Cours de droit du travail

DROIT DU TRAVAIL (L3)

  Le cours de droit du travail a pour objectif de présenter les acteurs et les principales réglementations du travail en France. Sont notamment évoqués le contrat de travail, les syndicats, les conventions collectives de travail… Le cours de droit du travail porte aussi sur l’analyse des principales règles du contrat de travail et, notamment, sur les obligations du salarié, les obligations de l’employeur et la fin des rapports de travail.  

Introduction.

             Le terme de droit du travail est récent ; avant 1950 on parlait de législation industrielle. Ce changement s’explique par l’extension du champ d’application de cette discipline à l’ensemble de tous les travailleurs subordonnés et non les seuls travailleurs de l’industrie. De plus, la généralisation de la sécurité sociale en 1945 a conduit à séparer le droit du travail du droit social (droit de la sécurité sociale et protection sociale niveau M1).

 Section I : Présentation du droit du travail.

  • 1 : L’objet du droit du travail : le travail subordonné.

            Le droit du travail régit l’ensemble des rapports juridiques qui naissent du contrat de travail subordonné ou dépendant. Il ne régit que le travail pour le compte d’autrui. Il ne concerne donc pas le travail de celui qui œuvre pour son propre compte (travailleur indépendant). Le droit du travail ne saisit pas toutes les formes d’activité professionnelle, mais uniquement le travail subordonné.

            La notion de subordination a connu des évolutions contrastées. Il se définit comme un lien juridique et non comme une dépendance économique. La subordination juridique est définie dans un arrêt de principe du 13 novembre 1996, Société générale c/ URSAF de la Haute Garonne, Droit social 1996, p. 1067 : le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Du fait de cette subordination, le droit du travail a une fonction de protection du salarié. En raison de sa situation de dépendance, le salarié doit être protégé contre l’arbitraire de l’employeur. Il n’y a pas cependant qu’une protection unilatérale du salarié. Le droit du travail contemporain est aussi un droit de l’organisation de l’entreprise et du marché. Une des finalités majeures du droit du travail et de rechercher et de favoriser l’emploi.

 

  • 2 : Le contenu du droit du travail.

 

            Le droit du travail règlemente les rapports individuels mais aussi les rapports collectifs. Les relation individuelles sont celles qui naissent du contrat de travail conclu entre l’employeur et le salarié : conclusion, exécution et rupture du contrat de travail. Les relations collectives sont celles qui se nouent entre un employeur ou un groupement d’employeur et un groupement de salariés.

            La représentation collective des salariés fonctionne dans les entreprises selon un système dualiste. D’une part, une représentation élue par les salariés composée des délégués du personnel élus dans les entreprises de plus de 11 salariés et d’un comité d’entreprise pour les entreprises de plus de 50 salariés. Les délégués présentent au chef d’entreprise toutes les réclamations individuelles et collectives des salariés. Le CE est présidé par le chef d’entreprise et est composé de membres élus par les salariés. Le CE a des pouvoirs importants mais limités d’information et de consultation sur le fonctionnement de l’entreprise et ce tant sur les questions économiques (fusions, délocalisation,…) que sur des questions professionnelles (licenciement économique,…). Le CE a des attributions décisionnelles pour la gestion des activités sociales et culturelles au bénéfice des salariés. D’autre part, il existe une représentation désignée par les syndicats, en particulier avec la désignation du délégué syndical dans les entreprises de plus de 50 salariés. La mission de ce dernier consiste à présenter les revendications du personnel et à négocier dans l’entreprise avec le chef d’entreprise.

            Le droit syndical fait partie du champ des relations collectives du droit du travail. La liberté syndicale comporte deux aspects. D’une part, par un aspect individuel qui se traduit par la liberté individuelle dont chacun dispose de se syndiquer au syndicat de son choix. D’autre part, par un aspect collectif qui consiste en la liberté de création et de fonctionnement des syndicats. Cela se traduit par un pluralisme syndical et de la division syndicale. Le droit français consacre l’égalité entre les syndicats, toutefois l’octroi des prérogatives particulièrement importantes n’est accordé qu’aux syndicats les plus représentatifs. Au niveau national, cinq confédérations sont dites représentatives : la CGT, la CFDT, la CFTC, FO et la CFE/CGC.

De plus, la négociation collective et les conventions collectives de travail sont un autre domaine des relations collectives. Les organisations syndicales représentatives des salariés négocient avec l’employeur ou avec des groupements d’employeurs des accords et conventions collectifs qui traitent des conditions de travail, d’emploi et des garanties sociales. Il existe en France plusieurs niveaux de conclusion des accords : interprofessionnel, professionnel, groupe et entreprise ou établissement.

            Le droit des conflits collectifs du travail constitue un autre pan des relations collectives avec le droit de grève qui se définit comme le droit de cesser le travail de manière collective et concertée en vue d’appuyer des revendications professionnelles. Le droit de grève n’est pas un droit collectif réservé aux syndicats, mais un droit individuel du salarié qui doit être exercé collectivement.

 

  • 3 : Le champ d’application du droit du travail.

 

            Les relations de travail pour le compte d’une entreprise privée font partie du champ du droit du travail. L’employeur peut être une personne morale ou physique. Le droit du travail ne s’applique pas uniquement aux travailleurs du secteur privé, certains salariés du secteur public sont concernés.

            Il faut distinguer plusieurs situations, même si les frontières ne sont pas franches entre l’application du droit public et du droit privé aux travailleurs subordonnés. Une grande partie des travailleurs du secteur public sont des fonctionnaires : le droit du travail ne leur est pas applicable, leur situation étant régie par un statut et non par un contrat conclu avec l’employeur. Le statut de fonctionnaire n’empêche pas la reconnaissance dans certains cas d’un contrat de droit privé : c’est le cas pour la mise à disposition et le détachement de fonctionnaires auprès d’un organisme privé.

            Certains personnels employés par l’Etat ou les collectivités publiques sont recrutés en dehors des statuts des fonctionnaires : il faut distinguer selon si la personne est gestionnaire d’un SPIC ou d’un SPA. Dans le premier cas, les personnels sont soumis au droit du travail sauf exception. Dans le second cas, le tribunal des conflits à opéré un revirement : TC 25 mars 1996, Berkani : les personnels non statutaires travaillant pour le compte d’un SPA sont des agents contractuels de droit public quelque soit leur emploi. Depuis ce revirement, ces personnels de droit public non fonctionnaires sont exclus des statuts de la fonction publique mais aussi du champ d’application du droit du travail. Toutefois, ponctuellement, le Conseil d’Etat décide de leur déclarer applicables les principes généraux du droit du travail, sous réserve des règles régissant le service public. Par exemple une femme enceinte ne peut être licenciée, une rémunération u moins égale au SMIC doit être versée, les sanctions pécuniaires sont interdites, le contrat de travail est immutable,… La personne publique gestionnaire d’un SPA peut recruter des contractuels de droit privé pour répondre à des besoins collectifs ou favoriser l’emploi de personnes défavorisées. Exemples : contrats d’avenir, contrats d’accompagnement dans l’emploi. Les salariés des personnes publiques à statut (SNCF, RAPT) sont liés à leur entreprise par un contrat de travail de droit privé régit par le Code du travail. Cependant, coexiste avec le contrat de travail un statut particulier de nature règlementaire. Dans ce contexte, l’application du droit du travail à ces personnels fait l’objet de divergences en jurisprudence. Selon la Cour de cassation, le droit du travail doit s’appliquer sauf si la disposition statutaire est plus favorable. Pour le Conseil d’Etat, les dispositions du Code du travail ne s’appliquent que dans le silence du statut ou si les dispositions du Code visent expressément les entreprises publiques. A défaut ne s’appliquent que les PGD du travail.

 

Section II : Aperçu historique du droit du travail.

 

            Le droit du travail ne se confond pas avec l’histoire du travail, c’est-à-dire que le droit du travail est un droit récent dont le début est marqué par la loi du 28 mars 1841.

 

  • 1 : L’époque classique.

 

A/ Le libéralisme.

 

            Jusqu’au début du XIX° siècle, il n’existe pas de droit spécifique au travail. Les relations de travail sont régies par les règles du Code civil qui consacre deux articles au louage de service dont l’ancien article 1781 du Code civil : « Le maître est cru sur sa seule affirmation pur la quotité des gages ». Le travail est une marchandise et le travailleur est réduit à l’état d’objet. L’évolution postérieure a consisté à reconnaître le travailleur comme personne titulaire de droits.

Les idées libérales prospèrent. Le décret d’Allarde du 2 et 17 mars 1791 pose le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. L’individualisme conduit, par réaction aux corporations et aux jurandes de l’Ancien Régime, à l’interdiction des coalitions et des groupements professionnels. En conséquence, il n’y a pas de réglementation professionnelle en raison de l’interdiction posée par la loi Le Chapelier du 14 et 17 juin 1791. Les conséquences du libéralisme et de l’industrialisation ont conduit à une grande précarité de la classe ouvrière qu’un rapport du docteur Villermé met en évidence (rapport sur l’état physique et moral des ouvriers employés dans les manufactures de lin, coton, soie et laine). A cette situation critique répondent des mouvements collectifs violents dans les années 1830-1840 avec la révolte des canuts à Lyon.

 

B/ L’interventionnisme de l’Etat.

 

            La monarchie de juillet st à l’origine de la première loi sociale du 22mars 1841 : le travail des enfants de moins de 8 ans est interdit dans les manufactures et dans les mines. Mais cette loi n’a jamais été appliquée. L’avènement de la deuxième République conduit à un essor du droit des travailleurs avec le droit au travail et le droit d’association. Cependant l’échec de la Révolution de 1848 entraîne la disparition rapide de cette législation. C’est sous la III° République que le droit du travail s’est construit dans les différents domaines. Ces textes constituent l’avènement des droits collectifs, fondement de l’essor du droit du travail. Deux lois interviennent.

            La loi Waldeck-Rousseau du 21 mars 1884 abroge la loi Le Chapelier. La liberté d’association professionnelle est reconnue et les syndicats naissent. Déjà en 1864 le délit de coalition, prévu par la loi Le Chapelier, avait été supprimé.

            La loi du 25 mars 1919 donne un statut juridique aux conventions collectives et sera le point de départ de la politique conventionnelle, centrale aujourd’hui en droit du travail. Sous l’influence des syndicats, différents aspects  des relations de travail ont été règlementées : hygiène, sécurité,… Une loi du 9 avril 1898 porte sur la réparation des victimes d’accidents du travail. Elle est complétée par la mise en place d’un régime d’assurance sociale. La durée du travail est règlementée sous la III° République : repos hebdomadaire (1906), journée de 8 heures et semaine de 48 heures (1919). Concernant la rupture du contrat de travail, deux lois imposent un délai de préavis et sanctionnent les abus en matière de licenciement (1888 et 1928).

 

  • 2 : Le droit du travail contemporain.

 

            Quatre facteurs ont conduit à l’évolution du droit du travail et à son émancipation par rapport au droit civil :

–          Le droit du travail est lié à la conjoncture politique ;

–          Il est tantôt du droit privé, tantôt du droit public :

–          C’est un droit lié à l’état de l’économie ;

–          Il existe des syndicats libres et des communautés d’intérêts.

 

A/ L’Etat providence.

 

            A partir de 1936, les apports du Front Populaire ont été nombreux dans un contexte de crise économique et d’unité syndicale. Suite aux grèves générales de mai et juin 1936, les accords de Matignon sont signés entre la CGT et la CGPF le 7 juin 1936. Ces accords ont été relayés par des lois en 1936. Ces lois portaient sur la semaine de 40 heures, 2semaines de congés payés, refonte des conventions collectives et création d’une amorce de représentation collective dans les entreprises (en 1946, délégués du personnel), procédure de règlement pacifique des conflits du travail, …

            La période de l’après Libération voit la création de la sécurité sociale par l’ordonnance du 4 octobre 1945. Les comités d’entreprise sont créés par une ordonnance du 22 février 1945. Sous la IV° République, la Constitution reconnaît dans son préambule des droits sociaux fondamentaux. La loi du 11 novembre 1950 créé un cadre juridique nouveau pour les conventions collectives et un salaire minimum légal, le SMIG devenu SMIC en 1970. Les débuts de la V° République voient la mise en place de deux politiques :

–          la participation financière des salariés aux résultats de l’entreprise (intéressement/participation) : ordonnances de 1959 et 1967 ;

–          la politique de l’emploi, avec en 1958, l’assurance chômage ; en 1963, Fonds National pour l’Emploi ; en 1967, l’ANPE.

Les évènements de 1968 conduisent à des négociations et à un constat appelé protocole de Grenelle. La loi du 27 décembre 1968 reprend les accords de Grenelle et reconnaît le droit pour les salariés de se grouper en sections syndicales, de désigner des délégués syndicaux dans l’entreprise. En 1968, le SMIG est augmenté de 35%.

 

B/ Le droit du travail sur fond de crise. (1975-2005).

 

            Le droit du travail est un droit vivant, sensible aux mutations de son environnement. Plusieurs facteurs ont pesés sur les dernières évolutions. Dès 1975, le contexte est à la crise économique et au chômage. Aujourd’hui on compte 9,9% de chômeurs. La mondialisation entraîne des délocalisations, du dumping social,… La composition de la main d’œuvre se modifie :

            – baisse des emplois industriels et augmentation des emplois tertiaires ;

            – entrée es femmes sur le marché du travail ;

            – développement de formes atypiques d’emploi (à relier avec la flexibilité de l’entreprise).

            – crise du syndicalisme.

            Après 1981, les ressources humaines se mobilisent autour de l’idée de citoyenneté dans l’entreprise. A la suite du rapport de Jean Auroux, un train de réformes a été adopté pour élargir les droits des salariés dans l’entreprise. Quelles sont ces réformes ?

            Une série de réforme intervient en 1982 par des ordonnances sur la durée de travail (39 heures) et sur les congés payés (5° semaine), sur le travail précaire et sur le temps partiel. Les lois Auroux, au nombre de 4 portent sur :

–          Les libertés des travailleurs dans l’entreprise : droit disciplinaire, règlement intérieur, droit d’expression des salariés (Loi du 4 août 1982) ;

–          Les institutions représentatives du personnel (Loi du 28 octobre 1982) ;

–          La négociation collective et le règlement des conflits collectifs du travail (Loi du 13 novembre 1982) ;

–          Le Comité d’Hygiène et de Sécurité dans les Conditions de Travail (23 décembre 1982).

En 1986, changement de majorité et de perspectives : le remède à la crise est dans la flexibilité de l’emploi et dans une déréglementation visant à éliminer les contraintes pesant sur les entreprises. Ces actions ont eu des effets limités sur le droit positif. La suppression de l’autorisation administrative préalable au licenciement économique a conduit à un contrôle judiciaire plus lourd. L’assouplissement des conditions d’utilisation du travail précaire dont le texte a été abrogé en 1990 a eu des effets sur le droit positif.

            Les majorités de droite ou de gauche donnent toujours la priorité à la lutte contre le chômage et à une politique de l’emploi. La divergence se situe au niveau des moyens. L’idée de partage du temps de travail est reprise par les différents ministre du travail : loi de Robien 1996, loi Aubry 1 et 2 (1998 et 2000). D’autres textes ont cherché à prévenir ou encadrer le licenciement économique, dans une logique de flexibilité. On peut parler d’une logique négociée des restructurations avec les lois Fillon 1 et Borloo de cohésion sociale du 18 janvier 2005. Création du contrat nouvelles embauches, dans lequel les règles sur le licenciement sont

écartées pendant les deux premières années d’existence du contrat par ordonnance du 2 août 2005. Les lois des trente dernières années n’ont pas toutes atteint leur objectif, d’où des amortisseurs : création du RMI en 1988, et la loi sur la lutte contre l’exclusion sociale de 1998. Depuis les années 70, les lois ont ébranlé les objectifs du droit du travail. Le rôle protecteur est affaibli et il y a une crise de la dimension collective du droit du travail.

 

Première partie : La diversité et l’articulation des sources du droit du travail.

 

            Les sources sont multiples, aussi bien internationales qu’internes, légales et conventionnelles mais aussi des pratiques.

Chapitre I : Les sources à caractère international.

Section I : Le droit international du travail.

            Les traités et accords internationaux ont une importance particulière en droit du travail. Ils sont de deux sortes, d’une part des accords bilatéraux conclus entre la France et un pays étranger et qui définissent le régime du travail des salariés migrants ; d’autre part, il existe des conventions multilatérales organisées par l’OIT.

L’OIT est une institution de l’ONU spécialisée dans les problèmes du travail. L’OIT comporte un organe administratif permanent, le BIT et d’autre part un organe délibérant non permanent qui est appelé la Conférence internationale du travail. Cette conférence se réunit une fois par an à Genève et elle est composée de délégations des Etats membres de l’OIT. L’originalité de ces délégations est d’être tripartite, c’est-à-dire qu’elles sont représentées de deux représentants du gouvernement, d’un délégué des organisations représentatives d’employeurs, et d’un délégué des organisations représentatives de salariés. Les conventions de l’OIT sont adoptées par la conférence à la majorité des deux tiers des délégués présents. Une fois adoptées, elles sont soumises à la ratification des Etats membres, ce qui leur donnera force obligatoire en droit interne en vertu de l’article 55 de la Constitution.

 

Section II : Le droit européen du travail.

  • 1 : Le droit social européen non communautaire.

            Pour l’essentiel ce droit résulte des conventions qui sont élaborées par le Conseil de l’Europe situé à Strasbourg. Parmi les principales de ces conventions ratifiées tardivement par la France, on peut citer la CESDH et des libertés fondamentales. Cette convention est relative aux droits de l’homme, son respect est soumis au contrôle de la CEDH. Cette convention a un effet direct horizontal et peut être invoquée par un particulier dans un litige du travail devant le juge national. Deux articles posent les principes essentiels concernant les travailleurs : l’article 4 qui interdit le travail forcé ou travail obligatoire ; l’article 11 affirme la liberté syndicale. D’autres articles plus généraux de la convention ont été sollicités dans le contentieux et servent de référence pour garantir à la fois des droits substantiels et processuels. Une illustration nous en est donnée par l’article 6 de la CESDH qui affirme le droit de toute personne à un procès équitable. La Cour de cassation a appliqué ce texte en matière de procédure prud’homale notamment quant à l’impartialité des juridictions et quant à l’incapacité et à la tarification en matière d’accident du travail. Elle l’a appliqué à la question des lois de validation. Une autre illustration nous est donnée par l’article 8 de la CESDH portant sur le respect de la vie privée et familiale : condamnation d’une clause de mobilité et de transfert du domicile. Le refus fait à l’employeur d’accéder aux mails du salarié qui se trouvait sur son ordinateur dans l’entreprise a été fait par la Cour de cassation.

            La charte sociale européenne signée en 1961, à Turin et révisée à Strasbourg en 1996. C’est une convention qui traite de nombreux aspects des politiques sociales et qui fixe des droits et principes, tels le droit à la dignité au travail, le droit à protection contre la pauvreté et l’exclusion. La ratification constitue un engagement sur 16 des 31 droits.

 

  • 2 : Le droit de l’Union Européenne.

            A la différence des normes précédentes, l’intégration dans le cadre de l’UE est plus poussée car il n’est pas nécessaire dans tous les cas que ces normes soient ratifiées pour être appliquées en France. Le système est la primauté du droit communautaire. Les traités constitutifs : Paris 1951-2001 : CECA ; Rome 1957 : CEE, CEEA. Des traités postérieurs ont modifiés ces traités originaires dont celui de Maastricht, créateur de l’UE en 1992, modifié par le traité d’Amsterdam en 1997 et par le traité de Nice en 2001. À ces traités s’ajoute le droit dérivé : les actes unilatéraux adoptés par les institutions de l’UE : le règlement à portée générale et directement applicable dans les droits nationaux sans nécessité de mesure de transposition par les Etats membres. La directive lie les Etats quant à la fin mais laisse les Etats libres quant aux moyens d’où transposition. La décision a un effet direct mais n’est obligatoire que pour les destinataires qu’elle désigne, Etat ou entreprise. Les recommandations ou avis n’ont pas de caractère contraignant.

Les apports et l’influence du droit de l’UE sur le droit français sont nombreux et en expansion. On peut les synthétiser en trois volets à partir des méthodes et des objectifs de l’UE. Le premier volet est un droit de l’unification sociale : il s’agit des règles qui organisent le dialogue social européen ou encore qui créent des instruments financiers tels que les fonds structurels ou les règles qui organisent la libre circulation et la mobilité des travailleurs dans l’UE. Le second volet est un droit de l’harmonisation sociale qui vise à garantir au sein de l’UE des droits socialement équivalents. Les réalisations par directives de l’Europe sociale sont nombreuses : égalité entre les sexes, lutte contre les discriminations, protection de l’emploi, santé et sécurité, information et consultation des représentants des travailleurs. Le troisième volet consiste à coordonner les politiques et droits nationaux. Se trouvent ici les normes qui organisent la protection sociale des personnes qui se déplacent au sein de l’UE. Au-delà, on peut y rattacher une méthode appelée MOC issue de la soft law qui vise non pas à adopter des actes contraignants mais à créer des convergences entre les politiques nationales en matière d’emploi ou de lutte contre l’exclusion sociale. Dans nombre de ces domaines, les apports jurisprudentiels de la CJCE notamment dans sa fonction d’interprétation du droit communautaire, sont tout à fait décisifs et novateurs. Les arrêts rendus par la Cour de justice ont fortement imprégnés le droit français que se soit sur la notion de discrimination indirecte ou de transfert d’entreprise. Cette interprétation est d’autant plus déterminante que le la loi française dot être interprétée par le juge national à la lumière de l’interprétation fournie par le juge communautaire.

 

Chapitre 2 : Les sources nationales ou internes.

Section I : Les sources étatiques.

  • 1 : Les règles constitutionnelles.

Il y a une constitutionnalisation croissante du droit du travail qui va de paire avec un regain d’intérêt pour la protection des libertés et droits fondamentaux. Les bases se trouvent dans le préambule de la Constitution de 1946, repris par celui de 1958, qui affirme des droits sociaux particulièrement nécessaires à notre temps : droit au travail, c’est-à-dire le droit d’obtenir un emploi et le devoir de travailler, le droit à la non discrimination, liberté syndicale, égalité homme/ femme, droit de grève, droit à la sécurité sociale et le droit de participation. Ce droit recouvre le droit à la négociation collective ainsi que le droit des salariés de participer à la gestion des entreprises. Le Conseil constitutionnel est amené à concilier ces droits avec d’autres qui sont issus de la DDHC tels que le principe d’égalité, le droit de propriété, la liberté d’entreprendre.

 

  • 2 : La loi et les règlements.

            C’est la Constitution qui fixe les domaines respectifs de la loi et du règlement, sachant que la loi fixe les principes fondamentaux du droit du travail et du droit syndical, le reste étant renvoyé au règlement. Le gouvernement a beaucoup utilisé la possibilité de l’article 38 de la Constitution qui consiste à légiférer par voie d’ordonnances comme en 1982, 1986 et en 2005. Par ailleurs, il existe une tendance importante en droit du travail au développement des lois négociées. C’est-à-dire que le gouvernement dans le cadre de la politique contractuelle, qui privilégie le dialogue social, se borne à ratifier le résultat d’une négociation préalable entre les partenaires sociaux. Exemple : accord national interprofessionnel qui a précédé la loi de 1990 sur le travail précaire ; idem en 1989 sur le licenciement économique ; idem en 2004 sur la formation tout au long de la vie professionnelle.

La plupart des textes législatifs et règlementaires ont fait l’objet d’une codification dont la dernière date de 1973. Les dispositions codifiées sont divisées en trois parties : une première législative, une deuxième réglementaire (règlement d’administration publique et décrets en Conseil d’Etat), une troisième contenant les décrets simples.

Quant à l’application de la loi dans le temps, on applique le droit commun (art. 2 Code civil).

 

  • 3 : La jurisprudence.

C’est une source essentielle en droit du travail dont on peut observer le développement. Ainsi, le juge social a vu une progression de son rôle, dans la mesure où la loi oblige le juge à effectuer des contrôles ne lui incombant pas jusqu’ici (cf. licenciements, droit disciplinaire).

En outre, on peut observer le développement de la contestation judiciaire (cf. judiciarisation des relations sociales). Ainsi, la chambre sociale de la Cour de cassation connaît plus du tiers des affaires parmi les chambres civiles, et ce malgré le transfert depuis 2003 du contentieux de la sécurité sociale, à la deuxième chambre civile de la Cour de cassation.

Il existe en matière sociale une grande dispersion du contentieux, fruit d’une répartition des compétences entre plusieurs catégories de juridictions. Ainsi, des juridictions civiles avec le Conseil des Prud’hommes, compétent en matière de litiges individuels du droit du travail, et le TGI compétent en matière de litiges collectifs sauf sur les questions de représentation élues ou désignées, ces questions relevant de la compétence du tribunal d’instance. Ensuite, les juridictions pénales appliquant un droit pénal du travail. Enfin, les juridictions administratives, l’administration du travail (via l’inspection du travail essentiellement) est amenée à exercer un certain nombre de contrôles sur recours classiques.

Du fait de la dispersion du contentieux, il existe un risque de contrariété entre les décisions rendues.

 

Section 2 : Les sources professionnelles.

 

Sous section 1 : Les normes issues de la négociation collective (conventions et accords collectifs).

 

  • 1 : Les conventions et accords collectifs.

 

Ce sont la principale catégorie de sources professionnelles du droit du travail. Ces conventions et accords sont l’expression normale du droit des salariés à la négociation collective consacré par la Constitution ainsi que la loi.

La convention collective se définit comme un accord conclu entre un ou plusieurs employeurs ou groupement d’employeurs (syndicat ou autre) et une ou plusieurs associations syndicales, représentatives des salariés, en vue de fixer en commun les conditions d’emploi, de formation professionnelle et de travail et les garanties sociales.

L’accord collectif a un objet plus ponctuel puisqu’il ne traite que d’un ou plusieurs sujets dans cet ensemble (salaires, durée et temps de travail…).

L’acte collectif est un acte singulier puisqu’il lie non seulement les parties signataires (aspect contractuel), c’est l’effet obligatoire, mais aussi l’ensemble des salariés qui entrent dans son champ d’application (aspect réglementaire), c’est l’effet normatif.

 

 

  • 2 : Les rapports entre la loi et les conventions et accords collectifs.

 

Le droit des conventions et accords collectifs est né en 1919, ce droit ayant fait l’objet de nombreuses réformes (Auroux, 13 novembre 1982 ; Fillon IV du 4 mai 2004). Ces réformes ont cherché à organiser et à promouvoir l’autonomie collective des partenaires sociaux (cf. négociation dans l’entreprise ayant acquis peu à peu une place centrale dans le système conventionnel, a fortiori dans la loi Fillon IV sur le dialogue social). Les accords et conventions collectives en tant que source de droit, soulèvent quelque soit leur niveau de conclusion, la question de leur rapport avec les règles du Code du travail.

En droit commun, prévaut le principe selon lequel on ne peut déroger par des conventions particulières aux lois d’ordre public (cf. 6 Code civil). En droit du travail, les principes sont différents car l’ordre public est surtout un ordre public de protection du salarié. Dès lors, il ne s’oppose pas à ce que des garanties ou des avantages soient accrus ou institués par la voie conventionnelle. Dès lors, la loi fixe un minimum qualifié d’ordre public social auquel il est possible de déroger conventionnellement dans un sens plus favorable pour les salariés. Ce principe de dérogation in meliusfigure en particulier dans l’article L. 132-4 du Code du travail, précisant que la convention ou l’accord collectif peuvent comporter des dispositions plus favorables aux salariés que celles des lois et règlements en vigueur. Par ailleurs, doctrine et jurisprudence considèrent qu’en cas de conflit entre la norme légale et la norme conventionnelle, c’est la plus favorable au salarié qui doit recevoir application. C’est le principe de faveur constituant un principe général du droit du travail (Ch. Soc., 17 juillet 1996, DS 1996, p. 1049/ Bull. civ. V, n° 296).

