DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL
Le droit du commerce international est également appelé droit des affaires internationales ou encore droit commercial international.
Le droit du commerce international est l’ensemble des règles régissant les relations commerciales qui ne se déroulent pas entièrement dans la sphère économique d’un seul état.
Le droit du commerce international inclut non seulement les opérations commerciales classiques, mais toutes les opérations qui sont à la base de la mondialisation du commerce, ainsi que les services qui les accompagnent.
Dans les relations internationales la volonté des parties peut intervenir dans le choix de la loi applicable (arrêt American Trading C° du 5 décembre 1910). C’est la reconnaissance de la clause de choix de loi (clause electio juris) .
- Fiches de droit commercial
- Fiches de droit du commerce
- Cours de droit du commerce international
- Droit du commerce et des affaires
- Cours de droit commercial
- Cours de droit du commerce
- Cours de droit commercial
- Chapitre 1 : Généralités (activité professionnelle transfrontière).
- Section introductive : Objet du droit du commerce international.
- 1 – Droit du commerce international du point de vue des États.
- A – Droit international économique.
- B – Réglementation économique supranationale.
- 2 – Droit du commerce international du point de vue des acteurs.
- A – Finalité de l’opération transfrontière.
- B – Sécurité juridique des opérations.
- 1 – Mécanismes de droit interne.
- 2 – Institutions.
- C – Opérateur économique et intensité des échanges.
- Section 1 : Droit international privé appliqué aux affaires.
- 1 – Le droit international privé lato sensu.
- A – La place de la nationalité en matière économique.
- B – Condition des étrangers en matière économique.
- 1 – Observation historique.
- 2 – État contemporain en France.
- 2 – Le droit international privé stricto sensu.
- A – Conflits de juridictions.
- B – Conflits de lois.
- Section 2 : Un droit spécifique des affaires internationales ?
- 1 – La thèse autonomiste.
- A – Variante absolue.
- B – Variante relative.
- 1 – Existence du droit informel.
- 2 – Valeur du droit informel.
- 2 – Mesure du particularisme du droit appliqué au commerce international.
- A – La spécificité des acteurs.
- B – La spécificité de l’activité professionnelle transfrontière.
- Chapitre 2 : L’arbitrage.
- Section 1 : Une justice privée.
- 1 – La nature de l’arbitrage.
- A – La nature juridictionnelle.
- B – Les aspects conventionnels.
- 2 – Le régime de l’arbitrage.
- A – Le régime.
- 1 – Les exclusions.
- 2- Le fonctionnement.
- A – Des standards légaux majoritairement supplétifs.
- B – Le principe de contractualité de l’arbitrage.
- Section 2 : Une justice coordonnée avec la justice d’État.
- 1 – Le contrôle étatique.
- A – Le contrôle en amont de la procédure arbitrale.
- 1 – La spécificité procédurale.
- 2 – Libéralisme au fond.
- B – Le contrôle en aval.
- 1 – Le stade de la reconnaissance et d’exécution forcée de la sentence internationale.
- 2 – Les voies de recours pouvant être exercées.
- 2 – Le soutien étatique.
- A – Soutien étatique pour l’accès à la procédure.
- B – Soutien du juge étatique au bon déroulement de la procédure d’arbitrage.
- C – Intervention du juge étatique pour assurer l’efficacité internationale de la procédure
- arbitrale
- Section 3 : Justice conditionnée.
- Chapitre 3 : Les procédures d’insolvabilité.
- Procédure contraignante et sanctionnatrice.
- Section 1 : Le droit commun français.
- 1 – Procédure isolée de faillite.
- A – La faillite française.
- 1 – La compétence judiciaire.
- B – La loi applicable.
- 2 – Procédure ouverte à l’étranger.
- A – Procédure d’exequatur.
- B – Procédure de reconnaissance des jugements étrangers.
- 2 – Procédure parallèles.
- A – Les affaires françaises qui ont avancé cette difficulté des procédures parallèles.
- B – Améliorations envisageables.
- Section 2 : Le droit commun européen.
- 1 – Généralités.
- A – Origines du règlement.
- B – Entrée en vigueur et champ d’application.
- 2 – Principales règles.
- A – Règles consacrant une répartition rigide des compétences étatiques.
- B – Règles matérielles dérogatoires de faveur.
- Chapitre 4 : Les sociétés.
- Section 1 : La détermination de la lex societatis [approche statique].
- 1 – Les solutions françaises de droit commun.
- A – Théorie du siège face aux théories concurrentes.
- 1 – Rattachement par le siège/rattachement par le contrôle.
- 2 – Rattachement par le siège/rattachement par incorporation.
- 3 – Rattachement par le siège/rattachement par superposition.
- B – Théorie du siège et solutions positives tirées en droit international privé français.
- 1 – Dans le champ du droit privé.
- 2 – En dehors du droit privé.
- 2 – Les infléchissements européens.
- A – Prudence des textes.
- 1 – Dans les traités fondateurs.
- 2 – Prudence du droit communautaire dérivé.
- B – L’audace du juge.
- 1 – Obligation de reconnaissance.
- 2 – La mobilité encouragée (fusion, trasnfert de siège).
- Section 2 : Mise en œuvre de la lex societatis [approche dynamique, opérations sociétaires
- 1 – La lex societatis face au rattachement civil ordinaire.
- A – La lex societatis dans sa combinaison avec la lex loci delecti.
- B – Lex societatis et lex contractus.
- 2 – La lex societatis face à une autre lex societatis.
- A – Opération de type restructuration.
- B – Opération de type expatriation.
- 3 – Lex societatis, loi de l’intermédiaire financier et loi du marché.
- A – Les titres cotés.
- B – Les titres intermédiés ou multi-intermédiés.
- Chapitre 5 : La place des États.
- Section 1 : Les engagements privés de l’État.
- 1 – Immunités souveraines.
- A – Sources du droit des immunités.
- B – Histoire française des immunités.
- C – Régime positif.
- 2 – La figure du contrat d’État.
- A – Questions théoriques.
- B – Réaction pratiques.
Chapitre 1 : Généralités
(activité professionnelle transfrontière).
Section introductive :
Objet du droit du commerce international.
L’objet premier du droit du commerce international c’est de régir l’activité professionnelle indépendante qui s’exerce par-delà les frontières. On dit indépendante pour exclure le salarié que l’on ne retrouvera que comme un facteur de production de l’entreprise.
1 – Droit du commerce international du point de vue des États.
A – Droit international économique.
On peut l’envisager en prenant le point de vue des États et en se demandant qu’elle est la réaction dans l’ordre de droit des États face au problème des échanges internationaux. Cette manière de voir est plutôt celle des publicistes qu’ils expriment sous l’idée de droit international économique. Au fond, on vise une branche spéciale du droit international public qui rassemble toutes les règles de droit édictées par les États pour réguler le phénomène économique international.
Les réponses centralisées sont extrêmement peu nombreuses et ne s’expriment que rarement sous la forme de règles contraignantes au point que l’ONU et les organisations qui en sont les émanations ne sont que de faible secours quant à la réglementation quotidienne des opérations économiques.
B – Réglementation économique supranationale.
Institutions des Nations-Unies.
La Commission des Nations-Unies pour le droit du commerce international fait des propositions de même que la conférence de la Haye qui propose des conventions pour ce qui la concerne, c’est-à-dire es affaires internationales.
La Commission des Nations-Unies du commerce et du développement prend en compte les objectifs d’intérêts généraux pour le développement durable des États les moins avancés, ici on prend plus en compte les intérêts des pays en voie de développement.
Conventions.
On a proposé des conventions régissant le droit privé. La convention de Hambourg qui procède d’une convention des Nations-Unies de 1978, elle s’oppose à une autre convention internationale conclue en 1924 favorable aux pays à grande flotte commerciale, mais trop favorable aux intérêts des transporteurs.
Institutions ayant pour objet la régulation économique mondiale.
L’essentiel des institutions qui ont pour l’objet la régulation économique mondiale se développent en dehors de l’enceinte des nations unies. Il s’agit d’une triade d’institutions, qui sont des institutions qui avaient été constituée en bloc après la seconde guerre mondiale lors des accords de Bretton woods de 1944 :
Fond monétaire international, institution à objet monétaire qui a géré pour le compte de tous les États parties le système monétaire.
Groupe Banque mondiale, ex BIRD, institution à objet financier support du plan Marshall à l’origine.
Nouvelle OMC (Accords Marrakech), prenant la suite du GATT, institution à objet commercial et douanier. Cinquante après l’action du GATT le taux de taxation moyen est de 4 en moyenne contre 40.
2 – Droit du commerce international du point de vue des acteurs.
A – Finalité de l’opération transfrontière.
L’autre manière de voir le commerce international, c’est par le détail c’est-à-dire regarder les échanges économiques en se plaçant dans la peau de ses acteurs. Cet opérateur privé traverse les frontières d’abord par une implantation durable c’est-à-dire un investissement pour y localiser tout ou partie de la production, soit pour se servir de relais pour la pénétration commerciale d’un marché donné. C’est alors la figure de la vente à l’exportation de produits manufacturés, plus de deux tiers des échanges mondiaux ont pour objet des produits manufacturés. L’autre hypothèse envisageable est l’acteur qui traverse les frontières pour proposer une prestation de services.
B – Sécurité juridique des opérations.
Ce qui intéresse l’opérateur, c’est la sécurité juridique de ses opérations, donc un travail de prévision non contentieuse. La meilleure réponse que le droit peut apporter, c’est l’évitement du procès. Comment éviter le procès international. Il y a des techniques de prévision, des moyens juridiques de se prémunir contre les risques qui n’empruntent pas la technique propre du droit international privé, mais qui au contraire repose sur des mécanismes de droit interne.
1 – Mécanismes de droit interne.
C’est ainsi par exemple que la France propose aux entreprises locales exportatrices des mécanismes de droit interne d’assurance contre les risques spécifiques de l’opération d’import export. Ces mécanismes d’assurance prévus par le droit interne font l’objet d’une réglementation propre, le droit du commerce extérieur : ensemble de règles ou institutions qu’un État donné met à disposition de ses ressortissants pour les inciter à l’import export et ces mécanismes sont essentiellement les garanties.
2 – Institutions.
Coface, compagnie d’assurance fonctionnant sur les modes du droit privé, son objet premier est de fournir dans l’ordre interne des mécanismes d’assurance contre les risques d’import export, même politiques.
Ubifrance, objectif être un point de renseignement des opérateurs économiques français pour les inciter à traverser les frontières.
Ces règles et institutions ne présentent pas un intérêt juridique particulier, leur raison d’être est de répondre aux risques spécifiques du commerce international, mais les mécanismes sont purement internes. L’utilité de ces institutions d’encouragement du commerce est de résoudre dans l’interne des difficultés nées au-delà des frontières.
C – Opérateur économique et intensité des échanges.
Distinction qu’on pourrait être tenté de faire qui consiste à dire que les professionnels indépendants ne participent pas tous aux échanges internationaux avec la même intensité. Certains de manière occasionnelle et cela sont avant tout soumis aux règles du droit international privé, parce que la réponse apportée en droit positif c’est le droit international privé qui l’apporte. Mais il y a aussi à côté ce que les anglais appelleraient des joueurs habituels, des opérateurs économiques dont l’activité principale c’est de prendre part à ces échange économique internationaux, et ces professionnels pourraient être tentés de dire que pour eux, pour répondre à leur habitude commerciale, le droit international est inadapté car c’est un droit qui oblige au relativisme des points de vue : ils pourraient prétendre à un droit spécifique.
Section 1 : Droit international privé appliqué aux affaires.
1 – Le droit international privé lato sensu.
C’est si la distinction des étrangers et des nationaux à un sens en droit économique.
A – La place de la nationalité en matière économique.
Avantages offerts par l’État de nationalité et protection diplomatique.
La nationalité en matière économique n’est pas aussi importante qu’elle l’est en matière civile et individuelle et familiale. Dans le droit international privé, la nationalité est aux racines du statut personnel, la personne physique existe et se déploie à travers la loi du pays dont elle arbore la nationalité. Permet à l’individu de jouir de la plénitude des droits conférés par cet État souverain.
Elle permet aux ressortissants d’un État donné de demander dans le domaine économique de bénéficier du maximum des avantages offerts par l’État de nationalité, elle permet aussi de bénéficier de la protection diplomatique. Assez tôt, dans la jurisprudence de la Cour permanente de justice internationale a fait produire une place importante à la nationalité.
Affaiblissement de la protection diplomatique.
Cour internationale de justice, 30 août 1924, Concessions Mavrommatis contre Palestine : il s’agissait d’un ressortissant grec qui avait implanté une activité économique en Palestine, ce grec avait été exproprié par la Palestine de son investissement réalisé à l’étranger. Il peut se tourner vers les tribunaux internes de l’État responsable, puis après épuisement des voies de recours, il ne peut se retourner vers ses tribunaux. Ce que la protection diplomatique a permis ici, c’est l’élévation du contentieux entre les États.
Aujourd’hui en pratique l’usage de la protection diplomatique s’est tarie et a laissé la place à une forme d’arbitrage spéciale du droit des investissements, notamment sous l’hospice du Centre international de règlement des différends relatifs à l’investissement (CIRDI). Cet organisme est conçu pour recueillir des arbitrages transnationaux qui permettent directement d’agir contre l’État hôte de l’investissement.
Nationalité comme outil de localisation fictive.
Cette notion de nationalité qui permet de fixer le pays d’origine d’un individu ou de la situation est employée en droit positif à propos de situations purement commerciales. Il existe une nationalité des engins de transport internationaux : elle peut servir comme assiette d’une localisation fictive. Au fond l’utilité de la nationalité appliquée à une chose c’est de fixer une origine unique, pays d’origine qui va avoir titre d’appliquer principalement ses lois à l’engin.
Personnes morales.
Cas de sociétés, associations, fondations qui exercent une activité économique qui déborde des frontières. À propos de ces êtres fictifs, la notion de nationalité est admise.
Cour internationale de justice, 5 février 1970, Barcelona Traction : la Cour a consacré la pertinence de cette notion de nationalité appliquée aux personnes morales. Cette nationalité peut produire ses effets normaux dans l’ordre international. La nationalité a pour but d’assigner une origine unique à la personne morale. La Cour a donné ici un peu plus de directive qu’à propos de la nationalité des personnes physiques, elle considère qu’en principe la société est la nationale du pays qui l’a constitué, donc de son siège social.
Cour internationale de justice, 20 juillet 1989, Elettronica Sicula : la Cour confirme sa jurisprudence de 1970. Néanmoins, en principe la prise en compte du critère de contrôle, c’est-à-dire la nationalité de l’actionnaire majoritaire, est exclue pour la détermination de la nationalité de la société. Néanmoins, la Cour admet une exception dans cette décision de 1989 : en l’espèce, la société victime de faits litigieux avait la nationalité de l’État qui en était à l’origine (filiale constituée en Italie d’une société mère américaine, la filiale est dissoute par l’Italie)
B – Condition des étrangers en matière économique.
Le droit de la condition des étrangers permet à quiconque agissant en dehors de son État d’origine de revendiquer devant l’État étranger un traitement minimal qui est garantit soit par des traités internationaux bi ou multilatéraux avec ou sans condition de réciprocité.
1 – Observation historique.
Libéralisation précoce, article 16 du Code civil de 1804.
Mouvement de reconnaissance des étrangers, mais en réalité le mouvement de libéralisation des étranger a été plus précoce en matière économique qu’en matière civile. Ancien article 16 du Code civil de 1804, il prévoyait l’institution de la caution judicatum solvi : elle consiste a exiger de l’étranger qui intente un procès en France de verser une caution au juge au cas où il perdrait. Cette caution était exigible en toute matière sauf celle de commerce, exemple d’une faveur précoce de la France pour le bon accomplissement des échanges économiques
Distinction droit civil et droit naturel.
Distinction entre le droit civil et le droit naturel qui permettait à la jurisprudence s’agissant de l’article 11 du Code civil de faire la différence entre les droits refusé à l’étranger et les droits reconnus même sans texte. Les questions commerciales étaient classifiées du coté droit naturel, donc non affecté par l’article 11 restrictif.
Chambre des requêtes 1827, une lettre de change souscrite notamment par un commerçant étranger, le contentieux vient en France, il s’agit d’un acte de commerce conséquemment d’un acte de droit des gens et cet acte est valable et soumis quant à son exécution aux lois et tribunaux du pays où l’engagement a eu lieu.
2 – État contemporain en France.
Article L122-1 et suivant du Code de commerce, et article L151-1 et suivants du Code monétaire et financier.
Article L122-1 du Code de commerce.
Origine.
Décret loi de 1938 qui instituait ce que l’on appelait la carte d’identité du commerçant étranger. Celui qui en qualité d’étranger voulait s’installer de manière stable en France pour y exercer une activité indépendante, ne pouvait le faire librement, il devait obtenir un titre administratif. Ce titre est délivré après contrôle par une autorité administrative en l’espèce le préfet. L’exigence était sanctionnée pénalement et civilement : on considérait que des actes de commerce passés par un étranger non contrôlé encouraient la nullité.
Amenuisement de la portée.
Ce dispositif s’est désactivé dans les relations intraeuropéennes. D’une manière plus générale, ces exigences ont été considérées excessivement protectionnistes. L’ancien régime a été démantelé, la seule chose qui subsiste est une obligation de déclaration préalable.
Article L151-1 du Code monétaire et financier, relation financière avec l’étranger.
Loi de 1966 codifiée dans le Code monétaire et financier, article L151-1 et suivants. L’objet de cette réglementation est d’instaurer un pouvoir de contrôle pour tous les mouvements d’investissements au départ de la France ou qui arrivent en France. Lorsque le France est pays d’accueil, on parle d’investissement direct étranger (IDE). Elle instaurait un mécanisme d’autorisation préalable de certains investissements en provenance de l’étranger.
Cette section du Code commence par préciser que les relations financières entre la France et l’étranger sont libres. Suit une série de restrictions. Elles sont aujourd’hui minces. L’autorisation administrative ne subsiste que dans les rapports extra-européens et elle n’est pas généralisée pour toute l’activité économique, uniquement pour certains secteurs jugés sensibles (services publics régaliens français). Pour le reste, le deuxième volet de cette législation française qui subsiste est un dispositif de notification de signalement à l’administration des mouvements de fonds massifs au départ de la France vers l’étranger.
Étiolement du droit de la condition des étrangers, droit européen.
Liberté de circulation et d’établissement.
Le droit européen est un instrument qui permet de lever certaines restrictions inhérentes à la condition des étrangers. On le voit en reprenant les qualifications ordinaires des entraves aux libertés de circulation. Si la mesure discriminatoire ne surmonte pas le test européen de la justifications des entraves, la mesure ne doit pas être appliquée au cas concret et à terme, la condamnation factuelle d’une législation interne invite à l’abrogation de la dite mesure.
Si on regarde l’effet à des mesures indistinctement applicables. Par exemple la libéralisation des paris en Europe. En France, les casinos font l’objet d’une réglementation et d’un contrôle. Les activités de paris font l’objet d’un monopole. Dans certains États membres, la réglementation est tout à fait différente : à Malte il n’y a aucune restrictions aux activités de jeu. Se sont implantées des sociétés à Malte qui ont ouvert sur internet des activités de paris et casinos en ligne. Cette activité économique n’est pas limitée au marché maltais.
Étranger en position plus favorable sur le local.
Aujourd’hui, l’étranger va se trouver mieux placé sur le local sur un marché donné. Opérateur à Malte qui entend développer en France son activité, opposition du monopole. Désactivation de la législation française en la soumettant au droit européen. Dans un tel cas, on peut soulever la liberté d’établissement, soit la liberté de prestation de service. C’est une entrave a considéré la Cour de justice.
Cour de cassation, 10 juillet 2007, Zeturf : la législation française prévoyant le monopole du PMU doit être mise à l’écart pour préserver la liberté de prestation de service. On a une distinction de régime entre le prestataire économique français et le prestataire économique étranger. Elle est faite au bénéfice de l’étranger, parce que le français lui ne peut invoquer la liberté économique afin de faire tomber les éventuelles entraves qui résultent du droit interne. La discrimination négative s’amenuise mais en plus les rapports s’inversent : l’étranger se trouve mieux placer pour pratiquer une activité économique que le local.
Cette anomalie aboutit à l’abrogation de la législation interne inopposable à l’opérateur étranger. Il y a toujours un effet d’alignement du droit du commerce interne sur celui du commerce international. En effet, ce procédé n’est pas légitime.
2 – Le droit international privé stricto sensu.
Autonomie de la volonté.
Comment les affaires sont considérées par ces règles ordinaires de conflit de lois et de juridiction. Dans quelle mesure permettent-elles de constituer ou non une certaine prévisibilité du régime. Le droit commun français est assez bien fait, car correctement employé il permet d’atteindre cette prévisibilité des solutions, en utilisant les deux grands instruments du droit international privé : autonomie de la volonté comprise comme la possibilité d’effectuer une sélection.
Localisation objective.
Alternativement, il y a une autre manière d’obtenir un minimum de prévisibilité, c’est d’utiliser la notion de localisation objective. Il y en a essentiellement deux : le pays d’établissement du professionnel, cette localisation est en un certain nombre de circonstances pertinente, et localisation au lieu d’agissement qui peut se dédoubler (lieu tangible de l’agissement individuel, mais qui peut être aussi le lieu ou des effets se font sentir). Ces localisations sont assez souvent utiles.
A – Conflits de juridictions.
Quand a été résolue la question de la compétence internationale des tribunaux, il reste une ou deux question processuelles non résolues : compétence territoriale interne et compétence d’attribution. Pour les activités professionnelles indépendantes le droit interne garde son mot à dire. En se saisissant de la qualification commerciale, celle-ci garde un sens en droit interne par rapport aux tribunaux compétents.
La grande exception c’est lorsque le professionnel a pris le soin de stipuler une clause attributive de juridiction. Pour être valable, pas besoin de régler tous les détails : les tribunaux français sont compétents suffit. Mais elle peut être précise, et en matière internationale on stipule des clauses complètes (ordre juridictionnel, juge interne territorialement compétent et attribution).
Situation du professionnel dans Bruxelles I.
Domicile de la personne morale.
Il existe des dispositions qui permettent la meilleure mise en œuvre de la compétence du domicile du défendeur. Pour une personne morale il y a deux dispositions, une de la convention de 1968 article 53 et l’autre article 60 du règlement Bruxelles I : le domicile d’une personne morale c’est son siège au sens de la convention de 1968.
Pour déterminer ce siège, chaque juge saisi appliquera les règles de son droit international privé. Le règlement a simplifié les choses, règle matérielle uniforme : le domicile des personnes morales est fixé soit au lieu du siège statutaire, soit à l’administration centrale, soit au principal établissement. Ce dernier peut diverger du siège statutaire : une personne morale peut être doublement domiciliée.
Mesures provisoires et conservatoires.
Dans les chefs de compétence optionnel, article 5 et suivant. Article 31 du règlement, relatif aux mesures provisoires et conservatoires : cet article dit que quelque soit la juridiction compétente au fond, on peut toujours demander à un juge donnée d’ordonner des mesures provisoires et conservatoires. L’article 31 permet de plonger sur les biens locaux alors même que le juge local n’est pas compétent. Elle peut être utilisée aussi pour l’obtention de paiements provisionnels dans des procédures de type référé.
Succursale.
Dans l’article 5, le chef de compétence de la succursale article 5-5° tous les contrats passés avec un opérateur économique établi à l’étranger mais passé au lieu de sa succursale, ces contrats peuvent donner lieu à la compétence du juge de lieu de la succursale.
Compétence du lieu d’agissement.
Article 5-1 et article 5-3° sont des illustrations de la compétence du pays du lieu d’agissement du professionnel. La jurisprudence communautaire avait permis déjà auparavant que le lieu d’exécution des obligations contractuelles soit d’avance fixé par la convention. Pour les activités non contractuelles, le règlement fait encore usage de la notion du lieu d’agissement du défendeur et ici du professionnel. Ce chef de compétence dans la plupart des cas devrait aboutir à des solutions prévisibles.
Cour de cassation, 25 mars 2009, Sinequanone : il s’agit d’un vendeur de produits établi dans le sud de la France qui apprend par un de ses clients qu’il a un concurrent établi en Allemagne. Il achète des produits à ce concurrent et il assigne pour concurrence déloyale. Le défendeur avance que la compétence française a été provoquée par fraude. La Cour dit que la société étrangère a été sollicitée par des voies qui ne lui apparaissait pas anormales, si bien qu’on pouvait considérer que l’activité se localisait en France, attributive de compétence à la France au titre de l’article 5-3°.
Question des sites internet.
La première fois où la question d’internet est intervenue est l’affaire Yahoo en 1999. Le site internet géré depuis les États-Unis expose et met en vente des outils de propagande nazie. Cette commercialisation est licite au regard du droit américain. La Lycra intervient. L’affaire se solde par la voie pénale, mais le juge français s’est reconnu compétent et a enjoint à l’opérateur de fermer son site ou de le rendre inaccessible.
Chambre criminelle, 2008 : blog scientifique franco-espagnol où interviennent des internautes et un labopharma de Clermont intente une action pour diffamation contre un article du blog relatif à ses produits. L’affaire est internationale, avant de saisir un juge ou faut localiser les faits.
Théorie de l’accessibilité.
