Cours d’histoire du droit des personnes

Histoire du droit des personnes

 Les caractères de la personnalité seront étudiés dans ce cours de l’histoire des personnes. Nous aborderons les thématiques de la liberté, l’égalité, la propriété… durant l’antiquité, le Moyen-age…

 

I. La liberté

Attribut caractéristique des hommes ; dans certaines civilisations tous les hommes ne jouissent pas de la liberté. Un homme libre est défini comme étant capable d’exercer et de jouir des droits politiques et civiques. Privation de liberté fréquente, elle peut être totale (esclavage) ou partielle, à vie ou temporaire. Elle résulte, au moins à l’origine, d’un événement particulier, une sanction collective ou individuelle. Cette perte de liberté créé une situation de dépendance envers un maître, une collectivité publique ou un Etat. Cette situation cesse par un affranchissement collectif ou individuel.

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A. Dans l’Antiquité

1) les civilisations les plus anciennes

— en Egypte, on a peu de sources documentaires mais on sait qu’il y avait des personnes attachées à certains domaines. Peu d’esclavage en Egypte même si l’esclavage est prouvé. On est esclave en Egypte par la prise de guerre, parce qu’on est l’objet d’un rapt ou parce qu’on est réduit en servitude pour dettes. De temps en temps, l’autorité publique intervient pour réduire les risques de servitude pour les débiteurs qui n’ont pas payé leurs dettes. Bocchoris est intervenu vers 715 avant JC pour dire que l’on ne pourra pas être réduit en esclavage pour dette mais cette disposition n’a pas fait long feu.
— dans la société assyro babylonienne, il y a plus d’hommes libres que d’esclaves ; on devient esclave par la capture au combat ou par l’achat. La vente d’esclaves est évoquée dans le code d’Hammourabi. On peut également être esclave par sanction pénale ou faillite personnelle (incapacité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible). L’hérédité peut en principe créer la situation de servitude. Le maître peut mettre son esclave en gages, le vendre, disposer de ses enfants. Le maître peut obtenir une réparation quand un tiers porte atteinte à son esclave. L’esclave est presque dans un situation d’objet de droit plus que de sujet. Cependant il a une capacité juridique limitée ; il peut faire une vente ou un dépôt mais on exige la présence de témoin et la rédaction d’un acte écrit. L’esclave ne peut pas emprunter. Il peut se marier, même en dehors de sa condition juridique. A Ourouk, un chirurgien marquait les esclaves (-3000 ans). Dans le code d’Hammourabi, une marque temporaire est formé sur l’esclave. L’esclavage peut cesser par l’arrivée du terme ou de l’affranchissement (octroi de la liberté par le maître).
— chez les hittites, l’esclave est considéré comme une personne, il est protégé par la loi. L’esclave a une famille, un patrimoine. En matière pénale, il arrive que l’esclave soit sanctionné par une peine plus rude que pour un homme libre.

2) la Grèce

Les historiens se disputent le nombre moyen d’esclaves en Grèce. En fait, leur nombre varie en fonction des périodes ; le développement des machines accroît les possibilités d’employer des esclaves. En période difficile économiquement, le statut des esclaves s’aggrave et il y a des risques de révolution servile. La condition des esclaves change d’une cité à l’autre. Dans certaines cités, on trouve des esclaves d’Etat qui cultivent des terres, ce sont les hilotes, qui devaient payer une redevance recognitive. En général, les esclaves appartiennent à des particuliers ou à des temples. Ce sont des personnes qui peuvent se marier et fonder une famille avec l’autorisation du maître. L’esclave est protégé, le maître ne peut pas lui faire subir de mauvais traitements. L’esclave dispose d’un patrimoine, il peut tirer profit de son travail. Il peut acheter sa liberté. L’affranchissement est pratiqué. Au 3ème siècle, 6 000 hilotes ont acheté collectivement leur liberté. L’Etat peut encourager l’affranchissement car cela peut augmenter le nombre de citoyen, donc de personnes susceptibles de se battre pour défendre la cité. Dans certains cas, on consacrait l’esclave à une Dieu. L’affranchissement d’était pas toujours un bien en soi, il donne la liberté mais pas la pleine capacité juridique. L’esclave affranchit est considéré comme un étranger, pas d’investissement immobilier, pas de participation à la vie publique, pas forcément de travail non plus. De façon générale, en Grèce, un certain nombre de philosophes ont été hostiles à l’esclavage. Chez les sophistes, Alsidamante a déclaré que Dieu ayant créé tous les hommes libres, la nature ne fait pas d’esclaves. Il existe deux types d’étrangers, étranger à la cité ou étranger au monde grec. Certains auteurs sont des tenants du cosmopolitisme, tous les hommes sont citoyens du monde donc ne doivent pas être esclaves.