Cette dérogation à l’ordre public social doit être nuancée car elle comporte deux limites. La première est constituée par un ordre public absolu, les textes étatiques étant dans certains cas absolus, interdisant toute dérogation (avis du CE 22 mars 1973, DS 1973 p. 514). Par exemple, sont d’ordre public absolu les textes qui fixent la compétence du Conseil des Prud’hommes, des agents publics, les incriminations pénales, prohibition de l’indexation automatiques des salaires sur le SMIC ou niveau général des prix. La seconde concerne l’ordre public dérogatoire. Depuis 1982, on a pu assister à une évolution des rapports entre les normes conventionnelles et les normes étatiques. Les conventions et accords ne sont aujourd’hui plus exclusivement destinés à améliorer la situation des salariés. Leur finalité est aussi d’assouplir l’organisation de l’entreprise dans un souci de flexibilité. La négociation collective est aussi devenue un instrument de gestion de l’entreprise. Ainsi, dans certains cas, essentiellement en matière de temps de travail, la règle étatique peut être remplacée lorsqu’elle le  prévoit elle-même par une règle négociée, peu important que celle-ci soit plus ou moins favorable aux salariés (accord dérogatoire). Le champ des accords dérogatoires était avant 2004 était réservé à la négociation de branche. La loi Fillon IV l’a plus largement ouvert à la négociation d’entreprise. Ce même texte a bouleversé les règles d’articulation entre les niveaux de négociation. Jusqu’à ce dernier et sauf exception, un accord de niveau inférieur ne pouvait déroger à un accord de niveau supérieur dans un sens moins favorable. Le principe de faveur jouait également dans les relations entre les différents niveaux de négociation. La loi Fillon rompt avec cette démarche puisque désormais, les accords de niveau inférieur peuvent déroger à des accords de niveau supérieur, sauf si ces derniers l’interdisent. D’autres changements sont venus affecter les négociateurs salariés des conventions et accords. La qualification de convention ou accord collectif est réservée à des accords négociés et signés par des syndicats représentatifs de salariés. Cette compétence syndicale demeure le principe. Toutefois, pour tenir compte de l’absence d’interlocuteur syndical, dans les petites et moyennes entreprises, la loi Fillon permet à un accord de branche d’envisager la possibilité pour d’autres acteurs de négocier dans l’entreprise (représentants élus des salariés, délégué syndical ou comité d’entreprise ou bien un salarié mandaté par le syndicat représentatif). Classiquement, une seule signature syndicale suffisait à la validité de l’accord. Cette règle de l’unicité de signature a été critiquée en raison d’une part, de la crise de la représentation syndicale et d’autre part, dans la mesure où un syndicat minoritaire peut porter préjudice à une majorité en signant des accords dont le contenu n’est pas toujours favorable pour le salarié. Ainsi, à partir de 1982, puis en 1992, la loi avait autorisé les syndicats majoritaires à s’opposer à posteriori à l’entrée en vigueur d’un accord signé par un syndicat minoritaire. Ce droit d’opposition marginal a été généralisé par la loi Fillon IV à tous accords et conventions collectifs, et parfois même, ce droit d’opposition majoritaire disparaît au profit d’un système d’accord majoritaire (dans lequel la validité de l’accord est conditionné à sa signature par des syndicats majoritaires).

 

Sous section II : Les normes non négociées.

 

  • 1 : Les usages.

 

            De manière générale l’usage se définit comme une pratique générale et permanente qui est considérée dans l’esprit de ceux qui l’observe comme nécessaire et obligatoire. En droit du travail, il existe deux types d’usages.

 

A/ Les usages professionnels.

 

            Ces sont des coutumes anciennes propres à certains métiers et qui ont force obligatoire à partir du moment où elle réunissent deux éléments : l’un objectif, c’est-à-dire une pratique ancienne et permanente dans la profession ou la région, l’autre subjectif, c’est-à-dire la croyance dans le caractère obligatoire de cette pratique. En droit du travail ces usages professionnels sont en net recul. Cependant on peut encore en observer en matière de préavis, de frais professionnels, etc. … Parfois la loi elle-même fait référence à ces usages en matière de durée du préavis de démission : L 122-5 du Code du travail. Cependant ces usages prévalent sur les dispositions de la loi, de la convention collective, du contrat de travail dans la mesure où ils sont plus favorables pour le salarié. Ces usages sont supplétifs, l’adoption d’une convention collective traitant de questions auparavant traitées par les usages va entraîner disparition de l’usage. Dès lors le rôle de ces usages est devenu résiduel dans la mesure où les conventions collectives ont repris ces usages et se substituent à ceux-ci.

 

B/ Les usages d’entreprise.

 

            Il s’agit d’une pratique interne à l’entreprise qui va lier l’employeur.

 

1)      Création de l’usage d’entreprise.

 

L’existence d’un usage d’entreprise résulte de la réunion de deux éléments : d’une part un élément subjectif qui est la volonté patronale d’accorder un avantage aux salariés. En pratique, il s’agit le plus souvent d’éléments de rémunération tels que des primes ou des gratifications,… Un usage ne peut résulter d’erreur commise par l’employeur ou d’une simple tolérance.

D’autre part, il faut un élément subjectif : la jurisprudence constante de la Cour de cassation considère qu’un usage s’est créé dans l’entreprise lorsque la pratique en cause réunit trois caractères cumulatifs :

–          La généralité : est concerné par cet avantage l’ensemble du personnel ou du moins une catégorie de personnel (ex : les commerciaux, les cadres,…).

–          La constance : il faut qu’il y ait répétition et périodicité régulière.

–          La fixité : l’avantage doit demeurer identique ou du moins les règles qui président à son octroi.

Il appartient au salarié qui invoque un tel usage d’en apporter la preuve à la fois dans son existence et dans son étendue. Parallèlement, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve de la remise en cause de l’usage d’entreprise.

 

2)      La disparition de l’usage d’entreprise.

Le plus souvent l’usage d’entreprise va disparaître par l’effet d’une dénonciation. La Cour de cassation a admis que l’employeur qui par sa volonté a institué un usage d’entreprise peut unilatéralement le dénoncer c’est-à-dire le supprimer. La Cour de cassation a fixé un régime de cette dénonciation : elle refuse l’assimilation avec les règles de dénonciation des accords collectifs qui figure dans l’article L 132-8 du Code du travail. Les modalités de dénonciation régulière ont été fixées dans un arrêt de principe du 25 février 1988, Bull. Civ. V° partie, n° 139, DESCHAMPS. Depuis cet arrêt, la jurisprudence est constante. Elle impose à l’employeur de respecter un délai de prévenance suffisant pour permettre d’éventuelles négociations. La dénonciation ne prendra effet qu’au terme du délai. La jurisprudence n’a pas fixé le délai de manière uniforme : il revient aux juges du fond de déterminer dans chaque cas d’espèce si le délai est suffisant. En second lieu, l’employeur doit donner à sa décision de dénonciation une double publicité : d’abord une information des représentants du personnel dans le but de permettre d’éventuelles négociations et ensuite une information individuelle des salariés concernés par l’avantage. La Cour de cassation considère que la dénonciation n’a pas à être motivée ou justifiée par l’employeur. Mais la jurisprudence a admis une réserve. La dénonciation peut être déclarée nulle si elle repose sur un motif illicite. Motifs illicites : menace de l’employeur de supprimer l’avantage si les salariés avaient recours à la grève Soc. 20 octobre 1993, 13 février 1996, Bull. Civ. V, N°54 ; dénonciation constituant une mesure de rétorsion pour entraver la mission des membres du CHSCT. Les règles d el a dénonciation s’appliquent aussi pour la modification des usages d’entreprise Soc, 1998, Droit social 1998, p. 730. Si la dénonciation est irrégulière, elle est inopposable aux salariés et l’usage demeure en vigueur aussi longtemps qu’il n’a pas été régulièrement dénoncé. Si la dénonciation est régulière, les avantages qui résultaient de l’usage disparaissent.

La jurisprudence constante depuis l’arrêt Deschamps considère que les avantages ne s’incorporent pas au contrat de travail qui n’est pas modifié par l’effet de la dénonciation. Cette règle traduit l’autonomie du statut collectif et du contrat de travail. Néanmoins l’avantage résultant de l’usage a pu être contractualisé, intégré au contrat parla volonté des parties, dans ce cas sa suppression entraîne modification du contrat de travail qui ne peut être imposé au salarié dont l’accord est nécessaire Soc 1998, droit social 1998, p. 623. La difficulté est de déterminer quand intervient la contractualisation pour cela il faut distinguer cette notion de la simple information. De manière générale, la cour de cassation est réticente à admettre la contractualisation des avantages quand le contrat se réfère à une norme unilatérale d’entreprise Soc. 5 octobre 1999, droit social 2000, p 837 ; Soc 11 janvier 2000 droit social, p. 837. L’usage peut aussi disparaître par l’entrée en vigueur d’une convention collective. Lorsqu’un accord collectif a le même objet qu’un usage d’entreprise, cet accord met fin à l’usage. Ici la substitution est automatique dès la signature de l’accord, même si celui-ci est moins favorable aux salariés. Soc 25 janvier 1995, revue de jurisprudence social Francis Lefèvre, n° 3 mars 1995, N° 99. En revanche l’usage ne disparaît pas par le seul effet d’un changement d’employeur. L’usage est transmis au nouvel employeur mais celui-ci à la pouvoir de le dénoncer ou cet usage peut être remis en cause par un accord collectif ayant le même objet.

 

  • 2 : L’engagement unilatéral de l’employeur.

 

            Il suffit ici de constater une manifestation explicite de la volonté de l’employeur sans qu’il y ait à tenir compte des conditions d’application de l’avantage. A la différence des usages, la force obligatoire  des engagements unilatéraux qui résultent aussi de la volonté de l’employeur n’est pas subordonné à la présence des critères de fixité, généralité et constance. Ces engagements unilatéraux ont des formes diverses.

Il peut s’agir du cas particuliers des accords atypiques. Ce sont des accords conclus entre un employeur et des salariés ou des institutions de représentation autres que les délégués syndicaux. Ces accords atypiques n’ont ni la valeur ni les effets des accords collectifs. Ils valent simplement comme engagement unilatéral de l’employeur dont le salarié peut se prévaloir s’il y a intérêt. Un accord atypique ne peut s’appliquer que s’il est plus favorable que les dispositions de la loi ou que les conventions collectives.

Il peut aussi s’agir d’engagements pris directement par l’employeur : déclaration faite devant le CE, engagement de l’employeur figurant dans le PSE (Plan de Sauvegarde pour l’Emploi) en cas de restructuration ou de licenciement collectif, avantages résultant d’un règlement intérieur non conforme à la loi de 1982. Rien n’empêche à l’employeur de soumettre l’engagement à une condition après l’avoir précisée. Lorsque l’engagement est à durée indéterminée, l’employeur peut le dénoncer dans les mêmes conditions que celles de l’usage d’entreprise. Le régime de la mise en cause des engagements unilatéraux est identique à celui des usages d’entreprise.

 

  • 3 : Le règlement intérieur.

 

            L’employeur s’est toujours vu reconnaître en vertu de son pouvoir de direction un pouvoir normatif, c’est-à-dire le pouvoir d’élaborer unilatéralement des règles générales s’imposant à l’ensemble des salariés à travers le règlement intérieur, les notes de service,… Ce pouvoir quasi discrétionnaire a été vivement dénoncé par la doctrine et a conduit à un encadrement de ce pouvoir par la loi Auroux du 4 août 1982. Contrairement à ce qui s’observe dans certains droits étrangers, la loi de 1982 n’a pas fait du règlement intérieur un acte négocié, il demeure un acte unilatéral fixé par l’employeur et ayant force obligatoire pour lui et pour les salariés. Cette loi a défini un nouveau statut du règlement intérieur sachant qu ce statut a été étendu aux notes de service et tout autre document assimilé portant sur le domaine du règlement intérieur. En effet, ainsi que le précise l’art L 122-39 du Code du travail, dès lors que leur prescription ont un caractère général et permanent, elles sont considérées comme des adjonctions au règlement intérieur et donc soumises aux mêmes dispositions. La nature juridique du règlement intérieur a été clarifiée par la jurisprudence qui l’a qualifié d’acte règlementaire de droit privé : Soc. 20 mars 1991 ; ou encore d’acte juridique de droit privé : Soc.16 décembre 1992.

 

A/ L’élaboration du règlement intérieur.

 

1)      Le champ d’application.

L’établissement obligatoire d’un règlement intérieur a un champ d’application étendu puisqu’il concerne selon l’article L122-33 tous les organismes de droit privé quelque soit leur forme ou leur objet. L’obligation d’établir un règlement intérieur est limitée aux entreprises qui emploient habituellement plus de 20 salariés.

 

2)      La procédure d’élaboration du règlement intérieur.

            Elle est la même pour l’élaboration et pour la modification du règlement intérieur et des documents assimilables. Le projet est établi unilatéralement par l’employeur puis il est soumis à la consultation de la représentation du personnel : d’une part, le comité d’entreprise, ou à défaut les délégués du personnel et d’autre part, le CHSCT ou à défaut, les délégués du personnel, sachant qu’ils ne sont consultés que sur les questions qui relèvent de leur compétence, soit les mesures d’hygiène et de sécurité. Cette consultation a un caractère substantiel et entraînerait la nullité du document qui n’y serait pas soumis. Le règlement intérieur et l’avis des représentants qui ne lie pas l’employeur sont communiqués à l’inspecteur du travail pour contrôle. Deux types de formalités sont ensuite imposées : un dépôt au greffe du conseil des prud’hommes (article R 122-13 du Code du travail) et une formalité de publicité sous forme d’affichage sur les lieux de travail et dans les locaux d’embauche (article R122-12 du Code du travail). Le règlement intérieur entre en vigueur un mois minimum après l’accomplissement de ces formalités (article L122-36 du Code du travail).

 

B/ Le contenu du règlement intérieur.

 

1)      L’objet obligatoire du règlement intérieur.

 

Depuis la loi de 1982 le contenu a été strictement encadré par la loi ce qui en fait une source mineure en droit du travail. Deux domaines principaux sont visés par l’article L122-34 du code du travail.

 

  1. a)      Les mesures d’application de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité.
  2. b)      Les règles générales et permanentes relatives à la discipline. Le doit disciplinaire s’impose à toutes les entreprises mais la loi réserve au x règlement intérieur le rôle de recueillir l’ensemble des prescriptions qui sous-tendent l’exercice du droit disciplinaire. Il existe une forte corrélation et une forte indépendance entre le règlement intérieur et le droit disciplinaire. La loi du 4 août 1982 a traité ces deux objets dans le même texte. Le règlement intérieur doit fixer la nature et l’échelle des sanctions applicables dans l’entreprise, sachant que la loi du 4 08 1982 sur le droit disciplinaire, définit la sanction disciplinaire comme « toute mesure autre que les observations verbales prises par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa carrière ou sa rémunération » (article L122-40 du Code du travail). le domaine disciplinaire couvre toute mesure prise par l’employeur à raison de faits considérés comme fautifs à partir de là il y a des mesures qui sont ouvertement disciplinaires : l’avertissement, le blâme, la mise à pied disciplinaire (suspension provisoire du contrat de travail), mutation disciplinaire, rétrogradation ou déclassement hiérarchique (baisse de qualification entraînant une baisse de rémunération), licenciement disciplinaire. D’autre mesures peuvent être qualifiées de disciplinaire en raison du contexte dans lequel elles sont prises : Soc 29 mai 2002, RJS octobre 2002, n°1120. L’employeur n’est pas tenu d’établir une liste des fautes ni une corrélation entre la gravité des fautes et la nature de la sanction applicable. Si cela était le cas, l’employeur serait tenu par les limites qu’il a lui-même fixées. En revanche, il subsiste un certain flou sur la question de savoir si l’employeur peut prononcer ou non une sanction qui ne figure pas dans le règlement intérieur. La jurisprudence n’est pas très claire : un vieil arrêt de 1987 dit que cela serait possible. Aujourd’hui, elle ne maintiendrait pas cette position. Plus largement et au-delà de ces problèmes, la jurisprudence reconnaît à l’employeur un pouvoir d’individualisation des sanctions. L’employeur peut sanctionner différemment des salariés ayant participé à une même faute à deux conditions : la sanction ne doit pas être discriminatoire au sens de l’article L ???- ?? du Code du travail ; la sanction doit être prise dans l’intérêt de l’entreprise. Les sanctions discriminatoires sont interdites mais aussi, sont interdites en vertu de l’article 122-42 les amendes et les sanctions pécuniaires. Ces sanctions pécuniaires ne peuvent figurer dans le règlement intérieur. La jurisprudence interdit le cumul des sanctions : une même faut ne peut faire l’objet de deux sanctions successives par application du principe non bis in idem. Cependant, lorsque des fautes de même nature sont commises de façon répétée, l’employeur peut tenir compte des fautes antérieures pour sanctionner plus sévèrement la dernière faute dès lors qu’il y a soit persistance des faits fautifs, soit réitération de la faute. L’employeur ne peut prendre en considération des sanctions prononcées au-delà de trois ans. Le prononcé des sanctions est subordonné au respect d’une procédure disciplinaire prévue par l’article L122-41 du Code du travail. on doit ici noter que le règlement intérieur doit énoncer les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés dans le cadre de la procédure disciplinaire de l’article L122-41. cette procédure ne s’applique pas pour les sanctions mineures : l’avertissement ou une sanction moindre : une lettre recommandée avec accusé de réception suffit. Pour les autres sanctions, l’employeur doit convoquer l’employé à une audience préalable, ce dernier peut se faire assister par un membre du personnel de l’entreprise. A l’issue de l’entretient, l’employeur doit notifier la sanction motivée dans un délai minimum d’un jour franc après l’entretien, maximum d’un mois après l’entretien. Le règlement intérieur ou la convention collective peut prévoir l’obligation pour l’employeur de soumettre le prononcé de certaines sanctions, notamment le licenciement à l’avis d’un organisme disciplinaire. Si c’est le cas, la jurisprudence considère qu’il s’agit d’une garantie de fond dont l’inobservation rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse. La faute disciplinaire n’est pas sanctionable au-delà d’un délai de prescription de deux mois après que l’employeur ait eu connaissance des faits fautifs, sauf si dans ce délai il y a eu engagement de poursuites pénales ce qui a pour effet d’interrompre la prescription. Si le comportement fautif s’est renouvelé ou poursuivi dans le délai de deux mois, la prescription n’est pas encourue. Se pose enfin la question des sanctions disciplinaires qui entraînent modification du contrat de travail comme une rétrogradation. Soc, 16 juin 1998, Société hôtel le Berry, RJS juillet 1998, n°858. Cet arrêt considère qu’une modification du contrat de travail prononcé à titre de sanction disciplinaire ne peut être imposé au salarié : le contrat de travail est donc supérieur au pouvoir disciplinaire. En cas de refus du salarié, l’employeur peut prononcer une autre sanction au lieu et place de la sanction refusée. Un arrêt postérieur a confirmé que la sanction de substitution peut être un licenciement pour faute grave, fondé sur la faute originelle et non sur le refus de la sanction Soc, 7 juillet 2004, RJS octobre 2004, N°1038.

 

2)      Les clauses textuellement interdites.

 

Un certain nombre de clauses sont exclus du règlement intérieur et ne peuvent donc y figurer. L 122-35 vise trois types de clauses :

–          Les clauses contraires aux lois, règlements, conventions et accords collectifs applicable dans l’entreprise. Cette exclusion démontre la place subordonnée du règlement intérieur dans la hiérarchie des normes.

–          Les clauses discriminatoires fondées sur le sexe, la situation de famille, la religion, la race,…

–          Les clauses qui restreignent les droits des personnes et les libertés individuelles et collectives et qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tache à accomplir ni proportionnées au but recherché.

Sur ce terrain de la protection des droits et liberté la jurisprudence met en œuvre les principes de finalité et de proportionnalité pour apprécier la licéité de certaines clauses, par exemples les clauses relatives aux fouilles, à l’alcotest, au port d’une tenue vestimentaire.

 

B/ Le contrôle du règlement intérieur.

           

1)      Le contrôle administratif.

 

Le règlement intérieur est transmis à l’inspecteur du travail qui va effectuer un contrôle de légalité qui porte sur l’élaboration du règlement intérieur et sur sa conformité, notamment au regard de son contenu par rapport à la loi. La loi Auroux de 1982 a renforcé le contrôle de l’administration : ce contrôle est permanent et est exercé au moment de l’élaboration du règlement intérieur mais aussi lors de sa modification et plus largement à tout moment. Selon l’article L122-37 du Code du travail, l’inspecteur du travail peut exiger de l’employeur le retrait ou la modification des dispositions non conformes aux articles L 122-34 et L122-35 du Code du travail. En revanche, il ne peut pas de sa propre autorité retirer les clauses incriminées. La décision motivée de l’inspecteur du travail est notifiée à l’employeur et est également communiqué pour information aux représentants du personnel. La décision est susceptible de faire l’objet de recours administratifs classiques : recours hiérarchique et recours contentieux.

 

2)      Le contrôle judiciaire.

 

Ce contrôle peut être exercé par deux juridictions : le conseil des prud’hommes qui, a l’occasion d’un litige individuel du travail, peut être amené à contrôler la légalité du règlement intérieur ou l’exercice du pouvoir disciplinaire. L’article L122-43 du Code du travail permet au conseil de prud’homme d’annuler une sanction, (sauf s’il s’agit d’un licenciement), sanction qu’il juge irrégulière en la forme, injustifiée au fond, ou disproportionnée à la faute commise. Cependant, pour respecter le principe de la séparation des pouvoirs, le conseil des prud’hommes ne peut annuler une clause du règlement intérieur qu’il estimerait inégale. Il peut simplement ne pas l’appliquer dans le litige individuel dont il est saisi. C’est ce que prévoit l’article L122-37 du Code du travail. Le jugement du conseil de prud’homme est ensuite transmis à l’inspecteur du travail et aux représentants du personnel et pourra déboucher sur le retrait des clauses incriminées.

Le TGI est compétent pour connaître d’une action principale en annulation des clauses d’un règlement intérieur dans le cadre d’un litige collectif mais uniquement les clauses au sujet desquelles l’administration ne s’est pas prononcée, les autres relevant de la compétence du juge administratif. 16 décembre 1992, DS 1993, p 267.

 

Partie 2 : Le contrat de travail.

 

Titre I : La conclusion du contrat de travail.

Chapitre 1 : La notion de contrat de travail.

 

            Dans le passé le rôle et la portée du contrat de travail étaient secondaires en raison d’une part de l’interventionnisme législatif et d’autre part d’un déplacement sur le terrain collectif des rapports de travail. De nos jours la tendance s’est inversée et on assiste à un renouveau certain du contrat de travail qui s’inscrit dans un mouvement d’individualisation du droit du travail. Ce contrat est essentiel aujourd’hui, il créé le rapport juridique employeur salarié et précise les droits et les obligations de chaque partie. Il constitue par rapport à la loi et aux conventions collectives un outil d’adaptation qui fixe les conditions concrètes d’exécution de la prestation du travail. Le contrat peut aussi déroger aux normes de niveau supérieur mais uniquement dans un sens plus favorable aux salariés.

On observe aussi que le contrat est devenu un outil de flexibilité pour l’entreprise qui lui permet de soumettre le salarié à des sujétions particulières telles que des clauses de mobilité, de non concurrence,…

 

Section I : Les critères du contrat de travail.

 

            Anciennement dénommé louage de service dans le Code civil, le contrat de service ne fait l’objet d’aucune définition légale. Néanmoins à l’aide des critères dégagés par la jurisprudence, la doctrine le définit comme une convention par laquelle une personne (le salarié) s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre personne (l’employeur) sous la subordination juridique de laquelle elle se place moyennant une rémunération. Emergent trois éléments cumulatifs de la qualification de contrat de travail.

            Une activité ou prestation de travail personnelle. Cette condition veut dire que le salarié met sa force de travail à la disposition de l’employeur, peu importe la nature des services promis : il peut s’agir de travaux manuels ou intellectuels. Il faut que cette prestation de travail existe. L’exécution de la prestation de travail se prolonge nécessairement dans le temps ce qui au regard de la classification en fait un contrat à exécution successive. Ce caractère aura des incidences sur la nullité du contrat, la modification du contrat, la résiliation unilatérale,…

            La rémunération ou le salaire doit être consenti en contrepartie de la prestation de travail. De là, le contrat de travail est conclu à titre onéreux. C’est un contrat synallagmatique qui génère des obligations réciproques et interdépendantes. En cas d’inexécution de la prestation de travail, le salaire n’est pas dû et réciproquement. Cependant, le lien entre salaire et prestation de travail est atténué notamment dans certains cas de suspension du contrat de travail tels que la maladie ou la maternité. Lorsqu’un salarié est malade, il perçoit une partie de son salaire (50%) versé par l’assurance maladie. Lorsque le salarié est malade, l’employeur doit verser sous conditions un complément.

            Le lien de subordination juridique est un critère essentiel, original qui permet de différencier le contrat de travail d’autres types de contrats plus ou moins proches que sont le contrat d’entreprise, le contrat de mandat, de société ou de louage. Les distinctions posent problème car les formes de la subordination ont changé notamment sous l’effet des NTIC, mais aussi d’un phénomène de l’extériorisation de l’emploi. Celui qui va bénéficier de la prestation de travail n’est pas l’employeur juridique. Cela conduit à un brouillage des frontières entre les salariés et les indépendants. On peut dire aujourd’hui que le travail salarié connaît des formes d’autonomie dans la subordination et réciproquement, le travail non salarié peut connaître des formes de dépendances dans l’indépendance. Ces évolutions amènent à un rapprochement du régime de l’indépendance et du salariat notamment en terme de protection sociale.

 Cette question des frontières a conduit des Etats étrangers à reconnaître un travail de troisième type, ni salarié, ni indépendant : par exemple en Italie des para subordonnés. En France, continue à subsister l’opposition classique entre le travail salarié et le travail indépendant. C’est la subordination juridique qui est l’élément déterminant de la qualification du contrat de travail que la jurisprudence a préféré depuis 1931 au critère de la dépendance économique considéré comme trop large. Par ailleurs, à l’origine, la jurisprudence avait conçu de manière restrictive la notion de subordination juridique en ce sens que le contrôle et la direction de l’employeur devaient porter sur l’exécution même de la prestation de travail. En conséquence cette vision, certaines activités autonomes étaient excluent du salariat et de son statut protecteur en matière de protection sociale. Aussi la conception de la Cour de cassation a évolué vers une vision plus extensive. La subordination pouvait être recherchée dans l’appartenance à un service organisé c’est-à-dire à travers le cadre imposé d’exécution de la prestation de travail telle que des horaires et un lieu de travail fixé.

