Droit de la protection sociale

 Droit de la sécurité sociale / Droit de la protection sociale

   Le droit de la sécurité sociale est une branche du droit social (qui étudie le droit du travail et celui de la protection sociale), qui s’intègre à la notion plus large de protection sociale. Au sens général, la protection sociale vise à protéger les personnes physiques contre les risques sociaux susceptibles d’affecter leur capacité de gain.

 

Introduction

             La sécurité sociale est issue de l’ordonnance du 4 octobre 1945 qui comporte un exposé des motifs remarquable car il exprime à la fois les fonctions de la sécurité sociale et dessine le champ d’application de la sécurité sociale. Il permet de comprendre que le système de sécurité sociale a d’abord une fonction essentielle qui tient à garantir à chacun des moyens de subsistance quelques soient les circonstances auxquelles il sera confronté. On peut avoir l’impression que la sécurité sociale a une visée universelle mais cette approche est inexacte parce que l’exposé des motifs précise que la sécurité sociale s’adresse au travailleur et à sa famille. Cela signifie que la sécurité sociale n’est pas universelle mais au contraire, s’adresse à des personnes qui exercent une activité professionnelle.

 

Elle s’adresse à tous les travailleurs et est ancrée fermement à la référence à l’activité professionnelle. Ainsi, les circonstances que la sécurité sociale va avoir vocation à couvrir vont affecter la capacité de travail, elles vont empêcher le travailleur de travailler en lui faisant aussi perdre le revenu du travail qu’il percevait.  Voici le plan du cours :

 

Introduction

Chapitre I. Le champ d’application personnel du régime général

  • Section I – Les personnes assujetties au régime général
  • Paragraphe 1 – Les travailleurs dépendants
  • A) La subordination juridique comme critère décisif
  • B- La rémunération
  • C- Le contrat
  • Paragraphe 2- Les présomptions légales
  • A) La présomption de travail dépendant
  • B) La présomption de travailleurs indépendants (ou la présomption de non salariat)
  • Section II – Les personnes accueillies par le régime général
  • Paragraphe 1 – Les assurances volontaires pour les risques invalidités, vieillesse et AT
  • Paragraphe 2 – L’effort particulier réalisé en matière de santé
  • A) L’assurance volontaire et les risques maladie-maternité
  • B. L’assurance personnelle
  • C. La CMU
  • 1. La CMU de base
  • 2. La CMU complémentaire

Chapitre II. La couverture du risque professionnel

  • Section introductive. La genèse de la législation sur le risque professionnel
  • Paragraphe I)  L’inadaptation du droit de la responsabilité civile aux risques du travail
  • Paragraphe II. La formation d’un droit du risque professionnel
  • Section I. Les formes du risque professionnel
  • Paragraphe I. L’accident du travail
  • A. La notion de fait accidentel
  • B. Le caractère professionnel de l’accident
  • 1. La présomption d’imputabilité de l’accident au travail
  • 2. La preuve du caractère professionnel de l’accident
  • 3. L’accident de mission
  • Paragraphe II. L’accident du trajet
  • A. L’autonomie de l’accident du trajet
  • B. Le parcours protégé
  • C. Les modalités d’exécution du trajet
  • Paragraphe III. Les maladies professionnelles
  • A. Le système des tableaux
  • B. La preuve du caractère professionnel organisé par la loi du 27 janvier 1993
  • Section II. L’indemnisation du risque professionnel
  • Paragraphe I. L’indemnisation automatique et forfaitaire
  • A. Les prestations en nature 
  • B. Les prestations en espèce
  • Paragraphe II. Les répercussions des fautes sur les ATMP
  • A. La faute intentionnelle
  • 1. La définition de la faute intentionnelle
  • 2. Les conséquences de la faute intentionnelle
  • B. La faute inexcusable
  • 1. Faute inexcusable de l’employeur ou du substitué
  • 2. La faute inexcusable de la victime

Chapitre III. La couverture des risques sociaux

  • Section I. L’assurance maladie
  • Paragraphe I. Les prestations en espèce
  • A. Les bénéficiaires
  • B. Les modalités de versement des indemnités journalières
  • C. Les obligations de l’assuré social malade
  • Paragraphe II. Les prestations en nature
  • A. Les bénéficiaires
  • B. La physionomie des prestations en nature
  • 1. L’objet des prestations en nature 
  • 2. Les principes applicables aux prestations en nature
  • Section II. L’assurance maternité
  • Paragraphe I. Les prestations en espèce
  • Paragraphe II. Les prestations en nature
  • Paragraphe III. Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant
  • Section III. L’assurance vieillesse
  • Paragraphe I. Les prestations contributives
  • A. Présentation historique
  • B. La pension de retraite versée à l’assuré
  • 1. Les conditions de l’attribution
  • 2. Le montant de la pension de retraite
  • C. Les prestations versées en vertu des droits dérivés
  • Paragraphe II. Les prestations non contributives
  • A. L’existence d’un minimum vieillesse
  • B. Les prestations contribuant à garantir le minimum vieillesse
  • Section IV. L’assurance veuvage
  • Section V. L’assurance invalidité
  • Paragraphe I. Définition de l’invalidité
  • Paragraphe II. Catégories d’invalidités et prestations
  • Section VI. L’assurance décès
  • I. Le montant de la prestation
  • II. Les bénéficiares de ce capital décès

Chapitre 4 : les prestations familiales

  • Section 1 : les prestations familiales et les finalités de la politique familiale.
  • Section 2 : les règles communes aux prestations familiales
  • Section 3 : les régimes spécifiques des prestations familiales.

 

 

            Cette conception de la sécurité sociale n’est pas la seule possible. Lorsqu’on rattache la sécurité sociale à la qualité d’être humain, le droit à la sécurité sociale devient un droit de l’homme, ce qui n’est pas la conception retenue par le législateur en 1945. Le droit à la sécurité sociale est un droit reconnu à la personne qui travaille car elle est en mesure d’acquérir ce droit par le paiement de cotisations. Si la personne ne travaille pas, elle n’aura donc aucun droit à la sécurité sociale. Or, cette conception a été adaptée.

De plus, il est précisé que le résultat visé (assurer à chacun les moyens de subsistance) ne s’obtiendra qu’au prix de longues années d’efforts persévérants. Il faut donc organiser le cadre dans lequel se réalisera le plan de sécurité sociale.

 

            Il existait d’abord deux grands modèles en 1945 mais au-delà de ces deux grands idéaux, il existait déjà en France des ébauches de sécurité sociale (assurances sociales) fondées sur une conception socioprofessionnelle.

Avec Bismarck, seuls les salariés de l’industrie sont couverts par la sécurité sociale (champ d’application personnelle) et les risques sont les 5 principaux (champ d’application matériel). Des évènements portant atteinte à la capacité de travail de l’ouvrier sont visés.

La plupart des prestations de sécurité sociale cherchent à garantir au bénéficiaire un revenu qui remplace le revenu du travail perdu (indemnités journalières, indemnités de repos de maternité, pension de retraite). Toutes ces prestations sont des revenus de remplacement qui entretiennent un lien étroit avec le revenu du travail. D’ailleurs, la base de calcul est constituée par le salaire perçu donc il y a un rapport étroit entre le montant de la prestation et le montant du revenu du travail. C’est pour cela que l’on parle de garantie de revenu.

En revanche, les ressources renvoient à des subsides, c-a-d une somme qui permet de subvenir à ses besoins. L’objectif est plus modeste avec aucune référence au revenu antérieur car il peut ne pas exister. On désigne alors des prestations qui sont dépourvues de lien avec un revenu antérieur quelconque. Le but est de garantir la subsistance à une personne qui est dans le besoin. Le montant de ces prestations est fixé sans aucune référence au revenu professionnel antérieur. On parle alors de garantie de ressources. Dans le système de Bismarck, on est dans un système de garantie de revenu antérieur.

 

            Cependant, en matière de santé, Beveridge avait préconisé l’installation d’un système national de santé financé par l’impôt qui permettrait à chacun de recevoir les soins appropriés à son état. C’est un système qui a plutôt une nature universelle car chaque personne est visée, indépendamment de sa condition professionnelle. Il avait écrit un rapport en 1942 élaboré car en Angleterre, il existait déjà des assurances sociales qui étaient insuffisantes.

En dehors du système national de santé, il préconise le maintien d’assurances de base pour des prestations de base. Concernant le champ d’application personnel, il est plus ambitieux que Bismarck. Or, concernant le champ d’application matérielle, Bismarck est plus ambitieux car il se situe dans la logique du revenu de remplacement, c-a-d une connexion entre la prestation et le revenu antérieur perdu tandis que Beveridge parle de plancher (de base) donc la prestation qui sera versée n’a pas vocation à remplacer de manière très significative le revenu perdu, l’ambition est alors plus modeste. Il favorise seulement une base, un revenu minimum. La sécurité sociale doit donc être articulée et complétée par l’assurance privée.

 

            En France, à partir de 1930, on voit qu’un certain nombre de lois mettent en place des systèmes de couverture qui sont plutôt contributifs et plus proches du modèle bismarckien que du modèle beveridgien.

Avant 1945, il y a la loi du 9 avril 1898 sur les accidents du travail qui instaure une première couverture au profit des travailleurs qui sont en contact avec des machines dangereuses. Cette loi a son intérêt même si ce n’est pas une loi de sécurité sociale car elle organise une protection de type assurantiel contributif en faveur d’une catégorie de personnes exposée à un risque du fait de l’exercice d’une activité professionnelle. Cette loi met en place, à leur faveur, un dispositif qui va leur permettre de recevoir automatiquement des prestations quand le risque se réalise.

 

La loi du 5 avril 1910 instaure les premières retraites ouvrières et paysannes. Une catégorie particulière de travailleurs est identifiée (les ouvriers et les paysans). Ce sont des personnes qui, compte tenu du niveau de leur revenu du travail, n’ont pas véritablement des capacités d’épargne et pour lesquelles la fin de l’activité professionnelle est synonyme d’absence de ressources. Il s’agit de permettre à des personnes âgées d’obtenir un revenu de remplacement, une retraite, pour laquelle elles auront cotisé.

Durant cette même période, d’autres garanties vont s’organiser dans des secteurs particuliers (les mines, les sociétés métallurgiques, les compagnies de chemins de fer, les industries électriques et gazières, les agents de l’État). Dans ces secteurs d’activité particuliers, à l’initiative de l’employeur et parfois sous la pression d’organisations collectives de salariés, vont être mises en place des garanties sociales, des prestations sociales qui sont également construites sur le modèle des assurances sociales. On voit des prestations ayant une nature contributive, c-a-d que c’est l’effort de cotisation qui ouvre le droit à la prestation. La nature de l’activité professionnelle est également très présente car ce sont des catégories de personnes qui travaillent qui vont bénéficier de couvertures spécifiques.

 

En 1930, on découvre une couverture systématique d’une catégorie d’actifs avec une première identification de risques sociaux. Depuis, cette liste a très peu évolué : maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès. On voit combien la logique contributive est dominante et combien le rapport avec le travail est important. Le travail est la voie d’accès à l’assurance sociale et il intervient dans l’identification des risques qui ont vocation à être couverts.

Il existait un plafond d’affiliation qui signifiait que ces assurances sociales avaient vocation à s’appliquer en tout premier lieu à des personnes dont les revenus étaient inférieurs. Il s’agissait d’accompagner des personnes dans la couverture de certains risques qui n’en auraient pas forcément fait le choix compte tenu de leur faible niveau de revenu.

 

Depuis la loi du 11 mars 1932, il existe des prestations familiales qui sont les allocations familiales. Elles trouvent leur origine dans le sursalaire familial qui a été créé à l’initiative des employeurs. Certains étaient particulièrement réceptifs à une doctrine selon laquelle chacun doit pouvoir faire vivre sa famille grâce à son travail. Ainsi, les employeurs ont créé les sursalaires pour permettre aux ouvriers chargés de famille d’avoir un supplément familial (sursalaire) pour subvenir à leur besoin particulier d’entretenir leur famille. Les employeurs avaient créé entre eux des caisses de compensation auxquelles ils cotisaient.

On voit que ces premières aides aux familles sont destinées uniquement aux ouvriers, c-a-d aux personnes qui travaillent et qui n’ont pas de type d’activité particulier et qui ont a priori des revenus modestes. Il y a donc un rattachement de la prestation à l’activité professionnelle. On voit aussi que ces prestations sont financées par des cotisations d’employeurs. Ce mode de financement est aujourd’hui discuté voire contesté car il a été maintenu alors que dans le même temps, le cercle des bénéficiaires des prestations familiales s’est considérablement transformé. On constate que cette évolution s’est faite dans le sens d’un détachement progressif de la référence au travail (anciens travailleurs, retraités, chômeurs, indépendants…).

Ces prestations sont conditionnées par le niveau de revenu du bénéficiaire potentiel.

=> En 1945, l’ordonnance se nourrit de toutes ces expériences et des modèles idéaux.

 

            La sécurité sociale repose sur le principe de la contributivité que l’on retrouve dans tous les régimes de sécurité sociale. Les régimes de sécurité sociale sont très largement financés par des cotisations. Le régime général sert parfois des prestations plus faibles que celles des autres régimes (régimes spéciaux).

            Ensuite, la sécurité sociale repose sur une conception restrictive du risque social. Il y a un encrage fort de la sécurité sociale dans la référence au travail et par conséquent, en droit de la sécurité sociale et ce, quelque soit le régime considéré, le risque de sécurité sociale est celui qui va affecter la capacité de travail ou de gain de l’assuré. On pourrait imaginer un champ d’application matériel très vaste et d’ailleurs, selon les auteurs, le risque de sécurité sociale est tout risque inhérent à la vie en société, c-a-d tout évènement produisant un effet négatif sur la personne.

On observe que le groupe des risques qui relèvent de la sécurité sociale est d’une remarquable stabilité depuis 1946. En 1945, la sécurité sociale va couvrir, par des assurances sociales, les risques sociaux. En 1945, la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles n’a pas été intégrée dans la sécurité sociale.

En 1946, un nouveau risque qui est rattaché au travail est reconnu : l’accident de trajet. Cette loi du 30 avril 1946 qui reconnaît l’accident du trajet comme un risque va également faire entrer la protection de ces trois risques professionnels (ATMP + accidents du trajet) dans le régime général de la sécurité sociale.

En 1980, un nouveau risque social est reconnu : le risque veuvage. Pour être veuf, il faut avoir été marié donc un lien conjugal est requis pour acquérir la qualité de veuf ou de veuve. Avant, il existait la pension de réversion qui est un droit dérivé de l’assurance vieillesse. Il faut avoir au moins 55 ans pour en bénéficier donc pour les moins de 55 ans, jusqu’en 1980, il n’existait pas de prestation particulière. Avant 1980, il existait des conventions internationales qui identifiaient le veuvage comme risque de sécurité sociale. Certains pays avaient instauré une couverture particulière pour ces personnes quelque soit leur âge. En 1980, la France reconnait le veuvage comme un risque autonome, ce qui s’est traduit par la création d’une nouvelle assurance sociale : l’assurance veuvage.

            En France, le choix de qualification est d’avoir contenu le risque de sécurité sociale à certains évènements : les risques sociaux et les risques professionnels. La conception du risque social est contrainte par le lien avec le travail.

Le problème qui se pose est celui de la dépendance qui peut être considérée comme un risque social ou non. Ce risque doit-il rentrer dans la sécurité sociale ? La dépendance n’est pas de nature à faire perdre sa capacité de travail et de gain dans la mesure où la personne ne travaille plus. Si on fait de la dépendance un risque social, la prestation dépendance devra être une prestation de sécurité sociale, ce qui signifie qu’elle doit être financée par le système de sécurité sociale. Il faut donc créer une cotisation sociale pour pouvoir financer cette prestation. Ainsi, cette solution semble difficile à mettre en œuvre.

 

Enfin, la sécurité sociale repose sur l’articulation entre les droits propres et les droits dérivés. On la retrouve dans tous les régimes de sécurité sociale. Elle s’explique en grande partie par la conception professionnelle et assurantielle de la sécurité sociale. Dans un tel environnement de sécurité sociale, les personnes qui sont titulaires de droits à prestation de manière naturelle ou automatique sont des assurés sociaux, c-a-d que ce sont des personnes qui peuvent s’acquitter de cotisations.

Ensuite, on trouve les assurés volontaires, c-a-d des personnes qui demandent leur affiliation.

Ainsi, les autres personnes ne sont a priori pas assurés. Elles vont donc être rattachées à un régime du fait du lien qu’elles ont avec un assuré social. Ce droit dérivé qui permet à l’ayant droit d’être titulaire de droits à prestations constitue une technique de généralisation de la sécurité sociale. L’ayant droit serait rattaché à l’idée de la famille, ce qui renvoie à une certaine unité dans la définition du groupe des ayants droit. La qualité d’ayant droit a permis d’élargir le droit à prestation.

 

Chapitre I. Le champ d’application personnel du régime général

 

On distingue plusieurs branches :

  • Famille
  • Vieillesse
  • Risques professionnels
  • Maladie/ maternité/ invalidité/ décès
  • Et parfois la branche recouvrement

 

Ce qui est assez notable c’est que le régime général n’a pas le même champ d’application personnel selon les branches. Ce qu’il faut relever c’est que la branche famille est celle qui a le champ d’application personnel le plus large puisque ce champ d’application personnel est très clairement énoncé par l’article L512-1 du Code de la sécurité sociale.

Il est immédiatement sous le Chapitre 2 intitulé « champ d’application », dans le Livre 5 sur les prestations familiales.

Donc on a un champ d’application très large.

Mais le régime général en dehors de cette branche, a un champ d’application qui est tout de même plus étroit puisque les personnes qui sont assurés par la sécurité sociale et qui résident sur le territoire nationale, sont réparties en différents régimes du fait de la nature de leur activité professionnelle.

 

Le régime général a vocation pour sa part à couvrir les travailleurs dépendants. On pourrait dire de façon un peu général : les salariés du privé sauf s’ils ne relèvent pas à titre dérogatoire, ou à titre particulier, d’un régime spécial. Ces personnes sont assujetties au régime général.

Derrière, ce terme d’assujettissement, on a un sens très fort : il renvoie à une obligation de rattachement au régime général. Cette distribution des différents actifs entre les régimes de sécurité sociale est d’ordre public. Donc on peut dire d’une certaine façon, sans que ce soit tout à fait fantaisiste, que le régime général a un champ d’application personnel naturel qui est composé des salariés du privé sauf exception. Ces personnes sont assujetties.

On utilise le terme assujettissement et le terme affiliation, qui sont parfois employés de façon synonymes :

  • L’assujettissement renvoie à la dimension obligatoire
  • L’affiliation est parfois employée pour le choix volontaire d’être rattaché à un régime.

Donc même si ces termes sont employés de façon synonyme, mais on peut y voir une différence de degré. La Cour de cassation emploie parfois ces deux termes de façon non différenciée.

Donc on a dans le régime général, cette 1ère population qui est celle des personnes naturellement assujetties qui sont les salariés du privé (Section I).

Et puis dans le régime général, il y a une autre population (Section II) plus difficile à cerner qui tient au fait que le régime général est porteur d’une fonction qui est induite par la dénomination même du régime qui est la généralisation. Cela signifie que le régime général a vocation à accueillir des personnes qui ne sont pas des assurés obligatoires. Plus exactement, des personnes qui sont sans régime de sécurité sociale et le régime général essaient de repousser les limites de la référence professionnelle et de la technique de contribution obligatoire. c-a-d qu’on va étendre la sécurité sociale à des personnes qui n’en relèvent pas automatiquement, soit parce qu’elles ne travaillent pas et qu’elles ne sont pas ayant droit puisqu’elles ne résident pas sur le territoire national.

 

Section I – Les personnes assujetties au régime général

 

Et on est là en présence du champ d’application professionnel. Ce qui va être déterminant pour l’accès au régime général cela va être véritablement l’activité professionnelle.

Ce qui est essentiel pour rattachement au régime général est la référence à la subordination, pour délimiter champs professionnel. C’est subordination juridique. Cette place centrale de subordination juridique doit être relevé car première assurances sociale se referaient à un autre type de subordination , la subordination économique avec un plafond d’affiliation.

A partir de 1945 le plafond d’affiliation est abandonné. Aujourd’hui ce qui est déterminant c’est situation de subordination juridique, qui est évoquée dans article L 311-2  mais aussi dans article L 411-1 qui concerne le champs d’application de couverture du risque professionnel.

La Sécu emploie deux méthodes :

  • La première dans l’article L 311-2: le code énonce la définition générale du Weur dépendant qui est le terme communément utilisé;
  • La seconde : le code de la Sécu pose des présomptions, il énumère un série d’activités professionnelles supposées effectuées sous ce rapport de subordination et qui justifie rattachement au régime général.

 

Paragraphe 1 – Les travailleurs dépendants

 

On faisait référence à l’article L311-2 du Code de la sécurité sociale qui concerne les assurances sociales mais qui est déterminant pour voir le champ d’application « Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d’une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l’un ou de l’autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quel que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat ».

Article dont il faut retirer l’essentiel :

  • Les conditions négatives

certain élément sans importance qui n’interfère pas pour les critères: il s’agit du genre, de la nationalité, de la perception d’une pension, de l’âge.

C’est au titre de la solidarité que cet effort contributif est demandé aux personnes exerçant une activité professionnelle.

  • Les conditions positives

Pour les conditions positives, il y a 3 séries de critères qui vont permettre d’imposer le rattachement au régime général.

  • Subordination juridique : Etre salarié ou travailleur pour quelqu’un
  • Rémunération : Quelle que soit le montant et la nature de la rémunération
  • Contrat : Quel que soit la forme, la nature ou la validité de leur contrat.

Ces 3 critères sont cumulatifs. Il faut insister sur le terme de « critère » : ces éléments sont nommés critères du travail dépendant par la jurisprudence. Il faut insister car les juges distinguent très clairement les critères et les indices.

Le terme indice est employé pour identifier les éléments qui peuvent se combiner pour caractériser un critère. On utilise la technique du faisceau d’indice.

 

  1. A) La subordination juridique comme critère décisif

 

            Elle constitue un critère décisif du travail dépendant. Quand on regarde la jurisprudence, on se rend compte qu’il est sans doute possible d’opérer une hiérarchie entre ces différents critères qui pourtant sont cumulatif. Or qui dit cumulatif, on dit implicitement que tous les critères ont la même importance.  En réalité, il y a des critères qui sont plus faciles de mettre en évidence que d’autres et cela pour des raisons qui tiennent au texte. Le texte invite ou autorise une interprétation très souple de ces critères.

  • Le critère qui va vraiment être décisif, qui va être une sorte de charnière pour la qualification du travail dépendant : c’est la subordination juridique.

De fait, la très large majorité du contentieux du travail dépendant porte sur le critère de la subordination juridique. Cette subordination juridique apparait aux moyens de plusieurs indices qui sont utilisés pas forcément de façon cumulatif par les juges et qui sont de 3 sortes :

– L’autorité de l’employeur

– L’intégration dans un service organisé

– Un indice de nature économique

Ce qui va être nouveau pour nous c’est de voir justement des arrêts qui concernent l’assujettissement au régime de sécurité sociale et qui reprennent des éléments qui sont aussi des critères du contrat de travail. Ce qui est normal car on est souvent en présence des travailleurs salariés. Forte heureusement, il y a une communauté de critères.

 

1) L’autorité de l’employeur 

            c’est un critère classique. Elle va consister dans des directives données aux travailleurs. Cette autorité va apparaitre également à travers un contrôle effectif, et puis, elle se manifeste par l’exercice du pouvoir disciplinaire qui va se matérialiser par le prononcé de sanction à l’encontre du travailleur défaillant. Ces directives, il faut en avoir l’approche la plus large : elles peuvent prendre des formes très diverses selon le métier, la tâche du travailleur.

Exemple : Il peut s’agir de la définition de tâche très spécifique mais ces directives peuvent aussi bien consister dans des objectifs certes précis, mais dans un but à atteindre par le salarié.

On voit bien là que c’est la finalité qui est identifiée. Ensuite, les travailleurs vont mettre en œuvre les moyens les plus appropriés pour atteindre cet objectif.

Ces directives vont porter sur la détermination matérielle de l’exécution du travail. Cela veut dire que c’est l’employeur qui va définir :

  • Le lieu du travail
  • L’horaire du travail : l’expression la plus symbolique du pouvoir de direction car l’horaire de travail est l’un des éléments voire l’élément qui pèse le plus sur le travailleur subordonné.
  • La fourniture du matériel

– Très souvent quand l’outil de travail nécessaire à l’accomplissement de la tâche est loué, prêté, mis à disposition : on est en présence d’une relation de travail subordonné. Chambre sociale, arrêt « Labane » du 19 décembre 2000 : chauffeurs de taxi étaient considérés comme travailleurs indépendants. Le juge a requalifié cette relation de travail.

– A l’inverse, le fait que le travailleur soit propriétaire de son matériel n’exclut pas de fait l’existence d’une subordination juridique.

Arrêt relatif à des chauffeurs des camions qui font ciment, le conducteur était propriétaire de son véhicule mais il était obligé de poser sur son véhicule des inscriptions qui étaient la marque du fabriquant de ciment.  Le juge a requalifié le contrat en contrat de travail.

Un grand nombre de faits qui vont permettre d’établir la subordination juridique. En même temps, il est vrai que ces éléments classiques de l’autorité de l’employeur sont parfois complètement inopérants dans des situations où la personne, de toute évidence, ne travaille pas pour elle-même mais cette personne n’est pas placée sous une autorité de l’employeur au sens classique du terme. Alors les juges ont créé de toute pièce un autre indice de la subordination juridique : qui se nomme l’intégration dans un service organisé.

 

2) L’intégration dans un service organisé

C’est un indice de la subordination juridique en droit de la sécurité sociale mais aussi en droit du travail et intervient donc dans le cadre de la requalification du contrat de travail. En droit de la sécurité sociale, cet indice est apparu à l’occasion d’un arrêt très célèbre du 18 juin 1976 rendu par l’assemblée plénière « Hebdo presse ».

Les faits étaient les suivants : Il s’agissait de personnes qui étaient chargées de distribuer des journaux d’annonce gratuit dans les boites aux lettres. Alors ces personnes, il est vrai, jouissaient d’une assez grande autonomie pour procéder à ces distributions puisqu’elles devaient réalisées ces distributions dans un délai déterminé, dans un secteur déterminé, pour le reste elles s’organisaient tout à fait librement. Ces personnes étaient liées par le Contrat par la société Hebdo presse, contrat qui avait été dénommé contrat de mandat. Et ces personnes étaient aussi rémunérées par la société hebdo presse. Elles étaient rémunérée par une prime mensuelle qui était dénommée prime de « travail bien fait », et puis une rémunération forfaitaire.

L’URSAFF soucieuse de collecter les cotisations qu’elles estiment dues, opèrent un contrôle et demandent le versement de cotisations sociales sur la rémunération perçue par ces distributeurs de journaux. En raison de cette possibilité d’organiser, en raison de cette autonomie laissée, les juges vont alors utiliser pour la première fois les termes « d’intégration dans un service organisé ».

 

Donc l’idée est que la subordination juridique ne résulte pas d’un seul type :

Il existe un autre type de possibilité pour caractériser la subordination juridique qui est l’intégration dans un cadre, un service organisé et selon des directives données par celui considéré comme l’employeur.

Cet indice d’intégration dans un service organisé intervient de façon alternative :

  • Soit l’autorité de l’employeur est caractérisée
  • Soit l’autorité de l’employeur n’est pas un critère valable, alors on a recourt à l’intégration dans un service organisé : on recherche s’il est caractérisé

 

            L’intégration dans un service organisé va connaitre un succès très important au lendemain de 1976, et peut être un trop grand succès : il est vrai que les arrêts qui vont recourir à cet indice pour caractériser la subordination juridique, ont été très nombreux, portant sur des professions très diverses : des sportifs, des professionnels de santé, des formateurs..

Parce que pour que cette intégration puisse caractériser la subordination juridique, il fallait tout de même, et cela a été dit par l’arrêt Hebdo presse de 1976, que le cadre soit imposé par celui qui allait être employeur.

Il ne fallait pas naturellement que le cadre ait été négocié car cela voudrait dire que l’on a des parties qui ne sont pas dans une situation de subordination, mais dans une relation de partenariat.

° La subordination est une relation verticale où la négociation n’a pas de place.

Jusqu’au début des années 90-93, il y arrêt du 8 juillet 1993 de l’assemblée plénière « rena ware » qui a recherché à recadrer l’indice intégration dans un service organisé.

° Et puis l’arrêt Société générale rendue par la chambre sociale le 13 novembre 1996 rendue au visa de l’article du Code du travail et l’article du Code de la sécurité sociale pour montrer que la notion de subordination juridique s’interprète de la même façon en droit du travail et en droit de la sécurité sociale. Dans cet arrêt, les juges vont rappeler que l’intégration dans un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination à condition que l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail.