3) Rome

L’esclavage est attesté quasiment dès les origines de Rome. Il y aura au fur et à mesure de plus en plus d’esclaves. Afflux d’esclaves tel que cela devenait un danger pour l’Etat romain, risques sociaux de révolte servile. Les brusques augmentations de citoyens par les affranchissements massif déstabilisaient Rome. Les conquêtes romaines vont fournir une abondante main d’œuvre servile. Egalement la piraterie dans le port de Délos. L’hérédité est une source importante d’esclaves. L’enfant suit la condition de la mère à la naissance. Un citoyen peut être réduit en esclavage, mais cela est interdit au sein de la ville puisque celle-ci est sous la protection des Dieux. Le débiteur défaillant peut être susceptible de devenir esclave au moyen de la contrainte par corps : tout d’abord le créditeur enferme le débiteur dans sa prison personnelle, puis il le traîne sur la place publique pour que sa famille ait honte et paye. Si personne ne payait, on pouvait, au bout d’un certain délai, vendre en tant qu’esclave le débiteur défaillant. Les soldats déserteurs pouvaient être vendu comme esclaves en punition. Si une femme libre couchait avec un esclave sans l’autorisation du maître de l’esclave, elle pouvait être réduite en esclavage. Un citoyen peut renoncer de lui-même à sa liberté, il peut lui préférer la sécurité.
Différence de statut entre les esclaves dans les maisons de ville et ceux dans les grands domaines, les esclaves y ont un statut moins faciles. Dans les villes, l’esclave fait partie de la famille. Dans les familles modestes, il arrive que les maîtres louent les services de leur esclave (écrivain public, danseur, jongleur…). L’esclave est considéré en droit romain comme une chose de valeur. L’esclave est un objet de droit cependant il y a des ambiguïtés autour de sa qualification. Gaius dans son œuvre va évoquer les esclaves au chapitre des personnes et non à celui des choses. Ulpien va faire une distinction entre droit civil et droit naturel ; selon le droit naturel, les esclaves sont des hommes et tous les hommes sont égaux mais cela ne concerne pas le droit civil. Dans l’ordre patrimonial, peu à peu, on va admettre que le maître puisse confier à son esclave l’administration de certains biens sous la forme d’un pécule. L’esclave pourra disposer pour lui d’une partie du pécule afin d’acheter sa liberté. Les stoïciens vont prendre des mesures pour protéger la personne de l’esclave. Limitation du droit de vie et de mort du maître sur l’esclave en contrôlant les motifs de cette sanction. Si un maître abandonne un esclave âgé ou malade, il perd son droit de propriété sur lui. Peu à peu on humanise la condition des esclaves. On a pas le droit de maltraiter un esclave, c’est un abus de droit. On reconnaît aux esclaves le droit de se plaindre de leur propre maître auprès des autorités. Si un esclave commet une faute, la présomption pèse sur tous les esclaves de la maison.
L’affranchissement peut être dû à la volonté du maître ou plus rarement à celle des pouvoirs publics. Il faut qu’il soit fait avec des modes particuliers :
– l’affranchissement testamentaire, quand le pater familias accorde la liberté à un ou plusieurs esclaves dans son testament ;
– l’affranchissement vindicta, le maître va, de façon solennelle, déposer sa renonciation devant un magistrat. Le maître participe à un rituel dans lequel il touche son esclave avec un bâton, il lui transmet ainsi la liberté. Puis le licteur (adjoint du magistrat) touche l’esclave à son tour et lui transmet ainsi la citoyenneté ; on faisait ensuite tourner l’esclave sur lui-même, symbole du retour sur soi, de la naissance d’un homme neuf ;
– l’affranchissement par le cens ; à l’occasion de la révision des listes du cens, le maître peut faire inscrire son esclave sur cette liste, il acquiert ainsi la citoyenneté.
Il existe aussi des formes d’affranchissement non formaliste : simple déclaration, rédaction d’une lettre… On peut aussi inviter à sa table un esclave ce qui signifie le traiter d’égal à égal. Ce système donne la liberté mais pas la qualité de citoyen. On va assimiler ces affranchis à des latins juniens.
Les esclaves affranchis de manière formelle acquièrent la citoyenneté ; il demeure un lien avec l’ancien maître qui devient le patron. Il existe donc une situation de dépendance qui se marque par des services que doit l’affranchi à son ancien maître et à lui seul. Si le patron tombe dans la misère, l’affranchi lui doit une pension alimentaire et ce devoir incombe également au patron dans la situation inverse. Le patron peut avoir un droit sur le patrimoine de l’affranchi si celui-ci n’a ni héritiers ni enfants.
Dans quelques cas exceptionnels, il peut y avoir révocation de l’affranchissement. Une révocation ne peut être faite que si elle intervient sous le contrôle de l’autorité publique.
On rend plus difficile la possibilité pour le maître d’affranchir un esclave. On ne veut pas que par la multiplication des affranchissements, le nombre d’affranchis soit supérieur au nombre de citoyen de souche. On veut de plus protéger le patrimoine des familles. Tout affranchissement est une perte de substance économique. Une loi va d’abord limiter le nombre d’esclaves que l’on peut affranchir (en 2 avant Jésus Christ, pas plus de cent esclaves). En 4 après Jésus Christ, la loi dispose qu’on ne peut affranchir un esclave de moins de trente ans sans raison sérieuse. Un conseil doit se prononcer. On doit utiliser la formule de l’affranchissement vindicta. Si l’affranchissement n’est pas régulier, l’affranchi ne sera pas citoyen. Il faut avoir au moins vingt ans pour affranchir un esclave sinon il y a nullité de l’acte d’affranchissement.
A Rome, les contraintes professionnelles retirent une part de liberté à des hommes originellement libres. A l’origine, il y avait des groupements professionnels qui avaient un caractère facultatif, les collegia. Ils vont devenir obligatoires lors des périodes de grandes difficultés économiques. L’empereur va intervenir pour imposer l’obligation d’entrer dans les métiers et d’y rester. On va attacher aux métiers des gens dont la profession est vitale. Dans le code théodosien, trois activités sont mentionnées comme obligatoires, transporteurs par eau, boulanger, boucher. Les naviculaires transportent les céréales jusqu’à Rome, les boulanger les transforment en nourriture, les bouchers pont une grande importance depuis la plus haute antiquité. On ne peut pas démissionner, prendre sa retraite, quitter le métier par des voies subreptices. Il y avait la possibilité d’entrer dans l’armée ou dans les ordres, les textes vont venir rappeler que cela ne doit pas être accepté, que c’est frauduleux. On pouvait également fuir mais si l’on vous rattrapait, on vous ramenait manu militari et de plus tous ceux qui vous avaient hébergé seront considérés comme complices. Les récidivistes sont marqués au fer rouge et s’ils recommencent à nouveau, ils sont condamnés à mort. « Votre patrimoine répond de votre obligation », c’est à dire que le patrimoine de celui qui a fui lui est confisqué. Hérédité de la fonction. Il existe aussi des contraintes professionnelles du même genre dans les ateliers impériaux et dans les ateliers de monnayage.

B. Le Moyen Age

1) l’époque franque


Sources documentaires peu nombreuses, beaucoup d’encre, beaucoup de sottises.
Dans les grands domaines fonciers, les exploitants vont de plus en plus être attachés à la terre ; « ils tiennent la terre, elle les tient ». L’esclavage se maintient, il est pratiqué par les germains (pour dettes, prisonniers de guerre, hérédité, esclavage volontaire pour échapper à la misère…). Trafic d’esclaves dans toute l’Europe. Il faut que ce soient des païens, il y a des obligations à respecter. Des villes vont devenir de grands centres du commerce des esclaves. A Verdun, en France, les juifs s’étaient spécialisés dans ce domaine. Les autorités vont vouloir réglementer ces ventes. Dans le capitulaire d’Herstal, il est dit que ces ventes doivent être contrôlés, que les autorités publiques doivent y assister (comtes ou évêques). L’amende de ban est attribué au fraudeur, 60 sous par esclaves, avec servitude jusqu’au paiement.
L’esclavage a tendance à diminuer, surtout à partir du concile de Lyon (567-570) où l’Eglise interdit de réduire en esclavage un homme libre. Il n’y a plus que des esclaves par hérédité et peu à peu ils vont se fondre dans la masse des non libres, c’est à dire des gens qui ont des statuts divers. Deux statuts, dépendance tenant à la personne et dépendance tenant à la terre.
Dans certains cas, quand on exerce des fonctions publiques, il faut prêter serment au monarque. Priorité aux obligations de la fonction sur celles de la personne. Le serment est dû par tout homme libre au delà de 12 ans. Un capitulaire de 802 dispose que les esclaves doivent prêter serment en public.

