dans certains pays européens , l’inexistence d’un salaire minimum ; la Grande-Bretagne a notamment refusé de signer la Charte Sociale de l’Europe . Le niveau de protection social assuré par les pouvoirs publics et les organismes para-publics est alors remis en cause , de même que la manière de le financer . En France , près de 80 % des transferts sociaux obligatoires reposent sur le facteur travail . Ceci introduit un biais : ce sont les charges pesant sur les salaires qui sont excessives . Dans ce contexte , les prix des biens et services sont renchéris , pénalisent la compétitivité , réduisent les profits et agissent de façon négative les décisions d’investir . Au total , l’emploi ne peut qu’être affecté .

L’entrée dans l’UE des PECO pourraient conduire à renforcer encore ce phénomène de dumping social, il conviendra alors d’observer ses principales évolutions.

 

                              CHAPITRE 8 : L’INFLATION  

Dans le cadre de l’économie française, la hausse moyenne des prix était de 4 % par an entre 1961 et 1970 , de 9 % entre 1971 et 1977 , supérieure à 10 % dans les années 80 et inférieure à 5 % depuis plusieurs années . Selon IXIS CIB, les prévisions pour l’année 2006 pour les principaux pays développés devraient évoluer de la manière suivante :  

 – 3,2 % aux Etats-Unis , 

– 0,6 % au Japon , 

– 1,9 % en Allemagne , 

– 2,3 % en Italie , 

– 2,0 % au Royaume-Uni , 

– 2,1 % pour la France .

 L’inflation n’est donc pas une fatalité . C’est le premier enseignement que l’on peut tirer des indicateurs ci-dessus . Pourtant , dans les années 50 , KEYNES la considérait comme un « benign neglect » parce que rampante ; elle devint même marchante puis courante et , dans certains cas , galopante au cours des années 60 et au début de la décennie 70 .

Cette accélération a donné naissance à différentes explications tant à propos de la définition de l’inflation que de sa mesure jusqu’aux moyens de lutter contre : les débats théoriques ont été nombreux . La question centrale qui prévaut aujourd’hui dans les économies capitalistes est davantage relative à la nécessité de rester sur un rythme annuel de 1 à 2 % ou s’il faut , au contraire , accepter une inflation de 3 à 4 % voire 5 % afin de soutenir l’activité économique .

La première section du chapitre aborde les définitions et mesures de l’inflation . La deuxième section traite des causes de l’inflation.

 

Section 1 ) Définition et mesures : 

Nous allons respectivement donner une définition de l’inflation en même temps que de soulever des problèmes de mesure .

 § 1.1 ) Définition : 

Pour éviter toute erreur , il convient de distinguer avant tout les termes : inflation, désinflation , déflation et stagflation .

L’inflation :   L’augmentation générale et autoentretenue des prix des biens et services .

La déflation :   Il s’agit de la contraction des grandeurs économiques nominales, baisse des prix , des salaires , réduction de la masse monétaire qui peut s’accompagner d’une contraction des grandeurs réelles , baisse de la demande de la production , de l’emploi , etc .

La désinflation : La réduction du taux d’inflation , mais l’inflation demeure positive . 

La stagflation :  C’est la combinaison de trois phénomènes : l’inflation , le chômage et une faible croissance .

 

Notre objet d’étude concerne surtout l’inflation que l’on peut définir comme la hausse du niveau général des prix et des services . Cette hausse ne peut pas concerner que quelques produits . Elle ne peut être davantage accidentelle ; cela revient à dire qu’il s’agit d’une hausse généralisée et continue des prix .

La hausse des prix est fondée sur des mécanismes macroéconomiques : à partir du circuit économique ( que l’on soit , à ce stade , en économie fermée ou ouverte ne change rien ) , il faut retenir les interdépendances entre les acteurs (ménages , entreprises , collectivités locales , institutions bancaires ) et entre les marchés ( de biens et services , du travail , financier …) .

Les flux de biens et services et les flux financiers qui forment le circuit économique sont autant d’éléments qui rejaillissent sur l’inflation . Et c’est bien ce constat qui pose un problème relatif à la définition de l’inflation .

En effet , lorsqu’un institut de statistiques déclare que l’inflation a été égale à 0,1 % au mois de janvier ou que l’inflation a été de 3 % sur les douze derniers mois , cela signifie quoi au juste ? . Les prix des biens et services ont-ils augmenté de 3 % ? Ou certains d’entre eux de 3 % , d’autres au-delà , d’autres encore en deçà ? .

