Cours de Droit des obligations

DROIT DES OBLIGATIONS

   Le droit des obligations  est une branche essentielle du droit civil, dont l’étude est absolument nécessaire, non seulement pour tout étudiant en droit, mais aussi pour tout individu. En effet, cette matière met en jeu des concepts fondamentaux de la science juridique, que vous allez retrouver tout au long de vos études, puis dans la vie professionnelle, et également dans votre quotidien.

Voici le plan du cours de droit des obligations :

  • Introduction
  • I. La notion d’obligation
  • II. Classifications des obligations
  • III. Sources du droit des obligations
  • Première Partie :  Les obligations nées d’un acte juridique : les contrats
  • I. La notion de contrat
  • II. Les fondements du contrat
  • III. Classifications des contrats
  • Titre 1 : La formation du contrat
  • Sous-titre 1 : Les conditions de formation du contrat
  • Chapitre 1 : L’accord des volontés : le consentement
  • Section 1 : Le consentement est une manifestation de volonté
  • Sous-Section 1 : L’existence du consentement
  • § 1 : L’aptitude à consentir
  • § 2 : Les expressions du consentement
  • Sous-Section 2 : La protection du consentement :
  • § 1 : L’erreur (article 1110du Code Civil.)
  • § 2 : Le dol (article 1116du Code Civil.)
  • § 3 : La violence (article 1111du Code Civil.)
  • Section 2 : Le consentement est une rencontre de volontés
  • § 1/ Les éléments de l’accord
  • § 2/ Les contrats entre absents
  • Chapitre 2 : L’extériorisation des volontés : la forme du contrat
  • Section 1 :  La forme exigée pour la validité du contrat
  • Section 2 : La forme exigée pour l’efficacité du contrat
  • 1 : Formalisme pour la preuve du contrat
  • 2 : Formalisme pour l’opposabilité du contrat.
  • Chapitre 3 : Le contenu du contrat : l’objet et la cause
  • Section 1 : L’objet
  • § 1 : Les caractères de l’objet
  • § 2 : L’équivalence des prestations : la lésion
  • Section 2 : La cause
  • § 1 : L’existence de la cause
  • § 2 : La licéité et la moralité de la cause
  • Sous-Titre 2 : La sanction des conditions de formation du contrat : La nullité du contrat
  • Section 1 : La notion de nullité
  • § 1 : Définition de la nullité
  • § 2 : Distinction entre nullité relative et absolue
  • Section 2 : La mise en œuvre des nullités
  • § 1 : Les personnes qui peuvent invoquer la nullité
  • § 2 : L’extinction du droit d’invoquer la nullité
  • Section 3 : Les conséquences de la nullité
  • § 1 : Etendue de la nullité
  • § 2 : Effets de la nullité
  • § 3 : Responsabilité civile consécutive à l’annulation
  • Titre 2 : Les effets du contrat
  • Chapitre 1 : La force du contrat
  • Sous-section 1 : Les obligations créées par le contrat
  • Section 1 : L’interprétation du contrat
  • Section 2 : L’immutabilité du contrat
  • § 1 : La modification du contrat
  • § 2 : La révocation du contrat
  • Sous-section 2 : Les personnes liées par le contrat
  • Section 1 : Le principe de l’effet relatif des conventions
  • Section 2 : Les exceptions au principe de l’effet relatif
  • § 1 : Les contrats pour autrui
  • § 2 : Les contrats contre autrui – La simulation
  • § 3 : Les contrats transmis à autrui
  • Chapitre 2 : La violation du contrat
  • Section 1 : La responsabilité contractuelle
  • § 1 : Les conditions de la responsabilité contractuelle
  • § 2 : La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle
  • Section 2 : Le sort des contrats synallagmatiques
  • § 1 : L’exception d’inexécution
  • § 2 : La résolution des contrats pour inexécution
  • Deuxième Partie :  Les obligations nées d’un fait juridique : la responsabilité civile délictuelle
  • Titre 1 : Les faits générateurs de la responsabilité civile délictuelle
  • Chapitre 1 : La responsabilité du fait personnel
  • Section 1 : Les éléments constitutifs de la faute
  • Section 2 : La disparition de la faute
  • Chapitre 2 : La responsabilité du fait des choses
  • Section 1 : Le principe général de responsabilité du fait des choses
  • Section 2 : Les régimes spéciaux de responsabilité du fait des choses
  • Chapitre 3 : La responsabilité du fait d’autrui
  • Section 1 : Les régimes spéciaux de responsabilité du fait d’autrui
  • Section 2 : Le régime général de la responsabilité du fait d’autrui
  • Titre 2 : L’objet de la responsabilité civile : la réparation du dommage
  • Chapitre 1 : Le dommage réparable
  • Section 1 : Les caractères du dommage
  • Section 2 : Les différentes catégories de dommage réparable
  • Section 3 : Les principes relatifs à la réparation du dommage
  • Chapitre 2 : Les actions en réparation
  • Section 1 : L’exercice de l’action en réparation
  • Section 2 : Les modalités de la réparation

 

1 =) Le contrat est un élément fondamental de notre vie quotidienne.

Tout le monde conclu chaque jour des contrats sans le savoir :

– Vous habitez un appartement => vous avez bénéficié de l’exécution d’un contrat de bail.

– Vous avez ensuite fait des courses dans un magasin => un contratde vente a été conclu préalablement ;

– Si vous avez pris le bus pour venir jusqu’ici, vous avez conclu un contrat de transport avec Les Cars Jaunes

 

NB 1: Le contrat est utilisé aussi bien par des personnes physiques que par des personnes morales :

Ex. : les entreprises (contrat de société qui crée l’entreprise)

 

NB 2 : Le contrat est utilisé dans les relations entre personnes privées mais aussi dans les relations avec les personnes publiques, les collectivités territoriales, l’Etat …

 

Si je vous donne ce cours, c’est que j’ai conclu un contrat avec l’Etat, qui me paie pour faire ce travail => C’est un contrat de travail.

– Certains d’entre vous bénéficient pour leur part d’une bourse publique pour accomplir leurs études => Une bourse correspond à l’exécution d’un contrat conclu avec l’Etat français.

 

2 =) Le contrat est la principale source des obligations.

 

3 =) La responsabilité civile appartient également à notre quotidien.Vous êtes l’auteur ou la victime d’un accident, vous devez réparer ou obtenir réparation pour le dommage subi.

 

Le droit des obligations :

–      discipline qui englobe presque toutes les autres

–      étude nécessaire à la compréhension d’autres branches du droittel que le droit commercial, le droit du travail, etc.

La distinction droit civil/ droit commercial

–      utile en terme de preuve et de prescription

–      le Code civil gouverne la vie des affaires et on peut dire que la théorie des obligations constitue le « droit civil des affaires », c’est la base du droit privé.

 

Le but du cours :

-vous donner les notions essentielles du droit des obligations

– vous donner les bases nécessaires à la compréhension de la science juridique.

 

=) Notion – Classification – sources –

 

Plan du cours :

I.             La notion d’obligation

=) sens distincts :

–       Dans le langage courant, il désigne tout devoir auquel l’hommeest astreint et ce, en vertu de règles morales, religieuses …

Les autres fiches de cours :

 

ÞC’est un lien de droit entre deux personnes en vertu duquel l’une d’entre elles (créancier) peut exiger quelque chose d’une autre (le débiteur).

 

–       En droit, il faut distinguer l’obligation du devoirqui ne produit pas toujours d’effet de droit :

=) seul le devoir issu d’une règle de droit produira des effets de droit (impliquant au besoin l’intervention de la force publique)

 

=) c’est cette sanction étatique qui fait la différence entre les devoirs de morale et les obligations juridiques

=) au sens du droit privé, le terme a un sens encore plus étroit : l’obligation est un lien d’ordre patrimonial qui unit les personnes juridiques entre elles.

 

=) l’obligation est donc une variété des droits subjectifs (Définition : prérogatives individuelles reconnue et sanctionnée par le Droit objectif qui permet à son titulaire de faire, d’exiger, ou d’interdire quelque chose)

Les droits subjectifs sont soit extra-patrimoniaux (droits de la personnalité, statut familial), soit patrimoniaux.

Les droits subjectifs patrimoniaux sont soit réels, soit personnels.

Le droit réel est celui qui donne à une personne un pouvoir direct sur une chose (droit de propriété)

Le droit personnel, ou « droit de créance »,

=) lien de droit entre deux personnes, en vertu duquel l’une (le débiteur) doit quelque chose à l’autre (le créancier).

=) Le rapport d’obligation est une « dette » du côté passif et une « créance » du côté actif.

 

=) ce sont les droits personnels qui constituent des obligations au sens juridique

=) ce lien personnel est un élément du patrimoine des parties ; c’est une valeur économique qui peut circuler.

=) Intérêt : transmission par succession : ceux qui recueillent le patrimoine d’une personne profitent de ses créances et sont tenus de ses dettes

 

Les différentes obligations peuvent faire l’objet de plusieurs classifications=) régimes juridiques différents.

 

II. Classifications des obligations

=) selon leur source, leur étendue et leur force.

  1. A) Classification des obligations d’après leur source

Deux classements d’après la source possibles ici : celle du Code civil et celle de la doctrine

1) classification du code civil

=) 5 sources d’obligations : articles 1101 et 1370 :

–       le contrat : accord de volontés destiné à créer des obligations

–       le quasi-contrat : (article 1371) : fait volontaire et licite, qui ressemble à un contrat mais qui ne comporte aucun accord de volonté 

=) gestion d’affaire (acte d’immixtion dans les affaires d’autrui dans l’intérêt et à l’insu du maître de l’affaire qui oblige celui-ci à rembourser les dépenses) 

=) paiement de l’indu (paiement ne correspondant à aucune dette qui ouvre droit à restitution à celui qui a payé par erreur)

–       le délit : (article 1382) fait illicite, volontaire et même intentionnel ; le fait de causer un dommage avec l’intention de le causer

–       le quasi-délit : (article 1383) fait illicite, volontaire mais non intentionnel (l’auteur du fait, s’il a voulu le fait lui-même, n’en a pas voulu le résultat dommageable)

–       la loi : qui fait naître, exceptionnellement, quelques obligations en dehors de toute volonté et de tout fait imputable à l’obligé (par exemple, les obligations de voisinage ou les obligations alimentaires).

=) contrats et quasi-contrats : caractère licite

=) délits et quasi-délits : caractère illicite

=) contrat et délit : caractère intentionnel

=) quasi-délits et quasi-contrats : caractère non intentionnel

=) loi : engagements qui se forment sans convention, par opposition aux obligations conventionnelles.

 

A cette distinction obligations conventionnelles ou non correspond la distinction moderne acte juridique – fait juridique.

 

2) la distinction de la doctrine : acte et fait juridique

Les actes juridiquessont

=) des manifestations de volonté

=) en vue de produire des effets de droit

=) ex. : un contrat conclu entre deux personnes afin de faire naître entre elles des obligations : une vente, un bail, un prêt.

 

Les faits juridiquessont

=) des évènements quelconques auxquels une règle de droit attachedes effets juridiques

=) n’ont pas été spécialement et directement voulus par les intéressés.

=) volontaire ou involontaire : un comportement demeure un fait juridique dès lors que l’effet juridique qui y est attaché n’a pas été voulu par son auteur.

Ex : personne qui cause intentionnellement un dommage à autrui. L’auteur responsable a volontairement lésé la victime, mais il n’était pas dans son intention de réparer le préjudice par le versement d’une indemnité pécuniaire. C’est la loi qui impose la réparation. La victime est donc titulaire d’une créance de réparation qui a sa source dans un fait juridique.

 

Intérêt de la distinction acte juridique / fait juridique:

Principalement : il concerne la preuve des obligations :

=) les actes juridiques se prouvent selon les règles visées auxarticles 1341 et s. du Code civil : preuve littérale / exception en matière commerciale/ enjeu< euros/ existence d’un CPE /impossibilité matérielle ou morale de produire un écrit.

 

=) Deux source d’obligations, mais :

  • La source la plus importante reste toutefois le contrat. Le Code civil a introduit le régime de l’obligation à partir de l’obligation contractuelle: le titre III du livre III qui lui est consacré (article 1101-1369) est intitulé : « Des contrats ou des obligations conventionnelles en général ».

Dans ce chapitre figure l’un des autres textes les plus célèbres du Code civil,

L’article 1134, al. 1er : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites », texte qui constitue la base fondamentale du droit des contrats.

 

C’est d’ailleurs cette source des obligations qui constituera l’essentiel du programme de ce semestre.

 

  • Le texte principal régissant les obligations naissant de faitsjuridiquesse trouve à

L’article 1382 du Code civil : « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

*   *

La classification des obligations en fonction de leur source est la distinction fondamentale en droit privé, et c’est la distinction que nous adopterons ; mais il en existe plusieurs autres. Les deux suivantes ont été élaborées principalement dans le cadre du droit des contrats. La dernière dans celui des obligations en général.

 

  1. B) Classification des obligations d’après leur objet

L’obligation peut en effet avoir des objets différents et le Code civil (article 1101 et 1126), oppose les obligations de donner aux obligations de faire et de ne pas faire.

=)Il y a obligation de donner lorsqu’une personne doit transférerla propriétéd’un bien (du latin dare, faire une dation) (et non consentir une donation, du latin donare).

Ex : Contrat de vente avec clause de réserve de propriété

 

.=) Il y a obligation de faire lorsque le débiteur doit accomplir une prestation positive  =) ex. : construire un bâtiment

=) Il y a obligation de ne pas faire lorsque le débiteur doit s’abstenir de certains actes =) ex. : clauses de non concurrence

 

 

Le principal intérêt de cette classification peut s’observer lorsque le débiteur n’exécute pas son obligation. Alors que le créancier d’une obligation de donner peut obtenir en justice l’exécution forcée de l’obligation.

Cette faculté n’est pas ouverte, en principe, au créancier d’une obligation de faire ou de ne pas faire. On ne peut pas forcer un artiste à exécuter sa commande, ni empêcher le commerçant de s’installer où il veut.

=> Au lieu d’une satisfaction directe, le créancier n’obtiendra qu’une satisfaction indirecte, à savoir le versement d’une somme d’argent qui viendra le dédommager. On dit alors que l’obligation de faire ou de ne pas faire se résout endommages et intérêts(article 1142 du Code civil).

*   *

 *

Ensuite, un troisième mode de classification des obligations intéresse les contrats : la classification selon leur étendue.

  1. C) Classification des obligations d’après leur étendue

Parmi les obligations de faire, on distingue  l’obligation de résultat et l’obligation de moyens

 

Obligation de résultat : débiteur est tenu à un résultat déterminé ;

=) Par exemple, le transporteur qui s’engage à amener qqn à destination

Il n’est considéré comme ayant exécuté son obligation ques’il a atteint le résultat convenu.

 

Obligation de moyens : le débiteur s’engage seulement à utiliser les moyens dont il dispose, à se montrer prudent et diligent, à faire de son mieux.

Ex : Le médecin ne promet pas de guérir le malade mais de le soigner du mieux qu’il peut

Si le malade meurt, le médecin ne sera pas nécessairement jugé responsable d’une inexécution contractuelle. Ce n’est que s’il est démontré que le médecin a commis une faute, en n’apportant pas tous les soins qu’il était en mesure d’apporter, qu’il engagera sa responsabilité.

 

Intérêt de la distinction: l’intérêt de la distinction touche surtout à la preuve de la faute et à la charge de la preuve :

=) obligation de résultat, le seul fait que le résultat promis n’ait pas été atteint suffit à engager la responsabilité du débiteur.

=)obligation de moyens le débiteur n’est responsable que s’il est démontré que son attitude a été incorrecte.

 

Cette distinction obligation de moyens/de résultats est très utilisée (et de plus en plus par les médias, souvent à mauvais escient). Elle est en faittrès difficile à appliquer.

*   *

 *

Enfin, il reste une dernière classification possible des obligations :

  1. D) Classification des obligations d’après leur force

Obligation « civile »  = en principe « obligatoire » 

Obligations « naturelles » :

–       obligation civile

–       mais vice lors de sa formation ou d’un événement postérieur,

–        pas  d’élément de contrainte.

– obligations civiles imparfaites : manque la sanction juridique : une obligation naturelle ne peut donner lieu à une exécution forcée. Mais si elle est volontairement exécutée, elle ne pourra être remise en cause (art.1235)

–       obligations répondant à un devoir de morale : devoir alimentaire entre frères et sœurs non inscrit dans Cciv

 

Particularité de l’obligation naturelle :

–       le paiement effectué sur son fondement est valable et définitif

–       elle se transforme parfois en véritable obligation juridique : lorsque l’intéressé s’y engage ou encore quand il a simplement commencé de l’exécuter.

*   *

 *

Nous avons vu la notion d’obligation et ses principales classifications. Il nous reste, pour conclure cette introduction à étudier rapidement les sources du droit des obligations.

 

III. Sources du droit des obligations

Nous avons vu que les obligations avaient deux sources principales (ce qui donne naissance aux obligations) : le fait et l’acte juridique, le contrat restant la source essentielle.

Quant au droit des obligations (les règles gouvernant ces obligations), il puise sa source dans plusieurs instruments.

ÞSources écrites/ non écrites

 

  1. A) Les sources écrites

=)Le droit des obligations a pour l’essentiel sa source dans la loi et particulièrement dans le Code civil des articles 1101 à 2278.

= l’article 1134 du Code civil selon lequel « les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites ».

= légalement formées, c’est-à-dire conformes à la loi, les conventions (i.e. les contrats) ont à l’égard des parties contractantes la même force que la loi.

Ce n’est qu’à cette condition que les contrats acquièrent force obligatoire.

=) la principale source du droit des obligations,= la loi (textes votés par le Parlement et règlements administratifs)

=) dans le respect de la hiérarchie des normes(voir cours de 1ère année sur les sources du droit, et sur la pyramide des normes.)

 

=)A côté de la loi, au sens de droit interne, le phénomène général d’internationalisation affecte aussi le droit des obligations.

– droit communautaire

Plusieurs directives intéressent le droit des obligations : celle de 1993 sur les clauses abusives, celle de 1985 sur la responsabilité du fait des produits défectueux, pour ne citer que celles-ci.

– droit international

Ex : Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises

 

  1. B) Les sources non écrites

A côté de ces deux sources principales du droit des obligations, il existe des sources non-écrites :

 – En premier lieu, il est fréquent que la loi renvoie expressément aux usages pour compléter ou interpréter les contrats (article 1135, 1159, 1160 du Code civil).

Ces usages sont dits « conventionnels » parce qu’ils consistent dans les pratiques, souvent spéciales à une profession ou à une région, que les particuliers suivent dans les conventions qu’ils passent. Il s’agit de clauses qui, initialement, étaient toujours insérées dans un certain type de conventions et qui ont finalement été sous-entendues, les parties étant censées s’y être référées implicitement, du seul fait qu’elles ne les ont pas écartées.

Les usages, en tant que source d’obligations, sont également très importants dans l’ordre international, et notamment en droit commercial international : on parle alors de lex mercatoria.

+ Principes UNIDROIT, destinés à régir les contrats internationaux.

 

– La jurisprudence a également joué un rôle important dans la formation du droit des obligations. La jurisprudence a permis au droit des obligations de résister à l’usure du temps, en élucidant, interprétant et adaptant les règles existantes, pour répondre aux nouveaux besoins exprimés par la pratique contractuelle.

Mais c’est surtout en matière d’obligations extra-contractuelles (responsabilité civile délictuelle) que la création prétorienne s’est donné libre cours.

En effet, les articles 1382 et suivants, Code civil, régissant les principes de la responsabilité délictuelle, se sont avérés insuffisants ou incomplets face aux nombreux progrès techniques que notre société a connus (industrialisation). Le juge a donc dû compléter la loi.

 

– En marge des sources traditionnelles (loi, jurisprudence, usages), de nouvelles normes ont proliféré en droit des obligations. Ces règles émanent souvent de ce qu’on appelle les « autorités administratives indépendantes » : Commission nationale des clauses abusives, Conseil de la concurrence, Commission des opérations de bourse, etc. Ces normes, qui peuvent prendre différentes appellations (instructions, avis, recommandations) ont contribué à obscurcir le paysage et à rendre encore plus difficile la compréhension du droit des obligations.

*   *

 *

Nous avons à présent passé en revue toutes les différentes sources du droit des obligations.

Nous allons maintenant revenir aux sources des obligations (vues au stade des classifications possibles des obligations entre elles).

Deux sources principales sont à retenir : c’est la vraie distinction à retenir.

=) Elle réside dans le caractère volontaire (contrat)ou involontaire (délit, quasi-délit, quasi-contrat)de l’obligation créée.

 

La distinction essentielle = l’acte et le fait juridique, que la Code civil n’utilise pas, mais qui est pourtant la meilleure façon d’exposer le droit des obligations.

 

=) première partie, les obligations qui résultent d’un acte juridique, le contrat.

=) Dans une seconde partie nous aborderons les obligations qui résultent d’un fait juridique ; ce sera la question de la responsabilité délictuelle.

Première Partie :
Les obligations nées d’un acte juridique : les contrats

Le contrat = élément essentiel de la vie en société

                    = touche tout le monde (tout le monde conclut des contrats)

                    = faire des courses, s’habiller, se loger … (contrats variés)

 

Nous étudierons ses conditions de formation et ses effets.

Mais auparavant : =) = les 3 points de cette introduction au droit commun des contrats :

1 – la notion de contrat

2 – ses fondements

3 – classification des contrats

 

I. La notion de contrat

 l’article 1101 du Code civil « Le contrat » = « convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres à donner, faire ou ne pas faire quelque chose ». 

Il résulte de cette définition que :

1- Le contrat est une convention, c’est-à-dire un acte juridique formé par l’accord de volonté de deux ou plusieurs personnes.

(Distinction de l’acte unilatéral = également un acte juridique

   = mais qui n’est l’œuvre que d’une seule volonté. (Ex. : testament).

 

2- Le contrat est créateur d’obligations, contrairement à d’autres accords de volonté, qui n’obligent pas juridiquement, parce que les parties n’ont pas voulu créer un lien de droit entre elles. 3 Ex :

Ex : lespromesses politiques, qui n’engagent pas civilement leur auteur.

Ex: les actes de courtoisie, qui n’obligent qu’en vertu des simples règles de politesse. Ex : Une invitation lancée et acceptée ne constitue pas un contrat.

Ex : L’acte de complaisance, comme celui accompli par un automobiliste qui prend à son bord un auto-stoppeur. On s’est longtemps demandé s’il n’y avait pas ici conclusion d’un contrat de transport, mais la jurisprudence s’y est jusqu’à présent opposée.

 

3- Le contrat ne lie que les parties qui l’ont conclu.C’est ce qu’on appelle l’effet relatif des contrats.

Distinction de l’acte juridique collectif, qui est susceptible de s’imposer à des personnes qui n’y ont pas participé.

Ex: La convention collective conclue par les syndicats avec le patronat au sein d’une entreprise, et qui s’impose à tous les salariés.

*   *

II. Les fondements du contrat

Pourquoi donne-t-on force au contrat ?

=) principes fondamentaux qui gouvernent l’ensemble du droit des contrats.

=) place déterminante accordée à la volonté individuelle

=) Le principe d’autonomie de la volonté constitue la base du droit des contrats (A). Il comporte certaines limites (B).

 

  1. A) LE PRINCIPE D’AUTONOMIE DE LA VOLONTE

 

=) conception classique : contrat = l’œuvre exclusive de la volonté des parties.

=) grand principe du droit des contrats : le principe de l’autonomie de la volonté.

=) idée que l’homme est fondamentalement libre, et que la loi ne peut restreindre cette liberté.

=) A l’inverse, toutes les obligations qu’il a voulues s’imposent à lui, et il doit les respecter.

=) L’idée est ensuite que, ce que l’homme a librement voulu est forcément juste pour lui, et utile pour la société.

 

On retrouve dans ce raisonnement les mots de Rousseau dans le Contrat social : « L’obéissance aux lois qu’on s’est prescrite est liberté ». La liberté engendre la liberté.

=) La théorie classique a influencé les rédacteurs du Code civil,

=) la volonté individuelle est considérée comme le seul véritable fondement de la force obligatoire des contrats

=) l’obligation n’est légitime que si elle est fondée sur la volonté des parties

=) cette volonté est autonome car elle seule peut déterminer le contenu et les effets du contrat, indépendamment de la loi.

 

=) influence du principe d’autonomie de la volonté sur les rédacteurs du Code civil se retrouve dans quelques grands principes qui ont gouverné et gouvernent encore le droit des contrats :

– premier principe posé = principe de la liberté contractuelle :les parties sont libres de contracter ou de ne pas contracter :

 

 (1) nul ne peut être obligé de contracter, d’entrer en relation avec ses semblables et, par exemple, chacun a droit de refuser de céder les biens qui lui appartiennent. Le refus de contracter est une manifestation de la liberté.

 (2) Cela signifie également que chacun choisit librement son cocontractant

 (3) ce sont les cocontractants, les parties au contrat, qui définissent librement ce à quoi elles s’obligent. Bien sûr, il peut exister des réglementations que les parties doivent respecter lorsqu’il s’agit de règles impératives, mais dans l’ensemble, en matière contractuelle les lois sont supplétives, c’est-à-dire qu’elles ne jouent qu’en l’absence de volonté expresse des parties.

=) Quant à la forme, la liberté contractuelle commande la primauté du consensualisme. L’échange des volontés suffit, l’échange des consentements suffit à la conclusion du contrat. Peu importe la forme dans laquelle il est constaté.

 

deuxième principe = la force obligatoire du contrat, si les parties décident de se lier, elles sont tenues de respecter leurs engagements. Rien n’oblige les parties à contracter. Mais dès lors qu’elles l’ont fait, elles sont tenues de respecter leurs engagements.

 

 Si les parties ne respectent pas leur engagement, elles engagent leur responsabilité sauf consentement mutuel des deux parties.

La force obligatoire du contrat s’impose donc aux parties. Mais elle s’impose également  au juge, qui doit respecter le contrat et le faire respecter ; il peut avoir à interpréter le contrat mais en aucun cas il ne peut le modifier.

 

Le troisième principe = l’effet relatif du contrat = seules sont tenues les personnes qui ont entendu se lier. Parce que le contrat repose sur la volonté des parties, il n’a pas d’effets à l’égard des tiers 

 

Ces trois principes gouvernent l’ensemble de la théorie générale des contrats, mais plusieurs limites ont été apportées au principe d’autonomie de la volonté.

 

  1. B) LES LIMITES AU PRINCIPE D’AUTONOMIE DE LA VOLONTE

 

Deux types de limites :

* 1ère limite : théorie de l’autonomie de la volonté nuancée par les rédacteurs du Code civil, qui ne l’ont retenue qu’en partie.

=) l’article 1134, selon lequel les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, montre que le contrat tire avant tout sa force de la loi, et que, aussi libre soit la volonté des parties contractantes, le contrat ne pourra être respecté que si il est « légalement formé ».

La loi conserve donc un rôle supérieur au contrat. L’autonomie est relative, car elle ne produit ses effets que si elle agit conformément à la loi.

 

=) le consentement des parties = très important (condition de validité du contrat) mais ne suffit pas,

=)  d’autres exigences ont été posées, comme l’existence et la licéité de l’objet et de la cause (contenu du contrat)

 

* 2ème limite : conséquences de certaines évolutions, que n’avaient certainement pas prévues les rédacteurs du Code civil.

– On s’est d’abord rendu compte qu’il pouvait y avoir une contradiction entre la liberté contractuelle et la justice : liberté à condition qu’il existe une égalité entre les parties

– XIXème siècle =  apparition des inégalités de puissance économique (essor des grands groupes industriels.)

loi du plus fort, le plus faible n’ayant aucune possibilité de négociation.

– sociétés qui détiennent un monopole sur un marché déterminé (ex : EDF) : le particulier n’a alors même pas la possibilité de refuser le contrat.

= contrats d’adhésion, par opposition aux contrats de gré à gré habituellement négociés.

– On s’est également rendu compte qu’il y avait une contradiction possible entre la liberté contractuelle et l’utilité sociale.

=> Il est apparu nécessaire que la volonté individuelle perde sa souveraineté absolue. Des réglementations impératives sont donc apparues, pour protéger les contractants en état d’infériorité

On a alors parlé du « déclin de l’autonomie de la volonté » :

–       restrictions apportées au consensualisme

–       multiplication des contrats dans lesquels on doit respecter un certain formalisme.

– dans certains cas, la loi force les parties à contracter (ex : assurance automobile obligatoire), ou détermine le contenu des contrats (ex contrat de travail : fixe la durée de travail des salariés, et rend obligatoire le repos hebdomadaire et les congés payés…)

En matière de protection des consommateurs, la loi peut également porter atteinte à la force obligatoire des contrats, en permettant aux consommateurs de ne pas exécuter leurs obligations…

 

Le principe d’autonomie de la volonté a donc subi quelques atteintes. Le principe n’est donc plus absolu, mais il demeurela règle en droit des contrats.

Il constitue donc toujours un facteur d’unité des différents contrats, qui peuvent être regroupés en différentes catégories, que nous allons maintenant étudier.

 

III. Classifications des contrats

=) grande variété de contrats.

=) Certains types de contrats sont très anciens et sont réglementés par le Code civil. Cette variété est présentée dans le Code civil des articles 1102 à 1107.

=) Mais la pratique a inventé d’autres contrats.

=) les contrats obéissent à des régimes juridiques distincts selon qu’ils appartiennent à telle ou telle catégorie. =) d’où l’importance de l’opération de qualification.

 

=) Les contrats sont généralement classés en fonction de leur réglementation, de leur objet, de la qualité des contractants, selon leur mode de formation.

 

  1. A) Classification des contrats selon leur réglementation

=) contrats nommés et innommés (article 1107 du Code civil.)

=) contrats nommés = nettement identifiés

       = régime juridique précis

       = correspondent à une opération juridique bien définie : vente, dépôt, mandat, prêt, louage, société, etc.

 

=) innommés = pas une dénomination légale propre

     = relèvent du droit commun des contrats.

     = contrats sui generis

    = « sur mesure » spécialement créés par les parties pour répondre à leurs besoins propres.

NB 1: – Certains contrats peuvent avoir un nom, tout en restant un contrat innommé. Ainsi du contrat de déménagement, de location de coffre-fort. La pratique leur a donné un nom, mais la loi ne leur a pas attaché de régime juridique spécial.

NB 2– D’autres contrats, autrefois innommés, sont devenus tellement fréquents que la loi les a nommés, et leur a attaché une réglementation spécifique. Ex : le contrat de crédit-bail, qui est le fruit de la pratique anglo-saxonne (leasing), et est aujourd’hui partiellement réglementé par le législateur français.

 

On prend conscience ainsi du phénomène de la spécialisation.

=) « Droit commun des obligations » = Code civil de 1804. (Titre 3 -article 1101 à 1369 du Code civil)

= en principe applicable à tous les contrats quelle que soit leur nature

=) certains contrats échappent au droit commun des obligations (article 1107 du Code civil dispose que « les règles particulières à certains contrats sont établies sous les titres relatifs à chacun d’eux ».)

–      A côté des règles générales, il existe donc des règles spéciales à certains contrats, que l’on appelle les contrats spéciaux :

ð    par exemple, le contrat de vente est régi par le titre 6 du Code civil (articles 1582 et suivants).

ð     Le contrat de prêt est soumis aux dispositions des articles 1874 et suivants,

ð    le contrat de mandat aux règles des articles 1984 et suivants du Code civil.

ð    autres contrats spéciaux plus récents : contrat de travail, contrat de transport, contrat d’assurance, contrat de sous-traitance…

ð    Certaines de ces nouvelles réglementations ont été intégrées dans le Code civil, mais elles ont souvent entraîné la naissance d’un droit spécial, comme le droit du transport, droit du travail, droit des assurances… Ainsi, des pans entiers du droit des contrats ont ainsi été détachés du Code civil, sans pour autant que les contrats en question deviennent autonomes par rapport au droit commun des contrats;

 

Mais il faut bien être conscient qu’aucun droit spécial ne se suffit à lui-même : ces règles ne visent que certaines situations ponctuelles de la vie du contrat. Elles se contentent de se greffer sur le droit commun, pour venir préciser ou déroger à certaines règles.

La connaissance du droit commun, de ce qu’on appelle la théorie générale des obligations constitue donc un préalable indispensable à l’étude du droit des contrats spéciaux.

 

  1. B) Classification des contrats selon leur objet et leurs effets

1- CONTRATS SYNALLAGMATIQUES ET CONTRATS UNILATERAUX

                            

Aux termes de l’article 1102 du Code civil, « le contrat est synallagmatique ou bilatéral lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres ».

 

=) caractéristiques = crée des obligations réciproques et interdépendantes entre les parties.

Ex. : le contrat de bail, le bailleur (le propriétaire, généralement), a l’obligation d’assurer au locataire la paisible jouissance de la chose louée et le locataire, réciproquement, a l’obligation de payer un loyer (article 1709). Chaque partie est à la fois créancière et débitrice.

 

–      Au contraire, le contrat unilatéral ne fait naître d’obligations qu’à la charge d’une seule partie (article 1103du Code Civil.).

 

–      Attention, il ne faut pas le confondre avec l’acte unilatéral comme le testament, dans lequel il n’y a pas d’échange entre les volontés de plusieurs personnes.

Dans le contrat unilatéral, on a un échange de volontés, (c’est un contrat), mais une seule personne s’oblige.

 

– Ex. : une promesse unilatérale de vente, un propriétaire (le promettant), s’engage à vendre son bien à une autre personne (le bénéficiaire), si celle-ci veut l’acheter dans un délai déterminé ; Si cette éventualité se réalise, le promettant sera tenu de vendre son bien.

Mais la promesse est unilatérale, et le bénéficiaire n’est pas obligé d’acheter. Il est seulement créancier de la promesse.

autre ex: la donation,qui requiert le consentement des deux parties, mais dans laquelle une seule personne s’oblige.

 

L’intérêt de la distinction est double :

quant à la preuve : les contrats synallagmatiques doivent répondre à la formalité du double : ils doivent être rédigé en autant d’originaux qu’il existe de parties (article 1325)

Les contrats unilatéraux doivent pour leur part répondre à l’exigence d’une mention manuscrite prévue par l’article 1326 (si c’est un engagement de payer une somme d’argent).

 

Quant au fond : les obligations réciproques du contrat synallagmatique sont interdépendantes, ce qui permet au créancier d’une obligation inexécutée :

* de refuser d’exécuter sa propre obligation : cela s’appelle l’exception d’inexécution

* de demander la résolution du contrat, c’est-à-dire son anéantissement rétroactif, ce qui entraînera des restitutions réciproques.

 

2- CONTRATS A TITRE GRATUIT ET CONTRATS A TITRE ONEREUX

 

Le contrat à titre gratuitest celui où celui qui s’oblige est désintéressé, et n’entend rien obtenir en échange. On dit que, dans ce cas, le débiteur est animé d’une intention libérale.

 

L’ex-type est la donation.

 

Le contrat à titre onéreux est au contraire celui où chaque partie n’entend fournir une prestation qu’en échange d’un avantage.

 

Ex: la plupart des contrats usuels : vente, louage, échange.

 

NB: Cette distinction recoupe en partie la distinction précédente : tous les contrats synallagmatiques sont conclus à titre onéreux.

Mais il peut arriver qu’un contrat unilatéral ne soit pas conclu à titre gratuit. Par ex, dans la PUV citée tout à l’heure, le promettant s’engage à réserver la vente au bénéficiaire pendant un certain délai, mais il n’est pas forcément animé d’une intention libérale. Il espère en échange de son engagement que la vente se réalisera dans des conditions qu’il estime avantageuses.

 

* Les intérêts de cette distinction sont multiples :

– l’acte à titre gratuit est en effet considéré comme un acte suspect, ou au moins dangereux pour le débiteur, car il ampute son patrimoine sans contrepartie. Ce qui entraîne notamment que :

– Les conditions de validité et de capacité juridiques des actes à titre gratuit sont plus strictes que celles des actes à titre onéreux (A.A. + les mineurs et les incapables majeurs ne peuvent pas conclure de donation).

– La responsabilité contractuelle du débiteur animé d’une intention libérale est appréciée moins sévèrement (ex : pas d’obligation de garantie du vendeur)

– Les droits de mutation sont plus lourds quand l’acte est conclu à titre gratuit.

 

3- CONTRATS COMMUTATIFS ET CONTRATS ALEATOIRES

 

Il faut ici ouvrir une sous-classification, parmi les contrats synallagmatiques à titre onéreux, celle qui est faite entre les contrats commutatifs et les contrats aléatoires.

Le contrat commutatif est un contrat à titre onéreux dans lequel la contrepartie que chaque contractant reçoit est certaine et déterminée dès la conclusion de l’acte.

 

 

Le contrat est aléatoire quand l’une au moins des obligations dépend, dans son principe ou dans son montant, d’un événement incertain (article 1104).

 

Ex. : la rente viagère, l’acheteur s’engage à payer une certaine somme au vendeur, jusqu’au décès de celui-ci. La somme que devra verser l’acheteur dépend donc de la durée de la vie du vendeur.

 

  • L’intérêt de la distinctionapparaît à propos de la théorie de la lésion. La lésion, c’est le préjudice résultant d’une disproportion manifeste entre les obligations réciproques.
  • Ex: un immeuble vendu pour un prix dérisoire. Le contrat lésionnaire peut éventuellement être annulé ou réduit, c’est-à-dire qu’on va ajuster les prestations l’une à l’autre.

 Un contrat aléatoire ne peut être annulé ni réduit, précisément parce qu’il est impossible de calculer les avantages que devait en tirer une partie : « l’aléa chasse la lésion ».

Les parties acceptent le contrat parce que l’aléa existe. C’est comme un pari, chacun espérant faire une affaire => Ils ne peuvent se plaindre ultérieurement.

 

4- CONTRATS A EXECUTION INSTANTANEE ET CONTRATS SUCCESSIFS

 

Un contrat est à exécution instantanée lorsqu’il donne naissance à des obligations susceptibles d’être exécutées en une seule fois, comme la vente d’un objet, l’échange ou la donation.

 

Le contrat est à exécution successive lorsqu’il comporte l’exécution d’obligations s’échelonnant dans le temps.

 

Par exemple, le bail ou le contrat de travail. Les parties se lient pour une certaine durée, déterminée ou indéterminée.

 

Le principal intérêt de cette distinction survient en cas d’annulation ou de résolutionpour inexécution.

 

Dans les contrats instantanés, l’annulation et la résolution sont rétroactives : le vendeur rend l’argent, l’acheteur rend la chose.

 

Dans les contrats successifs, on ne peut pas toujours restituer les prestations qui ont été accomplies (l’employé peut rendre l’argent, mais l’employeur ne peut pas rendre le travail). Dans ce cas, le contrat prend fin sans rétroactivité. La résolution s’appelle alors résiliation.