 

Depuis 1996, la jurisprudence est stable. Elle est revenue à d’avantage de rigueur dans le recours à l’intégration d’un service organisé. Il y a des recours très nombreux (cf. documents de TD). Même si, il est vrai, on trouve de temps en temps des décisions un peu particulières.

° l’arrêt du 22 janvier 2009 dans le domaine du sport sur des arbitres et des joueurs pour savoir si les primes d’arbitrages et match devaient être soumises à cotisation. La fff fixaient les dates, imposait des présences obligatoires, respect des règles de comportement, tenues, sponsors…Donc série d’élément de faits mettant l’organisation dans un service organisée avec un pouvoir de contrôle et de sanction.

– Mais comme au cours du match les arbitres disposent d’une totale indépendance, pas de subordination.

Parfois cette intégration dans un service organisée doit parfois encore être précisée : de façon surprenante, la jurisprudence a recours à un indice de nature économique.

 

3) Les indices de nature économique

            Certains auteurs ont prétendu que le contrat de travail serait applicable à chaque fois qu’un travailleur se trouve sous la dépendance économique d’un co-contractant qui lui fournit du travail et par là des moyens d’existence. Très tôt, cette thèse a été rejetée par la Cour de cassation (Cass. civ. 6 juillet 1931), mais elle a eu quelque crédit en droit de la Sécurité sociale, sans doute pour tenir compte du fait que, à l’époque, les travailleurs indépendants ne bénéficiaient d’aucune couverture maladie obligatoire. Même si cette thèse n’a jamais été retenue explicitement, c’est sans doute dans ce domaine que les décisions sont les plus ambigües.

 

La dépendance économique est donc insuffisante pour caractériser un contrat de travail, mais elle peut constituer un indice laissant présumer l’existence d’un tel contrat. Ainsi, plusieurs décisions retenant l’existence d’un lien de subordination relèvent, pour motiver cette qualification, que le prétendu travailleur indépendant n’avait qu’un seul client, qu’il n’était pas propriétaire du matériel utilisé pour les besoins de son travail, qu’il était tenu de travailler sous les couleurs de l’entreprise bénéficiaire, etc. (voir, par exemple, Cass. crim. 29 octobre 1985).

 

Aujourd’hui est-ce qu’il n’y a pas des situations de travail dans lesquelles de toute évidence le travailleur est économiquement subordonné et est-ce que cette situation de travail économique ne devrait pas conduire à la survenance d’une couverture sociale particulière ? 

Cette question s’est posé parce que depuis quelques années des situations de para-subordination ont été mises en place

Ces situations de para-subordination permettent de déterminer des situations de travail dites économiques dépendantes où la personne n’est pas un travailleur salarié mais en même temps n’est pas dans une situation de travail indépendant pur.

On est en présence de travailleur qui ne disposent pas de contrat de travail, mais ils ne sont non plus formellement indépendant parce qu’ils sont dépendants d’un seul client-employeur, ou d’un seul commettant pour la provenance de leur revenu. Donc ce ne sont pas des salariés, ce sont des personnes à la tête d’une organisation dotée de moyens propre c’est-à-dire d’une entreprise, ce sont eux également qui ont tout pouvoir pour décider de l’organisation de leur travail : ils sont tout à fait proche de la situation de l’indépendant de ce point de vu là mais en même temps ils ne sont pas tout à fait indépendant du fait de la place exclusive et conséquente que représente ce client-employeur dans leur travail.

Si ce client est perdu, alors l’activité ne peut plus prospérer : dépendance économique.

Cette situation toute à fait particulière a retenu l’attention de la commission européenne qui a rendu un Livre vert intitulé « Moderniser le droit du travail pour relever les défis du 21° siècle » en 2006. Ce livre vert préconise de traiter de façon particulière économiquement dépendant en droit de la protection sociale.

Il est vrai qu’entre ces deux modèles, il y a aujourd’hui des situations de travail qui sont intermédiaires, situations de travail qui ne trouvent pas de réponses appropriées dans la protection sociale.

 

Pas d’évolution du droit français avec un statut intermédiaire sur le plan de la couverture sociale. Mais Ce que l’on peut observer c’est que ces législations se sont quand même engagées dans cette reconnaissance: on remarque la création de plusieurs droits nationaux si avec la reconnaissance d’un statut intermédiaire et la création de dispositions spéciales (para-subordination). Cela permet aux personnes para-subordonnées de posséder des dispositions spéciales sur l’hygiène et la sécurité, relation de collaboration coordonnées et continues, contrat de collaboration de projet. Ces contrats permettent à leur titulaire de bénéficier d’une couverture minimale pour la maladie, maternité, retraite et le risque pro.

 

Aujourd’hui, on a la frontière travail dépendant/ travail indépendant, si on introduit entre les deux, le travailleur économique indépendant, il faudra parvenir à déterminer des critères d’identification très précis pour réussir à déterminer ses 3 statuts.

Conclusion : Donc on a 3 indices qui sont alternatifs ou cumulatifs selon les situations, qui permettent de qualifier la subordination juridique.

 

B- La rémunération

            L’article L311-2 du Code de la sécurité sociale : « Quel que soit le montant et la nature de la rémunération ».

Il ressort de cet article que la rémunération est une condition nécessaire à la qualification de travailleur dépendant.

Et d’ailleurs les chambres réunies dans un arrêt du 26 juin 1966 avaient parfaitement énoncé que « l’appartenance à un régime général impliquait l’existence d’une rémunération ». C’est un terme qui démontre les possibilités pour que la rémunération soit prise en compte.

Par exemple : le salaire renvoie directement au salariat. Or, on doit être dans des cas où il y a confusion. Il peut s’agir d’une bourse, d’une prime de travail bien fait, d’une allocation de recherche, il pourra s’agir de sommes qui seront dénommées commission, honoraire, participation au bénéfice, avantage en nature. Donc une série de rémunération extrêmement variée.

Donc toute sorte de rétribution, qui est exigée sinon on serait en présence de travail bénévole. Alors les juges assimilent aussi à l’absence de rétribution, la rétribution dérisoire, symbolique. Le montant et le mode de calcul de la rémunération importe peu.

Est-ce que l’existence de cette rétribution est suffisante ? La rémunération doit exister, mais elle doit également être versée en contrepartie d’un travail effectif. C’est le 2ème temps absolument indispensable :

Il peut y avoir une somme constitutif de ce que l’on va appeler communément rémunération, mais si elle n’est pas versée en contrepartie d’un travail effectif, alors critères tenant à l’existence de rémunération posé par le Code de la sécurité sociale ne sont pas remplis.

Illustration dans l’arrêt de la 2ème chambre civile du 16 février 2012 (TD n°1). Cette notion de contrepartie est introduite car elle permet de remettre en évidence la relation d’employeur à employés.

On retrouve cette exigence du rapport entre la rémunération servie et le travail effectué dans l’article L311-6 du Code de la sécurité sociale : cela concerne le conjoint d’un travailleur non salarié, et son affiliation à la Sécurité sociale. « Est affilié au régime général de sécurité sociale le conjoint d’un travailleur non salarié qui participe effectivement à l’entreprise ou à l’activité de son époux, à titre professionnel et habituel, et perçoit un salaire correspondant au salaire normal de sa catégorie professionnelle ».

Donc cette idée de contrepartie est essentielle pour que l’on puisse caractériser la rémunération.

 

C- Le contrat

            Article L311-2 du Code de la sécurité sociale : la fin de l’article concernant le contrat de travail. Il énonce « quel que soit la forme, la nature ou la validité de leur contrat ». Le terme de contrat doit être pris dans son sens le plus large de sorte que l’on dit souvent qu’il suffit qu’une convention existe, un accord existe. Mais en même temps, l’exigence de cet accord est indispensable : cela a été affirmé par une décision d’assemblée plénière du 17 décembre 1966, exigence rappelée par un arrêt de chambres mixtes en date du 26 mai 1972.

Le code invite à la plus grande souplesse :

  • Quel que soit sa forme : Il peut s’agir ou non d’un écrit
  • Quel que soit sa nature : On ne va pas s’arrêter au seul contrat de travail puisque l’idée est de faire rentrer aussi d’autres formes d’activité dans le champ d’application personnel du régime général
  • Quel que soit sa validité : Il suffirait que le contrat conclu ne soit pas valable pour empêcher l’assujettissement à la sécurité sociale.
    Par exemple : un CDD a été conclu en dehors des cas de recours fixé par le Code du travail dès lors il n’est pas valable pourtant on a bien un travail subordonné avec une rémunération versée en contrepartie d’un travail effectif. Donc exiger un contrat valable serait contreproductif, car cela reviendrait à priver un certain nombre de personnes qui subissent l’absence de validité de leur contrat de la sécurité sociale. Ce serait contraire aux objectifs posés par le Code de la sécurité sociale. Le contrat dans la relation de partenariat n’est souvent pas valable.

 

Conclusion

On avait vu qu’il avait des critères de la subordination qui était plus critique, ou plus important que d’autres :

  • En effet, ici, on voit que l’exigence tenant au contrat va être assez facilement rempli.
  • La rémunération c’est un peu pareil : quel que soit le montant et la nature de la rémunération. Cela signifie que toute rétribution tant qu’elle est la contrepartie d’un travail effectif, sera retenue.
  • Donc le plus important, là où se posera la question, ce sera concernant la subordination juridique.

En même temps, il faut que le contrat existe et certaines situations très marginales tiennent en échec cette exigence tenant au contrat. Il s’agit du cas des religieux qui parfois peuvent être effectivement dans une véritable relation de subordination, vraiment soumis à l’autorité de l’employeur avec les horaires, qui sont rémunérés en espèce ou en nature (hébergement) et qui effectuent leur activité non pas en exécution d’un contrat, mais par respect du vœu d’obéissance qu’ils ont formulé en rentrant dans la congrégation religieuse à laquelle ils sont attachés. Et c’est vrai que plusieurs arrêts concernent les religieux dont un 1er arrêt du 29 novembre 1947 de la chambre sociale.

 

 

Paragraphe 2- Les présomptions légales

 

Elles sont de deux ordres :

  • 1ère présomption : Elle a été instaurée dès 1945 et elle consiste dans une présomption de travail dépendant. On peut considérer que cette première présomption légale posée au début de la sécurité sociale est au fond logique du point de vue de l’objectif de généralisation de la SS puisqu’il s’agissait d’intégrer dans le régime général le plus grand nombre de personnes. Il y avait cet objectif de généralisation qui était poursuivi.
  • 2ème présomption : Il s’agit d’une présomption de travail indépendant. Plus étonnante puisque l’objectif est à l’inverse du premier car il s’agit de considérer que certaines personnes n’ont pas à relever du régime général de la SS. Il ne s’agit pas d’élargir, mais de fermer le régime de SS en raison de la caractéristique de certaines personnes. On est face à une présomption simple. Les personnes couvertes par la présomption peuvent être intégrée au régime général quand cette présomption est renversée.

 

  1. A) La présomption de travail dépendant

 

Il s’agissait d’une présomption légale posée à l’article L 311-3 du Code de la sécurité sociale. Il est apparu que malgré la souplesse des critères du travail dépendant, il était tout de même difficile de les appliquer à certains types d’activités professionnelles, à certains métiers.

En 1945, le législateur a décidé de faire rentrer d’autorité un certain nombre de personnes dans le régime général. Cette présomption est simple, elle peut donc être renversée.

 Il est dans l’intérêt des personnes de se trouver travailleur dépendant leur permettant de relever du régime général qui est plutôt favorable.

L’article L311-3 dresse une liste des personnes, et donc des activités professionnelles, qui sont présumées être travailleur dépendant, liste qui comporte 24 points. Quand on regarde cette liste, on constate qu’elle est hétéroclite et qu’elle assez anachronique car il y a des métiers qui sont visés par cette liste dont on sait qu’aujourd’hui ils sont exercé en exécution d’un contrat de travail :

  • Les travailleurs à domicile
  • Les voyageurs et représentants de commerce
  • Les employés d’hôtel, café et restaurant
  • Les porteurs de bagages
  • Les journalistes professionnels et assimilés
  • Les acteurs et mannequins…

 

Le code utilise 2 types de méthodes pour définir cette présomption :

1- Il procède à une assimilation directe : le Code de la sécurité sociale, dans ces cas, définit lui-même l’activité professionnelle qui doit donner lieu à l’application de la présomption

2- Méthode d’assimilation indirecte : l’article procède par renvoi au contrat de travail et c’est le cas par exemple pour les journalistes professionnels et assimilés. Ces articles du Code énoncent de façon précise les conditions auxquelles telle profession est liée par un contrat de travail et donc soumis aux dispositions du Code du travail.

 

La question se pose parfois de l’autonomie de l’article L311-3 par rapport à l’article L311-2 et donc quel rapport existe-t-il entre ces 2 articles ? Est-ce que les personnes visées par l’article L311-3 doivent remplir les conditions posées par l’article L311-2 ?

            Réponse négative car l’objectif de l’article L311-3 est de permettre pour certaines personnes d’entrer quand même dans le régime général.

Les juges se sont prononcés sur cette question et ils ont affirmé que la condition de subordination posée par l’article L311-2 n’avait pas à être caractérisée pour les personnes visées par l’article L311-3.  Autrement dit, les conditions posées par l’article L311-3 sont des conditions qui se suffisent à elle-même – Cela a été rappelé par un arrêt de la chambre sociale du 3 décembre 1969.       

            En revanche, il y a une condition commune à l’article L311-2 et -3, les juges rappellent que l’existence d’une rémunération était nécessaire.

 

Se pose une question : quid de la personne qui exerce bien une profession envisagée par l’article L311-3 mais cette personne ne remplit pas les conditions posées pour bénéficier de la présomption de l’article  L311-3 ?

Par exemple : il s’agit d’un artiste du spectacle mais cet artiste remplit pas les conditions pour bénéficier de la présomption.

Si cette personne demande son affiliation au régime général ou à l’occasion d’un contrôle de l’URSSAF, puisqu’on ne peut pas être dans le champ de la présomption, la situation de la personne sera traitée par application de l’article L311-2.

C’est-à-dire  qu’on va regarder si les critères du travail dépendant de l’article L311-2 peuvent être appliqués à cette personne exerçant une profession citée à l’article L311-3, mais qui ne remplit pas les conditions pour bénéficier de cette présomption. 

            voir TD2 (cass 13 juin 1996: Si les sous agents d’assurance ne remplissent pas les conditions pour être assujettis au régime général de SS sur le fondement de l’article L.311-3-5, les juges du fond vérifient s’ils peuvent l’être par l’application de l’art .L311-2 (rapport de subordination ou non ?). ici en l’espèce les juges du fond ont caractérisé le lien de subordination).

 

  1. B) La présomption de travailleurs indépendants (ou la présomption de non salariat)

           

            Au début des années 90, on est dans une période d’évolution jurisprudentielle par les dérives de l’intégration dans un service organisé. Ce contexte est marqué par des vagues de requalification qui concernent particulièrement des travailleurs indépendants.

Puis est posé une Présomption légale par la loi du 11 février 1994 relative à l’initiative et à l’entreprise individuelle, loi dite « Madelin ».

Pourquoi une telle présomption ? Certains travailleurs indépendants vont être requalifié en travailleurs dépendants ce qui les obligent à payer cotisations, donc ils ont volonté d’éviter ce double assujettissement (régime autonome + régime général)

C’est-à-dire  que des travailleurs indépendants qui de façon occasionnelle, temporaire vont prêter leur concours à un donneur d’ordre et vont être considérés comme travailleurs dépendant de ce donneur d’ordre et vont ainsi être assujettis au régime général.

Par exemple, un électricien entrepreneur individuel  qui est un indépendant peut être appelé par un donneur d’ordre pour intervenir sur un chantier et quand il intervient, il intervient dans le cadre d’un service organisé (horaires…) donc double assujettissement de la personne au régime indépendant et au régime général.

 

Alain Madelain par cette loi de 94 va tenter de répondre au Weurs indépendant afin de rendre assujettissement au régime général plus difficile.

Dès lors, il apparait comme un texte à contre-courant du mouvement qui était de faire entrer le plus de personnes possibles dans le régime général.

 

La loi Madelin décide alors d’entendre les revendications et attentes des indépendants de sorte que cette loi énonce que « les personnes qui sont immatriculées au registre du commerce, inscrites au répertoire des métiers ou encore au registre des agents commerciaux, auprès des URSSAF pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales, ces personnes sont présumées exerçer l’activité pour laquelle elles sont inscrites, à titre indépendant ». Cette présomption est posée à l’article L8221-6 du Code du travail.

Cette présomption posée par le Code du travail est une présomption simple qui est relayée par le Code de la sécurité sociale.

 

Néanmoins, cette présomption simple peut être renversée par la preuve que la personne exerce son activité dans un lien de subordination juridique permanent à l’égard du donneur d’ordre et être ainsi considérée comme travailleur dépendant.

Cette formule légale « lien de subordination juridique permanent » est inconnue de la jurisprudence, et quand il a fallu donner un contenu à ce caractère permanent, cela a été difficile car les débats parlementaires n’ont pas donné d’indications sur ce qu’il fallait entendre par « permanent ». La doctrine s’y est donc intéressée et a considéré que :

L’exigence de la permanence devait permettre d’écarter toutes les situations où cette subordination était ponctuelle, occasionnelle, exceptionnelle par rapport à l’activité habituellement développée par la personne en cause.

 

Donc les professionnels indépendants avaient obtenue satisfaction, il n’y a plus de double assujettissement automatique. Plusieurs décisions dont  l’arrêt du 16 juin 1994 rendue par la Chambre sociale qui a interprété de cette façon la subordination juridique permanente. La question était tout de même politique, en cherchant à savoir s’il fallait répondre aux attentes de ces travailleurs ou s’il fallait les faire rentrer dans le régime général.

 

En 2000, la loi va évoluer : la loi Aubry 2 du 20 janvier 2000 va laisser demeurer les dispositions du Code de la sécurité sociale introduites par la loi Madelin.

Cette loi avait organisé une procédure d’interrogation des URSSAF qui permettait aux personnes qui doutaient de la nature de leur activité professionnelle de demander aux URSSAF ce qu’il en était. Cette procédure est précisée par l’article L311-11 du Code de la sécurité sociale. Donc les URSSAF pouvaient être interrogé par le donneur d’ordre ou le travailleur d’ordre et si elle ne répondait pas dans un délai d’un mois, la demande de rattachement au régime général était considéré comme ayant trouvé une réponse négative et ne devait pas être rattaché au RG pour l’activité ayant donné lieu à interrogation.

 

La présomption de travail indépendant va faire l’objet d’une nouvelle modification avec la loi dite Fillon du 1e août 2003. Le secrétaire d’Etat aux petites et moyennes entreprises estimait qu’il fallait sécuriser la création de nouvelles entreprises et prévenir les risques de requalification intempestive en contrat de travail entre le travailleur présumé indépendant et le donneur d’ouvrage. On retrouve les mêmes arguments qu’en 1994. 

  • Artisans, petits commerçants et assimilés sont déclarés en tant qu’indépendant, parfois en contact avec des donneurs d’ouvrage mais il faut sécuriser voir figer la relation juridique entre les différents partenaires.

On va donc retrouver dans le Code du travail une présomption de travail indépendant à l’article L8221-6, et la rédaction de cet article est la même qu’en 1994. On revient à une présomption simple et on retrouve les mêmes moyens de renverser cette présomption simple c’est-à-dire par la preuve qu’il existe une subordination juridique permanente entre le travailleur et le donneur d’ouvrage.

Dans les derniers arrêts, la référence au caractère permanent de la subordination juridique semble d’une certaine façon perdre du terrain puisque dans les arrêts : 2ème chambre civile, arrêt du 7 février, 2ème chambre civile arrêt 20 mars et 2ème chambre civile, arrêt du 13 novembre 2008, les juges ne s’attachent plus au caractère permanent de la subordination pour renverser la présomption, mais s’en tiennent à une partie de la définition de la subordination telle qu’elle résulte de la JP société générale de 1996. Ces arrêts sont clairs et rappellent que :

 » le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives et d’en sanctionner les manquements; le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail ; L’assujettissement ne dépend pas de la volonté des parties ni de la convention conclue par les parties, mais des conditions matérielles dans lesquelles le travail est accompli ».

 

cf: critique de présomption de nn salariat voir doc TD.

 

Section II – Les personnes accueillies par le régime général

 

            On est face à une grande diversité des personnes accueillies par le régime général.

Il y a alors des degrés de couverture : toutes les personnes accueillis ne sont pas forcément couvertes pour tous les risques garantis par le régime général.

Donc on est face à une double diversité. De plus certaines personnes vont pouvoir choisir les risques pour lesquels elles veulent être assurées par le régime général : on peut donc entrer à la carte. Cela va dans le contre sens de la sécurité sociale qui est d’ordre public.

Il existe deux obstacles pour bénéficier à un régime obligatoire de sécurité sociale :

– Ne pas travailler

– Ne pas résider sur le territoire français

Des adaptations ont été adoptées pour bénéficier du régime général : 

  • Dans un 1er temps : Le législateur a créé des assurances volontaires pour différents risques sociaux : les risques maladie, invalidité, vieillesse, maternité et accidents du travail. Ces assurances volontaires ont eu un succès mitigé de sorte que le législateur en constatant ce relatif échec a considéré que cela ne pouvait pas être acceptable pour certains risques importants pour la population notamment le risque santé.
  • Dans un 2nd temps : ainsi, en matière de santé, un effort particulier a été réalisé par le législateur afin de favoriser la couverture des personnes qui n’étaient pas assujetties à un régime obligatoire. Mais tous les risques ne sont pas perçus de la même manière par le législateur : certains sont considérés comme plus graves. Ainsi pour les risques maladie et maternité, il y a eu véritablement un effort qui s’exprime pas les lois qui se sont succédées pour favoriser le rattachement de la personne au régime de la sécurité sociale.

 

Paragraphe 1 – Les assurances volontaires pour les risques invalidités, vieillesse et AT

 

Avec les assurances volontaires, on est en présence d’une soumission volontaire au régime général, et on est donc en présence de dispositifs qui vont être facultatifs et contributifs.

Les personnes visées sont :

– Toutes celles résidant sur le territoire national et n’exerçant pas d’activité professionnelle

– Mais également les personnes qui ne résident pas sur le territoire national qui exerce ou non une activité professionnelle.

 

  • Pour les risques invalidité et vieillesse

Pour les risques invalidité et vieillesse, articles L742-1 et suivants du Code de la sécurité sociale qui prévoient les dispositions pour les assurances volontaires. Il s’agit de permettre à des personnes de se constituer une pension de vieillesse.

Cela peut sembler curieux si on s’en tient aux personnes qui n’exercent pas d’activité professionnelle, mais sont concernés par ces articles des personnes expatriés qui ont une activité professionnelle à l’étranger et qui ont intérêt à se constituer des droits à pension de retraite quand elles envisagent de revenir en France. On permet à ces personnes d’acquérir des trimestres de cotisations.

           

  • Pour les accidents du travail

L’assurance volontaire accident du travail semble étonnante. Comment ouvrir une assurance volontaire accident du travail à des personnes qui ne relèvent pas d’un régime obligatoire et donc qui ne travaillent pas ?

– Les expatriés peuvent être concernés par cette assurance volontaire accident du travail

– Mais aussi les travailleurs indépendants c’est-à-dire non salarié, non agricoles qui n’ont pas de couvertures spécifiques « accident du travail » dans leurs régimes obligatoires donc ils trouvent dans cette assurance, une assurance particulière.

– On trouve aussi de façon plus surprenante, les bénévoles qui travaillent dans les œuvres et les organisations d’intérêt général sauf si ces œuvres ou organisations ont souscrits en leurs noms des assurances personnelles (vue leurs financements limités c’est rare).

 

Il semble que cette assurance volontaire accident du travail rencontre peu de succès au regard notamment des prestations versées.

En effet, les seules qui sont versées ce sont les prestations en nature c’est-à-dire  celles qui permettent de compenser les frais engagés pour se soigner à la suite de la réalisation de ce risque professionnel.

Donc les indemnités journalières ne sont pas versées par cette assurance volontaire « accident du travail ». Et cela va avoir des conséquences négatives pour les indépendants qui ont une activité professionnelle, et qui ne percevront pas un revenu de remplacement en cas d’accident du travail.

 

            En effet, un des intérêts majeur de la couverture des risques professionnels est de percevoir un revenu de substitution en cas d’incapacité de travailler.

Ici la cible (personnes concernées) est ratée au regard du régime de cette assurance. Ils auront plus d’intérêt d’aller vers des systèmes de prévoyance leur permettant de percevoir des indemnités journalières, rentes en cas d’invalidité…

Rappelons que la souscription de ces assurances volontaires est à la carte c’est-à-dire  pour les risques qu’on veut.

 

Paragraphe 2 – L’effort particulier réalisé en matière de santé

 

            Le rattachement au régime général proposé pour les risques maladie-maternité est bien organisé par la loi.

On observe une série de dispositifs mis en place destiné à favoriser le bénéfice de la couverture du risque santé et faire en sorte que le plus grand nombre soit couvert contre ce risque santé.

Le risque santé peut toucher tout le monde et bénéficie d’une consécration constitutionnelle avec le Préambule de la Constitution de 1946  qui proclame le droit à la santé donc le risque santé n’apparait pas comme un risque comme les autres. Il y a eu des efforts constants pour améliorer les dispositifs constants et pour rendre la généralisation effective. On a 3 dispositifs déployés à cette fin :

  • L’assurance volontaire
  • L’assurance personnelle
  • La CMU

 

  1. A) L’assurance volontaire et les risques maladie-maternité

 

Elle a été crée par l’ordonnance du 21 aout 1967. Cette assurance volontaire va s’adresser :

  • Aux personnes qui résident sur le territoire national, et qui ne sont pas assurés ou ayant droit
  • Aux personnes qui résident à l’étranger et qui pour les raisons qui tiennent à l’application du principe de territorialité ne peuvent pas bénéficier de la législation française de sécurité sociale.

 

Donc ce sont pour les personnes sans assurances, qui ne sont pas ayants droits ou qui sont à l’étranger, et qui bénéficie du principe de territorialité.

Dès 1945, le régime propre de sécurité sociale obligatoire avait connu des limites. On essaye de réaliser la généralisation mais en même temps le fait que cette référence professionnelle pouvait être un obstacle, avait été perçu. Les pouvoirs publics pensaient en 1945 que la période de reconstruction qui s’ouvrait, le développement économique serait favorable à cette généralisation et à l’assujettissement au régime obligatoire.

 

En 1967, cette possibilité d’assurance volontaire va être proposée : elle va reposer sur l’initiative individuelle. C’est le signe d’une grande liberté mais qui peut être dangereuse car cette assurance volontaire pour être efficace supposait que les destinataires potentiels du dispositif aient connaissances de leurs situations au regard de la sécurité sociale.

            Donc, il faut qu’elles aient conscience qu’elles n’étaient pas assurées ou plus assurées.

Très souvent, les personnes ne savent pas réellement qu’elle est leur situation au regard de la sécurité sociale. Il fallait que ces bénéficiaires potentiels, aient connaissance de leurs situations et de ce dispositif d’assurance volontaire. Egalement, il fallait que ces personnes mesurent l’intérêt de l’affiliation à l’assurance volontaire. Il fallait que le bénéficiaire potentiel ait une capacité contributive pour s’acquitter des cotisations d’assurance volontaire car il s’agit d’un dispositif assurantiel.

Tous ces éléments ont eu pour conséquence de rendre l’efficacité de l’assurance volontaire assez  faible du moins pour la population résidente.

 

Il fallait alors distinguer deux hypothèses :

– Pour la population expatriée, et quand cette expatriation s’organisait avec l’employeur, souvent cette assurance volontaire était utilisée, l’employeur affiliait son salarié à ce dispositif d’assurance volontaire et, dans ce cadre, l’accompagnement de l’employeur va au-delà, car il y a souvent une assurance complémentaire mise en place par l’employeur également.

– Donc le problème majeur au milieu des années 1970 était la population résidente car celle-ci qui n’est ni assuré obligatoire, ni ayant droit, a peu recours à ce dispositif.

 

  1. L’assurance personnelle

 

             Elle est instaurée par la loi du 3 janvier 1978. Ainsi, l’assurance personnelle utilise des moyens différents de l’assurance volontaire en couvrant la population résiduelle (population interstitielle). Il s’agit de ramener cette population interstitielle vers la couverture maladie/maternité (2% de la population). La population interstitielle renvoie à la population qui bénéficie de droits assurantiels en tant qu’ancien actif (chômeurs indemnisés, retraités, tout ancien assuré); les ayants droit ; les assurés sociaux et les inactifs.

 

Le dispositif d’assurance volontaire est organisé à partir des constats, des failles observées dans l’assurance volontaire. Une des failles observée était l’absence ou l’insuffisance d’information, la méconnaissance des droits qui étaient des caractéristiques communes aux bénéficiaires potentiels.