2) l’époque féodale

Servus désigne à la fois l’esclave et le serf. Le serf est une personne, il a statut d’homme et non de chose.
Distinction serf de corps et de poursuite et serf d’héritage.
Si un serf de corps et de poursuite quitte la seigneurie sans l’autorisation du seigneur, il peut-être poursuivi par le seigneur où qu’il aille avant la fin du délai d’an et jour.
Le serf d’héritage n’est serf que tant qu’il est sur la terre du seigneur. Il peut faire une action de déguerpissement s’il veut s’en aller et peut emporter ses biens.
La source principale du servage c’est l’hérédité. « On n’est serf parce que l’on naît serf ». Quand l’un des parents est libre, il faut se référer à la coutume locale ; le cas habituel est que l’enfant suit le statut de sa mère à la naissance. Il y a des coutumes où l’on applique le principe selon lequel, le pire emporte le bon, donc, si l’un des parents est serf, l’enfant sera serf. On peut devenir serf volontairement pour des raisons de sécurité physiques ou matérielles. Des hommes libres viennent se placer dans la dépendance de grandes seigneuries. La raison première c’est quand l’on a plus de quoi subsister par soi-même. Le Chartrier (registre de l’abbaye de Marmoutier) retranscrit le cérémonial. Le nouveau dépendant dépose une obole sur l’autel, c’est une taxe recognitive. Puis il retraverse l’Eglise et se rend au clocher où il se « passe la corde au cou ». L’abbaye lui accorde un lopin de terre. On pouvait devenir serf à titre de sanction. Otbert avait mis le feu à une exploitation dans un domaine ecclésiastique, il ne pouvait pas rembourser ; à titre de peine, il devint, ainsi que sa femme, serf de l’établissement ecclésiastique. On peut également devenir serf par mariage.
Il y a des incapacités relatives, des sujétions. On peut fonder un foyer mais l’on ne doit pas se formarier à moins d’un échange de serf entre deus seigneuries ; en prévention d’une perte de substance économique. L’Eglise encourage les échanges de formariés à cause des risques de consanguinité. On peut obtenir une dérogation en payant une taxe de formariage.
En principe, ce qu’un serf acquiert au cours de sa vie revient au seigneur lors de son décès, c’est la main morte. On va admettre dans la coutume qu’un serf puisse transmettre ses biens à ses enfants avec en contre partie, une taxe de main morte ou droit de main morte au bénéfice du seigneur.
Communautés taisibles pour échapper à la main morte.
En principe, un serf ne peut pas déguerpir sans l’autorisation du seigneur, il peut même difficilement aller et venir.
Chevage.
L’affranchissement
a) Cause : à partir, du 13ème siècle, le servage tend à s’effacer, lié au mouvement économique de l’époque, à l’enrichissement général, au développement des villes.
b) Forme : peut être consenti par le seigneur à titre individuel ou collectif, à titre gratuit ou dédommagé.
c) Effet : les hommes deviennent libres, paysans roturiers ; on considère que leur terre change de nature juridique, elle passe de tenure servile à tenure roturière.

C. Aux temps modernes (16ème siècle – 18ème siècle)

L’esclavage existait encore de façon résiduelle mais les juristes du royaume de France soutenaient qu’il n’y était pas admis. Dans certains ports, notamment Gênes, une série de documents parlent d’esclaves domestiques.
Les conquêtes coloniales vont faire resurgir l’esclavage mais les réaction vont être rapides, des religieux vont manifester leur opposition et vont demander l’établissement de règle pour encadrer cette pratique. Las Casas a demandé un code pour les autochtones d’Amérique centrale et latine. En France, à partir du règne de Louis XIII, on reconnaît la validité de l’esclavage pour les colonies. Des règles sont à nouveau réclamées, le texte sera élaboré sous le contrôle de Colbert qui va intervenir pour y insérer un peu d’humanité. Le Code Noir pour les colonies d’Amérique est promulgué en …. . La personnalité de Colbert ressort à travers les règles relatives au mariage et à la filiation.
La Compagnie des Indes Orientales avait le droit de s’installer à Madagascar mais il lui était interdit de prendre comme esclaves les malgaches. Elle devait aller chercher ses esclaves sur les côtes de l’Afrique.
L’esclavage va se maintenir jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. Dans certains ressorts de coutume, on trouvait encore des serfs. Un édit royal de 1779 va supprimer la servitude personnelle de façon générale et abolit la servitude royale uniquement sur le domaine de la couronne. Il y a encore des affranchissements au début de l’année 1789.

D. L’époque contemporaine

1) les principes révolutionnaires en matière de liberté

a) un courant de pensée ancien


D’abord une filiation à l’égard de la notion de personne telle quelle s’est développée dans la pensée chrétienne notamment dans la Somme théologique de Saint Thomas d’Aquin. « L’homme étant un être doué de raison est libre ». Dans cette pensée, la liberté et l’égalité des hommes sont entendus dans l’ordre spirituel et pas forcément social.
Par la suite, tout un courrant subjectiviste : Duns Scott et Guillaume d’Occan vont influencer très fortement toute l’école du droit naturel. Les tenants de cette école partent de l’idée de nature, ils envisagent les hommes dans l’état de nature, libres et égaux, qui passent entre eux un contrat pour organiser la société politique. Cette théorie du contrat est soutenue surtout dans la deuxième moitié du 18ème siècle par les monarchomaques (monos =>seul ; arche =>pouvoir ; arque =>combat), qui combattent la concentration des pouvoirs entre les mains d’un seul titulaire, soit la monarchie. Ce courant, qui est véhiculé par des réformés tels que Théodore de Bèze et François Hotman est déterminant dans la mesure où comme les pouvoirs sont délégués, on considère que si le délégué ne fait pas ce qu’il faut il est possible de le remplacer. Dans ce cas-là, on le nomme le tyran.
Quel meilleur moyen de se débarrasser politiquement de quelqu’un que de se débarrasser physiquement de lui, c’est la théorie du tyrannicide.
Selon la théorie du contrat, l’homme est considéré comme un sujet de droit et parmi les droits qui lui sont reconnus, le premier est la liberté, le second la sûreté (faculté de résistance à l’oppression, droit de s’opposer aux tyrans) et le troisième la propriété.
Cette idée évoquée par les philosophes de l’Antiquité est relayée au 18ème siècle dans des écrits et par la parole. Ces idées vont influencer les différentes déclarations des droits.

b) raisons conjoncturelles

L’aspiration à la liberté se conçoit aussi comme une réaction, une opposition à un certain nombre de contraintes institutionnelles et juridiques. On a l’impression que les libertés sont un peu étouffées. L’aspiration à la liberté fait rejeter une part de la tradition ; au nom de la liberté, on rejette tout système théocratique, tout dogme, toute vérité révélée.