 

Je vous renvoie enfin à la distinction, plus récente, entre les contrats d’adhésion et les contrats de gré à gré (ou contrats négociés) dont nous avons parlé, et dont il ne découle pas encore de conséquences juridiques très précises.

 

  1. C) Classification des contrats selon la qualité des cocontractants

Un contrat est marqué d’intuitupersonae lorsque sa formation  et son exécution dépendent de la personne du cocontractant. La considération de la personne constitue la cause de l’engagement.

 

Le mandat est par exempleconclu en raison de la confiance qui unit les contractants. Cela implique qu’une erreur sur la personne peut être une cause de nullité.

 

  • le contrat conclu entre professionnels ou entreconsommateurs(protection du consommateur)
  • Code de la consommation, adopté par une loi du 26 juillet 1993 et qui constitue l’ensemble des textes relatifs au droit de la consommation.

 

Contrats civils et commerciaux

En vérité, cette distinction n’existe pasen tant que telle, car la plupart des contrats peuvent être soit civils, soit commerciaux, soit mixtes.

 

Le caractère civil ou commercial ne dépend pas de la nature du contrat, mais de la qualité des personnes qui le concluent, et de l’objectif qu’elles visent.

 

Ex : un contrat de vente sera :

–      civilsi il est conclu entre particulierssans intention spéculative

–      commercials’il est conclu entre commerçantdans l’exercice de leur commerce.

–      mixtes’il est conclu entre un commerçant et un particulier.

 

Certains contrats sont nécessairement civils, comme ceux qui sont conclus à titre gratuit, c’est-à-dire sans intention spéculative. D’autres sont nécessairement commerciaux, comme la vente d’un vente de fonds de commerce, qui par hypothèse est conclu entre deux commerçants dans le cadre de leur profession. Mais il demeure que c’est la qualité des parties qui permet de distinguer un contrat civil d’un contrat commercial.

 

ð    Si le contrat est commercial :

ð    soumis aux règles du droit commercial

ð    principe de liberté de la preuve,

ð    la compétence des tribunaux de commerce,

ð    la solidarité présumée entre les débiteurs.

 

Mais, en toutes hypothèses, les dispositions du Code de commerce relatives au droit des contrats sont assez peu nombreuses, et le contrat continuera de s’appuyer sur les règles fondamentales du droit des obligations.

 

Ainsi, un contrat de vente commerciale sera-t-il soumis :

– en premier lieu, au droit commun des contrats ;

– en second lieu, au droit spécial de la vente contenue dans le Code civil ;

– enfin, aux règles spécifiques du droit commercial, chacune de ces règles pouvant déroger aux précédentes.

 

Il nous reste, enfin, à exposer la classification selon le mode de formation du contrat

 

  1. D) Classification des contrats selon leur mode de formation
  • contrat consensuel, solennel ou réel.

–      Le contrat consensuelest celui qui se forme par le seul accord des volontés, sans qu’aucune condition de forme ne soit requise.

 

Ex: le contrat de vente est en principe conclu dès que les parties se sont entendues sur la chose et sur le prix. Le document signé n’est requis qu’à titre de preuve, et non pas comme une condition de formation du contrat.

 

Le contrat solennel est celui pour la validité duquel la loi exige que certaines formes soient respectées. Ces formes consistent le plus souvent dans la rédaction d’un écrit qui peut-être, selon les cas, un acte authentique ou un acte sous seing privé.

Ex: la donation – le contrat de mariage : Acte Authentique.

 

En droit français, le consensualisme est la règle, le formalisme l’exception.

 

Les contrats réels sont ceux qui, pour leur formation, exigent non seulement l’accord des parties, mais également la remise d’une chose au débiteur. Tel est le cas du don manuel, ou du gage ou du prêt à usage entre particuliers.

 

  • On distingue ensuite entre les contrats de gré à gré, ou négociés, et les contrats d’adhésion.

Les contrats conclus de gré à gré sont le fruit d’une libre discussion entre les parties.

 

Les contrats d’adhésion, déjà évoqués, sont ceux dont la conclusion résulte de l’adhésion de la partie économiquement faible au projet pré rédigé par la partie forte (SNCF, EDF).

 

 

Intéressante, cette distinction n’a pas pour conséquence l’adoption d’un régime propre pour ce type de contrats, qui restent soumis au droit commun.

Cependant, c’est presque exclusivement dans ce deuxième type de contrat que figurent des clauses abusives qui, depuis quelques temps, sont réputées non écrites par la loi, notamment par l’article L. 132-1 du Code de la consommation, et par le juge

 

*   *

 *

 

Maintenant que nous avons étudié certains principes généraux applicables en droit des contrats, il nous reste à déterminer comment se forme le rapport contractuel, en étudiant d’abord la façon dont s’accomplit la rencontre des volontés, et quelles conditions doivent être respectées pour que le contrat soit valablement formé. Cela fera l’objet d’un premier titre, sur la formation du contrat.

Nous verrons ensuite dans un deuxième titre, consacré aux effets du contrat, comment on arrive à procurer au créancier la satisfaction qui lui est promise par le contrat.

 

Titre 1 : La formation du contrat

Pour produire leur effet créateur d’obligations, les contrats doivent être, selon l’article 1134 du Code civil, être légalement formés, c’est-à-dire respecter les conditions que la loi met à leur validité. Le non-respect de ces conditions entraîne la nullité du contrat.

Nous étudierons donc successivement les conditions de formation du contrat, et les sanctions de ces conditions de validité.

Sous-titre 1 : Les conditions de formation du contrat

Aux termes de l’article 1108 du Code civil, ces conditions sont au nombre de quatre :

« Le consentement de la partie qui s’oblige,

Sa capacité de contracter,

Un objet certain qui forme la matière de l’engagement,

Une cause licite dans l’obligation »

 

C’est pourquoi, en trois chapitres, nous aborderons successivement :

–      chapitre 1 : les conditions de fond (consentement, capacité, objet, cause)

–      chapitre 2 : les conditions de forme

 

Chapitre 1 : Les conditions de fond

Section 1 : L’accord des volontés : le consentement

Nous avons déjà dit que le contrat était une convention, c’est-à-dire un accord entre deux ou plusieurs volontés. L’idée de volonté est reprise dans l’article 1108 avec les conditions de consentement et de capacité.

 

En matière contractuelle, le terme consentement revêt une double acception.

Consentir, c’est vouloir : Il désigne d’abord la manifestation de volonté dechacune des parties, l’acquiescement qu’elle donne aux conditions du contrat projeté. C’est en ce sens que l’on dit d’une personne qu’elle « donne son consentement ».

Consentir, c’est également s’entendre : Pris dans son sens étymologique (cum sentire), le mot consentement désigne aussi l’accord, le concours de deux volontés, celle du débiteur qui s’oblige, celle du créancier envers qui il s’oblige, pour réaliser une opération commune qui est l’objet du contrat.

 

Sous-Section 1 : L’existence du consentement

Il est donc important de connaître quels sont les éléments de cet accord, et d’étudier les situations dans lesquelles la rencontre des volontés présente des difficultés.

 

§ 1/ Les éléments de l’accord

 

Dans la tradition contractuelle française, marquée par le consensualisme, le contrat est en principe formé dès la rencontre de l’offre faite par une partie, et de l’acceptation de cette offre par l’autre partie.

 

A/ L’offre

L’offre est, par hypothèse, la première manifestation de volonté : une personne prend l’initiative des négociations, en formant une offre, également appelée pollicitation.

Notion / régime :

 

1°) La notion d’offre

 

Au sens juridique du terme, l’offre = proposition ferme de conclure un contrat déterminé, à des conditions déterminées.

Il ne manque que l’acceptation de l’autre pour que s’accomplisse la rencontre des volontés, et que le contrat soit formé. L’offre est plus qu’une invitation à entrer en pourparlers, moins qu’une promesse de contrat.

L’offre doit être précise, et ferme.

 

* précise: L’offre doit être suffisamment précise pour que son acceptation (qui peut être un simple « oui ») permette la formation du contrat. L’offre doit donc décrire clairement les conditions auxquelles le pollicitant souhaite s’engager, en fixant au moins les éléments essentiels du contrat envisagé. Ces éléments essentiels varient en fonction de la nature du contrat :

 

En ce qui concerne le contrat de vente, la loi (article 1583 C. civ.) considère comme essentiels la détermination de la chose à vendre, et du prix demandé.

– Pour le contrat de bail, la Jurisprudence estime que l’offre doit mentionner la chose louée, le montant des loyers, et la date d’entrée en jouissance ;

– Dans le silence de la loi, la Jurisprudence détermine aucas par cas quels sont les éléments essentiels de chaque contrat. Ex : Dans un contrat visant à engager une actrice pour le tournage d’un film, la Cour d’appel de Paris a considéré comme essentielles la rémunération de l’actrice, et la date de début du tournage.

 

* ferme: La proposition de contracter ne peut être qualifiée d’offre que si son auteur manifeste sa volonté de conclure le contrat proposé. Tel n’est pas le cas si la proposition est assortie de réserves, expresses ou tacites.

Ex: – Le vendeur qui se réserve le droit de modifier le prix, ou qui donne un prix à titre indicatif.

– Toutes les propositions de contrats intuitu personae sont considérées comme faites sous réserve de l’agrément de la personne qui accepte. Ex : l’offre d’emploi. Même si la proposition est précise (nature de l’emploi et salaire), l’acceptation du candidat ne suffit pas à la conclusion du contrat. Il faut encore que l’employeur agréé celui-ci. Dans ce cas, l’acceptation est assimilée à une contre-proposition, et il faut encore l’acceptation de l’employeur pour que le contrat soit formé.

 

A défaut de préciser les éléments essentiels du contrat, ou d’être suffisamment ferme, la proposition n’est pas une offre, mais une simple invitation d’entrer en pourparlers.

Ex : A vendre, 206 diesel, 1999, prix à débattre.

 

2°) Régime de l’offre

 

L’offre peut être faite à personne déterminée, ou au public. (Ex : expo en vitrine, annonce dans le journal.)

– Elle peut être expresse ou tacite (cf. supra).

En principe, l’offre est librement révocable, c’est-à-dire que l’offrant peut retirer son offre, si cette rétractation intervient avant l’acceptation. Après : trop tard car le contrat est formé => D.I, car inexécution.

NB : Si l’offrant n’a pas précisé de délai, le pollicitant peut librement révoquer l’offre faite au public ; si l’offre est faite à une personne déterminée, elle doit être maintenue durant un délai raisonnable.

=) on veut éviter que le destinataire de l’offre, qui a besoin d’un délai de réflexion, et a peut-être engagé des frais ou du temps pour étudier la proposition, ne subisse un préjudice du fait du retrait brutal de l’offre.

– L’offre devient caduque si son auteur décède ou devient incapable avant qu’elle n’ait été acceptée.

 

B/ L’acceptation

nécessité d’adéquation entre l’offre et l’acceptation

L’acceptation résulte de l’agrément pur et simple de l’offre, aux conditions fixées par celle-ci. (Quand on accepte l’offre)

 

Distinction avec la contre-proposition: Toute réponse dans laquelle est demandée une modification des conditions fixées par le pollicitant s’analyse non comme une acceptation, mais comme une contre-proposition. Dans ce cas, la réponse devient offre nouvelle, et il faut l’acceptation du pollicitant originel pour que se forme le contrat. => Tant que dure la négociation, les parties jouent tour à tour le rôle de pollicitant.

 

L’acceptation peut être expresse ou tacite/ Le silence ne vaut pas, en principe, acceptation (cf. supra).

Il est des cas où, à titre exceptionnel, le silence vaut acceptation. ; Le silence dit « circonstancié » apparaît dans trois hypothèses.

– lorsque les parties étaient en relations d’affaires antérieures et si le nouveau contrat proposé est de même nature que les précédents, le silence vaut acceptation. Il en est de même du renouvellement d’un contrat par « tacite reconduction », ce renouvellement est constitué de deux silences (bail : article 1738)

– le silence vaut aussi acceptation pour les contrats conclu entre parties d’un même milieu professionnel, si l’usage le prévoit

– enfin, lorsque l’offre est faite dans l’intérêt exclusif de celui auquel elle est adressée, le silence vaut acceptation, c’est ce que décide parfois la jurisprudence (offre de remise partielle de loyer).

 

Dans un système consensualiste, l’acceptation entraîne la conclusion du contrat, aux conditions fixées par l’offrant.

Dans un système formaliste, c’est-à-dire si le contrat est de type solennel, l’acceptation est nécessaire à la formation du contrat, mais il faut encore que les formes requises soient accomplies (ex : Actes Authentiques) pour que le contrat soit considéré comme conclu.

Le problème se pose parfois de connaître l’ampleur exacte de l’acceptation : On ne peut en effet accepter que ce que dont on a pris connaissance, et il existe des clauses dont on peut douter que l’acceptant les ait connues.

C’est le cas notamment des clauses écrites en caractères minuscules, et en bas du document contractuel, ou présentées au dos du document, ou dans un document annexe que l’acceptant n’a reçu qu’après son acceptation. On peut alors se demander si l’acceptant a réellement su ce à quoi il s’engageait.

 

La jurisprudence considère dans ce cas qu’il incombe au pollicitant de démontrer que l’autre partie a connu ces conditions particulières, et qu’elle les a acceptées. Si cette preuve n’est pas faite, la clause est généralement réputée non écrite, c’est-à-dire que le contrat est considéré comme conclu, mais s’applique sans la clause litigieuse. Si la clause est une clause essentielle du contrat, le contrat n’est pas conclu.

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Lorsqu’un contrat est conclu entre deux personnes présentes, il n’y a aucune difficulté ; on sait où et quand s’est produit l’accord de volontés.

Il n’en est pas de même lorsque offrant et acceptant ne se trouvent pas au même endroit. C’est ce qu’on appelle les contrats entre absents.

CAS PARTICULIER / Difficultés d’application :
Les contrats entre absents

Quand un contrat entre absents est conclu verbalement, par téléphone, par exemple, c’est seulement le lieu de formation qui est difficile à déterminer. La difficulté est encore plus grande pour les contrats conclus par correspondance.

L’utilisation d’un mode de transmission de la volonté – courrier, fax, émail- soulève la question de savoir à quel moment et quel endroit se rencontrent les volontés, et se forme donc le contrat.

Des intérêts pratiques importants (surtout pour la date) sont attachés à cette question, comme celle de la compétence judiciaire qui dépend parfois du lieu de conclusion du contrat (contrat de travail), comme la compétence législative en droit international privé. L’intérêt peut également être commercial lorsqu’existent des fluctuations de cours importantes d’un jour à l’autre. Par ailleurs la caducité de l’offre peut dépendre de la date d’acceptation.

C’est bien sûr aux parties de dire dans quelles conditions le contrat est conclu. Le problème ne se pose que dans l’hypothèse inverse.

 

Le Code civil n’est pas bavard sur ce point (sauf article 932 et 1985 c.civ).

Les auteurs (c’est à dire la doctrine) se sont énormément opposés sur cette question.

Deux théories ont été présentées : celle de l’émission de l’acceptation (cachet de la poste) et celle de la réception de l’acceptation par l’offrant.

De même, certains auteurs estimaient que la détermination du lieu et de la date de formation du contrat devaient demeurer liées, tandis que certains autres estimaient qu’on pouvait dissocier les deux questions, et faire intervenir un critère pour fixé la date, et un autre pour fixer le lieu. Ex : lieu : émission ; Date : Réception.

=) C’est la Jurisprudence qui a eu à répondre à la question :

–       Elle semble tout de même favorable à ce que la date et le lieu de formation du contrat soient déterminés simultanément, et par application des mêmes critères.

–       Un arrêt de la Chambre commerciale du 7 janvier 1981 s’est en outre nettement prononcé en faveur du système de l’émission(cf. chambre des requettes. 21 mars 1932 ; com. 7 janvier 1981, GA 144-145).

Une société avait émis une offre assortie d’un délai de 30 jours. Le destinataire avait expédié sa lettre d’acceptation 7 jours avant l’expiration du délai, mais ne pouvait prouver que le pollicitant l’avait reçue dans le délai convenu. La Cour de cassation a estimé que, faute de stipulation contraire, le contrat était devenu parfait à compter de l’émission de l’acceptation. (critique de l’auteur Larroumet 285).

 

=) solution du droit français : émission de l’acceptation

NB : convention de Vienne 11 avril 1980 : théorie de la réception (article 18)

Directive 8 juin 2000 sur commerce électronique : réception (mais offrant doit envoyer un accusé de réception)

*   *

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Il ne suffit pas, pour que le consentement soit valable, que la volonté soit convenablement formée, par une personne saine d’esprit. Il faut encore que cette volonté soit exprimée, et manifeste le consentement de la partie au contrat en cause.

§ 2 : Les expressions du consentement

Le consentement = opération mentale, phénomène interne qui doit êtreextériorisé, et que l’autre partie est informée de l’existence de ce consentement.

Cette extériorisation peut s’accomplir

–      soit par une manifestation expresse,

–      soit par une manifestation tacite de la volonté de la personne qui s’engage.

 

1°) Le consentement exprès

 

Le consentement est exprès lorsque la volonté est clairement exprimée, et qu’il n’est pas nécessaire d’interpréter le comportement de la personne pour comprendre qu’elle désire s’engager.

=) le cas du langage écrit ou parlé : la rédaction et la signature d’un contrat, un échange de lettres, de fax, d’emails ou de paroles expriment de façon expresse la volonté de leur auteur.

=) Certains comportements sont également considérés comme exprimant de façon expresse le consentement – ou l’absence de consentement – de leur auteur.

Il en est généralement ainsi lorsque l’usage consacre ce comportement comme valant toujours offre ou acceptation de contracter.

Ex. : celui quilève la main lors d’une offre aux enchères manifeste sa volonté d’acquérir le bien proposé. De même, le fait pour un taxi de stationner sur un emplacement réservé, chauffeur au volant et gaine de compteur enlevée, constitue une offre expresse de contracter un contrat de transport.

Le fait d’exposer un objet en vitrine avec son prix est également considéré comme une offre de vente. (En fait, les auteurs s’opposent sur ces exemples).

=> Nul besoin de supposition ou d’interprétation, puisque l’usage veut que l’acceptation s’exprime par ce moyen particulier. Ici, le geste n’a pas d’autre but que d’exprimer la volonté de contracter.

 

2°) Le consentement tacite

 

=) Le consentement est au contraire tacite lorsqu’il se contente de laisser supposer la volonté de l’individu de s’engager dans les liens contractuels.

Par ex: le locataire qui reste dans les lieux après l’expiration du contrat de bail manifeste tacitement sa volonté de renouveler le contrat, et le bailleur qui continue de percevoir les loyers manifeste tacitement son acceptation.

 

=) La difficulté surgit lorsqu’il faut interpréter le silence d’une des parties : Le droit français ne consacre pas le dicton qui énonce « Qui ne dit mot consent ».

=) En principe, le silence ne vaut pas acceptation.

=) exceptions au principe selon lequel le silence ne vaut pas acceptation.

– Certaines exceptions sont légales : Ainsi, l’article L. 112-2 du Code des assurances énonce que, lorsqu’un assuré propose de prolonger ou de modifier un contrat d’assurance, le silence gardé par l’assureur pendant 10 jours vaut acceptation tacite de cette modification.

D’autres exceptions sont d’origine jurisprudentielle,et s’appliquent lorsque le silence, rapproché des circonstances particulières, manifeste sans équivoque le consentement :

Ainsi, lorsque le contrat prévoit expressément que, dans telle ou telle situation, le silence d’une des parties vaudra acceptation.

Ex: Si vous ne protestez pas dans les deux mois de la réception de vos relevés bancaires, vous êtes considérés comme ayant accepté les opérations qui y ont été inscrites. En signant le contrat bancaire, vous avez accepté toutes ses clauses, y compris celle qui assimile votre silence à une acceptation.

De même lorsque les parties se trouvaient déjà dans des relationsd’affaires, et que l’offre porte sur un contrat qu’elles concluent habituellement, le silence peut être considéré comme valant acceptation.

 

Troisième exception, plus contestable : la jurisprudence considère que le silence peut valoir acceptation, en dehors de toute relation contractuelle préexistante, lorsque la proposition de conclure un contrat est faite dans le seul intérêt de celui à qui elle s’adresse.

Ex : Silence d’un débiteur après réception d’une offre de remise de dette.

Ici, le mécanisme est contestable, car il repose sur une double interprétation : interprétation de ce qui est bon pour l’individu, et interprétation de la volonté de l’individu.

Ex: Un garagiste qui dépanne un motocycliste victime d’un accident. Le motocycliste, inconscient au moment des faits, n’avait peut-être pas envie qu’on répare son engin.

=> L’interprétation est parfois douteuse. Mais l’hypothèse est rare, de toute façon.

 

Conclusion : Gardez en tête le principe : le silence ne vaut pas acceptation, et sachez qu’il existe quelques exceptions.

 

On a vu que, pour que le consentement existe, il faut une volonté exprimée de façon non équivoque, par une personne douée d’un certain discernement. Nous allons maintenant étudier les différentes qualités requises pour que le consentement ainsi exprimé soit considéré comme valable.

 

Sous-Section 2 : L’intégrité du consentement : les vices du consentement

Il ne suffit pas que le consentement existe. Pour contracter, il faut consentir en pleine connaissance de cause et librement. On exprime cette idée en exigeant que le

Consentement libre et éclairé.

 

Eclairé,cela signifie que le consentement doit être déterminé par des données exactes concernant la nature, le contenu et la portée de l’engagement souscrit par chacune des parties. L’erreur à l’origine de ce défaut peut être spontanée ou provoquée. Dans le premier cas on parle d’erreur au sens strict, dans le second cas de dol.

 

Libre :Si un contractant qui, en son for intérieur, refuse de s’engager décide néanmoins de contracter car il est soumis à des pressions, son consentement n’est pas libre. Entre le contrat qu’il désapprouve et les menaces dont il est l’objet, il choisit le premier par crainte des secondes. On parle ici de violence.

 

L’erreur, le dol et la violence constituent trois vices du consentementqui permettent à la partie qui en est victime de demander l’annulation du contrat. On dit que le consentement a été vicié.

L’article 1109 du Code civil :« Il n’y a point de consentement valable, si le consentement, n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol »

 

On étudiera successivement chacun de ces vices du consentement.

§ 1 : L’erreur (article 1110du Code Civil.)

Définition: L’erreur est une fausse appréciation de la réalité : elle consiste à croire vrai ce qui est faux, ou inversement.

 

L’erreur peut porter sur différents éléments du contrat.

Par exemple, l’intéressé pense acheter un tableau de Renoir alors qu’il s’agit d’un tableau de Degas.

Mais la lecture du Code civil laisse apparaître que toutes les erreurs ne sont pas prises en considération par le droit positif.

Par ailleurs, la sécurité dans les relations contractuelles commande qu’on ne puisse pas sous le simple prétexte que l’on s’est trompé, attaquer un contrat.

Il y a deux impératifs à concilier : la protection de la victime et la sécurité contractuelle.

 

C’est pourquoi, il nous faut d’abord déterminer le domaine de l’erreur (A), c’est-à-dire les cas où l’erreur peut être sanctionnée, puis les conditions dans lesquelles l’erreur peut être sanctionnée (B).

 

A/ Le domaine de l’erreur

 

=) L’article 1110 du Code civil dispose que :

L’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet.

Elle n’est point une cause de nullité, lorsqu’elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention.

 

Dans cet article il n’est donc fait état que de l’erreur sur la substance et de l’erreur sur la personne, lorsque la considération de la personne était une considération essentielle.

=) la doctrine distingue trois catégories d’erreurs en fonction de leur gravité. La dernière catégorie n’entraîne pas la nullité du contrat.

Tantôt l’erreur détruit le consentement, c’est l’erreur-obstacle ; tantôt elle vicie le consentement, c’est l’erreur vice du consentement, tantôt elle est indifférente et ne porte pas atteinte à la validité du contrat.

 

  1. L’erreur-obstacle

L’erreur-obstacle résulte d’un quiproquo.

Il arrive que derrière des déclarations en apparence concordantes, les volontés réelles ne se soient pas rencontrées. Quand elles se présentent, il n’y a pas de doute possible sur la nullité du contrat : D’ailleurs, comme le disait Planiol : Ce n’est pas un contrat, c’est un malentendu.

Cet obstacle peut être rencontré dans deux séries d’hypothèses, hypothèses d’école (i.e. très rares) :

  1. a)          l’erreur sur la nature du contrat.

Anatole croyait qu’il s’agissait d’un contrat de vente alors que Barnabé voulait seulement louer le même bien.

  1. b)          L’erreur sur l’identité de la chose qui fait l’objet du contrat

Chacune des parties a en vue un bien différent. L’un entend vendre ou donner en location telle parcelle de terrain, l’autre croit acheter ou prendre en location une autre parcelle de terrain.

 

  1. L’erreur vice du consentement

L’article 1110 est restrictifet ne prévoit que deux types d’erreur : l’erreur sur la substance de la chose, de façon générale, et l’erreur sur la personne du contractant, à titre exceptionnel.

 

  1. a)         l’erreur sur la substance

L’erreur n’est une cause de nullité que si elle porte sur « la substance même de la chose qui en est l’objet ».

Difficile à comprendre, la notion a donné lieu à un important travail d’interprétation.

La notion de substance, en effet, peut être entendue de plusieurs façons.

 

  • Objectivementla qualité substantielle d’une chose = matière dont la chose est faite, c’est la substance physique 

= perçue comme essentielle.

= Ex : l’authenticité d’une œuvre d’art.

= une cause de nullité.

 

  • Subjectivement, la qualité substantielle = essentielle qu’aux yeux de l’une des parties (l’acheteur)

= qualité déterminante du consentement.

= conception retenue par le droit positif

 

Ex : l’authenticité lui importait peu mais il était important pour lui que le meuble soit en bois de letchi et non en bois de tamarin.

Aussi, pour concilier protection de la victime et protection du cocontractant, il faut nuancer ; prétendre que telle qualité était essentielle pour vous ne suffit pas :

=) Il doit s’agir d’une qualité déterminante connue des deux parties.

 

 

La nullité ne peut être prononcée que si l’autre partie connaissait l’importance essentielle que la victime de l’erreur attachait à la qualitédéfaillante. On a parfois, à ce propos, parlé d’erreur « commune ». Mais en fait ce n’est pas l’erreur qui est commune mais l’intention de considérer telle qualité comme substantielle. On dira par exemple que cette qualité, objet de l’erreur, doit « être entrée dans le champ contractuel » ou encore que l’erreur doit porter sur une qualité convenue.

Pour le savoir, on examinera le contrat avec attention. En matière de vente d’œuvres d’art, par exemple, on examinera les mentions et les formules du type « attribué à », « école de », « dans le style de ». Dans ce cas l’acheteur ne pourrait par exemple agir en nullité sous le prétexte qu’il s’agit d’une copie. Au contraire, le fait que l’acheteur exige un certificat de d’authenticité montre qu’il y attache de l’importance.

 

Exemple célèbre d’erreur sur la substance :

Vous étudierez à ce sujet dans le cadre de vos séances de T.D. la célèbre affaire POUSSIN, qui a donné lieu à 15 années de procédure judiciaire, et à l’intervention à deux reprises de la Cour de cassation, plus un détour par le Tribunal des conflits, pour arriver finalement, en 1987, à la même solution que celle posée par le TGI en 1972…. Des particuliers avaient vendu (2.200 francs) aux enchères un tableau qu’un expert avait attribué à l’Ecole des Carrache. Le Musée du Louvre exerça son droit de préemption, et, dans les semaines qui suivirent, divers articles de presse présentèrent ce tableau comme une œuvre du grand peintre de la Renaissance Nicolas Poussin, qui était donc mille fois plus précieuse qu’un banal tableau de l’Ecole des Carrache

Les vendeurs demandèrent la nullité de la vente pour erreur sur la substance.Les défendeurs soutinrent que seule l’erreur de l’acheteur, et non celle du vendeur, pouvait donner lieu à l’annulation, et que de toutes façons, il ne pouvait y avoir d’erreur car on n’était pas absolument sur que ce fut un Poussin authentique. Les vendeurs obtinrent finalement gain de cause, au motif que, s’il n’était pas absolument certain que l’œuvre fut effectivement de Nicolas Poussin, il est clair en revanche que les vendeurs avaient conclu le contrat en étant convaincu que ce n’étaitpasun Poussin. Cela était suffisant pour constituer une erreur sur la substance, car ils n’auraient jamais vendu le tableau 2.200 francs s’ils avaient su qu’il était possible que ce tableau en vaille 10 ou 100 fois plus.

 

=) Remarques sur cet arrêt :

–       L’erreur peut être celle du vendeur, et pas uniquement celle de l’acheteur.

Il est vrai que l’erreur sur la prestation fournie est rarement alléguée. Une raison toute simple en est le fait que l’acheteur qui fait une bonne affaire ne va pas en avertir le vendeur. Celui-ci n’a guère l’occasion de prendre conscience de son erreur, sauf peut-être en cas de revente, à un musée par exemple.

– (+ civ. 13 janvier 1998) : l’erreur peut être constituée par une discordance entre la croyance du vendeur (il pensait que le tableau n’était pas de Poussin) et une réalité même incertaine (l’œuvre est peut-être de Poussin)

 

  1. b) erreur sur la personne

Tout comme les choses, les personnes ont des qualités substantielles qui peuvent être déterminantes pour le consentement.

En fait, l’article 1110 du Code civil pose en principe que l’erreur sur la personne avec laquelle on contracte n’est pasune cause de nullité, « à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de la convention ».

Il est vrai que, dans les contrats usuels, la personne du cocontractant est normalement indifférente : peu importe à qui l’on vend, à qui on achète.

Mais dans certains contrats, l’identité ou la qualité de la personne est déterminante. On dit que ces contrats sont conclus intuitu personae, i.e. en considération de la personne.

L’intuitu personaeexiste toujours dans les contrats à titre gratuit : on ne donne pas à n’importe qui.

L’intuitu personaeest également présent dans les contrats à titre onéreux, qui comportent des prestations dépendant étroitement des qualités personnelles du cocontractant : commande d’un tableau à un artiste-peintre, contrat de travail, contrat de mandat, contrat de prêt….

Selon les cas, on pourra tenir compte d’une erreur sur le talent, la compétence, l’honorabilité, la situation de famille, la solvabilité de la personne…

 

  1. L’erreur indifférente

Dans tous les autres cas que ceux que nous venons de voir, l’erreur n’entraîne pas la nullité de l’engagement. Elle est indifférente.

  • l’erreur sur la valeur

On entend par là l’erreur sur l’évaluation (économique) de l’objet du contrat.

Distinguer :

–             erreur monétairequi procède d’une appréciation économique erronée effectuée à partir de données exactes (tableau est bien authentique mais vaut 1000 et non 100)

–             erreur sur la valeurqualitative de la chose, qui est la conséquence d’une erreur sur une qualité substantielle

Ainsi, erreur sur la valeur, en principe indifférente, ne l’est plus quand elle prend sa source dans une erreur sur la substance.

En fait, l’erreur sur la valeur est soumise à un régime particulier, celui de la lésion, qui n’entraîne la nullité que dans des cas exceptionnels (notamment, elle n’est d’aucune conséquence en ce qui concerne les biens mobiliers). cf. infra.

 

  • l’erreur sur les motifs

On entend  par là l’erreur sur le motif personnel) qui a conduit une partie à contracter mais qui ne prend en compte ni les qualités de la chose objet du contrat ni celle de la personne.

=) Par exemple, une personne achète une voiture parce qu’elle pense obtenir prochainement un emploi qui le requiert. Si elle n’obtient pas cet emploi, il y aura erreur sur les motifs mais c’est une erreur qui n’est pas sanctionnée.

On considère en effet que les motifs sont trop divers, trop subjectifs, et trop extérieurs au contrat pour que l’on porte atteinte à la validité du contrat dès qu’une partie s’est trompée sur ce point. Il faut, je vous l’ai dit, faire attention à préserver un minimum les intérêts de cocontractant, et l’annulation ne peut être encourue que si, par une clause expresse, le motif en question a été intégré dans le champ contractuel.

Ex : j’achète la voiture à condition que je sois nommé à St Pierre.

Dans ce cas, il n’est pas porté atteinte à la sécurité contractuelle, puisque le cocontractant sait qu’il existe un aléa.

– Le motif peut être la cause de l’engagement ; on le verra ultérieurement en étudiant la cause.

 

  • Remarque : Erreur de fait ou erreur de droit.

L’erreur de droit, qui porte sur l’ignorance de la loi, est susceptible d’être prise en considération aussi bien qu’une erreur de fait : Par ex, la personne qui vend sa part d’héritage en pensant que la loi lui attribue des droits insignifiants, alors qu’il s’avère qu’il doit recevoir des droits beaucoup plus importants.

On pourrait s’étonner de cette solution, puisque tout le monde connaît la maxime selon laquelle « nul n’est censé ignorer la loi ». Mais cette maxime a pour seul effet d’empêcher une personne d’échapper à l’application d’une règle sous prétexte qu’il ne la connaît pas.

Dans le cas présent, il s’agit de montrer que l’erreur de droit a vicié le consentement au contrat, ce qui est différent.

 

 

B/ Les conditions de la nullité pour erreur

Pour que l’erreur entraîne la nullité du contrat, il ne suffit pas, comme pourrait le laisser penser la lecture de l’article 1110, qu’elle ait porté sur la substance de la chose ou sur la personne du cocontractant, il faut encore qu’elle revête certains caractères que l’intéressé doit prouver.

L’erreur doit être déterminante.

Même lorsqu’elle tombe sur un point retenu par la jurisprudence, l’erreur n’est prise en compte que si elle a été déterminante du consentement. Le contractant doit prouver que, s’il n’avait pas commis cette erreur, il n’aurait jamais conclu le contrat (soit pas du tout, soit pas aux mêmes conditions).

Ce caractère est délicat à démontrer.

L’erreur doit être excusable.

Si l’erreur déterminante est généralement reconnue comme cause d’annulation du contrat, encore faut-il que celui qui l’a commise n’ait pas fait preuve d’une négligence excessive. Ainsi, lorsqu’il s’avère que la victime aurait pu facilement éviter l’erreur, en se renseignant un minimum, ou en faisant preuve d’un peu moins de naïveté, l’erreur est considérée comme inexcusable, et le contrat valable. On estime en effet que l’individu ne mérite pas d’être protégé.

C’est au juge du fond d’apprécier souverainement le caractère excusable de l’erreur, qui s’apprécie in concreto en fonction des circonstances de la cause, de l’âge, de l’expérience et de la profession du demandeur de la nullité.

Ex : Est ainsi inexcusable l’erreur commise par un architecte sur la constructibilité du terrain qu’il acquiert.

 

 

L’erreur doit être commune 

On a déjà abordé ce point à propos de la substance de la chose.

En fait, ce n’est pas l’erreur qui est commune mais intention de considérer telle qualité comme substantielle. L’autre devait connaître l’importance essentielle attachée à la qualité.

 

=) Cette règle, qui n’est pas toujours nettement exprimée par la jurisprudence, est souvent difficile à appliquer. Il est en effet déjà difficile de prouver que celui qui a commis l’erreur tenait telle ou telle qualité pour déterminante. Il est encore plus difficile de démontrer que l’autre savait qu’il en était ainsi.

On résout la difficulté en posant une présomption de fait, en fonction de la nature de la qualité considérée et des circonstances dans lesquelles le contrat a été conclu :

S’il s’agit d’une qualité qui, dans n’importe quelles circonstances, est toujours considérée comme substantielle, alors l’erreur sera présumée commune.

Ex : l’antiquaire doit bien se douter que ses clients recherchent des meubles anciens.

Dans le cas contraire, il faudra que le demandeur à l’annulation démontre non seulement le caractère déterminant de l’erreur qu’il a commise, mais également le fait que le cocontractant connaissait ce caractère déterminant.

 

 

Conséquences de la réunion des conditions :

L’erreur est sanctionnée par la nullité. Elle ne peut être demandée que par la victime de l’erreur (nullité relative).

Mais s’agissant d’une erreur-obstacle, celle-ci est sanctionnée par une nullité absolue car un élément essentiel du contrat, le consentement fait défaut. S’agissant d’une erreur – vice du consentement, la nullité du contrat est relative. Peut agir pendant cinq ans à compter de la découverte du vice ; la nullité est susceptible de confirmation.

Mais l’erreur ne suppose aucune faute de la part de l’autre partie, qui peut même avoir ignoré cette erreur ou l’avoir partagée (il croyait lui aussi que le tableau était authentique). Il n’y a donc pas lieu à l’attribution de dommages-intérêts.

*   *

 *

§ 2 : Le dol (article 1116du Code Civil.)

Le dol n’est pas défini par la loi. L’article 1116 dispose seulement que :

 «  Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas, et doit être prouvé. »

Le mot désigne un comportementdestiné à induire une personne en erreur, pour la décider à conclure le contrat.

Le dol est une manœuvre ayant pour but et pour résultat de tromper l’autre partie. Le dol désigne toutes les tromperies par lesquelles un contractant provoque chez sonpartenaire une erreur qui le détermine à contracter. Celui qui en est victime ne s’est pas trompé, il a été trompé. C’est une erreur provoquée.

 

Différence avec l’erreurayant, en cas de dol, sa source dans un acte de déloyauté.

Le droit civil la sanctionne avec plus de rigueur. Trois particularités :

–             preuve : s’il y a dol, la preuve est plus aisée car elle ne vise pas directement à prouver l’erreur (fait psychologique) mais les agissements qui ont provoqué celle-ci

–             fond : les erreurs qualifiées d’indifférentes lorsqu’elles sont spontanées (erreur sur la valeur), sont sanctionnées lorsqu’elles ont été provoquées par une tromperie

–             sanction : le dol implique toujours une faute de celui qui l’a commis ; la victime pourra donc en outre demander des dommages-intérêts si la nullité ne suffit pas à réparer le préjudice subi.

 

Ceci étant précisé, la loi n’a fait du dol un vice du consentement que si certaines conditions sont réunies. ÞÉléments du dol/ sanctions

A/ Les éléments du dol

L’article 1116 dispose que « le dol ne se présume pas, il doit être prouvé ». La personne qui invoque le dol doit établir l’existence du dol.

 

Il y a dol, lorsque 3 éléments sont réunis :

  1. L’élément matériel

–       L’article 1116 du code civil= « manœuvres pratiquées » par l’une des parties,

–       la Jurisprudence = assimile le mensonge et la réticence dolosive.

 

Manœuvre

Le Code civil utilise le mot manœuvres, qui impliquent une idée de machination et d’artifice.