Pour tenter de surmonter ces difficultés, ce dispositif confie aux CPAM un rôle central puisqu’elles vont être chargées de proposer à ces bénéficiaires potentiels l’affiliation à l’assurance personnelle.

 

Ce dispositif tente d’améliorer ce qui existait en matière d’assurance volontaire. Les bénéficiaires de minima sociaux (AAH ou API) vont être automatiquement affiliés à l’assurance personnelle et leurs cotisations d’assurance personnelle sont prises en charge automatiquement soit par la CAF, soit au titre de l’aide médicale qui est un dispositif d’aide sociale. Il y a encore un très fort attachement au principe de la contributivité qui s’accompagne d’aménagements.

Ce mouvement va être poursuivi par la loi du 1er décembre 1988 créant le RMI dont les bénéficiaires vont être affiliés automatiquement à l’assurance personnelle et leurs cotisations vont être prises en charge par l’aide médicale. Ce dispositif répond aux fins de généralisation de l’assurance maladie/maternité. De plus, il y a des accompagnements qui sont mis en place pour le paiement des cotisations. Cette assurance personnelle permet de bénéficier des prestations en nature mais cela ne signifie pas que la personne affiliée pourra facilement accéder aux soins car il reste une partie des frais de santé à la charge de la personne assurée (le ticket modérateur !) qui peut être trop lourde pour certaines personnes et notamment pour les bénéficiaires des minima sociaux (pauvreté relative). Cette prise de conscience est mise en évidence nettement par le RMI qui fait apparaître une part de la population qui ne relevait d’aucun dispositif social et qui ne pouvait alors pas accéder aux soins. Pour les bénéficiaires du RMI, ont été mis en place des « cartes santé » : le ticket modérateur est pris en charge au titre de l’action sociale.

 

Au lendemain de la loi de 1978, ses effets sont très favorables et positifs mais en même temps, elle ne peut pas, contrairement à ce qui avait été envisagé, réaliser totalement la généralisation de l’assurance maladie/maternité car les CPAM ne peuvent intervenir que pour les bénéficiaires qu’elles connaissent déjà.

Ainsi, les personnes qui n’ont aucun passé d’assuré ou d‘ayant droit ne peuvent pas être destinataires d’une proposition d’affiliation, elles devront en faire personnellement la demande. Ces personnes sont appelées les « exclus ».

 

Par ailleurs, le législateur de 1988 n’avait pas clairement estimé que la propension réelle ou non des bénéficiaires potentiels du RMI à s’engager dans le dispositif du RMI. Sans doute le législateur partait de l’hypothèse que la grande majorité des bénéficiaires potentiels du RMI demanderaient à s’engager dans le RMI.

            Or, les années postérieures ont montré qu’une fraction de la population interstitielle continuait à ne pas se présenter au guichet des organismes sociaux compétents pour instruire les dossiers d’accès au RMI. Cette fraction limitée peut s’expliquer pour plusieurs raisons.:

– D’abord, il faut être conscient de la grande diversité de la population interstitielle composée d’individus différents. La catégorie interstitielle n’est pas une catégorie professionnelle donc elle est composée de personnes qui ne se considèrent pas comme indigentes tandis que d’autres sont dans une marginalisation complète.

– Ensuite, cette partie de la population interstitielle est très difficile à contacter car elle est peu connue des services sociaux.

– De plus, certaines personnes craignent l’enquête sur dossier de candidature qui est susceptible d’être faite par les organismes sociaux qui peut révéler une situation qui ne souhaite pas être connue.

 

Le résultat est qu’en 1996, certains estimaient que 400 000 personnes étaient à nouveau privées de toute couverture sociale. Les autorités politiques ont fait deux propositions dont la seconde aboutit au vote de la CMU

 

  1. La CMU

 

            Cette CMU est créée par la loi votée le 27 juillet 1999, cette loi ne va entrer en vigueur qu’au 1er janvier 2000. 

Cette couverture maladie universelle est une terminologie mal appropriée, car elle nourrit une double ambition et comporte deux volets :

  • Volet assurance maladie-maternité : il s’agit là pour la CMU de base, d’élargir encore l’accès à l’assurance maladie-maternité. La CMU de base va être faite pour améliorer l’assurance personnelle répondant aux insuffisances de cette dernière.
  • Volet complémentaire : Elle doit permettre à tous ou au plus grand nombre de se faire soigner c’est-à-dire d’accéder aux soins, l’objectif porté par la CMU complémentaire est nouveau. Aucun dispositif légal n’avait jusqu’alors essayé d’organiser la couverture complémentaire santé afin de permettre à des personnes peu solvables de se faire soigner sans difficultés.

Un objectif nouveau porté par un objectif national. Au titre de l’action sociale, des caisses primaires d’assurance maladie, les acteurs locaux avaient essayé de favoriser l’accès au soin.

  • Avec la CMU complémentaire, le dispositif est légal, il est national, l’objectif c’est de réaliser en la matière une unité territoriale afin que toutes les personnes confrontées aux difficultés financières d’accès aux soins bénéficient d’un régime juridique unifié.

Il faut qu’une unité territoriale soit réalisée.  La CMU de base se substitue à l’assurance personnelle. En revanche, l’assurance volontaire pour les expatriés demeure.

 

  1. La CMU de base

            La CMU de base est un dispositif subsidiaire, c-a-d que le principe de rattachement à un régime de sécurité sociale reste l’assujettissement. En d’autre termes, on est d’abord couvert par l’assurance maladie/maternité parce qu’on relève d’un régime obligatoire (assuré social) ou parce qu’on a la qualité d’ayant droit.

Cela induit que relever de la CMU de base est dépourvu de lien avec le niveau de ressources de la personne. La condition de ressources n’est pas un critère d’affiliation à la CMU de base. Le seul critère est l’absence de régime obligatoire, soit en qualité d’assuré social, soit en qualité d’ayant droit.

De plus, les personnes visées par la CMU de base sont celles qui résident en France donc aucune condition de nationalité n’est posée pour le bénéfice de la CMU de base.

En revanche, pour les non nationaux, est posée une condition de résidence régulière et stable sur le territoire français, étant observé que cette stabilité s’entend d’une résidence ininterrompue de plus de 6 mois au cours de l’année civile de versement des prestations. Au départ, cette durée était fixée à 3 mois mais un décret du 14 mars 2007 a porté ce délai à 6 mois.

Ce critère permet de prendre conscience du fait que cette CMU n’est pas un dispositif aussi universel que cela est affirmé. Si on était véritablement en présence d’un dispositif universel, c’est la qualité d’être humain qui serait placée au premier plan et alors la régularité de la résidence ne devrait même pas être envisagée.

La CMU de base permet aux personnes couvertes d’ouvrir des droits dérivés et le droit de cette personne couverte n’est pas nécessairement un droit contributif ni un droit gratuit, de sorte qu’on observe que ce dispositif a partiellement renoncé à la contributivité qu’avait conservé l’assurance personnelle.

 La CMU pose une condition de ressource qui à ce jour est fixé à 9 356 euros annuel. Ce dispositif n’est pas par principe gratuit, ce qui montre un certain attachement au principe de la contributivité.

– Lorsque les ressources sont inférieures à ce seuil, le bénéficiaire est purement dispensé de cotiser tandis que ;

– lorsque les revenus sont supérieurs à ce montant, le bénéficiaire est redevable d’une cotisation de 8% sur la part des ressources qui excèdent ce seuil.

 

Malgré tout, les personnes dispensées de cotiser à la CMU de base sont très largement majoritaires car elles représentent plus de 95% des bénéficiaires de la CMU de base.

Cette affiliation à la CMU de base n’est pas automatique, sauf pour certains bénéficiaires de minima sociaux et pour les personnes qui ont des droits ouverts à la CMU complémentaire. Ces personnes doivent donc demander le bénéfice de la CMU de base mais ce qui est nouveau est que cette demande peut être faite par un tiers, notamment par les services de l’hôpital qui accueillent une personne dont aucun droit à l’assurance maladie n’est ouvert. Cela conduit alors à rendre nécessaire le volet complémentaire de la CMU.

 

  1. La CMU complémentaire

            Le bénéfice de la CMU-C est sans lien avec la qualité d’assuré social ou d’ayant droit mais est uniquement conditionné par le niveau de ressources du foyer du demandeur car c’est au regard des ressources de ce foyer que sa capacité à assumer le reste à charge ou sa capacité à financer une complémentaire santé va pouvoir être appréciée. Ainsi, ce dispositif s’accompagne d’une condition de ressources qui doit naturellement varier en fonction de la composition du foyer. Le plafond de ressources mensuel est de 661 euros pour 1 personne, 991 euros pour 2 personnes…

L’accès à la CMU C est uniquement conditionné par le niveau de ressources ! Peu importe que la personne puisse avoir droit aux prestations de base de l’assurance maladie, de sorte que parmi les bénéficiaires, le groupe est très hétérogène. La plupart de ces bénéficiaires de la CMU de base se retrouve parmi les bénéficiaires de la CMU C mais pas tous. Ceux qui sont cotisants à la CMU de base peuvent avoir des revenus supérieurs aux montants fixés et donc ne pas pouvoir bénéficier de la CMU C. Parmi les bénéficiaires, il y a les personnes qui sont ayants droit mais dont les revenus sont inférieurs aux plafonds de la CMU C : les travailleurs pauvres.

 

  1. a) La gestion :

La loi de 1999 a prévu un dispositif original pour gérer cette complémentaire santé :

  • 1ère mesure 

            La loi de 1999 a prévu un dispositif original car cette complémentaire santé peut être gérée par les CPAM. Le but est de permettre aux bénéficiaires des deux volets de la CMU mais aussi aux personnes assuré social dont les prestations de base étaient gérées par la CPAM de bénéficier du guichet unique (opérer toutes les démarches dans un même lieu, ce qui est un gage de simplicité, de rapidité et d’efficacité).

  • 2ème mesure

            Par ailleurs, la loi de 1999 a souhaité que les bénéficiaires de la CMU complémentaire puissent, comme la grande majorité de la population, choisir tout de même l’organisme qui pourrait gérer leur complémentaire santé. Il peut s’agir d’un organisme de protection sociale complémentaire qui a déclaré participer au dispositif.

 

  1. b) Le financement

            Dans la mesure où elle est gratuite, il faut quand même payer les prestations complémentaires. Un fond a été créé, un fond dit « le fond de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie ». Pour simplifier, on le nomme souvent le fond CMU complémentaire.

Ce fond a vocation à recueillir des recettes et au départ différents types de recette étaient identifiées :

  • Une dotation budgétaire de l’état qui était prévu par la loi de finance
  • Une taxe payée (une contribution) par tous les organismes de protection sociale complémentaire, tous les organismes d’assurance complémentaire, intervenant dans le domaine des soins de santé.

Ensuite ce fond qui recueille ces recettes, reversent à tous les organismes qui accueillent les bénéficiaires de la CMU complémentaire, une somme forfaitaire par tête.

Un financement relativement équilibré au départ : un secteur de la complémentaire santé accepte de prendre part à la mise en œuvre, l’état qui s’investie par cette loi afin de favoriser l’accès aux soins.

 

Le problème c’est que ce système de financement a vécu puisque et depuis 2009, l’état ne verse plus aucune dotation budgétaire à ce fond c’est-à-dire que les lois de finance prévoient comme dotation budgétaire 0 euros. Ce retrait de l’État est très critiqué car les besoins de recettes de ce fonds ne se sont pas taris. Ce retrait a été contrebalancé par une augmentation de la contribution qui pèse sur les complémentaires santés.

La loi de finance de 2013 prévoit quand même que le fonds pourra désormais compter sur de nouvelles recettes : une partie du produit de la taxe sur les boissons contenant des édulcorants et une partie du produit de la taxe sur les boissons à sucre ajouté. 

 

  1. c) les droits des bénéficiaires

Pour préciser quelques-uns de ces droits des bénéficiaires :

  • Cela signifie qu’ils sont dispensés d’avancer les frais des soins
  • Cela signifie aussi que les tarifs qui seront appliqués aux soins dont ils bénéficient, doivent être ceux de l’assurance maladie.

Cela se justifie parfaitement : les recettes du fond ne sont pas extensible à l’infini. Bien au contraire, on est face à des recettes contraintes, de sorte que le législateur ne pouvait mettre en place de dispositif qui ce serait engagée à prendre en charge les frais de santé hauteur des frais réellement engagés, c’est-à-dire de façon illimités.

Donc un moyen de limité les dépenses du fond, étaient un moyen de limiter la prise en charge.

Et la loi a considéré que cette prise en charge ne s’effectuerait que dans la limité des tarifs de l’assurance maladie.

  • La loi prévoit aussi que les bénéficiaires de la CMU complémentaire ne peuvent se voir appliquer que les tarifs de sécurité sociale c’est-à-dire que les tarifs dit « conventionnés ».

 

Ce dispositif n’a pas tardé à créer des effets pervers car certains professionnels de santé qui, en fonction du statut qui est le leur, ont le droit de pratiquer des dépassements d’honoraires étaient privés de ce droit à l’égard des bénéficiaires de la CMU C. Certains professionnels de santé ont alors évincé les bénéficiaires de la CMU C afin de ne pas avoir à supporter ces contraintes.

Concernant d’autres domaines comme la lunetterie, le tarif de sécurité sociale est totalement déconnecté du coût véritable de la prestation.

            Un dispositif de rattrapage a été instauré : l’aide à une complémentaire santé par la loi de réforme de l’assurance maladie du 13 août 2004. Il s’accompagne de nouvelles conditions de ressources et on retrouve des plafonds. Il s’agit de solvabiliser les bénéficiaires en les aidant à financer une complémentaire santé. La complémentaire santé va être partiellement payée grâce à une aide dont la personne est titulaire mais qui est perçue directement par l’organisme de complémentaire santé. Le montant maximum de cette aide varie en fonction de l’âge du bénéficiaire.

 

 

Chapitre II. La couverture du risque professionnel

 

Section introductive. La genèse de la législation sur le risque professionnel

 

Paragraphe I)  L’inadaptation du droit de la responsabilité civile aux risques du travail

 

            Entre le dépôt du premier projet de loi et le vote de la loi, une longue période s’est écoulée car le projet a été déposé le 29 mai 1880 et la loi fut votée le 9 avril 1898. Martin Nadaud a déposé une loi dont l’intitulé est « la responsabilité des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail ». Cette première tentative est ancrée dans les références à la responsabilité même si elle n’a pas abouti. Nadaud a la conviction que la révolution industrielle a conduit à un environnement du travail tout à fait nouveau marqué par le machinisme entrainant une dangerosité inédite et l’idée est que les règles de responsabilité civile ne sont pas appropriées pour permettre aux victimes d’être indemnisées.

 

La responsabilité civile, telle qu’elle existe, est une responsabilité très largement fondée sur la faute. L’article 1382 prévoit la faute intentionnelle et l’article 1383 fait référence à la négligence, l’imprudence mais ils sont très difficiles à mettre en œuvre en matière d’accidents du travail. En effet, le contexte dans lequel le dommage se produit est souvent un contexte de subordination donc la victime doit prouver une faute par tous moyens. La victime doit établir la faute de son employeur et on peut imaginer qu’il lui sera difficile de trouver des témoins car en cas de témoignage contre l’employeur, ils s’exposent à des congédiements.

            Dès lors que le système est fondé sur la faute, on tient aussi compte de la faute de la victime, quelle qu’elle soit et même une faute légère pourra priver la victime, totalement ou partiellement, de son indemnisation. L’articulation des fautes peut conduire à réduire l’indemnisation de la victime. Or, certains estiment que l’on ne devrait pas tenir compte de toutes les fautes pour réduire l’indemnisation de la victime.

            De plus, des tiers (salariés) peuvent être auteurs de fautes à l’origine de l’accident. L’assurance privée est très peu développée, de sorte que les personnes ne s’assurent pas pour les dommages qu’elles pourraient causer aux autres, ni même pour les dommages qu’elles pourraient subir. Or, il existe des sociétés de secours mutuel, des compagnies d’assurance accident et une caisse nationale d’accidents. En réalité, peu d’employeurs avaient assurés leurs salariés à ces caisses ou ces institutions de prévoyance donc le plus souvent, la victime accidentée ne va pas recevoir d’aide spécifique.

 

 Les juges, face à cette condition de l’accidenté du travail qui est difficile et à l’importance des préjudices, ont parfois essayé (dès le début du 19ème) d’exploiter le code civil pour indemniser les victimes. Dans un premier temps, ils ont tenté d’exploiter la responsabilité contractuelle mais ils ont renoncé car ils ont estimé que le contrat de louage ne comportait aucune obligation de sécurité légale ou conventionnelle.

            Ensuite, ils ont exploité le domaine de la responsabilité civile en dégageant une sorte de standard, de modèle ; celui du bon employeur en élaborant une sorte de doctrine des devoirs patronaux. Ils ont cherché à définir à partir de quand l’employeur était défaillant. Une jurisprudence va se construire en se référant au pouvoir d’organisation de l’employeur. En parallèle, il y a la théorie du risque profit : l’employeur tire profit de l’activité des salariés donc en retour, il leur doit la sécurité.

            Quand il apparait que l’employeur a placé à un poste un salarié inexpérimenté et qu’il s’est blessé ; quand l’employeur n’a pas choisi un personnel adapté à la tâche à accomplir ; quand il n’a pas bien réparti le service ; en cas de défaut de surveillance et d’assistance alors que le travail présentait une dangerosité => La faute de l’employeur est retenue.

Le juge réussi à engager la responsabilité de l’employeur sur une logique encore basée sur la faute. Cette logique interdit toute réparation quand à l’origine de l’accident, il n’y a aucune faute. Cela fait référence aux cas fortuits où rien n’est imputable au fait de l’homme (danger inhérent à la machine) et dans ce cas, il n’y aura aucune indemnisation.

            Les juges ont ensuite découvert les ressorts de l’article 1384 alinéa 1 à l’occasion d’un arrêt de la chambre civile du 16 juin 1896 en établissant une RFC.

 

Paragraphe II. La formation d’un droit du risque professionnel

 

            La loi du 9 avril 1898 a un champ d’application matériel et personnel limité car au départ, les seuls risques envisagés sont les accidents du travail et les seules personnes destinataires de ce régime particulier sont les personnes travaillant dans des entreprises industrielles. Au départ, l’élément de dangerosité du travail justifie la prise en charge particulière. L’idée est que cette indemnisation de l’accident du travail doit marginaliser la référence à la faute (et non pas l’abandonner !). La faute ne doit pas être le socle de l’indemnisation du risque professionnel mais si elle a vocation à intervenir, elle doit le faire de manière secondaire.

S’ajoute à cela que l’activité industrielle s’accompagne presque nécessairement de petites fautes qui n’ont pas à être prises en compte dans l’indemnisation car elles sont assez communes et peuvent avoir des conséquences démultipliées. Cette loi s’accompagne de la mise en place d’immunités, pour ces petites fautes, de la victime ; de l’employeur et des autres salariés de l’entreprise.

L’idée est que c’est une loi de pacification : il y a une indemnisation automatique qui est due dès que l’accident du travail est caractérisé et versée indépendamment d’une quelconque référence à la faute. Or, cette indemnisation est forfaitaire, limitée.

 

En 1898, il est admis que ces immunités instaurées n’étaient plus justifiées quand les fautes atteignaient un certain degré de gravité. Ces fautes font tomber l’immunité donc si c’est la victime qui est à l’origine de telles fautes, l’indemnisation à laquelle elle avait droit va diminuer ou disparaître. Quand les auteurs de telles fautes sont des membres de l’entreprise ou l’employeur, l’indemnisation doit être améliorée et même, des voies de recours doivent être ouvertes contre les auteurs. Ce schéma d’indemnisation, ces immunités sont organisées dans l’entreprise donc dès qu’un tiers à l’entreprise est en cause, il est exposé à une action en responsabilité sans aucune limite.

 

La loi de 1898 réserve l’indemnisation aux ouvriers victimes dans les entreprises industrielles donc il y a un lien entre la prise en charge du risque et la dangerosité du travail. Ce lien va demeurer assez longtemps car les extensions qui vont être réalisées montrent qu’en arrière plan, le caractère dangereux du travail effectué par le salarié est vraiment une justification de la prise en charge.

Ex : en 1899, la loi est étendue aux exploitations agricoles qui recourent à des engins motorisés. On retrouve alors cette référence à la machine qui est source de danger. En 1914, ce sont les exploitations forestières qui entrent dans le champ d’application de la loi.

Progressivement, cette référence au danger va disparaître : en 1923, ce sont les gens de maison qui bénéficient de cette protection et en 1938, la condition qui tenait à l’existence d’un contrat de louage de service disparaît. Il suffit dès lors que le travail ait été exécuté comme s’il y avait un contrat de louage de service valable.

 

Dans le même temps, un autre risque professionnel va apparaître : la maladie professionnelle par la loi du 25 octobre 1919. En 1919, seules deux maladies professionnelles seront prises en compte mais il est admis que le travail peut rendre malade. Cette idée que le travail peut rendre malade en l’absence de toute faute est tout à fait nouveau.

Ce dispositif de prise en charge de la maladie professionnelle s’appuie sur les mêmes principes que l’indemnisation des accidents du travail : une indemnisation automatique et forfaitaire en l’absence de faute et s’il apparaît que l’employeur ou le salarié a commis une faute hors du commun (intentionnelle ou inexcusable), l’indemnisation complémentaire peut être actionnée. La santé dont il s’agit est la santé physique.

 

En 1946, la loi du 30 octobre reconnaît un nouveau risque professionnel : les accidents du trajet. Cette extension a été très critiquée car le salarié se trouve en dehors de l’entreprise et échappe à la sphère d’autorité de l’employeur.

La victime de l’accident du trajet bénéficie de cette indemnisation automatique et forfaitaire comme les autres victimes mais elle va aussi se voir reconnaître la possibilité d’agir en indemnisation complémentaire quelque soit l’auteur de l’accident. Cet accès à l’indemnisation complémentaire ne va pas être envisagé dès 1946 mais par une loi de 1963 qui l’ouvre très largement.

 

En 1993, la loi du 27 janvier prévoit que les victimes d’accident du travail ont pu accéder à l’indemnisation complémentaire quelque soit l’auteur de l’accident quand cet accident du travail était un accident de la circulation.

 

Aujourd’hui, très souvent, la comparaison de la situation des victimes des risques professionnels et de la situation des victimes de dommages soumis pour leur indemnisation au droit civil conduit à constater que les victimes de risques professionnels sont dans une situation moins favorable pour leur indemnisation que les victimes de risques non professionnels.  Ce sont les juges qui ont alors réalisé ce travail d’adaptation.

Les risques professionnels sont entrés dans la sécurité sociale par la loi du 30 octobre 1946.

 

Section I. Les formes du risque professionnel

 

Paragraphe I. L’accident du travail

 

            L’article L..411-1 du code de la Sécurité sociale retient qu’ « est accident du travail quelle qu’en soit la cause l’accident survenu à l’occasion du travail ou par le fait du travail à toute personne salariée ». La cause est indifférente pour maintenir la qualification d’accident du travail.

 

  1. La notion de fait accidentel

                        Ce fait accidentel suppose que soient réunis deux types d’éléments : un fait matériel et une lésion.

 

  1. Un fait matériel

            Ce sont les juges qui ont énoncé une définition de l’accident du travail car la loi ne le définit pas. Le premier arrêt est un arrêt des chambres réunies du 7 avril 1921 : l’accident est une atteinte au corps humain provenant de l’action soudaine et violente d’un élément extérieur.

Il y a alors 3 éléments constitutifs : la soudaineté, la violence et l’extériorité. Au fil des années, on se rend compte qu’il y a un élément très important : la soudaineté car elle permet de dater, d’identifier l’évènement dans le temps et dans l’espace. Quand un évènement a une date certaine, on peut généralement en déduire le lieu où il s’est produit.

           

Dans une affaire Gendre rendue le 25 juin 1964 par la chambre sociale, il s’agissait de dire si une maladie pouvait être prise en charge au titre des accidents du travail. Ce qui s’oppose à la prise en charge de la maladie au titre des accidents du travail est qu’il est impossible d’identifier le fait à l’occasion duquel la maladie a pu être contractée. La maladie n’est donc pas prise en charge.

Arrêt du 21 mars 1969, Assemblée plénière = attendu de principe « constitue un accident du travail tout fait précis survenu soudainement au cours ou à l’occasion du travail qui est à l’origine d’une lésion corporelle ». Une maladie qui se déclare à la suite d’un fait identifiable pourra être qualifiée d’accident du travail et pas de maladie professionnelle. Une surdité qui survient à la suite d’une explosion peut être prise en charge au titre de l’AT ; comme l’infection par le VIH (seringue infectée) ; un stress post traumatique qui survient après une agression ou une explosion.

On passe ici d’une approche plus large de la lésion car avec le stress post traumatique, on est en présence d’un trouble psychique.

 

Cet évènement soudain a également évolué dans sa perception. Au départ, il était constitué par un fait précis. Or, depuis un arrêt de la chambre sociale du 2 avril 2003, les juges ont proposé une nouvelle définition de l’AT : « constitue un AT un évènement ou une série d’évènements survenus à des dates certaines dont il est résulté une lésion corporelle ». Cette somme de petits évènements permet de prendre en charge des lésions au titre de l’AT alors que pris individuellement, ils ne permettraient pas cette prise en charge.

Cette solution semble importante en matière de harcèlement car on est en présence d’une addition d’actes auxquels on peut donner date certaine.

                       

Dans la représentation commune, un accident consiste nécessairement dans un fait qui est anormal. Dans la jurisprudence, on voit que ces faits anormaux vont être représentés mais on constate aussi que sont retenus des faits pour lesquels aucune anormalité ne peut être mise en évidence. Elle retient un entretien d’évaluation dont les conséquences ont été néfastes pour le salarié.

De manière inattendue, on a des évènements qui sont vraiment inscrits dans le parcours professionnel; qui sont inhérents à l’activité professionnelle donc ils n’ont pas de caractère anormal. Or, les conséquences produites par de tels évènements sont pris en charge au titre de l’AT. Arrêt du 1er juillet 2003 = la dépression soudaine est un AT. Altercation avec l’employeur = AT.

 

  1. La nécessité d’une lésion

            Au départ, la lésion est une atteinte au corps humain, quelle que soit sa nature (physique, psychologique, apparente, profonde … Peu importe). Dans une circulaire de 1982, les pouvoirs publics admettent qu’un accident peut résulter d’une lésion psychique à la suite de menaces ou d’agressions. Elle concerne les stress post-traumatiques.

 

Aujourd’hui, le droit de la sécurité sociale privilégie une approche objective de la pathologie, c-a-d qu’il faut une manifestation de la lésion et dès lors que cette lésion est constatée, qu’il s’agisse d’une lésion physique ou psychique, elle doit donner lieu à une prise en charge.

Ce terme de lésion est contesté car certains considèrent que ce terme n’est pas propice à la prise en compte de la dimension psychique.

 

De plus, la question qui se pose est celle de l’imputabilité de la lésion au fait accidentel. Cette lésion ne peut être prise en charge que si elle est en relation avec l’accident mais pour autant, doit-on imposer à la victime d’établir ce lien de cause à effet, c-a-d prouver la causalité entre la lésion et le fait dont elle prétend qu’il est à l’origine de la lésion.

La jurisprudence a instauré un régime de preuve très favorable à la victime. Dans un arrêt de 1921, les juges ont estimé que la victime bénéficie d’une présomption d’origine, c-a-d une présomption d’imputabilité de la lésion au fait accidentel lorsque cette lésion survenait en même temps que le fait accidentel ou lorsqu’elle apparaissait dans un délai très proche du fait accidentel.

 

Or, la notion de délai très proche pose problème car la jurisprudence ne détermine pas le délai dans lequel la lésion doit se manifester. Il s’agit d’une appréciation au cas par cas. Toutes les maladies ne se manifestent pas dans le même temps donc on ne peut pas fixer de critère objectif.

Ainsi, le salarié doit signaler tout fait qui s’est produit à l’occasion du travail car s’il ne produit pas des conséquences visibles immédiatement, elles peuvent apparaître de manière différée.

Pour certaines lésions, des procédures particulières ont été instaurées : l’infection par le VIH. Un décret de 1994 avait fixé une procédure précise que doit respecter la victime pour bénéficier de la présomption d’origine.

 

  1. Le caractère professionnel de l’accident

 

            Le code de la Sécurité sociale donne deux indications à l’article L.411-1 : l’accident est survenu par le fait du travail ou à l’occasion du travail.

Le fait du travail n’a pas posé de grandes difficultés à la jurisprudence car il s’agit de la blessure qui résulte de l’outil de travail, d’une machine ou de l’action d’un autre salarié de l’entreprise.

 

En revanche, « à l’occasion du travail » est interprétée par les juges en se référant au lien de dépendance qui unit le salarié à l’employeur. Arrêt des chambres réunies du 28 juin 1962. A partir de là, les juges ont posé une présomption très avantageuse pour les victimes en considérant que lorsque la personne est sous la dépendance de son employeur, elle doit être considérée victime d’un accident professionnel.