Deux raisonnements sont possibles par rapport à la mise en œuvre d’un chef de compétence de l’article 5-3° par rapport aux agissements commis à travers internet. Le premier est un décalque du droit commun connu sous le nom de critère ou théorie de l’accessibilité : dès qu’un site internet étranger est accessible en France, tout ce qui surgit sur ce site est réputé surgir en France. Cette théorie offre les garanties les plus grandes pour les victimes potentielles mais elle recèle des dangers pou celui qui anime le site ou pour celui qui est l’auteur de l’acte incriminé parce que le responsable potentiel va pouvoir être exposé à la compétence de tous les tribunaux du monde où le site est accessible.
Théorie de la focalisation.
L’autre critère possible tient compte de la subjectivité, c’est la théorie de la focalisation. Il ne suffit pas que le site soit matériellement accessible, il faut qu’il ait été destiné à tel ou tel pays. À défaut il n’est pas focalisé vers ce pays et tous les agissements qui surviennent sur le site ne peuvent donner lieu à un procès dans un pays qui n’est pas couvert par la focalisation.
Cette théorie n’est pas acceptée en droit commun par les juridictions. Elle permettrait de mieux paramétrer un site pour limiter les pays dont la compétence judiciaire est virtuellement en cause. Cette théorie est mise en œuvre en spécifiant le site internet, tout d’abord par la langue mais c’est insuffisant, mais aussi en restreignant les moyens de paiements, identification géographique, clause de décharge qui limite le champ d’action territorial.
Cour d’appel de Paris sur cette question est entrée en résistance discrète puisqu’elle a dit notamment dans les contentieux ebay et google, pour que le juge français soit compétent il faut qu’il y ait un lien substantiel et significatif entre le site et le public français. C’est un tempérament à la théorie de l’accessibilité.
Compétence protectrice des parties faibles.
Il y a dans le règlement trois grands types de parties faibles, assuré, travailleur, consommateur passif. Dans ces trois cas, la compétence est encadrée.
Compétences exclusives
Des règles sont établies en considération spécifique de professions ou d’activités, notamment l’article 22-2°, compétence exclusive du siège de la personne morale pour décider de sa dissolution et de la validité des décisions internes. Le règlement indique là que pour déterminer le siège, chaque juge pourra déterminer ses propres règles de droit international privé.
Compétence en matière de certains droits intellectuels.
D’après l’article 22-4, en matière d’inscription ou de validité des brevets, marques, dessins et modèles, et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à enregistrent, la compétence est exclusivement attribuée aux juridictions de l’État membre sur le territoire duquel le dépôt ou l’enregistrement a été demandé, a été effectué ou a été réputé avoir été effectué aux termes d’un instrument communautaire ou d’une convention internationale. Cet article comporte des réserves en ce qui concerne le brevet européen.
Compétence pour inscription sur les registres.
Article 22-3, en matière de validité des inscriptions sur les registres publics, sont compétents les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel ces registres sont tenus.
Clauses attributives de juridiction.
Pour les clauses attributives de juridiction qui ne sont pas spécifiques au professionnel, article 23 la clause attributive de juridiction est valablement conclue si elle a été conclue par écrit, verbalement avec confirmation écrite, la clause est valable. Elle est valable encore dans le commerce international sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou était sensées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce. Ils peuvent être liés par une clause conclue ni par écrit ni par oral.
Le connaissement maritime est le titre de transport international des marchandises. Il renferme des clauses relatives au contrat de vent et au contrat de transport. Le connaissement maritime contient régulièrement des clauses de règlement des différends. Ce document soit n’est pas signé du tout soit n’est signé que par le transporteur. Un connaissement non signé peut être opposable au nom du commerce international.
Règles hors Bruxelles I.
En Europe l’existence des procédures uniformes simplifiée de règlement des impayés.
Convention de la Haye de 2005 sur les clauses d’élection de for, cette convention pas encore ratifiée, objectif c’est au niveau universel et pas seulement intra européenne de prévoir un régime d’efficacité des clauses attributive de juridiction. Elle devrait être signée par l’Union européenne elle-même.
B – Conflits de lois.
Place importante pour la prévision et la localisation objective.
Les contrats et la considération de l’activité professionnelle.
Localisation de l’activité à défaut de connaissance de l’autonomie de la volonté.
Lorsque l’autonomie de la volonté n’est pas connue, on voit consacré le critère de la localisation de l’activité : le lieu d’exercice d’une activité est érigé en critère. On le voit pour la protection des parties faibles, article 8 Rome I, la relation est régie la loi habituelle du lieu de prestation de la relation de travail. Pour les contrats d’assurance, application impérative de la loi de situation du risque, correspond où l’assureur exerce une activité professionnelle.
Contrat passé avec un consommateur, le règlement Rome I de 2008 actualise la définition du consommateur passif pou tenir compte du phénomène d’internet. Cette actualisation se fait par transposition du critère de la focalisation. Pour les contrats de transport, on applique la loi de la résidence du prestataire. Si elle est aussi la loi du pays d’embarquement ou de débarquement, à défaut on appliquera la loi du pays de livraison : on retrouve un rattachement territorial du type lex loci exequisionis.
Directives communautaires.
Il faut toujours faire attention à la protection impérative issue des directives communautaires qui recouvrent certains secteurs. Le risque avec ces directives, c’est que mal comprises elle soient appliquées selon un critère territorial à la manière des lois de police.
Cour de Justice, 2000, Ingmar : vendeur distribuant en Europe des produits américains. Ce contrat d’agence commerciale vient à être rompu. L’agent commercial réclame le bénéfice prévu par la directive agents commerciaux. Devait elle s’appliquer. La Cour répond oui en raisonnant avec la méthode des lois de police, la directive son but est de protéger tous les agents actifs à l’intérieur de la communauté. La Cour n’emploie pas le vocabulaire loi de police mais aboutit au même résultat. Cet arrêt est critiquable en ce que pour la partie extra-européenne, il est facteur d’insécurité.
A l’avenir dans le nouveau régime de Rome I les directives ne pourront intervenir que par deux voies alternatives, article 3-4 qui est l’exception de contrat régional, lorsque le contrat n’a d’attache qu’avec des État de l’Union, on ne peut invoquer le droit étranger. En revanche si le contrat dépasse les frontières de l’Union, la seule porte d’entrée de ces dispositions sera la qualification de loi de police de l’article 9 du Règlement Rome I. Est visé le but d’intérêt public de la loi de police, or ces directives ne revêtent pas une importance d’intérêt public.
Désignation de la loi applicable en connaissance de l’autonomie de la volonté.
Lorsque l’autonomie de la volonté est reconnue, la loi applicable au contrat fait l’objet d’une désignation. Le principal effet de la désignation est un effet de centralisation législatif. Il subsiste un certain nombre d’exception parfois édictée en considération du fait professionnel. Article 12-2, la loi du contrat s’applique a peu près à tout, néanmoins pour les modalités pratiques d’exécution du contrat on aura égard au lieu d’exécution du contrat.
Choix de compte, il est de principe que les parties peuvent librement choisir leur monnaie de compte. Cette règle n’est pas prévue par le règlement Rome I, il faut donc s’assurer qu’elle est prévue par la loi du contrat.
Article 19, alinéa 1 résidence habituelle des personnes morales. Fixe le rattachement à défaut de choix. 19-2 rattachement de la succursale.
Pour les franchises on appliquera la loi du fournisseur local pour protéger les parties faibles des contrats de distribution. Mais pour faire tomber cette protection il suffit de préciser dans le contrat, application à défaut de loi en effet.
La prévision en dehors du contrat.
Rome II essentiellement. Sont agencés l’autonomie de la volonté et de la territorialité article 14. Conciliation de la flexibilité et proximité du rattachement.
Section 2 : Un droit spécifique des affaires internationales ?
1 – La thèse autonomiste.
C’est celle qui considère qu’il existe un ordre juridique marchand, ou un ordre juridique des marchands. C’est l’idée de lex mercatoria. Cette thèse de la lex mercatoria a été défendue dans les années 1960-1970 par les plus grands esprits du commerce international.
Tendance libérale.
Auteurs de sensibilité libérale, ces auteurs vont dire que s’il y a bien un domaine où l’État doit se retirer, c’est le secteur marchand. Ce secteur fait l’objet d’une autorégulation régit par un droit propre. L’auteur significatif Goldman en France, Schmitt Hoff en Angleterre qu’il appelait la nouvelle loi des marchands.
Tendance collectiviste.
À la même époque, des auteurs de tendance collectivistes vont défendre que le droit du commerce international, c’est la lex mercatoria. Ces auteurs dirigistes vont se focaliser sur l’entreprise multinationale qui fixe elle-même ses lois. Ces auteurs l’ont dit pour mettre le phénomène sur la table et le combattre.
A – Variante absolue.
C’est celle qui dit que la lex mercatoria constitue un véritable ordre juridique marchand autonome. C’est non seulement des règles de droit mais aussi des organes chargés de les appliquer. Double dimension normative et institutionnelle. Dans cette version absolue de la lex mercatoria, les marchands évoluent dans ce milieu.
Moyen Age.
Il est exact que l’on voit au Moyen Age un particularisme se développer spontanément en matière commerciale résumé avec deux images qui se complètent mais ne se confondent pas. Image de la caravane qui était le moyen de transport des marchandises, le marchand qui veut avoir accès à des marchés se regroupe avec d’autres, les marchands assument en groupe les risques liés à l’aventure commerciale internationale. Au sein de ces caravanes, vont se développer certains usages particuliers : les taches vont être spécialisées, ce qui est avéré c’est que ces sociétés sécrètent leur loi. Il y a une société humaine qui développe son droit, ces marchands voyagent avec leurs lois. Ce n’est pas la lex mercatoria parce que lorsque ces marchands vont rencontrer les autres marchands, ils ne vont pas forcément contracter selon leur loi.
Image de la foire.
Dans l’ancien droit commercial on distingue le marché qui est le lieu de commerce interne et la foire qui se réunit de manière moins périodique. Les foires sont des lieux de rencontre des expéditions commerciales en provenance des divers coins du monde. Ces foires sécrètent leur loi propre, notamment des réglementations sur les fraudes et escroqueries commerciale, réglementation de la monnaie d’échange, des règles totalement locales et contingentes, administrative de droit public pour permettre au marché de fonctionner de façon structurée.
Critique de la thèse absolue.
Non exclusion de l’État.
Les règles de marché ne sont pas spontanées, elles sont édictées par le seigneur local, elles fixent un cadre institutionnel au lieu de l’échange. Pas d’universalité des règles applicables, ni d’exclusion de l’État puisqu’elles émanent du seigneur local. Ce lieu dicte sa loi.
Arbitrage comme mode secondaire de règlement des différends.
Cette théorie absolue dit que dès qu’un professionnel agit au-delà des frontières il sort du droit commun et arrive dans la sphère de la lex mercatoria. Pour Goldman, l’arbitrage est le mode normal de règlement des différends. Ce sont des personnes privées. C’est une vision statistique ou sociologique, confine à la profession de foi. D’un point de vue juridique, l’arbitrage n’est accessible que du fait du consentement des parties, l’arbitre ne peut être alors le mode normal de règlement des différends. Le juge de droit commun reste le juge étatique. L’arbitre est un mode volontaire.
Derrière le mot arbitre, il y a une égalité disparate : on fait appel a des gens qui n’ont aucune qualification, des citoyens lambdas. Ils ne peuvent former de véritables organes. Il n’y a donc pas d’organe ni une lex mercatoria arbitralis, qui serait un droit jurisprudentiel développé par les arbitres : les sentences sont confidentielles. Il n’y a pas de juge, ni de policier : ce sera la force étatique. Y a-t-il du droit sécrété par les marchands : les professionnels qui agissent au-delà des frontières, il n’y a pas suffisamment d’homogénéité entre ces professionnels pour qu’un droit commun émerge.
B – Variante relative.
Il s’agirait non d’un ordre juridique des marchands mais d’un système juridique des marchands réduit à ceci que pour les relations commerciales internationales il existerait des règles de droit informelles. Ces dernières seraient le droit prioritairement applicable aux relations commerciales internationales. Ce droit informel existe : il y a autre chose que du droit étatique, mais ce droit n’est pas d’application prioritaire au contraire, il est d’application subsidiaire.
1 – Existence du droit informel.
Principes généraux.
Règles juridiques non légiférées. On peut distinguer entre des principes généraux et des usages. Principes généraux dégagés par la voie comparative, virtuellement communs au droit de tous les États, par exemple la loyauté et la bonne foi. Cette règle qui a des déclinaisons dans divers domaines, c’est le principe d’action numéro un en droit du commerce international. Ces principes sont d’une telle généralité qu’on ne peut rien en tirer de concret. D’autre part, s’il est authentiquement compatible avec une législation interne, il ne s’en distingue plus.
Usages.
Les usages sont plus intéressants parce que la notion d’usage du commerce fait quant à elle référence à l’idée d’un droit spontané qui né de l’action et de l’interaction des opérateurs économiques. Au fond, les usages correspondent à une réglementation privée sectorielle. Ces usages existent, mais sont-ils suffisants ?
Institutions, la Chambre de commerce internationale.
Institution spécifique sous forme d’association loi 1901 : la CCI de 1919, la Chambre de commerce internationale. C’est une association privée, elle n’a rien à voir avec un quelconque État. Elle a une mission en matière de prestation de service d’arbitrage, elle accueille une cour internationale d’arbitrage : elle permet d’organiser des arbitrage institutionnalisés. Elle conseille les opérateurs et coordonne l’action d’opérateurs économique pour permettre de pénétrer un marché étranger. À ce titre d’ailleurs la CCI à un statut de consultant et d’observateur privilégié aux nations unis. Troisième rôle, elle a une « activité normative » : elle une activité d’écriture de rationalisation et de codification des usages. La CCI a entrepris de poser par écrit certains usages commerciaux internationaux. En pratique cela présente un très grand avantage : l’usage devient plus précis.
Les RUU 600.
Règles et usances uniformes relatives aux crédit documentaire. Recueil d’usages qui codifie les pratique bancaires et interbancaire pour les opérations de crédit. La Cour de cassation les vise mais avec valeur coutumière, d’usage donc ils ne constituent pas le droit applicable de prime abord.
Incoterms, international commercial terms.
La CCI a réalisé une sorte d’esperanto du droit, langage uniforme. Ce sont des associations de trois lettres qui décrivent la nature juridique de l’opération projetée et qui résume un certain nombre d’obligations respectivement assurées par telle ou telle partie de la relation commerciale. Pour comprendre l’utilité pratique de ces incoterms, il faut essayer de se représenter chronologiquement le déroulement concret d’une opération d’import/export. Souvent les contrats sont liés entre eux et on rencontre souvent l’alliage de la vente, du transport, du crédit et de certains contrats de garantie.
Déroulement d’une opération import export.
On part donc du premier point, le lieu d’établissement du vendeur ou l’usine de fabrication d’un produit. Après cela on enchaîne une opération de transport interne (routier ou ferroviaire), qui achemine le produit à un point de transport international (port aéroport). Au port doivent s’opérer une série de formalités administratives de déclaration et de dédouanement des marchandises, des manipulations de la marchandise (chargement), pour cela on a souvent recours à des sous traitant, le chargement à bord des navires (il faut donc un contrat de transport ou la location du navire.). Après cela il y a le transport maritime avec les risques qu’il comporte. Après dans un second sens, il va se passer la même chose au lieu de l’établissement de l’acheteur.
Faisceau de droit et obligations.
Il y a donc un nombre important de contrats et de formalités et il y a des risques à chaque étape de mauvaise exécution qui peut se traduire par une absence de livraison ou une livraison incomplète. A chaque incoterm correspond un faisceau de droits et d’obligations spécifiques aux parties au contrat. L’incoterm qui réparti également les risques de perte fortuite de la marchandise fixe un point de rupture c’est à dire un moment et un lieu à partir duquel toutes les responsabilité matérielles et juridiques passent du chef du vendeur à l’acheteur.
Familles d’incoterms.
Famille E.
Elle contient un incoterm, l’incoterm EXW qui signifie Ex Works c’est-à-dire sortie d’usine. A partir du moment où le produit est sorti d’usine, le vendeur se décharge de toute responsabilité, c’est à l’acheteur de régler toutes les formalités. On appelle cela également une vente au départ. Le schéma inverse est la vente à l’arrivée, elle est plus confortable pour l’acheteur mais plus cher.
Famille F.
Il y a la FOB, «Free on Board». Le point de rupture est sur le bateau, lorsque la marchandise passe sur le bateau. FAS, «Free along Side», le point de rupture est après le passage de la douane par le vendeur. Il est responsable jusqu’après le passage de la douane.
Famille C.
On trouve CIF, «Cost Insurance Fret» qui veut dire que les coûts du transport incombe et sont pris en charge par le vendeur et non pas par l’acheteur. Vente CIF Tokyo, on se libère au port de Tokyo.
Famille D.
DDP, «Delivred duty paid» c’est le schéma d’une vente à l’arrivée. Le vendeur est responsable jusqu’à la délivrance de la marchandise chez l’acheteur. Le point de rupture se trouve donc au bout du processus de livraison
Choix de l’incoterms.
Le choix de l’incoterm dépend des négociations des parties sachant bien sûr que la famille des E est moins chère pour l’acheteur que la famille D. Il convient de préciser que dans toutes les familles il y a beaucoup de variantes. La CCI tient à jour un catalogue des incoterms et leur signification précise. Ces exemples suffisent à montrer qu’il existe s’agissant du commerce international, un droit informel.
2 – Valeur du droit informel.
Ordre public, valeur subsidiaire des usages.
La question de l’originalité de ce droit, elle est incontestable. Ces règles forment elles un système de droit complet ? Ce système a t il une vocation légitime à l’exclusivité ? Il ne faut pas en exagérer l’importance et la portée. Il s’agit avant tout d’une réglementation technique. On est là dans le détail de l’horlogerie d’un contrat international. Ce système n’a pas vocation à régler la question de l’ordre public.
Le droit informel est donc une réglementation lacunaire des opérations commerciales internationales. Mais si c’est nécessaire il ne faut pas que la CCI franchisse les limites et s’amuse à toucher l’ordre public. Les questions les plus importantes relatives à la validité ressortent au fond d’un domaine réservé aux États. Ces règles ont une valeur complémentaire et subsidiaire.
En cas de conflit entre le droit étatique et un usage, c’est le droit étatique qui l’emporte. Mais c’est complémentaire car le droit étatique ne dit pas tout, lorsqu’il est supplétif ou lacunaire il est normal et légitime que les parties par stipulations contractuelles ou par usages viennent enrichir la réglementation de leurs rapports économiques. On en revient aux leçons de première année de droit, la coutume contra legem n’existe pas. Au fond ces débats ne sont pas bien utiles.
Réglementation stratifiée.
Remarque sur la réglementation des contrats du commerce international. La meilleur comparaison possible c’est l’image de la pièce montée, la réglementation à plusieurs étages, stratifiés.
Premier étage.
L’arrêt messagerie maritime, le socle de base du contrat est une loi étatique désignée au moyen des outils ordinaires de résolution des conflits de droit qui peuvent être complétées par des dispositions impératives tierces, les lois de police. Contrat import export franco égyptien, le contrat est soumis au droit français, mais dans le pays d’arrivée il peut y avoir une loi d’embargo, qui va s’appliquer en tant que loi de police. Le contrat est donc couvert par des lois de deux pays.
Deuxième étage.
Il est parfois constitué de conventions, de droit matériel uniforme, c’est à dire des conventions internationales édictées dans un secteur économique donné. Conventions qui ne règlent pas les conflits de loi grâce au rattachement mais qui fixent directement droits et obligations des parties. Il y a énormément de conventions.
La convention de Viennes des Nations Unies de 1980, sur la vente internationale de marchandise (le symbole). On aménage la définition du contenu et du régime d’exécution. La convention de Vienne a été ratifiée par 90-100 États dans le monde, elle est assez riche mais n’est pas complète, elle ne régit pas la validité du contrat de vente ni la question du transfert de propriété de la marchandise. Cette convention peut être applicable de plein droit dans deux cas :
–Circonstance d’application objective : le vendeur et l’acheteur sont établis sur le territoire d’un État partie à la convention de Vienne.
–Si la convention de Vienne a été ratifiée et est en vigueur dans le pays désigné par la règle de conflit de lois.
Article 6 de la Convention de Vienne, la convention est entièrement supplétive de volonté, cela signifie que les parties peuvent exclure la totalité ou une partie de la convention.
Troisième étage.
Il est composé au fond des compléments contractuels et de toute la partie de droit informel qui est les usages du commerce international.
2 – Mesure du particularisme du droit appliqué au commerce international.
Le plus important tient au marché concerné. Au fond si on aimait les adages on pourrait dire «A chaque marché national son droit». La même opération de commerce international entreprise par le même acteur professionnel pourra avoir une couleur juridique très différente en fonction du marché sur lequel l’opération se localise. On le voit sur l’exemple des professionnels agissant à l’égard des consommateurs. Lorsque Amazone vend des livres, selon qu’elle les vende aux français ou aux russes, cela va être différent.
Le plus sage va être de réduire le transfrontière à de l’interne. Souvent le professionnel agissant par-delà les frontières ne cherchait pas spécialement à être en dehors de la sphère juridique, mais plutôt d’être confronté à la pluralité juridique, et le plus simple pour y arriver, ils vont tenter de retourner au marché interne. Sur internet souvent il y a un site par pays, histoire de n’avoir qu’une seule loi applicable, le droit interne du pays.
A – La spécificité des acteurs.
Il y a un particularisme des acteurs, qui sont-ils ?
L’État.
Il intervient parfois comme un commerçant. Il peut passer des contrats de droit privé. On appelle cela des «State contract», c’est le contrat passé entre le professionnel du droit privé et un État étranger.
Le professionnel privé.
C’est notamment le professionnel privé structuré sous forme de société commerciale. La meilleure structure pour financer une activité professionnelle permanente, c’est le recours à la personnalité morale.
B – La spécificité de l’activité professionnelle transfrontière.
L’activité professionnelle dans le monde électronique, l’activité professionnelle dans le domaine de l’import export de marchandises manufacturées. Au fond pour étudier le droit du commerce international il y a deux voies possibles. Il y a la première voie qui est celle de l’étude d’un droit du commerce international sectoriel, l’idée consistant à dire qu’à chaque secteur économique spécifique, il existe une réglementation spécifique.
On étudierait ici toute une série de contrats spéciaux nommés ou pas dans le domaine du commerce international. Cette étude n’est pas sans intérêt mais est analytique, illustrative et donc ne dispense pas de l’autre manière d’étudier le droit du commerce international. Le droit du commerce international synthétique, c’est le droit du commerce international général. On regarde les questions permanentes abstraction faite de tel ou tel secteur économique déterminé. C’est ainsi que le cours se déroulera.
Chapitre 2 : L’arbitrage.
L’arbitrage est une justice alternative à la justice d’État. C’est un mode juridictionnel et contraignant de règlement des différends qui ne passe pas par le canal des juges étatiques et qui a même vocation à remplacer cette justice étatique pour des raisons de plus grande convenance, de plus grande commodité, de plus grande adaptation de la justice au contexte économique et technique d’un contentieux donné. C’est mieux d’être jugé par des gens qui s’y connaissent lorsque le contentieux est très spécifique.
Arbitrage en droit français.
On fait de cet arbitrage à la fois un emploi international mais aussi un emploi interne. Cette justice arbitrale est pratiquée en droit interne pour la résolution de certains litiges professionnels. Nos textes mais aussi le Code civil prévoyaient la licéité du recours à l’arbitrage entre commerçants pour les affaires de commerce. Justice plus flexible et plus commode. La loi NRE de 2001 a ouvert le champ de l’arbitrage dans la sphère interne en réformant l’article 2161 du Code civil qui dit que l’on peut compromettre (arbitrer) tous les litiges professionnels. On modernise le périmètre qui prend en compte l’activité professionnelle quelle qu’en soit la nature.
En droit interne on accède à l’arbitrage avec deux types de clause : la clause compromissoire qui est un engagement pris à l’avance de recourir en cas de litige à l’arbitrage. En droit interne on s’en méfie car on a peur que les gens ne se rendent pas compte de ce que cela entraîne. Le second type de clause est le compromis, c’est le même engagement mais arrêté une fois le litige né.
Valeur de l’arbitrage.
L’arbitrage présente pour les non initiés de grands dangers. C’est une justice payante, c’est un vrai marché juridique. Cette justice entretient son monde, et les juristes concernés font leur publicité et encouragent les parties à opter pour l’arbitrage (rapide, « confidentiel », flexible, sur mesure car on choisit son juge). Mais ce qu’on dit moins c’est que c’est une justice coûteuse, potentiellement dangereuse, si on ne s’y connaît pas on a toutes les chances de perdre En fait en cas de doute il vaut mieux éviter, mais cela on ne le voit jamais parce que ceux qui écrivent à propos de l’arbitrage en vivent. C’est une bonne option pour le initiés.
Distinction arbitrage interne et arbitrage international.
L’arbitrage international fait l’objet en France d’une réglementation plus simple que l’arbitrage interne. On différencie les deux. Concernant les sources de réglementation de l’arbitrage international, comment différencie-t- on les deux (interne ou international).
L’article 1492 du Code de procédure civile est le premier texte spécifique de l’arbitrage international, il prévoit que « est international l’arbitrage qui met en cause les intérêts du commerce international ». On a voulu là avoir une approche économique et compréhensive de ce que peut être un arbitrage international. On n’a pas voulu prendre compte de l’établissement du défendeur ou du demandeur. On a préféré avoir une définition économique, matérielle. Il faut donc que la relation concerne les échanges économiques internationaux.