La jurisprudence a relativisé l’importance de l’intégration dans un service organisé : Société générale contre URSSAF de la Hte Garonne. Cet arrêt a été rendu à propos d’un conférencier. Le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur unilatéralement les conditions d’exécution du travail. Ce qui caractérise le lien de subordination est l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le juge a qui est soumis un problème de qualification du contrat devra rechercher les circonstance de fait de nature à établir l’existence d’une subordination et donc d’un contrat de travail. Pour cela il a recours à une méthode qui est celle du faisceau d’indices, méthode qui rend compte d’un ensemble d’éléments, de faits, se complétant les uns les autres. Il en est ainsi du comportement comme employeur du bénéficiaire de la prestation de travail. Un individu qui remet à un autre individu des bulletins de salaire, un lieu de travail et des horaires imposés, la fourniture du matériel et des matières premières par l’employeur, l’absence de personnel occupé par le travailleur, l’autorité et le contrôle effectif sur la prestation de travail sont des indices permettant de découvrir l’existence d’un contrat de travail. Le juge doit statuer dans chaque cas particulier, il ne peut par une décision de principe reconnaître à l’ensemble d’une profession la qualité de salarié. La qualification de contrat de travail est d’ordre public ce qui signifie que le volonté des parties est impuissante à soustraire l’intéressé à un statut social impératif. Arrêt de principe, Ass. Pl. 4 mars 1983, Bull. Cass. N°3. Le juge a toujours un pouvoir d’interprétation et de requalification de la requalification de la convention conclue entre les parties pour restituer à l’opération sa véritable qualification. Ce pouvoir vient de l’article 12 du NCPC. De nombreuses décisions ont fait application de ce pouvoir judiciaire de requalification. Arrêt LABANNE, 19 décembre 2000 : la Cour de cassation a requalifié un contrat de location d’un taxi en contrat de travail en tenant compte des circonstances de fait dans lesquelles l’activité des chauffeurs de taxi s’exerçait : Droit social 2001, p. 228. Requalification d’une location-gérance en contrat de gérance salariée, Soc. 13 mars 2001, Droit social 2001, p. 547. Requalification de services bénévoles dans le cadre d’une association en contrat de travail. Soc. 29 janvier 2002, association Croix rouge, droit social 2002. Outre la jurisprudence, on ne peut passer sous silence le rôle du législateur dans la reconnaissance d’un contrat de travail. Celui-ci est intervenu ponctuellement pour adopter des dispositions qui selon des techniques diverses reconnaissent à certaines personnes la qualité de salarié ou leur étendent le bénéfice des dispositions du Code du travail ou qui instituent des présomptions légales de salariat. Exemple : les VRP, art. L 751-1 du Code du travail ; les travailleurs à domicile, L721-1 du Code du travail ; les journalistes professionnels, L 761-2 du Code du travail, les artistes du spectacles, L762-1 du Code du travail ; les mannequins, les gérants salariés, les conjoints et pacsés d’artisans et commerçants, les assistantes maternelles. La Cour de cassation considère qu’il suffit que ces personnes remplissent les conditions fixées par chaque texte particulier sans que l’existence d’un lien de subordination juridique ne s’impose.

 

Section II : La preuve du contrat de travail.

 

            La loi du 11 février 1994, Madelin sur l’initiative et l’entreprise individuelle avait introduit dans le code du travail un article L120-3 qui instituait une présomption simple d’activité indépendante ou une présomption simple d’absence  de contrat de travail au profit de personnes immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux,…Cette présomption avait pour objet de limiter les possibilités de requalification du contrat d’entreprise et contrat de travail, notamment à l’initiative des organismes de sécurité sociale. Ce texte a été critiqué par une large partie de la doctrine, bien que le risque généré par la loi Madelin de recours à de faux travailleurs indépendants ait été limité par la loi du 11 mars 1997 sur le travail dissimulé. Cette loi aggrave les sanctions du travail dissimulé : arriéré des cotisations sur trois ans plus sanction pénale. Cette présomption de non salariat a été abrogée par la loi Aubry II du 19 janvier 2000. Mais la loi pour l’initiative économique du 1er août 2003 a rétabli dans le Code du travail, la présomption simple de non salariat au profit du travailleur indépendant régulièrement immatriculé. Comme dans la loi Madelin, il s’agit d’une présomption simple qui peut être combattue par la démonstration que le travailleur est placé dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard du donneur d’ordre. Or cette présomption, on appliquera pleinement les principes généraux du droit de la preuve qui figurent dans les articles 1315 et suivant du Code civil.

            En matière de preuve c’est à la partie qui invoque l’existence d’un contrat de travail d’en apporter la preuve. En cas de contrat apparent c’est à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve. En ce qui concerne les modes de preuve et en tant qu’acte juridique, le contrat de travail qui porte sur une somme supérieure à 800 € doit être prouvé par écrit art. 1341 du Code civil. Depuis la loi du 13 mars 2000, l’écrit sur support électronique est admis au même titre que le support papier. Deux atténuation existent : lorsque l’employeur est un commerçant la preuve est libre art 110-3 du Code de commerce ; est admise généralement l’impossibilité de se procurer un écrit art 1347 du Code civil et donc de rapporter la preuve par des commencements de preuve par écrit.

 

Chapitre 2 : Le recrutement.

 

Section I : Recherche et sélection des candidats à l’emploi.

 

  • 1 : Les différents modes de recrutement.

 

            Le recrutement direct : l’entreprise procède à un recrutement interne (elle fait appel à des salariés déjà présents dans l’entreprise) ou a recours au recrutement externe sur le marché de l’emploi. Dans ce cas, le recrutement peut se faire par des contacts privés soit par des annonces insérées dans la presse ou diffusées sur internet. Des dispositions figurent dans le Code du travail pour encadrer les offres d’emploi sous forme d’annonce : art. L320-4 et s. du Code.

            Le recrutement par l’intermédiaire du service public. L’ANPE intervient entre demandeurs et offreurs d’emploi et jusqu’à une date récente, elle avait le monopole du placement des demandeurs d’emploi. Ce monopole était en contradiction avec la jurisprudence de la CJCE depuis un arrêt de 1991 et avec la Convention n°181 de l’OIT. Ce monopole n’était plus respecté dans les faits. Finalement la loi Borloo de cohésion sociale du 18 janvier 2005 qui a réformé à la suite du rapport Marainbert le service public de l’emploi, a mis fin au monopole de placement des demandeurs d’emploi au profit de l’ANPE. En conséquence, est organisée l’ouverture des activités de placement aux opérateurs privés, mais aussi l’ANPE peut créer des filiales pour exercer ses missions et facturer ses services aux entreprises.

            Le recrutement par intermédiation d’opérateurs privés, parmi lesquels des cabinets de conseil en recrutement. Les missions de ces cabinets sont diverses en fonction du mandant qui leur est donné. Parfois, ils recherchent des cadres de haut niveau (chasseurs de têtes), parfois ils passent des annoncent, recueillent les candidatures, assurent les opérations de sélection et proposent à l’entreprise quelques personnes. Ces cabinets s’occupent éventuellement de l’ « out placement », c’est-à-dire du reclassement externe sur le marché du travail des salariés licenciés économiques.

 

  • 2 : Les opérations de recrutement.

 

            Pendant des années, la question du recrutement a été délaissée par le législateur. Face au développement des techniques de recrutement en tout genre et des abus constatés, le législateur est intervenu avec une loi du 31 décembre 1992. Cette loi comporte un volet sur le recrutement et les libertés individuelles. Elle fait suit à un rapport d’un professeur : Gérard Lyon-Caen, Les libertés publiques et l’emploi, documentation française. Ce texte contient d’abord un principe général inspiré de la jurisprudence de la Cour de cassation, principe qui s’applique au delà même du recrutement. Il est contenu dans l’article L 120-2 du Code du travail : nul ne peut apporter au droit des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tache à accomplir, ni proportionnée au but recherché. La loi de 1992 met en place des garde-fous qui concernent les informations demandées et les techniques de recrutement utilisées.

 

 

 

A/ Les informations demandées au candidat à un emploi.

 

            L’article L121-6 du Code du travail précise la nature de ces informations. Les informations demandées quelque soit leur support, c’est-à-dire à travers des tests, questionnaires d’embauche etc.,… ne peuvent avoir comme finalité que d’apprécier la capacité du candidat à occuper l’emploi proposé : son interdites les questions relatives à la vie privée : état de santé, de grossesse, les opinions, les mœurs,… Les informations demandées doivent avoir un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé. Ce principe renvoi à une jurisprudence plus ancienne dite du prêtre ouvrier dégagée dans un arrêt de la Cour de cassation du 17 octobre 1973. Un prêtre se fait embaucher comme ouvrier fraiseur et ne mentionne pas ses diplômes de théologie. Il est licencié pour manque de loyauté. La Cour donne tort à l’entreprise. Outre ces règles, la loi pose un principe de loyauté dans la collecte de l’information. L’article L121-8 du Code du travail prévoit qu’aucune information concernant personnellement un salarié ou un candidat à un emploi ne peut être collecté par un dispositif qui n’a pas été préalablement porté à sa connaissance.

 

B/ Les méthodes et techniques d’aide au recrutement utilisées.

 

            La loi de 1992 a institué trois obligations principales à l’égard des recruteurs. Ces obligations figurent à l’article L 121-7 du Code du travail. La première obligation est celle de transparence : le candidat à l’emploi doit être informé avant leur mise en oeuvre des méthodes et techniques de recrutement qui seront utilisées. Cette obligation trouve un écho sur le terrain collectif dans l’article L 432-2-1 du Code du travail qui prévoit que le CE doit être informé de ces méthodes et techniques avant leur utilisation.

            L’obligation de pertinence : les méthodes et techniques doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie.

            L’obligation de confidentialité : les résultats obtenus sont confidentiels à l’égard des tiers.

 

Section II : La liberté d’embauche et ses limites.

 

            La liberté pour l’employeur de choisir ses collaborateurs a été reconnue par le Conseil constitutionnel dans une décision du 20 juin 1988 qui fait référence à la liberté d’entreprendre de l’employeur. Le droit positif consacre la liberté d’embauche et l’assortissant de quelques limites, les unes d’origine contractuelle (clauses de non concurrence), d’autres sont d’origine étatiques.

 

  • 1 : Le principe de non discrimination.

 

            Le libre choix du salarié est contraint par l’interdiction des discriminations qui figure dans de nombreux textes internationaux, européens et internes. Au niveau interne, le préambule constitutionnel dispose que nul ne peut être lésé dans son travail ou son emploi en raison de ses origines de ses opinions ou de ses croyances. L’essentiel des discriminations prohibées figure dans le Code pénal : articles 225-1 et 225-2 et d’autre part dans le Code du travail. L’article essentiel est l’article L122-45 car il a un vaste champ d’application. Jusqu’en 2001, ce texte n’interdisait la discrimination qu’en matière de recrutement, sanction, licenciement. De plus les motifs de discriminations interdites visaient l’origine, le sexe, les mœurs, la situation de famille, l’appartenance à une ethnie, une nation, ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l’état de santé ou le handicap, l’exercice du droit de grève. Ce texte s’est ensuite enrichi avec la loi du 16 novembre 2001 qui transpose plusieurs directives communautaires. Désormais, le discriminations interdites qu’elles soient directes ou indirectes, s’étendent à tous les aspects de la relation de travail : formation professionnelle, promotion,… En outre, la liste des critères de discrimination condamnés s’est allongée : à été ajouté l’orientation sexuelle, l’apparence physique, le patronyme, l’age et une loi de 2002 a rajouté les caractéristiques génétiques. Pour faciliter la lutte contre les discriminations la loi de 2001 a mis en place un nouveau régime probatoire qui organise un partage de la charge de la preuve à l’instar de ce que l’on trouvait dans les directives communautaires. Le demandeur doit présenter au juge prud’homal des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. Dans un second temps, l’employeur défendeur devra prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Si l’article L122-45 est le texte essentiel, d’autres dispositions du Code du travail réitèrent des discriminations interdites. Exemple : L412-2 du Code du travail pour l’appartenance syndicale, L123-1 pour le sexe ou la situation de famille, L122-25 pour l’état de grossesse. Il faut préciser que ces textes admettent parfois des différences de traitement qui ne s’analysent pas en une discrimination : le refus d’embauche peut être fondé sur le sexe lorsque celui-ci est la condition déterminante de l’emploi occupé. Sont visés ici les mannequins, les artistes du spectacle,… Des différences de traitement fondées sur l’age ne sont pas discriminatoires lorsqu’il existe un motif légitime notamment un objectif de politique de l’emploi. Lorsque la loi réserve certaines mesures aux jeunes ou aux vieux, il ne s’agit pas d’une discrimination, car il s’agit d’une mesure de politique de l’emploi.

            Par ailleurs, certains textes instituent «des discriminations positives», l’idée étant de mettre en place des mesures de rattrapage qui visent à garantir le principe d’égalité de traitement. Exemple : favoriser la promotion des femmes aux postes de dirigeant. Mesures de rattrapage : au sujet des travailleurs handicapés L 122-45-4.

 

  • 2 : Les interdictions d’emploi.

 

            Dans de rares cas, la loi interdit à l’employeur de recruter tel  ou tel candidat à l’emploi. Il en est ainsi d’abord des règles qui limitent l’accès à l’emploi des étrangers qui ne sont pas des ressortissants de l’UE et qui ne possède pas le titre unique de séjour et de travail.

            D’autres interdictions concernent les femmes : certains textes anciens fixent une liste de travaux interdits aux femmes tels les travaux à l’aide de marteau-piqueurs. Des interdiction d’emploi existent en lien avec la maternité : il existe un congé obligatoire de maternité qui est de deux semaines avant la date présumée de l’accouchement et six semaines après. Les congés facultatifs sont de 6 semaines avant et de dix semaines après.

            L’age peut être un facteur d’interdiction d’emploi : sauf dérogation, l’age d’admission au travail est fixé à seize ans, soit la fin de la scolarité.

 

  • 3 : Les priorités d’emploi.

 

            La plus connue concerne les handicapés. Pour faciliter leur insertion professionnelle, la loi oblige les entreprises qui occupent au moins vingt salarié d’employer un pourcentage minimum de travailleurs handicapés qui est de 6% de l’effectif. L’entreprise peut s’exonérer de cette obligation par différents moyens, y compris financiers. Néanmoins, la loi du 11 février 2005 sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, même si elle maintient des alternatives incite à l’embauche directe des personnes handicapées.

            L’employeur peut être tenu de réintégrer un salarié licencié de l’entreprise, réintégration à la suite de la nullité de son licenciement prononcée par le juge. Exemple : réintégration du salarié licencié économique après nullité du Plan de Sauvegarde pour l’Emploi (PSE, ex, plan social). Réintégration du salarié gréviste illégalement licencié.

Dans d’autres cas la loi fixe des priorités de réembauchages limités dans le temps : les bénéficiaires devront être réembauchés en priorité en cas d’emploi vacant correspondant à leur qualification. Exemple : priorité de réembauchage du licencié économique durant un an après la rupture du contrat.

Il existe enfin des priorités qui tiennent à la durée et aux horaires de travail. Exemple : les salariés à temps plein de l’entreprise ont une priorité pour occuper les emplois à temps partiel et réciproquement.

Les travailleurs de nuit ont une priorité pour un travail de jour et réciproquement.

 

  • 4 : Le cumul d’activités.

 

            Plusieurs hypothèses de cumul ont été règlementées. Le cumul d’un emploi public et d’un emploi privé est interdit sauf exception par l’article L324-1 du Code du travail.

Il en est différemment pour le cumul d’activités privées que ce soit le cumul d’activités salariées ou d’activités salariées et indépendantes. Le cumul qui est normalement licite peut être écarté par le jeu d’une clause d’exclusivité, par le respect des durées maximales de travail autorisées (L 324-2 du Code du travail), le salarié ne peut pas travailler pour des employeurs concurrents.

Une réglementation particulière s’applique à un type de cumul particulier entre un contrat de travail et un mandat social. La jurisprudence a posé des règles générales de validité au cumul qui s’applique dans toutes les sociétés. Le cumul autorisé suppose que les fonctions salariées correspondent à un emploi effectif  comportant l’exercice de fonctions distinctes de celle de direction de la société en contrepartie d’une rémunération distincte de celle de mandataire. Le dirigeant doit pour ses fonctions salariées se trouver dans un état de subordination juridique à l’égard de la société. A ces règles générales qui s’appliquent dans toute les sociétés, des règles spéciales s’ajoutent notamment pour les SA fixées par la loi du 24 juillet 1966, modifiées par la loi Madelin du 11 février 1994

 

Chapitre 3 : La formation du contrat de travail.

 

            La formation du contrat de travail relève du droit des obligations. L’article L121-1 du Code du travail précise que le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun.

 

Section I : Les conditions de fond.

 

            Selon l’article 1108 du Code civil, quatre conditions sont indispensables à la validité du contrat et donc du contrat de travail. L’absence de ces conditions est sanctionnée par la nullité. Le contrat nul cessera de produire effet mais n’entraîne pas l’anéantissement rétroactif du contrat qui est à exécution successive. Dès lors, le salarié conserve le droit à ses salaires et même aux salaires impayés sauf application éventuelle de la règle nemo auditur. Il peut bénéficier d’une indemnisation en cas de préjudice.

 

  • 1 : Le consentement.

 

            Le contrat de travail est un contrat consensuel qui se forme par l’échange des consentements. Dans la phase précontractuelle on distingue les pourparlers, l’offre de contrat et la promesse d’embauche.

Il y a simples pourparlers lorsque le projet de contrat est mal défini ou assorti de conditions imprécises. Compte tenu de ces imprécisions, la rupture des pourparlers ne donne pas lieu à des dommages et intérêts.

L’offre de contracter est une proposition de conclure le contrat à des conditions déterminées et doit contenir ces éléments essentiels pur engager son auteur. La simple acceptation de l’offre faite à une personne désignée emportera conclusion du contrat. En revanche, lorsque l’offre est faite au public tout entier, l’acceptation ne liera pas nécessairement son auteur et ceci en raison du caractère intuitu personae du contrat de travail.

La promesse unilatérale ou synallagmatique crée à la charge d’une partie ou des deux l’obligation d’une partie ou des deux de conclure le contrat  de travail. En cas de rupture, elle engage la responsabilité de son auteur, en précisant que la promesse d’embauche n’engagera les parties que si elle est ferme, faite à une personne désignée, que si elle précise les éléments essentiels du contrat tels que la nature de l’emploi, la date et le lieu d’entrée en fonction.

Le contrat de travail ne doit pas être fondé sur un consentement vicié par l’erreur, le dol ou la violence. Ces vices sont susceptibles d’affecter la validité du contrat du fait de son caractère intuitu personae du moins à l’égard de l’employeur. Il s’agit de dissimulation ou d’omission du salarié lors de la conclusion du contrat. Généralement, les juges refusent à l’employeur le droit de se prévaloir d’une erreur ou d’un dol lié à une qualité du salarié qui en réalité s’est avérée sans incidence sur sa capacité à exécuter la prestation de travail. Soc, 5 octobre 1994, bull. civ. V n° 256 ; Soc, 16 février 1999, D social 1999, p. 396.

 

 

  • 2 : La capacité.

 

            Depuis 1965, a été supprimé l’interdiction pour la femme mariée d’exercer une profession sans le consentement de son conjoint. Pour le reste, les règles de capacité de droit commun s’appliquent : en particulier, les mineurs non émancipés ne peuvent s’engager seul à un service et doivent obtenir l’autorisation expresse ou tacite de leur représentant légal. Les majeurs sous tutelle doivent être représentés, mais le juge peut autoriser la conclusion de certains actes dont le contrat de travail à l’incapable seul ou assisté de son tuteur.

 

  • 3 : L’objet et la cause.

 

            Ils doivent exister. Selon une analyse classique, l’objet de l’obligation de l’employeur est la rémunération et l’objet de l’obligation pour le salarié est l’activité promise. Mais le contrat créé plus qu’une obligation de faire et implique le salarié dans sa personne et dans son corps. Partant de cette analyse, certains auteurs ont vus dans l’objet du contrat la force de travail.

En ce qui concerne la cause et conformément au droit commun, c’est la cause déterminante qui est retenue et non les simples mobiles. L’objet et la cause ne doivent être ni immoraux, ni illicite. Les causes illicites sont rarement retenues : annulation d’un contrat de travail pour le maintien de relations adultères, annulation du contrat d’une femme de chambre employée dans une maison de tolérance.

 

Section II : Les règles de forme.

 

            Contrairement à certaines croyances, la conclusion du contrat de travail est marquée par une absence de formalisme. C’est ce qui se dégage de l’article L121-1 du Code du travail qu’il peut être constaté dans les formes qu’il convient aux parties contractantes d’adopter. On admet aussi bien un écrit (y compris électronique) ou un contrat verbal.

Lorsque le contrat est écrit, ce qui est préférable pour des questions de preuve, il doit être rédigé e français ; si le salarié est étranger, il a la possibilité de demander une traduction dans sa langue.

Il existe des exceptions à l’absence de formalisme : les conventions collectives peuvent imposer la rédaction d’un contrat écrit ou d’une lettre d’embauche. Rarement cette obligation est une condition posée à la validité du contrat. La plupart du temps, le non respect d’une formalité conventionnelle qui  cause au salarié nécessairement un préjudice, entraînera une simple réparation. Soc, 27 mars 2001, RJS 6, 2001, N°716.

Certains textes du Code du travail imposent la rédaction d’un écrit pour la validité de contrats spéciaux ou particuliers en raison des dérogations qu’ils contiennent par rapport au contrat de travail de droit commun. Exemple : le CDD, le contrat de travail temporaire, le contrat de travail à temps partiel, le contrat de travail conclu avec un groupement d’employeurs, le contrat nouvelles embauches.

On peut observer que dans un but de simplification, il existe une tendance en droit du travail et récemment avec les ordonnances du 2 août 2005 à assimiler certains de ces contrats écrits avec le phénomène des chèques emplois. Bien que la validité du contrat ne soit pas subordonnée à la rédaction d’un écrit, l’employeur est tenu d’une obligation d’information du salarié. Cela découle d’une directive communautaire de 1994 qui oblige l’employeur à informer le salarié des éléments essentiels de la relation de travail tels que le lieu de travail, l’emploi occupé, la rémunération,… Les supports de cette information peuvent être un contrat écrit, une lettre d’embauche ou un ou plusieurs documents écrits. Pour transposer cette directive des dispositions règlementaires ont été prises pour compléter notamment les mentions obligatoires du bulletin de paie. Les autres éléments essentiels figurent dans un autre document qui est la déclaration unique d’embauche faite par l’employeur aux organismes sociaux, déclaration dont l’accusé de réception est remis au salarié.

Chapitre 4 : Le choix du type de contrat de travail.

 

            Il n’existe pas une forme unique de contrat de travail, même si des propositions venant d’économistes suggèrent fortement de réunifier le contrat de travail en supprimant la dualité CDD/CDI. Apparaîtrait un contrat de travail unique qui résoudrait de nombreux problèmes. Il existe en ce moment plusieurs types de contrats qui correspondent à une multiplicité de formes d’emploi qualifiées d’atypiques au sens où elles dérogent à la forme typique de contrat qui est le CDI à temps complet au bénéfice d’un seul employeur. L’employeur va donc disposer d’une palette de choix quant au type de contrat à conclure, mais ce choix n’est pas totalement libre en particulier pour éviter une trop grande précarisation de l’emploi. Ont été règlementés les contrats à durée limitée.

 

Section I : Le contrat de travail à durée déterminé.

 

            Ce n’est qu’en 1979 que le législateur a élaboré les prémices d’une règlementation du CDD pour mettre un terme aux pratiques observées de reconductions tacites. Au delà de ce texte, le texte fondamental à été l’ordonnance de 1982 qui a fait du recours au CDD une exception, tout en affirmant un principe important, celui d’égalité des droits entre un salarié en CDD et un salarié en CDI. Ce texte a subi plusieurs modifications qui en fonction des alternances politiques mais aussi de la situation de l’emploi, ont assoupli dès 1985 et 1986 soit durci les contraintes juridiques. Dans ces derniers textes figurent l’accord national interprofessionnel (ANI) du 24 mars 1990 repris par la loi du 12 juillet 1990 et la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2000. Aujourd’hui, deux embauches sur trois se font sur la base d’un CDD. 90% des contrats en stock sont des CDI. Un CDD sur deux a une durée inférieure à un mois. Par ailleurs, 30% des entrées à l’ANPE correspondent à des fins de CDD, soit plus que le licenciement.

 

  • 1 : Les cas de recours.

 

            Le recours au CDD est limité par des conditions strictes. En effet le salarié ne doit pas occuper de manière durable un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. De plus, le motif de recours au CDD doit entrer dans le cadre d’une liste limitative de cas de recours et ne doit pas enfreindre des interdictions textuellement prévues.

 

A/ Les interdictions de recours au CDD.

 

1)      Interdiction pour des emplois permanents.

 

En matière de conclusion de contrat de travail, le CDI est le principe alors que le CDD est exception (L. 121-5). Lorsque l’activité ou l’emploi présente un caractère permanent, le salarié ne peut être engagé que par contrat de travail à durée indéterminée. Selon l’article L. 122-1, le CDD, quel que soit son motif, ne peut avoir pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Néanmoins, une dérogation existe pour les contrats liés à la politique de l’emploi (L. 122-2).

 

 

 

2)      Interdictions particulières.

 

Le remplacement d’un salarié gréviste ne peut se faire par un salarié en CDD. Il en est de même pour les travaux dangereux figurant sur une liste établie par arrêté ministériel. Pour les cas d’accroissement temporaire d’activité de l’entreprise. Le recours au CDD fondé sur un accroissement temporaire d’activité de l’entreprise est impossible, sauf dérogation, en vue de pourvoir des postes touchés par un licenciement économique, effectué par l’établissement, dans les six mois suivant la notification du licenciement au salarié concerné.

 

B/ Les cas de recours autorisés.

 

Le CDD doit être conclu pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et exclusivement dans le cadre d’une liste limitative de cas de recours, figurant dans la loi du 12 juillet 1990 (cf. Accord national interprofessionnel du 24 mars 1990).

 

1)      Le remplacement d’un salarié.

 

–          Absence du poste ou suspension temporaire du contrat de travail :

 

Selon l’article L. 122-1-1, le remplacement peut avoir pour cause l’absence au poste de travail du salarié remplacé (déplacement, affectation temporaire sur un autre poste…) ou suspension du contrat de travail du salarié remplacé. Le salarié recruté doit être embauché pour remplacer provisoirement un salarié déterminé dont le contrat de travail est en cours d’exécution. L’entreprise peut ne confier au salarié embauché sous CDD qu’une partie des tâches assurées par le remplacé et peut aussi pourvoir au passage temporaire d’un salarié à temps plein à un temps partiel.

Il est permis d’embaucher un salarié par CDD pour remplacer un salarié permanent occupant provisoirement le poste d’un autre salarié absent de l’entreprise ou dont le contrat de travail est suspendu. Il est ici question du remplacement en cascade ou par glissement d’emplois. L’administration et la Cour de cassation ont validé cette pratique en se fondant sur le fait que l’absence visée par la loi concerne le poste de travail et non l’absence de l’entreprise (Ch. Soc., 22 novembre 1995, DS 1995, p. 124). Le CDD doit faire figurer le glissement d’emploi et indiquer le nom et la qualification du salarié réellement absent de l’entreprise, ainsi que ceux du salarié remplacé sur le poste.

 

–          Départ définitif d’un salarié.

 

En cas de départ définitif d’un salarié sous CDI, précédent la suppression de son poste de travail, devant intervenir dans un délai maximal de 24 mois. Cette suppression doit avoir été décidée et fait l’objet d’une saisine préalable du comité d’entreprise ou des délégués du personnel. Au moment du recrutement par CDD, le poste doit être vacant mais peu importe la cause de départ du titulaire du poste. Le recours au CDD est de plus subordonné à la consultation préalable des représentants du personnel s’ils existent.

 

–          Attente de l’entrée en service effective d’un salarié.

Le remplacement d’un salarié recruté par CDI par un salarié embauché par CDD se justifie par le fait que le salarié CDI n’est pas immédiatement disponible pour occuper le poste (suivi de formation, exécution de préavis chez un précédent employeur). Selon une jurisprudence du 9 mars 2005, la conclusion du CDD suppose que le titulaire du poste ait déjà été recruté et non dans l’attente de son recrutement.

 

 

–          Le remplacement de non-salarié.