Le problème qui se pose est celui de la dépendance donc on pose alors une présomption : le salarié est sous la dépendance de son employeur quand il est au temps et au lieu de travail.

 

  1. La présomption d’imputabilité de l’accident au travail

            Cette présomption d’imputabilité est jurisprudentielle (arrêt du 28 juin 1962). Lorsque le salarié est à son travail, qu’il est au temps du travail, sur son lieu de travail, en principe, il travaille donc cette présomption est logique. Toutefois, si en principe il travaille, par exception, ce salarié peut se livrer à d’autres pratiques. Cette présomption est simple.

 

  1. La définition extensive du temps de travail

 

            Le temps de travail se détache un peu de la notion de temps de travail connue en droit du travail. Le temps de travail au sens du droit de la sécurité sociale n’est pas nécessairement le temps du travail qui est pris en compte pour le calcul de la durée du travail. Le temps de travail va au-delà de ce temps de travail pris en compte par le droit de travail. Ainsi, la définition donnée par la sécurité sociale est plus large.

 

            En droit de la sécurité sociale, les périodes d’astreinte sont assimilées au temps de travail et sont considérées comme faisant partie du temps de travail lorsque le salarié effectue cette astreinte dans un lieu qui est déterminé par l’employeur et distinct du domicile du salarié. Quand le salarié est tenu de rester à la disposition permanente et immédiate de l’employeur et quand il effectue cette astreinte en dehors de son domicile dans un lieu déterminé par l’entreprise et imposé par l’employeur, ce temps d’astreinte va être assimilé au temps de travail. Le salarié qui effectue son astreinte au domicile n’est pas considéré comme étant au temps et au lieu de travail. Un arrêt du 2 avril 2003 rendu par la chambre sociale considère que l’accident survenu pendant l’astreinte doit être qualifié d’AT en bénéficiant de la présomption d’AT.

            Il existe en droit de la sécurité sociale des périodes qui ne sont parfois pas qualifiées de temps de travail en droit du travail mais qui seront assimilées à du temps de travail en droit de la sécurité sociale. Ex : pauses, temps d’habillage/de déshabillage. La personne qui a un malaise avant ou à l’issue de son temps de travail est-elle au temps de travail ? Pour le droit du travail, ce ne sont pas des temps de travail mais ils peuvent l’être si la négociation collective en décide ainsi ou si le code du travail l’impose. En droit de la sécurité sociale, ce sont des temps très proches du temps de travail donc ce sont toujours des temps assimilés au temps de travail. On a alors une notion du temps de travail qui se détache de ce que l’on retrouve en droit du travail.

Le salarié ne peut pas bénéficier de la présomption si l’employeur s’oppose à ces pauses. Les pauses non tolérées sont interdites donc elles ne bénéficient pas de la présomption et ne peuvent pas être assimilées à des temps de travail.

 

            En cas de suspension du contrat de travail (sanctions disciplinaires, grève, maladie…), le principe est que le salarié ne peut pas être au temps de travail même s’il peut être présent dans l’entreprise. Néanmoins, bien qu’en période de suspension, le salarié peut être considéré comme victime d’un accident du travail même si la présomption ne s’applique plus. Le salarié peut effectuer des actes qui ne peuvent s’expliquer que par sa condition de subordination donc tout de même, les juges admettent que le salarié soit admis à établir que son accident est un AT.

 

  1. La définition extensive du lieu de travail

 

            Les juges ont choisi de retenir la conception la plus large possible du lieu de travail. D’ailleurs, en retenant cette conception très large, ils favorisent une étendue très large au champ d’application de la présomption d’imputabilité.

Pour la jurisprudence, le lieu de travail est le poste de travail mais plus largement, c’est tout endroit où le salarié se trouve placé sous l’autorité et le contrôle de l’employeur.

Le lieu de travail est constitué de tous les locaux de l’entreprise et même les dépendances, un parking, les voies d’accès, une cantine, un vestiaire, un lieu d’astreinte… Tous ces lieux sont assimilés au lieu de travail, ce qui signifie qu’à partir du moment où les salariés pénètrent dans le périmètre de l’entreprise, ils se trouvent sur leur lieu de travail. Un salarié qui tombe dans l’escalier ou sur le parking en arrivant à son travail est victime d’un AT (sur le lieu de travail + temps proche de l’activité pro).

 

  1. La preuve de l’absence d’imputabilité de l’accident au travail

 

            Le salarié peut être au temps et au lieu de travail mais il n’est pas autorisé à se livrer à n’importe quel acte pour préserver le bénéfice de la présomption et lorsqu’il apparait que le motif de la lésion ou de l’accident n’a aucun lieu avec le travail, la présomption va tomber. Deux cas permettent de renverser la présomption, ce qui a été posé par la jurisprudence :

 

– la soustraction du salarié à l’autorité de l’employeur. Dans ce cas, le salarié s’est montré insubordonné en se livrant à des actes d’insubordination (abandon de poste, activités formellement interdites par l’employeur : entrée dans un local qui lui est interdite, s’introduire dans un entrepôt pour y voler du matériel).

La jurisprudence est assez indulgente en considérant que de tels cas ne sont pas nécessairement constitutifs d’une soustraction à l’autorité de l’employeur, comme si ces débordements témoignaient d’un défaut de surveillance ou d’encadrement de la part de l’employeur. Elle maintient alors la qualification d’AT.

Or, en cas de rixe, les juges font une différence selon le motif de la rixe. Si le motif est professionnel, l’accident reste pro alors que si le motif est d’ordre privé, les juges considèrent qu’il y a bien soustraction à l’autorité de l’employeur.

 

– l’existence d’une cause totalement étrangère au travail. La preuve de la cause totalement étrangère impose que cette cause soit établie, identifiée. Cela signifie que lorsqu’il existe un doute, une incertitude sur cette cause, on ne peut pas établir la cause totalement étrangère. En cas de doute, la présomption demeure. Cela permet de comprendre la jurisprudence sur les AVC, les suicides… car de telles manifestations sont présumées, du seul fait qu’elles se produisent au temps et au lieu de travail, être AT, sauf s’il est avéré que cette manifestation a une cause totalement étrangère au travail (examen médical montrant une pathologie préexistante). Dans ce cas, la pathologie est la seule cause de l’accident.

De plus, il faut que le travail n’ait joué aucun rôle dans la survenance de l’accident pour que la cause soit totalement étrangère et qu’il ne s’agisse pas d’un AT. Même si le travail n’a pas joué un rôle unique, dès lors que l’élément travail est présent dans ces facteurs, la qualification d’AT sera maintenue. L’AT n’a donc pas besoin d’être exclusivement dû au travail mais c’est tout accident dont on peut dire que le travail est intervenu ou dont on ne peut pas dire que le travail n’est pas intervenu.

En cas de décès de la victime, la CPAM ou l’employeur qui conteste la présomption professionnelle peut demander l’autopsie de la victime. Il s’agit de pouvoir établir que la cause est totalement étrangère au travail. Si les ayants droit refusent cette autopsie, ils perdent le bénéfice de la présomption d’imputabilité de l’accident au travail.

 

  1. La preuve du caractère professionnel de l’accident

            Par principe, le salarié n’est pas placé sous l’autorité de l’employeur mais pour autant, il peut être amené à se livrer à certains actes en rapport avec son travail. C’est le rapport avec le travail qui va justifier la qualification d’AT et on peut se demander jusqu’où le rapport avec le travail sera assez étroit, suffisant pour retenir qu’il y a bien un AT. La difficulté est d’objectiver ce rapport avec le travail. L’intérêt est celui de l’indemnisation car l’indemnisation du risque professionnel est aujourd’hui vivement critiquée puisqu’on la considère comme insuffisante et certains auteurs demandent une amélioration de cette indemnisation. Il faut alors que la notion d’AT soit solide car on voit mal comment une mauvaise définition permette cette amélioration.

 

            On admet la qualification d’AT si la victime établit le lien avec le travail ou établit l’autorité avec l’employeur. C’est le cas de cérémonies organisées par l’entreprise (mariage, enterrement), participation à des évènements recommandés par l’entreprise. La jurisprudence retient que lorsque le salarié ne pouvait se soustraire à cette demande, sans encourir la réprobation de son employeur, si un accident survient, il sera qualifié d’AT. On a une référence à la soumission à l’autorité de l’employeur qui est assez peu claire sur le plan juridique car le salarié ne pourrait pas être sanctionné disciplinairement. La participation à des activités ludiques, sportives est également admise en tant qu’AT car le lien avec l’activité professionnelle est évident puisqu’il est très difficile de ne pas y participer (souder les équipes, être avec ses collègues).

Il y a aussi des activités qui ont un rapport étroit avec le travail (arrêt de 1999) : le juge retient la qualification d’AT alors que dans les faits énumérés, il existait autant d’éléments permettant de retenir la qualification que de l’exclure.

 

Arrêt du 22 février 2007, 2ème chambre civile : un salarié en arrêt de travail à son domicile tente de se suicider. Cet acte est qualifié d’AT car les juges considèrent que dans ce cas, le salarié a établi que ce geste était intervenu par le fait du travail. Les juges ont alors pris en compte le motif de l’arrêt de travail (conditions de travail). C’est une conception particulière du fait de travail car il est plus largement constitué par les conditions de travail qui s’exportent jusqu’au domicile du salarié.

 

  1. L’accident de mission

            L’accident de mission est un accident du travail qui survient dans un contexte particulier. Le salarié en mission est extrait de son environnement habituel et en conséquence, se référer aux critères d’application de la présomption n’est pas possible (pas de temps, de lieu de travail). Par nature, la mission s’effectue en dehors de l’entreprise mais en même temps, le salarié en mission reste sous l’autorité de son employeur puisque cette mission est accomplie selon les ordres de l’employeur et pour le compte de l’employeur.

La difficulté est que le salarié en mission jouit aussi d’une très grande liberté avec une large marge de manœuvre pour organiser son travail et en pratique, il échappe au contrôle et à la surveillance de l’employeur.

 

Pendant longtemps, les juges retenaient que quand le salarié en mission se livrait à des actes qui entraient dans son activité professionnelle, l’accident qui survenait était réputé accident de mission/du travail. C’était au salarié d’établir qu’au moment de l’accident, il était en train de travailler, d’effectuer des actes en rapport avec son activité professionnelle, sa mission (restaurant, promenade pour améliorer des relations commerciales, pour favoriser l’avancement des négociations…). Ces actes n’étaient pas des actes de travail au sens pur du terme.

En revanche, dès que le salarié se livrait à des activités d’ordre privé, dans un intérêt personnel, l’accident devenait un accident ordinaire. Il y avait aussi les actes de la vie courante (dormir dans une chambre d’hôtel, manger…) qui étaient considérés comme des accidents ordinaires et non pas des actes de mission au motif que de tels actes étaient effectués par le salarié où qu’il soit, en mission ou pas. Or, les juridictions de l’ordre administratif estimaient que l’agent en mission devait être couvert par le régime de l’accident de service car même s’il s’agissait d’actes de la vie courante, l’environnement n’était pas un environnement habituel mais inhabituel. Il y avait donc une divergence jurisprudentielle entre les deux ordres.

 

Les juges judiciaires ont alors fait évoluer leur jurisprudence en commençant à admettre que lorsque le contexte a joué un rôle déterminant, on doit pouvoir donner à l’accident la qualification d’accident de mission. Les juges prennent en compte le contexte pour retenir la qualification d’accident de mission. Arrêt de la CA de Nancy du 13 février 2001 = un salarié avait été envoyé en mission en Russie dans des conditions d’isolement très rude (pas de lien social, conditions climatiques difficiles) donc il boit beaucoup d’alcool et en meurt. Les ayants droit mettent en cause le contexte en prétendant qu’il s’agit d’un AT. Les juges retiennent la qualification d’AT.

Deux arrêts de la chambre sociale du 19 juillet 2001 modifient la jurisprudence. A partir de ces arrêts, les juges abandonnent la distinction entre l’exécution de la mission proprement dite et l’acte de la vie courante.

 

            De plus, les juges vont créer une présomption en faveur du salarié en mission : le salarié en mission est présumé victime d’un accident de mission et donc d’un AT, sauf s’il est établi que le salarié a interrompu sa mission pour un motif personnel ou que les lésions dont il est atteint ont une cause totalement étrangère au travail. Deux causes permettent de faire tomber la présomption, ce qui rappelle les deux cas qui permettent de faire tomber la présomption d’imputabilité au travail. La cause totalement étrangère au travail est la même.

 

Quant à l’interruption de la mission pour motif personnel, soit les juges ont une conception large de l’intérêt personnel, ce qui facilitera le renversement de la présomption ; soit ils ont une conception restrictive de l’intérêt personnel et elle sera plus solide et donc plus difficile à renverser.

La tendance des juges est plutôt à une interprétation étroite de l’intérêt personnel. Les juges retiennent cet intérêt personnel assez rarement. 3 arrêts de 2003 où des considérations personnelles avaient animé le salarié. Il avait aménagé sa mission pour s’organiser selon son choix.

 

Paragraphe II. L’accident du trajet

 

                        C’est un accident qui est presque assimilé à l’accident du travail dans le code de la Sécurité sociale : article L.411-2.

 

  1. L’autonomie de l’accident du trajet

 

  1. Les garanties du droit du travail

            Certains salariés bénéficient de garanties contre la rupture du contrat de travail parmi lesquels une place particulière est faite aux victimes d’ATMP (obligations de reclassement). Puisque le risque est né de l’exercice même de l’activité professionnelle, l’employeur doit une sécurité particulière à son salarié et mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour reclasser ce salarié afin de lui permettre de continuer d’avoir une vie professionnelle.

Cette protection particulière est réservée à ces victimes d’accidents qui sont au cœur de l’activité professionnelle, de sorte que les victimes d’accidents du trajet ne bénéficient pas de cette protection en cas d’inaptitude. L’employeur n’est tenu à leur égard d’aucune obligation de reclassement compatible avec l’état de santé de la victime.

 

Les juges ont, dans le silence de la loi, réservé l’obligation de reclassement en cas d’inaptitude aux victimes d’ATMP. Ensuite, la loi a entériné cette jurisprudence selon laquelle les victimes d’accidents du trajet ne bénéficient pas de cette obligation de reclassement en cas d’inaptitude.

 

  1. L’accès à l’indemnisation complémentaire

            Les victimes d’ATMP ont un accès à l’indemnisation complémentaire contraint et limité quand c’est un membre de l’entreprise qui a contribué au risque professionnel puisque dans ce cas, cet accès est conditionné par l’existence de ses fautes qualifiées, intentionnelles ou inexcusables. Quand il s’agit d’un tiers, l’accès à l’indemnisation complémentaire est libre.

En cas d’accident de la circulation, la victime peut agir en indemnisation complémentaire, quelque soit l’auteur de l’accident.

 

            En matière d’accident du trajet, aucune contrainte n’est posée. La victime peut agir en indemnisation complémentaire, quelque soit la personne intervenue. Cette possibilité montre qu’en matière d’accident du trajet, il n’existe aucune immunité de l’employeur ou des copréposés de la victime.

En cas d’accident de la circulation, cette différence de régime juridique n’a pas toujours présenté une importance majeure. Là où cette différence est apparue lourde de conséquences, c’est en 1985 avec le vote de la loi Badinter relative à l’amélioration de l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. A partir de 1985, ce qui est discutable est que d’un côté, il y a des victimes d’accidents de la circulation-accidents du travail qui étaient privés de l’indemnisation complémentaire sur le fondement de la loi de 1985 quand c’est l’employeur ou un copréposé qui était impliqué dans l’accident et de l’autre les victimes d’accident du trajet qui pouvaient librement agir en indemnisation complémentaire et qui pouvaient donc accéder au régime d’indemnisation très favorable qui avait été instauré par la loi de 1985.

 

Les juges ont alors disqualifié les accidents de mission pour les qualifier d’accidents du trajet à la seule fin de permettre aux victimes de l’accident d’agir sur le fondement de la loi de 1985. La loi du 27 janvier 1993 va faire disparaitre l’immunité en cas d’accident de la circulation pour permettre aux victimes directes d’agir en indemnisation sur le fondement de la loi de 1985 contre un membre de leur entreprise. La loi du 18 janvier 1994 ouvre aux ayants droit de victimes d’accident du travail-accident de la circulation la possibilité d’agir sur le fondement de la loi de 1985.

 

  1. Le régime de cotisations de l’employeur

            Le taux de cotisations qui est applicable n’est pas calculé pareil selon que l’on est en présence d’accidents du trajet ou d’ATMP.  En cas d’accident de trajet, l’employeur doit s’acquitter de cotisations dont le taux est unique et national. La fréquence des accidents du trajet est alors sans influence sur le taux de cotisations accident du trajet. Cela s’explique par le fait que ces accidents du trajet échappent à la sphère d’autorité de l’employeur qui n’a aucune prise sur le nombre d’accidents qui peut survenir à ces salariés donc il n’y a pas lieu que le nombre d’accidents survenus produise des conséquences sur le taux des cotisations dues.

En revanche, lorsqu’on est en présence d’ATMP, ces risques surviennent dans la sphère d’autorité de l’employeur donc le législateur a pensé que si le nombre d’ATMP déclarés conduisait à augmenter le taux des cotisations, ce mode de calcul pourrait responsabiliser les employeurs.

 

Un décret du 5 juillet 2010 prévoit une modification entrée en vigueur en 2012 mais ce nouveau mode de tarification n’est pas satisfaisant. Il y a 3 modes de tarification qui dépendent de l’effectif de l’entreprise. Pour les petites entreprises (1 à 19 salariés), c’est un mode de tarification collectif, c-a-d que l’entreprise est soumise à un mode de calcul qui tient compte du nombre d’accidents survenus dans la branche d’activité à laquelle l’entreprise est rattachée. Cela suppose que chaque entreprise ait été préalablement classée en fonction de son activité. Cela peut sembler injuste car si aucun accident n’est survenu dans l’entreprise mais que le nombre d’accidents dans la branche a augmenté, le taux de cotisations va augmenter.

Le second mode de calcul est mixte : il concerne les entreprises de 20 à 149 salariés. C’est un compromis entre la tarification collective et la tarification individuelle.

Les entreprises qui ont un effectif d’au moins 150 salariés bénéficient d’une tarification individuelle réelle qui est déterminée a posteriori et qui va prendre en compte le nombre d’accidents qui est effectivement survenu dans l’entreprise. Les entreprises sont intéressées directement à leurs résultats en matière de prévention du risque professionnel.

 

  1. Le parcours protégé

 

  1. Les extrémités du trajet

            Le code de la Sécurité sociale énumère les extrémités du trajet. Une extrémité est toujours nécessaire : le lieu du travail. Là encore, on retrouve une notion de lieu du travail très large, commune avec celle de l’accident du travail. Le lieu du travail est tout lieu où le salarié se trouve à la demande de son employeur donc ce n’est pas forcément le lieu habituel.

Les autres points sont, selon l’alinéa 1er de l’article L.411-2, la résidence principale qui comporte le lieu d’habitation, les dépendances attenantes… Il y a aussi la résidence secondaire présentant un caractère de stabilité. C’est un lieu qui appartient au salarié ou à son conjoint/compagnon. Le camping n’est jamais une résidence secondaire. Or, l’éloignement n’a pas d’importance. La stabilité s’inscrit dans la durée mais une résidence reste secondaire, même si le salarié ne s’y rend que rarement.

Ce peut aussi être tout autre lieu où le salarié se rend habituellement pour des motifs d’ordre familial. La jurisprudence considère que c’est un lieu dans lequel le salarié va séjourner (approche restrictive).

 

Le second alinéa de l’article L.411-2 envisage le restaurant, la cantine ou plus généralement le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas.

Si un trajet est effectué en dehors de ces endroits, le trajet n’est pas retenu car cette liste est limitative.

 

  1. Le lien entre le trajet et le travail

            Pour être protégé, il faut que le déplacement présente un lien suffisant avec le travail. Le salarié qui se déplace dans son entreprise alors qu’il est en grève, ce n’est pas un accident du trajet, même s’il est fait entre les extrémités prévues par le code de la Sécurité sociale.

Or, les juges ont été sensibles à la situation de salariés qui se déplaçaient dans leur entreprise en période de suspension de leur contrat de travail pour y effectuer des démarches en rapport avec l’activité professionnelle. Cette solution semble raisonnable car le risque est celui de la dérive de la qualification d’accident du trajet.

 

  1. Les modalités d’exécution du trajet

 

Pour être protégé, il faut que ce trajet ait été accompli selon un itinéraire normal, même si des interruptions et des détours sont tolérés. Ces conditions sont posées par l’article L.411-2.

 

  1. La normalité du trajet

            Cette normalité s’apprécie dans l’espace et dans le temps. L’itinéraire normal est en principe le plus court ou encore le plus rapide et qui est effectué sur des voies adaptées aux moyens de circulation choisi.

Le code de la Sécurité sociale a évolué en 2001 pour intégrer le covoiturage car il risque de faire quitter au salarié son itinéraire normal, le placer sur un parcours plus long et moins rapide. Le salarié serait alors sur un trajet anormal. La loi du 17 juillet 2001 a complété l’article L.411-2 en disant que « le trajet peut ne pas être le plus direct lorsque le détour effectué est rendu nécessaire dans le cadre d’un covoiturage régulier ». On trouve encore une référence à la régularité : la victime de l’accident du trajet devra prouver cette régularité (pas une constance ou une fréquence).

Le trajet doit s’effectuer dans un délai normal par rapport au début ou à la fin du travail. Ce délai est apprécié par rapport aux transports du salarié.

 

  1. Les détours et les brèves interruptions

            Le code de la Sécurité sociale envisage une hypothèse : dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné par un motif dicté par l’intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendante de l’emploi.

Si le parcours est interrompu par un tel motif, le parcours n’est plus protégé. En revanche, si on est dans le cas d’un détour justifié par les nécessités essentielles de la vie courante, le parcours restera protégé. Le détour allonge le trajet le plus court, c-a-d maintenir le même sens de circulation. L’interruption suppose une pause délibérée dans le parcours et l’interruption entraine une suspension de la protection.

Une nécessité essentielle de la vie courante est effectuer des achats alimentaires, poster un courrier, faire essence, chercher les enfants à l’école… Les juges qualifient au cas par cas. Le trajet est détourné et le salarié reste protégé.

 

Paragraphe III. Les maladies professionnelles

 

            En 1919, les maladies entrent dans les risques professionnels. Un système efficace est instauré par des tableaux qui permettent de poser des présomptions de maladies professionnelles. C’est une présomption très avantageuse pour les salariés puisqu’il va suffire au salarié d’établir qu’il remplit les conditions posées par le tableau pour être présumé atteint d’une MP. Or, ce système était très rigide : système du tout ou rien car si les conditions du tableau n’étaient pas réunies, le salarié ne disposait d’aucune possibilité  pour obtenir la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie.

En 1993, le législateur a enfin ajouté à ce système de tableaux un dispositif qui permet désormais la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie hors tableaux. Aujourd’hui, on a un système mixte.

 

  1. Le système des tableaux

 

            3 tableaux : désignation de la maladie + délai de prise en charge avec pour certaines, le délai d’exposition + liste des travaux susceptibles de provoquer les maladies (liste indicative et limitative).

 

Ces tableaux dispensent les salariés d’établir le lien de causalité entre le travail et la maladie. Cette causalité est présupposée. Ces tableaux entrainent un déplacement de la charge de la preuve pour les salariés. Ils vont devoir établir :

– qu’ils sont atteints de cette maladie

– qu’elle s’est déclarée dans le délai fixé par le code ; la durée d’exposition 

  qu’ils ont bien effectué les travaux désignés par les tableaux.

Ce régime de preuve est très favorable et dès lors que ces éléments sont établis, la présomption bénéficie à la victime.

C’est une présomption simple qui peut être renversée par la preuve que cette maladie a une cause totalement étrangère au travail. En réalité, établir la cause totalement étrangère au travail est quasiment impossible/irréfragable. Quand on est en présence d’une maladie présumée professionnelle, c’est qu’elle est issue d’un tableau et compte tenu des modalités d’élaboration des tableaux, prouver que la maladie n’a pas de rapport avec le travail semble hypothétique. Le tableau, quand il est publié, résulte d’études épidémiologiques très longues et sérieuses. Il repose sur des bases scientifiques très solides.

Les études ont vocation à montrer que la fréquence de la maladie visée par le tableau est plus importante chez telle population de salariés que dans la population normale. Après, il faut établir au bout de combien de temps le travail favorise la maladie, ce qui suppose des études dans le temps.

Quand un tableau est publié, cela signifie qu’il y a une causalité qui a été mise en évidence donc il est très difficile de détruire cette loi générale. Pour que la présomption tombe, il faut établir que le travail n’a joué aucun rôle dans le déclenchement de la maladie.

 

Ces tableaux évoluent très lentement, ce qui est une faiblesse. De plus, ils sont peu adaptés aux pathologies modernes qui ont pour point commun d’être multifactorielles. Parmi ces causes, il est parfois difficile d’établir que le travail apparaît comme un facteur dominant. Pour que la maladie soit présumée professionnelle, il faut que le facteur travail se détache tout de même des autres, il doit aggraver le travail.

L’idée a été envisagée de compléter le système des tableaux par une autre possibilité d’attribuer à la maladie un caractère professionnel. La loi du 27 janvier 1993 a permis aux salariés qui le souhaitaient de prouver le caractère professionnel de cette maladie.

 

  1. La preuve du caractère professionnel organisé par la loi du 27 janvier 1993

 

            Il existait déjà dans le droit supranational depuis longtemps des dispositions qui invitaient les États à instaurer un système mixte de reconnaissance des maladies professionnelles. On retrouve ces dispositions au niveau de l’OIT mais aussi du droit communautaire. En 1925, il existe une convention 18 de l’OIT qui invite les États à dresser une liste de maladies professionnelles et en 1964, la convention 121 de l’OIT invite les États à se munir d’un système permettant d’établir l’origine professionnelle des maladies hors liste.

Au niveau communautaire, en 1962, une recommandation des communautés européennes demande aux États membres d’ouvrir aux travailleurs un droit à réparation pour les maladies qui ne figurent pas sur la liste nationale mais dont l’origine professionnelle est suffisamment établie. En 1966, une autre recommandation invite à supprimer les conditions limitatives que sont les durées d’exposition et les délais de prise en charge.

Le droit supranational invite les États membres à décloisonner les dispositifs de maladies professionnelles. Il faut ouvrir d’autres possibilités aux victimes. Certains États européens l’avaient fait bien avant 1993 : Italie, Espagne…

                       

En 1993, cette réforme est très attendue. Elle ajoute au système des tableaux deux voies nouvelles de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie. On parle de maladies à caractère professionnel pour évoquer les maladies dont le caractère professionnel a été prouvé par la victime.

 

La première voie de reconnaissance concerne les maladies identifiées par des tableaux mais la victime ne remplit pas les autres conditions posées par les tableaux. La personne peut établir ce caractère professionnel si elle prouve que sa maladie est directement causée par son travail habituel. Une cause directe signifie qu’il faut établir que le travail fait partie des facteurs de la maladie mais le travail ne doit pas être le seul facteur. Il peut y avoir plusieurs facteurs directs.

 

La seconde voie de reconnaissance concerne les maladies qui ne sont identifiées dans aucun tableau. Le législateur a été prudent dans cette ouverture : l’accès à cette voie tient au taux d’incapacité de la victime. Pour pouvoir accéder à cette voie, la victime doit être atteinte d’une incapacité permanente au moins égale à 25% ou être décédée.

De plus, la victime doit établir que la maladie est directement et essentiellement causée par son travail habituel. La victime doit établir que le facteur travail est explicatif de la maladie.

 

Section II. L’indemnisation du risque professionnel

 

Paragraphe I. L’indemnisation automatique et forfaitaire

 

Cette indemnisation concerne tous les risques : ATMP + accidents du trajet.

 

  1. Les prestations en nature

 

            Elles poursuivent l’objectif de la gratuité des frais de santé pour la victime. Or, cet objectif n’est pas atteint. Il y a une prise en charge à 100% des soins justifiés par la lésion mais dans les tarifs de la sécurité sociale, de sorte que lorsqu’il existe des dépassements d’honoraires, ils restent à charge de la victime et lorsqu’il n’existe pas de tarification, il n’y a pas de prise en charge. Il y a aussi une dispense d’avance des frais.

A côté de ces soins médicaux sont aussi pris en charge tous les traitements particuliers qui sont dispensés en vue de la réadaptation fonctionnelle de la victime et de sa rééducation professionnelle.

 

  1. Les prestations en espèce

 

  1. Les prestations en espèce dues à l’assuré victime

 

            – Lorsque l’assuré est frappé d’une incapacité temporaire, il va percevoir des indemnités journalières. Ces indemnités sont dues tant que la santé de la victime n’est pas consolidée. La consolidation n’est pas nécessairement la guérison mais c’est le fait que l’état de santé de la victime est suffisamment stabilisé, de sorte qu’à cours termes, on peut penser que cet état ne va ni s’améliorer, ni s’aggraver.

