HISTOIRE DU DROIT DE LA FAMILLE
Le droit de la famille est une matière qui a connu de nombreux changements. Il n’y a pas d’autres domaines qui aient connu plus de bouleversements que le droit de la famille depuis une trentaine /quarantaine d’années. Depuis les années 1960, des réformes juridiques accompagnent les évolutions de la société, des structures familiales, avec plus ou moins de retard.
La famille française a connu en effet une véritable révolution silencieuse autour de la conjugalité, la filiation et la protection de l’enfant :
La conjugalité regroupe les relations dans le mariage et le développement de l’union libre et du concubinage et aussi du PACS. On se marrie de plus en plus tard, en moyenne vers 29 ans pour les femmes et 30 ans pour les hommes. Si le mariage est encore la norme la plus fréquente dans l’Europe du Sud (page 45), pour des raisons religieuses notamment, en particulier au Portugal, en Espagne et en Italie, au contraire dans l’Europe du Nord et de l’Est le mariage recule au profit de l’union libre, à l’exception notable de la Pologne très catholique. Maintenant un couple sur deux en moyenne vit hors mariage à question très débattue du mariage homosexuel. Il y a également l’instabilité conjugale, le démariage = séparation de corps et divorce, il y a une véritable fragilisation du couple, près de la moitié des couples mariés en France divorcent, 42 mariages sur 100 d’où la multiplication des familles monoparentales ou recomposées.
La filiation, regroupe les problèmes entre parents et enfants. En moyenne, en France, le couple, marié ou non, a un ou deux enfants. L’âge moyen de la mère au premier enfant a reculé (30 ans) et elle travaille (80 %). Les femmes se marient donc plus tard, ont des enfants plus tard, mais le fait qu’elles travaillent ne nuit en rien à la fécondité (la France est au 2ème rang dans l’UE en matière de fécondité derrière l’Irlande). Il y a en même temps un vieillissement de la population à cause de l’allongement de l’espérance de vie et l’arrivée à l’âge de la retraite de la génération du baby-boom, on observe donc un vieillissement de la population : augmentation de la part des personnes âgées de plus de 60 ans de 80 % d’ici à 2008. La filiation se présente comme une filiation légitime lorsque l’enfant naît dans le cadre d’un couple marié, elle est naturelle quand il naît hors mariage. La filiation naturelle est de plus en plus importante, près de la moitié des enfants naissent hors mariage en France et dans l’Europe du Nord, par contre en Allemagne, en Belgique et dans l’Europe du Sud 75 % des enfants continuent à naître dans le cadre du mariage, en Italie, en Pologne ou en Grèce, cette proportion atteint même les 80 %. Le législateur français en a tiré les conclusions, en supprimant la distinction filiation légitime / filiation naturelle, en mettant leur statut à égalité, les enfants ont aujourd’hui les mêmes droits. Dans les rapports d’autorité entre les parents et les enfants, du fait de la vie active des femmes et de la promotion de leurs droits, on est passé de la puissance paternelle ou « patria potestas » à l’autorité parentale qui est exercée aussi bien par le père que la mère.
La protection de l’enfant se développe. Le droit français et les droits civils européens insistent sur cette protection des droits de l’enfant orphelin ou dans la famille. Cette évolution explique les réformes profondes du droit de la famille depuis les années 1960, c’est-à-dire le début de la Vème République à peu près.
On est en pleine actualité, le passé n’est jamais tout à fait mort, il subsiste encore aujourd’hui des règles qui remontent à fort longtemps.
Le droit de la famille est sensible aux phénomènes de permanence : de tout temps les sociétés ont connu une organisation familiale, mais aussi de mutations et de diversité suivant les endroits et les périodes.
La famille romaine qui elle-même a beaucoup évolué est très différente de la famille du Moyen Age, puis de celle de l’Ancien Régime, puis de celle de l’époque révolutionnaire.
Il y a donc eu beaucoup de transformations, mais il y a aussi beaucoup de règles qui subsistent qui sont tributaires de l’histoire du droit de la famille.
Même s’il existait un droit familial encore avant, le droit occidental nous vient du droit romain. Au Moyen Age, on a deux sources fondamentales du droit de la famille :
– le droit canonique, le droit de l’église (en grec canon signifie décision)
– les coutumes, les droits coutumiers.
A partir du XVIème siècle, on assiste au triomphe de la Monarchie Absolue et on peut alors observer deux autres phénomènes :
– la législation étatique, émanant de l’Etat Monarchique
– la laïcisation progressive de la société (voir Max Weber, sociologue allemand du début du XXème siècle qui la met en valeur).
Ensuite, il y a la Révolution, de 1789 à 1799, qui débouche sur l’Empire et la codification.
Puis le XIXème siècle et la révolution industrielle.
Pour chaque institution du droit de la famille, on retrouve des apports de ces différentes périodes.
Dans le droit de la famille on trouve :
- les relations entre époux et les relations parents / enfants à étudiées en L3
- le droit patrimonial de la famille (les successions …) à étudiées en M1
Titre I – La famille occidentale : son évolution, de l’Antiquité Romaine à l’époque contemporaine
Chapitre I – La famille romaine : de la famille patriarcale à la famille conjugale
La famille romaine n’est ni statique, ni figée. L’Histoire de Rome s’écoule sur 14 siècles, du
– VIIIème siècle aux + V/VIème siècles. On peut donc observer de profondes évolutions.
A l’époque archaïque, de la fondation de Rome au – VIIIème siècle jusqu’au – IIIème siècle, Rome est une société patriarcale.
[Rappel : l’époque classique : du – IIIème siècle au + IIIème siècle ; l’époque tardive ou post-classique : du + IVème au + VIème siècle]
Puis elle se transforme en une famille nucléaire fondée sur le couple conjugal et leurs enfants ce qui détermine l’évolution du mariage, de la filiation et de la condition des enfants.
C’est une évolution de la famille patriarcale à la famille conjugale.
Sous sa forme ancienne, la famille est étendue par sa taille et la force des liens entre ses membres.
Pour la famille patriarcale, on parle de parenté agnatique alors que pour la famille conjugale, on parle de parenté cognatique.
Section 1 – La famille patriarcale archaïque et la parenté agnatique : clan et lignage
La famille patriarcale, beaucoup de peuples l’ont eu en commun. La famille est fondée exclusivement sur l’autorité politique du « pater familias », de sexe masculin, le chef de famille. Rome c’est la cité des pères, l’ensemble des pères citoyens qui ont la vocation de donner à la cité ses futurs citoyens.
La parenté est agnatique, tous ceux qui sont sous l’autorité d’un même père sont des membres de la même famille.
L’agnation est une parenté civile, créée par la cité et qui a une finalité sociale et politique.
Elle est exclusivement masculine, ce sont les pères citoyens, le chef de famille unit tous ceux qui sont sous sa puissance, soit par filiation légitime, soit par adoption.
Quand le mariage est « com manu » l’épouse aussi est soumise à la puissance du pater, c’est une cérémonie par laquelle le père de la mariée abandonne son autorité sur sa fille pour la confier à la famille de son mari. Le contraire c’est le mariage « sine manu » où la femme n’est pas transférée d’une famille à l’autre, alors si son père meurt elle devient sui iuris, autonome en quelque sorte.
Après la mort du pater familias les membres de la famille continuent à être des agnats. C’est donc une parenté qui ne repose non pas sur les liens du sang (à parenté cognatique) mais sur l’idée de patria potestas.
Les trois cercles de l’agnat :
A – Le premier cercle de l’agnation : la famille résidentielle, la domus, familia, ou l’agnation immédiate
Ce sont tous ceux qui vivent effectivement sous le même toit que le pater. Le chef de famille n’a plus son propre pater, il est sui iuris, il est son propre chef, le maître de lui-même, il a une pleine autonomie juridique. Il a l’autorité sur les personnes qui dépendent de lui : les alieni iuris (soumis au droit de l’autre).
Vivent sous le même toit :
- l’épouse mariée com manu (c’est le mariage le plus fréquent)
- leurs enfants
- les épouses des fils qui se sont mariées com manu et leurs enfants.
C’est une société rurale, ils vivent sur le domaine agricole. La soumission, l’assujettissement au chef de famille détermine le rattachement à la domus, à la familia.
La patria potestas est un pouvoir absolu, elle comporte même un droit de vie et de mort (qui a été tempéré avec le temps). Seul le pater jouit de la pleine capacité juridique. C’est le véritable propriétaire des biens de la famille qu’il conserve jusqu’à la mort. Il a également des pouvoirs religieux, il pratique le culte des ancêtres, il honore les Mânes et les Lares, les divinités protectrices de la maison, et les Pénates, les petites divinités de la maison.
Tout ceci c’est l’agnation immédiate. Au décès du pater familias, la domus se dissout. Les enfants deviennent sui iuris, pleinement capables, les fils deviennent pater familias de leur propre domus, les enfants se partagent le patrimoine sur lequel semble avoir existé une sorte de copropriété virtuelle quand le pater familias était vivant. Les enfants sont des heredes sui, ils acquièrent de plein droit la succession. Du vivant du pater familias ils avaient un droit virtuel sur le patrimoine qui devient effectif à sa mort. Les filles qui ne sont pas mariées sont sui iuris. Les anciens membres demeurent toujours unis par le lien de l’agnation.
B – Le deuxième cercle de l’agnation : les agnats ou l’agnation de proximité
Ce sont les frères, les sœurs, les neveux, les cousins… unis exclusivement par un lien de parenté masculine. Il y a des effets en matière de droit privé dans le domaine de la tutelle et du droit successoral, s’il n’y a pas ou plus d’heredes sui dans la domus du défunt, c’est un des agnats de proximité qui recueille la succession. C’est un parent collatéral par les mâles du défunt.
C – Le troisième cercle de l’agnation : la gens ou l’agnation de rattachement
La gens constitue un groupe fort étendu, c’est un clan familial dont les membres sont ou se croient issus d’un même ancêtre réel ou mythique. (Voir page 8)
Quand l’ancêtre est réel qu’il a existé, on parle de lignage, quand il est mythique, on parle de clan. Exemple : dans la gens Julia, celle de Jules César, on se croyait descendants de Vénus. (Voir page 7 à 11).
C’est l’agnation poussée à l’extrême, le pater familias commun, quand il a existé, a pu vivre très longtemps auparavant, et a pu avoir beaucoup de descendants. (Voir page 10 à 12).
En grec on parle de genos, la notion de clan est commune à tous les peuples indo-européens. La cité romaine serait née au départ d’une fédération de gentes, de clans familiaux. Elles exercent différentes fonctions :
- économique : l’exploitation territoriale agricole commune
- religieuse : un culte est rendu à l’ancêtre fondateur réel ou mythique
- militaire : c’est le chef militaire du clan contre les autres clans ou les ennemis extérieurs.
A l’époque classique, le phénomène de la gens connaît un déclin, mais il subsiste en droit privé, on porte le même nom gentilis.
La loi des 12 tables (au – IV/Vème siècles) fait intervenir la gens dans l’organisation des tutelles et pour les successions en l’absence de représentants du premier ou du deuxième cercle de l’agnation.
L’évolution de cette organisation se fait au fur et à mesure que Rome s’étend sur la péninsule italienne et dans le bassin méditerranéen, autrement dit quand Rome devient une puissance conquérante.
Section 2 – L’évolution vers la famille conjugale sous la République et l’Empire : de l’agnation à la cognation
On est dans la période classique, celle de la République aristocratique où la vie politique est agitée, et du Haut Empire ou principat.
La famille patriarcale correspond à une Rome primitive et rurale, où l’autorité politique est embryonnaire et les fonctions politiques et sociales sont assumées par les patres familias.
Mais le développement de la Cité de Rome est incessant, elle devient un véritable Etat qui se dote d’un empire né de conquêtes. L’économie s’en trouve bouleversée, elle devient marchande, monétaire du fait des échanges qui se développent dans le bassin méditerranéen, de l’essor des activités bancaires et commerciales, et de l’esprit individualiste grandissant dans les liens sociaux. La gens s’en trouve fortement touchée, beaucoup disparaissent, le lien gentilis subsiste uniquement dans les grandes familles aristocratiques.
Exemples : la Gens Cornelia de Sylla, la Gens Metelli auquel se rattachait la Gens Caecilia.
A – Le déclin de la domus
Quatre facteurs principaux y ont contribué :
- Le développement des mariages sine manu:
La main est un symbole de pouvoir. Ce mariage a lieu sans le rituel qui exprime une convention entre les familles, le passage de l’autorité du pater familias de la mariée au pater familias de la famille maritale. Le mariage com manu décline sous la République pour disparaître sous l’Empire. Le mariage sine manu exclue la formation de tout lien de parenté agnatique entre la mariée et la famille de son mari.
- La fragilisation du lien matrimonial :
La multiplication des divorces a pour conséquence la multiplication des mariages. Cf. : texte de Cicéron qui se lamente des aventures matrimoniales de sa fille puisqu’à chaque fois il doit verser une dot. Il est commun qu’un homme se marie deux à trois fois.
- La naissance d’un empire territorial :
On passe d’une économie autarcique à une économie financière commerciale qui provoque un relâchement des liens entre le pater familias et ses enfants. C’est une mondialisation à l’échelle de l’époque. Le principe d’unité du patrimoine familial est atteint : les fils voyagent de plus en plus pour des raisons commerciales, militaires, administratives sur les territoires conquis. Il y a un changement total de contexte. La pratique juridique atténue le principe, mais qui ne disparaît pas pour autant. Le droit romain reconnaît désormais une capacité contractuelle aux fils, voire la possibilité de posséder un patrimoine distinct.
- L’influence du stoïcisme et du christianisme :
Sous l’Empire, le courant philosophique d’origine grecque, le stoïcisme et le christianisme vont contribuer à limiter la toute puissance du pater familias et valoriser la famille conjugale et l’autonomie individuelle. Selon la pensée stoïcienne, la nature est contrôlée par le logos, la raison mais aussi les comptes en grec, en latin on dit ratio ce qui correspond aussi à ces deux notions. Le logos contrôle l’univers, il est assimilé à un dieu souverain, toute homme possède une parcelle de cette raison divine, c’est pourquoi les stoïciens considèrent qu’il existe une fraternité universelle entre les individus. Ils remettent en cause la distinction homme libre/esclave et celle de grec/barbare. Chaque individu est donc autonome. Cette pensée stoïcienne a une grande influence dans la pensée romaine. Le christianisme prend le relais, il devient peu à peu religion d’Etat.
B – Reconnaissance de la parenté cognatique
Les cognats sont reconnus progressivement. La parenté cognatique est fondée sur une parenté par le sang. La cognation c’est la parenté biologique, naturelle, qui repose sur le lien du sang. Elle unit tous ceux qui parmi les hommes et les femmes ont un ancêtre commun et font partie de la même famille civile. La cognation englobe donc tous les agnats mais aussi tous les parents par les femmes qui ne sont pas pris en compte dans l’agnation, c’est la grande différence entre ces deux parentés.
(Voir page 9, la parenté agnatique ou patrilinéaire, et la parenté cognatique ou indifférenciée)
Parallèlement au droit civil, qui régit les relations entre les personnes privées, se développe le droit prétorien, dans lequel le magistrat a un rôle essentiel, c’est le préteur qui organise le procès par lequel le droit peut évoluer. Il imagine des remèdes procéduraux, il donne une qualification juridique à la situation de fait présentée devant lui, et trouve une solution par des moyens procéduraux que le préteur met à la disposition des parties. A Rome le droit évolue par la procédure, le droit de l’action en justice.
Ce droit prétorien développe la famille cognatique et reconnaît par exemple aux parents par la mère des droits successoraux au même titre que les parents par le père.
La fin de l’évolution a lieu au VIème siècle avec la compilation de Justinien qui supprime la distinction entre le droit successoral civil et le droit successoral prétorien. Désormais le droit successoral repose exclusivement sur la parenté cognatique, qui ressemble fortement à la famille occidentale actuelle.
Chapitre II – La famille aux époques médiévale et moderne
Dès la fin du Vème siècle, l’Occident, et en particulier la Gaule, est séparé de l’Empire, qui est alors formé de plusieurs royaumes après les invasions barbares. Ils n’ont pas complètement rompu avec le droit romain, ils en gardent un certain héritage. Le droit traditionnel romain recule cependant au profit des coutumes de ces peuples, germaniques ou celtes, et de l’Eglise. Le droit romain sera par la suite redécouvert à la fin du XIème siècle d’abord en Italie puis dans toute l’Europe. Ces différentes traditions juridiques ont des influences respectives.
Section 1 – La famille médiévale (Vème – XVème siècle) : ménage et lignage
Cette période est caractérisée par un concept communautariste de la vie de famille mais aussi par la force des liens familiaux, le lignage dans les familles aristocratiques. C’est différent à l’époque moderne (XVIème – XVIIIème siècle), sous l’Ancien Régime, où la conception est plus individualiste, mais aristocratique en même temps, avec une vision plus autoritaire de la politique, d’où l’affirmation de la Monarchie absolue.
Le trait dominant de la famille médiévale, c’est l’étroite solidarité entre ses membres qui fait de la famille une véritable communauté. Ce qui diffère des solutions plus individualistes du droit romain du Bas Empire.
A – L’origine de l’esprit communautaire
1 – Tradition germanique : wergeld, chrenecruda
Les historiens, notamment allemands du XIXème siècle, ont longtemps admis, que les coutumes des anciens germains étaient profondément communautaires au sein du ménage. Au sein du clan, « sippe » dont les membres ont en commun un même ancêtre, la propriété est collective entre le père et ses enfants, on dit une « propriété en main commune ». Tout ceci s’oppose à l’individualisme romain.
Peut être est-ce une exagération d’analyse ? Remise en cause de l’historiographie aujourd’hui, il y avait aussi des aspects non communautaires dans les vieilles coutumes germaniques.
Il y avait quand même une forte solidarité familiale, par exemple : wergeld, qui est la composition pécuniaire qui est due en cas de meurtre, elle est payée au fils du défunt pour moitié et aux parents mâles du côté paternel et du côté maternel pour autre moitié.
Si le coupable ne peut acquitter sa dette, la loi salique (rédigée sous Clovis puis modifiée sous Charlemagne) lui donnait la faculté de rejeter la charge sur ses trois parents les plus proches aussi bien de la lignée du père que de celle de la mère. Ce mécanisme s’appelle la chrenecruda. Elle avait lieu à la suite d’une cérémonie symbolique.
L’accusé d’un crime pouvait se prévaloir de la solidarité familiale par l’intervention de co-jureurs : ses parents viennent jurer devant le tribunal pour lui manifester son soutien.
Dans un conflit entre deux individus de deux clans cela peut dégénérer en vendetta familiale.
Il existe tout de même des limites à cette solidarité :
La loi salique donne l’exemple d’un rituel (briser sur sa tête quatre baguettes d’aulnes) pour rompre les liens familiaux, et renoncer à la succession.
Remise en cause historiographique de l’existence des sippes qui n’auraient pas été de véritables communautés patrimoniales, et dont les liens auraient été plus relâchés que ce que l’on disait au XIXème siècle.
L’examen des actes de la pratique (chartes, formules…), nous montre que l’on met l’accent d’avantage sur le ménage qui est le plus indépendant des groupes familiaux et la structure familiale fondamentale des sociétés du Moyen Age.
Mais même au sein du ménage, l’esprit communautaire est limité, il n’y a pas de communauté de biens entre les époux, même si l’usage est d’accomplir les actes les plus importants à deux. Le pouvoir du père, le mundium, exclut la possibilité d’une gestion communautaire des biens.
La propriété en main commune n’existe que chez certains peuples, par exemple, les burgondes dont la loi organise le partage du patrimoine familial entre père et enfants. Mais chez d’autres, le droit du père est illimité, ce ne sera qu’après les invasions qu’il sera limité pour réagir contre la hausse des libéralités faites à l’Eglise.
2 – Origines autochtones : liguriennes, ménapiennes, celtes
C’est Meijers, un historien du droit hollandais qui émet cette hypothèse. Ce serait dans les coutumes que transparaîtrait l’esprit communautaire. Entre l’Escaut et la Meuse, les Ménapes ; les ligures au Sud Ouest de la Gaule et dans le Nord de la plaine du Pô et avant les invasions germaniques les celtes mais c’est plus difficile à savoir car on n’a pas de document, mais c’est fort probable.
3 – Evolution de la société : diffusion du christianisme, déclin de l’autorité publique, affaiblissement de l’économie d’échange
Le droit familial subit l’influence du contexte, l’esprit communautaire est originaire de phénomène qui se sont produits :
La diffusion et l’influence du christianisme avec son idéal de charité et de partage.
Le déclin de l’autorité publique centrale, incapable d’assurer la sécurité, aux dépends des pouvoirs locaux suite aux invasions et aux guerres qui font régner une insécurité généralisée et incessante.
La disparition de l’économie d’échange, l’avènement d’une économie autarcique fermée sur l’exploitation agricole.
Toutes ces raisons entraînent le resserrement des liens familiaux.
B – Importance des communautés familiales
La famille au Moyen Age c’est une communauté de vie et de bien. Le ménage se limite aux parents et aux enfants tandis qu’une communauté élargie forme un cercle plus grand.
1 – Le ménage : laudatio parentum, réserve héréditaire
Il est formé du père, de la mère et des enfants (éventuellement après avec leur conjoints et enfants). Il repose sur le principe communautaire, virtuellement les biens appartiennent en commun à tous les membres, il n’y a pas de propriété individuelle ou alors que sur certains biens déterminés. Les actes de disposition pour les immeubles (principalement la terre) se font en commun. L’aliénation n’est valable que si elle est approuvée par le conjoint et les enfants. C’est le laudatio parentum. On peut même parfois tenir compte des collatéraux. Ils doivent renoncer à leur droit sur le bien qui est vendu, idée de copropriété.
A partir du XIIème siècle le ménage est en déclin, l’économie redevient une économie d’échanges, la monnaie fait sa réapparition, les pratiques plus individualistes et les villes renaissent.
Lorsque deux ou plusieurs personnes, parentes ou non, vivent ensemble, leurs biens meubles, sauf volonté contraire, tombent en communauté.
Exemple : un coutumier angevin du XIIIème siècle prévoit que si un couple recueille à son foyer un enfant, celui-ci aura sa part dans les meubles du ménage, donc a fortiori on peut penser qu’il en sera de même pour les enfants du couple.
Exemple : à Paris au XVème siècle, une femme recueille et élève un enfant abandonné, mais elle fait une déclaration au tribunal pour éviter la formation d’une communauté entre elle et lui. C’est un exemple de déclaration expresse contraire.
La vocation successorale est fondée pendant longtemps moins sur les liens du sang que sur le fait d’avoir vécu avec le decujus. Jusqu’au XIIIème siècle, dans les coutumes de l’Ouest, de Vendée, de Bretagne, le partage des meubles ressemblent plus à une liquidation de communauté qu’à une véritable succession.
La règle de l’exclusion successorale des enfants déjà dotés avant la succession, qui se sont établis hors de la maison familiale, est appliquée à Paris au XIIIème siècle, elle se rattache au principe.
La réserve héréditaire dans certaines régions s’explique par les pratiques communautaires. Elle est prévue dans beaucoup de coutumes du Royaume de France. On l’appelle aussi « réserve des quatre quints » et correspond à une portion des biens propres dont une personne ne peut disposer par testament ou par donation au préjudice des héritiers.
En effet par principe, une partie des biens propres est réservée aux héritiers : les 4/5ème
Le decujus ne peut disposer librement que des 1/5ème de ses biens propres.
Cette réserve est un vestige de l’ancienne copropriété familiale germanique qui a pour les aliénations à titre gratuit un rôle analogue à celui du retrait lignager qui joue lui pour les aliénations des biens propres à titre onéreux.
2 – Les communautés familiales élargies : frérèches ; affrèrements ; communautés taisibles
Elles regroupent plusieurs ménages vivant ensemble.
Au Moyen Age on trouve tout d’abord les frérèches qui naissent d’une indivision successorale qui n’a rien de provisoire qui se prolonge entre frères et sœurs et leurs conjoints pour éviter le partage des domaines agricoles.
Elle existe chez les roturiers et dans les milieux paysans.
Dans les milieux aristocratiques, la noblesse on trouve l’institution du parage qui est une tenure de fief partagée entre les frères qui n’existe pas aux yeux du seigneur dont ils dépendent, il n’y a que leur représentant l’aîné.
Les affrèrements plutôt dans le midi de la France entre le XIIIème et le XVIème siècle sont des communautés de tous les biens, établies par contrat entre frères ou même entre personnes étrangères qui ont décidé de mettre leurs biens en commun « une table, une bourse et un pain ». Tout ce qui est acquis devient propriété commune et en contrepartie la communauté se charge de l’entretien et de l’établissement des enfants. Ceux qui la quittent reçoivent leur part tout au moins en biens meubles.
Dans les pays de coutume (au Nord du royaume) on rencontre des communautés taisibles, elles ne se font pas par contrat, en Auvergne, en Bourgogne … dans le centre de la France
Elles se forment tacitement, elles répondent à des besoins économiques et à celui d’échapper à la mainmorte servile (ne pas pouvoir transmettre ses biens à ses descendants qui reviennent au contraire au seigneur) les membres ne possèdent rien en propre, mettent tout en commun, travaillent ensemble sous l’autorité d’un chef élu représentant la communauté. Elles se perpétuent de générations en générations. Certaines communautés taisibles ont perduré parfois jusqu’au début du XXème siècle.
C – Force des liens lignagers dans l’aristocratie : chevetaigne (guerre) ; asseurement et finport (justice) ; assemblée de parents et solidarités militaires (vie familiale) ; retrait lignager (succession)
Parallèlement à ces communautés, groupements horizontaux, le droit médiéval attache une grande importance à une autre forme de communauté verticale, le lignage qui rassemble les parents par le sang, tous ceux qui descendent d’aïeuls communs du côté maternel et paternel. Dans l’ancien droit français, la parenté est cognatique. Le lignage crée de fortes solidarités et n’imposent pas une vie en commun, il subsiste même lorsque la féodalité décline.
L’aristocratie médiévale repose sur les liens vassaliques et lignagers.
La puissance d’un chef de famille dépend de l’aide apportée par ses parents, les guerres entre familles seigneuriales sont très fréquentes, cela forme le cercle d’amis charnels et naturels.
Cette solidarité lignagère se manifeste dans les affaires criminelles et les guerres privées.
Le chevetaigne, le chef de guerre mène au combat le groupe familial et conclut la paix.
Les conventions d’asseurement engagent tous les parents, lorsqu’un litige est porté devant la justice, c’est la famille qui qualifiée pour le faire et parfois même pour exécuter la sentence.
En Bretagne le finport permet de mettre en cause tous les parents de l’accusé.
Dans la vie familiale, les décisions importantes sont prises par les assemblées de parents par exemple, la protection des incapables mineurs et majeurs, elles discutent du mariage des orphelines et du montant de la dot.
Le lignage exerce un lien éminent sur les biens propres de ses membres provenant de la succession des parents. En l’absence de descendants les coutumes organisent le retour des biens aux parents de la ligne d’où les biens sont issus. Les parents collatéraux ont vocation à succéder et sont héritiers réservataires sans limitation de degré. En cas de vente d’un bien propre, ces collatéraux peuvent s’opposer en se substituant à l’acheteur en exerçant le retrait lignager. C’est le droit pour un parent de la ligne concernée, en cas d’aliénation d’un bien propre de la succession à un étranger à la famille, à faire renter le bien propre dans la famille en remboursant le prix à l’acheteur. Ce retrait a pour but de protéger, contre les aliénations à titre onéreux, les biens propres des parents.
L’esprit communautaire et le ménage ont plutôt prévalu dans les classes inférieures, le lignage l’emporte dans la noblesse, on retrouve cette distinction dans les coutumes dont les solutions se fixent entre le XIème et le XIIIème siècle.
Les coutumes de l’Ouest du royaume, où les règles se sont formées à partir des usages des nobles, se montrent plus lignagères et anti-communautaires, par exemple la coutume de Normandie.
Le Nord et le centre sont des régions communautaires.
Le groupe orléano-parisien adopte une position équilibrée entre lignage et ménage.
A partir du XIIIème siècle le lignage progresse à peu près partout au dépend du ménage et de l’esprit communautaire.
Section 2 – La famille d’Ancien Régime (XVIème – XVIIIème siècle) : une monarchie domestique
Bien entendu des traits de la famille médiévale se prolongent, ménage et lignage subsistent mais un esprit nouveau se fait jour plus individualiste autoritaire et inégalitaire qui profite au chef de famille dont les pouvoirs se renforcent, il apparaît comme un « monarque domestique », c’est le reflet de la monarchie absolue au plan politique.
A – Les facteurs de transformation
1 – L’influence du droit romain
Redécouverte du droit romain à travers la compilation de justinien redécouverte au XIème siècle. Jusque là, les solutions romaines, plus ou moins comprises, étaient plaquées sur les coutumes qui existaient. L’attitude des juristes change, les textes romains sont réétudiés selon la méthode des humanistes.
Ils recherchent le sens originel et utilisent les solutions du droit romain qui permettent de trouver des solutions efficaces à des situations non-prévues par les coutumes.
La distinction coutume / droit écrit se creuse.
Dans les pays de droit écrit, l’action des parlements conduit à éliminer les règles coutumières au profit des solutions romaines.
Dans le nord aussi les règles romaines sont introduites dans les coutumes au moment même où elles font l’objet d’une rédaction et d’une réformation.
On utilise le droit romain pour combler les lacunes et supprimer les contradictions.
Etablissement de l’autorité pleine et entière de celui reconnu comme chef de famille, retour du pater familias romain.
2 – L’évolution du pouvoir royal
Influence du système politique sur le droit privé.
Fin XVIème siècle, fin des guerres de religion se forme la monarchie absolue, J. Bodin (le traité des Six Livres de la République) appelle de ses vœux la formation d’un pouvoir très puissant entre les mains du monarque. En fait un monarque de droit divin dont l’autorité est incontestable. JB décrit d’ailleurs l’Etat comme une fédération de familles, la force et la cohésion de l’Etat dépend de la cohésion et de la solidité des familles.
Préambule d’une déclaration royale de 1639 : « la naturelle révérence des enfants envers leur parents est le lien de légitime obéissance entre le souverain et les sujets ».
3 – Le développement de l’esprit aristocratique
Il prend le relais de l’esprit lignager du Moyen Age.
Les anciennes solidarités militaires et judiciaires sont devenues inutiles du fait du développent de l’Etat. Les relations prennent un fondement nouveau à caractère social et aristocratique, et aussi dans la bourgeoisie d’offices.
L’obsession des familles est de préserver l’honorabilité de la famille et de transmettre un nom et un patrimoine, d’acquérir des fonctions qui consacrent l’ascension sociale dans une société d’ordres hiérarchisés. Le mariage n’est pas désintéressé, c’est pour se faire des alliés.
Encadrement des membres pour prévenir des mésalliances qui porteraient atteinte au groupe familial.
B – Individualisme et autorité dans la famille
Succède à l’autorité partagée de la famille médiévale la puissance d’un seul, qui a la double qualité de père et de mari.
Renforcement des inégalités patrimoniales.
1 – Renforcement des pouvoirs du mari sur l’épouse
Cela s’accentue à partir XVIème siècle.
Au Moyen Age, l’épouse était une collaboratrice, dans le midi, il était fréquent que le mari nomme sa femme pour lui succéder dans ses fonctions de chef de famille.
L’Ancien Régime est antiféministe, il est fidèle en cela au droit romain.
Dans les pays de coutume, où le régime matrimonial est communautaire, la femme mariée est frappée d’une véritable incapacité juridique sur ses biens propres, elle ne peut accomplir aucun acte de disposition sans l’autorisation de son mari.
Dans les pays de droit écrit le régime dotal lui est a priori plus favorable, mais ce régime est assorti de clauses restrictives des pouvoirs de l’épouse, en plus d’une dépendance personnelle sanctionnée par le droit de correction du mari sur l’épouse.
2 – Renforcement des pouvoirs du père sur les enfants
L’autorité parentale du Moyen Age laisse la place désormais à la puissance paternelle.
Dans les pays de droit écrit, le père redevient le pater familias romain, jusqu’à sa mort il exerce sur ses enfants une autorité absolue.
Dans les pays de coutume plus modérés, il y a l’introduction d’une majorité émancipatrice qui permet aux enfants, après un certain âge d’échapper à l’autorité paternelle.
Mais l’autorité sur la personne est aussi forte dans le Mord et le midi. Le père jouit d’un pouvoir de correction étendu qui fait de lui un magistrat domestique.
3 – Renforcement des inégalités patrimoniales au sein de la famille
Au Moyen Age, il n’y avait des inégalités que dans les familles nobles pour éviter le morcellement des fiefs.
A l’époque moderne le droit d’aînesse subsiste sous une forme atténuée dans les pays coutumiers. Des inégalités nouvelles apparaissent à la suite d’initiatives individuelles. Réintroduction du testament et du contrat de mariage. Avec une clause selon laquelle les filles dotées sont appelées à renoncer par avance à la succession et la pratique des substitutions, il s’agit d’une libéralité contenue dans un testament ou un contrat et qui est adressée à une personne, à charge pour elle de la conserver et de la rendre à sa mort à un tiers qui lui est substitué et qui peut être à son tour chargé de restituer ce bien à un autre pour assurer la conservation des biens dans la famille
Chapitre III – La famille de la révolution à l’époque contemporaine
A – L’esprit libéral des réformes de la Révolution
Elles sont proches par leur individualisme et leur égalitarisme de la législation d’aujourd’hui.
