Histoire du droit du travail

Introduction au cours d’Histoire du droit du travail / du droit social 

  A partir du XVIIIème siècle, apparaissent les grands principes du droit français.
Le XIXème siècle a été marqué par la première révolution industrielle (le textile, le charbon, l’acier,…), et par l’apparition du code civil et du code pénal.


A partir des années 1880, le système politique en place est la république républicaine (l’état providence).
Le symbole de la République est Marianne, une mère.
Il y a ensuite la 2ème révolution industrielle (chimie, électricité,…).
C’est au cours de celle-ci que la France devient véritablement un pays industriel. On voit à cette époque l’apparition des syndicats.
Le modèle de l’état providence explose en 1980.

I : Du travail encadré au travail libéré.

La mutation a lieu à la fin du XVIIIème siècle. Il y a le système des corporations (seuls 5 % des emplois sont concernés par ces corporations).

SECTION 1 : La France de l’Ancien Régime.

Il y a des lentes et douces mutations dans le monde agricole. La France est à cette période un pays agricole comme tous les autres pays européens, excepté le Royaume Uni qui est déjà dans le monde industriel.

Paragraphe 1er : Un pays rural.

La France est à cette période, mise à part la Russie, le pays le plus peuplé d’Europe :
Il y avait 20 millions de français en 1750, 27 millions en 1789 et, 29 millions en 1815.
Cela est dû au fait que la France du XVIIIème siècle a été épargnée par les guerres et que c’est une période ou la natalité était élevée et où les enfants avaient une espérance de vie plus élevée que sous les régimes précédents.
Cela a conduit à une augmentation de la main d’oeuvre et donc, la force de travail était plus élevée.
Sous l’Ancien Régime, quatre français sur cinq sont des ruraux, des paysans.
Même à la ville, la campagne est présente.
Des artisans sont également présents dans les campagnes (boulangers, bouchers, maçons, maréchaux-ferrants,…).
Il y a aussi des juges, des notaires, des douaniers, des agents du fisc, des huissiers,…
Il existe aussi des petites industries souvent familiales, on ne parle pas alors d’usines, mais d’ateliers.
On utilise, le lin, le chanvre pour se vêtir.
Les chanvrières sont les endroits où l’on cultive le bois.
(Sous l’ancien régime, le coton est seulement utilisé par les riches.)
On utilise le bois (fabrication de crucifixs, de couverts, d’assiettes, …).
Il y a des moulins, il y a des forgerons, notamment à Montbeliard, il y a des mines, notamment à Ronchamps, il y a des verreries, des tanneurs,…
Les villes grandissent et on verra les premiers lotissements se construire.
Cela est dû notamment à un exode rural. Les regroupements d’habitations de plus de 5000 habitants sont considérés comme étant des villes.
A cette période, les grandes villes sont Marseilles (100 000 habitants), Lyon (150 000 habitants) et Paris (550 000 habitants).
Les grandes villes sont généralement celles où il y a des ports (ex : Rouen, Bordeaux,…) et celles où il y a de grands centres industriels (Troyes, Lyon,…).
Il existe aussi des petites capitales administratives (Gray, Dijon, Vesoul,…).
Il y a 20 % d’urbanisation. Ce taux va durer pendant plus d’un siècle. Il va décoller en 1850.

Paragraphe 2 : Un lent essor industriel.

L’industrie naît de l’investissement.
Lorsque les agriculteurs s’enrichissent, ils dégagent des surplus.
Les paysans sont les premiers consommateurs. Si les récoltes sont bonnes, l’industrie va bien.
Si les récoltes sont mauvaises, l’industrie va mal. Jusqu’en 1775, les paysans s’enrichissent.
En 1775, c’est le repli. L’industrie est le moteur de l’économie.
En tant qu’énergie, on utilise les chevaux, l’eau, le bois pour alimenter le feu, …
En 1705, un farfelu découvre en Angleterre la machine à vapeur.
En 1769, Watt invente la machine à vapeur qui fait marcher le métier à tisser.
Plus tard, on découvrira le charbon, mais pour cela, il faut des mines.
Le marché intérieur de l’Angleterre ne peut pas absorber toute la production.
C’est pour cela que les anglais exportent par le biais de leur marine.
Les frères Perrier inventeront la pompe à vapeur.
Jouffrey Davant a inventé le bateau à vapeur. Les machines, on va les trouver dans les centres industriels.
La 1ère grande industrie, c’est le textile. En 1759, le roi autorise la fabrication du coton, or, l’avantage du coton, c’est qu’il est imprimable.
Ce sont les fameuses Indiennes. Ceci va revitaliser de nombreuses régions (Amiens, Mulhouse,…).
Les régions industrielles sont très liées à la campagne et certaines activités industrielles se réalisent principalement à la campagne.
Par exemple : pour les hauts-fourneaux de la sidérurgie, il faut du bois donc cette activité se réalise à la campagne.
Il faut également du minerai à proximité, …
A cette période, il y a également de grands ateliers qui embauchent plus de 50 personnes.
Par exemple, Dietrich qui fabrique des canons, embauche près de 1500 ouvriers, Le Creuset sera le point de départ en 1830 de l’empire Schneider,…
Le roi va encourager cette politique industrielle et l’encourager.
Une ordonnance de 1723 exige une autorisation pour ouvrir une forge.
En 1734, il faut une autorisation pour ouvrir une mine. Pour créer des usines, il faut des investisseurs, des capitalistes.
Les nobles n’ont pas le droit de travailler, sauf exception. Un noble peut être maître de forge,…
Le roi lui-même place de l’argent dans les manufactures et notamment les manufactures d’armes.
Dietrich sera anoblie, Oberkampf qui est un suisse et qui investit en France, sera aussi anobli.
Pour utiliser les talents, on offre des privilèges fiscaux.
On entre dans le capitalisme. La société s’embourgeoise, les gens s’enrichissent.
Dans la hiérarchie sociale, le noble appauvri passe devant le riche commerçant.
Les riches personnes qui ont fait fortune tentent d’acheter des terres et des titres de noblesse.
Louis XVI a anobli De Dietrich.
Dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, les seules distinctions autorisées sont celles du mérite, du talent et, du travail.

Paragraphe 3: Le monde du travail.