Ces indemnités ont pour objet de compenser la perte de salaire. Elles sont versées dès le premier jour de l’arrêt de travail (pas de délai de carence) ; calculées à partir d’un salaire de référence (salaire moyen des 30 derniers jours d’activité) composé de la rémunération brute et de certains accessoires. Ces indemnités s’élèvent à 60% du salaire journalier de base pendant les 28 premiers jours et 80% au-delà, sachant qu’elles sont plafonnées.

Le salarié ne doit pas exercer d’activité professionnelle mais le médecin peut autoriser une reprise progressive d’activité professionnelle, ce qui permet à l’assuré de cumuler les indemnités journalières partielles et le salaire.

 

            – Lorsque l’assuré est frappé d’une incapacité définitive, il va recevoir une rentre ou un capital. Une incapacité permanente est constatée, elle peut être totale ou partielle. Quand le taux d’incapacité est inférieur à 10%, l’indemnisation de l’incapacité définitive est faite obligatoirement sous forme de capital.

Le calcul de la rente fait intervenir un taux d’incapacité qui est appliqué à un salaire de référence. Le taux d’incapacité et le salaire de référence retenu vont aller dans le sens d’une limitation importante de l’indemnisation de l’incapacité de la victime.

 

L’incapacité de la victime est calculée par l’établissement du taux d’incapacité réel de la victime à partir d’un barème indicatif d’invalidité et du profil de la victime (âge, état général, caractéristiques physiques/mentales, aptitudes pro, qualification pro…). Le taux est adapté en fonction de la situation de la victime.

Ce taux va permettre d’établir un taux corrigé qui va être retenu pour calculer la rente. La partie inférieure à 50% est divisée par 2 et la partie supérieure à 50% est augmentée de moitié. Ex : taux de 60% devient taux corrigé de 40%. Ce mode de calcul est plutôt défavorable aux salariés voire très défavorable en cas d’incapacité faible.

 

Ce taux est appliqué au salaire de référence. On prend en compte les 12 mois qui ont précédé l’arrêt de travail consécutif à l’accident. Le code de la Sécurité sociale conduit à déterminer une base de calcul : le salaire utile calculé à partir de la rémunération moyenne perçue pendant les 12 mois qui ont précédé l’arrêt de travail. Le salaire utile ne peut être inférieur au montant du salaire minimum mais il ne va pas être toujours pris en compte dans sa totalité. Il n’est pris en compte dans sa totalité que dans la limite de 2 fois le SMIC. Entre 2 et 8 fois le SMIC, il n’est pris en compte que pour 1/3 et au-delà, il n’est plus pris en compte.

Cette base est donc beaucoup plus étroite que la rémunération réelle perdue à la suite de la maladie. Ce mode de calcul conduit à limiter le montant de la rente due à l’assuré frappé d’une incapacité permanente. Cette indemnisation forfaitaire, même si elle est automatique, est très limitée et est loin de compenser le préjudice économique qui résulte de la survenance du risque professionnel.

 

  1. Les prestations en espèce dues aux ayants droits en cas de décès de l’assuré

 

            – Des indemnités funéraires peuvent être versées selon l’article L.435-1 du code de la Sécurité sociale. Elles sont payées par la CPAM dans la limite des frais exposés et d’un plafond fixé par décret.

            – Des pensions sont possibles. La liste des ayants droit a été élargie en 2001 par la LFSS pour 2002 avec une disposition rétroactive à Septembre 2001. Le conjoint ; le concubin ou la personne liée par un PACS = entrée en 2001. La mention du « concubin » est nouvelle car avant on visait la vie avec ou la vie maritale.

 

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a pris une disposition rétroactive au 1° septembre 2001 afin d’élargir la liste des ayants droit et afin que des ayants droit nouveaux puissent bénéficier d’une rente. Alors que sous l’empire de la dernière rédaction certaines proches de l’assuré n’étaient pas éligibles.

La 1° catégorie d’ayant droit concerne des personnes qui vivent en couple puisque l’ayant droit c’est le conjoint ou depuis 2001, le concubin, ou la personne liée par un PACS art L 434-8. Ces personnes sont soumises à une condition d’antériorité du mariage, pacs ou concubinage, de 2 ans. Cette condition disparaît si un enfant est issu du couple. En cas de séparation de corps ou de divorce le conjoint survivant conserve un droit à pension s’il est créancier d’une pension alimentaire.
A priori la condition de charge n’est pas posé pour le bénéfice de cette rente sauf si le couple est séparé. On peut remarquer que c’est un des rares articles du code qui utilise le terme de concubin, alors que les autres font référence à la vie maritale. Il y a une définition juridique du concubinage depuis la loi de 1999 qui a instauré le PACS.
Que se passe t’il en cas de coexistence de plusieurs ayants droit ? Par exemple si on a un conjoint et un concubin de façon simultanée dans le cadre d’un mariage non dissout, tout comme un PACS et un concubin en cas de PACS non dissout.
Là le code de la sécu ne donne pas de réponse. On peut dire qu’il faut suivre l’ordre du texte mais c’est problématique car il vise le conjoint (situation de droit), le concubin (situation de fait) et le PACS (situation de droit). Or on devrait se dire que c’est la situation juridique qui devrait l’emporter. Donc il y a une maladresse dans la façon dont cet article est rédigé.
Il n’est pas prévu que la rente soit partagée, donc celui qui va bénéficier de la rente va avoir droit à une rente viagère calculée à partir du salaire de référence de l’assuré décédé. Le taux de cette rente est fixé à 40% de la rémunération de référence.

La 2°catégorie  : les enfants de la victime quelque soient le lien de filiaiton, cela en principe jusqu’à 16 ans. Cet âge peut être reporté à 20 ans en cas de poursuite d’étude, de handicap, l’impossibilité de travailler du fait de l’état de santé (infirmité ou maladie chronique).
La base de calcul de cette rente va être le salaire de référence mais le taux va être de 25% pour chacun des 2 premiers enfants et s’il y a plus de 2 enfants le taux est ramené à 20% pour chacun des enfants.
Il y a une idée de charge qui justifie le bénéfice de cette rente.

La 3° catégorie : les ascendants s’ils rapportent  la preuve qu’ils percevaient une pension alimentaire ou qu’ils auraient pu en obtenir une de la victime, à la condition que la victime n’ait ni conjoint, ni enfant. Le taux de chaque rente versé aux ascendants est fixé à 10% mais le total des rentes versées ne peut excéder 30%.  Si l’assuré avait  4 ascendants à charge on serait à 40% donc ce serait pas possible. Donc les rentes font chacun l’objet d’une réduction proportionnelle pour que cela reste dans la limite des 30%.
Une seconde limite est que l’ensemble de toutes les rentes versées ne peut dépasser 85% du salaire de référence sous peine de faire l’objet d’une réduction proportionnelle. L’indemnisation forfaitaire des proches est limitée puisque ce qui est réparé c’est le préjudice de la perte économique et non le préjudice moral.
On comprend l’intérêt pour les ayants droit d’accéder à l’indemnisaiton automatique et forfaitaire et quand il s’agit d’un AT de pouvoir agir sur le fondement de la faute inexcusable ou intentionnelle.

 

Paragraphe II. Les répercussions des fautes sur les ATMP

 

  1. La faute intentionnelle

 

  1. La définition de la faute intentionnelle

 

            Il s’agit de la faute dont le degré de gravité est le plus élevé. Sa définition est la même quelque soit l’auteur ; elle a été posée par un arrêt Cass Soc, 13 janvier 1966 et depuis elle n’a pas véritablement évoluée : « la faute intentionnelle de l’employeur ou de l’un de ses préposés suppose un acte volontaire accompli avec l’intention de causer des lésions corporelles et qui ne résulte pas d’une simple imprudence, si grave soit elle ».

On voit que l’élément distinctif de la faute intentionnelle est l’intention de nuire, ce qui entraine des conséquences assez justifiées. Peu importe que la personne atteinte soit différente de celle initialement visée. La faute intentionnelle sera retenue puisqu’il y a eu intention de nuire et peu importe que le dommage causé soit plus important que celui qui était recherché. Cette composante intentionnelle va être absente des actes de plaisanterie pouvant avoir des conséquences dommageables, idem pour toutes les maladresses qui peuvent être à l’origine d’un grave dommage, idem pour tous les actes de négligence. Il faut faire la distinction entre l’acte volontaire et la faute intentionnelle (volonté de nuire en plus).

 

Les juges ont eu à s’interroger sur le fait de savoir si l’auteur d’une tentative de suicide pouvait se voir reprocher une faute intentionnelle. Cela peut paraître étonnant. La jurisprudence est bien fixée aujourd’hui et elle s’est inspirée de la jurisprudence du droit des assurances privées parce qu’en matière d’assurance vie, le suicide est une clause d’exclusion de la garantie du versement. On a établi une différence entre le suicide conscient et inconscient.

En présence d’un acte inconscient, on ne peut pas être en présence d’une faute intentionnelle puisque l’intention suppose la volonté de rechercher un dommage et si l’acte est inconscient, il ne peut pas être intentionnel. Cette question s’est posée parce que le suicide est assimilé à un acte d’auto mutilation, la personne a l’intention de se nuire à elle-même.

La jurisprudence distingue les situations dans lesquelles la victime s’est organisée, a anticipé son geste et les juges considèrent que dans de tels cas, la faute intentionnelle est retenue. Au contraire, en présence d’un passage à l’acte brutal, consécutif à une discussion, un incident professionnel, les juges considèrent que le caractère conscient n’existe pas et que la faute intentionnelle ne peut pas être retenue. 

 

Du côté de l’employeur, cette faute intentionnelle peut poser des problèmes en matière de harcèlement moral ou sexuel. Ces agissements sont un délit intentionnel en droit pénal mais en droit social, la composante intentionnelle n’est pas nécessaire à la qualification de la faute. En droit du travail, le harcèlement est généralement qualifié de faute grave.

En droit de la sécurité sociale, ces agissements ne sont généralement pas qualifiés de faute intentionnelle. Ils sont plutôt dans la catégorie de la faute inexcusable et cela s’explique par la définition du harcèlement par le droit du travail qui n’exige pas la composante intentionnelle. Si la victime établit l’intention de nuire de l’auteur, la faute intentionnelle sera retenue par le droit de la sécurité sociale pour améliorer l’indemnisation de l’ATMP si la victime du harcèlement est victime d’un ATMP.

 

  1. Les conséquences de la faute intentionnelle

 

            L’article L. 453-1 énonce que la faute intentionnelle ne donne lieu à aucune prestation ou indemnité en vertu du présent livre (risque professionnel).

. Si la victime a survécu à la faute intentionnelle, elle ne percevra aucune prestation d’assurance sociale. Cette faute intentionnelle prive les ayants droit des prestations auxquelles ils auraient pu prétendre. Aucune prestation en espèce ne peut bénéficier à la victime si elle a survécu, ni même aux AD si la victime est décédée. Le capital décès ne peut pas non plus bénéficier aux AD.

. Il ne peut rester que les prestations en nature de l’assurance maladie pour la victime survivante. Cette disposition radicale résulte d’une crainte qu’avaient les auteurs : les victimes cherchent à tirer profit de l’indemnisation et se blessent intentionnellement.

 

L’ayant droit peut aussi commettre une faute intentionnelle : le conjoint, un enfant, un ascendant porte atteinte à l’intégrité physique de la victime. Ex : crime passionnel au temps et au lieu de travail.

L’article L.453-1 alinéa 3 déchoit l’ayant droit de ses droits à prestations et ses droits sont transférés sur la tête des autres ayants droit.

 

Ensuite, si la faute intentionnelle est commise par l’employeur ou par le copréposé de la victime. Cette faute intentionnelle permet à la CARSAT (retraite, remplace les CRAM) d’imposer une cotisation supplémentaire à l’employeur. De plus, la faute intentionnelle ouvre aux victimes une action en réparation du préjudice causé conformément aux règles du droit commun. Il s’agit d’une disposition de l’article L.452-5. Sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile, les victimes ou ayants droit vont saisir le juge civil pour obtenir l’indemnisation de tous les préjudices non réparés ou non intégralement réparés par les prestations de Sécurité sociale. On observe que l’immunité disparaît totalement. On est en présence d’un régime dérogatoire, il y a un rebasculement vers le droit commun car il y a une faute intentionnelle, la plus grave.

Cela signifie que les victimes peuvent fonder leur action en indemnisation sur deux types de textes : l’article 1382 du Code civil (faute délictuelle). C’est une action contre l’auteur de la faute et sur le fondement de l’article 1384 alinéa 5 (responsabilité du commettant du fait du préposé).

 

L’intérêt pour les victimes est qu’il n’est pas possible de s’assurer contre sa propre faute intentionnelle. En revanche, l’employeur, depuis 1987, peut s’assurer contre les fautes intentionnelles de ses préposés. Cela permet à la victime  de trouver un garant dans la personne de l’employeur. La victime, si elle agit et que l’auteur est le copréposé, risque de se heurter à l’insolvabilité de l’auteur. Si la victime agit sur le fondement de l’article 1384 al 5, elle évite ce risque d’insolvabilité puisque l’employeur peut s’assurer contre la faute intentionnelle de ses préposés.

 

Ensuite, la faute intentionnelle, parce qu’elle garantit une indemnisation complémentaire, expose les organismes de Sécurité sociale à des dépenses qui auraient pu être évitées. On a vu que les organismes de Sécurité sociale pouvaient répercuter les conséquences de cette faute. Le CSS va plus loin car il permet aux CPAM tenues au paiement des prestations de base d’agir en remboursement des sommes versées du chef de l’accident contre l’auteur de l’accident : article L. 452-5 al 2.

Cela veut dire que la CPAM ne dispose pas du même choix que la victime de la faute intentionnelle puisqu’ici, la CPAM ne peut pas agir contre l’employeur qui serait responsable du fait de son préposé. Quand bien même l’employeur serait civilement responsable du fait de son préposé, la caisse est obligée d’agir contre l’auteur de la faute intentionnelle, donc le préposé, même si la victime aurait pu obtenir une indemnisation complémentaire de l’employeur sur le fondement de l’article 1384 al 5.

 

  1. La faute inexcusable

 

            L’article L. 452-1 vise la faute inexcusable de d’employeur ou de celui qui lui est substitué dans la direction. Il vise aussi la faute inexcusable de la victime.

La faute inexcusable qui nous intéresse n’est pas celle de toute personne de l’entreprise, qui aurait été commise par un membre de l’entreprise. On vise celle commise par un auteur extrêmement précis : soit la victime, soit l’employeur, soit une personne qui est investie par l’employeur d’un pouvoir de direction. Le simple copréposé, le collègue de travail du salarié qui n’a aucune compétence particulière, ne peut être qualifié de substitué.

 

  1. Faute inexcusable de l’employeur ou du substitué

 

  1. La définition de la faute inexcusable

 

            La définition de la faute inexcusable de l’employeur a été largement réformée depuis des arrêts « amiante » du 28 février 2002. Cette réforme de la définition de la faute inexcusable est issue de la volonté de permettre à des victimes de risques professionnels d’accéder plus facilement à l’indemnisation complémentaire. Le seul levier permettant l’indemnisation complémentaire est la faute inexcusable dont il fallait faciliter la preuve.

                        – Jusqu’alors, la faute inexcusable reposait sur une définition qui s’était construite en deux temps :

. Ch. Réunies, 15 juillet 1941 = 4 éléments : Un acte ou une omission volontaire + D’une exceptionnelle gravité + Commis avec la conscience du danger + Dépourvu de cause justificative.

 

. Cass. Soc. 17 février 1950 ajoute un cinquième élément et considère que la faute ne peut être inexcusable que si elle est la cause déterminante de l’accident. Cela voulait dire que s’il y avait deux fautes, il fallait déterminer laquelle était déterminante pour l’ATMP. Solution reprise par Ass. Plén. 18 juillet 1980. Il y a eu toute une période où il était inconcevable de retenir deux fautes inexcusables en même temps.

 

=> Si la victime n’établissait pas les 5 composantes, la faute n’était pas établie. Il y avait une charge de la preuve exigeante pour la victime. Il y avait de la part de la jurisprudence une certaine faveur faite à la victime dans l’appréciation des caractéristiques (par exemple la conscience du danger était faite in abstracto et non in concreto).

 

– En 2002, l’objectif est d’alléger le pl us possible cette charge de la preuve. C’est pour cette raison que dans les arrêts de 2002 les juges vont mettre en rapport la faute inexcusable avec l’obligation de sécurité de résultat qui pèse sur l’employeur. Les juges considèrent que la faute inexcusable va pouvoir être retenue lorsque « l’employeur avait ou aurait du avoir conscience du danger auquel le salarié était exposé et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ». Des arrêts du 11 avril 2002 étendent cette solution aux accidents du travail.

 

Tout d’abord, sur le caractère déterminant, deux arrêts ont été rendus le 31 octobre 2002 où les juges vont affirmer que la faute inexcusable de l’employeur doit être la cause nécessaire de l’accident pour que sa responsabilité soit engagée. Du coup, elle n’a plus à être sa cause déterminante. En d’autres termes, la porte est ouverte à la coexistence de plusieurs fautes inexcusables.

 

Ensuite, les juges vont admettre que l’employeur peut échapper à sa responsabilité par la preuve de l’absence de conscience du danger donc d’une certaine façon par l’absence de faute. On est plutôt en présence d’une OSR allégée ou atténuée. La jurisprudence a abouti à ce que la victime d’un AT ne bénéficie pas de présomption de faute inexcusable. La victime doit alors prouver que l’employeur avait conscience du danger ou aurait dû avoir conscience du danger ou alors qu’il n’avait pas pris tous les moyens nécessaires pour empêcher la réalisation de l’accident. Arrêt 5 mars 2005, 2ème chambre civile ou 31 mai 2006.

En revanche, il existe des présomptions légales de fautes inexcusables :

– pour les salariés sous CDD ou intérimaires (mis à disposition d’une entreprise utilisatrice) affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers et qu’ils n’ont pas reçu la formation renforcée à la santé et la sécurité prévue par la loi. La présomption est simple.

– une présomption irréfragable est posée si l’accident survient alors que les salariés ou qu’un membre du CHSCT a signalé à l’employeur le risque qui s’est finalement réalisé.

 

  1. Les conséquences de la faute inexcusable

 

            La faute inexcusable de l’employeur entraîne deux séries de conséquences : une majoration de la rente servie à la victime et elle permet à la victime de bénéficier d’une indemnisation complémentaire selon un régime juridique singulier qui a donné lieu à une décision du Conseil constitutionnel saisi d’une QPC. La jurisprudence a adapté les dispositions du code de la Sécurité sociale pour bénéficier de cette indemnisation améliorée.

La majoration de la rente : le code de la Sécurité sociale prévoit une majoration de la rente en cas de faute inexcusable de l’employeur qui est évaluée par la CPAM. Le code de la Sécurité sociale ne dit rien du mode de calcul de cette majoration, c’est donc les juges, en cas de contentieux, qui vont se prononcer sur le niveau de majoration attribué.

Dans un premier temps, les juges ont estimé que c’est la gravité de la faute inexcusable qui devait guider l’importance de la majoration. Une faute ordinaire de la victime conduisait à une réduction de la majoration. Ensuite, dans un arrêt rendu par la chambre sociale du 19 décembre 2002, les juges affirment qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, la majoration de la rente doit être maximale. Ils ajoutent que la réduction de la rente ne peut intervenir qu’en cas de faute inexcusable de la victime. Depuis, la jurisprudence s’est stabilisée malgré une décision étonnante du 14 décembre 2004 (arrêt isolé) où la Cour de cassation a lié le montant de la majoration au taux d’incapacité de la victime.

 

L’indemnisation complémentaire : l’article L.452-3 met un dispositif très original où l’action des victimes doit être portée devant les juridictions de sécurité sociale et où il est énoncé de manière limitative les préjudices à la réparation desquels la victime peut prétendre (souffrances physiques et morales, préjudice esthétique et d’agrément, préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle). Cette liste limitative a été interprétée de manière très étroite et rigoureuse par les juges.

Les ayants droit visés par l’alinéa 2 peuvent demander indemnisation de leur préjudice moral.

Du fait de cette liste, la victime ne pouvait pas accéder à une indemnisation intégrale de ses préjudices. Refus d’indemniser un déclassement pro, frais engagés par la nécessité d’adapter un logement, d’équiper un véhicule … Ces victimes restaient placées dans un régime moins favorable que celles victimes d’un accident ordinaire qui pouvaient demander devant les juridictions civiles une indemnisation. Même en cas de faute inexcusable, cette indemnisation était contrainte.

Dès lors, cet article a fait l’objet d’une QPC, ce qui a conduit le Conseil constitutionnel à rendre une décision le 18 juin 2010.

 

Le grief d’inconstitutionnalité reposait sur plusieurs fondements :

– le principe d’égalité selon lequel il existait une rupture d’égalité entre les différentes victimes de dommages car les victimes de risques professionnels ne pouvaient pas accéder à un régime d’indemnisation comparable à celui dont les victimes de risque ordinaire pouvaient disposer.

– le principe de responsabilité en vertu duquel toute personne est responsable des conséquences dommageables de ses actes.

 

Le Conseil constitutionnel a écarté ce grief en considérant que le législateur pouvait instaurer différents régimes de responsabilité et qu’il n’y avait pas de rupture d’égalité entre les victimes puisque les victimes de risques professionnels bénéficiaient d’une indemnisation forfaitaire.

En revanche, le Conseil constitutionnel émet une réserve d’interprétation en application du principe de responsabilité. Il considère que la disposition n’est pas inconstitutionnelle, à condition qu’elle soit interprétée ou appliquée dans le sens qu’il indique. Grâce à cette réserve, les victimes vont pouvoir accéder à l’indemnisation complémentaire des préjudices non réparés au titre de la liste. Il précise que la juridiction compétente pour connaître de cette indemnisation reste le TASS.

A partir de cette décision, les limites posées par l’article L.452-3 tombaient car le juge constitutionnel considère que pour être conforme au principe de responsabilité, le droit de la sécurité sociale doit autoriser les victimes de risques professionnels consécutifs à une faute inexcusable d’obtenir une indemnisation complémentaire des préjudices non envisagés par la liste.

 

Arrêt 2ème chambre civile du 11 juin 2011 = la victime peut obtenir désormais une indemnisation pour des équipements qu’elle a dû installer à son domicile à la suite du risque pro.

4 arrêts de la 2ème chambre civile du 4 avril 2012 = désormais, il est admis que les juges se réfèrent à une nomenclature de dommages établie en 2005 (la nomenclature Dintilhac). Cette liste identifie des préjudices corporels patrimoniaux ou extrapatrimoniaux. Le préjudice sexuel doit être indemnisé de manière autonome, comme le déficit fonctionnel temporaire. De plus, ces indemnisations sont versées directement par la CPAM qui fait l’avance et qui en récupère le montant auprès de l’employeur.

 

Le problème était la possibilité pour l’employeur d’opposer à la caisse un défaut d’information dans la procédure de reconnaissance d’AT et l’insolvabilité de l’employeur car le coût moyen d’un sinistre dû à la faute inexcusable de l’employeur est de 73 000 euros.

 

. La LFSS pour 2013 prévoit, à l’article 86, la modification du code de la sécurité sociale : l’article L.452-3-1, dispose que « quelque soient les conditions d’information de l’employeur par la caisse en cours de procédure d’admission de l’origine pro de l’accident ou de la maladie, l’employeur a l’obligation de s’acquitter des sommes dues au titre de l’indemnisation complémentaire, dès que la reconnaissance de la faute inexcusable est passée en force de chose jugée ».

Dès que la décision concernant la faute inexcusable est définitive, l’employeur doit rembourser la caisse sans pouvoir lui opposer un quelconque défaut d’information.

. Une première voie était d’imposer à l’employeur une assurance obligatoire contre la faute inexcusable qui aurait permis à tout employeur de faire face aux conséquences financières d’une telle faute.

. Une seconde voie était d’obliger l’employeur à rembourser la caisse en une seule fois sous forme de capital => voie retenue par la LFSS.

 

Les préjudices couverts par l’indemnisation forfaitaire (Livre IV) peuvent-ils être complétés par l’indemnisation complémentaire ? Non car l’indemnisation intégrale n’a pas été consacrée par la décision du Conseil constitutionnel de 2010. Pour la Cour de cassation, le Conseil constitutionnel n’a pas remis en cause la réparation forfaitaire des risques pro. La réparation forfaitaire se suffit à elle même et n’a pas à être complétée.

 

  1. La faute inexcusable de la victime

 

  1. La définition de la faute inexcusable

 

            Pendant longtemps, elle reposait sur les mêmes bases que la faute inexcusable de l’employeur, même si ces éléments faisaient l’objet d’une appréciation in concreto pour la victime, ce qui lui était favorable.

Cette appréciation permettait au juge, notamment pour l’appréciation de la conscience du danger, de tenir compte de l’inexpérience de la victime, de son jeune âge … pour considérer que compte tenu de ces caractéristiques, la victime pouvait avoir du mal à anticiper et à avoir conscience du danger donc le juge écartait la faute inexcusable de la victime.

La faute inexcusable de la victime ne devait plus avoir besoin d’être intervenue de manière déterminante dans la réalisation de l’accident.

Arrêt du 27 janvier 2004, 2ème civ = nouvelle définition de la faute inexcusable de la victime. « Faute volontaire d’une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ». On retrouve l’appréciation in concreto. Ce n’est que si le salarié persiste dans des comportements imprudents qu’il sera sanctionné d’une faute inexcusable.

 

Si la première partie de l’attendu n’est qu’une reprise de l’arrêt du 19 décembre 2002, la définition de la faute inexcusable de la victime est une véritable innovation. Trois conditions doivent donc être remplies pour que les employeurs puissent invoquer la faute inexcusable de la victime :

– il faut, premièrement, que la faute soit volontaire. Une telle condition écarte donc toute idée de faute par imprudence, maladresse, inattention ou négligence ;

– la deuxième condition exigée par les Hauts magistrats est que cette faute soit d’une exceptionnelle gravité. S’il appartient aux magistrats de définir ce qu’il faut entendre par « exceptionnelle gravité », les termes ici  employés sont assez explicites et semblent vouloir rapprocher la faute inexcusable de la faute intentionnelle ;

– la troisième condition posée par la Cour de cassation consiste en ce que le comportement fautif de la victime doit l’avoir exposé, sans raison valable, à un danger dont il aurait dû avoir conscience. Un tel principe impose donc de reconnaitre une absence de cause raisonnable ou de raison valable pouvant justifier le comportement de la victime.

 

Autant dire que par une telle définition de la faute inexcusable, l’article L. 453-1 est vidé de toute portée…

 

  1. Les conséquences

 

            Le code de la Sécurité sociale indique que la CPAM peut diminuer la rente si elle estime l’accident est dû à la faute inexcusable de la victime : article L.453-1 alinéa 2. Ce n’est pas une obligation et la rente n’est pas supprimée.

Le problème est celui du quantum de la diminution car rien n’est dit. Lorsqu’il existe deux fautes inexcusables (employeur + victime), on majore la rente au taux maximum pour ensuite la diminuer sur le fondement de la faute inexcusable de la victime. Problème de la mesure du degré de la faute inexcusable.

 

Chapitre III. La couverture des risques sociaux

 

            Les risques sociaux sont les évènements couverts par les assurances sociales abordées à l’article L.311-1. En réalité, le risque paternité n’est pas un risque social et cet article est resté inchangé, alors même que l’assurance veuvage avait été supprimée puis restaurée.

Depuis 1945, la liste est restée inchangée : risque veuvage reconnu en 1980, congé de paternité créé. Il existe un débat important sur le risque de perte d’autonomie. Elle est traitée comme un besoin et est prise en charge par une prestation d’aide sociale. La question se pose de savoir si une assurance autonomie n’aurait pas vocation à intégrer la sécurité sociale car la perte d’autonomie qui va de paire avec le vieillissement est une réalité.

Les prestations de sécurité sociale restent largement contributives par des cotisations pesant sur les revenus donc la nouvelle création d’une prestation entrainerait de nouvelles cotisations, ce qui explique cette stabilité.

 

Section I. L’assurance maladie

 

L’assurance maladie est le risque pour lequel le champ d’application personnel est le plus large car le législateur a opté pour une définition très pragmatique de l’assuré. C’est pour ce risque social que la liste des ayants droit est la plus étendue.

L’assurance maladie est une assurance sociale ayant une double fonction : la compensation de la perte du revenu + l’accès aux soins (remboursement des frais de santé).

