INSTITUTIONS EUROPÉENNES
Les institutions européennes sont des acteurs politiques de la construction européenne créées par le Traité de Rome en 1957.
Avec le Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 et entré en vigueur le 1er décembre 2009, l’Union européenne se dote de sept institutions (précédemment il y avait cinq institutions).
L’article 13 §1 du Traité sur l’Union européenne liste les sept institutions de l’Union européenne :
Introduction
« L’Europe sera unie ou elle sera cosaque, l’agglomération de l’Europe arrivera tôt ou tard par la force des choses : l’impulsion est donnée, et je ne pense pas qu’il y ait en Europe, d’autre équilibre que l’agglomération des grands peuples ». NAPOLEON
L’unification de l’Europe s’appuie sur de longues traditions intellectuelles, morales ou encore spirituelles, trouvant elles-mêmes leurs sources dans l’Antiquité. A cet égard, les conquêtes de Rome et la romanisation du monde conquis, ont permis l’expansion d’une civilisation et d’une culture fondées à la fois sur l’humanisme hellénique et, à partir des derniers siècles de Rome, sur le christianisme.
Ce double apport n’a cessé de nourrir la tradition européenne, laquelle, malgré les invasions, s’est perpétuée sur cette partie limitée de l’Empire Romain que constitue l’Europe occidentale.
A partir de la fin du Moyen Âge, apparaissent des Etats monarchiques centralisés qui se donnent des administrations, des armées permanentes, des impôts réguliers, et disposent ainsi de forces considérables. Ces Etats sont : la France, l’Espagne, la Grande-Bretagne, puis la Pologne et la Russie.
A l’émiettement féodal succède la formation de grandes unités rivales, mais non pas d’une entité unique.
Le seul lien qui existait alors, l’unité religieuse, disparaît à son tour. L’Europe chrétienne se divise malgré elle avec les guerres de religions au 16ème siècle essentiellement.
Le cadre géographique de l’Europe des temps modernes s’est considérablement élargi par rapport au secteur limité qu’occupait l’Europe chrétienne au Moyen Âge. L’entrée de la Russie a constitué un élargissement conséquent à l’Est. Seul l’Empire Ottoman, qui n’était pas considéré comme faisant partie de l’Europe va progressivement être refoulé. Mais l’élargissement le plus spectaculaire se produisit cependant avec l’expansion coloniale, à l’époque des grandes découvertes et la conquête de nouvelles terres.
L’expansion des rivalités les plus exacerbées a donné lieu à des guerres en Europe et à l’extérieur : course à l’occupation des territoires entre les 5 plus grands territoires : France, Espagne, GB, Portugal et Hollande.
Les territoires occupés alors, étaient considérés comme des prolongements de chacun des territoires, et à aucun moment n’entendaient créer une nouvelle Europe.
Sont alors apparus des problèmes pour préserver l’équilibre entre les grandes puissances, pour éviter la domination d’un Etat sur les autres : système d’alliances.
Aux 17ème et 18ème siècles, on assiste à la naissance du système de l’équilibre. Selon ce principe, les grandes puissances s’équilibraient et se contrôlaient toutes plus ou moins. Le traité d’Utrecht (aux Pays-Bas) de 1713 évoque « le juste équilibre des puissances ». Ce système va correctement fonctionner au 17ème siècle, et permet d’assurer la stabilité entre les 5 grandes nations de l’époque (France, Angleterre, Russie, Prusse, Autriche).
Mais la révolution française va tout bouleverser. Elle apporte de nouveaux principes comme la DDHC, mais aussi comme le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et va mettre à bas des idéologies révolutionnaires qui, à l’époque, faisaient des adeptes en Angleterre, en Italie … et les monarchies qui entouraient la France se sont alors coalisées pour lutter contre une France trop puissante.
Arrive Napoléon et l’expansion va se poursuivre à la faveur de la lutte contre l’Angleterre et ses alliés. En 1811, l’Empire français comptait 130 départements et s’étendait de Hambourg à Rome. Il était, en outre, entouré d’Etats vassaux dont certains dépendaient de Napoléon. A partir de 1814, les monarques européens se mettent d’accord pour revenir au système européen traditionnel, tel qu’il existait avant la révolution française, mais en le fortifiant : concert européen.
Pour METTERNICH, chancelier d’Autriche, « il fallait restaurer l’Europe de l’équilibre et du droit des gens ». Ce point de vue était partagé par TALLEYRAND (royaliste sous Louis XVI, Ministre des Affaires Etrangères de Napoléon, puis de Louis XVIII, puis ambassadeur sous Louis-Philippe) et CASTLEREAGH. Ce fut ici l’œuvre du Congrès de Vienne, qui redessina la carte de l’Europe (après la bataille de Waterloo) en tenant compte de deux principes : la légitimité et l’équilibre. Légitimité car les chefs d’Etats naturels sont des princes, et équilibre car les princes ont le droit de conserver leurs biens et de se défendre contre les entreprises hégémoniques.
La sainte alliance, conclue le 26 septembre 1815 entre la Russie, la Prusse et l’Autriche, évoquait l’existence d’une nation chrétienne existant au-dessus des nations européennes, ainsi que la nécessaire solidarité des monarques, parce que les monarques sont tous frères ou cousins, ont les mêmes intérêts suprêmes, et doivent céder en cas de besoin. Cette alliance a été précisée par le traité secret du 20 novembre 1815 entre la Russie, la Prusse, l’Autriche et l’Angleterre, car elle prévoyait une action commune, si la France menaçait à nouveau le repos des autres Etats. Ce traité secret a aussi prévu des conférences périodiques entre les puissances « afin de se consulter sur les intérêts communs, et d’examiner les mesures propres à assurer le repos et la prospérité des peuples et le maintien de la paix en Europe ».
A partir de 1818, la France des Bourbons a été admise dans ce concert européen qui comprenait alors les 5 grandes puissances (France., Grande-Bretagne, Prusse, Autriche., Russie). Ce concert européen était une forme de directoire des grandes puissances, une sorte de gouvernement de fait de l’Europe, qui s’est révélé plutôt efficace de 1824 à 1914, et nombre de questions politiques intéressant l’ensemble du continent sont réglées dans ce cadre.
Ainsi, la conférence de Londres de 1830 a permis de régler l’affaire Belge.
Une autre évolution notable a eu lieu en 1856, à la conférence de Paris, qui admet l’Empire Ottoman dans le concert européen.
En 1878, à Berlin, est réglée la question Balkanique.
En 1885, toujours à Berlin, c’est la question des frontières coloniales qui est réglée.
Mais en 1870, ce concert s’est révélé inefficace lorsque 2 grands Etats s’affrontent (France et Prusse), tout comme en 1914. Au lendemain du premier conflit mondial, en 1918 et après, le problème de l’organisation de l’Europe en tant que continent commence à être clairement perçu (section I). Mais il faut attendre la fin de la Seconde Guerre Mondiale pour que ces projets se concrétisent (section II).
SECTION I : Les différentes tentatives d’organisation de l’Europe avant la Seconde Guerre Mondiale
La volonté de doter le continent européen de structures de coopération capables d’assurer la sécurité collective et la prospérité économique, est antérieure à la mise en place des organisations fondées après 1945, ce que l’on appelle aujourd’hui communément « l’idée d’Europe », idée ancienne dont on trouve de nombreuses traces.
En dépit des guerres innombrables, du haut du Moyen Âge à la première guerre mondiale, de nombreuses voix se sont élevées pour déplorer le morcellement de l’Europe. Dès le début du XIVe siècle, ont fleuri des plans pour une unification politique. À cette époque, certains éprouvaient une certaine nostalgie pour l’empire chrétien.
Ainsi, au début du XIVe siècle, DANTE souhaitait la soumission des monarques à l’empereur pour assurer la paix universelle. Mais cette conception était déjà dépassée en son temps, car les souverains ne voulaient plus de l’arbitrage du pape ou de l’empereur. Il fallait donc trouver un moyen d’arbitrer quand même. Comme ce projet ne pouvait fonctionner, Pierre Dubois proposa que cette fonction d’arbitre soit exercée par une assemblée de délégués de princes.
En 1464, le roi de Bohême, Georges de PODEBRADY abondait également dans ce sens.
En 1623, Emeric CRUCEE (prêtre et professeur de mathématiques) publie le nouveau Cyne, ouvrage dans lequel il préconise l’organisation de la paix internationale par l’arbitrage. Il envisageait qu’une assemblée permanente siège à Venise afin d’exercer cette fonction d’arbitre, ce qui permettrait à la fois le maintien et le développement des échanges économiques.
De son côté Sully (premier ministre d’Henri IV) prêtait à Henri IV le grand dessein de réorganiser l’Europe en 15 États de forces égales dont les délégués formeraient un conseil général chargé d’arbitrer et disposant des forces armées.
En 1693, William PENN publia un essai sur la paix en Europe dans lequel il préconise l’institution d’une diète européenne qui aurait été composée de représentants des Etats, en nombre proportionnel à l’importance démographique et économique de chacun d’entre eux. Cette diète aurait dû prendre ces décisions à la majorité des ¾ et disposerait également d’une armée pour les faire respecter. Si un tel projet voyait le jour, selon William PENN, ainsi régnerait la paix et pourraient se développer le commerce et la prospérité d’autant qu’il deviendrait possible de faire des économies d’armée.
Dans son Projet pour rendre la paix perpétuelle en Europe, l’abbé de Saint-Pierre envisageait le projet de sécurité collective garantissant l’existence et l’intégrité des Etats participants (décision à la majorité des 2/3). Mais ses idées étaient novatrices et furent mal vues.
Jérémie BENTHAN, juriste anglais, dans son ouvrage plan d’une paix universelle et perpétuelle rédigé en 1789, introduit une idée nouvelle, celle de la pression de l’opinion publique internationale.
KANT, en 1795, dans son Projet de paix perpétuelle, préconise l’établissement d’une société des nations sur la base d’un « État de droit » international. Dans son ouvrage, il esquisse une véritable théorie pacifiste et internationaliste.
Ces différents projets d’union européenne qui se sont succédés présentent de nombreuses similitudes, et notamment la nécessité d’un arbitre, d’un conseil de représentants des Etats, disposant d’un certain pouvoir et le respect de la souveraineté. Tous ces différents projets sont restés de l’utopie ou au mieux, de la réflexion. Il a fallu attendre le XIXe siècle pour que ces projets se développent et se précisent. Ils se développent encore plus à partir de 1814.
En 1814, le comte Henri de Saint-Simon rédige un texte dans lequel il entend fonder une nouvelle Europe sur une religion (l’esprit des lumières, le progrès et la foi dans la science) et le parlementarisme, qui est selon lui la meilleure forme de gouvernement. Sa théorie a eu beaucoup de succès sauf au congrès de Vienne. Il prédit l’avènement d’une communauté européenne disposant d’un parlement supranational après une période de guerre et de révolution.
En 1849, Victor Hugo (pro-européen), à l’occasion d’un congrès de la paix, lance un appel à l’unité du continent européen. Il souhaite fonder « les États-Unis d’Europe ». Selon lui, « un jour viendra où les bombes seront remplacées par le vénérable arbitrage d’un grand Sénat souverain qui sera à l’Europe ce que l’assemblée législative est à la France ». En 1840, FOURIER préconisait « l’établissement d’une souveraineté qui soit supérieure à la souveraineté de chaque État ».
PROUDHON, dans son Principe fédératif de 1863, estimait que la constitution d’une Europe devait se faire à condition de décentraliser les grands Etats avant de les fédérer, ainsi que de multiplier les communautés à l’échelle de l’Europe. À la fin du XIXe siècle, l’Europe n’est plus d’actualité. Certains Etats se tournent vers le nationalisme comme la Prusse, ou vers l’internationalisme avec l’émergence des États-Unis et du Japon.
En 1908, Georges SOREL écrivait : « en Amérique, on a fédéré des gens tous pareils les uns aux autres, vivant dans des Etats tous pareils. Comment ferez-vous pour fédérer des slaves ou religieux ou mystiques révolutionnaires ; des Scandinaves assagis ; des Allemands ambitieux ; des Anglais jaloux d’autorité ; des Français avares ; des Italiens souffrant d’une crise de croissance ; des Balkaniques braconniers ; des Hongrois guerriers. Comment calmerez-vous ce panier de crabes qui se pincent toute la sainte journée ? Malheureuse Europe, pourquoi lui cacher ce qui l’attend ? Avant 10 ans, elle sombrera dans la guerre et l’anarchie, comme elle l’a toujours fait 2 ou 3 fois par siècle ».
La 1ère Guerre Mondiale a transformé les problèmes car l’Europe s’est retrouvée affaiblie par le conflit, notamment du fait qu’elle ait été morcelée politiquement à la suite des traités de paix. La nécessité d’unité est devenue de plus en plus pressante pour maintenir la paix et la prospérité, mais également parce que émergent de nouvelles puissances (États-Unis, Japon). C’est la première fois que l’Europe est concurrencée.
Certains auteurs comme Paul VALERY ou Thomas MAN, ont fait partie d’un mouvement pour une Europe unie. En 1923, Richard COULENHOVE KALERGI publie à Vienne son manifeste Paneuropa, qui est fondé sur des abandons de souveraineté consentis par des Etats européens. Pour se faire, il va prendre l’exemple de la Suisse, des Etats-Unis, ou encore de l’Allemagne pour montrer qu’on peut avoir un seul véritable Etat.
« La question de l’Europe se résume en deux mots : unification ou écroulement ». Richard COULENHOVE KALERGI.
Cet ouvrage a suscité l’intérêt de nombreux intellectuels et en 1926, il réunit à Vienne le congrès constitutif de l’union européenne auquel participe plus de 2000 personnes. Au cours de ce congrès furent définis les principes d’une Europe confédérale.
En 1924, un autre auteur, HEERFORDT, publie un essai intitulé Europa Communis, dans lequel il critique la Société Des Nations dont la faiblesse indique déjà qu’elle n’interdit pas véritablement le recours à la guerre. Il dessine un nouvel État européen. Il envisage l’institution d’un nouvel État fédéral.
Au cours des années 20-30, on peut observer de plus en plus de mouvements d’intellectuels.
En 1929, le comte SFORZA parle aussi des États-Unis d’Europe. De nombreux auteurs y font également référence. Mais l’un des Etats européens pose problème : la Grande-Bretagne.
D’ailleurs à ce sujet, Édouard HERRIOT publie Europe en 1930, un ouvrage dans lequel il préconise une Union Européenne dans le cadre de la Société Des Nations avec l’adhésion de la Grande-Bretagne. C’était, à l’origine, un projet qu’Aristide Briand avait proposé avec le soutien de son homologue allemand, STRESEMANN (ministre des affaires étrangères allemandes), au gouvernement européen dans son discours du 5 septembre 1929 devant l’assemblée générale de la Société Des Nations à Genève : la création d’une Union Européenne sans perte de souveraineté. Dans son discours, Aristide Briand associe les termes d’« État fédéral » à « association » et « souveraineté » : mais ainsi le projet n’est pas vraiment défini.
Pour Pierre Henri TETJEN, ce projet est extrêmement important car c’est la véritable première proposition gouvernementale d’instauration d’une confédération européenne après plus de six siècles de préparation doctrinale. Lorsque Aristide Briand a proposé son projet, il a été acclamé. Mais en France, ce projet a été sévèrement accueilli : la droite était sceptique et ironique, tandis que la gauche ne le trouvait pas assez ambitieux. En Allemagne, les avis étaient également partagés. La Grande-Bretagne quant à elle, était très réticente.
Mais il a persévéré et en 1930, ses idées furent reprises dans un Mémorandum sur l’organisation d’un régime d’union fédérale européenne, rédigé par Alexis Léger, un diplomate français. À la différence de Briand, il axe son discours sur la politique. Dès février 1930, le Royaume-Uni s’est opposé à ce projet. Churchill craignait de futures rivalités et les hostilités intercontinentales qui pourraient s’ensuivre.
De son côté, Staline n’y voyait qu’une machine de guerre contre l’URSS.
Pour TETJEN, cette proposition est arrivée ou trop tôt ou trop tard. Trop tôt car « l’Europe ne savait pas encore à quelle horreur la conduirait le nationalisme devenu fou ». Trop tard car la crise économique frappait le monde depuis 1929, et la montée du fascisme et du nazisme et exacerbait les nationalismes.
Par la suite, rien ne put être réalisé et l’impérialisme de puissances totalitaires a pu imposer son modèle.
À la suite de la deuxième guerre mondiale, il a fallu attendre la ruine totale du continent et le déclin tant politique qu’économique des Etats européens, pour que se créent les conditions d’un renouveau. Les lendemains de la seconde guerre mondiale furent très difficiles pour l’Europe, car c’est là qu’elle a pris conscience de sa faiblesse (elle était à la fois morcelée et dominée par deux superpuissances). Elle avait subi l’une des plus horribles guerres de l’humanité.
Le 19 septembre 1946, Churchill prononce un discours retentissant à l’université de Zurich dans lequel il déplore l’échec des rêves d’avant-guerre et appelle de ses voeux le développement de groupements européens. Il conclut son discours ainsi : « que l’Europe se lève ». En effet, il souhaite l’Europe mais ne veut pas y appartenir. Il voulait se présenter comme l’ami et le garant de la nouvelle Europe, mais pas comme partie prenante. Il appartenait déjà au Commonwealth, et il s’estimait suffisamment puissant, se voyant comme un gagnant. Dans les mois suivants, Churchill fonda le mouvement pour l’Europe unie dont il prit la tête.
À cette époque de multiples associations européistes voient le jour. En 1946, est créée à Paris l’Union Européenne des fédéralistes, qui recoupe une cinquantaine d’organisations réparties dans 16 pays. On ne veut plus imposer l’Europe par la force, mais il s’agit de construire l’Europe dans le respect des diversités nationale. Cette nouvelle Europe réside dans la liberté des Etats : il fallait l’approbation des peuples et du parlement. À partir de là, de nombreuses organisations vont voir le jour.
SECTION II : L’organisation de l’Europe au lendemain de la seconde guerre mondiale
Cette volonté de construire l’Europe à la suite de la seconde guerre mondiale vient de la nécessité de s’organiser et de s’unir, avec l’instauration progressive de la terreur de la guerre froide.
Par la suite, se mettent en places diverses institutions européennes dans différents domaines. Elles sont toutes internationales et ont ainsi des caractéristiques communes. Mais il existe une différence fondamentale entre elles, selon qu’elles sont dites d’intégration ou de coopération. Or à la fin de la seconde guerre mondiale, toutes les tensions entre les pro-européens se sont cristallisées autour de ces deux notions.
D’une manière générale, les institutions européennes peuvent être définies comme « des organes et structures mises en place par les Etats du continent européen en vue de réaliser des objectifs d’intérêt commun ». Autrement dit, ses institutions sont des organisations internationales, et sont donc dotées de la personnalité juridique internationale ainsi que d’organes permanents.
Composition des organisations internationales :
Comme toute organisation internationale, les organisations européennes sont formées de sujets de droit international qui acquièrent la qualité de membre. Les sujets de droit international sont les Etats et les organisations internationales (il n’y a que ces deux là). À ce titre, les organisations internationales ne peuvent être composées que d’États ou d’autres organisations internationales.
Une organisation internationale est créée par ses membres fondateurs qui concluent à cette fin apprêtée. Pour organisations internationales, ce traité est appelé acte constitutif de l’organisation internationale. Il définit la compétence, la structure, et le fonctionnement de l’organisation. Une fois que ce traité est rédigé et signé, il doit être ratifié par chacun des Etats membres. Tant qu’il n’est pas ratifié, l’organisation ne peut être créée.
Compétence des organisations internationales :
Les organisations internationales sont gouvernées par le principe de spécialité. C’est-à-dire qu’elles n’exercent leur activité que dans le cadre des compétences qui leurs sont attribuées par des traités fondateurs.
Ces organisations peuvent aussi exercer des compétences implicites, c’est-à-dire des compétences qui, sans être explicitement prévues par le traité fondateur, s’avèrent être nécessaires pour réaliser les objectifs assignés à cette organisation.
Capacité juridique internationale :
Dès l’instant où elles sont créées, les organisations internationales acquièrent une personnalité juridique internationale propre, qui fait d’elles des sujets de droit international distincts des membres qui les composent. De cette capacité de sujet découlent des droits (elles ont le droit de conclure des traités dans la parenthèse et des obligations (elles doivent engager leur responsabilité internationale).
La structure institutionnelle est définie dans le traité constitutif qui décrit les organes principaux des institutions, leur composition, leurs pouvoirs, ainsi que les différents types d’actes qui pourront être adoptés, ainsi que la force juridique qui y sera attachée.
En règle générale, on trouve toujours un organe interne gouvernemental, composé des représentants des Etats membres, auxquels il confie l’essentiel du pouvoir de décision.
Autour de cette instance centrale gravitent divers organes dont les pouvoirs sont le plus souvent consultatifs. Parmi ces instances, on retrouve une assemblée représentant les Etats membres.
Il arrive qu’il y ait un conseil économique et social.
Il y a aussi un secrétariat, qui est chargé de la gestion courante. Il est dirigé par un secrétaire général, habilité à représenter l’organisation à l’extérieur.
Si la nécessité de construire l’Europe est apparue comme un moyen d’unification de l’Europe, la forme que cette unification devait revêtir a posé plusieurs problèmes : intégration ou coopération ?
Lors du congrès de La Haye en 1948, les partisans et adversaires de l’intégration et de la coopération se sont affrontés.
Il a eu lieu du 7 au 10 mai 1948. Lors de ce congrès, les différents mouvements pour l’unification européenne se sont donnés rendez-vous à La Haye, où 17 pays européens étaient représentés. Y ont participé de grandes personnalités comme Léon Blum, Jean Monnet, François Mitterrand pour la France, Winston Churchill pour l’Angleterre, Spinelli pour l’Italie, ou encore Adenauer pour l’Allemagne. Pendant toute la durée du congrès, les délégués du congrès vont se diviser en deux grands courants, ayant des visions bien différentes de l’avenir de l’Europe : fédéralistes et confédéralistes.
Le courant fédéraliste, qui existe toujours aujourd’hui, constitue une force de pensée vive et opérationnelle dans les débats sur l’avenir de l’Europe. Il défend l’idée d’une fédération des peuples européens qui remplaceraient les états nationaux. L’idée est que ces Etats nationaux, en raison de leur égoïsme et de leur visée hégémonique, ont amené la guerre à différentes reprises. L’Europe ayant été entraînée dans de grandes guerres mondiales, l’objectif était d’en éviter une troisième. L’organe moteur serait le peuple européen qui devrait élire un congrès constituant doté de pouvoirs politiques souverains qui remplaceraient à terme le pouvoir des Etats nationaux.
Parmi les défenseurs du courant fédéraliste, on retrouve Léon Blum (France), Spinelli (Italie), Raymond Aron, De Rougemet, …
Le courant confédéraliste propose que les Etats européens instaurent des formes de coopération intergouvernementale dont le contenu et le rayon d’action seront décidés au cas par cas par les Etats membres de la confédération. On ne peut observer aucune cession de pouvoirs à la confédération. Parmi les défenseurs de ce courant, on retrouve Winston Churchill pour l’Angleterre, ou le général De Gaulle pour la France.
La résolution finale adoptée lors du congrès ne suit aucun des deux courants de pensée. Elle se contente tout juste de proposer la création d’une assemblée européenne à convoquer immédiatement, ouverte à tous les pays démocratiques européens et élus par les parlements qui participeront. Ce congrès a permis de mettre en avant deux visions antagonistes de l’Europe.
Ainsi que le laissait entrevoir le congrès de La Haye, les courants fédéraliste et confédéraliste privilégient deux stratégies différentes : intégration et coopération.
La coopération : elle tend à rapprocher et coordonner les politiques menées par les Etats dans le respect de leurs souverainetés respectives. Autrement dit, elle repose sur des mécanismes de concertation intergouvernementale diplomatique dans un rapport d’État à État, ayant pour caractéristique majeure de conserver la souveraineté des Etats. La conséquence de ce choix est que les organes principaux de l’organisation créée sont composés de représentants des Etats membres, tandis que les actes adoptés n’ont généralement pas d’effet juridique obligatoire. Et lorsqu’ils le sont, ils doivent être en principe acceptés par tous. Cela signifie que dans le cadre de la coopération, on reste dans le système de l’unanimité.
Lorsque cette organisation est mise en place, les Etats membres gardent la maîtrise du fonctionnement et de l’évolution de l’organisation. Cela est particulièrement vrai dans le domaine financier dans la mesure où le budget de l’organisation est financé par les contributions nationales décidées annuellement.
L’intégration : elle correspond au modèle fédéral. Cette stratégie vise à réaliser l’union économique et politique de l’Europe en transférant certaines compétences relevant de la souveraineté nationale à des instances supranationales. Ce transfert de compétence entraîne plusieurs conséquences :
– la structure de l’organisation comprend des organes indépendants des gouvernements des Etats membres dont certains disposent de pouvoirs normatifs (possibilité de prendre des actes juridiques, des normes de droit).
– certaines décisions sont adoptées par l’organe intergouvernemental à la majorité, c’est-à-dire, malgré une opposition de certains (ce qui constitue une opposition à la souveraineté de ces derniers).
– les normes adoptées sont directement applicables dans l’ordre juridique des Etats membres sans nécessité de mesures nationales de réception, et surtout, elles peuvent créer au bénéfice des particuliers des droits qui pourront être invoqués devant les juridictions nationales.
Mais en raison des intérêts nationaux en jeu, l’intégration suscite des réticences. L’histoire des communautés européennes reflète cette opposition entre les visions confédéraliste et fédéraliste. Cependant l’Union Européenne est la seule organisation européenne à être bâtie sur le modèle d’intégration car toutes les autres sont organisées sur le modèle de la coopération. Il en résulte une césure très nette dans les pouvoirs de ces organisations.
TITRE I : l’Europe de la coopération
En 1945, l’Europe qui a subi trois guerres en 70 ans, est toujours dévastée et divisée.
Les États-Unis, dont la générosité n’est pas parvenue à redresser les économies européennes, n’entendent pas poursuivre leurs tentatives bilatérales de sauvetage. C’est eux qui vont inciter les Etats de l’Europe à s’unifier. Ils sont d’accord pour payer mais à condition d’avoir un seul interlocuteur : une organisation.
L’impulsion américaine intervient en 1947 avec le plan Marshall, l’année où la crise ôte aux pays européens tout espoir de retrouver la prospérité avec leur seule force. En effet, les États-Unis ont besoin d’une Europe solide afin d’établir économiquement le libre-échange, politiquement la démocratie, et en termes géopolitiques pour faire contrepoids au communisme. Ainsi, la pression en faveur de l’union des Etats et le climat de guerre froide vont faire naître les premières organisations européennes entre 1947 et 1949.