(Page 51 à 59)
La Révolution adopte une attitude diversifiée, elle voit dans la famille une sorte de concurrent de l’Etat, un frein à la diffusion des idées nouvelles. Dans le climat totalitaire de la Convention jacobine, fin 1792 à 1794, un projet préconise d’enlever les enfants à leurs parents pour les placer en interne et pour leur apprendre le nouvel esprit civique (influence de Spartes).
L’utilité sociale de la famille est reconnue sous le Directoire, 1795 – 1798, elle était déjà chantée par les philosophes du XVIIIème siècle.
Le Directoire est soucieux de reconstituer les structures ébranlées de la société, des mesures sont prises en faveur des familles nombreuses, on instaure les fêtes des époux, de la piété…
Une loi d’août 1790 crée des tribunaux de famille.
Les relations sont fondées sur le partage, l’égalité, la liberté.
On veut éliminer l’influence de l’Eglise dans les institutions familiales. Les réformes sont nombreuses et souvent audacieuses : laïcisation complète du droit matrimonial, instauration du mariage civil et du divorce.
La puissance paternelle est amoindrie
L’égalité successorale est établie, la reconnaissance de l’égalité entre les enfants légitimes mais aussi au profit des enfants naturels.
Seule subsiste l’inégalité entre maris et femmes.
Les réformes les plus audacieuses se sont produites en particulier sous la Convention, au moment où la Révolution a atteint son paroxysme. Ce sont des lois obscures, cependant touffues et mal rédigées. Par esprit de système le législateur a fait passer la famille d’un excès d’autorité à un excès de libéralisme et d’individualisme, d’où la réaction dès la Convention thermidorienne (1794) et jusque sous le Directoire.
B – La réaction conservatrice du Code civil et ses prolongements au XIXème siècle
Il fait œuvre de compromis entre les acquis révolutionnaires et un retour aux solutions de l’ancien régime à c’est la caractéristique de la société française pendant tout le XIXème siècle.
Les réformes de la Révolution jugées trop laxistes. Le Code civil est le pilier de la société moderne, c’est un symbole de l’histoire de notre pays, un lieu de mémoire.
Ni totalement la société d’Ancien Régime, ni totalement la société telle que l’aurait voulue les révolutionnaires.
Le Code civil fait un choix entre les acquis révolutionnaires et les solutions d’avant la Révolution mais aussi entre les traditions coutumières et le droit romain.
Les emprunts à la tradition révolutionnaire :
Un esprit fortement individualiste qui prédomine, il n’y a pas de droit de la famille, on n’envisage pas la famille comme une communauté organisée et autonome. On règlemente les relations individuelles à l’intérieur d’un groupement familial.
Un esprit laïc, le mariage civil, le divorce subsiste dans le Code mais il est strictement encadré.
Une idée d’égalité tout au moins en matière de droit successoral.
Pour le reste, le Code est tributaire de l’ancien droit, parfois il accentue le caractère autoritaire des relations familiales.
Retour à l’autorité dans les relations familiales en réaction à l’anarchie révolutionnaire et conformément aux idées de Bonaparte lui-même.
La puissance maritale et paternelle est restaurée avec un pouvoir de correction étendue.
Une prééminence de la famille légitime avec une baisse des droits des enfants naturels.
C’est cela qui régit les relations familiales pendant tout le XIXème siècle.
C’est en 1880 seulement quand « la République est aux républicains » que les choses vont évoluer.
C – La contre-réaction, des années 1880 au droit actuel
Elle est accentuée par les changements des deux guerres.
(Pages 67 à 73)
L’immobilisme du XIXème siècle tranche avec les changements importants qui affectent la société dans le même temps.
L’industrialisation, l’urbanisation provoquent de vastes mouvements de population et distendent les anciennes solidarités familiales. La famille se restreint et se limite aux parents et enfants = la famille conjugale.
Après 1914, les fortunes se sont érodées, on assiste à une baisse du rôle des familles dans la transmission du patrimoine.
Avec le développement de l’Etat providence, on a moins besoin des solidarités familiales.
Individualisme, indépendance économique des femmes.
Le concubinage, les naissances illégitimes, les familles monoparentales sont courantes…
Le droit ne répond que très tardivement.
L’avènement IIIème République favorise le mouvement de réformes mais avec une certaine lenteur et par touches successives.
Il faudra attendre la seconde moitié du XXème siècle pour des réformes de grande ampleur, même des refontes complètes des parties du Code civil concernant la famille.
Ces réformes retrouvent souvent les solutions du droit révolutionnaire et les dépassent
En ce qui concerne la famille légitime, on rétablit le divorce (aboli sous la Restauration). L’incapacité de la femme mariée est abolie au nom de l’égalité entre époux, un remaniement du fonctionnement des régimes matrimoniaux.
La puissance paternelle est remplacée par l’autorité parentale.
Une augmentation des droits du conjoint survivant
La famille naturelle a fait l’objet d’une reconnaissance, des droits sont reconnus aux concubins, le PACS, les enfants naturels ont des droits successoraux à égalité avec les héritiers légitimes.
La famille a changé de nature, elle apparaît moins comme un groupe social, compact et durable et plus comme une institution temporaire d’assistance et de protection.
Titre II – Le mariage
Ici on va faire la genèse du mariage occidental.
Enrichissement avec le travail des anthropologues (pages 14 à 17 concernant les liens de parenté et famille en anthropologie).
Le mariage a eu lieu partout, dans toutes les sociétés, à toutes les époques, comme un moyen d’alliance entre groupes familiaux.
Négation, prohibition de l’inceste pour favoriser l’échange exogamique, les alliances extérieures réciproques entre les familles.
Il y a 3 termes : époux, épouse, donateur (le père).
Exception dans les familles royales en Egypte où il y a eu des mariages entre frères et sœurs.
Il y a des règles, des conditions de fond du mariage que l’on retrouve aussi bien dans la famille romaine que médiévale, que moderne et contemporaine.
Sous l’influence de la démocratie et de l’individualisme, le mariage d’amour apparaît et le mariage d’intérêt diminue.
(Pages 28 et 30 mariages en Inde, chez les tziganes, en Roumanie…)
Chapitre I – Le mariage en droit romain
(Pages 18 à 21)
Dans le digeste de Justinien, c’est l’union de l’homme et de la femme, une communauté de toute la vie, la mise en commun du droit humain et divin. Ce n’est pas un acte juridique mais une relation continue, sociale à laquelle le droit reconnaît sous certaines conditions des effets.
Section 1 – La formation du mariage romain
Le mariage romain échappe au formalisme (parce qu’il n’est pas à proprement parler un acte juridique) auquel il soumet par ailleurs les contrats.
A – Absence de formes juridiques spécifiques, mais rites sociaux et pratiques juridiques d’accompagnement
Jusqu’au IIIème siècle avant notre ère, à l’époque archaïque, le mariage est précédé de fiançailles et est accompagné d’une convention in manum, qui présentent elles un formalisme très prononcé.
1 – Fiançailles, sponsalia, conclues par la sponsio, simple ou double
Le mot latin sponsio signifie promesse.
L’une des parties ou les deux s’engagent à réaliser l’union dans un avenir plus ou moins proche, soit le futur époux et le pater familias de la jeune fille (jamais elle seule) soit les deux patres familias lorsque le jeune homme a toujours son pater vivant.
Il est courant de fiancer très jeunes les deux futurs époux.
C’est un engagement conclu sous forme de la sponsio, un vieux contrat verbal romain, le fiancé (ou son pater) interroge le pater de la jeune fille qui répond en promettant de remettre sa fille au jeune homme au moment déterminé ou c’est une promesse double quand les deux parties promettent de réaliser le mariage.
Les fiançailles ne constituent pas une première étape du mariage, elles n’entraînent aucune obligation de se marier. La partie qui rompt injustement les fiançailles ne peut, à l’origine, subir qu’une sanction religieuse, puis une sanction civile, le versement d’une somme d’argent.
Au Bas Empire, où le droit romain subit l’influence de la doctrine chrétienne et des pratiques orientales, on reconnaît plus d’effets aux fiançailles. Il y a une obligation de fidélité à la charge de la fiancée, son inconduite est assimilée à un adultère. Les fiançailles créent aussi un empêchement au mariage entre un fiancé et un parent de l’autre.
L’empereur Constantin permet au fiancé délaissé de conserver les cadeaux reçus ou de contraint l’auteur de la rupture à restituer les cadeaux.
Les sanctions pécuniaires sont alourdies, souvent même des arrhes sont versés au moment de la conclusion du contrat, avec une restitution au quadruple si on rompt le contrat (après que au double). Mais on ne va pas jusqu’à imposer une obligation au mariage.
2 – Rites nuptiaux
- Cérémonie des nuptiae
Les « nuptiae » qui entourent la formation du mariage sont des cérémonies à caractère religieux dans la maison de la jeune fille, les prises d’auspices = consulter les entrailles d’un animal par un devin ou le vol des oiseaux par les augures pour voir si les dieux sont favorables, la jonction des mains, les sacrifices aux dieux, l’organisation de banquets, de fêtes…
- Deductio in domum mariti
L’épouse est conduite en cortège dans la maison du mari.
- Acta: tabulae nuptiarum; instrumentum dotale
Actes écrits, les tables du mariage avec témoins.
Acte de constitution de dots.
Ce sont des usages sociaux qui n’ont pas de caractère obligatoire juridique, ils servent juste de preuves du mariage. Il n’y a donc pas de formalisme.
Le mariage com manu s’accompagne lui d’une formalité spécifique, faire entrer la mariée dans la famille de l’époux.
3 – Conventio in manum : confarreatio ; coemptio ; usus et usurpatio trinoctii
La convention in manum (déclin à la fin de la République et disparition sous l’Empire) est un acte solennel qui dans l’ancien droit romain suit le mariage, il ne constitue pas le mariage, il l’accompagne simplement. Il présente un formalisme très prononcé. Il fait passer l’épouse de la domus de son père à celle de son mari.
A l’époque archaïque quand il n’y a pas de convention in manum, quand l’usus (délai) est écoulé elle finit par entrer dans la domus de son mari.
Ses formes varient selon la condition sociale des époux.
Le patriciat et la plèbe sont en conflit sous la République, d’où émerge une nouvelle aristocratie la nobilitas patricio-plébéienne.
Le patriciat est composé des grandes familles aristocratiques de la Rome archaïque (depuis 509 jusqu’à la fin de la République. Les patriciens concluent la convention par la confarreatio qui est une cérémonie religieuse qui consiste à offrir à Jupiter un pain d’épeautre en présence d’un prêtre -le flamine de Jupiter- et de 10 témoins tout en prononçant des paroles religieuses.
Les plébéiens: c’est par la coemptio qui est une vente réciproque fictive qui sert de mode formaliste de transfert de la puissance à l’égard de la fille, en l’absence de convention in manum ou si le formalisme de la cérémonie n’a pas été respecté, la femme tombe néanmoins sous la puissance de la famille de son mari au bout d’un an de mariage (délai d’usus).
Les effets de la convention.
Il sont proches de ceux de l’adoption : la femme rompt tout lien avec sa famille, elle cesse d’être un parent agnat, elle entre dans la famille de son mari comme si elle y était née (loco filiae – elle tient lieu de fille), elle devient l’agnat de son mari et de ses parents et des enfants auxquels elle donnera naissance, tous les biens qu’elle apporte sont absorbés par la puissance de la famille de son mari, elle y devient héritière virtuelle (comme les héritiers siens).
Avec l’affaiblissement de la domus, il a paru moins nécessaire de systématiquement soumettre la femme à cette convention. Elle a la possibilité d’échapper à l’usus, déjà selon loi des 12 tables en 450, la femme mariée sine manu peut échapper aux conséquences automatiques de l’usus en passant 3 nuits par an hors du domicile conjugal : c’est l’usurpatio trinoctii.
B – Nécessité des consentements
Le mariage n’est pas subordonné à la consommation par exemple, mais il a une seule condition : le consentement.
Il a des traits spécifiques cependant, qui le distinguent du mariage moderne qui a hérité de la réglementation du Moyen Age. D’abord quant à l’identité des personnes à consentir ensuite quant au caractère du consentement, la permanence.
1 – Les auteurs du consentement
Quand les mariés sont sui iuris, leur consentement suffit mais quand ils sont alieni iuris, ils dépendent de l’autorité de leur pater respectif, le consentement de celui-ci est nécessaire.
A l’époque archaïque, le mariage est décidé par les chefs de famille sans tenir compte du consentement des époux.
A l’époque classique on a d’abord exigé en plus du consentement des patres, le consentement du marié et plus tardivement celui de la mariée. C’est tout de même le pater familias qui doit donner son consentement nécessairement.
Une réforme de l’empereur Auguste, qui a fait voter une loi sur l’organisation des mariages, la lex Julia qui date de la fin du Ier siècle avant notre ère, et qui avait pour but de développer la natalité après les guerres dévastatrices, permet, sans que le pouvoir discrétionnaire du pater familias disparaisse (rappel : en droit romain, il n’y a pas de suppression formelle des anciennes lois, elles sont abandonnées en pratique, parce qu’on applique de nouvelles règles qui s’y ajoutent) à la fille de contester le refus de son père de consentir à son mariage avec tel garçon. Elle lui permet aussi de conclure le mariage en cas d’absence du pater à condition que la condition sociale du futur époux soit satisfaisante, tant qu’elle n’aurait pas suscité de refus du pater s’il avait été présent. Ce consentement parental est justifié par le souci de protection des époux. Le consentement doit être donné sans vices, mais la contrainte morale du pater n’est pas suffisante pour le vicier.
2 – La nature des consentements
- Mariage païen : le consentement continu
Contrairement à un consentement donné une fois pour toute, le droit romain exige un consentement continu, une volonté permanente de vivre en commun en tant qu’époux.
Le mariage n’est qu’une situation sociale que le droit ne peut prendre en compte que si elle dure. Comme la possession, autre exemple de situation de fait sanctionnée par le droit, il implique un élément matériel, la vie commune comme la possession d’une chose, et un élément intentionnel, l’affectio maritalis, comparable à l’animus du droit de possession. La disparition de l’affectio maritalis au moins chez l’un des époux suffit à entraîner la dissolution du mariage. Le simple fait de se marier une seconde fois a pour effet de dissoudre le premier mariage. Le consentement donné est celui de former pendant toute la vie une union monogamique : « une communauté de toute la vie ». Cela ne signifie pas que le mariage est indissoluble, Rome a connu le principe du divorce, mais cela signifie qu’aucun terme n’est fixé à l’union. Le consentement a donc un caractère de permanence, il doit exister non seulement au moment de la formation du mariage, le consentement initial, mais aussi durant toute la vie des époux, le consentement continu. Le mariage se trouve automatiquement dissout quand l’un des époux manifeste de quelque manière que ce soit sa volonté de ne plus poursuivre l’union.
- Mariage chrétien : le consentement initial
Lorsque l’Empire devient chrétien, à partir du IVème siècle, le consentement devient un consentement initial, ce sens parviendra jusqu’à nous. Le mariage n’est soumis à aucune autre condition de forme, dans le A. nous n’avons étudié que des rites sociaux d’accompagnement du mariage.
C – Les conditions de fond du mariage romain
En réalité le mariage romain correspond à ce que nous appelons aujourd’hui le concubinage, c’est une union non formalisée et qui est dissoute dès lors que l’un des deux souhaite cesser cette union. Mais toute union même durable n’est pas reconnue comme un mariage selon le droit romain : un iustum matrimonium, conforme au droit civil, au droit des citoyens. Il faut aussi des conditions de fond. Il peut tout de même être valide, considéré comme un mariage pérégrin (c’est un homme libre mais qui n’est pas citoyen), ou juste considéré comme un certain concubinage.
- 1 – Les conditions absolues : capacité matrimoniale
Il faut être doté d’une capacité matrimoniale.
1 – Capacité naturelle
- Puberté et nubilité
Le mariage sert à donner naissance à de nouveaux citoyens. Les garçons doivent être pubères et les filles nubiles, à l’origine ces critères sont laissés à l’appréciation du pater après examen physique, puis on fixe l’âge nubile à 12 ans pour les filles et à 14 ans pour les garçons.
- Intégrité physique pour le futur mari
Les garçons ne doivent pas non plus être frappés d’impuissance congénitale.
2 – Capacité juridique
- Conubium
Le mariage n’est possible qu’entre des personnes libres et possédant la citoyenneté romaine, d’origine ou reçue, le droit de conubium, accordé par le jeu d’une concession individuelle ou collective de citoyenneté romaine, par exemple Rome donne la citoyenneté à toute une cité conquise. L’édit de Caracalla ou la constitution antoninienne octroie la citoyenneté à tous les habitants libres de l’Empire. Ne sont finalement laissées hors du droit romain du mariage que les unions entre romains et barbares, prohibées par des peines sévères mais qui n’ont pas eu de grande efficacité.
- Absence de mariage préexistant
Sinon il y aurait bigamie, qui est interdite, une certaine publicité sera donc donnée, puisque la simple séparation vaut répudiation.
- Absence, pour les femmes, d’un veuvage récent
Les remariages sont choses fréquentes, et les divorces sont donc aussi très fréquents, pour des raisons qui se conçoivent facilement, un certain délai de décence d’abord, d’un ou deux ans ou encore de grossesse possible de la veuve si elle se remarie tout de suite, cela poserait la question de la paternité de l’enfant.
- 2 – Conditions relatives : absence d’empêchements
1 – Empêchements fondés sur la parenté et l’alliance, adfinitas
Au Moyen Age, l’Eglise développe énormément cette notion, qui est encore limitée à Rome.
La parenté en ligne directe a toujours constitué un obstacle au mariage. En ligne collatérale, les solutions sont plus fluctuantes, à l’origine les mariages entre parents collatéraux n’ont pas connu de limite, puis elle est progressivement ramenée au 4ème degré à partir de la fin de la République. Mais un sénatus consulte voté à la demande de l’empereur Claude à la fin de la première moitié du Ier siècle de notre ère, remet cette limite en cause puisqu’il désirait épouser sa nièce Agrippine. On connaît de nouveau un durcissement sous l’influence du christianisme durant le Bas Empire, au VIème siècle, l’empereur Justinien interdit le mariage entre collatéraux jusqu’au 4ème degré.
L’Empire chrétien étend la prohibition aux mariages entre parents par alliance trop proches.
2 – Empêchements à caractères éthico-social : cas des membres de l’aristocratie sénatoriale, des ingénus
Ils tiennent à la conception que la société se fait de la place des individus en son sein. Réprobation à l’égard des mariages, ou remariages de l’époux adultère avec son ou sa complice, une loi d’Auguste qui se veut très moralisante sur ce point, la lex Julia de adulteriis. Une autre prononce l’empêchement du mariage entre le ravisseur et sa victime. Enfin interdiction est faite aux membres de l’ordre sénatorial (les sénateurs ainsi que les membres de leur famille) et même aux personnes qui n’appartiennent pas à cette aristocratie mais qui sont nés libres, les ingénus, de se marier avec des affranchis ou des gens de basse condition ou exerçant des métiers jugés infamants, les prostitués ou les comédiens.
3 – Empêchements fondés sur l’intérêt de l’Etat : mariage des militaires pendant leur service
Interdiction du mariage des militaires pendant qu’ils sont en service. Cette règle a été assouplie par la suite, l’Empereur Septime Sévère, le père de Caracalla a permis au légionnaire de pouvoir contracter mariage.
Section 2 – Les effets du mariage
Le mariage crée des droits et des devoirs entre les époux, mais alors qu’aujourd’hui il établit l’égalité et la réciprocité des droits, à Rome il est marqué par une forte inégalité qui s’est progressivement atténuée mais sans disparaître totalement, ce dont témoignent les solutions retenues en matière de cohabitation, de fidélité, de secours et d’assistance.
A – Obligation de cohabitation.
Elle apparaît comme la conséquence normale du mariage et peut à ce titre être imposée à la femme.
Dans le mariage com manu elle résulte de l’intégration de l’épouse à la famille du mari. Le pater familias de son mari peut lui infliger des châtiments corporels, mais cette prérogative a été peu à peu atténuée.
Dans le mariage sine manu, si l’épouse a toujours son propre pater, elle reste sous son autorité. Il a possibilité de mettre fin à la vie conjugale, au moyen d’interdits qu’il fait valoir devant le préteur et qui lui permettent d’exiger le retour de sa fille dans sa maison.
Le droit romain reconnaît cependant de plus en plus de droits au mari qui l’emportent sur les prérogatives du pater de sa femme, le mari se voit reconnaitre par le préteur le droit d’utiliser une exception pour paralyser l’interdit mis en œuvre par le pater. Cette exception lui permet d’exiger le retour de son épouse au domicile conjugal. Si le pater et le mari avance une bonne raison chacun, peu à peu sous l’empire au IIème siècle, sous le règne d’Antonin le Pieux, le droit fait prévaloir la prérogative du mari sur celle du père.
On a donc une évolution dans le sens du mari et au détriment de l’autorité du pater, phénomène que l’on retrouvera dans le cas du divorce par dissolution forcée.
C’est aussi le signe de l’importance de plus en plus grande de la famille conjugale au détriment de la domus. Sous Justinien, la cohabitation est reconnue comme un droit de la femme. Les « novelles de Justinien » sont un recueil de constitutions publiées après son code, il édicte pour la première fois des sanctions contre le mari qui refuse d’accueillir sa femme au domicile conjugal, c’est pour elle un juste motif de divorce et elle peut recueillir un quart des biens du mari.
B – Obligation de fidélité
Elle pèse à titre principal sur la femme. L’infidélité du mari ne constitue pas une grave faute sanctionnée pécuniairement. Dans l’ancien droit romain, à l’époque archaïque, une loi royale c’est-à-dire une coutume, autorise le mari a tué la femme adultère, puis avec l’évolution et le relâchement des mœurs, l’adultère n’est plus sanctionné.
D’où la réaction d’Auguste qui fait voter une loi, la lex Julia de adulteriis qui date de 16 avant J.-C. et qui punit la femme adultère de la perte de sa dot et d’un tiers de ses biens propres, elle encourt la relégation dans une île ainsi que son complice, mais pas dans la même île. Cette action peut être intentée par son mari, son pater et n’importe quel tiers car il y va de la moralité de la société.
La loi prévoit une excuse absolutoire pour le père (il n’encourt aucune sanction), ou seulement minutoire pour le mari (il encourt une peine mais diminuée), s’ils surprennent la femme et son complice en flagrant délit d’adultère et qu’ils les tuent. Le mari n’encourt aucune peine si le complice est un esclave ou un affranchi ou s’il les surprend dans son propre domicile. Cette répression n’a pas eu beaucoup d’effet cependant, elle s’est renforcée à partir du IVème siècle, l’empereur Constantin édicte la peine de mort contre la femme et son complice, mais l’action en justice est alors réservée au mari et aux proches parents. L’empereur Justinien remplace la peine capitale par la réclusion de la femme dans un monastère, et il ajoute la faculté de pardonner pour le mari qui peut, après deux ans, reprendre sa femme s’il le souhaite.
Cette réglementation est reprise en France au XVIème siècle, on a alors une vision monarchique de la famille.
C – Obligation de secours et d’assistance
Le mariage fait naître l’égalité de rang social, et des devoirs mutuels de respect. Le mari doit poursuivre tout délit d’injures dont son épouse pourrait être victime. L’obligation de fournir nourriture soin et assistance s’est accrue avec les conceptions chrétiennes.
Section 3 – La dissolution du mariage
(Page 21/22)
Le mariage est défini par Modestin comme une communauté de toute la vie, mais le mariage n’est pas indissoluble pour autant, il est destiné à durer jusqu’à la mort des époux.
La dissolution peut aussi provenir de la volonté, ou de la survenance d’un fait hors de la volonté.
A – Cas de dissolution forcée
1 – Mort du conjoint
L’un des époux décède, l’autre est veuf. La mort entraîne la dissolution du mariage.
2 – Perte de la liberté (capitis deminutio maxima)
Un soldat romain est pris par l’ennemi, il est réduit à l’esclavage, son mariage est dissout.
3 – Perte du droit de cité (capitis deminutio media)
Le fait d’être prisonnier, ou coupable de trahison, ou de subir une condamnation pénale infamante entraîne la perte du conubio, du droit de se marier.
4 – Empêchement survenant après coup
Après la formation d’un lien de parenté à un degré prohibé par le droit, s’il y a eu adoption du gendre par le pater, par exemple, s’il n’a plus d’héritier pour permettre la continuité de sa domus et d’honorer ses ancêtres.
5 – Repudium par la volonté du père et sa limitation à partir du second siècle de l’Empire
Voir ce qu’on a dit tout à l’heure dans le A – Obligation de cohabitation, à propos de la volonté du pater de la fille qu’elle revienne dans sa domus, ce retour entraîne également la dissolution du mariage. Cette volonté du père est rognée par les droits du mari qui sont de plus en plus importants.
B – Le développement du divorce
Le simple fait de manifester que l’on ne veut plus continuer le mariage suffit à entraîner le divorce, il est donc facile. Il a lieu soit par consentement mutuel = divortium, soit par la volonté unilatérale de l’un des époux = repudium.
1 – L’ancien droit romain
La faculté de divorcer est restreinte, la femme est soumise à la puissance de son mari ou de son beau père par l’effet du mariage com manu, qui est dominant à cette époque. Elle ne peut pas répudier son mari, mais lui le peut dans certaines conditions énumérées par les coutumes (lois attribuées à Romulus) de l’époque dont le contenu est rapporté par Plutarque, historien grec, l’adultère, le fait de boire du vin et le vol des clés de la cave, parce que le vin était alors, croyait-on, une technique d’avortement, et elle aurait pu avoir lieu à l’insu du mari. La décision de répudiation est prise par le conseil de famille, la répudiation injustifiée pouvait donner lieu à des sanctions religieuses et sociales, par exemple l’exclusion du Sénat.
2 – Le droit classique et les réformes d’Auguste
Le droit classique est beaucoup plus laxiste, les vieilles sanctions tombent en désuétude. On cite souvent le cas de ce chevalier, membre de l’ordre équestre qui a répudié sa femme stérile sans encourir la moindre peine. Au Ier siècle, le divorce à l’initiative de la femme ou du mari est très fréquent, il n’est soumis à aucun motif ni aucune forme, la simple intention de dissoudre le mariage suffit, d’autant plus que le mariage com manu tombe en désuétude au profit du mariage sine manu. La dissolution du mariage entraîne symétriquement la dissolution du rite qui l’accompagnait, le rite de la confarreatio est annulé par diffareatio, et la coemptio par mancipatio.
Tout ce relâchement entraîne une réaction de la part d’Auguste qui édicte des interdictions de répudier, qui limite les divorces par des sanctions pécuniaires : la femme perd sa dot et qui impose le respect de certaines formes : la notification au conjoint du divorce en présence de 7 témoins. Cette législation n’est cependant pas trop observée et elle n’a pas pu freiner les divorces.
3 – La législation restrictive de l’Empire chrétien
La religion chrétienne est la première a posé le principe de l’indissolubilité du mariage perçu comme un sacrement qui a Dieu pour auteur.
L’attitude des premiers chrétiens n’est cependant pas unanime sur l’indissolubilité. Saint Paul puis Saint Augustin l’interprètent de façon absolue, certains autres pères de l’Eglise, admettent la faculté du mari de répudier la femme adultère, ce sera l’attitude adoptée par les Eglises chrétiennes d’Orient. On s’attache alors plus à l’aspect moral que juridique de la question. Les sanctions sont des peines spirituelles, la pénitence, et le plus grave c’est de se remarier après la dissolution.
La législation des empereurs chrétiens a été influencée par cette doctrine chrétienne mais elle a aussi tenu compte de la tradition du droit romain, elle n’est donc jamais allée jusqu’à prohiber le divorce. Elle précise les cas où la séparation peut être légitime, elle est plus sévère vis-à-vis du divorce unilatéral que du divorce par consentement mutuel.
- Le divorce unilatéral
C’est la cible privilégiée de l’Empire tardif. Il existe des listes des fautes graves permettant de répudier un époux coupable sans encourir de sanction : l’adultère, le meurtre, l’empoisonnement, la violation de sépulture, le proxénétisme du chef de la femme. Une novelle de Justinien distingue le repudium ex iusta causa, qui est justifié par une faute de l’un des époux, du divortium bona gracia, qui est justifié par un motif sérieux autre que la faute.
- Le repudium ex iusta causa :
Il est justifié par une faute de l’un des époux qui peut être, l’adultère de la femme, l’entretien par le mari d’une maîtresse dans le domicile conjugal, l’abandon du domicile conjugal, l’attentat envers l’un des conjoints, l’exercice d’un emploi infamant pour la femme.
- Le divortium bona gracia :
Il est justifié par un motif sérieux autre que la faute : la folie, l’impuissance, l’absence trop longue, ou pour permettre à l’un des conjoints d’entrer dans les ordres.
- Le divorce par consentement mutuel
La législation est plus indulgente dans ce cas, il reste comme avant entièrement libre.
C’est une novelle de justinien qui interdit pour la première fois ce type de divorce sauf dans le cas où il a pour but le respect du vœu de chasteté de l’un des époux ; mais son successeur direct Justin II a abrogé cette disposition et rétablit la liberté qui a prévalu jusque là.
- Les sanctions du divorce prohibé
Il existe des punitions lourdes contre les répudiations injustifiées ou contre l’époux dont la faute a provoqué le divorce : perte de la dot pour la femme, attribution des deux tiers des biens aux héritiers, parfois des peines privatives de liberté sont encourues et ajoutées aux peines pécuniaires comme la réclusion dans un monastère ou la relégation sur une île. L’époux fautif est interdit de remariage, en tout état de cause le mariage est dissout, même illégal, le divorce produit ses effets. L’influence de la doctrine chrétienne est limitée puisque jamais on ne prononce l’indissolubilité du mariage.
Chapitre II – Le mariage du Moyen Age à la fin de l’époque moderne (Vème – XVIIIème siècle)
Section 1 – Les pratiques du Haut Moyen Age (Vème – XIème siècle)
Le mariage subit l’influence des usages barbares, qui ont une conception très réaliste de l’union matrimoniale. C’est une période de transition entre le droit romain et le droit canonique.
A – Le mariage dans les royaumes barbares
C’est une conception très concrète à l’opposé de la conception consensualiste, d’où la pratique du divorce et de la polygamie, contre lesquels l’Eglise va lutter.
- Le réalisme dans la formation du mariage germanique : desponsatio, dotatio, traditio puellae
Au contraire du droit romain, dans les peuplades germaniques, le consentement ne suffit pas, le mariage est formé avec l’intervention d’un acte concret, réel : la consommation.
Trois étapes successives dans le mariage :
- La desponsatio :
C’est l’engagement réciproque des futurs époux et de leurs familles. Cet engagement se donne sous une forme solennelle, en présence de témoins, par écrit. Il s’accompagne de festivité, le jeune homme offre des cadeaux à la famille, l’anneau à la mariée qui symbolise l’union, un baiser plus une somme d’argent symbolique, un sous et un denier. La desponsatio évoque les fiançailles mais elle a une importance plus grande, elle est plus qu’une promesse de mariage, c’est un échange de consentements matrimoniaux, elle place déjà la jeune fille sous l’influence de son futur mari, elle fait naître déjà l’obligation de fidélité, dont la violation entraîne les peines de l’adultère. Le jeune homme s’engage à recevoir sa promise chez lui au terme fixé. Elle rend inutile l’existence de fiançailles, elle les remplace tout en lui donnant une valeur plus forte.
- La dotatio :
Elle suit immédiatement la première étape, c’est une compensation ou prestation matrimoniale par le futur mari à sa future épouse et à sa famille. L’Église a cherché à en faire le critère qui distingue le mariage officiel de la simple union inférieure, alors qu’au départ elle n’était pas obligatoire.
- La traditio puellae :
C’est la remise de la jeune fille au mari pour la consommation, c’est l’étape la plus importante, c’est seulement après cette étape que le mariage est considéré comme définitivement constitué.
Dans le mariage par rapt, fréquent chez les francs, l’union charnelle entre le ravisseur et sa victime se trouve ratifiée a posteriori par l’accord des deux familles du fait de la remise de la dotation. Dans ce cas les étapes n’interviennent pas dans le même ordre.
Le mariage apparaît comme un acte composé d’étapes successives, et qui n’est parfait qu’après la consommation.
- Le divorce par répudiation et par consentement mutuel
Le divorce par répudiation est connu mais assez peu répandu, il intervient sous la forme d’une répudiation de la femme par le mari, elle est soumise à des motifs déterminés, inspirés par le droit romain, mais exercés en fait de manière arbitraire.
Le divorce par consentement mutuel est également en usage même si les textes (les lois barbares) l’ignorent.
- La polygamie dans les familles royales et aristocratiques
Elle existait chez les anciens germains, malgré la conversion au christianisme, c’est l’historien Tacite qui le raconte, il a vécu dans la seconde moitié du Ier siècle de notre ère. Elle est exercée dans les familles royales et aristocratiques où il est courant de trouver des épouses secondaires, avec lesquelles les relations sont nouées dans des formes beaucoup plus simplifiées. La polygamie simultanée est exercée sous les carolingiens (fin VIIIème – IXème – début Xème siècle) il y a des épouses successives, d’abord une jeune épouse qui sera ensuite répudiée pour pouvoir se marier avec l’épouse principale.
B – L’intervention de l’Eglise carolingienne
Il y a une abondante législation conciliaire, à l’occasion de conciles œcuméniques. Les sanctions des pratiques réprouvées ont lieu par des peines religieuses, des pénitences, elles sont reprises par la législation carolingienne. Les juridictions ecclésiastiques, les officialités, développent leur compétence en matière matrimoniale, elles acquièrent le monopole des affaires matrimoniales, en particulier en matière de divorce. L’Eglise réussit à imposer le mariage officiel comme la seule forme légale d’union matrimoniale.