 

Paragraphe I. Les prestations en espèce

 

Il s’agit des indemnités journalières. Elles ont une fonction économique car elles doivent permettre à l’assuré de percevoir une compensation de leur perte de salaire. Leur objectif de compensation est mesuré car il ne s’agit pas de compenser intégralement la perte de salaire. Il s’agit simplement de compenser de manière significative mais en aucun cas de procurer un substitut de remplacement puisque le but est de responsabiliser l’assuré en lui évitant de recourir aux arrêts maladie. Il s’agit aussi de limiter les dépenses de l’assurance maladie.

 

  1. Les bénéficiaires

 

            Le code de la Sécurité sociale se réfère soit au montant des cotisations versées ; soit au nombre d’heures travaillées pendant une période déterminée. Le droit de la sécurité sociale envisage différentes périodes de référence et en fonction de la période de référence, la durée de la période indemnisée varie. L’idée est que plus l’effort contributif est important, plus la durée d’indemnisation doit l’être également. Le code de la Sécurité sociale tient aussi compte du produit de la cotisation versée.

 

  1. Les modalités de versement des indemnités journalières

 

            Les indemnités journalières sont calculées en se référant au salaire de base. Ce montant est obtenu par l’application d’un taux au salaire de référence. La base de calcul est dénommée gain journalier de base et elle se détermine par rapport au salaire brut sous plafond qui est versé au cours des 3 mois précédant l’arrêt de travail.

 

Ce taux varie en matière d’indemnités journalières en fonction de deux périodes et il faut tenir compte, pour calculer l’indemnité journalière, du nombre d’enfants à charge de l’assuré social. Les deux périodes sont les 3 premiers mois et la seconde période s’ouvre à compter du 4ème mois d’indemnisation. Pendant les 3 premiers mois, le taux qui s’applique est de 50% de la rémunération brut. Le plafond va contenir l’indemnité journalière dans la limite de 42 euros par jour.

Au-delà du 4ème mois, il y a une revalorisation possible en cas d’augmentation générale des salaires. Cette revalorisation a été instaurée en 2006 et avant 2006, on distinguait la période d’indemnisation des 6 premiers mois et au-delà, il y avait une revalorisation automatique de l’indemnité journalière.

La législation sociale tient compte du nombre d’enfants à charge de l’assuré social en arrêt maladie et prévoit que les assurés qui ont au moins 3 enfants à charge ont droit à une augmentation du taux à 66,66% après le 31ème jour d’arrêt de travail. Le plafond est fixé à 56 euros par jour.

 

Lorsque le salarié est atteint d’une maladie de longue durée ou ordinaire, il est soumis à un délai de carence de 3 jours, de sorte que le versement de l’indemnité journalière intervient à partir du 4ème jour de l’arrêt de travail.

. La maladie de longue durée comporte un traitement prolongé et/ou une thérapie particulièrement coûteuse. L’article D.322-1 énonce une liste de maladies et donne une définition de la maladie de longue durée.

En matière d’assurance maladie, il y a une approche particulière de la notion de maladie. L’assuré social malade a vocation à reprendre son activité pro donc si une personne est frappée d’une des maladies envisagées mais qu’il est avéré qu’elle ne reprendra pas son activité pro, l’assuré social n’est plus un malade et est devenu invalide. Il relève alors de l’assurance invalidité. Les modes de calcul de la pension invalidité font que le revenu de remplacement qu’elle procure à l’assuré est d’un niveau plus faible que le revenu de remplacement procuré par l’indemnité journalière de maladie. La durée d’indemnisation de cette longue maladie peut durer jusqu’à 3 ans.

. En cas de maladie ordinaire, la durée d’indemnisation est réduite car l’assuré a droit, pour une ou plusieurs maladies, à 360 indemnités journalières au max par période de 3 ans calculés de date à date (pas année civile !). La difficulté concerne des situations intermédiaires où un salarié n’est pas en situation de maladie de longue durée mais son état de santé entraîne des arrêts de travail à répétition (troubles musculo squelettiques). Il s’agit de savoir si ce salarié est apte à son poste de travail donc on est plus dans le cadre du droit du travail.

 

  1. Les obligations de l’assuré social malade

 

            Ces obligations conditionnent le versement de ces prestations en espèce. Le code de la Sécurité sociale impose le respect d’obligations administratives et de comportement.

Le but des obligations administratives est de permettre à la CPAM d’enclencher le paiement des indemnités journalières. L’assuré social doit faire parvenir au service du contrôle médical de la caisse l’arrêt de travail qui lui a été délivré par le prescripteur. Cet arrêt de travail comporte des indications de nature médicale qui justifient l’arrêt de travail qui, en cas de contrôle, vont permettre au médecin contrôleur de s’assurer que l’état de santé de l’assuré correspond bien à celui qui est mentionné sur l’arrêt de travail.

L’assuré doit informer la caisse dans les deux jours de la prescription (délai impératif !). Faute de le respecter, l’assuré s’expose à la perte de son droit aux indemnités journalières. La jurisprudence est assez exigeante à l’égard de l’assuré social puisqu’elle lui impose d’avoir utilisé tous les moyens possibles pour faire parvenir ce document.

Ces obligations doivent être respectées à chaque fois qu’un nouvel arrêt de travail est prescrit donc si le médecin a prolongé l’arrêt de travail, l’assuré doit de nouveau faire parvenir la prescription de cet arrêt.

 

Pour ce qui est des obligations de comportement, l’indemnité journalière a pour but de permettre à l’assuré de se soigner dans les meilleurs délais afin qu’il retrouve son activité professionnelle. Ainsi, l’assuré social en arrêt maladie doit en principe rester chez lui et ne se livrer à aucune activité (loisir ou pro).

– Des heures de sortie sont autorisées : de 9h à 11h et de 14h à 16h. Le reste du temps, le salarié est susceptible de faire l’objet de contrôles administratifs où les agents de la CPAM se rendent au domicile de l’assuré social afin de contrôler s’il s’y trouve. S’il n’y est pas, l’assuré social s’expose à des sanctions comme une suspension de ses indemnités journalières ou une convocation à la CPAM pour faire l’objet d’un contrôle médical (à titre d’exemple; arrêt Cass 27 janvier 2004 ; cependant la suppression partielle des indemnités journalières peut être jugé injustifié si l’intention de l’intéressé de rendre le contrôle impossible n’est pas démontré ou si l’assurée n’a pas cherché à se soustraire au contrôle de la caisse, ni enfreint le règlement intérieur : 16 juin 1994).

Le médecin prescripteur de l’arrêt de travail doit autoriser les sorties et il peut donner des autorisations larges en autorisant par exemple l’assuré à quitter le département dans un but thérapeutique ou par convenance personnelle justifiée.

– L’autre obligation est celle de l’inactivité : l’assuré social bénéficiaire de l’arrêt maladie ne doit se livrer à aucune activité de loisir et il ne doit pas non plus se livrer à une activité professionnelle. Concernant l’activité pro, l’exception est la possibilité d’une activité professionnelle partielle dans un but thérapeutique. Cette activité pro partielle doit toujours être prescrite par le médecin donc on retrouve cet impératif de prescription et de motif médical de dérogation au principe.

Concernant les activités de loisir, la jurisprudence se montre sévère car elle prononce une interdiction absolue, même quand le médecin a prescrit à l’assuré des sorties libres en le dispensant de l’obligation de rester chez lui : Cass. soc, Décembre 2010. La personne chargée d’effectuer le contrôle apprécie la transgression de l’interdiction au motif de l’arrêt de travail. L’état de santé de la personne doit ne pas être compatible avec la poursuite de telles activités car elle risque de retarder le rétablissement du bénéficiaire de l’arrêt de travail.

 

Paragraphe II. Les prestations en nature

 

  1. Les bénéficiaires

 

Les premiers sont les détenteurs de droits propres : les assurés sociaux. Avant, les détenteurs de droits propres étaient uniquement des assurés car seules les personnes qui contribuaient (assurés sociaux ou assurés volontaires) ou pour lesquelles un tiers contribuait (assurance personnelle) étaient visées.

Aujourd’hui, il faut ajouter les personnes qui sont couvertes au titre de la CMU car avec la CMU de base, certaines personnes vont être qualifiées d’assuré parce qu’elles cotisent sur les revenus qui dépassent le plafond d’exonération mais il y a aussi les personnes qui sont dispensées de verser des cotisations parce que leurs ressources sont inférieures au plafond d’indemnisation. Ainsi, des personnes couvertes et non pas assurées sont titulaires de droits propres.

 

Une place particulière est faite aux ayants droit car en matière d’assurance maladie, c’est là que le cercle des ayants droit est le plus large. On peut distinguer deux périodes : entre 1945 et 1978 = période de stabilité et depuis 1978 = élargissement progressif du cercle des ayants droit. Le but est d’adapter ce groupe aux nouvelles configurations que peut prendre un foyer.

 

Le groupe familial est le cercle originel : conjoint (actuel ; même s’il est séparé de droit ou de fait ; non affilié à un régime obligatoire d’assurance maladie : caractère subsidiaire de la qualité d’ayant droit). La conception du mariage est monogame donc on ne peut pas faire de demande en qualité d’ayant droit pour deux époux : la qualité d’ayant droit ne peut être attribuée qu’à un seul conjoint à la fois (cass. soc, 8 mars 1990). Cette qualité peut être éventuellement attribuée à un second conjoint, à condition que le premier conjoint soit retourné de manière définitive dans son pays.

 

En 1978, il s’agit de permettre à la personne qui vit maritalement avec l’assuré social d’être son ayant droit = introduction de la vie maritale dans l’assurance maladie (mais aussi maternité !) à l’article L.161-14. Un certain nombre de concubins de même sexe ont alors réclamé le bénéfice de la qualité d’ayant-droit en disant qu’ils étaient en situation de vie maritale. L’arrêt du 11 juillet 1989 énonça que la vie maritale devait s’entendre comme la vie entre mari et femme sans pour autant être marié. La vie maritale suppose la différence des sexes et donc des concubins de même sexe ne peuvent pas être en situation de vie maritale ni revendiquer la qualité d’ayant droit. C’est une interprétation rigoureuse de la notion de vie maritale.

 

Une loi du 27 janvier 1993 va étendre la qualité d’ayant droit à la personne qui vit avec un assuré social depuis au moins un an et qui est à sa charge effective, totale et permanente. Cette loi ne censure pas la jurisprudence de 1989 ; elle n’énonce pas que la vie maritale peut aussi concerner des concubins homosexuels mais se contente d’ajouter au premier alinéa de l’article  L161-14 du code de la Sécurité sociale relatif à la vie maritale un deuxième alinéa qui ajoute l’hypothèse de vie avec un assuré social. Il y a donc désormais deux cas d’extension :

– la vie maritale ;

– et la vie avec un assuré social.

Il est très clair que dans l’esprit du législateur, il s’agit de permettre l’extension de la qualité d’ayant droit au concubin homosexuel qui vit avec un assuré social.

 

En 1999, le PACS permet d’obtenir la qualité d’ayant droit. Le partenaire pacsé peut ouvrir des droits en matière d’assurance maladie mais aussi maternité, d’assurance décès et invalidité.

 

La L27 mai 2013 ouvrant le mariage aux personnes de même sexe

Il y a dans la L2013 des dispositions sociales importantes, mais il n’y a pas d’ajout ni à l’art. L161-14 et l’art. L313-3. C’est normal puisque le conjoint à la charge de l’autre dans le cadre d’un mariage entre personnes de même sexe est le même conjoint que celui de l’art. L313-3. C’est la qualité de conjoint qui change de définition : il faut entendre désormais toute personne mariée avec une autre, qu’il s’agisse d’un mariage entre personne de sexes différents ou de même sexe. Cela a été modifié non seulement pour l’art. L313-3 du CSS, mais aussi pour tous les textes du droit général qui concerne des conjoints.

En revanche, il y a un point qui a été modifié implicitement dans l’art. L161-14 du CSS par la L27 mai 2013.

La C.Cass avait dit par vie maritale il faut entendre des personnes de sexes différents puisqu’on ne peut pas se marier entre les personnes de même sexe. Or depuis 2013, on peut se marier lorsque les personnes sont de même sexe. Il peut donc y avoir vie maritale entre les personnes de même sexe.

L’objectif reste toujours le même en sécurité sociale : c’est la couverture sociale pour le plus grand nombre, c’est la généralisation de la couverture maladie-maternité notamment par l’extension de la qualité d’ayant-droit.

 

Tous les enfants à charge sont visés, sans discrimination de la nature du lien de filiation (légitime, naturel, adopté) et peu importe l’existence d’un lien de filiation car ce qui prend le dessus est la notion de charge. L’enfant doit être à la charge effective et actuelle de l’assuré social. Cet enfant à charge peut être un enfant recueilli ou accueilli. Cela concerne des situations où l’enfant est confié par un proche parent temporairement.

Le texte vise une notion de charge qui est large et interprétée largement par les juges mais en revanche, il y a une interprétation restrictive par les organismes sociaux puisque des circulaires de la CNAF invitent les organismes locaux à une interprétation plus étroite, la notion de charge renvoyant au transfert des attributs de l’autorité parentale.

Ces enfants sont ayants droit sous condition d’âge. L’âge limite est de 16 ans et le code de la Sécurité sociale prévoit la prorogation de cet âge jusqu’à 18 ans (enfants placés en apprentissage) ou jusqu’à 20 ans (enfants poursuivant des études ou se trouvant dans l’impossibilité de se livrer à un travail salarié pour des causes d’infirmité ou de maladie chronique). Il s’agit d’un âge qui est en deçà des engagements internationaux de la France car elle a ratifié la convention de New York en 1990 sur les droits de l’enfant qui pose le droit à la sécurité sociale de tout enfant jusqu’à l’âge de 18 ans.

 

Les ascendants, les descendants collatéraux jusqu’au 3ème degré ou alliés de même degré. Il s’agissait de permettre au plus grand nombre d’obtenir des droits sociaux à une époque où, pour ce qui est des personnes âgées, le droit à la pension de retraite n’était pas généralisé. Il n’existait pas de prestation permettant de garantir le minimum vieillesse. Si la personne âgée n’avait pas de droits dérivés, elle était dépourvue de droits sociaux dans la mesure où elle n’avait pas de droits propres. S’ajoutent des conditions : ces ascendants et descendants collatéraux ou alliés doivent vivre sous le même toit que l’assuré social + ils doivent se consacrer exclusivement aux travaux du ménage et à l’éducation d’au moins deux enfants de moins de 14 ans à charge de l’assuré social.

 

Aujourd’hui, cette catégorie peut encore être utile pour les enfants qui restent au foyer au-delà de l’âge de 18 ou 20 ans. C’est une voie d’entrée à la qualité d’ayant droit qui a largement perdu de son intérêt en raison de deux mesures intégrées récemment dans le code de la Sécurité sociale : la notion de vie avec + la CMU de base qui permet aux personnes qui sont sans droit de bénéficier de droits propres.

 

=> Ces qualités d’ayants droit ne s’étendent pas automatiquement aux autres assurances sociales ni même aux risques professionnels. Il semble que le législateur répond à des situations ponctuelles sans vision d’ensemble sur la notion d’ayant droit. Des propositions de réforme ont été faites mais un refus leur a toujours été opposé notamment en se basant sur l’argument du coût que cela engendrerait pour la sécurité sociale. C’est un instrument de généralisation de la sécurité sociale.

 

  1. La physionomie des prestations en nature

 

  1. L’objet des prestations en nature

 

Les prestations en nature ont pour objet de désintéresser partiellement le bénéficiaire des frais qu’il a engagés pour se soigner. On parle de prestations en nature mais en réalité, elles prennent la forme d’un versement de somme d’argent à l’assuré ou aux ayants droit. La somme d’argent versée est affectée aux prestations de santé dont la personne couverte a bénéficié alors on parle de prestations en nature.

 

Le code de la Sécurité sociale est prudent sur les soins car les prestations sont dues pour les frais rendus nécessaires. Ce caractère nécessaire est apprécié par le médecin, le professionnel de santé au regard de l’état des patients. Tous les frais ne sont pas remboursés car le remboursement n’est pas automatique !

Les soins sont énumérés par le code de la Sécurité sociale à l’article L.321-1. Le panel des frais de santé est très large (médecine générale, spéciale, prothèses dentaires, appareils, hospitalisation, chirurgie…). Ces soins sont en grande partie curatifs et on reproche à l’assurance maladie d’être trop centrée sur les soins curatifs au détriment de la prévention qui permet de faire des économies substantielles et permet de déceler des maladies. L’assurance n’a vocation à intervenir que quand le risque est intervenu, quand la maladie est déclarée. Cette critique a conduit l’assurance maladie à s’investir davantage en matière de prévention car elle prend désormais en charge les examens de dépistage qui sont effectués dans le cadre des programmes prévus par le Code de la santé publique. De même que l’assurance maladie prend en charge les vaccinations dans certaines limites.

 

Ces prestations en nature supposent un paiement préalable par le patient et ensuite un remboursement par la CPAM. L’impression générale conduit souvent les assurés sociaux à dire que l’assurance maladie rembourse de moins en moins. Le taux de prise en charge reste fixé à 75%, comme en 1945 mais ce taux ne différencie pas entre les soins qui sont pris en charge par l’assurance maladie. Si le taux moyen est de 75%, il y a des disparités importantes et notamment, si les dépenses d’hospitalisation sont très largement prises en charge en matière d’assurance maladie, il n’en n’est plus de même pour ce qui relève de la médecine de ville.

 

  1. Les principes applicables aux prestations en nature

 

4 principes sont essentiels et accompagnent le versement des prestations en nature.

 

le principe de libre choix : ce principe permet aux bénéficiaires des prestations de déterminer en toute liberté quel est le professionnel de santé qui leur prodiguera les soins nécessaires. Ce principe est précieux pour les malades et pour les professionnels de santé car les personnes sont attachées à la possibilité de pouvoir changer de médecin et les médecins souhaitent que la médecine libérale ne soit pas sectorisée géographiquement.

 

Ce principe peut produire des effets pervers car cette liberté de choix peut conduire les patients à être assez peu fidèles aux professionnels de santé et à se conduire comme des consommateurs vis-à-vis du système de soins. Cette attitude est appelée le nomadisme médical. Cela conduit à la multiplication de consultations qui sont parfois inutiles et favorise des prescriptions inutiles, redondantes de médicaments ou d’analyses alors qu’un autre médecin possède déjà le résultat d’analyses.

 

Le législateur a alors pris des dispositions qui essaient de canaliser les personnes malades. Le but est de fidéliser ces patients à des professionnels de santé.

– Depuis 2006, chaque assuré ou ayant droit de plus de 16 ans doit choisir son médecin traitant pour bénéficier d’une prise en charge optimale de ses frais de santé par l’assurance maladie.

Le patient n’est pas obligé de déclarer de médecin traitant mais s’il n’en choisit pas un, son niveau de remboursement sera réduit par rapport à la prise en charge classique de 75%. Le taux sera alors réduit et la complémentaire santé (mutuelle) ne doit pas compenser la réduction de la prise en charge par la couverture de base.

Dès lors que le médecin traitant est déclaré, il doit être consulté pour toute question relative à sa santé. Des exceptions sont faites si le patient est dans une situation d’éloignement géographique ou d’urgence.

– Depuis 2006, le patient est invité à s’inscrire dans un parcours de soins. Le médecin traitant ainsi désigné est placé par la loi au cœur du parcours de soins coordonné. En principe, le patient ne dispose plus d’un libre accès aux médecins spécialistes. Le médecin traitant dirige le patient qui en a besoin vers le médecin spécialiste approprié. Des spécialités sont exclues de ce parcours où le libre accès a été maintenu : pédiatrie, soins dentaires, gynécologie, psychiatrie avant 26 ans, ophtalmologie…

Or, en réalité, les médecins spécialistes ont été en désaccord avec la mise en place de ces parcours de soins coordonnés en considérant que c’était une atteinte intolérable à la liberté de choix des patients. Ainsi, le médecin spécialiste renseigne la feuille de soins lors de la consultation en indiquant si l’acte a été fait dans le cadre ou en dehors du parcours de soins coordonné. Si le patient a déclaré un médecin traitant et qu’il a pris l’initiative de consulter un médecin spécialiste, le médecin déclare le plus souvent que l’acte a été fait dans le cadre de ce parcours.

            => Ces parcours de soins coordonnés n’ont alors pas le résultat escompté.

 

le principe de l’avance des frais : le patient avance les frais et ensuite, il est remboursé par l’assurance maladie à partir de la feuille de soins établie par le médecin sur format électronique le plus souvent. Cette avance des frais est censée responsabiliser le patient qui prend ainsi conscience du coût de la prestation dont il a bénéficié et de sa valeur économique. Cette avance peut aussi avoir des effets pervers car les frais peuvent être coûteux et avoir un effet dissuasif.

            Dans certains cas, le patient est dispensé de l’avance des frais dont le motif peut être la nature de la pathologie (victime de l’AT dispensée de faire l’avance des frais + affection de longue durée), le coût des soins. Des conventions sont passées entre la CPAM et les opérateurs de soins comme les laboratoires pour éviter cette avance. De même pour les soins pharmaceutiques. Des motifs sociaux peuvent justifier l’exception à ce principe comme les bénéficiaires de la CMU où on applique le tiers payant.

 

le principe de la participation aux frais : ce principe se traduit par le principe du ticket modérateur, c-a-d la fraction des frais qui n’est pas prise en charge par l’assurance maladie. Quand il s’agit d’une hospitalisation, on parle de forfait hospitalier. L’idée est de responsabiliser l’assuré car s’il conserve à sa charge une partie du coût, il sera plus regardant quand il engagera la dépense.

Ce dispositif produit des effets pervers car il dissuade les moins solvables à recourir aux soins puisque quand ils n’ont pas de complémentaire santé, ils supportent ce ticket modérateur.

En réalité, les effets de ce ticket modérateur sont très largement anéantis par le développement des complémentaires santé, ce qui réduit son efficacité.

=> Ce système a été assez critiqué car des personnes n’ont pas le choix de recourir au système de santé donc là, le ticket modérateur est injustifié puisqu’il ne peut pas avoir d’effet de responsabilisation.

 

Les bénéficiaires de la CMU ou ceux qui relèvent de la complémentaire santé n’ont pas de ticket modérateur. De même pour les victimes atteintes d’une maladie chronique qualifiée d’affection de longue durée et les victimes du risque pro.

 

Pour autant, les prestations de l’assurance maladie n’interviennent que pour des types de soins qui ont été préalablement identifiés par la sécurité sociale. Toutes les prestations de santé ne sont pas remboursées mais seulement celles qu’elle a validé et à des tarifs qu’elle a validé (les tarifs de référence).

 

            Pour les médicaments, cela passe par l’autorisation de mise sur le marché et ce n’est que quand la validation préalable existe que la prestation d’assurance maladie peut intervenir. C’est un moyen pour l’assurance maladie de maitriser ses dépenses de santé car chaque année, des médicaments sont déremboursés parce qu’il est estimé que le service médical qu’ils rendent n’est plus suffisant.

 

            Pour les prestations, il existe des tarifs de référence qui sont négociés à l’occasion de la discussion des conventions médicales qui permettent d’organiser cette relation tripartite qui existe en matière de santé. Pour que la prestation de santé soit versée, il faut qu’intervienne un patient, un professionnel de santé et un organisme qui rembourse les soins. C’est sur la base de ces tarifs négociés que la prestation en nature sera calculée. Ces négociations permettent aussi d‘identifier les actes médicaux qui donnent lieu à remboursement qui font l’objet d’une cotation. L’acte est codé et il faut identifier l’acte qui permet à l’organisme de connaître la base de remboursement pour calculer la prestation en nature.

 

            Pour le tarif, certains professionnels de santé bénéficient d’un droit de dépasser les honoraires qui ont été validés par les CPAM à l’occasion de la signature des conventions médicales. Cette possibilité de dépassement conduit à distinguer deux secteurs d’activité médicale : secteur I où il y a les praticiens engagés à respecter les tarifs conventionnels et le secteur II où on trouve les praticiens autorisés à pratiquer des dépassements d’honoraires. Dans les deux cas, les médecins sont conventionnés mais le régime n’est pas le même. Il n’y a pas de 3ème secteur car ceux qui ne sont pas dans un de ces secteurs ne sont pas conventionnés soit par choix ; soit par l’application d’une sanction qui les déconventionne.

                        Le conventionnement trouve ses origines dès 1945 car il est apparu que les tarifs médicaux devaient être uniformisés afin que la prestation en nature représente une part significative du coût de la prestation. Les professionnels de santé ont intérêt à ce que les patients soient solvabilisés et pour que cette solvabilisation existe, les tarifs médicaux devaient être déterminés contractuellement.

. En 1945, les conventions étaient départementales mais ce choix s’est avéré assez peu judicieux car il y avait une pratique très inégale sur le territoire (diversité territoriale de conventionnement). Dans les départements où aucun accord n’avait été conclu s’appliquait un tarif d’autorité fixé par le pouvoir réglementaire (décret du ministre en charge de la sécurité sociale). Le ministère fixait un tarif bas afin de convaincre les professionnels de santé de négocier. L’objectif poursuivi n’a pas été atteint car la négociation n’aboutissait pas quand même et les professionnels de santé ne respectaient pas les tarifs d’autorité.

. En 1960, la loi a permis un système d’adhésion individuelle à une convention type nationale. Cela permettait aux professionnels de santé qui relevaient de départements sans convention médicale d’être conventionnés à titre personnel en y adhérant. Or, il y avait une très grande diversité tarifaire.

. En 1971, les conventions médicales sont devenues nationales. Depuis, le rôle des conventions médicales n’a cessé de s’amplifier. L’objet des conventions médicales est très large et diversifié : maîtrise des dépenses de santé, sanctions auxquelles les médecins s’exposent… Les organismes de sécurité sociale dressent des tableaux statistiques d’activité individuels et dégagent des moyennes territoriales d’activité. Tout professionnel de santé a la possibilité de situer son activité par rapport à l’activité moyenne de professionnels de santé qui exercent sur le même territoire. Ces conventions médicales prônent le développement des bonnes pratiques.

 

L’accès aux soins intéresse aussi la démographie médicale car il existe les déserts médicaux. Alors que certaines régions de France sont surdotées en personnels médicaux, d’autres sont en pénuries donc les conventions médicales se sont attachées à harmoniser la démographie médicale pour faire en sorte qu’il y ait une répartition territoriale plus favorable à l’accès aux soins. Or, il y a le principe de la liberté d’installation : tout professionnel de santé choisit son lieu d’exercice. Les conventions médicales s’en tiennent à des dispositions incitatives.

            La convention de 2011 envisageait la création d’une option de coordination et essaie de contenir les dépassements d’honoraires. Elle limite le taux de dépassement d’honoraires et les professionnels de santé qui s’y engagent permettaient à leurs patients d’obtenir la prise en charge de ce dépassement d’honoraires.

 

Ce principe de la participation aux frais a des atténuations qui s’expliquent par l’origine de la maladie ou sa nature. Pour les risques professionnels, il n’y a pas de ticket modérateur et pour les affections de longue durée, les soins qui y sont rattachés ne sont pas soumis au ticket modérateur.

 

le principe de l’entente préalable : pour certains soins, le patient est obligé de demander une autorisation à la CPAM. Il ne s’agit pas d’interdire la dépense mais le patient sait qu’il ne sera pas remboursé. Ex : interventions chirurgicales.

 

Section II. L’assurance maternité

 

            La maternité a des conséquences semblables à celles de la maladie car elle entraîne un arrêt de travail qui va devoir être indemnisé par l’assurance maternité + des soins médicaux, de sorte que des prestations en nature vont aussi être versées.

Dans les deux cas, ces prestations sont soumises à un régime beaucoup plus favorable que les prestations de l’assurance maladie, ce qui s’explique par la volonté des politiques sociales d’être favorable à la future mère et le risque de fraude qui est faible. L’assurance maternité n’est pas animée par le souci de limiter les frais médicaux en ne décourageant pas leur usage.

De plus, depuis 2001, une prestation a d’abord été réservée exclusivement aux pères mais depuis la LFSS de 2013, elle peut aussi être versée à la personne qui cohabite avec la mère de l’enfant.

 

Paragraphe I. Les prestations en espèce

 

                        On parle d’indemnités de repos. L’assurée sociale est la seule qui est privée de revenus pendant le congé donc elle est la seule à en bénéficier. Elle doit être immatriculée depuis au moins 10 mois à la date présumée d’accouchement. Cette condition peut poser problème en cas de naissance prématurée. De plus, il y a une condition d’heures travaillées ou de montant de cotisation.

 

                        Pour pouvoir obtenir le versement de l’indemnité de repos, la mère doit interrompre son activité salariée pendant au moins 8 semaines. En réalité, les durées de congés indemnisés sont beaucoup plus longues. En matière de maternité, les juges ont retenu que le bénéfice des indemnités de repos était compatible avec la poursuite d’une activité indépendante pour la femme enceinte (arrêt ass.plénière, 20 mars 1992).