2) Après la révolution

Au nom de la liberté des personnes :
– on supprime les vœux monastiques ;
– on va dire que le mariage est un engagement de nature contractuelle ; il y a donc admission de la rupture volontaire du lien conjugal, admission du divorce donc ;
– l’esclavage n’a plus de raison d’être, abolition de l’esclavage mais l’application en est difficile. Sur l’île Bourbon, l’abolition de l’esclavage n’est pas appliquée. L’esclavage est rétabli par Napoléon Bonaparte avant de disparaître définitivement en France en 1848.
Aujourd’hui, certains peuples pratiquent encore l’esclavage ; c’est la raison pour laquelle, l’Ethiopie a essuyé des difficultés pour entrer dans la SDN. L’esclavage a été redéfini par des textes récents. Il sert de justificatif à l’intervention de certaines puissances ou autorités internationales dans l’ordre juridique interne de certains états.

II. L’égalité


A. Dans l’Antiquité

1) l’inégalité au sein de la cité


Le monde antique a connu l’inégalité des conditions juridiques. Pour les sociétés indo-européennes, des historiens ont établi une division de la société en trois fractions selon des fonctions distinctes ; c’est la tripartie de ces sociétés, ceux qui prient, ceux qui se battent et ceux à qui appartiennent les tâches de production. Un certain nombres de sociétés sont organisées sur un mode inégalitaire.
Dans l’Assyro Babylonie, les hommes libres sont appelés awelum (?), ce sont, la plupart du temps, des propriétaires fonciers, des artisans ou des commerçants. Les vardum sont esclaves et ils existent une catégorie entre ces deux-là, les hommes semi libres, les mouskenum (‘mesquin’ en français), qui ont une capacité juridique moins étendu que celle des hommes libres. En droit pénal par exemple, on les apprécie moins cher que des hommes libres. Souvent l’égalité n’est conçu qu’entre les citoyens.
En Grèce, le bien commun de l’égalité devait être défendu, garanti contre les menaces émanant des particuliers. Il fallait rédiger des règles juridiques pour protéger l’idéal de la cité contre les gens qui devenaient trop puissant (riche, charismatique…). Création de l’ostracisme qui consiste à interroger l’assemblée des citoyens pour savoir si un citoyen pouvait être dangereux (vote à bulletin secret, à l’origine le vote était inscrit sur un coquillage, un ostraca d’où le mot ostracisme). Cette procédure est attestée à compter de 498 avant Jésus Christ. Cette mesure préventive consistait en un exil de 10 ans en général ; la personne disposait d’un délai pour faire ses valises et la sanction ne frappait ni sa famille ni ses biens. Dans certains cas, le citoyen exilé pouvait être rappelé (pour résoudre des crises graves…). L’égalité parfaite est en partie un leurre car il existe toujours des différences, fondées sur la fortune, la vocation à exercer certaines fonctions. Dans beaucoup de cités antiques on admettaient l’existence d’ordres.
A Rome, seul l’ordre sénatorial à vocation aux hautes fonctions publiques. Pour cette raison, on leur interdisait certaines tâches qui pourraient les corrompre (commerce…). Parfois, il y avait un aménagement du droit pour les membres de l’ordre sénatorial. L’inégalité pouvait se marquer aussi dans l’exercice des droits physiques. Quand un citoyen était frappé de l’infamie (perte de réputation), on le reléguait pour voter dans les derniers groupes (centuri) mais en pratique, on arrête le vote dès qu’une majorité est atteinte donc ils ne pouvaient jamais voter.

2) l’inégalité envers les étrangers à la cité

Les grecs distinguent deux catégories d’étrangers, ceux qui appartiennent au monde grec (…) et ceux qui n’y appartiennent pas, les barbares (…). Très tôt, les grecs ont développé une théorie de l’hospitalité d’où ils ont fait découler des règles pour l’étranger qui passe. L’étranger qui réside ne bénéficie pas de certains droits des citoyens, par exemple de l’éphébie, honneur de porter les armes pour défendre la cité. Il n’a pas non plus le droit de participer aux cérémonies cultuelles. Il n’a pas le droit d’enctésis, faire des investissements immobiliers. Souvent, l’étranger résident doit habiter en dehors des murailles de la cité, c’est métèque. L’étranger, même résident, n’a pas accès aux tribunaux, c’est pourquoi très souvent, pour régler les litiges entre eux, ils avaient recours à l’arbitrage. Souvent, cela ne suffisait pas c’est pourquoi on a créé des magistrats spécialisés pour s’occuper des affaires judiciaires avec les étrangers. Il y a eu des civilisations dans lesquelles on a veillé à ne pas accorder la citoyenneté trop facilement à des étrangers mais cela n’a pas toujours été le cas. A Rome, extension du droit de la cité au dimension de l’Empire par l’édit de Caracalla en 212 après JC.
La capacité d’un étranger de contracter mariage avec la fille d’un citoyen est réduite. Pour l’Egypte, un texte dit que le mariage entre un Egyptien et une étrangère n’est pas valide mais un texte ne constitue pas une certitude. Certaines cités n’admettent pas le mariage d’un étranger avec la fille d’un citoyen. A Rome, le mariage est conçu comme une institution faite pour créer des petits citoyens, on guignaient les filles des familles fertiles. Au bas Empire, il y a des mariages fréquents entre romains et barbares. En 370 après JC, une constitution de l’empereur Valentinien 1er les interdit sous peine de mort. Comme la sanction est trop rigoureuse, l’interdiction n’est pas respectée. Cette constitution impériale a survécu jusque dans le bréviaire d’Alaric.
Le droit familial peut être créateur d’inégalité juridique ; à Rome, grande distinction entre les sui juris et les alieni juris.
Inégalité liée au sexe. Selon les civilisations, dans l’Antiquité, on ne conçoit pas du tout cette assimilation totale entre les personnes. Très souvent, la situation juridique de la femme est une situation de dépendance. La capacité de la femme est réduite.
En Egypte, au Nouvel Empire, la condition juridique de la femme est pleine et entière, même si elle est mariée. Obligation de fidélité entre époux mais l’adultère est beaucoup plus sévèrement sanctionné chez la femme. Chez les Hittites pareil ; quand il y a flagrant délit, le mari peut mettre à mort les deux coupables, c’est l’exercice de la vengeance privée. Mais si le mari trompé n’agit pas sur le champ, il ne pourra ensuite qu’intenter une action en justice. Chez les Hébreux, la femme adultère est lapidée alors qu’il semble que l’adultère du mari ne soit pas sanctionné.