Cette coopération européenne va se développer en trois étapes et sur trois plans différents puisqu’elle va se développer au niveau économique, avec le plan Marshall puis la naissance de l’organisation européenne de coopération économique (OECE) ; au niveau politique et parlementaire, avec le conseil de l’Europe ; et au niveau militaire et diplomatique avec le pacte de Bruxelles et le pacte atlantique.
Chapitre I : les organisations à vocation économique
Au niveau européen, la coopération économique s’exerce avant tout dans le cadre de l’OCDE (organisation de coopération et de développement économique). Mais il existe également différentes organisations subrégionales.
Section I : L’OCDE
Depuis plus d’un demi-siècle, se poursuit au château de la Muette une coopération économique exemplaire. Cette coopération a débuté avec l’OECE sachant qu’elle s’est ensuite transformée en OCDE.
L’OECE trouve son origine dans le plan d’assistance économique et politique nord-américain : le plan Marshall. Il va amorcer la constitution de liens privilégiés entre les deux rives de l’Atlantique pour la reconstruction du continent européen. Dans les premiers mois de l’année 47, les autorités américaines prennent conscience de l’ampleur du désastre et plus particulièrement de l’ampleur des difficultés auxquelles la plupart des autorités européennes doivent faire face : la situation économique est catastrophique à tous niveaux. L’Europe doit faire face à une très lente reconstruction ainsi qu’à la menace communiste sur le plan politique (25 % en France).
Il était donc clair qu’une période de transition plus longue que prévu était nécessaire pour l’Europe sachant que ce relèvement ne pourrait être obtenu sans une aide massive des États-Unis. Le problème crucial était celui du financement par les Etats européens des importations en provenance des États-Unis. C’est dans ces conditions que le général Marshall (secrétaire d’État américain ó ministre des affaires étrangères) a prononcé le 5 juin 1947 son célèbre discours à l’université de Harvard dans lequel il dit :
« La guerre a laissé des ruines telles que les besoins de l’Europe sont plus grands que sa capacité de paiement. Il est nécessaire d’envisager une aide supplémentaire, sous peine de s’exposer à une dislocation économique, social et politique ».
« Il ne serait ni bon ni utile que le gouvernement des États-Unis entreprenne d’établir unilatéralement un programme destiné à remettre l’économie de l’Europe sur pied. C’est là l’affaire des Européens ».
Dans ce discours, le général Marshall affirme le désir des États-Unis d’accorder une aide financière, substantielle aux pays européens. Cependant, il conditionne cette aide à l’élaboration en commun un programme coordonné de relèvement économique pour l’Europe. Cette invitation est adressée à l’Europe entière (Europe occidentale + Europe de l’Est + soviétique).
Les soviétiques sont placés devant l’alternative d’accepter ou d’endosser la responsabilité de la division de l’Europe. Le 2 juillet 1947, l’URSS refuse de se joindre à la conférence sur le plan Marshall.
Cette décision entraîne immédiatement la scission de l’Europe en deux blocs. Le refus soviétique s’explique d’une part par le fait qu’il considérait le plan Marshall comme un empiètement sur la souveraineté nationale, mais aussi par le fait que l’URSS s’opposait à ce que ce plan profita à d’autres que les cinq victimes de l’Allemagne (le plan Marshall était aussi valable pour l’Allemagne). Le plan Marshall devant une opération purement occidentale. À partir de là, une fracture profonde divisa les deux parties de l’Europe : d’un côté, les pays de l’Ouest allaient s’organiser entre eux avec les États-Unis, tandis que de l’autre, l’URSS allait renforcer sa mainmise sur l’Europe orientale.
En octobre 1947, création du KOMINFORM (organisation centralisée du mouvement communiste international) et du COMECOM ou CAEM (coopération économique mise en place en 1949 : conseil d’assistance économique mutuelle). C’était une organisation d’entraide économique entre différents pays du bloc communiste. Il a été dissout en 1991 à la suite de l’effondrement du bloc communiste de l’URSS.
À partir de 1947, il est clair que l’unification ne peut plus être celle de la grande Europe, mais de chacune des deux Europe.
Le 12 juillet 1947 a été organisée à Paris une conférence de coopération économique européenne sur le plan Marshall qui avait un double objectif : dresser un programme de reconstruction, mais aussi évaluer l’aide nécessaire.
Tous les états d’Europe occidentale y ont participé à l’exception de l’Espagne et de l’Allemagne. Cette conférence a débouché sur la signature d’une convention instituant l’organisation européenne de coopération économique le 16 avril 1948. 16 états la signèrent. A ce moment, les États-Unis et le Canada eurent le statut de membre associé. À partir de 1949, la RFA l’a rejoint, puis l’Espagne (18 Etats en tout).
Certains gouvernements auraient voulu que l’organisation ait une certaine autonomie à l’égard des gouvernements. À cet effet, les Etats souhaitaient un comité exécutif fort et un secrétaire général capable de prendre des initiatives importantes de politique économique (cette idée était, entre autre, défendue par la France).
En revanche, le Royaume-Uni n’était prêt à accepter qu’une organisation contrôlée par un conseil des ministres. Il était soutenu par tous les petits pays soucieux de défendre leur souveraineté. C’est la conception britannique qui a finalement prévalu, et l’OECE reçut la structure d’une simple organisation de coopération intergouvernementale ce qui allait ici limiter sa capacité d’action.
L’OECE ayant achevé sa mission d’origine, la Convention de Paris du 14 novembre 1960 lui substitua l’OCDE.
L’OECE s’est assigné comme objectif de coordonner l’exécution du programme de relèvement européen, mais également de moderniser les appareils de production, de libérer les échanges, de rétablir la convertibilité des monnaies européennes, et enfin, de veiller à la stabilité monétaire ainsi qu’à un haut degré d’emploi.
Afin de mettre en oeuvre ces objectifs, l’OECE a institué une procédure d’examen périodique de chaque État membre. Globalement ce fut plutôt une réussite.
À la fin des années 50, les économies européennes avaient achevé leur relèvement, les monnaies étaient redevenues convertibles, et enfin, les discriminations qui avaient été tolérées à l’égard des États-Unis prirent fin.
L’OECE a permis l’intensification de la coopération européenne entre un noyau de pays désireux d’intégrer leurs économies, ainsi que la mise en place du marché commun en 1957. La coopération forgée au sein de l’OECE s’est étendue à un cercle plus large de pays industrialisés à économie de marché. L’objectif de l’OECE était d’étendre au reste du monde le degré de libéralisation.
La Convention de Paris a substitué l’OCDE à l’OECE. Les États-Unis et le Canada vont, par la suite, rejoindre les pays européens. Aujourd’hui l’OCDE comporte plus de 30 membres (Japon, Finlande, Australie, Nouvelle-Zélande, États-Unis, Canada, Mexique, République tchèque, Corée, Pologne, Hongrie, Slovaquie,…). C’est-à-dire, 30 membres d’Europe, d’Amérique du Nord, et d’Asie Pacifique.
Pour être membre de l’OCDE, il y a deux critères à respecter :
– être une démocratie pluraliste
– cette démocratie doit fonctionner de telle sorte à se plier aux règles de l’économie de marché
La communauté européenne participe également à l’OCDE par le biais de la commission européenne.
L’OCDE est une organisation classique de coopération intergouvernementale. Elle est composée d’un conseil des ministres qui se réunit une fois par an au niveau des ministres des affaires étrangères, des ministres de l’économie et des finances, et des ministres du commerce extérieur de chaque État membre. Il y a également des réunions une fois par mois au niveau des représentants permanents
Le deuxième organe de l’OCDE est le comité exécutif. C’est un organe restreint composé de 14 membres dont sept ont un siège permanent et les sept autres sont renouvelés chaque année. Ce comité exécutif a pour tâche de préparer les travaux du conseil et d’exécuter ses décisions.
L’OCDE comprend également d’autres structures :
– L’OCDE a à sa tête un secrétaire général nommé pour cinq ans (aujourd’hui, c’est Mr GURRIA, mexicain)
– L’OCDE comporte plus de 200 comités ou groupes de travail qui ont pour rôle d’effectuer des études et travaux préparatoires.
– Des organes autonomes qui sont chargés de coordonner la politique des Etats membres dans des secteurs particuliers. Ils sont également titulaires de pouvoirs de gestion.
L’OCDE est une organisation de coopération, si bien qu’au regard de l’étendue de ses compétences et de l’ambition de ses objectifs, le pouvoir décisionnel de l’OCDE peut paraître bien faible. Car en fait, l’exercice de ses compétences repose essentiellement sur la bonne volonté des Etats membres.
Elle peut adopter des décisions qui sont la forme la plus contraignante des actes qu’elle peut adopter, mais ces décisions sont généralement prises à l’unanimité (l’abstention ne fait pas obstacle à leur adoption). Les décisions s’adressent exclusivement aux gouvernements et non aux ressortissants des Etats membres.
L’OCDE est LE support institutionnel d’une négociation internationale continue dans un cadre multilatéral, laquelle porte sur l’ensemble des questions économiques. Cette négociation aboutit fréquemment à des accords gouvernementaux de plus ou moins grande portée qui trouve dans l’organisation le mécanisme nécessaire à leur conclusion et à leur mise en application.
Par exemple, le 17 décembre 1997, a été adopté sous les auspices de l’OCDE, la Convention de lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales.
L’OCDE à de nouveaux objectifs :
– L’expansion économique de ses membres, mais aussi des Etats en voie de développement
– La croissance et le développement du commerce mondial sur la base du multilatéralisme et de la non-discrimination. Elle souhaite ainsi parvenir à la libéralisation des échanges.
– Elle souhaite parvenir à la stabilité des politiques monétaires
On retrouve un cadre de comparaison des expériences économiques ou d’action publique pour les différents Etats. Il s’agit de chercher des réponses à des problèmes communs, ainsi que de coordonner les politiques nationales et internationales : c’est un véritable forum.
Cependant, d’autres Etats n’appartenant pas à l’OCDE peuvent prendre partie à ces conventions. L’OCDE fournit un cadre de réflexion et de discussion fondé sur des recherches et des analyses.
L’OCDE n’est pas une banque comme la banque mondiale ou le FMI (Fond Monétaire International). Elle ne prête pas d’argent.
Les méthodes de travail de l’OCDE constituent un processus très efficace de collecte et d’analyse des données, qui aboutit à une discussion collective entre les Etats membres. Parmi les grandes publications de l’OCDE, on citera les grandes perspectives économiques qui évaluent les tendances de l’année écoulée et présentent des projections concernant l’évolution de la situation économique pour les deux années à venir. Deuxième grande publication : les grands indicateurs économiques, préparés par la direction des statistiques.
Tout d’abord, l’atout de l’OCDE est d’avoir accompli une oeuvre majeure sur certains plans (au crédit de l’OECE surtout, mais aussi de l’OCDE). Ce n’était pas évident de réunir à la fin de la guerre des représentants de pays belligérants et de les faire travailler ensemble dans un climat de confiance.
Sa deuxième oeuvre est en relation avec son fonctionnement. Les discussions ouvertes au sein des différents comités à partir de statistiques comparatives et d’analyses objectives ont permis d’ouvrir les esprits des responsables aux réalités des autres pays. C’est important dans la mesure où cela conduit les autres Etats à s’interroger sur le bien-fondé de leurs décisions face aux questions voire critiques de leurs homologues. C’est une véritable instance de concertation économique.
Ces organisations n’ont pas été en mesure de promouvoir au-delà de la reprise des échanges commerciaux entre leurs membres, l’unification économique de l’Europe, parce que le Royaume-Uni a fait part d’une opposition radicale à toute proposition faite qui visait à développer le rôle et les pouvoirs de l’OCDE.
SECTION II : Les organisations de coopération économique subrégionales
Elles sont relativement nombreuses au niveau européen.
Par exemple l’union économique Bénélux est une coopération entre la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg, créée au lendemain de la seconde guerre mondiale. Cette union douanière est devenue une véritable union économique. Elle est instituée par le traité du 3 février 1958, entré en vigueur le 1er novembre 1960. Cette organisation existe toujours, mais elle a perdu sa spécificité. Elle est aujourd’hui dissoute dans l’union européenne.
L’AELE a été instituée en 1960 à l’initiative du Royaume-Uni parce qu’il voulait réagir à la mise en place de la CEE en 1957. De plus, en 1959, a été instaurée entre les 6 Etats fondateurs une union douanière.
Deux modèles se sont donc progressivement mis en place : la CEE et l’AELE.
L’AELE comprenait à l’origine 7 Etats membres, qui signèrent la convention de Stockholm le 4 janvier 1968 : l’Autriche, le Danemark, la Norvège, le Portugal, le R-Y, la Suède et la Suisse.
En 1970, l’Islande a rejoint l’AELE. La Finlande la rejoindra officiellement en 1986. Avant, elle avait le statut d’Etat membre. Le Lichtenstein y a adhéré en 1991.
Mais cette AELE va se réduire progressivement.
En effet, en 1973, le Royaume-Uni et le Danemark vont rejoindre la communauté économique européenne (CEE). Puis, c’est au tour du Portugal en 1986, et à l’Autriche, à la Finlande et la Suède, en 1995.
Aujourd’hui, elle ne comprend plus que 4 Etats.
Elle se voulait une alternative à la communauté économique européenne. Elle est révélatrice de la conception britannique de la construction européenne puisque ses membres ont privilégié la formule de la coopération de telle sorte à ce que toute décision prise dans le cadre de l’AELE nécessite l’unanimité de ses membres. D’un point de vue économique, alors que la communauté économique européenne a mis en place une union douanière, l’AELE n’institue qu’une zone de libre-échange limitée aux produits industriels.
L’union douanière comme la zone de libre-échange suppose la suppression des droits de douane et autres restrictions quantitative dans les Etats membres. La différence vient des pays tiers. La zone de libre-échange ne comporte pas de tarifs extérieurs communs aux frontières externes. Autrement dit, chaque État reste maître de sa politique commerciale vis-à-vis des Etats tiers.
Elle prévoit aussi un certain nombre de coopérations dans différents domaines.
Rapidement, des relations se sont créées entre l’AELE et la CEE. En 1972-1973, quand le Royaume-Uni et le Danemark ont décidé de rejoindre la CEE, des accords bilatéraux de libre-échange ont été conclus entre chaque pays de l’AELE et la CEE en matière de libre-échange.
En 1977, les pays de l’AELE et de la CEE ont décidé de former une vaste zone de libre-échange pour les produits industriels.
A l’initiative de Jacques Delors, des négociations se sont engagées à la fin des années 80 afin d’approfondir et d’institutionnaliser la coopération entre ces deux organisations. Ces négociations aboutirent à la signature du traité de Porto du 2 mai 1992 entre chacun des Etats membres de l’AELE et les membres de l’union européenne, qui a créé l’espace économique européen (EEE). Ce traité est rentré en vigueur le 1er janvier 1993 dans les 12 états de la CEE et les 6 de l’AELE qui l’ont signé. Seule la Suisse l’a rejeté.
L’accord sur l’espace économique européen établi les règles communes en matière de libre circulation et va au-delà d’un libre-échange. Mais cet accord a perdu largement de son intérêt en 1995, lorsque la Finlande, l’Autriche et la Suède ont rejoint la CEE, et donc, l’EEE.
On a ainsi pu assister au dépérissement progressif de l’AELE.
Elle a été créée en 1990, au lendemain de la chute des régimes socialistes, par 40 pays (les 12 de la CEE, les 7 de l’AELE, les huit PECO, ainsi que d’autres membres de l’OCDE).
Cette BERD siège à Londres. La commission européenne et la banque européenne d’investissement en font partie. Aujourd’hui la BERD comprend 60 membres.
Son rôle était d’accompagner la transition des Etats d’Europe centrale et orientale (PECO) et des anciennes républiques de l’Ex-URSS vers l’économie de marché, d’intégrer ces pays dans les circuits économiques mondiaux, et de favoriser la reconstruction économique. Elle prend exemple sur la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), créée au lendemain de la seconde guerre mondiale. C’est un organisme financier qui accorde des prêts aux gouvernements des anciens Etats socialistes et aux républiques de l’ex-URSS, mais également à des entreprises privées quand elles réalisent des projets d’infrastructure dans ces pays concernés. Mais ces financements ne sont accordés aux Etats qu’à condition qu’ils s’engagent à respecter les principes de la démocratie pluraliste et de l’économie de marché.
Chapitre II : Les organisations de coopération à vocation essentiellement défensive
Ces organisations de coopérations, de sécurité et de défense ont été créées après 1945, dans le contexte de la Guerre Froide, et de l’opposition entre deux blocs antagonistes. Mais le problème est qu’aujourd’hui, ce contexte a évolué avec la chute du rideau de fer, de la menace communiste et la dissolution du pacte de Varsovie en 1991 (qui reposait sur le traité de Varsovie du 14 mai 1955). Ces organisations se sont trouvées contraintes de redéfinir leur mission ainsi que de repenser leurs relations avec les PECO et ceux de l’ex-URSS, sachant qu’un certain nombre de défis devait être relevé :
– l’élargissement à l’Est
– la gestion des crises régionales (ex-Yougoslavie)
– la gestion des rapports avec l’ONU et l’OTAN
– la relance de la question de l’armement
Ces organisations s’insèrent toutes dans le système défini par la charte des Nations unies. Pour deux organisations en particulier, l’OTAN et l’UEO (union de l’Europe occidentale), ces organisations constituent des systèmes de légitime défense collective fondée sur l’article 51 de la charte des Nations unies qui interdit le recours à la force. Mais cet article pose le principe de la légitime défense qui peut être exercée individuellement ou collectivement. Cette légitime défense permet l’emploi de la force à deux conditions :
– réaction à une agression armée
– il est nécessaire de respecter les normes de procédure qui prescrivent que le conseil de sécurité soit immédiatement informé de l’action armée en légitime défense.
Si on parle de légitime défense collective, c’est qu’on reconnaît la possibilité à un État de recourir à la force, dès lors qu’un autre État fait usage de son droit de légitime défense et lui demande. Par exemple, les États-Unis ont décidé qu’ils agissaient par légitime défense quand ils ont attaqué l’Afghanistan : ils ont agi sur le fondement de l’article 51.
Les différents systèmes qui vont naître s’inscrivent sur le fondement de l’article 51 et tendent à privilégier les règlements pacifiques. Ces différentes organisations sont amenées à seconder les actions du conseil de sécurité dans le cadre du chapitre 7, mais également dans le cadre opérations de maintien de la paix.
Trois organisations naissent à la suite de la seconde guerre mondiale :
– l’alliance atlantique
– l’union de l’Europe occidentale (UEO)
– l’organisation de la sécurité et de la coopération en Europe (OSCE)
Prolégomènes : l’union occidentale (UO)
À l’origine de l’UO, on trouve le traité du 4 mars 1947, traité d’alliance et d’assistance mutuelle entre la France et la Grande-Bretagne, qui a été signé à Dunkerque. Les ministres des affaires étrangères respectifs étaient Georges Bidault pour la France et Ernest Bevil pour la Grande-Bretagne.
1947 fut une année importante car elle fut marquée par l’accroissement des tensions internationales :
– refus du plan Marshall
– création du KOMINFORM
– échec et de la conférence de Londres en novembre-décembre 1947, entre les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, l’URSS, au cours de laquelle ces derniers avaient essayé de régler les questions de l’Allemagne de l’Autriche : – problème des réparations de guerre
– problème de la démilitarisation
– question des frontières (URSS)
Ce qui cristallisait les tensions était l’avenir de l’Allemagne. D’un côté, Staline craignait l’Allemagne, de l’autre, les Américains et Britanniques souhaitaient à tout prix incorporer l’Allemagne au camp occidental. Ils voulaient une Allemagne prospère et stable, une Allemagne forte. La France, quant à elle, n’était pas du tout favorable à l’idée d’une Allemagne forte, puisqu’elle craignait son rétablissement.
À la fin de l’année 1947, Bidault et Bevil (ministres des affaires étrangères Français et Britannique) indique au général Marshall que les pays de l’Europe de l’Ouest ont besoin d’un appui militaire américain contre le danger soviétique. La réponse du général fut conditionnée. Les Américains subordonnaient leur concours à un effort de coopération sur le plan de la défense au niveau européen.
Dans un discours à la chambre des communes du 22 janvier 1948, le ministre des affaires étrangères britanniques, Ernest Bevil dénonce la menace constituée par la politique soviétique et estime le moment venu pour une consolidation de l’Europe occidentale. Dans ce discours, il va demander l’élargissement de l’alliance franco-britannique (traité de Dunkerque) au Benelux. Cet élargissement donnera naissance à une union des pays d’Europe occidentale. Le coup de Prague va accélérer les négociations, et ainsi le traité constitutif de l’UO fut signé à Bruxelles le 17 mars 1948.
Dans ce traité, conclu pour 50 ans, les partis manifestent leur attachement aux droits fondamentaux ainsi qu’aux traditions constitutionnelles et au respect de la loi, principes en lesquels ils trouvent un patrimoine commun. Ils manifestent également leur volonté de coopérer par voie de consultations mutuelles dans les domaines économiques, sociaux et culturels. Enfin ils souhaitent unir leurs efforts pour la reconstruction de l’économie européenne.
Les Etats signataires décident d’établir un système de sécurité collective comportant des organes militaires et notamment un Etat-major interallié siégeant à Fontainebleau. Ce dernier institue un conseil consultatif composé des ministres des affaires étrangères, siégeant alternativement dans les capitales des Etats membres et dans l’intervalle de ces sessions, existe une commission permanente. Un comité double cette commission permanente installée à Londres qui réunit les ambassadeurs en Grande-Bretagne, des Etats partis et un représentant du Foreign Office.
Sur le plan militaire, est institué le comité des ministres de la défense qui est assisté d’autres comités spécialisés, notamment chargés de la planification stratégique de l’armement.
Enfin, certaines forces militaires communes ont été constituées dans le but de placer sous un même commandement à un ensemble de divisions en cas de guerre. À partir de 1950, l’UO fut concurrencée. Le pacte l’Atlantique Nord, l’OTAN, a absorbé les organes militaires, puis ont été créés l’OECE et le conseil de l’Europe, qui accaparèrent les attributions économiques, politiques et culturelles. Aujourd’hui, elle est totalement vide de son contenu.
SECTION I : l’alliance atlantique
Afin de répondre au nouveau contexte de la guerre froide, il a été décidé de conclure une alliance entre différents Etats de l’Europe de l’Ouest, les États-Unis et le Canada. De cette décision allait naître l’OTAN, un organe créé en deux temps. Mais avec la chute du mur de Berlin et la fin du monde bipolaire, le rôle de l’OTAN est amené à évoluer.
Le traité de Bruxelles qui a instauré l’UO était, pour les Américains, le préalable à leur engagement militaire en Europe. Dès la signature du traité de Bruxelles en 1948, les ministres des affaires étrangères Français et Britannique ont demandé aux États-Unis d’assurer à l’UO, l’aide militaire qui lui était indispensable pour résister à une éventuelle agression soviétique. Les Américains accordèrent cette aide et décidèrent de sceller cette alliance dans le traité de l’Atlantique Nord.
Dès 1947 apparaissent des tensions. L’année suivante, la situation ne s’est pas améliorée, et en plus, il y a le blocus de Berlin qui a débuté en juin 1948.
Comme la bipolarisation commençait à apparaître, le Sénat des États-Unis a renoncé à toute velléité isolationniste et autorise le gouvernement de Washington, par la résolution Vandenberg, à ouvrir des négociations en vue de renforcer le système de sécurité européen.
Le 4 avril 1949, est signé le traité de l’Atlantique Nord à Washington. Lors de sa signature, les Etats signataires sont :
– les cinq états de l’UEO
– les Etats-Unis
– le Canada
– le Danemark
– l’Islande
– l’Italie
– la Norvège
– le Portugal
Ce traité a institué une alliance classique, c’est-à-dire une alliance entre Etats souverains où les décisions sont prises par consentement mutuel sur la base du consensus. Ce traité est fondé sur l’article 51 de la charte des Nations unies, et institue une garantie collective contre l’agression, ainsi qu’une coopération en matière de défense. En temps de paix, les parties au traité de Washington doivent maintenir et accroître leurs capacités individuelles et collectives de résistance, et doivent donc se consulter dans le cas où apparaît une menace contre l’intégrité, la dépendance ou la sécurité de l’une de ses parties. En cas d’agression, les parties prennent (article 5 du traité) individuellement et d’accord avec les autres parties, des mesures d’assistance, y compris militaire. La réaction intervient a posteriori. L’action prévue par l’article 5 du traité de Washington ne peut avoir lieu qu’à condition que l’agression se soit produite sur un territoire métropolitain, ou contre les forces d’un membre, stationnées sur le territoire d’un autre, ou sur une zone spécifiée dans le traité. Cette alliance va par la suite s’institutionnaliser.
L’organisation proprement institutionnelle de l’Atlantique Nord avec des organismes civils et militaires va naître le 20 septembre 1951, lorsque la Convention d’Ottawa dotera l’alliance de la personnalité juridique nécessaire à son essor opérationnel. Cette alliance superpose une alliance militaire intégrée et hiérarchisée, et une organisation politico-militaire.
Volet politico-militaire :
– le conseil de l’Atlantique Nord est composé des ambassadeurs ou de représentants permanents (la France en a un). Ce conseil se prononce sur la stratégie de l’alliance. C’est une autorité politique dotée d’un pouvoir de décision. Ce conseil peut se réunir aussi bien au niveau des ministres des affaires étrangères qu’au niveau des ministres de la défense ou de celui des chefs d’État et de gouvernement. Il est présidé par le secrétaire général de l’OTAN, désigné par les Etats membres.
– les comités de plan de défense sont composés de représentants des membres, et se réunissent au niveau des ministres de la défense au moins deux fois par an.
– le groupe des plans nucléaires. Les ministres de la défense sont représentés au comité des plans nucléaires où sont examinées des questions de politique spécifique.
– le comité militaire est composé des chefs d’état-major des armées. C’est la plus haute instance de l’OTAN. Il a pour rôle essentiel de recommander aux autorités politiques de l’OTAN les mesures qu’il juge nécessaires à la défense commune de la zone OTAN.
Volet militaire :
L’OTAN est une structure de commandement intégré qui dispose d’états-majors internationaux hiérarchisés mais composés d’officiers qui restent sous statut national. Ces commandements stratégiques sont eux-mêmes subdivisés géographiquement par des conditions géostratégiques et forment une chaîne de commandement. Pour l’instant, dans ce commandement, ça a toujours été un Américain qui exerçait la fonction de chef d’état-major.
Les forces qui interviennent peuvent avoir un triple statut :
– certaines forces sont toujours en dehors de l’OTAN
– certaines troupes seront assignées à l’OTAN en temps de guerre
– certaines troupes seront assignées à l’OTAN en temps de paix
À partir de 1952, deux Etats (la Grèce et la Turquie) ont adhéré au traité. En 1954, c’est la RFA qui a rejoint l’OTAN. L’Espagne l’a rejoint en 1982, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque en 1999, et enfin la Roumanie, la Bulgarie, la Slovénie, la Slovaquie et les pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) en 2004.