- Contre les pratiques polygamiques
L’Eglise assimile les épouses secondaires à de simples concubines.
- Contre le laxisme des usages barbares
L’Eglise développe le nombre des empêchements au mariage, de nombreuses décisions ou canons conciliaires insistent sur les empêchements fondés sur la parenté puisqu’ils sont peu respectés en pratique, en ligne collatérale est interdit le mariage jusqu’au 6ème degré puis jusqu’au 7ème degré. Elle rappelle le mariage des prêtres et religieux.
- Contre le divorce
Elle affirme le principe de l’indissolubilité du mariage interprétée de façon absolue. Cependant, certains canons conciliaires admettent la possibilité de dissolution de l’union quand il y a adultère. C’est pourquoi la doctrine du pape Nicolas 1er, soutenue par l’archevêque Hincmar de Reims, proche des carolingiens, frappe d’excommunication tout ceux qui après avoir répudié leur conjoint, quelqu’en soit le motif, contracte un nouveau mariage. Est posé le caractère sacramental du mariage tant que vivent les époux.
Mais cette doctrine n’est pas parfaitement élaborée et surtout respectée (comportement des grands), elle entraîne la résistance des peuples germaniques, elle est contraire à leurs usages. Cela marque un tournant décisif dans l’histoire du mariage en Occident, c’est une ébauche de principes systématisés, qui seront amplifiés dans la période suivante.
Section 2 – Le mariage du XIIème au XVème siècle, monopole du droit canonique classique : contrat et sacrement
Le mariage se présente sous l’influence de l’Eglise comme étant un contrat et un sacrement à la fois. Jusqu’à la fin du Moyen Age, du XIIème au XVème siècle, l’Église acquiert un monopole complet des affaires relatives au mariage. Elle impose ses propres solutions qu’elle fond dans une construction juridique très cohérente.
On dénombre trois renaissances dans l’histoire de l’occident :
- la Renaissance, la plus connue, qui commence au XVème siècle en Italie et se prolonge dans le reste de l’Europe au XVIème siècle, mais elle est précédée de deux redécouvertes :
- celle des pères de l’Eglise à l’époque carolingienne,
- à Bologne en Italie au XIème siècle puis au XIIème siècle dans le reste de l’Europe, on redécouvre le droit romain de la grande compilation de Justinien, le digeste, le code et les institutes.
Les milieux de l’Eglise redécouvrent le droit romain pour le mettre au service de la théocratie pontificale, ils enseignent le droit dans les facultés.
On assiste aussi à une redécouverte en même temps de la philosophie grecque et en particulier d’Aristote. La doctrine de l’Eglise profite de cette renaissance au XIIème siècle, pour élaborer une construction parfaitement cohérente du droit matrimonial, dont le droit moderne reste encore tributaire même s’il fait l’objet d’une laïcisation. Ce droit qui reprend les concepts romains repose pour l’essentiel sur des principes chrétiens de sacralité et d’indissolubilité.
A – L’affirmation du consensualisme : le libéralisme canonique du consentement
Réaction contre le réalisme.
Au milieu du XIIème siècle, le Décret de Gratien, moine de Bologne qui est à l’origine de la première compilation du droit canonique, refait ce que Justinien a fait pour le droit romain, il est attaché aux solutions réalistes de l’époque franque.
Au contraire la doctrine consensualiste va peu à peu se dégager du réalisme comme Pierre Lombard, Hugues de Saint Victor (fin XIème début XIIème) à l’abbaye de Saint Victor à Marseille, professeur à la faculté de Paris et de Chartes ou encore Yves de Chartes : ils dégagent peu à peu une conception consensualiste du mariage, cette théorie sera définitivement consacrée par les papes à la fin du XIIème /début du XIIIème siècle (sous Philippe Auguste en France) par le pape Innocent III notamment.
La volonté libre des époux est l’unique élément constitutif du mariage. Toutefois il y a une réintroduction des fiançailles par la doctrine consensualiste, avec des vestiges du réalisme.
1 – Les fiançailles : les paroles de futur
Elles réapparaissent avec le retour du consensualisme. On distingue les paroles de futur des paroles de présent (au moment même où on se marie) dans le but de concilier cette doctrine avec les textes du Haut Moyen Age qui faisaient apparaître le mariage comme incomplet quand l’échange des consentements n’avait pas été suivi d’une consommation.
Les paroles de futur sont des simples promesses de mariage qui ne contribuent pas à la formation du mariage, elles l’annoncent. Les paroles de présent sont l’expression même du consentement qui forme le mariage de façon irrévocable.
Il n’y a pas de forme déterminée pour la validité du consentement, même si le plus souvent il a lieu sous une forme solennelle avec un sermon. Seule la capacité des fiancés est nécessaire, c’est l’âge de raison pour comprendre la portée de leur promesse. Il est fréquent de fiancer des enfants en attendant qu’ils aient l’âge de raison pour consentir au mariage.
Les fiançailles ont des effets beaucoup plus étendus qu’en droit romain, elles font naître au moins une obligation en conscience, sanctionnée sur le plan religieux par une pénitence ou par la justice ecclésiastique qui peut dissoudre le lien et prononcer des amendes ou des dommages-intérêts contre le fautif. Les relations sexuelles entre les fiancés suffisent pour établir la présomption du mariage, mais les fiançailles ne constituent pas encore le mariage.
2 – Le consentement initial des époux : les paroles de présent
C’est l’acte constitutif essentiel et même unique du mariage. Le mariage est un sacrement et un contrat à la fois (pages 35 à 37 du recueil).
Dans le droit canonique c’est par le consentement initial au moment où on dit oui que le mariage est formé. Il est comparé à un contrat pour cette raison. Il n’y pas de formes requises pour la validité du consentement, mais il est d’usage qu’il ait lieu à l’Eglise en présence d’un prêtre qui donne aux époux la bénédiction nuptiale et de témoins. L’usage veut aussi que le projet de mariage fasse l’objet d’une mesure de publicité quelques semaines avant, et le Concile de Latran IV de 1215 les officialise. Cette publicité ce sont les annonces faites lors du discours du prône par le curé à la messe du dimanche sur les devoirs religieux. L’Eglise les recommande mais ne l’impose pas comme une formalité de validité du mariage, au contraire du Concile de Trente au XVIème siècle. Ceci pose le problème des mariages clandestins où les époux échangent leurs consentements hors de la présence d’un prêtre et de témoins, ils sont reconnus par le droit canonique. Il n’est pas nécessaire que le consentement soit explicite il peut découler du comportement des époux, comme la présomption qui découle des relations sexuelles.
Antoine Loisel : « Boire, manger coucher ensemble, c’est mariage ce me semble ».
Le consentement des parents n’est pas exigé ce qui entraînera une réaction contre ce libéralisme dans la période entre le XVIème et le XVIIIème siècle.
Gratien lui considérait que le consentement des parents est nécessaire, cela équivalait à un rapt s’il n’était pas donné. P. Lombard fait dépendre la validité des mariages des seuls consentements des époux, l’Eglise n’en fait pas une condition substantielle, même pour les mineurs mais elle le recommande.
Il y a une analyse psychologique du consentement donné par les époux de la part des canonistes, une casuistique entre les cas où la volonté est inexistante, où elle est viciée par l’erreur ou la violence :
– une erreur sur la personne sur son statut officiel, s’il est libre ou non,
– une violence grave dans le cas de rapt notamment, mais la crainte référentielle vis-à-vis des parents n’est pas une violence,
– pas de considération du dol considéré que comme un dolus bonus, « en mariage il trompe qui peut ».
3 – Survie des conceptions réalistes traditionnelles
La consommation n’est plus une condition de validité mais elle demeure le but du mariage. Comme le disait Saint Augustin, la consommation du mariage c’est le but dans la volonté de procréer. On développe la notion de devoir conjugal, allant même jusqu’à reconnaître à chaque époux un droit réel sur le corps de l’autre. Tant qu’il n’est pas consommé le mariage reste fragile, il peut être dissout par dispense pontificale ou pour permettre l’entrée dans les ordres. L’impuissance constitue aussi un motif de nullité (voir plus loin B. 3°).
Les pratiques séculières, des laïques, témoignent d’un attachement persistant aux conceptions réalistes traditionnelles, concrètement les couples procèdent à la bénédiction du lit nuptial, ou au simulacre de consommation dans les mariages des familles princières qui sont souvent conclus par représentation, un mandataire de l’époux devait glisser une jambe dans le lit de l’épouse. Les coutumes du Moyen Age attestent que c’est souvent la consommation du mariage qui permet à la femme d’acquérir le douaire, qui est une sorte de rente au bénéfice de la veuve, c’est le droit de survie de la femme mariée devenue veuve qui consiste en un droit d’usufruit sur les biens propres du mari et qui est fixé par le contrat de mariage ou par la coutume à la moitié ou aux tiers des biens propres du mari, il est toujours à la charge des héritiers du mari. « Au coucher la femme gagne son douaire ».
B – La multiplication des empêchements dirimants : le rigorisme canonique des empêchements
Le droit canonique dresse une longue liste des empêchements imposés dans le but de moraliser le mariage, en réaction contre les mœurs jugées trop relâchées ce qui entraînera encore une contre réaction à l’époque moderne. Les empêchements n’entraînent qu’une pénitence et pas la nullité du mariage, ce sont juste des empêchements prohibitifs. Mais il y a des empêchements dirimants dont les sanctions sont la nullité et la dissolution : l’existence d’un mariage antérieur non dissout, le défaut d’âge, 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons.
1 – Empêchements d’ordre religieux
Ils se sont affirmés à mesure que s’est affirmée la nature sacramentelle du mariage. Toute union avec un païen, un juif ou une personne de toute autre religion est nulle. Si deux païens se marient et que l’un se convertit, le renvoi de l’autre époux est licite à condition que la différence de religion rende la vie commune impossible. Le mariage est interdit à ceux qui ont prononcé des vœux solennels de chasteté, à cette époque l’Eglise rencontre des difficultés pour imposer le respect du célibat ecclésiastique, il faut attendre le XIIème siècle pour que soit bien affirmé le caractère dirimant de ces empêchements. On permet quand même à une personne déjà mariée d’entrer dans les ordres si elle observe l’abstinence.
2 – Empêchements fondés sur la parenté
Ils n’ont pas du tout étaient développés par le droit romain, le droit canonique emprunte à Saint Augustin pour justifier ces empêchements. Il disait que le mariage avait pour fonction d’étendre les sentiments de charité et d’amour donc il est inutile pour des personnes qui ont déjà ce genre de lien par la parenté. Un système très rigoureux est alors mis en place. La parenté par le sang est un empêchement infini en ligne directe, déjà en droit romain. Mais c’est surtout en ligne collatérale que les empêchements se développent.
- a) Ce qu’ils sont
- Parenté par le sang en ligne directe et en ligne collatérale
- Mode germano-canonique de computation des degrés
On calcule par génération, un degré comprend tout ceux qui se trouvent à la même génération, un grand père a deux enfants qui ont chacun deux enfants, qui sont cousins au deuxième degré (le premier degré : leurs parents, qui sont frères et sœurs).
- Mode romain et actuel de computation des degrés
Selon une perspective verticale, on remonte à l’ancêtre commun et on redescend vers la personne considérée, dans le même cas que plus haut ce sont cette fois-ci des cousins au 4ème degré. Le parent de A = premier degré, le grand père commun = deuxième degré, le parent de B = 3° degré et B = 4° degré. (Voir schéma page 6 du plan)
C’est le double à chaque fois, quand le droit canonique dit deux en fait cela correspond à quatre pour nous et pour le droit romain.
Le droit canonique dit que le mariage est interdit jusqu’au 7ème degré ce qui fait pour nous et le droit romain le 14ème degré !
- Parenté par alliance (ou affinité)
Le droit canonique décide que la parenté par alliance existait du fait du mariage ou même de l’adultère qui pouvait produire un empêchement au mariage. Un mari commet un adultère avec une parente de sa femme, cette relation provoque un empêchement, le mari devient du fait de sa relation un parent de sa propre épouse et ne peut pas rester marier avec elle. L’affinité est née d’une copulation illicite. L’alliance ne cesse pas en cas de veuvage. Celui qui a été marié à une des mes cousines, si cette cousine meurt, son mari demeure mon allié, s’il se remarie, sa deuxième femme devient aussi mon alliée. On parle alors d’affinité de deuxième genre.
Il existe même une affinité de troisième genre au cas où cette deuxième femme devient veuve à son tour son nouveau mari devient aussi mon allié.
- Parenté spirituelle
Les parrains et les marraines. Cette parenté est liée à la participation commune au sacrement de baptême, là encore l’Eglise institue des empêchements : empêchement au mariage entre le parrain et la marraine, entre eux et leurs filleuls et entre parrain ou marraine et les parents de l’enfant.
Tous ces empêchements entraînent de grosses difficultés dans la réalité, dans les milieux aristocratiques et les milieux ruraux où régnait une forte endogamie, ils ignoraient que leur lien de parenté éloignée constituait un empêchement. Ce fut le cas de Louis VII et d’Aliénor d’Aquitaine qui étaient parents au 4ème degré selon le droit canonique (8ème degré pour nous).
- b) Les graves inconvénients qui en résultent ; d’où la réforme du concile de Latran IV (1215)
Ce concile a voulu ramené au 4ème degré canonique, c’est-à-dire au 8ème degré selon nous, la limite de la parenté collatérale ou par alliance pour constituer des empêchements au mariage. Il a aussi supprimé les affinités de 2ème et 3ème genre. Des dispenses pouvaient être attribuées par le pape ou des évêques pour des époux qui avaient un degré de parenté prohibé mais quand même suffisamment éloigné pour qu’il n’y ait pas inceste. Le Concile de Trente a supprimé l’empêchement fondé sur la parenté spirituelle dans la période suivante. Avec le mariage contemporain, en sens inverse, ce mouvement atteint son paroxysme avec le décret de l’assemblée législative de septembre 1792, le mariage n’est interdit qu’entre frères et sœurs. Le Code civil fixe comme limite le 3ème degré (dans le calcul romain) ce qui était pratiqué à Rome, avec une possibilité de dispense par le chef de l’Etat.
3 – Empêchement fondé sur l’impuissance d’un époux
Elle rend impossible la consommation du mariage, le droit canonique a d’abord pris en considération l’impuissance du mari à condition qu’elle existe dès l’origine. Celle de la femme, à cause d’une malformation, a été retenue plus tard et produit les mêmes effets. En revanche la stérilité n’a aucun effet. L’impuissance peut être naturelle ou accidentelle. Le problème tient à l’établissement de la preuve, le droit canonique impose aux époux un délai d’épreuve de 3 ans, une visite corporelle permet d’établir cette preuve, par exemple pour vérifier que la femme est toujours vierge. Mais la preuve est particulièrement difficile à apporter quand l’impuissance résulte de la frigidité et pas d’un accident physique. La procédure du congrès réunissait des experts qui pénétraient dans l’intimité pour vérifier l’impuissance du mari. Mais il y a eu une erreur une fois, un mari a été déclaré impuissant par cette procédure puis s’étant libéré de son premier mariage, il s’est remarié et sont nés 7 enfants de son second mariage.
Un arrêt de règlement (de législation qui n’a de valeur que dans le ressort territorial du parlement) du parlement de Paris a supprimé cette procédure. Le Code civil ne tient pas compte de l’impuissance comme cause de dissolution du mariage, il n’en tient compte que pour contester une paternité et à condition que l’on puisse prouver l’accident dont elle résulte.
C – L’affirmation du principe de l’indissolubilité du mariage
1 – Le principe de l’indissolubilité
Rejet du divorce. Le principe d’indissolubilité est quasi absolu. Dans la période qui précède cette doctrine du XIIème siècle de l’Eglise, il y a eu beaucoup d’errements, en particulier des pratiques très souples dans les familles aristocratiques, chez les « grands ».
Le Comte d’Anjou a eu 5 épouses successives toutes répudiées pour stérilité, son neveu Foulques le Réchin devient son successeur et a eu lui aussi 5 épouses successives dont un seul de ces mariages fut dissout par le décès de son épouse.
Le Roi de France Philippe Ier dans la seconde moitié du XIème siècle a répudié sa femme après 20 ans de mariage pour épouser une cousine qui n’est autre que la quatrième épouse de Foulques le Réchin, ce qui a valu au roi d’être excommunié pour bigamie. La doctrine canonique élabore peu à peu des principes dans le sens de l’indissolubilité quasi absolue. Ils imposent le respect de ces principes y compris chez les aristocrates, il y a encore toutefois des hésitations autour de la maladie très grave ou de l’infirmité ou d’une absence très longue, mais on décide que même dans ces cas le mariage est indissoluble. Dans l’Eglise d’Orient de Justinien on garde toutefois les exceptions de la maladie incurable, de l’absence très longue ou de l’entrée dans les ordres.
2 – Les tempéraments au principe : le divortium
A défaut de permettre la rupture du lien matrimonial, il a fallu apporter des solutions quand la vie maritale est insupportable, d’où la création de techniques juridiques nouvelles. On les désigne par le terme de divortium mais il ne correspond pas au sens du mot divorce aujourd’hui. Cela veut dire nullité du mariage d’une part ou la séparation de corps d’autre part.
- Divortium a vinculo, nullité du mariage
Elle est inconnue du droit romain dans la mesure où le divorce au sens actuel était facile. Les causes de la nullité tiennent à l’existence d’un vice du consentement ou à la violation d’un empêchement dirimant. Elles doivent être constatées par la juridiction ecclésiastique, l’officialité est la seule compétente pour connaître de la rupture du lien matrimonial. Dans la procédure, s’est imposé un jugement pour prononcer la nullité du mariage. L’action est fondée sur l’existence d’une infraction grave aux principes de la morale chrétienne. Au départ elle pouvait être intentée par toute personne et présentait un caractère pénal puis peu à peu elle a été restreinte aux seuls époux. Elle est imprescriptible, c’est-à-dire qu’elle n’est soumise à aucun délai. Tous les modes de preuve sont admis sauf l’aveu qui est recevable seulement en faveur de la validité du mariage, le contraire. Le monopole du droit matrimonial est acquis par l’Eglise et sera peu à peu attaqué par le roi à partir du XVIème siècle.
Les effets de la nullité.
Le mariage est censé n’avoir jamais existé, les époux doivent se séparer, les enfants sont considérés comme n’étant pas légitimes. Cette sévérité est atténuée par la notion de mariage putatif qui est né en droit canonique mais elle y a survécu puisqu’aujourd’hui notre droit connaît cette notion qui fait produire, dans les mariages où les époux ont cru de bonne foi pouvoir se marier, pour les enfants les mêmes effets que si le mariage avait était valable, ils continuent à être légitimes. Cette notion est entrevue par P. Lombard mais elle n’est officialisée que par des décrétales du pape Alexandre III et ses successeurs. Lorsque les deux ou au moins un des deux conjoints sont de bonne foi le mariage est réputé putatif, les enfants sont légitimes, les époux peuvent même ensuite bénéficier des mêmes avantages pécuniaires qu’ils auraient eus si le mariage avait était valable.
La nullité a servi de palliatif à l’absence de divorce. La tentation était donc grande de se marier tout en sachant qu’il y avait un empêchement et pour pouvoir ensuite se séparer en invoquant la nullité du mariage. Ces pratiques sont utilisées notamment par les souverains, donc certains papes, conscients de cela, refusent des demandes d’annulation, par exemple Innocent III refuse d’annuler le mariage de Philippe Auguste et d’une princesse du Danemark pour non consommation.
Au XVIème siècle le roi d’Angleterre Henri VIII veut se séparer de son épouse Catherine d’Aragon au motif qu’il y avait un lien de parenté entre eux, et le refus du pape est à l’origine du schisme anglican.
Il y a toujours beaucoup de rigueur pour admettre l’annulation du mariage.
- Divortium quoad thorum, séparation de corps
Cela concerne des mariages parfaitement conformes au droit de l’Eglise donc en principe indissoluble mais où la poursuite de la cohabitation devient impossible pour des motifs graves. L’Eglise trouve un remède à ces situations en créant la séparation de corps. Elle naît au XIème siècle et est développée par Alexandre III et les canonistes du XIIème. Elle met fin à la vie conjugale tout en conservant le principe de l’indissolubilité. Par rapport au divorce en droit romain la séparation de corps n’est pas un acte purement privé, elle doit être prononcée par un juge d’Eglise à la suite d’une enquête approfondie. Son effet est de supprimer le devoir conjugal et de cohabitation mais le lien du mariage et le sacrement subsiste. Une éventuelle conciliation permet de se réconcilier et de reprendre la cohabitation, les époux ne peuvent plus se remarier avec une autre personne. Elle doit être prononcée par le juge ecclésiastique et doit être fondée sur des causes sérieuses :
– la plus commune c’est l’adultère, elle est le plus souvent invoquée par le mari
– le complot de l’un des époux sur la vie de l’autre
– les sévices graves qui peuvent mettre en péril la vie du conjoint (et pas les simple sévices qui résultent du droit de correction du mari)
– l’hérésie ou l’apostasie qui est l’abandon de la foi et de la vie selon les principes chrétiens, qualifiée de fornication spirituelle, alors que l’adultère c’est la fornication charnelle.
On n’admet pas le consentement mutuel pour une séparation de corps sauf pour le cas de l’entrée de l’un des conjoints en religion.
- Divortium quoad bona et cohabitationem, séparation des biens et de l’habitation à partir du XIVème siècle
Cette séparation est reconnue par la jurisprudence des officialités, les juridictions ecclésiastiques. Cette séparation d’habitation est momentanée, elle entraîne une séparation de vie, mais elle maintient le devoir conjugal d’où la constatation faite qu’à la séparation de corps, toujours conçue comme une sanction, est venue s’adjoindre une séparation d’habitation, moins complète mais plus facile d’accès et qui est comprise comme un remède. Elle ne fait pas disparaître le devoir conjugal que l’un des époux peut toujours exiger. Les causes ce sont les cas qui ne sont pas visés par la séparation de corps, elle est demandée pour l’incompatibilité, les corrections et sévices que l’un des époux fait subir à l’autre mais qui sont moins graves que ceux invoqués pour la séparation de corps, les griefs qui tiennent à la gestion des biens en particulier la dissipation des biens par l’un des conjoints. Le maintien du devoir conjugal est la caractéristique de la séparation d’habitation par rapport à la séparation de corps, elle apparait comme une solution de compromis entre la volonté des époux et le respect du droit canonique, mais quand même ce maintien est une anomalie par rapport aux situations de fait donc il y a une casuistique pour savoir s’il est toujours exigible ou non selon les cas.
La séparation de bien ne commence à apparaître qu’à partir du XVIIème siècle dans la jurisprudence des juridictions royales, comme une conséquence logique, un prolongement du prononcé de la séparation d’habitation. La séparation d’habitation et des biens ce n’est pas la séparation des biens stricto sensu. Lorsque le Code civil parle de séparation des biens cela n’implique pas la séparation d’habitation, c’est juste le contraire de la communauté réduite aux acquêts. La séparation d’habitation va tomber en désuétude. Les effets de cette séparation des biens et d’habitation sont considérés comme provisoires, une réconciliation est toujours possible.
Section 3 – Le mariage du XVIème au XVIIIème siècle : vers la sécularisation de l’union matrimoniale
Du point de vue du mariage, cette période moderne connaît par rapport au Moyen Age une évolution qui correspond à une évolution plus générale de la société.
La situation commence à changer à partir du XVIème siècle, c’est une conséquence entre autres des guerres de religion et de la naissance de la monarchie absolue.
Le monopole de l’Eglise fait l’objet d’attaque par les institutions royales, la souveraineté royale n’a de cesse d’empiéter sur les juridictions ecclésiastiques.
C’est l’essor du rationalisme et le début de la sécularisation de la société, consacrée par la révolution française et ses suites.
Le monopole normatif et juridictionnel dans le droit matrimonial indiscuté pendant le Moyen Age, commence à être remis en question à partir du XVIème siècle, la réforme protestante entraîne la rupture de l’unité de l’Occident chrétien. Elle diffuse des conceptions favorables aux puissances laïques. Pour Max Weber, le protestantisme est plus favorable à l’esprit d’entreprise et au capitalisme.
L’émergence de l’Etat à partir du XIIIème/XIVème siècle mais qui s’épanouit au XVIème au sortir des guerres de religion, affirme pleinement sa souveraineté et développe toute une administration qui cherche à reprendre les institutions abandonnées à l’Eglise au Moyen Age.
Les tendances de la société plus réceptives à des phénomènes nouveaux, par exemple l’hostilité à l’égard des mésalliances jugées déshonorantes pour la famille, autant de facteurs qui ont conduit à multiplier les critiques contre la conception canonique du mariage.
L’Eglise elle-même réforme son droit matrimonial, mais ses concessions sont jugées quand même insuffisantes par les autorités séculaires qui provoquent des réformes pour attaquer ce qu’elles jugeaient trop laxiste ou trop rigoriste. La question des séparations en justice est de plus en plus accaparée par les juridictions royales.
A – Les critiques du mariage canonique
(Pages 38 à 44 du recueil)
Les plus radicales remettent en cause la nature sacramentelle du mariage tandis que d’autres portent sur la règlementation canonique de l’institution.
1 – Critique de la doctrine classique du mariage sacrement
- Critique par les théologiens de la réforme protestante
Elle touche au fondement même de la conception canonique du mariage. Elle est formulée par des humanistes comme Erasme et les théologiens de la réforme protestante dès le début du XVIème siècle. Ils se fondent sur les dogmes religieux interprétés littéralement, aucun texte ne le dit. « Le mariage est un mystère ». Luther et Calvin n’y voient qu’une nécessité physique imposée par la nature, un acte honorable et même saint, mais dénué de toute valeur sacramentelle. Ils refusent de considérer le mariage comme indissoluble et admettent le divorce dans les cas où il ne répond plus aux nécessités physiques pour lesquelles il existe : l’impuissance, le refus du devoir conjugal, l’abandon ou la trop longue absence.
- Critique par les juristes catholiques gallicans
Certains catholiques eux-mêmes sans nier le caractère sacramentel tendent à en affaiblir la portée, surtout les juristes français partisans du gallicanisme (autonomie de l’Eglise de France par rapport au Saint-Siège) qui ont élaboré une théorie du mariage très différente de celle de l’Eglise qui repose sur la distinction bien nette dans le mariage entre le contrat et le sacrement, ils insistent sur le mariage-contrat qui a la primauté sur le mariage-sacrement.
2 – Critique de la réglementation canonique du mariage
Distinction du sacrement et du contrat. Le droit canonique est soit trop laxiste soit trop sévère.
Du point de vue du consentement, il est trop laxiste, on se dispense du consentement des parents, il est jugé préjudiciable par les familles, d’où la multiplication des mariages clandestins.
- Critique de la facilité des mariages clandestins
Aussi bien protestants que gallicans s’accordent pour exiger la nécessité du consentement des parents pour maintenir le nom et le patrimoine. Ne pas autoriser les enfants à se marier avec n’importe qui est une conception autoritaire de la famille, petite monarchie domestique. Le mariage est moins une alliance entre deux individus qu’entre deux familles, ce sont plus des considérations d’intérêts. Invalidation des mariages conclus sans le consentement des parents.
- Critique, au contraire, de la rigueur excessive des empêchements
Ils sont trop nombreux. D’abord contestation par les humanistes et les réformés du célibat ecclésiastique, source de scandale. Mais surtout contestation des empêchements fondés sur la parenté et l’alliance. Ils sont condamnés par les juristes en raison de leur trop grande extension, ils préconisent le retour aux solutions romaines.
B – La réforme canonique du mariage : le concile de Trente (1542-1563) et le lutte contre les mariages clandestins
Face aux critiques, l’Eglise est restée ferme sur ses principes.
Concile de Trente : débat sur le mariage et sa cession, décret Tametsi (premier mot de la première phrase du décret). Il réaffirme le caractère sacramentel et indissoluble du mariage et la compétence exclusive de l’Eglise. Il fait droit à la critique faite sur les unions clandestines et transforme le mariage purement consensuel jusque là à un acte solennel.
1 – Le décret De clandestinis ou Tametsi (11 novembre 1563)
Il impose le respect de formes qui ne sont pas nouvelles mais qui étaient facultatives, ces coutumes, rituels sociaux sont maintenant exigés pour la validité du mariage.
- Publication des bans
Institué par le concile de Latran IV, elle est mieux règlementée, il y a trois publications successives, à l’Eglise des paroisses des époux, le dimanche, des dispenses peuvent être données, le défaut de publication n’entraîne pas la nullité mais des peines canoniques. Cette condition est érigée par la législation royale, si elle n’est pas remplie, elle peut entraîner la nullité du mariage.
- Célébration en présence d’un curé de la paroisse et de deux témoins
La législation royale (ordonnance de Blois) exige la présence de 4 témoins. Les époux s’administrent eux-mêmes mutuellement le sacrement, le curé n’est qu’un témoin privilégié, il prononce la formule qui constate que le mariage a été contracté. Il n’a qu’un rôle passif de témoin.
- Transcription sur le registre paroissial
Il est tenu par le curé dans le but d’aménager une preuve de la contraction du mariage, en cas de destruction la preuve par tous moyens est prévue.
2 – Les conséquences du décret
La réforme tridentine (du concile de Trente).
- Nullité des mariages clandestins
Succède un acte formaliste strictement contrôlé par l’Eglise et plus tard par les autorités laïques. Loisel, « boire manger coucher ensemble c’est mariage ce me semble mais il faut que l’Eglise y passe ». Cette décision du concile de Trente a eu des effets à très long terme sur le mariage aujourd’hui.
- Maintien de la validité des mariages sans le consentement parental
L’Eglise reste sur ses positions en ce qui concerne le consentement des parents, il y a eu de nombreuses pressions de la royauté et des prélats français, mais elles ont été repoussées. C’est tout de même un compromis, il maintient l’exigence du seul consentement des intéressés mais en mêmes temps il déclare comme détestables et prohibées les unions malgré l’opposition des parents. Ce refus de réforme sur un point essentiel incite les autorités laïques à s’immiscer dans le droit du mariage.
C – Les réformes civiles du mariage
A partir du XVIème siècle l’Etat intervient de plus en plus, en Allemagne la compétence de l’Etat est exclusive. En France les tribunaux royaux et la législation royale préparent la sécularisation officialisée à la Révolution. La préoccupation dominante demeure la lutte contre les mariages clandestins, l’autorité royale veut renforcer le formalisme et imposer le consentement des parents et enfin prononcer la nullité du lien matrimonial en cas d’opposition des parents.
1 – Le renforcement du formalisme : ordonnance de Blois de mai 1579 et déclaration de novembre 1639
Cela se trouve favorisé par la non-réception en France des décrets du concile de Trente, dont les dispositions en ce qui concerne le mariage rencontrent les oppositions des protestants et gallicans. Ils ne peuvent s’appliquer de plein droit, ils doivent être repris par le droit royal qui en profite pour modifier les exigences du concile.
Ordonnance de Blois de 1579.
Elle reprend les règles du décret Tametsi en les renforçant, la publication des bans sans possibilité de dispense, l’exigence de la présence du curé de la paroisse conformément aux dispositions tridentines mais elle porte de 2 à 4 le nombre des témoins.
Des lois postérieures ont visé à donner au curé un rôle beaucoup plus actif dans formation du mariage pour combattre « les mariages à la Gaulmine », maître des requêtes Gaulmin inaugure cette pratique qui consiste à venir échanger les vœux devant un curé, devant des témoins et notaire complaisants, c’est valable en principe mais cela ne respecte pas l’esprit de la loi.
Le mariage n’est considéré comme valablement formé que du moment où le prêtre déclare à voix haute et intelligible les époux officiellement unis par les liens sacrés du mariage. Il y a eu une vive résistance au sein du clergé mais cela a prévalu. La jurisprudence des parlements a transformé la publication des bans en formalités substantielles dont l’absence peut entraîner la nullité. Elle a fait de la mention sur les registres paroissiaux le mode de preuve exclusif du mariage. Cette solution est confirmée par l’ordonnance civile de 1667 qui du point de vue du droit privé inspirera les futurs rédacteurs du Code civil. Un édit de 1606 contraint les tribunaux ecclésiastiques a appliqué cette législation même et surtout si les solutions sont plus sévères que celles du droit canonique.
2 – Le consentement des parents
- Le principe : obligation de ce consentement, édit de février 1556 et ordonnance de Blois de mai 1579
Il n’était pas exigé par le concile de Trente mais il a été imposé par le droit royal progressivement. Avant même le concile de Trente, Henri II promulgue la première mesure en ce sens à la suite du projet de mariage qu’il avait imaginé avec le connétable Anne de Montmorency (un homme) entre une de ses filles, Diane de France et le fils du connétable François de Montmorency mais celui-ci avait déjà épousé clandestinement une autre, il y avait eu l’échange des paroles de présent mais sans présence de témoins. Le pape refuse d’accorder une dispense au motif de non consommation il a fallu imposer à François de commettre un véritable parjure et de nier son mariage antérieur pour pouvoir épouser Diane.
Un édit royal fait l’obligation aux fils jusqu’à 30 ans et aux filles jusqu’à 25 ans d’obtenir l’opinion des parents, celle du père prévalant, au-delà, ils devaient informer solennellement leurs parents de leur projet et solliciter leur avis par des sommations respectueuses en forme d’acte notarié, mais sans être tenu de suivre l’avis. Mais cet édit ne prévoit pas de sanction cela aurait empiété sur le droit canonique, le mariage reste un sacrement donc le roi ne pouvait pas en prononcer la nullité, il ne pouvait prévoir que des sanctions pécuniaires.