Si l’estimation se voulait juste , il nous faudrait un indicateur par produit ! . Dès que l’inflation concerne plusieurs biens , sa mesure devient floue . En réalité , les prix n’augmentent pas tous dans la même proportion . C’est pour cette raison que l’on détermine un niveau moyen des prix. Pour autant , le problème de la mesure reste entier car il faut choisir les biens et services qui vont constituer le panier de référence , lequel va permettre de préciser l’indice général des prix . Le caractère arbitraire de la construction de cet indice pose une vrai question de représentativité à l’analyse macroéconomique . Imaginons , par ailleurs , que l’on cherche à comparer des indices de prix de divers pays ! . Non seulement , il faut que le calcul de l’inflation repose sur une méthode similaire ainsi que sur des biens et services communs . En France par exemple , le tabac n’a pas toujours été retenu dans le panier de référence . Il a pu l’être chez des pays voisins.

A un niveau microéconomique , l’indice du coût de la vie n’a pas la même signification selon la catégorie socio-professionnelle ( CSP ) . Les niveaux et les modes de consommation au sein d’un pays sont différents selon les CSP d’où la difficulté de mesurer l’impact de l’inflation auprès de tous les agents économiques . In fine , la question de la définition de l’inflation nous renvoie à la question de la mesure de l’inflation .

 

§ 1.2 ) Mesurer l’inflation : 

Pour atténuer autant que faire se peut les limites énoncées , il est possible de calculer des indices des prix par CSP ou des indices sectoriels ou encore des indices relatifs .

Les indices des prix par CSP permettent de tenir compte des structures de consommation des employés , des cadres , des ouvriers . Nous avons présenté (cf chap 3 ) la consommation d’un point de vue économique sans pour autant omettre la dimension sociologique . Cela revient à distinguer l’augmentation du prix d’un kilo de pain et l’augmentation d’une bouteille de champagne millésimée. Les conséquences diffèrent selon la CSP de référence . De même , la hausse des prix d’un bateau n’affecte pas autant d’agents que la hausse des loyers: le sens économique , sociologique et psychologique qu’il faut leur accorder n’est pas du tout comparable . Il est donc possible de considérer que l’inflation est plus injuste , par exemple , que le chômage puisque si ce dernier frappe nominativement un individu et sa famille , l’inflation apparaît plus neutre alors qu’elle affecte le pouvoir d’achat individuel et familial , a fortiori lorsqu’elle perdure et qu’elle est compensée différemment ( à partir d’une augmentation de salaire ) selon l’emploi occupé ( statut , taille de l’entreprise , conventions collectives , pouvoir de négociation , etc ) .

Les indices sectoriels concernent les indices de prix selon les secteurs économiques : on discernera par exemple la hausse des prix agricoles et celle des services . Cette distinction est utile pour cerner les éventuels dérapages lorsque la politique économique a fixé comme objectif principal la lutte contre l’inflation. C’est encore utile pour fixer le cas échéant les rattrapages de pouvoir d’achat par secteur et non de manière uniforme .

Les indices relatifs permettent de définir un indice relatif des prix d’un produit (le prix d’un kilo de pommes au temps n puis au temps n+1 ) ou un indice relatif des prix de deux produits . Pour être précis , il faut entendre par prix relatif le rapport de deux prix nominaux . Par prix nominal, on entend un prix exprimé en unités monétaires ( à la différence d’un prix réel qui exprime un prix en pouvoir d’achat ) . Ainsi , d’un point de vue microéconomique , les agents peuvent comparer le prix d’un kilo de pommes et le prix d’un kilo de poires . L’évolution respective de ces deux prix peut rejaillir sur leur consommation et entraîner un effet de substitution .

 

§ 1.3 ) Un déséquilibre macroéconomique maîtrisé aujourd’hui : 

En 1974 , Milton FRIEDMAN affirmait que la raison la plus ancienne de l’inflation tenait au fait qu’elle « est la seule forme d’imposition à laquelle on puisse recourir sans autorisation législative » ( The Guardian in Problèmes économiques , mars 1993 ) . « C’est aussi une forme d’imposition séduisante car , dans un premier temps , les gens s’en réjouissent plutôt parce que ses effets initiaux favorisent l’expansion et ne sont nullement désagréables » . En 1974 , cela faisait plus de 20 ans que les pays du monde recouraient , toujours selon l’auteur , à « la planche à billets » et ce , de manière croissante . Si les années 75-85 n’ont pas renversé la tendance , depuis c’est fait . C’est tellement vrai que certains réclament aujourd’hui un peu plus d’inflation pour retrouver l’expansion.

Quelles sont donc les raisons de cette victoire contre l’inflation? . Répondre à cette question nécessite que l’on puisse discerner les causes de l’inflation. Notons toutefois que la maîtrise actuelle de l’inflation bouleverse bon nombre de réflexes car, au delà, se pose la question du pouvoir d’achat pour les ménages , de la compétitivité pour les entreprises et des marges de manoeuvre de l’Etat via sa politique budgétaire .

 

Section 2 ) Les causes de l’inflation : 

On peut distinguer plusieurs causes de l’inflation .