Aujourd’hui, la France n’est plus membre de l’OTAN. En 1958, quand De Gaulle est revenu au pouvoir, il a adressé au premier ministre MacMillan et président Eisenhower un mémorandum dans lequel il proposait que les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne s’unissent pour former un directoire à trois de l’OTAN (en en prenant la tête). Cette proposition n’a pas été retenue. De Gaulle a alors annoncé lors d’une conférence de presse en date du 21 février 1966, son intention de se retirer de l’OTAN, tout en restant membre de l’alliance atlantique.
Pour ce faire, il s’est d’abord fondé sur des motifs géopolitiques : Les États-Unis ont changé de tactique. Ils ont quelque peu abandonné les représailles massives au profit de la technique de la riposte graduée. En effet, si les États-Unis étaient attaqués ils répondraient par des représailles massives. En revanche si c’était un des alliés des États-Unis qui était attaqué les États-Unis répondraient par une riposte graduée.
De plus, entre-temps, la France avait acquis l’arme nucléaire, et elle désapprouvait la politique étrangère menée par les États-Unis notamment avec la guerre du Vietnam.
Mais le général De Gaulle avançait également des motifs juridiques : REBUS SIC STANIBUS. C’est une clause qui fait référence au changement de circonstances. En effet entre 1949 (début de la guerre froide) et 1966 (coexistence pacifique), on avait changé de contexte. La France s’est retirée en se fondant sur cette clause de changement de circonstances.
La deuxième raison avancée et que l’OTAN est illégale car la France estimait que cette organisation contredisait la notion originelle de l’alliance. Elle était censée placer tous ses participants sur un pied d’égalité. Or, la structure de l’OTAN accorde une place prépondérante aux États-Unis.
En pratique, le retrait de la France porte sur les commandements intégrés et signifie le refus du gouvernement français à l’installation de bases d’unités étrangères en France. On a donc pu assister à un dédoublement de l’alliance atlantique. Ainsi, la France participe au conseil Atlantique dans la mesure où ce conseil évoque des questions civiles ou politiques, puisqu’elle considère que c’est un organe de l’alliance et non de l’OTAN.
En revanche, les représentants français n’interviennent plus quand sont évoqués les problèmes militaires.
La France ne participe plus non plus aux comités des plans de défense ni aux groupes des plans nucléaires.
La France s’est retirée de l’OTAN en 1966, mais s’en est rapprochée en 1979 avec Jacques Chirac. Aujourd’hui, elle essaie de revenir dans l’OTAN, mais Jacques Chirac a posé certaines conditions dont une européanisation de l’OTAN à travers certains postes de commandement. Il souhaite aussi que l’OTAN puisse conduire des missions purement européennes (sans les États-Unis).
Si aujourd’hui la France se rapproche de l’OTAN, c’est parce que l’on sait aujourd’hui qu’il est impossible d’avoir une armée européenne en raison du coût et parce que la plupart des états européens estiment nécessaire que l’existence d’une couverture militaire soit le fait de l’alliance atlantique dans son ensemble. Mais cela pose un certain nombre de difficultés.
La France est le deuxième plus gros contributeur en forces humaines. 800 soldats français se trouvent actuellement en Afghanistan sous les couleurs de l’OTAN.
Au niveau du budget, est le troisième.
L’OTAN a été créé contre l’URSS. Or, avec l’éclatement de l’URSS et la dissolution du pacte, la menace avait disparu.
Par la suite, l’OTAN a décidé de nouvelles stratégies et de nouvelles structures, notamment en décidant de s’ouvrir à l’Est.
Aujourd’hui, l’alliance est amenée à redéfinir son dispositif de stratégiques autour de trois tubes de force :
– une force de défense principale
– une force de réaction rapide
– une force d’appoint
Aujourd’hui, la question qui se pose est de savoir quel rôle a encore l’OTAN ?
En 1992, alors que l’ex-Yougoslavie est en plein conflit, les pays membres de l’OTAN se sont pour la première fois, déclarés prêts à mettre les moyens de l’alliance au service des opérations de maintien de la paix.
L’application de l’alliance va devenir de plus en plus forte puisque, tout d’abord, elle va être en charge de contrôler l’embargo, ainsi que des zones d’exclusion aériennes instaurées par les Nations unies. Et surtout, l’alliance va se voir reconnaître l’autorisation de lancer des frappes aériennes pour desserrer l’étau autour de Sarajevo.
Le 15 décembre 1995, le conseil de sécurité des Nations unies a chargé l’OTAN de mettre en oeuvre les aspects militaires de l’accord de paix. Deux forces ont été instituées pour stabiliser la situation et maintenir la paix. C’est la première opération menée par l’OTAN qui ne relève pas de la défense collective.
Ultérieurement, l’OTAN interviendra au Kosovo. Entre le 23 mars et le 10 juin 1999, l’OTAN a mené des opérations forces alliées, infligeant des frappes aériennes sur la Serbie. Ces forces furent menées sous mandat des Nations unies, car au sein du conseil de sécurité des Nations unies (composé des cinq Etats victorieux de la 2nde guerre mondiale), les États-Unis avaient déjà posé leur veto.
Une fois le conflit terminé, l’OTAN s’est vu confier la responsabilité d’une présence internationale de sécurité au Kosovo : la KAFOR.
L’OTAN est également intervenue en août 2001 en Macédoine, à la demande du président macédonien, pour mettre fin à l’insurrection armée de groupes Albanophones, mais aussi pour favoriser la reprise du dialogue politique entre les différents partis.
Depuis avril 2003, c’est l’union européenne qui assure cette fonction. Aujourd’hui, depuis août 2003, l’OTAN assure le commandement et la coordination de la force internationale d’assistance et de sécurité autour de Kaboul (Afghanistan).
Enfin, la dernière intervention, encore en cours, a été en Irak, au titre de l’aide à la formation des forces irakiennes de sécurité.
On assiste à une véritable redéfinition du rôle de l’OTAN, qui est chargé de participer à des opérations de maintien de la paix. Il est aussi chargé de participer à la stabilité et à la sécurité en Europe, et enfin, de répondre au terrorisme international.
En avril 1999, un nouveau concept stratégique a été défini du fait de l’opération « forces alliées ». Outre la défense de ses membres face à une agression, l’OTAN étend son champ d’application à la gestion de crise dans le respect de la charte des Nations unies afin de renforcer la stabilité et la sécurité de la région
euro-atlantique.
À compter des attentats du 11 septembre 2001, l’OTAN va affiner sa stratégie. Dans une déclaration adoptée le 21 novembre 2002 à Prague, les membres de l’alliance consacrent la vocation de l’OTAN à effectuer sans limitation géographique, toute la gamme de missions militaires, c’est-à-dire du maintien de la paix aux combats de haute intensité. Le rôle de l’OTAN s’est considérablement étendu.
La déclaration de Prague insiste aussi sur l’importance des relations de l’OTAN avec les pays méditerranéens. En effet, elle réaffirme le fait que la sécurité en Europe soit être étroitement liée à la sécurité et à la stabilité en Méditerranée. Elle décide de renforcer les dimensions politiques et opérationnelles du « dialogue méditerranéen », qui comprend les membres de l’alliance, l’Algérie, la Tunisie, le Maroc, l’Égypte, Israël, la Mauritanie et la Jordanie.
Lors du sommet d’Istanbul les 28 et 29 juin 2004, il a été décidé de confirmer ce partenariat. Est alors adopté une déclaration intitulée « notre sécurité dans une nouvelle ère ».
L’OTAN a aujourd’hui décidé d’intervenir en Afghanistan. En 2003, la deuxième guerre d’Irak, conduite par une coalition mais pas par l’alliance, a ouvert une véritable crise au sein de l’alliance.
D’un côté, il y a l’unilatéralisme américain, et de l’autre, les réticences françaises et allemandes. L’alliance pèse lourdement sur les projets d’une défense européenne autonome et peut constituer une alternative à l’unilatéralisme des Américains et au terrorisme.
À la suite de la chute du mur de Berlin, s’est posée la question de l’intégration des pays d’Europe de l’Est.
Dans un premier temps, l’OTAN a rejeté la demande d’admission des pays de Visegrad (Pologne, République tchèque, Hongrie et Slovaquie). En revanche, l’OTAN a créé le conseil de coopération nord atlantique (COCONA), qui rassemble les 16 pays de l’alliance de l’époque, les PECO et les pays baltes, et les républiques issues de l’ex-URSS à l’exception de la Russie.
En 1994, une nouvelle demande d’adhésion a été formée par les Etats d’Europe de l’Est. En décembre 1994, est mis en place le partenariat pour la paix qui va se substituer au COCONA. Ce partenariat implique un rapprochement sans adhésion, et des consultations avec l’alliance pour une dizaine de pays de l’Est. La différence est que ce partenariat s’applique aux pays de l’Est et aux Etats en situation de neutralité depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Un partenariat individuel est également envisagé pour la Russie.
En 1994, à l’opposition de la Russie, les dirigeants de l’alliance atlantique ont pris une position de principe favorable à un élargissement de l’OTAN aux Etats démocratiques de l’Est dans le cadre d’un processus évolutif, compte tenu des développements politiques et de sécurité dans l’ensemble de l’Europe.
À l’automne 1995, l’alliance définit des principes auxquels devrait obéir son élargissement. Tout d’abord, les futurs nouveaux membres devront se conformer aux principes fondamentaux de l’alliance, à savoir la démocratie et le respect des libertés individuelles et l’état de droit. Il s’agira d’Etats européens susceptibles de contribuer à la sécurité de la région nord atlantique. Les nouveaux membres bénéficieront de tous les droits liés à l’appartenance à l’alliance mais devront aussi en accepter les obligations. L’acceptation de ces nouveaux membres devra renforcer l’efficacité et la cohésion de l’alliance, ainsi que préserver ses capacités politiques et militaires à remplir ses fonctions essentielles de défense commune.
En juillet 1997, l’OTAN va engager la première phase de son élargissement vers l’Est. Alors que 12 pays avaient manifesté leur volonté d’adhérer, l’OTAN ne retiendra que 3 :
– la Hongrie
– la Pologne
– la République tchèque
Ces protocoles d’adhésion ont été signés le 16 décembre 1997. Il a été reconnu à ces pays le statut d’observateur jusqu’à leur entrée en 1999.
Lors du sommet de Washington en avril 1999, l’OTAN a lancé un plan d’action pour l’élargissement destiné aux neuf pays candidats non retenus pour le premier cycle.
En pratique, il y ait des divergences d’opinion au sein de l’OTAN. Certains pays membres comme la Grande-Bretagne ou les États-Unis, a souhaité marquer une pause dans l’élargissement. Les attentats de 2001 ont modifié l’opinion des États-Unis qui ont senti le besoin de réunir le plus grand nombre de soutiens politiques et militaires pour combattre le terrorisme. George Bush s’est prononcé début de 2002 pour un élargissement ambitieux. Les États-Unis avaient voulu marquer une pause car l’URSS ne voulait pas qu’ils viennent empiéter trop proche de ses terres. Mais les attentats du 11 septembre 2001 les ont rapprochés et désormais, l’URSS et les États-Unis sont partenaires dans le combat contre la prolifération des armes nucléaires et le terrorisme.
Le 28 mai 2002 a été créé le conseil OTAN/Russie. Ce conseil comprenait 20 membres, et la Russie siégeait à un pied d’égalité avec les membres de l’OTAN. Mais c’est un conseil formel, et non un organe juridique.
À partir de 2002, 7 nouveaux Etats ont été admis : les Etats Baltes, la Slovénie, la Slovaquie, la Bulgarie, et la Roumanie. L’albanie et la Macédoine ont été recalés.
Tous les Etats postcommunistes sont passés par le statut d’Etats membres de l’OTAN avant d’être membres de l’union européenne. Ce processus d’élargissement est amené à se poursuivre. Les chefs d’États et de gouvernements de l’alliance ont déclaré en 2002 que « l’OTAN restera ouverte aux démocraties européennes désireuses et capables d’assumer les responsabilités et les obligations liées au traité de Washington ».
L’OTAN hésite à intégrer l’Ukraine, mais une commission OTAN/Ukraine a été créée. L’Ukraine et la Géorgie étaient jusqu’alors les chasses gardées de l’URSS qui ne voulait pas qu’ils adhèrent à l’OTAN.
Washington souhaite promouvoir une OTAN globale, c’est-à-dire une organisation qui doit s’étendre sans cesse géographiquement et fonctionnellement.
L’OTAN devrait s’affranchir de ses rôles purement militaires pour intervenir dans le domaine civil. Or, le problème est qu’aujourd’hui, l’alliance n’a pas de compétence dans ce domaine, et surtout, il existe une autre organisation : l’ONU. La France s’oppose à attribuer ces nouvelles fonctions à l’OTAN.
Le secrétaire de l’OTAN estime actuellement que l’OTAN ne doit pas devenir un mini ONU ni se transformer en gendarme du monde.
SECTION II : L’UEO (l’union européenne occidentale)
Au cours d’une conférence spéciale, tenue à Londres en septembre 1954, à laquelle participaient les membres de l’union occidentale (France, Grande-Bretagne, Benelux, Canada, États-Unis, RFA, Italie), il fut décidé d’inviter la RFA et l’Italie a adhéré au traité de Bruxelles qui avait institué l’UO. C’est ainsi que va naître l’UEO.
L’effondrement entre les deux blocs, mais surtout la guerre de Corée (déclarée le 25 juin 1950) place les questions de défense au premier plan des préoccupations internationales. La première question est celle du réarmement de la RFA.
Dans un discours du 24 octobre 1950, le président du conseil français, René Pleven, suggérait l’idée d’instituer une communauté européenne de défense (ces deux des). Son rôle était de permettre d’éviter la reconstitution d’une armée allemande indépendante au bénéfice d’une armée européenne placée sous le commandement commun de la CED. Ce projet fut rejeté par la France en août 1954. Le problème est que cet échec de la CED laissait en suspens la question du réarmement allemand. D’autant plus que les Américains se faisaient de plus en plus pressants.
Une solution de remplacement fut trouvée dans la modification et les compléments apportés au traité de Bruxelles de 1947 afin de permettre l’adhésion à ce pacte de l’Italie et de la RFA. Le 23 octobre 1954, furent ainsi signés à Paris, les accords instituant l’UEO.
Dans le préambule du traité de Bruxelles modifié, les signataires des accords de Paris énoncent clairement trois objectifs principaux qui sont :
– constituer en Europe occidentale une base solide pour la reconstruction d’une économie européenne.
– se prêter mutuellement assistance pour faire obstacle à toute politique d’agression.
– promouvoir l’unité et encourager l’intégration progressive de l’Europe.
Ce traité a permis d’apaiser les inquiétudes des Américains mais a aussi permis d’apaiser les inquiétudes que suscitait en Europe la perspective d’une armée allemande, même si cette dernière était placée sous contrôle européen. En effet la reconstruction de l’armée ainsi que le réarmement seraient limités car l’Allemagne ne détiendrait pas les armes A, B, C (atomique, biologiques, chimiques).
Pendant un temps, entre 1954 et 1973, l’UEO n’a pas servi à grand-chose car son action était limitée à un rôle de liaison entre les six Etats fondateurs des trois communautés européennes et le Royaume-Uni. Ce rôle de liaison prit fin avec l’adhésion de la Grande-Bretagne à l’union européenne. Après 1973, l’organisation est tombée en léthargie. Il a fallu attendre le 27 octobre 1984 pour que l’organisation soit relancée. À l’initiative des gouvernements belges et français, une réunion commune des ministres des affaires étrangères fut organisée à Rome les 26 et 27 octobre 1984, réunion qui s’est soldée par la déclaration de Rome. Cette déclaration tend à promouvoir une coopération accrue au sein de l’UEO, afin, non seulement de garantir la sécurité de l’Europe occidentale, mais aussi l’amélioration de la défense commune de l’ensemble des pays de l’Atlantique Nord. Pour remettre en marche cette organisation, il est décidé que le conseil de l’UEO se retrouverait deux fois par an au niveau ministériel.
Cette déclaration fait de l’UEO le centre européen de réflexion et de concertation sur les problèmes de sécurité et de défense. L’idée était d’établir une Europe de la défense, et le 27 octobre 1987, le conseil de l’UEO adopta une « plate-forme sur les intérêts européens en matière de sécurité ». Dans cette plate-forme sont définies les grandes orientations du programme de travail de l’UEO. Mais elle contient également dans son préambule l’engagement suivant : « Nous rappelons notre engagement de construire une union européenne conformément à l’acte unique européen que nous avons tous signés en tant que membre de la communauté européenne ».
Cette déclaration souligne le caractère indivisible de la sécurité de l’alliance, et il faut aussi voir que les ministres y expriment une détermination à renforcer le pilier européen de l’alliance.
En 1987, les membres de l’UEO décident d’engager des négociations avec l’Espagne et le Portugal en vue de leur accession au traité de Bruxelles modifié. Le 27 mars 1990, ils sont devenus membres de l’UEO.
En 1988, la Turquie et la Grèce demandent officiellement à devenir membres de l’UEO. Seule la Grèce sera admise en 1995.
L’absence d’une défense européenne autonome a suscité diverses tentatives de réactivation de l’UEO, notamment en lien avec l’union européenne.
Le 10 décembre 1991, deux déclarations des ministères de l’UEO ont été adoptées à Maastricht :
– La première de ces déclarations indique que « l’UEO sera développée en tant que composante de défense de l’union européenne, et comme moyen de renforcer le pilier européen de l’alliance atlantique. À cette fin, elle formulera une politique de défense européenne commune, et veillera à sa mise en oeuvre concrète en développant plus en avant son propre rôle opérationnel ».
– la seconde déclaration incite les Etats membres de l’union européenne à devenir membres de l’UEO. En 1991, l’UEO invite les Etats européens de l’OTAN à devenir membre associé de l’UEO.
Cette déclaration constitue un compromis entre différentes positions : que faire de l’UEO ?
– certains, comme la France et l’Allemagne, préconisent que l’UEO ait un lien privilégié avec l’union européenne.
– d’autres, comme les Pays-Bas, estime que l’UEO doit constituer le pilier européen de l’OTAN.
– le Royaume-Uni, lui, ne privilégie aucune de ces deux solutions.
Il a été question que l’UEO devait avoir un rôle auprès de l’alliance. L’article 17 du traité d’Amsterdam, adoptée en 1997, réalisé par le traité de Nice de 2000, rappelle que l’union européenne respecte les obligations de l’OTAN. Et cet article poursuit en précisant que pour certains états membres, la défense commune est déjà réalisée dans le cadre de l’OTAN. Cet article a été rajouté sur la volonté des Anglais.
Cette perspective d’intégration de l’UEO dans l’union européenne s’éloigne quelque peu pour deux raisons :
– certains privilégient l’OTAN.
– d’autres sont neutres et ne veulent donc pas faire partie d’une organisation de défense du type de l’UEO.
Les fonctions de gestion de crise ont été transférées à l’union européenne dans le cadre du traité de Nice. Le traité constitutionnel ne fait aucune référence à l’UEO. Donc finalement, à quoi a-t-elle servi ?
– l’UEO a assuré la coordination des forces navales des Etats membres durant la première guerre du Golfe.
– elle a assuré la coopération avec l’union européenne pour l’administration de la ville de MOSTAR en Bosnie-Herzégovine
– elle a mené des opérations de police en Albanie en 2000, et de déminage en Croatie en 2001.
Aujourd’hui, l’UEO regroupe en qualité d’états membres 10 Etats : les 7 Etats signataires + l’Espagne et le Portugal depuis 1990 + la Grèce depuis 1995.
D’autres états participent à des activités sous des qualités diverses.
– Autriche
– Danemark
– Finlande
– Irlande
– Suède
– République Tchèque
– Hongrie
– Islande
– Pologne
– Norvège
– Turquie
– Bulgarie
– Pays Baltes : Estonie, Lettonie, Lituanie
– Roumanie
– Slovaquie
– Slovénie
Ces associés partenaires participent aux réunions mais ils ne peuvent en aucun cas bloquer une décision faisant l’objet de consensus parmi les membres.
Aujourd’hui, au total, l’UEO comporte 28 délégations avec différents statuts.
L’UEO a pris dès l’origine, une allure nettement institutionnelle. En effet, dès le départ, elle comprend trois organes : – un conseil
– une assemblée parlementaire
– un secrétariat
Le conseil peut être immédiatement convoqué en vue de permettre aux hautes parties contractantes de se concerter sur toutes les situations pouvant constituer une menace sur la paix en quelque endroit qu’elle se produise ou alors, mettant en danger la stabilité économique. Ce conseil prend ses décisions à l’unanimité lorsque aucune procédure de vote n’a été prévue. Au sein de ce conseil, il faut distinguer le conseil des ministres (composé des ministres des affaires étrangères et des ministres de la défense qui se réunit deux fois par an. Mais il ne s’est pas réuni depuis 2000) du conseil permanent (qui est composé de représentants permanents assistés des militaires).
Cet ensemble d’organes accumulés s’est accompagné de la constitution de forces multilatérales européennes telles que les groupements tactiques de 1500 hommes, destinée à fournir des unités d’intervention associant plusieurs états européens sur la base du volontariat.
Que peut-on dire de l’UEO aujourd’hui ?
Aujourd’hui l’UEO a été vidée en grande partie, de toute capacité opérationnelle.
Actuellement, elle sert à trois choses :
– c’est LA dépositaire de la garantie de l’article 5 du traité de Bruxelles qui engage les signataires à se porter assistance militaire en cas d’agression.
– c’est un forum du débat sur la sécurité et la défense grâce à l’activité de son assemblée parlementaire.
– elle assure la tutelle politique du groupe armement de l’Europe occidentale (GAEO). Ce groupe comporte une activité de recherche de défense en coopération dont l’UEO assure la tutelle.
SECTION III : L’organisation de la sécurité et de la coopération en Europe (OSCE)
Cette organisation tire ses origines de la conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), qui se voulait une instance multilatérale de dialogue des négociations entre l’Est et l’Ouest. Mais pour contribuer à la gestion des changements historiques en Europe, et pour répondre aux nouveaux défis issus de la fin de la guerre froide, cette conférence s’est transformée en organisation.
L’histoire de la CSCE se confond avec celle de la sécurité européenne depuis l’après-guerre. En effet, en l’absence d’un traité de paix formel entre l’Allemagne et ses 4 vainqueurs, le sort de l’Europe est resté en suspens durant de nombreuses années. On fait parfois remonter l’origine de la CSCE à la conférence quadripartite de Berlin entre la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis, l’URSS, de février 1954, et à la proposition soviétique faite à cette époque d’un pacte européen de sécurité collective. C’était une manoeuvre de l’URSS qui voulait éviter le réarmement de l’Allemagne et que la RFA rejoigne l’alliance atlantique. Mais ce fut un échec.
En 1955, fut signé le pacte de Varsovie.
Mais c’est surtout au cours des années 60, lors de la détente est/ouest, que l’idée d’une conférence paneuropéenne est vraiment apparue.
Au cours des années 60, l’URSS ne cesse de multiplier les propositions pour la tenue d’une conférence sur la sécurité européenne. En juillet 1966, le pacte de Varsovie adopte à Bucarest une déclaration visant à consacrer la division des deux Allemagnes (RFA/RDA) et dans sa déclaration, le pacte de Varsovie appelle à la dissolution des deux alliances militaires afin de les remplacer par un nouveau système paneuropéen de sécurité collective dans lesquelles les États-Unis seraient exclus. Mais cette déclaration n’a pas eu de suite.
Le 17 mars 1969, le pacte de Varsovie propose de nouveau dans la déclaration de Budapest, la tenue d’une telle conférence. Cependant, elle modifie ses conditions en laissant entendre que les États-Unis pourraient y participer. Contrairement à l’autre, cette déclaration renonce à la dissolution des alliances.
Les États-Unis sont réticents et posent le règlement concret de la question de Berlin.
Mais le 5 mai 1969, la Finlande se déclare prête à accueillir cette nouvelle conférence dans sa capitale, Helsinki. C’est un choix astucieux car la Finlande était alors un territoire neutre (elle n’était ni membre du pacte de Varsovie, ni membre de l’alliance atlantique).
Les Européens sont plutôt favorables à l’organisation d’une telle conférence. C’est finalement après la conclusion des accords SALT sur la limitation des armes stratégiques le 26 mai 1972, lors d’un sommet américano-soviétique, que les Américains ont levé leurs réticences. Le feu vert occidental pour la tenue de cette conférence fut obtenu le 31 mai 1972, lors d’une réunion de l’OTAN.
Le 22 mai 1972, jusqu’au 8 juillet 1973, débute à Helsinki la phase préparatoire de la conférence. Lors de cette phase préparatoire, il a été décidé que la conférence se ferait en trois temps :
– une phase initiale, marquée par la réunion des ministres des affaires étrangères pour lancer la conférence.
– une deuxième phase en commission et sous-commission.
– une troisième phase aura pour objet d’adopter en séance solennelle le document final de la conférence. Les états vont s’entendre pour établir un code de bonne conduite, communément acceptée par les états participants.
Trois grands thèmes (trois corbeilles) seront abordés :
– la première corbeille rassemble les questions politico-militaires de sécurité.
– la deuxième corbeille est relative à la coopération dans les domaines de la science, de l’économie, de la technologie et de l’environnement.
– la troisième corbeille porte sur la coopération humanitaire.
Mais c’est sur la première corbeille que se sont concentrées les attentions.
Il a été signé le 1er août 1975 après deux ans de négociations par presque tous les pays européens, de l’Est comme de l’Ouest + les Etats-Unis + le Canada + l’URSS.
Cet acte final fut élaboré par voie de consensus. Il n’est pas considéré comme un traité international, mais comme une déclaration. Puisque ce n’est pas un traité et il n’est pas juridiquement obligatoire, et cela pour plusieurs raisons :
– la RFA ne souhaitait pas conclure un traité qui aurait consacré la division de l’Allemagne.
– l’URSS ne voulait pas non plus de traité puisque ce dernier comporterait des clauses relatives aux libertés individuelles.
Cet acte final d’Helsinki est fondé sur un décalogue (10 principes) intitulé Déclaration sur les principes régissant les relations mutuelles des Etats participants. Les différents principes consacrés sont placés sur un pied d’égalité. Chaque État peut invoquer tel ou tel principe selon son intérêt ou sa stratégie. Un certain nombre de ces principes sont déjà consacrés dans d’autres traités comme l’égalité souveraine des Etats.
Mais il y a 2 innovations essentielles :
– l’acte final fait référence aux droits de l’homme.
– l’acte final fait référence au droit à l’autodétermination.
Mais ce texte est parfois ambigu et comporte un certain nombre de difficultés d’interprétation comme le principe de l’intangibilité des frontières. Ce principe consacre, selon l’URSS, le statu quo territorial issu de la deuxième guerre mondiale.