Depuis 2001, plusieurs textes, dont en dernier lieu une ordonnance du 24 juin 2004, permettent le recours aux CDD pour des remplacements de dirigeants d’entreprise ou collaborateurs non salariés (L. 122-1-1).

 

C/ Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise.

 

– L’accroissement temporaire d’activité stricto sensu.

  1. 122-1-1 2° vise ce cas, correspondant à une augmentation temporaire de l’activité habituelle de l’entreprise (surcroît d’activité). Au vu des arrêts du 21 janvier 2004 concernant le travail temporaire, il apparaît que l’accroissement d’activité n’a pas à présenter un caractère exceptionnel ni que l’augmentation du volume d’activité soit inhabituelle, d’où la possibilité d’y recourir pour des pics d’activité (cf. période de pointe dans les magasins…).

 

–          Tâche occasionnelle.

Il s’agit ici d’une tâche occasionnelle précisément définie et non durable, ne relevant pas de l’activité normale de l’entreprise (cf. travaux d’informatisation d’un service).

 

–          Commande exceptionnelle.

Est ici visée la survenance d’une commande exceptionnelle à l’exportation dont l’importance nécessite la mise en œuvre de moyens quantitativement ou qualitativement exorbitants de ceux que l’entreprise utilise normalement. Il est nécessaire pour ce motif de consulter préalablement le comité d’entreprise ou à défaut les délégués du personnel.

 

–          Travaux urgents.

Ce sont des travaux urgents immédiatement nécessaires pour prévenir des accidents imminents (organiser les mesures de sauvetage, réparer les insuffisances du matériel, des installations, des bâtiments présentant un danger pour les personnes).

 

D/ Les emplois saisonniers.

 

Le contrat saisonnier est visé à l’article L. 122-1-1 3°. Il est par définition conclu pour effectuer des travaux normalement appelés à se répéter chaque année, à date à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectives, et qui sont effectués pour le compte d’une entreprise qui obéit aux même variations. Cette définition résultant de l’accord national interprofessionnel a été consacrée par l’arrêt du 12 octobre 1999 SNETE (Ch. Sociale ; Société Nationale d’Exploitation de la Tour Eiffel ; DS 1999, p. 1097).

Pour que le recours soit valable, il convient que l’entreprise ait une activité saisonnière. Conséquemment, il a à plusieurs reprises été jugé qu’une activité s’étendant sur la totalité de l’année ne peut avoir de caractère saisonnier. L’emploi doit être lui-même saisonnier c’est-à-dire pour des travaux cycliques qui se répètent régulièrement en fonction de contraintes extérieures techniques, naturelles, ou socioéconomiques.

 

E/ Les emplois d’usage.

 

La conclusion d’un CDD est autorisée dans certains secteurs d’activité pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir aux CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

La première condition tient au secteur d’activité, l’activité principale de l’entreprise devant se situer dans un secteur défini par décret (D. 121-2 du Code du travail) limitatif, pouvant être complété par accord collectif étendu. Ainsi pour l’hôtellerie restauration, spectacle, enseignement, audiovisuel, sport professionnel… .

La deuxième implique que dans le secteur considéré, l’usage de ne pas recourir au CDI pour le type d’emploi en cause soit constant. Dans quatre arrêts de revirement (DS 2004, p. 629) la jurisprudence a assoupli sa position sur les CDD d’usage en n’exigeant plus que l’emploi en cause soit par nature temporaire, ce qui limite la requalification des CDD à usage successif.

 

F/ Autres cas de recours.

 

–          Les contrats conclus au titre de la politique de l’emploi :

 

Le recours au CDD est autorisé lorsque le contrat est conclu au titre des dispositions législatives et réglementaires destinées à favoriser l’embauche de personnes sans emploi (L. 122-2 1° ; cf. contrats de professionnalisation, initiative emploi … etc.). Suivant les cas, ces contrats sont obligatoirement ou facultativement conclus pour une durée déterminée.

 

–          Complément de formation professionnelle :

L’article L. 122-2 2° du Code du travail prévoit que l’employeur peut recourir aux CDD lorsqu’il s’engage à assurer un complément de formation professionnelle à ses salariés.

 

–          Le contrat de vendange :

La loi a créé ce contrat, échappant à la réglementation du contrat saisonnier (L. 122-3-18 à – 20). Il peut être conclu avec toute personne en congé.

 

  • 2 : Le terme et la durée du CDD :

 

A/ Les contrats à terme précis.

 

            Le contrat doit normalement comporter un terme précis, il doit être conclu de date à date. La durée totale du contrat inclut son renouvellement et ne peut excéder en règle générale 18 mois, mais cette durée peut être ramenée à 9 mois dans deux cas qui sont : attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté sous CDI et travaux urgents. La durée maximale peut être repoussée jusqu’à 24 mois lorsqu’il est conclu pour être exécuté à l’étranger ou en cas de départ définitif d’un salarié précédant la suppression de son poste. Les contrats conclus au titre de la politique de l’emploi ont leur propre durée spécifique.

            Une durée minimale n’est pas exigée, sauf en cas de commande exceptionnelle à l’exportation, où la durée minimale est de 6 mois et sauf pour certains contrats conclus au titre de la politique de l’emploi.

B/ Les contrats à terme imprécis.

 

            Dans 4 cas, le contrat peut être conclu avec un terme imprécis.

–          Remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat est suspendu ;

–          Attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté sous CDI ;

–          Emploi saisonnier ;

–          Emploi d’usage.

Lorsque le terme est imprécis, le contrat sera conclu et aura pour terme la réalisation de son objet. Exemple : retour du salarié remplacé, fin de la saison, fin du spectacle,… Comme le terme est imprécis les durées maximales ne s’appliquent pas sauf dans le cas de l’attente de l’entrée en service d’un salarié recruté sous CDI pour lequel la durée maximale est de neuf mois. Ces contrats à terme imprécis doivent comporter une période minimale de garantie d’emploi et de rémunération, période à laquelle est attaché le calcul de la période d’essai. Cette période est de six mois.

 

  • 3 : Le formalisme de la conclusion du contrat.

 

            Ce formalisme est extrêmement précis.

 

A/ L’exigence d’un contrat écrit.

 

            Le CDD fait partie des contrats dérogatoires qui nécessite pour leur validité la rédaction d’un contrat écrit. A défaut, le contrat est réputé avoir été conclu pour une durée indéterminée. De cette formulation légale, la jurisprudence a considéré qu’il s’agit d’une présomption irréfragable. Mais elle n’est irréfragable qu’à l’égard de l’employeur. En conséquence, le salarié peut rapporter la preuve que le contrat verbal est à durée déterminée. En outre, le contrat doit être transmis au salarié au plus tard dans les deux jours qui suivent l’embauche. La Cour de cassation confirme que la transmission tardive équivaut à une absence d’écrit qui entraîne donc une possible requalification du CDD en CDI.

 

B/ Les mentions obligatoires.

 

            1) Le motif de recours.

 

L’écrit doit comporter la définition précise du motif de recours sous peine de requalification en CDI. La présomption est irréfragable. L’énonciation du motif fixe les limites du litige dans le cas où la qualification du contrat se trouve contestée. En conséquence, le juge ne peut se fonder sur un autre motif que celui qui est énoncé dans le contrat pour légitimer le recours au CDD.

 

2) Les autres mentions obligatoires.

 

Outre le motif, la loi impose un contenu obligatoire au contrat : le nom et la qualification du salarié remplacé, la date d’échéance du terme avec éventuellement la clause de renouvellement. Lorsque le terme est imprécis doit figurer la durée minimale de garantie d’emploi. Doit aussi être mentionné, l’intitulé de la convention collective applicable, la durée de la période d’essai, le montant de la rémunération et ses différentes composantes, le nom et l’adresse de la caisse de retraite complémentaire et éventuellement ceux de l’organisme de prévoyance.

La loi n’a pas prévu les sanctions applicables et notamment le fait de savoir s’il y a requalification en CDI. Cependant, la jurisprudence distingue entre d’une part les mentions indissociable de la nature déterminée du contrat dont l’omission entraîne requalification. Exemple : absence de terme, silence sur le remplacé, et d’autre part, les mentions purement informatives du salarié dont l’omission n’entraîne pas automatiquement requalification : omission de l’intitulé de la convention collective applicable.

 

  • 4 : La requalification du contrat.

 

            La requalification permet de réputer le contrat en contrat de travail à durée indéterminée. Elle peut intervenir pour des raisons de fond ou de forme, le détail étant visé à l’article L 123-13-2 du Code du travail. Les règles légales étant édictées dans un but de protection du salarié, il est seul admis a demandé la requalification : ni le juge, ni l’employeur, ni l’Assurance de Garantie des Salaires (AGS) sauf fraude qu’elle doit démontrer ne peuvent demander la requalification. Le salarié calcule selon son intérêt le type de contrat. D’un point de vue procédural, la demande de requalification obéit à un régime spécifique fixé aux l’articles L 122-3-13 à L122-3-16.

            Lorsque le juge fait droit à la demande de requalification, il doit accorder au salarié une indemnité qui ne pet être inférieure à un mois de salaire. La Cour de cassation vient de préciser qu’une seule indemnité est due en cas de requalification de CDD successifs. Cette solution résulte d’un arrêt du 25 mai 2005, Soc. La requalification a pour conséquence d’appliquer à la rupture du contrat, si elle est intervenue, les règles du licenciement. Le juge devra apprécier si ce licenciement a une cause réelle et sérieuse qui ne saurait consister en la seule survenance du terme ou les raisons qui ont conduit à la conclusion du CDD. Soc, 8 février 2005, Droit social 2005, p.813. Souvent la requalification débouchera sur le prononcé de dommages et intérêt pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sans préavis Soc. 2000, droit social 2000, p. 1012. Par ailleurs, le salarié peut conserver l’indemnité de fin de contrat due dans le cadre d’un CDD.

 

  • 5 : L’exécution du CDD.

 

            Deux points sont à envisager.

 

A/ La période d’essai.

 

            La période d’essai est facultative. Si les parties souhaitent qu’elle existe, il convient de préciser sa durée dans le contrat écrit. La durée de la période d’essai contractuelle ne doit pas excéder des durées maximales autorisées par la loi. La durée maximale est fixée dans les contrats à terme précis en fonction de la durée initiale du contrat et dans les contrats à terme imprécis en fonction de la période minimale de garantie d’emploi. La loi prévoit le maximum suivant : la durée du contrat est supérieur e à six mois, la durée de la période d’essai est d’un mois. Lorsque la durée est inférieure ou égale à six mois, on calcule un jour par semaine dans la limite de deux semaines. La période d’essai exprimée en jours se décompte en jours calendaires, ie : on ne retranche pas les jours fériés et les jours de repos. De même, lorsqu’elle est exprimée en semaine ou mois, il s’agit de semaines civiles et de mois calendaires.

 

B/ L’égalité de traitement.

            Les salariés engagés sous CDD ont les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux qui sont titulaires d’un CDI. Cette égalité vaut pour les droits légaux, conventionnels, ou issus des usages. Par exemple, la rémunération que perçoit un salarié titulaire d’un CDD ne peut être inférieur à celle que percevrait dans la même entreprise un salarié sous CDI occupant les mêmes fonctions et de qualification équivalente. Il est courant qu’une moindre rémunération soit versée au salarié sous CDD en fonction de facteurs individuels qui lui sont propres : son ancienneté, son expérience,… Inversement, la Cour de cassation considère que ne méconnaît pas le principe : « à travail égal, salaire égal ». L’employeur qui justifie par des raisons objectives et matériellement vérifiables la différence de rémunération, en l’occurrence dans l’affaire en question un remplaçant sous CDD percevait plus que le remplacé, Soc, 21 juin 2005. Une directrice de crèche quitte l’entreprise car elle est malade ; sa remplaçante négocie une rémunération supérieure à la sienne. Il n’y a pas atteinte au principe car l’employeur justifie cela par des considérations objectives. Certaines dispositions législatives expresses y dérogent. L’exclusion principale vise les dispositions concernant le rupture du contrat de travail.

 

  • 6 : La rupture du CDD.

 

A/ La cessation par arrivée du terme.

            C’est le mode de cessation normal du contrat. La rupture est automatique, le CDD cesse de plein droit par l’arrivée du terme même si à cette date, le contrat de travail est suspendu. A l’arrivée du terme, le contrat s’éteint sans délai de prévenance sauf accord contraire des parties, sans obligation de respecter une procédure quelconque. Lorsque le terme est imprécis, il peut y avoir difficulté lorsque le salarié remplacé ne revient pas dans l’entreprise. Dans ce cas, c’est la rupture du contrat du salarié remplacé, date de son licenciement, de sa démission qui constituera le terme du contrat du remplaçant. Logiquement, si la relation contractuelle se poursuit au delà du terme, sans que soit conclu un nouveau CDD, lorsque cela est possible, le contrat devient à durée indéterminée avec maintient des conditions initiales (article L122-3-10 du Code du travail). le législateur a prévu la possibilité limitée d’un aménagement du terme en cas de remplacement d’un salarié temporairement absent ou dont le contrat est suspendu.

 

B/ L’indemnité de fin de contrat ou de précarité.

            A l’issue du CDD, l’employeur doit verser au salarié une indemnité destinée à compenser la précarité de sa situation uniquement dans certains cas de recours ; des exceptions existent. L’indemnité n’est pas due pour les contrats saisonniers, les contrats d’usage, les contrats conclus au titre de la politique de l’emploi, les contrats conclus avec des jeunes pendant leurs vacances scolaires ou universitaires. Certaines circonstances en excluent le paiement : il en est ainsi en cas de rupture anticipée à l’initiative du salarié ou rupture anticipée par l’employeur en cas de faute grave ou de force majeure. Elle n’est pas due lorsque la relation contractuelle se poursuit par un CDI. Elle n’est pas due en cas de rupture pendant la période d’essai, elle n’est pas due lorsque le salarié refuse la conclusion d’un CDI pour occuper le même emploi ou un emploi similaire.

            Cette indemnité a la nature juridique de salaire et supporte les charges salariales et fiscales. Son montant est égal à 10% de la rémunération totale brute perçue par le salarié pendant toute la durée du contrat. Une convention de branche étendue ou un accord d’entreprise peut réduire le montant de l’indemnité jusqu’à un minimum de 6% à condition que l’accord prévoie des contreparties pour les salariés.

 

C/ La rupture anticipée.

 

1) Les cas de rupture anticipée sont visés par l’article L122-3-8 du Code du travail.

 

  1. a)      La rupture d’un commun accord. On retrouve la rupture fondée sur l’article 1134 du Code civil : les parties au contrat peuvent décider d’un commun accord de rompre leurs relations contractuelles avant l’arrivée du terme. Cette rupture amiable va nécessiter une volonté claire et non équivoque des parties de mettre fin à leur relation contractuelle.
  2. b)      La faute grave est une faute qui rend impossible le maintien du contrat de travail jusqu’à son terme. A partir de cette définition générale, les juges apprécieront au cas par cas si le comportement fautif de l’une ou l’autre des parties justifie la rupture immédiate du contrat. L’appréciation de la faute grave est la même que pour un CDI. Pour le salarié, ne constitue pas une faute grave une insuffisance de rendement ou une insuffisance professionnelle, alors que ces motifs sont des causes réelles et sérieuses justifiant un licenciement, c’est-à-dire la rupture du CDI par l’employeur. Il est plus facile de rompre un CDI qu’un CDD. Les salariés qui ont un CDD sont dans une situation précaire, il faut donc une contrepartie. L’employeur qui accorde un préavis à un salarié ne peut se prévaloir d’une faute grave justifiant la rupture anticipée. La faute grave de l’employeur peut résider dans une inexécution de ses obligations contractuelles telles que défaut de paiement des salaires, modification par l’employeur des éléments essentiels du contrat de travail. la jurisprudence a considéré que la rupture anticipée pour faute grave du salarié constitue une sanction, en conséquence, l’employeur doit respecter les dispositions de l’article L122-41 applicables en matière disciplinaire. A défaut, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts.
  3. c)      La force majeure s’entend d’un évènement extérieur, irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite du contrat de travail. la définition de la force majeure et ici la même que dans le CDI. La jurisprudence est réticente a admettre la rupture fondée sur ce motif. Exemple : ne sont pas des cas de force majeure, le retour anticipé du salarié remplacé, les difficultés financières de l’entreprise, la fermeture définitive de l’entreprise, la suppression du poste du salarié remplacé. De même, l’inaptitude physique du salarié ne constitue pas un cas de force majeure justifiant la rupture anticipée. En conséquence, si l’employeur rompt le CDD pour inaptitude et impossibilité de reclasser le salarié, cette rupture est abusive, mais contrairement aux sanctions de la rupture abusive, le salarié n’a pas droit au montant des salaires jusqu’au terme du contrat, mais à des dommages et intérêts en fonction du préjudice subi, Soc, 18 juin 2005, D social 2005 p. 918. Le salarié ne travaille pas, il n’est pas payé, mais il ne faut rompre le contrat de travail. lorsque l’inaptitude est d’origine professionnelle, l’employeur peut demander la résiliation judiciaire du contrat (L122-32-9 du Code du travail). Depuis la loi de modernisation sociale de 2002, la rupture anticipée en raison d’un sinistre relevant d’un cas de force majeure ouvre droit au paiement au salarié d’une indemnité compensatrice qui correspond au minimum au montant des salaires restants dus jusqu’au terme du contrat. Cette indemnité était prise en charge par l’AGS. A partir du premier janvier 2006, et conformément à la loi du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises, l’employeur devra verser cette indemnité.
  4. d)     Embauche à durée indéterminée du salarié. Le salarié sous CDD peut rompre son contrat avant le terme s’il justifie d’une embauche à durée indéterminée dans une autre entreprise. Sauf mention contraire, il doit respecter un délai de préavis mentionné à l’article L122-3-8 du Code du travail. En dehors de ce cas particulier et sauf faute grave de l’employeur, le salarié ne peut quitter l’entreprise avant le terme.

A travers ces 4 cas, la loi a énoncé les cas de rupture qui sont d’ordre public. En conséquence, le salarié ne peut par avance accepter la rupture pour d’autres causes. De plus l’employeur ne peut demander la résolution judiciaire du contrat sauf dans le cas de l’article L122-32-9 du Code du travail.

 

3)      Les sanctions de la rupture abusive.

 

La rupture est imputable au salarié, dans ce cas l’employeur a droit à des dommages et intérêts correspondant au préjudice subi dont il doit apporter la preuve. Le salarié perd le bénéfice de l’indemnité de fin de contrat.

La rupture est imputable à l’employeur et le salarié à droit à une réparation forfaitaire minimale. L’indemnité est au moins égale aux rémunérations brutes qu’il aurait perçu jusqu’au terme du contrat. Au-delà du forfait, la fixation du montant des dommages et intérêts est à l’appréciation du juge. Ces dommages et intérêts ne peuvent se cumuler avec les indemnités de chômage servies par les ASSEDIC au titre de cette période, c’est-à-dire entre la date de la rupture et la fin théorique du contrat. En conséquence, le salarié doit restituer ces indemnités aux organismes sociaux.

 

  • 7 : Le renouvellement du CDD.

            Le renouvellement du CDD consiste à prolonger le contrat initialement conclu avec le salarié, en reporter le terme. Moyennant quoi, seul les contrats à terme précis peuvent être renouvelés. Un seul renouvellement est possible et ce dans le respect des durées maximales (le renouvellement est compris dans la durée maximale). Le motif de recours originaire doit subsister dans le renouvellement : la sanction est la requalification en CDI.

            Les conditions du renouvellement sont stipulées dans le contrat où font l’objet d’un avenant soumis au salarié avant le terme initialement prévu. L’avenant doit être formalisé par écrit, signé par les parties et assorti de son motif de recours. Lors d’un renouvellement, l’employeur ne peut imposer une modification du contrat, car le renouvellement vise à aménager le terme initial du contrat.

 

  • 8 : La succession de CDD.

 

            Il ne s’agit pas ici de prolonger le contrat initialement conclu avec le salarié. La succession de CDD vise la conclusion de contrats distincts. Cette succession fait l’objet de limitations législatives à deux niveaux.

 

A/ Contrat successifs sur un même poste de travail.

            L’employeur ne peut conclure immédiatement des CDD successifs sur un même poste. A l’expiration d’un CDD, il doit respecter un délai d’attente pour pourvoir au même poste sous forme d’un nouveau contrat à durée déterminée. Cette règle est fixée à l’article L122-3-11 du Code du travail. Le contrat (nouveau CDD) conclu sans respect du délai d’attente est réputé à durée indéterminée. Les exceptions au délai de carence sont nombreuses : rupture anticipée du fait du salarié, refus de renouvellement du contrat par le salarié, nouvelle absence du salarié remplacé, travaux urgents, emplois saisonniers, emplois d’usage, contrat lié à la politique de l’emploi. Le point de départ du délai d’attente est constitué par le terme du dernier contrat. Le délai est modulé en fonction de la durée du contrat qui vient de s’achever. Pour les contrats courts c’est-à-dire inférieurs à 14 jours, le délai est de la moitié de la durée du contrat : un CDD de 8 jours : délai de 4 jours. Au-delà de 14 jours, le délai est du tiers de la durée du contrat. Le délai se compte en jours ouvrables.

 

B/ Contrats successifs conclus avec le même salarié.

            Normalement, si la relation contractuelle se poursuit avec le même salarié à l’issue du CDD, le contrat devient un CDI article L122-3-10 du Code du travail. Cette interdiction ne vise que la conclusion d’un nouveau CDD avec le même salarié sur le même poste, sans respect d’un délai d’attente. Il n’est pas interdit à l’employeur de conclure un autre CDD avec le même salarié sur un poste différent en respectant un délai d’attente. Par ailleurs, exceptionnellement, dans trois cas : remplacement, contrat saisonnier, contrat d’usage, l’employeur peut conclure avec le même salarié des CDD successifs.

Pour le contrat de remplacement, la succession de CDD avec le même salarié est possible soit en vue de continuer à remplacer un salarié dont l’absence se prolonge, soit pour le remplacement successif de plusieurs salariés absents. Pour qu’il n’y ait pas requalification, il faut que les contrats soient autonomes, distincts les uns par rapport aux autres. De plus la jurisprudence contrôle l’absence de fraude : il ne faut pas qu’il y ait occupation durable par le salarié remplaçant d’un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Soc, 4 décembre 1996, Bull. civ. N°414 : une employée salariée pendant 4 ans par 94 CDD : fraude. Soc, 29 septembre 2004, confirmé le 26 janvier 2005, droit social 2005 p. 573, ASF : utilisation de CDD de remplacement pour faire face à un besoin structurel de main d’œuvre. Concernant les contrats saisonniers, dans le cadre d’une même saison, l’employeur peut conclure avec le même salarié des contrats successifs à terme précis. De plus, dans le cadre de la succession de contrats saisonniers, d’une saison sur l’autre, et sauf clause de reconduction, le contrat qui est conclu pour la durée d’une saison reste à durée déterminée même s’il est renouvelé pour les saisons suivantes. Dans un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation 2002, Société des talcs de Luzenac, Droit social 2002, p. 1140 : des CDD successifs saisonniers pendant 23 ans demeurent à durée déterminée. Deux éléments peuvent faire basculer les CDD saisonnier dans le régime du CDI. Lorsqu’il y a embauche pour toutes les saisons ou pour la durée totale de chaque saison. Lorsqu’il y a une clause de reconduction pour la saison suivante. Cette clause de reconduction qui peut figurer dans le contrat saisonnier est visée par l’article L123-2-15 al 1er du Code du travail. du fait des renouvellements, les contrats successifs constitueront un ensemble à durée indéterminée. Soc.1 février 2000 droit social 2000 p. 643. Ce cas est différent d’une stipulation dans une convention collective ou accord collectifs prévoyant l’obligation pour l’employeur de proposer sauf motif réel et sérieux au salarié un emploi de même nature pour la saison suivante. Cette stipulation contraire est visée à l’article L123-2-15 al 2 du Code du travail. Cette clause de réemploi n’institue qu’une priorité d’emploi et n’a donc pas pour effet de transformer la relation de travail en durée indéterminée. Soc 30 mai 2000 DROIT SOCIAL 2000 p. 768.

 

Section II : Le contrat nouvelles embauches.

           

            Dans le cadre des ordonnance du plan d’urgence pour l’emploi a été créé un nouveau contrat de travail, le contrat nouvelles embauches. Il a été créé par une ordonnance du 2 aout 2005 afin de favoriser l’embauche dans les TPE. Ce contrat s’inscrit aussi dans un courant général de simplifications administratives en faveur de l’embauche. On a créé un chèque emploi TPE pour les entreprises employant jusqu’à 5 personnes pour alléger les obligations sociales et administratives des entreprises. Il s’agit aussi de sécuriser le contrat et sa rupture en promettant à l’employeur un contrôle judiciaire réduit sur son comportement. De manière plus cachée, le CNE est une expérimentation juridique qui pourrait conduire soit à une généralisation du CNE à toutes les entreprises, soit à la mise en place d’un contrat de travail unique qui ressemble fort au CNE et qui est proposé par plusieurs économistes libéraux : rapports Camdessus, Cahuc et Kramatz. Il faudra vérifier si le CNE est facteur de création d’emploi et qui plus est d’emplois pérennes. Il y a dans les entreprises de moins de 20 salariés, 1,5 millions d’entreprises sans aucun salarié. Les PME font un usage assez massif du CDD de courte durée. Il faut encourager les entreprises qui n’ont pas d’employé à embaucher et à inciter les entreprises qui ont recours au CDD à proposer des emplois plus stables.

            A propos du CNE on parle de contrat de 3ème type ou de nouvelle génération de contrat de travail. Il s’agit d’un contrat dérogatoire qui fait échapper le CNE aux dispositions strictes sur le recours et la rupture en cours d’exécution du CDD mais sans pour autant imposer à l’employeur le respect des garanties attachées au licenciement, c’est-à-dire à la rupture du CDI de droit commun. Le CNE est un contrat conclu sans détermination de durée. C’est un CDI de type particulier qui déroge aux règles sur le licenciement même si antérieurement des CDI de type particuliers existaient mais avaient pour seul effet l’inapplication des règles sur le licenciement économique : le contrat de chantier, le contrat de mission à l’exportation. Le CNE est un CDI, il n’est pas soumis au respect d’une liste de cas de recours comme les contrats précaires. Néanmoins, il ne peut pas être utilisé pour les emplois saisonniers ou emplois d’usage. L’employeur peut utiliser le contrat pour toute nouvelle embauche. Par exemple, à l’issue d’un CDD, ou d’un contrat de travail temporaire ou en tant que première embauche. En revanche, un contrat en cours ne peut pas être rompu en vue de la conclusion d’un contrat nouvelle embauche. Cependant après rupture d’un premier CNE à l’initiative de l’employeur au cours des deux premières années, un CNE pourra être conclu entre le même employeur et le même salarié avec respect d’un délai de carence de trois mois. Du fait de sa souplesse le recours au CNE est essentiellement conditionné par le champ d’application du dispositif qui est double. Il faut être employeur au sens de l’article L 131-2 du Code du travail. il y a une condition de seuil de l’entreprise d’au plus 20 salariés. Au niveau du seuil d’effectif un élément intéressant est le fait que les jeunes de moins de 26 ans n’entrent pas le décompte des effectifs. Cela a été adopté par une autre ordonnance du 2 août 2005. il faut rester prudent sur cette exclusion car le CE a saisi la CJCE pour qu’elle statue en urgence sur la compatibilité de cette règle avec le droit communautaire.

            Le formalisme du CNE est minimal. Le contrat doit être écrit et peut être à temps plein ou partiel, il doit préciser qu’il s’agit d’un CNE sous peine de requalification en CDI de droit commun. L’originalité du CNE est qu’il offre des règles de rupture assouplies au regard du droit du licenciement ainsi qu’un régime indemnitaire spécifique. Ce régime ne vaut que durant une période de deux ans dite de consolidation de l’emploi. Au-delà de deux ans, le contrat sera soumis aux règles de rupture du CDI de droit commun.