Sources de l’arbitrage.
Code de procédure civile.
Les sources c’est d’abord des règles françaises dérogatoires. Ce sont quinze articles issus d’un décret de 1981 qui a édicté quinze articles inscrits dans le Code de procédure civile, articles 1492 à 1507. Ils sont positionnés après les textes de l’arbitrage interne.
Droit international conventionnel.
Convention de New York de 1958.
Il y a ensuite du droit international conventionnel mais vieillissant et peu fourni. On a d’abord la Convention de New York de 1958 qui a un objet restreint. Porte sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères. Ces règles sont pour les États supplétives et constituent le socle minimal, mais si on est plus favorable on peut le faire. En France on a rarement l’occasion d’appliquer cette Convention car le droit interne est plus favorable, de ce fait les quinze articles cités ci-dessus font écran.
Convention de Genève.
Il y a également la Convention de Genève de 1961 qui est une convention européenne sur l’arbitrage commercial international. Il y a un peu plus de règles que celle de New York de 1958 mais sont périmées si l’on se souvient des circonstances. Ce texte a été signé en période de guerre froide pour facilité le débouclage de contentieux économiques en Europe entre opérateurs ressortissants des deux blocs.
Droit international informel.
Il y a également du droit international informel, donc on ne peut pas le réduire à des règles de droit écrites et codifiées par les États.
Jurisprudences nationales
Les jurisprudences nationales rendues régulièrement par des juridictions spécialisées : la Cour d’appel de Paris a en son sein une chambre spécialisée. Les jurisprudences nationales se font souvent écho.
Lois modèles.
Il y a également des lois modèles. La CNUCDI a proposé un texte de loi non contraignant qui est une réglementation exhaustive proposée aux États souverains qui peuvent librement la transposer. C’est le moyen le plus efficace pour arriver à l’homogénéité des lois. Si on faisait un texte obligatoire il y en a plusieurs qui ne le feraient pas. Là on propose un texte et ça marche, les États les acceptent. C’est l’objectif d’attractivité des États, ils sont même notés et classés. Si on veut être « attractif » il faut transposer les lois modèles.
Statuts et réglementations intérieures.
Enfin il faut mentionner les statuts et les réglementations intérieures qui garantissent le bon déroulement des instances arbitrales. On peut faire des arbitrages AAA ou CCI ce qui veut dire que l’on fera des arbitrages selon des règlements privés qui constituent d’importantes sources pratiques de la réglementation de l’arbitrage. Ces institutions privées d’arbitrage sont en concurrence et doivent être le plus attractives possible, elles s’épient et s’imitent. Mais on peut aussi avoir recours à un arbitrage ad hoc et non un arbitrage institutionnel. On peut choisir qui on veut et où on veut.
Traités fondamentaux.
Les traits fondamentaux se résument par la liberté, la souplesse, la rapidité et la confidentialité. Le droit en tient compte, de cette souplesse, de ce désir de liberté, d’aménagement de la procédure. Et le droit est marqué par ces besoins, mais parfois il tombe dans l’excès, c’est la tendance française qui est extrêmement libérale. A chaque fois que c’est possible on déréglemente.
Cour de cassation, 29 juin 2007, Putrabali : la Cour dispose que la sentence arbitrale est une décision de justice internationale qui n’est rattachée à aucun ordre juridique étatique. Une décision rendue par un arbitre est une norme flottante. On ressuscite cette idée que l’arbitre serait la forme normale de jugement en commerce international.
Instance post arbitrale.
En fait c’est une métaphore contredite par le droit positif. Une fois le différend tranché, l’arbitre est dessaisi et retourne à ses occupations. Lorsqu’il y a des difficultés d’exécution on a recours à l’instance d’État. Peut naître alors une instance post arbitrale, ayant recours à la contrainte d’État, les autorités étatiques vont retrouver un pouvoir de contrôle.
Il existe une exequatur des arbitrages internationaux et il est évident que cette exequatur est donnée sur un acte privé. Cette exequatur ne va pas être donné par un administratif les yeux bandés. L’exequatur de l’arbitral est conditionnée par une instance de reconnaissance du contenu. L’idée de sentence flottante on se rend bien compte que c’est une métaphore trompeuse. Une sentence choquante, non reconnue et non exequaturée n’est rien d’autre qu’un chiffon de papier. On ne peut pas dire qu’une sentence arbitrale n’est pas douée d’autonomie.
Position erronée de la France.
L’arrêt de la Cour est intervenu dans une affaire de vente de poivre sauf qu’il arrive pourri. Clause compromissoire disant qu’on aura recours à un arbitrage institutionnel siégeant à Londres. Sentence condamnant l’acheteur à payer le prix du poivre car on considère que l’incident n’est pas de la faute du vendeur. Particularité de la réglementation anglaise de l’arbitrage international, on doit pouvoir faire appel de la sentence arbitrale devant le juge d’État pour violation de règle de droit. La Court of Appeal annule la sentence et rend même une décision en sens contraire.
Mais le vendeur se saisit de la sentence arbitrale et demande l’exequatur en France. En défense on crie à la fraude. La Cour répond qu’elle n’a cure de savoir comment les anglais font avec l’arbitrage, et donc elle dit qu’elle va contrôler elle-même abstraction faite de ce qu’a dit le juge anglais pour juger si c’est valable ou non. La Cour a réussi a exequaturer une sentence arbitrale qui sous l’empire de la loi d’origine n’existe plus. Création d’une situation complètement boiteuse. On en arrive au résultat qu’en Angleterre l’acheteur n’a pas à payer et a même limite droit à des dommages et intérêts alors qu’en France il va devoir payer.
Section 1 : Une justice privée.
1 – La nature de l’arbitrage.
L’arbitrage revêt d’abord et avant tout une nature conventionnelle. Il nait de l’accord des parties, il est donc calibré par cette convention mais ce n’est pas tout. Il faut ajouter que de source et d’origine conventionnelle l’arbitrage revêt la nature d’une juridiction conventionnelle. Le mot de juridiction implique un pouvoir, une autorité. C’est le pouvoir de résoudre un litige en disant le droit, en application des règles de droit. Si on décompose ainsi la nature de l’arbitrage, il y a d’abord la soumission volontaire d’un litige, et aussi au pouvoir de décision d’un tiers choisi.
A – La nature juridictionnelle.
Attributs de la décision de justice.
A l’issue du processus, on voit que l’arbitrage revêt une nature professionnelle car à l’issue on a une décision juridiquement obligatoire et juridiquement définitive on a donc bien la solution utile et contraignante d’un litige. La sentence produit un état de droit nouveau comme un jugement. La nature juridictionnelle de la sentence se voit qu’elle a vocation d’avoir les mêmes attributs de la décision de justice (chose jugée, force exécutoire si exequatur).
Acte juridictionnel.
C’est un acte juridictionnel qui a tous les atouts du jugement sauf la force exécutoire conditionnée par l’exequatur. On le distingue donc des modes alternatifs de résolution des litiges. Il s’agit de la médiation et de la conciliation, où l’on ne « tue » pas le litige contrairement à l’arbitrage. Au cours du déroulement de l’instance arbitrale, le caractère juridictionnel se traduit par quelque chose qui est constant, presque de droit naturel c’est le débat contradictoire.
Nécessité d’un véritable litige.
Enfin, avant la mise en œuvre du processus, la nature institutionnelle de l’arbitrage implique que l’on ait affaire à un véritable litige reposant sur des éléments de faits et/ou de droit. Ceci permet de faire la distinction entre l’arbitrage et des situations frontalières du droit des contrats comme le mandataire commun ou la fixation du prix. Fixer un prix n’est pas résoudre un litige. La fixation de prix aura valeur contractuelle et non d’arbitrage.
B – Les aspects conventionnels.
Ils se traduisent d’abord et en principe par le libre choix par les parties de l’autorité non permanente de jugement et libre choix aussi des modalités de jugement. C’est ce que dit dans notre droit français de l’arbitrage international l’article 1493. On peut choisir son juge et les modalités de ce jugement, et les textes reprennent la distinction arbitrage ad hoc ou institutionnel. Il y a deux grands types de conventions conclues pour recourir à l’arbitrage.
Convention d’arbitrage.
Le droit français n’exige pas ad validatem le droit écrit, mais en pratique on le fait. C’est la convention d’arbitrage on peut aussi bien dire contrat d’arbitrage car il crée l’instance arbitrale mais on peut aussi la lire en terme de création d’obligations mutuelles des parties. On s’oblige à deux choses : obligation de ne pas faire c’est- à-dire ne pas saisir le juge étatique, et obligation de faire c’est-à-dire saisir l’arbitre.
La convention d’arbitrage opère le renoncement aux voies étatiques et la faveur pour le juge. Si on saisit un juge malgré tout, les anglais considèrent qu’on viole ces obligations, et que dans ce cas on peut le contraindre à respecter ses obligations via une astreinte.
Contrat d’arbitre.
Le second contrat est plus discret. On l’appel le contrat d’arbitre, c’est l’acte juridique qui relie séparément, conjointement et solidairement les parties au litige avec les personnes privées choisies pour servir de juge. Il faut bien payer l’arbitre. C’est un contrat de prestation de service qui engendrent des relations réciproques entre les parties et l’arbitre, générant des droits et obligations réciproques et qui mettent à la charge de l’arbitre diverses obligations principales ou accessoires qui vont être de nature plus ou moins rigoureuses allant d’une obligation de moyen mais sans aller jusqu’à l’obligation de résultat, mais être ponctuel, ne pas sauter un délais. C’est la contrepartie de la rémunération « intéressante ».
La qualité d’arbitre ne présuppose aucune qualification. Il faut simplement plaire aux parties mais il y a une responsabilité à la clef. Donc attention, ne pas s’improviser arbitre. On peut se demander quelle loi appliquer à ce contrat. Si chaque partie nomme un arbitre et un autre comme président, si c’est le cas on ne va pas désigner la loi du domicile de l’arbitre. On considère en principe qu’il faut faire rejoindre la loi du contrat d’arbitre avec celle choisie pour la procédure.
Relativité des contrats.
La convention d’arbitrage doit être soumise à la relativité des contrats. Les contrats n’obligent que ceux qui les ont signé c’est quasiment du droit naturel. Donc pas question d’obliger un tiers non signataire, et on devrait regarder la question du rayonnement de la clause compromissoire à l’égard de tiers avec beaucoup d’attention. Souvent les arbitres procèdent à l’extension de la clause compromissoire à des tiers qui n’ont pas directement été signataires.
Extension de la clause compromissoire au sein d’un groupe de société.
On considère vite sur le terrain de l’apparence, de l’immixtion dans la gestion que les autres sociétés du groupe sont elles aussi liées par l’acte d’arbitrage. C’est un peu excessif.
Les groupes et chaînes de contrats.
La jurisprudence française accepte avec beaucoup de souplesse que les clauses compromissoires se transmettent avec les contrats.
Cour de cassation, 2001, Peavey : la Cour avance que la clause d’arbitrage se transmet de plein droit avec le contrat au sous contractant sauf preuve de l’ignorance raisonnable de cette clause par le tiers à qui l’on veut l’opposer. On répudie la méthode des conflits de loi et elle crée des règles matérielles en faveur à l’efficacité de l’arbitrage, c’est moyen car c’est de l’arbitrage forcé (antinomique).
2 – Le régime de l’arbitrage.
Effet à l’égard des tiers.
A l’issue de la procédure arbitrale, l’autorité de la chose jugée conférée à la sentence est plus que jamais relative. Elle ne sera obligatoire, définitive qu’à l’égard des parties. Il est hors de question que l’on fasse «rayonner » la sentence à l’égard des tiers. Cela pose des difficultés pour certains contentieux dits « constitutifs », c’est-à-dire des contentieux ayant vocation à fournir des effets sur des tiers.
Litige inarbitrable.
Propriété intellectuelle.
En matière de brevets, en cas d’enregistrement à l’Institut national de propriété intellectuelle, il est possible de saisir un arbitre pour savoir si tel brevet est valable. Cependant, il existe une compétence exclusive de l’État dans lequel les autorités tiennent le registre : cette compétence exclusive est réservée aux conflits judiciaires, l’arbitrage relève du domaine privé, en conséquence, la règle de compétence exclusive ne tient pas l’arbitre. Néanmoins, un tel litige se laisse difficilement rallier dans le domaine arbitral car ce litige a vocation à créer des effets envers les tiers. Ici l’arbitre n’a pas de titre pour dire que le brevet existe ou pas.
On considère que ce type de litige est un litige « inarbitrable ». La jurisprudence de la Cour d’appel de Paris fait la différence selon qu’une question inarbitrable de propriété industrielle se pose de manière principale ou incidente. Mais quoi qu’il en soit sur la partie incidente, la juridiction n’est pas tenue par la décision de l’arbitre.
Procédures collectives.
Il en va de même pour les litiges nés de procédures collectives d’insolvabilité. Voilà encore un cas d’inarbitralité que l’on va pouvoir qualifier d’objective : on se fonde sur l’objet même du litige. C’est du bon sens, « marier l’arbitrage aux procédures collectives c’est comme marier l’eau et le feu ». Lorsque l’arbitre a été saisi de l’exécution ou de l’inexécution d’un contrat et que l’une des parties fait l’objet d’une procédure collective, la jurisprudence française considère que l’arbitre doit sursoir à statuer et attendre que l’organe statue sur la question du débiteur mis en faillite, cela peut aller jusqu’à stopper la procédure devant l’arbitre.
A – Le régime.
On comprend le régime de cette justice privée en la comparant avec la justice étatique.
1 – Les exclusions.
Exclusion de la lex fori au regard des règles de procédure et de fond.
La première chose, c’est que « devant l’arbitre il n’y a pas de lex fori ». Plus généralement il n’y a pas de perspective étatique qui s’imposerait d’emblée au juge privé qu’est l’arbitre. Lorsque le procès va se dérouler devant l’arbitre celui-ci va avoir recours à des règles de procédure et de fond. Devant un juge étatique la procédure est fournie obligatoirement en principe par la lex fori, pour l’arbitre cela ne fonctionne pas.
Concernant des règles de fond, elles non plus ne sont pas régies par la lex fori même devant le juge, cependant on applique quand même bien le système de droit international privé du for. Puisque l’arbitre n’a pas de for, pas de lex fori, on comprend que l’arbitre n’appliquera pas les règles de droit international privé comme le ferait un juge étatique.
Exclusion de la lex fori au regard de la localisation.
Au début du XX siècle, la doctrine et la pratique de certains États avaient tendance à localiser l’arbitrage dans un pays donné qui était celui du siège de l’arbitrage, résultat, il y avait une lex fori. Mann disait que « c’est la loi qui fait l’arbitre ». Il faut au fond que la procédure soit enracinée dans le droit d’un pays qui va alors fournir à l’arbitre une loi pour le fond. C’est une théorie étatiste.
Mais cette théorie localisatrice est dépassée, et ce pour une raison simple : le siège de l’arbitrage n’a pas de valeur localisatrice intrinsèque. C’est le lieu du déroulement, le lieu fixé pour les audiences, il peut être fixé par les parties ou par les arbitres. Mais quand on fixe ce siège on le fait pour des raisons de commodité ou d’économie extra juridique : de nombreux arbitrages ont lieux dans des hôtels d’aéroports, cela n’a rien à voir avec les parties. En conséquence, cela ne doit pas avoir de conséquence juridique.
Exclusion de la loi étatique relative.
On pourrait considérer que ce qui est également exclu du domaine de l’arbitrage c’est tout simplement la loi étatique tout court. Cette vision est trompeuse. Ce qui est vrai c’est que sur le fond, la justice arbitrale internationale n’est jamais soumise à un foyer d’impérativité étatique exclusif. On ne trouve jamais des situations où la contrainte étatique viens d’un seul État. Il est généralement rattaché à plusieurs pays. Ainsi, plusieurs États peuvent au même moment avoir un « appétit régulateur ».
Ce sont les lois de police. Ceux qui disent que c’est parce que c’est un arbitrage qu’il n’y a plus de lois de police, se trompent. Par contre ceux qui disent que l’arbitrage est multi-localisé, en contact avec plusieurs droits nationaux, et au fond plusieurs États peuvent proposer ou tenter d’imposer leurs conceptions essentielles de l’impérativité internationale sont plus dans le juste.
Respect de l’ordre public international.
Dans la pratique cette impérativité du droit étatique sera parfois considérée en tant que tel, on constate un certain respect de cette impérativité, pas vraiment de façon précise mais on respecte plutôt la notion d’ordre public international. Il ne s’agit pas de l’ordre public international au sens du droit international privé, c’est-à-dire l’ordre public du for interne : celui que vise les arbitres c’est l’ordre public réellement international. Il est constitué de l’addition des principes qui paraissent les plus essentiels dans les divers droits nationaux.
Exemple : une entreprise de travaux publics américaine soudoie un fonctionnaire français pour obtenir un marché. Cette entreprise est avertie par l’avocat des éventuelles difficultés d’exécution du contrat, choix du recours à une justice cachée, discrète et délocalisée. C’est un contrat de corruption avec une clause d’arbitrage. L’arbitre se rend compte qu’il est contraire aux bonnes mœurs.
La tendance des arbitres (les honnêtes), est de ne pas sanctionner ce contrat, car il n’est pas le bras armé des États, il ne va pas viser telle ou telle loi de police. Ainsi, ils vont dire qu’ils constatent qu’on leur demande l’exécution d’un contrat constitutif d’un délit pénal, ce sont des pratiques contraires aux règles d’un certain nombre de pays, et que donc c’est un acte contraire à des standards réellement internationaux, donc contraire à l’ordre public réellement international. Les arbitres ne sont pas absolument affranchis des contraintes étatiques.
2- Le fonctionnement.
A – Des standards légaux majoritairement supplétifs.
Ce sont les articles 1492 et suivants du Code de procédure civile.
Procédure.
Article 1494, les questions de procédure sont réglées par la convention elle-même ou par renvoi par les règlements d’arbitrage (arbitrage ad hoc ou intermédié comme les arbitrages CCI). On peut dire que l’on soumet la procédure de l’arbitrage aux règles de la CCI, qui n’est pas un règlement légal, c’est un texte privé. Mais les parties peuvent aussi soumettre les questions de procédure à la loi d’un État. En cas de silence, l’arbitre peut régler les difficultés procédurales au fil de l’eau, mais en vérité même pour un arbitre le fait de se référer à des règles tierces offrent un surcroit de sécurité. Donc en cas de silence des parties c’est l’arbitre qui fait ce qu’il veut.
Article 1495, si l’on choisit la loi française, toutes les règles procédurales françaises sautent si les parties en font le choix. Les parties font ce qu’elles veulent.
Fond.
Article 1496, « l’arbitre tranche le litige conformément aux règles de lois que les parties ont choisies. A défaut, conformément à celle qu’il (l’arbitre) estime les plus adaptées ». En principe la loi étatique n’est pas directement source de contrainte pour les arbitres. C’est la volonté des parties à défaut, le feeling de l’arbitre. En Suisse, c’est pareil sauf qu’ils reprennent le principe de proximité (loi qui a les liens les plus étroits avec le litige), c’est dangereux à cause de sa souplesse.
B – Le principe de contractualité de l’arbitrage.
Articles 1496 et 1497 du Code de procédure civile.
Ce qui gouverne l’arbitrage et l’action de juger de l’arbitre, c’est le contrat. En appliquant ce principe de contractualité de l’arbitrage et de l’action de juger, quand on fond, se traduit par une large palette possible que la loi reprend aux articles 1496 et 1497. En gros on peut dire à l’arbitre de trancher le litige en équité, cela s’appelle l’arbitrage en amiable composition de l’article 1497. Mais on peut aller jusqu’à l’arbitrage en droit étatique (autre extrême).
Lex mercatoria.
Entre les deux on peut imaginer toutes les variations possibles, et on peut ainsi appliquer une certaine lex mercatoria. Si on désigne comme compétente la lex mercatoria dans un contrat que l’on présente devant un juge étatique, ce choix ne vaut rien, car il faut choisir une loi d’État. Devant un arbitre, on peut le faire. L’article 1496 dit bien que l’on applique les « règles de droit » choisies par les parties. La lex mercatoria est bien composée de règles de droit mais qui sont informelles et ne proviennent pas d’un État. On ne fait pas ça par idéologie, mais plutôt pour avoir une voie intermédiaire entre l’équité et le droit étatique. On fait appel au bon sens juridique de l’arbitre. C’est une sorte de chèque en blanc à l’arbitre.
Première chambre civile, 22 octobre 1991, Valenciana : les parties avaient juste dit à l’arbitre de « statuer en droit ». L’arbitre applique des grands principes généraux sans se référer au droit de tel ou tel État. C’est un raisonnement qui s’opère dans les termes de la lex mercatoria. C’est contesté pendant l’instance d’exequatur. On dit que la sentence est irrégulière car l’arbitre a violé sa mission qui est de respecter le contrat, les parties ont demandé de juger en droit, et se pose la question de savoir si un juge qui a statué en lex mercatoria a statué en droit.
La Cour de cassation dit que l’arbitre ayant appliqué et tenu compte de principes internationaux applicables à la matière commerciale, ayant reçu la sanction des jurisprudences nationales, alors l’arbitre a statué en droit. Les apôtres de la lex mercatoria y ont vu la consécration de leur théorie.
Silence des parties.
En cas de silence des parties, l’article 1496 dit que l’arbitre statue conformément aux règles qu’il estime appropriées. Le texte ajoute que dans tous les cas il tiendra compte des usages du commerce. En gros l’arbitre fait ce qu’il veut. L’arbitre n’a pas de lex fori s’imposant à lui. Ainsi il va regarder qui est concerné, voir ce que disent les règles des différents pays, et faire ce qu’il veut.
Principe de contractualité et procédure.
Pour la procédure vaut aussi le principe de contractualité qui n’est que le le revers de la médaille de la supplétivité des lois nationales. La clef motrice des règles de la procédure c’est le calibrage conventionnel. Il est en pratique fréquent et plus sûr de recourir à des règlements privés d’arbitrage. L’avantage des règles de droit c’est que toutes les incarnations des difficultés procédurales ne peuvent pas être prévues, et donc le recours à un texte qui balise la procédure est plus sécurisant. Une procédure arbitrale paralysée est le plus grave des maux : ayant renoncé au juge étatique, cela peut poser des difficultés.
Étant donné que les grands organismes d’arbitrage s’épient pour rester dans la course, ils s’améliorent en faisant une observation comparative des autres organisations privées, on arrivera peut être à une véritable unification des règles applicables aux arbitrages internationaux.
Des compilations privées ont été entreprises parmi eux il y a les principes ALI/Unidroit de procédure civile transnationale. C’est un texte écrit par des universitaires de toute provenance de tradition européenne continentale. Cela s’appelle ainsi à cause de l’institution à Rome Unidroit, et ALI est une institution américaine très prestigieuse qui fait des restatment (écriture privée du droit). On peut demander à l’arbitre de procéder avec les règles de ALI/Unidroit.
Principe de contractualité et Convention européenne des droits de l’homme.
Se pose aussi la question de savoir si le principe de contractualité ne serait pas à la marge, limitée, bridée par les droits fondamentaux de la procédure civile et notamment par les droits inscrits dans la Convention européenne de 1950. Est-ce que l’article 6-1 s’applique de plein droit à l’arbitrage international ? Au sens formel du terme, la Convention n’oblige pas les arbitres qui sont des personnes privées. Elle oblige formellement les États et les oblige à assurer les garanties des droits fondamentaux à tous les justiciables ressortissant de sa juridiction.
Donc les droits de l’homme procéduraux sont faits dans leur finalité pour s’appliquer dans le contentieux interne Étatique. Au sens formel du terme les garanties de l’article 6-1 ne s’appliquent pas à l’arbitre. Mais chassez la contrainte par la porte et elle revient par la fenêtre : le juge de l’exequatur ne laissera pas passer une décision qui a été mal jugée et qui est contraire aux garanties fondamentales.
Cour européenne, 1996, Pelligrini contre Italie : le juge italien qui reconnaît avec l’exequatur des décisions religieuses du Vatican dans des procès peu respectueux des garanties procédurales commet une violation de la Convention européenne. On peut l’étendre au cas de l’arbitrage. Formellement la Convention ne s’applique pas à l’arbitre, mais en pratique il n’a pas le choix, il doit s’y conformer au risque de voir sa sentence rejetée par les juges.
Première chambre civile, 20 février 2001, Cubic Defense Systems : l’arbitre n’est pas tenu d’appliquer les règles de la Convention européenne mais le juge étatique veillera sous couvert d’ordre public à leur respect.
Première chambre civile, 7 janvier 1992, Dutco : l’égalité des parties dans la nomination de l’arbitre est un principe inaltérable. C’était une affaire avec trois parties ce qui est fréquent. La convention disait qu’il y aura trois arbitres, un par partie le troisième choisit par les deux arbitres de départ. On avait dit qu’en fait une partie aura le sien et les deux autres vont en nommer un conjointement. Mais une des parties conjointes va râler. La Cour va dire qu’il y a quand même une limite, l’accès à la procédure arbitrale était mal réglée.
Section 2 : Une justice coordonnée avec la justice d’État.