Pour les occidentaux, qui ne reconnaissaient pas la partition de l’Allemagne, l’intangibilité des frontières implique seulement le refus de l’agression territoriale, mais elle ne saurait d’aucune manière limiter le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il peut y avoir un éclatement des Etats mais en aucun cas une annexion.
À aucun moment il n’a été considéré que la CSCE fût une fin en soi. Elle a été conçue par un processus continu lié à la sécurité européenne, et elle devait se poursuivre.
Mais sont apparues des positions contradictoires : l’URSS cherchait à obtenir l’institutionnalisation de la CSCE pour avoir un droit de regard permanent sur les affaires paneuropéennes. En revanche, les occidentaux n’étaient pas favorables à la création de structures lourdes. Ils voulaient instituer un contrôle de l’application des engagements pris dans l’acte final.
Le compromis a consisté à prévoir des réunions de suivi périodique mais sans s’engager sur un calendrier précis. Au cours des années 80, différentes réunions ont eu lieu. Mais avec l’implosion du bloc de l’Est, les questions allaient désormais se poser différemment
À la fin de l’année 1989, toutes les dictatures de l’Europe de l’Est cèdent les unes après les autres. La voie est alors libre pour le sommet sur la nouvelle situation en Europe. Ce sommet est une idée lancée le 30 novembre 1989 par Mikhaïl Gorbatchev. Le 6 décembre, François Mitterrand donne son soutien à l’initiative soviétique. Peu de temps après, la France annonce sa disponibilité pour accueillir ce sommet qui aura lieu à Paris.
Au même moment, des négociations ont lieu entre les États-Unis, URSS, la France et la Grande-Bretagne pour régler la question de l’Allemagne (conférence des « 2 + 4 »). Elles vont s’achever en septembre 1990.
Le 31 août 1990, le traité de réunification entre les deux Allemagne est signé.
Le 19 novembre 1990, après la conférence des « 4 + 2 », s’ouvre le sommet de Paris, presque un an après avoir été lancé. Il va durer jusqu’au 21 novembre 1990. Lors de ce sommet, les chefs d’État et de gouvernement prennent acte de la transformation pacifique du « paysage européen » avec « la réalisation de l’unité nationale de l’Allemagne ».
Ils s’entendent sur cette affirmation : « nos Etats coopéreront et se soutiendront mutuellement pour rendre irréversibles les acquis démocratiques. L’Europe entière et libre appelle à un nouveau départ, nous invitons nos peuples à s’associer à cette grande entreprise ».
Lors de ce sommet de Paris est adoptée la Charte de Paris pour une nouvelle Europe, qui consacre vraiment un nouvel ordre européen. Cette charte va s’articuler autour de deux volets :
– d’un côté, elle consacre un ralliement aux valeurs occidentales comme valeurs universelles.
– de l’autre, elle va rappeler 2 principes importants qui sont le respect de l’intégrité territoriale des Etats et le principe de non recours à la force.
Mais elle introduit de nouveaux principes porteurs de l’idéologie libérale parmi lesquels on distingue les principes du libéralisme politique (qui visent à consolider les droits de l’homme, la démocratie, et l’état de droit) du libéralisme économique (qui vise à développer l’économie de marché).
Cette charte est extrêmement importante car elle conduit à une véritable relecture de l’acte final d’Helsinki. Elle fixe de nouvelles perspectives dans le cadre des trois corbeilles :
– La première corbeille peut désormais s’élargir aux questions de désarmement.
– La deuxième doit également s’intéresser aux principes de l’économie de marché, qui est un passage obligé en vue de s’insérer dans le système économique et financier international et dans le libre-échange du GATT.
– la troisième corbeille a gagné en importance. On parle désormais de « dimension » humaine.
La charte met en place des mécanismes d’intervention à savoir qu’une action diplomatique est destinée à garantir concrètement les libertés fondamentales. Il est aussi envisagé de garantir certaines libertés individuelles.
La charte de Paris contient 2 pôles :
– le premier pôle est un volet institutionnel : on assiste à une internationalisation de la coopération politique. L’idée est que la multiplication des Etats après l’effondrement du bloc soviétique nécessitait de repenser la logique institutionnelle. Aussi pour ne pas être fragilisé, la CSCE devait impérativement se doter d’un système institutionnel cohérent.
– c’est pourquoi à côté de la charte de Paris vont être conclus des accords institutionnels qui envisagent l’institutionnalisation progressive de la CSCE. Apparaissent donc des institutions permanentes.
Lors du sommet, il devait être annoncé ultérieurement la transformation de la CSCE. C’est lors du sommet de Budapest de 1994 que va être décidée l’OSCE.
Aujourd’hui, l’OSCE comporte 56 Etats.
Ils peuvent être distingués entre deux grands groupes :
À la tête de l’OSCE, il y a le sommet des chefs d’État et de gouvernement. Il était initialement convoqué tous les deux ans, mais aujourd’hui il n’est plus convoqué que périodiquement et sans date fixe. Le rôle des chefs d’État et de gouvernement est de définir les priorités de l’organisation.
– le conseil des ministres des affaires étrangères : les ministres des affaires étrangères se rencontrent une fois par an, sauf quand a lieu un sommet des chefs d’État et de gouvernement. La présidence tourne tous les ans. Un ministre des affaires étrangères dirige, assisté de son successeur.
– le conseil des représentants permanents : il se réunit une fois par semaine à Vienne.
– évaluer la mise en oeuvre des objectifs de l’OSCE. Elle organise des débats parlementaires sur les différents sujets traités par le conseil.
– développer et promouvoir des mécanismes pour la prévention et le règlement des conflits.
– favoriser le renforcement et la consolidation des institutions démocratiques dans les Etats participants.
– contribuer au développement des structures institutionnelles de l’OSCE.
Ces organes de vigilance sont chargés d’intervenir dans les différents secteurs d’activité de l’OSCE. Il y en a quatre :
Il a pour mission : – l’observation des élections dans les Etats qui effectuent leur transition démocratique.
– il doit promouvoir les actions des O.N.G. au service des droits de l’homme.
– il effectue la formation des observateurs, mais aussi la formation des journalistes.
Aujourd’hui, l’OSCE est un « accord régional » au sens du chapitre huit de la charte des Nations unies. C’est une organisation de premier recours pour le règlement des différends dans la région.
Aujourd’hui elle a trois rôles essentiels :
– elle joue un rôle d’enceinte de réflexion sur la structure européenne de sécurité.
– c’est un instrument d’alerte, de prévention, mais également de gestion de crise et de relèvement après un conflit.
– c’est aussi un forum transatlantique européen mais également euro-asiatiques puisqu’il existe quelques partenariats extérieurs avec des pays d’Asie.
En novembre 1995, l’OSCE a adopté à Istanbul la charte de sécurité européenne.
Cette charte à 2 objectifs :
– renforcer la sécurité et la stabilité en Europe, ainsi que les capacités opérationnelles de l’organisation.
– il est prévu une redéfinition du rôle de l’OSCE par rapport aux autres organisations.
Certains Etats, et les États-Unis plus particulièrement, essaient d’orienter l’OSCE vers un rôle davantage politique que celui du maintien de la paix réelle. Les Américains estiment que l’OSCE n’est pas militairement outillé pour le maintien de la paix, et elle devrait soutenir celles qui le sont, comme l’OTAN.
A l’inverse, les Russes souhaitent renforcer l’OSCE en tant qu’organisation paneuropéenne de sécurité. Les Russes proposent qu’elle puisse jouer le rôle actuel de l’OTAN. En effet, l’OSCE constitue pour la Russie la seule enceinte de défense relative au continent européen dans laquelle elle peut prendre part au débat sur la sécurité puisqu’elle n’appartient pas à l’OTAN.
L’Europe n’a pas d’avis sur la question.
Aujourd’hui, l’OSCE cherche à éviter la marginalisation. On a tenté de mettre en place les décisions prises par les États-Unis, mais ces dernières sont difficiles à appliquer.
L’OSCE a essayé de jouer un rôle politique dans le cadre du conflit en Tchétchénie. En 1999, lors du sommet d’Istanbul, 30 Etats ont signé un accord d’adaptation sur le traité des forces armées conventionnelles en Europe. Ce texte réduit le niveau des armements conventionnels et des troupes. Or il est établi que la Russie viole déjà ce traité au niveau des armements déployés par la guerre en Tchétchénie. Moscou a alors promis qu’elle allait respecter ce traité une fois que la guerre en Tchétchénie serait terminée.
Le 10 février 2007, à Munich, Vladimir Poutine a critiqué l’OSCE de manière très vive, en disant qu’« on tente de banaliser l’OSCE pour en faire un instrument au service d’un groupe de pays, au détriment d’un autre ». L’OSCE est accusé d’ingérence dans les affaires des anciennes républiques soviétiques.
Aujourd’hui son rôle est incertain. L’OSCE reste largement dépendante des États-Unis. Elle est concurrencée par l’OTAN, l’union européenne, l’ONU et le conseil de l’Europe.
Chapitre III : Le système européen de protection des droits de l’homme
Peu après la signature de la convention créant l’OECE, un important congrès se réunit à la Haye du 7 au 10 mai 1948, de caractère non de gouvernemental organisé par le comité international de coordination des mouvements pour l’unification de l’Europe (CICMU).
Au cours de ce congrès, deux courants de pensée s’opposent :
– les unionistes : à leur tête on retrouve les conservateurs britanniques. Ils étaient partisans de l’union et non de l’unité. Mais les travaillistes les ont également rejoints. En effet, ces derniers ne souhaitaient pas se lier avec les pays du continent européen, puisqu’ils ne voulaient pas non plus distendre les relations traditionnelles privilégiées entre les États-Unis et les dominions.
– les fédéralistes : ils étaient issus des rangs français, belges, italiens et néerlandais.
Au coeur des ambiguïtés de l’Europe, se trouve l’attitude anglaise. De ce congrès naîtra, un an plus tard, le conseil de l’Europe dont l’oeuvre majeure est la Convention européenne des droits de l’homme (Loudéac).
SECTION I : Le conseil de l’Europe
Lors d’une intervention devant les cinq signataires du pacte de Bruxelles, le 20 janvier 1948, Georges Bidault (ministre des affaires étrangères français) propose à son tour de créer une assemblée européenne. Quelques semaines plus tard, le nouveau titulaire du Quai d’Orsay, Robert Schuman, prend le projet d’assemblée à son compte et réussi à obtenir le soutien du premier ministre belge de l’époque : Paul Henri Spaak.
En janvier 1949, la France, la Grande-Bretagne et le Benelux s’entendent pour créer un conseil de l’Europe qui sera fondé sur une assemblée consultative, et doublé d’un conseil des ministres chargés de représenter les Etats lors de ces négociations. Robert Schuman alors été amené à faire des concessions :
– il ne voulait pas mécontenter les européistes, et encore moins les Américains.
– il ne voulait pas non plus se couper des Anglais, car il estimait que leur participation paraissait indispensable pour faire contre-poids à l’Allemagne.
Ce compromis adopté donne une large satisfaction aux Britanniques. Il n’y aura pas d’union européenne, mais d’un conseil de l’Europe bicéphale où l’assemblée consultative sera encadrée par le conseil des ministres.
Le 28 mars 1949 est réunie à Londres une conférence pour établir un traité entre les 10 Etats fondateurs du conseil de l’Europe : les cinq signataires du pacte du Bruxelles + l’Italie + le Danemark + la Norvège + la Suède + Irlande.
Le 5 mai 1949, un texte est signé à Strasbourg, faisant du conseil de l’Europe une conférence diplomatique, et non un congrès des peuples européens.
Le 9 août 1949, le comité des ministres va se réunir pour la première fois. L’assemblée consultative tient une séance inaugurale le lendemain. Lors de cette première session le 10 août, les parlementaires ont immédiatement tenté de faire modifier le statut pour faire accroître les pouvoirs de l’assemblée face au comité des ministres. Mais ce conflit se révéla stérile et paralysa l’organisation dès le départ.
D’un côté on trouvait les partisans du gouvernement d’assemblée. De l’autre, les travaillistes.
Ce statut va être jugé souverainement par les européens les plus ardents (Schuman, …).
Il n’est pas étonnant que moins d’un an après la création du conseil de l’Europe, les Etats soucieux d’aller plus loin dans l’intégration européenne reporteront leurs ambitions sur une autre conception de l’Europe : une Europe communautaire, qui sera dévoilée par Schuman et portera son nom en mai 1950.
Pendant longtemps, ces deux Europes vont évoluer parallèlement avec des objectifs et des méthodes différentes dans des sphères complémentaires.
Malgré les tentatives périodiques de réforme et de relance du conseil de l’Europe, l’organisation reste marquée par cette cohabitation initiale de projets contradictoires.
D’un côté, il y avait les Britanniques et les scandinaves, et de l’autre, les fédéralistes.
À l’origine, il y en avait 2 :
– le comité des ministres
– l’assemblée parlementaire
Mais d’autres organes ont été créés. Les deux premiers organes sont assistés par un secrétaire général, qui apparaissait comme un organe auxiliaire. Comme les organes statutaires pouvaient se donner des prolongements, de nombreux aux organes subsidiaires et complémentaires ont vu le jour.
Le comité des ministres des affaires étrangères se réunit deux fois par an en session ordinaire à Strasbourg. La présidence du comité change tous les six mois selon l’ordre alphabétique anglais des Etats membres.
En 1952, les ministres ont délégué leur pouvoir à des ambassadeurs en qualité de représentant permanent des membres auprès du conseil de l’Europe. Ils se réunissent en comité au moins une fois par mois.
Ce comité des ministres est un organe d’initiative et de rapprochement de points de vue différents. Il ne doit pas se substituer aux Etats. Il prend des recommandations qu’il veut adresser à l’égard des Etats. Mais ils n’ont pas d’effets obligatoires l’égard de ces derniers.
Les décisions sont en principe, prises à la majorité des 2/3, mais en pratique, elles sont prises à l’unanimité. Quand la majorité aux 2/3 est requises, à l’abstention n’est pas assimilée à un veto. Mais quand l’unanimité requise, l’abstention est comparable à un droit de veto.
Ce comité des ministres répond aux questions écrites ou orales posées par les représentants de l’assemblée.
Il se prononce également sur les demandes d’adhésion. De manière générale, il peut prendre des décisions d’ordre interne et contribuer aux accords internationaux.
Le conseil de l’Europe a adopté un certain nombre de conventions. C’est le comité des ministres qui va les élaborer. Il existe deux types de convention :
– accords généraux
– accords partiels
Le comité des ministres va élaborer des conventions et des accords qui constitueront ensuite la base des modifications visant à obtenir une harmonisation législative au sein des différents membres du conseil de l’Europe. De très nombreuses conventions d’unification du droit ont été conclues sous les auspices du conseil de l’Europe.
À côté de ces conventions générales, il y a des accords partiels qui sont des sortes de coopération à géométrie variable. Ils permettent à un certain nombre d’Etats de mener une politique spécifique commune. Si ces accords partiels n’engagent que certains Etats, le comité des ministres doit autoriser l’adoption de ces accords par un vote à l’unanimité des voix exprimées
Aujourd’hui, le conseil de l’Europe a contribué à l’élaboration de plus de 200 conventions par entreprise du comité des ministres, qui portent sur tous les domaines.
Par exemple :
– la charte sociale européenne signée à Turin le 18 octobre 1961
– la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du 27 novembre 1987
Ces conventions ne sont obligatoires que pour les Etats qui les ont signées et ratifiées.
Outre les différentes fonctions du comité des ministres, il a un rôle de surveillance : le comité des ministres veille à la mise en oeuvre effective des conventions et accords conclus entre Etats membres. Il est également en charge, dans le cadre de la Convention européenne des droits de l’homme de veiller à l’exécution des arrêts de la cour européenne des droits de l’homme.
Les positions prises et les votes émis au sein de ce comité ne sont pas publiés, ce qui n’est pas le cas pour l’assemblée parlementaire.
Cette assemblée parlementaire est l’instance délibérante du conseil de l’Europe. Elle est composée de 315 membres, sachant que ses membres sont des représentants désignés par les parlements nationaux membres du conseil de l’Europe, selon une certaine forme de répartition : deux sièges minimums, 18 au plus (c’est le cas de la France car elle est fortement peuplée). Cette assemblée est consultative car les Etats fondateurs du conseil de l’Europe souhaitaient avant tout préserver le caractère intergouvernemental de l’Europe.
Son nom officiel est « assemblé consultative ».
– Elle siège à Strasbourg en séance plénière une fois par an. Elle fonctionne exactement selon un style parlementaire.
– Elle fixe son ordre du jour qui correspond généralement à l’actualité.
– Elle agit par voie de recommandations (adressées au comité des ministres). Ces recommandations sont adoptées à la majorité des deux tiers.
– Elle peut aussi adopter des résolutions à la majorité simple, qui seront adressées aux gouvernements nationaux ou à d’autres institutions dont elle examine les rapports périodiques d’activité.
– Ses actes sont dépourvus de toute force obligatoire. C’est un organe parlementaire, donc elle a constitué des commissions générales et spéciales sur tel ou tel problème.
– Elle dispose aussi d’une commission permanente qui siège entre les sessions et ainsi assurer une certaine continuité.
Elle a un rôle important. Elle est devenue une importante tribune politique susceptible de donner des impulsions. En 1951, elle s’est affirmée en combattant son statut et s’est émancipée par rapport aux textes du traité en étendant les sphères de compétence qui lui était dévolues. Elle est sortie du carcan qui lui était imposé par le statut du conseil de l’Europe. Elle a notamment réussi à étendre ses pouvoirs en ce qui concerne l’adhésion de ces nouveaux membres.
Il existe un statut d’invité spécial pour les Etats du continent européen susceptibles de devenir membres du conseil (c’est le cas de la Biélorussie).
Mais il a aussi un rôle particulier car il est le dépositaire des conventions.
Ce comité est un organe de liaison entre l’assemblée et le comité des ministres (qui, dans le statut de 49, était complètement isolée et séparée).
– elle vise à prendre en charge la situation des réfugiés et la reconstruction des services publics.
– elle vise à promouvoir le respect des droits de l’homme et de la démocratie.
Par exemple : il a fait un rapport sur la Russie suite à une opération de nettoyage en Tchétchénie.
Successivement, de nombreux Etats sont venus grossir les rangs du conseil de l’Europe, afin de promouvoir un idéal démocratique et l’État de droit. Mais la contradiction initiale qui caractérise le statut se traduit par un flou volontaire concernant les objectifs et les compétences de l’organisation. En fait, il est doté d’objectifs très vastes mais ces moyens sont relativement faibles.
Le conseil de l’Europe regroupe un nombre croissant d’Etats européens.
Ces modalités sont prévues aux articles trois et quatre du statut du conseil de l’Europe.
Article 3 : « Tout membre du conseil de l’Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il s’engage à collaborer sincèrement et activement à la poursuite du but défini au chapitre premier ».
Article 4 : « Tout Etat européen considéré capable de se conformer aux dispositions de l’article 3, et comme en ayant la volonté, peut être invité par le comité des ministres à devenir membre du conseil de l’Europe ».
Pour être membre, il faut répondre à deux conditions :
1) Etre européen
Au début, le critère géographique a été adopté avec une certaine souplesse : la Turquie, tout comme Chypre, est membre du conseil de l’Europe.
Pourquoi ? Parce que le conseil de l’Europe avait peur que ces Etats se retrouvent marginalisés. Mais cette problématique de l’adhésion a été bouleversée à la fin de la guerre froide, et elle a été renouvelée car il y avait trop de candidature des PECO.
Seuls les Etats « dont la culture est étroitement liée à la culture européenne » devrait pouvoir adhérer à l’organisation.
Dans ce rapport, elle se prononce contre l’éligibilité des anciennes républiques asiatiques, membre de l’OSCE, mais elle se prononce en faveur de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan, et de la Géorgie (république caucasienne).
L’assemblée parlementaire leur reconnaît une vocation à demandé leur adhésion, en raison des liens culturels, mais aussi à condition qu’elles indiquent clairement leur volonté d’être considéré comme faisant « partie de l’Europe ».
2) Se conformer aux valeurs démocratiques
L’adhésion au conseil de l’Europe implique une mise en conformité du droit constitutionnel national avec les exigences de la Convention européenne des droits de l’homme.
Elle appelle également des adaptations législatives ou réglementaires et la mise en place d’un système adéquat pour la mise en oeuvre de la jurisprudence de la cour européenne.
En application de l’article 4 du statut, c’est au comité des ministres qu’il revient d’inviter à devenir membre du conseil de l’Europe l’État ayant la capacité et la volonté de respecter les principes de base énumérés.
Devenir membre du conseil de l’Europe signifie « avoir un brevet de démocratie ».
Ce fut le cas de la Grèce. Elle a quitté le conseil de l’Europe et est revenue dès que la démocratie elle-même s’est réinstallée dans le pays.
Avec la chute du mur de Berlin, des critères plus précis ont été élaborés. Tout État qui voulait adhérer devait ratifier la CEDH et respecter les droits des minorités.
L’assemblée parlementaire avait aussi posé comme condition préalable à tout examen d’une demande d’adhésion la tenue d’élections législatives libres et démocratiques. Par exemple, la Russie devait respecter les conditions précédentes et prononcer un moratoire sur l’application de la peine de mort. De même, la Croatie devait respecter les accords de Dayton et l’Ukraine devait mettre en place une nouvelle constitution.
Lorsque le conseil lance une invitation, il consulte l’assemblée parlementaire qui va lancer une enquête pour vérifier que le candidat répond aux conditions d’adhésion.
Le statut prévoit une possibilité de retrait. Par exemple, le 12 décembre 1969, la Grèce s’est retirée pour ne pas avoir à subir les sanctions que le conseil de l’Europe s’apprêtait à prendre.
Il existe deux types de sanctions :
-l’article 9 du statut du conseil de l’Europe envisage la suspension du droit de représentation tout à la fois au comité des ministres et à l’assemblée d’un État qui n’exécute pas ses obligations financières.
– l’article 8 prévoit une gamme de mesures à l’encontre d’un État qui violerait certains principes de base du conseil de l’Europe. C’est une véritable procédure de sanction graduelle qui s’étend de la simple suspension au retrait forcé.
Dans la résolution 794 (1983), l’assemblée parlementaire a décidé de prendre sérieusement en considération la possibilité d’adresser au comité des ministres une recommandation visant à l’application de la procédure prévue par l’article 8 du statut du conseil de l’Europe à la Turquie.
Cependant, c’est une simple proposition.
En pratique, cette menace est restée en suspens. Elle n’a pas été plus loin car dans ce même texte, l’assemblée se disait « consciente du fait que l’influence du conseil de l’Europe se fera mieux sentir tant que seront maintenus les liens de la Turquie avec cette organisation ».
En 1980, on était encore en pleine guerre froide et la Turquie avait une position stratégique au sein de l’OTAN.
À l’origine, il y avait 10 membres :
– les 5 du pacte de Bruxelles : Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, France, Grande-Bretagne.
– le Danemark
– l’Irlande
– l’Italie
– la Norvège
– la Suède
+ la Grèce en 1949
+ le Portugal en 1976
+ l’Autriche …
+ la Finlande en 1989. Lorsqu’elle est devenue un État membre du conseil de l’Europe, cette adhésion fut saluée par le secrétaire général du conseil comme « un événement marquant l’achèvement de l’Europe démocratique ». On pensait que le conseil avait atteint ses limites géographiques et politiques.
Après l’effondrement du bloc communiste, le conseil de l’Europe va s’ouvrir véritablement pour construire une Europe libre et unie. Le conseil de l’Europe veut être une organisation paneuropéenne.
Dans les années 90, tous les pays issus du bloc de l’Est vont progressivement rejoindre le conseil de l’Europe qui fut très sélectif : il n’a accueilli que la Hongrie, la Pologne, et la Tchécoslovaquie.
Dans un deuxième temps, le conseil va s’ouvrir pour accueillir un maximum d’État pour mieux encadrer la démocratisation inachevée des candidats.
Le conseil de l’Europe comporte aujourd’hui 46 membres. Le dernier entré est Monaco, en octobre 2004. Seule la Biélorussie n’est toujours pas membre, même si elle est candidate depuis 1993. Elle est marginalisée étant donné qu’elle est actuellement sous une dictature.
Ce changement quantitatif a sans conteste alourdi les mécanismes de concertation politique, mais surtout, cela a entraîné un changement de nature car le conseil de l’Europe était vu comme le club des vieilles démocraties.
Les États-Unis, le Canada et le Japon ont actuellement le statut d’observateur.
– Premier objectif : « le but du conseil de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes qui sont leur patrimoine commun et de favoriser leurs progrès économiques et sociaux ».
L’expression « union plus étroite entre ses membres » est source d’ambiguïté :
– Pour les Français, l’idée était d’aller vers des États-Unis d’Europe.
– Pour les Britanniques, c’était juste une coopération entre Etats.
C’est une formule rituellement citée dans les considérants des recommandations élaborées par les organes de l’organisation, l’idée étant de dépasser les particularismes nationaux, sans pour autant rompre avec la collaboration et l’intégration.
Le conseil de l’Europe à 2 grands buts si : « sauvegarder et promouvoir des idéaux ». Ces objectifs ont été définis seulement quatre ans après la fin de la seconde guerre mondiale, donc l’idée était de rappeler les bases de la démocratie véritable. Le patrimoine commun auquel il est fait allusion concerne la primauté d’État de droit, le pluralisme politique des démocraties représentatives, et la protection des libertés individuelles et des droits de l’homme.
– Second objectif : il établit un lien entre la démocratie politique et la démocratie sociale. Mais en pratique, c’est un objectif très théorique face à ce qui deviendra l’OCDE.
En 1955 est créée la conférence européenne des ministres du transport, qui informe chaque année l’Assemblée Parlementaire de son activité.
Le conseil de l’Europe ne dispose pas d’autres instruments que ceux du droit international classique, excepté dans le domaine des droits de l’homme. Le conseil de l’Europe n’institue qu’une simple coopération entre Etats. Le seul moyen d’agir passe par les traités.
=> article 1er alinéa d : « le conseil de l’Europe ne peut évoquer les questions relatives à la Défense nationale ». Cette absence de compétences explique d’une part par la création de l’alliance atlantique (puis de l’OTAN) mais aussi par la volonté de certains Etats de conserver leur neutralité, et par la volonté pour d’autres de garder leur souveraineté.
Le 1er mars 1949, Robert Schuman, Ministre des Affaires Etrangères, a dit devant le conseil de la république « il est compréhensible que nous ne soyons pas encore mûrs pour que l’existence et la liberté des Etats puissent être soumises à une discussion par des représentants d’autres pays dans une assemblée qui n’en est qu’à ses débuts ».
En pratique néanmoins, le conseil de l’Europe essaye d’évoquer ce sujet. Par exemple, des débats ont été organisés en 1950 sur la sécurité de la société alors que la guerre de Corée venait juste de commencer. Aujourd’hui, il discute encore de ces questions mêmes si ce n’est pas vraiment son rôle pour
=> article 1er alinéa c : « la participation des membres aux travaux du conseil de l’Europe ne doit pas altérer leur contribution à l’oeuvre des Nations unies et des autres organisations ou unions internationales auxquelles ils sont partis ». Cet alinéa aborde la question de la compétence des autres organes de l’Europe.