Vous avez une villa au bord la mer ; vous savez que votre acheteur potentiel est un passionné de pêche ; le jour où il visite votre maison, vous organisez une mise en scène avec une flottille de barques sillonnant la mer et simulant une pêche miraculeuse ; votre acheteur achète la villa à un prix exorbitant (trafiquer compteur voiture)

Mensonge

Le mensonge, même sans machinations, sans acte extérieur, constitue un dol. Mais ne sont pas dolosives les exagérations habituelles dans une profession

Evidemment, la frontière entre l’exagération (dolus bonus) et le mensonge (dolus malus) est une question de fait, appréciée souverainement par les juges du fond.

Réticence

La réticence est le fait de garder le silence sur une information que l’on connaît et devrait communiquer.

Certains textes règlent expressément le problème, en énonçant par exemple que le vendeur est tenu de déclarer les vices cachés dont il a connaissance (article 1641 à 1648 du Code civil), ou au contraire, permet aux femmes enceintes de ne pas révéler leur état de grossesse lors d’un entretien d’embauche (art. L.122-25 du Code du travail).

En dehors de ces cas, la JP, après avoir longtemps décidé le contraire, considère aujourd’hui que le dol est constitué dès lors qu’il apparaît que le cocontractant a gardé le silence sur un fait qui, s’il avait été connu de son partenaire, l’aurait empêché de contracter (V. p. ex Cass. 3ème civ. 2 octobre 1974, GAJCiv. n° 87).

(Il apparaît ainsi que la Jurisprudence sanctionne non seulement celui qui a fait naître l’erreur par son silence, mais également celui qui n’a pas provoqué, mais s’est contenté d’exploiter l’erreur de l’autre. => Emergence de l’obligation précontractuelle d’information).

 

  1. L’élément intentionnel

Pour que le contrat puisse être annulé sur le fondement du dol, il faut que l’élément matériel que l’on vient d’évoquer ait été commis par l’une des parties dans le but de tromper l’autre. Pas de dol sans intention de tromper.

Cela sera facilement vérifié s’il s’agit d’une manœuvre ou d’un mensonge délibéré, mais sera plus difficile à démontrer s’il s’agit de simple réticence.

Dans ce cas en effet, le silence peut résulter d’un simple oubli et non pas de la volontépositive de tromper l’autre partie. Les juges retiennent toutefois l’existence d’un dol lorsqu’il apparaît que le contractant connaissait, ou qu’il ne pouvait pas ignorer l’importance du fait dissimulé pour son partenaire contractuel.

Ex: le vendeur d’antiquité commet un dol s’il ne dit pas que la pièce qu’il vend est une copie récente d’un meuble ancien.

 

Remarque

Le dol n’est une cause de nullité que s’il émane du cocontractant ou de son représentant parce qu’il repose sur l’idée de faute de celui-ci.

=) le dol n’est pas cause de nullité s’il est le fait d’un tiers.

 

  1. Le caractère déterminant du dol

La manœuvre commise dans le but de tromper autrui n’est dolosive que si elle atteint son but, c’est-à-dire qu’elle provoque chez l’autre une erreur déterminante.

 

* L’erreur ainsi provoquée peut être de n’importe quelle nature : erreur sur la personne ou sur la substance, erreur de droit ou de fait, erreur du vendeur ou de l’acquéreur, mais aussi erreur sur la valeur ou sur les motifs (qui ne sont pas reconnues quand elles sont spontanées).

 

* L’erreur doit être déterminante, c’est-à-dire non seulement qu’elle doit avoir été provoqué par les manœuvres du cocontractant, mais qu’elle doit en outre avoir été telle que, sans elle, la victime n’aurait pas contracté.

 

=> On parle alors de dol principal, par opposition au dol incident. Le dol est incident quand la victime aurait quand même contracté, maisà des conditions différentes (par ex, à un prix plus bas). Dans ce cas, la Jurisprudence considère généralement que le contrat n’est pas nul, et que la victime peut seulement obtenir desdommages et intérêts. (=> Responsabilité délictuelle de base).

 

Le caractère déterminant du dol est apprécié in concreto, c’est-à-dire qu’on recherchera si, compte tenu de l’âge, de l’intelligence, et de la compétence de la personne, celle-ci a effectivement été trompée, et qu’elle mérite d’être protégée. Par transposition au dol des règles appliquées en matière de d’erreur inexcusable, on refusera l’annulation à celui qui s’est laissé prendre par un mensonge particulièrement grossier ou une manœuvre particulièrement évidente.

 

B/ La sanction du dol

La preuve (qui peut se faire par tous moyens) du dol permet de prononcer la nullité du contrat (nullité relative)

 

Mais le dol est aussi une faute, qui permet d’allouer des dommages-intérêts à la victime. La victime peut donc exercer une action en responsabilité délictuelle pour obtenir réparation du préjudice subi. La responsabilité est délictuelle car la faute est antérieure au contrat.

Si un tiers est complice, on peut lui demander des dommages-intérêts sur le fondement de l’article 1382 du Code civil

Délit civil, le dol peut aussi dans certains cas constituer un délit pénal (escroquerie, publicité mensongère, délit d’abus de faiblesse ou d’ignorance du consommateur)

 

§ 3 : La violence (article 1111du Code Civil.)

Article 1111

La violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation, est une cause de nullité, encore qu’elle ait été exercée par un tiers autre que celui au profit duquel la convention a été faite

 

Article 1112

Il y a violence, lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable, et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent.

On a égard, en cette matière, à l’âge, au sexe et à la condition des personnes.

 

Il y a violence lorsqu’une personne contracte sous la menace d’un mal qui fait naître chez elle un sentiment de crainte.

 

La différence est manifeste avec l’erreur et le dol. En cas de violence, le consentement a été donné en connaissance de cause, mais il n’a pas été libre. Tout en sachant que le contrat est mauvais pour elle, la victime de la violence donne son consentement car elle est menacée d’un mal plus grave au cas où elle refuserait de s’engager.

Le vice du consentement n’est plus l’erreur (spontanée ou provoquée) mais la crainte qui entame ou supprime la liberté du consentement.

NB : En revanche, il n’y a pas à proprement parler de violence lorsqu’une personne contracte sous l’empire d’une drogue qui annihile totalement sa volonté ou que sa main a été guidée de force pour obtenir sa signature. En ce cas, en effet, le consentement n’est plus donné sous l’empire de la crainte, il fait radicalement défaut.

Conditions ; origine

 

A/ Les conditions de la violence

Elément matériel et caractère injuste

Plusieurs éléments sont nécessaires pour caractériser la violence :

 

  • L’élément matériel: on entend par là toutes sortes de menaces.

La violence peut s’exercer à l’encontre du contractant ou à l’égard des proches pour lesquels la loi présume de l’affection : conjoint, descendant, ascendants (article 1113du Code Civil.).

Le mal dont ils sont menacés peut être physique (menace de mort, de coups), moral (révéler un fait contraire à l’honneur), pécuniaire (priver quelqu’un de sa profession)

 

  • L’élément injuste, illégitime: pour être cause de nullité, la violence doit être injuste. Il ne suffit pas que la liberté de décision ait été altérée, il faut encore que la contrainte soit illégitime.

Le Code civil et la Jurisprudence considèrent que la violence n’appelle pas de sanction lorsqu’elle est légitime.

On peut citer deux cas de violence légitime :

* la crainte révérencielle : L’article 1114 du Code civil dispose que « la seule crainte révérencielle envers le père, la mère ou autre ascendants, sans qu’il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat ».

L’expression désigne la crainte que les enfants peuvent avoir de déplaire à leurs parents, et qui peut les conduire à conclure un contrat qu’ils ne souhaitaient pas vraiment (par ex : mariage). Cette crainte est considérée comme légitime, car elle résulte de l’autorité morale des parents, et du respect qui leur est dû.

Si aucune violence caractérisée ne peut être reprochée aux ascendants, le contrat ne sera pas annulé, bien que le consentement n’ait pas été totalement libre.

 

* La menace d’exercer une voie de droit. La Jurisprudence considère que la menace d’exercer un droit, comme par ex une action en justice, pour persuader autrui de conclure un contrat n’est pas illégitime.

Ex: – Le débiteur qui accepte de vendre ses biens pour échapper aux poursuites judiciaires de son créancier ne peut pas invoquer une violence illégitime cause de nullité du contrat.

– L’employé qui a détourné des fonds de sa société, et qui accepte de démissionner pour échapper à des poursuites pénales ;

– la menace de faire grève, ou la contrainte exercée par une grève déjà déclenchée ne sont pas illégitimes, car la grève est un mode d’action reconnu par le droit.

 

  • Le degré de gravité:

Enfin, selon l’article 1112du Code Civil., « il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une personne raisonnable et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne ou sa fortune à un mal considérable et présent ».

Ce qui importe en vérité, c’est que la crainte inspirée par cette menace ait été suffisamment importante pour déterminer le consentement.

 

Pour apprécier l’importance de cette crainte, deux critères sont possibles :

Appréciationin concreto, ou appréciation subjective : on recherche quelle influence la violence a effectivement eu sur le comportement de la victime : celle-ci aurait-elle contracté si la violence n’avait pas eu lieu ? L’appréciation in concreto suppose que l’on prenne en compte les particularités physiques, physiologiques et psychologiques de l’individu victime : une personne âgée, en mauvaise santé, peu sûre d’elle, sans compétence dans les affaires, sera nécessairement plus sensible à la violence qu’un professionnel ou une personne en pleine possession de ses moyens.

Ce système permettra d’annuler des contrats dans lesquels la violence exercée aura été objectivement peu importante.

 

Appréciationin abstracto, ou objective : on se contente de rechercher si la violence exercée était de nature à influencer le consentement d’un « Bon père de famille », c’est-à-dire d’une personne moyennement influençable, ni héros ni faible => on ne se réfère pas aux caractéristiques particulières de la victime. On n’annule le contrat que si la violence présentait objectivement un caractère de gravité suffisant.

 

Le choix entre ces deux systèmes est important, car l’un est plus favorable à la victime que l’autre.

Le problème, c’est que l’article 1112 du Code civil se réfère successivement aux deux critères : l’alinéa 1er envisage, in abstracto, l’influence que la violence pouvait avoir sur une personne raisonnable ; l’alinéa 2 impose aux juges d’avoir égard, in concreto, à l’âge, au sexe et à la condition des personnes.

C’est là que la Jurisprudence est intervenue, pour exercer son rôle d’interprétation et d’adaptation des textes, en remédiant aux contradictions de la loi : la Cour de cassation estime en effet que, entre ces deux conceptions, il faut faire prévaloir celle qui recherche concrètement l’influence exercée par la violence sur la victime, compte tenu de ses caractéristiques personnelles.

=> Avec l’appréciation in concreto, le seuil à partir duquel la violence devient une cause de nullité est variable en fonction de l’âge, du sexe, de la condition sociale et de la force de caractère de celui qui demande la nullité du contrat.

 

B/ Origines de la violence

Plus grave que le dol, la violence sera prise en compte qu’elle émane du cocontractant ou d’un tiers. De même l’état de nécessité est parfois prix en compte.

* La contrainte par un tiers

Contrairement à ce qui se passe pour le dol, la violence est considérée comme une cause de nullité du contrat même si elle n’est pas exercée par le cocontractant, mais par un tiers. Ainsi, quel que soit l’auteur de la menace, la pression exercée est sanctionnée dès lors qu’elle est illégitime, et qu’elle a déterminé le consentement de la victime. Cette solution peut paraître injuste pour le cocontractant, qui subit la nullité du contrat alors qu’il n’est pas à l’origine du VDC, mais on peut également considérer qu’il a quand même profité de la violence sans laquelle, en tout état de cause, le contrat n’aurait pas été conclu.

 

* L’état de nécessité.

 

On s’est longtemps demandé s’il fallait reconnaître comme cause de nullité la contrainte qui, en dehors de toute action humaine, résulte des seulsévènements extérieurs. La victime contracte alors sous le seul effet del’état de nécessité dans lequel elle se trouve. C’est le cas typique du contrat d’assistance maritime : le capitaine du navire en péril est bien obligé d’accepter l’aide du navire sauveteur, sans pouvoir discuter les conditions du contrat.

Faut-il considérer qu’il y a eu violence, alors que personne, ni partie ni tiers, n’en est à l’origine ?

Il existe en fait assez peu de décisions judiciaires ayant eu à trancher cette difficulté, mais ces la Cour de cassation semble favorable à l’assimilation de l’état de nécessité au cas de violence exercée par un humain.

Ex: – Chambre des requettes. 27 avril 1887, D. 1988, 1, 263 pour un contrat d’assistance maritime.

– Soc. 5 juillet 1965, Bull. civ. IV, n° 545, qui approuve l’annulation pour violence morale d’un contrat de travail désavantageux, que le salarié avait conclu sous l’influence de pressants besoins d’argent, dus notamment à la maladie d’un enfant.

 

[La Jurisprudence est trop pauvre pour être considérée comme fixée. Mais il semble ETAC que l’état de nécessité ne soit retenu comme un VDC que si le cocontractant à profité des circonstances, pour stipuler des conditions abusives. Ex : le chirurgien qui profite de l’urgence de l’intervention pour réclamer des honoraires excessifs.

Si le contrat est conclu à des conditions normales, il y a alors violence légitime => il faut donc une faute, en plus de l’altération du consentement, pour que la sanction soit encourue].

 

 

Sanction de la violence

–       la violence est un fait juridique, qui peut être prouvé par tous moyens.

–       Si preuve des éléments constitutifs est rapportée, donc si violence a été déterminante =) nullité relative

Selon la conception moderne, la violence est sanctionnée parla nullité relative du contrat. La nullité ne peut être demandée que par la victime ; son action se prescrit par cinq ans à compter du moment où la violence a cessé (article 1304du Code Civil.).

–       Comme dans le dol, il y a une dimension morale dans le régime de la violence : l’annulation est conçue à la fois comme la réparation d’un vice du consentement, et comme la sanction de la faute commise par l’auteur de la violence =) dommages-intérêts

–       sanctions pénales dans certains cas(escroquerie, extorsion de fonds, chantage, abus de position dominante)

 

Section 2 : La capacité

 

=) une opération mentale = pesé le pour et le contre,

 =) requiert l’aptitude à comprendre, c’est-à-dire l’intelligence, et l’aptitude à décider, c’est à dire la volonté. (§ 1)

=) Il faut ensuite que la volonté soit exprimée, pour que l’autre puisse en prendre connaissance. (§ 2)

§ 1 : L’aptitude à consentir

=)  la partie qui s’engage doit être apte à mesurer les conséquences de ses actes, et la portée de son engagement.

=)  la personne doit être suffisamment consciente de ses actes au moment où elle s’engage, qu’elle ait une capacité de discernement suffisante.

 

2 cas d’incapables juridiques

ð    les enfants en bas âge,

ð    les adultes atteintsprovisoirement ou définitivement d’un trouble mental (régime d’incapacité juridique qui tente de les protéger contre les effets d’un contrat mal conclu).

 

=)  Les incapables, mineurs ou majeurs

Interdiction de conclure certains actes : 2 cas à envisager

–      (A) :obligation d’assistance d’une tierce personne : les incapacités

–      (B) : Mais il peut arriver qu’une personne juridiquement capable soit ponctuellement (à un moment donné pour une raison déterminée) hors d’état de manifester sa volonté : l’absence de consentement

 

A/ Les incapacités

=) certaines personnes voient leur capacité de contracter limitée par la loi, en raison de la faiblesse de leur discernement.

 

Article 1123 du Code civil : « toute personne peut contracter si elle n’en est pas déclarée incapable par la loi ».

 

Il existe deux types d’incapacités :

ð    incapacité de jouissance

ð    incapacité d’exercice

 

Il y a incapacité de jouissancelorsqu’un individu est purement et simplement privé du droit d’accomplir tel ou tel acte juridique.

 

L’incapable ne peut le faire lui-même, et aucun représentant ne peut le faire en sonnom. Ce régime est assez rare, et ne concerne que des actes particuliers.

Ex: La donation : Un mineur ne peut en principe faire aucune donation, et ses parents ne peuvent la faire à sa place. La raison d’une telle incapacité est la volonté de protéger l’incapable, car la donation est un acte trop dangereux, qui appauvrit son patrimoine sans contrepartie.

Certaines incapacités de jouissance sont également prononcées à titre de sanction, comme une peine accessoire à une condamnation pénale. Ex : interdiction bancaire.

 

Il y a incapacité d’exercice quand la personne a les mêmes droits qu’une personne capable, mais qu’elle ne peut pas les exercer librement.

C’est le cas le plus fréquent quand on parle d’incapacité.

 

=) Principe : les mineurs ne peuvent conclure personnellement aucun acte juridique, mais leurs représentants légaux (en général, leurs parents) peuvent le faire en leur nom.

=) exception : caractère modeste de l’acte et en raison de l’âge  (article 389-5 et 450du Code Civil.) : ex. : course au supermarché, l’acte ainsi conclu sera valable.

 

=) les incapables majeurs, 2 régimes :

la tutelle frappe les personnes atteintes d’une altération de leurs facultés mentales grave et définitive.

Ils sont placés sous un système de représentation, c’est-à-dire qu’ils sont représentés par un tuteur dans tous les actes de la vie juridique.

La curatelles’applique à des personnes victimes d’une altération de leur facultés mentales qui amoindrit leur discernement, sans les mettre totalement hors d’agir. Ils sont placés dans un système d’assistance, qui les oblige à se faire assister d’un curateur pour conclure les actes les plus graves de la vie juridique (notamment, les ventes, les donations, et les actes de longue durée.

 

La sanction : la nullité de l’acte, nullité dont la portée varie en fonction du régime de l’incapacité, nous aurons l’occasion d’y revenir.

 

=) mineurs = automatiquement placés dans un régime d’incapacité, et jusqu’à leur majorité

=) Majeurs = un jugement doit intervenir pour que le majeur soit placé sous la protection d’un système de tutelle ou de curatelle.

 

Dans ce cas, il suffit généralement de démontrer que le jugement est intervenu avant l’acte litigieux pour en obtenir l’annulation. En dehors de l’existence de tout jugement, la protection des personnes inaptes à contracter se fait au cas par cas, comme nous allons le voir maintenant.

 

B/ L’absence de consentement

Il arrive que des majeurs juridiquement capables, concluent des actes alors qu’ils étaient hors d’état de manifester une volonté consciente.

=)  Cela peut arriver pour une personne à l’égard de laquelle un jugement d’incapacité n’est pas encore intervenu,

=) ou encore lorsque une personne, sous l’emprise de l’alcool ou de la drogue, conclut un acte alors qu’il n’était ponctuellement pas apte à mesurer les conséquences de ses actes.

 

Ces personnes ne bénéficient pas d’un régime de protection permanent, mais le droit les autorise tout de même à demander la nullité du contrat, s’ils parviennent à démontrer que, lors de la conclusion du contrat, ils n’étaient pas en mesure de donner valablement leur consentement. Aucune volonté réelle et consciente n’ayant pu être formée, il y a dans ce cas absence de consentement.

 

L’article 489 du Code civilénonce en effet : « pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit. Mais c’est à ceux qui agissent en nullité de prouver l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte ».

 

Il incombe donc à celui qui veut obtenir la nullité de démontrer :

l’existence d’un trouble mental : il n’est pas nécessaire que l’altération des facultés mentales soient totale et prive définitivement l’intéressé de toute raison. Mais il faut démontrer que ce trouble a altéré de façon suffisamment grave la capacité de compréhension, de réflexion ou de décision de l’individu. Ainsi la faiblesse de caractère, l’intelligence médiocre, ou l’état dépressif d’un individu ne suffira pas pour faire annuler l’acte. L’appréciation de la gravité du trouble mental relève du pouvoirsouverain des juges du fond, c’est-à-dire que cette notion, qui est essentiellement une notion de fait, ne sera pas contrôlée par la Cour de cassation.

– il faut également rapporter la preuve que ce trouble mental existait au moment précis de la conclusion de l’acte.

 Cette preuve étant souvent très difficile à démontrer, la Jurisprudence admet que le demandeur se contente de prouver que le trouble existait « à l’époque de l’acte », c’est-à-dire avant et après sa conclusion. L’annulation sera alors prononcée, saufsi le défendeur parvient à démontrer l’existence d’un « intervalle lucide » au moment précis de la conclusion du contrat.

S’agissant de faits juridiques, la preuve du trouble mental, comme la preuve de l’intervalle lucide est libre, et peut être rapportée partous moyens.

Sont admis à agir en nullité :

– l’intéressé ;

– son tuteur ou curateur s’il a par la suite été placé sous un régime d’incapacité ;

– ses héritiers s’il décède entre-temps.

 

Section 3 : l’objet et la cause

(Le contenu du contrat)

Contrat : Les parties veulent quelque chose de précis, pour une raison précise.

–       Rechercher ce qu’elles veulent, c’est déterminer l’objet du contrat ;

–       Rechercher pourquoi elles le veulent, c’est déterminer la cause du contrat.

 

La loi pose donc deux conditions supplémentaires pour la validité des conventions, l’une relative à l’objet (1), l’autre relative à la cause (2), que nous envisagerons successivement.

 

Sous-Section 1 : L’objet

Parmi les 4 conditions essentielles à la validité du contrat, l’article 1108 pose celle de « l’objet certain qui forme la matière de l’engagement ».

 

Cette exigence est ensuite reprise et développée dans les articles 1126 et suivants du Code civil. La création d’une obligation n’est pas abstraite, elle a pour objet une certaine prestation.

 

L’objet =  prestation que le débiteur s’engage à fournir au créancier

–       donner,

–       faire

–       ne pas faire quelque chose, selon la classification déjà exposée et selon l’article 1126du Code Civil.

 

Il en résulte qu’il y a un seul objet dans les contrats unilatéraux, et deux dans les contrats synallagmatiques.

Ex. : la vente : l’objet de l’obligation du vendeur est de livrer la chose ; l’objet de l’obligation de l’acheteur est de payer le prix.

 

Pour que le contrat soit valable, l’objet doit présenter certains caractères (§ 1). On se demandera ensuite si, dans les contrats synallagmatiques, l’équilibre entre les prestations réciproques est une autre condition de validité du contrat. Le § 2 sera donc consacré à la lésion.

§ 1 : L’existence de l’objet

Remarque : l’obligation doit avoir un objet possible

De même qu’à l’impossible nul n’est tenu, à l’impossible, nul ne peut s’engager, mais pour que le contrat ne puisse valablement se former, il faut une impossibilité absolue. Exemple : une agence de voyage propose à sa clientèle un voyage au centre de la terre.

Autre exemple: USA contrat d’assurance contre le risque d’enlèvement extraterrestre ou syndrome de la vierge marie

 

Les caractères de l’objet (certain (A), déterminé ou déterminable (B) et licite (C))

A/ L’objet doit être certain

Principe : Le contrat n’est en valable que si la chose existe lors de sa conclusion.

 

  1. Article 1601 du Code civil : « si au moment de la vente, la chose vendue était périe en totalité, la vente serait nulle »

=) Si la chose a péri avant la vente (animal mort), le contrat n’a pu être valablement conclu

 

Exceptions : la vente de chose future est licite (article 1130 alinéa 1 : « Les choses futures peuvent être l’objet d’une obligation »

 

En pratique, les contrats sur choses futures sont très fréquents. Tel est le cas des commandes adressées à des fabricants qui, au moment où ils les acceptent, n’ont pas en stock les produits qu’ils s’engagent à livrer dans le délai convenu. Autre ex : vente d’immeuble à construire (article 1601 à 1604 du Code civil)

Exception à l’exception : pactes sur succession future

 

B/L’objet doit être déterminé ou déterminable (article 1129, repris à l’article 1591 concernant la vente)

 

L’obligation doit avoir pour objet une chose déterminée ou déterminable

=) Il est évident que le débiteur ne peut souscrire un contrat sans savoir à quoi il s’engage. L’objet de l’obligation doit donc être déterminé, et cette détermination peut avoir plusieurs niveaux, selon les cas :

* Dans la plupart des obligations de faire ou de ne pas faire, la simple désignation de la prestation à accomplir suffit : en indiquant le service promis (peindre un mur – construire une maison), on satisfait à l’obligation de détermination de l’objet. Encore faut-il que les indications soient suffisamment précises pour que le débiteur sache à quoi il s’engage.

Ainsi, la Cour de cassation a considéré que l’obligation du débiteur de « faire un geste » en faveur d’un tiers manquait de précision, et que le contrat devait être annulé pour indétermination de l’objet (Cass. com. 28 février 1983, Bull. civ. IV, n° 86).

 

* Si le contrat porte sur une chose matérielle (il s’agit alors principalement d’une obligation de donner) il faudra préciser la nature de l’obligation (transférer la propriété, par la vente, l’échange ou la donation), et préciser en outre quelle est la chose matérielle qui doit être donnée.

=> Cette précision permettra de vérifier que la chose existe, qu’elle appartient bien à celui qui s’engage à en transférer la propriété

Si le contrat porte sur une chose matérielle, deux situations peuvent se présenter :

si la chose est ce que l’on appelle un corps certain, c’est-à-dire une chose qui a une identité propre (un tableau, bijou de famille, vin millésimé) alors la simple désignation de la chose suffit : telle maison, telle voiture.

si la chose est une chose fongible (qui se remplace) ou « chose de genre » (du blé, une marchandise de série), c’est-à-dire une chose qui se compte, se pèse ou se mesure, et qui interchangeables avec d’autres choses de la même espèce, alors il faudra non seulement désigner l’espèce à laquelle cette chose appartient (ex : du blé, du sable, du vin, en précisant le cas échéant la qualité), mais aussi, selon les termes de l’article 1129 du Code civil, sa quotité, c’est-à-dire en gros sa quantité (une tonne, deux litres, 3 euros).

 

Ainsi, un contrat devente de farine, sans autre précision, est dépourvu d’objet.

–       L’article 1129 du Code civil exige que la quotité soit déterminée au moment de la conclusion du contrat, ou, au moins déterminableà condition que les éléments permettant de le déterminer soient suffisamment précis 

–       Ex. : vente dont le prix sera fixé ultérieurement en fonction du cours boursier

–       importante jurisprudence : cas des contrats cadre

–       stipulant une clause d’exclusivité (ex. contrat de distribution entre une compagnie pétrolière et un pompiste)

–       article 1129 : pas applicable à la détermination du prix selon la Jurisprudence (pas d’annulation du contrat) : ex. Cour de cassation Assemblée Plénière. 1er décembre 1995

 

C/ L’objet doit être licite et moral (article 6 et 1128)

Article 6du Code civil qui énonce qu’« on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ».

Article 1128 : application particulière de l’article 6 :« Il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet des conventions »

 

 

Ex: Interdiction de conclure aucun contrat sur les choses « hors du commerce », que l’on appelle aussi les choses indisponibles.

 

Sont en général hors du commerce:

Les choses dangereuses ou choses dont le commerce est interdit ou restreint en vue de la protection de la santé publique (les remèdes secrets, les substances vénéneuses, la drogue, les animaux atteints de maladies contagieuses.

Mais : limites car certaines personnes (pharmaciens) peuvent acheter des drogues.

–       Les choses « sacrées », commela famille, l’état civil ou lecorps humain, qui sont considérés comme indisponibles. 

–       On parle du principe de l’indisponibilité  du corps humain

Ex: on ne peut vendre ou donner ou renoncer aux droits attachés à ses liens de filiation, ni son nom ou sa nationalité. Possibilité de changer de nom à certaines conditions.

Ex 2: on ne peut en principe faire aucun contrat portant sur son corps. C’est au nom des articles 6 et 1128 que la Cour de cassation a ainsi annulé les conventions de mère porteuses, en estimant qu’elles contrevenant à la fois au principe de l’indisponibilité du corps humain (celui de la mère et celui de l’enfant) qu’à celui de l’état civil (nom de l’enfant). Solution en partie reprise dans l’article 16-7 du Code civil.

 

NB : Multiplication des exceptionsau principe d’indisponibilité du corps humain :dons de sang, d’organes et de gamètes, possibilité de céder un embryon issu d’une P.M.A. et, bientôt, de faire des expérimentations dessus…

=) L’humain n’est pas une chose, mais détaché du corps, il devient une chose

– la loi du 29 juillet 1994 réglemente la cession et l’utilisation des produits du corps humain, y compris les embryons. La seule chose qui reste du tabou originaire est l’interdiction de toute contrepartie pécuniaire (article 16-5du Code Civil.).

– une directive CEE du 14 juin 1989 du conseil des communautés européennes qualifiant le sang et le plasma humains de matières premières et leurs dérivés de « médicaments »

 

§ 2 : L’équivalence des prestations : la lésion

La lésion est le préjudice résultant, pour l’une des parties à un contrat, d’un défaut d’équivalence entre l’avantage qu’elle obtient et le sacrifice qu’elle consent. Un vendeur est lésé s’il vend trop bon marché ; un acheteur, s’il paie trop cher.

 

Le problème est de savoir s’il y a dans la lésion une cause de nullité du contrat, ou au moins de modification par le juge des conditions stipulées dans la convention.

 

A/ Le principe

Le Code civil considère que, en principe, la lésion n’affecte pas la validité des contrats.

 

La raison en est que, conformément au principe d’autonomie de la volonté, les parties ont librement fixé les prestations respectives

 

Faisant prévaloir la liberté contractuelle, le droit refuse d’annuler le contrat sur des considérations de valeur comparée des prestations réciproques.

 

B/ Les exceptions

En droit positif, aux termes de l’article 1118 du Code civil « la lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats et à l’égard de certaines personnes » :

 

à l’égard de certaines personnes : la plupart des actes accomplis par un incapable (les mineurs et les majeurs en tutelle) sont susceptibles d’annulation (on parle alors de rescision) de l’acte s’il est démontré que l’acte est lésionnaire : mineurs non émancipés (article 1305du Code Civil.)

 

dans certains contrats : Initialement, et conformément à la tradition romaine, le Code civil ne prévoyait que deux cas : le partage pouvait être rescindé en cas de lésion de plus du quart (famille) (article 887, al. 2), et la vente d’immeuble, rescindable en cas de lésion de plus des 7/12ème (patrimoine) (article 1674).

Des dispositions légales sont par la suite intervenues, pour sanctionner la lésion dans contrats aussi divers que variés : vente d’engrais, contrat d’assistance maritime, prêt à intérêt… (+ article 491-2 ; article 510-3)

La sanction varie selon les cas, mais les lois ultérieures préfèrent la révision du prix que la rescision pure et simple.

Résultats: multiplication des systèmes particuliers, perte de cohérence.

 

*   *

 *

L’objet doit donc être certain, déterminé ou déterminable et licite, sans qu’il soit en principe nécessaire que l’objet d’une obligation soit d’une valeur équivalente à l’objet de la prestation réciproque.

 

Sous-Section 2 : La cause

Analyser le consentement répond à la question : est-ce que les parties ont voulu s’engager?

Analyser l’objet répond à la question : à quoi les parties ont-elles voulu s’engager ?

Analyser la cause est répondre à la question : pourquoi les parties ont voulu le contrat ?

 

Or, l’article 1108 du Code Civil subordonne la validité d’une convention à l’existence d’une cause licite dans l’obligation et les articles 1131 et suivants reprennent cette exigence en la précisant.

 

La cause, est la justification du contrat.

L’existence de la cause (§1) et sa licéité (§2)

 

§ 1 : L’existence de la cause

Aux termes de l’article 1131 du Code Civil « l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause… ne peut avoir aucun effet ».

 

Remarque : la notion de « fausse cause » suppose une erreur du débiteur, qui a cru à une cause qui n’existait pas. Cette notion n’est donc qu’un cas particulier d’absence de cause, et ne fera pas l’objet d’un traitement particulier. Le cocontractant croyait que la cause existait alors qu’elle n’existait pas. Par exemple : j’achète un débit de boissons en ignorant que l’administration en interdit l’exploitation.

 

A/ La notion de cause objective

Systématisée sous l’Ancien droit par le juriste DOMAT, cette théorie consiste à définir la cause comme le but en vue duquel les parties ont contracté.

Mais ce but est un but objectif, spécifique à chaque type de contrat, et indépendant des mobiles personnels des parties.

– Ainsi, dans les contrats synallagmatiques, l’obligation de chaque partie a pour cause celle qui est assumée par l’autre partie : les obligations réciproques se servent mutuellement de cause.

Ex: Dans la vente, l’obligation du vendeur a pour cause le paiement du prix par l’acquéreur. Inversement, l’obligation de l’acquéreur a pour cause le transfert de la propriété par le vendeur. En fait, l’objet de l’obligation de l’une des parties constitue la cause de l’obligation de l’autre partie;

– Dans les contrats unilatéraux à titre onéreux, l’engagement de la partie qui s’oblige a pour cause la prestation antérieurement assumée par l’autre.

Ex: Contrat de prêt = contrat réel. L’obligation de l’emprunteur (rendre avec intérêt) a pour cause la remise des fonds prêtés.

– Dans les contrats unilatéraux à titre gratuit, la cause ne peut être que la volonté de faire un sacrifice sans contrepartie : ici, la cause réside dans l’intention libérale du donateur.

 

B/ L’utilité de la notion de cause objective

La théorie classique de la cause permet de faireannuler l’entier contrat s’il s’avère que la cause de l’une ou l’autre obligation n’existe pas.

Ainsi, le contrat de vente sera annulé si la chose vendue n’existe pas, ou qu’elle n’appartient pas au vendeur. L’objet de l’obligation du vendeur est inexistant, le contrat doit donc être annulé. Avec la disparition de l’objet de l’obligation du vendeur disparaît la cause de l’obligation de l’acheteur, qui doit donc également être annulé => le contrat disparaît.

 

=> La théorie de la cause, comme celle de l’objet, permet de mettre en valeur l’interdépendance des obligations, et permet également d’éviter qu’une des prestations subsiste après annulation de l’autre. Sans la théorie de la cause, l’acquéreur resterait tenu de payer le prix bien que l’objet vendu n’existe pas. La cause joue ici comme un instrument d’équité, pour éviter qu’une partie reste tenue alors que l’autre est déliée.

 

Les tribunaux annulent aussi pour absence de cause les contrats où la prestation promise par l’une des partie ne présente aucune utilité pour l’autre, ou qu’elle est privée de son principal intérêt.

Ex TD: Contrat Chronopostcontient une clause qui limite l’indemnité due en cas de retard dans la livraison. La Cour de cassation a estimé que l’obligation essentielle de Chronopost était de livrer dans un délai déterminé et que la clause de limitation de responsabilité avait pour effet de priver de tout intérêt la souscription du contrat par le client (je paie plus cher que La Poste pour avoir un service rapide et sûr – si une clause limite la responsabilité de Chronopost en cas de retard, je paie en fait pour rien, puisque je n’ai aucune garantie).( arrêt Chronopost rendu par la Ch. com., le 22 octobre 1996 (Bull. civ., IV, n°261 ; D. 1997, 121 ; Rép. Defrénois 1997, 333, n. D. Mazeaud).)

=> la clause privait de cause l’obligation du client. La Cour de cassation refuse d’en faire application, en la réputant non écrite.

Souhaitant participer à une adjudication (concours), une société remet une enveloppe renfermant sa soumission à la société Chronopost qui s’engage à la faire parvenir au destinataire, au plus tard le lendemain de son envoi avant midi. « Maître du temps », selon la publicité bien connue, Chronopost contracte ainsi, en contrepartie du surcoût payé par l’expéditeur, une obligation de célérité et de ponctualité. L’enveloppe étant parvenue à son destinataire après l’heure promise, c’est-à-dire trop tard pour être admise dans la procédure d’adjudication, l’expéditeur réclame réparation de son préjudice à Chronopost. Celui-ci lui oppose une clause du contrat qui limite l’indemnisation du retard au prix du transport acquitté. Se fondant sur l’article 1131 du Code civil, la Cour de cassation décide que la clause limitative de responsabilité doit être réputée non écrite car elle contredit la portée de l’engagement pris par Chronopost, « spécialiste du transport rapide garantissant la fiabilité et la célérité de son service ». En d’autres termes, en limitant à une somme forfaitaire faible l’indemnisation due par Chronopost en cas d’inexécution de son obligation de rapidité et de fiabilité, le contrat prive de cause l’engagement de l’expéditeur, car le supplément de prix payé pour l’envoi du pli avait pour contrepartie l’obligation pour un professionnel du transport rapide de livrer en temps et en heure.

 

 

C/ Preuve et sanction de l’existence de la cause

–       preuve

Le plus souvent, le titre qui constate l’obligation du débiteur en indique aussi la cause : dans l’acte de vente, la cause de l’obligation de l’acheteur résulte de la mention de la chose vendue ; la seule production du titre établit la cause. Si le débiteur soutient que la cause est absente par ce que la chose, objet de l’obligation du vendeur n’existe pas, il lui appartiendra de le démontrer.

Mais il se peut que le titre n’indique pas la cause : « je reconnais devoir à X la somme de « tant » » ; or une promesse de payer n’est juridiquement efficace que si elle est motivée (par une intention libérale, par exemple). L’instrumentum n’indique pas la cause mais son existence est présumée du seul fait que la promesse est produite. Le débiteur qui veut se soustraire à son obligation devra démontrer l’absence de cause. (cf. interprétation donnée à l’article 1132, Code civil)

– Quant à la sanction, la jurisprudence se prononce pour une nullité absolue, le contrat étant dépourvu d’un de ses éléments essentiels.

Mais =) Cour de cassation chambre Civ. 1re, 9 novembre 1999 (D.2000, 507) : la nullité d’un contrat d’assurance pour absence d’aléa est une nullité relative. Fait prévaloir le fondement de la protection sur gravité du vice qui affecte l’acte

Approbation doctrine : l’absence de cause (ou le défaut de contrepartie) n’a de sens que par rapport au contractant qui s’est engagé en pure perte. La nullité est donc protectrice de ses seuls intérêts. Donc : nullité relative.

Mais parfois, plutôt que d’anéantir le contrat dans sa totalité, certaines décisions récentes se contentent de réputer non écrite une clause particulière au motif que celle-ci prive l’un des contractants de la contrepartie nécessaire.

On est alors en présence d’une nullité partielle qui s’explique par le fait que l’annulation totale du contrat se retournerait contre celui que le juge entend protéger. Par ce biais, la jurisprudence parvient à supprimer des clauses abusives dans des hypothèses où l’article. L. 132-1, Code de la consommation, n’est pas applicable, le contrat ayant été conclu entre deux professionnels.

+ Cour de cassation, Chambre Civil  1re, 20 février 2001, Société Cubic Défense c./ CCI, Bull. civ., I, n°39 (contrats – cause – absence) =) Dès lors que la Cour d’appel retient que la demande en nullité du contrat pour défaut de cause ne visait que la protection des intérêts de la partie demanderesse, elle justifie sa décision soumettant cette nullité relative à la prescription de 5 ans de l’article 1304du Code Civil.

 

*   *

 *

 

Le problème est que la théorie classique de la cause permet de vérifier l’existence de la cause, mais ne permet pas d’assurer une protection parfaite de l’ordre public et des bonnes mœurs.

Certains contrats sont réguliers quand on les envisage objectivement, mais ont été subjectivement déterminés par la recherche d’une fin illicite ou immorale.