Cela signifie tout simplement que la justice arbitrale n’évolue pas dans l’autisme et l’autarcie. Elle vient s’imbriquer, s’associer, se compléter avec la justice d’État, et avec ses standards propres de cette dernière. La seule chose c’est que les standards de la justice d’État s’assouplissent au contact de l’arbitrage, faveur à l’arbitrage qui se traduit en ce que la justice d’État intervient pour prolonger la justice arbitrale. Elle vient en appui. Il faut distinguer deux choses.
1 – Le contrôle étatique.
A – Le contrôle en amont de la procédure arbitrale.
1 – La spécificité procédurale.
C’est le principe de compétence-compétence. Ce principe est assez fortement inscrit dans notre réglementation interne de l’arbitrage mais aussi en partie dans la convention de New-York de 1958. Ce principe revêt une double dimension positive et négative.
Dimension positive.
La dimension positive signifie que l’arbitre est compétent pour juger de sa propre compétence. Si la convention d’arbitrage n’est pas valide il n’y a pas d’arbitre. Donc pour des raisons pragmatiques on investit l’arbitre du pouvoir d’apprécier sa propre compétence. Article 1466, si devant l’arbitre l’une des parties conteste dans son principe et son étendue le pouvoir de l’arbitre il appartient à celui-ci de statuer sur sa compétence. On cherche en fait à éviter les argumentations dilatoires.
Dimension négative.
La dimension négative se trouve dans l’article 1458, le juge étatique n’est pas compétent en principe pour apprécier la validité et l’étendue de la compétence arbitrale. Cette incompétence du juge étatique est absolue à partir de la saisine de l’arbitre. Mais si l’arbitre n’a pas encore été saisi, le juge étatique n’a qu’une possibilité limitée de se déclarer compétent : il devra constater qu’au fond la clause est manifestement nulle. C’est un grand relâchement du contrôle, c’est une certaine souveraineté de l’arbitre.
2 – Libéralisme au fond.
Autonomie de la convention d’arbitrage.
On veut évoquer les standards de validité, d’admissibilité de la convention d’arbitrage au regard du droit français. On a fait de la convention d’arbitrage un contrat sans loi. On ne l’a pas fait parce que c’était nécessaire, mais on l’a fait par choix libéral de ne pas entraver ou du moins le moins possible l’accès efficace à l’arbitrage. C’est ce que l’on appelle l’autonomie de la convention d’arbitrage ou autonomie de la clause compromissoire.
Évolution jurisprudentielle.
Autonomie édulcorée [indépendante par rapport au contrat principal]
La séparabilité matérielle de la clause compromissoire (convention d’arbitrage). Cette clause est séparable.
Première chambre civile, 7 mai 1963 et 4 juillet 1972, Gosset ; Hecht : clause compromissoire matériellement séparable du reste. Elle est donc indépendante du contrat qui la contient. Cela permet d’arriver à ce que si la convention principale est nulle et tombe à l’eau, la convention d’arbitrage subsiste. Cela empêcher de changer d’avis et d’aller devant le juge en remettant en cause la validité du contrat principal.
Autonomie absolue [autonome par rapport à toute loi étatique]
La clause d’arbitrage est dite valable de plein droit, per se. C’est la jurisprudence récente et contestable.
Première chambre civile, 20 décembre 1993, Dalico : le contrat est valable selon la volonté commune des parties sans support de loi impérative. En fait il n’y a que la condition des lois de police et d’ordre public réellement international.
Première chambre civile, 5 janvier 1999, Zanzi : ils sont construits sur le principe d’indépendance, mais on fait produire des conséquences considérables. Le contrat d’arbitrage prend la forme d’une clause compromissoire qui n’est pas soumise aux lois d’un État. La validité de la clause s’apprécie d’après la commune volonté des parties. Pas de contrainte juridique extérieure. C’est un contrat valable en soit.
Absence et vice du consentement.
Comment faire valoir l’absence de consentement, vice dol ou violence pour sortir de ce contrat ? Flou juridique, il faut prouver le dol ou la violence qui devra être sanctionné par des lois de police et l’ordre public international totalement flou.
Litiges inarbitrables.
Il reste au fond des cas exceptionnels d’inarbitrabilité de litiges. Comment savoir où tracer la limite d’arbitrabilité d’un litige ? Avant on avait des limites nettes dans les articles 2059 et 2060 Code civil. Les droits indisponibles sont inaccessibles au juge. On ne peut pas non plus compromettre sur les questions d’état et de capacité des personnes ou contestations intéressant les collectivités publiques et plus généralement l’ordre public. Maintenant le droit français ne sanctionne l’incompétence arbitrale que dans des cas exceptionnels que l’ont peut synthétiser dans la distinction inarbitrabilité objective/subjective.
Inarbitrabilité subjective [lorsque la personne est incapable d’accéder à l’arbitrage]
Cas de l’État et des collectivités publiques.
Première chambre civile, 2 mai 1966, Galakis : en droit interne l’État ne peut pas compromettre mais dans le cadre des relations commerciales internationales, il le peut.
Cas des parties faibles.
Concernant les parties faibles de droit privé, le petit travailleur, le consommateur, l’assuré. Enjeu fondamental, car si il faut aller plaider à Boston devant un arbitre américain, personne n’ira payer pour aller devant la justice flexible. Sur le cas du salarié la jurisprudence est claire et précise
Cour de cassation, 1999 et 2006 : la clause d’arbitrage est inopposable aux salariés. On ne dit pas qu’elle est nulle mais qu’elle est inopposable. Un salarié qui veut passer devant un arbitre peut le faire.
Première chambre civile, 21 mai 1997, Jaguar : contrat de consommation comportant clause d’arbitrage. L’admission de la clause compromissoire en matière internationale pour le contrat de consommation est expressément reconnue par la Cour de cassation. Le consommateur avait acheté une jaguar et l’avait fait customiser, c’était dans l’ordre des millions de francs. C’est juridiquement inadmissible, on avait plus ou moins dit que ce n’était pas grave car il est riche. La règle de droit n’a pas d’odeur elle s’applique au pauvres comme aux riches. Mais la jurisprudence française a beau être laxiste, en envoyant un consommateur se casser les dents sur un arbitrage pas fait pour lui, la Cour de Justice veille au grain. Les consommateurs européens doivent être soumis par les règles de protection européenne.
Cour de Justice, 26 octobre 2006 et 6 octobre 2009, Mostaza Claro ; Asturcon : dans ces deux arrêts la Cour a réclamé une protection consumériste même en cas de clause d’arbitrage. Là où ce sera sanctionné c’est au stade de l’exequatur. Un consommateur qui est entrainé dans un arbitrage doit contester dès le début pour dire que l’arbitre n’est pas compétent. Si l’arbitre n’écoute pas, on peut dire que la sentence ne doit pas être exequaturée car remet en question la protection du consommateur.
Inarbitrabilité objective.
Chambre commerciale, 29 novembre 1950, Tissot : il ne suffit pas que soit applicable des règles d’ordre public pour dire que le litige intéresse l’ordre public et donc est inarbitrable. Il faut que la réglementation d’ordre public soit violée. Mais comment peut-on le savoir d’avance tant qu’on n’a pas tranché le litige ? Par cette jurisprudence s’est étendu considérablement le champ de l’arbitrabilité objective. Des contrats de droit de concurrence peuvent aujourd’hui être tranchés par l’arbitre.
Cour suprême, 2 juin 1985, Mitsubichi Motors : sorte de pacte du diable avec les arbitres. Le juge américain fait confiance à l’arbitre, mais à condition que l’arbitre ne fasse pas n’importe quoi. Il devra appliquer les règles les plus essentielles de l’ordre public. Au fond, sur cette question le contrôle étatique s’est déplacé d’un contrôle en amont à un contrôle en aval.
Cour d’appel de Paris, 29 mars 1991 et 19 mai 1993, Ganz ; Labinal : transposition de Mitsubichi Motors. En matière internationale, l’arbitre a compétence pour apprécier sa propre compétence quant à l’arbitrabilité du litige au regard de l’ordre public international et dispose du pouvoir d’appliquer les principes et règles relevant de cet ordre public, ainsi que de sanctionner leur méconnaissance éventuelle, sous le contrôle du juge de l’annulation [Ganz]. L’arbitrabilité du litige n’est pas exclue du seul fait qu’une réglementation d’ordre public est applicable au rapport de droit litigieux [Labinal].
Cour de Justice, 1 juin 1999, Eco Swiss : la Cour dit aux États membres que le caractère impératif du droit de la concurrence doit être reconnu et sanctionné jusque dans les cadres de litiges arbitraux internationaux. En fait la jurisprudence française est extrêmement laxiste sur l’arbitrage, c’est la jurisprudence européenne qui met de plus en plus son nez là dedans.
B – Le contrôle en aval.
1 – Le stade de la reconnaissance et d’exécution forcée de la sentence internationale.
C’est le seul moment de contrôle efficace en France. Cette procédure est différente de celle de l’exequatur des jugements étatiques soumit soit à Bruxelles I soit à l’arrêt Parker avec Munzer. Il y a à ce sujet trois textes.
Article 1498 du Code de procédure civile.
Les sentences seront reconnues en France si leur existence est prouvée par celui qui s’en prévaut. Il faut bien présenter la sentence (la forme écrite n’est pas obligatoire). Il faut la retranscrire de manière probante (prouver qu’elle existe), la faire traduire, et qu’elle ne soit pas manifestement contraire à l’ordre public international.
Article 1499 du Code de procédure civile.
Il en va de même pour l’exécution forcée.
Article 1500 du Code de procédure civile.
Renvoi aux articles 1476 et 1477. On éteint l’action en justice avant même de la contrôler. Dans notre droit commun il n’y a pas de reconnaissance de plein droit. En matière arbitrale si, elle peut être exequaturée sans passer devant le juge. La reconnaissance n’est obligatoire que pour avoir la force obligatoire. Sans exequatur du Tribunal de grande instance du ressort du siège de la sentence pour ce qui est de l’arbitrage international, le demandeur choisit mais sans fraude, en pratique c’est le Tribunal de grande instance de Paris. Tous les effets sont acquis de plein droit sauf pour l’exécution forcée en cas de résistance.
2 – Les voies de recours pouvant être exercées.
En principe, comme les jugements étrangers, les sentences arbitrales internationales et les sentences arbitrales étrangères ne sont pas susceptibles d’un recours direct devant les juridictions françaises, articles 1501 à 1507 du Code de procédure civile. Seule la procédure d’exequatur (ou de reconnaissance) permet au juge français de se retrouver compétent.
Un recours en annulation reste autorisé et n’est recevable qu’au lieu où la sentence a été rendue. Les voies de recours suivantes sont exceptionnelles et soumises à des conditions restrictives. En cas de recours abusif, la Cour d’appel de Paris inflige des amendes conséquentes, de l’ordre de 500’000 euros par exemple.
Décisions françaises.
Recours contre la décision française statuant sur la reconnaissance ou l’exécution de la sentence.
Décision refusant la reconnaissance et l’exécution de la sentence.
La décision qui refuse la reconnaissance et l’exécution de la sentence arbitrale internationale ou de la sentence arbitrale étrangère est toujours susceptible d’appel dans un délai d’un mois, article 1501 du Code de procédure civile.
Décision accordant la reconnaissance et l’exécution de la sentence.
La décision qui accorde la reconnaissance ou l’exécution n’est susceptible d’appel que dans les cas prévus à l’article 1502 du Code de procédure civile, c’est-à-dire l’inexistence, la nullité ou l’expiration de la convention d’arbitrage ; le tribunal arbitral irrégulièrement constitué ; la violation de sa mission par l’arbitre ; le non-respect du principe de la contradiction ; et la contrariété à l’ordre public international [pleine et entière alors qu’en amont on juge la contrariété manifeste].
L’appel est de la compétence de la Cour d’appel dont relève le juge qui a statué et doit être exercé dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision du juge, article 1503 du Code de procédure civile.
Recours contre la sentence arbitrale internationale rendue en France.
Un recours en annulation peut être directement exercé contre les sentences arbitrales internationales rendues en France, article 1504 du Code de procédure civile, dans les cas prévus par l’article 1502 du même Code. Ce recours est de la compétence de la Cour d’appel dans le ressort duquel la sentence a été rendue. Ce recours doit être exercé dans le mois de la signification de la sentence déclarée exécutoire.
Décisions étrangères.
En cas de sentence étrangère, la voie de recours est celle de l’appel interjeté contre l’ordonnance d’exequatur. En effet, la personne qui a succombé à l’étranger ne jouit pas en France d’action préventive en inopposabilité de la sentence.
Première chambre civile, 29 juin 2007, Société PT Putrabali : une sentence rendue an matière internationale dans un État étranger n’étant pas intégrée dans l’ordre juridique de cet État, son existence demeure établie malgré son annulation dans l’État du siège de l’arbitrage et sa reconnaissance en France n’est pas contraire à l’ordre public international.
Standards communs de contrôle.
Les standards de contrôle sont communs et sont fixés à l’article 1502 du Code de procédure civile qui prévoit cinq cas limitatifs de contrôle des sentences arbitrales. En pratique, il y a beaucoup de textes de la Cour d’appel de Paris. Le contrôle exercé par le juge étatique doit-il être un contrôle plein ou celui-ci doit-il être atténué?
Première chambre civile, 6 janvier 1987, Plateau des Pyramides : la Cour dit que le juge de l’exequatur n’a aucune limitation dans l’étendue de son pouvoir de contrôle et qu’il peut rechercher tous les éléments de faits ou de droit utiles à son pouvoir de contrôle
Ordre public international [exemple du droit communautaire de la concurrence]
Cour d’appel de Paris, 18 novembre 2004, Thales c/ Euromissile : cet arrêt s’inscrit dans le courant minimaliste du contrôle de la sentence. Après avoir confirmé, en se référant à l’arrêt Eco Swiss, que l’article 81 TCE fait partie de l’ordre public, la Cour d’appel limite l’étendue du contrôle de l’ordre public aux violations «flagrantes, effectives et concrètes ». Les critères « effectif et concret » ne sont pas nouveaux, alors que l’exigence d’une violation « flagrante » est novatrice et entraîne une limitation importante du contrôle.
Cour de cassation, 4 juin 2008, Cytec : en se fondant sur le principe de non-révision au fond de la sentence, la juridiction suprême a limité l’étendu de contrôle aux violations « effectives, flagrantes et concrètes » comme cela était fait auparavant par la Cour d’appel de Paris en 2004. On ne peut pas opérer une révision au fond des sentences il faut se contenter d’un contrôle marginal de l’erreur manifeste de l’arbitre.
Ce décalage ne perdurera pas en tout état de cause du fait de l’émergence de la réglementation européenne en matière de droit de la concurrence [arrêt précédents]
2 – Le soutien étatique.
Le juge étatique va pouvoir en cas de difficulté, et spécialement en cas de blocage de la procédure arbitrale, intervenir en soutien de la procédure arbitrale. Il va apporter la force dont l’arbitre ne dispose pas. Ce soutien étatique peut intervenir à tout stade de la procédure et spécifiquement lors de son initiation puis tout au long de la procédure.
A – Soutien étatique pour l’accès à la procédure.
On parle alors de juge d’appui à l’arbitrage. Exemple lorsque la convention d’arbitrage n’a pas désigné la personne des arbitres mais que cette convention a laissé au pouvoir des partie le choix des arbitres. La forme la plus optimale est une nomination plurielle. Mais si une partie refuse de nommer son arbitre pour de mauvaises raisons, elle est fautive. La convention peut contenir des remèdes privés comme le recours à la CCI. Mais à défaut de cette précaution comment faire face au refus pur et simple d’une des parties ? C’est dans ce cas que le juge peut venir soutenir l’arbitrage et la mettre en œuvre.
Hypothèses de compétence du juge français.
Juge français choisi.
Toutes les réglementations la prévoient, c’est une condition de fiabilité. Article 1493 alinéa 2 du Code de procédure civile : pour les arbitrages en France ou soumis à la loi française. Au fond cette compétence du juge français s’offre dans divers cas. Le plus évident c’est le juge français choisi : les parties se sont accordées sur le fait que la procédure devait être soumise à la loi française et on donc choisit le juge français implicitement. Facteur incitatif de se soumettre à la loi française de procédure pour obtenir l’appui du juge français : c’est un élément d’attractivité.
Juge français, juge du siège.
Le second cas lorsque le juge français est le juge du siège. L’arbitrage a son siège en France.
Juge français de repli.
Dernière figure, le juge français de repli, cette hypothèse est consacrée par un arrêt isolé de la Cour de cassation.
Première chambre civile, 1 février 2005, Nioc contre Israël : inexécution d’un contrat particulier noué entre la société de droit iranien Nioc qui est entrée dans une relation contractuelle avec l’État d’Israël. Figure du contrat d’État. La société avait posé que tout litige ira devant un arbitre, au détriment de l’immunité de souveraineté. Il était dit que ce serait un arbitrage qui aurait son siège au Moyen Orient. Surviennent des difficultés politique et le législateur d’Israël édicte des mesures prohibitives qui rendent impossible l’exécution des contrats noués avec des ressortissants d’État ennemis. La société est victime de l’inexécution en conséquence.
L’État d’Israël ne fait rien face à la procédure d’arbitrage. Il vient à l’idée de la société de recourir à la compétence d’appui française parce que les parties étaient convenues d’un arbitrage CCI. La Cour de cassation française, alors même que les conditions de l’article 1482 n’étaient pas remplies, fait le choix d’intervenir et elle active l’article 6-1 de la Convention européenne pour cela. Elle invoque la notion de déni de justice internationale, cette notion s’applique aussi à l’arbitrage : la société serait dans un cas de déni de justice absolu. Les textes ne permettaient pas la chose. Le point décisif dans cette affaire, c’est que les parties étaient convenues d’un arbitrage CCI. C’est un appui ou un renfort du juge français.
Règlement 44/2001.
En droit strict on pourrait s’interroger sur l’applicabilité dans les rapports intra-européens des règles de compétences issues du règlement 44/2001.
Cour de justice, 25 juillet 1991, Marc Rich : a considéré que la compétence du juge étatique tombe dans le champ de l’exclusion du règlement 44/2001.
B – Soutien du juge étatique au bon déroulement de la procédure d’arbitrage.
On peut saisir le juge étatique ordinaire de manière préventive pour s’assurer de ce que la future sentence arbitrale pourrait bel et bien être exécutée, et on peut ainsi demander au juge d’État qu’il prenne des mesures provisoires et conservatoires. Il ne faut pas que cette demande soit utilisée comme un moyen d’entraver le déroulement de la procédure arbitrale. Ainsi par exemple si l’arbitre lui-même est en mesure de prendre de telles mesures, il n’y a pas à avoir recours au juge étatique.
Cour de Justice, 17 novembre 1998, Van Uden : le chef de compétence contenu dans la Convention de 1968 propre aux mesures conservatoires demeurait éligible aux parties lorsqu’elles voulaient solliciter le juge étatique du prononcé de mesures conservatoires. En revanche les chef de compétence ordinaire sont eux exclus.
C – Intervention du juge étatique pour assurer l’efficacité internationale de la procédure arbitrale
Lorsque la convention d’arbitrage ou lorsque la procédure arbitrale en cours menace de ne pas être respectée par une des deux parties, la question posée est de savoir si l’on peut avoir recours au procédé comminatoire, est-ce qu’un juge étatique va pouvoir ordonner de respecter la convention d’arbitrage ?
Cour de Justice, 10 février 2009, West Tankers : il s’agissait de l’exécution d’un contrat de transport international couvert par une clause compromissoire donnant compétence à une institution d’arbitrage londonienne. Le navire transportant la marchandise subit une avarie. La victime s’appuyant sur le fait que le dommage est survenu au port d’arrivage, il saisit le juge italien du litige. La House of Lord saisit la Cour de justice, en matière d’arbitrage donc exclusion du système de Bruxelles I donc de l’espace où vaut la confiance mutuelle. L’arbitrage n’est pas un domaine harmonisé. La Cour de Justice pose une interdiction absolue au nom de la confiance mutuelle.
Cet arrêt a été critiqué. D’abord il faut y voir une sorte d’arrêt Desmares pour inciter le législateur à adopter la loi Badinter. Incitation au législateur européen de revoir les rapports entre les contentieux internationaux et les contentieux d’arbitrage. D’un point de vue technique, on a une juridiction saisie pour un préjudice particulier : au fond la saisine est illégitime s’il existe une convention d’arbitrage valable emportant renonciation du recours aux juges étatiques. Or l’opposabilité de la convention d’arbitrage n’est pas de droit naturel. Il y a des États, des réglementations étatiques qui sont moins favorables. Cette solution est justifiée, la Cour a prohibé l’unilatéralisme des injonctions anti-suit dans l’espace judiciaire harmonisé européen.
Section 3 : Justice conditionnée.
Conditionnement de la justice arbitrale.
Il y a un conditionnement de la justice arbitrale, même si la justice arbitrale est une justice libérée en ce sens que parce qu’elle repose sur un fondement contractuel, l’action d’arbitrer est de même nature que l’action de justice, mais elle ne se réalise pas selon les mêmes paramètres. Il n’y a pas non plus une autonomie totale face aux droits étatiques c’est-à-dire les droits nationaux en contact avec la procédure arbitrale internationale. L’arbitrage a fixé son siège sur un État, ce qui est un critère d’intervention. Connexion avec les lieux d’établissement respectifs de l’arbitrage. Contact avec tous les États qui peuvent être considérés comme un lieu d’exécution pertinent.
Règles impératives étatiques.
Indépendance.
Les règles impératives étatique peuvent avoir un mot à dire, les principes de l’ordre public doivent être pris en compte. L’indépendance de l’arbitre même si ce n’était pas dit dans la convention d’arbitrage, cette indépendance est une garantie inaltérable. Ce conditionnement de l’arbitrage par le droit étatique signifie que lorsqu’il y a une suspicion légitime, il faut mettre en place des moyens de récusation.
Principe d’égalité.
Le principe d’égalité également est fondamental, il est en mesure d’infléchir la liberté en apparence non bornée de la procédure arbitrale.
Principe du contradictoire.
Enfin, le principe du contradictoire est également essentiel, on ne peut y renoncer par avance. Il est à la base de l’organisation française.
Principes fondamentaux de fond.
Principes fondamentaux de fond, prohibition de la corruption, les standards les plus communs dans les législations nationales sont susceptibles de conditionner la conduite et l’issue de la procédure arbitrale.
Obligations contractuelles à l’égard des parties.
L’arbitre a des obligations contractuelles à l’égard des parties, l’arbitre lorsqu’il accepte sa mission souscrit une obligation de moyen si ce n’est une obligation de moyen renforcée à l’égard de l’efficacité de sa sentence. Se traduit par une responsabilité de l’arbitre. D’autre part, la sentence de l’arbitre peut renvoyer au droit pénal des États, et le qualifier de complice.
Chapitre 3 : Les procédures d’insolvabilité.
Procédure contraignante et sanctionnatrice.
Les livres parlent de faillite internationale. Ce qui est important dans cette branche du droit commercial, c’est sa nature procédurale. La faillite d’un point de vue institutionnelle est essentiellement basée sur un procédure. La vision classique est celle d’une procédure contraignante et sanctionnatrice : il faut traiter un patrimoine malade. Au niveau macro économique, il faut éradiquer le maillon faible, celui qui gère mal ses affaires, qui met en danger l’économie de tout un pays entier. Une procédure contraignante et une procédure aussi parce qu’elle est largement attentatoire aux intérêts, provisoire et transitoire. À la fin de la procédure, on retrouve la liberté notamment la liberté commerciale.
Lex fori concursus.
On applique la lex fori concursus : la loi du for de la faillite, la loi du pays d’ouverture de la procédure. C’est ce qui fait dire que les faillites constitueraient un ilot de résistance à l’internationalisation du droit : on applique la loi interne, la lex fori est la moins internationale des solutions. Phénomène d’évitement devant la faillite. La vision moderne des procédures d’insolvabilité est renouvelée par rapport à cette vision classique.
Facteur de renouvellement du droit interne.
Depuis une décennie le pluralisme s’est invité dans le droit des procédures collectives. En effet les procédures de traitement de l’insolvabilité se sont diversifiées et surtout leur physionomie s’est largement renouvelée : il existe des procédures facultatives et déconnectées de la notion de cessation des paiements, la consécration de procédures de traitement préventives que sont la sauvegarde de 2005 provenant du Chapter 11, mais aussi la conciliation.
Forum shopping.
En droit international privé, cela change la donne non pas tant que l’application de la lex fori concursus, mais la manière dont on en fait emploi en pratique. Même phénomène de course à la meilleure lex fori concursus, forum shopping.
Exemple au niveau mondial.
La faillite du groupe russe Yukos, conglomérat très puissant issu des privatisations rapides après la chute du bloc soviétique. Yukos devient insolvable, les dirigeants veulent obtenir la protection du droit américain, prennent prétexte d’une filiale aux États-Unis pour se placer sous la réglementation du Chapter 11, et se placer dans une situation de litispendance pour empêcher d’ouvrir une procédure dans un autre État. La possibilité de procédure parallèle est possible.
Exemple au niveau européen.
Faillite eurotunnel. Le groupe de deux sociétés exploitant le tunnel sous la Manche. Les dirigeants de ces deux sociétés décident d’utiliser la procédure de sauvegarde française comme moyen de pression contre les actionnaires. Demande une procédure globalisée pour les deux sociétés. Marges de forum shopping.
Recours subsidiaire au droit international privé.