            La période de deux ans suit un régime dérogatoire. Le régime repose sur deux éléments : pas d’entretient préalable à la rupture : elle doit être simplement notifiée par lettre recommandée avec accusée de réception et la notification n’a pas à être motivée. L’exigence d’une cause réelle et sérieuse et du contrôle judiciaire de celle-ci n’est pas exigée. L’article L122-14-3 est évincé.

Pour autant le CNE n’est pas un modèle de libre rupture par l’employeur. D’abord l’employeur doit respecter les règles particulières qui s’appliquent pour les salariés protégés (ceux qui sont titulaires d’un mandat syndical ou représentatifs, les femmes enceintes, la constatation et les conséquences de l’inaptitude physique à l’emploi). Ensuite et le CE l’a confirmé en validant le CNE dans sa décision du 19 octobre 2005. L’ordonnance n’exclut pas la possibilité de contester devant le juge le caractère abusif de la rupture avec comme fondement l’article 1382 du Code civil. Le non respect des règles relatives à la procédure disciplinaire et les mesures discriminatoires et les mesures contre le harcèlement moral et/ou sexuel. L’employeur n’est pas à l’abri de toute contestation judiciaire. La rupture a un coût sauf en cas de faute grave. L’employeur doit u préavis au salarié qui varie en fonction de l’ancienneté. Il doit une indemnité égale à 8% du montant total de la rémunération brute perçue depuis le début du contrat, à laquelle il faut ajouter une contribution de 2% versée à l’ASSEDIC.

 

Section III : Les contrats issus d’une fourniture de main-d’œuvre.

 

            Pour éviter des charges supplémentaires et disposer d’une plus grande flexibilité, les entreprises recherchent des formes d’emploi et de contrat leur permettant de bénéficier d’une prestation de travail sans avoir à supporter les coûts et les risques liés à l’embauche de salariés. Le recours à cette main-d’œuvre extérieure est plus ou moins libre suivant que le prêt de main-d’oeuvre est à but lucratif ou non lucratif.

 

  • 1 : La fourniture de main-d’œuvre à but non lucratif.

 

            Ce type de contrat de mise à disposition de personnel est licite et est assez répandu entre société d’un même groupe. Le prêt de main-d’œuvre est considéré comme à but non lucratif lorsque l’entreprise qui fournit la main-d’œuvre se fait rembourser à prix constants par l’entreprise utilisatrice les salaires, charges sociales et frais de gestion sans recherche de bénéfice ou de profit. Le législateur a encouragé cette mise à disposition par des dispositifs spéciaux dans un but de développement de l’emploi.

            Les groupements d’employeurs ont été créés par une loi du 25 juillet 1985 : articles L127 et s. du Code du travail. Ces groupements recrutent des salariés pour les mettre ensuite à disposition des membres du groupement. Ces groupements ont la forme soit d’associations déclarées loi de 1901, soit la forme de sociétés coopératives. L’activité du groupement est nécessairement à but non lucratif. Pour les salariés, ils sont liés au groupement par un contrat de travail écrit contenant des mentions obligatoires.

            Les associations intermédiaires ont été crées en 1987, article L 322-4-16. Ce sont des associations agrées par l’Etat qui embauchent des personnels rencontrant des difficultés d’emploi pour les mettre à disposition de personnes physiques ou morales pour des activités qui ne sont pas couvertes par l’initiative privée ou l’action des collectivités publiques.

 

  • 2 : La fourniture de main-d’œuvre à but lucratif.

 

            Dans ce domaine, le droit du travail s’est toujours montré méfiant, moyennant quoi, il existe un principe d’interdiction avec des autorisations exceptionnelles.

 

A/ Le principe d’interdiction.

 

            Il existe deux articles qui interdisent le prêt de main-d’œuvre à but lucratif et qui constituent des sanctions pénales. L’article L125-1 du Code du travail sanctionne toute opération à but lucratif de fourniture de main-d’œuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié ou d’éluder l’application des textes en vigueur dans l’entreprise utilisatrice. Dans ce cas, le contrat de mise à disposition est nul et l’infraction du délit de marchandage est constituée. Ce délit est visé par l’article L 152-3 du Code du travail.

            L’article L125-3 du Code du travail interdit toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d’œuvre lorsqu’elle n’est pas effectuée dans le cadre des dispositions relatives au travail temporaire.

            En croisant ces deux textes sont seuls autorisés en dehors du travail temporaire, la fourniture de main-d’œuvre à but lucratif qui accompagne une autre opération et qui n’entraîne pas de préjudice pour les salariés. Dans ce registre, la distinction est parfois difficile à faire entre le contrat de sous-traitance qui est licite et le prêt de main-d’œuvre à but lucratif qui lui ne l’est pas. Soc, 29 avril 2003 Revue de jurisprudence sociale F. Lefèvre N°57.

 

B/ Le travail temporaire.

 

            L’originalité du travail temporaire est de créer une relation triangulaire entre l’entreprise de travail temporaire, l’entreprise utilisatrice et le travailleur temporaire ou intérimaire. Le travail temporaire a un vif succès car les entreprises y voient un moyen d’extérioriser le coût de gestion de la main-d’œuvre, d’adapter les effectifs à la charge de travail, etc.… Pour les salariés c’est un moyen choisi ou subi d’occuper un emploi à durée limitée. La première réglementation du travail temporaire date de la loi du 3 janvier 1972. Les réformes du travail temporaire ont été alignées sur celles du CDD moyennant quoi, il existe entre les deux un régime largement partagé. Les entreprises de travail temporaire font l’objet d’un encadrement assez strict pour éviter des abus et moraliser la profession. Les entreprises de travail temporaire ont pour activité exclusive la mise à disposition de main-d’œuvre à but lucratif (article L124-1 du Code du travail). De plus l’activité d’entrepreneur de travail temporaire est soumise à déclaration auprès de l’inspection du travail. Enfin, l’entreprise soit présenter une garantie financière avant tout début d’activité.

 

            1) La conclusion des contrats.

 

            L’entreprise de travail temporaire est l’employeur juridique de l’intérimaire qui accomplit sa prestation de travail chez un utilisateur. Le recours au travail temporaire va donc supposer l’établissement de deux contrats.

 

  1. a)      Le contrat de mise à disposition. C’est le contrat commercial conclut entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice. Sa conclusion n’est possible que dans des cas de recours à l’intérim limités par la loi. Ce sont les mêmes cas de recours et d’interdiction qu’en matière de CDD, à l’exception des cas de recours de l’article L122-2 du Code du travail : CDD liés à la politique de l’emploi qu ne peuvent faire l’objet d’un recours à l’intérim. Ce contrat obéit à un formalisme strict : il doit être établi dans les deux jours qui suivent la mise à disposition et doit comporter des mentions obligatoires visées par l’article L 123-3 du Code du travail.
  2. b)      Le contrat de mission. C’est le contrat de travail conclu entre l’entreprise de travail temporaire et l’intérimaire. La durée et le renouvellement du contrat obéissent aux mêmes règles que celles du CDD. C’est un contrat écrit remis au salarié dans les deux jours qui suivent la mise à disposition. Ce contrat doit reproduire les mentions du contrat de mise à disposition plus des mentions complémentaires qui sont visées par l’article L 124-4 du Code du travail. le contrat de mission peut comporter une période d’essai dont la durée est fixée conventionnellement (soit par accord de branche étendu soit accord d’entreprise et à défaut de dispositions conventionnelles, par la loi qui prévoit des dispositions contraires. 2 jours d’essai si le contrat est inférieur à un mois ; 5 jours si le contrat est supérieur à deux mois.
  3. c)      La requalification des missions. Eventuellement, l’intérimaire peut agir en requalification en CDI contre l’entreprise utilisatrice lorsque celle-ci a violé les dispositions des articles L124-2 à L124-2-4 du Code du travail concernant les conditions du recours au travail temporaire. En cas de requalification, les conséquences sont les mêmes que pour le CDD : une indemnité de requalification au moins égale à un mois de salaire. Cette indemnité est globale et unique. Soc. 30 mars, 13 avril, 25 mai 2005. l’intérimaire va faire valoir que la rupture s’analyse en un licenciement lequel sera sans cause réelle et sérieuse. L’intérimaire peut agir en requalification en CDI contre l’entreprise de travail temporaire lorsque les conditions à défaut desquelles l’opération de prêt de main-d’œuvre est interdite n’ont pas été remplies. Ces conditions sont visées dans l’article L124-4 du Code du travail.

 

2) Les droits du travailleur temporaire.

 

Plusieurs dispositions du Code du travail visent à établir une égalité de traitement avec les salariés permanents des entreprises utilisatrices. Le travailleur temporaire doit recevoir une rémunération au moins égale à celle que percevrait dans l’entreprise utilisatrice passée la période d’essai, un salarié de qualification équivalente occupant le même poste de travail. Article L124-4-2 du Code du travail. De même, durant l’exécution de sa mission, le salarié temporaire va bénéficier des mêmes conditions de travail et avantages sociaux que les salariés de l’entreprise utilisatrice. De manière plus large, les conditions d’exécution du travail, notamment quant à la durée, quant aux mesures de sécurité,… sont régies par les mesures législatives, règlementaires, conventionnelles, applicables dans l’entreprise utilisatrice. Le statut collectif est déterminé par les dispositions en vigueur dans l’entreprise de travail temporaire.

 

3) La fin de la mission.

 

Le contrat de mission cesse par l’arrivée du terme. Si l’utilisateur continue à faire travailler l’intérimaire sans nouveau contrat de mise à disposition, le salarié est réputé lié à l’utilisateur par un CDI article L 124-7 du Code du travail. Le salarié va percevoir sauf exception, article L124-4-4 une indemnité de précarité dont le montant actuel est de 10% de la rémunération totale brute perçue par le salarié depuis le début du contrat. Rien n’interdit à l’utilisateur d’embaucher définitivement l’intérimaire et de comptabiliser son ancienneté des missions effectuées dans les trois derniers mois. Comme pour le CDD, l’utilisateur doit respecter un délai de carence pour des missions successives sur un même poste sauf exception. La rupture anticipée du contrat de mission est possible en cas de commun accord des parties, force majeure, faute grave. Si la rupture intervient en dehors de ces motifs, normalement, le salarié à droit à sa rémunération jusqu’au terme prévu. L’entreprise de travail temporaire peut échapper à ce versement si elle propose un nouveau contrat de mission à des conditions équivalente dans les trois jours qui suivent la rupture. L124-5 du Code du travail.

 

C/ Le travail à temps partagé.

 

            C’est une création de la loi PME du 2 août 2005. Elle fait l’objet des articles L124-24 à L124-32 du Code du travail. Le travail à temps partagé est une formule hybride de mutualisation de l’emploi entre les groupements d’employeurs et le travail temporaire. Cette formule pourrait avoir pour effet de légaliser une pratique jusqu’alors interdite : le portage salarial. La loi définit l’entreprise de travail à temps partagé comme toute personne physique ou morale dont l’activité exclusive consiste, nonobstant les dispositions du prêt de main-d’œuvre à but lucratif, à mettre à disposition d’entreprises clientes du personnel qualifié qu’elle ne peuvent recruter elles-mêmes en raison de leur taille ou de leurs moyens.

 

Section IV : Le contrat de travail à temps partiel et le contrat de travail intermittent.

 

  • 1 : Le travail à temps partiel.

 

            Depuis plusieurs années on a assisté à une expansion du travail à temps partiel. Il permet à l’employeur d’allonger le temps d’utilisation des équipements, est un facteur d’amélioration de la productivité, il permet de lutter contre l’absentéisme et d’assouplir la gestion de la main-d’œuvre. Pour les salariés, l’intérêt essentiel est de concilier vie professionnelle et vie personnelle, d’où un fort pourcentage de femmes qui travaillent à temps partiel. C’est un moyen de combiner activité rémunérée et études. Du côté des pouvoirs publics, le temps partiel a été un instrument de lutte pour l’emploi. Cette vision a été combattue par les lois Aubry I et II qui, notamment, pour tenir compte de la situation précaire des salariés à temps partiel, ont supprimé les aides publiques accordées à l’employeur.

 

A/ La définition du travail à temps partiel.

 

            La définition a été revue pour la mettre en conformité avec une décision communautaire du 15 11 97 L412-4-2 du Code du travail qui précise sauf salarié à temps partiel, les salariés dont la durée de travail est inférieure à la durée légale de 35 heures hebdomadaires ou équivalent mensuel ou annuel ou si elles sont inférieures à la durée conventionnelle ou durée du travail applicable dans l’établissement. Sont salariés à temps partiel, les salariés dont la durée du travail est inférieure à un temps plein.

 

B/ La mise en place du travail à temps partiel.

 

            L’introduction d’horaire à temps partiel dans l’entreprise peut s’effectuer soit conventionnellement, soit unilatéralement par l’employeur après avis du Comité d’entreprise ou des délégués du personnel et s’ils n’existent pas, après information de l’inspecteur du travail. Le législateur a prévu des modalités timides pour promouvoir le temps partiel choisi. Le législateur a aussi prévu la possibilité de temps partiel pour des besoins familiaux. Après l’introduction du travail à temps partiel par l’employeur l’accès doit s’y effectuer sur la base du volontariat des salariés. L’article L212-4-9 du Code du travail prévoit que le refus du salarié ne peut constituer ni une faute, ni un motif de licenciement. Cette liberté est plus théorique que pratique car lorsque le passage à temps partiel est justifié par des motifs économiques, le refus du salarié conduira à son licenciement économique. La loi dans l’article L212-4-9 accorde une priorité aux salariés à temps plein de l’entreprise avant tout recrutement externe, et inversement les salariés sont prioritaires pour occuper les emplois à temps complet. Si l’employeur méconnaît ces priorités, il s’expose au paiement de dommages et intérêts. Le passage d’un temps plein à temps partiel, ou inversement, s’analyse en une modification du contrat de travail qui nécessite l’accord du salarié car on touche à deux éléments du contrat : la durée et la rémunération contractuelles. Comment doit s’effectuer le choix de l’employeur lorsqu’il y a pluralité de candidature pour un même emploi. La Cour de cassation a tranché cette question dans les mêmes termes que pour la priorité de réembauchage, à cet égard, elle laisse libre l’employeur de choisir, mais en cas de contestation, il devra fournir au juge les éléments objectifs sur lesquels il s’est appuyé pour fixer son choix : Soc, 7 juillet 1998, Reboul, D. soc 1998, p. 947.

 

C/ La forme et le contenu du contrat de travail à temps partiel.

 

L’article L212-4-3 du Code du travail dispose que le contrat de travail des salariés à temps partiel doit être établi par écrit. Selon la jurisprudence, l’absence d’écrit fait présumer que le contrat a été conclu pour un temps plein. Néanmoins, il s’agit d’une présomption simple qui peut être combattue par l’employeur : Soc 14 mai 1987, depuis la jurisprudence est constante. Pour reverser la présomption, l’employeur doit prouver la durée du travail et que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il doit travailler ni être constamment à la disposition de son employeur. Outre l’exigence d’un écrit, la loi impose le respect de mentions obligatoires centrées sur les horaires de travail. ces mentions obligatoires sont la qualification du salarié, les différents éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou mensuelle du travail, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Sur la répartition le contrat doit aussi définir les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de la modification, c’est-à-dire l’ampleur des changements possibles. Autres mentions obligatoires : le contrat doit prévoir les modalités selon lesquelles le salarié est informé de la répartition des horaires travaillées dans chaque journée travaillée : cela peut se traduire par la remise d’un planning périodique ; les limites des heures complémentaires.

 

D/ L’organisation du travail à temps partiel.

 

            1) La fixation de la durée du travail.

            Il existe une durée maximale au temps partiel : la durée légale ou conventionnelle du travail. Il n’existe pas de durée minimale. Les parties au contrat peuvent outre l’horaire de base qui est garanti prévoir des heures complémentaires c’est-à-dire des heures qui sont au-delà de la durée contractuelle mais en deçà de la durée légale ou conventionnelle. Les heures complémentaires font l’objet d’un encadrement légal strict :

–          Le contrat doit déterminer les limites des heures complémentaires.

–          Le nombre d’heures complémentaire ne peut être supérieur au dixième des heures prévues contractuellement. Un accord de branche étendu ou un accord d’entreprise peut augmenter cet horaire jusqu’au tiers de la durée contractuelle. Ces heures complémentaires comprises entre le dixième et le tiers sont payées à un taux majoré de 25% ; les autres heures complémentaires étant rémunérées à un taux normal. L’augmentation du volume d’heures travaillées ne doit pas aboutir à ce que les travailleurs effectuent des horaires supérieurs ou égaux à la durée conventionnelle.

–          Les lois Aubry ont prévu un système d’intégration des heures complémentaires structurelles. Si l’horaire moyen effectué par un salarié dépasse de deux heures au moins par semaine sur douze semaines consécutives ou douze semaines sur une période de quinze semaines, l’horaire contractuel sera modifié en conséquence si le salarié ne s’y oppose pas, la modification intervenant dans un délai de sept jours.

–          Le refus d’accomplir des heures complémentaires. La loi a prévu des cas de refus légitime du salarié d’effectuer des horaires complémentaires : ce refus n’est ni une faute, ni un motif de licenciement. Refus légitime si l’employeur propose des heures complémentaires au-delà du contrat, de même lorsque le salarié refuse d’effectuer les heures complémentaires lorsqu’il en a été averti trop peu de temps à l’avance, c’est-à-dire moins de trois jours à l’avance.

 

2) La répartition de la durée du travail.

Elle peut se faire mensuellement ou hebdomadairement. Le contrat précise les modalités. Par ailleurs, sauf disposition d’un accord collectif étendu, les horaires de travail au sein d’une même journée ne peuvent comporter qu’une seule interruption d’activité toujours inférieure à deux heures. La loi a prévu la possibilité d’une répartition de la durée différente d’une semaine sur l’autre ou d’un mois sur l’autre dans le cadre de la modulation du temps partiel. Cette modulation ne peut être mise en place que par accord de branche étendu ou accord d’entreprise : L212-4-6 du Code du travail. la répartition de la durée entre les jours de la semaine ou les semaines du mois peut faire l’objet de modification par l’employeur à condition qu’une clause autorisant cette modification ait été prévue dans le contrat. A partir de là, la loi prévoit que la modification de la réparation devra être notifiée au salarié avec respect d’un délai de prévenance de sept jours qui peut être ramené à trois jours par un accord de branche étendu ou par un accord d’entreprise. La loi Aubry II a consacré dans plusieurs situations le droit pour le salarié de refuser la modification de la répartition, refus ne constituant ni une faute, ni un motif de licenciement ces cas figurent à l’article L212-4-3 du Code du travail : lorsque le contrat n’a pas prévu les cas et la nature de la modification, lorsqu’il y a modification de la répartition dans un cas et selon les modalités définies par le contrat mais la modification n’est pas compatible avec des obligations familiales impérieuses, le suivi d’un enseignement universitaire ou scolaire, avec une période d’activité chez un autre employeur ou avec une activité professionnelle non salariée.

 

  1. L’égalité des droits.

            Selon l’article L212-4-5, les salariés à temps partiel doivent jouir des mêmes droits que les salariés à temps plein. La rémunération doit être proportionnelle à celle d’un salarié à temps plein occupant un emploi équivalent dans l’entreprise. La période d’essai ne peut avoir une durée calendaire supérieure à celle des salariés à temps plein. L’ancienneté est décomptée comme si le salarié était à temps complet. Cette égalité des droits qui est entière s’agissant des droits légaux n’est pas forcément garantie au regard des droits conventionnels qui peuvent comporter des modalités spécifiques pour les salariés à temps partiel.

 

  • 2 : Le travail intermittent.

            La loi Aubry II a abrogé du fait de sa précarité, le temps partiel annualisé pour le remplacé par le contrat de travail intermittent. Ces contrats peuvent être conclus pour pourvoir des emplois permanents qui comportent une alternance de périodes travaillées et non travaillées (au-delà d’un mois) ce qui vise essentiellement le travail saisonnier. La mise en place de ce contrat intermittent nécessite un accord collectif de branche étendu ou accord d’entreprise. Le contrat lui-même est un contrat de travail à durée indéterminée, écrit comportant des mentions obligatoires. Il en est de même que précédemment : il existe un principe d’égalité des droit avec les salariés à temps complet et possibilité de prévoir ce que l’on appelle le lissage de la rémunération.

Chapitre 5 : Le contenu du contrat de travail.

            Hormis les clauses principales du contrat, à savoir la prestation et la rémunération, l’époque moderne a vu fleurir toute une série de clause dans un but de flexibilité du contrat ou de fidélisation de la main d’œuvre dont la licéité est parfois douteuse. Certaines clauses figurant dans les conventions collectives ou par le contrat de travail sont interdites et frappées de nullités car contraires à l’ordre public : les clauses discriminatoire, la clause compromissoire, la clause d’indexation des salaires sur le SMIC, les clauses couperet ou guillotine (rupture de plein droit du contrat à un age donné). Le principe de la liberté contractuelle autorise les parties à discuter des termes du contrat, à prévoir les clauses de leur choix, dont certaines ne présentent d’intérêt que pour certains types d’emploi. Le contrat de travail est un contrat d’adhésion, ce qui veut dire que le salarié est souvent tenu d’accepter les clauses telles que voulues par l’employeur, c’est pourquoi, pour éviter certains abus patronaux, ces clauses ont fait l’objet d’un encadrement. Singulièrement, les clauses qui portent atteinte au droit des personnes aux libertés individuelles et collectives sont soumises au contrôle vigilant de la Cour de cassation à l’aune du principe de finalité et de proportionnalité inscrit dans l’article L120-2 du Code du travail.

Section I : Les clauses d’essai, la période d’essai, le contrat à l’essai.

            La période d’essai constitue une phase probatoire d’expérimentation du contrat dans laquelle l’employeur va apprécier l’aptitude professionnelle du salarié et le salarié va juger de ses conditions de travail. Si l’essai est concluant de part et d’autre, le contrat de travail aura un caractère définitif. Du fait de leur finalité proche, la cour de cassation a eu à se prononcer sur la distinction entre les tests professionnels antérieurs à l’embauche et la période d’essai qui est postérieure à l’embauche. Pour la Cour de cassation, il n’y a période d’essai que si l’intéressé est placé dans des conditions normales d’emploi. Dans l’essai, il y a une mise en situation réelle du salarié. Tel n’est pas le cas pour un chauffeur de car qui avait conduit le car vide en présence du chauffeur habituel et durant quelques heures. Soc 4 janvier 2000, Henry, Droit social 2000, p. 550. Le Code du travail ne contient pas de réglementation d’ensemble de la période d’essai, il n’en traite qu’à l’occasion de certains contrats : CDD, contrat d’apprentissage, ou à propos de certaines catégories de salariés telles les femmes enceintes ou les VRP. Au-delà, ce sont les conventions collectives et les contrats de travail qui contiennent les dispositions sur la période d’essai et la jurisprudence qui en défini le régime juridique.

 

  • 1 : L’existence de la période d’essai.

            L’existence de la période d’essai ne se présume par : l’essai est une dérogation au principe du contrat de travail conclu à titre définitif. C’est donc à celui qui se prévaut de la période d’essai d’en apporter la preuve. Par hypothèse, c’est l’employeur qui va s’en prévaloir. Les sources de la période d’essai doivent être exclusivement recherchée dans les conventions collectives ou le contrat de travail. Une difficulté se présente lorsque la convention collective prévoit une période d’essai et que le contrat de travail ne mentionne pas la période d’essai ou renvoie à la convention collective. Il faut alors s’attacher à la rédaction de la convention collective. Si la convention collective envisage la période d’essai sans la rendre obligatoire, la période d’essai n’existera que si les parties l’ont prévue dans le contrat de travail. en revanche, lorsque la période d’essai est rendue obligatoire par la convention collective, l’employeur pourra se prévaloir de cette dernière à deux conditions : que la disposition conventionnelle se suffise à elle-même et que le salarié ait été informé au moment de son engagement de l’existence d’une convention collective et mis en mesure d’en prendre connaissance. A défaut, la clause est inopposable au salarié. C’est à l’employeur à apporter la preuve de la connaissance par le salarié de la disposition conventionnelle, ce qui n’est pas chose facile. L’employeur peut recopier la convention dans le contrat ce qui évite les difficultés. La jurisprudence est constante depuis un arrêt du 29 mars 1995, bull Civ. V n°112. Dans le cas d’un CDD, ou de l’intérim, la seul référence à la convention collective ne suffit pas à prouver l’existence de la période d’essai, puisque la durée de la période d’essai est une mention obligatoire du CDD : Soc 11 janvier 1994. Il va de soi que même si la convention collective ne fait pas mention d’une période d’essai, le contrat de travail peut stipuler l’existence d’une période d’essai. De plus, le contrat de travail peut déroger aux dispositions conventionnelles dans un sens plus favorable pour le salarié.

 

  • 2 : La durée et le renouvellement de la période d’essai.

A/ La durée.

            Le point de départ de la période d’essai se situe nécessairement au commencement de l’exécution du contrat de travail même si la prise effective des fonctions à lieu postérieurement du fait d’un stage de formation par exemple. Lorsqu’il y a un changement de fonctions en cours d’exécution du contrat, l’employeur ne peut pas imposer une période d’essai. Il ne peut s’agir lors de changement de fonction d’une période probatoire dont le caractère non satisfaisant oblige l’employeur à rétablir le salarié dans ses précédentes fonctions. Cette solution novatrice résulte de trois arrêt de la Cour de cassation : 30 mars 2005, revue de jurisprudence sociale F Lefèvre. Les parties sont en principe libres de déterminer la durée de la période d’essai dans le CDI sauf pour les VRP ou la limite légale est de 3 mois. Néanmoins, la liberté des parties est limitée par deux règles : la durée ne peut pas excéder celle qui est prévue par la convention collective. La durée doit être en rapport avec la finalité de l’essai et les fonctions du salarié. A défaut, on considèrera qu’elle a pour objet de contourner les règles sur le licenciement, le contrat sera considéré comme définitif et s’il y a rupture, elle s’analysera en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

B/ Le renouvellement.

            Les parties peuvent prolonger ou renouveler la période d’essai qui arrive à expiration. Des conditions sont exigées pour le renouvellement :

            Il faut un accord exprès des parties intervenues au cours de la période initiale.

            La possibilité de renouvellement doit avoir été prévue expressément par la convention collective ou le contrat de travail.

            En présence d’une convention collective, le renouvellement doit respecter les dispositions conventionnelles : ne pas excéder la durée prévue.

            En tout état de cause, le renouvellement doit être justifié par la nature de l’emploi et non pas destiné à frauder les règles sur le licenciement qui sont d’ordre public.

La prolongation de l’essai intervient automatiquement dans certaines circonstances telles que maladie, accident du travail, fermeture de l’entreprise pour congés annuels. Dans tous ces cas, la période d’essai est prolongée de la durée de suspension.

 

  • 3 : La rupture de la période d’essai.

 

            En principe, chaque partie est libre de rompre le contrat à tout moment durant la période d’essai. Encore faut-il que la rupture soit portée à la connaissance du salarié avant le terme de l’essai. Pour cela l’employeur peut utiliser une lettre remise en main propre contre un reçu. L’employeur peut également envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception pour notifier la rupture. La Cour de cassation vient de juger dans un arrêt de revirement du 11 mai 2005 d social 2005, p. 2005 : la rupture du contrat se situe à la date ou l’employeur a manifester sa volonté d’y mettre fin, au jour de l’envoie de la lettre recommandée. L’article L122-4 du Code du travail fait échapper la rupture par l’employeur de la période d’essai aux règles du licenciement. Les règles sur le licenciement ne s’appliquent pas, mais il existe des exceptions. Elles sont les mêmes que celles qui autorisent la rupture du CNE.