Un autre édit de 1639 condamne à l’exhérédation (exclusion de la succession) de plein droit des enfants qui n’ont pas obtenu le consentement parental.
La jurisprudence au cours du XVIIème siècle aggrave cette exhérédation en l’étendant aux enfants majeurs (plus de 25 et 30 ans) lorsque le mariage faisait injure aux parents du fait de la trop grande différence de condition sociale entre les conjoints. Sur le plan pénal, même si cela n’a pas été suivi dans les faits, l’ordonnance de Blois ajoute à ces infractions des sanctions pénales, reprenant la doctrine de certains canonistes du Moyen Age, elle assimile à un rapt le mariage d’un mineur sans autorisation des parents et menace de considérer le conjoint comme un ravisseur et de le condamner ainsi que le curé qui a célébré le mariage à des peines pouvant aller jusqu’à la mort.
- La sanction de l’absence de consentement parental par la jurisprudence des parlements : la nullité du mariage justifiée par la théorie du rapt de séduction
Ce que la loi royale n’a pas osé faire la jurisprudence des parlements, foncièrement gallicans va aller plus loin, jusqu’à prononcer la nullité des mariages qui n’auraient pas obtenu le consentement parental.
Dès le XVIème siècle, ils s’érigent comme compétents pour connaître des causes matrimoniales pour empiéter sur la juridiction ecclésiastique au moyen de l’appel com dabu, pour abus, pour sanctionner en appel des sentences des officialités au motif que le roi est garant des libertés gallicanes. Cela permet de déférer à la justice royale (un parlement) l’acceptation ou le refus du prêtre de célébrer un sacrement, ce qui offrait au parent le moyen de contester devant les juridictions laïques le mariage de leurs enfants qu’ils désapprouvaient.
La théorie du rapt de séduction.
Les parlements l’ont élaboré en combinant les solutions du concile de Trente qui annule comme vicié par violence le mariage par rapt, et l’ordonnance de Blois qui assimile à un rapt le mariage d’un mineur sans autorisation parentale, dans ce cas les parents présument irréfragablement un rapt constitué non par la violence par la séduction exercée sur le mineur par le majeur ou réciproque si les deux sont mineurs. Ce rapt équivaut à un vice du consentement qui justifie en tant que tel l’annulation du mariage. C’est un raisonnement spécieux qui conduit à dissoudre un mariage valable et librement contracté pour le droit canonique. Mais c’est une arme contre les mésalliances, obsession des familles aristocratiques. Les annulations de mariage pour défaut des consentements des parents très nombreuses au XVIIème et XVIIIème siècle.
3 – L’instauration d’un mariage civil en ce qui concerne les protestants : édit de tolérance de novembre 1787
En vertu d’un édit de Louis XVI de novembre 1787, les protestants pouvaient faire célébrer devant des pasteurs chargés de tenir des registres d’état civil, sous conditions de respecter les formes prescrites pour la validité par l’édit de Nantes. Il a été révoqué par louis en XIV, interdiction du culte réformé. Beaucoup ont été contraints de se marier devant un prêtre mais d’autres ont eu recours aux mariages au désert, clandestins devant un pasteur, mariages nuls aux yeux du droit français, ils sont considérés comme des concubins et leurs enfants sont illégitimes.
Du fait de l’affaiblissement du sentiment religieux et de la campagne des philosophes, le mariage au désert est validé par les parlements de Toulouse et de Grenoble.
Guillaume de Lamoignon de Malesherbes prépare un édit qui accorde aux non catholiques la liberté de conscience et crée à leur intention un état civil particulier, devant un curé agissant en tant qu’officier d’état civil ou devant un juge royal : c’est alors un mariage purement civil, contracté devant une autorité laïque ou quasi laïque.
D – L’appropriation exclusive de la séparation judiciaire par la justice royale
Prolongement du C. 2° de la section précédente, tempérament au principe d’indissolubilité du mariage selon le droit canonique, le divortium, la séparation de corps et la séparation de bien et d’habitation.
Sous l’Ancien Régime cette séparation d’habitation va être reprise par la justice royale à la jurisprudence canonique, elle s’approprie cette création canonique et empiète sur les juridictions canoniques, elle va peu à peu l’éliminer et créer la séparation de biens pure que nous connaissons aujourd’hui.
La séparation d’habitation, il y a toujours le devoir conjugal, en cas de sévices pas très graves ou d’incompatibilités…
1 – Des officialités aux parlements : la jurisprudence relative à la séparation d’habitation (XVIème – XVIIème siècle)
Empiètement incessant du pouvoir royal sur le monopole du droit canonique à l’époque moderne. Appropriation progressive par la juridiction royale en matière de séparation de corps et d’habitation, les séparations judiciaires au XVIème siècle et pendant toute une partie du XVIIème. Transposition telle quelle de la séparation d’habitation imaginée par le droit canonique. Là encore par le biais de l’appel com dabu, ce qui permet aux juges royaux de s’assurer du respect par les officialités de la législation et de la jurisprudence royale. Les décisions de l’official contraires au droit royal peuvent être attaquées devant une juridiction royale pour abus. Se reconnaissant compétent pour statuer sur les demandes de séparation qui se multiplient les juridictions royales vont innover. Ce transfert de compétence s’accompagne d’un transfert des solutions juridiques de la jurisprudence canonique dans la jurisprudence royale. Une séparation à l’issue d’une action judiciaire, ils reprennent à leur compte les solutions des juges canoniques, le maintien du devoir conjugal, la cessation de la vie commune qui entraîne la liquidation du régime matrimonial, la femme peut reprendre sa dot et exiger le douaire même si le mari est toujours vivant. Une provision est en plus souvent accordée par le juge pour sa subsistance.
2 – La création au XVII siècle d’une nouvelle séparation judiciaire : la séparation de biens et la disparition de la séparation d’habitation
Dans un second temps le droit laïque au XVIIème et XVIIIème siècle innove et crée une séparation de biens proprement dite au sens actuel du terme. Elle est toujours prononcée dans un contexte judiciaire et entraîne la disparition progressive de la séparation d’habitation.
En cas de mauvaise administration des biens par le mari avec un risque de dilapidation. Quand la séparation de biens est prononcée, elle a pour effet une rupture de la communauté de biens, la femme peut reprendre sa dot, ce que chaque époux va acquérir c’est pour lui seul, mais la femme ne peut prétendre au douaire car la séparation de biens maintient la vie commune. Elle n’a qu’un aspect purement matrimonial. C’est ce qui distingue la séparation de bien de la séparation d’habitation.
Cette jurisprudence créatrice des cours royales aboutit à une bipartition des séparations judiciaires, d’un côté la séparation de corps (pour sévices, infidélité de la femme) et de l’autre la séparation de bien (dilapidation ou risque majeur de dilapidation des biens) les causes du Moyen Age sont donc réparties entre les deux institutions.
Cela a pour résultat une moindre protection de la femme mariée avec la disparition de la séparation d’habitation, l’adultère du mari n’est pas reconnu, et la dilapidation entraîne la séparation de biens mais la femme ne peut disposer de ses biens sans le consentement du mari (la famille est une petite monarchie domestique). Il y a un sentiment de misogynie dans la société d’Ancien Régime que souvent les arrêts expriment avec netteté. Il faut attendre une loi de 1792 pour l’institution du divorce et la suppression de la séparation de corps. C’est alors que véritablement l’ordre ancien va être bouleversé.
Chapitre III – Le mariage depuis la Révolution ou la sécularisation définitive du mariage : mariage civil et divorce
Amplification du phénomène qui commençait déjà : la sécularisation du mariage qui va être définitive avec l’institution du mariage civil et son équivalent négatif le divorce.
Le mariage dans notre droit positif reprend pour l’essentiel, mais en le laïcisant, les formes du mariage canonique. Mais sur le fond il diffère profondément, du point de vue du droit seul compte le mariage à la mairie donc c’est un acte purement civil dénué de tout caractère sacramentel.
Section 1 – La généralisation du mariage contrat civil
La laïcisation du mariage a été parachevée par la loi révolutionnaire de septembre 1792 qui opère la sécularisation générale, confirmée par le Code civil.
(Pages 51 à 59 du recueil)
A – Le droit révolutionnaire : la loi du 20 septembre 1792 (1ère loi)
Le droit révolutionnaire impose un mariage unique, totalement laïcisé conformément aux vues des philosophes, tous hostiles au dogme catholique. Selon eux l’union homme/femme est imposée par la nature et est dépourvue de tout caractère sacramental. L’assemblée constituante alors que ce n’était pas trop dans les doléances, a inscrit dans la constitution de 1791 le principe de la sécularisation de l’état civil et du mariage (affaire de l’acteur Talma). L’assemblée législative en 1792 enlève aux curés la tenue des registres qui est confiée à des officiers d’état civil dans chaque commune, qui sont chargés de célébrer le mariage
1 – Les formes nouvelles du mariage
Elles s’inspirent des ordonnances royales du XVIème et XVIIème siècle mais n’ont pas de caractère religieux, c’est non plus le curé mais l’officier d’état civil qui publie les bans devant la porte de la mairie, c’est devant lui et 4 témoins que les époux échangent les consentements, il rédige l’acte sur le registre. Il n’y a pas de considération de la religion des individus.
La loi permet qu’avant ou après (seulement pour le Code civil) on procède à un mariage religieux mais pas cela n’a pas d’effet civil.
2 – Les conditions de fond
Elles sont encore plus affectées. Tous les empêchements résultant des vœux religieux ont disparu, subsiste l’interdiction de la bigamie et les empêchements fondé sur la parenté jusqu’au 2ème degré et la limite d’âge à 15 ans pour les garçons et 13 ans pour les filles.
En revanche le consentement des parents devient obligatoire jusqu’à l’âge de 21 ans et les sommations religieuses au-delà sont supprimés.
B – Le Code civil de 1804 et le mariage institution
Le Code civil entérine avec nuances cette innovation révolutionnaire. Le Code napoléon en dépit du concordat confirme la sécularisation de l’état civil et du mariage, il n’y a pas de changement sauf quelques durcissements de la loi de 1792.
1 – Les formes du mariage
Les formes du mariage sont règlementées avec plus de vigueur, c’est un désir de Napoléon de renforcer le contrôle de l’Etat et d’accentuer la solennité du mariage civil. Il consacre le mariage institution de la société.
Il y a deux publications de bans. L’officier d’état civil doit lire aux époux les passages du Code avant de les déclarés solennellement unis au nom de la loi. Il fait le mariage, il a un rôle actif, l’union n’est constituée qu’après sa déclaration solennelle (comme l’évolution pour le curé). Le mariage religieux peut avoir lieu mais seulement après.
2 – Les conditions de fond
L’âge minimum est de 18 ans pour les garçons et de 15 ans pour les filles, sauf dispense. L’empêchement a lieu jusqu’au 3ème degré. Le consentement des parents est imposé pour les hommes jusqu’à 25 et 21 ans pour les filles alors même que l’âge de la majorité émancipatrice demeure fixée à 21 ans. Au-delà les sommations respectueuses sont remises en vigueur pour les majeurs, elles ne seront supprimées qu’entre 1907 et 1933.
La jurisprudence a procédé à une création originale, elle prononce la nullité du mariage des prêtres et des religieux jusqu’à ce que la Cour de cassation prononce un arrêt contraire en janvier 1888.
Au XIXème de nombreux droits européens, au contraire (Angleterre, Autriche Hongrie, Espagne) ont maintenu le choix pour les époux entre un mariage religieux produisant des effets civils ou un mariage purement civil.
Le droit français impose en même temps le divorce sans égard non plus pour la religion.
Section 2 – L’introduction du divorce
La loi du 26 mai 2004 est la dernière loi sur le divorce, jusqu’alors il y a eu beaucoup d’étapes.
La réduction du mariage à un acte purement civil permet l’introduction du divorce réclamé par les philosophes et consacré par la révolution. L’indissolubilité du mariage pour les canoniques est selon eux contraire à la liberté et au bonheur des individus, et favorisait la débauche des unions clandestines. C’est le complément indispensable du mariage pour Voltaire. C’est la suite logique de la sécularisation du mariage.
La deuxième loi de septembre de 1792 est votée le même jour que celle sur laïcisation du mariage et de l’état civil. C’est une affaire éminemment politique ce qui explique les vicissitudes de l’histoire du divorce, reconnu puis limité puis abrogé puis restauré et libéralisé.
A – Le libéralisme révolutionnaire : le divorce remède de la loi du 20 septembre 1792 (2ème loi)
Il apparaît comme un remède, pour la première fois dans le droit français, il est unilatéral ou bilatéral, il a des formes simples qui produisent des effets étendus.
1 – Les causes du divorce
– Le consentement mutuel
– L’allégation d’incompatibilité d’humeur
Le caractère non-prouvé autorise la répudiation quasiment discrétionnaire.
– Motifs déterminés : fautes, impossibilité de cohabiter, émigration
Il y a 7 motifs déterminés : crime, sévices ou injure graves, dérèglement de mœurs, abandon pendant 2 ans. Certains constitutifs de faute mais d’autres impliquent seulement une difficulté ou une impossibilité à poursuivre la vie commune : la démence, une absence de plus de 5 années, une condamnation pour crime ou l’émigration.
Les causes sont larges, la séparation de corps est supprimée.
2 – Des formes simples
Les formes sont peu rigoureuses ni celles de la procédure judiciaire ni celles du jugement. Il est prononcé par l’officier public du domicile du mari en présence de 4 témoins et il est retranscrit sur le registre. Il a lieu sans délai si l’époux apporte la preuve du motif qu’il invoque, la mission de l’officier n’est pas d’apprécier le motif.
3 – Des effets étendus
Le divorce a lieu par consentement mutuel ou pour incompatibilité d’humeur, la loi prévoit une procédure de conciliation devant une assemblée de parents ou amis avec un délai de 4 mois ou d’un an mais cela ne peut faire obstacle à la volonté des époux de se séparer.
Les époux peuvent se remarier en respectant le délai d’une année pour les deux divorces, pour incompatibilité d’humeur ou par consentement mutuel.
S’il est demandé pour un motif déterminé, on impose un délai de viduité à respecter par la femme.
La garde des enfants est organisée sans référence à une faute, les enfants de moins de 7 ans restent avec la mère, les garçons de plus de 7 ans peuvent aller avec le père.
Il n’y a pas de considération de la culpabilité, chaque époux perd les avantages matrimoniaux et les gains de survie que l’autre lui a accordés.
Une pension alimentaire est prévue pour celui qui est dans le besoin même s’il est fautif.
4 – Les conséquences importantes de l’introduction du divorce
Les conditions sont encore élargies entre fin 1792 et 1794 par la Convention jacobine montagnarde.
Elle réduit à un mois le délai de conciliation.
Elle permet au mari de se remarier immédiatement.
Elle autorise le divorce par une simple déclaration unilatérale d’un des époux sans avoir à alléguer l’incompatibilité d’humeur lorsque les époux étaient déjà séparés de fait depuis deux ans.
Cela explique la flambée des divorces entre 1792 et 1795, dans les milieux urbains de la petite bourgeoisie surtout par les femmes. Ils sont si faciles et si nombreux qu’à partir de la réaction thermidorienne et sous le directoire, il va y avoir des restrictions en rallongeant les délais et en instaurant un cérémonial lugubre du prononcé du divorce. On peut observer une hostilité croissante à la fin de la Révolution vis-à-vis du divorce.
B – La rigueur du Code civil de 1804 : le divorce-sanction
Le Code civil garde les acquis de la Révolution mais les encadre.
La question du maintien même du divorce est très discutée dans les travaux préparatoires, le tribunal de cassation (créé en 1790 et jusqu’en 1802 où il devient la Cour) et la cour d’appel de Paris souhaitent la conservation en l’état, alors que d’autres veulent sa suppression. Il y a un long débat au Conseil d’Etat, finalement il est conservé mais règlementé.
1 – La réduction des causes du divorce
Les causes du divorce sont réduites à 2 seulement, par consentement mutuel ou pour motif déterminé, mais plus pour incompatibilité d’humeur.
- Pour motifs déterminés : adultère sévices ou injures graves, condamnation à une peine infamante
Ce son des motifs constitutifs d’une faute.
L’adultère est plus laxiste pour le mari (entretien de la concubine au domicile), des sévices graves et une condamnation à une peine infamante.
La séparation de corps est rétablie mais elle est conçu comme une situation provisoire, elle est convertie en divorce si au bout de 3 ans le conjoint innocent refuse de reprendre la vie conjugale.
- Par consentement mutuel
2 – Les conditions strictes du divorce par consentement mutuel
Les conditions sont très restrictives. Il faut avoir plus de 25 ans pour le mari, et pour la femme entre 21 et 45. Il vaut uniquement pour un mariage de plus de deux et moins de 20 ans.
L’autorisation des pères et mères et requises quelque soit l’âge des époux.
La conclusion devant notaire d’une convention réglant leur sort et celui des enfants est ensuite soumise au président du tribunal.
Il faut subir à 4 reprises dans un délai d’un an les exhortations du juge qui leur rappellent la gravité de leur décision. Ces conditions s’ajoutent aux autres conditions des autres divorces.
3 – Une procédure plus complexe
La procédure en générale (pour les autres et aussi pour le divorce par consentement mutuel) :
L’officier ne peut le prononcer qu’en exécution d’un jugement définitif rendu par le tribunal d’arrondissement. La procédure est longue et coûteuse, la comparution des époux est précédée d’une tentative de conciliation, intervention du ministère public à l’audience rendue en publique, elle est susceptible d’appel et de cassation.
Pour excès, sévices et injure graves le juge a un large pourvoir d’interprétation et peut imposer aux époux un délai d’épreuve d’un an.
Le nombre de divorce baisse de façon drastique.
4 – Des effets rigoureux
C’est une sanction.
Si c’est un divorce pour motif déterminé, ils ne peuvent se remarier ni épouser le complice de l’adultère. La faute joue un rôle pour l’attribution de la garde des enfants et a des conséquences pécuniaires et pour la pension alimentaire.
Quand le divorce se fait par consentement mutuel, les époux ne peuvent se remarier avant 3 ans et subissent une sanction pécuniaire lourde. La propriété de la moitié de leur bien est immédiatement transmise aux enfants du mariage, les parents n’en gardent que l’usufruit jusqu’à leur majorité.
Un retour en arrière une réaction par rapport à l’élan révolutionnaire très libéral dans le prolongement des idées philosophiques. Cela correspond au caractère de la famille à l’époque napoléonienne.
Ce caractère du divorce se prolonge sur la période de la restauration.
C – De la Restauration à aujourd’hui : abolition, rétablissement et extension du divorce
La conception restrictive du Code civil atteint son but, on peut observer une baisse du nombre des divorces pour tomber en moyenne à 180 par an.
1 – La Restauration et le poids du catholicisme : la loi du 8 mai 1816 et l’abolition du divorce
Accentuation avec l’avènement de la Restauration. La volonté de restaurer l’ordre ancien, l’ancien régime et ses conceptions en particulier les principes catholiques, qui redevient une religion d’Etat dans la charte de 1814. Rejet de tout ce que la révolution a créé. Mouvement des ultras.
Vote de la loi du 8 mai 1816 à l’initiative de Louis de Bonald émigré en 1791, qui rentre en 1804, il est royaliste en 1815, membre de l’académie française, c’est un farouche défenseur du catholicisme. Cette loi prononce l’abolition du divorce, ne subsiste que la séparation de corps.
Plusieurs projets de réhabilitation sous la Monarchie de juillet et IIème République mais ce sont des échecs.
Stabilité de façade du couple du XIXème en raison de l’impossibilité de divorcer et du faible usage de la séparation de corps. Le mouvement de réhabilitation a peu d’écho.
2 – La IIIème République, laïque et anti cléricale : la loi Naquet du 27 juillet 1884 et la reconnaissance du divorce-sanction
Avènement de la III république avec les lois de 1875 qui forment la constitution de la IIIème République et après la présidence de Mac Mahon, la majorité des tenants de la constitution de la IIIème. En 1880 « la République aux républicains », nouveau mouvement en matière de droit familial qui retrouve des accents de la Révolution.
En 1884 : rétablissement du divorce
La République opportuniste, laïque, anticléricale est animée par les grands principes de la Révolution, elle symbolise la lutte contre l’influence de l’Eglise, l’encyclique de Léon XIII en 1880 condamne le divorce.
Alfred Naquet député républicain fait pencher la balance, il est condamné pour outrage aux bonnes mœurs, c’est un adepte de l’union libre,
En 1876 et 1878 déjà deux projets, le premier = un retour à la loi de 1792, l’autre = le divorce du Code civil, la troisième tentative est adoptée mais avec des atténuations du Sénat. Elle est adoptée en juillet 1884, la loi Naquet régit l’essentiel du divorce jusqu’à 1975, sa portée a été constamment élargie entre temps par des réformes, la pratique et la jurisprudence.
Elle est plus restrictive que la loi révolutionnaire et même que le Code civil en ce qui concerne les causes, il n’y a que le divorce pour motifs déterminés, pour adultère, identique pour le mari et la femme qui entraîne une condamnation à une peine afflictive et infamante. Il y a des causes péremptoires qui contraignent le juge à prononcer l’excès, les sévices et injures graves. La séparation de corps est conservée mais sa conversion en divorce est permise après 3 ans à la demande de l’un ou l’autre époux.
Les effets sont moins rigoureux que dans le Code civil.
Il y a un délai de viduité de 10 mois pour l’épouse (difficulté pour la paternité).
Impossibilité de se remarier s’il y a eu entre temps un autre mariage avec un tiers.
Interdiction d’épouser le complice de l’adultère.
La garde et enfants et la pension alimentaire sont en principe pour l’époux innocent.
La procédure de 1804 est maintenue (elle avait été maintenue pour la séparation de corps en partie en 1816).
3 – L’extension du divorce par la législation postérieure, la jurisprudence et la pratique
La législation postérieure a élargit les dispositions de la loi Naquet en simplifiant et en accélérant la procédure et surtout en levant les restrictions au remariage.
Pendant la période du régime de Vichy on essaie de revenir sur des restrictions au divorce au nom de la défense de la famille et de la natalité, aboli en 1945.
La jurisprudence et la pratique dans la politique d’élargissement du divorce.
Interprétation souple de la notion d’excès sévices et injures graves : une violation d’un devoir né du mariage ou une atteinte à la dignité de l’autre y sont assimilés et justifient la demande de divorce.
Progressivement on passe à un divorce pour cause de motifs indéterminés (tentative de retour en arrière par Vichy).
Tolérance par les juges des pratiques par lesquels les époux d’un commun accord souvent avec le conseil d’un avocat simulent les injures, les adultères… pour faciliter les divorces.
Augmentation constante et régulière du nombre de divorce.
D’abord lente fin XIXème/début XXème : 7900 en 1910, 13 000 après les deux guerres mondiales, montée en flèche de la désunion des couples 30 000 en 1920, 52 000 en 1946.
4 – Un aboutissement le divorce remède ou divorce constat par la loi du 11 juillet 1975 et la loi du 26 mai 2004
Aboutissement avec la loi du 11 juillet 1975 qui entérine l’évolution sociale et l’évolution jurisprudentielle, elle libéralise le divorce selon une conception du divorce remède.
Retour aux solutions du droit révolutionnaire.
Divorce par consentement mutuel et unilatéral pour rupture de la vie commune (cas d’aliénation mentale en particulier)
La loi du 26 mai 2004 élargit encore la possibilité de divorce (pages 46 à 48 du recueil). Elle dissocie les conséquences financières de la répartition des tords.
Aujourd’hui la conception libérale du divorce rejoint le libéralisme du droit romain.
Chapitre IV – L’UNION HORS MARIAGE
Ou l’union libre. Les unions extra conjugales représentent plus de la moitié des unions qui existent aujourd’hui.
Section 1 – De Rome au droit contemporain : l’union hors mariage est, en principe, ignorée par le droit
Le concubinage, l’union libre, se distinguent de simples relations sexuelles passagères par sa stabilité, c’est comme le mariage sans la cérémonie officielle.
Vient du mot latin concubinatus. Pour les romains il représente une sorte d’union de rang inférieur, au même titre que le mariages des pérégrins, libres mais non citoyens romains, ou entre citoyens de cités différentes ou le contubernium, l’union des esclaves, une union de pur fait.
La situation du concubinat est un peu délicate en droit romain on ne voit pas la différence avec le mariage, puisqu’il suffit de manifester le consentement du vivre ensemble. Il se distingue aussi de l’adultère, union d’une personne mariée avec quelqu’un d’autre. Donc la définition : c’est une union entre deux personnes non mariées, stuprum, la relation hors mariage d’un homme qui n’est pas lui-même dans les liens du mariage avec une femme qui elle non plus n’est pas déjà dans les liens du mariage (célibataire, veuve, divorcée)
La législation familiale d’Auguste en faveur du mariage et du remariage, condamne les relations hors mariage. Certaines ne sont pas condamnées quand l’autre est de rang social inférieur. Incitation des romains à se marier et non vivre hors mariage. Bien que réprouvée cette situation est extrêmement courante à la fin de la République et au Haut Empire. Le droit romain sur le plan du droit pénal et civil a ignoré cette situation de concubinat, il ne lui a pas reconnu d’effets, en dépit de la législation d’Auguste beaucoup pratiquée.
Pendant le Bas Empire, sous l’influence du christianisme, hostilité à l’égard des unions hors mariage. Les enfants nés d’un concubinat régulier ont bénéficié de quelques attentions favorables de la part du législateur. Création de la légitimation, c’est-à-dire, lorsqu’il y a un mariage subséquent des parents qui ont eu avant une relation hors mariage avec des enfants. On ne la pénalise pas, elle est ignorée par le droit.
Ancien droit français.
Pratique fréquente dans la société du Haut Moyen Age, à côté du mariage, les concubines sont fréquentes dans les familles aristocratiques et princières. Pas de répression pratique de façon ouverte. L’Eglise cherche à moraliser ces situations, les conciles œcuméniques de l’époque mérovingienne sont partagés entre sa réprobation et sa tolérance à condition qu’elle soit monogamique.
Les canonistes le condamne c’est un état permanent de péché. L’Eglise lutte contre elle, pas toujours de façon efficace, elle incite à se séparer ou régulariser l’union par un mariage. Le concile de Trente à la moitié du XVIème prend des sanctions dures contre ce type d’unions, l’excommunication. Hostilité virulente à l’égard des concubinages adultérins et incestueux ou pratiqués par les prêtres, sanctions aussi à l’encontre des enfants, naturels, incapables d’entrer plus tard dans les ordres. Pas très grande efficacité pour le Moyen Age.
Le droit séculier, à partir du XVIème siècle, empiètement des juridictions royales s’est montré beaucoup moins rigoureux, il ignore ce type d’union ne fait de tord à personne, les juridictions annulent simplement les donations entre concubins comme s’ils étaient des gens mariés.
Ce genre d’union a donc le plus souvent était ignoré par le droit.
Section 2 – Depuis la Seconde moitié du XIXème siècle : évolution vers une reconnaissance juridique : loi de 1999 sur le concubinage et le pacte civil de solidarité (« PACS »)
Aucune mention dans le Code civil, c’est considéré comme hors du droit, les enfants sont naturels.
Après la seconde guerre mondiale, le droit s’intéresse par la force des choses à ce genre d’union. Depuis la seconde moitié du XXème siècle, le concubinage n’est pas reconnu comme emportant des droits et obligations pour les concubins, mais ce genre de situation de fait peut dans certaines circonstances être suivi de conséquences juridiques. La jurisprudence dans les rapports entre concubins, s’est refusée à reconnaître des obligations dans la charge du ménage, de même des dédommagements de rupture, sauf s’il y a une faute caractérisée. Avant c’était dans tous les rapports des concubins avec les tiers, mais lorsque l’un des deux est victime d’un accident mortel, la jurisprudence a pu reconnaître le droit au concubin de demander des dommages-intérêts au responsable de l’accident.
En ce qui concerne la législation quelques mesures sont intervenues dans le domaine social et fiscal, des droits et obligations on été reconnues pour les concubins. La multiplication de ces situations a amené le législateur à prendre en compte le concubinage : loi sur le PACS et introduction de l’article 515-8 dans le Code civil sur le concubinage = une union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité entre deux personnes du même sexe ou de sexe différent. Articles 515-1 à -7 du Code civil sur le PACS. Institué principalement pour les couples homosexuels. C’est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures de sexe différent ou de même sexe pour organiser leur vie commune. Le droit conduit à prendre en compte une réalité sociologique, on a pris en compte l’union homosexuelle. D’autres législations européennes ont reconnu le droit au mariage des homosexuels et à l’adoption. En droit français il n’y a pas de reconnaissance du mariage et de l’adoption, juste d’une union par le PACS (page 75 à 78 du recueil).
Il se forme par une déclaration conjointe au greffe du tribunal d’instance dans le ressort duquel ils ont une résidence commune, il est interdit entre parents et alliés en ligne directe ou collatéraux jusqu’au 3ème degré. Il peut y être mis fin unilatéralement, par une signification au partenaire et une copie au greffe ou une déclaration au greffe bilatéralement.
Ils sont tenus d’une aide mutuelle et matérielle, ils sont tenus solidairement des dettes et dépenses de la vie courante, les meubles sont indivis entre eux. Des décrets d’application pour appliquer au PACS la plupart des mesures financières qui concernent le mariage. Dans les premier temps engouement, 6 000 en 1999, 22 000 en 2000, 31 000 en 2003, 60 000 en 2005, 500 000 personnes concernées par le PACS depuis sa création. Les homosexuels que 15% des nouveaux signataires.
La famille concerne aussi les relations avec les enfants nés de ses unions.
Titre III – La filiation
Comment s’établit-elle ? Les conditions et modes d’acquisition de la filiation ? Ses modes physionomiques différents ? Les conséquences qui en résultent : les relations parents/ enfants ?
Chapitre I – L’ETABLISSEMENT DE LA FILIATION
Malgré la naissance, refus de la filiation, refus de l’enfant.
Section 1 – Le droit des parents de refuser la filiation
Deux cas, l’abandon ou l’avortement, refus avant la naissance.
A – L’ « exposition » des nouveaux nés
C’est l’abandon de l’enfant, pratique courante dans les sociétés de l’Antiquité et qui s’est poursuivie par la suite. Ce refus d’établir la filiation pouvait venir du père, une fois l’enfant né, geste symbolique de son acceptation, le soulève.
1 – A Rome puissance paternelle et droit de tollere liberum
Soulever l’enfant. Si refus de le faire, il est abandonné, de façon cruelle, dans les égouts dépotoir, ou dans un temple au pied de la statue d’un Dieu ou d’un empereur, remet sa vie au bon vouloir des Dieux, le premier venu pouvait recueillir l’enfant pour l’adopter, forme adoption reconnue, ou juste pour l’élever, adoption de fait ou quasi adoption : le fosterage de l’alumnus ou en faire son esclave. Les romains attribuaient au premier roi mythique de Rome Romulus une loi en vertu de laquelle il aurait été obligatoire d’accepter d’élever le premier enfant mâle à naître, mais possibilité d’exposer les autres, ou tuer les enfants nés mutilés ou monstrueux, enfants nés handicapés, ou même quand enfant jugé de trop. Surtout abandon dans les milieux pauvres incapables de les nourrir ou les éduquer. Bas Empire influence chrétienne constitution de l’empereur Valentinien premier interdiction de l’exposition, mais réitérée par la suite (Justinien) parce que pas suivie. Constantin permet de vendre les enfants en cas de nécessité
2 – Après Rome dépôt et délaissement
Abandon sous le proche des églises.
Idem à l’époque moderne, églises et hospices.
Aujourd’hui le « délaissement » d’un enfant est un délit article 220-1 du Code pénal, les parents qui ne peuvent pas ou ne veulent pas élever un enfant doivent le confier à une institution publique spécialisée obligatoirement.
B – L’avortement librement provoqué
1 – Le droit romain condamne l’avortement par souci de protéger l’intérêt du mari
Au nom de l’intérêt de la famille, du mari. Permet de continuer le nom de la famille et la pratique du culte des ancêtres. Donc pendant longtemps avortement réprimé, en particulier celui pratiqué par la femme contre l’avis du mari. Condamnation à mort voire à l’exil. Indigne la femme qui prive le mari d’enfant.
Le christianisme a marqué une évolution, l’intérêt du mari ne joue plus de rôle dans la réprobation de l’avortement, les pères de l’Eglise considère que c’est un homicide, ils condamnent aussi toutes pratiques anticonceptionnelles. Le fœtus a déjà une âme dès la conception, ou 40 jours après…
2 – L’ancien droit français et le Code pénal de 1810 répriment l’avortement assimilé à un crime
Au Moyen Age il est réprimé considéré comme un crime, qui intervient dans les 40 premier jours peine plus légère, au-delà considéré comme un homicide qui tend à s’assimiler à un infanticide, il est puni de mort, droit de l’Eglise qui s’applique.
A l’époque moderne, le droit reprend à son compte cette hostilité Edit de 1556, qualifie l’avortement de crime très énorme et exécrable fréquent en notre royaume. Obligation de déclarer grossesses et accouchement, mesure pas très bien observée. La peine de mort menace la femme qui n’a pas déclaré sa grossesse et l’enfantement si l’enfant mourait sans être baptisé et s’il n’avait pas une sépulture normale. (Page 50 du recueil, livre consacré aux morts nés dans l’Europe chrétienne).