B. Au Moyen Age

1) l’existence des ordres


La société est divisé en trois ordres qui coexistent et ne sont pas susceptibles d’être disjoint :
– ceux qui prient et assurent la vie religieuse ;
– ceux qui combattent ;
– ceux qui par la force de leur bras font vivre la société ;
Ces trois ordres ont chacun leur statut juridique, deux statuts particuliers et un statut ordinaire. On appelle aussi les combattants, le second ordre.

a) les clercs

Ils revendiquent une certaine autonomie pour accomplir leur triple mission (évangélisation, assistance, enseignement). Les clercs ont été amenés à entrer en conflit avec l’autorité royale. Il y a deux sortes de clercs, réguliers et séculiers.
Réguliers : qui suivent une règle de vie dictée par un ‘prédécesseur’, il existe deux sortes de clercs réguliers, les ermites et les cénobites (bénédictins, cisterciens, prémontrés, chartreux, franciscains, dominicains…).
Séculiers : ceux qui vivent dans le siècle, au contact de la population.
La condition juridique des clercs :
Pour devenir clerc, il faut être libre de naissance ou l’être devenu par la suite. Il faut être né en légitime mariage. Il fallait avoir reçu une formation religieuse.
Lex privata : statut particulier, privilège.
En matière fiscale, les clercs sont exemptés de la taille. L’Eglise est tout de même appelée à contribuer aux charges. Le roi va mettre l’Eglise à contribution pour la défense ou la croisade en lui demandant la décime avec le consentement du pape.
Dans le domaine militaire, les clercs sont exempts du service d’host. En principe, les chefs ecclésiastiques n’assurent pas eux-mêmes le commandement militaire.
Dans le domaine judiciaire, les clercs ne ressortissent qu’à la compétence des tribunaux du clergé, c’est le privilège du ‘for’ qui est accordé à toute personne qui peut prétendre à la qualité de clerc (qui a subi la tonsure). C’est un privilège important qui donne lieu à des abus. Le pouvoir royal a lutté de toutes ses forces pour restreindre ce privilège. Peu à peu on a vu se réduire le nombre de bénéficiaire de ce privilège. Il se maintient en droit pénal même s’il diminue en raison de la multiplication des cas royaux. En principe, la justice du roi ne peut pas procéder à la contrainte par corps.

b) l’ordre de la noblesse

nobilitas : signifie surtout une certaine reconnaissance sociale. Dans ces familles, la naissance et la parenté jouent un rôle considérable. La noblesse s’est constituée par les chefs territoriaux et militaires et par leurs auxiliaires.
Comment accède-t-on à la noblesse ?
Evolution historique dans ce domaine. Aux 1er temps féodaux, soit par l’acquisition de la qualité de combattant à cheval, soit par des liens de fidélité personnels souvent renforcés par l’attribution d’une terre à charge de service militaire. L’adoubement joue un rôle considérable, c’est une consécration de la capacité militaire et une reconnaissance de cette capacité à travers un certain nombre de rites (colée, faire tomber la quintelle…). Même dans les familles nobles, tous les fils ne sont pas adoubés mais considérés quand même comme nobles. Au 13ème siècle, des changements se produisent pour l’adoubement et pour la remise des terres. A l’origine, tout chevalier peut adouber une autre personne qu’il juge digne de l’être. Au 13ème siècle, on retire cette prérogative au chevalier, les princes territoriaux puis le roi vont s’en emparer. Cela devient un droit régalien. Un certain nombre de terres vont être vendues, en général à des bourgeois des villes. Petit à petit, on va poser le principe qu’un roturier qui acquiert une terre noble n’en devient pas noble pour autant. Arrêt du parlement de Paris puis texte de 1275 qui dit qu’un roturier qui achète un fief doit payer une taxe qui l’affranchit du service militaire( droit de franc-fief). A la fin du 13ème siècle, la terre n’anoblit plus. Le statut juridique de la terre est indépendant de la condition de la personne qui la tient. Dans les faits, quelques fois, il y avait assimilation entre famille noble et famille roturière tenant un fief depuis plusieurs générations.
A la fin du Moyen Age, le mode normal d’acquisition de la noblesse, c’est l’hérédité en ligne masculine. Dans de rares régions, la noblesse peut se transmettre en ligne féminine, on dit alors que « le ventre anoblit ». Dès le Moyen Age, il peut y avoir des anoblissements par grâce du prince territorial puis du roi. Il peut y avoir également des charges ou des fonctions publiques dont on considère qu’elles anoblissent.
Condition juridique ?
Privilèges militaires, fiscaux, judiciaires et … .
Encadrement militaire à cheval ; l’armée royale est permanente, le levée des troupes devient un monopôle royal ;
Les nobles ne sont pas assujettis au paiement de la taille, de même qu’à certains impôts de péage ;
Les nobles sont jugés, à l’origine, par leurs pairs au sein de la cour féodale. Par la suite, il leur faudra aller devant la justice du roi. Pour sauvegarder le principe des nobles jugés par leurs pairs, ils vont directement devant le bailli ou devant le sénéchal. Les sanctions pénales qui leur sont appliquées sont plus lourdes que pour les autres ordres car ils sont censés montrer l’exemple, « ils doivent reluire en vie et en mœurs ». La peine de mort qui leur est appliqué, c’est la décollation (décapitation), ils ne sont jamais pendu. En droit privé, il existe une coutume spécifique des nobles, notamment, en matière successorale, application de la règle de l’aînesse, en matière matrimoniale, la veuve noble a le droit de douaire, c’est un droit sur certains biens de son mari défunt (elle est appelé pour cela la douairière). On dit que « la douairière ne peut pas jouer du haut bois », c’est à dire qu’elle n’a pas le droit d’accélérer la production, celle-ci doit rester au même stade qu’à la mort du mari. Ils ont le droit d’avoir un sceau, ils ont des droits honorifiques. Droit de chasse à partir de 1397, avant tout le monde pouvait chasser.
Comment perd-on ce statut ?
– mort ;
– dérogeance, perte du statut de noble quand on se livre à des actions incompatibles avec ce statut (toutes les activités commerciales,…) ;
– déchéance, perte de la noblesse à la suite d’une condamnation de caractère pénal (peine afflictive ou infamante) ;

c) le troisième ordre

On leur applique le droit commun. On va établir des statuts urbains qui vont accorder à certains d’entre eux des statuts de franchise ou même d’autonomie. Les villes de franchise restent sous l’autorité du seigneur, les villes autonomes se gèrent seules. Ces statuts sont accordés par le seigneur. Apparaît le terme de bourgeois, celui qui dispose d’un statut particulier, généralement des garanties en matière financière, judiciaire et militaire. Dans les villes du Nord du royaume, généralement, le statut de bourgeois est refusé aux nobles et aux clercs. Dans les villes du Sud, on est beaucoup plus large. Les droits particuliers des habitants des villes varient en fonction des coutumes locales.

En plus de l’existence des ordres, le roi peut accorder des droits particuliers à certaines catégories de personnes. Ces privilèges peuvent être personnels ou collectifs. Il peut y avoir des avantages, des statuts, liés à certaines fonctions, à certaines activités professionnelles.
Il existe un privilège de juridiction, le privilège committimus, qui tient dans la possibilité de comparaître uniquement devant une juridiction spécialisée.