La matière de la faillite internationale n’est que du droit commun. Ces procédures ne sollicitent le droit international privé qu’à partir du moment où un accord a été trouvé entre le débiteur et ses créanciers, et que cet accord doit circuler à l’étranger, notamment du fait de créanciers étrangers ou de biens situés à l’étranger. Le droit international est sollicité lorsqu’un accord constatant des remises de dettes ont été dressés. Malgré la nature foncièrement contractuelle de l’accord, on accepte de le faire circuler en le soumettant aux procédures de reconnaissance et d’exequatur pour des raisons de commodité.
Procédures de traitement de l’insolvabilité des particuliers issues des législations consuméristes.
Ces procédures de surendettement peuvent revêtir une dimension transfrontière, la jurisprudence l’atteste [Première chambre civile, 20 janvier 2001]. La Cour de cassation dit que les effets sont les mêmes que ceux d’une procédure collective, ils s’imposent au créanciers nationaux et aux créanciers étrangers. En cas de difficulté, on adoptera les mêmes raisonnement que pour les procédures d’insolvabilité des professionnels.
La soft law.
Il existe une loi type CNUCI de 1997 sur l’insolvabilité internationale. Il existe aussi un guide législatif CNUCI sur le droit substantiel de l’insolvabilité, il dit de son point de vue quel est le meilleur droit interne de la faillite possible. Néanmoins au sein de ce guide il existe quelques dispositions spécifiques aux conflits de lois notamment des dispositifs qui visent à donner aux sûretés un régime international privilégié. Sur ce point proximité du droit européen.
Section 1 : Le droit commun français.
Droit commun parce que dans les deux il existe des solutions générales et des solutions spéciales ponctuelles qui assouplissent le droit commun.
1 – Procédure isolée de faillite.
Cette procédure isolée de faillite peut être ouverte au for ou à l’étranger. Dans ces deux hypothèses, on va solliciter les outils du droit international classique mais pas les mêmes.
A – La faillite française.
Le grand particularisme du droit commun français, c’est une liaison, une jonction du forum et du jus : corrélation du juge compétent et de la loi applicable. Ceci imprime les conflits de lois en matière de faillite d’une particularité : ils sont résolus de manière techniquement unilatérale. Tout dépendra en amont de la mise en œuvre des règles de compétence juridictionnelle : s’il n’y a pas de faillite ouverte en France, il n’y a pas de lex fori française. Le droit français de la faillite s’applique en fonction des critères français de compétence judiciaire. C’est le trait de l’unilatéralisme. La loi française de la faillite va s’appliquer parce que le législateur veut bien ouvrir une procédure.
1 – La compétence judiciaire.
La compétence judiciaire des tribunaux français s’apprécie suivant les critères de la jurisprudence Pelassa Scheffel : on se sert des règles de compétence territoriale interne. Les tribunaux français se rendent compétents pour des faillites internationales au moyen des règles de compétence exorbitante, également en particulier les articles 14 et 15 du Code civil.
Chef ordinaire de compétence internationale.
Établissement principal.
Inscrit à l’article R600-1 du Code de commerce. Il sert à dire quel est le Tribunal de commerce territorialement compétent. Le premier critère est l’établissement principal en France, si le débiteur a en France son principal établissement les juridiction françaises sont compétentes. Le lieu de l’établissement principal veut dire que le centre de gravité économique est en France. Ce principal établissement correspond au domicile pour une personne physique, pour une personne morale au siège social. Il est dit que le changement est inopposable pendant une durée de six mois.
Centre des intérêts principaux.
A défaut d’établissement principal, l’article pose la compétence française au lieu du centre des intérêts principaux en France. Il suffira d’un établissement secondaire en France pour que les tribunaux soient compétents. L’article R600-1 prévoit deux circonstances : établissement principal ou secondaire en France. Ce sont des chefs de compétence fondés sur l’idée de présence économique. Ces deux règles sont des règles raisonnables fondées sur la commodité privée : les biens privés sont situés sur le territoire, et des contrats sont localisés en France. Répond au souci d’une bonne administration de la justice.
Chef exorbitant de compétence.
Article 14 et 15 du Code civil, les tribunaux sont compétents du seul fait que le demandeur ou le défendeur est français, et qu’il n’a pas renoncé à son bénéfice de juridiction. Vaut aussi en matière de faillite. Le créancier impayé du seul fait qu’il est français peut requérir l’ouverture d’une procédure en France. Qui plus est, une procédure de vocation mondiale qui a la prétention d’appréhender l’entier patrimoine du débiteur. Un débiteur établi aux États-Unis qui n’a pas d’établissement en France, donc qui n’est pas économiquement localisé en France, la nationalité de ce débiteur français va fonder la compétence française. Ces privilèges sont inadaptés, mais d’une part de ces privilèges ne sont pas si nuisibles et peuvent être utiles.
Pas si nuisibles parce que si l’on ouvre en France une procédure de faillite et qu’il n’y a pas de biens en France, peu de chance qu’elle soit reconnue à l’étranger. Elle n’aura d’impact concret que si elle est reconnue. En revanche dans le cas où l’on a affaire à un escroc l’ouverture peut être bénéfique du fait de l’arsenal des sanctions pénales, civiles et administratives. Sanction en France d’un créancier étranger parce qu’il a la nationalité française.
Chambre commerciale, 26 octobre 1999 : au titre des compétences exorbitantes il y aurait aussi la compétence française du simple fait de la présence de biens en France ou de la passation de contrats en France. Dans cette affaire, il s’agissait d’une société établie à l’ile de Man et qui est propriétaire en France d’une maison de retraite. Elle l’a mise en sous location auprès d’une société du domaine de l’aide médicale. Cette maison a été acheté en crédit-bail et financée au moyen d’un prêt. La société ne rembourse pas les échéances, déclenchement d’un redressement judiciaire en France. La Cour de cassation accepte la compétence des juridictions françaises. C’est une déclinaison de la notion d’établissement secondaire au fond, c’est un des paramètres de l’activité économique de la société.
B – La loi applicable.
On applique en principe sans exceptions ni tempéraments la loi interne du pays d’ouverture, la lex fori concursus. Si la procédure a été ouverte en France, ce sera une procédure de droit français et procédure qui va être intégralement régie par le droit français et cela même si la procédure englobe des créanciers étrangers ou des biens situés à l’étranger.
Justifications.
Au regard de la procédure.
Pour des raisons pratiques tout d’abord, il y a un aspect institutionnel d’organisation judiciaire. La procédure collective est sous tutelle judiciaire qui est très précisément réglementée et qui a des organes judiciaire et extra judiciaires. Les rapports de ces différents organes sont réglés de façon précise et minutée. Il faut bien une loi unique. Toute immixtion d’une loi étrangère dans la procédure serait un facteur de blocage. Mais ce n’est pas tout.
Au regard du contenu de la loi de la faillite.
La procédure collective est aussi le lieu concret ou se règlent pas mal des plus belles questions de droit civil. C’est un droit substantiel particulier en ce que c’est un droit de solution dérogatoire. L’efficacité des sûretés, par exemple une clause de réserve de propriété, ne s’apprécie pas selon les mêmes règles hors et dans la procédure collective. Autrement dit le droit de la faillite renferme un droit civil spécial dérogatoire, qui est le plus souvent marqué par des sacrifices individuels dans l’intérêt commun, ou, par des arbitrages d’intérêt général opérés par l’État entre les intérêts en présence à des fins macro économiques. En fait ces règles de fond sont d’authentiques lois de polices.
Ces règles de police économique sont tellement nombreuses, denses, que l’on n’a pas besoin de les identifier isolément et que l’on peut les exprimer au moyen d’un facteur de rattachement économique. Au fond le domaine de la loi de la faillite est exclusif, le principe de lex fori concursus c’est « tout sauf… ».
Cas particulier des sûretés.
Une sûreté réelle, par exemple une clause de réserve de propriété, mais transposable à toute sûreté. Cas d’une clause de réserve de propriété conventionnelle sur une cession mobilière : acheteur français de moules auprès d’un fabricant italien, achetés à crédit, le contrat de vente contenant une clause d’electio juris désignant le droit italien et une clause de réserve de propriété. En cas de faillité de l’acheteur français, que devient la clause de réserve de propriété stipulée dans un contrat régi par le droit étranger ?
Première chambre civile, 8 janvier 1991, Heinrich Otto : la loi applicable à l’efficacité de la sûreté en faillite était la lex fori concursus quelle que soit par ailleurs la loi applicable à la validité et à l’opposabilité de la sûreté.
Pièce montée de Meyer.
On considère que cette jurisprudence a transposé une formule de Meyer qui avait créé une pièce montée à trois étages, il y a trois lois qui viennent s’appliquer à notre sûreté :
–La loi du contrat pour la validité de la sûreté
–A raison de son caractère réel, il faut appliquer la lex rei sitae, la loi de la situation pour l’efficacité de la sûreté
–Des conditions spéciales pouvant être imposée par la loi de la faillite.
La doctrine traditionnelle accepte cette construction. C’est insatisfaisant car plus on multiplie les lois plus on augmente les chances de mettre à mal la sûreté. Mettre trois lois compétentes c’est multiplier le nombre de chances de nullité. On pourrait réduire l’éventail des lois applicables, et on peut se baser sur un arrêt moins important.
Chambre commerciale, 8 janvier 2002, Comast : il semble dire que la revendication du meuble frappé d’une clause de réserve de propriété dans la faillite serait soumise à la loi du contrat sous réserve de l’application internationalement immédiate de la loi de police de la lex fori concursus. La loi de situation est absente : quant à la loi applicable à l’efficacité d’une sûreté, application à la sureté réelle d’origine conventionnelle la loi du contrat et corrigée avec la loi de police du pays de situation lorsqu’il n’y a pas de faillite, et lorsqu’il y en a, loi de police de la procédure d’insolvabilité. Cela fait deux lois certes, mais une de moins.
2 – Procédure ouverte à l’étranger.
Elle a vocation à produire des effets en France, à condition que n’ait pas été ouverte en France une procédure collective. La reconnaissance ne peut même plus être envisagée si une procédure à été ouverte en France. Il faut que l’on puisse présenter en France un jugement d’ouverture ou un acte assimilable du point de vue étranger.
Chambre commerciale, 17 octobre 2000, Barney’s : il est certains pays où les procédures collectives ne se déclenchent pas par une décision du juge. Les juges avaient affaire à une déclaration volontaire du débiteur de placement en faillite sous le régime du Chapter 11 du droit américain des faillites. Dans le droit américain le juge ne prononce pas l’ouverture de la procédure collective.
Le principal effet d’un acte de jugement déclenchant la procédure collective, c’est d’assujettir le débiteur aux règles dérogatoires contenues au sein de la lex fori concursus.
A – Procédure d’exequatur.
Procédure nécessaire.
Cette procédure est en droit commun nécessaire ce qui signifie que tant que le jugement étranger n’a pas été exequaturé il ne produit pas d’effets en France et la procédure est considérée en quelque sorte non avenue. Les biens du débiteur en France ne sont pas appréhendés par la suspension des poursuites.
Cour de cassation, 1903 et 1905, Negrotto et Syndic Richer : ces arrêts avaient exigé un exequatur constitutif de l’efficacité du jugement étranger. À l’époque cela pouvait apparaître exorbitant, car à l’époque on distinguait les jugements déclaratifs patrimoniaux et les jugements constitutifs de pouvoir, ces jugements sont reconnus de plein droit. Les jugements déclaratifs patrimoniaux nécessitaient l’exequatur pour tous les effets.
La nature des procédures de faillites, et plus précisément la nature juridique du jugement ouvrant la procédure étaient analysé comme œuvrant dans le champ de l’incapacité. Si l’on avait poursuivi ce raisonnement, le jugement ouvrant la faillite aurait du être reconnu de plein droit, sauf pour les mesures d’exécution forcée. La jurisprudence française n’en a pas voulu de cela. Elle a rectifié ou déformé les qualifications qui provenaient du droit interne. Peut être parce que l’ouverture d’une procédure collective se rapproche d’une voie d’exécution. C’est surtout pour des raisons d’opportunité, la Cour de cassation ne veut pas que le jugement étranger de faillite puisse produire ses effets en France sans mesure de publicité. L’avantage du passage obligatoire devant une procédure d’exequatur est d’assurer cette publicité.
Plus fondamentalement, c’est même protectionniste : on a voulu ménager aux créanciers locaux la possibilité de faire ouvrir une procédure locale d’insolvabilité soumise à la loi française du for. Mais le débiteur fait l’objet d’une procédure en Algérie, d’après ce droit il entraine cessation des poursuites. Créancier en France détenant une sûreté. Si le jugement nécessite un exequatur, cela laisse le temps au créancier d’ouvrir une procédure collective en France. Si le syndic algérien demande la reconnaissance en France, on lui répond qu’elle est impossible parce qu’incompatible avec une procédure en cours en France.
Effets rétroactifs.
Lorsque l’exequatur est octroyé en France, suppose que le jugement soit régulier, cette exequatur peut produire certains de ses effets rétroactivement : c’est la rétroactivité tempérée de l’exequatur du jugement étranger de faillite.
Chambre commerciale, 1986, Kleber : dans cette affaire, débiteur commerçant établi à titre principal au Danemark. Ce débiteur danois a aussi des créancier en France mais également un chalet de ski à Miribel. Il va être mis en faillite au Danemark et un syndic est nommé. Un des créanciers apprenant la faillite et étant chirographaire, il demande une saisie conservatoire sur le chalet. Par la suite, le syndic danois fait reconnaître et exequaturer le jugement de faillite. Le syndic va dire que le jugement est exequaturé et l’immeuble lui appartient. Le créancier saisissant va avancer qu’il a acquis un droit antérieurement.
La Cour de cassation reconnaît que l’exequatur a été octroyé postérieurement, mais la procédure de saisie est en cours, et comme elle n’est pas achevée, va lui faire subir les effets de la procédure de faillite. La procédure de saisie conservatoire est stoppée, le créancier rentre dans le rang. On appelle cela rétroactivité tempérée parce qu’elle trouve sa limite dans le cas où les biens ont été définitivement attribués. Une manière de rattraper les créanciers de bonne foi est de faire jouer une fois que la procédure de faillite a été exequaturée la nullité de la période suspecte.
B – Procédure de reconnaissance des jugements étrangers.
Reconnaissance lâche.
Il faut que le jugement étranger satisfasse aux conditions de reconnaissance, arrêts Bachir et Munzer. La reconnaissance se fait sur une base libérale : on reconnaît assez facilement les jugements étrangers ouvrant une procédure collective. C’est étonnant dans le sens où les règles de procédures collectives sont des lois de police économique. Cela s’explique par l’idée de la réciprocité, la faillite intéresse les États d’assez près.
Exception d’atteinte à l’ordre public.
La jurisprudence française conditionne assez faiblement les jugements étrangers au nom de la compétence judiciaire indirecte. La doctrine considérait que pour qu’un jugement étranger soit reconnu, il fallait un établissement, mais la jurisprudence n’a jamais suivi. La Cour de cassation se satisfait de liens assez lâches. La compétence judiciaire indirecte ne constitue pas un frein à la reconnaissance. Reste alors l’exception d’atteinte à l’ordre public : la jurisprudence française est d’un libéralisme étonnant.
Chambre commerciale, 18 janvier 2000, Pehrsson : la mise en faillite d’un débiteur non commerçant n’est pas contraire à la conception française de l’ordre public international.
Chambre commerciale, 5 février 2002, SA Seb : la reconnaissance d’un jugement espagnol assorti d’une période suspecte de 24 mois n’est pas contraire à la conception française de l’ordre public international, et ne met pas en cause la sécurité du commerce en France.
Cour de cassation, 28 janvier 2009 : on accepte de reconnaître en France une astreinte hors de proportion.
La condition de non reconnaissance essentielle, c’est l’exception de chose jugée ou l’exception de procédure en cours. Si une procédure en France est en cours, la reconnaissance de la décision étrangère est radicalement impossible.
2 – Procédure parallèles.
A – Les affaires françaises qui ont avancé cette difficulté des procédures parallèles.
Un même débiteur, dont les actifs sont dispersés de par le monde, va faire l’objet dans deux ou plusieurs pays de procédures distinctes de traitement de l’insolvabilité, régies chacune par leur loi propre, procédures qui peuvent prétendre appréhender tous les biens. Le risque est l’affrontement de procédures nationales.
Chambre commerciale, 11 mai 1995, BCCI : la BCCI à l’époque était une importante banque établie dans plus de cinquante pays et dont le siège social était aux Iles Caïmans. Elle devient insolvable et fait l’objet de l’ouverture d’une procédure collective aux iles Caïmans et également d’autres procédures dans les pays où sont établies les succursales. À Paris il y en a une et le Tribunal de commerce de Paris ouvre une faillite contre la société BCCI dont le siège est aux iles Caïmans.
La Cour rappelle un principe acquis, la simple ouverture à l’étranger d’une faillite ne fait pas obstacle à l’ouverture d’une faillite concurrente. Elle continue, cette procédure vise tout le patrimoine de la personne morale insolvable, conséquence de quoi tous les créanciers de la personne insolvable peuvent venir produire en France, elle n’est pas réservée aux créanciers locaux. Pose une difficulté, que faire du créancier qui a été partiellement ou totalement désintéressé à l’étranger. La Cour va aménager les règles françaises, obligation de reverser le surplus. La Cour de cassation ne va pas se sentir gênée de nommer un administrateur ad hoc provisoire. La Cour ignore tout ce qui est survenu à l’étranger mais en plus, la Cour de cassation défie presque le point de vue du pays étranger.
Première chambre civile, 19 novembre 2002, Banque Worms contre Brachot : les époux Brachot ont pour principal créancier la banque. Dans cette affaire, il ne s’agissait pas de deux procédure concurrentes, mais de l’opposition d’une procédure française de faillite et d’une procédure étrangère d’exécution forcée individuelle. Les époux ont un fonds de commerce en France, et par ailleurs ils se sont acheté une résidence en Espagne. La procédure collective est ouverte en France, les organes nommés arrivent à une issue amiable possible et prévoient un plan de cession partiel. L’idée est d’arriver à la cession partiel des activités françaises.
Comme l’essentiel de l’activité à lieu en France, les mandataires se sont abstenus de demander la reconnaissance de la décision en Espagne. Avant que le plan de continuation ait trouvé son terme, un créancier va se payer sur l’immeuble en Espagne. Les organes vont saisir le juge pour que le créancier français soit paralysé. Mais ils n’ont pas demandé la reconnaissance du jugement en Espagne. Le juge français va utiliser le procédé de l’astreinte. On est dans un problème de procédure parallèle.
La Cour de cassation dit deux choses : elle dit d’abord en pur droit que la procédure française d’insolvabilité a en droit commun une vocation à l’universalité et cette vocation, destinée à couvrir tous les biens, sous réserve des traités internationaux et du droit communautaire et sous réserve de l’acceptation de l’ordre juridique étranger. Réserve d’effectivité, si le pays de situation de l’immeuble ne veut pas reconnaître les effets réels, c’est lui qui aura le dernier mot parce que l’immeuble est sur son territoire. La Cour statue aussi sur la licéité de l’astreinte, le prononcé de l’astreinte est valable, elle constitue un accessoire légitime de garantie de la procédure de faillite française. La posture de la jurisprudence n’est pas celle d’une articulation harmonieuse des deux procédures.
Chambre commerciale, 21 mars 2006, Khalifa Airways : insolvabilité de la société personne morale. C’est une société de droit algérien. Elle a en France un établissement secondaire. À la date t est ouverte en Algérie une procédure d’insolvabilité de droit algérien, à vocation extra territoriale en ce sens que d’après le droit interne algérien il n’y a pas de limitation. Un mois après, sur assignation des créanciers français, une procédure est ouverte en France. Procédure de vocation mondiale également. Le débiteur représenté par son syndic algérien ne va pas se donner satisfait de cette procédure en France.
Un moyen soulevé va être de donner acte que la procédure française de faillite est cantonnée aux biens situés en France. La Cour de cassation rejette la litispendance, pas de reconnaissance de la procédure algérienne, et ne limite pas la procédure aux biens situés en France. La Cour se lance dans l’affrontement, de fait elle donne acte de ce que la procédure française ouverte en seconde est une procédure concurrente. La Cour de cassation risque de facto la paralysie. Le résultat, risque de surgir au fond deux procédures liquidatives purement territoriales.
Ces trois affaires montrent que la jurisprudence française sur cette question des procédures parallèles est rigide et refermée sur elle même.
B – Améliorations envisageables.
En instillant un peu de souplesse et de diversité dans les règles habituelles qui fixent la compétence internationale française et la compétence législative.
Le jeu sur les règles de compétence judiciaire.
Forum non conveniens.
On peut d’abord jouer sur le principe même de la compétence judiciaire des tribunaux français en admettant d’appliquer dans la matière des faillites l’outil classique qui est celui de l’exception de litispendance. Ne pourrait- on pas accepter le jeu exceptionnel d’un forum non conveniens, même dans l’hypothèse où le juge français a été saisi en premier, ne devrait-il pas se dessaisir si un juge étranger est mieux placé.
Limitation de l ‘étendue de la compétence.
Ensuite, on pourrait aussi jouer sur le chef compétence judiciaire en acceptant de limiter l’étendue de la compétence judiciaire internationale française. On pourrait dire que lorsque le juge français est saisi de la faillite sur la base d’une compétence subalterne, il ne devrait ouvrir qu’une procédure limitée aux biens locaux.
Le jeu sur le critère de compétence législatif.
Une fois qu’il s’est reconnu compétent, application de la seule lex fori concursus. Lorsque la faillite française bloque sur un obstacle à l’étranger, il faudrait limiter le domaine de la lex fori concursus.
Cour d’appel de Versailles, 20 mars 2008 : la Cour prenant appui que l’arrêt Worms Brachot, elle prend cette formule au sérieux dans l’hypothèse où une faillite avait été ouverte au France et concernait un compte bancaire en Suisse. La procédure n’avait pas été reconnue en Suisse, le juge français considère qu’il laisse intact ce qui est intervenu sur ce compte pour ne pas contrarier le point de vue suisse. Limitation dans le champ de la compétence législative.
Le droit français des procédures collectives appliqué à l’international était relativement bien rodé tant qu’on restait dans une logique d’unicité de la procédure. Mais le droit français commun ne marche pas encore très bien dans les hypothèses où il y a pluralité des procédures de faillite. Bien employé le droit international français a un mérite, ce droit peut permettre des coordinations souples c’est-à-dire circonstanciés des diverses procédures concernées.
Section 2 : Le droit commun européen.
Règlement 1346/2000 du 29 mai 2000. A côté il existe des directives sur le traitement des faillites bancaires, établissements de crédit et d’assurance.
1 – Généralités.
A – Origines du règlement.
Modèle d’universalité et de pluralité.
Ce règlement ne sort pas de nul part, il a un riche passé. Il a été reformaté d’une convention internationale qui avait été adoptée mais jamais entrée en vigueur faute de consensus des pays européens. Les premières ébauches de convention sur la question de faillite remontent à quarante ans. C’est depuis ces années que l’on a commencé à réfléchir pour l’édification de règles de coordination internationale des faillites de droit national. Dès ces années 1960 on avait à l’esprit les difficultés de coordination des procédures nationales, et on opposait un modèle d’unité universalité de la faillite international, et d’autre part un modèle de pluralité. Le premier modèle d’unité, il faudrait que lorsque l’on a affaire à une insolvabilité qui traverse les frontières il ne faudrait qu’un seul juge compétent et sa procédure s’étend. À l’opposé, modèle de la pluralité, territorialité des procédures. L’inconvénient c’est qu’il ne rend pas justice de l’unité du patrimoine.
Convention d’Istanbul.
C’est sur cette base que les travaux se sont déployés, d’abord sous les hospices du Conseil de l’Europe. Ils ont abouti à la signature de la Convention d’Istanbul qui n’est jamais entrée en vigueur, mais elle a donné la tonalité, elle adopte un modèle transactionnel et ce qu’à partir d’une procédure nationale prépondérante qui peut être ouverte dans le pays du principal établissement du débiteur, elle aura vocation à l’universalité c’est-à-dire produire des effets extraterritoriaux mais cette procédure n’est pas pour autant unique, elle peut coexister avec des procédures dites secondaires qui sont subordonnées à la procédure principale et qui peuvent être ouverte dans les pays d’établissement subalterne du débiteur.
Convention du 23 novembre 1995.
Va être repris dans la Communauté européenne sous forme d’une convention européenne signée le 23 novembre 1995. Le fondement de cette Convention est l’ancien article 220 du traité CE, devenu 293 : base textuelle sur laquelle avait été adopté également la Convention du Bruxelles. Ce texte disait que pour les questions de droit international privé, les États étaient libres de signer des conventions internationales. Elle ne va pas entrer en vigueur à cause de l’opposition anglaise. Cette convention était accompagnée d’un rapport explicatif Virgos Schmitt. L’interprétation du droit positif actuel se fait à l’aulne de ce rapport.
Règlement 1346/2000.
Le traité d’Amsterdam posant un base de compétence communautaire dans le domaine du droit international privé, l’article 65 du traité dit que la communauté peut légiférer dans le domaine des conflits de juridiction et de lois. C’est sur cette base que la Convention de Bruxelles a été reformatée en règlement, de même pour la Convention de Rome. Règlement 1346/2000 constitue la version de la convention de 1995, mais c’est une loi européenne uniforme qui bénéficie du soutien de l’interprétation uniforme et contraignante de la Cour de Justice.
B – Entrée en vigueur et champ d’application.
Entrée en vigueur.