Exd’un contrat de vente d’un immeuble. L’immeuble existe, le transfert de propriété s’effectue, le prix est payé. Au regard de la théorie classique, le contrat est parfaitement valable. Mais si l’acquéreur a acheté l’immeuble dans le but d’y installer une maison de tolérance (maison close), en principe prohibé par la loi du 13 avril 1946 => la notion objective de cause est souvent impuissante à annuler des contrats conclus à des fins illicites ou immorales. D’où naissance d’une autre théorie moderne de la cause, qui est venu pallier les insuffisances de la théorie classique.

 

§ 2 : La licéité et la moralité de la cause

Il ne suffit pas que la cause existe, il faut encore qu’elle soit licite.

Article 1131 du Code civil : « L’obligation… sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet »

Le contrôle de la licéité de la cause permet de vérifier la rectitude des mobiles des contractants. Cette condition n’est pas posée dans un souci de protection des intérêts individuels mais dans un souci de protection de l’intérêt général.

De fait, il est précisé :

Article 1133 du Code civil: « La cause est illicite quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs ».

 

C’est surtout ici la cause subjective, lointaine, qui permettra d’examiner la licéité de la cause.

=) Ainsi, l’achat ou la location d’un immeuble, considéré objectivement, est toujours licite. Mais ce qui pourra ne pas l’être, c’est la destination concrète que l’acquéreur entend donner à l’immeuble (y établir une maison de tolérance, par exemple).

 

A/ La notion de cause subjective

(Ou cause du contrat)

Selon les auteurs modernes, approuvés par la jurisprudence, lorsqu’il faut apprécier la licéité de la cause, il ne s’agit plus d’examiner la cause de l’obligation, mais la cause du contrat, ou cause subjective, c’est-à-dire les mobiles qui ont conduits les parties à conclure la convention. Si ces mobiles sont contraires à la loi, à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, le contrat sera nul.

 

Ex : Comprise comme l’intention libérale, la volonté abstraite de gratifier une personne, la cause sera toujours licite. Ce qui pourra ne pas l’être, ce sont les mobiles, les motifs qui animent le disposant, par exemple obtenir une faveur, des services que la loi ou la morale réprouvent. On décidait par exemple traditionnellement qu’une donation faite à une concubine était nulle si elle avait pour cause, dans la pensée des contractants, l’établissement ou le maintien de rapports immoraux.

Voir arrêt Civ. 1, 3 février 1999

 

En réalité, tous les mobiles ne sont pas pris en compte, et la Jurisprudence pose deux conditions à l’annulation du contrat : (mais en réalité, aujourd’hui, il n’en reste plus qu’une)

1- Le mobile retenu doit être la « cause impulsive et déterminante » du contrat,c’est à dire celle qui a conduit la partie à conclure le contrat. Sans laquelle le contrat n’aurait pas été conclu ;

2- Ce motif déterminant doit avoir étécommun aux deux parties, i.e. le dessein illicite ou immoral doit avoir été connu de l’autre partie (cf. erreur commune : le contractant de bonne foi ne doit pas se voir imposer une annulation fondée sur une illicéité ou une immoralité dont il ne s’est pas aperçu). 

Par là, il ne fallait pas entendre l’exigence d’une fin commune poursuivie par les deux parties mais seulement celle d’un motif entré dans le champ contractuel (Civ. 1re, 12 juillet 1989). On voulait ainsi assurer la sécurité des relations juridiques et protéger le cocontractant de bonne foi. Celui-ci n’avait pas à supporter une annulation fondée sur un motif illicite ou immoral qu’il n’a pas connu.

Cette solution avait toutefois suscité de vives critiques. Visant à contrôler la conformité de la convention à l’ordre public, l’exigence d’une cause licite intéresse au premier chef l’intérêt général. Or, en exigeant que le mobile illicite ou immoral qui anime l’un des contractants ait été connu de l’autre, la solution présentait l’inconvénient de raréfier les annulations et aussi d’atténuer son rôle moralisateur. De plus, même du point de vue des intérêts particuliers, la solution retenue n’était pas plus satisfaisante lorsque le demandeur en nullité n’était pas celui qui connaissait le mobile illicite, mais celui qui l’ignorait. Donc, loin de protéger le contractant irréprochable, l’exigence d’un mobile illicite commun aux deux parties se retournait contre lui.

Aussi certains auteurs ont-ils proposé qu’on ne préoccupe pas de savoir si le but illicite avait été connu de l’autre partie.

=) Cette suggestion a finalement été entendue et une nouvelle solution a été posée dans un arrêt de la Civ. 1re, 7 octobre 1998, époux Malvezin (D. 1998, 563, concl. Sainte-Rose ; 1999, somm., 110, obs. Delebecque, chron. Tournafond, p. 237 ; J.C.P. 1998, II, 10202, n. Malville ; 1999, I, 114, obs. Jamin ; Rép. Defrénois 1998, 1408, obs. D. Mazeaud).

=) La Cour de cassation a en effet posé qu’un contrat pouvait être annulé pour cause illicite ou immorale même lorsque le motif qui a déterminé l’une des parties à conclure ce contrat n’a pas été connu de l’autre.

Il est à noter cependant que l’exigence d’un motif immoral connu des deux parties n’était posée que pour les contrats à titre onéreux. Pour les libéralités, il suffisait et il suffit toujours que le mobile illicite ait été déterminant dans l’esprit du disposant.

 

B/ La conformité de la cause à l’ordre public et aux bonnes mœurs

Pour pouvoir apprécier la licéité de la cause, il faut d’abord encore savoir ce que contient la notion d’ordre public et de bonnes mœurs.

Contrairement à ce que pourrait laisser penser l’article 6 du Code civil (« on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs »), ces notions ne trouvent pas uniquement leur source dans la loi, et il n’est pas exigé qu’un texte soit enfreint pour que la nullité soit prononcée.

La Jurisprudence a également un rôle non négligeable dans la détermination de ce qui donne uncaractère « illicite » à l’objet ou à la cause d’un contrat. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne la notion de bonnes mœurs, qui a une connotation principalement morale, et à propos de laquelle peu de textes ont été adoptés. Cela est également vrai pour l’Ordre Public car, si la loi énonce parfois expressément le caractère impératif d’une disposition (ex, article 1388, qui dispose que les époux ne peuvent déroger aux droits et obligations découlant du mariage et de l’autorité parentale), cette précision fait souvent défaut, et c’est alors la Jurisprudence qui donne à la règle son caractère impératif).

Si on ajoute à cela le fait que l’Ordre Public et les Bonnes Mœurs sont des notions variables dans le temps, on comprend qu’il soit difficile d’en dresser une liste exhaustive.

Pour se faire une idée de ce que représente cette notion, on peut dire d’abord que les bonnes mœurs font partie intégrante de l’ordre public. On ne sanctionne les conventions contraires aux bonnes mœurs que parce qu’elles portent atteinte à l’Ordre Public.

Reste à définir ce qu’est l’Ordre Public. On a coutume de distinguer l’Ordre Public classique à l’Ordre Public économique et social.

 

1) L’ordre public traditionnel

 

L’ordre public traditionnel est un OP politique. Il tend à sauvegarder des principes permanents de civilisation. A travers ces principes, on vise à protéger trois institutions particulières, qui sont considérés comme les piliers de la société :

 

1°) L’Etat et les services publics: la plupart des lois constitutionnelles, fiscales et pénales sont d’Ordre Public ;

 

2°) La famille: les particuliers ne peuvent ni créer leurs rapports de famille dans des conditions différentes que celles prévues par la loi, ni leur faire produire d’autres effets. Ex : article 1388 du Code civil précité ; nullité des conventions de séparation amiable des époux ; nullité des conventions de mère porteuses, cf. TD.

 

3°) La morale :        

– nullité des conventions qui portent atteinte au respect dû à la personne humaine (jeter de nains ; convention de strip-tease ; racolage) ;

– nullité des conventions qui tendent à la réalisation d’un gain immoral (le gagnant au jeu ne peut pas agir en justice contre le perdant qui ne l’a pas payé ;

– nullité des conventions contraires à la morale sexuelle (contrats tendant à l’établissement ou à l’exploitation d’une maison de tolérance)

On touche là à la notion de Bonnes Mœurs, et à son caractère très évolutif.

Evolution jurisprudentielle très fameuse : Jusqu’à février 1999,la Jurisprudence considérait comme nulles les libéralités entre concubins qui avaient pour objet d’établir, de maintenir ou de rétablir les relations sexuelles entre les deux. De même, la Jurisprudence considérait comme nulle la libéralité faites pour entretenir des relations adultères.

Le 3 février 1999, la Cour de cassation a mis un terme à cette jurisprudence, en considérant que « n’est pas contraire aux bonnes mœurs la cause de la libéralité dont l’auteur entend maintenir la relation adultère qu’il entretient avec le bénéficiaire ».

 

2) L’ordre public économique et social

 

La naissance de l’OPES correspond au déclin du libéralisme, et de l’autonomie de la volonté. Il est l’instrument des réformes sociales, et vise à intervenir dans les rapports pécuniaires des individus, pour les rendre plus équitables, ou pour mieux les ordonner en considération de l’intérêt général.

Cet Ordre Public est d’origine légale plus que jurisprudentielle. Il se traduit par la multiplication des dispositions impératives

On a coutume de distinguer, dans l’Ordre Public Economique et Social, deux sous-catégories, en fonction de l’objectif poursuivi :

– l’Ordre Public Economique et Socialde direction, qui tend à réaliser une organisation et un équilibre économique : ex : réglementation des prix et de la concurrence ; Ces règles sont édictées dans l’intérêt général.

– l’Ordre Public Economique et Socialde protection, qui vise à assurer la protection de la partie la plus faible, dans les contrats où il existe une forte inégalité entre les parties. Ex : réglementation en matière de droit du travail, ou de droit de la consommation ; Elles sont prises au profit d’un intérêt particulier.

 

Mais il est souvent difficile de distinguer ce qui relève de l’une ou de l’autre catégorie, parce que les objectifs sont souvent mêlés (augmentation des salaires => protection et augmentation du pouvoir d’achat), comme il est parfois difficile de distinguer OP traditionnel de OPES. Les distinctions ont pourtant quelques implications en ce qui concerne lanature de la nullité encourue, c’est ce qu’on va voir maintenant.

 

 

C/ preuve et sanction de la cause illicite

preuve

Quant à la licéité, la cause est présumée licite ; il appartient à celui qui prétend qu’une cause est illicite de le démontrer. Par conséquent, c’est sur le débiteur que pèse la charge de la preuve, car il a intérêt à faire annuler le contrat. En général, il peut faire cette preuve par tous moyens, sans que l’illicéité ou l’immoralité ressorte nécessairement de l’acte, textuellement et intrinsèquement.

– sanction : nullité absolue

On justifie cette solution en suggérant qu’un contrat dépourvu de cause serait contraire à l’intérêt général car il ne remplirait pas sa fonction sociale d’échange.

En revanche, alors que l’annulation d’un contrat implique en principe la restitution mutuelle des prestations, le contrat annulé pour cause immorale a cette conséquence que celui qui se prévaut de son immoralité ne peut obtenir la restitution de sa prestation (nemo auditur…)

 

De tout ceci on s’aperçoit et on mesure l’importance de la licéité de la cause. La cause est en effet le moyen juridique essentiel qui permet de contrôler la conformité du contrat à l’ordre public et aux bonnes mœurs

 

Chapitre 2 : la forme du contrat

=) La forme du contrat est en principe libre 

=)c’est le principe du consensualisme

=)  Un contrat est valable et efficace même s’il n’a pas été « signé ».

–       On se fie alors au respect de la parole donnée. Le principe assure aussi la rapidité des transactions.

–       Dangers : risque de s’engager à la légère, sans avoir mesuré la portée de l’engagement

 

=) c’est pourquoi notre droit positif a instauré un minimum de formalisme. Le formalisme s’oppose au consensualisme.

=) deux fonctions à ce formalisme :

  • exigé parfois pour la validité même du contrat

Sanction= nullité du contrat

  • exigé parfois pour la seule efficacité pratique du contrat : preuve, publicité du contrat

Sanction= le contrat n’est pas nul, mais sa portée reste limitée : le contrat mais ne pourra être prouvé, exécuté, etc.

Section 1 : La forme exigée pour la validité du contrat

=) Lorsqu’une forme est imposée à titre de condition de validité du contrat, on dit que le contrat est un contrat solennel.

=)  Le but de ce formalisme est de protéger les parties ou l’une d’elles.

Mais le principe étant le consensualisme, seul un texte peut imposer une exigence de forme.

Ex : loi du 3 janvier 1967 qui exige que les ventes de navires soient faites par écrit « à peine de nullité ». (Il peut y avoir quelques doutes lorsque la loi exige un écrit mais sans préciser qu’il l’est « à peine de nullité »)

                                              

Il y a plusieurs formes possibles :

–       l’acte notarié : le notaire est censé éclairer les parties sur la portée de leur engagement

=) donations (article 931) ; contrat de mariage (article 1394) 

Remarque : la vente d’immeublen’est pas un contrat solennel, même si en pratique elle est conclue par acte notarié pour les besoins de la publicité foncière.

–       l’acte écrit, sous seing privé : c’est un écrit qui peut revêtir n’importe quelle forme (même un simple bon de commande).

 

 

Mais souvent, les textes exigent aussi desmentions impératives : indication des résultats des 3 dernières années dans la vente de fonds de commerce ;

–       Ils peuvent exiger aussi des formulaires annexes : formulaire détachable de réponse ou de dédit (démarchage à domicile, crédit mobilier)

–       On peut encore exiger des mentions manuscrites : pour la caution (personne physique) d’un prêt

 

Sanction de ces exigences : nullité du contrat ou bien la clause peu lisible, par exemple, sera réputée inexistante.

 

Autres formalités exigées pour la validité du contrat :

–       contrat réel : ce contrat ne se forme définitivement que par la remise de la chose : dons manuels, gage (article 2073), prêts d’argent consentis par des particuliers (article 1875 et 1892) (mais autres prêts d’argent, dépôt, sont devenus des contrats consensuels)

La remise de la chose s’appelle « tradition »

–       contrats soumis à autorisation ou homologation : contrat modifiant le régime matrimonial (article 1397) ; vente des éléments d’actif d’une entreprise en difficulté (art. L. 622-16 du code de commerce), à peine de nullité absolue.

autorisations administratives préalables à la vente de certains biens, tels que les immeubles classés monuments historiques, les HLM, les immeubles intégrés dans un périmètre de rénovation urbaines. Idem pour les offices ministériels, ou les biens destinés à être vendus aux enchères.

– Exigence d’une notification au bénéfice des personnes bénéficiant d’un droit de préemption (preneur du bail rural, Musées nationaux, SAFER, locataire de l’immeuble, etc…)

–       Formalités civiles diverses : la loi du 11 juillet 1975 sur la sous-traitance, qui impose de fournir au sous-traitant une caution bancaire

–       Exigences d’ordre fiscal : en principe l’enregistrement d’un acte n’entraîne que des sanctions d’ordre fiscal, mais exceptionnellement, la formalité est exigée pour la validité : les promesses unilatérales de vente portant sur des immeubles ou des fonds de commerce doivent être enregistrées dans les dix jours (article 1840 A, CGI)

 

Section 2 :
La forme exigée pour l’efficacité du contrat

En dehors des cas limités que nous venons de voir, le contrat est valable dans tous les cas, du seul fait de l’échange des consentements, sans autre formalité.

D’ailleurs, le terme « contrat » désigne l’accord juridique ; on devrait utiliser le terme « acte » pour désigner le document écrit.

Principe du consensualisme

Exceptions : des formes peuvent être exigées. Pour : preuve, exécution, opposabilité

1 : Formalisme pour la preuve du contrat

Lorsqu’une forme est imposée pour la preuve du contrat, on dit que la condition est requise ad probationem.

Il faut prouver existence du contrat et contenu du contrat.

Plusieurs questions à résoudre (rappel du cours de 1re année) : charge de la preuve (article 1315), etc.

Cas où l’écrit est exigé :

–       contrats supérieurs à 800 € (article 1341). Autres modes de preuve non recevables.

Exception : contrats conclus par un commerçant (article 109, C. com. ; L. 110-3) ; impossibilité de l’écrit ; CPE

–       cautionnement (article 2015) ; contrat d’apprentissage (art. L. 117-12, C. trav.)(VERIF)

 

Notion d’écrit :

–       Depuis la loi du 13 mars 2000, de nouvelles dispositions du Code civil (article 1316 à 1316-4) admettent l’écrit sous forme électronique, au même titre que l’écrit sur support papier

–       Acte authentique : reçu par un officier public, il fait foi jusqu’à inscription de faux

–       Acte sous seing privé

2 : Formalisme pour l’opposabilité du contrat.

En principe, tous les actes juridiques sont opposables aux tiersdu fait même de leur conclusion. Mais la loi impose parfois certaines formalités particulières destinées à informer les tiers de l’existence de l’acte, et ces formalités sont érigées en conditions d’opposabilité de l’acte.

 

Il existe encore parfois des exigences de publicité, notamment pour les biens stables et importants :

–       les ventes d’immeubles font l’objet d’une publicité foncière. Tant que cette publicité n’est pas assurée, les tiers sont en droit de faire comme si l’acte n’avait pas été conclu, et que l’immeuble était resté la propriété de l’acquéreur.

–       inscriptions, immatriculations : fonds de commerce, avions, navires, automobiles, brevets, marques, chevaux de course, société…

De même les transferts de droit sur ces biens doivent être transcrits pour être opposables aux tiers.

 

=> Bien distinguer les différentes conditions de forme, en fonction de l’objectif en vue duquel elles sont édictées : Ni les formalités probatoires, ni celles qui sont requises pour l’opposabilité aux tiers n’ont d’influence sur la validité de l’acte. Seuls les contrats solennels sont nuls en cas d’irrespect des conditions de forme.

 

Sous-Titre 2 : La sanction des conditions de formation du contrat : La nullité du contrat

Il n’existe aucun contrôle préventif (le risque n’est pas non plus exclu dans les contrats solennels)

Seule une sanction intervenant a posteriori est concevable : il faudra annuler le contrat irrégulier, de manière à le priver d’effet, et à détruire ce qu’il avait créé.

 

Inconvénients= annulation est toujours préjudiciable pour une des parties, et elle l’est souvent pour les tiers.

 

Sanctions possibles / non respect des conditions de formation du contrat =

–       La nullité

–       La sanction pénale

–       Les dommages- intérêts : règles de responsabilité civile = comportement fautif d’une des parties, dans la mesure où celui-ci a causé un dommage à l’autre.

Mais avant d’aller plus avant, il convient de préciser la notion et de la différencier d’autres notions voisines.

Ensuite : mise en œuvre des nullités et conséquences de la nullité

 

Section 1 : La notion de nullité

Définition/ distinction

§ 1 : Définition de la nullité

Définition: La nullité se caractérise par deux éléments fondamentaux : ses causes et ses effets

 

=)  Quant aux causes qui la provoquent

–        Absence d’une des 4 conditions de formation du contrat (conditions de fond : consentement, capacité, objet, cause)

–       Dans les contrats solennels, l’inobservation des formes requises sera une cause supplémentaire de nullité.

–       Dans les contrats spéciaux, d’autres conditions pourront être érigées par la loi ou par la Jurisprudence comme des conditions de formation du contrat nécessaires à sa validité.

 

=)  Distinction : nullité / caducité, qui vient frapper le contrat lorsqu’une condition de validité du contrat vient à disparaître en cours de contrat.

Ex: Le contrat de location est valable, mais le local loué est détruit en cours de bail : l’objet disparaît ; le contrat est caduc.

=)  Distinction nullité/ résolution, qui intervient lorsque le contrat est valable, mais qu’une des parties ne l’exécute pas correctement.

Ex: l’acheteur ne paie pas le prix prévu dans le contrat de vente. Le vendeur peut, à certaines conditions, demander la résolution du contrat.

 

=) Quant aux effets produits, la nullité entraîne la destructionrétroactive du contrat

–       Distinction nullité / caducité et de la résiliation,qui n’ont d’effet que pour l’avenir.

–       La résiliation du contrat survient en cas d’inexécution du contrat, quand celui-ci est à exécution successive.[Ex : contrat de travail : on ne peut pas anéantir le contrat rétroactivement, dans la mesure où, si le salarié peut éventuellement restituer les salaires qu’il a perçus, il est difficile d’envisager que l’employeur restitue le travail dont il a bénéficié.]

La résiliation est en fait la résolution des contrats successifs, elle n’a d’effet que pour l’avenir.

[Les effets distinguent encore la nullité de l’inopposabilité, qui a des effets relatifs, c’est-à-dire qu’ils ne se produisent qu’à l’égard de certaines personnes. Au lieu d’être considéré comme n’ayant jamais existé, le contrat continue de produire ses effets à l’égard des parties, mais il peut être méconnu par les tiers, ou par certains d’entre eux. Cela est généralement le cas quand les formalités de publicité légale ne sont pas accomplies. Ainsi, l’hypothèque non publiée reste valable entre les parties, mais n’est pas opposable aux autres créanciers du propriétaire de l’immeuble, qui peuvent refuser de passer après le créancier hypothécaire lors du paiement des différentes créances.]

 

§ 2 : Distinction entre nullité relative et absolue

La distinction entre nullité relative et nullité absolue est une distinction fondamentale, qui repose essentiellement sur la nature des intérêts protégés par la nullité.

 

La nullité absolue du contrat : parmi les dispositions légales, certaines tendent à assurer la sauvegarde de l’intérêt général. C’est le cas lorsque l’objet ou la cause sont contraire aux bonnes mœurs ou à l’Ordre Public politique *, ou à l’Ordre Public économique de direction.

La nullité relative du contrat : d’autres règles ne sont édictées que pour assurer la protection d’une personne déterminée.

=)  cas pour les règles relatives à l’absence de consentement, aux vices de consentement, et à l’incapacité

=)  cas encore lorsque le contrat est annulé pour absence decause, qui ne préjudicie pas à l’intérêt général, mais seulement à celui qui s’engage sans contrepartie.

(cf. : revirement de Jurisprudence Cour de Cassation. 1ère civ. 9 novembre 1999 – SCREG c/ G.F.A. : Absence d’aléa dans un contrat d’assurance souscrit après le sinistre => nullité relative, ne pouvant être demandée que par l’assureur).

 

=)  cas enfin pour toutes les règles qui entrent dans l’Ordre Public de protection.

 

[La distinction est toutefoisdifficile à justifier dans certains cas. Il est notamment souvent difficile de savoir si les règles de formes sont édictées pour protéger l’intérêt général ou l’intérêt particulier. La tendance dominante est toutefois d’y voir, dans tous les cas, une cause de nullité absolue.]

=) la distinction nullité relative / absolue est d’une grande importance pour la mise en œuvre des nullités.

 

Section 2 : La mise en œuvre des nullités

=) qui peut invoquer la nullité ?

=) dans quels délais ?

=)  et pour produire quels effets ? (= extinction du droit d’invoquer la nullité)

§ 1 : Les personnes qui peuvent invoquer la nullité

Nullité conventionnelle :

–       sans avoir recours au juge

–       les parties constatent la nullité du contrat, et en tirent elles-mêmes les conséquences.

Nullité judiciaire :

–       le plus souvent, les parties ne sont pas d’accord sur le principe de la nullité, ou sur les effets de cette nullité

–        Le recours au juge est alors nécessaire.

–       peut être demandée par voie d’action, c’est-à-dire qu’une personne prend l’initiative d’intenter un procès, pour faire prononcer la nullité. Ce sera le cas lorsqu’un contractant, qui a déjà exécuté sa prestation, veut obtenir la restitution de ce qu’il a fourni.

–       peut également être obtenue par voie d’exception, c’est-à-dire comme moyen de défense. Ce sera le cas lorsque le défendeur, se voyant réclamer l’exécution de son obligation, invoque la nullité du contrat, pour éviter d’avoir à s’exécuter.

 

I- LE DROIT d’INVOQUER LA NULLITE ABSOLUE

 

– La nullité absolue étant instituée pour protégerl’intérêt général,

droit français : principe général de procédure, « Pas d’intérêt, pas d’action ». (Article 31 NCPC), qui veut que seules sont admises à agir en justice les personnes qui ont un intérêt personnel et actuel à agir

Prenant en compte cette nécessité et cette contrainte, la loi ouvre d’abord le droit d’invoquer la nullité absolue à « toute personne intéressée ».

Les personnes intéressées sont celles concernées par l’acte litigieux.

-Les parties à l’acte,

– si incapacité, son représentant légal

– Si la partie décède, son action sera transmise à ses héritiers

 

 

(Distinguer ayant cause à titre universel et particulier)

=) ayants cause universels (Celui qui a acquis l’universalité des biens de son auteur ou une quote-part de cette universalité (héritier légitime – légataire universel ou à titre universel). Recueille en principe tous les droits et obligations.).

=) ayants cause à titre particulier des parties au contrat (Celui qui a acquis de son auteur un ou plusieurs droits déterminés (acheteur – donataire – légataire particulier d’une chose ou d’une somme d’argent) auquel sont transmises les créances relatives au bien acquis (mais non les obligations).

Ceux-ci sont intéressés dans la mesure où leur situation est affectée par le contrat conclu par leur auteur. Ainsi, l’acquéreur d’un immeuble loué, tenu en vertu de l’article 1743 du Code civil de respecter le bail conclu par son auteur, pourra se prévaloir de la nullité de celui-ci.

 

Les créanciers des parties seront également admis à agir en nullité, si le contrat a appauvri leur débiteur.

 

L’action est également ouverte au Ministère public, dans la mesure où il est chargé de veiller à la bonne exécution des lois. Il ne pourra toutefois agir que lorsque la nullité est fondée sur des raisons d’ordre public : principalement pour immoralité ou illicéité de la cause.

 

– Le juge peut enfin soulever d’office la nullité de l’acte, dans un procès où l’un des plaideurs aurait négligé de l’invoquer (article 12 NCPC). Le juge est toutefois tenu de respecter le principe du contradictoire, et doit inviter les parties à présenter leurs observations sur la nullité encourue.

 

II- LE DROIT D’INVOQUER LA NULLITE RELATIVE

 

Les nullités relatives sont uniquement destinées à protéger des intérêts particuliers.

Si la personne protégée ne se sent pas lésée par le contrat, il n’y a pas de raison d’en prononcer la nullité dès lors que l’intérêt général n’est pas contrarié.

C’est pourquoi la loi n’ouvre l’action qu’à la seule partie que la nullité tend à protéger. L’action est au contraire refusée à l’autre partie.

ex: En matière d’absence ou de vice de consentement, d’incapacité, ou d’absence de cause, l’action sera ouverte à la seule partie dont le consentement a été absent, vicié, ou altéré, ou à la partie qui souffre de l’absence de cause.

 

Si la partie est un incapable, l’action en nullité sera intentée par son représentant légal, ou par l’incapable lui-même avec l’assistance de son curateur.

L’action est transmise aux héritiers, et peut éventuellement être exercée par les créanciers de la personne protégée, si les conditions de l’action oblique sont réunies.

 

§ 2 : L’extinction du droit d’invoquer la nullité

Le droit d’invoquer la nullité n’est pas éternel. La personne habilitée à invoquer la nullité peut perdre ce droit, par la confirmation ou la prescription.

 

A/ La confirmation

La confirmation est l’acte unilatéral par lequel une personne qui peut demander la nullité d’un acte renonce à se prévaloir des vices dont celui-ci est entaché. Il y a renonciation à agir en nullité.

=) distinguer confirmation et régularisation : la régularisation consiste à valider un acte initialement nul en lui apportant l’élément qui manquait. Elle rend l’acte rétroactivement valable à l’égard de tous.

=) distinguer confirmation et réfection : la réfection résulte d’un nouvel accord des parties, analogue à celui qui avait donné naissance au contrat primitif, mais échappant à la cause de nullité qui l’affectait.

Ensuite :

–       Elle n’est possible que lorsque la nullité encourue est une nullité relative,

–       qui ne concerne pas l’intérêt général. Elle peut être expresse ou tacite.

–       Par exemple, la personne qui exécute volontairement l’acte, alors qu’elle connaît l’existence d’une cause de nullité relative, est considérée comme ayant tacitement confirmé l’acte, et renoncé par là-même au droit d’invoquer la nullité.

 

Deux conditions sont requises pour que la confirmation produise son effet :

– le confirmant doit avoir connaissance du vice qui affecte le contrat ;

– il doit avoir l’intention de réparer ce vice ; Cette intention sera parfois difficile à démontrer, surtout lorsqu’il est question de confirmation tacite.

Ces deux conditions impliquent que la confirmation ne peut intervenir qu’après la conclusion de l’acte. On ne peut confirmer qu’après la naissance du droit d’agir en nullité : la clause du contrat par laquelle la partie renonce par avance au droit d’invoquer la nullité est considérée comme non-écrite.

Enfin,

=) La confirmation n’a qu’un effet relatif, c’est-à-dire que, si plusieurs personnes étaient admises à agir en nullité, celles qui n’ont pas confirmé l’acte conservent leur droit d’agir en nullité.

Ex : colocataires/ nullité du contrat de bail

 

B/ La prescription extinctive

Lorsque le titulaire d’un droit s’abstient de l’exercer pendant un certain temps, il perd son droit d’agir, par l’effet de la prescription extinctive.

Le délai de prescription varie en fonction de la nature de la nullité.

 

– En matière de nullité relative, la prescription est quinquennale (5 ans).

– Elle est trentenaire en matière de nullité absolue.

 

* Point de départ du délai :

=)  Principe : le délai de prescription commence à courir au jour de la conclusion du contrat.

=)  Exceptions :

 

S’il s’agit d’un VDC, le délai de 5 ans court à compter de la découverte de l’erreur ou du dol, ou à compter de la cessation de la violence.

S’il s’agit d’une incapacité, le délai quinquennal court contre l’incapable à compter de la majorité ou de l’émancipation de l’enfant, ou du jour où le régime de protection a cessé. En revanche, si c’est lereprésentant légal qui agit au nom de l’incapable, le délai court dès la conclusion du contrat.

 

Imprescriptibilité de l’action en nullité exercée par voie d’exception.

 

Section 3 : Les conséquences de la nullité

Principe :l’annulation du contrat a pour effet de provoquerl’anéantissement rétroactif du contrat.

Cependant, la réalité est plus complexe :

–             l’étendue de la nullité : l’annulation peut porter sur l’acte tout entier ou sur une partie de l’acte.

–             Les conséquences de la nullité : l’acte annulé a pu être entièrement ou partiellement exécuté ; les prestations fournies doivent en principe être restituées

–             Parfois, source de responsabilité : l’anéantissement de l’acte peut avoir causé à l’une des parties un préjudice imputable à l’autre 

 

§ 1 : Etendue de la nullité

Principe : lorsqu’un contrat est vicié, il l’est normalement dans sa totalité.

 

 Par ex, si le consentement d’une partie fait défaut, ou si la cause est illicite ou immorale, le contrat est affecté dans son principe même, et doit donc être complètement anéanti.

 

Cependant, l’annulation d’un contrat est un acte grave. On essaie donc, dans la mesure du possible delimiter l’étendue de la nullité aux seules clauses litigieuses.

 

  1. TD, dans l’affaire Chronopost, que les juges n’ont pas annulé l’entier contrat, mais uniquement la clause qui limitait la responsabilité de la société en cas de retard dans la livraison. Cette clause a été déclarée non-écrite, en ce qu’elle privait de cause l’engagement du client, qui ne s’était engagé que parce qu’il comptait sur la célérité de l’opération =) nullité partielle.

 

La Jurisprudence s’assure donc, avant de limiter l’étendue de la nullité à certaines clauses, que celles-ci n’ont pas constitué la « cause impulsive etdéterminante » de l’engagement des parties.

S’il s’avère que, sans cette clause, le contrat n’aurait jamais été conclu, parce qu’il perd tout son intérêt, les juges prononceront l’annulation de l’entier contrat.

 

§ 2 : Effets de la nullité

=) Lorsque la nullité est prononcée, l’acte est privé évidemment d’effets pour l’avenir.

=) Mais la nullité remet aussi en cause les effets que l’acte a déjà produits. L’acte nul, dit-on, est anéanti rétroactivement. Il est censé n’avoir jamais existé.

Mais difficultés :

– Il se peut cependant que l’acte ait été déjà exécuté. La rétroactivité de la nullité postule alors que les choses soient remises en l’état où elles se trouvaient au moment de la formation de l’acte.

– Il se peut aussi que l’une des parties ait par exemple revendu son bien ou l’ait loué à un tiers

Il convient donc d’étudier les conséquences de l’annulation entre les parties et à l’égard des tiers

1/ Effets de l’annulation du contrat entre les parties

si la convention n’a connu aucun commencement d’exécution : la rétroactivité n’emporte aucun effet : la dette et la créance disparaissent simultanément.

* Lorsque l’acte a été exécuté, même partiellement, les choses doivent être remises dans le même état que si le contrat n’avait jamais existé. Chacun restitue en nature ce qu’il a reçu.

Ex: le vendeur rend l’argent, l’acheteur le bien vendu.

* Si la restitution est impossible parce que le bien a été consommé, ou qu’il a étédétruit, la restitution se fait par équivalent, c’est-à-dire en argent, à la valeur du bien au jour de la conclusion du contrat.

 

Exceptions :

  • Dans les contrats à exécution successive,

(Ex contrat de travail, contrat de bail)certaines prestations ne peuvent être restituées en nature : le travail de l’employé, ou la jouissance des locaux loués. Dans ce cas, on procédera à une restitution par équivalent : les salaires ou les loyers devront être restitués, diminués d’une indemnité correspondant à la valeur du travail fourni, ou à la valeur de l’occupation des lieux pendant le temps où le contrat a été exécuté. Le plus souvent, l’indemnité est égale aux sommes devant être restituées, ce qui fait que personne ne devra rien à personne.

NB : Si l’on se contente des apparences, on pourra penser que la nullité n’a d’effet que pour l’avenir. Mais il y a bel et bien eu restitution, absorbée par la compensation.

Ex: Une entreprise de travail temporaire (intérim) met du personnel à la disposition d’une société de BTP. La société de BTP ne règle pas les factures correspondant à cette mise à disposition. La société d’intérim assigne en paiement la société de BTP, qui réplique en invoquant la nullité du contrat, pour vice de forme (écrit obligatoire). La CA reconnaît la nullité du contrat, mais condamne l’entrepreneur au paiement des factures. Celui-ci fait un pourvoi, en disant que, si le contrat est nul, on ne peut le condamner à l’exécuter. Rejet par la Cour de cassation, qui explique que, lorsque comme en l’espèce les restitutions sont impossibles, la partie qui a bénéficié de la prestation irrépétible doit s’acquitter du prix correspondant à cette prestation. Ici, l’entrepreneur devait payer la somme correspondant aux rémunérations versées aux salariés par la société d’intérim pendant la durée du contrat => la somme payée par l’entrepreneur ne correspond pas à une exécution du contrat annulé, mais à l’indemnisation du travail dont il a bénéficié (bof : en fait cela ne devait pas correspondre aux factures, car elles prenaient en compte un bénéfice pour la société).

Mais le juge, appréciant souverainement le montant de l’indemnité, fixera parfois une somme différente de celle à restituer (ex : déduit des salaires à restituer les congés payés correspondant à la durée de travail effectué). (Critique Flour et Aubert n° 374)

 

  • exception d’indignité:

Dans les contrats annulés pour immoralité, celui qui invoque la nullité ne peut obtenir la restitution de ce qu’il déjà exécuté, dès lors qu’il savait que le contrat conclu portait atteinte aux bonnes mœurs.

Cette règle résulte de deux adages : Nemo auditur propriam turpitudinem allegans (nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude) et in pari causa, turpidudinis cessat repetitio : il n’y a pas lieu à répétition si les deux parties sont pareillement associées à la turpitude.

Ainsi, l’acquéreur d’une maison de tolérance, qui est entré en possession avant le paiement du prix, pourra à la fois demander la nullité du contrat, donc être dispensé de payer, et refuser la restitution de l’immeuble.

Cette règle joue un rôle dissuasif important, puisqu’elle fait peser une menace sur la partie qui commence à s’exécuter, celui-ci pouvant craindre que l’autre invoque la nullité du contrat, et se prévale de la règle Nemo auditur pour refuser les restitutions.

 

+ La règle ne joue que si la nullité repose sur l’immoralité (cause immorale) ; si le contrat est simplement illicite (ex : si objet hors commerce), la restitution des prestations peut être réclamée

De plus la règle ne trouve application qu’en matière de contrats à titre onéreux, et non pour les libéralités annulées pour cause immorale. Le refus de la restitution aurait pour résultat, cette fois, de donner effet à la libéralité nulle.

  • conservation des fruits par le possesseur de bonne foi(article 549du Code Civil.). La stricte application de la rétroactivité postulerait que l’acquéreur d’un bien dont le titre est annulé restitue non seulement le bien, mais les fruits perçus depuis son entrée en possession (ex : loyers, récoltes). L’article 549 lui permet au contraire de les conserver, sauf s’il était de mauvaise foi, c’est-à-dire s’il connaissait le vice qui a motivé l’annulation.
  • incapables

Lorsque la nullité est demandée par l’incapable, l’article 1312 ne l’oblige pas à restituer (sinon nullité n’a aucun intérêt pour lui) ; ne restitue que ce qui a tourné à son profit. Ex : si a dépensé l’argent reçu, ne sera pas obligé de le restituer.

 

2/ Effets de l’annulation du contrat à l’égard des tiers

Si A vend à B, qui revend à C, l’annulation de la première vente forcera C à restituer le bien à B, qui devra lui-même le rendre à A.

Cette règle des restitutions en cascade supporte toutefois quelques exceptions :

– D’abord, le vendeur d’un bien est légalement tenu d’une obligation de garantie à l’égard de son acquéreur. Il en résulte que si c’est B qui est le demandeur à l’action en nullité, C ne sera pas tenu de lui restituer le bien.

– Ensuite, en matière mobilière, l’action en revendication formée par B contre C se heurte à la règle posée par l’article 2279 du Code civil : « en fait de meubles, possession vaut titre ». Si C est de bonne foi, c’est-à-dire s’il ignorait la cause de nullité de la vente A-B, il pourra donc s’opposer à la restitution.

En matière immobilière, il sera beaucoup plus difficile de s’opposer à la restitution. C pourra toutefois invoquer la théorie de l’apparence, qui vise à protéger les personnes qui se sont fiées de bonne foi à la situation qui leur était présentée. C pourra donc conserver le bien s’il démontre qu’il ne pouvait connaître la cause de nullité de la vente A-B. 

 

Dans ces trois cas, A restituera le prix, et B restituera le bien par équivalent, c’est-à-dire à sa valeur estimée au jour de la vente A-B, valeur qui ne correspond pas forcément au prix convenu.