Lorsque la rupture de l’essai est motivée par l’employeur par une faute du salarié, il doit respecter la procédure disciplinaire de l’article L 142-41 du Code du travail. Soc, 10 mars 2004, RJS 2004, n°646.

Les règles particulières de protection contre le licenciement vont s’appliquer pour d’une part, les salariés victimes d’un risque professionnel inapte à l’emploi, et d’autre part, depuis un arrêt de revirement du 26 octobre 2005, aux salariés protégés (mandat représentatif, ou syndical).

L’employeur n’a pas à motiver la rupture ni à alléguer une cause réelle et sérieuse de licenciement puisqu’il n’y a pas de licenciement. Néanmoins le droit de rompre est soumis à la théorie de l’abus de droits. Il y a abus de droits lorsque la rupture est fondée sur des motifs étrangers aux capacités professionnelles du salarié : exemple : détournement de l’objet de la période d’essai. Il peut y avoir malveillance ou intention de nuire. Il peut y avoir légèreté blâmable de l’employeur ; l preuve de l’abus de droit incombe au salarié.

            La rupture ne peut pas être fondée sur un motif discriminatoire : L122-45 du Code du travail. A défaut la rupture est nulle. Cette solution ressort d’un arrêt de la Cour de cassation RJS 2005, n° 469.

 

Section II : Les clauses de non concurrence.

            Les clauses de non concurrence sont des dispositions de la convention collective ou du contrat de travail qui interdise au salarié à l’expiration de son contrat soit d’ouvrir un établissement concurrent à celui de l’employeur, soit de se faire embaucher par une entreprise concurrente. La clause de non concurrence est donc une obligation contractuelle qui survit au contrat de travail, et qui entre en application après le rupture du contrat. Elle se distingue ainsi de l’obligation de loyauté à laquelle se trouve soumis le salarié pendant toute la durée du contrat. Elle est fondée sur l’article 1141 du Code civil. Même en l’absence de clause de non concurrence, le salarié devra s’abstenir à l’issue de la relation contractuelle de toute concurrence déloyale à l’égard de l’ancien employeur. Aucun texte de porté générale ne règlemente les clauses de non concurrence, c’est la jurisprudence, complétée par les conventions collectives, qui a façonné leur régime juridique.

 

  • 1 : Les conditions de validité de la clause.

            Dans un premier temps, la jurisprudence a consacré la validité de principe de la clause de non concurrence sur le fondement de l’article 1134 du Code civil. Néanmoins, il s’agissait d’une validité conditionnelle, la clause devant être triplement limitée dans le temps, dans l’espace et quant à l’activité interdite. Cette position a été vivement critiquée par la doctrine en raison de l’atteinte à la liberté du travail et à la libre concurrence.

Dans un second temps, la Cour de cassation ne s’est pas contentée de contrôler l’étendue de la clause au regard des triples limitations, mais en est venue à un contrôle de la légitimité de la clause, un contrôle sur l’opportunité pour le chef d’entreprise d’imposer une clause de non concurrence au salarié. Ce contrôle est apparu dans un arrêt du 14 mai 1992, Godissart ou arrêt du laveur de vitres : la clause de non concurrence pour être licite doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise.

Dans un troisième temps, la Cour de cassation a inversé les propositions : la validité des clauses de non concurrence a cessé d’être le principe pour devenir l’exception. Arrêt du 19 novembre 1996, Martinez, Droit social 1996. Dans cet arrêt la Cour de cassation met au premier plan, non plus l’article 1134 du Code civil mais le principe de la liberté du travail, du commerce et de l’industrie.

Pour le droit positif, la Cour de cassation renforce les conditions exigées pour la validité des clauses en visant d’une part, le principe fondamental du libre exercice d’une activité professionnelle et d’autre part, l’article L120-2 du Code du travail. Au final une clause de non concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificité de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser une rémunération au salarié une contrepartie pécuniaire, ces conditions étant cumulatives. Cette position résulte de trois arrêts de revirement de 2002. Ils exigent une contrepartie pécuniaire et en rendant nulles toutes les clauses qui n’en comporterait pas.

 

  • 2 : Les sanctions des clauses de non concurrence irrégulières.

 

La nullité de la clause interviendra lorsque les conditions de validité ne sont pas remplies. L’action en nullité appartient exclusivement au salarié car c’est une nullité de protection du salarié : Cass. 17 juillet 1997, Bull. civ. V° N°280.

La réfaction de la clause, la limitation de son champ d’application lorsqu’elle est excessive. Le juge peut en effet à travers un contrôle de la proportionnalité de la clause réduire son champ d’application dans l’espace Cass. 25 mars 1998 ; ou son champ d’application professionnel : Soc. 18 septembre 2002, Droit social 2002 p. 1007.

 

  • 3 : La source de la clause de non concurrence.

 

La clause de non concurrence ne se présume pas. L’existence de la clause résulte soit de la convention collective, soit du contrat de travail. Dans le silence de la convention collective, on applique les dispositions du contrat de travail qui peut déroger à la convention collective dans un sens plus favorable au salarié. Lorsque la clause de non concurrence est prévue par la convention collective et qu’il n’y a aucune disposition dans le contrat de travail, la cour de cassation retient la même solution que celle déjà vue pour la période d’essai : Soc. 8 janvier 1997, droit social 1997 p. 323. l’insertion d’une clause de non concurrence dans un contrat de travail qui n’en comportait pas à l’origine s’analyse en une modification du contrat de travail et nécessite l’accord du salarié.

 

  • 4 : Les modalités d’application de la clause de non concurrence.

 

A/ La portée de la clause.

            Deux cas peuvent se présenter : la clause est rédigée en termes généraux : dans ce cas elle s’appliquera quelque soit le cas de rupture du contrat : démission, licenciement,…

            La clause est rédigée en termes spéciaux et dans ce cas elle ne s’appliquera que dans le cas prévu.

 

B/ La contrepartie pécuniaire.

            Autrefois simple faculté, devenue obligation depuis 2002, la clause de non concurrence est liée à l’existence d’une contre partie pécuniaire. Elle peut avoir différentes modalités : le paiement d’un capital au moment de la rupture, le versement d’une prime en cours d’exécution du contrat (en plus du salaire), le paiement d’une indemnité mensuelle pendant toute la durée de l’interdiction qui est fixé en général en proportion de l’ancien salaire et qui augmente avec la durée d’interdiction.

Cette contrepartie a la nature de salaire. Cette indemnité ne peut être réduite par le juge même si elle est excessive. La contrepartie n’est pas une clause pénale. L’obligation au paiement de l’indemnité existe dès lors que le salarié respecte la clause et en l’absence de renonciation de l’employeur. De plus, elle reste due même si l’obligation de non concurrence n’a plus d’objet (salarié inapte, parti à la retraite,…).

 

C/ La renonciation à la clause.

            L’employeur ne peut y renoncer unilatéralement que si le contrat de travail ou la convention collective l’y autorise expressément. En outre, la renonciation unilatérale doit résulter d’une manifestation de volonté claire et non équivoque de l’employeur. De plus, la renonciation doit être effectuée dans les formes et les délais prévus par la convention collective ou le contrat. En cas de renonciation tardive ou irrégulière, la contrepartie pécuniaire reste due au moins pour la période où le salarié à respecté la clause : Soc 13 septembre 2005.

  • 5 : Les sanctions de la violation de la clause.

 

            L’employeur dont l’employé viole la clause peut cesser le versement de la contrepartie voire demander le remboursement à compter du jour où le salarié à violé la clause. En second lieu, l’employeur peut assigner le salarié devant le conseil de prud’homme pour obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle. L’employeur peut faire jouer une éventuelle clause pénale insérée au contrat, fixant forfaitairement le montant des dommages et intérêts. Le juge a toujours le pouvoir de modérer les clauses pénales excessives ou d’augmenter les clauses pénales dérisoires. L’employeur peut aussi demander au juge la cessation sous astreinte de l’activité concurrentielle, c’est-à-dire par exemple la rupture du contrat de travail avec le nouvel employeur. Outre les sanctions qui visent le salarié, l’employeur victime peut demander à la juridiction commerciale ou civile la condamnation du nouvel employeur à des dommages et intérêts pour concurrence déloyale ou a rompre la relation contractuelle, demande fondée sur la responsabilité délictuelle. Cette responsabilité n’est engagée que si l’ancien employeur établit que le nouvel employeur connaissait l’existence et la portée de la clause ou que l’ayant appris, il a conservé le salarié à son service. La rupture est facile car le fait pour un salarié de dissimuler l’existence de la clause lors de l’embauche s’analyse comme une faute grave. La mauvaise foi de l’employeur est parfois présumée.

 

Section III : La clause de mobilité.

 

            Ces clauses sont fréquentes : le contrat ou la convention collective peut comporter une clause de mobilité, une clause qui écarte toute localisation du travail, le salarié acceptant par avance la modification du lieu de travail. En l’absence de clause de mobilité instituée par le contrat de travail, l’employeur peut se prévaloir d’une clause de mobilité figurant dans la convention collective à condition que la disposition conventionnelle se suffise à elle-même que le salarié ait été informé de l’existence d’une convention collective au moment de son engagement et qu’il ait été mis en mesure d’en prendre connaissance. Cela ne peut s’appliquer que si la convention est antérieure au contrat. En présence d’une clause de mobilité, la mutation du salarié ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail qui s’impose au salarié. Si le salarié refuse la mutation, ce refus constitue une faute grave qui peut déboucher sur son licenciement. La jurisprudence admet la validité de la clause de mobilité, mais le juge contrôle les conditions de sa mise en œuvre. Ces conditions de mises en œuvre ont été revues par un arrêt du 23 février 2005 p.576, 634 avec le commentaire. La bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n’ont pas à rechercher si la décision de l’employeur de faire jouer la clause est conforme à l’intérêt de l’entreprise. Dès lors, il incombe au salarié de démontrer que cette décision a été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou qu’elle a été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle. L’employeur doit avoir manqué de loyauté dans la mise en œuvre de la clause. La non prise en compte de la situation familiale de l’employeur est un abus. De même lorsqu’il y a absence de moyens matériels pour se rendre au nouveau lieu de travail. L’abus dans la mise en œuvre de la clause, et que le salarié refuse, la rupture du contrat s’analysera comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur soit respecter les disposition conventionnelles comme l’obligation d’une notification écrite de la mutation. La jurisprudence considère que le salarié doit disposer d’un délai de prévenance suffisant qui est fonction des circonstances Soc.18 septembre 2002. La clause de mobilité ne doit pas heurter une liberté fondamentale. Une clause de mobilité assortie d’une obligation de transfert du domicile est soumise au contrôle de proportionnalité Soc. Spiellers.

 

Section V : Les autres clauses.

 

  • 1 : Les clauses de dédit formation.

 

            En contrepartie d’une formation financée par l’entreprise le salarié s’engage à rester un certain temps à son service et à verser en cas de départ anticipé une somme forfaitaire fixée à l’avance ou à rembourser les frais de formation. La jurisprudence admet que ces clauses sont licites, sauf cas particuliers. Il faut trois conditions de fond.

            Effectivement l’employeur ait engagé des frais réels de formation au-delà des dépenses imposées par la loi ou les conventions collectives.

            Il faut que le montant de l’indemnité de dédit soit proportionné aux frais de formation engagés.

            Il ne faut pas que la clause ait pour effet de priver le salarié de sa possibilité de démissionner.

            A ces conditions de fond rappelées dans un arrêt Soc 2002, s’ajoutent des conditions de forme pour que la clause soit opposable aux salariés. La clause doit faire l’objet d’une convention particulière précisant la date, la nature et la durée de la formation, son coût réel pour l’employeur et les modalité de remboursement à la charge du salarié.

 

  • 2 : La clause d’exclusivité.

 

            Le cumul d’activité peut être limité par une clause qui interdit au salarié l’exercice d’une autre activité professionnelle salariée ou indépendante. Cette clause porte atteinte au principe fondamental du libre exercice d’une activité professionnelle. La jurisprudence applique l’article L120-2 : la clause doit être justifiée par la nature de la tache à accomplir et proportionnée au but recherché. Soc. 11 juillet 2000, droit social 2000, p. 1141.

 

 

Titre II : La rupture du contrat de travail.

            Le droit de la rupture du contrat de travail est marqué par la combinaison de deux règles essentielles : l’article L 121-5 du Code du travail précise que le contrat de travail est conclu sans limitation de durée. Le contrat conclu sans détermination de durée peut cesser à l’initiative d’une des parties contractante. Résiliation unilatérale du CDI en raison de l’interdiction des engagements perpétuels. Dans le cadre du CDD, les causes de rupture anticipée sont strictement définies. Pour ce qui es du CDI deux tendances : prévalence du licenciement parmi les modes de rupture. La jurisprudence considère que la rupture du CDI par l’employeur ou la rupture en période d’essai, les cas de force majeure et la mise à la retraite constituent un licenciement. Ce mouvement a été amplifié par un recul de l’influence des modes de rupture issus du droit civil au profit du licenciement, dont les règles sont plus protectrices pour le salarié. Le rétrécissement du champ de la démission, ce qui entraîne mécaniquement l’extension du champ du licenciement.

 

Sous titre I : Les modes de ruptures autres que le licenciement.

 

Démission

La volonté de démissionner doit être manifestée par le salarié de manière claire, sérieuse et non équivoque.

Le préavis est fixé par la loi, la convention collective ou les usages professionnels.

Rupture d’un commun accord depuis la loi du 25 juin 2008 (art. L1237-11 à 16)

Nouvelle rédaction de l’art. L1231-1 : « Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l’initiative de l’employeur ou du salarié, ou d’un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre. »

Art. L1237-11 : « L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties. Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »

Art. L1237-13 : « La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l’indemnité prévue à l’article L1234-9. »

Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation.

A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d’entre elles dispose d’un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d’une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l’autre partie.

Art. L1237-14 : La validité de la convention est subordonnée à son homologation. (par l’autorité administrative)

Ce mode de rupture peut concerner les salariés protégés mais ne supprime pas l’autorisation du directeur départemental du travail.

Ce mode de rupture ne concerne pas les ruptures résultant des accords de GPEC ou des plans sociaux.

Le contentieux de la convention et de l’homologation est confié au conseil de prud’hommes dans un délai de 12 mois.

Rupture d’une période d’essai : le droit du licenciement ne s’applique pas selon l’art. L1231-1 §2

Le délai de prévenance est fixé par les art. L1221-25 ( loi du 25 juin 2008) pour l’employeur :

1° Vingt-quatre heures en deçà de huit jours de présence ;

2° Quarante-huit heures entre huit jours et un mois de présence ;

3° Deux semaines après un mois de présence ;

4° Un mois après trois mois de présence.

La période d’essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance.

Pour le salarié : 48h ou 24h s’il est présent depuis moins de 8 jours. (art. L1221-26)

Force majeure (cas rare)

CODE CIVIL Article 1148

Il n’y a lieu à aucuns dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit.

Force majeure : circonstance imprévisible, irrésistible et qui n’est pas le fait des parties. (jurisprudence)

Départ volontaire à la retraite

Le départ volontaire s’apparente à une démission mais avec une indemnité

Texte légal : Article L1237-9

Tout salarié quittant volontairement l’entreprise pour bénéficier d’une pension de vieillesse a droit à une indemnité de départ à la retraite.

Le taux de cette indemnité varie en fonction de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise. Ses modalités de calcul sont fonction de la rémunération brute dont il bénéficiait antérieurement. Ce taux et ces modalités de calcul sont déterminés par voie réglementaire.

Mise à la retraite d’initiative patronale

Principe : pas de rupture de plein droit à un âge déterminé.

Texte légal : Art. L1237-4

« Les stipulations relatives au départ à la retraite des salariés prévues par une convention collective, un accord collectif de travail ou un contrat de travail sont applicables sous réserve qu’elles ne soient pas contraires aux dispositions légales.

Sont nulles toutes stipulations d’une convention ou d’un accord collectif de travail et d’un contrat de travail prévoyant une rupture de plein droit du contrat de travail d’un salarié en raison de son âge ou du fait qu’il serait en droit de bénéficier d’une pension de vieillesse. »

Fondamental :

La loi établit plusieurs seuils d’âge avec des conséquences différentes.

Art. L1237-5 : Modifié par LOI n°2010-1330 du 9 novembre 2010 – art. 27

Définition : Age légal de la retraite (pour les personnes nées en 1955 : 67 ans)

La mise à la retraite s’entend de la possibilité donnée à l’employeur de rompre le contrat de travail d’un salarié ayant atteint l’âge mentionné au 1° de l’article L351-8 du code de la sécurité sociale sous réserve des septième à neuvième alinéas (c.-à-d. la limite des 70 ans) :

Définition : Age auquel le salarié peut prétendre à une retraite à taux plein (pour les personnes nées en 1955 : 62 ans)

Un âge inférieur peut être fixé, dans la limite de celui prévu au premier alinéa de l’article L351-1 du code de la sécurité sociale, dès lors que le salarié peut bénéficier d’une pension de vieillesse à taux plein au sens du code de la sécurité sociale :

1° Dans le cadre d’une convention ou d’un accord collectif étendu conclu avant le 1er janvier 2008 fixant des contreparties en termes d’emploi ou de formation professionnelle ;

2° Pour les bénéficiaires d’une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 et mise en œuvre dans le cadre d’un accord professionnel mentionné à l’article L5123-6 ;

3° Dans le cadre d’une convention de préretraite progressive conclue antérieurement au 1er janvier 2005 ;

4° Dans le cadre du bénéfice de tout autre avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites et ayant pris effet avant le 1er janvier 2010.

Age auquel l’employeur peut imposer au salarié de partir en retraite (pour toute personne : 70 ans)

(il se déduit de la procédure ci-dessous)

Avant la date à laquelle le salarié atteint l’âge fixé au 1° de l’article L351-8 du code de la sécurité sociale et dans un délai fixé par décret, l’employeur interroge par écrit le salarié sur son intention de quitter volontairement l’entreprise pour bénéficier d’une pension de vieillesse.

En cas de réponse négative du salarié dans un délai fixé par décret ou à défaut d’avoir respecté l’obligation mentionnée à l’alinéa précédent, l’employeur ne peut faire usage de la possibilité mentionnée au premier alinéa pendant l’année qui suit la date à laquelle le salarié atteint l’âge fixé au 1° de l’article L351-8 du code de la sécurité sociale.

La même procédure est applicable chaque année jusqu’au soixante-neuvième anniversaire du salarié.

Texte légal : Art. L1237-5-1

A compter du 22 décembre 2006, aucune convention ou accord collectif prévoyant la possibilité d’une mise à la retraite d’office d’un salarié à un âge inférieur à celui fixé au 1° de l’article L351-8 du code de la sécurité sociale ne peut être signé ou étendu. 

Texte légal : Art. L351-8

Code de la sécurité sociale modifié par LOI n°2010-1330 du 9 novembre 2010 – art. 20 (V)

Bénéficient du taux plein même s’ils ne justifient pas de la durée requise d’assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plusieurs autres régimes obligatoires :

1° Les assurés qui atteignent l’âge prévu à l’article L161-17-2 (pour les personnes nées en 1955 : 62 ans) augmenté de cinq années ;

1° bis Les assurés ayant interrompu leur activité professionnelle en raison de leur qualité d’aidant familial telle que définie à l’article L245-12 du code de l’action sociale et des familles qui atteignent l’âge de soixante-cinq ans dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État ;

1° ter Les assurés handicapés qui atteignent l’âge de soixante-cinq ans ;

2°) les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l’article L351-7 ;

3°) les anciens déportés ou internés titulaires de la carte de déporté ou interné de la Résistance ou de la carte de déporté ou interné politique ;

4°) les mères de famille salariées justifiant d’une durée minimum d’assurance dans le régime général, ou dans ce régime et celui des salariés agricoles qui ont élevé au moins un nombre minimum d’enfants, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L342-4, et qui ont exercé un travail manuel ouvrier pendant une durée déterminée ;

4° bis) les travailleurs handicapés admis à demander la liquidation de leur pension de retraite avant l’âge prévu au premier alinéa de l’article L351-1 ;

5°) les anciens prisonniers de guerre : …

Texte légal : Art. L1237-6

« L’employeur qui décide une mise à la retraite respecte un préavis dont la durée est déterminée conformément à l’article L1234-1. » (préavis de licenciement)

Texte légal : Art. L1237-7

« La mise à la retraite d’un salarié lui ouvre droit à une indemnité de mise à la retraite au moins égale à l’indemnité de licenciement prévue à l’article L1234-9. »

Transaction

Lorsque l’employeur a licencié un salarié pour motif personnel, les parties peuvent préférer une transaction ( Article 2044 du Code civil ) qui règle le litige et interdit ensuite aux parties d’aller en justice.

CODE CIVIL : Titre XV : Des transactions

Article 2044 : La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit. (…)

Article 2052 : Les transactions ont, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort. Elles ne peuvent être attaquées pour cause d’erreur de droit, ni pour cause de lésion.

Article 2053 : Néanmoins une transaction peut être rescindée, lorsqu’il y a erreur dans la personne ou sur l’objet de la contestation. Elle peut l’être dans tous les cas où il y a dol ou violence.

Cas de rupture du contrat par décision de justice (résolution judiciaire)

Application du droit commun des contrats lorsque l’une des parties n’exécute pas ses obligations, mais uniquement dans les cas prévus par la loi :

– cas de la rupture du contrat d’apprentissage. (art. L117-17)

Interdiction dans le cas des représentants du personnel. (Cass. Chambre mixte 21/6/74)

CHAPITRE 1 : La démission

Section 1 : Condition de la démission

  1. Les caractéristiques de la démission

Pour être valable, une démission doit résulter d’une volonté sérieuse, claire et non équivoque.

  1. Une volonté claire et non équivoque de démissionner.

La démission ne se présume pas et doit découler d’une volonté claire et non équivoque. C’est à celui qui invoque la démission de la prouver.
La démission peut être explicite ou implicite. 
  La volonté de démissionner doit être non équivoque. Elle peut en effet être équivoque lorsque le salarié ne reprend pas son activité professionnelle à l’issue de congés. Il s’agit dans ce cas d’une faute que l’employeur peut sanctionner par un licenciement. Toutefois, cette absence ne peut être ipso facto considérée comme une démission du salarié. En tenant compte des circonstances, le juge considèrera que ce comportement caractérise ou non une volonté non équivoque de démissionner.

 

Dans le cas où elle est implicite, les juges hésitent souvent à reconnaître la démission, préférant ne pas se limiter aux apparences.
Etudions certaines situations pour savoir si elles caractérisent ou non une volonté claire et non équivoque du salarié de démissionner.

1ère situation : L’absence non justifiée du salarié
En principe, le fait que le salarié tarde à donner à l’employeur une justification de son absence ne constitue pas une volonté claire et non équivoque de sa part de démissionner. Ainsi par exemple, le fait pour un salarié de ne pas justifier sa prolongation d’absence pour maladie ne constitue pas une manifestation non équivoque de sa part de démissionner (Cass. soc., 16 avril 1992).

 Cette règle s’applique même si la convention collective dispose que le salarié qui ne justifie pas son absence dans un certain délai peut être considéré comme démissionnaire. En effet, une telle disposition conventionnelle ne peut être admise.

2ème situation: Le retour tardif du salarié après une période de suspension de son contrat de travail
En principe, si le salarié ne reprend pas son travail à l’issue d’une période de suspension de son contrat de travail, cet acte ne constitue pas une démission claire et non équivoque de démissionner. Cette règle s’applique quelle que soit la cause de la suspension du contrat de travail : maladie, congés payés, mise à pied, arrêt de travail suite à un accident du travail, etc
En effet, face au retour tardif du salarié à l’issue d’une période de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut pas considérer le salarié comme démissionnaire. La seule solution offerte à l’employeur est de mettre en œuvre une procédure de licenciement.

 Le retour tardif du salarié suite à une période de suspension du contrat de travail peut constituer un motif réel et sérieux de licenciement, parfois même une faute grave.
De même, le salarié ne peut être considéré comme démissionnaire lorsqu’il refuse d’exécuter son travail, lorsqu’il abandonne son poste sans aucune explication, etc. Ici encore, l’employeur qui souhaite mettre fin à la relation contractuelle doit mettre en œuvre la procédure de licenciement.

  1. Une volonté consciente et réelle de démissionner.
    Par ailleurs, pour être considéré comme démissionnaire, le salarié doit avoir agi en toute connaissance de cause, c’est-à-dire hors de toute contrainte de l’employeur.

a/ Une décision réfléchie
Si le comportement d’un salarié est dû à un mouvement d’humeur, de désarroi ou d’énervement, la démission ne peut être caractérisée. En effet, l’acte de démission doit découler d’une réflexion suffisante et éclairée.
Ainsi, par exemple, la démission d’un salarié donnée sous le coup de la colère et contredite par son comportement postérieur, notamment en exprimant son désir de reprendre son travail, ne caractérise pas une volonté claire et non équivoque de démissionner (Cass. soc. 4 mars 1998 ).

b/ Une décision libre
De même, la démission d’un salarié est déclarée nulle si elle a été donnée par erreur, par dol ou sous la menace.
Il y a erreur lorsque le salarié n’a pas conscience de son acte et de ses conséquences. Il en est ainsi par exemple si la lettre de démission du salarié a été écrite par un autre salarié, l’intéressé ne sachant ni lire, ni écrire (Cass. soc. 30 novembre 1994). De même, la démission n’est pas caractérisée lorsque le salarié n’avait pas conscience des conséquences de sa démission sur les allocations chômage (Cass. soc. 10 octobre 1996 ).
Par ailleurs, la démission est nulle lorsqu’elle a été donnée sous la pression, physique ou morale, de l’employeur. Il est notamment ainsi lorsqu’un salarié démissionne suite à des injures et des menaces de son employeur ou encore lorsque le salarié démissionne suite à des menaces de licenciement pour faute grave (Cass. soc., 27 juin 1984).

  1. La rétraction
    Si la démission résulte d’une volonté claire, sérieuse et non équivoque, la rétractation du salarié est sans effet. Dès lors, l’employeur n’est pas tenu de l’accepter.
    Ainsi, par exemple, le fait qu’un salarié ait manifesté sa volonté de démissionner en termes clairs et dépourvus de la moindre ambiguïté mais qui est revenu sur sa décision trois mois après ne permet pas de requalifier la démission ( Cass. soc. 13 novembre 1996 )
    De même, le salarié n’est pas tenu de réintégrer l’entreprise lorsque l’employeur revient sur sa décision de considérer le salarié comme démissionnaire.

 

  1. Les limites à la liberté de démissionner

Certaines clauses contractuelles peuvent limiter la liberté de démissionner du salarié.

  1. L’existence d’une clause de non-concurrence
    Le but d’une clause de non-concurrence est d’interdire au salarié, après la résiliation de son contrat de travail, d’exercer certaines activités susceptibles de nuire à son ancien employeur dans un secteur géographique et professionnel déterminé. Bien que cette interdiction doit toujours être limité dans le temps, dans l’espace ou dans son objet, l’existence d’une telle clause limite la possibilité du salarié de démissionner. C’est d’ailleurs dans le but principal d’éviter les démissions intempestives que ces clauses sont prévues par les conventions collectives ou les contrats de travail !

En l’absence d’une telle clause, le salarié retrouve à l’expiration du contrat de travail la liberté d’exercer l’activité de son choix, même concurrente à celle de son ancien employeur, à condition toutefois que cette nouvelle activité ne s’exerce pas dans des conditions déloyales.