Le 31 mai 2002, le règlement s’applique aux procédures collectives rentrant dans le champ d’application ouvertes postérieurement au 31 mai 2002. Le droit européen a voulu laissé un temps d’adaptation.
Champ d’application matériel.
L’article 1er le dit dans une formule synthétique que le règlement s’applique aux procédures collectives fondées sur l’insolvabilité du débiteur qui entraine le dessaisissement partiel ou total du débiteur ainsi que la nomination d’un syndic. Le deuxième alinéa exclut les procédures d’insolvabilité des secteur bancaires, financier et du droit des assurances.
Article 2, liste de définitions législatives. On entend par procédure d’insolvabilité les procédures collectives visées à l’article 1. La liste des procédure figurent dans l’annexe A, elle contient État membre par État membre des procédures éligibles. Est un syndic toute personne ou tout organe dont la fonction est d’administrer ou de liquider les biens dont le débiteur est dessaisi ou de surveiller la gestion de ses affaires, la liste de ces personnes figure à l’annexe C.
Pour la France.
Exclusions.
Si une procédure du droit français n’est pas inscrite à l’annexe A elle ne rentre pas dans le champ. Cette annexe a varié dans le temps, elle a été modifiée en 2006 par suite de la réforme interne. En 2000 figurait la liquidation judiciaire et le redressement judiciaire avec nomination d’un administrateur. La nouvelle annexe A dit la chose suivante : sont éligibles au règlement la liquidation judiciaire, le redressement judiciaire, et la sauvegarde. Sont donc exclus le surendettement des particuliers, de même les procédures informelles de conciliation.
Cas de la procédure de sauvegarde et de redressement.
L’inscription à l’annexe A est une formalité qui ne dispense pas la procédure nationale de se conformer à la définition contraignante du règlement. Il faut regarde si la sauvegarde répond à cette définition. Deux difficultés, d’une part les redressements judiciaires sans dessaisissement du débiteur, et d’autre part la sauvegarde.
Sauvegarde.
La sauvegarde pose la difficulté qu’il n’y a jamais dessaisissement du débiteur, il reste à la tête de ses affaires, l’administrateur est totalement passif. D’autre part, est-ce réellement une procédure d’insolvabilité dans la mesure où il n’y a pas de cessation des paiements. Même si la sauvegarde n’est pas une procédure basée sur l’insolvabilité elle est quand même basée sur l’insolvabilité à venir, et son objectif est de remédier à cette insolvabilité. La sauvegarde est fondée sur l’insolvabilité, mais non motivée par une insolvabilité constatée.
Redressement judiciaire.
Absence de dessaisissement du débiteur, il est possible dans le cadre du redressement judiciaire. En adoptant une lecture formelle du règlement, la sauvegarde ne rentre pas dans le champ d’application. Si on s’inspire de la définition substantielle, on peut inclure la sauvegarde : la surveillance de la gestion peut servir d’ersatz au dessaisissement. On peut considérer que le débiteur a été dessaisi du fait de la présence d’un contrôleur.
Tribunal de commerce de Paris, 2 aout 2008 : première application de la sauvegarde sous couvert et par application du règlement 1346/2000. La procédure d’ouverture a été frappée de voie de recours par la voie de la tierce opposition. Aout 2009, la Cour de cassation a dit que la tierce opposition devait être recevable. Aujourd’hui est pendante la question si cette décision d’ouverture de la procédure de sauvegarde était valable ou non.
Champ d’application spatial (ou dit international).
Cette question n’est pas expressément résolue par les articles du dit règlement. La réponse s’évince implicitement de l’article 3 du Règlement, et notamment des considérant 12 et 14. L’article 3 constitue la règle principale de compétence judiciaire internationale qui dit deux choses, on peut ouvrir une procédure principale d’insolvabilité dans le pays membre où se trouve le centre des intérêts principaux du débiteur, et cet article continue en disant qu’on peut ouvrir des procédure secondaires dans les autres États membres à condition qu’on y trouve un établissement subalterne.
Considérant 14, le présent règlement s’applique uniquement au procédures dans lesquelles le centre des intérêts principaux du débiteur est situé dans la communauté. Cela veut dire qu’au plan du champ d’application, il y a une distinction binaire, c’est où est localisé le centre des intérêts principaux du débiteur. S’il est à l’intérieur de la communauté devenu Union de l’espace judiciaire européen, le règlement s’applique. S’il est à l’extérieur, le règlement ne s’applique pas, on retombe sous l’empire du droit commun. Ce règlement est fait pour des débiteurs dont le principal établissement des centres d’intérêt est à l’intérieur de la communauté. Il n’y qu’un centre au niveau mondial.
2 – Principales règles.
Le règlement fait emploi des deux grands types, les règles indirectes qui fixent la compétence judiciaire et législative, et ensuite certaines règles matérielles internationales. Mais elles interviennent dans un second stade.
A – Règles consacrant une répartition rigide des compétences étatiques.
Compétence judiciaire.
Absence d’établissement.
A partir du moment où nous somme face à un débiteur dont le centre des intérêts principaux est en Europe, le premier critère uniforme est celui de l’existence d’un établissement. Tous les États membres sur les territoires desquels le débiteur n’est pas établi sont dans l’interdiction d’ouvrir une procédure collective.
Établissement secondaire.
Pour les pays pour lesquels il y a un établissement, cette notion est affinée. Si sur le territoire d’un État membre donnée il y a un établissement secondaire pourra être ouverte une procédure dite procédure secondaire dont les effets seront limités aux biens situés sur le territoire. Cette procédure doit être liquidative, et normalement elle ne peut pas être ouverte avant l’ouverture de la procédure dite principale. Dans l’hypothèse normale, c’est la procédure principale qui doit être ouverte en premier. Une exception, les créanciers locaux peuvent à tout moment demander l’ouverture de cette procédure secondaire, en pratique de valeur inférieure.
Établissement principal.
Établissement principal, il n’y en a qu’un, il est sur le territoire d’un État membre, pays ou est localisé le centre des intérêt principaux du débiteur, peut être ouverte la procédure principale d’insolvabilité, qui est prépondérante et qui a une vocation extraterritoriale. La notion fondamentale est celle de centre des intérêts principaux.
Coordination internationale hiérarchisée et procédure rigide [Exemple]
Personne morale ayant son siège social en France, établissement secondaire en Allemagne et États-Unis, un appartement en Espagne. Elle est insolvable de dimension internationale, perspective française : le centre des intérêts est localisé en Europe, le règlement s’applique, et comme il est en France par application de l’article 3 la France est le pays compétent pour ouvrir la procédure principale, l’appartement est appréhendé par la procédure française. L’ouverture d’une procédure secondaire en Allemagne est possible, notamment par des créanciers locaux, mais cette procédure ne peut être que liquidative. La procédure française pourrait vouloir appréhender les biens en dehors de l’Europe, mais cette question est hors le pouvoir de réglementation de l’Union européenne.
Centre des intérêts principaux.
Centre de gravité ostensible.
Les États membres bien que liés par le Règlement ont créé entre eux parfois des situations de concurrence voire d’affrontement. La première définition donnée figure au considérant 13 : le centre des intérêts principaux est le lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est donc vérifiable par les tiers. C’est le centre de gravité de l’entreprise qui est ostensible. Si les tiers ne le voient pas c’est qu’il n’est pas réel.
Présomption du siège statutaire.
L’article 3 paragraphe premier qui est le siège de la règle de compétence ajoute une présomption, pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé être le siège statutaire. La Cour de justice a déjà connu deux affaires mettant en cause la localisation du centre des intérêts principaux du débiteur.
Contentieux.
Incidence du temps sur la notion.
Cour de Justice, 17 janvier 2006, Staubitz Schreiber : cette personne physique prend sa retraite, elle ferme boutique au sens matériel du terme. Elle n’effectue pas toutes les formalités pour obtenir sa radiation. Elle reçoit un arriéré, elle se rend compte qu’elle est insolvable et elle demande en Allemagne l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité. La question qui va se poser dans ce contentieux est celle de l’incidence du temps sur la notion de centre des intérêts principaux.
La Cour dit pour droit que la notion de centre des intérêts principaux doit être entendue de façon assez stricte pour ne pas se prêter aux manœuvres des parties concernées, le centre des intérêts principaux est celui du débiteur au moment de la survenance de l’insolvabilité et un changement ultérieur à l’ouverture de la procédure ne devrait pas être pris en compte.
Incidence du patriotisme économique.
Cour de Justice, 2 mai 2006, Eurofood : dans cette affaire la Cour était saisie du contentieux de l’insolvabilité d’un groupe internationale de sociétés, le groupe Parmalat. Société mère holding siégeant à Rome détenant une filiale de droit irlandais. Insolvabilité, souhaite se mettre sous la protection des procédures de traitement de l’insolvabilité. Le Règlement s’exprime dans des termes juridiques qui n’ont rien à voir avec la réalité. Le mode normal de mis en œuvre du Règlement était de l’appliquer société par société, de distinguer en fonction des entités du groupe. On aurait donc dû ouvrir une procédure principale à l’encontre de la mère dans le pays de son centre des intérêts principaux et également une procédure principale contre la filiale au pays de son centre des intérêts principaux.
Cela ne convient pas aux attentes des dirigeants : ils demande l’ouverture à Rome d’une procédure consolidé pour tout le groupe. Ils le demandent sous la forme d’une protection juridictionnelle offerte par le droit italien. Quelques mois après les créanciers de la filiale irlandaise tentent d’obtenir en Irlande l’ouverture d’une procédure contre la filiale. La protection juridictionnelle provisoire est convertie en une procédure collective définitive visant le groupe.
En Italie, certains créanciers ont fait valoir qu’il fallait caractériser le centre des intérêts principaux de manière dissociée pour la mère et filiale, les juges italiens ont rejeté au motif qu’elle était détenue à 100%, et mêmes dirigeants : le centre des intérêts principaux de la filiale est à Rome. Derrière cette argumentation il y a un argument moins propre, du patriotisme économique. En Irlande, c’est le syndic de la faillite italienne qui vient et qui avance une argumentation du type litispendance. Les juges irlandais vont poser la question à la Cour de Justice, notamment à supposer que l’État le premier saisi se soit trompé dans le maniement du centre des intérêts principaux, le juge irlandais peut-il ne pas reconnaître le jugement parce qu’il est contraire à l’ordre public irlandais.
La Cour de Justice d’abord dit que l’Italie s’est trompée. Dès lors que la filiale a une activité économique et réelle dans le pays du siège statutaire, la présomption ne peut être renversée. Si la société est une simple boite aux lettres, alors on peut renverser la présomption pour désigner le lieu où la société est établie économiquement à titre prépondérant. La présomption en faveur du siège statutaire est une présomption forte. La Cour dit implicitement que l’Italie a eu tort, mais elle interdit à l’Irlande toute réaction puisqu’au nom de la confiance mutuelle, l’Irlande ne peut contrôler la manière avec laquelle un juge étranger a mis en œuvre les règles uniformes de compétence. Conséquence de quoi l’Irlande est totalement dépourvue de moyen pour faire échec à la procédure italienne, l’erreur se perpétuée. Un certains nombre de praticiens considèrent que la consolidation au pays du siège de la holding est classique.
Loi applicable.
Article 4 du Règlement qui contient un principe de solution totalement classique : on doit appliquer la lex fori concursus, la loi applicable est celle de l’État membre sur le territoire duquel la procédure est ouverte. L’article 4 paragraphe 2 fournit une liste indicative d’exemples de cas typiques. La lex fori va traiter de tout sauf ce que le Règlement réserve à des règles spéciales. Lorsqu’en Europe sont ouvertes plusieurs procédures, chaque procédure est régie par sa lex fori concursus.
Reconnaissance.
L’idée générale c’est que les autorités judiciaires des divers États membres doivent coopérer activement selon le principe de confiance et de reconnaissance mutuelle des décisions. Cela se traduit par un principe de reconnaissance de plein droit des décisions d’ouverture article 16. Vaut aussi pour les décisions consécutives jusqu’à la clôture de la procédure. Différence avec le droit français commun où le principe est celui d’un exequatur constitutif.
Il existe un tempérament, c’est celui de la publicité du jugement d’ouverture, le syndic de la faillite principale peut faire publier le jugement d’ouverture dans les autres pays de l’Union, et cette publication empêche les paiements de bonne foi que le débiteur aurait effectué entre les mains d’un débiteur ignorant. Les pouvoirs du syndic sont reconnus dans les tous les États membres, le Règlement ajoutant simplement que si le syndic de la faillite principale veut faire emploi de la force il devra requérir le concours des autorités locales. La seule exception possible permise par le Règlement à la reconnaissance automatique est celle d’une atteinte manifeste à l’ordre public local, mais ne peut servir de frein général pour le juge.
B – Règles matérielles dérogatoires de faveur.
Ce sont des dispositions de droit substantiel qui règlent directement une difficulté. C’est le deuxième volet du Règlement, un certain nombre de règles qui viennent atténuer les solutions conflictuelles qui passent par les grands chapitres du droit international privé. En complément un certain nombre de règles matérielles qui sont importante.
Règles matérielles de coordination procédurale.
Les premières règles matérielles que contient le Règlement ce sont les règles matérielles de coordination procédurale : ce sont des règles qui vont dire comment dans l’espace judiciaire européen on va faire vivre ensemble les diverses procédures d’insolvabilité qui on pu être ouvertes simultanément contre un même débiteur. Comment les créanciers chirographaires vont-ils procéder à la déclaration de leur créance.
L’article 31 du Règlement pose un principe de coopération active des syndics des diverses procédures. Il est même reconnu un pouvoir prépondérant du syndic de la faillite principale. Règles qui facilitent les déclarations croisées de créances.
Règles matérielles de coordination procédurale.
Règles de faveur catégorielle, le Règlement a pris l’initiative quoique dise le droit interne applicable à la procédure principale, d’imposer un certain nombre de dérogations au principe d’égalité des créanciers. Le Règlement impose de faire un sort à part à un certain nombre de créanciers. Articles 5 à 15.
La première technique consiste à exempter certains créanciers de la procédure principale d’insolvabilité, de se soustraire de la procédure principale, comme si la procédure n’existait pas pour ces questions. La deuxième technique consiste à inclure le créancier dans la procédure principale mais à soumettre ses droits à un rattachement spécial, à permettre à ce créancier de se voir appliquer autre chose que la lex fori concursus : ce sont les privilèges législatifs.
Franchise de procédure principale.
Il s’agit essentiellement des créanciers munis de sûretés réelles, articles 5 à 7 du Règlement. Pour que la franchise fonctionne, il faut que le créancier soit investi d’une sûreté portant sur un bien situé hors le pays d’ouverture de la procédure principale. La sûreté n’est pas affectée par la procédure, cette dernière ne peut pas nuire à l’efficacité de la sûreté, donc que la procédure est inopposable au créancier muni de cette sûreté : le créancier peut tenir la procédure comme réputée à son égard comme non écrite.
Le créancier peut revendiquer, restitution d’une chose objet d’une clause réserve de propriété, peut faire jouer tous les mécanismes de compensation connexe. Ces créanciers sont hors la discipline collective, volonté de favoriser le paiement sélectif des créanciers qui se sont fait octroyer des sûretés. Excessif.
Privilèges législatifs.
Ce sont les articles 8 à 15 du Règlement. Il s’agit de situations qui vont être appréhendées par la procédure d’insolvabilité mais soumises à un rattachement législatif spécial.
Article 8, Contrat portant sur un bien immobilier.
Les effets de la procédure d’insolvabilité sur un contrat donnant le droit d’acquérir un bien immobilier ou d’en jouir sont régis exclusivement par la loi de l’État membre sur le territoire duquel ce bien est situé.
Article 9, Systèmes de paiement et marchés financiers.
L’exemple typique est celui des prestataires de services d’investissement agréés auprès d’un marché boursier. Les conséquences de l’insolvabilité de l’un des participants sur un opération nouée au sein du système financier s’apprécie exclusivement d’après la loi applicable au dit système financier.
Article 10, Contrat de travail.
Les effets de la procédure sur un contrat de travail sont régis par la loi de l’État membre applicable au contrat de travail, c’est-à-dire le lieu d’exécution habituel de la prestation de travail. Crainte de grandes protestations sociales
Article 11, Effets sur les droits soumis à enregistrement.
Les effets de la procédure d’insolvabilité concernant les droits du débiteur sur un bien immobilier, un navire ou un aéronef, qui sont soumis à inscription dans un registre public, sont régis par la loi de l’État membre sous l’autorité duquel ce registre est tenu.
Article 12, Brevets et marques communautaires.
Aux fins du présent règlement, un brevet communautaire, une marque communautaire, ou tout autre droit analogue établi par des dispositions communautaires ne peut être inclus que vertu dans une procédure visée à l’article 3, paragraphe 1.
Article 14, Protection du tiers acquéreur.
Lorsque, par un acte conclu après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité sur les droits et obligations des participants à un d’insolvabilité, le débiteur dispose à titre onéreux d’un bien immobilier, d’un navire ou d’un aéronef soumis à inscription dans un registre public, de valeurs mobilières dont l’existence suppose une inscription dans un registre prévu par la loi, la validité de cet acte est régie par la loi de l’État sur le territoire duquel ce bien immobilier est situé, ou sous l’autorité duquel ce registre est tenu.
Article 15, Effets de la procédure d’insolvabilité sur les instances en cours.
Les effets de la procédure d’insolvabilité sur une instance en cours concernant un bien ou un droit dont le débiteur est dessaisi sont régis exclusivement par la loi de l’État membre dans lequel cette instance est en cours.
Chapitre 4 : Les sociétés.
Pour l’essentiel il n’existe pas de société supranationale, par exception cela existe pour les sociétés commerciales instituées par un Traité international : la Scandinavia Airlines, les pays scandinaves avaient uni leurs forces pour acquérir une flotte commerciale et a été créé une société de toute pièce au moyen d’un Traité qui valait statut de la société.
On rencontre en pratique des sociétés de droit étatique ou à la rigueur des sociétés hybrides de droit national et de droit régional, ce sont les sociétés de forme commune européenne, par exemple la Société européenne et à côté de cela le groupement économique d’intérêt économique et bientôt la Société privée européenne qui a vocation à devenir l’équivalent des SARL de droit national. Dans leur mode d’organisation contemporain, ces sociétés hybrides ont toutes un double rattachement : Règlement européen instituant les sociétés européennes et subsidiairement rattachement par la loi de l’État du pays où elle a été enregistrée.
Section 1 : La détermination de la lex societatis [approche statique].
La lex societatis est la loi de l’être moral sociétaire. Loi de l’institution sociétaire, il doit avoir à la base un minimum d’organisation juridique. Le trait décisif est la naissance d’une personne morale distincte.
Distinction société et contrat.
L’opposition est assez nette, le contrat est régi par la loi librement choisie tandis que la société est régie par une loi institutionnelle. Mais il y a des points d’intersection. Toutes les sociétés ne sont pas personnalisées, il existe des sociétés non personnalités inconscientes comme les sociétés créées de fait, ou des sociétés dépourvues de la personnalité comme les sociétés en participation.
Le Règlement Rome I article 1 paragraphe 2 dispositif d’exclusion, cas particulier sur les sociétés. Il est dit qu’il ne s’applique pas aux questions relevant du droit des sociétés tel que la formation, le pouvoir des dirigeants. Le Règlement a exclu de son champ d’application les questions institutionnelles relatives aux sociétés. Il ne s’intéresse pas à l’institution sociétaire, mais si basé sur un contrat il n’y a pas lieu à exclusion.
Distinction société et groupe de sociétés.
Distinction avec la notion de groupe de société. Dans les années 1960, le commerce international et notamment immatériel prend son envol, l’attention s’était focalisée sur le groupe international de sociétés. Les apologues de la lex mercatoria s’étaient focalisés là-dessus. La vérité c’est que le groupe international de sociétés ne constitue pas une réalité juridique autonome : il n’y a pas en droit positif un rattachement unitaire du groupe de société.
Goldman disait que la vraie unité économique était le groupe et que cela devait se répercuter dans le conflit de loi : rattachement unitaire à la loi de la société mère. Cette théorie a été réfutée en 1979 dans la thèse du professeur Hervé Sainvet : les premières questions qui peuvent se poser au sein d’un groupe de sociétés se sont des questions bilatérales entre la mère et chacune des filiales, des questions qui naissent du rapport de domination. Ce rapport de domination se traduit par le fait que dans le capital de la filiale il y a un actionnaire majoritaire qui est une personne morale : le rapport est un rapport entre une société et un de ses associés, donc application de l’entité dont le capital est contrôlé par un tiers.
Distinction société et entreprise.
Le mot entreprise a pénétré le droit par des matières annexes et relativement impures matinées de droit public. Même si la notion d’entreprise a aujourd’hui une signification propre dans toutes les branches du droit, cela ne suffit pas pour autant à éclipser la considération traditionnelle de la société, là encore l’entreprise ne constitue pas l’objet principal pris en compte par les règles de conflit de lois : le juriste se focalise sur la société, puis rattachement casuistique comme pour les les lois de police.
1 – Les solutions françaises de droit commun.
Pas de Règlement européen en la matière. Solution française de droit commun article L210-3 du Code de commerce et reproduite dans les dispositions de droit commun des sociétés article 1837 du Code civil issu de la loi de 1978. Critère unilatéral qui a été bilatéralisé par la jurisprudence. Les tiers peuvent se prévaloir du siège statutaire mais celui-ci ne leur est pas opposable par la société si le siège est situé en un autre lieu. Cette deuxième phrase fait naitre une difficulté, le siège peut se dédoubler entre un siège statutaire et un siège réel.
Ces dispositifs légiférés sont le fruit de plus d’un siècle de jurisprudence française puisque la première illustration de ce mode de détermination de la lex societatis date de 1870 [Chambre des requêtes, 20 juin 1870, Société du débarcadère de Cadix].
A – Théorie du siège face aux théories concurrentes.
1 – Rattachement par le siège/rattachement par le contrôle.
La théorie du contrôle regarde ce qu’il y a derrière la personne morale, comment est composé le capital de la personne morale : ce qui est décisif c’est la composition majoritaire. Cette théorie a eu des applications en France et elle était notamment favorisée par ceux qui considéraient que la personne morale était une fiction et relativisaient son autonomie. Application dans le domaine de la condition des étrangers dans les périodes d’hostilité diplomatiques ou après guerre, années 1919-1921. Imposait par exemple la confiscation des biens appartenant à l’ennemi, même les biens privés. Si le capital est détenu par des étrangers, la société est étrangère.
Cette théorie a beaucoup de défauts, la société va changer de loi applicable au gré de l’évolution de son capital. Création de conflits mobiles. C’est un critère qui sauf exceptions n’a pas été employé dans le droit international privé français, répudié par la jurisprudence [Chambres des requêtes, 24 décembre 1928 et 12 mai 1931, Société la Soie artificielle de Calais ; Remington typewriter].
Ces deux arrêts ont répudié la considération du contrôle. Néanmoins dans certains dispositifs le critère du contrôle a fait sa réapparition notamment dans des secteurs sensibles comme la vente d’armes ou la presse lorsqu’elle n’était pas libre.
2 – Rattachement par le siège/rattachement par incorporation.
Critères administratifs.
Dans le monde anglo-américain on ne rattache pas les sociétés par le siège mais selon un critère administratif et formel qui est celui de l’incorporation, c’est-à-dire en quel lieu on été réalisées les formalités administratives d’inscription : c’est le lieu d’incorporation. On pourrait préciser la notion pour la rapporter à l’opposition du siège social statutaire et du siège social réel. La notion de siège statutaire est une notion à la fois contractuelle et administrative et au fond le siège statutaire correspond au critère anglo-américain de l’incorporation.
Théorie du siège réel.
La théorie du siège réel est plus exigeante en ce qu’elle permet de déjouer des fraudes. Si le siège statutaire a été fixé de façon fantaisiste ou est fictif, il est arbitraire et le droit se réserve le droit de ne pas en tenir compte. Ce siège réel est présumé être le siège statutaire. La France est adepte d’un rattachement par un siège au sens réel du terme. Au fond ce sont des choix à la racine profonde de la conception que se font les États des sociétés.
Cour de cassation, 17 juillet 1935 : société créée à Paris pour l’import export de marchandises. Le siège est à Paris. L’associé fondateur se rend compte qu’au Vietnam la fiscalité serait pour lui plus avantageuse et déplace son siège à Saigon. La Cour dit que légalement les impôts doivent être acquittés au lieu du siège social, le siège social réel doit correspondre au principal établissement, a défaut le droit se réserve le droit de le contrarier pour fraude.
La théorie française du siège permet de sanctionner les sociétés étrangères boite aux lettres, société fictivement domiciliée à l’étranger et qui n’a aucune activité économique.
3 – Rattachement par le siège/rattachement par superposition.
Théorie transactionnelle.
On la recherche dans des alternatives tranchées. On ne pourrait pas imaginer que diverses lois viennent s’appliquer à la société. Dans la doctrine allemande, c’est ce que l’on appelle la théorie de la superposition. L’idée est qu’au fond, lorsqu’on va faire face à une société pour laquelle les fondateurs sont allés la placer dans un pays d’immatriculation complaisant. Dans ces cas là, les partisans de la superposition vont dire que la société est soumise quand à son enregistrement au pays de l’enregistrement mais cumulativement pour les tiers, on appliquera la loi du pays de son siège. On fait usage des méthodes de rattachement de principe (incorporation) et d’exception (siège réel) car l’intérêt général est engagé.