 

§ 3 : Responsabilité civile consécutive à l’annulation (dommages et intérêts)

Indépendamment des considérations liées au mécanisme des restitutions, il est possible, et même fréquent, que l’annulation cause un préjudice particulier à l’une ou l’autredes parties : des frais ont pu être engagés inutilement, du temps a été perdu, d’autres offres ont été repoussées, des bénéfices escomptés n’ont pas été perçus…

=) La question est de savoir si ce type de préjudice ouvre droit à réparation.

 

La Jurisprudence accorde parfois en plus de la nullité du contrat, la condamnation à des dommages et intérêts.

Il faut souligner que la responsabilité encourue (de nature délictuelle) doit trouver sa source dans une faute commise par l’une des parties. Cette faute ne peut résider dans le fait de demander l’annulation (qui est par hypothèse un fait licite), mais dans celui d’avoir laissé le contrat se conclure en connaissance de cause. Ainsi, celui qui està l’origine du vice contractuel, ou qui connaissait, ou aurait dû connaître le vice, alors que l’autre l’ignorait, devra réparer le préjudice subi par son cocontractant.

En pratique, cela le cas dans les hypothèses suivantes :

– erreur inexcusable,

– dol ou violence commise par le cocontractant,

– la dissimulation frauduleuse d’une incapacité,

– illicéité du contrat; dans ce dernier cas, les deux parties sont généralement également fautives, et la réparation sera exclue en cas de préjudice égal, ou diminué en raison de la faute de la victime en cas de préjudice éprouvé par l’une seule des parties.

 

Titre 2 : Les effets du contrat

Le contrat étant valablement formé, est efficace, il produit des effets.

Parmi les dispositions du Code civil relatives aux effets du contrat, deux textes se détachent plus particulièrement :

=) l’article 1134 (les conventions…tiennent lieu de loi…) : force du contrat

=)l’article 1165 qui énonce que « les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes » : domaine du contrat

=) les conséquences de la violation du lien contractuel (contrat pas respecté)

 

Chapitre 1 : La force du contrat

Le contrat est la loi des parties et c’est de là qu’il tire sa force

Dans une formule empruntée à Domat, c’est l’article 1134 qui exprime le principe de la force obligatoire du contrat :

=) « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

 
Sous-section 1 : Les obligations créées par le contrat

Article 1134, al. 2, ajoute :

« Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour des causes que la loi autorise »

 

=) sa modification, sa suspension, se révocation, ne peuvent s’opérer que par le mutuel accord des volontés primitives

=) par ailleurs, ni le juge ni le législateur n’ont le pouvoir d’intervenir dans la vie contractuelle.

=) pose deux séries de questions : interprétation & immutabilité du contrat

Section 1 : L’interprétation du contrat

Le principe = le juge ne peut intervenir dans la vie contractuelle, mais en cas de litige, il peut être amené à interpréter le contrat

 

  • Le contenu du contrat doit d’abord être défini par référence à la volonté des parties

Article 1156 du Code Civil : « on doit, dans les conventions, rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes »

 

Les articles suivants contiennent des directives complémentaires

Ex : article 1164 : « dans le doute, la convention s’interprète (…) en faveur de celui qui a contracté l’obligation »

D’autres textes donnent eux aussi leurs directives à propos de certains contrats.

Ex : l’article L. 133-2, Code de la consommation, précise que les clauses (des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs) s’interprètent en cas de doute dans le sens le plus favorable au consommateur ou au non professionnel »

 

  • Il arrive aussi que le contrat comporte des lacunes

Dans ce cas l’article 1135 invite l’interprète à combler ces lacunes :

« Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature »

Loi : pour les contrats les plus courants, la loi définit le régime juridique de chacun d’eux au moyen de dispositions supplétives de volonté ; en cas de silence du contrat, ces dispositions s’appliquent.

Usages : on entend par là les pratiques suivies dans certains contrats, ou de pratiques suivies dans certains milieux professionnels.

Equité :il fixe le contenu des obligations de chacune des parties en s’inspirant du sentiment de justice.

=) sur l’appui de ce texte, le juge va par exemple ajouter au contrat une obligation à laquelle les parties n’avaient pas pensé

Exemples : obligation de sécurité ; obligation d’information

 

NB : La Cour de cassation contrôle la dénaturation et la qualification du contrat.

*   *

 *

De plus, les conventions doivent être exécutées de bonne foi, c’est-à-dire que chacune des parties doit respecter fidèlement son engagement, et faire tout son possible pour que son cocontractant obtienne satisfaction. Les tribunaux sont de plus en plus exigeants sur ce principe, en mettant le plus souvent à la charge des parties un devoir de coopération ou, à tout le moins, une obligation de loyauté réciproque.

                 ¤ Ainsi, le débiteur qui se met dans une situation rendant impossible l’exécution de son obligation, pourra engager sa responsabilité : ex : Cie d’aviation qui pratiquent le surbooking ou surréservation ;

                 ¤ L’obligation de loyauté impose également aux parties d’éviter à leur cocontractant des dépenses inutiles.  Le transporteur doit choisir l’itinéraire le plus avantageux pour son client (taxi notamment),

                 ¤ Ce devoir de loyauté s’impose également au créancier : ainsi, celui qui délivre un commandement de payer alors qu’il sait que son débiteur est en vacances, et qu’il ne pourra donc pas s’exécuter dans les délais.

 

=) La force du contrat est ensuite marquée par le caractère immuable du contrat.

 

 

Section 2 : L’immutabilité du contrat

Une fois conclu, il ne peut être modifié ou révoqué qu’à certaines conditions (art.1134, al. 2du Code Civil.)

Deux questions : modification ; révocation

§ 1 : La modification du contrat

A suivre la théorie de l’autonomie de la volonté, le contrat ne saurait être modifié ni par la loi ni par le juge. Seules les parties pourraient le faire et elles ne peuvent le faire que de leur consentement mutuel.

 

1) le contrat ne peut être modifié par la loi

=) le principe de non-rétroactivité fait obstacle à ce que la loi nouvelle revienne sur les situations qui se sont déjà constituées et modifie les effets qu’elles ont sortis.

=) c’est le principe de la survie de la loi ancienne en matière contractuelle

Justification =) respect volonté des parties, sécurité juridique

Mais exception : lorsque la loi nouvelle exprime un intérêt social impérieux, on estime que la stabilité des conventions ne peut y faire échec

Ex : droit du travail et lois sur les congés payés, etc.

 

2) le contrat ne peut être modifié par le juge

=) Ainsi, même si il constate un changement de circonstances qui justifieraient, en équité, un changement du contrat, il ne peut rien faire

 

C’est le délicat problème de l’imprévision contractuelle

=) Principe : refus de la révision pour imprévision

Illustration : affaire du Canal de Craponne. Les conventions litigieuses avaient été conclues en 1560 et 1567. Elles avaient pour objet la fourniture d’eau destinée à alimenter des canaux d’irrigation de la plaine d’Arles, moyennant une redevance de 3 sols par carteirade (190 ares). Au cours du XIXe siècle, l’entreprise qui exploitait le canal, faisant état de la baisse de la valeur de la monnaie et de la hausse du coût de la main-d’œuvre, demanda un relèvement de la taxe qui n’était plus en rapport avec les frais d’entretien. La Cour d’Aix avait élevé cette redevance à 60 centimes. Sa décision fut cassée. Aucune considération de temps ou d’équité ne peut, en effet, selon la Cour de cassation, permettre au juge de modifier la convention des parties. L’article 1134 s’y oppose.

Il existe toutefois des Tempéraments, qui sont toutefois relatifs :

Ex : en cas de promesse unilatérale de vente, la lésion s’apprécie au jour de la réalisation de la promesse et non au jour où la promesse a été consentie. Par hypothèse le vendeur n’était pas lésé au moment de la vente ; il ne l’est qu’au moment de la levée de l’option.

Article 1152, alinéa 2 : le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire

 

3) le contrat peut être modifié par les parties

Les parties peuvent certainement convenir de modifier leur contrat. Mais il faut l’accord des deux parties.

La pratique a mis sur pied de multiples clauses qui ont pour objet de permettre leur adaptation, sans renégociation :

Ex : clause d’adaptation automatique du contrat : ex : clause d’indexation (ou « clause d’échelle mobile ») qui fait varier le prix à payer par référence à la valeur de tel produit ou tel service

 

§ 2 : La révocation du contrat

De même qu’une loi ne peut être abrogée que par une autre loi, de même les parties sont, en principe, liées par leur contrat jusqu’à ce qu’un nouvel accord entre elles viennent détruire le premier.

 

Et, de fait, l’article 1134, alinéa 2 du code civil dispose que les conventions ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise.

 

1)         le contrat peut être révoqué de leur consentement mutuel

La convention révocatoire obéit aux règles relatives aux conditions de validité des conventions en général.

Principe = accord exprès ou tacite de toutes les personnes parties au contrat.Les parties peuvent régler elles-mêmes l’étendue de la révocation.

 

Exception :Dans certains cas, la révocation peut être unilatérale, mais à la condition que les parties l’aient prévu

Il s’agit d’une rétractation unilatérale d’origine conventionnelle :

Ex : Clause de dédit : le contrat peut conférer soit à l’un des contractants, soit aux deux, la faculté de se désengager ; il n’y a pas violation de l’article 1134, al. 2, car la partie qui se rétracte use d’un droit que le contrat lui a reconnu.

 

2) le contrat peut être révoqué pour les causes que la loi autorise

En principe les contractants ne peuvent se dégager unilatéralement du lien contractuel.

 Cependant, parfois la loi l’autorise, ou bien, l’une des parties s’est réservé ce droit dans le contrat initial.

–             droit de repentir

–             résiliation unilatérale : les contrats à durée indéterminée, c’est-à-dire les contrats à exécution successive conclus sans détermination de durée, impliquent, en principe, le pouvoir de se dégager unilatéralement.

Pour sauvegarder la liberté individuelle, les engagements perpétuels sont prohibés.

 

Sous-section 2 : Les personnes liées par le contrat

En droit privé, le contrat n’a en principe d’effets qu’à l’égard des individus qui l’ont voulu,

L’article 1165 l’exprime en cette formule : « Les conventions n’ont d’effets qu’entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne leur profitent que dans le cas prévu par l’article 1121 ».

 

C’est ce que l’on a coutume d’appeler le principe de l’effet relatif des conventions.

Le texte 1165 correspond à 3 hypothèses :

– La première partie de la phrase correspond à l’hypothèse la plus courante, celle des contrats pour soi-même : en contractant, les parties n’ont entendu créer d’obligations qu’à leur charge et à leur profit.

– La dernière partie, plus rare, correspond à l’hypothèse des contrats pour autrui. Par leur contrat, les parties veulent faire naître une obligation au profit ou à la charge d’un tiers. Ils promettent ou stipulent pour autrui

–       La 3e hypothèse (« elles ne nuisent point aux tiers ») vise celle de la simulation

–      

Nous envisagerons donc le principe de la relativité des conventions, puis les exceptions à ce principe.

 

Section 1 : Le principe de l’effet relatif des conventions

Selon l’article 1165 du Code Civil, les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes. Elles n’ont point d’effet à l’égard des tiers.

 

Les tiers proprement dits sont ceux qui n’ont aucun lien de droit avec les parties (ex : ne sont pas créanciers de l’une d’elles).

Mais il faut distinguer entre l’exécution du contrat et son opposabilité

Exécution du contrat

L’exécution des obligations que créent le contrat ne peut être exigée d’un tiers ni par un tiers

 

Opposabilité du contrat

En revanche, le tiers ne peut ignorer l’existence du contrat et la situation de fait qui en résulte.

 

Ex : les contrats translatifs de propriété créent une situation nouvelle opposable à tous. Si vous êtes victime de l’effondrement d’un immeuble, il faudra vous adresser au propriétaire et donc il faudra bien tenir compte des divers actes passés sur cet immeuble.

Ex : le tiers commet une faute s’il aide une partie à violer son engagement (notamment en matière de non-concurrence)

Civ. 1re, 17 octobre 2000, Prisma presse c./ Michael O’Mara books, D. 2001, 952, n. M. Billiau et J. Moury

Relevant qu’un article de presse n’est pas le résultat d’investigations personnelles, mais la reprise d’informations contenues dans un ouvrage à paraître, une Cour d’appel peut, faisant application du principe d’opposabilité des conventions aux tiers, retenir la faute de la société de presse à l’égard des titulaires du droit d’édition de l’ouvrage

=) affirmation du principe d’opposabilité du contrat aux tiers

Contrat d’exclusivité entre un éditeur et un auteur pour publication d’un ouvrage ; or, une autre société d’édition publie des informations contenues dans cet ouvrage, peu avant mise sur le marché

 

Autres personnes intéressées au contrat :

* Certains deviennent parties : les représentés, les ayants cause universels (deviennent créanciers ou débiteurs, par ex les héritiers), (les cessionnaires) ;

* D’autres ne peuvent être indifférents à la convention :

–             créanciers chirographaires : les créanciers chirographaires ont un droit de gage général sur le patrimoine de leur débiteur (article 2092 et 2093du Code Civil.). A ce titre ils subissent les effets des conventions conclues par lui : contrats translatifs qui enrichissent ou appauvrissent

–             ayants cause à titre particulier = ce sont les tiers qui viennent à acquérir d’une des parties le droit ou le bien faisant l’objet du contrat. Le lien qui l’unit à son auteur est spécial : par l’intermédiaire de la chose transmise, il peut être mis au contact d’une convention conclue par celui-ci.

 

Section 2 : Les exceptions au principe de l’effet relatif
§ 1 : Les contrats pour autrui

 L’article 1119 du Code Civil dispose que « on ne peut, en général, s’engager, ni stipuler en son propre nom que pour soi-même »

 

Ce texte signifie qu’en règle générale, la volonté des parties est inefficace lorsqu’elles ont prévu expressément que leur contrat ferait naître une créance ou une obligation à l’égard d’un tiers.

Cependant : 3 limites

  1. a) représentation

La représentation est un mécanisme par lequel une personne agit au nom et pour le compte d’autrui ; elle permet à une personne physique non présente de faire un acte juridique

Le principe de la relativité des contrats ne s’applique donc que si l’on a contracté en son propre nom : on peut donc contracter au nom d’un tiers ; c’est l’hypothèse de la représentation. C’est alors le représenté et non le représentant qui est obligé et qui est partie au contrat. Ex : mandat

 

  1. b) promesse pour autrui

Elle est en principe interdite par l’article 1119 : nul ne peut devenir débiteur par un contrat s’il n’y a consenti

En revanche, l’article 1120 permet les conventions de porte-fort. Se porter fort pour autrui, ce n’est pas engager autrui, c’est promettre qu’autrui s’engagera.

 

  1. c) stipulation pour autrui

Enfin, l’article 1121, permet dans certains cas, de stipuler pour autrui.

 

Il y a stipulation pour autrui lorsque, dans un contrat, une des parties, appelée le stipulant, obtient de l’autre, appelée le promettant, l’engagement qu’elle donnera ou fera quelque chose au profit d’un tiers étranger, le bénéficiaire, qui devient ainsi créancier sans avoir été partie au contrat.

Par exemple un individu stipule d’une compagnie d’assurances, moyennant le paiement d’une prime annuelle, qu’elle remettra, lors de son décès, un capital soit à sa veuve, soit à ses enfants. ; L’assuré stipule, en son nom personnel, pour autrui.

Dans cette hypothèse, l’atteinte à la relativité des contrats est certaine, puisque la convention fait naître un droit sur la tête d’un tiers qui n’était et ne devient pas partie

 

§ 2 : Les contrats contre autrui – La simulation

La simulation est un mensonge concerté entre des contractants qui dissimulent le contrat qui renferme leur volonté réelle derrière un contrat apparent. On se trouve donc en présence de deux conventions: 

–             l’une, ostensible et mensongère (l’acte apparent),

–             l’autre qui est sincère, mais secrète (la contre-lettre). (article 1321 du Code Civil)

Le plus souvent, la simulation est un moyen de fraude : fiscale (prix inférieur au prix réel), aux créanciers (vente fictive d’un bien pour le faire ‘disparaître’)

Par ailleurs :

La simulation n’est pas, en elle-même, une cause de nullité. Bien qu’impliquant un mensonge, la simulation est neutre. Elle ne rend pas nul ce qui est valable, non plus qu’elle ne rend valable ce qui est nul.

Mais il faut toutefois rechercher lequel, entre l’acte ostensible et l’acte caché, va l’emporter.

–             l’autonomie de la volonté impose de respecter la volonté réelle (l’acte secret)

–             la théorie de l’apparence doit autoriser le tiers de bonne foi à se prévaloir de l’acte apparent

–             la fraude doit être découragée

=) article 1321du Code Civil. « les contre-lettres ne peuvent avoir leurs effets qu’entre les parties contractantes ; elles n’ont point d’effet contre les tiers ».

Ainsi :

–             entre les parties, la simulation est neutre : l’acte secret est obligatoire entre elles

–             Les tiers ont, en quelque sorte, une option : selon leur intérêt, ils peuvent s’en tenir à l’acte apparent ou faire prévaloir la contre-lettre.

 

§ 3 : Les contrats transmis à autrui

En principe le transfert d’un bien n’entraîne pas que l’acquéreur soit lié par les contrats conclu au sujet de ce bien.

Dérogations légales :

–       le contrat de bail est transféré à l’acquéreur de la chose louée

–       le contrat d’assurance est transmis à l’acquéreur du bien assuré (avec faculté de résiliation)

–       le contrat de travail est transmis au nouvel entrepreneur

En dehors de ces hypothèses d’ordre public (non exhaustives), les parties peuvent bien sûr prévoir un transfert aux tiers.

 

Autres transferts possibles : non plus transfert des contrats mais transfert des actions :

–       actions directes en paiement (ex : bailleur contre sous-locataire)

–       actions directes en responsabilité (ex : dans les chaînes de contrats)

*   *

 *

Il découle enfin du principe de la force obligatoire du contrat que celui qui n’exécute pas ses obligations s’expose à des sanctions. C’est que nous allons voir maintenant.

 

Chapitre 3 : La violation du contrat

®    La loi du contrat doit être respectée.

®    Toutes les obligations qui en découlent doivent être exécutées.

®    Toute défaillance constitue un manquement contractuel :

o    qu’il s’agisse d’une inexécution totale ou partielle

o   ou en encore une exécution défectueuse.

®    Cette défaillance expose le débiteur à plusieurs sortes de sanctions :

 

o   le créancier peut toujours poursuivre l’exécution du contrat, lorsqu’elle est possible (article 1184) 

  • Exécution forcée: après mise en demeure de s’exécuter adressée au débiteur, le créancier pourra demander cette exécution en justice.
  • Ex. : le bailleur peut exiger la remise des lieux en état même si le locataire a apporté des améliorations. Limites : abus de droit et bonne foi.

o   Lorsque l’exécution forcée n’est pas envisageable,

  • soit parce qu’il s’agit d’une obligation de faire,
  • soit parce l’exécution est devenue impossible ou inutile.
  • Ex: la chose à transporter a péri
  • Dans ce cas, l’exécution se fera par équivalent:
  • selon les principes de la responsabilité civile contractuelle (1).
  • Dans le cas des contrats synallagmatiques, l’inexécution du contrat emportera des conséquences particulières, liées à l’interdépendance entre les obligations réciproques (2).
 
Section 1 : La responsabilité contractuelle

 

®    La responsabilité civile désigne l’obligation faite à une personne de réparer le dommage causé à autrui.

®    Il s’agit ici de réparer un trouble d’intérêt privé, qui se résout en (di).

®     Au contraire, la responsabilité pénale, qui tend à réparer un trouble d’intérêt général, se solde par une amende et/ou une peine de prison.

 

Lorsqu’on est dans le cadre de la responsabilité civile, il faut distinguer selon que le dommage a été causé dans le cadre d’une situation contractuelle ou délictuelle

                

®    responsabilité contractuelle : Si le dommage est causé dans le cadre d’un contrat, la responsabilité sera de nature contractuelle, et soumise aux articles 1137 et suivants du Code civil.

®    Responsabilité délictuelle : Si le dommage a été causé indépendamment de toute relation contractuelle, la responsabilité sera de nature délictuelle (on dit aussi extra-contractuelle), et soumise aux articles 1382 et suivants du Code civil.

®    Ces 2 types de responsabilité ont pour objet la réparation d’un préjudice mais se distinguent en de nombreux points :

La prescription de l’action en réparation est de 10 ans en matière de responsabilité délictuelle, 30 ans en matière contractuelle ;

– Il est possible de prévoir dans le contrat une clause limitative de responsabilité contractuelle, alors que de telles stipulations sont inopérantes en matière de responsabilité délictuelle.

 

Conditions de la responsabilité contractuelle et ses effets

§ 1 : Les conditions de la responsabilité contractuelle

 

Trois conditions doivent être réunies :

®    un dommage,

®     une faute contractuelle

®    un lien de causalité entre cette faute et ce dommage

A/ Le dommage

La responsabilité du débiteur n’est engagée qu’à la condition que le créancier démontre qu’il a subi un préjudice.

 

Il reste à savoir quel type de dommage peut être pris en compte et réparé.

De nombreux débats ont eu lieu en doctrine et en Jurisprudence pour savoir quel type de dommage devait être pris en compte.

Le préjudice peut comporter consister dans la privation de la prestation attendue ou comprendre aussi les conséquences de cette privation

 

–       Le dommage dont le créancier peut faire état est presque toujours matériel.

Il en est ainsi lorsqu’il peut invoquer le préjudice que lui a causé l’absence d’une prestation sur laquelle il comptait. Conformément à l’article 1149 du Code Civil, réparation est alors due, non seulement pour la perte éprouvée, mais aussi pour le gain manqué du fait de l’inexécution de l’obligation.

Ainsi, si un artiste engagé pour une représentation manque à sa parole, l’entrepreneur de spectacle pourra obtenir remboursement des frais engagés (publicité, location de salle), mais également du bénéfice escompté (prix des billets).

 

–       Le dommage peut également être corporel(si manquement, par exemple, à une obligation de sécurité)

 

–             Il est plus rare que le créancier invoque un dommage moral, mais c’est finalement possible, notamment parce que l’article 1148 du Code Civil est assez large pour englober le préjudice moral.

Ex : atteinte à l’honneur, à la réputation du créancier qui ne peut assumer des obligations souscrites auprès des tiers car le contrat initial n’a pas été exécuté. La JP, après avoir hésité, admet aujourd’hui que, lorsque ce préjudice est démontré, il peut donner lieu à réparation.

–            

 

Toutefois, pour être réparable, le dommage doit remplir certaines conditions : prévisible, certain

1)          il doit être prévisible

L’article 1150 du Code civil limite en principe le droit à réparation aux seuls préjudices prévus ou prévisibles lors de la conclusion du contrat.

 

La notion de dommage prévisible est une question d’espèce, qui est appréciée par les tribunaux au cas par cas.

Ex: Fiche de TD : Passagers qui du fait du retard du TGV, ratent l’avion charter qu’ils devaient emprunter dans le cadre d’un voyage organisé, et doivent acheter le lendemain un billet plein tarif sur des lignes régulières pour rejoindre leur groupe. La CA Paris estime que la SNCF doit rembourser le prix des billets d’avion, car elle devait prévoir que ses clients empruntent le TGV, réputé rapide et fiable, comme préalable à d’autres moyens de transport, et que le retard du TGV peut impliquer l’impossibilité de poursuivre le voyage comme il avait été prévu.

 

NB: dommage prévisible sauffaute intentionnelle du débiteur. Dans ce cas, le responsable doit une réparation de l’entier dommage, qu’il ait ou non été prévisible.

L’article 1150 du Code Civil précise que « le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu’on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n’est point par son dol que l’obligation n’est point exécutée ».

 

2)         il doit être certain

Cela exclut le dommage simplement éventuel.

Ex: La Jurisprudence a ainsi distingué entre les différents préjudices subis par une personne transfusée avec du sang contaminé : – le préjudice lié à la séropositivité est actuel et certain ;

–       le préjudice lié à la contraction du Sida n’est qu’éventuel, tant que la maladie n’est pas déclarée (Paris, 26 janvier 1994, D. 1994, IR 75 – Cass. 2ème civ. 20 juillet 1993, D. 1993, 526).

 

En revanche, la réparation n’est pas limitée à l’indemnisation du dommage actuel, déjà réalisé. Le dommage futur doit également être pris en compte, du moment qu’il est certain.

Ex: La marchandise n’est pas livrée. Si l’acheteur avait prévu de la revendre, il subit un préjudice qui, pour ne pas être encore réalisé, n’en est pas moins certain.

 

B/ La faute contractuelle

Généralement, c’est l’inexécution d’une obligation (totale ou partielle, ou retard) qui constitue la faute.

 

 Il en résulte que, pour rechercher l’existence d’une faute, il faut d’abord s’interroger sur l’existence et le contenu des obligations contractuelles.

Elle suppose : une obligation ; une faute

1°) S’agissant de l’existence de l’obligation,

Obligations légales ou contractuelles           

 

1°) Les obligations légales

 

– La loi prescrit parfois des devoirs impératifs auxquels les parties ne peuvent déroger (toute clause contraire est réputée « nulle ou non écrite ». Ex : article 1628 : le vendeur doit garantir l’acquéreur contre son fait personnel, i.e. qu’il ne doit pas troubler la possession de l’acheteur : rétablissement du commerçant dans les environs…

 

-Il arrive que la loi prescrive de simples obligationssupplétives, qui ne s’imposeront aux parties que si elles n’en ont pas convenu autrement.

 

2°) Les obligations jurisprudentielles

 

Il est de plus en plus fréquent quela Jurisprudence précise le contenu de certains contrats, en mettant à la charge des parties des obligations qui ne sont pas exprimées, mais que les tribunaux considèrent comme ayant été tacitement souscrites.

Nous nous contenterons ici de citer les deux obligations d’origine jurisprudentielle les plus importantes :

 

a- L’obligation de sécurité

L’obligation de sécurité impose au créancier de garantir la sécurité physique du débiteur.

Cette obligation a été initialement créée par la Cour de cassation à propos des contrats de transports de personnes (Cass. civ. 21 novembre 1911). Peu à peu, la Jurisprudence a étendu cette obligation à tous les contrats dans lesquels la sécurité physique de l’une des parties est exposée au risque d’un local ou d’une chose dépendant plus ou moins du contrôle de l’autre.

=> Ob° de sécurité est considérée comme nécessairement inclue dans tous les contrats de fourniture d’un produit (ex : CTS condamnés sur ce fondement de la violation de l’obligation de sécurité, qui leur impose de fournir aux receveurs un sang exempt de vice), les contrats conclus dans l’exercice d’une activité de sports et loisirs (équitation, alpinisme, manèges forains, parapente : les organisateurs du vol doivent garantir le bon état des voiles et des cordages), contrats d’hébergement et d’accueil du public (hôtellerie, café, restauration :

La difficulté est de savoir si cette obligation est une obligation de moyen ou de résultat =>Preuve. En fait, plus le créancier a une part d’intervention personnelle dans l’exécution, plus c’est une obligation de moyen, et vice-versa).

 

b- L’obligation de renseignement et de conseil

Ce type d’obligation a peu à peu été intégré par la Jurisprudence dans tous les contrats pour l’exécution desquels une partie se fie raisonnablement à la compétence de l’autre.

Ainsi la Jurisprudence a-t-elle mis à la charge de l’avocat, du notaire, du médecin, de l’architecte, et de tous les vendeurs en général, l’obligation d’informer le cocontractant sur les caractéristiques du produit ou sur la prestation fournie, et de le conseiller sur le produit ou la prestation correspondant le mieux à ses besoins. (=> Développement de l’obligation de loyauté)

 

L’intégration par la Jurisprudence de ces différentes obligations contractuelles fait que les obligations assumées par les parties ne sont pas uniquement celles qui sont librement souscrites par celles-ci, mais également celles qui découlent de la nature du contrat conclu.

 

Une fois qu’on a déterminé le contenu des obligations assumées par le débiteur, il reste à démontrer la faute contractuelle.

 

2°) S’agissant de l’existence de la faute

Le demandeur à l’action en responsabilité devra démontrer la faute contractuelle pour obtenir indemnisation. Cette preuve sera plus ou moins difficile à rapporter selon que l’obligation inexécutée est une obligation de résultat ou une obligation de moyens.

 

  1. a) Rappel de la distinction (déjà vue en intro) :

–             Dans d’autres situations, l’objet de l’obligation est strictement déterminé, car le débiteur a promis un résultat précis. Le seul fait de ne pas l’avoir obtenu constitue l’inexécution de l’obligation ; tenu d’une obligation de résultat, le débiteur sera considéré comme fautif aussitôt que la preuve de l’inexécution ou du retard sera rapportée.

Il n’en est autrement que si celui-ci démontre que l’inexécution a été causée par la force majeure, le fait du créancier ou le fait d’un tiers (article 1147/ résultat). On parle alors de « cause étrangère)

 « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part ». Ce texte fait état de l’inexécution et non de la faute mais

 

–             Dans certains cas, le débiteur s’oblige seulement à utiliser tous les moyens possibles en vue d’atteindre un résultat déterminé,sans promettre qu’il y parviendra. Ex ; médecin, avocat. Ce n’est plus la fin poursuivie, mais les moyens mis en œuvre qui forment l’objet de l’obligation.

Ici la seule preuve de l’inexécution ne suffit pas. Le demandeur devra prouver que la faute du débiteur, c’est-à-dire que celui-ci n’a pas mis en œuvre les moyens requis pour atteindre le résultat.

=> Cette preuve sera parfois difficile à rapporter. Il faudra en effet confronter le comportement qu’à eu le débiteur au comportement qu’il aurait dû avoir (1137/ moyen)

 « L’obligation de veiller à la conservation de la chose, soit que la convention n’ait pour objet que l’utilité de l’une des parties, soit qu’elle ait pour objet l’utilité commune, soumet celui qui en est chargé à y apporter tous les soins d’un bon père de famille ».

L’article 1137 se réfère à la notion de bon père de famille : le créancier de l’obligation inexécutée doit, pour obtenir réparation, prouver que le débiteur ne s’est pas comporté en bon père de famille, c’est-à-dire a manqué à son obligation de prudenceet de diligence. La faute consisterait donc en un comportement anormal

 

  1. b) Les critères de la distinction

La distinction obligations de moyens/de résultat n’est pas toujours facile à opérer. C’est aux tribunaux que revient la charge de la qualification. La tendance dominante est de se référer au caractèreplus ou moins aléatoire de l’objectif contractuel :

– si le résultat à atteindre dépend essentiellement du pouvoir du débiteur, l’obligation sera de résultat ;

– si au contraire le but à atteindre dépend pour une forte part d’évènements extérieurs au débiteur, et notamment du comportement du créancier, l’obligation sera de moyens.

 

=> D’une façon générale, les obligations de donner et de ne pas faire sont des obligations de résultat, car leur exécution dépend principalement de la seule volonté du débiteur. Les obligations de faire sont souvent tributaires d’autres éléments, et sont généralement considérées comme des obligations de moyens. [Distinguer obligation de moyen avec ou sans présomption de faute]

 

  1. c) Régime de la distinction

Preuve de la faute

=) si l’inexécution ne suffit pas à engager la responsabilité du débiteur, et si donc, il faut une faute, la faute est présumée dans le cas de l’article 1147, elle doit être prouvée dans le cas de l’article 1137. La combinaison de ces articles a servi de support à la distinction capitale entre obligations de moyens et obligations de résultats.

Gravité de la faute

* Lorsque l’on se trouve dans le cadre d’une obligation de résultat, la seule preuve de l’inexécution suffit pour engager la responsabilité du débiteur.

 

* S’il s’agit d’une obligation de moyens, et que la faute du débiteur est établie, la question est de savoir s’il faut que cette faute revête un certain caractère de gravité pour engager la responsabilité de son auteur.

Evolution : L’Ancien droit établissait clairement une hiérarchie des fautes, qui allait de la faute légère, voire très légère, à la faute dolosive (intentionnelle), en passant par la faute simple et la faute lourde. Chacune de ces fautes était dotée d’un régime particulier.

Le Code civil ne reproduit pas cette gradation des fautes : pour lui, toute faute, même légère, constatée à la charge du débiteur l’oblige en principe à réparer le préjudice causé.

 

Maisle droit positif fait tout de même quelques références à la gravité de la faute. Ainsi la faute intentionnelle n’est susceptible d’être couverte ni par un contrat d’assurances (article. L. 113-1 alinéa 2 du Code des. Assurances), ni par une clause limitative de responsabilité (jurisprudence).

 

 

De même, la loi exige parfois que la faute ait un certain caractère de gravité pour engager la responsabilité de son auteur.

Ex: Art. L 521-1 du Code du travail : « la grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ».

 

C/ Le lien de causalité entre la faute et le dommage

Quelle que soit la nature de la responsabilité, il doit exister un rapport de cause à effet convaincant entre la faute et le dommage.

 

®    En ce qui concerne la responsabilité contractuelle, l’exigence d’un lien de causalité est posée par l’article 1151 du Code civil : on ne doit réparer que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution. On ne répare pas le préjudice indirect, qui aurait éventuellement pu se produire sans la faute du débiteur, ou qui est en est une conséquence trop éloignée.

 

Ex :(exemple de Pothier) Ainsi, si un marchand a vendu une bête malade, il devra non seulement en rembourser le prix, mais aussi celui des bestiaux qui ont péri par contamination. En revanche, l’acheteur ne peut réclamer des dommages-intérêts en soutenant que, par suite de la mort de ses bêtes, il n’a pu cultiver ses terres, etc., car d’autres évènements auraient pu l’empêcher de cultiver.

 

-On ne peut donc aller trop loin dans la chaîne des conséquences

– système de la causalité adéquate : on n’indemnise que les dommages dont il est certain qu’ils ne se seraient pas produits sans la faute

 

Cette exigence du préjudice direct est connexe à celle du préjudice prévisible, et souvent les tribunaux ne font pas bien la distinction entre les deux.

  1. Affaire du TGV :En revanche, la CA refuse de condamner la SNCF à des dommages et intérêts supplémentaires pour la perte d’une journée de vacances, car ce n’est qu’une conséquence particulière du retard, et que la société ne connaissait pas l’objet du voyage. En fait, cette perte d’une journée de vacances n’est pas imprévisible pour celui qui prévoit le ratage de l’avion, mais la CA cherche une indemnisation juste, sans non plus aller dans les conséquences des conséquences (retard)

 

Parfois, il apparaît que la faute a directement concouru à une partie seulement du dommage. Il y aura alors lieu à un partage de responsabilité, voire condamnation in solidum des coresponsables.

 

D/ causes d’exonération du débiteur

On suppose le dommage et la faute démontrées. Cela entraîne la responsabilité du débiteur.

Mais, le débiteur peut, dans certains cas, être exonéré de sa responsabilité

–       l’inexécution est imputable à une cause étrangère (article 1147).

–       Le contrat contenait une clause limitative de responsabilité

Ces causes d’exonération libèrent le débiteur.

  1. a) l’existence d’une cause étrangère

Il s’agit ici pour le débiteur de démontrer que l’inexécution contractuelle résulte de faits ou d’évènements indépendants de sa volonté.

 

Deux catégories de causes étrangères : la force majeure et le fait d’autrui.

 

  1. la force majeure

–       Elle est aussi dénommée « cas fortuit » (article 1148)

–       C’est l’événementirrésistible, imprévisible et extérieur au débiteur et qui apparaît comme la cause du dommage.

irrésistible : C’est la condition principale ; si l’événement pouvait être surmonté, bien que l’exécution eût été difficile et onéreuse, le débiteur serait responsable de n’avoir pas exécuté.

–       imprévisible : le débiteur doit prendre les mesures nécessaires en vue de contrer un événement prévisible. L’imprévisibilité est seulement un indice de l’irrésistibilité. Tout est toujours, dans l’absolu, prévisible, notamment le pire.

Ex : un cyclone n’a pas le caractère d’un événement de Force Majeure (période cyclonique, prévu longtemps à l’avance)

extérieur : Enfin, l’événement doit être extérieur au débiteur ; mais le débiteur ne répond pas seulement de lui-même mais aussi de tous ceux ou de tout ce qu’il emploie pour exécuter le contrat. Par exemple, un entrepreneur ne peut invoquer la défaillance de son personnel ou de son matériel.

Grève :(ex : coupures de courant car grève à EDF) n’a pas un caractère exonératoire, parce qu’elle est prévisible au moment de la conclusion du contrat. Mais on a admis qu’il y avait force majeure lorsque le conflit avait été provoqué par une décision gouvernementale (ex : blocage des salaires) et que son dénouement dépendait des pouvoirs publics et non de la direction de l’entreprise (Civ. 1re, 24 janvier 1995, Bull. civ., I, n°54 ; D. 1995, 327, n. Paisant) + Soc., 11 janvier 2000, SNCF

 

Les tribunaux restent très sévères pour apprécier les éléments de la Force Majeure (not. à propos SNCF).

 

Si l’évènement se voit reconnaître les caractères de la force majeure, le débiteur est alors automatiquement libéré de son obligation contractuelle, et ne doit donc aucun dommage et intérêts du fait de son retard ou de l’inexécution. Le débiteur perd bien sûr du même coup toute possibilité d’obtenir de son cocontractant la contrepartie escomptée (la Force Majeure ne doit pas servir l’injustice).

 

–             2. le fait d’autrui

Le débiteur pourra également s’exonérer en démontrant que le dommage résulte du fait d’un tiers.

 

Ce tiers pourra être le créancier lui-même, dont le comportement aura empêché la bonne exécution de la prestation du débiteur.

 

La Jurisprudence a ici tendance à distinguer :

–       si le fait du créancier est fautif, il peut constituer une cause d’exonération au moins partielle, car le créancier ne peut obtenir la réparation d’un préjudice qu’il a contribué à causer ; Le fait du créancier exonère totalement le débiteur lorsqu’il a été la cause exclusive du dommage (imprudence du voyageur) ; l’exonération est partielle dans les autres cas

–       si le fait du créancier n’est pas fautif,il ne sera considéré comme une cause exonératoire que s’il présentait les caractéristiques de la Force Majeure : imprévisible, irrésistible et extérieur au débiteur.

–       Idem si autrui en question est un tiers au contrat : seuls les comportements constitutifs de Force Majeure seront pris en compte. De même pour le fait d’un tiers.

 

Conséquence de la condition d’extériorité : le débiteur ne pourra s’exonérer de sa responsabilité en invoquant le fait d’une personne dont il devait répondre.

Ex: l’employeur ne peut invoquer la faute de son salarié pour s’exonérer de sa responsabilité contractuelle.

 

  1. b) clause limitative de responsabilité

Les parties prévoient souvent dans le contrat quelle sera l’étendue de leur responsabilité en cas d’inexécution contractuelle.