Conseil : Il est conseillé au salarié de vérifier le bien fondé de sa clause de non-concurrence. En effet, la clause de non-concurrence ne doit pas être trop restrictive. Ainsi, les juges considèrent que pour être légale, la clause de non-concurrence doit être nécessaire à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise. Elle ne doit pas empêcher le salarié de retrouver un autre emploi compte tenu de sa formation et de son expérience professionnelle. A défaut, la clause peut être cassée par les juges du Conseil de prud’hommes et le salarié peut bénéficier de dommages et intérêts.

La convention collective ou le contrat de travail peuvent prévoir que la mise en œuvre d’une clause de non-concurrence entraîne le versement d’une indemnité en faveur du salarié, destiné à compenser le préjudice subi. Le montant de cette indemnité est variable, allant du tiers au deux tiers du salaire mensuel des trois au douze derniers mois. Cette indemnisation est alors versée chaque mois par l’employeur pendant toute la durée de l’interdiction fixée par la clause de non-concurrence.
Si le salarié ne respecte pas la clause de non-concurrence et exerce une activité interdite, l’employeur a la possibilité de cesser le versement de l’indemnité et le salarié peut être contraint de payer à l’employeur des dommages et intérêts.

Cette indemnité est due même si, en pratique, le salarié se trouve dans l’impossibilité d’exercer effectivement une activité concurrente (maladie, expatriation, etc.)

Même si aucune indemnité n’est prévue, le salarié démissionnaire doit tout de même respecter la clause de non-concurrence.
Toutefois, l’employeur peut aussi renoncer à la clause de non-concurrence et donc au versement éventuel d’une indemnité si cette faculté de renonciation est prévue dans le contrat de travail ou la convention collective. Dans ce cas, le salarié retrouve sa totale liberté dès la fin de son préavis de démission.

  1. L’existence d’une clause de dédit-formation
    Une clause de dédit-formation aboutit également à restreindre la liberté de démissionner du salarié. En effet, une clause de dédit-formation interdit au salarié de quitter l’entreprise avant un certain temps sous peine de verser à l’employeur des dommages et intérêts, dont le montant est fixé dans le contrat de travail. Dès lors, l’existence d’une clause de dédit formation ne doit pas empêcher le salarié de sa possibilité de démissionner (tout comme l’employeur de sa possibilité de licencier le salarié).
    La mise en œuvre d’une clause de dédit-formation constitue la contrepartie de la formation, financée par l’entreprise, que le salarié a reçu dans le cadre du plan de formation ou d’un congé individuel de formation non pris en charge par l’OPACIF (organisme paritaire pour le congé individuel de formation).

 L’indemnité mise à la charge du salarié doit correspondre à des frais réels engagés par l’employeur, au-delà des dépenses imposées par la loi ou la convention collective. Toutefois, le tribunal conserve la faculté de réduire l’indemnité mise à la charge du salarié si celle-ci a été fixée forfaitairement et qu’elle est manifestement excessive.

  1. La forme de la démission
  2. Une absence de formalisme légal
    En principe, la démission n’est soumise à aucun formalisme spécifique. La démission peut donc être écrite ou verbale. Par ailleurs, cette absence de formalisme légal explique l’existence de multiples contentieux pour déterminer l’auteur de la rupture.
    Ainsi, pour des raisons de preuve, il est toujours recommandée que la démission soit notifiée par écrit, par lettre recommandée avec accusé de réception ou encore qu’une lettre de démission soit remise en main propre à l’employeur contre décharge.

Ont été déclarées comme valant démission, les déclarations orales suivantes : « A partir de ce jour, je ne fais plus partie de l’entreprise » (Cass. soc., 10 décembre 1980), « Je prends ma veste et je m’en vais » (Cass. soc., 8 octobre 1970).

  1. Les règles conventionnelles
    De nombreuses conventions collectives imposent que la démission soit notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception. Toutefois, la jurisprudence considère que le non-respect de cette règle conventionnelle ne suffit pas, à lui seul, à remettre en cause la décision de démissionner du salarié (Cass. soc., 27 mai 1992).

 

       

Section 2 : Le régime juridique de la démission :

 

            La démission étant unilatérale, dès lors que librement décidée par le salariée, elle n’a pas à être acceptée par l’employeur. Il n’existe aucune condition de fond ni de forme pour que la démission soit valable. Toutefois, un écrit apparaît souhaitable pour des raisons probatoires.

La démission du salarié ne doit pas pour autant pas être intempestive, puisque nuisible au bon fonctionnement de l’entreprise. La loi a ainsi prévu le principe du respect par le salarié d’un délai de congé (préavis ; L. 122-5 Code du travail). S’il y a brusque rupture et que l’entreprise subit un préjudice, l’employeur peut demander des dommages et intérêts.

            Lorsque le salarié démissionne, il n’a pas à motiver sa démission. Cependant, si celle-ci est abusive, elle ouvre droit à des dommages et intérêts au profit de l’employeur (L. 122-13 du Code du travail). Cette qualification de démission est peu favorable pour le salarié, celui-ci n’ayant pas droit aux indemnités de rupture attachées au licenciement. Sauf exception, le salarié n’a pas droits aux allocations de l’assurance chômage postulant la perte involontaire de l’emploi.

 

 

Chapitre 2 : La prise d’acte.

 

            En tant que mode de rupture du contrat, la prise d’acte s’est illustrée dans les années 1970-90. Il s’agissait pour l’employeur (suivi par la jurisprudence), de prendre acte d’une rupture censée être imputable au salarié et donc d’échapper à la réglementation du licenciement (cf. maladie prolongée du salarié, inaptitude physique à l’emploi…). Cette jurisprudence a été bannie dans les années 1990-92 et est réapparue à la fin du XXème sous la notion de rupture imputable au salarié.

            En 2003, la Cour de cassation a finalement rejeté le recours à la prise d’acte par l’employeur. Désormais, l’employeur prenant l’initiative de rompre le contrat ou qui le considère comme rompu du fait du salarié, doit nécessairement mettre en œuvre une procédure de licenciement. A défaut, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Ainsi sont intervenus cinq arrêts du 25 juin 2003, établissant une jurisprudence constante.

            Ces arrêts ont mi un terme à la jurisprudence dite de « l’auto licenciement du salarié ». Selon cette jurisprudence, un salarié pouvait prendre acte de la rupture du contrat du fait de l’employeur et même si les griefs invoqués n’étaient pas fondés, il ne pouvait pas être considéré comme démissionnaire. Si l’employeur ne contestait pas la rupture, celle-ci était analysée automatiquement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (26 septembre 2002, MOKA). Désormais, lorsqu’un salarié prend acte de la rupture du contrat en raison de faits qu’il reproche à l’employeur. Cette rupture produit soit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les griefs étaient justifiés, soit les effets d’une démission lorsque les griefs sont justifiés. Le juge contrôle le bien fondé des griefs même s’ils ne sont pas mentionnés dans lettre de prise d’acte (Cass. Soc., 29 juin 2005).

Chapitre 3 : La retraite.

 

            Le départ à la retraite n’a aucun caractère automatique et résulte toujours d’une initiative du salarié ou de l’employeur.

 

Section 1 : Le départ à la retraite.

 

            C’est dans ce cas le salarié qui prend l’initiative du départ à la retraite. Le salarié qui remplit la condition d’âge pour prétendre à une pension de vieillesse, peut décider de son départ à la retraite. Ce dernier est un mode autonome de rupture du contrat. Le salarié doit respecter un délai congé ou préavis étant le même qu’en cas de licenciement. Son départ est indemnisé au minimum par une indemnité légale de départ à la retraite variant d’un demi mois à deux mois de salaire, en fonction de l’ancienneté. De plus, le régime de cette indemnité est peu avantageux sur le plan social et fiscal.

 

Section 2 : La mise à la retraite.

 

            La loi a mis en place un mode autonome de rupture du contrat par l’employeur appelé mise à la retraite, dont le régime se distingue du licenciement tout en étant assez proche. Depuis la loi réformant les retraites du 21 août 2003, l’employeur ne peut plus mettre à la retraite un salarié avant l’âge de 65 ans, à partir duquel toute personne bénéficie d’une retraite à taux plein quelle que soit sa durée d’assurance. Il existe deux dérogations :

            Un accord collectif étendu peut ainsi avant le 1er janvier 2008 prévoir un âge de mise à la retraite inférieur à 65 ans.

            La mise à la retraite est possible avant 65 ans, lorsque le salarié est en fin de dispositif de préretraite et qu’il peut bénéficier d’une retraite à taux plein. Le salarié mis à la retraite bénéficie d’un préavis dont la durée est identique à celle du licenciement. Il est indemnisé au minimum au niveau de l’indemnité légale de licenciement. Ces indemnités sont dans certaines proportions totalement exonérées sur le plan social et fiscal. Si les conditions de la mise à la retraite ne sont pas réunies, la rupture par l’employeur sera qualifiée de licenciement (devant respecter toutes les règles de fond et de forme). L’employeur ne pourra pas motiver ce licenciement par l’âge du salarié, mais par un motif y étant extérieur (économique…).

 

Chapitre 4 : La résiliation judiciaire et la force majeure.

 

Section 1 : La résiliation judiciaire.

 

            Selon l’article L. 121-1 du Code de travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun.

            Pour les salariés investis de fonctions représentatives, la Cour a interdit le recours à la résiliation judiciaire du contrat car il porterait atteinte à leur statut protecteur en matière de licenciement. Ceci résulte des arrêts du 21 juin 1974 PERRIER de la Chambre mixte.

            Pour les salariés ordinaires, la jurisprudence a dans un premier temps admis la coexistence de la résiliation judiciaire et du licenciement. Elle a par la suite procédé par étape jusqu’à exclure dans le cadre du CDI le recours à la résiliation judiciaire par l’employeur au motif qu’il dispose du droit de résiliation unilatéral par la voie du licenciement en respectant les garanties légales. Cette exclusion résulte de l’arrêt du 13 mars 2001. Il s’agit de préciser que quelques temps plus tôt, la Cour avait ainsi statué dans le cas d’un CDD, dans l’arrêt du 15 juin 1999. Conséquemment, l’employeur ne peut agir en résiliation judiciaire que lorsque le Code du travail l’y autorise expressément (contrat d’apprentissage ; rupture anticipée du CDD pour inaptitude physique à la suite d’un risque professionnel).

            La demande de résiliation a des effets pour l’employeur, puisqu’elle s’analyse en un licenciement qui sera sans cause réelle et sérieuse.

            En revanche, la jurisprudence permet au salarié de demander la résiliation judiciaire et les y encourage (tous les employés pouvant la demander, y compris les salariés protégés depuis l’arrêt de revirement du 16 mars 2005).

 

Section 2 : La force majeure.

 

Dans le CDD comme dans le CDI, la jurisprudence a admis que la force majeure pouvait être une cause valable de rupture du contrat de travail en se référant au droit commun (évènement ayant pour effet de rendre impossible la poursuite du contrat de travail ; cf. Cass., 12 février 2003).

Les cas d’admission de la force majeure sont très rares en droit du travail. Le législateur a depuis 2002 prévu un régime d’indemnisation du salarié, correspondant dans le CDD au montant des salaires jusqu’au terme du contrat, et dans le cadre du CDI, à une indemnité compensatrice dont le montant est égal à l’indemnité légale de licenciement pour motif personnel à laquelle s’ajoute une indemnité compensatrice de préavis. Ces indemnités étaient jusqu’à présent à la charge de l’AGS et à partir de janvier 2006 à la charge l’employeur.

 

 

Chapitre 5 : la rupture amiable :

 

Le contrat de travail peut cesser par la volonté des deux parties sur le fondement de l’article 1134 du Code civil, et ce tant pour des motifs personnels que pour des motifs économiques. L’acte de rupture doit satisfaire aux conditions de validité des conventions et particulièrement quant à l’absence de vices du consentement. La jurisprudence se montre particulièrement méfiante vis-à-vis de ce mode de rupture, cette dernière étant irrévocable, et n’entraînant aucune indemnisation pour le salarié. La Cour de cassation a exclu ce mode de rupture du contrat pour les salariés protégés, c’est-à-dire non seulement les représentants du personnel et représentants syndicaux, mais aussi pour les salariés victimes d’un accident du travail ou maladie professionnelle.

Par ailleurs, la Cour s’est employée en distinguer la rupture amiable (l’objet de l’accord porte sur le principe même de la rupture et ce en l’absence de tout litige, sans nécessité de concessions réciproques) d’un autre procédé n’étant pas un mode de rupture : la transaction (accord au terme duquel les parties à un conflit né ou à naître y mettent fin à l’amiable en se faisant des concessions réciproques) -29 mai 1996, PURIER-. La transaction n’est valable que si elle a été conclue après réception par le salarié de la lettre de licenciement.

 

 

Sous titre 2 : le droit du licenciement :

Il se définit comme le droit de résiliation unilatérale du CDI de droit commun par l’employeur. La jurisprudence a une large acception de la notion, puisqu’il s’agit d’une rupture à l’initiative de l’employeur mais également de toutes ruptures par le fait fautif de l’employeur.

Il existe plusieurs régimes juridiques en fonction de la qualification donnée au licenciement. Deux catégories de licenciement coexistent avec d’une part le licenciement pour motif personnel (licenciement disciplinaire et licenciement pour motif personnel non disciplinaire) et d’autre part le licenciement pour motif économique.

 

Chapitre 1 : le licenciement pour motif personnel :

 

C’est la loi du 13 juillet 1973 qui a fixé la base du droit de licenciement. Cette réforme a eu deux apports essentiels, d’abord sur le plan formel (respect d’une procédure préalable) et ensuite au niveau du fond (acte juridique causé au sens ou tout licenciement doit être fondé sur une cause réelle et sérieuse).

 

Section 1 : la procédure préalable au licenciement :

 

Celle-ci s’applique quelle que soit la situation du salarié. Néanmoins, le licenciement disciplinaire obéit à des règles procédurales originales en raison du cumul et de la combinaison de la loi de 1973 avec la loi Auroux de 1982 sur le droit disciplinaire. La procédure préalable est obligatoire même en cas de faute grave ou lourde du salarié.

Pour permettre une mise à l’écart du salarié pendant la procédure l’employeur peut prononcer une mesure immédiate d’attente appelée mise à pied conservatoire devant être concomitante à la convocation à l’entretien préalable et à défaut, le juge considèrera qu’il s’agit d’une mise à pied disciplinaire.

La procédure préalable qui garanti les droits de la défense et le principe du contradictoire se déroule en plusieurs phases.

 

  • La convocation à l’entretien préalable :

 

  1. Les formes de la convocation :

Elle doit être impérativement faite par écrit. L’employeur a le choix entre deux possibilités et soit il convoque par lettre recommandée avec AR, soit il remet la lettre en mains propres au salarié contre décharge (L. 122-14 du Code du travail).

 

  1. Les délais :

 

De façon générale, la loi ne fixe pas de délai pour la convocation. Cette règle est cependant écartée lorsque le licenciement intervient pour faute du salarié (cf. cumul) et l’employeur doit respecter le délai de prescription de deux des faits fautifs pour convoquer le salarié, la convocation interrompant la prescription (L. 122-44).

Le licenciement qui interviendrait après une convocation tardive est considéré comme sans cause réelle et sérieuse. La jurisprudence est sur ce point constante.

En outre, même si l’employeur respecte ce délai, la jurisprudence exige qu’en cas de faute grave et a fortiori faute lourde, la mise en œuvre de la procédure de licenciement intervienne dans un délai restreint après que l’employeur ait eu connaissance des faits et dès lors qu’aucune vérification ou investigation n’apparaît nécessaire (Cass., 16 juin 1998).

 

  1. Le contenu de la convocation :

 

Il est fixé par l’article R. 122-2-1 :

La convocation doit indiquer l’objet de l’entretien (précision substantielle). La lettre doit être explicite et clairement indiquer au salarié qu’un licenciement est envisagé. L’objet ne consiste pour autant pas en les motifs du licenciement envisagé.

Elle doit mentionner le lieu (la Cour de cassation admet que le lieu de l’entretien n’est pas nécessairement le lieu de travail et ce peut être le lieu du siège social ou tout autre lieu s’il existe une justification, dans ce dernier cas, le salarié a droit au remboursement de ses frais de déplacement), la date (entretien ne pouvant avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation au salarié de la lettre recommandée de convocation ou sa remise en mains propres, à défaut irrégularité de la procédure entraînant un préjudice pour le salarié selon la jurisprudence) et l’heure (il peut se tenir en dehors du temps de travail sans qu’il y ait irrégularité de procédure, mais si le salarié subi un préjudice il doit être indemnisé) de l’entretien.

Elle doit mentionner la possibilité pour le salarié de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise. De plus, en l’absence d’Inst. Rep. du Pers. (IRP) dans l’entreprise ou l’unité économique et sociale, la lettre doit indiquer que le salarié peut se faire assister par une personne de son choix inscrite sur une liste dressée par le préfet (Conseiller du salarié) et préciser l’adresse des services où la liste des conseillers est à la disposition des salariés (adresse de l’Inspection du travail et de la mairie).

 

  • L’entretien proprement dit :

 

  1. Les participants à l’entretien préalable :

 

L’employeur peut se faire assister ou représenter, mais il est exclu qu’il le fasse par une personne étrangère à l’entreprise. De plus, l’entretien préalable est nécessairement individuel (exclusion d’autres employés).

L’assistance du salarié est possible et pour ce qui concerne sa représentation, la question n’est pas clairement tranchée mais certaines cours d’appel l’ont admise.

 

  1. La tenue de l’entretien :

 

La jurisprudence considère que l’entretien est une garantie pour le salarié et sa présence n’est donc pas obligatoire mais son absence ne fait pas obstacle à la poursuite de la procédure par l’employeur. L’entretien doit donner lieu à un débat contradictoire. S’il n’indique pas les motifs, il s’agit d’une simple irrégularité de procédure. Le salarié doit pouvoir s’exprimer librement et ses propos ne peuvent justifier le licenciement sauf abus. Les textes ne prévoient pas la rédaction d’un PV à l’issue de l’entretien. Néanmoins, si l’employeur prend l’initiative d’en rédiger un, le salarié n’est pas tenu de le signer et n’aura dans ce cas aucune valeur probante.

Le témoignage de l’assistant ou du conseiller comme moyen de preuve, la jurisprudence considérant que la preuve est libre en matière prud’homale, le juge peut le retenir et est libre d’en apprécier la valeur et la porté.

 

 

  • La notification du licenciement :

 

  1. Le délai :

 

Selon l’article L. 122-14-1, l’employeur doit laisser s’écouler un délai de deux jours ouvrables après la date fixée pour l’entretien avant d’expédier la lettre de notification du licenciement.

Le non respect de ce délai constitue une irrégularité de forme.

Il n’existe en revanche pas de délai maximum pour notifier le licenciement sauf en cas de licenciement pour faute, licenciement disciplinaire, auquel la jurisprudence applique le délai d’un mois maximum de l’article L. 122-41 du Code du travail.

Le licenciement tardif est jugé comme sans cause réelle et sérieuse par l’employeur. C’est la date de présentation de la lettre recommandée de notification qui fixe le point de départ du délai de préavis lorsque le salarié y a droit.

 

  1. La forme de la notification :

 

Selon L. 122-14-1 Doit intervenir par lettre recommandée avec AR. La jurisprudence considère que ce n’est pas là une formalité substantielle et mais un mode de preuve de la date de licenciement. Une lettre simple ou remise en mains propres ne constitue par une irrégularité de procédure. En revanche, le licenciement verbal est nécessairement sans cause réelle et sérieuse.

 

           

Selon l’article L 114-20 du Code du travail la notification du licenciement doit être faite par lettre RAR. La Cour de cassation juge que cette lettre recommandée n’est pas une formalité substantielle mais un mode de preuve de la date du licenciement. En conséquence une lettre simple ou remise en mains propres ne constitue pas une irrégularité de procédure. En revanche, le licenciement verbal est nécessairement sans cause réelle et sérieuse.

 

C/ La motivation.

 

            Selon l’article L 122-14-2 du Code du travail, l’employeur est tenu d’énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement. Cette règle vaut pour tout type de licenciement. La Cour de cassation a précisé que c’est la lettre de licenciement ou de rupture et elle seule qui doit contenir cette motivation. Ce principe a été rappelé par 3 arrêts de l’assemblée plénière de la Cour de cassation. La jurisprudence a donné à cette obligation de motivation, qui est une règle de fond, une portée absolue. Ainsi peu importe que le salarié demande à l’employeur de ne pas faire figurer le motif dans la lettre de licenciement. Peu importe que les motifs soient connus du salarié, soit parce qu’ils lui ont été dans d’autres documents que la lettre de licenciement ou qu’il en ait été informé lors de l’entretien préalable. L’obligation est une règle absolue. Il importe que les motifs énoncés par l’employeur ne soient pas imprécis, car l’énoncé d’un motif imprécis équivaut à une absence de motif. En l’absence de motif, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Ces principes ont été posé dans un arrêt ROGIE, 29 novembre 1990 ; depuis la jurisprudence est constante.

            Le motif personnel est suffisamment précis selon la jurisprudence dès qu’il est matériellement vérifiable. L’énoncé du motif doit être assez explicite pour être identifié en tant que tel et qu’il repose sur des éléments objectifs de telle sorte que le juge puisse en vérifier la pertinence. Motifs imprécis : la seule référence à une faute grave ou lourde, difficultés relationnelles, incompatibilité d’humeur, perte de confiance ou mésentente, problèmes que vous occasionnez. Motifs précis : insuffisance de résultats, insuffisance professionnelle, harcèlement sexuel. L’employeur peut invoquer plusieurs motifs dans la lettre à plusieurs conditions. Le cumul n’est possible qu’entre des motifs personnels, par exemple, une faute grave et une inaptitude physique ; un motif personnel et un motif économique ne peuvent être cumulés. Seuls des faits distincts peuvent constituer des motifs de licenciement. L’employeur doit respecter des règles de procédure inhérentes à chaque cause de licenciement. Sur le cumul de motif, Soc, 23 septembre 2003, Droit social 2003, p. 119. La motivation du licenciement joue un rôle fondamental en cas de contentieux, car les motifs qui sont invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement fixent les limites du litige. En conséquence, le juge ne peut retenir des motifs différents ou supplémentaires de ceux qui figurent dans la lettre de licenciement. Les limites du litige concernent uniquement les motifs et non la qualification et non qui a été donnée par l’employeur à ces motifs. Le salarié peut toujours contester que les motifs véritables de son licenciement sont autres que ceux qui figurent dans la lettre de licenciement. Le juge doit vérifier la cause exacte du licenciement sans être tenu par les motifs énoncés par l’employeur.

 

  • 4 : Les sanctions des irrégularités de procédure.

 

            Il existe un double régime de sanctions.

 

A/ Les sanctions spécifiques de l’article L 122-14-4 du Code du travail.

            Ces sanctions s’appliquent aux licenciement irréguliers de salariés qui ont au moins deux ans d’ancienneté et qui travaillent dans une entreprise occupant au moins onze salariés. Dans ce cas, le texte prévoit que le tribunal doit condamner l’employeur à accomplir la procédure et accorder au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. La jurisprudence considère que cela n’est qu’une faculté pour le tribunal et en pratique cela n’arrive jamais. Seule l’indemnité est applicable.

            Le tribunal ne peut sanctionner de manière autonome et spécifique l’irrégularité de procédure que si par ailleurs, le licenciement a une cause réelle et sérieuse. Si ce n’est pas le cas, l’irrégularité de fond absorbe l’irrégularité de procédure ce qui se traduit par un non cumul des sanctions.

 

B/ Les sanctions non spécifiques de l’article L 122-14-5 du Code du travail.

            Ce régime s’applique pour les salariés qui ne comptent pas deux ans d’ancienneté ou qui ne sont pas dans des entreprises de plus de 11 salariés. Dans ce cas, l’indemnité est proportionnelle au préjudice subi. Cette indemnité peut se cumuler avec l’indemnité pour absence de cause réelle et sérieuse.

 

Ce double régime connaît une exception : lorsque les règles sur l’assistance du salarié n’ont pas été respectées, tous les salariés ont droit à l’indemnité maximale d’un mois de salaire. Les salariés qui ont moins de deux ans d’ancienneté ou qui travaille dans une entreprise de moins de 11 salariés, pourront bénéficier d’un mois de salaire ou d’une indemnité visée à l’article L 122-14-4. si leur licenciement est sans cause réelle et sérieuse, il pourront cumuler cette indemnité avec des dommages et intérêts  visés à l’article suivant du même Code. Cela ressort de l’arrêt du 5 février 2003, droit social 2003 p 398. 

Section II : L’exigence d’une cause réelle et sérieuse.

 

            Depuis la loi de 1973, cette exigence conditionne le droit de l’employeur de licencier et ce quelque soit l’ancienneté du salarié, l’effectif de l’entreprise, le motif du licenciement. Le juge va contrôler la réalité et le sérieux du motif et sanctionner les licenciements injustifiés.

 

  • 1 : La notion de cause réelle et sérieuse.

 

            Cette notion est centrale, mais qui ne fait l’objet d’aucune définition légale. La Cour de cassation n’a pas pallié à ce vide : depuis 1985, elle a abandonné son contrôle de qualification sur la cause réelle et sérieuse du licenciement. La Cour de cassation contrôle la motivation de la décision des juges du fond. Vu les travaux préparatoires de la loi, une cause réelle est une cause objective, existante et exacte. Une cause sérieuse est une cause d’une certaine gravité qui rend impossible sans dommage pour l’entreprise la continuation du travail et qui rend nécessaire le licenciement. La jurisprudence donne une grande variété d’exemple de rupture.

 

A/ Les motifs de licenciement.

1)      Le motif disciplinaire. Le comportement fautif ne peut résulter que d’un fait imputable au salarié. La jurisprudence tend à limiter le licenciement disciplinaire à des faits strictement relatifs à la relation de travail et ne relèvent pas de la vie personnelle du salarié. Le droit du travail met en place une gradation des fautes. La faute légère ne peut pas justifier un licenciement, mais uniquement des sanctions disciplinaires moindres. La faute sérieuse est une faute qui rend impossible la continuation de l’exécution du contrat de travail et qui justifie le licenciement mais sans rendre impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant le préavis. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis et qui entraîne un licenciement immédiat du salarié. La faute lourde est celle qui révèle l’intention de nuire du salarié à l’employeur ou à l’entreprise, elle justifie la rupture immédiate, sans préavis et elle permet d’engager la responsabilité du salarié.

2)      L’insuffisance professionnelle. Elle consiste en l’inaptitude du salarié d’effectuer son travail de façon satisfaisante. Pour que le licenciement fondé sur l’insuffisance professionnelle repose sur une cause réelle et sérieuse, il faut que l’insuffisance soit fondée sur des éléments objectifs et matériellement vérifiables. Le licenciement pour insuffisance professionnelle échappe en principe au droit disciplinaire, elle ne constitue pas une faute. Selon la jurisprudence, si les erreurs commises par le salarié ne relèvent pas d’une mauvaise volonté délibérée, mais de son insuffisance professionnelle, elles ne peuvent constituer une faute grave, ni même une faute. La jurisprudence est constante Soc 9 mai 2000, droit social 2000, p. 786. En outre, l’insuffisance professionnelle en tant que cause réelle et sérieuse de licenciement doit être appréciée en lien avec l’obligation d’adaptation du salarié. Cette obligation d’adaptation du salarié est une création à la base prétorienne qui a été initiée par l’arrêt EXPOVIT du 25 février 1992. Cette obligation fondée à la base sur l’exécution de bonne foi du contrat de travail et donc sur l’article 1134 du Code civil a été par la suite légalisé dans différents textes. Ces textes prévoient que l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation des salariés à l’évolution de leurs emplois. Cela signifie que l’employeur doit donner au salarié tout au long de l’exécution du contrat la formation adéquate pour suivre les évolutions de l’emploi. A défaut, le licenciement qui serait fondé sur l’insuffisance professionnelle sera dépourvu de cause réelle et sérieuse. Exemple : une secrétaire face à un nouveau logiciel, elle ne s’adapte pas, l’employeur la licencie pour insuffisance professionnelle. Cela est irrégulier car il ne l’a pas formé Soc, 21 Octobre 1998, RJS 12 1998 N°1054.