La société est divisée en ordre.
Chaque ordre a une fonction.
Le Clergé prie.
Il est dévoué à la noblesse des Ames.
Les Nobles doivent se battre.
Le Tiers-Etat, c’est le reste de la population.
Les gens qui composent le Tiers-Etat travaillent pour nourrir les nobles et les religieux.
Il y a une vision égalitaire du travail.
Lorsque l’on fait des cérémonies, dans l’ordre protocolaire, on classera :
– les métiers nobles : C’est-à-dire ceux que l’on apprend à l’université.
Exemple : La médecine, le droit, …
– De l’autre côté, il y a les métiers viles. Le négoce, c’est le beau commerce international.
Il y a également le métier des artisans, des commerçants,…
Ensuite, il y a les petits métiers : Les porteurs d’eau, les chiffonniers,…
Le monde d’autrefois est un mode de « petits boulots ».
Dans chaque métier, il y a une hiérarchie découlant de l’ancienneté et de la compétence.
Il y a le maître, l’employé, puis l’apprenti.
Cependant, il est toujours possible de bouger d’un statut à l’autre.
A la Révolution, il y a eu un blocage :
On ne pouvait plus sortir de son statut, ce qui a entraîné avec d’autres facteurs, la Révolution.
L’Ancien Régime finissant ressemble beaucoup au monde d’aujourd’hui.
Les mutations sociales sont inscrites dans le droit, figées dans le droit.
Ceci donne des privilèges, des droits acquis.
Dans nos sociétés actuelles, il y a des costumes différents pour chaque statut social :
Le cadre homme a, en principe un costume-cravate, la femme active un tailleur, …

On entre dans le capitalisme.
Les gens s’enrichissent.
Dans la hiérarchie sociale, le noble appauvri passe avant le riche commerçant.
Les riches personnages tentent d’acheter des terres et des titres de noblesse.
Louis XVI a par exemple anobli De Dietrich.
Dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789, les seules distinctions admises sont celles du mérite, du talent et du travail.

1er point : Les paysans et les domestiques

Le paysan n’est pas libre, il vit dans le cadre de la seigneurie.
Il doit respecter les règles de la seigneurie.
On ne peut pas utiliser la forêt quand on le souhaite, mais plutôt quand le seigneur le décide.
Les physiocrates préconisent de se moderniser.
Il faut encourager les cultures industrielles.
Cette école moderne veut briser les carcans.
50 % des terres appartiennent à des petits paysans.
L’autre moitié appartient à 10 % des français, « l’élite » :
La Noblesse détient 1/4 des terres, l’Eglise 15 %, et le reste appartient à la Haute Bourgeoisie.
Les paysans sont des petits propriétaires.
A côté de ces propriétaires, il y a les « salariés » (ce terme n’existait pas encore à l’époque).
On loue ces terres quand on en a beaucoup, on loue de la main d’oeuvre, des saisonniers,…
A côté de ces journaliers, il y a les permanents (Les serviteurs, les domestiques, les valets, les cuisiniers, …).
Ces travailleurs et travailleuses louent leur travail.
C’est du louage de service.
Le journalier est un travailleur temporaire.
Il est embauché à temps, à la journée ou à la saison.
Les domestiques sont souvent embauchés à l’année.
Ces travailleurs touchent des gages et non des salaires.
Il s’agit d’un petit salaire plus d’un petit supplément en nature.
Les avantages en nature sont principalement la nourriture et le logement.
Lorsqu’il les renvoie, le maître leur donne leur congé.
Le congé c’est le départ.
Aujourd’hui, on a des appareils ménagers, jadis, on avait du personnel.
Les domestiques sont nourris, logés, embauchés à l’année par reconduction tacite.
On peut les assimiler à la famille.
Les domestiques ont parfois signé un contrat écrit devant notaire mais c’est plutôt rare.
La plupart du temps, il s’agit d’un contrat verbal.
Une infraction commise par un domestique plutôt que par une personne étrangère au domaine est plus sévèrement punie.
Les domestiques sont révocables « ad nutum » (Sur un signe de tête).

2ème point : Les travailleuses de la maisonnée :

dans beaucoup de pays, les femmes travaillent.
Aujourd’hui, les femmes font de plus en plus de métiers d’homme.

3ème point : Les travailleurs de l’industrie.

Un ouvrier, c’est quelqu’un qui vit de sa force de travail, de ses bras.
C’est celui qui subsiste au jour le jour avec un salaire.
C’est une personne qui est dépendante.
L’ouvrier du XVIIIème siècle n’est pas encore bien détaché du monde du travail.
Il y a très peu d’ouvriers à 100 %.
Ils ont souvent une double activité
Les travailleurs à domicile travaillent plus dans l’industrie.
C’est le « Verlag system » ou le « Domestic system ».
Le « Verlag system » ralentit l’exode rural.
La mutation industrielle n’a lieu qu’au XIXème siècle,
le travail à la maison se fera à la ville.
Dans la société industrielle, ce sont les travailleurs qui vont à l’usine.
Dans la société agricole, c’est l’usine qui vient à la campagne.
On a appelé le « Verlag system » le système de la manufacture ouverte.
Ceci s’oppose à la manufacture fermée, c’est-à-dire un lieu clos.
Dans ces manufactures, il y a 2 types d’ouvriers :
– Les ouvriers internes et,
– les ouvriers externes (les intérimaires, les saisonniers, …)
Le rythme industriel est régi par le régime des eaux (Exemple : moulins).
Il y a un droit de marchandage ou d’équipe.
C’est-à-dire que le maître de forge donne une enveloppe à plusieurs chefs d’équipe qui font un peu ce qu’ils veulent en tant qu’ouvriers.
Le droit de marchandage est aboli en 1848.
Dans les ouvriers externes, on trouve souvent des enfants (13-14 ans par exemple).
La main-d’oeuvre enfantine, c’est de la main d’oeuvre auxiliaire, c’est-à-dire d’aide.
Parmi les ouvriers externes, il peut également y avoir des spécialistes (ouvriers souffleurs).
Les sidérurgistes allemands et autrichiens sont très disputés.
Ce sont eux qui permettent d’introduire de nouvelles techniques.
L’autre main-d’oeuvre, c’est la main d’oeuvre interne.
Comme ils sont permanents, cela signifie que les ouvriers internes sont des ouvriers qualifiés.
Eux ont droit à un contrat de travail souvent notarié.
Plus le métier est qualifié, plus on utilise l’écrit notarié.
Ces ouvriers très qualifiés ont des contrats à long terme et ont un bon salaire.
Il s’agit d’un salaire fixe avec un supplément à la pièce.
Souvent, ces suppléments à la pièce sont des avantages en nature.
Souvent le contrat va prévoir des secours si par exemple le conjoint décède.
C’est une façon pour les patrons d’attirer les ouvriers.
Le milieu des ouvriers qualifiés est très fermé.
Les gens de ce milieu sont endogames.
Il s’agit d’une véritable aristocratie ouvrière avec ses usages et ses traditions.
C’est ce milieu qui va subir le choc de l’industrialisation puisqu’ils vont être remplacés par les machines.
En fait, dans ce milieu, on reste en famille.
Le patron mange avec ses ouvriers, c’est le paternalisme.
On estime à 1 500 000 (au sens large) le nombre d’ouvriers à la Révolution.
Il y a déjà quelques villes ouvrières.
A Lyon, il y a 100 000 ouvriers.
A Lille, il y a 7000 dentellières.
A Sedan, il y a beaucoup d’ouvriers.
Le nombre d’ouvriers est un danger puisqu’ils peuvent manifester.
On voit donc apparaître les premières réglementations policières.
A l’époque, on envoie la troupe et on n’hésite pas à tirer.
A partir de 1770, il y a de mauvaise récoltes, ce qui entraîne la disette, la famine.
La guerre enlève une partie du chômage.

SECTION 2 : Le travail organisé, les corporations.