Il arrive ainsi qu’elles conviennent que l’une des parties supportera même le préjudice résultant d’un cas de Force Majeure. Mais le plus souvent, les clauses relatives à la responsabilité tendent plutôt à limiter, voire à exclure toute responsabilité.

 

La Jurisprudence reconnaît en principe la validité de ces clauses, mais à certaines conditions :

d’abord, ces clauses ne s’appliquent pas en cas de dol ou de faute lourde du débiteur ; En effet, admettre la validité de ces clauses reviendrait à accepter qu’on puisse être impunément de mauvaise foi, ou d’une imprudence qui confine à l’inconscience.

ensuite, les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité sont en principe invalidées lorsque le dommage est un dommage corporel (atteinte à l’intégrité physique du créancier)

–       plusieurslois spéciales excluent les clauses de non-responsabilité dans certains contrats particuliers

 

Ex. le transporteur n’est-il en principe pas admis à exclure, ou même à limiter sa responsabilité en cas de perte ou d’avaries subie par la marchandise transportée (cf. notamment article 103 du Code de commerce). Idem transport de personnes. Idem contrat conclus entre un professionnel et un consommateur (art. L. 132-1 Code de la conso) ; Idem clause excluant les indemnités de licenciement (art. L. 122-14-7 Code du travail).

 
§ 2 : La mise en œuvre de la responsabilité contractuelle

Il s’agit ici de déterminer comment le créancier pourra obtenir la réparation du dommage causé par l’inexécution ou la mauvaise exécution de l’obligation par le débiteur.

 

Si le débiteur admet sa responsabilité et si les parties sont d’accord sur le montant du dommage, il n’y a pas de problème : la réparation est alors amiable, et les parties devront alors conclure ce qu’on appelle une transaction, qui aura la même autorité qu’une décision de justice (seul recours possible : pourvoi en cassation, sur une question de droit – article 2044 à 2058 du Code civil).

 

En l’absence d’accord :

–       il faudra d’abord constater l’inexécution. C’est l’objet de la mise en demeure.

–       Il faudra ensuite déterminer judiciairement le montant de la réparation, et dire comment devra s’effectuer cette réparation.

 

I- LA MISE EN DEMEURE

 

L’article 1146 du Code civil impose comme un préalable nécessaire à la mise en œuvre du droit à réparationla mise en demeure adressée par le créancier au débiteur défaillant.

 La mise en demeure

= acte par lequel le créancier enjoint le débiteur d’exécuter l’obligation qu’il n’a pas exécutédans les délais et les formes prévues au contrat.

= acte par lequel le créancier constate l’inexécution, et manifeste son intention de ne pas la tolérer.

= peut prendre la forme d’une lettresous seing privé avec accusé de réception(LRAR)

= d’un acte extra-judiciaire, c’est-à-dire un commandement ou une signification dressée par un huissier de justice.

= L’assignationen justicesur le fondement de l’inexécution contractuelle est également considérée comme valant mise en demeure.

 

La mise en demeure a pour fonction de rendre l’inexécution officielle,et d’ouvrir le droit à réparation.

C’est notamment à compter de la Mise en Demeure que les intérêts moratoires, dus en cas de retard dans l’inexécution, vont commencer à courir. (Car dommages et intérêts = réparation du dommage (intérêts compensatoires si inexécution ou moratoires si simple retard dans l’inexécution) + intérêts sur cette réparation, courant à compter de cette MED).

 

Exception: la Mise en Demeure n’est pas exigée dans deux cas particuliers :

* Quand les parties ont stipulé dans le contrat que l’arrivée d’un certain terme ou d’un certain évènement vaudrait mise en demeure ;

* Quand lanature de l’obligation rend inutile ou absurde la Mise en Demeure :

– obligation de ne pas faire : le seul fait de la contravention oblige le débiteur à la réparation sans qu’il soit nécessaire de le mettre en demeure.

– obligation de faire ou de donner qui ne pouvait être exécutée que dans un certain temps : la fin de la période remplace la Mise en Demeure ;

 

II- LA REALISATION DU DROIT A REPARATION

 

Il faut se demander ici sous quelle forme va être accomplie la réparation et, en cas de réparation par l’octroi de dommages et intérêts, comment va-t-on procéder à l’évaluation du dommage.

 

A- LES PROCEDES DE REPARATION

 

Deux procédés de réparation sont possibles : la réparation par équivalent et la réparation en nature

 

–       la réparation par équivalent, qui consiste en l’octroi de dommages et intérêts; C’est le mode de réparation préféré du Code civil (cf. Article 1142) ; Elle peut prendre la forme d’une somme globale unique, ou d’une rente viagère.

 

la réparationen nature, qui entraînera la condamnation du débiteur qui a perdu la chose à fournir une chose semblable (remplacement de la chose), ou la destruction de ce qui a été fait en contravention avec l’engagement contractuel. La réparation en nature peut également autoriser le créancier à faire exécuter lui-même l’obligation aux frais du débiteur.

La Jurisprudence fait parfois appel à ce procédé de réparation, qui présente l’avantage de procurer au créancier exactement la même prestation que celle prévue au contrat (sauf obligations monétaires), et d’échapper au problème de la taxation des prix.

 

B- L’EVALUATION DES DOMMAGES ET INTERETS

 

1°) Principe de réparation intégrale du préjudice

 

Le montant des dommages et intérêts alloués par le juge doit couvrir l’intégralité du préjudice par le créancier, mais ne doit pas le dépasser.

 

Le principe deréparation intégrale du dommageest une règle générale de droit commun, qui s’applique aussi bien en matière contractuelle que délictuelle. Elle implique qu’on doive inclure dans la réparation aussi bien le préjudice moral que matériel, et que l’on exclue le préjudice éventuel. Elle justifie aussi que la gravité de la faute commise par le débiteur ne soit pas prise en compte par les juges. Le dommage, tout le dommage, rien que le dommage.

 

 

2°) Fixation des dommages et intérêts

 

Conformément aux règles générales applicables en matière de charge de la preuve, il incombe à celui qui demande réparation de prouver l’existence et la consistance de son préjudice. Il doit chiffrer sa demande, mais le juge restera libre de faire une évaluation conforme au dommage réellement subi, et de condamner le créancier au paiement du montant ainsi fixé.

 

La liberté du juge pour la fixation des dommages et intérêts est toutefois limitée dans deux hypothèses particulières :

 

–       S’il existe une clause limitative de responsabilité. Si cette clause est valable, le juge ne peut pas allouer des dommages et intérêts pour un montant supérieur au plafond fixé par la clause ;

 

–       S’il existe une clause pénale. La clause pénale est une stipulation par laquelle les parties évaluent par avance les dommages et intérêts dus en cas d’inexécution d’une des obligations. Les parties fixent donc une somme forfaitaire, qui sera due en tout état de cause dès lors que l’inexécution est démontrée, et sans qu’il soit besoin de démontrer un préjudice particulier.

 

Le juge conserve toutefois la possibilité de réviser le montant de la clause pénale pour le cas où celui-ci serait « manifestement excessif ou dérisoire ». (Article 1152 du Code civil).

 

Ce pouvoir modérateur accordé au juge est une exception au principe selon lequel le contrat fait la loi des parties, et le juge ne peut augmenter ou diminuer le montant de la peine prévue par la clause pénale qu’à la condition de motiver spécialement leur décision.

*   *

 *

 

Les mécanismes que l’ont vient d’évoquer sont inclus dans la responsabilité contractuelle de droit commun, et sont applicables quelle que soit la nature de la convention inexécutée.

Nous allons voir maintenant que les contrats synallagmatiques sont susceptibles de recevoir d’autres sanctions particulières.

 

Section 2 : Le sort des contrats synallagmatiques

 —  Variété de contrats la plus nombreuse et la plus importante

 —  Caractéristique : interdépendance des obligations réciproques des co-contractants

—  En cas d’inexécution contractuelle : sanctions spécifiques :

–             l’exception d’inexécution(1) : si l’un des co-contractants n’exécute pas ses obligations, l’autre peut refuser d’exécuter les siennes

–             la résolution pour inexécution (2) : si l’un des contractants n’exécute pas son obligation, l’autre peut demander en justice la résolution du contrat (résolution, résiliation)

 

§ 1 : L’exception d’inexécution

L’exception d’inexécution – ou exceptio non adimpleti contractus, ENAC –  est le droit qu’a chaque partie à un contrat synallagmatique de refuser d’exécuter son obligation tant qu’elle n’a pas reçu la prestation qui lui est due.

 

Le Code civil ne mentionne l’ENAC dans aucune disposition générale, mais certains textes spéciaux le prévoient.

Ex :Article 1612 du Code civil autorise le vendeur à ne pas livrer la chose si l’acheteur ne paie pas le prix.

L’article 1948 du Code Civil permet au dépositaire de ne pas restituer la chose déposée jusqu’à ce que le créancier lui ait payé ce qu’il lui doit en raison du dépôt (NDLR : il s’agit en vérité ici de l’exercice du droit de rétention mais bon).

La Jurisprudence a étendu le principe de ces solutions à tous les contrats synallagmatiques.

 

 

Avantages de l’EI :

–       L’EI permet d’abord au créancier d’éviter de fournir ce qu’il doit tant qu’il n’est pas assuré de recevoir la contrepartie de son débiteur.

 

–       L’EI protège donc le créancier contre l’insolvabilité de l’autre, et le mécanisme est particulièrement efficace en cas de faillite du cocontractant. Car s’il s’exécute, le créancier court le risque de ne pouvoir récupérer sa prestation, même après la résiliation du contrat.

 

–       fonction comminatoire = qui renferme la menace d’une sanction légale.

 

L’ENAC permet au créancier à faire pression sur le débiteur (dans le bon sens du terme, pour aboutir à quelque chose de bon : l’exécution du contrat)  Celui-ci, conscient que son partenaire est déterminé à défendre ses propres intérêts, n’a alors d’autre issue que de s’exécuter (du moins s’il veut obtenir la prestation prévue au contrat).

 

 

A/ Mise en œuvre de l’exception d’inexécution

–             nature des obligations inexécutées : obligations interdépendantes, à exécution simultanée(hôtel, restaurant : on ne paie qu’après le séjour ou le dîner)

–       L’avantage de l’ENAC :

–       rapiditéet la simplicité de sa mise en œuvre

–       agit de plein droit : pas nécessaire d’obtenir une autorisation judiciaire préalable

–       pas de contrôle judiciaire a priori.

–       Cependant : possibilité d’un contrôle judiciaire a posteriori  ®Hypothèse où le cocontractant assigne en exécution forcée de l’obligation inexécutée.

L’autre invoque la propre inexécution du demandeur, et se prévaut donc de l’exception d’inexécution. Le juge va vérifier que la riposte est bien proportionnée à l’attaque. L’EI apparaît ici comme une sorte delégitime défense, et est soumise aux mêmes conditions de proportionnalité.

Il n’est pas question en effet de permettre à une partie de retenir l’intégralité de sa prestation, alors que l’autre partie n’est responsable que d’une inexécution partielle.

Ex: Un locataire ne peut refuser de payer ses loyers au prétexte que le propriétaire n’a pas fait repeindre les volets de la case.

En revanche, il pourra s’abstenir de payer si l’inexécution du propriétaire le prive totalement de la jouissance des lieux. Ex : le toit fuit de telle façon que le maintien dans les lieux devient problématique. Le propriétaire ne fait pas accomplir les réparations qui lui incombent.

Entre les deux hypothèses, une inexécution partielle peut autoriser une EI partielle.

=) L’exercice de l’EI doit être mesuré, et celui qui fait un usage abusif de l’EI engage sa responsabilité contractuelle.

 

B/ Effets

Elle n’entraîne pas la disparition des obligations mais un simple ajournement de leur exécution. La solution est provisoire

 

Les effets de l’exception d’inexécution :

–       purement défensifs : le contractant qui l’invoque se borne à refuser de payer sa dette.

–       Ils sont aussi temporaires : l’obligation est seulement suspendue et reprend son effet lorsque le cocontractant exécute son obligation.

 

Deux issues sont possibles :

–       Soit la crise se résout par l’exécution du débiteur,

–       soit elle persiste, et elle appellera alors la résolution du contrat.

 

§ 2 : La résolution des contrats pour inexécution

Article 1184 du Code Civil.

La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.

 

Si la mise en œuvre de l’exception d’inexécution est un échec, ou si elle est vaine parce que le débiteur est déterminé à ne pas s’exécuter ou que le préjudice est d’ores et déjà consommé, le créancier peut toujours demander la résolution pure et simple du contrat.

 

Définition° : La résolution est l’anéantissement, en principe rétroactif, du contrat pour cause d’inexécution.

 La résolution a les mêmes effets que la nullité mais : 

–       la résolutionsanctionne l’inexécution d’un contrat valablement formé,

–       la nullitésanctionne l’absence d’une condition de validité du contrat.

 

 

a- Les conditions de la résolution

Le créancier de l’obligation inexécutée n’est pas tenu de demander la résolution : il peut préférer des dommages et intérêts, ou demander l’exécution forcée, si toutefois celle-ci est possible.

 

S’il demande la résolution du contrat, il devra démontrer :

– d’abord, l’inexécution par l’autre partie de son obligation ;

– ensuite, il devra prouver que cette inexécution est imputable au débiteur, c’est-à-dire qu’elle ne procède ni d’un cas de Force Majeure, ni du fait d’un tiers, ni de celui du créancier lui-même.

Ex: le vendeur qui se plaint de ce que l’acquéreur n’est pas venu retirer la chose vendue. La demande de résolution sera rejetée s’il s’avère que l’inexécution était dueau vice de la chose, imputable au vendeur.

En revanche, le demandeur n’a pas spécialement à établir l’existence d’un préjudice pour obtenir la résolution. Il ne sera tenu à cette preuve que s’il demande en outre des dommages et intérêts : il aura alors à remplir les conditions de la responsabilité civile : faute, causalité, préjudice.

 

La résolution peut être judiciaire ou volontaire. On verra ensuite ses effets.

 

A/ La résolution judiciaire

Aux termes de l’article 1184 du Code civil, la résolution n’intervient pas de plein droit, mais requière l’intervention du juge, saisi par le créancier de l’obligation inexécutée.

 

Le juge n’est jamais tenu de prononcer la résolution. En effet, 4 autres possibilités s’offrent à lui :

1°) Si les conditions de la responsabilité du débiteur sont remplies, il peut estimer que le créancier doit se contenter de dommages et intérêts.

2°) Il peut encore donner acte au débiteur qui propose de s’exécuter, en laissant au créancier la possibilité de faire une nouvelle demande de résolution si le débiteur ne s’exécute toujours pas.

3°) Il peut également, conformément à l’article 1184, alinéa 3, ajourner la résolution en accordant un délai de paiement au débiteur.

4°) La jurisprudence s’est également arrogée le pouvoir de ne prononcer qu’une résolution partielle du contrat, en réduisant la prestation due par le créancier en proportion du manquement imputable au débiteur.

Ex: Réduction du loyer en fonction du trouble de jouissance subi par le locataire du fait du propriétaire.

Il appartient donc au juge d’apprécier le bien-fondé de la résolution, et de rechercher éventuellement des solutions alternatives. Il prendra en compte la bonne ou lamauvaise foides parties, ainsi que le coût de la remise en état, et l’utilité que le créancier peut retirer d’une exécution simplement partielle de l’exécution.

 

S’il prononce la résolution, le juge pourra l’assortir d’une condamnation au paiement de dommages et intérêts,en réparation du dommage subi par l’autre du fait de l’inexécution fautive. Il se peut encore que la résolution soit prononcée aux torts réciproques des deux parties. Le juge devra alors déterminer la part de faute imputable à chacun dans l’inexécution du contrat.

Ex: A fait état de 60.000 francs de préjudice

B démontre pour sa part avoir subi un préjudice de 40.000.

Le Tribunal détermine la part d’intervention fautive de chacun :

A : 20 %

B : 80 %

Résultat: A devra à B 20 % de 40.000 = 8.000 francs

B devra à A 80 % de 60.000 = 48.000 francs.

Après compensation, B devra à A 40.000 francs.

 

B/ La résolution volontaire

La résolution judiciaire présente au moins trois défauts :

– elle est coûteuse ;

– elle prend du temps (12 à 18 mois) ;

– elle est aléatoire.

 

Pour pallier ces inconvénients, la pratique et la jurisprudence ont donc aménagé pour les parties la possibilité d’une résolution sans intervention judiciaire, à l’initiative d’une ou des deux parties.

 

1°)- La résolution conventionnelle

 

Si clause résolutoire expresse prévue dans le contrat, (qui stipule que, en cas d’inexécution par l’une ou l’autre partie), la résolution interviendra de plein droit, c’est-à-dire sans qu’il soit nécessaire de saisir le juge.

 

Cf : Contrat SFR : Article. 11-3 « En cas de non-paiement par l’abonné des sommes dues, et après l’envoi d’une lettre de relance (Mise en Demeure) restée sans effet au terme du délai précisé dans la lettre, SRR peut suspendre les services auxquels il a souscrit et résilier le contrat d’abonnement dans les conditions visées à l’article 12. La suspension des services entraîne l’exigibilité immédiate de toutes les sommes facturées à l’abonné ».

 

La validité d’une telle clause n’est plus contestée aujourd’hui: l’article 1184, qui prévoit la résolution judiciaire, n’est pas considéré comme une disposition impérative, et il est donc possible d’y déroger conventionnellement.

 

Le vrai problème est celui des abus qui pourraient résulter d’une telle clause.

 

La loi et les tribunaux interviennent pour éviter de tels excès :

La loi intervient a priori, en interdisant la clause résolutoire dans certains contrats (ex : bail rural,) ou en la réglementant (ct d’assurance).

–       Les tribunauxpeuvent intervenir a posteriori, lorsqu’ils sont saisis par l’une des parties qui estime que la mise en œuvre de la clause est disproportionnée par rapport à la gravité de l’inexécution.

 

L’examen de la Jurisprudence révèle que les tribunaux subordonnent la mise en œuvre de la clause à trois conditions :

* D’abord, la résolution doit impérativement être précédée d’une mise en demeure, sauf si les parties en ont convenu autrement, ou si l’obligation est une obligation de ne pas faire, ou qu’elle devait être exécutée dans un délai déterminé (cf. supra).

* Ensuite, la résolution ne jouera que si la clause est invoquée par le créancier de l’obligation inexécutée. On ne peut se prévaloir de sa propre inexécution pour échapper à la force obligatoire du contrat. Le créancier n’est nullement obligé d’invoquer la clause ; il peut toujours demander en justice l’exécution forcée, ou la résolution judiciaire.

* enfin, la clause ne peut être invoquée par le créancier au mépris du principe de bonne foi visé à l’article 1134, alinéa 3 du Code civil : « Les conventions doivent être exécutées de bonne foi ». Donc, lorsqu’il apparaît que la clause n’a pas été invoquée loyalement par le cocontractant, elle est judiciairement invalidée, et le contrat est rétabli.

 

Exemple jurisprudentiel: le vendeur à crédit qui s’abstient de réclamer pendant plusieurs années la rente prévue, qui laisse donc croire à l’acquéreur que, en raison des liens d’amitié existant entre les parties, rien ne lui sera réclamé, et qui soudainement se fonde sur le non-paiement des rentes pour invoquer la clause résolutoire.

Ex2 : Le bailleur qui reproche au preneur le non-paiement du loyer, fixé à un franc symbolique, alors que les autres prestations mises à la charge du locataire avaient été scrupuleusement exécutées (bail rural).

 

2°) La résolution unilatérale

 

Il peut arriver, à titre exceptionnel, que, en l’absence de clause résolutoire, une partie puisse unilatéralement invoquer la résolution sans faire appel à la justice.

La loi offre une illustration de cette situation : art. L. 113-3 alinéa 3 du Code des assurances : résolution unilatérale par la Compagnie d’assurance. En cas de non-paiement des primes, 30 jours après Mise en Demeure ; Résolution unilatérale par le vendeur de denrées périssables que l’acheteur ne vient pas retirer (article 1657 du code civil).

–       La Jurisprudence admet la résolution unilatérale dans le cas où la sauvegarde des intérêts de l’une des parties appelle l’urgente résolution du contrat en réaction à l’attitude de l’autre partie : ex : Expulsion du spectateur indélicat ;

 

C/ Les effets de la résolution

 

–       disparition rétroactive du contrat.

–       On se retrouve globalement dans les mêmes situations, et devant les mêmes difficultés que celles qu’on a vues en matière de nullité :

– Si le contrat n’a reçu aucun commencement d’exécution, le contrat disparaît purement et simplement ;

– Si le contrat a été exécuté, il y aura en principe lieu à des restitutions réciproques ;

– Si les restitutions sont impossibles, parce que le contrat est à exécution successive ou pour préserver les droits des tiers, on procédera à une résolution sans rétroactivité, mécanisme que l’on appelle la résiliation : pas de restitution, mais les parties sont désormais dispensées d’exécuter leurs obligations futures.

 

(Exception si le contrat est indivisible et ne supporte pas d’exécution partielle : contrat d’auto-école/prix forfaitaire : Cour de cassation. 13 janvier 1988. cf. Martin).

 

NB: La différence entre la nullité et la résolution apparaît dans le fait que la résolution frappe un contrat qui a été valablement conclu.

 

Il en résulte que, si la nullité frappe le contrat dans toutes ses stipulations, certaines clauses légalement formées peuvent au contraire survivre à la résolution. C’est le cas des clauses qui régissaient les conséquences de la fin du contrat. Tel est le cas de la clause pénale fixant une indemnité forfaitaire due en cas d’inexécution, ou de la clause de non-concurrence, prévoyant que le salarié ne pourra se faire embaucher chez un concurrent après la rupture de son contrat de travail. (Ça serait absurde d’anéantir ces clauses au motif d’une inexécution ou d’une résolution, alors qu’elles ont précisément pour objet de régler les conséquences de cette inexécution ou de cette résolution.)

 

*   *

 

On peut donc conclure ce chapitre en rappelant que le créancier d’une obligation inexécutée dispose de différentes options :

si le contrat est synallagmatique :exception d’inexécution dans l’attente que son cocontractant accomplisse sa propre prestation ;

–       Si l’exécution forcée est inutile, ou pas souhaitable, le créancier pourra par la suite, en même temps que ou à la place de l’exception d’inexécution :

–       agir en résolution du contrat,

–       faire jouer une éventuelle clause résolutoire,

–       soit demander au juge de prononcer la résolution du contrat ;

Quelle que soit la nature du contrat, le créancier pourra demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’il a subi.

 

NB: Il n’y a pas de cumul possible entre l’allocation de dommages et intérêts et l’exécution forcée de l’obligation : Exemple : Masseur-kiné à Piton St Leu engage une assistante – cl. de non-concurrence 10 km/5 ans à compter de la fin du contrat.

Selon la Cour d’Appel : Dommages et Intérêts + interdiction d’exercer

Selon la Cour de Cassationsur le fondement de l’article 1184 du Code civil : on exécute OU on indemnise.

 

Ces règles, comme toutes les règles que l’on a vues jusqu’à présent, sont des règles de droit commun, et sont donc en principe applicables à tous les types de contrats.

*   *

 

Deuxième Partie :
Les obligations nées d’un fait juridique : la responsabilité civile délictuelle

Au-delà du contrat et de l’acte unilatéral, le Code civil reconnaît un effet créateur d’obligations à de simples faits juridiques.

ÞAu terme de l’article 1382, et suivants du Code Civil., un délit, fait matériel illicite, engendre à la charge de son auteur une obligation de réparation du préjudice subi par la victime.

Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

C’est l’un des textes les plus célèbres du Code civil.

Ce texte et ceux qui le suivent, posent les bases de la responsabilité civile délictuelle.

 

Nature de la responsabilité délictuelle

  1. a)   Distinction des responsabilités civile et pénale

Ex : l’auteur d’un coup volontaire peut être poursuivi pénalement et tenu à indemniser la victime des conséquences dommageables de son acte.

Fonctions :

–       la responsabilité pénale tend à la punition du coupable, par le prononcé d’une peine et vise la réformation de son comportement, le tout dans l’intérêt général de la société.

–       la responsabilité civile, poursuit un but d’indemnisation de la victime, dans son intérêt privé.

Rapprochements :

–       la victime d’une infraction peut obtenir réparation de son préjudice devant le juge civil, mais elle peut également devant le juge pénal, dans le cadre d’une action civile jointe à l’action publique.

–       lorsqu’un même fait est source de responsabilité civile et pénale, les énonciations du jugement pénal ont une autorité absolue de chose jugée à l’égard du juge civil. C’est ce qu’on appelle « l’autorité au civil de la chose jugée au pénal ».

 

  1. b)   Distinction des responsabilités contractuelles et délictuelles

–       lorsque le dommage est causé par l’inexécution d’un contrat, la victime peut obtenir réparation du préjudice sur le fondement des articles 1147, et suivants du Code Civil., dans le cadre d’une responsabilité contractuelle.

–       lorsque le dommage est causé alors qu’aucun lien juridique préalable n’existait entre le responsable et la victime, celle-ci peut obtenir réparation sur la base des articles 1382, et suivants du Code civil.

 

Cette dualité est garantie par le principe de non-cumul posé par la jurisprudence (Civ., 11 janvier 1922, Gr. arrêts n°177) : en présence d’un contrat, le préjudice né de son inexécution doit nécessairement être indemnisé sur la base de la seule responsabilité contractuelle, même si le régime des articles 1382 et suiv. est plus favorable. En l’absence de contrat, la responsabilité délictuelle est nécessairement engagée.

 

La distinction entre les deux types de responsabilité est parfois remise en cause :

–       la Cour de cassation refuse parfois de censurer l’erreur de qualification commise par les juges du fond ou les parties lorsque l’application des règles conduit au même résultat.

–       depuis un arrêt de la cour de cassation chambre Criminelle., 15 juin 1923 (DP 1924, 135), le juge pénal, saisi d’une action civile en réparation, applique les seules règles de la responsabilité délictuelle, même lorsqu’un contrat existe entre le délinquant et la victime. Ainsi, un médecin coupable de coups et blessures involontaires à l’occasion des soins prodigués est civilement responsable sur le terrain délictuel.

–       la mise en œuvre des deux responsabilités n’étant pas toujours facile, certaines lois tendent à estomper la distinction en soumettant la question traitée au même régime, que les parties soient liées ou non par un contrat (ex : responsabilité en matière de fait des produits défectueux).

 

Evolution du droit de la responsabilité délictuelle

La matière (qui trouve son origine dans les écrits de Domat) a beaucoup évolué depuis 1804, même si les textes des Codes sont restés inchangés.

Les règles présentaient de forts liens avec la responsabilité morale. C’est pourquoi la responsabilité était par principe fondée sur la faute.

C’est la survenance de la révolution industrielle qui a constitué le tournant de l’histoire du droit de la responsabilité civile. Le développement du machinisme et de l’industrialisation a créé de nouveaux risques, source d’accidents multiples, qui ont modifié les fondements de la responsabilité civile.

On a, peu à peu, reconnu l’existence de responsabilités sans faute. Cela a été notamment rendu possible grâce au développement de l’assurance de responsabilité civile, permettant de mieux indemniser les victimes.

 

La doctrine a cependant du justifier qu’un individu puisse être déclaré responsable en dehors de toute faute de sa part.

Deux théories ont été proposées :

  1. La théorie du risque

Elle a été exprimée par Saleilles, à la fin du XIXe siècle et reprise notamment par Josserand.

Selon cette théorie, lorsqu’une activité créé un danger spécial pour autrui, le créateur du risque est tenu, de ce seul fait et en dehors de sa faute, à l’indemnisation des dommages causés aux tiers. Par son activité, l’homme se procure un profit ; il est juste qu’en contrepartie, il répare les dommages qu’elle provoque.

Cette théorie a été critiquée, notamment par Planiol. On lui reprocha notamment, par la liaison automatique qu’elle établit entre création d’un risque et responsabilité, de condamner l’homme à l’immobilité. La théorie a cependant fortement imprégné notre droit positif.

 

  1. La théorie de la garantie

La théorie de la garantie est due aux travaux de Starck. Pour lui, il faut rechercher les fondements de la responsabilité du côté de la victime. Lorsqu’une personne est atteinte dans ses droits essentiels, le système juridique, garant de ses prérogatives, doit prononcer une sanction en condamnant le responsable à la responsabilité des dommages causés. L’obligation d’indemnisation est fondée sur la simple nature des droits atteints, indépendamment du comportement du responsable.

 

Evolution : le développement des lois d’indemnisation.

L’interprétation des articles 1382, et suivants du Code civil ne permet pas d’indemniser systématiquement les victimes. Seuls la faute, le fait des choses et le fait d’autrui fondent, dans le Code civil, une obligation à réparation. Cela ne résout pas par ailleurs le problème de la solvabilité du débiteur.

C’est pourquoi on a souhaité l’adoption de lois d’indemnisation, offrant aux victimes des conditions souples et des garanties financières de réparation. Ce mouvement de socialisation des risques a conduit à la prise en charge par la collectivité de dommages particuliers : la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation et du 19 mai 1998 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux ; la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé qui reconnaît un droit à indemnisation au profit des victimes d’un accident médical non fautif. Lorsque les conditions seront réunies, la victime pourra obtenir indemnisation auprès d’un fonds, dénommé office national d’indemnisation.

Titre 1 : Les faits générateurs de la responsabilité civile délictuelle

Au terme de l’article 1382 du Code Civil « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ».

Ce texte pose les bases de la responsabilité délictuelle pour faute, appelée aussi responsabilité subjective (chapitre 1).

Mais on peut également être responsable du fait des choses (chapitre 2) et du fait d’autrui (chapitre 3).

 

Chapitre 1 : La responsabilité du fait personnel

Les articles 1382 et 1383 du Code Civil fondent l’obligation à réparation du préjudice sur la faute du responsable, qui doit être prouvée par la victime.

Nous préciserons les éléments constitutifs de la faute (1) avant d’en étudier le régime (2) et notamment sa disparition.

 

Section 1 : Les éléments constitutifs de la faute
§ 1 : Définition de la faute

La notion de faute délictuelle n’est pas définie par le Code civil, même s’il distingue la faute volontaire (article 1382 du Code Civil – délit) de la faute involontaire d’imprudence (article 1383 du Code Civil (quasi-délit).

Planiol a défini la faute comme la violation d’une obligation préexistante, la doctrine s’accorde aujourd’hui à considérer que la faute est constituée de deux éléments : un élément objectif et un élément subjectif.

 

A/ L’élément objectif de la faute

1°) la violation d’une norme de conduite

La faute civile peut résulter :

–       d’une faute de commission : violation d’une règle de droit écrit (code de la route, droit du travail, droit de la construction) ; violation d’une règle coutumière (pratique d’un sport et méconnaissance des règles du jeu)

D’une façon générale, il peut s’agir de tout comportement apparaissant contraire à l’attitude qu’un homme normalement diligent aurait dû adopter.

–       d’une faute d’abstention : (arrêt Branly du 27 février 1951) : cette faute n’implique pas une intention malveillante mais elle ne peut être sanctionnée qu’à la condition que le responsable ait été contraint à l’action d’une obligation préexistante.

 

2°) faute appréciée par le juge

Pour qualifier de faute le comportement du responsable, le juge doit réaliser une appréciation in abstracto de sa conduite en la confrontant à celle qu’aurait eu un individu moyen : le « bon père de famille ». On ne tient pas compte des particularités strictement personnelles du responsable.

Ensuite, si la faute est reconnue, peu importe que la faute soit légère ou grave, peu importe également que la faute soit intentionnelle ou non. La volonté ne doit pas être confondue avec l’intention ; la volonté porte juste sur le comportement fautif.

 

B/ L’élément subjectif de la faute

La faute délictuelle supposait traditionnellement que le responsable ait eu conscience de la portée de ses actes. Cette faute subjective devait être imputable au responsable, excluant par exemple les malades mentaux ou les mineurs en bas âge.

Les choses ont évolué vers une faute objective afin de permettre aux victimes d’être indemnisées.

 

1°) Les personnes atteintes de troubles mentaux

Une loi du 3 janvier 1968 a introduit un nouvel article dans le Code civil : l’article 489-2 :

« celui qui a causé un dommage à autrui alors qu’il était sous l’empire d’un trouble mental, n’en est pas moins obligé à réparation ».

 

Conditions : un trouble mental : cela ne s’étend pas à des troubles de conscience indépendants d’une maladie mentale ; en revanche le texte s’applique que le malade soit mineur ou majeur.

Effets : le texte permet à la victime d’obtenir indemnisation du dommage causé par l’aliéné dans tous les cas de responsabilité prévus aux articles 1382 et suivants du Code Civil.

Cela ne crée pas un régime autonome de responsabilité. Un comportement peut être qualifié de faute indépendamment de l’état de conscience de son auteur. La faute se cantonne à la simple méconnaissance d’une norme de comportement, abstraction faite de tout élément subjectif.

 

2°) L’enfant dépourvu de discernement (l’infans)

Le Code civil a toujours admis qu’un mineur puisse être responsable sur le terrain délictuel (article 1310du Code Civil.). La responsabilité pour faute de l’enfant était en revanche exclue jusqu’en 1984. On estimait qu’en raison de son jeune âge, l’infans était dépourvu de réelle conscience.

La Cour de cassation a cependant opéré un important revirement par deux arrêts Assemblée plénière. Assemblée Plénière., 9 mai 1984, Derguini et Lemaire.

ÞPar ces décisions on a abandonné l’imputabilité comme élément de la faute délictuelle.

Dans ces espèces, les faits laissaient apparaître une faute d’un enfant victime, invoquée par le responsable comme moyen d’exonération de sa propre responsabilité. La Cour de cassation a affirmé qu’une faute peut être retenue, sur le fondement de l’article 1382 du Code Civil sans que la Cour d’appel n’ait à vérifier si l’enfant était capable de discerner les conséquences de ses actes. Une conception objective de la faute est donc imposée par la jurisprudence.

Autrement dit : la capacité de discernement de l’auteur de la faute est indifférente à l’application de l’article 1382. L’imputabilité n’est donc plus un élément de la faute.

 

Si l’infans est l’auteur du fait dommageable, la victime peut agir directement contre l’infans sur le fondement des articles 1382 et suivants. Mais la victime agira le plus souvent sur le fondement de l’article 1384, alinéa 1 du Code Civil.

Si l’infans est la victime : la solution de 1984 permet d’opposer à l’infans sa faute pour diminuer son droit à dommages-intérêts.

 

 

La faute de l’infans est appréciée de manière abstraite, par référence au « bon père de famille » (Civ. 2e, 28 février 1996).

 

Section 2 : La disparition de la faute

Les articles 1382 et 1383 du Code Civil instaurent une responsabilité pour faute prouvée, dont les conditions doivent être établies par la victime. Le responsable peut se défendre en démontrant que, contrairement aux apparences, son comportement n’est pas fautif.

 

§ 1 : Exonération pour cause étrangère

La cause étrangère est un fait extérieur au responsable qui, opérant une rupture du lien de causalité entre la faute et le dommage subi par la victime, permet son exonération.

La notion se rapproche de celle retenue dans le domaine de la responsabilité contractuelle.

L’exonération peut résulter :

–       d’un événement de force majeure, événement irrésistible, imprévisible et extérieur contraignant le responsable à la commission du fait dommageable.

–       du fait d’un tiers ou de la victime, sans que ces faits soient nécessairement fautifs. Ils doivent cependant : être à l’origine du dommage et présenter les caractères de la force majeure.

NB : s’il ne présente pas les caractères de la Force Majeure, le fait doit être fautif et donne lieu  à un partage de responsabilité et donc à une exonération partielle, appréciée par le juge proportionnellement à la gravité des fautes respectives.

 

§ 2 : Exonération par faits justificatifs

La notion de fait justificatif est issue du droit pénal et désigne des circonstances matérielles ou juridiques dont la réalisation neutralise la responsabilité. L’auteur du fait dommageable n’est donc pas déclaré responsable, car l’élément illicite de la faute est justifié par un élément qui en paralyse la sanction.

Le droit civil retient l’effet exonératoire de tous les faits justificatifs consacrés par le droit pénal : ordre ou autorisation de la loi, commandement de l’autorité légitime, légitime défense, état de nécessité.

La notion est toutefois entendue plus largement en droit civil :

–       acceptation des risques : le responsable peut tenter de justifier son comportement en opposant à la victime son acceptation des risques né de l’activité dommageable : transport bénévole, activité sportive. Conditions : que l’acceptation soit libre et éclairée et qu’elle ait porté sur un risque normal de l’activité envisagée.

–       consentement de la victime : sauf pour les dommages corporels car le corps humain est indisponible (article 16-1du Code Civil.).

 

NB : les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité, déjà exceptionnelles en matière de responsabilité délictuelle en raison de l’absence de rapport préalable avec la victime (mais un magasin peut afficher qu’il décline toute responsabilité envers les visiteurs), sont sans effet dans le domaine de la responsabilité délictuelle pour faute, les articles 1382 et 1383 étant d’ordre public.

 

Chapitre 2 : La responsabilité du fait des choses

La possibilité pour un sujet de droit d’être responsable du fait d’une chose n’avait été envisagée en 1804 que dans des hypothèses limitées. Il n’y avait guère que les articles 1385 et 1386 (animaux et bâtiments en ruine).

Cette responsabilité a fait l’objet d’une évolution historique considérable :

ÞÉvolution technologique

ÞL’arrêt Teffaine (16 juin 1896) et l’arrêt Jand’heur (Chambres réunies, 13 février 1930) ont découvert un principe général du fait des choses, fondé sur l’article 1384, al. 1du Code Civil.

La responsabilité du fait des choses résulte donc soit du principe général posé à l’article 1384, al. 1, soit des régimes spéciaux prévus par d’autres textes.

 

Section 1 : Le principe général de responsabilité du fait des choses

L’article 1384, alinéa 1 du Code Civil dispose que : « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».

 

§ 1 : Contenu du principe

ÞUne chose sur laquelle une personne exerce un pouvoir de garde doit avoir causé un dommage à autrui.

A/ notion de chose

Le terme est vague et peut s’appliquer à tout objet, quelle soit sa nature physique (ex : onde électrique, sonore, image de télévision). La nature juridique est aussi indifférente (meuble ou immeuble).

Exceptions : les choses régies par des textes spéciaux (animaux, par ex.) ; le corps humain (car il n’est pas une chose) (sauf quand il forme un tout avec une chose – vélo, skis – ; exclusion des choses sans maître (eau de pluie) ou abandonnées (car personne n’exerce à leur égard de pouvoir de garde). Cependant l’appropriation, même momentanée de la chose change la solution (ex de l’adolescent qui donne un coup de pied dans une bouteille abandonnée et qui blesse quelqu’un Þil en devient le gardien).

 

B/ fait de la chose

Cela renvoie à une exigence de causalité. La chose doit avoir été « l’instrument du dommage ».