Fin des années 40/début des années 50, de nombreuses organisations ont vu le jour. Cela a posé des problèmes de double emploi : certains participaient à plusieurs organisations européennes complémentaires ou concurrentes.
Cet alinéa doit être lu avec l’article 23 alinéa b qui indique à propos de l’ordre du jour de l’assemblée parlementaire que celle-ci doit tenir compte « de l’activité des autres organisations intergouvernementales européennes auxquelles sont partis tous les membres du conseil ou quelques-uns d’entre eux ». A partir de là, deux interprétations sont envisageables de ces deux articles :
– Le conseil de l’Europe ne serait qu’une instance subsidiaire dont la compétence est résiduelle. Dans cette perspective, le conseil de l’Europe doit se contenter de ne pas entreprendre de travaux là où une organisation européenne s’est déjà prononcée.
– Le conseil de l’Europe serait une instance de coordination, une plaque tournante de la coopération européenne en vertu de sa compétence générale et de sa dimension politique.
En pratique, ni une ni l’autre de ces interprétations ne se sont réglées de manière empirique.
Le conseil de l’Europe collabore avec d’autres organisations nationales et régionales :
– Avec l’OCDE : coopération depuis 1962, qui passe notamment par l’organisation annuelle d’un « débat élargi sur les activités de l’OCDE » devant l’assemblée parlementaire du conseil de l’Europe.
– Avec l’ONU : – réunions d’experts et des échanges de points de vue (entre le comité ad hoc des Nations unies sur le terrorisme et le comité d’experts du terrorisme du conseil de l’Europe).
– participation réciproque à des réunions et conférences des 2 organisations. Par exemple, en 2000, a eu lieu une conférence européenne contre le racisme sous l’égide du Conseil de l’Europe, à laquelle l’ONU a participé, en vue de l’organisation de la conférence mondiale contre le racisme, la xénophobie et l’intolérance, organisée à Durban en 2001.
– réunions tripartites de haut niveau entre l’ONU, le conseil de l’Europe et l’OSCE
– Avec l’UE : superposition des 27 Etats membres au conseil de l’Europe (tous les membres de l’UE sont membres du conseil de l’Europe). Les relations entre les deux organisations régionales ne sont pas seulement des relations de voisinage. Le traité de Rome avait envisagé cette superposition puisque l’article 303 du traité de Rome prévoit « la communauté établie avec le conseil de l’Europe, toute coopération utile ».
Il n’y eût pas de difficultés tant que l’union européenne avait la compétence économique. Après, sont apparus des problèmes de coordination entre l’union européenne et le conseil de l’Europe, et ce, depuis que l’union européenne a cessé d’être une organisation purement économique.
Aujourd’hui, il s’agit de savoir si l’union européenne pourrait adhérer à la CEDH.
– Le même problème survient avec l’OSCE : la coopération a été instaurée entre les trois Etats en cas de graves crises. Ils doivent coopérer sur le terrain.
– Le 14 décembre 1995, ont été signés les accords de Dayton, qui avaient confié le volet militaire à l’OTAN, mais qui avaient attribué le volet civil aux Européens, et plus précisément à l’union européenne, à l’OSCE et au conseil de l’Europe.
– le pacte de stabilité pour l’Europe du Sud-Est, proposé par l’union européenne en 1994, mais adopté en 1999, est un cadre de coopération entre le conseil de l’Europe, l’OSCE et l’union européenne.
Il s’agit de mener conjointement des opérations sur le terrain (par exemple, l’intervention Serbie), et plus généralement, assurer la paix, le bon voisinage, la démocratie, le respect des droits de l’homme et des minorités, le retour des réfugiés et la prospérité économique dans la région.
BILAN DU CONSEIL DE L’EUROPE
C’est la seule organisation créée sans les États-Unis. Aussi, le lien transatlantique est beaucoup moins fort. C’est une organisation proprement européenne qui a pour vocation de réunir toutes les démocraties parlementaires du continent. Aujourd’hui, cet objectif a été atteint.
Aujourd’hui, les objectifs n’ont pas changé depuis 1949. Le premier objectif est toujours de défendre efficacement les démocraties des droits de l’homme et la diversité sociale et culturelle, ainsi que de promouvoir une coopération juridique afin de répondre aux problèmes transnationaux qui peuvent se présenter.
Le conseil de l’Europe est une organisation qui constitue un pôle d’attraction pour tous les pays européens, en tant qu’expression d’une éthique occidentale fondée sous le signe de l’État de droit et le respect des valeurs individuelles. Son action a contribué à stimuler et consolider le processus de démocratisation rapide qui s’est enclenché en Europe centrale et orientale après l’effondrement du bloc soviétique.
Mais le conseil de l’Europe a connu quelques difficultés :
– depuis 1996 (adhésion de la Russie au Conseil de l’Europe), l’Assemblée Parlementaire adopte régulièrement des textes dans lesquels elle demande aux autorités russes de mettre fin pacifiquement au conflit en Tchétchénie. Face à la poursuite de la guerre et aux exactions commises sur le territoire tchétchène parler forces russes, les pouvoirs de la délégation de la fédération de Russie ont été contestés. En 2000, au vu des rapports alarmants établis par les parlementaires, l’assemblée parlementaire a décidé de suspendre le droit de vote de la délégation russe (pendant seulement quelques mois).
Le conseil de l’Europe a réussi sa mission, mais aujourd’hui, son statut semble obsolète. Il est concurrencé par l’union européenne qui ne cesse de s’élargir, et par l’OSCE qui s’adapte continuellement grâce à la souplesse de son statut.
SECTION II : La Convention Européenne des Droits de l’Homme (CvEDH)
Parmi les très nombreuses conventions établies par le conseil de l’Europe, la CvEDH a une place particulière (= Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales).
Elle a été adoptée le 4 novembre 1950 par le comité des ministres du conseil de l’Europe à Rome. Elle est entrée en vigueur le 3 septembre 1953.
La CvEDH est inspiré de la déclaration universelle des droits de l’homme adoptée à Paris le 10 décembre 1948. Cette DUDH est une « recommandation » de l’assemblée générale des Nations unies. Elle n’a aucune valeur juridique. En revanche, la CvEDH a une force obligatoire. Elle fournit le modèle le plus perfectionné dans le monde garantissant les droits de l’homme.
C’est le mouvement européen, lors du congrès de la Haye, qui a favorisé son adoption. La CvEDH est en quelque sorte la constitution du conseil de l’Europe. Elle a été complétée après son adoption, par des protocoles, dès 1950 (14 protocoles ont été adoptés).
Il existe deux types de protocoles :
– Les protocoles additionnels : ils vont ajouter, préciser certains droits, mais ne vont obliger que les Etats qui les ont ratifiés. Par exemple, le 3 mai 2002, le protocole n°13, signé à Vilnius, est relatif à l’abolition de la peine de mort en temps de paix comme en temps de guerre (le protocole n°6 n’abolissait la peine de mort qu’en temps de paix).
– Les protocoles d’amendement : ils doivent être ratifiés par tous les membres du conseil de l’Europe pour entre en vigueur, car ils modifient le texte même de la CvEDH (ex : Protocole 11). Ce sont les plus importants.
L’originalité et l’importance du système européen de protection des droits de l’homme tiennent moins aux droits garantis (§1) qu’à la mise en place d’un mécanisme juridictionnel destiné à assurer le respect de ces droits (§2).
Évoquer les droits garantis, c’est parcourir le titre premier de la Convention européenne des droits de l’homme et certains de ses protocoles additionnels (n°1, 4, 6, 7, 12, 13). Ces protocoles énumèrent les droits protégés que l’on peut qualifier de « classiques ».
Les principes essentiels consacrés par la CvEDH guident la CrEDH :
– la CvEDH considère que certains droits, certains principes, sont plus absolus que d’autre car ils ne souffrent d’aucune dérogation (par exemple, le droit la vie).
– la jouissance des différents droits reconnus par la CvEDH doit être assurée sans aucune distinction.
– l’équilibre entre les libertés individuelles et les intérêts de la société démocratique nécessitent de pouvoir restreindre certains des droits individuels garantis.
– la jouissance des droits reconnus par la CvEDH peut connaître des dérogations en cas de guerre ou de danger public menaçant le gouvernement de la nation.
Droits et libertés :
– l’intégrité de la personne physique qui consacre trois grands droits aux articles 2, 3, 4 :
– le droit à la vie (article 2) : mais le problème est que le terme « vie » n’est pas défini.
« Tout être né a droit à la vie » : cette formule ne permet pas de se prononcer sur les embryons, ce qui pose problème pour les avortements.
Mais la peine de mort n’avait pas été abolie jusqu’au protocole 6 puis 13.
– le droit à ne pas subir de tortures ou de traitements inhumains ou dégradants :
– Torture : concerne essentiellement la Turquie, mais également la France, condamné dans l’affaire SELMOUNI Vs FRANCE. Dans un arrêt du 28 juillet 1999, la CrEDH a retenu la qualification de tortures à l’encontre de mauvais traitements infligés par des policiers à des personnes placées en garde à vue.
– Esclavage et travail forcé : en théorie interdits. La CrEDH n’a jamais eu l’occasion de condamner sur ce fondement, sauf la France, récemment, dans l’affaire SIALIADIN Vs FRANCE. La CrEDH a constaté une violation à ce droit dans un arrêt du 26 juillet 2005.
– la prééminence du droit comprend le principe du double degré de juridiction, le principe de l’égalité des délits et des peines (ce qui comprend le droit à un procès équitable : article 6). De ce droit découlent de nombreux autres principes.
– le pluralisme et la tolérance : c’est-à-dire, le pluralisme des comportements (liberté de la vie privée, droit au mariage, liberté des pratiques sadomasochistes … D’ailleurs, la CrEDH est intervenue plusieurs fois pour défendre les droits des homosexuels comme en Irlande), le pluralisme des idées, le pluralisme politique et syndical. Ces différents droits ont été consacrés par la Convention en 1950, ultérieurement précisés par la CrEDH et les différents protocoles.
La France a ratifié la CvEDH 21 ans après son entrée en vigueur, en 1974, pendant l’intérim d’Alain Poher.
Il avait été estimé que cette convention ne « servait à rien » car la France était la patrie des droits de l’homme. D’autres considéraient que cette convention était contraire à la laïcité.
Mais avec la guerre d’Algérie fin 1950/début 1960, il s’est révélé que la législation adoptée était parfois contraire à certains principes de la CvEDH.
La CrEDH siège à Strasbourg depuis le 21 janvier 1959. Elle est le rouage principal d’un mécanisme de contrôle supranational de l’application de la CvEDH. Ce mécanisme est novateur.
Conçu en 1950, ce mécanisme originaire s’efforçait tout à la fois de protéger les droits individuels et de ménager les intérêts Etatiques. Il en est résulté un édifice institutionnel complexe avec trois organes de contrôle ayant leur siège à Strasbourg :
– la commission européenne des droits de l’homme (CmsEDH)
– la cour européenne des droits de l’homme (CrEDH)
– le comité des ministres du conseil de l’Europe
1) Tout commençait par la saisine de la CmsEDH. Il existait deux catégories de recours : le recours Etatique et le recours individuel.
– Hypothèse du recours Etatique : il s’agit de la saisine d’un État contre un autre État en l’accusant de commettre des manquements à la CvEDH. Mais en général, les Etats préféraient ne pas saisir.
– Hypothèse du recours individuel : il s’agit de la saisine des individus, personnes physiques ou morales, s’estimant victime d’une violation par un État partie à la CvEDH. Mais cela ne se faisait qu’à la condition que l’État attaqué ait reconnu la compétence de la commission. La France n’a accepté qu’une fois en 1981. En 1974, elle ne l’avait pas directement reconnu.
2) Les requêtes faisaient ensuite l’objet d’un examen de la recevabilité de la demande. 90 % des requêtes étaient rejetées à ce niveau. Si une requête était refusée, la procédure s’arrêtait là. Si, en revanche, la requête était acceptée, la CmsEDH procédait à un examen approfondi, avec l’aide des parties.
3) Dans un premier temps, on tentait d’obtenir un règlement à l’amiable. Si cela aboutissait, le demandeur percevait une indemnité et l’Etat défendeur s’engageait à modifier sa législation ou les pratiques incriminées. Sinon, dans le cas où la tentative échouait, à partir de là, la commission établissait un rapport dans lequel elle constatait les faits, et formulait un avis sur le fait de savoir si les faits révélaient de la part de l’État incriminé une violation. Le rapport était ensuite adressé au comité des ministres et aux Etats intéressés.
4) puis, s’ouvrait un délai de trois mois durant lequel la CrEDH pouvait être saisi par :
– la commission
– l’État défendeur
– l’État dont la victime est le ressortissant
– le particulier qui est la victime
Si la CrEDH était saisie dans les délais, elle était tenue de rendre un arrêt.
Si ce délai était passé, c’est le comité des ministres (composé des ministres des affaires étrangères des différents Etats) qui était saisi et se prononçait sur la violation à la majorité des deux tiers. En règle générale, il se contentait de suivre la commission.
Si la décision de la commission était méconnue, le défendeur devait prendre des mesures pendant un certain délai. Si à l’expiration dudit délai, ces mesures n’avaient pas été prises, la sanction était la publication du rapport du comité des ministres.
Mais ce système souffrait de deux déficiences :
– sa complexité qui rendait la procédure de contrôle peu lisible pour le requérant.
– son caractère hybride à la fois juridictionnel et politique, qui affectait la crédibilité du système.
Mais il a surtout été critiqué parce qu’il était trop long. En 1998, les procédures duraient en moyenne cinq ans et un tiers. Le système était victime de son succès, et il a fallu le revoir.
Le protocole 11 à la CvEDH, entré en vigueur le 1er novembre 1998, procède à une unification organique en substituant aux trois organes une cour unique et permanente : la nouvelle cour européenne des droits de l’homme.
C’est une juridiction internationale indépendante qui siège à Strasbourg. Elle se compose d’un nombre égal de juges à celui des Etats partis à la Convention. Il y a 46 membres donc 46 juges. Chaque État membre propose un juge. C’est une très grosse juridiction.
La CrEDH est divisée en cinq sections. Les juges sont élus pour six ans renouvelables avec renouvellement partiel triennal par l’assemblée du conseil de l’Europe. Ils sont élus à la majorité des deux tiers sur liste (chaque État présente trois candidats : la France ne présente que des anciens conseillers d’État).
Chaque juge est élu par l’assemblée parlementaire, mais ce n’est pas un représentant d’État, c’est-à-dire que par exemple, quand la France est mise en accusation, le juge français peut aller contre son pays. Les juges sont indépendants.
Leur mandat s’achève automatiquement dès que les juges atteignent 70 ans.
La CrEDH est présidée par un président qu’elle élit en son sein pour 3 ans. Aujourd’hui, c’est le juge français : Jean-Paul Costa.
Les juges statuent à la majorité et peuvent joindre leur opinion à l’arrêt. Ils peuvent donner 2 types d’opinions :
– une opinion concordante : le juge expose son soutien au dispositif (aux résultats auxquels parvient l’arrêt), mais non au motif.
– opinion séparée, dissidente : le juge s’oppose à l’arrêt.
Les juges peuvent également joindre une déclaration. Cela signifie qu’ils sont d’accord avec l’arrêt, mais qu’ils veulent y apporter une précision. Cela arrive souvent aux États-Unis, mais cela est rare en droit romano germanique.
La langue de travail est l’anglais ou le français, obligatoirement.
Cette CrEDH connaît trois formations de jugement :
– Un comité de trois juges : chargé de rejeter l’unanimité les requêtes irrecevables. S’il n’y a pas unanimité, les requêtes ne sont pas rejetées.
– Une chambre de sept juges : c’est la formation ordinaire de jugement de droit commun. Le juge proposé par l’État défendeur y figure toujours. Elle va exercer le rôle de la CrEDH. Elle rend un arrêt d’irrecevabilité ou sur le fond, considérant qu’il n’y a pas violation. Au bout de trois mois l’arrêt est définitif.
– Une chambre de 17 juges : c’est la formation supérieure de jugement, son rôle étant de veiller à la cohérence et à la continuité de la jurisprudence de la cour. Il y a le président, le vice-président et les présidents de section. C’est la formation la plus solennelle. Elle peut être saisie dans un délai de trois mois, sachant qu’elle est saisie soit par l’État défendeur, soit par le requérant. Mais la « grande chambre » ne sera saisie qu’à condition que le comité de cinq juges ait estimé que la demande soulève des questions graves d’interprétation ou de caractère général.
Les arrêts rendus par la CrEDH sont revêtus de l’autorité de la chose jugée, c’est-à-dire qu’ils ont une force obligatoire et définitive. La CrEDH constate une violation de la Convention et condamne à des dommages et intérêts. Mais elle ne peut annuler ou intervenir sur la législation du plan national des Etats.
Le comité des ministres du conseil de l’Europe est chargé de veiller à l’application de l’arrêt de la CrEDH. Mais malgré tout, son pouvoir est maigre car il ne peut pas forcer son exécution.
Depuis 1989, si un État n’a pas pris les mesures nécessaires pour mettre un terme à la violation constatée, le comité des ministres adopte une résolution intérimaire et décide de reprendre l’examen de l’affaire à une date ultérieure qu’il fixe. Dans l’ensemble, ces mesures sont exercées sans grande difficulté.
Depuis 1998, avec le protocole 11, tous les Etats membres ont accepté le recours individuel.
Depuis 1989/1990, la CrEDH est complètement engorgée. En 2005, la cour a été saisie de 41 510 requêtes, et 1105 arrêts ont été rendus. En septembre 2006, 89 000 affaires étaient pendantes. Les délais sont toujours de cinq ans.
Face à cette situation, le protocole 14 adopté et ouvert à la signature le 13 mai 2004, amende de nouveau le système de contrôle afin de faire face au travail de surcharge de la cour. Quelques mesures ont été prises :
– un juge unique
– de nouveaux critères de recevabilité de requêtes (la demande est irrecevable quand le requérant n’a subi aucun préjudice important)
Un correctif a quand même été apporté quand le respect des droits de l’homme appelle un examen au fond, ou si l’affaire n’a pas été dûment examinée par un tribunal interne.
Il ne s’agissait pas d’une réforme, mais d’une « réformer ». La meilleure solution était de transformer la CrEDH en en faisant une vraie cour européenne comme aux États-Unis avec la cour suprême. Le protocole 14 départs entre en vigueur puisque la Russie est opposée.
La CrEDH est un instrument considérable de la défense des droits de l’homme.
– La garantie juridictionnelle a fait des élus dans la mesure où la Convention américaine des droits de l’homme adopté le 22 novembre 1969 prévoit une cour et une commission américaine des droits de l’homme.
– la charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 28 juin 1981 crée une commission africaine des droits de l’homme. Cette charte a été complétée par un protocole en 1998, instituant une cour africaine des droits de l’homme. Mais l’Afrique ne dispose pas des moyens financiers nécessaires pour la mettre en place.
La mise en place de ces différentes organisations internationales dans la période qui suit la deuxième guerre mondiale est important dans la mesure où elle manifeste un témoignage, une prise de conscience, du fait que trois des grandes fonctions souveraines des Etats ne peuvent pas être assurée par chacun des Etats pour son propre compte. C’est pourquoi ces différentes fonctions vont être mises en oeuvre de manière collective :
– sur le plan économique avec l’OECE
– sur le plan de la sécurité avec les différents traités d’assistance mutuelle (autant…)
– sur la protection des libertés dans le cadre du conseil de l’Europe
Mais très rapidement (fin 1940), l’organisation de l’Europe occidentale rencontre certaines limites. C’est pourquoi certains estiment qu’il faut franchir une nouvelle étape : le passage de la coopération à l’intégration.
TITRE II : l’Europe de l’intégration
. La fin de la seconde guerre mondiale a vu naître de nombreuses organisations, essentiellement de coopération. La question s’est posée de savoir s’il ne fallait pas aller au-delà, c’est-à-dire s’engager dans la voie qui conduirait à une organisation de type fédéral, l’idée étant de parvenir à la création des États-Unis d’Europe.
Cette construction européenne va s’engager dès le début des années 50. Elle a en projet politique sans pareil, destiné à réaliser une unité qui n’a jamais existé à une quelconque époque de l’histoire. C’est un projet très ambitieux et de longue haleine qui a connu des succès, mais aussi des échecs et qui aujourd’hui est en panne.
Chapitre I : L’évolution institutionnelle des communautés européennes et de l’union européenne
Le 5 septembre 1929, Aristide Briand a fait un discours devant l’assemblée générale de la société des nations dans lequel il employa à la fois les termes de « communauté » et d’« union européenne ». Ce discours était prémonitoire dans la mesure où l’Europe de l’intégration s’est tout d’abord mise en place avec les communautés européennes puis s’est poursuivie avec l’union européenne.
SECTION I : La mise en place des communautés européennes (CE)
En 1948, au congrès de la Haye, l’idée de communauté européenne a échoué du fait d’une division entre les fédéralistes et les autres. C’est Jean Monnet qui était à l’origine de cette idée (né en 1888, mort en 1979).
Il a développé une méthode nouvelle d’intégration : il s’agit de mettre en commun différentes compétences, l’idée qu’une compétence en appel forcément une autre, et à force de travailler ensemble, les Etats en prennent l’habitude et ils ne peuvent même plus imaginer le pouvoir solitaire et souverain.
Cette méthode a été posée par Robert Schuman, qui était ministre des affaires étrangères français à cette époque (c’est la méthode de Jean Monnet, qui était appliquée par Robert Schuman).
La déclaration Schuman, qui reprend cette méthode, va aboutir à la mise en place de la CECA.
Le 9 mai 1950, Robert Schuman, qui était ministre des affaires étrangères français, fit une déclaration retentissante. Il va tout d’abord partir d’un constat : « l’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre ». Cependant, « l’Europe ne se fera pas d’un coup ni dans une construction d’ensemble. Elle se fera par des réalisations concrètes, créant d’abord une solidarité de fait. Le rassemblement des nations européennes exige que l’opposition séculaire de la France et de l’Allemagne soit éliminée ».
Il propose ainsi à l’Allemagne de placer sa production de charbon et d’acier sous une « haute autorité commune » et d’autre part, sa proposition s’étend à tous les autres Etats d’Europe qui le souhaitent.
Cette déclaration est très importante. Le plan Schuman va se placer en dehors des schémas classiques, puisqu’il ignore le modèle de droit international, qui est entièrement fondé sur le principe de souveraineté des Etats (Europe de la coopération).
Le modèle intégrateur fédéral n’est évoqué que pour l’avenir. Le terme de « fédération » n’est évoqué qu’une seule fois. Cela reste une alliance entre Etats.
Le principe du plan Schuman était de créer un marché commun du charbon et de l’acier. La France était favorable à ce projet dans la mesure où cela permettrait de régler le « problème allemand ». Cette union allait permettre de prévenir contre la construction des cartels allemands. De plus, ce plan pouvait aussi permettre l’accroissement d’une production nécessaire à la reconstruction.
Finalement, dans la déclaration Schuman, la CECA apparaissait comme une des premières assises concrètes d’une fédération européenne indispensable à la préservation de la paix.
Ce projet a tout de suite rencontré un certain succès (il a été rédigé par Jean Monnet, mais prononcées par Robert Schuman), et très rapidement, il a rencontré l’assentiment de l’Allemagne, du Benelux et d’Italie.
Le 18 avril 1951, le traité instituant la CECA a été signé à Paris.
Le traité de la CECA est entré en vigueur le 23 juillet 1952. Ce traité avait été conclu pour 50 ans. Aussi, il a pris fin le 23 juillet 2002 et n’existe plus aujourd’hui.
Sur un secteur restreint mais capital dans les sociétés industrielles, la CECA constitue ce que l’on a appelé le « pool charbon/acier ».
– Les missions de la CECA sont définies au titre premier du traité. Elle concerne l’approvisionnement, les prix, les conditions de vie et de travail de la main-d’oeuvre, ainsi que le développement des échanges.
– Ce traité détermine également les pratiques incompatibles avec le marché commun. Ces pratiques sont les lois de douane, les restrictions quantitatives et les pratiques discriminatoires. Aussi ces pratiques sont interdites.
– la CECA doit aussi assurer le respect des conditions normales de concurrence. Le but est d’éviter la reconstitution des cartels. Les articles 65 et 66 sont relatifs aux ententes et aux concentrations.
Les différentes ententes sont assurées par des institutions dont le statut et les attributions sont de véritables nouveautés. 4 institutions sont envisagées par le titre 2 :
– la haute autorité
– le conseil spécial des ministres
– une assemblée commune
– la cour de justice
1) La haute autorité : elle est composée de 9 membres, choisis par les Etats membres. C’est un organe collégial et indépendant des trois autres institutions, mais il peut être contrôlé par elles.
2) Le conseil spécial des ministres : c’est un organe de la communauté, ce n’est pas une conférence diplomatique. Il représente les Etats.
3) Une assemblée commune : elle est composée de délégués des parlements nationaux, un peu à la manière du conseil de l’Europe. Son rôle est modeste dans la mesure où elle ne peut émettre que des avis. Néanmoins, elle a également la possibilité d’adopter une motion de censure à l’encontre de la haute autorité.
4) La Cour de Justice : elle est dotée de pouvoirs inédits dans le domaine du droit international. Ses arrêts ont force exécutoire sur le territoire des Etats membres.
La CECA a rapidement donné des résultats probants. On retrouve à sa tête Jean Monnet : premier président de la haute autorité.
D’un point de vue économique, ce fut un succès car on assista à un accroissement de la production, et une intensification des échanges. C’est aussi un succès politique car elle représente la première expérience communautaire réussit. L’Allemagne et la France vont à nouveau s’entendre même si elles sont encore confrontées à des divergences d’intérêts.
La CECA a aussi favorisé une nouvelle pratique de coopération interétatique.
Dès lors que le traité fut engagé, d’autres projets sont apparus. La conclusion même du traité a engagé plein d’autres projets. L’idée était qu’on pourrait progressivement arriver à une intégration complète de la vie économique et sociale.
Mais de nombreux projets ont échoué faute de préparation. De plus la France voulait, elle, aller vers une communauté de défense.
L’idée de la CED est née vers 1950 (guerre de Corée). Le réarmement de l’Allemagne était nécessaire, mais la France s’y opposait fermement. En octobre 1950, l’idée d’un réarmement a été proposée par René Pleven, non pas sous la forme d’une armée allemande, mais d’une armée européenne qui serait composée de petites unités placées sous la direction d’un « ministre européen de la défense », sachant que ce dernier devait être responsable devant une assemblée européenne, et sous contrôle d’un conseil des ministres des Etats membres. Cette idée s’inspire de la déclaration Schuman.