Le phénomène reste assez marginal.
Ce système des corporations a sa logique :
Travail encadré, hiérarchie, autorité, … il s’agit d’un groupe clair.

Paragraphe 1 : Les origines des corporations.

Au XIème, XIIème siècle, c’est le renouveau des villes.
Dans certaines villes et, en particulier dans l’Est de la France, les corporations forment des collèges électoraux qui désignent les magistrats qui dirigent la ville.
Les villes sont dirigées par les mêmes familles économiques.
Les puristes ont voulu faire un classement des corporations.

Les catégories de corporation :

Ce sont des catégories générales.
Il n’y a pas d’organisation uniforme, il y a des variantes.
Dans cette organisation des métiers, on observe 2 catégories :

A) Les métiers jurés ou les jurandes (définition universalis).

Les métiers jurés qu’on appelle confréries, guildes, ou bannières, sont caractérisés par leur autonomie d’organisation.
Ces métiers se sont auto-organisés.
Pour accéder aux métiers, il faut être agrée par tous les autres membres de la jurande.
Lorsque l’on est accepté, il faut prêter serment.
Le serment est la cohésion institutionnelle, mais aussi la cohésion morale.
Ces métiers jurés, aujourd’hui, on les retrouvera dans l’ordre des médecins, l’ordre des avocats, …
Sous l’Ancien Régime, les avocats font partie d’une conjuration et les médecins ont une déontologie.

B) Les métiers réglés.

« Réglés », cela signifie qu’ils sont organisés et contrôlés par l’autorité publique.
Ici, L’autorité publique impose des statuts.
Dans ces métiers, l’accès est en général obligatoire.
Ici, il n’y a pas d’autonomie.
Il y a une tutelle de l’autorité publique.
Ces métiers réglés n’ont pas la personnalité juridique.
Ce ne sont pas des PM.
Ils sont représentés par les villes.
Dans le sud de la France, l’identité municipale est très forte ( donc pas de PM).

C) Les métiers libres.

Lorsqu’il n’y a pas de conditions d’entrée et pas d’organisation, le métier est dit « libre ».
Il existe également des métiers réglés qui ont aussi des serments, ce sont des métiers mixtes.
La classification de ces métiers peut donc être remise en cause.
Les métiers jurés sont sous le contrôle politique de l’intendant.
A côté de ces catégories classiques (jurés, réglés et libres) que fait la monarchie dans cette réglementation des corporations ?
La monarchie est favorable aux corporations.
Elle favorise l’organisation des métiers puisque ceci permet de contrôler les métiers et ce, toujours sous la tutelle de l’Etat.
Louis XIV avec Collbert a ainsi voulu généraliser les corporations.
Or, dans les villes, les différents métiers n’ont pas voulu et la monarchie n’a pas pu généraliser le modèle des corporations.
Il y a plein de métiers qui ne sont pas organisés.
Ce sont, en général, les « petits boulots ».
A côté de ces petits métiers que l’on va réglementer avec la police, il faut aussi évoquer les enclaves urbaines.
Celles-ci avaient un statut particulier et bénéficiaient d’un droit particulier
A Paris, le quartier Saint-Antoine était une enclave qui échappait aux corporations et aux taxes municipales.
Dans ces enclaves, les artisans s’installaient.
Aujourd’hui, on pourrait parler de « zones franches ».
A Saint-Antoine, il y avait plus de 900 menuisiers, plus de 1000 cordonniers, des fabricants de bas,…
A côté de ces zones franches, il faut également évoquer le commerce forain qui est libre.
Les forains vont de ville en ville vendre leurs marchandises.
Il y avait également des métiers mobiles comme les transporteurs.
Il y avait aussi les métiers privilégiés.
Les fournisseurs du roi ont le privilège d’échapper aux corporations, mais pour cela ils doivent payer le privilège.
Le roi accorde également des privilèges à des inventeurs.
Les manufactures qui ont des privilèges donnés par l’Etat échappent également aux corporations .
Ces privilèges sont donnés par le roi dans le but de développer un secteur économique.
Il y a les mines, les manufactures de porcelaine,…
On peut citer également les compagnies de commerce coloniales.
A la fin de l’Ancien Régime, les distinctions juridiques s’estompent.

Paragraphe 2 : Organisation et compétences des corporations.

Comment marche une corporation ?

Chaque corporation dispose d’un statut.
Le statut a pu être crée à l’origine par les artisans et les commerçants et il a par la suite été homologué par les juges royaux pour être reconnu.
Dans ces statuts, on trouve de tout.
On peut trouver des règles disciplinaires.
Dans ces corporations, on y voit plusieurs phénomènes:
– La direction.
– Les privilèges.
– Le contrôle des métiers.

1) La direction et la nomination des maîtres.

Tous les adhérents participent et votent.
On va qualifier cela de système démocratique.
Les corporations se sont hiérarchisées de manière très stricte et ces transformations ont assuré la domination des maîtres.
Il y a les maîtres, les compagnons et les apprentis.
Cette hiérarchie s’est figée et au XVIIème siècle, les apprentis et les compagnons ne votent plus pour élire les dirigeants.
Dans la corporation, il y a l’assemblée générale et le bureau.
Au début, l’assemblée générale réunissait tout le monde.
L’assemblée générale a pour fonction d’élire les dirigeants, de notifier les statuts, …
Au XVIIème siècle et au XVIIIème siècle, l’assemblée générale devient l’assemblée générale des maîtres.
Elle devient par la suite une réunion annuelle où tous les maîtres se retrouvent souvent et où cela se finit par un banquet.
Au XVIIIème siècle, toutes ces décisions doivent être approuvées, soit par le pouvoir politique, soit par la ville, soit par le roi ou leurs représentants.
La fonction de l’assemblée générale est de désigner les dirigeants, c’est-à-dire le bureau de la conjuration.
Les personnes élues sont des jurés, des prud’hommes, des syndics, des gardes, des maîtres-gardes, le numéraire suivant la religion,…
Souvent, ils sont élus pour un an.
Le renouvellement se fait en principe, par 1/3 (une partie tous les ans).
Les familles principales ont phagocyté les corporations.
Ceci renforce le caractère corporatiste (fermé) de la corporation.
Souvent, ceux qui dirigent la ville (Les conseillers municipaux) sont les mêmes personnes qui dirigent les corporations.
On contrôle les brevets, les marques, les marchandises.
La finance et la discipline sont gérées de façon courante.
Il y a un arbitrage dans les corporations.
« On lave son linge sale en famille ».
Le registre est contrôlé par l’autorité publique.

2) Les privilèges des corporations.