La jurisprudence royale admettait une simple déclaration de l’accouchement fait à une personne privée, les textes royaux ont peu à peu fait obligation à la femme de déclarer l’accouchement. Réitération des textes officiels montre que pratique ne suivait pas. Les municipalités imposaient aux sages femmes de déclarer les accouchements des filles mères étrangères à la localité, déclaration des parturientes pour savoir qui est le séducteur.
Code pénal punit moins gravement que l’infanticide (mort) : réclusion. Travaux forcés pour les complices si sont médecins.
3 – Le droit contemporain récent et la libération progressive de l’interruption volontaire de grossesse
Après la première guerre mondiale, loi de 1920 réprime l’avortement, la propagande anticonceptionnelle, il est qualifié de crime.
Progressivement la répression atténuée, un décret loi de 1939 code de la famille n’édicte plus que des peines correctionnelles, un décret de 1953 code de la santé publique permet dans des conditions limitées l’avortement thérapeutique pour sauver la mère, on passe du crime au délit. Une politique plus préventive, le planning familial vers la régulation des naissances, pratiques anticonceptionnelles
- La « loi Neuwirth » du 28 décembre 1967
Autorisation vente et fabrication de contraceptifs, liberté de la femme de procréer ou non selon ses désirs, préoccupation des femmes et sur implantation des centres de planning familial.
- La « loi Veil » relative à l’IVG du 17 janvier 1975
Finalement votée après recours devant le Conseil constitutionnel rejeté. On parle d’IVG, permise pour motif thérapeutique, pour préserver la santé de la mère ou de l’enfant quand il est atteint d’une infection incurable et librement avant la fin de la 10ème semaine, lorsque cette grossesse place la femme en situation de détresse. Prévue pour 5 ans, loi renouvelée en 1979, avec de nouvelles facilités : surpression de l’obligation pour les mineurs d’avoir le consentement des parents. Loi de 2001 allonge le délai à 12 semaines. En 2002, 206 000 IVG prononcées, 10 000 mineures : accroissement.
Section 2 – Les modes d’acquisition de la filiation
Détermine la condition et la capacité juridique des personnes. Evolution depuis le droit romain à la société occidentale aujourd’hui.
A – Le droit romain et les sources de la filiation légitime : la volonté du pater familias
Primauté de la filiation légitime, importance du chef de famille. Droit moderne reconnaît la prédominance des liens de sang, parenté par cognation, en droit romain plus diversifié il y a aussi l’agnation, tous ceux qui sont soumis à l’autorité du pater familias.
1 – La preuve par l’acte de naissance : lois d’Auguste des IVème et IXème siècles de notre ère, Aelia Sentia et Papia Poppaea
Divers papiers officiels.
Lois d’Auguste, premier Empereur oblige le pater familias à déclarer à l’autorité publique la naissance de ses enfants : la proffessio. A Rome la démarche avait lieu à l’Aerarium Saturni, bureaux du trésor de la ville, dans le temple de Saturne. Tabularium, bureaux des archives sur la pente de la colline du capitole. En province c’est dans les bureaux du gouverneur de la province. Ces déclarations sont ensuite affichées sur un album (un tableau), les intéressés pouvaient donc prendre une copie privée certifiée par 7 témoins, mais qui ne donne pas à ces déclarations la même valeur juridique que nos actes de naissances actuelles. Ne sont pas indispensables pour prouver la filiation, pas irréfragable. Une Testatio de la mère devant témoins, qui faisait l’objet d’un procès verbal privé.
2 – La procréation en mariage légitime : les deux présomptions
- La présomption Pater is est quem nuptiae demonstrat
Depuis le droit romain, la conception dans le mariage fait poser la présomption (aujourd’hui article 312 du Code civil) le père est sensé être le mari de la mère.
- La présomption relative à la durée de la grossesse
Pour résoudre les difficultés liées aux naissances survenues peu de temps après la formation du mariage, ou les naissances postérieures au décès du mari enfant posthume.
Réputée comprise entre 6 et 10 mois, sous réserves de l’admission de cas de grossesse prolongée.
Le mari peut combattre ces deux présomptions en apportant preuve de son absence ou impuissance ou maladie rendant impossible la procréation. L’établissement de la filiation ne découle pas automatiquement de la naissance pendant le mariage le pater familias a toujours le droit de refuser le nouveau né même quand sa paternité légitime est indubitable.
3 – La légitimation des enfants naturels
Situation fréquente.
Les enfants nés hors mariage, jusqu’au Bas Empire ils ne sont frappés d’aucune incapacité spéciale, ils restent simplement hors de la famille.
Législation de l’Empire romain interdit de leur consentir des donations ou legs, mais permet d’assimiler à des enfants légitimes des enfants nés d’un concubinat durable, incitation au parent pour légitimer les enfants.
- Par mariage subséquent des parents
La légitimation des enfants se fait par mariage subséquent. Règle qui passe dans les droits postérieurs.
- Par rescrit de l’empereur
S’adresse à l’empereur pour lui demander une consultation juridique, la chancellerie répond, mais que au VIème siècle sous Justinien. Autorisation spéciale du Prince lorsque mariage impossible par le décès de l’un des parents.
- Par oblation à la curie
Oblatio en latin participe passé du verbe offere = offrir. Souci fiscal du pouvoir impérial, l’enfant a obligation de succéder à son père dans ses fonctions au Sénat municipal.
Entraînait des charges, lourdes les personnes les fuyaient, enfant légitimé en s’engageant à ce que son enfant le remplace après et en payant les charges inhérentes à sa fonction.
4 – La filiation artificielle : l’adoption
Restera très effacée après, mais importante à Rome, que à l’époque contemporaine qu’on la retrouve. On considère quelqu’un comme son enfant alors qu’il ne l’est pas. Elle joue un rôle considérable à Rome permet au pater familias d’augmenter la valeur de sa domus, pour satisfaire au culte des ancêtres ou pour des raisons politiques : se doter d’un successeur, fréquent pour les Empereurs.
- L’adrogation du sui iuris
L’adopté est pleinement capable juridiquement. Acte juridique suivi de conséquences très importantes, il subit une capitis diminutio, une diminution de sa capité juridique et devient un alieni iuris du fait de l’adrogation. La domus dont il est le chef disparaît et les membres et le patrimoine de sa domus sont absorbés par la domus de l’adrogeant. Le culte familial d’origine s’éteint. Les liens d’agnation avec la famille d’origine sont rompus
- a) Une institution de droit public, donc contrôlée par la cité
L’adrogation est souvent qualifiée d’adoption sous le contrôle du peuple, l’ensemble des citoyens. Un acte accompli par un pupille devra recevoir contrôle et ratification du tuteur. Contrôle préalable puis ratification apportée par un vote des comices curiates assemblées populaires, la plus ancienne, tombée en désuétude sous la République, son rôle a survécu pour des domaines spécifiques. Remplacées par 30 licteurs. Quand il s’agissait de contrôler un testament ou une adrogation, elles portaient le nom de comices calates. Se réunissaient le 24 mars et 24 mai présidées par un collège des pontifes. Au Bas Empire prononcée par une demande faite à la chancellerie impériale réponse par un rescrit de l’empereur prend en compte l’importance de la famille de l’adrogé et l’âge de l’adrogeant, l’existence de descendants légitimes de celui-ci ne constitue pas en principe un obstacle. L’adrogation des impubères (14 ans pour les garçons et 12 ans pour les filles) longtemps prohibée autorisée entre les Ier et III° siècles de notre ère.
- b) La réforme de Justinien : une conception nouvelle, pallier l’absence d’enfant
Elle doit imiter la nature. Permise qu’à ceux dépourvus de descendants par le sang, au moins 60 ans pour l’adrogeant, différence minimale de 18 ans avec l’adrogé.
- L’adoption proprement dite de l’alieni iuris
Adoption de celui qui n’a pas la capacité juridique. C’est une adoption simple qui permet de transférer la puissance paternelle d’un père de famille sur un alieni iuris au père de famille adoptant. Formes moins lourdes.
- a) Une institution à caractère privé
Il suffit de deux actes successifs. Le premier formalisme correspond à une vente fictive. Le pater familias d’origine procède à l’extinction de sa propre patria potestas, en effectuant trois mancipations, trois ventes formalistes à un comparse qui joue le rôle d’acquéreur, puis deuxième acte, l’adoptant revendique l’adopté à ce comparse comme étant son propre fils devant le magistrat qui va lui adjuger l’enfant : une addictio avec le consentement du pater d’origine. Procès purement fictif. Le consentement de l’adopté n’est pas requis. L’adoption en droit classique (3 premiers siècles de notre ère) entraîne la rupture avec la famille d’origine et l’entrée avec le statut de fils dans la famille de l’adoptant.
- b) La réforme de Justinien et la création de deux types d’adoption : adoption minus plena et adoption plena
Il simplifie les formes de l’adoption réduites à une déclaration du père d’origine devant le juge compétent en présence de l’adoptant et de l’adopté. Mais il va renforcer les conditions de fond en exigeant notamment le consentement au moins tacite de l’adopté, quant aux effets il les modifie profondément, distinction de deux types : l’adoption minus plena consentie au profit d’un adoptant autre qu’un ascendant de l’adopté, elle maintient les liens de l’adopté avec la famille d’origine, donne seulement la qualité d’héritier de l’adoptant. Et l’adoption plena en faveur d’un adoptant qui est un ascendant de l’adopté, elle a des effets plus complets, elle intègre complètement l’adopté bénéficiaire dans la famille de l’adoptant. Reprise par le droit moderne, notamment dans le décret-loi de 1939 (le code de la famille).
(Pages 22 à 24 du recueil)
- Deux pratiques originales de l’adoption
De fait mais avec conséquence juridique
- a) L’adoption testamentaire dans l’aristocratie (la nobilitas)
Face lourdeur des procédures, l’aristocratie développe un système plus original, un particulier pouvait imposer à l’héritier qu’il désigne une condition : porter son nom, sinon héritage passait à un héritier en seconde ligne. Ce n’est pas une institution juridique proprement dite, on constate cette pratique dans les sources littéraires ou épigraphiques. Pas de limitation quant à l’âge ou au sexe, formalisme minimum, le testament. Par cette méthode une femme peut adopter.
Gendre de Cicéron désigné comme hériter pour un neuvième de ses biens par une femme. Effets qu’après la mort du testateur, concerne que les biens et le nom et pas le culte des ancêtres. Accepter des biens sans porter le nom est incorrect c’est une incivilité. Illustration par historien Suétone, sénateur Gallius adopte Tibère par testament, mais celui-ci s’abstient de porter son nom puis qu’il a fait partie du mouvement hostile à Auguste. Néfaste de porter le nom si l’adoptant est d’un milieu social inférieur.
- b) La quasi adoption, ou fosterage de l’alumnus
Ou nourricière, foster = nourrir élever en anglais. Adoption de fait par des parents nourriciers.
Transfert d’une personne d’un groupe familial à un autre, appropriation pour nourrir et éduquer un ou des enfants (alumnus alumni) qui font entrer par adoption proprement dite dans leur famille ou simplement l’éduquer le nourrir l’instruire. La relation d’adoption n’aura aucune conséquence sur le plan du nom on ne peut l’observer que lorsqu’une inscription un document mentionne que telle personne a été alumnus = nourri, élevé, éduqué par un couple conjugal qui ne sont pas ses parents. S’observe dans les sociétés musulmanes ou dans beaucoup de sociétés primitives.
Aux Etats-Unis, étudiants d’université = alumni souvent.
Imprégnée de lien affectif, statut juridique de l’alumnus très divers, enfant orphelin de père et de mère adopté par un parent lointain, l’Empereur Claude appelait la fille de son frère défunt mon alumna née et élevée dans mes bras. L’enfant peut encore être un enfant esclave né d’un esclave de la maison avec un autre esclave d’une autre maison ou né d’une esclave et de son maître, dans ce cas il jouit d’un statut particulier reconnu par le droit, à la différence des autres esclaves ne pourra pas être saisi par le créancier du maître, il pourra l’affranchir avant l’âge minimum légal de 30 ans, porte le nom de celui qui l’a affranchi. Il a des parents biologiques mais pas au sens juridique du terme. Cette adoption nourricière de fait permettait de cacher des naissances illégitimes. Il peut encore être un enfant exposé, abandonné, qu’il s’agisse d’un enfant de naissance libre ou malformé.
Se distingue de l’adrogation et de l’adoption, absence de formalisme caractère strictement privé, rôle joué par les femmes, beaucoup de ses alumni étaient des enfants de femmes esclaves et de leurs maîtres. Et contrairement à l’adoption testamentaire aristocratique, produit des effets pendant la vie de l’adoptant. Repose sur les sentiments, parfois ambigu.
Parfois les romains se servent des alumni comme objet sexuel.
Adoption s’entend que par un père d’un fils. Situation de l’affrèrement au Moyen Age (page 3 du plan) : acte d’un frère qui fait d’une autre personne son frère, dans le droit de l’Orient romain mais jamais à Rome, droit de la famille centré sur la figure du père.
Au Moyen Age droit de l’adoption repoussé ; il faut attendre le Code civil timidement puis surtout le XXème siècle.
B – L’ancien droit français et le maintien des principes romains de la filiation légitime
Les sources de la filiation légitime sont restées les mêmes qu’en droit romain mais leur importance s’est inversée. La procréation dans le mariage demeure la filiation principale.
1 – La règle Pater is est… et la présomption de durée de la grossesse
Conservée et systématisée par le droit canonique. La filiation par mariage subséquent tolérée mais combat la filiation naturelle. La filiation par adoption, contraire à l’esprit des droits coutumiers, importance du sang, tombe en désuétude sauf dans le midi (droit écrit, traces du droit romain) sous la forme de contrat d’affiliation
2 – Mais hostilité à l’encontre de la bâtardise
Filiation naturelle, connotation très péjorative. Etymologie plus ou moins certaine. On s’attache avant tout au rang social de la mère, si esclave ou affranchie les enfants restent dans la condition servile, fréquent encore engrossée parle maître. Si de naissance libre, ingénue comme disent les romains, la situation de l’enfant naturel, de plus si le père est de famille aristocratique il bénéficie d’une situation pas très différente de celle des enfants légitimes, il est placé sous le mendium du père, ils recueillent eux aussi la succession, Thierry bâtard de Clovis recueille sa part du Royaume. Charles martel grand père de Charlemagne lui-même un bâtard, victoire à Poitiers, maire du palais, fils Pépin Le Bref. Guillaume dit le Conquérant, dit dans les textes le bâtard, un des premiers ducs de Normandie, tous les rois capétiens ont tous eu des bâtards chacun a recueilli des biens font partie de la noblesse, fonctions dans haute administration. Dans les familles nobles droit de porter les armes de la famille avec une barre, une brisure pour distinguer visuellement la situation d’enfant naturel.
Dans les familles roturières cette égalité n’a pas subsisté au-delà du Haut Moyen Age.
- Le droit canonique réprobation et charité
Combat concubinat et adultère prêche le mariage légitime donc combat la filiation naturelle, la « tâche de la bâtardise ». Union hors mariage particulièrement condamnable. Combat aussi union des prêtres et aussi leurs enfants, redoute une dynastie de prêtres, et que leurs enfant veuillent à leur tour entrer dans les ordres. Concile de Latran reconnaît possibilité de dispense tout de même.
Mais édicte des mesures de charité envers ses enfants bâtards, droit de demander des aliments, les hospices et monastères recueillent beaucoup d’enfants naturels abandonnés. Solutions reprises par le droit étatique
- Le droit séculier
Les décisions des juridictions royales, à partir du Moyen Age et encore plus à partir du XVIème prononcent des déchéances sociales et incapacités juridiques mais en même temps des mesures de charité à l’image du droit canonique. Interdiction d’exercer des fonctions publiques, ils ne peuvent être juges ou prêtres, comme les serfs ils ne peuvent témoigner contres des franches personnes (libres et de condition légitime) dans un procès, ni de duel judiciaire, mais règles tombent en désuétude.
En plus d’incapacité juridique.
- a) Déchéances et incapacités
On vise les familles roturières non nobles.
– Incapacité active
C’est le fait de ne pas pouvoir recevoir une succession, la règle est absolue pour la succession paternelle. Source essentielle du droit c’est le droit coutumier donc il y a des nuances à apporter pour la succession maternelle. Certaines coutumes dans le nord permettent de recevoir la succession par la mère : « nul n’est bâtard par sa mère ». Interdiction même par certaines coutumes des donations et legs aux enfants naturels, permettant simplement une soutenance = une aide alimentaire.
– Incapacité passive relative : le droit de bâtardise
Incapacité de pouvoir transmettre sa succession. Elle est assez relative. Incapacité de laisser à sa famille une succession. A la mort de l’enfant naturel ce qu’il a pu avoir comme capital il ne peut le transmettre il va au Seigneur, puis à la fin du Moyen Age à l’Etat au Roi = le droit de bâtardise. Droit d’aubaine dévolu au seigneur puis au roi, au départ droit féodal qui permet au seigneur de récupérer les droits de l’aubain qui vit dans la seigneurie à sa mort. Droit de mainmorte qui concernait les paysans serfs, à sa mort les biens étaient dévolus au seigneur et pas à sa famille, le seigneur souvent se contentait d’un meuble = droit au meilleur catel. Pour contourner ce droit de mainmorte beaucoup de paysans ont formé des communautés taisibles. A partir du XIIIème/ XIVème c’est le roi qui en profite.
Le droit de bâtardise pour que le seigneur puis le roi puisse recueillir les droits de l’enfant naturel il faut deux conditions selon les coutumes il ne fallait pas qu’il ait d’enfants, des descendants légitimes et qu’il n’ait pas fait de testament. Mais certaines coutumes diffèrent sur ce deuxième point, par exemple coutume de Paris possible de faire librement un testament pour le bâtard, mais dans l’Ouest juste sur les meubles.
A défaut de ces deux conditions il ne saurait y avoir de droit de bâtardise, sinon les biens vont au seigneur puis au roi. Souvent le roi ne se contente que de la moitié des biens, avec le roi ce droit devient incontestable. Administration de collecteurs de mainmortes et de droit de bâtardise. Mais n’ pas rapporté des sommes considérables au trésor royal. On peut y voir une sorte de droit déshérence, comme ce qui existait au profit de l’empereur en droit romain. Est-il tenu des dettes qui existent à l’ouverture de cette succession ? Le roi y est tenu seulement dans la limite de l’actif de la succession contrairement à une succession normale.
- b) Règles de charité
Mises en œuvre par le droit canonique et que le droit laïque va reprendre à son compte. L’Eglise réprouve mais doit faire preuve de charité, les parents doivent à leurs enfants illégitimes des aliments. Le droit canonique a imaginé trois actions reprises par le droit royal et transposée dans la jurisprudence des juridictions royales. Souvent c’est la femme qui réclame de l’argent au père.
– Causa dotis
Permet à une jeune fille déflorée, enceinte ou non de pouvoir demander à celui qui l’a séduite de lui réclamer sa part de responsabilité et sa contribution. La meilleure réparation c’est de l’épouser ou à défaut de lui verser une somme d’argent : une dote. Le séducteur souvent déniait sa responsabilité, la preuve pouvait être apportée par tous moyens par la jeune fille et par le séducteur, par exemple qu’il n’était pas le premier à la séduire… montant de la dot fixé par le juge ecclésiastique. Les juridictions royales l’ont reprise à leur compte sans toutefois contraindre le séducteur à épouser la jeune fille mais à réparer financièrement.
– Causa provisionis
C’est l’action pour fournir une provision alimentaire pour que la mère puisse survivre dans les semaines qui précèdent l’accouchement = les frais de gésine, la parturiente. Le juge canonique, l’official acceptait des preuves relativement sommaires pour attester de la séduction et de la responsabilité du père à l’origine de l’accouchement. Les juridictions royales la reprennent et admettent la simple affirmation sous serment de la mère d’avoir été mise enceinte par telle ou telle personne. On croit la femme enceinte ou parturiente. Permettait aux autorités civiles et en particulier les municipalités de se retourner contre le séducteur pour que ce ne soit pas elles qui aient la charge de l’enfant qui pourrait être abandonné. Cela a pu donner des abus. Anecdote du XVIIIème siècle, jeune file enceinte qui exerçait un chantage auprès d’ecclésiastiques, préfèrent acheter son silence. Avocat général près le parlement de Grenoble : homme de vertu pas à l’abri d’une femme impudente. Code civil dans le prolongement interdit la recherche en paternité naturelle.
– Causa captionis
Action mise en œuvre devant les officialités et reprise par les juridictions laïques. Exercée pour que le séducteur prenne en charge à ses frais l’éducation et l’entretien de l’enfant. Là aussi on se contente d’une simple affirmation de la mère sous serment. Mais il fallait que la mère apporte la preuve de relations charnelles suivies et régulières. Les juridictions royales se montrent assez exigeantes quant à cette preuve de relations suivies. Le défendeur pouvait prouver l’inconduite de la mère. Si l’action aboutissait le père pouvait être condamné soit à prendre l’enfant avec lui soit à verser à la mère les frais d’entretien pour l’éducation de cet enfant (études, apprentissage d’un métier ou dot pour une fille). Il ne s’agit pas pour autant d’une action en reconnaissance de paternité à proprement parler même si on reconnaît en justice que c’est lui le père sinon il ne serait pas condamné. (Convention jacobine interdira cette action en reconnaissance de paternité). L’enfant n’entre pas dans la famille du père et ne peut pas par conséquent y recueillir une part de succession.
Tendance à confondre les deux dernières actions. Sort de l’enfant naturel reste inférieur à celui de l’enfant légitime. Reste une souillure dans l’opinion publique. Beaucoup de penseur comme Rousseau et Robespierre prêchent pour une aide des enfants naturels.
C – De la révolution au droit actuel : la sollicitude à l’égard de l’enfant du droit contemporain
Plus encore que le droit du mariage le droit de la filiation a subi de profondes transformations à l’époque contemporaine, l’enfant a bénéficié d’une sollicitude toute particulière de la part du législateur, qu’il soit naturel, légitime ou adopté. Promotion à côté de la filiation légitime de la filiation artificielle et naturelle.
1 – La filiation légitime : rôle renforcé de la présomption Pater is est… dans le Code civil
Le droit de la filiation légitime est celui qui a subi le moins de changement. La présomption pater is est critiquée à l’époque de la Révolution parce que disait-on, elle couvrait l’impudicité et l’effronterie des femmes. Elle est conservée par le Code civil et il lui donne une force encore plus forte qu’elle a pu avoir auparavant.
Le mari ou ses héritiers ne peuvent contester la légitimité de l’enfant né de sa femme plus de 180 jours (6 mois) après la formation du mariage et moins de 300 jours (10 mois) après la dissolution du mariage. On ne peut contester sauf si l’on apporte la preuve formelle d’une incapacité physique d’engendrer pour cause d’impuissance temporaire ou pour cause d’éloignement, ou si l’on apporte la preuve de l’adultère de la femme avec recel de grossesse.
Le Code civil fait également bénéficié d’une présomption de légitimité l’enfant conçu avant le mariage est né moins de 180 jours (6 mois) après la célébration du mariage et même l’enfant né plus de 300 jours (10 mois) après la dissolution du mariage. La présomption est tout de même moins forte dans ces deux derniers cas puisque le mari peut désavouer l’enfant né moins de 6 mois après la célébration du mariage par une simple déclaration lorsqu’il a eu connaissance de la grossesse de la mère avant de l’épouser. Le père peut aussi contester la paternité de l’enfant né plus de 10 mois après la dissolution, ainsi que tout intéressé qui a intérêt à contester cette paternité.
Cela va dans le sens de l’intérêt de l’enfant à une époque où l’enfant naturel a un statut bien moindre que celui de l’enfant légitime. Aussi le souci de sauver les apparences et de ne pas subir un désaveu social. La loi du 3 janvier 1972 a préféré la vérité, même si elle conduit à établir un lien de filiation naturelle simple ou adultérine, elle affaiblit donc la portée de la présomption. Le droit révolutionnaire et le Code civil ont aussi conservé la possibilité de la légitimation par mariage subséquent des parents. Elle a d’abord été réservée aux enfants naturels simples puis étendu aux enfants adultérins et incestueux à condition que le mariage soit possible par dispense par une loi de 1907.
2 – La filiation adoptive
Elle a été très peu utilisée dans l’ancien droit elle renaît en droit contemporain, elle doit ce nouveau départ à la Révolution mais le Code civil l’a réglementé de façon très restrictive ce qui ne la facilité pas du tout, et seulement au XXème siècle qu’elle devient une source importante de la filiation.
- Les errements du droit révolutionnaire
A la mode par les philosophes du XVIIIème siècle, a voulu la favoriser. Mais incapable de dégager une conception uniforme de l’adoption.
Tantôt institution de droit civil pour permettre à ceux qui n’ont pas de descendants de s’en doter.
Tantôt un acte de charité pour recueillir des orphelins.
Tantôt comme un moyen politique de diviser les fortunes réduire les inégalités de naissance et favoriser la formation d’une classe de petits propriétaires plus favorables aux idées révolutionnaires.
L’assemblée législative en 1792 vote un décret de principe qui s’engage à établir l’adoption avec un statut spécifique.
La Convention montagnarde saisie de plusieurs projets, conditions laxistes pour l’adoption et effets étendus. Au nom de l’imitation de la nature elle considère qu’elle devait se rapprocher le plus possible de la filiation par le sang, l’adopté devait avoir moins de 15/16 ans, l’adoptant 13 ou 15 ans de plus, l’adopté devait être placé dans la situation exacte d’un enfant c’est-à-dire rompre tous ses liens avec sa famille d’origine, prendre le nom de l’adoptant et devenir son héritier. Mais la volonté de diviser les héritages amènent ces projets à considérer que l’adoption soit permise aussi aux parents qui avaient déjà des enfants par le sang ou déjà des enfants adoptifs, et à considérer que des limitations soient apportées au droit des successions pour limiter la concentration des fortunes. Mais elle n’a voté aucun de ces projets soumis, les français ont adopté des enfants en dépit de l’absence de toute réglementation.
Sous le Directoire il y a un retour en arrière par rapport aux idées révolutionnaires, ce qui se traduit par l’abandon des objectifs politiques, le troisième projet de Code civil de Cambacérès se contentant de l’imitation de la nature n’autorise l’adoption que pour ceux qui sont dépourvus d’enfants par le sang.
- La timide consécration du Code civil
Parmi les membres de la commission de rédaction du Code civil les avis étaient très partagés, certains y étaient hostiles, l’adoption n’était pas prévue au départ mais contestations de la part du tribunal de cassation et d’un certains nombres de tribunaux d’appel donc finalement intégrée. Mais le statut donné à l’adoption ne répondait plus au but de la Révolution. Plus de donner un foyer aux orphelins plus de donner des enfants à ceux qui n’en avaient pas. Juste transmission du nom et de la fortune dans une perspective très aristocratique ce qui explique conditions fond et formes très restrictives et effets pas très étendus.
Les conditions : l’adopté devait avoir plus de 21 ans, devait donner son consentement et ses parents devaient donner leur consentement tant qu’il n’avait pas atteint l’âge de 25 ans, ou marié. L’adoptant plus de 50 ans et 15 de plus que l’adopté et ne pas avoir de descendants. Consentement du conjoint requis, même si reste une adoption individuelle.
Conditions de formes : inspiration de l’adrogation romaine, Bonaparte voulait que l’adoption soit prononcée solennellement par le corps législatif, Code civil se contente d’imposer un échange de consentements devant le juge de paix, qu’elle soit ratifiée par un jugement du tribunal de première instance sur conclusions du ministère public, jugement confirmé par un arrêt de la cour d’appel. Et tout cela pour des effets réduits : l’adopté prend bien le nom de l’adoptant et devient son héritier mais sans couper les liens avec la famille d’origine, il reste étranger à la famille de l’adoptant. Il n’est pas étonnant qu’il y ait eu très peu d’adoption au cours du XIXème siècle une centaine par an, pour des raisons fiscales liées à la succession ou pour favoriser des enfants naturels.
- L’élan décisif des réformes contemporaines : les lois de 1923, 1925 ; décret-loi de 1939 (Code de la Famille) ; loi du 22 décembre 1976
Elles ont donné une portée très vaste à l’adoption en lui restituant sa fonction d’institution charitable, comme à Rome (ou un peu au Moyen Age). On a élargi le domaine de l’adoption en lui conférant des effets identiques à ceux de la filiation légitime et tout cela en accord avec l’importance de plus en plus grande donnée à la fin par le droit de la famille contemporain.
Loi juin 1923 et juillet 1925 qui ont voulu favorisé l’adoption des orphelins de guerre elles ont supprimé toute condition relatives à l’âge des adoptés et ont permis l’adoption des mineurs et ont conféré la puissance paternelle à l’adoptant. A l’origine de l’essor contemporain de l’adoption.
Le décret-loi de 1939, le Code de la famille : a étendu les effets de l’adoption en reprenant la distinction du droit de Justinien (adoption pleine et adoption moins que pleine) entre adoption simple et légitimation adoptive laquelle s’est appelée adoption plénière en 1976, elle est ouverte aux seuls couples mariés, elle entraine la rupture complète des liens de l’adopté avec sa famille d’origine qui souvent reste inconnue, c’est donc l’entrée de l’adopté dans la famille de l’adoptant qui dispose de la puissance paternelle.
3 – La filiation naturelle : vers l’assimilation de l’enfant naturel à l’enfant légitime
Hostilité du droit à l’égard de la filiation naturelle incapacités qui en résultaient dans l’ancien droit. A partir Révolution attitude du législateur ?
- Sentimentalisme et égalitarisme des réformes révolutionnaires : loi du 12 Brumaire an II (2 novembre 1793)
(Pages 51 à 59 du recueil)
Les réformes révolutionnaires ont ouvert une première phase vers l’assimilation. Sympathie envers ces enfants de la nature, considérés comme victimes innocentes d’une situation dont ils ne sont pas responsables.
L’assemblée constituante s’est d’abord contentée d’abolir les incapacités que subissaient les enfants naturels, du droit de bâtardise notamment décret avril 1791.
La Convention montagnarde (fin 1792 – fin 1794) œuvre pour l’assimilation vote d’abord d’un décret de principe puis loi du 2 novembre 1793, 12 brumaire an II attribue aux enfants naturels simples les mêmes droits que les enfants légitimes dans la succession de leur père et mère. Avec effet rétroactif au 14 juillet 1789. Et pour la succession des parents collatéraux mais cette fois-ci sans effet rétroactif. Cette assimilation n’est qu’incomplète les enfants adultérins et incestueux n’ont droit qu’à des aliments. Il n’est question que du droit successoral. La loi ne donne pas aux parents naturels la puissance paternelle sur leurs enfants. L’exercice de ce droit supposait que la filiation naturelle soit établie or sur ce point elle est restrictive : qu’un seul mode d’établissement de la filiation naturelle à l’égard du père, la reconnaissance volontaire par le père, elle écarte l’action en recherche de paternité alors que la causa captionis dans l’ancien droit reconnaissait de fait la paternité paternelle : le père devait subvenir aux besoins de l’enfant même s’il restait étranger à sa famille. Estime que donnerait lieu à des abus, que l’action en recherche de maternité naturelle ce qui est beaucoup moins intéressant sur le plan patrimonial pour l’enfant. L’exercice effectif de ses droits reconnus sont subordonnés au bon vouloir du père.
- La réaction du Code civil et le ralliement à une solution transactionnelle
Réaction transactionnelle, plus généreuse que l’ancien droit mais moins que la période révolutionnaire. Code civil permet de reconnaître à l’enfant naturel simple certaines prérogatives ; en matière de succession il peut bénéficier du tiers d’une part d’enfant légitime ou la moitié d’une part d’enfant lorsqu’il est en concurrence avec des ascendants ou collatéraux privilégiés (frères et sœurs du défunt et leurs descendants) ou les trois quarts lorsqu’il est en concurrence avec des collatéraux simples ou ordinaires (les autres oncles tantes…) le Code civil confirme l’interdiction de la recherche de paternité sauf s’il y a eu rapt de la mère et la jurisprudence postérieure l’a assimilé au rapt avec le souci d’éviter des procès scandaleux. Là encore pour faire valoir leur droit ils en sont réduits à attendre une hypothétique reconnaissance du père qui était inopposable aux enfants légitimes pendant le mariage. La jurisprudence du XIXème siècle atténue cette sévérité en condamnant le séducteur quand il est parvenu à ces fins par des manœuvres dolosives. Elle a, en quelque sorte ressuscité l’action en frais de gésine. De même elle a pu obliger les pères à pourvoir aux besoins de l’enfant.
- Vers l’assimilation complète par le droit actuel
Réalisée progressivement à partir fin XIXème siècle.
- a) La législation de la fin du XIXème siècle
– L’établissement du lien de filiation : loi de 1912
Reprend des solutions jurisprudentielles qui ont augmenté le nombre de cas où on pouvait agir en reconnaissance de paternité, le rapt ou le viol, la séduction dolosive, l’aveu écrit du père, le concubinage notoire pendant la naissance de l’enfant, l’entretien de la femme et de l’enfant présumé. Droit successoraux des enfants naturels ont été accrus.
– L’amélioration de la vocation successorale des enfants naturels : loi de 1896
Place les enfants naturels avant les collatéraux ordinaires et attribue aux enfants la moitié d’une part d’enfant lorsque l’enfant naturel et en concours avec un enfant légitime et non plus un tiers. Elle accorde aux enfants naturels les trois quarts d’une part d’enfant lorsqu’il est en concours avec des ascendants ou collatéraux privilégiés.
– L’organisation pour la première fois de la famille naturelle : loi de juillet 1907
Organise pour la première fois la famille naturelle en soumettant l’enfant naturel à la puissance paternelle qui est confiée au parent qui l’a reconnu en premier et si reconnaissance simultanée c’est au père qu’elle est confiée.