Le 27 mai 1952, le traité instituant la CED (communauté européenne de défense) est signé à Paris par la France, l’Allemagne, Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas et l’Italie. Le problème c’est que si on s’était entendu pour former une armée commune, la question suivante se serait posée : comment accepter une mise en commun des forces militaires sous une autorité commune sans mise en commun des politiques communes ?
Parallèlement est donc porté un projet portant statut de la communauté politique européenne (CPE). Une commission ad hoc est chargée de rédiger ce nouveau projet de CPM.
Mais seulement 4 Etats sur 6 avaient ratifié le traité de la CED : il manquait la France et l’Italie.
Le 30 août 1964, l’assemblée nationale française a décidé d’écarter le projet de la CED par 319 voix contre 264 définitivement. L’Italie attendait que la France ratifie, et donc elle n’a pas signé.
En France, cette question divisait. Mais il y a eu une détente au milieu des années 1950 : mort de Staline en 1953, fin de la guerre de Corée, fin de la guerre d’Indochine en 1954. De plus, en France, les élections avaient porté le RPF (gaulliste) au pouvoir. Or, le général De Gaulle n’était pas vraiment d’accord pour l’Europe, et la gauche qui était contre les États-Unis voulait une indépendance européenne. Néanmoins ce traité reste important dans l’histoire de l’Europe.
Cela a eu des conséquences immédiates :
– le réarmement de l’Allemagne
– la création de l’union européenne occidentale (UEO)
– l’abandon du projet de communauté politique européenne, qui même aujourd’hui a du mal à rejaillir
– l’échec de la CED, qui fut une chance ratée
– ce fut la première tentative d’organisation politique de l’Europe
– pour la première fois, l’Europe a suscité un large débat public
– c’est la première fois que la France enterrait un projet dont elle était à l’origine
Quoi qu’il en soit, le refus de l’organisation politique de l’Europe a immédiatement provoqué un redéploiement des forces sur le terrain de la reconstruction économique : c’est ainsi que fut signé le traité de Rome.
Jean Monnet, après le vote négatif du Parlement français, démissionna de la présidence de la haute autorité pour reprendre une activité militante en fondant, le 13 octobre 1955 le Comité d’action pour les Etats-Unis d’Europe, qui fut un groupe de pression extrêmement efficace et qui aboutira à la conclusion des traités de Rome.
Le Conseil des ministres va se réunir à Messine en Italie le 1er juin 1955 pour essayer de résoudre la crise après l’échec de la CED. Il va désigner le successeur de Jean Monnet à la tête de la haute autorité. Les 3 pays du Benelux présentèrent un mémorandum pour sortir de cette crise.
2 voies furent proposées :
– que soient menées des actions sectorielles, en particulier dans les domaines du transport et de l’énergie.
– la construction d’un marché commun général.
Finalement, ce Conseil des Ministres adopta une résolution proposant de « poursuivre le développement d’une Europe unie par le développement d’institutions communes, la fusion progressives des économies nationales, la création d’un marché commun et l’harmonisation progressive de leurs politiques sociales ». Il fut finalement décidé de créer un comité intergouvernemental pour essayer de mettre en pratique cette résolution, sous la direction de Pierre-Henri Spaak. Ses travaux aboutirent à la signature de 2 traités le 25 mars 1957 :
– le 1er instituant la CEEA (Euratom : Communauté Européenne de l’Energie Atomique)
– le 2nd instituant la CEE (Communauté Economique Européenne)
Ce traité est très important. Il va instituer une nouvelle communauté en matière économique, qui vise à regrouper l’ensemble des économies des Etats membres, en vue d’ouvrir, à terme, un espace économique. A cet effet, elle instaure un véritable marché commun, c’est-à-dire que ce n’est pas une zone de libre-échange, mais une zone d’union douanière que l’on pourrait qualifier de « renforcée ».
D’un point de vue interne, c’est la mise en place d’un tarif extérieur commun (les zones de libre-échange visent l’intérieur), et de droits de douanes uniques vers l’extérieur.
Ce marché commun institue la libre circulation des marchandises, mais aussi des personnes, des services et des capitaux. C’est ce que l’on appelle « les 4 libertés ».
En outre, le traité met aussi en place une réglementation de la concurrence entre ses 6 Etats membres dont la Commission représente la pierre angulaire, chargée de faire en sorte qu’il y ait une vraie concurrence. Cette réglementation est basée sur 3 grands principes :
– la prohibition des ententes : tout doit être transparent
– la prohibition des abus de positions dominantes : il ne doit pas y avoir de monopole
– la prohibition des aides d’Etats
Ce traité vise aussi à instituer des politiques communes dans un certain nombre de secteurs où la loi du marché ne peut suffire à assurer seules les régulations nécessaires. Parmi ces secteurs on en distingue trois principaux :
– l’agriculture (PAC)
– la politique commerciale
– les transports
D’un point de vue institutionnel, le traité de Rome reprend le schéma institutionnel de la CECA, à la différence près que l’on observe un recul de la supranationalité. Le pouvoir de décision de la haute autorité est transféré de la commission au conseil.
Il y a quatre institutions : la commission, le conseil, le Parlement et la CJCE (la cour de justice des communautés européennes).
L’Euratom ambitionne deux choses :
– assurer le développement d’une source d’énergie considérée comme prometteuse
– acquérir une certaine autonomie vis-à-vis des Etats-Unis (face à leurs programmes militaires, qui ont la primauté en la matière. Le nucléaire s’est développé tant au niveau militaire que scientifique).
Mais Euratom sera un échec, car en revenant, la France voulait tout prix se doter de l’arme nucléaire. Cela va conduire les auteurs du traité a limiter le champ de la CEEA aux seules questions industrielles et d’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins civiles. Sur le plan institutionnel, la CEEA, comme la CEE, reprend le modèle de la CECA.
La ratification de ces traités fut très rapide. En France, ils furent ratifiés par l’assemblée nationale le 10 juillet 57, par 342 voix contre 249. Ils entrèrent en vigueur le 1er janvier 1958.
Aussi, au 1er janvier 1958, 3 communautés coexistent avec des institutions propres. Cependant, une convention relative à certaines institutions communes a été signée à Rome, qui prévoit une assemblée parlementaire unique et une seule cour de justice. Ce dispositif a été précisé en 1965 par le traité de Bruxelles du 8 avril 1965 : unification du dispositif institutionnel.
De 1957 à 1980, il n’y eût pas de révision majeure. Cependant, différentes crises d’évolutions jalonnent cette période.
Peu après l’entrée en activité de la communauté, les 6 Etats fondateurs vont être sollicités par d’autres Etats, et notamment le Royaume-Uni. Il avait déjà refusé de participer aux négociations de la CECA pour deux raisons : il refusait de soumettre les industries britanniques du charbon et de l’acier à un contrôle international, et il restait persuadé qu’il figurait encore au rang de grande puissance du fait du Commonwealth.
Mais le Royaume-Uni réalisa qu’il ne faisait plus partie des grands avec la crise de Suez. En 1961, le Royaume-Uni a donc présenté une demande d’adhésion. Mais le général De Gaulle a refusé cette adhésion, lors d’une conférence de presse du 14 janvier 1963 : « si la Grande-Bretagne entrait dans la communauté avec une foule d’autres Etats, la cohésion de tous ses membres n’y résisterait pas et en définitive, il apparaîtrait une communauté atlantique colossale sous dépendance et direction américaine et qui aurait tôt fait d’absorber la communauté européenne ».
Pourquoi ce refus ? Parce que le général De Gaulle craignait les Américains et pensait qu’on pouvait faire de l’Europe une entité politique indépendante des États-Unis d’Amérique.
En 1961, il avait provoqué une réunion des 6 Etats membres afin de donner une dimension politique à la communauté européenne (3 plans Fouchet). Le général De Gaulle, par l’entreprise de Fouchet, voulait faire une union d’Etats (coopération) :
– En octobre 1961, le premier plan Fouchet instaure une coopération dans le domaine des affaires étrangères, ainsi que dans les domaines scientifiques et culturels. Ce plan a été rejeté.
– Un second est établi visant à mettre en oeuvre des mécanismes de coopération. Il a également été rejeté.
– Un troisième qui n’a pas tenu compte des critiques fut aussi rejeté.
De Gaulle va nouer des relations particulières avec Adenauer, le chancelier allemand. Le 22 janvier 1963, sera signé le traité d’Élysée : c’est un traité d’amitié et de coopération entre la France et la RFA. C’est la naissance du couple franco-allemand.
Mais le Royaume-Uni ne désespère pas et le 11 mai 1967, il fait une nouvelle demande d’adhésion. Un changement de gouvernement avait eu lieu entre temps : les travaillistes étaient revenus au pouvoir.
Mais De Gaulle n’avait pas changé d’avis, il rejeta la demande le 16 mai.
Les Britanniques n’attendaient plus que le général De Gaulle tire sa révérence. Il sortira affaibli du fait de certains événements (mai 68, le coup de Prague …). De Gaulle part en 1969, et c’est Georges Pompidou qui lui succède. Lui, était favorable à l’intégration britannique dans la communauté. Aussi, il a proposé que se réunissent les chefs d’État et de gouvernement au sommet de La Haye les 1er et 2 décembre 1969. Pour exorciser le plan Fouchet, le président de la commission est invité à participer à la réunion avec les 6 chefs d’État et de gouvernement.
Le communiqué final est adopté à l’issue de ce sommet et défini la stratégie commune pour l’immédiat et les temps à venir. Un communiqué prend souvent la forme d’un triptyque :
1) L’achèvement : entrer dans la phase définitive du marché commun, sachant que l’on consacre le principe du caractère irréversible de l’oeuvre accomplie.
2) L’approfondissement : il faut dépasser l’objectif du marché commun et instituer une union économique et monétaire (UEM).
3) L’élargissement : il fut décidé d’élargir la communauté européenne : des négociations furent engagées avec le Danemark, Irlande, la Norvège et le Royaume-Uni. Il fut tout de suite décidé que les états entrants devraient se conformer à certaines conditions : « cette négociation sera engagée pour autant que les états candidats acceptent les traités et leur finalité politique, les décisions intervenues depuis l’entrée en vigueur des traités et les options prises dans le domaine du développement ».
Trois nouveaux Etats vont entrer dans la CECA, la CEE et l’Euratom par un traité d’élargissement signé par les 6 membres fondateurs et les 4 candidats le 22 janvier 1972 (entrée en vigueur le 1er janvier 1973). Mais seuls le Danemark, l’Irlande et le Royaume-Uni entreront. La Norvège avait soumis son entrée à un référendum qui avait abouti à un refus. Aussi, au 1er janvier 1973, c’est « l’Europe des 9 ». L’Europe changea de forme à partir de l’entrée du Royaume-Uni.
En février 1974, les travaillistes sont revenus au pouvoir au Royaume-Uni, et ils ont tout de suite demandé une renégociation du traité. Cette demande était juridiquement irrecevable car le traité ne devait pas pouvoir être renégociable. Un accord fut trouvé au sommet de Dublin des 10 et 11 mars 1975, portant essentiellement sur l’allégement de la contribution britannique au budget communautaire.
Le 1er janvier 1981, c’est la Grèce qui rejoint la communauté européenne. Dès les années 60, elle s’était tournée vers elle car elle fut la première à avoir demandé un traité d’association. Ces traités se caractérisent par un volet institutionnel. Dès le 8 juin 1959, la Grèce avait demandé un traité d’association. Le 9 juillet 1961, un accord fut signé avec la Grèce et les communautés européennes qui prévoyait deux choses :
– une union douanière
– une adaptation progressive de la politique agricole et économique
Cependant, le problème de la Grèce est que le 21 avril 1967, le coup d’état militaire entraîna le gel de ces différents accords. Il a fallu attendre la fin du régime des colonels (dictature). Mais dès lors que la démocratie fut revenue, la Grèce refit une demande d’adhésion le 12 juin 1975. La communauté européenne a été sensible à cette demande qu’il s’agissait de consolider un régime démocratique. Des négociations eurent lieu le 27 juillet 1976. Le 28 mai 1979, un accord fut obtenu, entré en vigueur le 1er janvier 1981 : « Europe des 10 ».
Un certain nombre de mesures transitoires furent prises notamment dans le domaine agricole.
En 1986, l’Espagne et le Portugal s’ajoutèrent à cette « Europe des 10 ». Ces deux pays ont également connu des dictatures. Aussi, dès le retour de la démocratie, ils firent des demandes d’adhésion à l’union européenne. L’établissement d’un régime démocratique est bien une condition d’adhésion à la communauté est un moyen pour celle-ci de consolider la démocratie. Le Portugal déposa sa demande le 28 mars 1977 et l’Espagne le 28 juillet 1977. Des négociations sont engagées difficilement le 5 février 1979. Mais elles seront plus longues en raison des questions agricoles. Ces négociations n’aboutirent que le 12 juin 1985. Ces accords entreront en vigueur le 1er janvier 1986. À cette date, la communauté européenne comptait désormais 320 millions d’habitants.
À la suite des chocs pétroliers de 1973 et 1979, l’Europe doit faire face à une crise économique sans pareil. Cela amena à un repli des Etats membres qui adoptèrent des mesures protectionnistes. La commission européenne le constata mais ne pouvant agir, elle attira l’attention du conseil européen.
Le 29 juin 1981, un conseil a été réuni à Luxembourg afin d’examiner les atteintes croissantes portées à la libre circulation. Ce conseil constata que l’union douanière ne suffisait pas seule à réaliser un grand marché européen. L’année suivante, les 3 et 4 décembre 1982, le conseil européen s’est réuni à Copenhague et a décidé de se saisir de deux propositions de la commission concernant :
– les obstacles techniques aux échanges
– la suppression des contrôles aux frontières
La France et l’Allemagne vont alors prendre les devants. Ils avaient signé un accord bilatéral à Sarrebruck le 13 juillet 1983. Ils ont rapidement été rejoints par le Benelux, et le 14 juin 1985, ils vont signer l’accord de Schengen.
L’objet de cet accord est le « libre franchissement des frontières intérieures par tous les ressortissants des Etats membres et la libre circulation des marchandises et des services ».
Une convention d’application fut également signée à Schengen le 19 juin 1990, entrée en vigueur en 1995.
Au fur et à mesure, tous les Etats de l’union européenne ont rejoint la France, Allemagne et le Benelux sauf le Royaume-Uni et l’Irlande.
Au début des années 80, l’union avait deux objectifs :
– réaliser un marché intérieur commun
– réaliser une Europe politique (coopération politique entre Etats)
C’est l’acte unique européen qui a consacré ces deux objectifs. Ce traité consigne en un document unique un accord entre Etats membres portant sur deux objets distincts même si ces deux objets peuvent être liés. Il porte sur une révision des traités instituant les communautés européennes, l’objectif étant de réaliser un grand marché intérieur prévu pour la fin des années 90. Il porte également sur une coopération politique.
Ce traité préfigure la structure du traité de Maastricht.
Cet acte unique européen renforce le rôle du Parlement au niveau institutionnel et il va créer un tribunal de première instance des communautés européennes (TPICE).
L’acte unique européen a été signé le 17 février 1986 par 6 Etats et le 19 février par le Danemark. Il entre en vigueur le 1er janvier 1987. Cet acte unique européen est important car il constitue une accélération dans la construction européenne.
SECTION II : Le dépassement des CE : l’UE
Le traité de Maastricht fut signé le 7 février 1992, et est entré en vigueur le 1er novembre 1993. Il a fallu plus d’un an et demi car ce traité a appelé à des révisions constitutionnelles dans plusieurs pays. Il marque une étape très importante en créant l’union européenne.
Ce traité se singularise par sa structure en pilier (A) et aussi par l’institution d’une union économique et monétaire (B).
L’union européenne est une entité juridique nouvelle dont la nature juridique n’est pas évidente. Se pose la question de sa personnalité juridique.
L’union européenne repose sur 3 piliers :
– un pilier communautaire, qui regroupe la CECA, Euratom et la CEE
– un pilier de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), qui se situe dans le prolongement de la coopération instaurée par l’acte unique européen (création d’une défense commune européenne)
– un pilier de la coopération en matière juridique et des affaires intérieures, qui met en commun les problèmes d’immigration et d’asile
Ces deux derniers piliers sont des piliers intergouvernementaux fonctionnant sur le modèle de la coopération.
Cette union va prendre corps avec la mise en place d’un marché intérieur puisqu’il va fait disparaître les obstacles à la libre circulation.
Dès 1989, le conseil européen charge un comité d’experts présidé par Jacques Delors de préparer un projet d’union économique et monétaire. Ce projet va prendre place au sein du pilier communautaire.
Le traité de Maastricht, sur le volet économique, se contente d’instituer une coordination des politiques économiques qui restent largement sous l’empire des Etats. Ce traité fixe les conditions de réalisation de la monnaie unique en plusieurs étapes :
– la phase préparatoire, qui s’est étendue de janvier 1990 à janvier 1994, visait à déterminer les critères de base qu’il fallait remplir pour pouvoir adhérer à l’union.
– la deuxième phase, de 1994 à 1999, vise à mettre les Etats en situation de passage à la monnaie unique. Ces derniers doivent maîtriser leurs déficits.
– la troisième phase est la mise en place de la monnaie unique.
1er janvier 1999 : création de l’euro et de la BCE (banque centrale européenne)
1er janvier 2002 : mise en circulation de l’euro et remplacement des monnaies nationales
Le 24 mars 1994, un traité d’adhésion est signé par l’Autriche, la Finlande, la Suède et la Norvège. Mais un référendum est organisé en Norvège, auquel il est répondu « non » à 52 %. Le 1er janvier 1995, a lieu le quatrième élargissement de l’union européenne à l’Autriche, la Finlande et la Suède. Ces trois Etats sont des Etats neutres. À partir de 95, avec l’Irlande, l’union européenne compte donc quatre Etats neutres. Il devient alors difficile de créer une armée de défense européenne.
Il va falloir adapter les institutions au fur et à mesure des élargissements et le traité de Maastricht sera révisé.
Depuis une quinzaine d’années, on est forcé de constater une intensification du rythme des traités et ce, pour deux raisons :
– une volonté d’aller plus vite et plus loin dans l’intégration européenne
– une insuffisance institutionnelle
Cette nécessaire adaptation des institutions devenait d’autant plus urgente qu’un nouvel élargissement d’envergure se préparait. Les PECO ont, en premier lieu, présenté des demandes d’adhésion à l’union européenne. À partir de là, le traité de Maastricht a été révisé à deux reprises. S’est alors posée la question d’une constitution européenne.
Deux traités sont venus réviser le traité de Maastricht :
– le traité d’Amsterdam de 1997
– le traité de Nice de 2001
Signé le 2 octobre 1997, il est entré en vigueur le 1er mai 1999. Il s’inscrit dans la directive de l’élargissement et de l’approfondissement de l’union européenne. C’est une des questions majeures sur la réforme des institutions de l’union européenne.
Le traité d’Amsterdam n’a pas réussi à modifier les institutions. Il pose le principe de la « coopération renforcée ». L’idée est celle d’une Europe à géométrie variable. L’intérêt est de susciter des démarches dynamiques pour permettre à des Etats d’aller plus loin dans certains domaines (par exemple : l’€, l’espace Schengen…, qui n’ont pas été adopté par tous).
Signé le 26 février 2001, après d’âpres négociations en décembre 2000, il est entré en vigueur le 1er février 2003. Il autorise l’élargissement à 25. Il envisage également de modifier les institutions, en une réforme différée le 1er mai 2005. Mais ce traité reste insuffisant pour organiser une Europe politique à 25.
Le conseil européen de Nice a adopté en décembre 2000 une déclaration sur l’avenir de l’union. Cette déclaration invite à réunir une nouvelle conférence intergouvernementale à l’horizon 2004 et l’idée d’un nouveau traité européen est alors lancée.
Une accélération des événements va amener à une nouvelle déclaration sur l’avenir de l’Europe qui est adoptée par le conseil en décembre 2001. On envisage une constitution de l’union européenne.
Une convention pour l’avenir de l’Europe est constituée, présidée par Valéry Giscard d’Estaing. Elle va être chargée de réfléchir à l’avenir des institutions européennes. Finalement, le 18 juillet 2003, le projet a été remis au conseil européen. À compter de là, il existait un projet de constitution européenne, mais il fallait que le conseil européen l’adopte. Ce fut difficile en raison de querelles. Le projet a échoué en décembre 2003.
C’est sous la présidence des Irlandais que le projet a été adopté le 18 juin 2004. Il a fallu attendre le 29 octobre 2004 pour que soit signé à Rome un traité dénommé « projet de traité établissant une constitution pour l’Europe ».
Cependant, la procédure d’adoption se déroule en deux phases : signature + ratification
S’est ensuite ouverte la phase de ratification. Mais le résultat espéré d’une ratification par tous n’est pas venu en raison d’une majorité de votes négatifs dans deux pays fondateurs : la France et les Pays-Bas.
Sur le plan formel : ce traité est un texte extrêmement complet, car il regroupe l’ensemble de l’acquis communautaire depuis 1950, et est donc composé de 448 articles.
Il comporte quatre parties :
– Partie 1 : dans ce traité, il y avait tous les traités existants (codification) ainsi que les dispositions sur les politiques et actions de l’union européenne.
– Partie 2 : elle porte surtout sur la charte des droits fondamentaux, adoptée lors du conseil européen des 7 et 8 décembre 2000. Elle vise à conforter la place des droits fondamentaux dans l’ordre juridique communautaire. Mais ce texte n’a pas de valeur juridique (puisqu’il n’a pas été ratifié), c’est juste un texte politique.
– Partie 3 : elle traite de la politique du fonctionnement de l’union européenne.
– Partie 4 : elle aborde les dispositions générales et finales.
Ce dispositif est complété par des protocoles additionnels et annexes obligatoires et par des déclarations non obligatoires.
Sur le fond : l’intérêt est porté sur les institutions. Le traité institutionnel aurait permis cette adaptation, pour gérer un ensemble hétéroclite de 27 membres. Une trop grande diversité peut amener à la cacophonie, et il fallait donc mieux organiser les institutions pour un meilleur fonctionnement.
Le traité institutionnel prévoyait :
– l’élection d’un président du conseil européen pour deux ans et demi
– l’élection d’un ministre des affaires étrangères
– la réduction du nombre de commissaires européens
– l’élection du président de la commission européenne par le Parlement européen
– des « lois européennes »
– le renforcement du rôle des parlements nationaux
En France, le projet de constitution a été soumis par le président de la république au conseil constitutionnel, conformément à la procédure de l’article 54 de la constitution de 1958. Dans sa décision du 19 novembre 2004, les juges ont relevé certaines incompatibilités nécessitant une révision constitutionnelle avant la soumission du projet au référendum sur la base de l’article 11. La révision constitutionnelle a eu lieu le 28 février 2005, ce qui a ensuite permis une campagne référendaire, ainsi que l’organisation d’un référendum le 29 mai 2005. Lors de ce référendum, les Français ont rejeté le texte proposé par 54,68 % de NON.
Trois jours après, les néerlandais ont aussi rejeté le projet avec 61,6 % de NON.
Le président de la commission européenne, José Manuel Barroso, a expliqué que ce refus « s’expliquait moins par le texte que par le contexte ». Ainsi, les Français auraient dit NON à la politique de Jacques Chirac et de Jean-Pierre Raffarin, et pas à l’Europe. Cette formule a séduit le parlement qu’il a repris à son tour dans une résolution du 18 janvier 2006.
Mais en fait, il n’y a pas que le contexte qui ait joué. Ce qui a fait blocage, c’est la troisième partie de la constitution qui reprend les dispositions des traités antérieurs sur les politiques communes telles qu’elles ont pu évoluer depuis le traité de Rome. Le président de la Convention, Valéry Giscard d’Estaing, a publiquement regretté cette incorporation des traités antérieurs sous cette forme. En effet, il en est résulté un texte lourd et complexe qui ne répondait pas à l’objectif de simplification du texte.
A partir du moment où 2 NON se sont affichés, les autres consultations prévues (au Royaume-Uni, en Pologne, …) ont été reportées. Ceci jette un certain doute sur la ratification d’une constitution européenne. Lors du conseil européen des 16 et 17 juin 2005, il a été décidé de « geler » le processus, pour une durée indéterminée.
Selon la déclaration n°30, annexé au traité constitutionnel : « si à l’issue d’un délai de deux ans à compter de la signature du traité établissant une constitution pour l’Europe les 4/5 des Etats membres ont ratifié le traité et qu’un ou plusieurs Etats ont rencontré des difficultés pour procéder à ladite ratification, le conseil européen se saisit de la question ».
D’autres Etats ont ratifié le traité, même si le processus est gelé. Aujourd’hui, la constitution pour l’Europe a été ratifiée par 18 Etats membres sur 27, mais seuls 4 Etats (Espagne, Luxembourg, Bulgarie et Roumanie, lors de leur adhésion pour ces derniers) l’ont adoptée à la suite d’un référendum.
Pour l’instant, aucun État n’a vraiment demandé l’abandon du projet.
Pour le traité de Maastricht, les Danois avaient dit NON, de même que les Irlandais pour le traité Amsterdam. On les avait alors fait revoter pour qu’ils disent OUI.
À l’heure actuelle, Nicolas Sarkozy propose de soumettre le projet aux parlementaires, et Ségolène Royal veut adopter ce projet par référendum.
Quoi qu’il en soit, il est à peu près certain que la troisième partie à disparaître, où sera sûrement réaménagée.
CONCLUSION : La problématique de l’élargissement
Dès la chute du mur de Berlin, cette question s’impose comme un problème politique majeur pour les Etats membres de l’union européenne. Cet élargissement bouleverse la perspective de la construction européenne, prise dans un paradoxe difficile à surmonter car d’un côté, il lui faut absorber le continent, mais de l’autre, elle risque de s’y perdre.
Le conseil européen de Copenhague des 22 et 23 juin 1993 est important puisqu’il reconnaît la vocation des PECO associés à l’union européenne qui le désire à devenir membre de l’union européenne. Cependant, ils doivent respecter certains critères, les critères de Copenhague : « l’adhésion requiert de la part du candidat qu’il ait des institutions stables, garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection, l’existence d’une économie de marché viable ainsi que la capacité de faire face à la pression concurrentielle et aux forces du marché à l’intérieur de l’union. L’adhésion présuppose la capacité du candidat à en assumer les obligations et notamment à souscrire aux objectifs de l’union politique, économique et monétaire ».
Ensuite, dès mars 1994, la Hongrie a présenté la première candidature. D’autres Etats ont ensuite suivi. Cette préparation s’est faite en deux temps : les PECO ont d’abord conclu des accords d’association à l’union européenne, puis, ils ont présenté leur candidature. Pendant cette période, ils se sont adaptés puisque leur adhésion ne pouvait se faire que sous la condition du respect de certains critères.