2) Autres sources d’inégalités

a) différence entre les sexes


Au Moyen Age, l’inégalité va résider souvent dans la différence entre les sexes. On le voir par la situation de la femme mariée. Plus on va aller vers la fin du Moyen Age, moins la capacité juridique de la femme mariée sera grande, surtout à partir du 14ème siècle, parce que c’est l’époque où se fait sentir, de façon très forte, l’influence du droit romain chez les légistes. On veut en même temps protéger la femme et réduire sa capacité.
Il y a deux types de régime principaux :
– le régime dotal ; dans les pays de droit écrit, du Sud, l’épouse apporte une dot inaliénable, le mari la gère mais n’en dispose pas, on dit que la femme est frappée d’incapacité ;
– le régime de communauté ; dans les pays de coutumes, du Nord, surtout à partir du 13ème siècle ; lié à la transformation de la notion de famille, les biens meubles sont mis en commun tandis que pour les immeubles on distingue les propres, apportés au moment du mariage, et les conquêts de communauté, achetés après le mariage ; c’est le mari qui gère (conséquence de son autorité maritale) car il est le chef de la communauté ; mais il ne peut pas disposer des propres de sa femme.
L’incapacité de la femme est analysée comme une contrepartie de cette autorité du mari.
Si le mari ne peut plus diriger, c’est la femme qui le remplace ce qui montre que son incapacité n’est totale.

b) distinction entre sujets locaux et étrangers

A l’époque franque, on connaît deux types de rattachement :
– le droit du sang marque l’appartenance à un peuple, à un groupe ethnique ;
– le droit du sol lie au territoire et à la communauté des hommes libres ;
Peu à peu, l’appartenance au territoire va l’emporter sur le droit du sang. Celui qui est étranger, c’est celui qui n’est pas du territoire, il a une condition juridique inférieure, c’est l’aubain. Au Moyen Age, le droit du sol a une importance extrême, celui qui s’en va perd son rattachement. Quand il devient résident, l’aubain va devoir conquérir son rattachement. Le seul fait de s’installer ne suffit pas, il faut avouer le seigneur local dans un délai déterminé, le délai de coutume, d’un an et d’un jour, sinon celui qui s’est installé s’expose à être considéré comme serf. L’aubain a un statut juridique marqué par certaines restrictions ; s’il meurt, le seigneur saisit ses biens, on appelle cela le droit d’aubaine, il n’est pas établi partout. Ce droit peut être suspendu en période de foire parce que le seigneur veut favoriser la venue sur ses terres des marchands étrangers. Il peut être aussi supprimé quand le seigneur veut augmenter la population de sa seigneurie. L’étendu de ce droit dépend aussi de la coutume ; souvent, la coutume dit que le seigneur ne peut bénéficier du droit d’aubaine que s’il n’y a pas de descendants sur place.

C. Les temps modernes

Pas de changements aussi importants qu’on pourrait le penser.

1) les ordres

a) l’Eglise


La condition juridique ne change pas mais l’autorité royale continue à vouloir restreindre le privilège du for. L’autorité du roi s’appesantit de plus en plus sur le clergé de France. L’Eglise se transforme en corps politique. Le concordat de Bologne reconnaît au roi le droit de nommer les titulaires d’un certain nombre de fonction ecclésiastiques. C’est donc le roi qui nomme, sous certaines conditions. Le pape donne l’institution canonique, le pouvoir d’encadrement spirituel d’un ressort déterminé.
(…)
Deux conséquences :
– (…) ;
– le roi s’est mis à accorder des postes du clergé régulier à des dignitaires du clergé séculier. Ces derniers se contenteront de toucher les revenus de leur abbaye, on appelle cela la commende. C’est un facteur de déclin des abbayes et des monastères à la fin de l’Ancien Régime.

b) la noblesse

L’évolution est modeste. Pour les voies d’accès :
– la transmission est héréditaire en ligne masculine.
– le roi accorde aussi la noblesse par lettres. Sous Louis XIV, pour des raisons fiscales, le roi va accorder des lettres de noblesse moyennant paiement, puis les révoquer à moins d’une confirmation, également moyennant paiement. Cette pratique doit être tempérée, les concessions étant le plus souvent méritées.
– on peut également acquérir la noblesse par l’exercice de charges publiques. Seules les hautes fonctions publiques anoblissent. C’est parfois conditionnel, il faut avoir exercé sa charge pendant un certain temps, parfois deux générations successives. Cela n’est envisageable qu’à partir du moment où l’on admet l’hérédité des charges (=> un édit royal de 1604). Un certain nombre de charges municipales ne sont que personnelles et viagères, c’est la noblesse de cloche. Quelques hautes charges publiques anoblissaient au premier chef et se transmettaient héréditairement (ex : conseiller secrétaire du roi, la savonnette à vilain).
Les familles en cours d’anoblissement au moment de la révolution sont appelées la noblesse inachevée. La noblesse a traditionnellement deux rôles : assister et conseiller. Il reste un prolongement des guerres privées médiévales : le duel. L’autorité royale continue à lutter contre cette pratique, parfois avec une très grande sévérité (sous Louis XIII, un édit pris au nom du roi par Richelieu, punit de mort les gentilshommes qui participent à des duels). Sévérité due au refus de l’appauvrissement de l’encadrement militaire.
Le statut particulier des nobles c’est aussi un aménagement en matière fiscale, exonération de la taille. Les nobles vont être assujettis à tous les impôts nouveaux.
Les nobles gardent des droits honorifiques : le droit de porter les armes (à feu et épée), le droit de timbrer les armoiries…
Toujours le même statut judiciaire. Ils se rendent directement devant les baillis et sénéchaux ou les tribunaux royaux.
La perte du statut de noble va connaître une évolution. En ce qui concerne la dérogeance, vont intervenir des exceptions liées à l’exploitation du domaine. Au 16ème siècle, on voit se multiplier les forges et les verriers. Pour le commerce maritime, pour les grandes sociétés qui disposent d’avantages royaux, il est précisé que l’on peut souscrire des parts sans que cela entraîne dérogeance. Au 18ème siècle, on admettra que l’on peut être associé dans une société comme actionnaire ou comme commanditaire. A la fin de l’Ancien Régime, on admettra que l’on peut faire de la banque.
A la fin de l’Ancien Régime, de nombreux nobles demandent à bénéficier d’emplois de réserve. Ils vont obtenir des édits réservant certains grades de l’armée aux gentilshommes. Les officiers qui ne sont pas issus de familles nobles sont appelés officiers de fortune.

c) le Tiers Etat

Evolution dans les termes. Le mot de bourgeois correspond au Moyen Age à une réalité (habitant d’une ville disposant d’un statut spécial). Il est désormais très souvent employé au sens des gens qui vivent de leur rente.
Les paysans serfs existent encore dans de rares régions. La plupart des paysans sont des hommes libres. On va établir au sein du Tiers Etat plutôt des distinctions d’ordres économique et social. Différence entre les brassiers (ceux qui n’ont que la force de leurs bras pour vivre) et les laboureurs (riche, charrue et attelage). Le statut fiscal des uns et des autres n’est pas le même.
Le problème de l’Ancien Régime c’est la complexité des statuts juridiques.