- b) La législation de la Vème République : lois de 1972, 1993 et 2001 ; ordonnance de 2005
La loi du 3 janvier 1972 : la présomption de paternité est en recul, elle ne s’applique plus à l’enfant né plus de 300 jours après la dissolution du mariage. Le père peut repousser l’action en recherche de paternité s’il prouve par tous moyens qu’il n’est pas le père, la mère également peut également la repousser et faire reconnaître quand elle veut faire légitimer son enfant naturel par son second mari après avoir divorcé du premier. Facilitée par les analyses biologiques : reconnaissance de la paternité scientifiquement établie. Action à fins des subsides qui peut être intentée contre tout homme qui a eu des relations avec la mère pendant la période de la conception, pour éviter les abus la loi pose 2 conditions : l’action sera écartée lorsque le défendeur pourra opposer une exception de débauche de la mère. Et une pénalité sera possible chaque fois qu’il aura établi la mauvaise foi de la mère.
Article 334 du Code civil : l’enfant naturel simple a en général les mêmes droits et les mêmes devoirs que les enfants légitimes envers ses pères et mères il entre dans la famille de son auteur. Il prend le nom de celui de ses deux parents à l’égard duquel la filiation est établie en premier, si simultanée le nom de son père ou de sa mère (depuis une réforme de 2005). L’autorité parentale appartient à celui des parents qui a reconnu l’enfant, si les deux l’ont reconnu l’autorité parentale est donné à la mère ou aux deux parents s’ils sont d’accord et déclaration au greffe.
Les droits successoraux, succession sans testament, désormais l’article 757 dispose que l’enfant naturel a les mêmes droits qu’un enfant légitime. Ils ont une part réservataire dans la succession et ont le droit de recevoir des libéralités.
Les enfants naturels adultérins ou incestueux, la loi de 1972 s’efforce de venir à leur secours, la filiation incestueuse ne doit pas apparaître si elle est établie à l’égard d’un des parents, l’enfant n’est pas autorisé à l’établir à l’égard de l’autre. La loi de 1972 prend soin de ne jamais prononcer le mot adultérin, « l’enfant naturel dont le père et la mère était au moment de la conception dans les liens du mariage avec une autre personne ». Il ne peut être élevé au domicile conjugal à moins que ce soit avec le consentement de l’autre conjoint au détriment duquel la relation adultérine a eu lieu.
Les droits de succession : le partage par moitié en cas de concours au profit de l’enfant adultérin soit avec le conjoint officiel soit avec les enfants légitimes.
La loi de janvier 1993 concernant la généralisation de la recherche en paternité. La loi de 1972 permettait preuves scientifiques à l’appui de faire reconnaître une paternité naturelle mais limitait les cas d’ouverture de recherche en paternité.
Avec loi de 1993 suppression des cas où le père pouvait opposer une fin de non recevoir, article 340 du Code civil, peut être rapportée si la présomption de paternité est vraisemblable.
Elle doit être exercée par la mère au nom de l’enfant dans un délai très strict de deux ans et l’enfant lui-même peut intenter cette action dans un délai de deux ans à partir de sa majorité.
La loi de 2001 pour les enfants adultérins et incestueux la loi de 1972 a été attaquée comme contraire aux principes d’égalité devant la Cour EDH qui en février 2000 dans l’arrêt Mazurek a donné tord à la France, la loi de 2001 a donc abrogé toutes les inégalités qui subsistaient et les enfants naturels adultérins et incestueux sont considérés comme les autres (pages 63 et 64 du recueil).
Moins d’importance de la famille légitime, plus une famille nucléaire, c’est plus l’aspect affectif de protection qui prime sur les intérêts de cohérence patrimoniale.
CHAPITRE II – PUISSANCE PATERNELLE ET AUTORITE PARENTALE
Evolution de la puissance du père vers une autorité, exercée non plus par le père mais par les parents.
A Rome, le père de famille est avant tout un citoyen qui donne à la Cité de futurs citoyens, son rôle pour la cité s’exerce à travers sa puissance qu’il exerce sur sa famille, pas de distinction sphère privée / sphère publique.
Section 1 – La patria potestas du droit romain : une puissance viagère
Cesse à la mort du pater familias sans considération de l’âge de ceux qui étaient soumis à cette puissance, pas d’importance du fait d’être marié ou non. Les romains ont connu l’émancipation, accomplie par des procédures formalistes, qui seule peut interrompre prématurément l’exercice de cette puissance personnelle. Mais elle jouait plus comme une sanction : exclusion de la maison paternelle. Ils sont considérés comme des alieni iuris soumis au droit d’un autre : le pater, ils ne possédaient pas de biens personnels mais après cela a été relativisé. Les biens qu’ils acquièrent sont acquis au bénéfice du pater, ils ne peuvent agir en justice, passer de contrats ou faire des testaments pour leur propre compte. Les engagements qu’ils prennent ne sont pas nuls mais ils ne peuvent avoir pour seul effet que de rendre le pater créancier mais jamais le rendre débiteur ou nuire à ses intérêts.
Des réformes prétoriennes (qui organisent les procès ont apporté des solutions nouvelles notamment en ce qui concerne les contrats passés par les fils de famille et des réformes impériales sont venues améliorer leur conditions, sans abrogation, les principes sont amoindris par des solutions ingénieuses nouvelles.
A – Le droit archaïque (- VIème/VIIème siècles au IIIème siècle)
C’est le maître absolu dans sa domus, l’enfant a une incapacité de jouissance. Le père dispose en principe d’un droit absolu de vie et de mort en ce qui concerne l’état des personnes.
1 – Le droit de vie et de mort du chef de famille : ius uitae necisque
Droit de correction sans avoir à en rendre compte, le droit officiel s’arrête à la porte de la domus. Mais atténuation même lors de la période archaïque par le conseil des proches. Les censeurs ont pu instituer un contrôle, puisque chargés du contrôle des mœurs.
2 – L’incapacité de jouissance du fils de famille
Règle de l’unité du patrimoine qui appartient au pater familias comme son nom l’indique. Second principe : le fils peut nouer des engagements, améliorer la condition de son père mais il ne peut pas la rendre plus mauvaise. Si l’on prend l’actif, le père seul est titulaire il a tous les droits. Si l’on prend le passif résultant d’engagements contractuels par le fils, il est paralysé. Si le fils s’engage il le fait valablement mais il n’a pas de patrimoine, il ne peut acquitter sa dette tant que son père est vivant. Il devra attendre la mort de son père, il sera lors sui iuris. Le père de famille n’est pas obligé de payer la dette contractée par son fils.
Si le fils a commis un délit, principe de la responsabilité délictuelle du coupable. Abandon noxal, (noxa = dommages, préjudices) : le père peut se dédouaner en abandonnant son fils entre les mains de la victime ou de sa famille. Il peut aussi payer l’indemnité. Sous l’Empire réforme prohibe l’abandon noxal.
La procédure judiciaire : le fils de famille ne peut engager une action en justice, son nom ne peut pas figurer sur une action en justice. Quand une action est engagée le nom du fils ne peut figurer sur l’acte qui engage une action de la loi. La situation du fils de famille était proche juridiquement de celle d’un esclave pas doté d’une autonomie. Convenait à la Rome archaïque, une petite cité de paysans qui vivaient dans des huttes ! Cela ne convient plus à une Rome devenue une grande puissance à la tête d’un empire territorial et commercial. Ces bouleversements politiques et économiques vont susciter des aménagements sans abroger les vieux principes pour contourner les difficultés.
Réforme prétoriennes puis impériales : réformes, mais comme toujours en droit romain : réformes se greffent mais n’abrogent pas ce qui existait.
B – Les réformes prétoriennes de la fin de la République pour obliger le pater : biens profectices (qui viennent du père) et actions dites adiectitiae qualitatis (de qualité additionnelle)
Puissance paternelle : au départ pater familias a tout pouvoir. Sur le plan patrimonial, situation pater amélioré par engagement de son fils.
Évolution mais sans abrogation de règles juridiques, on maintient des principes qui s’assouplissent par la pratique : c’est l’objet de ces réformes prétoriennes et leur contexte…
Fin de la République : réformes du préteur qui organise le procès : 1ère phase il est saisi par les parties, il détermine la situation juridique sous-jacente aux faits, qualifie et donne moyens procéduraux. Dans un 2ème temps : il rédige des formules : y figure le nom des parties et les moyens procéduraux. Puis après les parties saisissent un juge : un judex une personne privée (un bonus vir) qui tranche.
– Le pécule profectice ou bien profectices : ce sont les biens qui émanent du père et qui se distinguent des biens adventices. Les pères de famille remettaient à leur fils devenu adultes, dans la pratique, soit de l’argent, soit des biens. On leur confiait aussi les affaires que le père tenaient (par exemple : une « société») comme une banque, un commerce, etc. … Mais juridiquement reste des alieni iuris, en principe incapable, ces fils : ils agissent comme des sui iuris, comme s’ils étaient propriétaires de leur affaire, alors qu’en fait, ils ne sont pas capables tant que le père est vivant.
En droit : le père est titulaire de l’actif, ce qui lui permet par exemple de reprendre les rênes de l’entreprise et aussi de soustraire les biens donnés, pour ce qui est du passif : le père ne peut pas être tenu des dettes contractées par le fils. Ce fils ne peut pas non plus être poursuivi puisqu’en théorie il n’a rien.
Pour remédier a cela, le préteur (=magistrat) a créé des nouvelles actions (de par une adaptation des situations établies). [Le droit romain évolue toujours par ce qui existe : c’est un droit « jurisprudentiel » ou juridictionnel (préférer ce dernier terme) comme le droit anglais actuel bien qu’à l’époque romaine, le mot jurisprudence a une signification bien plus ample que dans la langue française]. Ils ont créé des actions pour agir contre le père et contre le fils en même tps ; ce sont les actions adiectitiae qualitatis = action avec qualité du père ajoutée a celle du fils, c’est-à-dire des actions additionnelles où l’on additionne l’action contre le père à celle contre le fils.
1 – Le principe de ces actions
Le fils de famille contracte un engagement, mais théoriquement, il faut attendre la mort du père pour que le créancier obtienne sa créance. Lui veut se faire tout de suite payer sur les biens : pour toucher sa créance, il lui faut pouvoir condamner le père de famille. Techniquement ce qui est utilisé c’est une formule : rédaction par le préteur qui indique qualifications juridiques, moyens et fondements à la disposition des parties. (On parle alors de procédure formulaire : a partir de la formule, le juge personne privée va pouvoir juger).
On distingue plusieurs parties dans la formule : au début ; l’intentio et à la fin la condamnatio.
Dans l’intentio : le préteur indique comme nom du débiteur le fils car c’est bien lui qui a passé le contrat. Expose la prétention du demandeur qui agit contre le défendeur.
Mais dans la condamnatio : le préteur indique le nom du père car c’est seulement lui qui peut être condamné à payer.
Donc : ajout de la qualité du père a celle du fils.
Grands juristes consultes de l’époque impériale disent : celui qui a contracté a 2 débiteurs : le père et le fils.
2 – L’étendue de l’obligation paternelle
C’est-à-dire dans quels cas le père peut-il être obligé : père n’est pas tenu de toutes les dettes de manière indifférente contractées par le fils.
Au début de l’Empire ; 5 cas ou le père se trouve obligé, ils ont tous en commun que l’opération concerne toujours les situations ou le père se trouve plus ou moins à l’origine de la situation qui a provoqué la situation d’endettement du fils.
— Trois cas où le père est tenu de payer la totalité de la dette :
– Père tenu in solidum de la totalité de la dette lorsque le pater a donné l’ordre (= jussus) à son fils de contracter ou tout au moins lui a donné son autorisation de contracter. Les créanciers ont alors une action nommée action quod iussu à leur disposition. On considère que le fils a agi comme un employé, un mandataire spécial du père.
– Quand le père en tant qu’armateur a préposé son fils pour la conduite d’un navire lorsqu’il a préposé son fils a la tête d’une entreprise maritime. L’action qu’on pourra intenter est l’action exercitoria.
– Le père a préposé son fils comme commis ou courtier a la tête d’une entreprise de commerce terrestre, le créancier aura contre le fils et donc contre le père l’action institoria. On pense que le père à donner un mandat général à son fils servant pour toutes les opérations nécessitées par le commerce.
— Deux cas ou le père peut être tenu d’une partie de la dette contractée par le fils : (à titre partiel = pro parte ; être tenu pro parte)
– Le domaine civil : le fils a pu agir et le père sera tenu soit dans la mesure de l’actif du pécule dont le père a confié la charge à son fils et là le tiers créancier pourra agir contre le fils et contre le père : le créancier agit par l’action de peculio (l’action au sujet du pécule dont le père a confié l’administration à son fils). Soit le créancier pourra agir dans la mesure de l’enrichissement que le père a retiré de l’opération : c’est l’action de in rem verso.
Donc double limite : limite du pécule et limite de l’enrichissement.
– Le domaine commercial : lorsque le fils a fait du commerce avec le pécule de son père sans être préposé pour autant par ce père. Ici, c’est la réparation équitable (pas de peine, sans être préposé par peine…); mais difficile avec le domaine civil où les créanciers se font payer dans l’ordre des créanciers qui réclament et parmi ces créanciers pouvait figurer le père de famille lui-même qui pouvait donc se servir le premier sur le pécule ! Dans le domaine commercial, le préteur a imaginé une procédure qu’on appelle la tributio ; le préteur ordonne que soit procédé à une liquidation judicaire (pour cela : action tributoria pour que le juge statue sur cette liquidation). Et ici les créanciers seront placés à égalité et toucheront le montant de leur dette à titre proportionnel. (C’est la procédure « au marc le franc » du droit français après). Procédure qui a l’origine de notre procédure de faillite.
Ces actions sont donc la reconnaissance patrimoniale pour le fils finalement.
C – Les réformes impériales
Elles vont toutes dans le même sens.
1 – La protection de la personne du fils de famille
C’est l’idée de pitié réciproque : des fils et des parents.
Il en résulte tout un ensemble de mesures à caractère positif ou négatif parmi lesquelles les mesures introduites par Constantin au IVème siècle ont une grande importante.
- Limitation du ius uitae necisque
Mesure à caractère négatif : limitation du droit de vie et de mort du père sur le fils. Constantin assimile au crime du parricide le meurtre du fils par son père. Au Bas Empire, on tolère un certain droit de correction à condition qu’il n’y ait pas maltraitance : en cas d’abus le fils peut s’adresser au magistrat pour lui demander l’émancipation : ce sont des idées que nous retrouverons à l’époque révolutionnaire et après encore.
Interdiction pour le père de vendre ou abandonner son enfant en cas de délit : abandon noxal a d’abord été supprimé pour les filles, puis Justinien le supprime en ce qui concerne les fils (droit d’abandon noxal existait à l’époque archaïque).
A partir de Constantin, à condition d’apporter des preuves suffisantes, les enfants ont pu faire prononcer contre leur père une véritable déchéance de la puissance paternelle ou patria potestas. Par exemple lorsqu’un père livre sa fille à la prostitution ou commet un inceste. Mais difficulté de l’émancipation, car une fois la puissance paternelle « supprimée », l’enfant échappe uniquement a la patria potestas c’est tout, il ne devient pas capable.
- Obligation alimentaire
Obligation alimentaire, d’éducation de ses enfants pour le père : fait l’objet de réglementation dès le Haut Empire et en particulier au second siècle de l’Empire (sans la Dynastie des Antonins) c’est véritablement une obligation.
2 – La protection patrimoniale du fils de famille
- Sénatus-consulte macédonien
Il est intervenu dans la deuxième partie du Ier siècle sous l’empereur Vespasien. Origine de ce sénatus consulte : un fils contracte un emprunt pour lui-même. Le père n’avait rien à voir là dedans donc n’avait pas à être obligé de rembourser la dette de son fils (cf. action adiectitiae qualitatis). Le fils devait donc attendre la mort de son père pour rembourser l’emprunt à l’usurier ce dernier incita a faire avancer la date de mort de son père, le fils assassina donc son père.
Conséquences : sénatus consulte interdit, en dehors des capitaux où le père donnerait son consentement, de prêter de l’argent à un fils de famille. Si un prétendu prêteur demande quand même le remboursement : on lui impose une exception perpétuelle à cet usurier. Cette exception née pendant la vie du pater, elle est maintenue même après le décès du pater (pour éviter et prévenir un tel prêt).
A part cette mesure exceptionnelle, toutes les autres mesures ont pour but d’étendre les prérogatives du fils de famille. Le droit romain assoupli les principes.
- Pécule castrense et quasi castrense
Création dès le début de l’empire d’un pécule au profit du fils de famille quand il entre dans l’armée : pécule castrense vient du mot castra qui veut dire camp militaire. Ce sont donc les biens qu’il pourra acquérir pendant sa vie militaire. On lui reconnaît des pouvoirs quand il est militaire et il touche de l’argent qu’il garde comme si on lui reconnaît une capacité.
Puis : Constantin (IVème siècle av. J.-C.) élargit ce castrense : on considère que relève du même statut les sommes que le fils peut recevoir dans l’administration ou dans le cadre ecclésiastique (argent gagné en tant que fonctionnaire de l’église par exemple) : on parle donc de pécule quasi castrense.
- Biens adventices (qui viennent en dehors du père) : bona materna et bona materni generis
Il s’agit de biens advenus au fils de famille en dehors du père c’est-à-dire du coté de la mère ou du coté de la ligne maternelle : bona materna et bona materni generis (biens de genre matériel).
Pr ce type de bien, au cours du IIème siècle, des sénatus consulte (décision votée par le Sénat romain) : théoriquement, les fils peuvent donc hériter des biens de leur mère. Mais théoriquement, si père est encore vivant, biens devraient tomber dans le patrimoine du père : mais on fait exception à cela.
Puis empereur Constantin complète le principe : les bona materna sont considérés comme entrant dans la propriété du fils. Le père n’en a que l’usufruit pour ces biens (droit de jouissance donc). C’est la l’origine du droit de jouissance légale (cf. après, on en rappellera), article 382 et suivants du Code civil (qui donne aux parents un droit de jouissance légale sur le patrimoine de leur enfant mineur).
Concernant les bona materni generis et biens assimilés à ces biens de genre maternel c’est-à-dire la dote ou les donations reçus par un fils de famille de la part de sa femme ou de la famille de sa femme : on les assimile aux biens adventices et donc soumis au droit de propriété du fils.
Puis Justinien (VIème après J.-C.) procède a une simplification et une généralisation : tous les biens qu’un fils reçoit en dehors des biens profectices (= reçus de son père) sont sa propriété. On a donc retourné le principe de départ où le père a tout, puis évolution et principe inverse c’est la propriété du fils de famille en dehors de certain biens. Le père garde quand même un droit de jouissance, récupère les fruits donc mais ne peut pas en disposer donc vendre par exemple.
Donc 3 grandes catégories de biens :
-Ceux dont le père a la propriété et le fils l’administration : c’est le pécule et le bien profectis.
-Ceux dont la propriété est au fils, le père n’en a que la jouissance : ce sont les biens adventis.
-Ceux dont le fils a la propriété et la jouissance : le pécule castrense et le pécule quasi castrense.
Donc une progressive diminution de l’emprise du pouvoir paternel eu égard au patrimoine de l’enfant. En tout état de cause, le père doit laisser à ses enfants un minimum de ses biens : c la réserve.
Section 2 – Puissance paternelle et autorité parentale dans l’ancien droit français
A – L’autorité parentale au Moyen Age
Cf. titre I : on constate des différences entre l’esprit qui règne dans la famille au Moyen Age et au droit romain.
Au Moyen Age : solution inscrite dans des tendances communautaires, dans des coutumes. Solutions coutumières variées d’ailleurs car coutume dépend des variations géographiques.
Cependant : on peut dégager des caractéristiques communes.
1 – La durée de l’autorité est limitée
A la difficulté du droit romain ou l’autorité est viagère (jusqu’à la mort : patria potestas) : ici, au Moyen Age, elle est limitée.
On observe dans beaucoup de coutume que l’enfant reste sous l’autorité parentale quelque soit son âge tant qu’il demeure dans la maison de ses parents. Le fait de s’établir hors de la maison « la mise hors de celle », le plus souvent car mariage qui aura de fait l’effet d’une émancipation. Au Moyen Age : pas rare pourtant que le fils même marié avec des enfants reste dans la maison… Traduit l’effet communautaire : la maison constitue une entité spécifique.
Puis au XIIIème siècle : l’arrivée a un certain âge, chez les roturiers à Pairs, 14 ans pour les garçons, 12 pour les filles, pour les nobles 21 ans pour les garçons, 15 ans pour les filles : là le mariage ou l’arrivée a un certain âge a pour effet l’émancipation, la tutelle de l’autorité parentale n’est plus la même s’il subsiste certaines prérogatives.
2 – L’autorité est parentale et non strictement paternelle
Certes, père a dans les faits le rôle principal. Mais il est avant tout un protecteur un nourricier, moins un monarque comme dans l’esprit romain. Signe du communautarisme. (Voir fascicule page 49 qui parle de la figure paternelle au Moyen Age).
Tant que vivent les deux parents, ils exercent en commun cette autorité même si de fait le père a un rôle prépondérant. Pour certaines affaires, les deux parents agissent ensemble, lorsque père malade ou meurt, la mère remplace.
A la mort d’un des 2 parents : cette autorité parentale se transforme en une sorte de tutelle, le parent survivant exercera sur ses enfants une autorité avec des pouvoirs réduits. Le père au décès de sa femme devient l’administrateur de ses enfants, la femme au décès de son mari devient elle une sorte de tutrice (c’est pareil en fait qu’un administrateur…).
3 – Le contenu de l’autorité parentale sur les biens participe des mêmes conceptions
L’enfant tant qu’il reste sous le toit de ses parents n’a pas de biens propres, tant ce qu’il peut acquérir va se trouver tomber dans la propriété commune de la famille. Mais lorsqu’il acquiert son émancipation / autonomie ou bien à la mort de son père : il va récupérer une part de bien commun en qualité de « parçonnier » (vieux français : veut dire en qualité de partage).
Un certain nombre de coutume considèrent que les obligations qu’un fils de famille a pu contracter alors même qu’il vivait chez ses parents sont inopposables au fils de famille mais aussi à son père. En revanche, contrairement au droit romain, le père doit répondre de manière pécuniaire des délits que peuvent avoir commis ses enfants.
Fin du Moyen Age « renaissance du droit romain » : va dans le sens d’une aide du fils de famille avec réintroduction de la notion de pécule, du coup le droit va établir des exceptions au principe général : (hypothèse ou le fils reste dans la maison familiale)
Les biens acquis par l’enfant, dans l’exercice d’une profession séparée
Les biens acquis de la famille maternelle
Les biens acquis par l’enfant par donation à titre personnel
Ils demeurent à l’enfant uniquement qui peut les engager par contrat.
A titre successoral : certaines coutumes permettent a l’enfant de disposer de ses biens propres par testament, d’autres coutumes l’interdisent ou bien autorise le legs et le testament mais sous condition d’autorisation du père.
Distinction selon les coutumes mais concernant les pouvoirs sur la pers elles sont unanimes.
4 – Les pouvoirs sur la personne sont étendus
Le père et la mère ont un droit de correction sur l’enfant mais n’autorise pas pour autant la mort ou les blessures ou la maltraitance.
Cas limite : parents peuvent expulser de la maison familiale l’enfant sans lui donné sa part de biens communs donc cela revient à le déshériter.
Puis au XVIème : retour de la patria potestas dans les pays du midi : alors on observe la quelques différences avec le nord.
B – La puissance paternelle sous l’Ancien Régime
L’opposition va être nette entre les pays de droit écrit qui sont inspirés du droit romain et les pays coutumiers. On revient sur une conception romaine de la famille qui illustre la monarchie absolue qui est d’actualité : on parle de monarchie domestique.
Pour autant concernant les droits sur la pers : pas beaucoup de changement, grandes similitudes entre les pays de droit écrit et les pays de coutumes.
1 – Dans les pays de droit écrit : retour à la patria potestas romaine sur les biens
Retour pur et simple à la patria potestas de droit romain qui se traduit par une soumission rigoureuse des enfants au père et à l’exclusion de la mère. Le père détient sur ses enfants une puissance viagère (qui ne cesse qu’a sa mort ou bien par le jeu d’une émancipation possible, elle doit être expresse cf. après).
L’enfant, comme a Rome, ne peut pas acquérir pour son propre compte, ce que l’enfant acquiert devient propriété du père à l’exclusion des pécules et biens adventices hérités de la mère ou de la famille maternelle.
Les engagements contractuels ne sont opposables au père que si engagements contractés sous son ordre : jussus ou dans la mesure ou ces engagements ont profité au père.
2 – Dans les pays de coutumes : restrictions, au contraire, des prérogatives du père sur les biens
– Évolution opposée : on refuse la patria potestas romaine. Loisel : « En France puissance paternelle n’a lieu ».
Les coutumes refusent la patria potestas et restreignent les prérogatives qu’au Moyen Age le père exerçait sur les biens.
– Au XVIème et XVIIème : La majorité émancipatrice se généralise progressivement c’est-à-dire arrivé à un certain âge (le plus souvent 25 ans) les enfants échappent de plein droit à l’autorité paternelle et deviennent pleinement capable.
Le mariage à n’importe quel âge émancipe.
Le mineur (de moins de 25ans) se voit reconnaître la propriété des biens qu’il a acquis par succession ou par donation et le père sur ses biens n’a qu’un simple droit d’administration et le fils pourra toucher le fruit de ses biens déduction faite des frais d’entretien et d’éducation que le père a du supporter.
Seules quelques coutumes du centre de la France (donc proche du droit écrit) accordent au père l’usufruit des biens de l’enfant mineur.
3 – Les pouvoirs sur la personne se renforcent tant dans les pays de coutumes que dans les pays de droit écrit.
Convergence conformément à la conception autoritaire de la famille à l’image de la monarchie absolue qui se détermine dès la fin du XVIème siècle.
Père est un véritable monarque domestique : doté d’un pouvoir « juridictionnel » : il a un pouvoir de correction qui permet d’infliger à ses enfants une véritable peine : pouvoir qui se confine à un pouvoir juridictionnel en ce que le père peut infliger à ses enfants des peines publiques.
C’est ainsi que dans le Dauphiné, un père condamne son fils à 20 ans de galère pour tentative de meurtre sans passer devant le juge mais bénéficie du concours de la police pour appliquer cette peine. Mais les parlements, cours juridictionnelles ayant des pouvoirs législatifs, contrôlent le tout.
Des arrêts de règlement du dernier tiers du XVIIème siècle interdisent de faire emprisonner les enfants qui ont plus de 25 ans.
Lorsque le père est remarié ou lorsque c’est la mère qui exerce le pouvoir paternel du fait de la mort du père : il faut une autorisation judiciaire pour faire incarcérer son enfant.
Au XVIIIème siècle : l’habitude s’est développé d’obtenir, de solliciter de l’autorité royale des lettres de cachets pour faire enfermer son enfant mineur à la suite d’une enquête royale qui étaient quand même des enquêtes très approfondies ce qui empêchait les abus mais cela n’empêche tout de même pas que ces lettres de cachets sont dénoncées comme un symbole arbitraire que la Révolution dénonce.
Section 3 – Le droit contemporain et l’affaiblissement de la puissance paternelle
Et ce par une prise en compte des droits des enfants, encore que le Code Napoléonien va marquer un certain retour a l’esprit de l’Ancien Régime ce que les réformes postérieures de la fin du XIXème et du début du XXème vont effacer.
A – Le rejet de la puissance paternelle sous la Révolution
On veut mettre fin à la puissance despotique paternelle de même qu’on veut mettre fin à la monarchie absolue.
Les assemblées révolutionnaires ont donc pris toutes une série de mesures pour restreindre pouvoir du père.
1 – Suppression de la puissance paternelle à durée indéterminée des pays de droit écrit
Suppression par une loi d’août 1792, à la suite de cette réforme, la loi de septembre 1792 a établi de manière uniforme pour toute la France une majorité émancipatrice fixée à 21 ans.
Majorité émancipatrice a été étendue pour le mariage et a été étendue à la capacité patrimoniale par un décret (interprétatif de la loi de 1792) de janvier 1793.
C’est la conception coutumière de l’ancien droit qui devient donc la règle pour la France toute entière.
À partir de 21 ans, l’enfant continu d’être tenu à l’égard de ses parents d’un devoir de respect même si émancipé automatiquement.
Des projets de Code civil pour la Révolution (qui sont restés à l’état de projet mais montre que l’idée de code civil date de cette période) ont contenu des dispositions favorables à une émancipation émancipée de l’enfant du fait du mariage ou bien pour des mineurs pratiquants le commerce.
2 – Réduction des prérogatives de la puissance paternelle
En particulier concernant le droit de correction du père.
Plusieurs étapes :
La constituante de 1790 supprime les lettres de cachets
Loi d’août 1790 retire au père la faculté de faire incarcéré l’enfant pour confier ce droit à des tribunaux de famille (présidé par des juges de paix) qui pouvaient condamner le mineur a des peines d’un an maximum.
Loi de janvier 1793 (an II) : loi votée par la Convention pour supprimer le droit d’exclure de la succession c’est-à-dire d’exhéréder l’enfant.
Et plusieurs projets préconisent de généraliser des solutions qui existaient dans les coutumes existantes avant la Révolution qui n’attribuaient au père qu’un droit d’administration et de jouissance concernant les biens des enfants.
3 – Projet de création d’une tutelle parentale
Projet formulé de créer 1 tutelle parentale exercée conjointement par le père et la mère remplaçant ce qui pouvait rester de la puissance paternelle (projet = période fin 1792-1794).
Même si resté à l’état de projet : montre qu’on a déjà le souci de faire partager la puissance paternelle avec la mère : idée qui va se retrouver plus tard pour une généralisation de la puissance maternelle.
B – Rétablissement de la puissance paternelle par le Code civil de 1804
Compromis plus ou moins harmonieux des solutions avant Révolution, des impératifs de la Révolution avec un retour en arrière cependant aussi.
Compromis qui marque une importance pour les solutions coutumières.
1 – Confirmation de la majorité émancipatrice
Existence de la majorité émancipatrice est confirmée et demeure fixée à 21 ans (solution du droit révolutionnaire ou du droit dit intermédiaire pour marquer que c’est le droit entre le droit l’Ancien Régime et le droit du Code civil…).
– Pour le mariage des fils, le consentement des parents est exigé jusqu’à 25 et le restera jusqu’à une loi de 1907.
– Avant 21 ans : émancipation anticipée est possible, elle est de plein droit par le mariage ou par la volonté expresse formulée par le père. Mais ne confère qu’une capacité réduite (voir section 4 suivante).
2 – Droit de jouissance légale du père sur les biens du mineur
En dehors des biens acquis par le travail du mineur : le père reçoit un droit de jouissance légale (compromis).
3 – Rétablissement du droit paternel de correction mais avec des limites
Rétablissement des droits de correction mais avec une étendue plus restreinte que sous l’Ancien régime. Par exemple le mineur ne peut pas quitter sans autorisation le domicile paternel sauf si c’est pour s’engager dans l’armée mais uniquement après 18 ans.
Avec le Code civil : les tribunaux de famille disparaissent (car mauvais fonctionnement), et le père retrouve son droit de pouvoir de faire emprisonner l’enfant avec 3 précisions :
– Lorsque l’enfant a moins de 15 ans, le père dispose d’1 pouvoir discrétionnaire : il décide seul de l’emprisonnement mais ce dernier ne peut durer plus d’un mois.
– Pour les enfants de plus de 15 ans : le père peut seulement saisir le président du tribunal qui jugera de l’opportunité de l’incarcération laquelle ne peut pas être supérieure à 6 mois.
– Quelque soit l’âge de l’enfant, le régime ci-dessus (c’est-à-dire la procédure avec le tribunal) vaut également lorsque l’enfant possède une fortune personnelle, lorsque le père est remarier ou lorsque cette puissance paternelle est exercée par la mère.
Dans le Code civil : la faculté d’exhérédé n’est pas rétablie.
4 – Une puissance paternelle ni partagée ni contrôlée
Cela contrairement au projet révolutionnaire et à la situation contemporaine.
Puissance paternelle : confiée au père seulement, la mère peut se la voir confiée si mort du père et de toute manière : pouvoir restreints dans ce cas.
Cette puissance paternelle : n’est pas sanctionnée en cas d’abus.
Donc : retour a l’esprit familial de l’ancien régime.
C – De la puissance paternelle a l’autorité parentale
Avec la loi décisive de juin 1970.
Depuis fin XIXème siècle : le droit de la puissance paternelle a fait l’objet de puissante réforme. Depuis loi de 1970, il ne reste quasiment rien de la puissance paternelle d’avant.
1 – Une puissance paternelle contrôlée
Dès le XIXème siècle, alors même que déracinement et exode vers les villes a contribué à des abus. C’est la jurisprudence qui a joué 1 grand rôle. Les tribunaux ont joué un rôle précurseur donc et ont créé de manière prétorienne une déchéance soit partielle soit totale de la puissance paternelle.
Déchéance partielle : pour priver le père de sa puissance dont il pouvait abuser, on considérait que abus dès lors que santé ou moral de l’enfant été jugés comme étant en danger.
Début de la IIIème République qui va opérer d’importantes réformes (avec rétablissement du divorce notamment).
Loi de 1889 : loi sur la protection de l’enfance maltraitée ou moralement en danger, elle s’est s’inspirée de la jurisprudence pour proclamer une déchéance totale dans les cas les plus graves.
Loi de 1921, après guerre prévoit dans ces situations ci-dessous si moins graves : on peut prononcer déchéance partielle.