Le conseil européen de Madrid des 15 et 16 décembre 1995 a décidé d’engager des négociations d’adhésion après la conclusion de la conférence intergouvernementale d’Amsterdam. Le traité Amsterdam a été un échec et n’a pas permis de réviser les institutions. Aussi, le conseil européen de Luxembourg de 1997 a néanmoins décidé d’engager la procédure. Les traités d’adhésion ont été signés le 13 avril 2003, ratifié le 1er mai 2004. L’union européenne est passée de 15 à 25 membres :
– Chypre
– Malte
– Estonie
– Hongrie
– Lettonie
– Lituanie
– Pologne
– République tchèque
– Slovaquie
– Slovénie
Ce processus d’élargissement fut long et s’est poursuivi par la suite. Depuis le 1er janvier 2007, la Roumanie et la Bulgarie sont officiellement membres de l’union européenne. Il s’agit du sixième et dernier élargissement à ce jour. Ils avaient présenté leurs demandes en même temps, mais leur situation ne permettait pas leur adhésion en 2004.
– l’Albanie + les pays balkaniques (issu du démembrement de l’ex-Yougoslavie), puisqu’ils sont situés sur le continent européen. Aujourd’hui, seule la Croatie, le 20 février 2003, a présenté sa candidature, et les ministres des affaires étrangères européens ont décidé d’ouvrir les négociations en vue de son adhésion, le 4 octobre 2005. C’est l’Autriche qui a largement appuyé cette demande.
– la Turquie a officiellement déposé sa candidature le 14 avril 1987, il y a plus de 20 ans. Cette entrée avait déjà été expressément envisagée le 12 septembre 1963, par l’accord d’association signée à Ankara dont l’article 28 dispose « lorsque le fonctionnement de l’accord aura permis d’envisager l’acceptation intégrale par la Turquie des traités instituant la communauté européenne, les parties contractantes examineront la possibilité d’une adhésion de la Turquie à l’union européenne ».
Le 13 décembre 1999, le conseil européen d’Helsinki a confirmé la vocation de la Turquie d’adhérer à l’union européenne. Le 14 octobre 2005, les ministres des affaires étrangères européens ont décidé d’ouvrir des négociations d’adhésion de la Turquie à l’union européenne. Ces négociations devraient prendre de 10 à 15 ans.
La Turquie devrait-elle entrer dans l’union européenne ? Pourquoi NON ?
Le problème de la Turquie divise largement l’opinion.
Problèmes :
– la Turquie n’a que la pointe d’Istanbul dans le continent européen.
– l’article 49 du traité de l’union européenne estime que : « c’est aux instances de l’union européenne qu’il appartient de décider de qui est européen ou pas en acceptant on rejetant une candidature ». Donc, même un État qui n’est pas européen peut rentrer dans l’union.
– se pose aussi la question de l’aptitude de la Turquie à respecter les valeurs fondamentales de l’union européenne (démocratie…)
– Chypre (divisée en deux zones : une zone chypriote rentrée dans l’union européenne, et l’autre sous domination turque)
– la reconnaissance du génocide arménien
– le respect du droit des minorités : la question kurde
– l’éventuelle remise en cause du principe de laïcité avec la montée de l’islamisme
– la forte natalité qui ferait que la Turquie serait l’Etat européen le plus peuplé
Avantages :
– puissance politique et militaire
– la Turquie constituerait un pont entre l’Europe et le monde islamico-arabe
– l’effet catastrophique d’un refus
Article 88-5 : « tout projet de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’union européenne et aux communautés européennes est soumis au référendum par le président de la république »*
*« l’article 88-5 dans sa rédaction en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur du traité établissant une constitution pour l’Europe, n’est pas applicable aux adhésions faisant suite à une conférence intergouvernementale dont la convocation est décidée par le conseil européen avant le 1er juillet 2004 ».
Cet article et l’astérisque qui l’accompagne signifient deux choses :
– l’article est applicable à la Turquie
– pour que la Turquie rentre dans l’union européenne, le peuple français devra accepter cette adhésion par référendum. Les Français ont le droit de veto.
Aujourd’hui, la finalisation de l’adhésion de la Turquie à l’union européenne dépend de :
– la transcription de l’acquis communautaire
– l’avis favorable de la commission européenne
– l’avis favorable de chaque gouvernement
– la réponse positive des électeurs français lors du référendum qui serait proposé en vertu de l’article 88-5
Leur situation politique est aujourd’hui catastrophique :
– la Moldavie connaît une guerre de sécession
– seulement 50 % de l’Ukraine serait d’accord pour rentrer dans l’union européenne
– la Biélorussie est sous un régime de dictature
De plus, aucune adhésion ne sera possible pour ces trois pays tant que la Russie ne l’aura pas accepté. Sinon, ce serait une déclaration de guerre. En effet, ces Etats sont dans l’entourage proche de la Russie et elle garde aujourd’hui encore un certain contrôle sur eux.
=> L’Europe n’est plus du tout ce qu’il était au départ. Cette grande hétérogénéité, cette diversité réduisent la possibilité d’accords.
Aujourd’hui, le défi à relever est le défi institutionnel.
Chapitre II : Le système institutionnel de l’union européenne
Les institutions créées initialement pour l’impulsion et la décision dans la communauté étaient au nombre de trois : – le conseil des ministres
– la commission européenne
– l’assemblée européenne
Ces trois organes politiques constituent ce que l’on nomme comme le « triangle institutionnel communautaire ». A côté, d’autres institutions sont venues compléter ce schéma.
SECTION I : Les organes politiques : le triangle institutionnel communautaire (TIC)
Là où le droit constitutionnel interne limite en règle générale le jeu politique au tandem législatif/exécutif, le droit communautaire fait apparaître un trio traditionnel interne.
L’Europe est une organisation politique. L’institution qui représentait les Etats dans le système communautaire était le conseil des ministres initialement. Ce conseil est qualifié d’institution par les traités.
La pratique va donner naissance à un organe progressivement devenu déterminant : le conseil européen. Ce conseil européen a d’abord été en marge des traités, puis intégré. Il apparaît aujourd’hui comme l’instance de direction au sommet de l’union européenne (A), tandis que le conseil des ministres apparaît comme l’institution de prise de décision (B).
Ce conseil européen est la réunion ponctuelle des chefs d’État et de gouvernement. Tout juste après l’entrée en vigueur des traités de Rome, les Etats membres ont senti la nécessité de se réunir au niveau des chefs d’État et de gouvernement. Au début, on parlait de « sommet des chefs d’État et de gouvernement ».
Entre 1961 et 1974, il y eut 7 sommets, sachant que chacun correspondait à un tournant dans l’histoire communautaire. Par exemple, le sommet de la Haye en 1969.
En décembre 1974, sur proposition de Valéry Giscard d’Estaing, les chefs d’État et de gouvernements ont pris la décision de se réunir régulièrement en conseil européen avec leurs ministres des affaires étrangères et le président de la commission européenne. L’idée était de se réunir pour débattre des questions les plus importantes qui concernent la communauté. À partir de décembre 1974, le conseil européen a fixé des orientations et donné des impulsions politiques sur des sujets de première importance. Par exemple, c’est le conseil européen qui est à l’origine de l’élargissement ou de l’élection du Parlement européen au suffrage universel. Mais en 1974, ce conseil n’a pas d’existence au niveau des traités. Il a fallu attendre l’acte unique européen de 1986.
Au terme de l’article 2 de l’acte unique européen, le conseil européen réuni deux fois par an les chefs d’État et de gouvernement, le président de la commission européenne, ainsi que les ministres des affaires étrangères des différents Etats membres. C’est donc l’acte unique européen qui a consacré l’existence du conseil européen, mais sans en énoncer les missions. Il a donc fallu attendre le traité de Maastricht qui, dans son article 4, reconnaît au conseil européen le rôle de « clé de voûte politique » du système institutionnel de l’union européenne.
Depuis 2002, un sommet sur deux au moins se réunit à Bruxelles, sachant que ce conseil européen est présidé par le chef d’État ou de gouvernement du pays qui préside l’union européenne.
Le traité constitutionnel met fin à la présidence tournante, notamment en instituant un président du conseil européen qui serait élu par la majorité qualifiée de ses membres pour deux an et demi.
À l’issue de chaque réunion du conseil européen, des conclusions sont publiées, conclusions dans lesquelles se trouve consigné l’ensemble des questions sur lesquelles les chefs d’État et de gouvernements sont parvenus à un accord politique.
Le conseil européen a trois fonctions principales :
– c’est un lieu d’échange devenu informel entre les dirigeants des Etats membres.
– il délibère de sujets qui relèvent tout à la fois de la compétence communautaire et de la coopération politique, et de manière générale, de tout autre sujet d’intérêt commun. En pratique, il n’adopte pas d’actes juridiques. Il laisse ce rôle au conseil des ministres.
– ce conseil européen peut donner l’impulsion à l’union pour favoriser son développement. Il peut intervenir pour débloquer des dossiers qui n’ont pu être réglés au niveau inférieur. Ce conseil européen marque un certain infléchissement de la construction européenne, au profit des gouvernements nationaux par rapport aux traités fondateurs. Cela permet de rassurer les Etats inquiets de voir avancer l’union européenne trop rapidement.
Il existe depuis l’origine des traités et siège soit à Luxembourg, soit Bruxelles. Son rôle est d’assurer la représentation des Etats dans l’ordre juridique communautaire.
Le conseil de l’union européenne est composé d’un représentant de chaque État membre (sachant qu’il y en a 27. En principe, c’est un ministre) sachant que sa composition varie en fonction de l’ordre du jour car il existe plusieurs formations du conseil.
Il y a peu près trois grandes formations :
– la formation appelée « affaires générales et relations extérieures ». Elle rassemble les ministres des affaires étrangères de chaque État membre. Elle traite des questions qui n’ont pas un caractère suffisamment technique pour être envisagées par une autre formation. De plus elle coordonne les autres formations pour donner une cohérence à l’ensemble.
– les formations spécifiques : elles sont au nombre de huit et elles réunissent les ministres les plus compétents pour évoquer les questions techniques qui se posent dans un secteur donné. Par exemple, dans le secteur agricole, se réunissent les ministres de l’agriculture.
– la formation appelée « Jumbo » : elle réunit plusieurs ministres et permet de traiter de questions ministérielles.
Il existe environ 20 formations différentes qui ont varié dans le temps. La dernière liste a été arrêtée par le conseil européen de Séville en juin 2002, sachant que ces diverses formations exercent le pouvoir du conseil des selon les modalités définies par le traité.
La présidence du conseil est exercée à tour de rôle par chaque État membre pour une durée de six mois, selon un ordre fixé par le conseil à l’unanimité. L’État qui préside le conseil de l’union préside du même coup tous les organes de nature intergouvernementale. Cette présidence était à l’origine une fonction honorifique, mais progressivement elle s’est affirmée parce que les élargissements successifs des communautés européennes (puis de l’union européenne) ont valorisé la recherche de compromis. Aujourd’hui, cette présidence joue un rôle essentiel. En effet, aujourd’hui, la présidence exerce une fonction d’arbitrage puisqu’il appartient au président d’élaborer et de proposer des compromis pour débloquer des négociations difficiles. C’est également la présidence qui décide de passer au vote. Elle représente le conseil vis-à-vis des institutions et autres organes communautaires, mais également l’union sur la scène internationale.
Rôle du conseil de l’UE :
– depuis le traité de Rome, le conseil de l’union européenne détient le pouvoir de décision, alors que dans le cadre du traité CECA, c’était la haute autorité qui avait ce pouvoir. À l’origine, le conseil avait un pouvoir exclusif de décision (il décidait tout seul), mais désormais, il doit partager ce pouvoir de décision avec le Parlement européen.
– le conseil doit également accorder les politiques économiques générales des Etats membres en vue d’atteindre les objectifs fixés par les traités.
– le conseil confère aussi des pouvoirs d’exécution à la commission, pouvoirs qu’il peut tempérer.
– depuis le traité d’Amsterdam, le conseil est qualifié de « législateur ». Mais il recoupe tout à la fois des fonctions législatives et gouvernementales
Comment ces décisions sont-elles prises ?
1) elles peuvent être prises à la majorité simple : mais c’est très rare, et généralement utilisé pour la modification du règlement intérieur du conseil.
2) elles peuvent être prises à la majorité qualifiée : chaque État dispose d’un certain nombre de voix qui reflètent son poids. Par exemple, la France a 29 voix tandis que Malte n’en a que 3. En tout, on obtient 345 voix, et la majorité qualifiée est à 255 voix sur 345.
Ce n’est pas la seule condition :
– il faut 255 voix
– il faut que cette décision soit approuvée par un certain nombre d’Etats (par une majorité d’Etats membres : 14)
– si un État le demande, il faudra que la décision soit adoptée par 62 % de la population de l’union européenne
3) L’unanimité : c’est exceptionnel. En général, on utilise la majorité qualifiée. Une décision sera prise à l’unanimité pour les décisions les plus importantes. Par exemple, dans le cadre de la révision des traités ou de l’adhésion de nouveaux membres.
4) Le droit de veto : les vérités ne sont pas prévues par le traité. Le droit de veto est né au moment du compromis de Luxembourg en 1966. Il y avait eu un blocage institutionnel entre la France et la commission européenne. Au milieu des années 60, la commission européenne, sous l’influence de son président, avait proposé une réforme du financement de la PAC qui devait aller dans le sens d’une plus grande intégration. Le général De Gaulle y était fortement opposé, et il a appliqué « la politique du siège vide ». Face à cette situation de blocage, une situation de compromis a été trouvée. Depuis, dès lors qu’un État considère que ses intérêts vitaux sont concernés, il peut s’opposer à la prise de décision et exiger un vote à l’unanimité. Cette décision de 1966 est un compromis politique.
Aujourd’hui, c’est une règle internationale coutumière.
Enfin, il convient de préciser que différents organes sont chargé d’assister le conseil de l’union européenne, dont le COREPER (comité des représentants des Etats permanents), qui siège à Bruxelles.
Elle siège à Bruxelles, et a pour ancêtre la haute autorité de la CECA. Elle est bien souvent le bouc émissaire de l’Europe.
C’est une institution dont les pouvoirs sont liés à l’intérêt général européen. Elle défend l’ensemble des 27 Etats membres. L’assise démocratique s’est renforcée au fil du temps. Si la commission dérange, c’est parce qu’elle est l’illustration par excellence de la supranationalité. C’est le lieu où se forge l’intérêt général européen. Cet intérêt général européen n’est pas la somme des intérêts des Etats membres mais l’intérêt général des Etats.
Elle est composée de nationaux, mais ceux-ci n’ont pas vocation à représenter les Etats membres. Ils sont désignés en raison de leurs compétences et des garanties d’indépendance qu’ils présentent. Le nombre de commissaires et les conditions de leur nomination vont dans ce sens.
La commission est composée de 27 membres qui offrent tous des garanties d’indépendance, de compétences, et choisis par leur gouvernement. Il y a donc un commissaire par État membre.
Mais il fut un temps où la France, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et la Grande-Bretagne avaient 2 commissaires. Aujourd’hui, ils n’en ont plus qu’un seul.
Le nombre de 27 est amené à évoluer dans la mesure où le protocole sur l’élargissement annexé au traité de Nice prévoit qu’à partir de la date d’entrée en fonction de la première commission suivant l’adhésion du 27e Etat membre, le nombre de commissaires sera inférieur à celui du nombre d’Etats, sachant que le nombre exact de commissaires sera alors fixé sur la base d’une rotation égalitaire dont les modalités sont arrêtées par le conseil statuant à l’unanimité. Le traité constitutionnel prévoyait la réduction aux deux tiers des Etats membres. Il y aurait eu 18 commissaires dans une Europe à 27.
À l’origine, cette nomination des commissaires par les Etats avait fait l’objet de critiques, si bien que au fil du temps, la procédure est amenée à évoluer. Progressivement, le Parlement européen est sollicité officieusement en amont, sur les choix des membres, puis en aval, il va être appelé à voter la confiance à la commission une fois celle-ci nommée par les Etats. C’est le traité de Maastricht qui va consigner ces différents éléments. Il consacre ces pratiques et rallonge la durée du mandat de 4 à 5 ans pour qu’il coïncide avec la législature du Parlement.
Le traité de Nice en 2000 est venu apporter des modifications. Au terme de ce traité, le président de la commission européenne est désormais désigné par le conseil en formation des chefs d’État et de gouvernement statuant à la majorité qualifiée, mais il ne peut être désigné sans l’approbation du Parlement. Ensuite, la commission, d’un commun accord avec le président désigné, adopte à la majorité qualifiée la liste des autres personnalités amenées à devenir commissaire européen conformément aux propositions faites par chaque État. Mais là encore, il faut l’approbation du parlement européen. On est passé de l’unanimité à la majorité qualifiée.
Le traité constitutionnel prévoyait d’aller encore plus loin, puisqu’il envisageait que le président de la commission soit élu par le parlement européen.
En juin 2004 (et ce, jusqu’à juin 2009) les Etats membres se sont accordés sur le nom de José Manuel Barroso.
À compter du 27 septembre 2004, et ce pendant 15 jours, les différents membres de la commission Barroso ont été auditionnés par les différentes commissions parlementaires.
Le parlement européen accepte le président qu’on lui propose et accepte ou refuse la commission proposée, mais ne se prononce pas individuellement. Cette procédure de dénomination est devenue démocratique dans la mesure où la commission doit obtenir la confiance du parlement, qui est élu au suffrage universel direct. Donc, le parlement peut faire obstacle à la désignation du président et sur l’ensemble de la commission.
Au sein de la commission, chaque commissaire dispose d’un portefeuille.
Le président est aidé de 4 vice-présidents, désignés par la commission. Chaque portefeuille correspond un champ d’action de la commission, à des compétences différentes. Il existe un commissaire compétent pour le deuxième pilier du traité de Maastricht et un pour le troisième (ce sont les deux piliers intergouvernementaux).
Les commissaires sont indépendants. Donc, ils ne doivent ni accepter ni solliciter d’instructions des gouvernements dont ils sont ressortissants. Ils ne peuvent accepter d’activité professionnelle, et ne peuvent pas non plus cumuler une fonction élective locale. Les Etats s’engagent à respecter ce principe d’indépendance.
Les commissaires européens sont désignés pour 5 ans renouvelables.
La commission est un organe collégial qui vote à la majorité simple de ses membres. Elle se réunit à l’initiative de son président environ une fois par semaine. Les réunions de la commission sont préparées par les fonctionnaires de la commission qui sont extrêmement nombreux (il existe plus de 36 services spécialisés). Elle est responsable de manière solidaire devant le Parlement européen, qui peut voter la motion de censure de la commission européenne.
Est-elle efficace ? Oui. Par exemple, dans la nuit du 15 au 16 mars 1999, la commission SANTER avait démissionné collectivement craignant une motion de censure.
ROLE DU PRESIDENT DE LA COMMISSION :
A l’origine, il avait un rôle essentiellement administratif. Progressivement, il s’est politisé, à tel point qu’aujourd’hui, le président de la commission européenne a une large marge de manoeuvre dans la répartition des portefeuilles au sein de la commission. Le traité de Nice a renforcé les prérogatives du président de la commission : il défini les orientations politiques de la commission et décide de l’organisation interne de celle-ci. Il répartit les rôles en son sein et peut réorganiser les portefeuilles en cours de mandat. Il peut nommer les vices présidents et enfin, il peut, s’il le souhaite, demander le départ d’un des commissaires.
Garante de l’intérêt général de l’union, la commission européenne cumule trois fonctions principales car elle est un organe d’impulsion, une instance d’exécution, et enfin, c’est une des garantes du respect du droit communautaire.
Ce rôle se retrouve en matière de révision des traités dans la mesure où au terme de l’article 48 du traité sur l’union européenne, la commission peut faire toutes propositions en matière de révision des traités. En pratique, l’initiative appartient au conseil et non à la commission. Cette initiative vient davantage d’un consensus des institutions et des Etats. D’autant qu’aujourd’hui, depuis le traité de Maastricht, il existe des clauses de rendez-vous en vue de nouvelles révisions.
Si le rôle de la commission n’est pas très efficace en matière de révision des traités, en revanche, elle a un véritable rôle dans l’adoption des actes communautaires. L’article 250 du traité CE (= traité de Nice) lui donne la compétence de trafic pour proposer des actes communautaires pour ce monopole d’initiative s’est érodée pour ciment car le conseil le Parlement participe aussi à l’initiative. Ce partage des pouvoirs a été officialisé par le traité de train en ce qui concerne la compétence communautaire, les plus limitées. Le titre 4 est relatif à l’asile, au visa, politique d’immigration et autres politiques liées à la libre circulation. Ce sont les cas dans lesquels des Etats sont compétents. Dans le cadre de l’UEM, son rôle en matière d’initiative et moins.
La commission intervient en un an prenant des initiatives, mais aussi en aval avec son pouvoir d’exécution.
Son rôle est d’intervenir sur les clauses de sauvegarde. Les traités communautaires prévoient un certain nombre de dérogations au droit communautaire en fonction des circonstances. C’est à la commission qu’il revient ou non d’accepter ces clauses de sauvegarde.
La commission à un pouvoir d’exécution normative. Pour s’appliquer, certaines politiques ont besoin d’actes juridiques d’application. La commission adopte ainsi des milliers de règlements pour l’exécution de la PAC dans la mesure où c’est elle qui met en oeuvre les politiques communautaires.
Le contrôle juridictionnel est assuré par la CJCE mais cela n’empêche pas que la commission exerce un certain contrôle. La commission dispose d’un pouvoir d’information auprès des Etats membres qui ont l’obligation de lui transmettre tous les actes nationaux relatifs au droit communautaire. Il pèse sur les Etats une obligation de loyauté, c’est-à-dire que les Etats doivent prendre toutes les mesures nécessaires à l’application du droit communautaire. Et à l’envers, ils doivent s’abstenir de prendre toute mesure qui ne la respecte pas.
Elle dispose également d’un pouvoir d’investigation. Notamment, elle peut faire des investigations sur place, au sein des Etats membres, mais aussi des particuliers ou des entreprises. Si dans le cadre de ce pouvoir, elle constate une infraction ou un risque d’infraction, elle est habilitée à attirer l’attention de l’État concerné. Dans le cadre du droit de la concurrence, elle dispose d’un pouvoir d’investigation, de contrôle et de sanction.
Dans le cadre de l’UEM, elle dispose d’un pouvoir de surveillance en matière de contrôle des déficits publics et ce en vertu de l’article 104. Elle peut aussi saisir la CJCE d’un recours en manquement si jamais elle observe qu’un Etat ne respecte pas le droit communautaire.
Le traité constitutionnel confirme la commission dans sa mission de la représentation de l’intérêt général et de gardienne de la légalité communautaire, et apporte une certaine innovation.
Il siège à Strasbourg.
A l’origine, il était désigné comme l’assemblée des communautés européennes mais très vite, cette assemblée va changer d’appellation pour devenir le Parlement Européen, par une résolution du 30 mars 1962. Il faudra attendre l’Acte Unique Européen de 1986 pour que soit consacrée l’appellation de « Parlement Européen ».
C’est très certainement l’institution qui a le plus évolué, tant au regard de sa composition que de ses pouvoirs.
L’article 189 du traité CE prévoit que le Parlement européen est composé des représentants des peuples des Etats réunis dans la communauté. C’est donc par l’intermédiaire de l’assemblée de Strasbourg que ces peuples participent à la construction européenne. Mais le parlement européen ne représente pas LE peuple européen mais LES peuples des Etats réunis dans la communauté. Cette distinction montre qu’en l’état actuel des choses, l’union européenne n’est pas une fédération.
À partir du moment où le parlement européen représente LES peuples des états membres, il est logique d’attribuer des contingents de représentant à chaque étape. La répartition des sièges doit tenir compte du poids démographique de chaque État membre mais en pratique, on observe une surreprésentation des petits Etats. Par exemple un député français représente 670 000 habitants tandis qu’un député luxembourgeois représente 61 000 habitants (soit 10 fois plus).
L’Allemagne a 99 eurodéputés, la France, Royaume-Uni, l’Italie en ont 78. Aujourd’hui, le Parlement européen compte 785 eurodéputés.
A l’origine, l’assemblée des communautés européennes était formée de délégués que les parlements nationaux désignaient selon la procédure fixée par chaque État membre. Mais dès l’origine, il était prévu que le Parlement européen devrait élaborer des projets en vue de permettre l’élection de ses membres au suffrage universel direct et selon une procédure uniforme pour tous les Etats membres.
Ce n’est finalement que le 1er juillet 1978 que l’acte portant élection des parlementaires européens au SUD est entré en vigueur. Et c’est en juin 1979 que les citoyens de la communauté ont élu pour la première fois directement leur représentant à l’assemblée de Strasbourg.
En application de l’article 19 du traité CE, « tout citoyen de l’union résidant dans un État membre dont il n’est pas ressortissant a le droit de vote et d’éligibilité aux élections au Parlement européen dans l’État membre où il réside dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État ». L’objectif initial était le SUD, ce qui est fait.
Mais aujourd’hui, la question de la procédure électorale uniforme reste en suspens. Les Etats n’arrivent pas à s’entendre sur une procédure électorale uniforme. Cet objectif n’a absolument pas été respecté. Les Etats font comme ils veulent. Face aux résistances étatiques, s’agissant de la procédure électorale uniforme, le traité d’Amsterdam évoque désormais la nécessité d’organiser ces élections selon des principes communs. On assiste à une sorte de recul puisque aujourd’hui, la procédure uniforme n’est plus une exigence du traité.
Les élections européennes se déroulent par un scrutin de liste à un tour à la proportionnelle : c’est le principe de base. En France, à l’origine, jusqu’aux élections de 1999, c’était le scrutin de liste à un tour à la proportionnelle qui se déroulait dans le cadre de la circonscription électorale de l’État. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, la circonscription n’est plus la même. Une loi de 2003 a changé ce processus. Elle découpe la France en 8 circonscriptions, spécialement pour les élections européennes. L’intérêt de ce changement est de permettre une meilleure connaissance de ses députés par le citoyen européen français. Le problème, c’est que la procédure n’est pas uniforme pour les élections.
Les eurodéputés sont élus pour cinq ans renouvelables et leur mandat est représentatif. Cette qualité de député européen est compatible avec une fonction parlementaire nationale. Elle est en revanche incompatible avec les fonctions gouvernementales et toute autre fonction communautaire. Ce sont les règles communautaires.
Les parlementaires européens bénéficient d’un régime d’immunité, en tous points comparables à celui des parlementaires nationaux. Mais cette immunité peut être levée. La question s’est notamment posée l’égard de Jean-Marie Le Pen.
Le Parlement européen dispose d’une capacité d’auto organisation relativement étendue, notamment au travers de son règlement intérieur. Il se réunit en « sessions » et en « réunions ». Il tient une session annuelle. Il se réunit de plein droit le deuxième mardi de mars et il peut également se réunir en session extraordinaire. Ces sessions extraordinaires sont tenues soit la demande de la majorité de ses membres, soit à la demande de la commission, soit la demande du conseil. Les sessions extraordinaires ne sont, en pratique, à utiliser car les sessions ordinaires de l’amant. Par conséquent, celles-ci se succèdent.