3)      L’insuffisance de résultats. Ce motif vise essentiellement les secteurs commerciaux et les salariés qui sont rémunérés sur la base d’un rendement lorsque les objectifs ne sont pas atteints. La jurisprudence considère qu’il n’y a pas un lien automatique entre la non atteinte des objectifs et le caractère justifié du licenciement. la Cour de cassation dit que la seule insuffisance de résultats ne peut en soi constituer une cause de licenciement. Plus précisément, l’insuffisance de résultats doit être établie sur la base d’éléments objectifs. Il convient d’une part que les objectifs soient réalistes, c’est-à-dire raisonnables et compatibles avec l’Etat du marché. D’autre part la non réalisation des objectifs doit procéder soit d’une insuffisance professionnelle, soit d’une faute imputable au salarié. Soc, 3 et 4 avril 2001, RJS juin 2001, N°729.

4)      La perte de confiance. Ce motif était autrefois très utilisé. La Cour de cassation a mis un coup d’arrêt à ce recours systématique à la perte de confiance dans un arrêt de principe, FERTRAY, 29 novembre 1990 : « la perte de confiance ne constitue pas en soi un motif de licenciement ». Dans le même arrêt, la Cour dit que tout licenciement pour motif personnel du salarié doit être fondé sur des éléments objectifs. En clair, la Cour de cassation a la volonté d’objectiver le licenciement. c’est ce qui ressort de la dernière formule utilisée : « La perte de confiance ne peut jamais constituer en tant que telle une cause de licenciement même quand elle repose sur des éléments objectifs. Ces éléments peuvent le cas échéant constituer une cause de licenciement. » Cette formulation résulte d’un arrêt de 2004.

5)      La vie personnelle du salarié. La Cour de cassation a posé pour principe qu’un fait relevant de la vie personnelle du salarié ne peut constituer une faute à son encontre. Soc, 14 mai 1997, Bull V, n°175 : un gardien d’immeuble se promenait dans les étages pendant son temps libre avec un fusil. La vie personnelle comporte trois composantes qui sont la vie privée proprement dite : tenue vestimentaire, coiffure, domicile, le droit à l’image, la correspondance ; l’exercice des libertés civiles telles que la liberté de se marier, de divorcer, de consommer ou d’être propriétaire ; l’exercice de la citoyenneté : la liberté d’opinion, la participation à la vie politique,…Par exception, des éléments tirés de la vie personnelle peuvent constituer une cause disciplinaire de licenciement. il en est ainsi notamment lorsque le salarié manque à son devoir de loyauté ou encore lorsqu’un fait de la vie personnelle peut se rattacher à la vie professionnelle : Soc, 25 février 2003, droit social 2003, p.625 ; Soc, 21 octobre 2003, droit social 2004, p. 550. Par ailleurs, le licenciement est possible pour motif personnel non disciplinaire lorsque le comportement de l’intéressé dans sa vie personnelle, compte tenu de ses fonctions et de la finalité propre de l’entreprise a créé un trouble objectif et caractérisé au sein de l’entreprise. Cette jurisprudence a été inaugurée par un arrêt Soc 17 avril 1991, affaire de l’aide sacristain. L’arrêt association Saint Pie X contre Painceq : l’aide sacristain homosexuel et séropositif est licencié par son employeur, le licenciement n’est pas réel et sérieux car il n’y a pas de trouble caractérisé. La cour de cassation admet qu’il n’y a pas de trouble pour la secrétaire d’un concessionnaire Renault licenciée pour avoir acheté une Peugeot : Soc 22 janvier 1992. Inversement, le trouble caractérisé est reconnu pour un salarié d’une entreprise de gardiennage qui en dehors du temps de travail avait commis un vol au préjudice d’un client de l’employeur : Soc, 20 novembre 1991. Le cadre qui tape sa compagne dans les locaux de l’entreprise, constitue un trouble pour l’entreprise. La difficulté est de délimiter vie professionnelle et vie personnelle. La Cour de cassation a reconnu qu’il y a place pour une vie privée au temps et au lieu de travail : en visant l’article 8 de la CEDH, l’article 9 du Code civil et l’article L120-2 du Code du travail, elle a considéré que le salarié a droit même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée. Nikon, 2 octobre 2001, Droit social 2001, p. 915.

 

B/ L’incidence des clauses de garantie d’emploi.

            Le CDI peut contenir une clause de garantie d’emploi par la quelle les parties s’interdise toute résiliation pendant une période déterminée. Pendant cette période, il est admis que le contrat peut être rompu pour faute grave ou cas de force majeure. A défaut le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

            Les conventions et accords collectifs peuvent restreindre le droit de résiliation unilatéral de l’employeur en prévoyant des garanties de fond ou de forme en cas de licenciement. Ils peuvent ainsi limiter le licenciement à des causes déterminées. Le licenciement pour d’autre motifs, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse, voire nul.

            L’employeur peut s’engager par accord collectif à ne pas licencier pendant un certains temps pour motif économique. S’il viole cet engagement et selon la jurisprudence, le licenciement n’est pas sans cause réelle et sérieuse, ce seront des dommages et intérêts qui devront être versés.

 

  • 2 : Le contrôle judiciaire.

 

            En cas de contestation, il appartient au juge de contrôler la cause réelle et sérieuse du licenciement a partir de la motivation de la lettre de licenciement. Il peut être amené à contrôler la cause exacte du licenciement à la demande du salarié. Le juge a le pourvoir de requalifier la faute en considérant qu’il n’y a pas faute grave mais simplement faute sérieuse. Encore faut-il que l’employeur ait rattaché ces faits à la qualification de faute. Soc, 9 mai 2000, Droit social 2000, p. 786.

A/ La charge de la preuve.

            Avant 1973, la charge de la preuve de l’abus du droit de licencier incombait au salarié. La loi de 1973 a innové en mettant en place une procédure inquisitoire. C’est au juge qu’il appartient de forger sa conviction au vu des éléments de preuve fournis par les deux parties et au besoin après avoir diligenté des mesures d’instruction telles que : nomination d’un expert, nomination de conseillers rapporteur. Si un doute subsiste, il profite au salarié : article L122-14-3 du Code du travail. L’employeur supporte le risque de la preuve. Ces principes ne s’appliquent pas lorsque l’employeur invoque une faute grave ou lourde du salarié. Dans ces cas c’est à lui d’établir les faits et de justifier de la qualification de la faute retenue.

B/ Les moyens de preuve.

            Par application de l’article 9 du NCPC, la preuve du motif de licenciement peut être rapportée par tout moyen. Cependant, l’employeur ne peut avoir recours à des moyens de preuve illicites. Ces moyens illicites sont de deux sortes : la première sont des procédés clandestins, c’est-à-dire des procédés mis en œuvre sans information préalable des salariés : l’employeur enregistre à leur insu les salariés au moyen d’une caméra. Lorsque l’employeur fait suivre à son insu un salarié par un détective privé. Sont illicites, les moyens qui portent atteinte à l’intimité de la vie privée dont le secret des correspondances. Ce principe a été dégagé dans l’arrêt Nikon de 2001, dans lequel, la Cour de cassation a considéré que l’employeur ne peut pas prendre connaissance des messages personnels (mails) émis et reçus par le salarié grâce à l’outil informatique mis à disposition pour son travail et ceci même si l’employeur a interdit une utilisation non professionnelle de l’ordinateur. La jurisprudence est constante Soc, 2005, Droit social 2005 p. 789 : condition dans lesquelles un employeur peut avoir accès au disque dur de son employé.

 

  • 3 : Les sanctions du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

            On retrouve le double régime des irrégularités de procédure.

A/ Les sanctions spécifiques de l’article L 122-14-4 du Code du travail.

            Ces sanctions ‘appliquent pour les salariés qui ont au moins deux ans d’ancienneté dans une entreprise d’au moins 11 salariés. Le tribunal peut proposer aux parties la réintégration du salarié avec maintien des avantages acquis. Même si le tribunal propose la réintégration, l’employeur ou le salarié peut la refuser.

            A défaut de réintégration, le tribunal octroi au salarié une indemnité qui ne peut être inférieur au salaire brut des six derniers mois calculé sur la moyenne des trois derniers mois. Cette indemnité est due même si le salarié n’a subi aucun préjudice, si le salarié veut obtenir plus que le minimum, il devra apporter la preuve d’un préjudice supérieur pour obtenir une indemnité supérieure. Le tribunal ordonne le remboursement par l’employeur aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage payées du jour du licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d’indemnité.

            Les sanctions en questions ne se cumulent pas avec les sanctions de l’irrégularité de procédure.

B/ Les sanctions de l’article L 122-14-5 du Code du travail.

            Ces sanctions vont s’appliquer pour les salariés qui ont moins de deux ans d’ancienneté ou qui travaillent dans une entreprise de moins de 11 salariés. Le régime est de droit commun, il y a responsabilité contractuelle, le préjudice est indemnisé. Cette indemnisation se cumule avec les sanctions de l’irrégularité.

 

            Que le licenciement soit fondé ou non sur une cause réelle et sérieuse ou non, le salarié à droit à une réparation sur le fondement de 1382 du Code civil, lorsque le licenciement est prononcé dans des conditions vexatoires ou brutales.

Section III : Les licenciements interdits.

 

            Il existe des interdictions de licencier absolue et relatives qui paralysent le droit de résiliation unilatéral de l’employeur. L’interdiction absolue la plus connue concerne les salariés protégés, dont le licenciement est soumis à autorisation administrative. Le licenciement discriminatoire est formellement interdit. Il est interdit de licencier le salarié victime de harcèlement sexuel ou moral L122-46 et 49 du Code du travail. L’article L122-27 interdit de licencier une salariée pendant son congé de maternité. D’autres textes prévoient des exceptions à l’interdiction de licencier. L’article L122-32-2 du Code du travail qui interdit de licencier pendant son arrêt de travail le salarié victime d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle sauf en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat. Au-delà de ces interdictions textuelles, la question s’est posée de l’existence d’autres causes illicites de licenciement. la Cour de cassation a répondu dans une affaire Clavaud, 28 avril 1988 : un salarié d’une entreprise de pneus, s’était exprimé dans la presse sur son entreprise. La Cour de cassation reconnaît la liberté constitutionnelle d’expression et reconnaît la nullité du licenciement dans tous les cas où il y a violation du droit du travail. Le licenciement interdit est nul, le salarié a droit à sa réintégration et au paiement de l’arriéré des salaires ; si le salarié ne souhaite pas être réintégré, il a le droit aux indemnités de rupture, ainsi qu’à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice au moins égale aux six mois de salaire, visée à l’article L122-14-4 du Code du travail.

 

Chapitre 2 : Le licenciement économique.

 

            Définition : Article L321-1 du Code du travail. Plusieurs conditions : le licenciement est qualifié d’économique dès lors que le motif est non inhérent à la personne du salarié ; le licenciement économique doit être fondé sur une cause économique réelle et sérieuse. Il y a par combinaison de la loi et de la jurisprudence, 4 causes admises : les difficultés économiques, les mutations technologiques, la réorganisation pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et la cassation d’activité de l’entreprise.

            Cette cause économique doit avoir un impact sur l’emploi ou le contrat. Elle doit entraîner soit la suppression de l’emploi, soit sa transformation, soit la modification d’un élément essentiel du contrat refusé par le salarié.

            Par ailleurs, le licenciement économique doit être l’ultime solution, c’est-à-dire que l’employeur doit avant la notification du licenciement avoir fait tous les efforts de formation et d’adaptation du salarié, ainsi qu’avoir tenté de reclasser le salarié, y compris dans un emploi de catégorie inférieure.

            Il existe des procédures complexes de licenciement économique : il existe une procédure individuelle, une procédure du petit collectif (de 2 à 9 salariés licenciés sur 30 jours), une procédure du grand licenciement (au moins 10 salarié licenciés sur 30 jours). Dans ce dernier cas, le CE négocie et non le salarié.

            Le licenciement économique fait l’objet de mesures sociales d’accompagnement qui sont au nombre de 3.

            Le Plan de sauvegarde pour l’emploi (PSE) : il doit être établi par l’employeur dans les entreprises d’au moins 50 salariés et qui envisagent au moins dix licenciements économiques sur une période de trente jours. Le PSE est un ensemble de mesures de reclassement, des actions de formation, des actions de réduction du temps de travail ou du volume des heures supplémentaires. Le but du plan est d’éviter des licenciements ou d’en limiter le nombre et de faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité. 

            La convention de reclassement personnalisée (CRP) doit être proposée à tout licencié économique ayant au moins 2 ans d’activité dans une entreprise de moins de 1000 salariés. S’il accepte la convention, le salarié va bénéficier d’un plan de reclassement personnalisé, de prestations d’accompagnement et d’aides diverses au reclassement. S’il accepte la convention, la rupture du contrat a lieu par commun accord des parties et durant la durée du congé qui est de 8 mois après la rupture, l’individu aura le statut de stagiaire de la formation professionnelle. Ces individus n’apparaissent pas comme chômeurs dans les statistiques.

            Le congé de reclassement va s’appliquer pour tous les salariés licenciés économiques mais uniquement dans les entreprises d’au moins 1000 salariés. Le dispositif est différent, le congé débute durant le préavis et entraîne suspension du contrat de travail durant un délai de 4 à 9 mois. Toutes les prestations d’aide au reclassement sont à la charge de l’entreprise ainsi que le maintien de l’essentiel de la rémunération.

 

Sous-titre III : Les effets de la rupture du contrat de travail.

 

            Il existe des effets communs aux différentes ruptures du contrat de travail. Il s’agit de la remise de documents obligatoires qui sont le certificat de travail et l’attestation Assedic ainsi que de la signature facultative d’un reçu pour solde de tout compte qui est en quelque sorte un relevé des sommes versées à l’employé lors de la rupture de son contrat de travail. Il y a des effets qui sont propres à certains modes de rupture : le congé et les indemnités.

 

Le délai congé ou préavis est dû dans les cas de rupture unilatérale du contrat, c’est un délai de prévenance qui permet à son destinataire de s’organiser avant que le départ ne devienne effectif. En cas de démission, l’existence et la durée du délai congé résulte soit des conventions collectives, soit des usages art L.122-5 du Code du travail. En cas de licenciement, l’article L122-6 du Code du travail qui date d’une loi de 1958, a institué un préavis légal dont la durée varie en fonction de l’ancienneté du salarié à la date de notification du licenciement. la loi prévoit des tranches d’ancienneté : lorsqu’elle est inférieure à 6 mois, la durée du délai congé est fixée par la convention collective et à défaut par les usages ; entre 6 mois et moins de 2 ans, le préavis légal est d’un mois de préavis. A partir 2 ans d’ancienneté, le délai est de 2 mois. Lorsque le licenciement est prononcé pour faute grave et donc pour faute lourde, le salarié n’a pas droit à un délai congé. Pendant la durée du préavis, qui débute lors de la notification de la rupture, le contrat de travail va s’exécuter aux mêmes conditions. L’employeur peut aussi dispenser unilatéralement le salarié d’exécuter son préavis et cette dispense figure dans la lettre de licenciement : l’employeur dispense le salarié de travailler à condition de lui verser une indemnité compensatrice dont le montant est égale aux sommes qu’il aurait perçues s’il avait fourni sa prestation de travail jusqu’à l’expiration du préavis.

 

Les indemnités de licenciement. Depuis 1967, le salarié licencié qui compte 2 ans d’ancienneté au service d’un même employeur à droit à une indemnité légale de licenciement Article L122-9 du Code du travail. Le salarié n’a pas droit à cette indemnité s’il a commis une faute grave et a fortiori lourde, avant la notification du licenciement. Selon l’article R122-2 du Code du travail, l’indemnité légale se calcule par année de service dans l’entreprise, sachant que les taux applicables sont différents en fonction du motif du licenciement. Premièrement, lorsque le motif du licenciement est personnel, l’indemnité est de 1/10 de mois de salaire par année d’ancienneté. A partir de 10 ans d’ancienneté, on compte 1/10 + 1/15 par année d’ancienneté. Deuxièmement, pour motif économique, les taux ci-dessus sont doublés. Cette indemnité de licenciement, contrairement à l’indemnité compensatrice de préavis n’a pas la nature de salaire mais celle de dommages et intérêts, ce qui est plus intéressant sur le plan social et fiscal.

 

 Chapitre 1er : La modification du contrat de travail.

 

            Le contrat de travail étant un contrat à exécution successive, un certain nombre d’évènements affectant l’entreprise ou le salarié vont nécessiter des adaptations du contrat. D’un côté, le droit du travail permet à l’employeur de réviser les conditions de travail et ceci dans le cadre de son pouvoir de direction qui place le salarié sous la subordination de son employeur. D’un autre côté, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun et la modification du contrat et la modification du contrat n’échappe pas aux règles de l’article 1134 du Code civil.

 

Section I : La distinction jurisprudentielle.

 

            Le Code du travail ne s’est pas préoccupé de la modification du contrat de travail. La jurisprudence a établi dans les années 1980, une distinction entre la modification substantielle du contrat de travail et celle non substantielle. A partir de 1992, la Cour de cassation a amorcé une évolution qui a conduit à l’abandon de cette distinction dans deux arrêts de revirement du 10 juillet 1996, Van Der Donckt et Le Berre. Depuis ces arrêts, la distinction ne porte plus sur le caractère substantiel ou non de la modification mais sur le fait qu’il y a soit modification du contrat, soit changement des conditions de travail dans le cadre du pouvoir de direction de l’employeur. Ce revirement marque un renouveau des techniques contractuelles puisque on met l’accent sur la sphère contractuelle qui ne peut être modifiée que par les deux parties et la phase d’exécution du contrat ou le salarié doit se plier aux ordres et directives de l’employeur. Toute la difficulté va être de déterminer ce qui relève du domaine contractuel et ce qui n’en relève pas, ce qui revient à déterminer le contenu du contrat de travail. La Cour de cassation considère que d’un côté, certains éléments sont de l’essence même du contrat, c’est-à-dire qu’ils sont des éléments par nature contractuelle, ce que la Cour de cassation appelle les piliers contractuels. D’un autre côté, les parties peuvent faire entrer dans le champ contractuel des éléments considérés par elle comme déterminants. Le problème se complique car il ne suffit pas qu’un élément soit énoncé dans le contrat pour qu’il ait une nature contractuelle. Dans le contrat, il y a une cœxistence entre des clauses contractuelle et des clauses informatives.

            Le premier pilier est la rémunération contractuelle, moyennant  quoi la Cour de cassation considère qu’il y a modification du contrat, chaque fois que l’employeur touche à la rémunération contractuelle (montant, structure, mode de calcul,…) même de manière minime et même si la modification est favorable pour le salarié. Il faut être attentif à ma source de la rémunération car elle n’est pas nécessairement contractuelle, elle peut résulter de la loi à travers le SMIC ou des conventions collectives, voire des usages ou des engagements unilatéraux de l’employeur. Dans ce contexte, la Cour de cassation s’est aussi prononcée sur les clauses de variation du salaire. Ces clauses sont valables lorsqu’elles sont fondées sur des éléments objectifs qu’elles ne font pas peser le risque d’entreprise sur le salarié et qu’elle ne réduise pas la rémunération en dessous de minima légaux et conventionnels.

            Le deuxième pilier est la qualification. Le contrat de travail comporte l’embauche du salarié pour effectuer une tache donnée selon une qualification déterminée. Le changement de qualification du salarié constitue une modification du contrat de travail. Il en est ainsi en cas de promotion qui transforme les attributions, mais aussi en cas de réduction de la qualification avec la rétrogradation et l’arrêt hôtel le Berry. Il peut se produire un changement de tache ou de fonction. La Cour de cassation distingue le changement de fonction ne fait pas partie de la qualification, il y a modification du contrat de travail : un salarié embauché en qualité de ripeur à qui on fait effectuer des taches de chauffeur ; un cuisinier affecté à un poste de magasinier. Le changement de tache correspond à la qualification, dans ce cas, il n’y a pas modification du contrat. Arrêt citron banane : un ouvrier qui s’occupait des bananes va cueillir des citrons : 10 Mai 1999. Une femme de ménage fait le ménage de la copropriété, on lui demande de faire le ménage chez les copropriétaires. Il n’y a pas de modification. Changement des conditions de travail si changement du niveau hiérarchique, de la rémunération.

            La durée du travail contractuel (troisième pilier). Selon la Cour de cassation, la durée du travail contractuellement prévue constitue un élément essentiel du contrat qui ne peut donc être modifié sans l’accord du salarié. En revanche, en ce qui concerne les horaires, la notion est plus relative. En principe dans le cadre d’un temps complet, l’horaire de travail et sa répartition relève du pouvoir de direction de l’employeur. En conséquence, un simple changement d’horaire quine touche pas à la durée globale du travail n’entraîne pas modification du contrat de travail. Ce principe connaît deux exceptions. D’une part, lorsqu’il y a bouleversement des horaires (passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit ou inversement, passage d’un horaire fixe à un horaire variable, passage d’un horaire continu à un horaire discontinu). D’autre part, les horaires peuvent avoir été contractualisés, moyennant quoi, il y a modification du contrat si on veut toucher aux horaires. Cette idée explique les solutions déjà vues à propos du travail à temps partiel et sa répartition. Sauf volonté contraire des parties qui auraient considéré l’horaire comme déterminant de leur accord, il n’est pas un élément essentiel du contrat sous réserve qu’il ne touche pas à la durée contractuelle du travail ou à la rémunération et qu’il ne bouleverse pas l’économie du contrat.

            Le lieu de travail. C’est une notion relative comme les horaires de travail, il faut tenir compte de plusieurs circonstances. Une clause du contrat peut mentionner un lieu de travail sans clause de mobilité, dans ce cas, depuis un arrêt du 3 juin 2003, la Cour de cassation considère que la mention du lieu a valeur d’information à moins qu’il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu. Une modification en dehors du secteur géographique. Lorsque le lieu de travail est contractualisé, la mutation du salarié constitue une modification du contrat de travail. En second lieu, une clause du contrat peut prévoir une clause de sédentarité mais pour tenir compte de la nature des fonctions du salarié, prévoir que celui-ci pourra exercer ses fonctions temporairement dans un autre lieu et dans ce cas, il n’y aura pas modification du contrat de travail. En troisième lieu, le contrat peut comporter une clause de mobilité, la mutation du salarié constitue un changement des conditions de travail, sauf si la clause de mobilité affecte la rémunération ou la qualification contractuelle. Quatrièmement, le contrat peut être muet ou informatif sur le lieu de travail. Le contrat ne contractualise pas le lieu et ne comporte pas non plus de clause de mobilité, dans ce cas, le lieu s’entend d’un secteur géographique à l’intérieur duquel les salariés doivent se déplacer. La mutation au sein d’un même secteur géographique ne constitue pas une modification du contrat de travail. La Cour de cassation a précisé que le changement s’apprécie de manière objective, on ne tient pas compte de la situation personnelle du salarié. La difficulté est qu’il n’existe pas de définition jurisprudentielle du secteur géographique. C’est au juge du fond que revient cette définition. Il peut tenir compte des facilités de communication, des transports existants, des habitudes culturelles, de la distance,… Des ajouts sont possibles : la jurisprudence considère que les clauses favorables aux salariés ne peuvent être modifiées sans son accord. Réciproquement, les clauses défavorables ne peuvent être ajoutées sans son accord. Le fait pour un salarié de devenir télétravailleur s’analyse en une modification du contrat de travail. De même, le changement du secteur géographique de prospection d’un VRP constitue une modification du contrat de travail.

 

Section II : Les effets de la distinction.

 

            L’intérêt de la distinction entre modification du contrat et changement des conditions de travail réside dans le régime juridique de la rupture consécutive à un refus du salarié. Ce refus est légitime en cas de modification, il est fautif en cas de changement des conditions de travail.

 

  • 1 : La modification du contrat de travail.

A/ Le problème de l’acceptation du salarié.

 

            L’article L120-1 du Code du travail renvoi à l’article 1134 du Code civil. La modification, quelle qu’en soit sa cause, nécessite l’acceptation du salarié, y compris depuis l’arrêt société hôtel le Berry, lorsque la clause est disciplinaire. Concernant cette acceptation, il faut distinguer deux régimes.

            La proposition de modification a une cause personnelle au salarié. On applique la jurisprudence élaborée dans l’arrêt Raquin et Trappiez, 8 octobre 1987 qui considère que l’acceptation du salarié doit être expresse et non tacite. Selon la jurisprudence postérieure, le salarié devra disposer d’un délai suffisant de réflexion pour lui permettre d’évaluer la portée de cette proposition, cette jurisprudence étant fondé sur l’exécution de bonne foi du contrat de travail.

            Lorsque la proposition de modification repose sur un motif économique, on applique l’article L321-1-2 d’une loi de 1993 qui prévoit que lorsque l’employeur pour motif économique envisage d’apporter une modification à un élément essentiel du contrat de travail, il doit en informer chaque salarié par lettre recommandée avec accusé de réception en lui indiquant la nature de la modification. Cette même lettre doit indiquer au salarié qu’il dispose d’un mois à compter de la réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai, le salarié est réputé (présomption irréfragable) avoir accepté la modification. On en conclu que l’acceptation peut être expresse ou tacite.

            L’employeur qui ne respecte pas les formalités de L321-1-2 ne peut se prévaloir ni d’un refus, ni d’une acceptation, moyennant quoi, s’il licencie, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse.

B/ Le problème de la qualification et de la justification de la rupture.

 

            L’acceptation du salarié est matérialisée par un avenant au contrat.

            En cas de refus du salarié d’accepter la modification, l’employeur a le choix entre deux voies : il renonce à la modification et maintient les conditions de travail antérieures ; il doit rendre la prendre la responsabilité de la rupture et licencier le salarié. La rupture du contrat sera imputable à l’employeur sauf cas exceptionnel où le salarié exprimerait le désir de démissionner. Cette qualification de licenciement va obliger l’employeur à respecter toutes les règles sur le licenciement : non seulement la procédure, l’exigence d’une cause réelle et sérieuse et tous les droits attachés au licenciement. Pour que le licenciement soit justifié, il faut que la modification du contrat envisagé soit elle-même justifiée. En aucun cas, le refus de la modification ne peut constituer le motif réel et sérieux du licenciement. La cause réelle et sérieuse soit être cherchée dans la base de la modification. Deux grandes causes se distinguent : la première cause est la modification pour cause économique. Si l’employeur a inventé des difficultés : licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le deuxième cause est la modification pour motif personnel : la cause de la modification peut être disciplinaire, dans ce cas, le refus du salarié conduira à son licenciement disciplinaire. La cause de la modification peut être personnelle non disciplinaire : une personne insuffisante à son poste de chef, proposition de rétrogradation, refus de la proposition, licenciement pour insuffisance professionnelle.

 

  • 2 : Le changement des conditions de travail.

 

Le changement des conditions de travail n’a pas à être accepté par le salarié, ce changement s’impose à lui en vertu du pouvoir de direction de l’employeur. Le salarié n’a pas de droit au refus. En pratique, il peut refuser, dans ce cas ce refus est qualifié de faute grave. L’employeur peut alors procéder à un licenciement pour faute grave. Cette rigueur a été atténuée par la jurisprudence puisqu’elle prend en compte la situation subjective du salarié et les circonstances de fait et elle vérifie si l’employeur n’a pas manqué à la bonne foi contractuelle. C’est ce qui ressort d’un arrêt du 23 février 2005, RJS 5/2005. La qualification de faute grave n’est pas systématique et le licenciement peut recevoir seulement la qualification de cause réelle et sérieuse.