Les corporations ont un rôle d’intérêt général.
Elles exercent des missions de service public.
C’est pour cela que le roi leur donne des privilèges.
Il y a une tutelle de plus en plus serrée de la part de la monarchie sur les villes et les corporations.
Puisque le roi leur accorde des privilèges, la corporation a aussi le privilège d’être la représentante officielle de la profession auprès de l’administration et du roi.
Lorsque le roi veut négocier avec les différentes branches de métier, les corporations ont le monopole.
Le roi doit négocier avec les corporations.
Le roi confie aux corporations des missions de services publics.
A Paris, les corporations ont le monopole la police de la navigation.
Elles touchent les taxes et les amendes.
C’est une sorte de délégation de service public.
Le roi a très peu de fonctionnaires, il préfère déléguer.
Les épiciers de Paris sont la police des poids et mesures.
Ils vérifient les étalons : C’est l’étalonnage.
Dans les métiers dangereux, les corporations participent à des missions d’ordre public.
Ce sont, par exemple, les bijouteries, les orfèvres, ils sont obligés de tenir un registre des clients.
Et ce pour éviter le recel.
Dans d’autres domaines, il y a le registre hôtelier, le registre des voyageurs, …
On va par exemple, confier à la corporation des maçons la mission de service public d’alignement des rues.
A la corporation des libraires, on va déléguer la censure.
Le roi peut aussi demander aux corporations le service militaire (1 ou 2 soldats à fournir par corporation).
Le roi peut demander aux corporations des contributions volontaires (Exemple : faire des dons).
Les corporations participent à la levée des impôts.
Pour exercer leurs missions de service public, on leur donne des privilèges.
Bien entendu, il y a toujours une tutelle du pouvoir royal.

3) Le rôle de la corporation : le contrôle du métier.

Le contrôle du métier reste une mission de droit public.
Sa mission d’intérêt général est de contrôler le métier.
Produire des produits de bonne qualité, c’est une mission d’intérêt général.
La philosophie de l’Ancien Régime est marquée par la conception chrétienne du travail.
On travaille pour le bien commun, pour le bien de tous.
On interdit la grève parce que cela empêche par exemple le client d’utiliser le service public.
Les corporations exercent un monopole.
Et la contrepartie du monopole, c’est l’interdiction de faire grève.
On va donner des prérogatives.
La 1ère prérogative, c’est celle qui sert à la qualité du produit.
La marque, la « trademark », c’est la garantie de qualité.
A Besançon, la corporation des cuirs contrôle les importations.
Les marques et poinçons sont des choses publiques qui appartiennent à la puissance publique.
Le monopole, c’est une garantie de la qualité.
Le contrôle de la qualité est effectif.
Les jurés ont un droit de visite.
Ils inspectent les ateliers de production.
Le droit de visite va jusqu’au droit de perquisition au domicile de l’artisan.
Les jurés ont le pouvoir de saisir les biens, prononcer des amendes.
Les chambellans sont les travailleurs au noir.
Tous les conflits sont arbitrés par le bureau et à défaut, par la juridiction de police de droit commun.
Les contrôles se font également sur les marchés.
Ceci permet de contrôler les forains.
Pour mieux organiser les contrôles, on crée des Halles.
On s’occupe également des matières premières.
A chaque opération, il y a des taxes.
On répartit la pénurie en contrôlant l’approvisionnement des matières premières.
Dans les corporations, on embauche les jeunes diplômés.
Le nombre d’employé est limité.
Souvent, le nombre d’ouvriers ou d’employés est contingenté.
Pour chercher du travail, on s’inscrit sur le registre des recherches d’emplois de la corporation.
Le bureau de la corporation est un organe disciplinaire.
Tout ceci se fait au nom de la qualité.

II : La mutation libérale : c’est la Révolution.

La Révolution financière instaure un ordre juridique libéral.
Il y a mutation libérale notamment du point de vue politique : On quitte la monarchie, l’Ancien Régime.
L’Etat libéral est celui qui protège les libertés, c’est l’Etat non interventionniste.
Cette mutation libérale correspond également à une mutation socio-économique.
On accède à la Révolution industrielle qui commence vers 1820-1830, la Société est troublée.
Il y a des émeutes.
A cela s’ajoutera un climat de guerre (guerres révolutionnaires, guerres napoléoniennes,…).
Les guerres ont un impact sur l’économie.

SECTION 1 : La revendication libérale.

Le siècle des lumières est le siècle de la liberté :
– Liberté politique contre la monarchie.
– liberté sociale : Les gens s’émancipent des tutelles traditionnelles.
– La laïcisation de la Société commence déjà.
– Liberté économique : Le monde du travail revendique cette liberté économique, car selon certain un individu libre est un individu épanoui.
– La liberté contractuelle.
On commence à discuter de questions économiques.
Montesquieu, Diderot, Rousseau, Voltaire, ont des notions économiques.

Paragraphe 1 : Les physiocrates ou le travail de la terre.

Selon eux, la richesse est produite par l’agriculture.
L’industrie, c’est la transformation, l’agriculture, c’est la production nette.
Donc, pour eux, l’agriculture seule crée.
En conséquence, ils préconisent donc d’encourager ce secteur et indiquent que le rôle de l’Etat est de favoriser le paysan.
Pour eux, améliorer la production agricole, c’est intégrer la nouvelle culture (pommes de terre, le nouveau maïs, les plantes fourragères, …)
Les physiocrates disent qu’il est possible de changer le rythme agricole.
Exemple : Planter de la Luzerne.
Ils insistent sur le fait qu’il faut sélectionner les races de bétail.
Plus le paysan est riche, plus il achète, plus la machine économique tourne et donc, plus il y a d’activité économique, plus il y a de taxes.
Pour stimuler le paysan, ils estiment qu’il faut le laisser libre de cultiver ce dont il a envie.
Il faut abroger les droits seigneuriaux, les droits de douanes, …
Les physiocrates pensent qu’il faut supprimer les corporations.
Cela libérera les travailleurs, en conséquence ils travailleront plus.
Cette volonté économique doit avoir une traduction juridique.
Il faut créer un nouveau droit du travail : « laisser-faire », « laisser passer ».
Pour les physiocrates, seul un pouvoir fort peut faire réforme.
Ils souhaitent des despotes éclairés.
(Voltaire est favorable aux despotes éclairés).
« Seul un despote éclairé peut imposer la tolérance car le peuple est intolérant. »

Paragraphe 2 : Les libéraux et les philosophes.