 

                        L’indemnité de maternité est de 100% de la rémunération nette, sous plafond de 80 euros par jour. Cette durée d’indemnisation dépend du rang de l’enfant à naître (1er, 2ème…) et du nombre d’enfants. La durée d’indemnisation dite normale (1er ou 2ème enfant) est de 16 semaines. A partir du 3ème enfant, cette durée est portée à 26 semaines. La répartition de ce congé se fait de part et d’autre de la naissance de l’enfant : 6 semaines pour la période prénatale + 10 semaines pour la période postnatale. On calcule le congé maternité à partir de la date présumée d’accouchement. Le congé prénatal qui n’a pas été pris vient se reporter en période postnatale, de sorte que la durée totale du congé est toujours de 16 semaines.

A partir du 3ème enfant = 8 semaines pour la période prénatale et 18 semaines pour la période postnatale.

Pour les jumeaux = 34 semaines avec 12 semaines avant et 22 semaines après. Pour les naissances au-delà = 46 semaines avec 24 semaines avant et 22 semaines après.

 

                        Cette durée normale situe la France dans la fourchette basse. L’Union Européenne préconise une durée de congé maternité plus longue car un projet de directive vise à porter la durée du congé à 20 semaines. Quand le congé de maternité existe, sa durée varie entre 14 semaines et 58 semaines.

                        S’il existe des complications pathologiques, la durée du congé maternité peut être allongée de 2 semaines dans la période prénatale. Dans ce cas, l’assurance maladie intervient. Tout arrêt de travail qui doit être plus long que la période de congé prénatale prévue est compensé par des indemnités journalières maladie dont le taux est beaucoup plus bas (50% du brut).

 

                        Le législateur a progressivement introduit un peu de souplesse dans la distribution de ces semaines de congé maternité. Cela permet à la mère d’adapter son congé à des impératifs d’ordre familial, professionnel ou personnel. Il existait assez tôt des possibilités d’adaptation mais elles étaient conditionnées à l’état de santé de l’enfant.

Le code de la Sécurité sociale prévoit que lorsque l’enfant reste hospitalisé après sa naissance au-delà de la 6ème semaine de sa naissance, la mère peut demander le report de son congé de maternité en totalité ou en partie à la date de la fin de l’hospitalisation de l’enfant.

Le père peut aussi récupérer le congé postnatal en cas de décès de la mère lors de l’accouchement.

Depuis 2007, le code du travail autorise la future mère à reporter une période de son congé prénatal en période postnatale. Il demeure une période incompressible de 3 semaines avant la naissance. De même, la salariée qui attend son 3ème enfant peut reporter son départ en congé maternité.

 

                        En cas d’adoption, l’équivalent du congé maternité n’existe pas mais il existe un congé d’adoption calqué sur le régime du congé maternité. La durée du congé d’adoption est égale aux durées des congés postnataux car il ne peut être attribué qu’à partir du moment où l’adoption intervient.

Les associations de parents adoptifs contestent ce régime qu’ils considèrent comme trop réducteur et font observer qu’il est fréquent que l’adoption requière des démarches longues demandant aux parents de suspendre leur activité pro et ces périodes préalables à l’adoption ne sont pas prises en compte par le congé d’adoption.

 

Paragraphe II. Les prestations en nature

 

                        L’article L.331-1 vise l’assuré et ses ayants droit. Certains examens prénataux qui ont pour fonction de déceler certaines pathologies sont exercés également sur le père donc il va bénéficier des prestations en nature de l’assurance maternité. Les ayants droit sont les mêmes que ceux de l’assurance maladie : conjoint, personne qui vit avec, vie maritale, PACS, enfants, ascendant, descendant, collatéraux…

 

                        L’intérêt de ces prestations en nature est qu’elles dispensent leur bénéficiaire du ticket modérateur pendant une période qui commence 4 mois avant le début de la date présumée d’accouchement. Pour que ces droits soient ouverts, la mère doit respecter des conditions prévues par le Code de la santé publique : obligation de déclaration de grossesse dans les 14 semaines suivant la conception à la CPAM qui adresse à la future mère un carnet de maternité recensant toutes les étapes de la surveillance médicale à laquelle la mère va devoir se soumettre pour conserver le bénéfice de ces prestations (objectif de surveillance sanitaire). 

Dès que la mère satisfait cette obligation, elle peut bénéficier de ces prestations en nature. Cette période de prise en charge à 100% des tarifs opposables (aucun dépassement d’honoraires n’est pris en charge !) se termine 12 jours après l’accouchement. Les frais d’examens prénataux (consultations, dépistages, frais de laboratoire, amiosynthèse), les séances de préparation à l’accouchement, l’accouchement, les frais d’accouchement… sont pris en charge par l’assurance maternité dans la limite des tarifs opposables !

 

                        La mère bénéficie d’une dispense d’avance des frais qui est tout de même conditionnée par la nature de l’établissement qui prodigue les soins. Cela s’explique par l’objectif de compensation.

. Hôpital public ou clinique privée conventionnée = application du tiers payant et la mère doit s’acquitter des éventuels dépassements d’honoraires.

. Clinique non conventionnée mais agréée = la mère s’acquitte des frais qui lui seront ensuite remboursés.

. Établissement non agréé = pas de remboursement.

           

            Les frais qui sont pris en charge pendant cette période (4 mois avant la daté présumée d’accouchement + 12 jours après) sont uniquement les frais liés à la maternité, de sorte que les traitements de maladies qui peuvent affecter la future mère restent pris en charge au titre de l’assurance maladie avec l’éventuel reste à charge qui demeure. Pour certains, il faudrait prendre en compte toutes les pathologies de la femme enceinte, sans appliquer le ticket modérateur, de la même manière car les maladies ordinaires ne le sont plus dès lors que la femme est enceinte.

 

Paragraphe III. Le congé de paternité et d’accueil de l’enfant

 

            C’est une prestation hybride car elle est payée par les CPAM et pourrait être une prestation d’assurance sociale. Or, elle est mise à la charge financière de la branche famille, c-a-d qu’elle est financée comme une prestation familiale.

 

            L’article L.1225-35 du code du travail prévoyait le congé de paternité. Jusqu’alors, le bénéficiaire du congé paternité était le père de l’enfant. Depuis la LFSS, la désignation du bénéficiaire a changé car les bénéficiaires sont « le père salarié ainsi que, le cas échéant, le conjoint salarié de la mère ou la personne salariée liée à elle par un PACS ou vivant maritalement avec elle ».

            Le problème est que le père de l’enfant pouvait ne pas être connu ou avait disparu et la mère pouvait avoir recomposé un foyer avec une autre personne n’étant pas le père de l’enfant. De plus, il y avait des familles homoparentales. Ce texte ne tenait pas compte de toutes les formes de foyers existants aujourd’hui.

            Le texte envisage que deux personnes, en même temps, puissent bénéficier de ce nouveau congé : le père + le cas échéant, s’il y a lieu, une personne qui serait avec la mère en étant son nouveau conjoint, en ayant conclu un PACS ou en forme de vie maritale.

Une différence est faite entre la naissance simple et les naissances multiples : 11 jours consécutifs en cas de naissance simple + 18 jours consécutifs en cas de naissance multiple. Ce congé doit être pris dans un délai proche de la naissance de l’enfant : dans les 4 mois de la naissance de l’enfant.

 

            2/3 des pères recourent à ce congé mais les plus représentés sont les 25/34 ans.

 

Section III. L’assurance vieillesse

 

                        Il y a des prestations contributives mais également non contributives : les prestations de solidarité (allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA, qui contribue à garantir le minimum vieillesse). Le minimum vieillesse n’est pas le nom d’une prestation car la prestation est l’ASPA.

 

Paragraphe I. Les prestations contributives

 

                        On retrouve le clivage entre les droits propres qui prennent la forme d’une pension de vieillesse et les droits dérivés qui donnent lieu au versement d’une pension de réversion.

 

  1. Présentation historique

 

                        La première grande loi qui a concerné les retraites est celle du 5 avril 1910 sur les retraites ouvrières et paysannes. A partir de cette loi, l’évolution de l’assurance vieillesse a témoigné d’un mouvement d’amélioration continue jusqu’à 1993 où là, ce mouvement a marqué une pause voire un recul, ce qui s‘explique par le mode de financement de nos retraites.

 

                        En 1910, les retraites sont financées en capitalisation, ce qui signifie que les cotisations qui sont perçues sont investies en produits financiers. Ces investissements génèrent des intérêts. Au moment de la retraite, l’assuré récupère sous forme de rente viagère le produit de son épargne avec les intérêts qu’elle a produit.

Ce dispositif a un champ d’application limité et l’assuré est accompagné dans son épargne avec des cotisations salariés et patronales mais cette épargne est dangereuse car elle dépend des marchés financiers.

                        => On observe une très grande ineffectivité et ce sont les intéressés qui refusent de souscrire des épargnes. La Cour de cassation a refusé de reconnaitre le caractère obligatoire de cette affiliation donc la loi est inefficace.

 

                        La loi du 30 avril 1930 modifie le fonctionnement des retraites et tente de mettre en place un système mixte qui concilie capitalisation et répartition.

 

            A partir de 1945, la sécurité sociale est instaurée et l’assurance vieillesse est créée. Avec l’ordonnance du 19 octobre 1945, un droit à la retraite émerge. Ce droit est également consacré par des normes supranationales comme la DUDH de 1948, la Convention n° 102 de l’OIT de 1952, la charte sociale européenne de 1961.

A cette période, on parle de droit à la retraite et de pension de retraite mais on parle aussi d‘assurance vieillesse. Cela signifie que ce droit à pension permet à des personnes de se retirer de leur activité professionnelle comme s’il y avait un droit au repos, un droit de ne plus travailler.

Aujourd’hui, le lien entre le retrait du marché du travail et l’âge s’est atténué car quelque soit notre âge, cette légitimité à se retirer du marché du travail découle aussi du temps pendant lequel on est resté sur le marché du travail. La durée d’activité de la personne permet de fonder le droit à la retraite.

 

                        La technique de financement retenue en 1945 est la répartition : les cotisations des actifs sont utilisées pour financer les pensions des retraités tout en étant prises en compte pour calculer les droits à pension de l’assuré qui les verse. Les pensions futures dépendent de la capacité des salariés de demain à s’acquitter de leurs cotisations. Le rapport favorable démographique est très important car les populations cotisantes doivent être suffisamment solides au moment où les pensions sont versées. Si le nombre de cotisants est insuffisant au regard des pensions qui doivent être liquidées ou si le poids des pensions devient trop important au regard des cotisations qui doivent être collectées, il faut trouver d’autres ressources pour financer les retraites.

Les pensions de retraite ont été portées par un mouvement d’amélioration permanent. Leur taux a été progressivement amélioré. Leur niveau général a aussi été élevé, de sorte que la condition des retraités a été véritablement transformée.

A partir de 1982, l’âge de 60 ans permet de partir à la retraite et le taux de la pension de réversion a été amélioré car il avait été porté de 50% à 52%.

                        La répartition va rencontrer des problèmes sérieux à la fin des années 80. Au milieu des années 80, des retraites vont commencer à être versées à des assurés qui ont acquis des droits à pension entiers. La durée de cotisation instaurée pour avoir des droits entiers était de 150 trimestres (37 ans ½). De plus, l’espérance de vie augmente donc ces pensions de retraites d’un montant plus élevé vont être versées plus longtemps. Il  y a aussi une augmentation des retraités et donc du nombre de retraites versées avec des besoins de recettes plus importants. Or, dans le même temps, une crise économique frappe, ce qui entraine une stagnation du nombre des cotisants et par conséquent, des recettes qui ne sont plus suffisantes pour financer les dépenses nécessaires.

                        A partir des années 90, des réformes se succèdent et un rapport est publié en 1991 sous le nom de Livre blanc sur les retraites en proposant des voies d’évolution. Toutes ces réformes s’inscrivent dans le sens d’une adaptation de la répartition et ne préconisent pas le basculement vers la capitalisation. Le poids de la capitalisation ne doit rester que marginal dans le système de retraite en raison de l’incertitude des marchés financiers qui peut exposer les retraites à des risques trop importants pour les assurés.

Ces adaptations vont dans le sens d’un allongement de la durée de cotisation qui s’exprime en nombre de trimestres cotisés. Ce rapport préconise une modification du calcul du salaire de référence qui permet de calculer la pension de retraite.

 

                        Une première réforme des retraites va être votée le 22 juillet 1993 avec des décrets d’application publiés en août 1993. Elle augmente la durée de cotisation. Or, la réforme n’est pas suffisante à la fin des années 90.

 

                        En 2003, une nouvelle loi est votée le 21 août 2003 en s’inscrivant dans le sens de la réforme déjà amorcée en 1993. Cette réforme est une sorte de prolongement mais le contexte est différent et va au-delà. Un allongement des cotisations n’apparaît plus comme la seule solution. Cette réforme va en plus concerner la pension de réversion et l’assurance veuvage. De plus, elle va aussi concerner le régime général et les régimes dits alignés, c-a-d les régimes des indépendants et le régime agricole mais également les régimes des 3 fonctions publiques. L’idée est d’introduire davantage d’égalité entre les retraités afin que de part et d’autre (secteur privé + secteur public), la durée de cotisation soit équivalente. Jusqu’en 2003, les fonctionnaires n’étaient pas concernés par l’augmentation de la durée de cotisation mais ils le seront dès 2003.

 

                        Comme les difficultés persistent, une loi a été votée le 9 novembre 2010. Elle va au-delà car elle affecte un élément qui n’avait pas été concerné par les réformes précédentes : l’âge de la liquidation de la pension de retraite qui est reculé. L’âge auquel la garantie d’un niveau minimum de retraite est assurée va être aussi reculé. En même temps, l’âge auquel le taux plein peut être attribué d’office va aussi être reculé. Dans un contexte de marché du travail difficile où on y entre tardivement et on en sort précocement, la vie au travail se réduit aux deux extrémités. La carrière professionnelle n’est pas continue et est marqué par des discontinuités donc tout est réuni pour que même s’il le voudrait, l’assuré aura les plus grandes difficultés à remplir les conditions posées pour avoir une pension entière.

 

  1. La pension de retraite versée à l’assuré

 

  1. Les conditions de l’attribution

 

                        La condition essentielle tient à l’âge de l’assuré. Dire d’un assuré qu’il peut obtenir le paiement de sa pension de retraite à un certain âge ne signifie pas qu’à cet âge indiqué, il aura une pension de retraite entière. Depuis 1982, l’âge avait été ramené à 60 ans et aujourd’hui (effet de la réforme de 2010), cet âge a été porté à 62 ans. Il faut distinguer 3 catégories d’assurés :

 

– dans certains cas, le départ anticipé à la retraite est admis, de sorte que même aujourd’hui, certains assurés peuvent obtenir la liquidation de leur pension avant 60 ans. 2 cas : les assurés atteints d’une incapacité permanente d’au moins 80%. Il peut partir entre 55 ans et 60 ans, cet âge étant déterminé à la fois par leur année de naissance et par le nombre de trimestres cotisés.

. Les assurés faisant état d’une carrière longue. Cette référence à la carrière longue avait été introduite par la réforme de 2003 afin de permettre aux personnes qui ont commencé très tôt leur activité pro de pouvoir partir plus tôt en retraite. Ces personnes peuvent obtenir une liquidation anticipée de leur pension de retraite. Ces personnes ont cotisé plus que ce qui est requis. Ce dispositif est destiné à des personnes qui ont une durée de cotisation bien supérieure à celle requise. Aujourd’hui, ce dispositif pour les carrières longues est ouvert pour les assurés qui ont entre 56 ans et 8 mois et 60 ans, à condition qu’ils aient jusqu’à 174 trimestres de cotisations (43 ans ½).

 

– certains assurés peuvent partir à la retraite à 60 ans. Ces assurés sont tous ceux nés avant le 1er Juillet 1951 et qui sont atteints d’une incapacité permanente d’au moins 10% liée à la pénibilité du travail. Cette nouveauté est issue de la réforme de 2010. La pénibilité du travail découle de facteurs de risque pendant une certaine durée.

Cela concerne aussi les assurés qui ont cotisé la durée d’assurance nécessaire pour obtenir le taux plein et ont cotisé au moins 5 trimestres à la fin de l’année des 20 ans.

 

– la situation normale. Aujourd’hui, l’âge normal est de 60 ans et 9 mois depuis le 1er janvier 2012. Cet âge va être progressivement augmenté jusqu’à 62 ans par étapes au 1er mars 2014 à 61 ans et 2 mois ; en août 2015 à 61 ans et 7 mois et au 1er janvier 2017 à 62 ans.

 

  1. Le montant de la pension de retraite

 

                        Le calcul fait intervenir 3 éléments : le salaire annuel moyen de base auquel on applique un taux. Ensuite, on prend en compte le nombre de trimestres cotisés au RG que l’on rapporte au nombre de trimestres requis.

 

                        A partir de 1973, la référence a été modifiée passant des 10 dernières années d’activité au 10 meilleures années. La réforme de 1993 a proposé l’allongement de la durée de cotisations pour calculer le salaire moyen aux 25 meilleures années d’activités. Réforme mise en œuvre de manière progressive. En 2008, tous les assurés sont soumis à la période de référence de 25 ans.

 

                        A ce salaire de référence, on applique un taux. Il varie entre un maximum qui est de 50% et un minimum qui est de 25%. Le taux max correspond au taux plein. On tient compte de l’effort de cotisation fourni. Pour le calcul du taux, la loi admet qu’il soit tenu compte de l’âge de la personne. Au fond, quand une personne est trop vieille, elle peut quitter le marché du travail donc le taux plein est attribué aussi en fonction de l’âge de la personne. Dès qu’on est en dessous de 50%, on parle de taux minoré.

 

                        Avec le nombre de trimestres cotisés, il s’agit de tenir compte de l’effort contributif d’une personne. C’est une précision importante car elle permet de comprendre que les trimestres qui vont être pris en compte pour le calcul du taux sont les trimestres qui ont été cotisés quelque soit le régime de SS auquel l’assuré était assujetti au moment où il a cotisé.

                        Jusqu’en 1993, le nombre de trimestres était de 150 (37 ans ½) pour obtenir le taux plein. La loi de 1993 porte le nombre de trimestres attendus pour l’obtention du taux plein à 160 (40 ans). Réforme progressive avec un trimestre par an à compter de janvier 1994 de sorte qu’au 1er janvier 2003, on est arrivé à 160 trimestres.

                        Réforme 2003 = augmentation du nombre de trimestres de cotisation. Cette augmentation devait entrer en vigueur à partir de 2009 seulement car ce délai tient à la réforme du régime des fonctionnaires. À partir du 1er janvier 2004, leur durée de cotisation va être augmentée de deux trimestres par an (160 trimestres en 2008). Ainsi, en 2008, secteur privé et public cotisent 160 trimestres pour avoir le taux plein.

                        La loi du 9/11/2010 prévoit qu’il faut retenir l’allongement de la durée de cotisation mais que l’augmentation de cette durée de cotisation pour bénéficier du taux plein doit être fixée après un avis technique du Conseil d’Orientation des Retraites par décret publié chaque année avant le 31/12 de l’année au cours de laquelle l’assuré atteint 56 ans. L’assuré qui a 56 ans en 2013 va savoir combien de trimestres il va devoir cotiser.

            Aujourd’hui, les personnes qui avaient 56 ans au 31/12/2012 sont les assurés qui sont nés en 1956. Les assurés nés en 1956 devront avoir une durée d’assurance de 166 trimestres pour avoir le taux plein (41 ans et 6 mois).

 

                        Un assuré qui cotiserait beaucoup pendant un trimestre cotise plus qu’un trimestre mais cela ne va pas au-delà par l’intermédiaire d’un plafond. Le salarié qui cotise beaucoup pendant une durée limitée peut avoir cotisé plus qu’un assuré qui a cotisé sur une durée plus longue. Le législateur a accepté qu’un assuré puisse valider plus de trimestres que ceux qui ont véritablement donné lieu à cotisations. Il ne peut valider des trimestres que dans la limite de 4 trimestres par an. Cela peut correspondre à un emploi saisonnier.

                        Il y a aussi les trimestres assimilés : ce sont les trimestres durant lesquels l’assuré n’exerçait pas une activité professionnelle mais pour autant, il percevait des prestations sociales consistant à des revenus de remplacement. Ex : indemnisation du chômage, rente d’AT. Le trimestre non travaillé est assimilé dans le calcul du taux de la pension de retraite.

 

                        Concernant l’âge de la personne, jusqu’à la réforme du 9/11/2010, l’âge du taux plein était resté inchangé à 65 ans. Or, une personne peut ne pas avoir travaillé les 160 trimestres, c-a-d qu’une personne qui n’a pas assez cotisé au regard du nombre de trimestres a intérêt à attendre 65 ans quelque soit le nombre de trimestres cotisés. L’âge est porté en 2010 progressivement à 67 ans. L’âge de 67 ans concernera les assurés nés en 1955 car ils auront 67 ans en 2022.

                        Dans la situation où l’assuré n’a pas cotisé assez de trimestres et qu’il n’a pas l’âge pour le taux plein mais seulement l’âge de partir à la retraite aura un taux réduit. Il y a un coefficient de minoration appliqué en fonction du nombre de trimestres manquants. Ce taux ne pourra jamais baisser en dessous de 25% car c’est un plafond. La minoration est faite à l’avantage du salarié donc soit l’âge ; soit les trimestres selon la situation de l’assuré.

 

                        Pour le calcul proportionnel de la pension, il s’agit de savoir combien de trimestres vont être retenus pour le calcul du montant de la pension par le RG. En 1993, le nombre de trimestres exigés était de 150. Il est resté à ce niveau car l’un des objectifs de la réforme de 1993 était de pousser les personnes à rester au travail plus longtemps. Le législateur savait qu’à 65 ans, elles n’auraient pas les 160 trimestres mais en 2003, on passe à 160. Désormais, depuis la loi 2010, la connexion est établie entre le nombre de trimestres pour le calcul du taux et le calcul proportionnel de la pension.

 

  1. Les prestations versées en vertu des droits dérivés

 

                        Ces prestations consistent aujourd’hui uniquement dans les pensions de réversion. Ces prestations ont été mises en place par les premières assurances sociales, elles avaient essentiellement pour fonction de procurer à la veuve de l’assuré des subsides quand son conjoint viendrait à décéder.

 

                        En 1935, il n’est pas prévu de poser une condition de sexe donc c’est une pension de veuve ou de veuf. C’est une prestation en réalité créée pour répondre à un modèle familial traditionnel, dominant où l’homme va avoir une activité professionnelle et où la femme va consacrer son temps aux tâches domestiques et à l’éducation des enfants. La femme survie à son conjoint et va se retrouver sans ressources au décès de son conjoint d’où ce souci de procurer à la femme des subsides au décès de son conjoint. En 1935, ces prestations sont reversées au conjoint à la charge de l’autre. Au départ, pas d’automaticité au bénéfice de la pension de réversion, elle est versée au conjoint qui était à la charge du conjoint décédé.

                        Au départ, on est face à une finalité alimentaire. Ce caractère alimentaire explique aussi que dès le départ le bénéfice de la pension de réversion est réservé au conjoint non remarié. Cela est logique car si la personne se remarie avec une personne qui a des ressources, cette pension alimentaire n’a plus besoin d’être versée. Ce caractère alimentaire va demeurer assez longtemps.

 

                        En 1945, la pension de réversion perdure mais toutefois, elle n’est plus réservée au conjoint qui était à la charge de l’assuré décédé. Tout de même, elle reste versée sous conditions de ressources. De sorte qu’au-delà d’un certain niveau de revenu, le conjoint survivant ne perçoit pas de pension de réversion. Un conjoint survivant peut avoir une activité professionnelle, peut avoir une pension de retraite et avoir des ressources qui lui sont propres. Le droit de la sécurité sociale réserve la pension de réversion aux personnes dont les ressources sont en dessous d’un certain niveau de revenu.

                        Seront écarté du dispositif dans le RG le conjoint survivant dont on considère que les ressources sont suffisantes pour subvenir à ses besoins. Cette pension de réversion à un montant calculé à partir de la pension que percevait ou qu’aurait perçu l’assuré social décédé. La pension de réversion s’élève à 54% de la pension versée ou qui aurait dû être versée à l’assuré. Cette pension est soumise à une double limite d’un plancher et d’un plafond. Avec un minimum de 279 euros par mois et un maximum de 833 euros par mois. Cette pension de réversion a échappé très longtemps à toute forme de réforme et les âges fixés dès le départ est que le conjoint survivant pouvait bénéficier de la pension de réversion à partir de l’âge de 55 ans.

Le bénéficiaire était celui ou celle qui était marié avec l’assuré social ou qui avait été marié avec l’assuré social. Cela signifie que la pension de réversion est versée au conjoint survivant actuel mais également aux anciens conjoints de l’assuré social si ces derniers remplissent les conditions d’âges, de ressources et jusqu’en 2003, la condition tenant à l’absence de remariage. Cela veut dire qu’en cas de mariage successif de l’assuré social, l’assuré social ouvre des droits à réversion à ses différents conjoints. Il faut donc partager la pension entre le conjoint actuel et les anciens et le partage se fait en se référant aux années de mariage. Un partage proportionnel aux durées des différents mariages est fait et les durées prises en compte sont le mariage, si des années de vie communes hors mariage ont existé, elles ne comptent pas. Ce n’est pas le conjoint actuel qui a forcément la part la plus importante de la pension de réversion.

                        Le régime de la pension de réversion est de ce point de vue là critiqué. Montant modique, émietté entre les différents conjoints survivants sans préférence au dernier conjoint survivant mais au mariage qui a eu la durée la plus longue. Cette pension de réversion d’une certaine façon, qualifiée de droit patrimonial par la Cour européenne des droits de l’homme, apparait comme une sorte d’acquis du mariage. Et c’est ce caractère qui permet de maintenir le droit à pension à un conjoint divorcé de l’assuré social mais longtemps marié avec lui.

                        En 2003, la réforme des retraites a modifié de façon importante mais éphémère le régime de la pension de réversion. La pension de réversion était versée à partir de 55 ans au conjoint survivant mais il existait dans le CSS dans le RG une autre prestation pour le conjoint survivant, nommée l’allocation veuvage. Cette allocation veuvage était versée par une autre assurance sociale nommée assurance veuvage créée en 1980. Cette assurance veuvage concernait les conjoints survivant de moins de 55 ans. A partir de 55 ans, le conjoint survivant était pris en charge par l’assurance vieillesse et pour les moins de 55 ans, il y avait cette autre prestation nommée allocation veuvage versée par une autre prestation sociale. La pension de réversion était associée à la vieillesse et la pension de veuvage était associée au veuvage.

                        La réforme de 2003 a tenté d’introduire une simplification des prestations, on était en présence de deux prestations qui concernaient le conjoint survivant mais ces deux prestations avaient des régimes juridiques extrêmement différents l’un de l’autre. La différence essentielle est la garantie de ressources, l’allocation de veuvage appartenait aux minimas sociaux donc des ressources minimales étaient garanties au conjoint survivant. La différence majeure est qu’en matière de réversion, le niveau de ressources n’est pas garanti. Il existe un plancher mais le niveau de la pension de réversion est étroitement et complètement dépendant du niveau de la pension de vieillesse dû à l’assuré. Cela était vraiment un élément problématique résultant de la fusion parce que la suppression de l’allocation veuvage conduisait à ce que les conjoints survivants jeunes de moins de 55 ans perçoivent une pension de réversion calculée à partir de la pension de retraite qu’aurait perçu ou que percevait déjà leur conjoint décédé.

                       

                        Cet effort de simplification ou cette volonté de simplification qui conduisait à fusionner deux allocations pouvait être séduisante mais la difficulté qu’il y a quand on procède à une simplification, une rationalisation des prestations est qu’il faut également résoudre le problème tenant aux différences de régime juridique. Les problèmes ne pouvaient pas être résolus puisque le mode de calcul de la pension de réversion ne permettait pas de mettre en place une pension pour un conjoint survivant jeune marié avec un assuré social ayant acquis des droits à pension faible.

 

                        Une deuxième modification va résulter de la réforme de 2003. L’une des conditions posées pour le bénéfice de la pension de réversion était l’absence de remariage. En cas de remariage, le nouveau mari peut subvenir aux besoins de la personne veuve ou veuf. Mais un constat est dressé : un certain nombre de personnes âgées ne se remarient pas mais vivent en couple.

La loi de 2003 va introduire une disposition assez intéressante : la condition de non remariage est supprimée pour le bénéfice de la pension de réversion. Désormais, un conjoint survivant remarié conservera ses droits à pension de réversion. Mais la loi de 2003 introduit désormais deux plafonds de ressources. Un premier plafond pour les personnes seules et un deuxième plafond pour les personnes en couple. Plafond annuel pour une personne seule = 19 614 euros + plafond annuel pour une personne en couple = 31 383 euros.

Comme la condition d’absence de remariage disparaît, les conjoints qui se remarient ont le droit à la pension de réversion mais il y a un plafond couple.