 § 2.1 ) L’inflation et la monnaie : 

Jean BODIN attribuait la hausse généralisée des prix dans l’Europe du XVIème siècle à l’afflux d’or et d’argent d’Amérique . La théorie quantitative de la monnaie s’en est inspirée pour établir son raisonnement : le niveau des prix augmente lorsque la quantité de monnaie augmente elle-même et , inversement , il diminue lorsqu’elle baisse . L’économiste américain Irving FISHER (1907) a repris cette formulation sous la forme de l’équation suivante :

 MV = PT avec M , le volume de la masse monétaire

  •                        V , la vitesse de circulation de la monnaie
  •                        P , le niveau des prix
  •                        T , le volume des transactions

L’équation peut s’expliquer ainsi : partons d’une situation d’équilibre où la quantité de monnaie exprimée en termes réels , c’est-à-dire en pouvoir d’achat demandée par les agents économiques est égale au stock de monnaie en circulation . Supposons à présent que les autorités monétaires décident, unilatéralement , d’augmenter le volume de la masse monétaire ( M ) . La réaction des agents économiques sera un accroissement de leur demande de biens et services ( T ) . Mais l’offre de ces biens et services est rigide à court terme : l’offre devient donc d’un niveau inférieur à la demande d’où une hausse des prix jusqu’à ce que ces derniers aient suffisamment augmenté par rapport à la valeur réelle des encaisses au niveau désiré par les agents .

Par conséquent , si le volume des transactions ( T ) et la vitesse de circulation de la monnaie (V) sont constants , toute augmentation de la quantité de monnaie (M) se traduit par une augmentation des prix dans le même sens et dans la même proportion . La demande excédentaire de biens trouve ainsi son origine dans une augmentation de la masse monétaire , ce qui fait dire à FRIEDMAN que l’inflation est toujours un phénomène monétaire .

 

§ 2.2 ) L’inflation par la demande : 

Pour l’essentiel , l’inflation par la demande correspond à l’analyse keynésienne . Pour autant , il ne faut pas confondre l’origine de l’inflation par la demande et les mesures de soutien à la demande effective que préconise KEYNES lorsque la conjoncture économique l’exige . Pour être précis , les mécanismes auto-régulateurs du marché ne permettent pas de trouver un équilibre de plein emploi de façon permanente . Ce serait d’ailleurs un hasard que de se retrouver en situation d’équilibre . A partir de ce constat , il faut qu’une impulsion exogène soit donnée afin de relancer l’activité économique ; cette impulsion doit consister en un soutien de la demande effective . L’Etat peut également soutenir l’emploi par une politique de grands travaux ( cf le New Deal de ROOSEVELT ) … toutes ces mesures à un niveau macroéconomique ont pour objectif de soutenir l’activité des entreprises qui , conscientes des efforts entrepris et constatant que la demande des ménages tend à augmenter , vont décider de produire en utilisant pleinement leurs capacités productives puis en investissant . Leurs demandes d’investissement seront d’autant plus fortes que les taux d’intérêt d’emprunt seront bas et que l’efficacité marginale du capital sera élevée .

Ces mesures qui représentent autant de soutiens à la demande peuvent entraîner des tensions inflationnistes ; cela ne signifie pas pour autant que l’analyse keynésienne y soit favorable . Cela ne signifie pas non plus que l’inflation par la demande ait nécessairement pour origine une politique de relance d’inspiration keynésienne . Dans un contexte économique tel que celui que nous venons de décrire , il est tout à fait possible que l’offre puisse satisfaire la demande nouvellement émise ; en d’autres termes , l’élasticité de l’offre peut être suffisante pour que la demande accrue n’engendre pas un écart inflationniste substantiel . Le gap inflationniste peut être réel mais limité .

L’inflation par la demande peut également provenir d’un surcroît de dépenses des ménages qui préfèrent consommer qu’épargner . S’ils désépargnent , la demande de biens et services accrue peut alimenter l’inflation . Là également , la plus ou moins forte élasticité de l’offre ainsi que l’élasticité des importations peuvent accroître les tensions inflationnistes .

 

§ 2.3 ) L’inflation par les coûts : 

Il convient de distinguer l’inflation par le coût du facteur travail et celle par le coût du facteur capital . Cela revient à distinguer l’inflation par les salaires et l’inflation par le profit .