2) autres

• la différence entre les sexes
Evolution du statut de la femme mariée. La puissance maritale devient un principe d’ordre public. Le mari est le seigneur et maître de la communauté. L’incapacité juridique de la femme mariée va se renforcer. Quand son mari est empêché, la femme mariée ne peut plus agir d’elle même, elle doit être assistée par la justice.
• la différence entre la condition de national et celle d’étranger
Au 16ème siècle, le roi va se réserver le droit d’aubaine et les biens qui proviennent de l’application de ce droit sont considérés comme faisant partie du domaine royal (ordonnance de Moulins de 1566). L’aubain désormais, c’est l’étranger au royaume, celui qui n’est pas considéré comme sujet du roi, régnicole. Le roi peut en dispenser soit de façon générale par une convention avec un autre Etat, soit de façon spéciale pour certains biens, certains types d’investissement. C’est le cas pour les souscriptions aux grandes compagnies de commerce au temps de Louis XIV. De même cela peut être un avantage accordé à des étrangers pour venir les faire travailler dans le royaume. C’est un moyen pour attirer des ouvriers dans les manufactures. Pour un français qui s’installe à l’étranger : il sera considéré très facilement comme un étranger d’autant plus s’il a reçu des lettres de naturalité là ou il s’est installé.
Une française qui épouse un étranger et se fixe à l’étranger devient étrangère.
On va considérer que le fait pour un français de s’installer à l’étranger n’entraîne plus la perte de rattachement au pays d’origine. De plus on va dire que les enfants nés à l’étranger de parents français sont français s’ils viennent s’installer en France en établissant leur résidence permanente (perpétuelle dans les textes de l’époque). Dans l’édit de Nantes, il est dit que les enfants ou ceux nés en dehors du royaume en raison de l’exil de leurs parents pour cause de religion seront tenu pour vrais français sans avoir besoin de lettres de naturalité.
A Lyon, au 16ème siècle, un étranger qui ne fait pas d’investissement immobilier, qui dispose d’une fortune mobilière, échappe aux impôts directs. Ces étrangers ne payent que les impôts de consommation et vont défendre avec âpreté cet avantage, ils vont même aller jusqu’à utiliser le chantage.
Sous l’Ancien Régime, à l’inégalité qui relève de la situation individuelle de chacun, il faut ajouter des situations appartenants à des groupes dotés de statuts spécifiques : les privilèges collectifs étaient très nombreux à cette époque.

D. De la Révolution à nos jours

On va proclamer le principe de l’égalité juridique entre les ordres.

1) le principe

Les cahiers de doléances, rédigés en vue des Etats généraux de 1789, montrent que les rédacteurs ne mettent pas en cause l’organisation de la société. On dénonce essentiellement les privilèges fiscaux. Parfois, on attaque aussi la vénalité de la noblesse. On dit que ce serait mieux si c’était une concession fondée sur le mérite ou sur le talent. Toutefois, les idées d’égalité étaient véhiculées depuis un certain temps, elles étaient une des composantes de l’esprit des lumières. Lors de la nuit du 4 août 1789, les privilèges et les droits exclusifs sont abolis. Le principe même d’égalité est affirmé dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du mois d’août 1789. C’est une égalité juridique mais économique et sociale. L’égalité devant la loi et devant l’application de la loi, la loi civile ou la loi pénale.

En matière pénale, tous les condamnés à mort sont sanctionnés de la même manière, on applique une peine de mort noble à tout le monde, la décollation.
C’est de cette idée d’égalité que vont découler des conséquences :
– n’importe quel citoyen peut être juge, c’est la théorie du citoyen juge ;
– suppression de toutes les juridictions d’exception ;
L’idée d’unité du droit est remise à l’honneur. La loi des 19-23 juin 1790 abolit les titres et certains signes distinctifs comme les livrées et les armoiries. Il y a une volonté de supprimer tous les corps intermédiaires entre les citoyens et l’Etat. Les groupements sont un facteur potentiel d’inégalité. Le décret d’Allarde va supprimer l’organisation des métiers en prévoyant une indemnisation qui ne sera jamais versée.

Les textes vont dire les choses de façon claire et nette. La Constitution de 1791 dit expressément qu’ « il n’y a ni nobles, ni pairies, ni distinction héréditaire, ni distinction d’ordre, aucun privilège ni exception au droit commun de tous les Français ». Cette idée d’égalité, on a voulu la faire passer dans le droit successoral avec une exception, la quotité disponible.

2) les tempéraments

Sous l’Empire, on va voir réapparaître la noblesse mais on ne fait pas découler de la condition de noble un statut juridique spécial. Sous la Restauration, en 1814, l’ancienne noblesse reprend ses titres, la noblesse d’Empire conserve les siens. Sous la monarchie de Juillet et le Second Empire, l’existence de la noblesse demeure une réalité juridique mais toujours sans statut particulier. La noblesse est une dignité héréditairement transmissible qui fait partie de l’état civile des personnes. Aujourd’hui encore, les titres, dès lors qu’ils sont justifiés, font toujours parie de l’état des personnes.
Inégalité civique : distinction entre citoyen actif (qui paie une taxe et participe à la vie politique en contre partie) et citoyen passif. Ce système va durer jusqu’à la Seconde République.