Rejet de la théorie.
Cette théorie n’a pas convaincu pour peut-être deux raisons. Tout d’abord, du point de vue de la praticabilité, comment faire la part entre l’une et l’autre des deux lois. Est-ce qu’au fond on ne revient pas à la théorie du siège à la française car celle-ci ne s’oppose pas dans tous les cas à la théorie de l’incorporation. Par exemple, le tiers qui est victime d’une activité délictuelle, le tiers est libre de se mettre dans la situation de son choix. Au fond, la théorie du siège permet à un tiers de plaider sur la théorie de la société qui n’a pas été celle du pays du fondement.
D’autre part, dans certain pays on admet qu’une même société a la nationalité A alors même qu’elle a été fondé selon le droit du pays B. Ce cas mise à part, la théorie de la superposition n’a pas eu grand succès.
B – Théorie du siège et solutions positives tirées en droit international privé français.
Elle fournit un principe explicatif unique.
1 – Dans le champ du droit privé.
La théorie du siège en 1837 était exprimée en termes unilatéraux, pourtant la jurisprudence n’a eu aucun mal à la bilatéraliser.
Admission du renvoi.
Il est accompagné d’un renvoi au premier degré voire au deuxième degré. Ce renvoi a été opportun car il a permis d’atténuer les divergences nationales concernées.
Cour d’appel de Paris, 1984 banque Ottomane : banque incorporée sur les registres anglais, un litige survient en France pour savoir quelle loi s’applique pour la banque. C’est la question de l’identité et du pouvoir du dirigeant. L’acte est-il valable ? Opposable à la personne morale ? Elle a son siège en Turquie donc on désigne le droit turque mais le problème est que ce n’est pas sous l’empire de cette loi qu’elle s’est formée. Le droit international privé turc comme le droit international privé anglais sont adeptes de l’incorporation et donc le juge français désigne le droit turc qui désigne le droit anglais et ici le renvoi fonctionne.
Étendue de la lex societatis.
L’étendue de la catégorie désignée sous le terme lex societatis est en France l’étendue maximale : il est global et cohérent. Sont couverts les questions relatives à la constitution, au fonctionnement, la dissolution ainsi que pour l’extérieur de la société la représentation de la société vis-à-vis des tiers.
Chambre commerciale, 21 décembre 1987, Société Viuda : premier arrêt à avoir qualifier les lettres d’intention (déductible d’une obligation de moyen ou de résultat). Et la question était de savoir si la caution était valable. Dans cette affaire, une société de droit français dont le dirigeant avait octroyé une lettre d’intention au nom de la société personne morale. C’était un contrat franco-japonais. Il y a un créancier espagnol qui exige une garantie. La Cour de Cassation dit que c’est une question de pouvoir d’engagement à l’égard d’un tiers et elle est soumise à la loi de l’Etat dans lequel la société à son siège social
Première chambre civile, 8 décembre 1998, Société générale Accident : l’exception admise en droit depuis l’arrêt Lizardi n’est pas transposable en matière d’incapacité de la personne morale. Il a été jugé que le créancier ne pouvait exciper son ignorance excusable de son droit applicable. Solution qui a été retouché de manière expresse sur la question de la clause compromissoire de la clause par l’arrêt Soerni. Ce dernier arrêt a été trop loin en faveur de l’arbitrage. Lorsque l’on est un tiers et qu’on a été surpris et qu’on peut prouver qu’une société peut être incorporée dans un pays qui n’est pas le siège social. C’est une garantie qui n’est ouverte qu’au tiers mais point de salut pour le tiers de bonne foi qui ne s’est pas renseigné.
Conflit de juridictions.
Cela laisse une liberté en France du rattachement fonctionnel de la société dans Bruxelles I. De la même manière l’article 22-2 pose une compétence exclusive pour le siège de la société pour les décisions de la société. Pour déterminer le siège, l’État va appliquer son droit international privé. Lorsque l’on applique le droit français commun, notre jurisprudence admet que se produise dans le droit des conflits de juridictions le même dédoublement que celui prévu pour les conflits de lois : choix de saisir le juge français s’il est le juge du siège statutaire ou le juge du siège réel.
2 – En dehors du droit privé.
On retrouve cette théorie du siège qui fixe l’origine juridique de la personne morale, son rattachement de base et prépondérant à la loi de l’État donné.
Droit pénal.
Chambre criminelle, 3 juin 2004 : champ d’application international du délit pénal d’abus de biens sociaux qui est la correspondance pour les sociétés de capitaux d’abus de confiance. On dit que ce délit pénal est un délit autolimité : restreint aux hypothèses du concept sociétaire de droit français. Donc le droit pénal français s’applique quelque soit le lieu de survenance de l’abus de biens sociaux, mais l’incrimination d’abus de biens sociaux ne peut être étendue a des sociétés que la loi n’a pas prévues, telle une société de droit étranger, et pour lesquelles seule la qualification d’abus de confiance est susceptible d’être reconnue
Chambre criminelle, 31 mars 2007 Elf : la société a des filiales au Gabon et a donc fait fonctionner la société avec le droit gabonais ce qui a engendré des malversations. Les juges avaient estimé que le droit français était applicable , car la société était contrôlée à 58,28 % par la société Elf, elle était dotée d’un établissement en France, entraînant son immatriculation au registre du commerce de Nanterre, son président résidait à Paris, et son siège réel était dans les locaux de la Tour Elf où ont été prises les décisions d’octroyer les avances litigieuses. Bref, la société Elf Gabon devait être considérée comme une société française, si bien que les dispositions incriminant l’abus de biens sociaux étaient applicables.
Nationalité.
Comment savoir que la société est française, notamment pour le droit public. Le plus souvent cette question se pose pour le droit fiscal. La France a eu deux réponses successive.
Tribunal des conflits, 23 novembre 1959, Mayol Arbona : il faut avant d’appliquer la règle fiscale savoir quel est la nationalité. Les parties hésitent entre le juge judiciaire et administratif. En réalité, ils étaient passés devant le juge administratif mais une question de nationalité a été posé et donc compétence exclusive du juge judiciaire. Le Tribunal a une réponse hésitante et a été surement inspiré de Niboyet : « une personne morale ne fait pas son service militaire et ne vote pas ». Ce n’est pas une question de principe qui ne doit pas être porté devant le juge judiciaire. Elle doit être contrôlée au cas par cas, c’est la théorie fonctionnelle pour la nationalité des personnes morales.
Assemblée plénière, 21 décembre 1990 : le rattachement à un État n’est autre que la nationalité et cette nationalité résulte de son siège réel défini comme le siège de sa direction effective et présumé par le siège statutaire. Le droit international privé français a choisi d’opter pour un rattachement unitaire de la société à son siège qu’il s’agisse des questions de droit privé ou de droit public.
Condition des étrangers.
Décret loi du 31 mai 1857.
C’est dans ce champ des règles matérielles que la théorie du contrôle a une certaine relativité. Dès qu’une distinction a lieu entre étrangers et nationaux, il tombera dans le traitement spécifique des étrangers. Un point sur lequel il y a une discrimination des sociétés étrangères, c’est pour la reconnaissance de la personnalité morale par le texte issu d’un décret loi du 31 mai 1857 qui réagissait à un événement de circonstance. Cette règle éteinte existe encore parfois à l’étranger.
Impact sur les sociétés étrangères.
Ce texte est né d’un différend diplomatique franco-belge. La Belgique a décidé de décalqué le droit français. Le droit français des SA était méfiant de ces sociétés. Pour accéder à la personnalité, il fallait une autorisation administrative. On va donc signer un traité diplomatique franco-belge qui contient un dispositif : « les sociétés reconnus par l’administration seront reconnus dans l’autre pays ». Article 1, les sociétés autorisées en Belgique seront reconnus en France. Article 2, même privilège aux sociétés de capitaux étrangères si convention internationale ou par un décret de reconnaissance automatique.
Abrogation.
Ainsi on a créé une difficulté systématique pour la reconnaissance des sociétés de capitaux étrangers qui sont en l’absence de convention réputée inexistantes, avant il n’y avait rien qui permettait leur reconnaissance. Cela va être le cas pendant plus d’un siècle. C’est une loi de 2007 qui est venu abrogée cette disposition. Une société étrangère de capitaux ou des fondations du Liechtenstein étaient concernés par cette règle. Jurisprudence qui a activé les garanties fondamentales de la Convention européenne : ces sociétés sont quand même dans leur pays d’origine des entités juridiques, droit au procès équitable, droit à la garantie minimal par l’accès à la justice.
2 – Les infléchissements européens.
Impact du droit et de la jurisprudence de l’Union Européenne sur le droit international privé ainsi que la teneur de ce droit européen : les textes étaient prudents et respectent les règles de rattachement de droit international privé. Ce qui a été audacieux, c’est la création prétorienne de la Cour de Justice.
A – Prudence des textes.
1 – Dans les traités fondateurs.
Avant le traité d’Amsterdam et Lisbonne car Amsterdam a prévu une base pour légiférer. Depuis 1957, il y avait deux textes.
Traité CE, article 48.
C’est le texte qui ferme la section du traité de Rome relative à la liberté d’établissement. L’article 48 vient fermer cette section comme ceci : les sociétés constituées en conformité de la législation d’un État membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l’intérieur de la communauté, sont assimilés pour l’application des dispositions du présent chapitre aux personnes physiques ressortissants des états membres. De manière plus technique, c’est un texte relatif à la jouissance des droits et qui dit qu’une société même étrangère à partir du moment où elle a un rattachement avec la communauté, jouit du principe de libre établissement.
Les pères fondateurs avaient pensé à l’opérateur personne physique. Il y a une liberté d’établissement principale et secondaire pour les personnes physiques, et ce bénéfice était étendu par cet article aux personnes morales. Ce texte avait prévu et acter qu’il pouvait y avoir une divergence entre le siège statutaire ou réel et ne l’a pas tranché.
Article 220 devenu 293 du traité CE (consolidation du texte par Maastricht).
Ce texte était une annexe qui prévoyait que les États membres pouvaient négocier des traités internationaux classiques de reconnaissance mutuelle des sociétés au sens de l’article 288 alinéa 2, c’est-à-dire reconnaissance de la personnalité juridique. Il faudra pour cela procéder à des conventions internationales, elles ont été tentées notamment sous les hospices de la conférence de la Haye, puis dans l’espace de la communauté européenne avec la Convention de Bruxelles de 1968 du même type que celle qui a donné Bruxelles I mais ce texte était transactionnel car prenait pour base la théorie allemande de la superposition mais celle-ci ne contentait personne.
2 – Prudence du droit communautaire dérivé.
Aucun texte ne tranche les deux notions de sièges. L’article 3 du Règlement 1346/2000 avance qu’il faut regarder le centre des intérêts principaux, siège statutaire mais c’est une présomption simple. Les rattachements contenus dans le règlement instituant la société européenne avaient bloqué le rattachement car crainte que tous les opérateurs économiques allemands désertent le droit allemand car il est plus contraignant. Le projet a été débloqué par Chirac en France moyennant une certaine assurance pour le droit allemand dans le droit du travail. Il est dit que les États sont en droit d’exiger la correspondance entre le siège réel et statutaire. La question de principe sur les sièges a été bien gardée d’être tranchée.
B – L’audace du juge.
La jurisprudence a été provocatrice et imprudente. Elle a été légaliste et prudente qu’à une seule occasion.
Cour de Justice, 27 septembre 1988, Daily Mail : on avait à faire à une société qui voulait s’expatrier au Danemark pour des raisons d’optimisation fiscale. Le droit anglais lui dit que dans ce cas, taxation de toutes les plus-values latentes. Est-ce que le Royaume-Uni peut empêcher d’aller dans un régime plus avantageux. La Cour dit qu’il n’y a pas entrave car ce n’est pas la mobilité d’un être de chair et que le droit communautaire ressortissait de la compétence exclusive des États membres.
La Cour dit qu’il y a lieu de constater que la disparité des lois nationales quant au rattachement des sociétés et modalités de transfert de siège sont des questions qui ne sont pas résolues par les règles sur les droit d’établissement mais qui doivent l’être par les travaux législatives ou conventionnels. Principe d’abstention du juge qui peut se justifier par le principe de la séparation des pouvoirs. Subsidiarité de l’action internationale à
l’action interne. La cour va détricoter cet arrêt.
Cour de Justice, 9 mars 1999, Centros : la Cour va corriger le droit national sous l’égide de la liberté d’établissement en faisant produire des effets. Ces effets vont aller vers deux directions : une obligation de reconnaissance des personnes morales créée par un autre État membre et exploiter la liberté d’établissement.
1 – Obligation de reconnaissance.
Obligation dans certains cas à la reconnaissance des sociétés étrangères.
Cour de Justice, 9 mars 1999, Centros : nous sommes au Danemark avec un couple désirant exploité un fonds de commerce et qui vont voir leur expert comptable ou l’avocat du quartier et qui veulent la société la moins coûteuse. L’expert dit qu’il va optimiser les disparités qu’il existe en Europe entre les législations étatiques de droit interne. Il subsiste des différences considérables, les sociétés anglaises apparaissent plus attractives. On exploite les droits du droit international privé et du droit interne. Les anglais sont adeptes de la théorie de la corporation. Les avocats du quartier conseillent d’expatrier l’affaire, de faire une structure société de droit anglais, de l’immatriculer à Londres et de revenir au Danemark par voie communautaire via la liberté d’établissement. Les époux ont donc fait l’aller retour. Ils sont allés en Angleterre pour créer une coquille vide, une société boîte aux lettres. L’administration danoise refuse d’accorder à la société anglaise son inscription sur le registre du commerce.
La Cour considère qu’il y a une atteinte à la liberté d’établissement. Peu importe que la société ait été constitué en Angleterre pour exercer sa principale activité au Danemark, à partir du moment où elle a été valablement été constituée selon le droit anglais, on a alors affaire à un sujet de droit qui est investi de la liberté de déplacement en Europe. Faveur au critère d’incorporation.
Cour de Justice, 12 septembre 2006, Cardbury Schweppes : puisqu’il s’agit de la matière fiscale, la Cour se montre prudente et elle réalise un montage artificiel. D’avout prétend que la société boite au lettre est l’exact équivalent d’un montage purement artificiel.
Affermissement de la jurisprudence Centros.
Cour de Justice, 5 novembre 2002, Uberseering : une SCI a été constituée aux Pays-Bas avec des associés néerlandais. Cette SCI se donne pour objet d’exploiter et de commercialiser un terrain qui est en Allemagne. A un moment donné, le contrôle de cette société change et toutes les parts sont transférées à des allemands. L’encrage réel de la société, c’est l’Allemagne. Pour le terrain allemand, on a recours un constructeur allemand. On a affaire à un conflit mobile de lois. Le contrat serait nul pour défaut de capacité du contractant, n’était pas soumise au droit allemand. La société aurait été constituée sous l’empire du faux droit. Cette société aurait du être constituée par application du droit allemand.
La société de droit néerlandais n’a-t-elle pas droit à l’établissement secondaire. On se trouve dans un litige analogue à celui de l’arrêt Centros. L’Allemagne élève les débats au niveau des principes et se fonde expressément sur l’article 220 du traité qui avait été visé dans l’arrêt Daily Mail. La société a été constituée valablement du point de vue néerlandais et donc on entraverait la liberté d’établissement. L’Allemagne a eu tort et donc elle a changé son droit car le droit communautaire impose la théorie de l’incorporation. La Cour réitère la position Centros.
Au regard du droit international privé, on peut penser à ce qu’on a appelé les conflits de systèmes. C’est l’hypothèse d’une divergence concrètes des règles de rattachement d’un pays à un autre. Cette divergence se retrouve dans le conflit négatifs de type renvoi, rencontré dans l’arrêt Banque Ottomane. Le souci est le conflit positif qui est insoluble. Si on prend la jurisprudence européenne, on se rend compte que l’invocation des libertés européennes de circulation obligent l’Etat du for à une solution renouvelée de conflit de systèmes, oblige à ouvrir les yeux sur les divergences des systèmes nationaux, et permet de privilégier le point de vue étranger : tout à fait inédit en droit international privé. Immixtion du droit étranger sans que le droit international privé interne désigne la possibilité de désignation du droit étranger.
Cour de Justice, 30 septembre 2003, Inspire Art : affaire qui oppose l’Angleterre aux Pays-Bas. On est allé créer une société en Angleterre pour un commerce néerlandais. On est revenu aux Pays-Bas par voie d’établissement secondaire. Les néerlandais ont compris qu’ils n’ont pas le droit d’invoquer leurs règles de droit international privé pour sanctionner l’entreprise. Ils ont mis en place deux types de mécanismes essentiels : il faut protéger les tiers, on va obliger la société étrangères à faire inscrire leur succursale en mettant une mention «société étrangère de pure forme », si la société fait des dettes au Pays-Bas, il sera possible d’aller à l’encontre de la mutation de personnalité.
La Cour juge là que le dispositif hollandais est condamnable car disproportionné. Le risque combattu, le risque de porter une atteinte aux tiers, aux contractants locaux est un risque hypothétique et pour combattre ce risque. La Cour répond à la loi de police qui dit que les dirigeants sociaux seront responsables.
Après ces trois arrêts, les pays de siège en ressortent penaud car ils ne peuvent pas se rattraper avec la théorie transactionnel en appliquant quelques lois de police. En gros la Cour accepte que des mesures curatives mais pas des mesures préventives.
2 – La mobilité encouragée (fusion, trasnfert de siège).
Comment une société peut être mobile à travers les frontières. La première opération est la fusion internationale de société. Exemple, société allemande absorbée par une société luxembourgeoise, à la fin la société de droit allemand s’est bien expatriée.
Fusion internationale de sociétés.
Cour de Justice, 13 décembre 2005, Sevic System : société allemande veut se faire expatrier par une société luxembourgeoise. La société fusionnée sera soumise au régime luxembourgeois. Mais dans le droit allemand, les sociétés ne peuvent pas fusionner internationalement. Et la Cour dit qu’il y a entrave à la liberté d’établissement et qu’elle est injustifiée. Quelle liberté ? Celle de l’absorbante. Mais la Cour n’a pas regardé qu’il existait un moyen autre pour avoir un établissement secondaire. Cette question de principe n’est pas évoquée. Il faut que toutes les voies soient ouvertes alors. La liberté d’établissement est donc plus importante par la Cour que par les textes. Directive sur les fusions transfrontalières en octobre 2005 entrée en vigueur en 2008.
Transfert international du siège social.
La seconde opération est le transfert international du siège social, par exemple modification des statuts.
Cour de Justice, 16 décembre 2008, Cartesio : il s’agit d’une forme de retour sur l’hypothèse Daily Mail. Une société de droit hongrois a été constituée en Hongrie et a son siège social en Hongrie. La Hongrie est un pays de siège. Cette société Hongroise veut s’installer dans un autre état membre. Elle veut le faire d’une manière particulière en déplaçant juste sont siège social réel. Structure sociétaire de droit hongrois. On veut rester soumis au droit hongrois mais changer le siège d’exploitation. La Hongrie s’y oppose avec une dissolution de la société en cas de déplacement. Selon le droit hongrois, le siège doit correspondre à la loi applicable. Il y a une entrave à la sortie : c’est le pays d’origine de la société qui bloque. Cela constitue-t-il une atteinte ? S’agit-il d’une liberté d’établissement secondaire ?
La Cour dit qu’il n’y a pas entrave. Elle conclut par un arrêt qui va bien au-delà du droit des sociétés : l’État de constitution de la société garde la maîtrise de la qualification des sociétés bénéficiant de la liberté d’établissement. La question de savoir qui peut déterminer le droit applicable se fait par le droit national. Un État dispose ainsi de la faculté de définir le lien de rattachement qui est exclusif d’une société. Cet État membre conserve le droit de ne pas permettre à la société de conserver cette qualité lorsque celle-ci veut se réorganiser dans un autre État membre. Fondamentalement, les libertés fondamentales ne sont pas là pour donner la préférence à telle ou telle théorie de rattachement.
Le changement d’établissement principal n’est prévu par aucun texte mais des travaux sont en cours car c’est important, on ne répudie pas comme ça le pays qui nous a donné la vie. Demain le plaideur avisé va plaider que cette exigence est contraire au droit communautaire et qu’elle doit être réputée non écrite.
Semble préfigurer où la loi de la société va pouvoir changer, c’est la figure de l’expatriation des sociétés. Correspond dans cet arrêt à l’établissement principal. Contre toute attente la Cour considère que la Hongrie a raison, ressuscite sa jurisprudence Daily Mail, réinstaure une compétence de plein exercice des États constituant la société. En apparence l’État peut donner la mort à la société, mais la Cour prend position sur une question qui ne lui était pas posée. La Cour stigmatise l’incohérence de l’opérateur économique. Si le projet avait été une expatriation totale, alors là l’opposition du pays de départ aurait été condamnable du chef de l’entrave à la liberté d’établissement.
Baiser de Judas au rattachement par le siège. Dans cet arrêt Cartesio, la Cour invite à un forum shopping systématique et ultérieur à la constitution. L’expatriation permet le changement de la loi applicable, à partir du moment où un État accepte d’accueillir la société, l’État de départ ne peut plus rien faire sous peine d’entraver la liberté d’établissement. Encourage le phénomène de la mobilité européenne des sociétés. Cet intervient après l’enterrement du projet de la quatorzième directive relative au transfert de siège.
Section 2 : Mise en œuvre de la lex societatis – Approche dynamique, opérations sociétaires
1 – La lex societatis face au rattachement civil ordinaire.
A – La lex societatis dans sa combinaison avec la lex loci delecti.
Faits délictuels du dirigeants à l’étranger.
Le pouvoir de représentation de la société dans l’ordre externe relève de la lex societatis. Face à une situation d’engagement délictuel de la société, par exemple une société de droit français le dirigeant tue un individu sur le territoire Suisse avec sa voiture de fonction. On peut arriver à une confrontation de la lex societatis et de la loi du lieu d’agissement. Les ayants cause vont agir contre le dirigeant au regard de la lex loci delicti. Soit le dirigeant va dire qu’il agit dans le cadre de ses fonctions et l’organisation pour laquelle il agit prévoit une immunité du dirigeant agissant dans le cadre de ses fonctions ; soit le dirigeant va s’avérer insolvable et la victime va faire la démarche de recherche elle-même la société. Pas d’hypothèses jurisprudentielles, mais les solutions ne sont pas forcément évidentes et univoques.
S’agissant de la responsabilité de plein droit de la société du fait des actes de son dirigeant, c’est une question qui relève de la lex societatis. Mais le juge étranger pourrait mettre en œuvre un cas de responsabilité délictuelle de plein droit du type responsabilité du commettant du fait du préposé. Parallélisme possible des actions : il y a des chevauchements et des alternatives.
Groupes de sociétés et dommages environnementaux.
Dans le groupe de sociétés, levé du voile social de la filiale dans les litiges de pollution environnemental. Exemple de l’entreprise maritime qui est organisée sous forme de filiales, notamment la figure un bateau égal une entreprise. Si un bateau cause un dommage, la responsabilité est limitée pour l’entrepreneur : une entreprise responsable mais actif limité. Ne faut-il pas mettre de côté le principe de l’autonomie de la personne morale et percer le voile social et aller chercher derrière la filiale ses associés ou actionnaires, notamment la société mère.
La lex societatis risque d’être concurrencée par la loi du lieu de l’agissement. La question de l’engagement de la mère du fait de l’activité de sa fille relève de la lex societatis de la fille. Mais la lex locti delicti peut reprendre le pas et notamment en forçant l’application de ses plus importantes dispositions qualifiées de loi de police. Actuellement, le fait de savoir si l’on peut poursuivre la mère relève de la lex societatis de la société ayant causé le dommage, donc étrangère. Il pourrait être imposée la levée du voile social du fait d’une loi de police d’application territoriale.
Cour d’appel de Paris, 30 juin 2006, Morgan Stanley c/ LVMH : la Cour a jugé que l’activité extracontractuelle d’une société devait s’apprécier d’après la lex loci delicti, sauf en ce qui concerne la structure ou l’organisation de la banque dont les règles sont issues de la loi du siège social.
En l’espèce, préparation d’une opération de fusion entre deux sociétés, dont la LVMH. L’autre société est une cliente de la Morgan Stanley, auprès de laquelle elle prend conseil. Au cours des négociation, un analyste de la banque, chargé de noter les sociétés, abaisse le classement de la LVMH. Cette dernière reproche au collusion frauduleuse au sein des services de la banque pour favoriser l’opération de fusion au profit de son client. Il est reproché notamment que le système dit de la muraille de Chine, c’est-à-dire un cloisonnement entre les différentes cellules de la banque, ne soit pas respecté au sein de la banque, ce qui aura abouti à un échange d’informations. Ainsi, il était visé la structure même de la banque régie par le droit anglais.
Par cet arrêt, les faits délictuels sont appréciés au regard du lieu d’agissement, sauf pour ce qui concerne la structure et l’organisation de la banque soumises à la loi du siège social, en l’espèce le droit anglais.
B – Lex societatis et lex contractus.
Pacte d’actionnaire.
Comment faire régir un pacte extra statutaire d’actionnaires. Il a une nature contractuelle et il a pour but d’influer sur le fonctionnement de la vie sociale dans les rapports entre les actionnaires signataires, typiquement pour l’exercice conjoint du droit de vote. La qualification naturelle d’un tel acte fait pencher vers la lex contractus, parce que par essence même le pacte a une nature non institutionnelle, c’est un pacte volontaire, en conséquence de quoi l’on peut appliquer la loi librement choisie, donc les associés peuvent très bien soumettre le pacte à un droit différent de celui de la société.