La charge de la preuve de cette condition varie selon les situations :

1°) chose en mouvement entrée en contact avec la victime

ÞLorsque la chose est animée d’un certain dynamisme (chose qui se déplace, qui explose), une quasi certitude existe quant à son rôle causal. On présume alors le fait de la chose. La victime doit seulement prouver l’intervention matérielle de la chose.

Il s’agit d’une présomption simple, qui peut être renversée par le gardien (en démontrant, par ex, le rôle passif de la chose).

2°) autres hypothèses

Lorsque une chose est totalement inerte ou n’est pas entrée en contact avec la victime (un passant percute une vitrine et se blesse), un doute surgit : le dommage est-il dû à la chose inerte ou à l’inattention de la victime ?

La jurisprudence imposait à la victime de prouver le fait de la chose (position ou comportement anormal de la chose). Actuellement, plusieurs arrêts de la Cour de cassation ont étendu la présomption du rôle actif de la chose lorsque la victime était entrée directement en contact (civ. 2e, 29 avril 1998).

 

C/ garde de la chose

La notion de garde est essentielle à la mise en œuvre de l’article 1384, al. 1.

La notion a fait l’objet d’une évolution de la jurisprudence. Elle adoptait une conception juridique de la garde en considérant que la garde est exercée par le propriétaire de la chose. La solution était problématique quand l’intéressé avait été dépossédé de son bien, suite à un vol, par exemple.

Par un arrêt de principe (Chambres Réunies, 2 décembre 1941, Franck), la Cour de cassation a adopté une conception matérielle de la garde : une personne privée « de l’usage, de la direction et du contrôle » d’un véhicule du fait d’un vol en a perdu la garde.

C’est ainsi qu’est définie la garde aujourd’hui.

Cette définition implique qu’un préposé ne peut jamais être gardien, car il n’exerce pas de pouvoir autonome de contrôle et de direction sur la chose qu’il utilise dans l’exécution de sa mission (Civ. 2e, 1er avril 1998).

Pourtant, un arrêt du 9 mai 1984 de l’Assemblée plénière, Gabillet, affirme qu’un enfant peut être déclaré gardien de la chose, sans qu’il soit nécessaire de caractériser sa capacité de discernement. Cette solution altère la notion de garde puisque l’exercice d’un réel pouvoir de contrôle et de direction sur une chose semble impliquer une capacité de discernement.

 

Détermination du gardien

On présume qu’il s’agit du propriétaire. Mais il peut démontrer qu’au moment des faits, la garde (usage, contrôle et direction) de la chose avait été transférée volontairement ou non à un tiers. Ce dernier devient ainsi gardien de la chose. La jurisprudence est exigeante dans l’appréciation du transfert de garde, qui ne doit pas être confondu avec le simple usage de la chose par un tiers et suppose que le propriétaire lui a réellement confié des pouvoirs de contrôle et de direction sur la chose.

Le transfert de garde volontaire résulte le plus souvent d’un contrat (vente ou louage de chose, mais moins évident dans le cas du prêt).

 

Distinction de la garde de la structure et de la garde du comportement

Depuis l’arrêt Franck, la garde est alternative. Mais la solution est parfois inopportune.

La personne à qui la chose a été confiée par son fabricant, pour la vendre ou la transporter, est considérée comme gardienne et se trouve responsable alors que la chose était complexe et/ou dangereuse. Lorsqu’une bouteille de gaz explose chez un commerçant, il doit indemniser les victimes, même si l’explosion est due à un défaut de fabrication.

Certains auteurs (Goldman) ont proposé de distinguer. Le fabricant est le gardien de la structure et responsable des dommages dus aux vices de la chose, le détenteur serait gardien du comportement et responsable des dommages dus à une utilisation défectueuse.

Cette distinction a été retenue par un arrêt Oxygène liquide du Civ. 2e, 5 janvier 1956.

 

NB : la distinction ne va peut-être plus survivre aux nouveaux articles. 1386-1 et suivants. du Code Civil.

 

NB : La garde commune est exceptionnelle (joueurs de foot gardiens du ballon). Elle entraîne une responsabilité in solidum des différents gardiens. Mais si la victime était elle-même gardienne (joueur de tennis), elle ne peut demander aucune indemnisation, car la qualité de gardien est exclusive de celle de victime.

 

§ 2 : Régime du principe

Depuis l’arrêt Jand’heur, la responsabilité du fait des choses est une responsabilité sans faute, purement objective.

La responsabilité du gardien est engagée du seul fait que la chose sur laquelle il exerçait ses pouvoirs de garde a causé un dommage à autrui.

Le gardien peut cependant démontrer que les conditions de la responsabilité n’étaient pas réunies : rôle passif de la chose, transfert de garde.

Il peut invoquer aussi une cause étrangère.

Section 2 : Les régimes spéciaux de responsabilité du fait des choses

=) fait des animaux, ruine d’un bâtiment, accidents du travail, incendie de la chose, dommages causés par les avions, abordages, troubles du voisinage, accidents de la circulation, fait des produits défectueux

§ 1 : La responsabilité du fait des animaux

Prévue à l’article 1385 du Code Civil, la responsabilité du fait des animaux a été le premier cas de responsabilité du fait des choses. Ce texte est applicable, chaque fois qu’un animal est à l’origine d’un dommage.

 

Conditions d’application

Elles sont alignées sur l’article 1384, al. 1du Code Civil.

–       tout animal, quelle que soit sa nature biologique, relève du texte. La seule condition est qu’il soit approprié (peu importe qu’il se soit échappé).

–       l’animal doit avoir causé un dommage.

–       cela entraîne la responsabilité du propriétaire ou de l’utilisateur de l’animal (l’article 1385 ne faisant pas référence à la garde).

 

Régime de responsabilité

C’est une responsabilité sans faute ; la preuve d’une faute n’est donc pas nécessaire. Le propriétaire de l’animal peut s’exonérer par la force majeure, le fait du tiers ou de la victime.

 

§ 2: La responsabilité du fait de la ruine d’un bâtiment

Cette responsabilité est prévue à l’article 1386du Code Civil. Elle s’éloigne du régime de l’article 1384, al. 1du Code Civil.

 

Conditions d’application

–       bâtiment : toute construction en matériaux durables élevée par l’homme et fixée au sol. Sont exclus les ouvrages naturels (grottes, souterrains) et les constructions provisoires.

–       Le dommage doit être dû à la ruine du bâtiment : il s’agit de sa destruction totale ou partielle. Cette ruine doit elle-même être due à un défaut d’entretien ou un vice de construction.

 

Régime de responsabilité

C’est une responsabilité sans faute dont le propriétaire ne peut s’exonérer que par la preuve d’une cause étrangère.

Elle pèse sur le propriétaire même si la ruine est due à la négligence d’un autre (locataire, par ex, ou constructeur ; il aura cependant un recours contre eux).

La Cour de cassation vient de décider que l’action sur le fondement de l’article 1386, contre le propriétaire, n’empêchait pas la victime d’agir contre le gardien de la chose sur le fondement de l’article 1384, al. 1. (Civ. 2e, 23 mars 2000, R.T.D.Civ.  2000, 581).

 

§ 3: La responsabilité du fait des accidents de la circulation

ÞLa loi Badinter du 5 juillet 1985.

Les accidents de la circulation sont la principale source de dommages corporels d’origine accidentelle. Or, jusqu’en 1985, aucune loi particulière ne régissait l’indemnisation de ces préjudices, dont la réparation devait être recherchée sur le seul fondement du droit commun de la responsabilité. La doctrine (dont Tunc) a plaidé en faveur de l’adoption d’un texte particulier.

La loi de 1985 opère une rupture avec le droit commun de la responsabilité. Le but de la loi n’est pas la recherche d’un responsable, mais d’un débiteur d’indemnités solvable et, à travers lui, d’un assureur apte à garantir l’indemnisation de la victime.

 

A/ Conditions de l’application de la loi du 5 juillet 1985

NB : la loi Badinter transcende la distinction des responsabilités contractuelle et délictuelle.

3 conditions :

1°) la victime doit subir un préjudice à l’occasion d’un accident de la circulation

Cette notion désigne tout événement soudain et fortuit, présentant un lien avec la circulation. L’accident doit donc avoir eu lieu sur une voie ouverte au trafic public, et présenter un lien de déplacement du véhicule. La loi reste applicable si le véhicule est en stationnement.

 

2°) l’accident doit impliquer un véhicule terrestre à moteur

Il s’agit de tout engin ayant une force motrice, apte au transport des personnes ou des choses et évoluant sur le sol. Sont donc exclus les moyens de transport non terrestres (avion, bateau) ou non motorisés (vélo) ou circulant sur des voies propres (train, tramways).

La notion d’implication permet de condamner à indemnisation tout conducteur ayant participé à un titre quelconque à l’accident, même lorsque son action n’en est pas la cause. Ainsi, lors d’un accident en chaîne, le passager du premier véhicule peut demander indemnisation des préjudices à tout conducteur mêlé au fait accidentel.

Il faut cependant distinguer :

–       1re hypothèse : véhicule entré en contact avec la victime Þl’implication est établie, que le véhicule soit en mouvement ou en stationnement (Civ. 2e, 23 mars 1994, J.C.P. 1994, II, 22292).

–       2e hypothèse : absence de contact entre le véhicule et la victime Þla victime doit établir la preuve de l’implication du véhicule. Mais la jurisprudence se montre peu exigeante quant à l’établissement de cette preuve. Ex : Civ. 2e, 13 juillet 2000, admettant l’implication d’un véhicule dont l’alarme s’était déclenchée, effrayant des chevaux qui causèrent un accident 10 Km plus loin et 20 minutes après la mise en route de l’alarme.

 

3°) le dommage doit être imputable à l’accident

Cette question a fait l’objet d’une évolution jurisprudentielle. Jusqu’en 1989, la jurisprudence n’exigeait pas que le dommage soit imputable à l’accident. L’implication du véhicule suffisait. A partir d’un arrêt Civ. 2e, 28 juin 1989, la Cour de cassation a admit que le conducteur pouvait s’exonérer en prouvant que la victime était déjà blessée lorsqu’il l’a percutée. Cela introduisait ainsi une exigence d’imputabilité du dommage à l’accident que la victime devait prouver.

La jurisprudence considère aujourd’hui que l’imputabilité doit être présumée en cas d’implication du véhicule (Civ. 2e, 19 février 1997, D. 1997, 384), le conducteur pouvant apporter la preuve contraire.

 

NB : la victime ne peut agir que contre le conducteur du véhicule impliqué. S’il agit contre une personne non conductrice, l’action doit se fonder sur le seul droit commun.

 

B/ Moyens d’exonération du défendeur

Article 2 : « les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d’un tiers par le conducteur ou le gardien d’un véhicule ». La seule cause d’exonération admise est donc la faute de la victime

1°) faute de la victime non conductrice (piétons, cyclistes, passagers des véhicules).

–       lorsqu’il s’agit d’un dommage causé à ses biens, toute faute de sa part peut lui être opposée, quelle que soit sa gravité, pour restreindre son droit à indemnisation

–       lorsque le dommage est corporel, l’opposabilité de la faute de la victime n’est admise que dans des conditions strictes et variant selon la qualité de la victime : les victimes âgées de moins de 16 ans, de plus de 70 ans ou titulaires d’un titre leur reconnaissant une incapacité d’au moins 80%, ne peuvent être privées de leur droit à réparation que si elles ont volontairement recherché le dommage. A toutes les autres victimes, le défendeur peut opposer, outre la recherche volontaire du dommage, leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident ; ce qui limite les possibilités d’exonération puisqu’un accident a généralement plusieurs causes.

La faute inexcusable est la « faute volontaire, d’une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience (Civ. 2e, 20 juillet 1997, Gr. arrêts n°223).

 

2°) faute de la victime conductrice

Le conducteur est soumis à un régime encore moins favorable : « la faute commise par le conducteur du VTM a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis » (article 4).

Le « conducteur » est tout individu exerçant une maîtrise sur le véhicule au moment de l’accident. La personne éjectée du véhicule a pu perdre cette qualité.

L’article 4 a été interprété par deux arrêts du 22 mai 1997 et du 28 mars 1997 : « lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l’indemnisation des dommages qu’il a subis, sauf s’il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; il appartient alors au juge d’apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l’indemnisation ou de l’exclure ».

 

§ 4: La responsabilité du fait des produits défectueux

La loi du 19 mai 1998 a introduit dans le Code civil les articles 1386-1, et suiv. Elle illustre la volonté du législateur de développer des techniques d’indemnisation des victimes en marge des cas classiques prévus par le Code civil.

Cette loi constitue la transposition (tardive) de la directive communautaire du 25 juillet 1985 imposant une responsabilité sans faute du producteur de produits défectueux.

 

A/ Conditions de la responsabilité du fait des produits défectueux

Les articles 1386-1 et suivants du Code Civil offrent à la victime une action en indemnisation, dès l’instant où elle a subi un dommage causé par le fait d’un produit défectueux, sans qu’une faute du producteur n’ait à être établie : « le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit… ».

 

La notion de produit est définie à l’article 1386-3 du Code Civil comme tout bien meuble, même incorporé dans un immeuble. La notion est large, car les éléments du corps humain peuvent y être assimilés. (Les immeubles restent soumis aux règles spéciales de la responsabilité des constructeurs).

Le fait générateur de la responsabilité est la défectuosité du produit (article 1386-4du Code Civil.). C’est le cas quand celui-ci n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre, notamment lorsque la chose est dangereuse en elle-même du fait de sa conception, de sa fabrication ou de son utilisation.

La responsabilité n’est encourue du fait de la défectuosité du produit qu’à la condition que celui-ci ait été mis en circulation. Cette notion, voisine de la commercialisation, implique que le producteur se soit dessaisi volontairement de la chose. Elle n’impose toutefois pas un transfert de propriété au profit de la victime.

 

B/ Mise en œuvre du droit à indemnisation

La responsabilité instaurée par les articles 1386-1 et suivants du Code Civil est une responsabilité sans faute dont les conséquences doivent être supportées par le producteur, qu’il soit ou non lié à la victime par un contrat.

La victime peut aussi se retourner contre toute personne ayant participé à l’élaboration ou à la commercialisation du produit.

Il s’agit ensuite de respecter un double délai :

–       délai de péremption : c’est la période maximale pendant laquelle le producteur garantit la sécurité de son produit = 10 ans suivant la mise en circulation (article 1386-16du Code Civil.).

–       délai de prescription : c’est la période pendant laquelle la victime peut demander une indemnisation au producteur du dommage causé par le produit. Ce délai est fixé à 3 ans à compter de la connaissance du dommage ou de l’identité du producteur.

 

Causes d’exonération : (article 1386-11du Code Civil.)

ÞNotamment : exonération pour risque de développement (défaut qu’il est impossible de prévoir, eu égard à l’état des connaissances scientifiques, lors de la mise en circulation du produit), à l’exception des dommages causés par un élément ou un produit du corps humain (article 1386-12du Code Civil.).

 

Conclusion : Si les conditions requises sont réunies, la victime a droit à la réparation intégrale de son préjudice, à l’exclusion des dommages causés à la chose elle-même. Par ailleurs, la victime reste libre d’agir sur le terrain du droit commun de la responsabilité (article 1386-18du Code Civil.).

 

Chapitre 3 : La responsabilité du fait d’autrui

Dans certaines hypothèses, le Code civil reporte la charge de la responsabilité sur un tiers. La victime peut obtenir réparation d’une personne qui n’a pas matériellement causé le dommage, mais qui est responsable du fait d’autrui.

Ce type de responsabilité n’était prévu dans le Code civil que dans des hypothèses spéciales. Ces textes étaient appliqués limitativement par les tribunaux car ils sont une exception au principe selon lequel on n’est responsable que de son propre fait (1).

La jurisprudence ultérieure a toutefois dégagé un principe général de responsabilité du fait d’autrui (2).

 

Section 1 : Les régimes spéciaux de responsabilité du fait d’autrui

L’article 1384 du Code Civil prévoit 4 régimes spéciaux de responsabilité du fait d’autrui : celle des parents du fait des enfants mineurs ; celle des commettants du fait des préposés ; de l’artisan du fait des apprentis ; des instituteurs du fait de leurs élèves.

 

§ 1 : La responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs

L’article 1384, alinéa 4 du Code Civil prévoit que :

« Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ».

Lorsqu’un dommage est causé par un enfant, la victime dispose d’un choix d’action : agir contre le mineur (1382 ou 1383) ou agir contre ses parents (1384, al 4).

L’interprétation de ce texte a évolué.

 

A/ Les conditions de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs

L’enfant doit bien sûr être mineur. S’ajoutent d’autres conditions :

 

1)    les parents doivent exercer l’autorité parentale (article 372, suivants du Code Civil).

L’exercice de l’autorité parentale peut être conjoint (que les parents soient mariés ou non, qu’ils soient ou non séparés, à partir du moment où le lien de filiation a été établi à l’égard des deux (loi 4 mars 2002).

L’exercice de l’autorité parentale peut être unilatéral (impossibilité de l’un des parents – article 373 ; 373-1du Code Civil. – ou retrait autorité parentale – article 378du Code Civil. – ; séparation des parents lorsque l’intérêt de l’enfant justifie de ne soient confiées qu’à un seul parent ; lien de filiation établi tardivement à l’égard de l’un des parents, sauf déclaration conjointe)

 

2)  cohabitation avec l’enfant

A défaut de cohabitation, la responsabilité des parents ne peut être engagée.

On considérait auparavant que toute rupture, même brève, de la communauté de vie, excluait l’application de l’article 1384, al. 4.

La jurisprudence s’est ensuite assouplie, excluant les ruptures brèves de communauté de vie.

Puis : Civ. 2e, 19 février 1997 Bertrand : interprétation juridique de la notion de cohabitation : la responsabilité est liée à la qualité de titulaire de l’autorité parentale. La cohabitation doit s’entendre comme la résidence habituelle de l’enfant au domicile des parents. + Dans l’hypothèse de parents divorcés « l’exercice d’un droit de visite et d’hébergement (chez celui qui n’a pas l’autorité parentale, ne fait pas cesser la cohabitation du mineur avec celui des parents qui exerce sur lui le droit de garde ». Il fut ensuite précisé que le fait de confier temporairement l’enfant à un tiers (centre médical), ne faisait pas cesser la cohabitation avec les parents.

 

3)  fait de l’enfant

La jurisprudence traditionnelle exigeait que ce fait soit fautif. Un arrêt Assemblée. Assemblée Plénière., 9 mai 1984, Fullenwarth) a affirmé qu’un acte simplement causal de l’enfant suffisait. Il suffit donc d’établir le rôle causal du fait de l’enfant dans la production du dommage.

 

B/ Le régime de la responsabilité des parents du fait de leurs enfants mineurs

La nature de cette responsabilité n’est pas précisée.

La jurisprudence traditionnelle considérait que cette responsabilité était une responsabilité pour faute présumée dans l’éducation ou la surveillance de l’enfant. La victime n’avait pas de faute à prouver mais les parents pouvaient apporter la preuve contraire. Cependant, l’exonération était devenue très difficile.

La jurisprudence a ensuite affirmé (arrêt Bertrand) qu’il s’agissait d’une responsabilité objective (responsabilité sans faute). Les parents ne peuvent s’exonérer en démontrant qu’ils ont correctement éduqué ou surveillé l’enfant, seule la cause étrangère peut conduire à l’exonération.

 

§ 2: La responsabilité du commettant du fait ses préposés

Instaurée par l’article 1384, al. 5du Code Civil., la responsabilité du commettant du fait de ses préposés permet à la victime d’obtenir indemnisation d’une personne qui exerçait une autorité sur l’auteur du fait dommageable, née le plus souvent d’un contrat de travail.

 

A/ Conditions

Trois conditions :

  1. un rapport de préposition

Un rapport de préposition entre le responsable et l’auteur du fait dommageable = « droit de donner au préposé des ordres ou des instructions sur la manière de remplir les fonctions auxquelles il est employé » (Civ., 4 mai 1937, Gr. arrêts n°210).

Un tel pouvoir naît généralement d’un contrat de travail.

NB : même si l’auteur du fait dommageable dispose, dans l’exercice de sa mission, d’une totale liberté intellectuelle, l’article 1384 demeure applicable. Une clinique est par exemple responsable du fait de son médecin salarié.

Le lien de préposition peut naître autrement : dès l’instant où une personne exerce à l’égard d’une autre un pouvoir d’autorité permettant de lui donner des ordres lors de l’accomplissement d’une mission, le lien de préposition peut être retenu.

 

  1. Fait du préposé

Ce fait est généralement fautif mais une faute objective suffit.

 

  1. Lien avec les fonctions

Le fait dommageable doit avoir été accompli pendant les fonctions auxquelles le préposé était employé.

Pb pour certains actes, accomplis pendant les fonctions, mais étrangers à elles. Ex : un employé de banque détourne les fonds remis par les clients. C’est un cas ici d’abus de fonction. Le problème a donné lieu à une controverse jurisprudentielle. La jurisprudence a été finalement fixée par un arrêt de l’Assemblée. Plénière., 19 mai 1988, Grands arrêts n°215, qui affirme que l’abus de fonction est constitué lorsque « le préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions ».

Abus de fonction : 3 conditions cumulatives : acte du préposé hors de ses fonctions (horaires, lieux, moyens) ; absence d’autorisation ; fins étrangères aux attributions (le préposé doit avoir agi à des fins personnelles, ce qui exclut le cas où il agit dans l’intérêt de son commettant)

Appréciation de l’abus de fonction : si la victime ne pouvait légitimement croire que le préposé agissait dans le cadre de ses fonctions, la responsabilité du commettant est écartée.

 

B/ Régime

La responsabilité du commettant est une responsabilité sans faute, purement objective. Les possibilités d’exonération sont restreintes : non réunion des conditions ou cause étrangère.

 

Action :

Traditionnellement, le commettant se substituait au préposé dans ses seuls rapports avec la victime, le préposé demeurant le débiteur définitif. L’action pouvait donc être engagée soit contre le commettant, soit contre le préposé ; le commettant disposait d’une action contre le préposé.

Evolution : arrêt Assemblée. Plénière., 25 février 2000, Costedoat, rendu sous le double visa de 1382 et 1384, alinéa 5 : « n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant.

Complété par Assemblée. Assemblée Plénière., 14 décembre 2001, Cousin : « le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fut-ce sur l’ordre du commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à l’égard de celui-ci ».

Conséquences :

–       la victime ne peut agir contre le préposé que si celui-ci a dépassé le cadre de sa mission ou a commis une infraction pénale intentionnelle. Dans les autres cas, seule une action contre le commettant demeure possible.

–       le recours du commettant est impossible lorsque le préposé était dans le cadre de sa mission

 

§ 3 : La responsabilité de l’artisan du fait de ses apprentis

Cette responsabilité est instaurée à l’article 1384, al. 6du Code Civil. Elle a ensuite été rapprochée de la responsabilité des parents.

Conditions :

L’apprenti doit avoir commis un fait illicite (faute ou fait des choses) ayant causé un dommage à un tiers.

Il faut donc une relation d’apprentissage : la responsabilité pèse sur toute personne qui dispense une formation professionnelle à un mineur dans le cadre d’une relation de travail. Peu importe l’existence d’un contrat d’apprentissage valable ou pas.

Ensuite, l’artisan n’est responsable que s’il exerce à l’égard de l’apprenti un pouvoir de surveillance. Si l’apprenti habite avec lui, sa responsabilité est permanente et peut être engagée même si le fait dommageable a été commis en dehors des heures ou des jours de travail et ne cesse que lorsque l’apprenti retourne chez ses parents. Dans le cas contraire, sa responsabilité est limitée aux périodes de travail.

 

Nature de la responsabilité :

On considérait traditionnellement que le tout reposait sur une responsabilité simple de faute. Depuis l’arrêt Bertrand, on considère que la responsabilité devrait être une responsabilité objective.

 

§ 4 : La responsabilité de l’instituteur du fait de ses élèves

Dans la version originaire du Code civil, la responsabilité des instituteurs obéissait à un régime voisin de celle des parents à laquelle elle se substituait pour les périodes où l’élève se trouvait à l’école. La solution, jugée trop sévère a été modifiée par une loi du 5 avril 1937, qui a posé les conditions nouvelles de la responsabilité de l’instituteur + une substitution de l’Etat dans la prise en charge financière de l’indemnisation.

 

Conditions de la responsabilité :

Cf. article 1384, al. 6 et 8du Code Civil.

–       s’applique à tous les membres de l’enseignement (surveillants, directeurs d’établissement), à l’exception des professeurs d’université.

–       1re condition : preuve de la faute de l’instituteur (défaut de surveillance, par exemple)

–       2e condition : dommage causé par l’enfant alors qu’il était sous surveillance de l’instituteur

NB : cela couvre toute la durée de l’activité scolaire (cours, récréation, activités extérieures…)

 

Substitution de la responsabilité de l’Etat

–       si l’enseignant enseigne dans une école privée, il est responsable personnellement du fait de l’enfant, bien que la victime puisse aussi agir contre l’établissement dont il est le préposé, sur le fondement de l’article 1384, al. 5du Code Civil.

–       si l’enseignant enseigne dans une école publique, l’Etat se substitue à lui dans l’indemnisation de la victime. L’action en réparation doit donc être dirigée directement contre l’Etat, devant le TGI, dans le délai de 3 ans.

 

Section 2 : Le régime général de la responsabilité du fait d’autrui
§ 1 : Evolution jurisprudentielle vers la reconnaissance d’un principe général de responsabilité du fait d’autrui

Jusqu’en 1991, la jurisprudence refusait toute mise en œuvre de la responsabilité du fait d’autrui en dehors des cas spéciaux instaurés par le Code civil. Dans l’esprit de la doctrine traditionnelle, l’article 1384, al. 1, n’était qu’un texte d’annonce.

Par un arrêt de son. Assemblée Plénière.du 29 mars 1991, Blieck, la Cour de cassation a opéré un important revirement en admettant, sur le fondement de l’article 1384, al. 1du Code Civil., qu’une association qui avait accepté la charge d’organiser et de contrôler, à titre permanent, le mode de vie d’un handicapé mental devait répondre des faits de celui-ci. En l’espèce, la personne inadaptée avait mis le feu à une forêt alors qu’elle effectuait des travaux pour le compte de l’association auprès de laquelle elle avait été placée. L’organisme a été déclaré responsable du dommage causé par le handicapé.

ÞC’est la première fois que la Cour de cassation admet une responsabilité du fait d’autrui en dehors des régimes spéciaux du Code civil.

 

Les raisons du revirement sont exprimées dans les conclusions de l’avocat général Dontenwille : apparition d’un risque social, lié aux méthodes de traitement des personnes inadaptées. Celles-ci sont de plus en plus souvent laissées dans un régime de liberté, jugé conforme à leurs intérêts, mais qui est source de risques accrus pour les tiers.

+ Volonté d’alignement sur le droit administratif qui offre aux victimes des conditions d’indemnisation favorables dans des situations similaires (détenus en liberté conditionnelle…).

 

Malgré sa nouveauté, l’arrêt Blieck n’a pas posé un véritable principe général de responsabilité du fait d’autrui.

L’attendu de la décision subordonne en effet la mise en œuvre de cette responsabilité à de strictes conditions : fait d’une personne handicapée ; existence d’un contrôle permanent de son mode de vie ; nécessité d’une acceptation préalable de la prise en charge de la personne handicapée.

Cependant, cet arrêt marque le point de départ d’une évolution jurisprudentielle importante.

 

§ 2 : Domaine de l’article 1384, al. 1du Code Civil.

Le texte lui-même n’apporte aucune précision sur ses conditions d’application.

La doctrine a alors émis l’idée que l’application du principe général de responsabilité du fait d’autrui devrait être limitée aux personnes exerçant une autorité sur l’auteur du fait dommageable. Ce critère a inspiré la jurisprudence qui retient aujourd’hui deux grands champs d’application de l’article 1384, alinéa 1 :

 

A/ responsabilité des personnes ayant la garde d’individus nécessitant une surveillance particulière

1/ application de l’article 1384, al. 1du Code Civil., aux gardiens professionnels

Þcf. associations ayant la garde d’adultes handicapés ; organismes prenant en charge des mineurs dans le cadre de mesures d’assistance éducative.

–       Personne dont on doit répondre : le critère n’est pas la dangerosité de l’auteur du dommage mais le particularisme de sa situation personnelle, nécessitant une surveillance spéciale.

–       Personne responsable : elle doit exercer un pouvoir d’organisation, de contrôle, et de direction sur l’activité ou le mode de vie de l’auteur du dommage. Les sources de ce pouvoir sont variées (convention, décision de placement).

–       Il semble par ailleurs que le pouvoir de garde doit avoir une certaine permanence ; les pouvoirs doivent être exercés de façon habituelle car l’habitude conditionne l’existence d’une réelle autorité sur autrui. Ex : une baby-sitter ne pourrait pas, voir sa responsabilité engagée sur 1384, al. 1, si elle ne vient que de temps en temps.

 

Exercice d’un pouvoir de garde permanent : la personne qui l’exerce peut voir sa responsabilité engagée même si au moment du fait, l’auteur n’était pas sous sa surveillance effective.

Civ. 2e, 6 juin 2002, 2 arrêts de principe : « une association chargée par décision d’un juge des enfants d’organiser et de contrôler à titre permanent le mode de vie d’un mineur demeure (…) responsable de plein droit du fait dommageable commis par ce mineur, même lorsque celui-ci habite avec ses parents, dès lors qu’aucune décision judiciaire n’a suspendu ou interrompu cette mission éducative ».

La responsabilité du fait d’autrui semble désormais liée à l’existence d’un pouvoir juridique de garde sur le mineur, indépendamment d’une surveillance réelle au moment où ce dernier cause un dommage à autrui.

 

Exercice d’un pouvoir non permanent : dans ce cas, le gardien n’engage sa responsabilité qu’à la condition que l’auteur du dommage ait été sous sa surveillance réelle au moment du dommage (Civ. 2e, 25 février 1998, D. 1998, 315) (responsabilité d’un centre alors que l’enfant était chez sa mère).

 

2/ exclusion de l’article 1384, al. 1du Code Civil., aux gardiens bénévoles

Ces gardiens occasionnels ne sont ni rémunérés, ni assurés

  • exclusion de l’article 1384, al. 1, à l’encontre des membres de la famille

Civ. 2e, 18 septembre 1996, D. 1998, 315 : la Cour de cassation a refusé d’engager la responsabilité d’une grand-mère et d’une tante du fait d’un enfant qu’elles gardaient pendant les vacances. On peut penser que le critère de permanence de la garde faisait défaut.

+ La Cour de cassation considère possible la responsabilité des parents même s’ils n’habitaient pas effectivement avec l’enfant au moment du fait dommageable.

 

  • application incertaine de l’article 1384, al. 1, à l’encontre du tuteur de l’incapable

Peu de cohérence. Un arrêt Civ. 2e, 25 février 1998, a exclu l’application de l’article 1384, alinéa 1 à l’encontre de l’administrateur légal d’un incapable majeur. Il n’y avait pas, selon elle, de pouvoir d’organisation, de contrôle et de direction. + Caractère non professionnel de la garde et absence d’assurance du tuteur.

La Cour de cassation a adopté une solution contraire dans un arrêt du 28 mars 2000 (Chambre Criminelle).

 

B/ responsabilité des associations sportives du fait de leurs membres

Il s’agit d’une responsabilité du fait des membres de l’association pendant la durée des compétitions (Civ. 2e, 22 mai 1995 ; 3 février 2000, J.C.P. 2000, II, 10316, retenant la responsabilité d’associations sportives du fait d’un rugbyman ayant causé des dommages volontaires à l’un de ses adversaires durant un match).

On peut s’interroger sur la justification d’une telle responsabilité, le contexte apparaissant étranger à l’existence d’un nouveau risque social.

De plus, les sportifs ne sont pas des personnes nécessitant une surveillance particulière. La Cour de cassation a cependant considéré que l’association exerçait à leur égard un pouvoir d’organisation, de direction et de contrôle au cours des compétitions.

La solution paraît alors surtout motivée par une politique d’indemnisation des victimes.

 

§ 3 : Nature de la responsabilité générale du fait d’autrui

Elle n’était pas précisée. Depuis un arrêt de la Crime., 26 mars 1997, J.C.P. 1998, II, 100015, la Cour de cassation a clairement affirmé qu’il s’agissait d’une responsabilité sans faute, dont le responsable ne peut s’exonérer que par la cause étrangère.

Les principaux régimes de responsabilité du fait d’autrui reposent donc tous sur une responsabilité purement objective.

 

Conclusion : articulation des régimes entre eux :

–       régimes spéciaux et principe général de responsabilité du fait d’autrui : la règle spéciale déroge à la règle générale.

–       responsabilité du fait d’autrui et responsabilité pour faute : le premier régime est favorable à la victime puisque ces responsabilités sont objectives. Mais lorsque les conditions de la responsabilité du fait d’autrui ne sont pas réunies, la victime peut toujours agir contre le gardien (parents, commettants, organismes ayant la charge de personnes inadaptées), en prouvant sa faute. L’article 1382du Code Civil., texte de droit commun, reste en effet applicable en toute hypothèse. Mais la victime supporte alors la charge de la preuve de la faute de surveillance du gardien.

Titre 2 : L’objet de la responsabilité civile : la réparation du dommage

 


SOUS TITRE I : LE DOMMAGE.


Les mots dommages ou préjudices désignent les atteintes portés aux biens ou à la personne d’autrui. Il y a une très grande variété de dommages possibles en fonction de leur nature ou de leur ordre d’importance. Par ailleurs, tous les dommages ne sont pas réparables, certains ne peuvent pas donner lieu à des réparations.


SECTION I : les catégories de dommages réparables.


+ Il existe un principe en droit français qui est relativement méconnu, qui a peu d’application, c’est le principe selon lequel le dommage minime, insignifiant ne sont pas réparables. Cette règle est l’application d’un principe général, dans un adage latin « De minimis non curat praetor ». L’idée de l’adage est que le juge peut débouter un auteur car l’enjeu est jugé trop minime. Cela suppose qu’on peut laisser certains dommages sans réparation (justifiée par l’encombrement de la justice).


+ Si tous les dommages ne peuvent pas être réparés en droit français, c’est parce que certains d’entre eux ne sont pas considérés comme légitime. C’est la question de la légitimité de l’intérêt lesé.
Civ1, le 25 Juin 1991/Dalloz 91, p.566. Affaire « pas de bébé préjudice ». / Affaire Perruche ?


  • 1 Dommages patrimoniaux.


Pas de difficulté particulière à indemniser un dommage patrimonial. Le dommage patrimonial peut être défini comme une atteinte à une valeur qui s’apprécie en argent. Il faut faire une distinction entre deux types de dommages qui sont tous deux patrimoniaux.


– Atteinte au seul patrimoine.


– Conséquences économiques des atteintes à l’intégrité physique de la personne.


A/ Atteinte au seul patrimoine.

  1. a)   Le dommage matériel.


C’est la destruction ou la détérioration d’un bien sur lequel une personne a un droit de propriété. LA seule difficulté concerne dans certains cas la situation dans laquelle le bien qui a été détruit ou endommagé, était un bien déjà usagé. En effet, s’il n’existe pas un bien du même type dans un marché d’occasion, il faut offrir à la victime de s’acheter un bien neuf. La conséquence sera que la victime recevra le prix pour un bien neuf, on ne peut pas se prévaloir de la vétusté.


Si le bien n’a pas été entièrement détruit par le dommage, donc s’il peut être réparé. La victime n’aura pas le droit au prix d’un bien neuf mais pourra se faire indemniser un certain nombre de dommages accessoires causés par l’immobilisation du bien.


  1. b) Le dommage pécuniaire.


C’est une perte d’argent, c’est donc un dommage purement économique. Il consiste pour la victime soit à dépenser une somme d’argent, soit à être privé d’un gain.


B/ Conséquences économiques des atteintes à l’intégrité physique de la personne.


Dépenses occasionnées par des soins, perte de gains et salaires, dépenses d’appareillage (prothèse ou fauteuil roulant), travaux d’aménagement et enfin l’indemnisation des frais funéraires…

§2 Dommages extra-patrimoniaux ou moraux.


Il s’agit d’atteinte à des valeurs autres que le patrimoine de la victime. On parle d’atteintes personnelles pour signifier que ce sont des atteintes qui ne sont pas simplement économiques. On vise la souffrance physique et morale


Question d’ordre politique, est-il légitime de réparer un dommage moral ? Est-ce que ce n’est pas aller vers une sorte de patrimonialisation de la personne ? Est-ce que comme le disait George Lupert, d’aller devant un tribunal pour monnayer ses larmes.


Cette réticence a été dépassée depuis longtemps par les tribunaux français qui ont choisi d’apporter une indemnisation à la victime.


L’autre argument utilisé par les personnes qui sont pour les dommages moraux. 13 Ocobre 1955, civ 2.


L’autre problématique, d’ordre technique


Evaluer poste par poste les dommages précis, les victimes corporelles se voient attribuer des dommages et intérêts.


– Diminution de capacité physique, décrite comme physiologique, déficit fonctionnel. C’est un premier type de situation personnelle.


– Il s’agit des souffrances des personnes blessées ou malades.


– Préjudice d’affection. Douleur invoquée par la perte d’un être cher, ou des souffrances causées à un être cher.


L’affaire du cheval Lunus car le propriétaire de ce cheval avait demandé la réparation de son préjudice moral lié à la souffrance provoquée par la perte de cet animal. Civ 1, 16 Janvier 1962.


Les juges du fond sont aidés par une nomemclature d’INTILLAC, ils y trouvent des mesures pour les aider.


Le recours des tiers payeurs, quand on subit un préjudice, il y a des organismes qui prennent en charge ces dommages. Le tiers payeur peut se retourner contre l’auteur.


On peut souligner que le droit français de la responsabilité civile n’est pas très exigent sur les dommages. En réalité, c’est plutôt sur la faute et le lien de causalité que le juge français va se concentrer pour limiter la réparation. La catégorie des dommages est plutôt ouverte que fermée. Chaque semaine, chaque mois, de nouveaux types de préjudices peuvent apparaître. Exemple, récemment, le préjudice écologique, naufrage de l’Erika. Prononcé le 16 Janvier 2008, Chambre correctionnelle, il a reconnu qu’une faute d’imprudence avait été commise par deux personnes morales : La compagnie pétrolière totale et le certificateur du navire RINA.

 

  • 1 Qualité de victime

Personne née vivante et viable :

Le jour du dommage, la victime doit avoir une personnalité juridique, et doit donc être viable. A priori, aucun problème.  Il se pose pour le préjudice subi in utero (fœtus subit un geste maladroit du médecin lors d’un examen-accident de la mère).

25 JUIN 2002 : faute du praticien hospitalier = mort de l’embryon. Il était viable (6mois), et les parents ont porté plainte devant lecivil. Le médecin a été poursuivi pour homicide involontaire, coupable pour la cour d’appel, censuré par la cour de cassation : le principe de légalité des délits et peines impose une interprétation stricte de la loi pénale et s’oppose à ce que l’incrimination s’applique au cas de l’enfant qui n’est pas né vivant.