L’inflation par les salaires peut résulter d’une situation d’un marché du travail où les offres d’emploi des entreprises sont supérieures aux demandes d’emploi des actifs . Toutes choses égales par ailleurs , ces derniers peuvent accepter ou chercher des emplois plus rémunérés . Dans nos sociétés actuelles , ce cas de figure n’est pas dominant et ce , non pas exclusivement du fait du chômage mais encore parce que les salaires ne sont pas tous déterminés par le marché. Un certain nombre de salaires sont administrés : les salaires des fonctionnaires mais également les bénéficiaires des salaires minimaux ( cf le SMIC en France ) ou des salariés qui , au sein de leurs entreprises , disposent de conventions collectives dont celles relatives aux rémunérations . Il existe également des accords réguliers entre syndicats pour établir chaque année les grilles salariales eu égard à divers indicateurs internes et externes à l’entreprise (productivité , chiffre d’affaires , profitabilité , part de marché , inflation … ) ; les exemples allemands peuvent en témoigner . Certains économistes libéraux ont d’ailleurs dénoncé ces pratiques car ils considèrent que les négociations et / ou les conventions collectives dans un contexte de pression syndicale finissent par aboutir à une rigidité du taux de salaire à la baisse . En fait , la hausse des salaires peut être réelle dans un contexte d’accroissement de productivité . Une part de celui-ci revient aux salariés . Dans ces conditions , il n’y a pas de tension inflationniste par les salaires . Si en revanche , la hausse des salaires se produit en dehors de toute pénurie de main d’oeuvre ; si en plus , elle est supérieure à l’accroissement de la productivité , les coûts de production des entreprises augmentent . Les entreprises n’ont aucune raison objective d’accepter une diminution de leur marge et sont donc amenées à répercuter la hausse des salaires sur leurs prix . Le risque de la spirale inflationniste est alors grand . En effet, la nouvelle hausse des prix « décidée » par les entreprises ampute d’autant le pouvoir d’achat des ménages lesquels peuvent réclamer une autre augmentation de leurs salaires . Les entreprises réagiront de nouveau …

Les prix augmentent sous une double pression : celle des salariés et celle des entreprises . Les premiers augmentent leur niveau de consommation ou , à défaut , ils le maintiennent ; les secondes cherchent à maintenir leurs profits . Ces tendances peuvent encore engendrer ce qu’on appelle un effet perroquet : le souhait de maintenir une parité de salaire avec une autre branche de l’économie au sein de laquelle des augmentations ont été accordées .

L’inflation par les profits correspond à l’augmentation des marges bénéficiaires en dehors de toute croissance de la demande ou , plus globalement , en dehors de toute fluctuation du marché . Une situation de monopole ou d’oligopole peut inciter une entreprise à accroître ses prix de vente . Dans un contexte inflationniste dû à diverses causes , certaines entreprises peuvent être également incitées à « la valse des étiquettes » . On peut imaginer , par exemple , qu’un accroissement du prix d’un ou de plusieurs inputs , entrant dans la combinaison productive d’une entreprise , soit répercuté sur le prix au détail avec une légère majoration .

Il est admis que l’inflation par les profits est moins importante que l’inflation par les salaires . Maurice ALLAIS ( 1965 ) soutient en effet que « la poussée par les profits est probablement plus faible parce qu’ils constituent une part plus réduite du prix et , en partie , parce qu’une telle poussée intervient une fois pour toutes , alors que les poussées salariales sont plutôt continues » .

On pourrait penser que l’inflation est finalement l’expression des rapports entre les groupes sociaux qui constituent la Nation étant entendu que chacun cherche à préserver ses acquis et à les élargir .

§ 2.4 ) L’inflation importée : 

On discerne deux causes essentielles : celle relative à la hausse des coûts , celle relatives aux fluctuations de change . Les producteurs de certains produits importés , matières premières , énergies ou encore produits alimentaires , peuvent décider une augmentation du prix de leurs exportations , à moins que ce ne soit le cours de la marchandise qui s’emballe sous un effet de mode par exemple . La pression peut également trouver son explication dans les variations du cours des devises . Soit il y a hausse du cours de la devise dans laquelle sont libellés les contrats, soit la devise nationale perd de sa valeur sur les marchés en système de changes flottants , soit elle est dévaluée en système de changes fixes.

Les augmentations du prix du pétrole dans les années 70 constituent un bon exemple : sur décision du cartel des exportateurs de pétrole désireux de compenser la perte de leur pouvoir d’achat due à l’inflation croissante dans les pays capitalistes industrialisés , les pays importateurs ont subi de plein fouet par deux fois le renchérissement du prix de la matière première . « Un troisième choc pétrolier » leur a été imposé en 1983 , non pas , cette fois-ci à cause de l’augmentation du prix du produit . Chaque hausse de la matière première importée est répercutée sur les prix intérieurs , soit au niveau de la consommation , soit au niveau de la production ce qui a entraîné des effets de propagation et d’amplification .

On perçoit immédiatement que ce type d’inflation importée peut engendrer une inflation par les coûts et , en fin de compte , déclencher la spirale inflationniste . Dans une telle conjoncture , il convient au plus tôt d’enrayer le mécanisme . Divers remèdes peuvent être utilisés sans que la solution soit pour autant facile .

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