L’école libérale française existe bien avant l’école libérale anglaise.
Vaubans est un réformateur un peu libéral pour son époque.
Bois-Guilbert qui est un économiste s’oppose à la politique protectionniste de Colbert.
Il est pour une liberté des échanges.
Ce libéralisme est repris par les philosophes : « L’Homme est né libre. »
« Les Hommes sont libres et égaux. »
Ils sont donc libres de travailler.
On prépare la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.
« Un homme libre travaille pour vivre et nourrir sa famille. »
L’Histoire a créé avec le temps des corporations, des réglementations, mais ce sont des produits de l’Histoire.
« Naturellement, l’Homme est libre de travailler. »
On proclame donc en 1789 les Droits Naturels de l’Homme.
Il faut alors supprimer les taxes, les monopoles, les privilèges, …
Il y a également un libéralisme anglais.
Ce libéralisme anglais a pour grand maître John Locke.
Pour lui, le travail est la source de la richesse et de la propriété.
« La propriété est le fruit du travail. »
« Il faut laisser l’Homme maître de son intérêt. »
Ici, on voit un individualisme anglais : « L’Etat n’a pas à s’occuper des individus. »
Pour les français, l’Etat doit quand même intervenir sur les individus.
Le roi protège la veuve, l’orphelin et les pauvres.
Les français sont catholiques et non protestants comme les anglais.
Le protestant est seul face à Dieu, le catholique se réfère au pape.
La liberté économique entraîne l’inégalité économique.
C’est le risque à assumer.
Pour les anglais, c’est la liberté au prix du risque de l’inégalité.
Adam Smith est un grand penseur économique.
Il présente comme idée la division du travail.
Il faut un marché libre donc une liberté du travail.
C’est notamment la liberté contractuelle en matière de travail.
Les anglais sont les apôtres du « moins d’Etat ».
Pour eux, l’Etat sert à la police et à la justice, c’est l’Etat gendarme.
Il n’a pas à intervenir dans les autres domaines.
Ce discours n’est pas limité à l’élite.
Les ouvriers ne sont pas défavorables à l’idée de liberté.
Au sein du milieu ouvrier, il y a une revendication libérale.
Le monde patronal ou une partie de celui-ci est sensible à la liberté, à la concurrence.
Il y a des secteurs modernes, inventifs.
En revanche, d’autres sont contre cette liberté, contre la concurrence.
Le monde politique n’est pas insensible à ce débat d’idée.
La question qui se pose à l’Etat, c’est la réforme.
Beaucoup de Hauts-Fonctionnaires ainsi que les conseillers du roi ont compris qu’il faut des réformes libérales.
Faut-il une rupture ou non ?
La réforme sera-t-elle acceptée ?
La réforme va générer des tensions sociales.
Cela entraîne la nécessité d’un pouvoir politique fort.
Louis XVI n’a pas la force de Louis XIV et dès les années 1760 il y aura des réformes économiques.
La grande réforme sera la libération du commerce des grains.
La question qui se pose alors est de savoir s’il faut supprimer les corporations.
Le problème sous-jacent est la liberté du travail et de l’industrie.
Ainsi va intervenir Turgot.

SECTION 2 : Turgot et la crise des corporations.

L’arrivée de Louis XVI est un soulagement parce que la France attend tout de ce jeune roi.
Louis XVI est conscient de la nécessité de réformer le pays.
Il va appeler un homme éclairé : Turgot, en tant que contrôleur général des finances.
Il a mis en oeuvre des réformes.
Pour Turgot, il faut libérer l’économie de ses carcans pour la stimuler et ainsi, les caisses de l’Etat seront plus remplies.
Pour le secteur agricole, l’édit du 13 septembre 1774 pose le principe de la liberté du commerce des grains.
Pour le monde de l’artisanat, Turgot envisage la suppression des corporations.

Paragraphe 1 : La liberté du commerce et de l’industrie.

Ce sera celle que l’on retrouvera pendant la Révolution.
Le préambule s’assoit sur l’idéologie que le travail est un droit naturel à l’Homme.
C’est le discours de John Locke.
« C’est Dieu qui nous a donné la faculté de travailler. »
« Dieu a fait de nous des travailleurs et des travailleuses. » Or cette faculté est entravée par des institutions, des usages, des coutumes et des réglementations.
Si l’on veut revenir à la nature, il faut supprimer les entraves.
Parmi les entraves, il y a les corporations (taxes, droit d’entrée dans les corporations,…).
Pour limiter l’accès à un métier, il faut des diplômes.
On appelait cela l’esprit de monopole.
On exclut les jeunes de l’apprentissage.
Exemple : Pour être brodeuse, les femmes doivent montrer « patte blanche ».
Exclure les femmes du travail, revient à les conduire directement à la débauche et à la misère.
Le consommateur aura le libre choix grâce à la concurrence.
Le marché s’autorégule de lui-même en enrichissant les meilleurs.
« La liberté du travail, c’est d’abord la liberté d’entreprendre. »
Il y a dans ce discours un certain dogmatisme.
« Du passé faisons table rase ».
Il y a la liberté d’établissement, d’installation, à la seule condition de s’enregistrer au registre du commerce et des sociétés (RCS).
Tout entrepreneur pourra ouvrir une entreprise sauf exception.
Les imprimeurs vendent des écrits et les écrits sont dangereux.
Les métiers à danger sont soumis à autorisation.
Ce sera également le cas pour les orfèvres et les pharmaciens qui vendent des produits dangereux.
D’après Saint Thomas d’Acquin, « La liberté, c’est l’ordre juste. »
« La liberté n’est pas la licence.
Dans chaque ville, la discipline professionnelle sera confiée à des syndics de métiers.
Si l’on donne la liberté au sujet du droit du travail, l’article 14 interdit les associations professionnelles afin que les corporations ne renaissent pas sous une autre forme.
C’est l’interdiction des associations professionnelles des maîtres, des compagnons et des apprentis.
On retrouvera cela dans la loi Le Chapelier, dans le code civil et le code pénal.

Paragraphe 2 : l’échec de Turgot.

L’édit de Turgot est accueilli de manière assez ambiguë.
Il y a une réaction hostile des élites et des maîtres.
Or ceci a maintenu la discipline, la morale.
Les ouvriers sont heureux.
Dans cette opposition on remarque l’attachement des traditionalistes à la tradition.
Les corporations vont faire pression sur les parlementaires.
Le discours des corporations est un très beau discours :
« Les corporations agissent pour le bien commun, il y a de la discipline, de l’ordre et de la qualité au niveau des produits.
« Elles sont au service de l’intérêt général.
Les corporations disent que la liberté, entraîne une mauvaise qualité des produits.
Pour garantir la qualité, il faut une réglementation.
Ce discours de défense de l’ordre social est repris par les bourgeois, les élites.
La défense de l’ordre social, on la trouve également dans les remontrances du Parlement.
On dénonce l’égoïsme, l’individualisme.
L’ordre social est aussi un ordre moral.
Or la liberté porte atteinte à l’ordre social donc à l’ordre moral.
Supprimer les corporations, les maîtrises, revient à supprimer le droit de propriété.
En faisant cela, on viole le droit de propriété des maîtres.
Le parlement propose par conséquent de réformer les corporations plutôt que de les supprimer et d’ouvrir certains métiers aux femmes.
La Noblesse et les maîtres n’ont pas les mêmes valeurs, mais ils ont la même idée : L’attachement aux privilèges.
Il faut organiser un « lit de justice » pour enregistrer l’édit et ce par la procédure de l’enregistrement forcé.
Ceci est une « victoire à la Pyrrhus » pour Turgot.
Au mois d’août 1776, Turgot est obligé de démissionner.
Il emporte dans sa chute sa réforme.
Le successeur de Turgot rétablit les corporations tout en les réformant.
Il simplifie l’accès aux métiers, il supprime l’obligation du chef d’oeuvre et il diminue le nombre des corporations.
(De 113 corporations à Paris, on passe à 44).
Le contrôle de l’Etat sur les corporations est renforcé.
En rétablissant la corporation, on rétablira la discipline et l’ordre.
On nomme un nouveau contrôleur général des finances.
Ce contrôleur général des finances a un directeur du trésor qui s’appelle Jacques Necker.
Jacques Necker envisage la reprise en main ferme de l’économie par l’Etat.
Necker est prudent au niveau des réformes.
Les nouvelles corporations sont instaurées à Lyon en 1777.
A Metz, c’est en 178, en Lorraine en 1779,…
Necker négocie avec les métiers et leurs statuts.
Le temps faisant, on entend certains dire qu’il faut rétablir la liberté du commerce et de l’industrie.
Dans le textile, ils estiment que la liberté est bénéfique pour eux.
A la veille de la Révolution, 2 doctrines s’opposent :
– D’un côté, l’économie et le travail libéral.
– D’un autre côté, l’économie et le travail organisé.
Le problème de Necker est qu’il ne tranche pas entre les 2 systèmes.
La question n’est pas économique, elle est sociale et politique.
L’enjeu est global et non pas strictement économique.
Pour résoudre la crise, il faudrait un roi réformateur et fort.
Or Louis XVI est un roi réformateur mais faible.