Puis entre deux guerres : mesures d’assistance éducative ont permis de laisser dans la famille et ont permis au père d’exercer son autorité mais en le soumettant à la surveillance des tribunaux chaque fois que santé, moralité de l’enfant mineur était estimées en danger, et ce même en l’absence de faute des parents.
2 – Une puissance paternelle limitée
Limitation du droit de correction entreprise d’abord par la jurisprudence. Au XIXème l’emprisonnement des mineurs très utilisé surtout dans les cas d’inconduite mais dans de mauvaises conditions, mélangés avec les prévenus adultes de droit commun. Mais les juges ont exercé de plus en plus un contrôle strict sur les demandes paternelles d’incarcération pour les mineurs de moins de 15 ans et de 16 à 21 ans. Ils ont très souvent opposés des refus aux demandes d’enfermement. Au début du XXème la législation en liant la question de la correction à la question de l’enfance malheureuse dans de nombreux cas la législation a remplacé l’emprisonnement par des mesures de placement dans des institutions spécialisées.
L’emprisonnement des mineurs au titre de la correction paternelle tombait dès la première moitié du XXème peu à peu en désuétude. Décret loi de 1935 qui a remplacé l’emprisonnement dans des maisons d’éducation surveillée. Une ordonnance de septembre 1945 a ôté au père le pouvoir de décider du placement dans une telle institution pour le remettre au président du tribunal pour enfant, son rôle devient de plus en plus important. Reprise de solutions préconisées à l’époque révolutionnaire. Dans une loi de 1970 l’ultime vestige réside dans la faculté pour les parents de demander au juge l’assistance par des mesures éducatives
3 – Une autorité parentale progressivement partagée
Remplace la puissance paternelle. Loi de 1927 ouvre déjà la voie en supprimant la voix prépondérante du père dans le consentement au mariage des mineurs une loi de juillet 1942 a admis le principe de l’association de la femme dans l’exercice de la puissance paternelle mais avec des restrictions telles que finalement privée de toute efficacité. Loi de 1970 organise l’exercice en commun de l’autorité parentale.
- Une vague de réforme de la Vème République : les trois lois de décembre 1964, de juin 1970 et de juillet 1974
Législation qui renoue avec les projets de la période révolutionnaire mais aussi mais avec la tradition juridique des coutumes du Moyen Age.
Création de l’assistance éducative par une ordonnance de 1958 si santé, sécurité, moralité ou éducation compromise. On se situe du côté de l’enfant : idée de protection.
Une loi de 1964 modifie le régime de la tutelle et de l’administration légale. Loi du 4 juin 1970 le titre du Code civil consacrée à la puissance paternelle articles 371 à 387 devient l’autorité parentale. Loi de juillet 1974 âge de la majorité à 18 ans. La fin de la jouissance légale des biens du mineur par les parents s’arrête à 16 ans.
- Une série de mises au point postérieures : les quatre lois de décembre 1985, juillet 1987, janvier 1993 et de mars 2002
Le but c’est d’inciter les parents à agir en commun dans l’administration des biens dans l’éducation de leurs enfants.
Passage de la puissance paternelle à l’autorité parentale, les mots sont très importants. Traduit un affaiblissement, un certain recul des pouvoirs des parents. Liée à cela toujours l’idée de protection l’esprit du droit a changé, l’esprit du droit révolutionnaire et coutumier a été repris par la législation contemporaine. Article 371-1 issu de la loi de 1970 (modifié par loi de 2002) autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant elle appartient au père et mère …
Inspiration que l’on retrouve dans les projets de Code civil préparé par Cambacérès.
Elle apparaît quand même diminuée dans sa durée, elle s’éteint à 18 et plus 21 ans et dans ses effets parce que le droit d’incarcération a disparu remplacé par des mesures d’assistance éducatives, le rôle du juge et de l’administration amplifié.
Egalité entre père et mère promotion de la femme au sein de la famille, ils agissent de concert exercent l’autorité en commun, ils sont solidairement responsables des dommages causés par le mineur. A défaut de l’un des parents, c’est l’autre qui est administrateur légal qui s’exerce sous le contrôle de l’autorité judiciaire.
C’est l’esprit des droits coutumiers du Moyen Age qui inspire le législateur ainsi que l’esprit du droit révolutionnaire : protecteur des droits de leurs enfants administrateurs.
Synthèse sur les droits des enfants à la lumière du droit contemporain.
Les sources des droits fondamentaux de l’enfant et le contenu de ces droits ?
Perspective plus globale que le cadre national.
En novembre 1959 une déclaration des droits de l’enfant adoptée par les Nations Unies. Pas de valeur juridique en elle-même mais prépare la Convention de New York préparée en novembre 1989 signée en janvier 1990 ratifiée par la France en août. Droit à la protection des enfants contre l’exploitation économique, droit de choisir leur religion contre toute atteinte à vie privée et familiale et interdiction discrimination sur la naissance.
La CEDH du 4 novembre 1950 permet d’assurer la protection des droits de l’enfant sur le fondement de ses articles 8 et 14, article 8 relatif au respect vie privée et familiale, reconnu droit de l’enfant à une vie familiale d’un point de vue affectif et matériel ne doit pas subir les conséquences du refoulement de ses parents. Article 14 prohibe toute discrimination fondée sur la naissance.
En droit interne les enfants sont protégés par le droit pénal interdiction des relations sexuelles avec un mineur sauf lorsqu’il a au moins 15 ans et qu’il y a librement consenties. Est réprimé tout attentat à la pudeur même sans violence. Les peines pour violence sexuelle comme celles qui sanctionnent la prostitution sont aggravées lorsque la victime est mineure incitation à la débauche d’un mineur également sanctionnée.
Loi de 1989 relative à la protection des enfants pose qu’en cas de crime le délai de prescription est de 10 ans à compter de la majorité et non des faits.
Droit civil ; égalité de traitement reconnue pour les enfants dont conditions de naissance ne sont plus les mêmes plus d’inégalités entre enfants naturels, adultérins et enfants légitimes. Touche à 5 points droit à la vie, droit à connaître ses origines, droit d’être élevé par ses parents, droit à une égalité de traitement et droit à une certaine autonomie.
IVG loi Veil de 1975 au regard de cette loi certains auteurs ont considéré que le droit à l’IVG consacré était contraire à la convention de NY article 6 qui affirme le droit inhérent à la vie de l’enfant voire même article 16 du Code civil, qui garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie.
Arrêt perruche Ass. Plén 17 novembre 2000, suivi par deux arrêts du 13 juillet et 28 novembre 2001 qui a suscité la loi du 4 mars 2002. Droit à la mère d’avoir un enfant en bonne santé et dépourvu de tout handicap mais une telle interprétation conduit à confondre le droit à l’IVG et le droit à l’indemnisation de la mère privée de la possibilité de décider en toute connaissance de cause d’une IVG (déficience des médecins qui n’ont pas su déceler un handicap), droit à l’indemnisation de l’enfant en réparation du préjudice résultant du fait d’être né handicapé, droit encadré par la loi de 2002.
Le droit à connaître ses origines.
La loi récemment s’est efforcée de faciliter l’établissement de la filiation de l’enfant la loi de janvier 1972 a limité le domaine de la présomption de paternité légitime et permis à la mère de contester la paternité dans un but de légitimation.
La loi de juin 1982 a rendu possible l’établissement de la filiation naturelle par l’effet de la seule possession d’état c’est-à-dire une situation dont beaucoup d’éléments de faits laissent présumer la paternité.
La loi de janvier 1993 a assoupli les conditions de l’action en recherche de paternité naturelle en supprimant les anciens cas d’ouverture et en la rendant possible dès lorsqu’il existe des présomptions ou indices graves. Cependant le droit de l’enfant de connaître ses père et mère connaît 4 restrictions :
- l’enfant incestueux ne peut établir sa filiation qu’à l’égard de l’un de ses deux parents surtout lorsque l’inceste est absolue, le protège autant lui-même que l’ordre public
- l’enfant né d’une procréation médicalement assisté avec un tiers donneur, ne peut pas établir de lien de filiation à l’égard de l’auteur du don, loi de juillet 1994 est venue préciser ce point
- l’adoption plénière d’un enfant a pour conséquence de rompre tout lien entre cet enfant est sa famille d’origine, sauf lorsque l’enfant adopté est l’enfant du conjoint
- l’accouchement sous X permet à la mère de faire obstacle à toute recherche de l’enfant à son encontre, cette règle posée par articles 341 et 341-1 du Code civil retouchée par une loi de janvier 2002, elle n’a pas remis en cause les deux dernières restrictions mais permet seulement aux père et mère de laisser tous les renseignements relatifs à la santé des parents aux origines de l’enfant et aux raisons et circonstances de la remise de l’enfant aux services de l’aide social, on respecte l’anonymat. Elle permet aussi à une femme qui demande d’accoucher sous X de laisser des informations sur sa santé et celle du père et tous les renseignements sur les origines de l’enfant et les circonstances de sa naissance et de laisser sous pli fermé son identité, et la possibilité de lever le secret de son identité à tout moment, l’enfant peut toujours saisir le conseil national pour l’accès aux origines personnelles qui peut agir comme médiateur.
Le droit d’être élevé par ses parents.
Ce qui soulève la question de l’autorité parentale exercée en commun désormais depuis loi de 1970, qui visait l’enfant légitime mais loi de 1987 précise le rôle des parents divorcés et la loi de janvier 1993 relative aux enfants naturels précise le devoir des parents naturels et enfants la loi de 2002 qui instaure un droit commun de l’autorité parentale dont le principe est l’exercice conjoint de cette autorité quelque soit la nature de la filiation et le statut des parents article 372 du Code civil précise que désormais les père et mère exercent en commun l’autorité parentale. Egalité des enfants légitimes et naturels au regard de l’autorité parentale. Le droit de l’enfant de ne pas être séparé de ses frères et sœurs à rapprocher. Consacré par une loi de décembre 1996 protection de la fratrie article 371-5 du Code civil.
CA Paris de mai 2003, l’enfant confié à son père plus disponible que la mère au motif qu’il souffrait d’être séparé d’une demi-sœur née d’un premier mariage du père, notion extensive de la fratrie englobe les demi-frères et sœurs. Cet arrêt peut contribuer à une sorte de statut juridique des familles recomposées.
Le droit à l’égalité de traitement.
La loi de janvier 1972 a affirmé le principe que l’enfant naturel devait avoir les mêmes droits que l’enfant légitime droits patrimoniaux ou extra. Renforcée par la loi de janvier 1993 du point de vue de l’exercice de l’autorité parentale et puis loi de décembre 2001 complétée par ordonnance de 2005 (pages 63 et 64 du recueil).
La Cour de cassation pendant longtemps considérait que cette inégalité des enfants adultérins n’était pas contraire aux articles 8 et 14 de la CEDH au motif que la vocation successorale est étrangère à la vie privée. Arrêt Mazurek de 2000 CEDH condamne la France, article 14 de la convention s’opposait à ce que des personnes dans des positions comparable soient traitées de façon différente sauf justification objective et équitable, rejette l’argument tiré de la protection de la famille traditionnelle « l’institution de la famille n’est pas figée », faits pas imputables à l’enfant.
Droit à une certaine autonomie.
Peut user de la contraception accoucher sous X recourir à une IVG sans l’autorisation de ses parents, mais il a surtout le droit d’être entendu et défendu en justice. Article 12 de la convention de NY reconnaît le droit à l’expression de l’enfant.
Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants adoptés en 1996 et en France la loi de janvier 1993 a consacré ces deux aspects du droit du mineur d’être entendu (388-1 du Code civil) et défendu (388-2 du Code civil) en justice.
Section 4 – L’extinction de la puissance paternelle
A – L’émancipation romaine
Le droit romain a établi une tradition qui a pesé sur les siècles, notamment dans la moitié méridionale de la France pays de droit écrit. Puis peu à peu le droit français s’en est détaché.
Le mot même vient du droit romain. Les juristes consulte romains notamment Gaius fait remarquer que l’existence de cette institution est un trait original propre au droit romain. Puissance paternelle fondamentale en droit romain propre à cette société, absolue même après l’âge adulte, le mariage. L’émancipation n’est pas un accès à la liberté, pas d’aspect positif au contraire c’est une sanction, négative, l’institution fondamentale c’est la toute puissance du pater. Aussi longtemps que le pater familias est vivant. Rien à voir avec notre notion moderne d’émancipation pourtant c’est le droit romain qui nous a donné le mot.
Pour sortir à Rome de la toute puissance du père tant qu’il est vivant il y avait qu’une solution, c’était d’être émancipé mais pas du tout de sens positif, pour devenir sui iuris. Mais évolution, notamment par le droit prétorien, en pratique à la fin il devenait pratiquement capable.
Le mot émancipation tire son étymologie de deux sources possibles soit il vient de mancipatio qui servait à faire cette émancipation, opération qui sert à procéder à l’émancipation, soit du mot mancipium. Mancipatio c’est un procédé formaliste utilisé pour une vente d’aliénation volontaire utilisé pour l’aliénation des res mancipi ce sont toutes les choses qui sont susceptibles de mancipatio et qui sont un fond de terre, les maisons situées en Italie, les bêtes de trait, les servitudes rustiques, les esclaves qui travaillent sur la terre cultivée. C’était un procédé de vente très formaliste solennel pour les res mancipi. Le é vient de ex = hors de, permet de sortir de la puissance paternelle.
Mancipium, c’est la puissance la potestas exercée par un chef de famille exercée sur une personne libre mais incapable juridiquement, alieni iuris qui fait partie d’une autre famille
Hors du mancipium de quelqu’un.
Acte de la volonté du pater familias qui met fin par exception de manière prématurée à la puissance du chef de famille. Elle rend le fils de famille pleinement capable sui iuris mais en contre partie il se trouve désormais totalement exclu de la famille, elle n’a pas du tout le même sens que l’institution qui porte ce nom aujourd’hui. Pour trouver à Rome une institution qui correspond à ce que nous connaissons, il faut attendre la création de la venia aetatis. Cette émancipation ne concerne pas les mineurs en tant que tel mais les fils de famille quelque soit leur âge.
1 – Les formes de l’émancipation
A l’époque archaïque mais aussi à l’époque classique et sous le Haut Empire, esprit traditionaliste du droit romain, les romains utilisent toujours pour l’émancipation les modalités de la loi des 12 tables qui remontent à 450 avant J.-C.
Le procédé est le même que celui utilisé pour l’adoption, une vente fictive très formaliste. Le pater va « manciper », vendre trois fois de suite son fils à un comparse qui va l’affranchir. Le fils est considéré comme une res mancipi, il va le vendre comme un esclave et le comparse va l’affranchir. Si c’est une fille ou le petit fils une seule fois suffira.
A l’issue de la troisième vente, la patria potestas disparaît et le fils de famille se trouve dans le mancipium du comparse acheteur, il exerce sa puissance sur le fils qui est maintenant dans sa famille. Il l’affranchit à l’issue de la troisième vente et il se trouve sui iuris.
L’administration impériale met en place une procédure plus adaptée en même temps mise en place pour l’adoption et l’adrogation, par rescrit impérial qui répond à la requête ou un acte judiciaire, un contrat passé devant le juge, déclaration du père d’émanciper son fils et acceptation du fils qui adhère.
2 – Les effets de l’émancipation
La procédure est la même mais à l’époque classique les effets vont se modifier. A l’époque archaïque l’émancipation touche l’exercice de la patria potestas, elle exclut le fils de famille de la domus de sont pater. Il est n’est plus soumis à son pater il devient sui iuris. Il peut avoir un patrimoine. Ses liens avec ses frères et sœurs sont rompus définitivement, ainsi que les liens avec les agnats de sa famille. S’il était marié et avait des enfants, du fait du mariage son épouse et ses enfants restent sous la patria potestas du pater et rompent les liens avec lui. Toute sa vocation successorale disparaît. Elle présente donc plus d’inconvénients, c’est une peine une sanction et pas une libération. A partir du droit classique fin République et Haut Empire les inconvénients patrimoniaux de l’émancipation ont été corrigés, d’abord par l’usage, le père qui émancipe son fils lui confie en même temps son pécule (de l’armée par exemple). Ensuite le prêteur accorde à l’enfant émancipé un droit de succession, le droit de succéder à son père et à ses frères en dépit de son émancipation. La bonorum possessio c’est la possession des biens : unde liberi en qualité de descendants, ou unde cognati, en qualité de cognat. Dès lors, l’émancipation commence à changer de sens, à ne plus signifier une peine mais à devenir un avantage même si la procédure reste formaliste.
Ce caractère viager de la puissance paternelle, qui au départ signifie que l’émancipation est une sanction, est beaucoup moins net en droit français qui du Moyen Age au XVIIIème siècle ne présente pas une image uniforme de l’émancipation il faut distinguer selon les époques et selon les régions.
B – Du Moyen-âge à la fin de l’Ancien Régime, des évolutions contrastées entre les pays de coutumes et pays de droit écrit
1 – Au Moyen-âge
- L’émancipation plutôt tacite des coutumes (nord de la France)
Elle résulte d’actes de situation dans la vie familiale. Trois choses séparent l’homme de la puissance paternelle, l’âge, le mariage et le feu et lieu (le foyer).
La puissance paternelle s’éteint soit en raison de l’âge de la majorité, soit par le mariage de l’enfant, soit par l’établissement dans une maison séparée de l’enfant (souvent d’ailleurs à l’occasion d’un mariage).
Dans beaucoup de coutume c’est ce dernier point qui est important « la mise hors de pain et pot ». « Feu et lieu font mancipation ». C’est le moyen le plus fréquent de faire cesser la puissance paternelle. Tant que l’enfant reste au foyer il reste sous la puissance de ses parents mais d’abord de son père, « chief de l’hostel ».
Quant au mariage, celui de la fille se traduit par le départ de la fille de la maison parentale donc par la cessation de l’exercice de la puissance paternelle. Mais il est fréquent que le garçon même s’il se marie reste sur l’exploitation familiale, il ne fait donc pas cesser.
Adage « tout mariage émancipe » mais que dans certaines régions, le droit n’est pas uniforme.
Le décès de la mère, ou de façon générale de l’un ou l’autre des parents, le parent survivant continue à exercer l’autorité sur ses enfants mais plus une sorte de tutelle. Si le père survit ses pouvoirs ne seront plus les mêmes que quand la mère était vivante, plutôt les pouvoirs d’un tuteur. A la fin du Moyen Age lorsque la mère décède il n’est pas rare que le père soit nommé officiellement tuteur de ses enfants.
- L’émancipation expresse du droit romain
Au Moyen-âge le régime en vigueur dans les pays de droit écrit c’est jusqu’au XIIème siècle la même chose que dans les pays de coutume et à partir du XIIIème siècle comme le droit romain est remis en vigueur c’est l’émancipation expresse qui prévaut en allant devant le juge (laïque ou d’église) pour prononcer l’émancipation. Redécouverte de la compilation de Justinien en Italie à la fin du XIème siècle, elle débouche sur la création des premières facultés juridiques (Bologne), l’enseignement se fait sur la base du corpus iuris civilis et du droit canonique qui en est largement inspiré.
2 – Sous l’Ancien Régime
Dans les pays de coutumes : majorité émancipatrice fixée ordinairement à 25 ans et émancipation expresse.
Les différentes causes qui faut mettre fin à la puissance paternelle, c’est l’âge désormais sur lequel l’accent est mis pour émanciper, il y a donc une majorité émancipatrice. Loisel, « droit de puissance paternelle n’a lieu ». Il veut dire par là qu’en France à la différence du droit romain, la puissance paternelle n’est pas viagère, elle peut s’éteindre avant la mort du père de famille. Ce sont les coutumes qui veulent que la majorité atteinte par l’enfant faisait cesser la puissance paternelle. Majorité fixée à 25 ans en général dans les coutumes, comme dans la pleine majorité en droit romain. La mort de la mère donne là aussi lieu à l’ouverture d’une tutelle du père. L’établissement dans une habitation séparée joue un rôle plus effacé. De même que l’exercice d’une profession du père et qui entraîne une séparation d’habitation.
De même le mariage, dans le ressort de la coutume de Paris émancipe mais dans beaucoup d’autres régions de France il n’émancipe pas.
Avec la renaissance du droit romain qui s’infiltre également dans les pays de coutume à partir du XIVème – XVème siècle le droit coutumier emprunte l’émancipation expresse accordée par les lettres royaux, homologuées en justice. Elles sont accordées à condition d’avoir au moins 16 ans pour les filles et 18 ans pour les garçons. Mais cette émancipation par lettre a des effets incomplets parce que de 16 ou 18 à 25 ans l’émancipation doit être assistée d’un curateur pour les actes les plus graves, pour les actes d’aliénation d’un immeuble.
Dans les pays de droit écrit : émancipation expresse.
A partir du XVIème siècle la réception du droit romain va entraîner une rigueur plus importante, c’est une expression tacite avec des formes très solennelles. A Limoges un curé en 1792, âgé de 47 ans se présente devant le juge de district et qui joignant les mains supplie son père de bien vouloir l’émanciper. Les mentalités subsistent.
L’émancipation tacite qui pouvait résulter de l’établissement dans un domicile séparé, le mariage s’efface, pour laisser place à l’émancipation expresse.
C – De la révolution à nos jours
La première tendance des révolutionnaires c’est d’être hostile à la puissance paternelle qui rappelle la monarchie domestique elle-même reflet de la monarchie absolue. Mirabeau avait eu à la subir emprisonné plusieurs fois par son père jusqu’à 32 ans. L’assemblée législative par un décret d’août 1792, abolit la puissance paternelle sur les majeurs. Ils ne savaient plus à quel âge se situait la majorité, 25 ans le plus souvent mais peut varier d’une coutume à l’autre.
1 – La réforme décisive du droit révolutionnaire : décret du 31 janvier 1793 fixant la majorité à 21 ans
La majorité atteinte dans toute la France à 21 ans accomplis. Dans l’intervalle un décret de septembre 1792 relatif au mariage a limité à l’âge de 21 ans la limite de l’âge jusqu’auquel était requis le consentement des parents.
2 – Les restrictions du Code civil
Ces solutions de l’époque révolutionnaire ont été consacrées par le Code civil de 1804, mais il marque aussi un petit pas en arrière sur le point particulier du consentement au mariage, revirement déjà annoncé par un premier projet de code civil de Cambacérès et le deuxième en 1799 rédigé par Jacques Minot voulait absolument restituer à l’autorité paternelle le légitime empire qu’elle n’aurait jamais du perdre. Si le Code napoléon consacre la majorité émancipatrice à 21 ans pour le mariage le Code introduit une exception, le consentement des parents qui est requis jusqu’à 25 ans pour un garçon ou une fille au delà de cet âge on peut se dispenser du refus des parents mais encore faut-il solliciter leur avis, « les actes respectueux », abolis que très tardivement en 1933.
3 – Depuis la fin du XIXème siècle
Là encore jusqu’à la fin du XIXème pas de changement il faut attendre la IIIème République retour progressif à la conception révolutionnaire succession de petites mesures, loi de 1896 a supprimé l’obligation de renouveler les actes respectueux, loi de 1907 a limité l’obligation de consentement des parents à 21 et plus 25 et une loi de 1933 a supprimé l’obligation de solliciter les actes respectueux. C’est la réforme opérée par loi du 5 juillet 1974 qui modifie l’article 488 du Code civil en fixant à 18 ans l’âge de la majorité sans aucune restriction. 16 ans l’âge de la fin de la jouissance légale des biens du mineur par les parents.
TITRE IV – L’INCAPACITE D’EXERCICE ET LA PROTECTION DES INCAPABLES
La capacité de droit ou de jouissance c’est l’aptitude à être titulaire d’un droit, par exemple l’incapacité du fils de famille qui est alieni iuris, à ne pas confondre avec l’incapacité de fait ou d’exercice, c’est l’incapacité de faire un acte juridique tout seul, on a le droit de le faire à condition d’être assisté.
Ceux qui titulaires d’un droit ne peuvent pas l’exercer seul du fait de leur trop jeune âge (attention pas mineur c’est différend à Rome), l’incapacité en raison du sexe (les femmes), et de ceux qui ne sont pas en état de pourvoir exercer leur droit en raison du mal qui les frappe la prodigalité et la folie.
A Rome ou au Moyen-âge les incapacités ont pour but avant tout de protéger la famille, et en particulier les héritiers présomptifs. A l’époque féodale, de protéger le seigneur. L’évolution s’est faite dans le sens de l’individualisme, d’une protection individualisée. Le régime juridique a visé à protéger l’incapable avant tout.
CHAPITRE I – L’INCAPACITE DU FAIT DE L’AGE
Il ne faut pas dire minorité qui a un sens précis à Rome, le droit considère d’abord les impubères ou pupilles, puis une deuxième catégorie d’incapables en raison de l’âge, les enfants de moins de 25 ans, ceux qui se situent entre l’âge de la puberté (12 et 14 ans) et 25 ans = les mineurs de 25 ans. Les droits coutumiers ont introduit des institutions originales qui vont peu à peu laisser place aux institutions romaines en raison de la renaissance du droit romain dans la pratique juridique et judiciaire, en les modifiant.
Section 1 – La protection du sous-âgé en droit romain
Il s’agit du sui iuris, le sous-âgé qui n’a plus de pater mais a besoin de l’assistance de quelqu’un en raison de son âge.
Sous-section 1 – Les impubères ou pupilles
De la naissance à 12 ou 14 ans, (les mineurs à Rome se sont les enfants qui se situent entre 12/14 ans et 25 ans, c’est plus large), ici on parle d’impubères ou de pupilles.
Remariages fréquents à Rome, disparition de pères en raison des guerres ou maladies.
En quoi consiste l’impuberté et quelles sont les tranches d’âge des impubères, différents régimes ?
Protection de la tutelle, qui peut l’exercer, ses conditions d’exercice, la responsabilité du tuteur si nécessaire par l’impubère ?
Orphelins de père sui iuris par hypothèse parce que si son père était vivant même à 60 ans il serait incapable.
- 1 – L’étendue de l’incapacité de l’impubère
Il a des droits mais jeune âge donc besoin de quelqu’un il ne peut agir seul compte tenu de son trop jeune âge, il agit avec le concours d’un tuteur (en droit français l’incapacité d’exercice joue jusqu’à 16 ans). En droit romain la fin de l’impuberté est fixée à 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons.
Les romains distinguent trois périodes d’âge de la naissance à la puberté.
A – L’incapacité totale de l’infans
In = négatif et fari = parler, ce lui qui ne peut pas parler, incapable de prononcer des paroles audibles correctes pour prononcer les paroles sacramentelles, formalistes dans les actes juridiques.
L’infantia dure jusqu’à 7 ans, on cesse après d’être totalement incapable. Aujourd’hui on dit l’âge de raison.
B – La capacité limitée de l’infatiae proximus et du pubertati proximus
Infatiae proximus : encore proche de l’infantia, sa capacité contractuelle est la même que la capacité, sur le plan contractuel de l’enfant qui est lui tout proche de la puberté (entre 7 et 10 ans). Ce qui différencie le deuxième stade du troisième c’est sur le plan délictuel, le deuxième stade, il est reconnu incapable pour les délits qu’il peut avoir commis.
Pubertati proximus : tout proche de la puberté qui approche des 12 ans pour les filles et des 14 ans pour les garçons, pas d’âge exact fixé pour le passage du deuxième au troisième stade, c’est une question de discernement, de comprendre ce que l’on fait. Il s’oblige lui pour les délits qu’il peut commettre. Mais pour les obligations contractuelles dans les deux derniers stades il s’engage contractuellement.
Comme pour les enfants vis-à-vis du père, l’enfant peut rendre sa condition meilleure, l’enfant ne peut pas la rendre plus mauvaise qu’elle n’est au départ, dans un sens purement juridique et non économique, peu importe que au total l’opération procure un appauvrissement ou un enrichissement. L’impubère des deux dernières catégories peut devenir propriétaire ou créancier à la suite d’un acte, il peut cesser d’être débiteur mais il ne peut par un acte juridique consentir à perdre la propriété d’un bien, une créance il ne peut contracter une dette, même si économiquement au bout du compte sa situation d’endettement n’est pas si mauvaise. L’impubère ne peut faire une donation mais il peut en recevoir. Si un impubère vend un bien il peut valablement en acquérir le prix, mais il n’est pas obligé de livrer la chose. En sens contraire, s’il achète un bien, il peut exiger la livraison de ce bien sans être obligé de payer le prix du bien qu’il acquiert. S’il contracte un emprunt il peut acquérir l’argent prêté mais il n’est pas tenu de le rembourser. Si un débiteur lui paie une dette, il conserve sa créance qui n’est pas éteinte par le paiement de la dette, il peut réclamer de nouveau le paiement de la dette une deuxième fois. Les actes qu’il a passés d’un côté sont valables d’un côté mais nulles de l’autre. Autrement dit personne ne traite avec un impubère s’il agit seul. Règles du droit civil romain, c’est le droit qui découle de la loi des 12 tables de 450 et quelques lois postérieures, dans le droit privé il y a aussi le droit prétorien qui va remédier à ces situations absurdes, boiteuses. Le préteur oblige à choisir entre la validité et la nullité du contrat, si le mineur opte pour sa validité il devra lui aussi l’exécuter. S’il opte pour la nullité il devra renoncer à se prévaloir du contrat, on aboutit à une sorte de nullité relative, d’intérêt privé qui ne peut être invoquée que par la personne protégée. Justinien ne supprime pas ce régime mis au point par le préteur. Il a souvent regroupé sous un même régime des catégories différentes de personnes. Il a appliqué aux mineurs le régime d’une restitution en entier pour lésion, mesure qui avait été énoncée au bénéfice des mineurs de 25 ans, il décide de l’appliquer également aux impubères. Fait partie d’une série de mesure qui ont tardivement rapproché les impubères et les mineurs de 25 ans. La protection des impubères consiste à leur confié un tuteur.
- 2 – Le régime de la tutelle
3 catégories selon qu’elle est prévue ou non par un particulier.
A – Les modes de désignation du tuteur
1 – La tutelle testamentaire
En droit romain on distingue les successions avec (le principe contrairement à aujourd’hui) ou sans testament. Le decujus (celui de la succession duquel il s’agit) désigne par le testament le tuteur de son enfant. Aujourd’hui le survivant peut désigner un tuteur, alors que seul le père le peut à Rome. A défaut de testament, s’ouvre alors la tutelle légitime, lex = loi, celle qui est conforme à la loi, la tutelle organisée par la loi.
2 – La tutelle légitime
La loi des 12 tables qui remonte à l’époque archaïque, qui date de – 450, milieu du Vème siècle avant notre ère, confie la tutelle au parent agnat de la ligne paternelle le plus proche, l’oncle ou le frère ainé du pupille. A défaut la tutelle ira à l’ensemble des gentiles, les membres du clan, problème groupe très important. Dans l’un et l’autre cas le tuteur est considéré comme l’héritier présomptif de l’impubère de ce fait en gérant ses biens c’est son droit éventuel de succession qu’il protège. De plus en plus le droit s’est préoccupé de protéger l’impubère et de limiter les pouvoirs du tuteur sur les biens du pupille.
On sait très peu de chose de la tutelle exercée par la gens, difficile à mettre en œuvre donc disparaît à la fin de l’époque classique (fin de la République, II/IIIème siècle).
Idée de protection de plus en plus assurée à l’époque postclassique on évite de prendre comme tuteur certaines personnes que la loi aurait normalement pu désigner.
3 – La tutelle dative ou honoraire ou « atilienne » (lex Atilia de 186 av. J.-C.)
Tutelle honoraire, le tuteur est désigné par un magistrat, à Rome la magistrature s’appelle un honneur. Ou encore tutelle atilenne, Atilius a proposé par plébiscite au début du IIème siècle avant notre ère que le tuteur puisse être désigné par un magistrat, le préteur.
Plus tard sous le règne de l’Empereur Claude dans les années 40/50 la compétence de nommer un tuteur fut élargie aux magistrats municipaux. Encore un peu plus tard sous le règne de Marc Aurèle la deuxième moitié du IIème de notre ère par un sénatus consulte fut créé un magistrat spécial un préteur tutélaire et en Province les gouverneurs avec les magistrats municipaux sont chargés de nommer les tuteurs.
Jusqu’en 390, fin du Bas Empire, les femmes ne pouvaient jamais être nommées tuteur, c’est considéré comme une charge virile. La mère ne pouvait même pas être tutrice de ses propres enfants à l’époque ancienne et même au début de l’époque classique puisqu’elle-même est mise sous tutelle. A partir de 390 elle peut être tutrice à condition qu’elle fasse la promesse de ne pas se remarier. Pas d’équivalent du conseil de famille d’aujourd’hui, l’organe suprême de la tutelle c’est le magistrat. En principe c’est une charge gratuite il n’y a pas de rémunération du tuteur.
B – L’extinction de la tutelle
La tutelle des impubères est par définition temporaire, elle s’éteint au moment de la puberté ou nubilité (12 et 14 ans). Elle peut s’éteindre auparavant à la suite du décès du tuteur en raison de la destitution du tuteur qui peut avoir mal géré commis des fraudes et voir sa tutelle confiée à un autre, ou par la capitis diminutio, maxima, totale s’il perd sa liberté, sa citoyenneté, ou media tout en restant libre le tuteur perd le droit de cité, par exemple condamné au bannissement de la Cité. Il convient dans tous ces cas de désigner un nouveau tuteur et il convient de procéder à la reddition des comptes de la tutelle qui s’achève. Evidement la mort prématurée ou la capitis diminutio du pupille entraîne aussi l’extinction de la tutelle.