La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen vise l’homme en général et pas la femme en particulier. Cela a choqué certaines femmes ; Olympe de Gouges a rédigé une déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Il y avait effectivement une infériorité juridique de la femme qui se voyait surtout dans le statut de la femme mariée même si dans les projets de code il y avait eu l’idée d’une égalité entre époux. Dans le code civil, on revient à la puissance maritale. La femme mariée est placée sous l’autorité de son mari et lui doit obéissance. L’adultère de la femme est traité sévèrement. L’incapacité de la femme mariée est large. Elle ne peut pas agir en justice, disposer de ses biens, en acheter sans l’autorisation de son mari. In capacité générale et d’ordre publique, on ne peut pas y déroger.
On admet que la femme mariée puisse faire un testament. L’extension de la capacité de la femme va être un phénomène progressif. En 1881, la femme mariée peut ouvrir et gérer librement un livret d’épargne. En 1886, une loi permet à la femme mariée d’adhérer à une caisse de retraite sans l’autorisation du mari. En 1907, une loi va donner à l’épouse le droit d’exercer une profession séparée en ayant la libre disposition de ses gains et salaires. Ce qu’elle achète prendra le nom de biens réservés. Se pose la question de l’autorité du mari. Dans des droits étrangers, cette notion a été supprimée (en Angleterre en 1882, en Allemagne dans le code de 1900 et en Italie au lendemain de la Grande Guerre, en 1919). En France, une loi de 1938 supprime le devoir d’obéissance. L’incapacité juridique de la femme mariée disparaît en 1965. Aujourd’hui, on parle de collaboration entre époux. Par exemple en matière d’autorité parentale, « l’autorité parentale est exercée en commun par les deux parents… ». Pour les droits politiques, le droit de vote, l’égalité a été admise au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

En ce qui concerne le droit des étrangers, l’évolution est en dent de scie ; selon les périodes, on est plus ou moins large. Un décret du 6 août 1790 abolit le droit d’aubaine. L’époque révolutionnaire est plutôt large concernant les étrangers ; il est dit que les étrangers qui vivent depuis un certain temps en France deviennent citoyen.
Sous l’Empire on rétablit les lettres de naturalisation avec un décret du 17 mars 1809.
Entre temps, dans le code civil, l’article 11 régissait le statut de l’étranger : « est français celui qui est né d’un père français ». Dans cet article on précise que les étrangers disposent en France des mêmes droits civils que ceux qui sont accordés aux Français résidents dans leur pays d’origine. L’enfant d’un étranger, né en France, peut opter pour la nationalité française dans l’année qui suit sa majorité. Après l’Empire on aura tendance à toujours interpréter les textes dans le sens restrictif ; en plus, on accordera les lettres de naturalisation avec la plus grande précaution. On l’accordait plus facilement quand la mère était française.
La 3ème république a adopté une attitude contradictoire. On a appliqué l’article 11 du code civil de façon large. En revanche, il y a eu des lois restrictives dans le domaine des activités professionnelles. On a même fermé l’accès à certains métiers pour les étrangers.
Actuellement, s’affrontent des théories contradictoires entre l’intégration large et la restriction. Dans ce domaine, la marge de manœuvre de l’Etat français est entravée par le droit communautaire. L’idée d’égalité va être à l’origine d’un certain nombre de changements. Dans l’ordre économique, elle permet de justifier la pression fiscale. Dans le domaine politique, elle a suscité le principe de parité (application en matière électorale). Dans le domaine du droit privé, elle fonde des changements par des organes extérieurs (CEDH, CJCE dont la jurisprudence s’impose aux Etats membres) qui poussent au maximum le principe d’égalité.

III. La propriété

Maîtrise de la personne sur les choses.
Débat sur l’origine.
Débat sur la légitimité de la propriété.

A. Dans l’Antiquité

On constate que partout la propriété privative existe. On la rencontre aux temps les plus reculés. Cette propriété privée peut être soumise à des contraintes collectives. On a toujours distingué les biens immobiliers des biens mobiliers.

1) l’Orient

— en Assyro Babylonie, l’appropriation privative des biens est attestée par des documents dès le 4ème millénaire avant notre ère. Il existe plusieurs types de propriété. Chez les Sumériens, il y a un système de propriété commune à coté de propriété privée. Le temple qui gère les biens du dieu passe des baux d’habitation avec des particuliers qui tiennent la terre. Dans certaines civilisations, des concessions de terre s’apparentent à des fiefs. Souvent ces terres rémunèrent des services soit administratifs soit militaires. S’agissant des services administratifs, la terre est confiée à vie mais n’est pas disponible, c’est le roi qui en reste le maître ; à la mort du titulaire, le roi reprend son bien ; il semble que dans certain cas il y ait eu une tendance à l’hérédité peut-être liée à l’hérédité des fonctions. S’agissant des services militaires, les terres devaient toujours être bien entretenues.
Il y a des petites propriétés libres ; dans le code d’Hammourabi, on parle du fermage. Il existe aussi des propriétés familiales mais pas très répandues. Dans les lois d’Eschnouna, il est dit que si l’on vend une part indivis d’une maison, les frères ont un droit de préemption.
Le droit de propriété est protégé par les lois. Les atteintes aux biens sont sanctionnées et le droit pénal est particulièrement sévère. Cela peut aller jusqu’à la peine de mort (par exemple pour les effractions de nuit). Tous les hommes libres peuvent disposer de leurs biens même les mouskenum, mais pas de façon absolue car les biens sont le siège des dettes. Dans le droit matrimonial, on connaît une pratique : le mari, d’avance, constitue une petite masse de biens à sa femme au cas ou il mourrait avant elle, c’est la nudunnu. C’est une institution de prévoyance. La veuve n’en a que la jouissance, c’est un droit d’usufruit ; si elle se remarie, elle le perd. Cette institution nous est connu par le code d’Hammourabi. Quand une femme se marie, elle apporte une dot (meubles ou immeubles). C’est ce qui permet à la femme de contribuer aux charges du ménage. Versée au moment du mariage ou bien par fraction, la femme en reste propriétaire mais ne peut pas en disposer. C’est le mari qui la gère jusqu’à la dissolution du mariage. Le problème des dettes s’est posé. Les dettes contractées pendant le mariage engagent les deux époux. Mais il peut arriver qu’il y ait eu des dettes avant. Alors, pour protéger les intérêts de la femme, on pouvait demander au mari un engagement écrit garantissant que sa femme ne serait pas responsables des dettes antérieures au mariage.
— en Egypte, sous l’Ancien Empire, les particuliers ont des biens et en ont la maîtrise effective même si pour les terres on reconnaît un droit éminent au profit de Pharaon. Sous l’Ancien Empire, les sources documentaires montrent des ventes assez fréquentes (grâce aux listes de recensement). On connaît aussi les transmissions successorales. Il y a égalité dans le partage entre les enfants (pas de droit d’aînesse ou de masculinité). On peut faire un testament révocable jusqu’à la mort, fait devant des témoins. La plupart du temps, on fait un testament quand on a pas d’enfant, il fait désigner un héritier pour qu’il accomplisse les rites funéraires.
Au Nouvel Empire, on voit coexister des grands et des petits propriétaires mais comme il y a un droit éminent de Pharaon, la propriété des terres est très surveillée. Il existe une propriété privée des meubles, des immeubles ou des fonctions religieuses. Le droit familial a un effet : on trouve une grande méfiance envers les remariages parce qu’il faut défendre les biens contre la rapacité du deuxième époux. Prise d’une mesure de sauvegarde pour les biens des enfants du premier lit. L’homme qui se remarie doit laisser les deux tiers de ses biens aux enfants du premier lit. On rencontre beaucoup de vente et de donation même ente époux.
Dans le domaine successoral, il y quelques changements…

 

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