SECTION 3 : La Révolution et la liberté du travail.

L’enjeu est la réforme du pays.
C’est pour cela que Louis XVI convoque les Etats Généraux.
Durant ce débat électoral, on proclame la liberté de la presse et la liberté de parole.
Les cahiers de doléances sont la synthèse de l’opinion des français.
En 1787-1788, il y a eu de mauvaise récoltes, c’est la disette.
En conséquence, le prix du pain a fortement augmenté.
Cette disette et aussi accompagnée d’une crise industrielle que l’on peut analyser en 2 points.
– Crise du textile du fait du traité de libre-échange signé avec l’Angleterre en 1786.
En Normandie, 70 % des exploitants de textile sont au chômage.
– Crise artisanale et industrielle due à l’appauvrissement de la paysannerie.
(Quand les paysans sont appauvris, ils commercent moins.)
Dans les villes, on revendique un système d’assistance sociale.
On déplore dans les cahiers de doléances que le prix du blé ait augmenté de 150 %.
En outre, les taxes ont également augmenté.
Certains se disent alors que la liberté du commerce n’est pas une mauvaise idée :
« La liberté du marché rend le marché plus fluide. »
Les cahiers de doléances permettront au monde du travail de dénoncer les prélèvements vexatoires. Exemple : La corvée.
En ville, le monde ouvrier critique l’autorité des maîtres.
Certaines corporations sont pour l’ouverture.
Le monde industriel (les manufacturiers) a des revendications contradictoires.
Les manufacturiers demandent des taxes et des limitations vis-à-vis des produits anglais.
D’autres demandent la liberté d’exporter.
Ce climat de difficultés économiques, sociales et politiques, dure.
L’été 1789 est celui des grandes réformes.
C’est la guerre en 1792 et 1793 qui permet de remettre la France au travail.
Les manufactures textiles et d’armes vont réembaucher.
La Noblesse accepte d’abolir les privilèges pour tenter de calmer le peuple.
En juillet 1789, les paysans attaquent les châteaux, c’est la « Grande Peur ».
Pour les petites gens, lorsqu’il y a une hausse des prix, on parle de spéculations, de complots,…
A la Révolution, il y a de grands principes juridiques :
– Liberté,
– Egalité,
– Propriété, …
– La fraternité (Ce grand principe sera dégagé en 1848, pas à la Révolution de 1789).
Il y a la liberté politique, juridique (égalité des droits), contractuelle, la liberté de culte, la liberté contractuelle, …
Il n’y a plus d’ordre, plus de Noblesse, plus de privilèges.
En 3 semaines, on a totalement révolutionné l’ordre social.
Les corporations vivaient à travers les privilèges, donc sans privilèges, les corporations n’ont plus de raisons d’être.
L’égalité devant la loi est une égalité civile et n’empêche pas l’inégalité sociale.
Aujourd’hui, on recherche l’égalité sociale et, pour ce faire, il y a une inégalité juridique.
La propriété est le fondement de l’ordre social.
« L’Homme a vocation à devenir propriétaire en son travail.
On supprime le droit d’aînesse en établissant l’égalité successorale.
De même, en favorisant la propriété, on va partager les communaux.
On autorise alors les paysans à clore leurs champs.
En 1791, le code pénal pose l’égalité des peines.
« On est tous égaux devant la loi. »

Paragraphe 1 : Le décret d’Allarde.

Le décret d’Allarde date du 17 mars 1791.
Ce décret est la réponse à un problème de l’époque.
Au printemps 1791, à Paris, il y a du chômage.
On demande un programme économique en faveur des salariés.
Ils réclament un travail, une augmentation du salaire et un minimum.
Ils vont voir le maire de Paris, Bailly.
Ils demandent au maire de faire une réglementation municipale.
Effrayée par l’agitation, la mairie de Paris ordonne la répression des manifestations.
Dans le même temps, on comprend qu’il faut faire quelque chose.
On va instaurer la liberté du travail :
On va supprimer officiellement les corporations.
On retrouve les mêmes arguments que Turgot.
L’autre motivation est fiscale :
Depuis la fin des privilèges, « on ne sait plus qui fait quoi. »
Un décret est proposé par d’Allarde qui est membre de la commission économique.
En échange de la liberté du travail, ce décret stipule que les artisans et les boutiquiers, devront payer une taxe :
Ce sera la patente (l’ancêtre de la taxe professionnelle).
Le décret d’Allarde abolit définitivement les corporations (Article 3 du décret).
A compter du 1er avril 1791, le travail est libre (on doit payer la patente).
Il y a des exceptions :
– Les fonctionnaires ne payent pas la patente.
– Les agriculteurs non plus (Il ne faut pas trop taxer les paysans, car ce sont eux qui nourrissent le peuple).
– Les indigents sont exemptés.
– Les salariés ne la payent pas non plus.
– Les vendeurs ambulants travaillant partout, ils ne payent pas la patente non plus.
En revanche, ils payent le droit de marché à l’endroit où ils font commerce
La patente dépend de la valeur locative.
– Les boulangers payent à 50 % la patente.
Le décret d’Allarde a permis de mettre un certain nombre de règles dans ce « no mans land » juridique.

Paragraphe 2 : La loi Le Chapelier du 14 juin 1791.