Des bénéficiaires de pension de réversion alors qu’ils vivaient en concubinage, ont perdu des droits à pension de réversion puisque les revenus de leurs concubins étaient pris en compte. Cet aménagement demeure aujourd’hui encore.

 

                        Par contre, l’assurance veuvage qui avait été supprimée en 2003 a été réinstaurée en 2010 dans le régime juridique qui était le sien avant qu’elle soit supprimée. Il est apparu que le mode de calcul de la pension de réversion était de toute évidence inadapté quand le veuvage survenait à des âges précoces. Très simplement parce que dans ces conditions, la base de calcul de la réversion était trop faible pour garantir au conjoint survivant des ressources d’un niveau convenable.

Cette pension de réversion est encore aujourd’hui réservée au conjoint survivant. Sont exclus du bénéfice de cette pension le partenaire pacsé et le concubin. Cette disposition du CSS a fait l’objet d’une QPC, décision du Conseil constitutionnel, 29 juillet 2011. Le demandeur prétendait à la question sur la conformité des dispositions qui réservent la pension de réversion au conjoint aux droits et libertés que la Constitution garantie.

 

Le Conseil a considéré que ces dispositions n’étaient pas contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution et notamment pas contraires au principe d’égalité avec ce raisonnement imparable : le principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’on traite de façon différente les situations de nature différente. Il ajoute que ce principe d’égalité ne s’oppose pas à ce que l’on déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général.

En d’autres termes, il n’y a pas ici d’inconstitutionnalité des dispositions qui étaient mises en cause.

Montée en puissance du pacs donc plusieurs positions de la HALDE vont dans ce sens avec des préconisations pour l’ouverture de la pension de réversion aux partenaires pacsés mais cela n’est toujours pas réalisé.

 

Paragraphe II. Les prestations non contributives

 

                        Les prestations non contributives s’expliquent par le fait qu’au lendemain de la 2nde GM, le niveau de vie des personnes âgées était une question cruciale dans la mesure où les pensions de retraite étaient modiques, de sorte que leurs bénéficiaires étaient très souvent dans une situation de grande précarité économique. Une précarité économique qui pouvait s’expliquer par des raisons différentes : pour certains, cette précarité économique s’expliquait par le fait qu’ils avaient cotisé en capitalisation et le montant dégagé était insuffisant. Il y avait d’autres personnes âgées qui n’avaient jamais cotisé dans un système contributif.

 

                        Ce n’est pas dès 1945 mais seulement en 1956 que le principe est posé d’une garantie de ressources minimales aux personnes âgées. Le principe posé est celui d’un minimum vieillesse et en 1956 va être créé le fonds national de solidarité vieillesse alimenté par différents impôts qui va reverser aux personnes âgées démunies une allocation.

 

  1. L’existence d’un minimum vieillesse

 

                        Le minimum vieillesse n’est pas le nom d’une prestation mais désigne le niveau de ressources qui doit être garanti en France à toute personne âgée. On retombe sur la définition de la personne âgée. A partir d’un certain âge, on considère qu’une personne est légitime à se retirer du monde du travail et va bénéficier de subsides qui lui permettront de ne plus travailler. Cette prestation est financée par la solidarité nationale.

                        Jusqu’à la réforme des retraites de novembre 2010, cet âge était fixé à 65 ans ou à 60 ans en cas d’inaptitude au travail. Cet âge a été relevé par la réforme des retraites et va être relevé au même rythme qu’est relevé l’âge pour l’obtention du taux plein. On va arriver à l’âge de 67 ans, âge qui sera en application au 1er janvier 2022 pour les générations nées en 1955.

 

                        Le montant de ce minimum vieillesse est fixé pour une personne seule à 777 euros mensuel et pour un ménage à 1 206 euros. Ce minimum vieillesse doit lutter contre la pauvreté des personnes âgées mais il apparait que ces montants du minimum vieillesse sont inférieurs aux chiffres posés pour la pauvreté relative.

 

  1. Les prestations contribuant à garantir le minimum vieillesse

 

                        Avant l’ordonnance du 24 juin 2004, il existait 5 prestations non contributives qui étaient destinées à garantir le minimum vieillesse. Il s’agissait de prestations qui étaient différentielles, attribuées sous condition de ressources. Ces prestations s’ajoutent éventuellement à des ressources existantes pour porter les revenus de la personne âgée au niveau du minimum vieillesse.

Il existait différentes prestations non contributives destinées à des bénéficiaires spécifiques (allocation vieux travailleur salarié, allocation mère de famille…). Cette différenciation des bénéficiaires s’expliquait par le fait qu’au départ, des populations cibles avaient été identifiées pour conduire à identifier des personnes bénéficiaires et la particularité de leur situation motive une prestation spécifique. Cela rendait le panorama de ces aides assez complexe alors que l’objectif poursuivi était le même : garantir des ressources aux personnes âgées.

 

                        Un souci de simplification a conduit le législateur à créer une nouvelle prestation contributive nommée l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). Le dispositif devait entrer en vigueur au plus tard au 1er janvier 2006 mais il n’est entré en vigueur qu’au 1er janvier 2007 et à partir de là, tous les nouveaux entrants dans le dispositif minimum vieillesse ont relevé automatiquement de l’allocation.

Pour ceux qui bénéficiaient depuis de longues années du minimum vieillesse, le dispositif n’a pas voulu être autoritaire donc soit elles demeuraient titulaires de leurs prestations avec le régime particulier ; soit celles qui le souhaitaient pourraient relever de l’allocation.

                        Cette prestation va compléter le revenu jusqu’à hauteur du minimum vieillesse. Toute personne âgée d’au moins 65 ans devrait relever de ce dispositif. Les personnes âgées ne devraient plus être dans des situations de grande pauvreté éventuellement dans des situations de pauvreté relative mais toute personne d’au moins 65 ans devrait avoir des subsides lui permettant de faire face à ses besoins essentiels.

                        Au fond, cela est assez théorique puisque cette prestation non contributive est soumise à un régime très fréquent qui est le régime de la récupération sur succession. Les sommes servies au titre de l’ASPA sont récupérables sur succession. Toutes les successions ne sont pas exposées à la récupération car elle s’effectue au delà d’un montant de 39 000 euros, ce qui veut dire qu’en dessous, les sommes sont garanties aux héritiers. Cette récupération sur succession est dissuasive pour certaines personnes âgées car elles sont attachées à la transmission de leur patrimoine.

Le dispositif d’allocation vieillesse permet aux proches de ne pas être sollicités au titre de la solidarité nationale parce que leurs ascendants recevront des subsides de la solidarité nationale. Cela permet à l’ascendant de bénéficier des subsides et d’éviter de se dépouiller pour vivre.

 

Section IV. L’assurance veuvage

 

                        C’est la dernière assurance sociale créée en 1980. C’est une extension du champ matériel de la sécurité sociale. Ce risque veuvage va être désormais identifié de manière autonome. Plusieurs normes internationales comme la convention 102 de l’OIT identifie spécifiquement cette assurance veuvage qui résulte de l’idée que le conjoint survivant, quand il est jeune, est dans une situation vraiment singulière qui justifie un traitement lui-même spécifique.

 

                        L’assurance veuvage concerne uniquement le conjoint survivant de moins de 55 ans qui se retrouve dans une situation caractérisée essentiellement par deux éléments : la solitude, appréciée au regard du couple + le besoin. L’objectif de cette assurance veuvage va être de verser une aide temporaire à ce conjoint survivant afin de lui permettre de se réinsérer professionnellement. Il est prévu, en 1980, que la prestation va être versée en principe pendant 3 ans et exceptionnellement, elle pourra être versée jusqu’à 5 ans dans des cas où l’insertion professionnelle du conjoint survivant sera très difficile. Le conjoint survivant visé doit avoir 50 ans et plus jusqu’à la limite de 55 ans. Au-delà de 55 ans, la pension de réversion prend le relai.

 

                        Pour inciter le bénéficiaire à rechercher activement un emploi, l’allocation versée était dégressive. Chaque année, le montant de la pension était réduit. Or, l’effet que l’on attendait de la dégressivité ne pouvait se produire avec l’allocation veuvage car les bénéficiaires de l’allocation étaient en situation très difficile sur le marché du travail. En effet, le plus souvent, ces bénéficiaires étaient des femmes au foyer qui n’avaient pas de formation professionnelle récente ni de qualification ou d’expérience professionnelle récente. De sorte que des personnes aussi peu armées sur le plan de la formation et de l’expérience avaient de très grandes difficultés à intégrer le marché du travail donc elles subissaient la dégressivité. La dégressivité n’était pas incitative mais pénalisante.

                        Cette allocation veuvage permet au conjoint survivant de faire face à une période de besoin mais le mode de calcul de la prestation paraissait particulièrement inadapté car le montant de la prestation était forfaitaire et indépendant de la composition du foyer. De telle sorte, lorsque le conjoint survivant avait des enfants à charge, le montant de cette allocation plaçait le foyer en dessous des conditions de ressources posées par le RMI.

                        Il s’agit bien d’une assurance sociale mais le montant de la prestation n’entretient aucun lien avec le revenu de l’assuré qui a permis de percevoir les cotisations. Ainsi, elle ressemble plus à une prestation d’assistance.

 

                        => Toutes ces critiques vont donner lieu à une première réforme votée en 1993 supprimant la dégressivité + la durée normale de versement est ramenée à 2 ans. En 2003, l’allocation veuvage disparaît et est fondue dans la pension de réversion. Une réforme est de nouveau intervenue par la LFSS de 2009 qui rétablit l’allocation veuvage, tout en réintroduisant la condition d’âge de 55 ans pour la pension de réversion. On retrouve l’allocation sans dégressivité + jusqu’à 2 ans ou jusqu’à 5 ans si le conjoint survivant a entre 50 et 51 ans + le même mode de calcul avec une déconnexion de l’assiette des cotisations et une définition du montant indépendante de la composition du foyer. On retrouve cette condition d’isolement appréciée seulement du point de vue du couple et le montant mensuel de l’allocation veuvage est porté à 594 euros. Ce montant est inférieur à celui du RSA pour 2 personnes (724 euros).

Cette prestation n’est pas strictement différentielle. C’est une allocation versée dans la limite d’un plafond de 2 229 euros par trimestre. Elle peut être cumulée avec des ressources propres.

 

Section V. L’assurance invalidité

 

                        Elle concerne toutes les situations où l’origine de l’invalidité n’est pas professionnelle. La situation de l’assuré est quand même comparable à celle de la victime de l’accident de travail car l’assuré a une capacité de travail ou de gain réduite. En matière d’assurance invalidité, cette réduction de capacité, de travail ou de gain est massive et définitive.

 

Paragraphe I. Définition de l’invalidité

 

                        L’article L.341-1 définit l’invalidité avec une formulation très laborieuse qui rend assez difficile l’identification de l’invalidité. Il faut tenir compte de plusieurs éléments concrets ou abstraits qui vont se combiner.

                        En premier lieu, l’invalidité se définit au regard de la situation de l’assuré qui supporte une réduction de sa capacité de travail ou de gain stabilisée. Cette capacité de travail ou de gain doit être réduite totalement ou partiellement. La réduction qui est au moins nécessaire pour qu’il y ait incapacité est des 2/3. Le code demande de se référer à la capacité de travail restante de l’assuré et plus exactement à sa capacité de gain restante. Il faut rechercher si l’assuré ne peut pas se procurer, dans une profession quelconque, un salaire supérieur au tiers de la rémunération moyenne perçue par les salariés qui exercent la même activité.

Si une personne est frappée d’une affection de longue durée mais dont il est certain, compte tenu de la stabilité de son état qu’elle ne recouvrera pas sa capacité de travail et ne reprendra pas son activité professionnelle, avant qu’elle ait épuisé ses 3 années d’indemnisation, elle sera déclarée invalide par la CPAM et relèvera de l’assurance invalidité si son état correspond à la définition de l’invalidité.

 

Paragraphe II. Catégories d’invalidités et prestations

 

                        L’assurance invalidité ouvre des droits propres ouverts au regard d’une durée minimale d’immatriculation et de cotisation et des droits dérivés. Cette pension d’invalidité qui va être versée à l’assuré a un montant variable en fonction de la catégorie dans laquelle se place l’assuré invalide.

 

                        3 catégories : les assurés atteints d’une invalidité partielle (plus des 2/3). On parle d’invalides de la 1ère catégorie. Ces bénéficiaires vont avoir droit à une prestation qui représente 30% du salaire moyen des 10 meilleures années d’activité. La pension est également plafonnée à 925 euros par mois.

– les assurés atteints d’une invalidité totale. On retrouve la même base de calcul : les 10 meilleures années et le taux est fixé à 50%. Le plafond est de 1 543 euros par mois.

– les assurés atteints d’une invalidité totale mais qui ont besoin de l’assistance d’une tierce personne pour tous les actes de la vie courante. La jurisprudence contrôle avec rigueur cette condition d’assistance pour tous les actes de la vie courante. La pension est majorée de 1 082 euros par mois.

 

                        Il existe aussi une pension de veuf ou veuve invalide dont le montant est fixé à 52 % de la pension principale. Cette prestation est curieuse car la personne bénéficiaire doit elle même être invalide mais ne doit pas avoir de droits ouverts à la pension invalidité.

 

Section VI. L’assurance décès

 

Elle garantie aux proches qui survivent à l’assuré social, un capital, une prestation qui s’appelle le capital décès.
Cette prestation a un objet très simple : il s’agit de compenser la perte soudaine de revenus qui étaient procurés par l’assuré et de couvrir les frais occasionnés par le décès, notamment les frais d’obsèques.
Cette fonction double n’est pas définie de manière précise, on va retrouver cela dans le régime juridique car on va voir que les bénéficiaires de ce capital sont désignés en référence à leurs droits alimentaires, ou à leur situation de besoin alimentaire.
Ce capital décès est parfois dénommé « succession sociale ».
Cette dénomination n’est pas très justifiée puisque le capital décès échappe aux règles particulières de dévolution successorale
L’assuré social n’a pas le choix de désigner le bénéficiaire du capital décès. En cela ce capital décès se différencie des différentes prestations auxquelles une personne a droit quand elle contracte une assurance privée.

I. Le montant de la prestation 
 
Ce capital s’élève à 90 fois le gain journalier de base avec un plafond de 9 000euros.
Ouvre droit au capital décès l’assuré social en activité mais aussi l’assuré social indemnisé au titre de l’assurance maladie, l’assuré bénéficiaire d’une pension d’invalidité, et celui qui perçoit une rente risque professionnel.
Par contre, l’assuré qui est titulaire d’une pension de vieillesse qui est donc assez porteur du risque décès, n’ouvre pas le droit au capital décès.
Le décès perçu par la sécurité sociale est celui qui intervient de manière anormale.

 
II. Les bénéficiaires de ce capital décès

Le code de la sécurité sociale distingue deux catégories de personnes :
-celles qui sont à la charge totale, effective et permanente de l’assuré au moment du décès. Ce sont des bénéficiaires prioritaires.
-celles qui ne sont pas à la charge totale effective et permanente au jour du décès. Ce sont des bénéficiaires non prioritaires.

Si au moment du décès des personnes sont à charge de l’assuré social ce sont elles qui vont bénéficier en priorité du capital décès. A défaut de personnes à charge on  va rechercher des personnes non à charge.

Aujourd’hui plusieurs personnes peuvent être à charge d’un assuré social.
 Donc le code de la sécurité sociale instaure entre ces bénéficiaires prioritaires un ordre de préférence qui va permettre de dire qui sont les personnes qui en premier recueil le capital décès :
-Les premières sont le conjoint, même séparé de droit ou de fait, ou le partenaire pacsé.
-Les enfants quelque soit la nature du lien de filiation. Si plusieurs enfants sont à la charge le capital décès sera partagé en parts égales par enfant à charge
-A défaut d’enfants à charge, les ascendants à charge.

On se demandait si cette liste devait être limitative ou si tout autre personne à charge devait pouvoir bénéficier de ce capital décès. La jurisprudence avait considéré que la notion de personne à charge devait être abordée de la façon la plus large sans se référer à la définition de l’ayant droit en matière d’assurance maladie,  de sorte que même si la personne ne remplie pas les conditions pour être ayant droit en assurance maladie elle peut néanmoins bénéficier du capital décès en tant que personne à charge. Ce sont des arrêts de 1961 et 1967.
Cela signifie au fond que la situation de vie maritale n’est pas privilégiée par cette définition. Ce choix est discutable quand on le rapproche des fonctions de la prestation, de son objet c a d permettre aux proches de l’assuré de faire face à la perte de revenus résultant du décès et les frais liés au décès.
Généralement celui qui assume ces frais c’est celui qui vit en couple avec l’assuré social.  Or là ce sont les enfants à charge qui vont recueillir le capital décès puisque le concubin intervient bien plus tard.

Si aucune de ces personnes n’est à charge de  l’assuré social on se tourne vers les bénéficiaires non prioritaires.
Le code de la sécurité sociale établie aussi un ordre de préférence qui n’est pas le même que pour les bénéficiaires prioritaires:
-le conjoint non séparé de droit ou de fait ou le partenaire pacsé.
-les descendants  et non les enfants, avec la même règle de partage par tête
-les ascendants.

Cela veut dire que là aussi les personnes en situation de vie maritale et qui ne serait pas à charge de leur compagne ou compagnon ne pourraient pas avoir droit au capital décès quand bien même il n’y aurait aucune personne à charge et aucun autre représentant des personnes non à charge.
On a aucune prise en considération de la vie maritale.


Chapitre 4 : les prestations familiales


 

Elles sont aujourd’hui en France très nombreuses et variées.
Alors qu’au lendemain de 1945 ces prestations se réduisaient quasiment aux allocations familiales.
L’origine des prestations familiales se trouve dans une loi du 11 mars 1932 qui a crée et rendue obligatoire le sursalaire familiale.
Il s’agissait de donner aux salariés du commerce et de l’industrie un suplément de salaire afin de compenser les charges de famille.
Avant la loi de 1932 il y avait des initiatives patronales puisque ces patrons que l’on appelait les « patrons sociaux » (ceux qui avaient été inspiré par la doctrine sociale de l’église) avaient crée des prestations à destination de ces salariés chargés de famille afin qu’ils puissent faire vivre leur famille dignement.
Depuis les aides aux familles se sont diversifiées. Cet objectif de compensation des charges de famille demeure mais les prestations familiales soutiennent d’autres obectifs car les finalités de la politique familiale se sont diversifiées
La sécurité sociale n’est pas le seul moyen de développer la politique familiale, le droit fiscal est aussi un levier important avec le quotient familial.



Section 1 : les prestations familiales et les finalités de la politique familiale. 

 

Ces prestations familiales permettent de comprendre le rôle que la sécurité sociale a joué dans la protection de la mère et de l’enfant, et de mesure la dimension de cette politique familiale affirmée dès 1945
Très souvent se pose la question de l’unité, la cohérence de cette politique familiale.

La natalité est une préoccupation ancienne, elle date de la fin du XIXè : un auteur avait dit de la France qu’elle était un pays de « célibataires et fils uniques » Cette préoccupation va justifier la généralisation des allocations familiales dès 1939 avec des dispositions en faveur des familles qui sont rassemblées dans le code de la famille du 29 juillet 1939.
Pendant la 2° guerre mondiale, le gouvernement de Vichy va mener une politique familiale assez controversée, avec  en 1941 la création de l’allocation de salaire unique, destinée à favoriser le modèle de la mère au foyer.
En 1945 à la libération il existe un très fort consensus sur la nécessité d’une politique familiale de sorte que le conseil national de la résistance va maintenir la plupart des dispositifs existants.
En 1945 la politique familiale et les prestations qui en découlent vont intégrer la sécurité sociale. Les allocations familiales sont généralisées mais pas encore universalisées, aux personnes qui travaillent. Cela signifie notamment qu’elles ne vont plus être réservées aux salariés. Il y a cette référence à l’activité actuelle ou passée qui va demeurer jusqu’en 1978 puisqu’en 1978 c’est la condition de résidence régulière qui devient déterminante pour l’attribution des prestations familiales.

Dans le même temps, le mode de financement est resté constitué des cotisations employeurs. Il y avait ce mode de financement car les bénéficiaires des prestations étaient à l’origine des salariés donc les employeurs cotisaient pour que des prestations soient versées aux salariés chargés de famille.
Un des arguments qui a été avancé dès 1981 pour la modification du financement des prestations familiales étaient cet élargissement du cercle des bénéficiaires des prestations avec cette universalisation.

Cette universalisation est partiellement exacte car si on regarde les prestations familiales aujourd’hui qui sont versées sous seule condition de résidence et non conditions de ressources, ce sont les allocations familiales. Mais elles sont versées à partir du 2° enfants.
Les familles de un enfant n’ont pas droits à ces prestations présentées comme universelles. Elles ont droit à d’autres prestations mais qui sont placées sous conditions de ressources

Cette préoccupation nataliste ne justifie pas de verser des prestations pour le 1° enfant. Par contre avoir un 2° enfant voir un 3° est une décision plus rationnelles, et justifie le versement des allocations familiales.
A partir de 3 enfants il y a une majoration sensible du montant des allocations familiales.
Pour 2 enfants c’est 128e et 3 enfants c’est 293e, 4 enfants 458e et 164e par enfants supplémentaires.

Il y a eu dans l’histoire des prestations familiales des primes qui ont pu être décidé pour la naissance du 3° enfant. Quand VGE était Président, une prime de 10 000 francs était versée.

Toutes ces prestations familiales font que la perspective d’avoir un enfant n’est pas dissuadée grâce des prestations efficaces.


Ensuite il y a la compensation du coût de l’enfant : les prestations familiales remplissent cet objectif qui est énoncé par l’article L 111-1 du code de la sécurité sociale, il s’agit de compenser les charges de famille.
De nombreuses prestations participent aujourd’hui à cet objectif, les allocations familiales pour toutes les familles, mais il existe d’autres prestations qui sont placées sous condition de ressources :
-le complément familial: prestation réservée aux ménages qui ont 3 enfants. On ne peut pas dire que c’est une prestation destinée aux familles pauvres : car il y a des plafonds de ressources selon que dans le ménage il y a 1 ou 2 revenus d’activité. Pour les ménages avec 2 revenus d’activités le plafond annuel est 45 623e.
Le montant de cette allocation est de 167e par mois qui s’ajoute aux allocations familiales versées pour 3 enfants qui s’élèvent à 293e.
-la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) comporte une prime à la naissance, une prime à l’adoption, une allocation de base. Elle est versée sous conditions de ressources. Cette compensation bénéficie à un nombre de familles important.

-l’allocation de rentrée scolaire : versée sous conditions de ressources et pas réservée aux familles pauvres.


Certaines prestations sont destinées à lutter contre la pauvreté des familles. C’était un axe surtout illustré par la prestation allocation de parents isolés.
Depuis 2008 et la création du RSA, l’API a été intégré dans le RSA de sorte que cette fonction des prestations familiales, de lutte contre la pauvreté des familles, est aujourd’hui beaucoup plus difficile à saisir. De façon indirecte cette lutte contre la pauvreté des familles rsultent des prestations famillaes qui contribuent à la compensation du coût de l’enfant.

Finalement il y a la conciliation vie familiale et vie professionnelle: cet objectif est porté par la prestation d’accueil du jeune enfant. C’est une prestation à tiroirs car elle se décline en plusieurrs prestations. Elle est venue faire la sythèse en 2004 de prestaitons qui existaient déjà. On a le complément de libre choix d’activité (jusqu’à 3 ans), le complément optionnel de libre choix d’activité (dès l’issue du congé maternité le parent décide de suspendre son activité professionnelle pendant une année). Le plafond de la prestation qui est versée est plus elevé que celui du complément du libre choix d’activité.
Il y a ausi le complément de libre choix du mode de garde.

Diverses prestations sont donc liées à la naissance ou à l’arrivée d’un enfant et permettent aux parents de choisir de continuer à exercer ou pas son activité professionnelle.
Quand on regarde les montants des prestaitons on observe que la suspension d’activité professionnelle peut être attractive pour les personnes qui perçoivent les salaires les moins elevés. Cela car ces prestations ne sont pas imposables. La suspension d’activité professionnelle va entraîner des économies très importantes de frais de garde d’enfant qui sont assez élevés.
Ce sont des raisons qui conduisent les parents à suspendre leur activité professionnelle
Ces prestations ne sont pas « genrées » c a d pas reservées à l’homme ou à la femme

On a aussi l’allocation journalière de présence parentale qui permet à une personne de suspendre son activité professionnelle pour s’occuper d’un enfant atteind d’un handicap ou d’une maladie chronique.
Il y a aussi la possibilité pour l’assuré d’accompagner un proche en fin de vie.

 
Section 2 : les règles communes aux prestations familiales

 

Parmi les premières règles posées, il y a d’abord les règles qui concernent l’enfant.
L’enfant qui ouvre droit aux prestations familiales (« l’ouvrant droit ») doit être à la charge effective et permanente du bénéficiaire. Cet enfant peut avoir avec le bénéficiaire un lien de filiation, ou non. On retrouve cette situation de fait qui est vraiment placée au 1° plan pour le bénéfice des prestations familiales.
Le lien de droit n’est pas du tout pris en compte pour la définition de la charge.

On imagine la dimension économique de la charge, quand la personne qui acueille la personne à charge l’entretient, a des des obligations alimentaires à l’égard de l’enfant.
Au delà de cette dimension économique, on a une dimension morale c a d que les ayants droits doivent assumer des devoirs de garde, de surveillance, d’éducation dans le but de protéger l’enfant dans sa santé, sa sécurité, et dans sa moralité au sens où l’entend le code civil (article 371-2).
Dès que la personne assume cette fonction elle va pouvoir bénéficier de ces prestations familiales.

Pour les enfants en garde alternée ou partagée, il est admis que la garde et la charge effective et permanente est assumée par l’un et l’autre des parents.
Le code de la sécurité sociale prévoit désormais le partage des allocations familiales.
En général, jusqu’à 6 ans, l’enfant est considéré comme à charge sans aucune autre condition. De 6 ans à 16 ans l’enfant est soumis à une obligation scolaire et à partir de 16 ans, il reste à charge s’il est étudiant, apprenti, sans activité professionnelle, ou si sa rémunération ne dépasse pas 55% du SMIC.
L’enfant à charge doit en principe résider en France. Il y a des exceptions prévues à l’article R 512-1 et suivants, des conventions internaitonales permettent de maintenir le droit aux prestations familiales même sil l’enfant réside à l’étranger ou s’il va poursuivre ses études à l’étranger.
L’enfant doit résider en France de façon régulière et il ne peut avoir lui même la qualité d’allocataire.


Concernant l’allocataire : il doit résider en France et de façon régulière. Il n’y a pus de conditions d’activité professionnelle qui est posée ce qui signifie que le national qui part à létranger perd son droit aux prestations familiales. Il y a quelques exceptions : ce sont toujours les conventions internationales et la situation du salarié qui va être détaché notamment dans l’UE.
Ces allocataires normalement doivent utiliser les prestations conformément à leur destination dans l’intérêt de l’enfant. Cela a conduit les auteurs à s’interroger sur l’identification du véritable titulaire du droit aux prestations familiales. Ces prestations sont versées aux ayants droit  mais compte tenu de la destination, ce serait plutôt l’ouvrant droit qui serait le véritable titulaire du droit.
Cette question se pose sous un jour nouveau avec la réforme touchant le financement des prestations familiales : les cotisations employeurs et versées par des professionnnels indépendants qui financaient la branche famille vont être supprimées. C’est bien une suppression et non une dispense de cotiser.
 Il est probable que le financement des prestations familiales va se faire par l’impôt.
La question qui reste ouverte est de savoir si cette modification de financement ne va pas entraîner une large modification du régime juridique des prestations familiales.
On se demande ce qui va advenir des conditions de ressources : vont elles être renforcées, généralisées? Car un financement par l’impôt sa signifie un fiancement par la solidarité nationale. On se demande donc si elle doit bénéficiER à tous ou être reservée à ceux qui en ont le plus besoin.
Si on retient la seconde réponse il est probable que les plafonds vont être abaissé ce qui va faire sortir du bénéficie de ces prestations une part des classes moyennes qui en bénéficient actuelleemnt. Et aussi que des conditions de ressources soient introduites là ou elles n’existent pas, concernant les allocations familiales.
On peut se demander si le pouvoir politique peut supprimer une prestation qui est aujourd’hui attribuée sans conditions de ressources et qui montrent ce signal positif que donne l’état aux familles.

 
Section 3 : les régimes spécifiques des prestations familiales. 
 

– mettre en avant le fait qu’on a acquis de solides connaissances techniques concernant les prestations de sécurité sociale, les régimes, et que maintenant on a envie de les situer dans un contexte plus général, dans leur environnement.
-mettre en avant la volonté d’étudier les solidarités, le goût de mettre en place au regard des évolutions actuelles, de les faire évoluer, avec l’ effort contributif. Montrer que l’on ne se trompe pas dans notre projet. Volonté collective et non individuelle

 

 

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