La cour de cassation  refuse d’étendre l’infraction pénale à l’mebryon, sans exclure une réparation au civil. Le préjudice est donc reconnu.

Pour hypothèse d’IVG manquée : la cour de cassation refuse d’en faire un préjudice, mais la situation est différente à la suite d’un IVG manqué pour enfant malformé.

1989 CE : Indemnisation du préjudice propre de l’enfant qui a subi une atteinte alors qu’il était in utero : souffrance physique, préjudice esthétique, troubles dans l’existence.

 

Le droit français permet une indemnisation au civil d’une personne qui n’est pas née viable.

L’enfant conçu est considéré comme né toutes les fois où il en va de son intérêt.

 

La victime peut être une PPHY ou PMO. Les PM ont des particularités : n’ayant pas de corps, elles ne peuvent pas souffrir des mêmes préjudices que les PHY, les PM souffrent uniquement de pertes financières, bien qu’on puisse envisager une atteinte morale à la réputation.

Pour les PM qui défendent des intérêts collectifs (assoc, syndicats). On admet que les PM peuvent agir en justice pour demander réparations pour les atteintes portées aux intérêts collectifs de leurs membres.

  • 2 Catégories

A/ Victimes directes

Cas le plus simple : victime « immédiate ».

C’est celle à qui le dommage a été causé en premier, par le fait générateur lui-même : blessé dans un accident de la circulation, ou celle dont la voiture a été endommagée, etc.

B/ Victimes par ricochet

Victime « médiate ». Elle n’a pas subi le fait générateur. Elle a subi un préjudice parce que c’est une personne avec qui elle a des liens particuliers, qui a subi le dommage.

Ce peut être la femme, l’enfant de la victime.

 

1)Types de dommages subis

La victime peut subir un préjudice pécuniaire ou moral :

-Pécuniaire lorsque la victime subvenait aux besoins de la victime indirecte. Le victime a donc perdu sa source de revenu.

-Moral : préjudice d’affection. La victime par ricochet souffre de l’atteinte portée à un être cher. La victime directe est décédée, blessée.

 

2)Conditions de la réparation

Le droit français admet la réparation du dommage, mais la jurisprudence afin de limiter les abus, pose un certain nombre de conditions à la recevabilité de ces actions.

On a une certaine réticence à l’égard des demandes en réparations concernant le préjudice moral.

Le droit français exige 2 conditions

Lien direct suffisant

-On exige un lien de droit entre la victime directe et indirecte ? Le modèle de la famille il ya 30 ans était le mariage, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Absence de lien matrimonial et juridique empêchait le lien. 1970Ch mixte : DANGEREUX accident de la circulation, mort d’un homme. Sa concubine en demande réparation, est déboutée, puis on lui reconnait un droit, à condition qu’elle apporte la preuve d’un lien matériel et affectif de sa relation.

17 OCT 2000 Crim : la victime par ricochet était un enfant, sans lien juridique avec la victime immédiate, qui était le compagnon de la mère de l’enfant. L’homme meurt, l’enfant peut il demander réparation ? OUI : le lien affectif prime toujours.

-Notion de ricochet ? Ne pas confondre ricochet et cascade : on permet aux victimes de réclamer réparation du préjudice, mais il faut des liens particuliers avec la victime directe. Au minimum, il faut l’avoir connue, avoir eu des liens, pas trop distendus (16 AVRIL 1996 Civ 2 : les juges du fond ont refusé d’indemniser l’oncle et la tante de la victime directe au motif qu’ils ne rapportaient pas la preuve de lien affectif avec la victime. La cour de cassation censure : la seule preuve exigible était celle d’un préjudice personnel, direct et certain. La cour de cassation a une tendance protectrice : elle reproche aux juges du fonds d’avoir voulu limiter l’indemnisation au motif qu’il s’agissait de l’oncle et de la tante.)

Gravité du préjudice

Elle est un moyen de restreindre les actions en indemnisation ouvertes aux victimes par ricochet. Pour le préjudice moral, on exigeait que la victime directe soit décédée.

Ensuite, on a voulu que le préjudice soit d’une gravité exceptionnelle. Civ 2 5 JANV 1973.

Evolution ensuite des juridictions civiles qui abandonnent le principe pour avoir une meilleure indemnisation des victimes.  1977 : on voit que la cour de cassation refuse de tenir compte de la gravité, même si la victime n’est pas décédée, on indemnise.

Crim, elle, reste sur la position initiale : 6 MARS 1969 : un texte du Code de procédure pénale, disposant que l’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. La chambre s’appuie sur ce texte pour limiter et refuser la réparation de la victime, lorsque celle-ci n’était pas dans un état grave.

Divergence : l’ASSP se réunit, et rend une décision le 12 JANV 1979 : elle se range sur la position de la chambre criminelle.

Toutefois, revirement de jurisprudence : crim, 9 FEV 1989 : accident de la circulation = blessures. La chambre accepte de réparer le préjudice par ricochet subi par son entourage, pour le spectacle des blessures infligées à la victime.

Les positions des chambres restent les mêmes : les victimes par ricochet demande une réparation devant toutes juridictions, même si la victime a survécu.

 

Conditions :

-Dommage financier : si pas assez grave : pas de conséquence

-Dommage moral : plus compliqué

 

Si la victime directe est décédée, ses héritiers peuvent être amenés à agir en justice à 2 titres différents :

  • préjudice par ricochet (moral)
  • à titre d’héritier, on peut agir au nom du défunt
  • 3 Caractères du dommage

Le droit français est peu exigeant s’agissant du type d’atteinte susceptible d’être réparé. Il est assez compréhensif ; en revanche, il est plus exigeant au sujet des caractères que le dommage doit recouvrir.

A/ Certain

Le dommage n’est pas éventuel : il s’est réalisé, je peux le mesurer.

Il n’exclut pas la réparation d’une part de dommages futurs, ou de la perte de chance.

 

1)Dommages futurs

La condition de la certitude n’empêche pas l’indemnisation d’un préjudice pas encore présent, mais dont la survenance est certaine.

Civ 1er JUIN 1932 : s’il n’est pas possible d’allouer des d&i en réparation d’un préjudice éventuel, il en est autrement lorsque le préjudice, bien que futur, apparait au juge comme la prolongation certaine et directe d’un état de chose actuel et comme étant susceptible d’estimation immédiate. Proprio d’un terrain se voient imposer une ligne électrique : demandent réparation du préjudice actuel, mais aussi futur, lié au fonctionnement et à l’entretien de la ligne.

Une personne qu’un accident a laissée handicapée peut avoir des besoins qui aujourd’hui vont être assumés par sa famille, mais qui dans l’avenir ne le seront pas. Ces besoins correspondent à un chef de préjudice futur.

On oppose « futur » à « éventuel ».

 

2)Perte de chance

On peut la définir : « la perte d’une chance réparable est la disparition actuelle et certaine d’une éventualité favorable. ».

Civ 1, 4 JUIN 2007

On se sert d’un calcul de probabilité pour apprécier la situation qui aurait été celle de la victime si un dommage n’avait pas eu lieu.

L’incertitude ne porte pas sur l’existence du préjudice mais sur son évaluation : étudiant qui part pour un examen, est renversé. Peut il demander la réparation de la perte de chance d’avoir l’examen ? On a aucune certitude sur la question…En revanche, on sait que l’étudiant a perdu une chance de le réussir.

Les juges évaluent d’abord les conséquences qu’aurait eu la réussite de l’examen, en prenant en compte les années de salaire correspondant à la profession. On pondère la somme en tenant compte de probabilité, et de la chance de réussir le concours.

Pour l’avocat négligent, qui laisse passer un délai pour faire appel. Il fait perdre une chance à son client : conséquences financières !

La notion de perte de chance est répandue aujourd’hui en jurisprudence :

On l’admet aussi dans le domaine délictuel, pas seulement contractuel. Civ 1ère, 24 MARS 1992. La cour de cassation précise que la perte de chance peut être invoquée par toutes victimes immédiates ou non : Crim, 18 MARS 1975.

 

Conditions à l’indemnisation : la chance perdue doit être réelle et sérieuse.

Perte de la chance de gagner un procès = n’est pas réparée si l’échec du procès était certain. ASSP 3 JUIN 1988

Cette condition permet d’imposer une proximité entre le moment auquel l’espoir aurait pu se concrétiser et le moment auquel l’espoir a disparu.

Perte de chance d’obtenir un soutien alimentaire, alors que la victime est un enfant, mais qui est censée se constituer beaucoup plus tard… La jurisprudence fait preuve de sévérité, on n’accepte pas la perte de chance qui aurait eu vocation à se réaliser dans un temps éloigné. Les juges regardent donc si les conditions de l’octroi de la pension sont sur le point d’être remplies au moment où l’incident survient.

Civ 2 5 JANV 1994 : refus d’indemnisation du préjudice de la perte de chance d’obtenir pension de l’enfant

 

Autre condition : Il faut tenir compte de l’aléa affectant la réalisation de la chance perdue.

On dit que la perte d’une chance ne donne lieu qu’à une indemnisation partielle, que l’on retrouve dans la jurisprudence.

Elle fait l’objet de critiques récurrentes de la doctrine : le terme est inopportun, la perte d’une chance s’applique à un principe de réparation intégrale.

Les juges tiennent compte de l’aléa qui affecte le dommage ; la réparation ne peut pas être la même si l’on est privé d’un gain.

La réparation est donc moins importante.

Les juges du fond appliquent souverainement un calcul de probabilité : la cour de cassation exerce un contrôle de motivation, qui lui permet de censurer les juges qui calquent la réparation accordée sur l’avantage escompté ou qui ne tiennent pas compte du fait qu’il y avait un certain nombre de cas dans lesquels la chance avait peu de probabilité de se réaliser.

B/ Direct

Article 1151 du code contient cette exigence : décrit le dommage comme étant la suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention. On transpose la règle dans le domaine délictuel.

Se pose alors la question de savoir où l’on s’arrête dans la réparation lorsqu’il y a un enchaînement de dommages provoqués les uns par les autres.

Dans un accident de la circulation, un médecin dans une voiture est blessé, et empêché de soigner un patient, qui meurt. On estime que le lien entre dommage et fait générateur est trop indirect…

Lorsque le dommage n’est pas assez direct, il y a rupture dans la chaîne de causalité.

Les prédispositions de la victime sont elles de nature à exonérer le responsable ou a diminuer la charge ?

Prédisposition ? Fragilités, qui peuvent faire que là où le dommage aurait été moindre sur une personne plus forte est moins important.

On raisonne par la réparation intégrale.

La cour de cassation l’énonce : le droit de la victime à obtenir indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique, lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée par le fait dommageable ; 10 JUIN 1999 Civ 2

Le caractère direct du dommage vient effacer le fait que le dommage n’était pas  prévisible pour l’auteur du dommage.

On oblige donc l’auteur à réparer le dommage entièrement sans tenir compte des prédispositions de la victime, à condition que le dommage ait participé à les provoquer.

C/ Intérêt lésé légitime

La méthode du droit français n’est pas de préparer une liste précise d’intérêts ; la question se pose de savoir si les préjudices et souffrances doivent être considérés comme légitimement réparables.

Le Code de procédure civile dit que la légitimité de l’intérêt est une condition de recevabilité de l’action en justice.

-Celui qui tient à la réparation du préjudice tenant à une naissance handicapée

Les juridictions considèrent de longue date qu’à partir du moment où le fœtus nait avec un handicap, on considère qu’on est en présence d’un préjudice réparable.

Les parents sont donc indemnisés.

L’enfant peut il réclamer la réparation d’un dommage personnel, le fait d’être né handicapé à la suite d’une erreur d’un médecin.

Le médecin qui suit la grossesse fait une erreur de diagnostic, et l’enfant nait handicapé.

CE, 14 FEV 1997 : on accepte l’indemnisation des parents, pas celle de l’enfant.

PERRUCHE, ASSP 17 NOV 2000 : la cour de cassation admet l’indemnisation du préjudice de l’enfant. On énonce que lorsque les fautes commises par un médecin et un laboratoire dans l’exécution de contrats formés avec une femme enceinte, ont empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap. Ce dernier peut demander la réparation du préjudice résultant du handicap, et causé par les fautes retenues.

Cette jurisprudence a été en partie contrecarrée par la loi du 4 MARS 2000, relative aux droits des malades et à la qualité du service de santé. (=Kouchner)

Avec cette loi, l’indemnisation du préjudice de l’enfant lui-même a été refusée, et on a renvoyé à la solidarité nationale.

La cour avait innové en acceptant, mais la loi va contre la décision.

La jurisprudence française opère un barrage à la loi, en utilisant les règles sur l’application de la loi dans le temps pour ne pas barrer les actions en justice des enfants dont le préjudice est antérieur à la loi.

On place le débat sur la légitimité de l’intérêt lésé : pour eux, l’arrêt est condamnable : le fait de ne pas réparer le préjudice d’être né (la vie comme préjudice).

-Victimes demandant la réparation d’un préjudice illicite.

En principe, pour le droit français, le fait d’être dans une situation illicite ne fait pas obstacle à l’indemnisation. Un toxico blessé par un coup de feu aura droit à réparation, même si on lui opposera une faute réductrice de l’indemnisation.

Problème : si on se prévaut de la perte d’intérêts illicites. On considère que des revenus qui ont été acquis par une activité illicite, ou des revenus considérés comme tel car non déclarés.

Une action en justice ne pourra donc pas aboutir. La cour de cassation a jugé que lorsqu’une victime a subi un accident, et que dans le préjudice, on a une perte de revenu, on ne pourra pas prendre en compte les revenus s’ils étaient non déclarés.

Civ 2 24 JANV 2002 : une victime ne peut pas obtenir la réparation de la perte de ses rémunérations si celles-ci sont illicites.

Civ 2 FEV 2007 : un joueur avait pénétré dans un casino alors qu’il était frappé d’une interdiction de jeu. Il gagne, et en arrivant à la caisse, le casino refuse de lui verser ses gains. Il agit en justice contre le casino, et demande la réparation du préjudice en reprochant au casino d’avoir commis une faute : l’avoir laissé entrer alors qu’il y a des règles précises. Un juge de proximité accueille la demande, mais censuré par la cour de cassation (1382 CC). On ne peut obtenir réparation que de la perte d’un intérêt licite, en l’occurrence le contrat était nul, le joueur doit être débouté.

L’avantage perdu est-il licite ? On doit veiller à ce que la responsabilité civile ne permette pas de rétablir des avantages qui sont prohibés par l’ordre public.

Cette limite sera peut être inscrite au code, si l’avant projet devient du droit positif.

« Tout préjudice certain consistant dans la lésion d’un intérêt licite, patrimonial ou extrapatrimonial, individuel ou collectif est réparable ».

Sous titre 2 Le lien de causalité

La jurisprudence utilise surtout ce lien pour limiter les actions en responsabilité. L’exigence de ce lien est générale, sauf exception pour le droit spécial des accidents de la circulation.

L’implication vient remplacer la causalité dans cette loi.

= Relation existant entre une cause et son effet : neige=glissade sur le trottoir.

Le lien de causalité est caractérisé dès lors que le fait imputé au responsable a causé le dommage dont il est demandé réparation.

Difficulté : on peut remonter très loin dans la chaîne de causalité d’un dommage, et il faut éviter d’arriver à une solution injuste. Elle n’a pas conduit la cour de cassation a définir le lien de causalité, mais permet à la doctrine de discuter, et à la jurisprudence de faire des choix, en fonction des domaines et de l’objectif.

Notion très doctrinale :

  • 1 Les différentes théories du lien de causalité et leur application pratique

A/ Les différents systèmes concevables

1)Equivalence des conditions :

Un dommage n’est souvent pas la conséquence d’un fait unique, mais de plusieurs évènements, qui ont concouru à sa réalisation.

On considère que toutes les causes qui ont concouru à la production de ce dommage doivent être retenues, considérées comme équivalentes. On regarde rétrospectivement le dommage, et on retient tous les faits qui l’ont rendu possible.

Une personne renversée = transfusée, et contaminée. Son dommage a deux causes : la transfusion ET l’accident de voiture.

Toutes les causes du dommage peuvent donc être considérées comme étant une condition sine qua non du dommage.

 

2)Causalité adéquate

On permet de faire le tri entre les différentes causes du dommage. On écarte donc les évènements qui n’ont concouru à la réalisation que par un concours de circonstance.

On identifie parmi ces causes celles qui normalement entraînent ce type de dommage : donc la transfusion ici.

Cette théorie est plus restrictive que la précédente, mais paradoxalement, elle peut avoir 2 effets inverses.

-Exclure une responsabilité lorsque l’évènement causal ne produit pas normalement cet effet, par exemple une personne qui laisse des clés sur sa voiture, volée ensuite, et qui provoque un accident. Le fait de laisser les clés ne devrait pas entraîner le dommage. Donc, le propriétaire de la voiture ne sera pas tenu responsabilité : on facilite la recherche du responsable, en établissant une causalité abstraite, tirée de la normalité des choses.

Dans une hypothèse où une preuve est difficile à apporter : un banquier envoie un chéquier dans un courrier simple. Il est déclaré responsable des conséquences des vols qui ont été commis vis-à-vis des commerçants qui en subiront les conséquences.

On considère la responsabilité établie, car c’est le cours normal des choses.

Contrairement à la première impression, le système n’est pas toujours plus favorable aux victimes, il y a des contrexemples.

B/ Le système retenu par le droit positif

On oscille entre les 2 théories.

PERRUCHE : cette décision donne lieu à des commentaires très techniques sur la définition de lien de causalité. Le préjudice a pour cause apparemment la négligence du médecin, mais ce n’est pas ici une IVG manquée. Si l’enfant est malformé, ce n’est pas parce que le médecin a commis une erreur = c’est la nature.

L’enfant, depuis le tout début, était malformé. On pouvait uniquement la détecter, mais pas l’empêcher. Sans la négligence du médecin, le dommage ne se serait pas produit, car la mère aurait choisi d’avorter.

Complexe !

La cour de cassation applique la théorie de l’équivalence des conditions : à propos d’une intervention chirurgicale après un accident qui a provoqué la perte d’un œil, la cour de cassation considère que la faute de l’auteur est bien la cause de la perte de l’œil.

Alors que ce n’est pas l’accident qui l’a provoquée.

Civ 2 27 JANV 2000

Civ 2 27 MARS 2003 : une voiture appartenant à un  homme non assuré est rentré dans la devanture d’un magasin, et a fini à l’intérieur, provoquant de lourds dégâts. Le commerçant s’est retourné vers son assureur pour qu’il prenne en charge ses dégâts. Il a sollicité le fond de garantie pour la partie non couverte par l’assureur ; le fond a considéré qu’il ne devait pas prendre en charge la totalité des dommages, parce qu’une partie des dommages était liée à une forme de désorganisation dans le commerce. La cour de cassation juge qu’il y a un lien de causalité direct entre l’auteur de l’accident, et les dommages produits dans le commerce. Dans l’hypothèse où d’autres causes seraient en jeu, cette pluralité de cause n’est pas de nature à faire obstacle à l’indemnisation de l’entier dommage par l’auteur initial. = Le principe de l’équivalence des causes dans la production du même dommage en matière de responsabilité délictuelle.

Quand plusieurs évènements sont ainsi retenus par le jeu de la théorie de l’équivalence des conditions, la cour de cassation utilise cette théorie pour éviter que l’un ou l’autre des coresponsables obtienne une diminution de l’indemnisation mise à sa charge.

Civ 2 8 FEV 1989 : un homme a été grièvement blessé en 1971 par un accident de la circulation ; handicapé, il meurt dans l’incendie de sa maison : on condamne l’auteur de l’accident initial à réparer le préjudice car le handicap est la seule cause qui a empêché la victime de quitter la maison. La cour de cassation censure, 1382 CC : le décès avait pour cause immédiate l’incendie qui s’était produit, et pas l’accident.

= L’application du principe de la causalité adéquate : on recherche la causa proxima plutôt que de remonter dans la chaîne des causalités.

Civ 3 19 FEV 2003 : affaire d’incendie, le locataire de l’appartement en est responsable. Le propriétaire fait procéder à des travaux de bâchage de la toiture. Un autre locataire s’installe avant la fin des travaux, mais les bâches se détachent, et dégât des eaux. Les juges du fond retiennent la responsabilité du 1er locataire. Cour de cassation : 1382 CC : on considère que l’incendie était une cause trop lointaine du dommage, donc on retient le bâchage défectueux mis en place par le propriétaire.

Comm, 4 DEC 2001 : dans cette affaire, une banque est mise en cause parce qu’elle a rejeté un chèque d’un de ses clients, et a averti son client qu’elle rejetait ce chèque, assorti d’une interdiction bancaire.

On reproche de ne pas avoir mis assez d’avertissements. A la suite de cette décision, le client s’est suicidé. Peut il y avoir un lien ? On refuse de reconnaître l’existence d’un lien de causalité.

Civ 12 MAI 2005 : la cour de cassation se satisfait d’un lien très indirect entre le fait générateur et le dommage.

Une personne gravement blessée dans un accident de la circulation est accueillie et hébergée au domicile de ses parents, qui agissent en réparation contre un certain nombre de préjudices dont les frais engagés. La cour d’appel déboute la demande, car les blessures auraient pu justifier l’hospitalisation, mais que le choix avait été fait = pas de réparation. (en raison de leur initiative personnelle, ils ont rompu le lien de causalité)

La cour de cassation censure : la victime dont l’état de santé ne laissait aucune autonomie avait été accueillie au domicile des demandeurs, donc lien de causalité directe entre l’accident et le préjudice allégué.

Ici, théorie de l’équivalence : dommage inexistant sans l’accident.

La théorie de l’équivalence a pour effet de gommer la cause intermédiaire = le lien entre la cause initiale et le dommage n’est pas rompu, même si cause intermédiaire modifie les choses.

La preuve : appartient au demandeur de prouver qu’un lien causal existe entre le dommage dont il demande réparation et le fait générateur.

En fait, la preuve du lien est difficile à apporter = cela amène les magistrats à se contenter de probabilités.

= Contaminations transfusion sanguine : cour de cassation admet que lorsque la personne qui demande réparation avait déjà reçu avant la transfusion d’autres dérivés de sang, les magistrats retiennent qu’il y avait une telle disproportion dans la quantité qu’on pouvait présumer que la contamination était due à la 2nde transfusion. Civ 1 17 FEV 1993

Dans certains cas, la cour de cassation retient la responsabilité du centre de transfusion, parce qu’il n’y a pas d’autres causes possibles de la contamination.

Civ 1 14 NOV 1995

La cour de cassation a posé une vraie présomption de causalité entre la transfusion et la contamination. Il s’agit de décisions qui ont retenu que dès lors que la victime démontre qu’elle a subi des transfusions sanguines antérieurement à sa contamination, et qu’aucune autre cause de contamination n’est probable, il appartient alors au laboratoire de rompre le lien de causalité présumé entre la transfusion et la contamination, chose que le laboratoire peut faire en prouvant que les lots transfusés n’étaient pas contaminés.

Civ 1 24 FEV 2004

Contentieux de l’hépatite B : 23 SEPT 2003 Civ 1 : on censure les juges du fond (ca de versailles) qui a considéré que le lien de causalité était établi parce que la relation causale entre vaccin et sclérose était possible. Les données épidémiologiques ne permettaient pas d’éliminer un tel lien de façon certaine et absolue. La cour de cassation censure donc au motif que ces constatations ne permettent pas d’établir le lien de causalité.

Cette décision a été très critiquée, parce qu’elle est défavorable aux victimes, et parce que la cour de cassation a refusé d’appliquer un mécanisme du droit de la preuve = présomptions du fait de l’homme (1353 du Code Civil).

Malgré ces critiques, la cour de cassation a rendu une décision dans le même sens, le 27FEV 2007 Civ 1 : on refuse l’indemnisation : la preuve du lien de causalité n’est pas apportée, parce que le risque lié à la vaccination contre l’hépatite n’est pas avéré.

La question fait l’objet d’une évolution initiée par les juridictions administratives : Conseil d’Etat rend 4 décisions le 9 MARS 2007 : le Conseil d’Etat retient  que le lien de causalité est établi en s’appuyant sur la grande proximité dans le temps entre l vaccination et l’apparition des premiers symptômes de la sclérose.

Cass : 3 décisions le 22 MAI 2008 : ces décisions retiennent un lien causal entre la vaccination contre l’hépatite et la survenance d’une sclérose en s’appuyant sur des présomptions graves, précises et concordantes, tirées du fait que les études scientifiques n’excluent pas la possibilité d’un tel lien ; du bref délai entre l’apparition de la maladie et la vaccination ; de l’absence d’antécédents, ou de prédisposition du vacciné ou de toute autre cause pouvant expliquer la maladie.

Cette solution est confirmée par une décision de la Civ 1, le 9 JUIL 2009.

Cette affaire est emblématique des raisonnements des juges : s’il y a difficulté de preuve, on raisonne par probabilité. On le trouve aussi dans la pratique à propos de l’affaire des hormones de croissance.

Civ 1 24 JANV 2006 : Le lien de causalité a été retenu en utilisant des présomptions graves, précises et concordantes. Les magistrats de la cour de cassation approuvent les juges, qui se fondent sur les présomptions.

Affaire du distillben (médicament pour fausses couches) : effets secondaires graves.

24 SEPT 2009 : Civ 1 : on censure les juges du fond (1382 du Code Civil- 1315) qui avaient retenu que le fait que les laboratoires en cause aient mis sur le marché la molécule à l’origine du dommage n’a pas de relation directe avec le dommage subi par la patiente. Les juges du fond se sont déterminés alors qu’ils avaient constaté que la patiente avait été exposée in utero à la molécule litigieuse, ils ont donc violé les 2 textes visés alors qu’il appartenait à chacun des laboratoires de prouver que son produit n’était pas à l’origine du dommage.

C’est au laboratoire de prouver que l’exposition à la molécule n’a pas provoqué le dommage.

  • 2 La rupture du lien de causalité, les causes étrangères

Cause étrangère : évènement dont la personne à laquelle la responsabilité d’un dommage est imputée cherche à se prévaloir pour démontrer que le fait qui lui est reproché n’est pas la seule cause, ou n’est pas la cause principale du préjudice invoqué.

La rupture du lien = évènement extérieur au défendeur, cas dans lequel le dommage est du en réalité non à la faute du responsable, mais à une cause étrangère.

Un entrepreneur chargé de la toiture d’une maison a effectué ce travail de façon défectueuse : la toiture s’effondre, mais un jour où il y avait tempête. On évalue si cette tempête aurait conduit à l’effondrement si toiture bien réalisée.

La cause étrangère a un effet exonératoire s’il est prouvé qu’elle était la cause unique du dommage.

Article 1147 du Code Civil : le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient de causes étrangères qui ne peuvent lui être imputées.

La cause étrangère. si elle est la cause exclusive, écarte la responsabilité. La jurisprudence a appliqué ce texte par analogie : elle fait de la cause étrangère un moyen de défense en matière délictuelle.

La cause étrangère recouvre une grande variété de situations : sous le terme « cause étrangère » on vise le cas fortuit, le fait d’un tiers, la faute de la victime.

A/ Les conditions

Cas fortuit : vise un évènement de la nature (tempête)

Compris souvent dans la Force Majeure ou la CE.

 

1)Extériorité de la cause étrangère

Pour entraîner une exonération du défendeur, le fait invoqué doit être extérieur au défendeur. Le défendeur ne peut pas invoquer un fait qu’il a lui-même provoqué. S’il existe une règle juridique qui lui impose de répondre du comportement de certaines personnes, le fait invoqué ne lui est pas extérieur. Mais la notion d’extériorité n’a pas le même sens en fonction de l’objet de référence. De manière générale, l’extériorité est aussi exigée par rapport à la chose qu’il a sous sa garde, ou par rapport à l’entreprise qu’il dirige ou par rapport aux personnes dont il répond.

Pour le fait de la victime ; on l’invoque pour se défendre. Il ne sera pas jugé extérieur au défendeur lorsque c’est le défendeur lui-même qui a provoqué ce fait de la victime.

Civ 2 9 DEC 1992 ; la victime avait fait un geste brutal, que l’auteur du dommage invoquait, mais il a été prouvé que le geste n’avait été fait que pour se protéger d’un coup qu’elle craignait de recevoir.

Pour le fait d’un tiers : il est par définition extérieur, mais on écarte toutes les personnes dont le défendeur doit répondre.

Grève : peut-on s’exonérer du dommage de la grève en se prévalant de celle-ci, comme élément extérieur ? En principe, non, la grève est interne à l’entreprise. Dans la majorité des cas, on ne permet pas au chef d’entreprise d’invoquer la grève commencé. Pourtant, il est arrivé qu’on le permette : la cour de cassation admet que le juge du fond doit rechercher si certaines circonstances ne pouvaient pas donner à la grève ce caractère d’extériorité. La cour de cassation rend dont un arrêt le 6 OCT 1993 civ 1 : on reproche aux juges de ne pas avoir recherché si la grève avait donné lieu ou non à un préavis.

Civ 1 24 JANV 1995 : les grèves du personnel EDF étaient extérieures aux dirigeants dans la mesure où elles se situaient dans le cadre d’un mouvement de grande ampleur affectant l’ensemble du service public.

Maladie : peut être à l’origine d’un comportement à l’origine d’un dommage.

En matière délictuelle, il ya une distinction faite entre la maladie mentale, et la maladie physique. Pour la maladie mentale, elle n’est plus considérée comme un évènement extérieur pouvant exonérer une responsabilité : Objectivisation, on considère qu’un aliéné mental doit être responsable civilement.

TRICHARD 1964, puis entériné par la loi de 1968.

Pour la maladie physique, la tendance est de reconnaître que cette maladie est un évènement extérieur, qui permet donc une exonération. Malaise cardiaque : Civ 2 4 FEV 1981.

En matière contractuelle : elle a toujours été considérée comme cause d’exonération : ASSP 14 AVR 2006 : débiteur tenu à la fabrication d’une machine, atteint d’un cancer, ne peut plus le faire. Le créancier assigne les héritiers en résolution : les magistrats rendent une décision favorable à la cause d’exonération. Débiteur empêché par un cas fortuit : donc pas dommage et intérêts ; il en est ainsi lorsque le débiteur a été empêché d’exécuter par la maladie dès lors que cet évènement présentant un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible dans son exécution est constitutif de Force Majeure. Maladie = exonératoire + caractère de Force Majeure.

Lorsque l’évènement tient dans un cas fortuit, la règle est évidente.

 

2)Revêtant les caractères de la FM

La Force Majeure exprime l’idée de contrainte, irrésistible, expression traditionnelle. On évoque une force supérieure qui dépasse l’homme. En droit français, la définition est plus précise : un évènement de Force Majeure est imprévisible et irrésistible.

L’imprévisibilité = caractère d’un évènement auquel on ne peut pas s’attendre, c’est l’évènement que l’homme moyen et diligent ne peut pas prévoir.

Irrésistibilité : caractère d’un évènement que l’on ne peut pas surmonter. L’homme moyen est la référence.

On distingue alors les deux ; mais en pratique, on voit que les 2 se confondent.

Pendant un temps, la jurisprudence s’est montrée moins exigeante sur le cumul de ses deux caractéristiques, où elle s’est contentée de l’irrésistibilité.

Comm, 1er OCT 1997 : l’irrésistibilité est à elle seule constitutive de la Force Majeure lorsque sa prévision ne saurait permettre d’en empêcher les effets sous réserve que le débiteur ait pris toutes les mesures requises pour éviter la réalisation de l’évènement.

Si le dommage était prévisible, mais que par son irrésistibilité, rien ne pouvait l’empêcher de se produire, peu importe que l’évènement ne soit pas imprévisible tant qu’il est irrésistible. Le caractère déterminant de la Force Majeure était donc l’IRR.

La cour de cassation, et surtout la C2, a continué à faire de l’IMP une condition autonome de la Force Majeure. C2 23 JANV 2003. Piéton engagé dans un passage à niveau alors que les barrières étaient fermées…blessé par le train. La SNCF n’a pas prouvé qu’elle avait tout fait pour éviter la présence de piétons. Les juges ont donc dit que la présence des piétons était prévisible : la condition n’est pas remplie, et la SNCF ne peut être exonérée.

Ce que recherchent les juges, c’est de savoir si l’évènement était ou non évitable. La SNCF aurait elle pu prévenir ce type d’accident ?

Divergence amène l’ASSP a se prononcer : 14 AVR 2006 : accident dans le métro. La faute de la victime (suicide) peut elle être considérée comme IMP & IRR ? La cour de cassation considère que la SNCF ne devait pas être exonérée, car l’évènement devait être IRR ET IMP. Si la faute de la victime n’exonère totalement qu’à la condition de présenter les caractères d’un évènement de Force Majeure, cette exigence est satisfaite lorsque la faute présente un caractère IMP et IRR.

Dans la deuxième espèce, on exige également le cumul de l’IRR et de l’IMP.

B/ Les effets

L’existence d’un cas de Force Majeure entraine en principe une disqualification de la faute : la disparition de l’élément d’illicéité qui conduit à une exonération totale. Le cas fortuit ou les 3 autres qui revêtent la Force Majeure exonèrent totalement le défendeur. S’il manque un des éléments de la Force Majeure, et que la faute du défendeur peut être retenue, alors le responsable devra réparer le dommage.

Il y a un flottement doctrinal : la Force Majeure joue elle un rôle au stade de l’illicéité de la faute. Sous la plume de certains auteurs, on trouve l’affirmation selon laquelle l’exonération s’explique par la théorie de la causalité.

L’existence d’une cause étrangère IMP et IRR démontre l’absence de causalité entre le fit qui est imputé au défendeur et le dommage.

Pour d’autres auteurs, la Force Majeure serait une preuve renforcée de l’absence de faute. Les professeurs Jourdain et Viney ont proposé de dépasser cette contradiction apparente en disant que la cause étrangère démontre à la fois que le défendeur n’a joué qu’un rôle accessoire dans la réalisation du dommage et que son attitude n’était pas critiquable.

La participation du défendeur n’est devenue dommageable que sous l’influence déterminante de la cause étrangère.

La Force Majeure a des effets dans tous les régimes de responsabilité, et c’est seulement exceptionnellement que le législateur l’a parfois cantonnée dans certains domaines.

La loi badinter, de 85, la Force Majeure n’a qu’un effet partiel, seule la faute de la victime qui revêt les caractères de la Force Majeure est susceptible d’exonérer l’auteur, ce n’est pas le cas pour le fait d’un tiers ou le cas fortuit.

  • 3 La pluralité des causes

Aucune d’entre elles ne présentent de caractères de la Force Majeure : on est en présence d’une pluralité. On parle de pluralité lorsque ces causes sont sur le même pied d’égalité pour expliquer la survenance d’un dommage : ce sont des causes distinctes, qui ont toutes partiellement concouru à la réalisation d’un même dommage.

Cette situation se rencontre quand la faute de la victime ou le fait d’un tiers ont concouru au dommage SANS Force Majeure.

A/ La faute de la victime

La victime peut avoir contribué à la réalisation de son propre dommage : à ne pas confondre avec les prédispositions de la victime. Pour exonérer le responsable, il faut que cette faute de la victime revête les caractéristiques de la Force Majeure. Si la faute n’a pas ces caractères, on exonère partiellement le défendeur. Pour savoir comment va se mesurer cette exonération, on estime la gravité des comportements respectifs de l’auteur et de la victime :

-La victime comme l’auteur du dommage a commis une faute : donc 2 fautes en tout. L’auteur est exonéré à proportion de la gravité de la faute de la victime. On apprécie la gravité des 2 fautes.

-Aucun des 2 n’a commis de faute ; responsabilité sans faute (du fait des choses ; responsabilité objective,  pèse sur le gardien d’une chose).

La victime peut être responsable, car son fait a contribué au dommage : le partage se fait par tête, l’indemnisation sera divisée par deux, car la victime est un peu responsable.

-L’un des deux a commis une faute : si c’est l’auteur du dommage, il supporte la totalité de la responsabilité, il ne pourra pas se prévaloir du fait non fautif de la victime. Si c’est la victime, la réparation sera diminuée en fonction de la gravité de la faute commise par la victime.

La jurisprudence a décidé depuis longtemps que la faute de la victime initiale était opposable à la victime par ricochet. Doit-on diminuer le droit à réparation des victimes par ricochet ? OUI, on décide que la faute est opposable à la victime par ricochet, et on applique les règles ci-dessus.

B/ Le fait d’un tiers

Lorsque le fait d’un tiers a présenté les caractères de la Force Majeure, il y a rupture du lien de causalité, et le défendeur est totalement exonéré. Dans ce cas la victime se retournera contre ce tiers. Mais dans certains cas, le fait d’un tiers a contribué à la production du dommage sans constituer un cas de Force Majeure : le dommage a 2 causes, le fait du défendeur, et le fait du tiers.

On dit qu’ils sont coauteurs du même dommage. On est alors en présence d’une responsabilité partielle ; mais là où le terme est source de confusion, c’est que la responsabilité n’est pas partielle vis-à-vis de la victime, seulement entre les coauteurs.

Ce qui permet cet effet, c’est un mécanisme appelé obligation in solidum : obligation pour le tout.

Il est construit par la jurisprudence, devenu nécessaire car le principe est que la solidarité ne se présume pas.

Lorsque la solidarité n’est pas stipulée, elle ne peut pas jouer. Il a pourtant semblé à la doctrine inopportun d’obliger la victime d’un dommage de multiplier. La doctrine applique donc le principe in solidum : chacun  des coauteurs doit réparer pour le tout (in solidum) 11 JUIL 1892 ;

Le mécanisme joue que ce soit dans une situation où les coauteurs ont chacun commis des fautes, ou non. Donc le principe est large, peu importe que l’un ou l’autre des coauteurs sont puni sur n’importe quel fondement.

Solution générale : la cour de cassation érige un principe « chacun des auteurs d’un même dommage doit être condamné à la réparation de l’entier dommage ».

L’obligation à la dette : on l’oppose à « contribution à la dette » : CD vise les rapports des coauteurs entre eux. Une fois que l’un ou l’autre des coauteurs est condamné à indemniser l’entier dommage, il doit régler les rapports des coauteurs entre eux. Celui qui a payé plus que sa part de responsabilité pourra agir contre les autres pour lui demander de contribuer à la dette. Il exerce une action RECURSOIRE.

Si on a 4 coauteurs, celui qui se retourne contre les autres, doit diviser ses poursuites, il n’a pas d’obligation in solidum pour cette action.

Le mécanisme in solidum conduit donc à refuser que le responsable puisse dans ses relations avec la victime invoquer le fait d’un tiers.

On empêche le coauteur d’invoquer le fait d’un tiers autrement que si le fait d’un tiers revêt le caractère de la Force Majeure.

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