Ce sont les circonstances qui décidèrent le législateur à créer cette loi.
Il y a un manque de pain.
Le pouvoir politique se méfie des attroupements, des rassemblements.
Cette loi Le Chappellier est le 2ème grand principe, c’est-à-dire l’interdiction des regroupements des associations professionnelles.
On craint de voir se rétablir le corporatisme.
(cf article 1 de la loi le Chapelier.
On interdit les coalitions.
Lorsque plusieurs personnes se regroupent, on parle d’entente et notamment d’entente illicite (Article 2)
Le grand principe posé par la loi Le Chapelier, concernant la liberté des associations professionnelles, durera jusqu’en 1884.
Pas d’association, pas de regroupement.
Avec cette loi, on pose également la non-intervention de l’autorité publique dans le jeu économique (Article 5).
Une municipalité ne peut pas fixer un prix maximum.
Les contrevenants s’exposent à des sanctions pénales.
De cette interdiction des coalitions, se déduit l’interdiction du droit de grève.
Jusqu’en 1864, il y avait une pénalisation du droit de grève.
Ces 2 lois (Allarde et Le Chapelier) ont souvent été critiquées.
L’économie libérale qui se développe au XIXème siècle est un système capitaliste.
Le législateur révolutionnaire va également supprimer les douanes intérieures.
Maîtres et ouvriers doivent négocier librement.
Dans le nouvel ordre dont relèvent les révolutionnaires, il n’y aura pas d’intermédiaires, il n’y aura pas de communautés.
On admet seulement la Nation et l’individu.
Ces 2 lois seront dénoncées au XIXème siècle par Karl Marx.
Karl Marx parle pour la loi Le Chapelier de « coup-d’état bourgeois ».
D’Allarde et Le Chapelier ont un idéal émancipateur.
Ils veulent sortir le monde du travail du carcan des conjurations.
C’est le principe de l’autonomie de la volonté.
L’individu négocie seul ses intérêts : C’est l’égalité des chances.
Ce ne sont pas des lois sociales.
On imaginait à l’époque construire une Société meilleure, individualiste, mais à l’époque on connaissait peu de choses sur l’économie.
L’économie était un monde mystérieux.
A partir de 1792, on va rentrer dans une économie de guerre et on va retrouver l’interventionnisme de l’Etat.
Il s’agit d’une situation exceptionnelle.
Le problème, c’est que la guerre va durer longtemps : Cela va entraîner le désordre.

II : Le travail au temps des codes.

Ce qui préoccupe Bonaparte (futur Napoléon), c’est de remettre l’ordre en France.
A cette époque, il y a les balbutiements de l’industrialisation.
Le législateur n’a pas anticipé le développement industriel : Les codes ont une vision rurale, or le monde change.
Dans ces codes, il y a des règles qui concernent les travailleurs et les travailleuses, mais il n’y a pas de vrai code du travail.
Ces règles du travail existent accessoirement dans le code civil et dans le code pénal de manière éparse.
On les trouve également dans les lois annexes.
Le monde du travail est un monde d’usage.
Dans ces usages, on trouve l’embauche à l’essai, la suspension du travail en cas de maladie, l’apprentissage,…
On trouvera le droit du travail dans le contrat, notamment le contrat de louage.
Il y a des règles tacites, donc des usages.

SECTION 1 : Le droit du travail dans les codes.

Paragraphe 1 : La relation de travail dans le code civil.

Cela s’appelle un louage d’ouvrage et de service.
C’est un contrat.
« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. »
L’article 1779 du code civil définit les 3 types de louages.
On s’intéresse ici au louage de service.
Le code civil s’intéresse à la durée des engagements puisqu’il interdit l’engagement perpétuel.
Seul l’esclave est dans une relation d’engagement perpétuel.
On ne peut pas concevoir l’existence d’un contrat à durée déterminé.
Dans le code civil, l’article 1781 du code civil est relatif à la preuve des salaires.
« En matière de gage, le patron est cru sur son affirmation.
Ceci reprend un usage du monde de l’Ancien Régime.
L’explication est qu’un patron n’a pas pas intérêt à mentir puisque le salaire est dérisoire.
Si l’on n’admet pas la preuve orale, on aura recours à la preuve écrite.
Cependant, la plupart des contrats de louage sont verbaux.
La preuve se fera donc par témoin, par oral.
C’est pourquoi, pour éviter une bataille de chiffonnier, on va affirmer une présomption de vérité pour le patron en matière de salaire.
Cette présomption de preuve s’applique à défaut d’écrit.
A l’article 2101, il y a un privilège de l’ouvrier en ce qui concerne son salaire.
Il a une créance de salaire contre son patron (voir aussi article 2271 et 2272)
Le contrat de travail n’est pas un contrat comme les autres.
Petit-à-petit, la jurisprudence va égratigner la conception dualiste du contrat de travail.
Du louage de service, on parle dans les années 1860-1870 de louage de travail.
Le réglement d’atelier, c’est la loi de l’usine.
Il s’agit d’un réglement de discipline.
Le patron devient la législateur de son usine.
Il faut attendre un arrêt de 1870 de la cour de cassation pour savoir quelle est la nature juridique de ce réglement d’atelier.
Il s’agit d’un contrat d’adhésion.
Le règlement d’atelier est un document contractuel conventionnel.
En cas de violation du règlement d’atelier par l’une des parties, des dommages et intérêts sont alloués à la victime.
Le règlement d’atelier est une annexe du contrat de travail.
C’est le règlement d’atelier qui fixe le délai de préavis.
Les usages et les coutumes déterminent la durée de l’engagement.
Cela peut être au mois ou à l’année.
Un ouvrier agricole est embauché à l’année avec tacite reconduction.
Un saisonnier est embauché à la saison.
Plus on est qualifié, plus la durée de l’engagement est longue.
Les employés sont embauchés selon les régions, soit au mois, soit à l’année.
Les domestiques sont embauchés au mois.
La rémunération se fait en argent avec parfois des avantages en nature.
Les employés peuvent être payés à la journée, à la quinzaine, au mois, ou à l’année.
La mensualisation sera généralisée en 1968 et ceci est un luxe.
La courte durée correspond à un cycle économique.
Si le salaire était mensuel, le pauvre ferait crédit.
Mais l’on ne fait pas crédit aux pauvres.
Le salaire mensuel est imposé par l’Etat dans les marchés publics.
Les ouvriers des arsenaux de l’Etat sont payés à la quinzaine.
Le montant du salaire est librement négocié d’après le code.
Mais en pratique, c’est le patron qui l’impose.
Les créances de salaire se prescrivent en 6 mois (Article 2271).
C’est la coutume et les usages qui fixent les horaires de travail.
Jusqu’en 1830, on vit avec le temps.
Il y a une législation des jours fériés.
On est dans un pays chrétien :
la loi du 18 novembre 1814 interdit de travailler le dimanche, les jours fériés, et les jours de fêtes reconnus par la Loi.
En 1801, le dimanche était redevenu chômé avec le Concordat.
Sous la Révolution, on chômait le 10ème jour que l’on appelait le « Décadi ».
Ceci est décidé en 1793.
On abolit le calendrier Gregorien et on met en place le calendrier révolutionnaire ou Républicain.
C’est le Directoire qui avait obligé d’appliquer le Décadi.
Ceux qui travaillaient le Décadi payaient une amende, sauf pour le travail à domicile.
La Révolution a voulu redéfinir le temps.
Travailler le dimanche est un délit puni de 5 francs d’amende.
Les jours de fêtes reconnus par la loi sont au nombre de 4 :
– L’Ascension (Le jour de Pâques).
– L’Assomption (Le 15 août).
– La Toussaint (Le 1er novembre).
– Noël (25 décembre).
En 1810, le jour de l’an devient un jour férié reconnu par l’Etat.
Certains commerçants restent ouverts le dimanche.
Ces sont des exceptions légales.
Exemple : Cafetiers, les salles de jeux, …
Mais, on ne peut pas ouvrir pendant la messe.
Il y a également une exception pour les professionnels de santé et certains métiers.
Exemple : Le médecin, la poste, les pharmaciens, les entreprises de transports, les foires traditionnelles,…, travaillent le dimanche.
Les meuniers et les agriculteurs peuvent aussi travailler le dimanche dans certains cas graves.
Exemple : S’il y a Péril pour les récoltes.
Le 21 janvier est un jour férié, c’est la mort de Louis XVI.
Ce jour férié sera aboli en 1833.
La loi de 1814 sera définitivement abrogée en 1880.
La République est laïque: Il n’y a plus de dimanche obligatoire.