La difficulté est alors en cas de loi tierce le risque de ressurgissement de la lex societatis dans ses dispositions empruntes de loi de police au titre des articles 7 et 9 du Règlement Rome I. Le choix sérieux est de soumettre le pacte à la lex societatis.
Cession de contrôle d’une société non cotée.
Acte volontaire bilatéral, la nature est conventionnelle donc la cession de contrôle dans son aspect droit des obligations relève de la lex contractus. La convention d’achat est régie sous l’empire de la lex contractus. À défaut de choix on retomberait sur la lex societatis. Mais cette transaction comprend aussi des aspects réels au sens du droit des biens, on sort de la qualification contractuelle et on retombe dans une qualification appliquée à un actif immatériel ici : ce sont des parts sociales ou actions. Pour ces aspects réels la lex societatis retrouve une compétence normale en tant que loi des titres, ce sont des actions de droit français par exemple régis par la lex societatis française.
2 – La lex societatis face à une autre lex societatis.
L’hypothèse où le droit français va entrer en contact avec le droit des sociétés d’un autre État.
A – Opération de type restructuration.
Types d’opérations.
Restructuration par fusion par exemple, scission, ou encore apport partiel d’actif à une société de droit étranger, et cette opération est soumise au régime des scissions. Dans tous ces cas, ce sont des opérations de restructurations sociétaires, la structure va se trouver changée par l’effet de cette opération.
Schéma commun.
Le schéma commun à ces opérations, il y a toujours trois étapes. Tout d’abord la dissolution sans liquidation dans l’hypothèse de la fusion, donc fin d’une des personnes morales. Deuxième étape, la transmission universelle du patrimoine. Troisième étape une modification du capital social de l’entité qui reçoit et qui émet des titres pour rémunérer les associés de la société ayant disparu.
Une société de droit français a le projet de se laisser absorbée par une société de droit allemand. À l’issue de l’opération, une seul structure régie par la lex societatis allemande. Les associés français seront au final en possession de titres allemand. Tout d’abord signature d’un contrat de fusion passé par les dirigeants. En amont, il y a tout un processus de prise de décisions internes à chaque société. La décision doit être prise en assemblée et en certains cas à majorité renforcée. On fait voter sur l’identité de la société étrangère et sur la parité de fusion.
Loi applicable.
Le mode de raisonnement suppose de distribuer la compétence législative comme en matière de mariage, chaque société est régie par sa lex societatis. Le non respect de l’une ou de l’autre des lex societatis peut se payer ensuite par la sanction de la nullité. Les causes de nullité son démultipliées par rapport à une fusion interne. La particularité c’est que pour les questions communes, il va falloir procéder à l’application cumulative des deux lex societatis.
La fixation de la date de la prise d’effet de la fusion [exemple du cumul et directive européenne].
Elle peut être fixée rétroactivement, suppose l’accord des deux lois en présence, si les deux lois ne sont pas d’accord, la réalisation pratique devra se faire d’après la loi la plus restrictive. Abouti à rigidifier l’opération, au plan civil la fusion transfrontière est délicate. Sur ce schéma de fond est intervenu la directive fusion transfrontière du 26 octobre 2005, transposée en 2008 en France. Elle ne se sépare pas des principes de droit commun, elle va faciliter la réalisation pratique de l’opération de fusion.
Pour cela, la directive maintient la compétence des lex societatis en amont du traité de fusion. La directive ajoute deux compléments essentiels, d’abord des règles matérielles uniformes qui ont pour but d’éviter les cas de cumul de lois. Aussi, la directive prévoit et organise l’intervention d’autorités nationales certificatrices de la fusion. On a supprimé toute possibilité de contestation après réalisation de la fusion, l’intervention de cette autorité contrôle l’opération.
Autorité compétente.
En France, l’autorité compétente est alternativement le greffier ou le notaire. Articles L236-35 et suivants du Code de commerce. Ces opérations de restructurations supposent des mouvements de patrimoine à patrimoine. Dans la version française on appelle cela une transmission universelle. En circonstance internationale il faudra prendre garde au pouvoir de veto que peut avoir la loi étrangère applicable à un élément d’actif isolé.
B – Opération de type expatriation.
Cette opération de type de l’arrêt Cartesio est appelé de façon classique transfert de siège ou changement de nationalité. Là aussi, il va avoir confrontation de deux lex societatis, il va falloir accorder l’une avec l’autre qui sont pour une même personne morale la lex societatis du pays de départ et la lex societatis du pays d’arrivée.
Pour une opération de ce type, on va devoir appliquer distributivement les deux lex societatis concernées, selon un critère chronologique. Il faut obtenir l’accord de la lex societatis du pays de départ plus dans le pays de départ la radiation de l’inscription, et dans le pays d’arrivée il faut l’accord de la lex societatis plus une inscription. Si cette opération se réalise valablement, la société va devoir changer sa structure pour fonctionner conformément au prescriptions de la nouvelle lex societatis. Cette opération pose deux problèmes.
Moment du point de rupture.
Pour que l’opération se réalise sans heurts, il faut qu’il y ait continuité de la personnalité morale, à défaut les conséquences fiscales peuvent être lourdes dans le pays de départ comme la taxation des plus-values latentes. En pratique, cela suppose que la radiation se fasse sous condition suspensive d’inscription dans le pays d’arrivé, et cela suppose dans le pays d’arrivé que l’inscription opère rétroactivement.
La protection des associés minoritaires et des créanciers.
L’opération de transfert de siège ou de changement de nationalité, au fond la qualification interne la plus exacte est une transformation. On va passer d’une forme de la lex societatis française à une forme distincte d’une autre lex societatis. C’est une transformation internationale de la société. Le changement de la forme peut impacter la situation des créanciers et des associés minoritaires. C’est le cas par exemple du passage à une forme sans capital minimum. La grande question est celle de la consécration d’un pouvoir de blocage dans le pays de départ bénéficiant aux minoritaires et aux créanciers extérieurs.
De tels pouvoirs de blocages étaient prévus dans le projet de directive de transfert de siège. Dans le droit international commun, ces pouvoirs de blocage n’existent pas de toute évidence. D’abord pour la protection des minoritaires, le pouvoir de blocage est celui qui se traduit en terme de vote, et c’est ainsi que pour la SARL et SA, le principe pour le changement de nationalité est celui de l’unanimité. Ces règles imposant l’unanimité sont fragilisées par la jurisprudence Cartesio. Pour les tiers, rien n’est prévu, et la seule chose possible serait par les ressources de la procédure civile : agir en référé préventif pour empêcher l’expatriation.
Première chambre civile, 30 mars 1971, C.C.R.M.A : seul hypothèse jurisprudentielle relative à une opération d’expatriation L’arrêt énonce que « si, en principe, la nationalité se détermine par la situation de son siège social, pareil critère cesse d’avoir application lorsque le territoire sur lequel est établi ce siège social, étant passé sous une souveraineté étrangère, les personnes qui ont le contrôle de la société et les organes sociaux investis conformément au pacte social ont décidé de transférer dans le pays auquel elle se rattachait le siège de la société afin qu’elle conserve sa nationalité et continue d’être soumise à la loi qui la régissait ». Cet solution répondait à une logique de protection économique.
3 – Lex societatis, loi de l’intermédiaire financier et loi du marché.
Rattachement premier de la lex societatis.
Les sociétés sont des outils de financement. Lois multiples que l’on peut rencontrer dans le cadre des titres financiers. Le principe est celui de l’arrêt Royal Dutch, selon lequel les obligations de la société envers ses actionnaires sont régis par la loi nationale de la société. Les rapports entre un actionnaire et la société, c’est la lex societatis. Cette loi seule détermine, quelque soit le pays où les titres sont détenus, les conditions dans lesquelles s’acquière, se conserve et se perd la qualité d’associé. Il s’agissait de titres au porteur émis par une société néerlandaise détenus dans différents pays. Quelque soit le lieu de détention physique des titres, les prérogatives liées à la détention se détermine selon la lex societatis.
Lois de police économiques.
Ce rattachement premier qui vaut encore aujourd’hui, cette compétence va être partagée dès que l’on va avoir recours au placement de ces titres par sollicitation du public. L’émission sur un marché entraine application de la réglementation protectrice du pays considéré. Le droit boursier est d’application territoriale impérative, la réglementation des placements des titres financiers auprès du public répond aux toutes premières lois de polices économiques, pour protéger l’épargne française. La loi du titre va être relayée par la loi de l’emplacement.
Législation consumériste.
Le dispositif spécial de protection des consommateurs dans la le Règlement Rome I et Bruxelles I. Le consommateur passif a droit à une protection, et un éventuel choix de loi dans le contrat ne peut le priver de cette protection. Il est dit que l’article 6 ne s’applique par aux droits et obligations qui constituent un instrument financier, ni aux obligations qui se nouent et dénouent au sein d’un système financier. La substance du titre financier reste intact. Si un titre étranger est coté en France, les opérations boursières sont régis par le système de la bourse. L’opération de démarchage d’un non professionnel en France et l’acquisition de produits s’analyse en une opération de consommation soumise à l’article 6.
A – Les titres cotés.
Loi de la Bourse.
Article L421-1 du Code monétaire et financier. On ne dit plus titre coté mais titre admis aux négociations au sein d’un marché réglementé, et depuis la directive MIF admission aux négociations au sein d’un système financier. Lorsqu’un titre est admis localement sur un tel système, le principe c’est que la circulation du titre ou l’octroi sur les titres de garanties particulières va être très largement attiré sous l’empire de la loi de la Bourse.
Système de l’agrément.
La directive MIF définit de manière uniforme ce qu’est un système financier : c’est une mécanisme géré par une entreprise privé qui fonctionne selon des règles non discrétionnaires et qui font l’objet d’un agrément par une autorité publique, et cet agrément vaut rattachement du système financier à la loi du pays qui l’a autorisé. C’est ce rattachement qui va donner la loi applicable aux opérations financières : si un titre américain subi une opération sur la Bourse allemande, il sera soumis à la loi allemande. Signifie aussi application de cette loi locale aux opérations boursières.
Fondements.
Une première idée tient à l’ordre public, d’ordre politique : le phénomène qui régit la cotation boursière est emprunte de protection également. Autre fondement plutôt technique lui, le système financier facilite la rencontre de multiples intérêt acheteurs et vendeurs représentés par des intermédiaires agréés eux-mêmes multiples : pour qu’un tel système fonctionne, il faut qu’une loi unique s’applique.
Offre publique d’achat.
Des offres publiques d’achat, il en survient des volontaires : prise de contrôle d’un émetteur en Bourse. Il y aussi des offres publiques d’achat contraintes, de source légale. Par exemple à chaque dépassement d’un seuil de contrôle significatif par un actionnaire, pour la protection des minoritaires la loi va contraindre à offrir à tous les autres le rachat de leur titres dans des conditions équitables.
Loi du marché de cotation.
En droit international privé, il y a une question de loi applicable, celle du marché de cotation. Question de compétence des autorités de contrôle : ce n’est pas l’Autorité de contrôle du pays de l’émetteur, mais celle du lieu de cotation. Dans le système français interne, le règlement général de l’autorité administrative qui contrôle les marchés financiers, l’ Autorité des marchés financiers, le règlement général de cette autorité précise les critères de sa compétence.
Règlement de l’Autorité des marchés financiers.
Ce règlement général précise les choses en fonction de l’origine de l’émetteur des titres. Il est dit que le règlement général s’applique obligatoirement aux société françaises qui sont cotées en France. Le règlement général s’applique également aux société étrangères cotées en France, mais il ne s’applique qu’en ses dispositions non contraignantes. La loi boursière française ne va pas intervenir dans le fonctionnement d’une société étrangère. Par exemple, les obligations de déclenchement d’offre publique ne jouent pas pour une société étrangère. Dernière règle, l’émetteur étranger peut décider lui-même de se soumettre à la plénitude de la compétence facultative et contraignante de l’Autorité des marchés financiers.
Titres cotés sur plusieurs marchés.
Comment est régie une offre publique transfrontière, le principe de base c’est un rattachement distributif. À chaque Bourse son offre publique d’achat est régie par son droit propre ce qui peut aboutir à des difficultés. Quant à la fixation du prix, il peut très bien ne pas l’être de la même manière sur les différents marchés. Pose des problèmes au plan du respect des actionnaires. En l’état du droit et en l’absence de convention internationale, c’est l’état du droit positif. En pratique, mouvement de coopération spontané qui consiste à déterminer une autorité administrative nationale principale qui va recevoir une compétence d’appui de l’autorité nationale dite subsidiaire
Dans l’espace européen, un tel processus a été mis en œuvre, affaire Arcelor cotée sur deux marchés. L’Autorité des marchés financiers et son homologue ont planifié les choses, il a été convenue qu’il y aurait une Autorité de cotation prépondérante. Ce système de coopération a été repris et codifié dans la directive OPA du 21 avril 2004 transposé à l’article L433-1 du Code monétaire et financier.
Directive OPA du 21 avril 2004.
Cette directive tranche la question de la compétence des autorités boursières, elle construit à partir du lieu de cotation et lex societatis.
–Lorsqu’une société donnée est cotée sur un seul marché financier, est applicable à l’offre publique d’achat la loi du marché.
–Une société est cotée sur deux marchés financiers distincts, dont le marché de son pays d’origine, est compétente l’autorité du pays d’origine.
–Si une société est coté simultanément sur deux marchés dont aucun n’est son pays d’origine, c’est l’Autorité du premier lieu de cotation qui sera compétente.
–Si une société décide de faire admettre au même moment ses titres dans deux marchés dont aucuns n’est son marché d’origine, autonomie de la volonté.
B – Les titres intermédiés ou multi-intermédiés.
Pour le placement interne et plus encore transfrontière des titres financiers émis par un émetteur, l’intermédiation bancaire est la règle. Cette intermédiation financière en pratique va prendre la forme de contrat et même d’ensemble de contrats, contrat de type mandat, de type commission entre le banquier et les investisseurs qui vont souscrire les titres.
Régime de détention au moyen des intermédiaires bancaires et d’inscription dans des comptes titres.
Soit des titres émis par une structure américaine, ces titres sont la propriété de particuliers français. Entre ces deux maillons, pour les aspects de détention, propriété du titre et garantie, il va avoir deux intermédiaires bancaires. Il y a le banquier de l’émetteur et le banquier de proximité du titulaire en France. On peut également passer par plus de pays. Les titres sont dématérialisés, trouve sa substance dans une inscription en compte. Le banquier américain va dans sa comptabilité ouvrir un compte pour le banquier français : sur les 100 actions, il y en a 20 pour le banquier français. La banque française peut ouvrir des comptes correspondant à la valeur de ces actions.
Prise de garantie sur des titres émis par une société étrangère. La tendance est de raisonner à partir des inscriptions, le problème c’est qu’il peut y avoir plusieurs inscriptions. L’inscription informatique n’est que la représentation numérique d’une relation contractuelle. Le risque est qu’un des banquiers distribue plus qu’il ne dispose, c’est le tirage sur la masse.
Loi de l’émission.
La loi applicable est la loi américaine, la loi de l’émission. Il faut se tourner vers la loi du pays d’origine. Pour des raisons de pure technique comptable et financière, les intermédiaires bancaires qui sont établis dans des pays autre que le pays d’émission ont besoin d’une loi de proximité pour réaliser les opérations locales de gestion patrimoniale de ces titres.
Loi du compte.
Il a été proposé un rattachement des opérations patrimoniales portant sur un titre inscrit en compte à la loi du compte pertinent, c’est un rattachement du type droit des biens : la loi applicable est la loi du compte concerné. C’est le choix qui a été opéré par la convention de la Haye de 2006 sur la loi applicable aux titres inscrits en compte, on applique la loi du compte pertinent. Pour déterminer la loi du compte, rattachement juridique qui va épouser son objet, le contrat : abouti à l’autonomie de la volonté. Cette solution libérale est bloquée par les pays européens comme la France.
Loi du pays de l’établissement de l’interrmédiaire.
C’est ainsi qu’est venu à l’idée de certains que la bonne opération est de ne pas les rattacher à la loi du compte, mais à la loi du pays de l’établissement de l’intermédiaire qui tient le compte. Cette règle était favorable aux banquiers du lobby, mais un des banquiers n’a pas compris. Ces solutions s’agissant des titres intermédiés aboutissent à ce que la loi diverge à chaque degré, à chaque inscription en compte son droit.
Chapitre 5 : La place des États.
La question de l’État constitue la pire des obsession en le sens que tout le monde y pense mais que personne n’en parle. La CNUCED a tenté de faire émerger le concept d’État catalysateur, notamment dans le domaine des investissements. L’État se présente comme une interface des intérêts étrangers à l’intérieur et des intérêts privés à l’étranger. Pour remplir ce rôle de prise en charge d’interface pour les opérations dans le commerce international, engagements de l’État.
Section 1 : Les engagements privés de l’État.
Les engagements.
On parle d’engagements qui sont souscrits par la voie conventionnelle, d’engagements contractuels, mais dans certaines circonstances la loi peut servir d’équivalent fonctionnel au contrat notamment sur impulsion des investisseurs.
L’État.
Démembrement local et fonctionnel.
D’un point de vue extérieur celui reconnu par ses tiers. Doivent être assimilés à l’État ses démembrements locaux ou fonctionnels, comme une autorité administrative indépendante. Le démembrement local ce sont les collectivités, État fédérés ou canton. On rencontre des engagements privés pris par-delà les frontières entre des entités locales. Ces démembrements doivent être assimilés à l’État.
Émanation de forme privé.
D’autre part, des émanations de forme privé, à propos desquelles la jurisprudence à eu l’occasion de développer le concept d’émanation d’État. On vise des entités privées constituées sous une forme indépendante de l’État, mais une entité privé qui se trouve être sous le contrôle de droit ou de fait de l’État, et dont le patrimoine se distingue mal de l’État.
Première chambre civile, 14 novembre 2007, Winslow : contentieux banquier parisien et République du Cameroun. Cette dernière n’a pas de bien saisissable en France. Le banquier saisi les biens de la société national camerounaise d’hydrocarbure sous forme privée. La Cour fait droit à la demande du banquier, la saisie des biens de l’émanation est régulière parce qu’elle n’était pas statutairement dans une indépendance fonctionnel suffisante pour bénéficier d’une autonomie de droit et de fait à l’égard de l’État, et son patrimoine se confondait avec l’État.
L’État contractant n’est pas un contractant comme les autres, c’est une partie formellement hyperforte : immunités souveraines.
1 – Immunités souveraines.
A – Sources du droit des immunités.
Le principe des immunités appartient au vrai droit supranational, c’est la coutume du droit international privé. D’ailleurs la Cour de cassation rend parfois hommage à cette origine lorsqu’elle cite les principes relatifs aux immunités. Ce droit coutumier est silencieux quant au contours de l’immunité, il garde silence quant au régime concret des immunités de l’État. Pendant plus de trente ans, la Commission de droit international s’est penchée sur cette question. Les débats entre savants à l’ONU se sont soldés par une convention en 2004 sur les immunités. La conséquence, c’est que s’agissant de la France, ce sont les sources internes et spécifiquement la jurisprudence du droit international privé qui a pris le relai et fixé les contours. Dans d’autres pays c’est parfois la loi.
B – Histoire française des immunités.
1849, immunité absolue.
Cour de cassation, 1849, Casaux : cet arrêt a fixé le domaine des immunités autour d’un critère formel et subjectif, il faut que la partie au procès soit une entité publique et/ou étrangère. Il faut que ce soit un acte imputable à un gouvernement étranger, donc tous les biens de ces gouvernements sont protégés.
1929, point de rupture.
Cour de cassation, 1929, Représentation commerciale des Soviets : n’a pas droit à l’immunité de juridiction parce que même si ces actes manifestent l’intervention de l’URSS, ils représentent des actes de commerce auxquels le principe de souveraineté des États demeurent totalement étranger. Quand l’État prend en charge des activités de nature commerciale, il ne bénéficie pas de son statut privilégié de souverain étranger.
On est passé d’une immunité absolue à une immunité relative. On distingue donc entre les actes passés jure imperi et les actes passés jure gestionis.
Personnes privées investies d’un service public.
Immunité fonctionnelle, si elles représentent l’État ponctuellement pour l’accomplissement d’un service public, elle bénéficie des immunités.
C – Régime positif.
Immunités fonctionnelles dont les critères techniques sont distincts. Certains actes bénéficient de l’immunité de juridiction, et certains biens bénéficient de l’immunité d’exécution.
Immunité de juridiction.
Première chambre civil, 25 février 1969, Levrant Express Transport : bénéficie de l’immunité de juridiction les actes quel qu’en soit l’auteur, personne publique ou non, accomplis par exercice de la puissance publique ou dans le cadre de l’accomplissement d’un service public. Critère français de l’administratif. Une tendance est à l’œuvre au rétrécissement du champ des immunités.
Chambre mixte, 2004, Soliman : employée comme agent de propreté dans une ambassade. Elle n’a pas été affectée à un régime de sécurité sociale. On rétorque immunité de juridiction. La Cour dit que l’acte consistant à affilier un employer est neutre, donc cet acte là n’est pas couvert par l’immunité des actes administratifs, c’est un acte ordinaire. La Cour ne regarde pas globalement le champ d’activité, elle regarde la nature de l’acte litigieux. Comme tous les privilèges, l’immunité est susceptible de renonciation.
Immunité d’exécution.
Cour de cassation 14 mars 1984, Eurodif : l’idée c’est que les biens souverains doivent être protégés. Comment déterminer si un bien est un bien souverain. La Cour a posé une distinction qui est fonction de l’identité du propriétaire et qui a recours à la technique de la présomption. La distinction distingue l’État propriétaire et d’autre part les entités distinctes de l’État. Quand le bien appartient à l’Etat, tous les biens sont présumés couverts par l’immunité sauf ceux dont le créancier saisissant démontre qu’ils sont affectés à l’activité privée litigieuse. Il n’y a que les créanciers dont la créance est née au titre de l’activité litigieuse qui peuvent saisir le bien. Permet d’éviter que des créanciers de droit public de l’État étranger ne viennent chercher l’exécution sur les biens privés situés à l’étranger.
Cour de cassation, 1 octobre 1985, Sonatrach : entités distinctes propriétaires, les biens ne sont pas couverts par l’immunité sauf si le propriétaire apporte spécialement la preuve que tel ou tel bien est affecté à un service régalien.
2 – La figure du contrat d’État.
C’est une figure abstraite qui recouvre des situations variées. Ce sont généralement des opérations de longue durée, mais aussi des contrats permettant de réaliser un investissement local, et très fréquemment le contrat passe par une concession publique et ces opérations ont pour contrepartie un transfert de technologie. Le trait commun est qu’il y a un intérêt économique commun et l’intervention de l’État. L’État s’interpose entre les opérateurs privés en représentation des intérêts locaux.
A – Questions théoriques.
Nature des State contracts.
Enracinement dans le traité.
On pourrait concevoir que ces contrats particuliers se localisent sous l’empire du vrai droit international, au fond on pourrait fournir de ces contrats une analyse analogue aux traités. Le contrat d’État a une nature analogue à celle d’un traité, c’est un acte passé entre une entité privée et un État, seule différence. Les sujets du droit international public ne sont pas seulement des États dans cette optique. L’avantage de cette théorie, appelée théorie de l’enracinement, est qu’elle fait bénéficier au particulier de la protection qui existe dans le droit coutumier international. L’inconvénient de cette théorie est que la droit international général n’a pas été fait pour cela, il s’est construit sur le postulat de base qu’il avait pour objet les États.
Enracinement dans l’ordre interne.
Seconde option théorique, celle selon laquelle le contrat serait enraciné dans l’ordre interne de l’État contractant. Ce modèle peut être justifié par l’idée d’une compétence exclusive de l’État à raison de son service public, mais aussi par le fait que le marché territorial d’économie locale est concerné.
Cour international de Justice, 1929, Emprunts serbes et brésiliens : tout engagement de l’État qui ne prend pas la nature d’un traité entre État s’enracine dans le droit interne. Les engagements se distinguent en deux sous groupes, les engagements privatifs d’un État qui revêt la forme d’un Traité et les autres. Il y a une assez forte opposition des intérêts en jeu. Pour la personne privée, la théorie de l’enracinement est naturellement moins sécurisante. L’opposition des intérêts se résout de façon pratique par une optimisation des clauses du contrat.
B – Réaction pratiques.
Neutralisation contentieuse.
Lorsqu’un opérateur passe un contrat étranger, peut le passer sous le régime du droit administratif interne. Tout au contraire de cela, l’opérateur peut chercher à neutraliser les pouvoirs normatifs via des clauses. On peut opérer une neutralisation en circonstance contentieuse, cela supposera d’insérer des clauses spécifiques de règlement des différends, clause d’arbitrage. Lorsque l’État s’accorde sur l’arbitrage, emporte renonciation de ses privilèges. Désignation d’un juge neutre possible également.
Neutralisation non contentieuse.
Neutralisation non contentieuse, au plan du droit applicable, elle passe par la stipulation de clause de choix de la loi applicable, externalisation du droit applicable possible. Autonomie de la volonté utilisée comme un contrepoids. Il est possible d’accepter d’être soumis à la législation de l’État contractant avec une clause de stabilisation ou de gel.