C – L’administration de la tutelle
Choix du tuteur en deux procédés il peut autoriser l’impubère à agir ou il peut se substituer à l’impubère pour agir ès qualités.
1 – L’auctoritas tutoris
Autorisation donnée par le tuteur qui valide par là-même, ratifie l’acte. Ce n’est pas une simple autorisation, le tuteur est présent au moment où l’acte est conclu, il participe en même temps à la conclusion de l’acte. L’acte accompli par le pupille peut être valable mais là il a un supplément de validité en raison de l’autorisation du tuteur.
2 – La negatiorum gestio, gestion d’affaires : oratio Severi de 195 sur les immeubles rustiques et suburbains, étendue par Constantin en 335 aux immeubles urbains et aux meubles précieux
La gestion d’affaires. L’acte est fait par le tuteur au nom de son pupille. Les pouvoirs du tuteur étaient à l’origine illimités d’autant plus que le tuteur agit dans son propre intérêt pour sauvegarder ses droits de succession éventuels. Les droits classique et tardif vont se soucier de protéger les pouvoirs du pupille, diverses mesures pour restreindre les pouvoirs tutélaires.
D’abord fin du IIème siècle de notre ère un oratio Severi a été adoptée par le Sénat, c’est un discours, l’empereur pouvait prendre des constitutions impériales ou un édit. L’empereur allait faire un discours de proposition au sénat, un oratio, et les sénateurs ne pouvaient faire que la ratifier, et devient un sénatus consulte que l’on qualifie d’oratio. Il est interdit au tuteur de vendre les biens ruraux, rustiques ou suburbains de la banlieue de Rome (souvent une terre). Insula = les bâtiments les immeubles au sens où on l’entend aujourd’hui. Il est interdit au tuteur de vendre des mancipia rustica c’est-à-dire les esclaves qui travaillent sur ses fonds ruraux. Pourquoi les immeubles urbains sont exclus de cette interdiction ? Moins de valeur en raison de la multiplicité des incendies, immeubles en bois, menacés en permanence.
Lorsque le tuteur avait besoin d’argent pour payer les dettes du pupille il ne pouvait décider seul, il pouvait payer à question de s’adresser à l’institution de haute tutelle, les préteurs tutélaires (avant le consul ou le préteur urbain). Au Bas Empire sous Constantin au IVème siècle il a étendu la mesure de l’oratio Severi aux immeubles urbains ainsi qu’aux meubles précieux. Au VIème siècle Justinien a de nouveau ajouté une restriction au pouvoir du tuteur en lui interdisant de recevoir le paiement des créances dues au pupille. Celui qui reçoit le paiement doit donner quittance et doit ensuite faire emploi de l’argent reçu et en rendre compte. Il précise il ne peut recevoir seul le paiement des créances il doit être autorisé par le juge qui averti contrôle les actes du tuteur, le fait qu’il reçoive bien l’argent et en fasse bon usage.
D – La responsabilité du tuteur et les garanties en faveur du pupille
1 – Mise en cause de la responsabilité du tuteur
- Les deux actions pénales de la loi des XII tables
- a) Accusation du tuteur suspect, crimen suspecti tutoris
C’est une poursuite criminelle contre le tuteur suspecté d’avoir commis des malversations. Elle appartient à la catégorie des actions populaires, elle pouvait être intentée par n’importe quel citoyen. Elle a pour but la destitution du tuteur suspect, il devra être changé si elle aboutit.
- b) Action pour arracher au tuteur ses comptes, actio rationibus distrahendis
En cas de détournement des biens elle peut aboutir à obliger le tuteur à restituer le double des sommes qu’il a détournées, en outre le tuteur est frappé d’infamie.
Ces deux actions ont pour but de comporter des sanctions particulièrement énergique mais ces actions étant pénales elles ne pouvaient par définition être intentées que contre des agissements malhonnêtes intentionnels du tuteur, la simple négligence ou en cas de simple imprudence fautive du tuteur, il ne pouvait pas être poursuivi, le régime était incomplet, d’où des solutions nouvelles.
- Les trois actions du droit classique
Elles apparaissent au cours de la République.
- a) En faveur du pupille : action directe et, à partir du Haut Empire, action utile
L’action est intentée directement par le pupille contre son tuteur ou ancien tuteur, elle a pour but de mettre en jeu sa responsabilité pécuniaire (les actions pénales subsistent). Si elle aboutit, elle sera marquée quand même d’un aspect pénal, le tuteur sera frappé d’infamie. Le droit romain considère que le tuteur aurait du gérer les biens du tuteur en bon père de famille (un bonus vir). Le tuteur remplace le père de famille qui n’est plus là. Les auteurs du Moyen Age créeront à partir de cette notion la faute légère appréciée in abstracto par référence au critère du bon père de famille un modèle, un idéal abstrait. Sous justinien au VIème siècle de notre ère, il va apporter une petite atténuation en tenant compte du fait que cette tutelle est gratuite, tout ce qu’il demande au tuteur c’est de gérer les affaires du pupille aussi bien qu’il doit gérer les siennes propres. C’est ce qui a donné lieu selon les commentateurs du Moyen Age qui enseignait le droit romain, à la faute légère appréciée in concreto, d’après le comportement personnel du tuteur.
Le droit romain a aussi créé une action de tutelle à titre utile. C’est l’action imaginée par le préteur en vue d’étendre le champ d’application normal d’une action déjà existante, ici l’action de tutelle directe. Elle a été modelée sur l’action directe de tutelle apparue à partir du règne de l’empereur Claude première moitié du Ier siècle de notre ère (années 40/50) contre le tuteur inactif, contre les tuteurs nommés par une tutelle dative d’autant plus lorsqu’il aura été bien précisé au moment de l’investiture que ce serait à ses risques et périls s’il ne s’occupait pas avec soin de la tutelle de son pupille. Marc Aurèle deuxième moitié du IIème siècle action renforcée contre tout tuteur qui a eu connaissance de sa nomination comme tuteur et qui a laissé passé un certain délai sans s’occuper de la tutelle de son pupille et qui ne s’est pas excusé. Il sera poursuivi même s’il n’a pas commis de faute.
- b) Au profit du tuteur : action contraire de tutelle, pour le remboursement des impenses
Elle est intentée par le tuteur contre son pupille pour lui réclamer le remboursement des dépenses qu’il a faites dans l’intérêt du pupille. Elle n’est pas infamante.
Le droit romain ne s’est pas soucié simplement après coup mais aussi en amont de protéger le pupille, de lui donner des garanties.
2 – Garanties pour la protection du pupille
A partir de l’époque classique des précautions ont été prises dans deux sens.
- Garantie pour la consistance de son patrimoine : obligation d’inventaire
Prouver la consistance du patrimoine de l’impubère c’est pour cela qu’avant d’entrer en fonction, chaque fois que des biens viennent à accorder des biens au pupille le droit à imposer au tuteur de faire un inventaire
- Garantie contre l’insolvabilité du tuteur
- Depuis l’empereur Claude, promesse de conserver intact le patrimoine du pupille et aux IIème/ IIIème siècles, privilège du pupille sur les biens du tuteur : droit de préférence à l’égard des créanciers chirographaires
A l’époque de Claude le premier procédé : promesse donnée par le tuteur de conserver sauf les biens du pupille, engagement que le patrimoine du pupille sera conservé sain et sauf. L’intérêt est que cette promesse est garantie par des cautions tenues de payer si le tuteur ne le fait pas.
Droit de privilège, préférence sur les créanciers chirographaires, = écrire avec la main, document qui précise qu’ils sont créanciers, ils sont des créanciers ordinaires qui ne bénéficiaient pas de sûretés mais qui n’ont qu’un droit de gage général sur les biens du débiteur, payés après les créanciers privilégiés qui ont une sûreté. Tout de même préférés les créanciers hypothécaires au pupille.
- Sous Justinien, hypothèque légale et générale sur tous les biens du tuteur
Remplacement du droit de préférence par une hypothèque générale et légale sur tous les biens du tuteur qui prend rang au jour de l’ouverture de la tutelle.
Sous-section 2 – Les mineurs de vingt-cinq ans
Les adolescents entre 12/14 ans et 25 ans, orphelins de père, capables en droit mais qui ne peuvent les exercer en raison de leur jeune âge.
En principe sui iuris capable mais il est protégé, puis renversement, il est incapable avec une possibilité d’émancipation au sens actuel du terme.
A l’époque archaïque, dès la puberté ils étaient à l’origine pleinement capables, pour les jeunes filles c’est différent elles ont été mises en tutelle perpétuelle puis il y a eu une évolution progressive. Risques de la société romaine qui devient commerçante, mesures intervenues pour les protéger. Vers le début du IIème siècle avant notre ère une loi Laetoria ou Plaetoria serait intervenue, homme de théâtre Plaute qui a vécu dans la deuxième moitié du IIIème siècle et au début du IIème siècle avant notre ère, il fait référence dans ses pièces à des jeunes gens empêchés d’emprunter de l’argent aux usuriers, notamment dans une pièce dans le but d’acheter des jeunes esclaves qu’ils veulent épouser, il est dit « à cause de la loi de 25 ans ».
- 1 – La loi Laetoria ou Plaetoria (vers le début du IIème siècle avant notre ère) : action pénale, populaire pour sanctionner la circumscriptio, la tromperie : peine pécuniaire et peine de d’infamie
Elle crée le délit qui est le fait de tromper un homme pubère, de circonvenir un mineur de 25 ans, c’est-à-dire un jeune homme pubère qui n’a pas encore atteint 25 ans. C’est une amende privée, encaissée non par l’état mais par le demandeur, mais en plus celui qui a escroqué le mineur est frappé d’infamie. C’est une action populaire, intentée par n’importe quel citoyen, bien des mineurs auraient hésité à avouer le fait qu’il s’était trompé, à déclarer publiquement leur naïveté. On retrouve le même cheminement que pour le pupille, renforcement de la protection grâce aux réformes du préteur.
- 2 – Les réformes prétoriennes
A – L’exception de la loi Laetoria, pour ne pas excéder l’acte juridique passé à la suite des manœuvres frauduleuses du créancier
Intervenu à la fin de la République il a complété cette mesure de la loi Laetoria, la nullité de l’acte dolosif. Lorsque le créancier veut faire exécuter le contrat alors même qu’il l’a extorqué au jeune homme, le jeune homme va lui opposer une exception de la loi Laetoria, un moyen de défense imaginé par le préteur, invoqué par le défendeur en vue d’écarter la demande de la partie défenderesse.
B – La restitution in integrum ob aetatem pour obtenir la rescision de l’acte juridique
Une remise en l’état antérieur par rapport au moment où a été conclu le contrat en raison de l’âge du mineur. Ce que le préteur vise ici, ce n’est pas une malhonnêteté intentionnelle commise par celui qui a fait affaire avec le mineur, mais c’est la lésion même involontaire qu’a pue subir le mineur. C’est une mesure exceptionnelle prise par le préteur en vertu de son imperium pour anéantir les effets d’un acte qui est par lui-même valable après avoir examiné les faits de l’espèce qui lui est soumise, il décide qu’il est justifié équitable de ne pas tenir compte de l’acte juridique attaqué, il remet les parties dans la situation primitive, antérieure à la conclusion de l’acte, comme si l’acte n’avait jamais eu lieu, on procède à une fiction juridique. C’est en raison de son âge de son inexpérience que le préteur considère que le mineur a subi une lésion en contractant seul. Cette restitution a par la suite été étendue sur le tard par justinien au pupille. La lésion est une notion économique qui correspond à un appauvrissement du mineur elle est évidemment bien supérieure à la formule purement juridique de l’appauvrissement, où on ne considère pas l’ensemble de l’opération, mais seulement ce qui avantage ou non le mineur. Ici le préteur considère l’opération dans son ensemble est considère s’il y a eu lésion ou non. C’est l’origine de la rescision pour lésion du droit civil aujourd’hui dont le régime est fort bien connu depuis le Moyen Age.
- 3 – La création impériale d’une curatelle
Retournement du principe.
A – Le principe de la capacité tempérée par la curatelle, simple faculté sous le Haut-Empire
Sous le Haut-Empire, ce n’est qu’une simple faculté, le principe c’est la capacité. Marc Aurèle à la fois empereur et intellectuel (souci de l’égalité entre individus, du plus faible) aurait décidé, un texte tardif le laisse entendre, que tous les adolescents auraient des curateurs, sans besoin d’invoquer des circonstances particulières. Mais plus probables une autre interprétation, jusqu’à la seconde moitié du IIème siècle de notre ère il n’existait pas de curatelle spéciale au profit des mineurs de 25 ans, simplement, il était possible de doter un mineur de 25 ans d’un curateur mais il fallait alors invoquer une raison, soit la faiblesse d’esprit, soit la prodigalité et la débauche. A partir de Marc Aurèle de la fin de la seconde moitié du IIème siècle de notre ère, la fin des Antonins, les mineurs n’ont pas tous une curatelle mais il suffit d’invoquer la situation de minorité dans laquelle il se trouve sans avoir à invoquer un prétexte quelconque pour que la curatelle soit accordée. La curatelle reste une simple faculté.
Qui peut demander l’assistance d’un curateur en invoquant la minorité ? Pas le mineur lui-même mais sa famille pour l’empêcher de dilapider son patrimoine, un ou des membres de la famille proche ou un tiers qui veut être en relation d’affaires avec le mineur, pour ne pas se voir opposer la lésion qui le protégera il se met à l’avance à l’abri contre une lésion. Des textes sous Dioclétien, début du Bas Empire, montrent que la curatelle pas encore une institution généralisée.
B – Le principe de l’incapacité du mineur : la curatelle obligatoire du Bas-Empire
Inversion de perspective, obligation pour le mineur d’être assisté par un curateur.
1 – Le principe
Incapacité du mineur de 25 ans avec assistance d’une curatelle généralisée. Evolution achevée sous Justinien qui va assimiler impubère et mineur de 25 ans, en parlant toujours de tuteur ou curateur. Curatelle générale permanente et obligatoire. Petite différence avec la tutelle, la curatelle est toujours dative, donnée par le juge. Les incapacités tendent à s’unifier sur la base de la lésion. La lésion, la restitution en entier à raison de l’âge est étendue au bénéficie des impubères. On étend au curateur du mineur de 25 ans les règles que le droit classique à imaginer pour protéger les impubères en limitant les pouvoirs du tuteur, et en étend au mineur les garanties qui protégeait les impubères. Mise en jeu de la responsabilité des curateurs sur la même base que celle des tuteurs.
2 – Les tempéraments au principe : la venia aetatis
Sauf à admettre une exception, possibilité de supprimer la minorité et donc l’incapacité. Littéralement la remise d’âge. La possibilité de faire cesser l’incapacité avant l’âge normal de 25 ans. Au départ émancipation conçue comme une peine puis de moins en moins. La venia aetatis correspond à l’émancipation au sens où nous l’entendons aujourd’hui. Premier texte qui en parle est un texte de Constantin au IVème siècle de notre ère. Conditions, il faut avoir au moins 18 ans pour les filles et 20 ans pour les garçons. Déposée par une requête à la Chancellerie de l’empereur qui répond par un rescrit impérial qui une fois obtenu, il faut se rendre devant un juge lui prouver que l’on a bien l’âge requis que l’on a indiqué, justifier de ses bonnes mœurs. Le juge prononcera définitivement en se prononçant sur les faits. Assimilation impuberté minorité pas tout à fait complète mais quasi assimilation dans le sens d’une simplification opérée par Justinien.
Section 2 – La protection du sous-âgé dans l’ancien droit français
Sous-section 1 – Tutelle et curatelle des pays de droit écrit
Le régime de la tutelle a été le régime de droit commun, on parle aussi bien de tutelle que de curatelle. La renaissance du droit romain a parmi de la calquer sur le modèle du droit romain avec les garanties qui limitent l’omnipotence du tuteur : obligation de dresser un inventaire, les cautions, l’hypothèque générale du pupille sur les biens du tuteur. Comme à Rome l’adolescent sorti à 14 ans reste dans l’impossibilité d’agir en justice, capacité d’ester en justice et de disposer de ses biens sans l’assistance de son tuteur ou curateur et la possibilité d’obtenir la restitution en entier, la remise en l’état antérieure à l’opération contestée qui a provoqué une lésion au détriment de l’adolescent. Modèle qui reprend les principales garanties et protection du pupille puis mineur de 25 ans, telles qu’elles existaient à Rome.
Sous-section 2 – La garde des pays de coutume et l’influence du droit romain
Les pays de coutume n’ont pas dans un premier temps repris tout de suite les règles romaines, à partir du XIIème et XIVème siècle que le droit romain a exercé une influence, ses règles utilisées et reprises d’une certaine manière.
Pendant l’époque franque des VIIIème/IXème siècles, la protection des mineurs (au sens large ceux qui ne sont pas adultes) étaient organisée de la manière suivante. Ils bénéficiaient d’une garde confiée à un parent très proche. Pendant l’époque féodale cette garde se généralise et perdure au-delà du Moyen Age plutôt pour la noblesse. Garde tutelle pour les classes bourgeoise et paysanne. La conception féodale subsiste pour la noblesse mais la bourgeoisie va utiliser la tutelle le règle romaine à partir du XIVème siècle. Les coutumes font apparaitre l’existence de 4 grands types de garde.
- 1 – La garde
A – Les quatre grands types de garde
1 – La garde seigneuriale
A l’époque féodale du IXème au XIIIème siècle, fief à un sous-âgé, c’est le seigneur qui le perçoit jusqu’à ce qu’il atteigne la majorité, le seigneur l’accueille, subvient à ses besoins. Mais peu à peu on s’est éloigné de cet usage la famille de l’orphelin voyait d’un mauvais œil que le suzerain reprenne le fief et accueille l’enfant et même les seigneurs étaient embarrassés d’avoir à s’occuper de l’orphelin. A partir du XIIème/XIIIème siècle ils ont exigé qu’un proche de l’orphelin rende ses services féodaux que lui ne peut pas rendre. La garde seigneuriale tombe peu à peu en déclin sauf la Normandie qui a gardé des traditions féodales jusqu’à la fin de l’Ancien régime.
2 – Le bail familial à fief
Surtout à Paris et dans les régions environnantes le fief est confié au plus proche parent du mineur, sous-âgé mais à condition que ce soit un parent du côté d’où lui vient ce fief (à cet orphelin). Le gardien est appelé baillistre qui est l’héritier présomptif du fief au cas où l’orphelin viendrait à disparaitre, lorsque l’orphelin reçoit un fief des deux côtés de sa famille il y a deux baillistres. Institution qui a vécu jusqu’au XVème siècle. Puis il s’est transformé en garde noble.
3 – La garde noble
A partir de la fin du Moyen Age, elle vise avant tout les familles aristocratiques. C’est la qualité de la personne qui fait que l’on parle de garde noble. C’est un privilège exceptionnel et personnel qui consiste pour le gardien à gérer les biens de l’orphelin. Elle est toujours confiée à un ascendant du mineur. Lorsqu’il est orphelin que d’un seul parent, c’est le premier qui assurera cette garde noble.
4 – La garde bourgeoise
Dans la grande bourgeoisie aussi une notion de garde, institution parallèle par rapport à la garde noble, c’est un privilège réservé aux bourgeois de Paris, privilège qui remontait à des lettres royaux qui remontaient à 1371 de Charles V. Il semble que ces lettres royaux aient confirmé une pratique antérieure. Les biens étaient confiés au survivant des père et mère lorsqu’il n’y a plus qu’un seul parent ou à un ascendant le plus proche lorsque les deux parents ont disparu.
B – Les règles communes aux quatre gardes
L’âge de la majorité.
Dans un certain nombre de tribus germaniques et chez les francs, la pleine capacité était fixée à 14 ans chez les francs à 20 chez les wisigoths. Au Moyen Age l’âge de la majorité varie selon âge et sexe. Un garçon noble n’est pleinement majeur qu’à 20 ans, l’âge de porter les armes. Pour les filles la minorité jusqu’à leur mariage, puis règle de l’âge de 15 ans se dégage. Chez les roturiers, la notion de garde emprunte au droit romain, 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons.
La gestion des biens et les pouvoirs du gardien ou baillistre.
En ce qui concerne la personne même du mineur, la garde est confiée à un très proche parent. « Ne doit mi garder l’agneau qui doit en avoir la peau ». Ce n’est pas la même personne qui s’occupe des biens et de la personne. On se méfie du collatéral.
En ce qui concerne les biens il y a une confusion de patrimoine le gardien doit garder les immeubles et les restituer dans l’état lorsqu’il atteint la majorité simplement il peut s’approprier tous les fruits produits par les biens. Il confondait avec ses biens propres les meubles de son pupille jusqu’à l’époque féodale. En contrepartie le gardien se doit de remplir les services du fief et d’entretenir et réparer les immeubles pour les restituer dans l’état où il les a reçus. A l’époque moderne, à partir du XVIème siècle, pour la garde noble et bourgeoise la jurisprudence des parlements a restreint ce régime et a obligé les gardiens à faire un inventaire des meubles de l’orphelin, et à les restituer à sa majorité, adage : « meuble ne tombe en garde ».
L’incapacité du sous-âgé, en quoi consiste-t-elle ?
Jusqu’au XIIIème siècle le sous-âgé est un peu dans la même situation qu’un enfant sous puissance paternelle, il est à peu près incapable, s’il passe des contrats le gardien n’aura pas à en répondre. Les actions en justice que l’on peut intenter contre lui sont suspendues. Dormition des actions jusqu’à la majorité du mineur.
Les délits commis par ce mineur, on a commencé par admettre qu’il ne répondait pas de ses délits, dès l’époque franque. Mais on note tout de même des capitulaires (des ordonnances royales) du début du Xème siècle qui ont permis de poursuivre ce mineur dans certains cas où il s’était emparé des biens d’autrui ou dans des cas où il recélait des biens volés par d’autres personnes.
A partir du XIIIème siècle, dans la dernière partie du Moyen Age, la tendance de rendre le mineur capable de s’engager par ces délits et c’est le gardien qui devait supporter la responsabilité pécuniaire de ces délits. Tendance d’éliminer le principe de la dormition des actions engagés contre l’orphelin, les mineurs pouvaient être attaqués et plaider par l’intermédiaire de leur tuteur ou d’un tuteur spécialement désigné pour le procès. La tutelle ressemble plus à une sorte d’exercice de la puissance paternelle, qu’à la tutelle au sens romain du terme.
La renaissance va ensuite se faire sentir dans la pratique judiciaire et notariale. Tutelle et curatelle romaines vont de plus en plus être reprises et surtout concerner les familles roturières.
- 2 – Tutelle et curatelle : influence romaine et spécificités médiévales
Dès le XIIème siècle dans les pays de droit écrit, XIIIème/XIVème siècles dans les pays de coutume que va réapparaitre la tutelle ou curatelle, surtout pour les biens roturiers. Les règles s’inspirent du droit romain mais ne coïncident pas toujours.
A – L’âge de la minorité
L’âge limite pouvait varier d’une coutume à l’autre, mais la tendance générale de 12 à 14 ans appliquée ici. A la différence du droit romain pas de distinction des trois périodes de l’enfance. L’enfant va être pourvu d’un tuteur ou curateur. A l’époque moderne la minorité va être repoussée jusqu’à 25 ans, âge limite de l’incapacité d’exercice du droit romain, mais avec un correctif, on a créé ce qui correspondait à la venia aetatis (qui correspond à notre définition de l’émancipation) obtenue en sollicitant des lettres de chancellerie délivrées au nom du roi. Elles émancipaient mais ne procuraient pas pour autant une capacité absolue, le mineur avait encore besoin de son curateur pour les actes les plus graves, les actions en justice ou les aliénations d’immeuble. La pratique judiciaire ou notariale a également admis une émancipation tacite résultant du mariage. Sous le règne de Louis XIV l’ordonnance sur le commerce de 1673 (qui a inspiré le Code de commerce de Napoléon) a réputé comme majeur les mineurs qui étaient commerçants.
B – La rescision pour lésion
Dans un souci de protection du mineur au sens juridique du terme, tendance à unifier et à mettre sur le même rang l’impubère et le mineur, de 0 à 25 ans. Beaumanoir avait tendance au XIIIème siècle à s’inspirer de la lésion romaine et à l’appliquer aussi bien au mineur qu’à l’impubère. Intérêt de laisser une certaine capacité au sous-âgé et de mettre comme limite de leur action la lésion qu’il pouvait subir. Les actes qui pouvaient être considérés comme créant une lésion au détriment du mineur sanctionnés par la rescision, délai de 10 ans à partir de la majorité pour la demander. Repris par article 1304 du Code civil, réduit à 5 ans depuis une loi de 1968. Ce délai de 10 ans a été posé par une ordonnance de Villers-Cotterêts. On sollicitait pour cela des lettres de la chancellerie.
C – L’organisation de la tutelle
Loisel écrit « toutes tutelles sont datives », le tuteur est nommé par une instance publique, nomination en deux phases, on réunissait une assemblée de parents qui désignaient le tuteur puis le juge saisi investissait ce tuteur de ses pouvoirs. Pas de tutelle testamentaire mais dans la pratique elle a été utilisée, simplement quand il y avait tutelle testamentaire elle devait être confirmée par l’assemblée de parents et le juge. Aussi des tutelles légitimes, elle va au plus proche parent mais à condition qu’il soit confirmé dans ses fonctions par l’assemblée de parents et par le juge. Organes de haute tutelle à côté du tuteur : le juge, il faut qu’il confirme et l’assemblée des parents qui devient le conseil de famille au XIXème chargé d’élire le tuteur de le destituer en cas de malversation ou de le confirmer s’il est légitime ou qu’il est désigné par testament.
D – La gestion de la tutelle
Les pouvoirs du tuteur, les garanties de restitution ont été soumises aux règles romaines qui ont été rétablies, obligation de faire un inventaire au début de la tutelle, de rendre compte à la fin de sa tutelle par le tuteur, et sous l’Ancien Régime on a repris l’ensemble des garanties protectrices des intérêts du mineur et le principe de la gratuité, que remboursement des dépenses qu’il a pu faire pour gérer les biens du mineur.
L’esprit qui a prévalu, le souci de protection du mineur va se retrouver dans la période suivante.
Section 3 – La protection du mineur de la Révolution à nos jours
Eliminer les institutions périmées.
A – L’apport révolutionnaire
La révolution a supprimé les gardes tombées en désuétude, sauf exception la garde seigneuriale qui a subsisté en Normandie abolie par un décret de mars 1790. La garde noble et bourgeoise abolies avec l’abolition des privilèges. Le Code civil la reprendra sous le nom de jouissance légale en l’étendant à toutes les classes de la société. L’âge de la majorité de 25 à 21 ans de façon uniforme. Décret de la convention de janvier 1793.
B – Le Code civil de 1804
Il a rétabli officiellement les tutelles légitimes et testamentaires qui n’existaient plus en théorie même si utilisées en pratique. Les assemblées de parents remplacées sous la Révolution par un tribunal domestique supprimé sous le directoire et le Code civil a repris l’idée de l’assemblée de parents mais sous le nom de conseil de famille.
C – Les réformes du XXème siècle
Trois choses.
La décadence du conseil de famille
Résulte du déclin progressif de la parenté collatérale, rôle de plus en plus assumé par le conjoint survivant ou l’autorité publique. Conseil de famille sujet à critiques, pas la compétence requise pour prendre les bonnes décisions. En 1939 un décret-loi (article 389 du Code civil) a institué un conseil des tutelles, un par canton, composé de personnes pouvant n’avoir aucun lien de parenté avec les enfants. Les membres de ce conseil étaient nommés par le TGI.
La loi du 14 décembre 1964, a maintenu le conseil de famille mais lui a fait jouer un rôle assez réduit, composé de parents amis voisins ou toutes personnes susceptibles de s’intéresser à l’enfant. Rôle réduit quand le conjoint survivant quand il y en a qui joue le rôle d’administrateur légal sous contrôle du juge qui remplace de plus en plus le conseil de famille et contrôle l’action du parent survivant quand il y en a un.
Le rôle de plus en plus croissant de l’Etat
Lorsqu’il s’agit d’orphelin qui a perdu ses parents, les pupilles, cette loi de 1964 a donné à l’autorité publique un rôle plus accru complétée par une loi de 1984 et un décret de 1985. Les pupilles de l’Etat, ceux dont la filiation ne peut être établie, qui ont été abandonnés par leur parents ou ont perdu leur deux parents ou quand les parents ont été déchus de l’autorité parentale. Un tuteur désigné par département, l’administration prend en charge les soins du pupille. A été institué un conseil de famille des pupilles de l’Etat en 1985.
La fixation de la majorité à 18 ans
A 16 ans le droit de jouissance des parents cesse, sorte de majorité anticipée.
CHAPITRE II – L’INCAPACITE DU FAIT DU SEXE
Sans tenir compte de l’âge ou du fait qu’elle soit mariée ou non.
Section 1 – En droit romain
Les femmes mariées placées à Rome sous la manus de leur mari. Il s’agit de l’incapacité du fait même d’être femme, sui iuris, elles n’ont plus de pater familias, elles ne sont pas mariées com manu, célibataires ou veuves, qui ont atteint l’âge de la nubilité, 12 ans.
Les femmes placées pendant longtemps en droit romain en tutelle perpétuelle, indépendante de l’âge que pouvait avoir la femme.
Sous-section 1 – A l’époque républicaine
- 1 – Le fondement de l’incapacité d’exercice de la femme
L’état des mœurs, les mentalités, la faiblesse physique, elles ne participent pas à la vie politique. Le régime : il y a des actes qui leur sont interdits : aliéner leurs biens par mancipation, elles ne peuvent pas faire de testament, contracter une obligation, intenter une action en justice selon la procédure des actions de la loi qui sévissait à l’époque archaïque. Elles ne peuvent contracter un mariage com manu, c’est celui qui veut l’épouser qui décide. Elles sont au fond frappées de l’incapacité de disposer de leur patrimoine.
Le tuteur était désigné soit par testament soit par la loi (tutelle légitime), le pater familias pouvait donner un tuteur pour sa fille nubile ou pour sa veuve. Si pas de testament, tutelle légitime, les agnats, les plus proches parents du côté paternel, ou à défaut les gentiles. Les femmes affranchies avaient nécessairement comme tuteur leur patron, leur ancien maître.
Il n’y a pas ici de gestion d’affaires, le tuteur donne son auctoritas à la femme pour faire tel ou tel acte qui valait ratification de l’acte qui pouvait alors acquérir pleine efficacité.
Sous-section 2 – A l’époque impériale
Femmes libérées par le déclin de la tutelle, institution périmée qui ne correspond plus à l’état des mœurs.
- 1 – Le fondement du déclin de l’incapacité d’exercice de la femme
Cicéron parle de l’infirmitas concilii, manque de fermeté dans la décision des femmes. D’autres parlent de la légèreté d’esprit. L’imbecilitas sexus.
Ne correspond plus à l’état de la société romaine mais pas supprimée mais contournée par les praticiens et finalement largement amendée par la législation.
- 2 – Le régime de l’incapacité
Liste des actes interdits à une femme est maintenue on constate des évolutions. Les praticiens ont dès la fin de la République (époque des Gracques) la pratique imagine l’optio tutoris, faculté de choisir un tuteur pour la femme mariée com manu, qui peut demander à son mari de faire figurer telle personne pour être son tuteur dans son testament. La veuve devenue sui iuris pourra choisir comme elle le veut son tuteur ou changer de tuteur aussi souvent qu’il lui plaira. En réalité elle peut faire ce qu’elle veut et le tuteur suivra ses décisions.
L’empereur Auguste fut le premier à dispenser les femmes d’être mises en tutelle quand elles avaient un certain nombre d’enfants, le ius liberorum. Toutes les femmes ingénues (de naissance libre) qui ont eu trois enfants, les affranchies qui ont eu 4 enfants sont libérées de la tutelle perpétuelle des femmes. Elles peuvent faire librement leur testament, elles peuvent recueillir une succession et des legs et à la suite d’une réforme d’Adrien elles peuvent venir à la succession ab intestat de leurs enfants (sans testament).
Loi que Claude a fait voter par les comices, lex claudia, toutes les femmes ingénues sont dispensées de toute tutelle légitime subsiste la tutelle testamentaire dans le cas où le père de famille la juge nécessaire. Dernière allusion à la tutelle des femmes se trouvent dans une constitution tardive de Dioclétien fin du IVème siècle de notre ère.
Le sénatus consulte velléien interdisait à toutes les femmes d’intercéder pour autrui par exemple en se portant caution, en empruntant pour autrui, en hypothéquant leur bien pour garantir autrui. Cela subsiste mais le reste tombe en quenouilles.
Section 2 – Depuis l’ancien droit français
Dans les tribus germaniques du haut Moyen Age les femmes complètement incapables. Chez les francs très faible voire inexistante.
Au Moyen Age le droit de l’Eglise proclame l’égalité de principe mais les théologiens du Moyen Age ont régulièrement affirmé l’infériorité de la femme : pêché originel, homme créé à l’image de Dieu… Saint Paul : le mari est le père de famille. Femme sous la protection du mari, protection de la veuve et de l’orphelin. (Page 65 du recueil)
La tradition chrétienne prône plutôt l’infériorité.
Dans l’ancien droit français laïc, il ne reste à peu près rien tenant à l’incapacité tenant au sexe, seul le mariage peut entraîner l’incapacité. La femme en tant que telle il ne reste à peu près rien de son incapacité. Seul le sénatus consulte velléien est invoqué dans certaines régions de France mais peu appliqué ou surtout aux femmes mariées.
Capacité de la femme sur la même ligne jusqu’à l’époque contemporaine, en plus aujourd’hui une promotion de l’égalité en fait.