Paragraphe 2 : Le code pénal.

La relation de travail est une relation sociale.
Le code pénal de 1810 est le code d’un Etat gendarme.
Il rappelle les règles en cas de violation de ces règles, on est sanctionné.
Le droit pénal sanctionnera les atteintes à la concurrence.
Il y aura quelques délits économiques tels que la contrefaçon ou la divulgation des secrets de fabrication à une puissance étrangère.
Il y aura également une régulation des rapports entre patron et salariés.
A l’extérieur de l’usine, cela relève du droit pénal.
A l’intérieur de l’usine, cela relève du règlement intérieur.
Dans le code pénal, on va sanctionner le délit de coalition.
Il y a une continuité entre la loi Le Chapelier et le code pénal.
(loi du 22 germinal an XI relative aux manufactures et qui interdit les coalitions).
La coalition prend différentes formes :
C’est un terme générique et c’est volontaire.
La grève est un terme beaucoup plus restrictif.
La place de la grève est une place publique derrière l’Hotel de Paris.
Les ouvriers sans travail attendaient sur cette place.
Le mot « grève » apparaît dans un arrêté de 1805.
L’article 414 et l’article 415 du code pénal sont de très célèbres articles.
Le premier de ces articles sanctionne et punit les coalitions patronales.
On interdit le « lock out » et les « ententes illicites ».
Les coalitions patronales tendent injustement et abusivement, de manière concertée, à abaisser les salaires.
Les patrons qui réalisent des coalitions étaient sanctionnés d’une peine d’emprisonnement et d’une amende pécunière de 200 à 3000 francs.
L’article 415 interdit et punit les coalitions ouvrières, c’est-à-dire toute coalition ayant pour but de cesser de travailler, de suspendre, d’empêcher, ou d’enchérir les travaux.
S’il n’y a eu que tentative ou commencement d’exécution, 1 à 3 mois de prisons sont requis contre les participants.
Les meneurs, eux, seront punis d’1 an d’emprisonnement.
Si l’infraction a été consommée, les meneurs encourent de 2 à 5 ans de prison.
Les incriminations de l’article 415 sont plus larges que celles de l’article 414.
L’appel à la grève et la réunion préparatoire à la grève peuvent être sanctionnés.
Le patron est sanctionné de 6 jours à 1 mois de prison en cas d’appel à la grêve.
Alors que l’ouvrier, lui, est puni de 1 à 3 mois d’emprisonnement.
Cela s’explique par le fait que le patron doit diriger l’usine.
Le code ne parle pas des meneurs patronaux.
Cambacérès dit que toute coalition ouvrière constitue, pour ceux qui la forme, un état de révolte.
On peut constater qu’avec le temps, il y a de plus en plus de poursuites et de prévenus.
Exemple : De 1826 à 1830, on recense 32 affaires et 169 prévenus par an en moyenne.
Alors que de 1836 à 1840, il y avait en moyenne 69 affaires et 398 prévenus par an.
Il y a peu d’affaire au niveau national, on utilise le code avec parcimonie.
En 1864, Napoléon III abolit le délit de coalition.
Dans le code pénal, on interdit également les associations (Article 291 du code pénal).
Une association est une coalition institutionnelle, c’est-à-dire une coalition qui dure.
La coalition est par nature temporaire.
Les critères de la coalition sont :
– Elle doit regrouper plus de 20 personnes.
– Il doit y avoir des réunions périodiques pour parler de religion, de littérature, de politique, ou d’autres choses.
Ces associations ne pourront se former qu’avec l’agrément du gouvernement et aux conditions que le gouvernement posera.
Les réunions de moins de 20 personnes sont elles, en principe libres.
Cependant, l’article 291 du code pénal interdit également les réunions non déclarées de moins de 20 personnes et les considèrent comme des réunions de familles ou d’amis.
En dessous de 20 personnes on peut en effet ne pas demander l’autorisation de se réunir, mais on peut être interdit de réunion si l’on est pris sur le fait.
Les contrevenants seront punis de peine d’amendes renforcées pour les meneurs.
Cet article a un régime de droit commun.
L’article 293 du code pénal permet de poursuivre les « cris séditieux ».
Tout appel public à la grève, à la révolte, à la rébellion est un délit.
Le mouvement associatif est ancien dans le monde du travail.
C’est parce que l’on travaille difficilement que l’on s’associe.
Pendant très longtemps, les ouvriers se sont réunis hors du cadre officiel, c’est-à-dire hors des corporations.
La fraternité est fréquente dans les milieux ouvriers.
Les travailleurs et les travailleuses se réunissent dans des compagnonnages (Des associations de compagnons).
Le pouvoir les tolèrent car l’on ne pouvait pas les interdire.
Ce système associatif du compagnonnage disparaîtra avec l’industrialisation.
Le pouvoir les sanctionnent quand il y a abus ou trouble à l’ordre public.
Le pouvoir tolère également les associations de secours mutuel.
Au contraire, il incite à la création de telles associations.
Il les tolère tant qu’ils ne font pas de politique, qu’ils ne complotent pas une grève, …
Si jamais ça dégénère, on sanctionne.
On est hors du cadre légal, mais le cadre légal sert uniquement à sanctionner les abus.
En droit pénal, il y a le principe d’opportunité des poursuites.
La loi du 10 avril 1834 modifiera le régime des associations, mais il faudra attendre la 2ème République pour revoir la question dans les débats.
L’inégalité juridique reflète l’inégalité sociale.

Paragraphe 3 : Le livret.

Pour contrôler les gens, il faut qu’ils aient tous des papiers.
Au début du XIXème siècle, la volonté du pouvoir, c’est de surveiller et punir.
Les papiers servent à prouver qui l’on est.
Dès que l’on quitte son canton, il faut un passeport intérieur.
Cette pratique existait sous la Révolution mais également sous l’Ancien Régime.
En effet, un texte de 1749 impose un usage :
On met en place le billet-congé.
Si l’on n’a pas ce certificat, on n’est pas demandeur d’emploi.
La loi du 22 germinal An XI réintroduit le livret ouvrier.
Tous les patrons ne pourront embaucher un ouvrier que si celui-ci à un livret.
Le livret est un certificat d’acquis.
La carte d’identité est imposée aux gens du voyage vers 1903.

 

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