Le Parlement européen se réunit une fois par mois à Strasbourg pendant une semaine. Les trois autres semaines, il est à Bruxelles. Quand il ne siège pas, il peut se réunir en commission. Les séances au Parlement européen sont publiques sauf décision contraire. En principe, on applique la règle du quorum. Il faut au moins un tiers des membres en séances, mais ce quorum n’est pas toujours vérifié. Le vote est personnel et ne peut pas être délégué. Sauf dispositions spéciales, le Parlement européen délibère à la majorité absolue des suffrages exprimés.
Au sein du Parlement européen, il y a également un président, un bureau et des services. L’article 197 du traité prévoit que le Parlement européen désigne son président et son bureau parmi ses membres. Il y a un bureau ramassé mais aussi un bureau élargi. Le bureau est élu pour deux an et demi, avec en son sein un président (actuellement, c’est Hans Pöttering). Il y a aussi les vice-présidents du Parlement européen et des questeurs. Le rôle des questeurs est de diriger l’emploi des fonds, ainsi que l’administration intérieure et matérielle de l’assemblée.
Dans le bureau élargi, il y a le bureau, et en plus, des présidents de groupes politiques. Ce bureau élargi propose l’ordre du jour, arrêté par le parlement au début de chaque période de réunion.
Les partis politiques parlement européen :
L’article 191 du traité de Nice dispose que « les partis politiques au niveau européen sont importants en tant que facteur d’intégration au sein de l’union. Ils contribuent à la formation d’une conscience européenne et à l’expression de la volonté politique des citoyens de l’union ». Le traité de Nice, sur les partis politiques, avait prévu que le conseil fixerait à la majorité qualifiée, en codécision avec le Parlement européen, le statut des partis politiques au niveau européen, mais surtout les règles relatives à leur financement.
Le 4 novembre 2003, un règlement a été adopté, relatif au statut et au financement des partis politiques au niveau européen. Les différents partis politiques qui composent le Parlement européen se constituent sur la base d’affinités politiques et non sur la nationalité.
Quand le parlement européen a été constitué, un groupe politique pouvait être constitué d’eurodéputés d’un même État. Mais il fallait 29 eurodéputés pour avoir un groupe d’une même nationalité. Il en fallait 18 s’il y avait trois nationalités, et il en fallait 14 s’il y avait quatre nationalités ou plus. On tendait ainsi à favoriser la mixité.
Aujourd’hui, il faut au moins 20 députés pour former un groupe et 1/5 des Etats représentés dans un groupe, en vertu du respect du critère de multinationalité.
Les principaux partis politiques :
– le PPE-DE : groupe du parti populaire européen et des démocrates européens. C’est le groupe démocrate-chrétien. C’est là que figurent les membres de l’UMP. C’est le groupe majoritaire : 277 sièges.
– le PSE: parti socialiste européen. Il regroupe les partis socialistes français et européen ainsi que les partis radicaux de gauche. Il rassemble 218 sièges.
– l’ ALDE : le groupe alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe. Créé par François Bayrou pour avoir un centre, il rassemble 102 députés.
– les verts et l’ALE : rassemble les verts et l’alliance libre européenne. Ce sont les écologistes, qui rassemblent 42 sièges.
– le groupe confédéral de la gauche unitaire européenne, gauche verte nordique (GUENGL) : 41 eurodéputés (= 41 sièges)
– le groupe indépendance démocratie : 24 eurodéputés.
– le groupe pour l’Europe des nations : 44 sièges. Il rassemble une majorité de Polonais et d’Italiens.
– l’ITS : le groupe Identité-Tradition-Souveraineté, auquel appartient Jean-Marie Le Pen. Il compte 21 eurodéputés. C’est la première fois que le Front National appartient à un groupe. Ce groupe a été créé avec l’adhésion de la Roumanie de la Bulgarie.
13 eurodéputés n’appartiennent à aucun groupe politique et ne sont pas inscrits.
Le Parlement européen dispose de quatre prérogatives :
– tout d’abord, par les votes d’investiture et de censure de la commission.
– mais également par des débats. Par exemple, chaque année, il y a un débat sur l’État de l’union au sein duquel participe le conseil et la commission.
– il peut poser des questions écrites ou orales, soit au conseil soit la commission, avec ou sans débat.
– il peut être amené à exercer son contrôle par le biais de commissions d’enquête (comme pour l’affaire de la vache folle).
Le conseil va soumettre une initiative. Il va prendre une « position commune ». Puis, le parlement va être amené à émettre un avis soit positif (et les mesures seront adoptées à la majorité qualifiée), soit négatif (et le conseil ne pourra adopter l’acte qu’à l’unanimité).
– Le traité de Maastricht, généralisée par le traité d’Amsterdam, instaure la procédure de codécision qui s’inspire de la procédure de coopération. Si le Parlement émet un avis négatif, il peut faire une tentative de conciliation. Mais si le Parlement ne veut pas de la procédure, il n’y a pas de possibilité d’adopter une mesure à l’unanimité. Le rôle du Parlement comme législateur a été renforcé par la procédure de codécision, qui est la procédure la plus courante.
– Il y a aussi la procédure de l’avis conforme : le conseil de nécessairement suivre l’avis du Parlement européen, c’est-à-dire que le conseil est lié par la position tenue par le Parlement.
Finalement aujourd’hui, le Parlement européen est une institution très originale qui s’inscrit dans une logique d’intégration supranationale. C’est l’organe d’intégration par excellence, et le traité constitutionnel en faisait un véritable co-législateur.
Mais il a beaucoup évolué et aujourd’hui il a un rôle de législateur.
SECTION II : Les organes de contrôle non politique
Le système juridique communautaire comporte des règles juridiques contraignantes. Il importait dès lors, qu’un système juridictionnel efficace accompagne la prise de décision. Les rédacteurs du traité ont imaginé une organisation juridictionnelle qui s’est étoffée au fil du temps. Mais à côté de ces organes juridictionnels, d’autres exercent un contrôle. Ces derniers ne sont pas juridictionnels.
L’une des innovations majeures de la construction communautaire tient de la mise en place d’un système juridictionnel efficace, même si l’idée d’institution d’une juridiction internationale n’est pas nouvelle (1920 : cour permanente de justice internationale). Mais la CJCE se distingue à plus d’un titre des autres juridictions internationales
Cette CJCE est l’organe juridictionnel essentiel de la communauté européenne. Il fut mis en place dès le début de la construction communautaire par le traité CECA. Ultérieurement, sa compétence a été étendue aux traités CEE et CEEA.
La CJCE siège à Luxembourg sur le plateau du Kilchberg. En vertu de l’article 7 du traité CE, la CJCE est une des institutions assurant la réalisation des tâches confiées à la communauté. Elle doit agir « dans la limite des attributions qui lui sont conférées par le présent traité ».
La composition de la CJCE repose sur le principe d’indépendance des juges. Elle est indépendante par rapport aux instances nationales, aux instances politiques et aux instances privées.
Au sein de la CJCE, il y a deux catégories de membres :
– les juges qui rend des arrêts après délibéré
– les avocats généraux qui présentent des conclusions motivées sur les affaires. C’est-à-dire que chacun était général exposé les faits et présenter ses solutions, sachant que les juges ne sont pas du tout tenu de suivre les conclusions des avocats généraux.
La CJCE fonctionne comme le conseil d’État français qui lui a servi de modèle. Le nombre de juges et d’avocats généraux est fixé par le traité mais peut être augmenté à la demande de la cour et par décision du conseil à l’unanimité.
A l’origine, il n’existait aucune condition de nationalité. Aujourd’hui cela a changé :
– pour les juges, chaque État à un juge de sa nationalité sur le siège. Le traité de Nice indique expressément que la cour est composée d’un national de chaque État membre. La France nomme toujours un conseiller d’État.
– pour les avocats généraux, le nombre est arrêté à 8, mais il est possible de l’augmenter à la demande de la cour ou du conseil statuant à l’unanimité. Il n’y a pas de condition de nationalité non plus, mais en pratique, les grands Etats ont toujours un avocat général (Yves Bot pour la France). Les postes qui restent tournent entre les petits Etats.
Chacun des juges et avocats généraux dispose de trois référendaires pour les assister. Ces référendaires sont choisis IN TUITU PERSONAE. Ils ont des juristes qualifiés. Il participe à la rédaction des rapports préalables, aux conclusions des avocats généraux et à la rédaction des arrêts pour les raisins d’un des juges.
Les membres de la cour sont nommés d’un commun accord pour 6 ans renouvelables avec renouvellement partiel tous les 3 ans. Ces juges doivent présenter des garanties d’indépendance et de compétence en matière juridictionnelle. Ils sont recrutés au sein des juridictions nationales. Ils peuvent être des hauts fonctionnaires ou des professeurs d’université.
Les juges et avocats généraux doivent prêter serment à leur entrée en fonction et doivent exercer leurs fonctions en toute impartialité (ce qui est logique) dans le respect du secret des délibérations. Ils doivent également respecter les obligations qui découlent de leurs charges pendant la durée de leurs fonctions et après cessation de celles-ci. Ils ne peuvent exercer de fonctions administratives ou politiques. En gage de leur indépendance, ils sont inamovibles.
Ces juges désignent en leur sein un président, élu pour 3 ans renouvelables. C’est un personnage clef puisqu’il représente la cour à l’intérieur comme à l’extérieur, il dirige les travaux de la cour et préside des audiences. Mais les juges et avocats généraux désignent aussi un président parmi les avocats généraux pour 1 an.
La cour établit également son propre règlement de procédure mais le conseil doit donner son accord à la majorité qualifiée.
Lorsqu’une affaire est introduite devant la CJCE, la cour l’instruit, l’avocat général rédige des conclusions publiques et les juges rendent un arrêt obligatoire dans tous ces éléments.
Le traité de Nice a changé la façon de fonctionner. Désormais, l’article 221 du traité CE prévoit que la CJCE siège en chambre : – soit en formation de 3 à 5 juges
– soit en grande chambre de 13 juges : cette grande chambre est constituée lorsqu’un État membre ou une institution de la communauté qui est partie à l’instance le demande
– soit en assemblée plénière, à 27 juges :
– quand elle examine la démission d’office ou la déchéance des droits à pension ou d’autres avantages des membres de la commission
– pour les membres de la Cour des Comptes : quand un membre de cette Cour des Comptes remplit pas de les conditions à l’exercice de ses fonctions
– quand une affaire revêt une importance exceptionnelle (vache folle, Yougoslavie …)
La cour délibère en nombre impair, sachant que le président n’a pas de voix prépondérante. Quand elle délibère, il faut un quorum de trois juges minimum. Pour la grande chambre, il faut un quorum de 9 juges minimums, et au moins 11 juges pour l’assemblée plénière.
Certain estime qu’on devrait aller plus loin et faire des chambres spécialisées, compte tenu de la complexité des affaires. Mais cela pourrait constituer un risque d’atteinte à l’uniformité de la jurisprudence.
La CJCE nomme son greffier élu pour six ans renouvelables à bulletin secret. Il exerce une double fonction :
– il assiste les membres de la cour dans l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles, notamment dans la mesure où il assure la réception, le traitement, la transmission et la conservation de tous les actes de procédure. Il se charge de toutes les notifications, signification et communication des documents.
– il assure l’administration générale de la cour sous l’autorité générale du président. Les autres fonctionnaires sont placés sous son autorité.
La CJCE comprend plus de 1650 personnes. Contrairement à la CEDH, elle n’émet pas d’opinions dissidente ou individuelle.
La CJCE une très large compétence en matière juridictionnelle, envisagée par l’article 220 du traiter CE. Elle est investie d’une compétence consultative, contentieuse et préjudicielle.
Ces compétences sont prévues par l’article 300 §6 du traiter CE qui porte sur la conclusion des accords entre la communauté et un ou plusieurs Etats ou autre organe international. Il prévoit que « le conseil, la commission ou un État membre peut recueillir l’avis de la cour de justice sur la compatibilité d’un accord envisagé avec les dispositions du présent traité. L’accord qui a fait l’objet d’un avis négatif de la cour de justice ne peut entrer en vigueur ». Le traité de Nice a modifié cette disposition puisqu’il permet désormais au parlement européen de saisir la cour de justice des communautés européennes sur la compatibilité.
L’intérêt de cette procédure est de permettre à la cour de se prononcer sur la répartition des compétences entre la communauté et les Etats membres. C’est une procédure qui ne fonctionne que moyennement car elle n’a rendu que 10 arrêts depuis son apparition.
L’article 220 du traité CE prévoit que « la cour de justice assure le respect du droit dans l’interprétation et dans l’application du présent traité ».
Toutefois, l’article sept de ce traité précise qu’elle ne peut agir « que dans la limite des attributions qui lui sont confiées ».
Il est possible de former des recours :
– le contentieux de l’annulation : la cour est saisie dans une affaire où le requérant demande l’annulation d’un acte d’une institution. La cour ne peut qu’annuler entièrement ou partiellement. Ce contentieux est réservé à la CJCE quand le recours est formé par un État membre contre le parlement européen et/ou contre le conseil. Les actes sont introduits par une institution communautaire contre une autre institution. Pour tous les autres recours, on doit saisir le TPICE (tribunal de première instance des communautés européennes).
– le recours en manquement : permet à la CJCE de contrôler le respect par les Etats membres des obligations qui leur incombent vertu du droit communautaire.
C’est la commission qui est à l’origine de ce recours. Elle engage une procédure préalable. Elle va constater qu’un État méconnaît ses engagements, et ensuite engager une procédure au cours de laquelle elle va demander à l’État de répondre des griefs dont il fait l’objet. Si cette procédure n’amène pas l’État à mettre fin à ce manquement, un recours pour violation du droit communautaire peut être introduit auprès de la cour de justice. Ce recours peut être engagé soit par la commission, soit par un État membre. À partir de là, si la cour constate le manquement, l’État est tenu d’y mettre fin sans délai. Mais si, après une nouvelle saisine par la commission, la cour de justice reconnaît que l’État concerné ne s’est pas conformé à son arrêt, elle peut lui infliger le paiement d’une somme forfaitaire et/ou d’une astreinte.
– le recours en carence : dirigée contre les institutions communautaires, il permet de contrôler la légalité de l’inaction des institutions communautaires, c’est-à-dire, chercher si ces dernières auraient dû ou non adopter tel ou tel acte.
C’est une procédure par laquelle une juridiction nationale soumet à la CJCE des questions relatives à l’interprétation ou à la validité des dispositions du droit communautaire.
Le renvoi préjudiciel a servi à 2 choses :
– il permet d’assurer l’unité de l’application du droit communautaire : il garantit l’unité d’interprétation. Cela permet de faire en sorte que l’application des textes communautaires ne soit pas à la merci des jurisprudences nationales contradictoires.
– cette procédure s’est affirmée comme un instrument de protection des justiciables.
Cette procédure est très importante, et elle a un succès considérable. C’est celle qui est le plus souvent utilisé.
Mais elle est victime de son succès. En effet il faut environ 20 mois à la CJCE pour répondre à une question préjudicielle.
Au début de la construction communautaire, ce tribunal n’existait pas. Il a été créé compte tenu de l’engorgement de la CJCE. Aujourd’hui il est largement saisi.
Dès 1974, la CJCE a demandé à ce que soit créé un tribunal administratif communautaire afin de répondre à l’engorgement, sur les questions de la fonction publique. C’est un contentieux répétitif qui pousse toujours les mêmes questions. Mais les Etats n’ont pas fait suite à cette demande.
La CJCE a maintenu sa demande et c’est l’acte unique européen de 1986 qui lui a donné raison en posant le principe de la possibilité de créer un nouvel organe juridictionnel à condition que la cour en fasse la demande après consultation des institutions (parlement européen + commission), le conseil décidant à l’unanimité. La décision fut prise en 1988, et le TPICE est entré en fonctions le 1er septembre 1989.
Le TPICE est régi par des règles proches de celles qui s’appliquent la cour. Mais il y a une différence notable : il n’y a pas d’avocats généraux au TPICE. Cependant, les membres du tribunal peuvent être appelés à exercer la fonction d’avocat général dans une affaire déterminée. Mais cela est très rarement utilisé.
Le traité de Nice prévoit que le tribunal peut être assisté par des avocats généraux.
Le nombre de juges est fixé par le statut de la cour, sachant que le traité est composé de plus de juges que d’Etats membres, à raison d’au moins un juge par Etat (au moins 27). Ces juges sont nommés d’un commun accord par les gouvernements des Etats membres pour un mandat de six ans renouvelables. Il comporte également un président désigné par les juges et nomme un greffier.
Le TPICE fonctionnant formation bicamérale : il est généralement une formation de 5 juges, parfois 3. Il peut aussi parfois juger à juge unique. Enfin, il peut aussi siéger en grande chambre de 13 juges ou encore en assemblée plénière de 27 juges pour les affaires complexes ou importantes. Les juges sont élus pour trois ans.
Le TPICE à des services communs avec la CJCE.
Le statut des juges du TPICE est le même que celui des juges de la CJCE.
Initialement, le TPICE avait une compétence beaucoup plus restreinte que celle de la cour. Il a fallu attendre le traité de Nice pour que lui soient conférées des compétences particulières. Avant, ses compétences n’étaient même pas envisagées dans les traités.
En application de l’article 225 du traité de Nice, il dispose d’une compétence sur un large ensemble de recours. Il dispose même une compétence préjudicielle, même si elle est exceptionnelle.
Selon l’article 220 du traiter CE, sont garants du droit communautaire la CJCE ET le TPICE. Il est prévu que des chambres juridictionnelles peuvent être adjointes au TPICE pour exercer dans certains domaines spécifiques des compétences juridictionnelles prévues par le présent traité.
Le 2 novembre 2004, le conseil de l’union a adopté la décision instituant le tribunal de la fonction publique de l’union européenne. Ce tribunal est une nouvelle juridiction spécialisée, composée de sept juges et qui est appelée à exercer ses compétences en matière de fonction publique communautaire.
Ces décisions peuvent faire l’objet d’un pourvoi devant le TPICE et exceptionnellement, à un réexamen devant la CJCE. L’objectif est de réduire la durée des procédures. La justice communautaire a considérablement évolué. La CJCE et le TPICE sont surchargés. Il faut revoir l’architecture juridictionnelle du système.
Il y en a deux :
– la Cour des Comptes européenne
– le médiateur européen
Elle a été créée par le traité de Bruxelles le 22 juillet 1975 pour remplacer l’ancienne commission de contrôle des comptes. Le traité est entré en vigueur le 1er juin 1977. Elle siège à Luxembourg.
Cette cour des comptes européennes est en charge du contrôle financier externe.
Elle s’inscrit dans une double logique :
– une logique de mise en place et de consolidation du financement de la communauté par des ressources propres (budget autonome).
– la logique de l’attribution du parlement de la responsabilité d’accorder la décharge à la commission pour l’exécution du budget.
Comme dans tout système budgétaire, le système communautaire repose sur la nécessité, pour les organes investis du pouvoir d’autorisation, de s’assurer de la conformité de l’exécution du budget avec les autorisations précédemment données.
Cette Cour des Comptes européenne a été élevée au rang d’institution par le traité de Maastricht, et ce traité a également accru son rôle. À compter du traité de Maastricht, la cour des comptes européennes a le droit de formuler un rapport devant la CJCE dans les cas où elle estimerait qu’il serait porté atteinte aux prérogatives qu’elle détient en application des traités.
Le traité de Nice est venu préciser cette composition : la cour des comptes européennes est composée d’un national de chaque État membre.
On estimait qu’il fallait un représentant pour chaque État membre. Ces membres sont nommés pour six ans selon une procédure qui a évolué :
– A l’origine, le conseil statuait l’unanimité.
– Aujourd’hui, le conseil statut à la majorité qualifié, et le parlement est simplement consulté. Ses membres sont choisis parmi des personnalités compétentes, ayant appartenu aux Cours des Comptes ou organisations analogues des Etats membres, ou des personnes ayant des compétences particulières pour cette fonction.
Ses représentants sont indépendants, et leur indépendance est garantie dans les mêmes conditions que celles des juges de la CJCE. En son sein, la Cour des Comptes européenne désigne un président élu pour trois ans renouvelables.
La cour allie la division du travail et la collégialité :
– elle est répartie en deux groupes d’audits composés de 13 membres.
– elle se prononce selon le principe de la collégialité : chaque membre se voit confié un secteur spécifique de vérification et de contrôle.
Le rôle de la Cour des Comptes européenne est de contrôler les comptes de l’Europe. Ses membres rendent des avis et des rapports adoptés par la cour elle-même. Il y a plus de 300 personnes qui contrôlent la sincérité des comptes.
C’est le règlement intérieur de cette institution qui détermine avec précision les modes de fonctionnement et les modalités d’exécution du contrôle. Ce contrôle a lieu sur pièces, mais peut aller sur place et dans ce cas, il reçoit l’aide des institutions analogues (institutions nationales).
La Cour des Comptes européennes n’a pas de compétence juridictionnelle. Son rôle est d’examiner la totalité des recettes et dépenses de la communauté et de chaque organisme communautaire. L’idée est de veiller à la légalité et à la régularité des budgets en s’assurant de la bonne gestion financière.
Le traité de Maastricht a précisé son rôle et a aussi renforcé les relations entre la Cour des Comptes européenne et les autres institutions. La Cour des Comptes européenne doit présenter à ces institutions son rapport annuel. C’est l’essentiel du travail de la Cour des Comptes. Il est établi après la clôture de chaque exercice budgétaire. Il est ensuite transmis aux institutions communautaires, et publié au JOUE (journal officiel de l’union européenne), après avoir été examiné par le Parlement européen. Il est déterminant.
La Cour des Comptes européenne peut rendre des observations formulées à l’initiative de la cour sur des questions particulières. Elles sont exprimées sans grand formalisme puisqu’elles sont présentées sous la forme d’une simple lettre au président de la Cour des Comptes européenne qui consigne les observations de la cour. Globalement, on peut dire que c’est un contrôle accessoire.
La cour peut aussi rendre des rapports spéciaux dans lesquels elle se concentre sur un problème précis. Ces rapports sont soit à l’initiative de la cour elle-même, soit à la demande du conseiller de la commission.
Elle peut rendre des avis facultatifs ou obligatoires. Les avis facultatifs sont rendus à tout moment à la demande d’une institution. Les avis obligatoires sont rendus à la demande du conseil à propos des règlements financiers.
La Cour des Comptes européenne assiste et aide le parlement européen et le conseil pour le contrôle de l’exécution du budget de la communauté, et leur fournit une déclaration sur la fiabilité des comptes ainsi que sur la légalité et la régularité des opérations relatives aux comptes.
Depuis l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, la Cour des Comptes européenne a vu ses pouvoirs s’accroître. Elle dispose de nouveaux pouvoirs de contrôle et d’investigation afin, notamment, de lutter plus efficacement contre la fraude. Elle a vu également son pouvoir de contrôle étendu aux fonds communautaires gérés par la BMI (banque monétaire internationale).
Il siège à Strasbourg. C’est un organe nouveau. Il a été inséré par l’article 195 du traité sur l’union européenne (traité de Maastricht). Ce médiateur est inspiré des institutions équivalentes fonctionnant dans de nombreux Etats membres. Il emprunte aux médiateurs scandinave et français. Il y a un lien étroit entre le médiateur et le Parlement européen, et il dispose d’un certain nombre de pouvoirs toutefois modestes.
Le médiateur est nommé après chaque élection du Parlement européen pour toute la durée de la législature
(5 ans) avec un mandat renouvelable. Il peut être déclaré démissionnaire par la CJCE à la demande du parlement, s’il ne remplit pas les conditions nécessaires à l’exercice de ses fonctions ou s’il a commis une faute grave.
Il est indépendant et sa fonction est incompatible avec toute autre activité professionnelle rémunérée ou non. On pourrait douter de son indépendance du fait qu’il soit nommé par le Parlement, mais il s’avère en réalité, totalement indépendant.
Son statut et les conditions générales d’exercice de ses fonctions sont fixés par le Parlement européen après avis de la commission et avec l’approbation du conseil qui statut à la majorité qualifiée.
Le rôle du médiateur et de recevoir les plaintes de tous les citoyens de l’union européenne ou de toute autre personne physique ou morale résidante ou ayant un siège statutaire dans un État membre. Ces plaintes sont relatives à des cas de mauvaise administration dans l’action des institutions ou des organes communautaires à l’exception toutefois de la CJCE et du tribunal de première instance, dans l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles. Cette notion de « mauvaise administration » n’est pas définie par les textes, mais précisée par la pratique du médiateur :
– il s’agit d’une compétence matérielle relativement large qui va bien au-delà de la simple illégalité puisqu’il rassemble également la lenteur, la lourdeur administrative, le manquement de transparence ou un dysfonctionnement non fautif ou illégal.
– la compétence personnelle est uniquement limitée aux organes et institutions communautaires.
Ce médiateur procède aux enquêtes qu’il estime justifiées, soit de sa propre initiative (il peut se saisir lui-même), soit sur la base des plaintes qui lui sont présentées (soit directement, soit par l’intermédiaire d’un membre du parlement). Dans l’hypothèse où l’affaire en question va faire l’objet d’une procédure juridictionnelle, ce pouvoir est limité. À partir du moment où le parlement européen décide de faire une enquête, il informe l’institution où l’organe concerné.
La plainte doit faire apparaître l’objet de la demande et l’identité de la personne, mais l’auteur de la plainte peut demander la confidentialité. Cette plainte doit être introduite dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle les faits qui la justifient sont portés à la connaissance du plaignant.
Si le médiateur constate un cas de mauvaise administration, il doit saisir l’institution concernée dans un délai de trois mois pour lui faire parvenir les mesures prises pour mettre un terme à ce dysfonctionnement. Mais il ne dispose d’aucun pouvoir décisionnel. Si l’organe ne lui répond pas, il ne peut pas saisir le juge communautaire. Ensuite, il établit et transmet son rapport au Parlement et à l’institution concernée. Chaque année, le médiateur présente un rapport sur le résultat de ses enquêtes.
Plus d’une fois, la question de la responsabilité du médiateur s’est posée : on observe plusieurs arguments dans le sens d’une non-responsabilité :
– le médiateur est sous une étroite dépendance du parlement
– il n’a pas la qualité d’institution
– les recommandations qu’il adopte ne sont pas obligatoires
Aussi, il n’a pas besoin de responsabilité.
Mais un fonctionnaire européen a présenté un recours devant le tribunal de première instance, fondé sur de prétendues difficultés dans l’accès à un concours professionnel, et le médiateur n’avait pas retenu sa plainte.
Que se passe-t-il si la plainte n’est pas reçue ? Saisir la CJCE ?
Selon le TPI et la CJCE, il est possible de former un recours en indemnités, et de saisir la cour pour obtenir réparation. En pratique, la responsabilité ne peut être engagée que dans des cas exceptionnels.
Le médiateur est assisté d’un secrétariat dirigé par un responsable nommé par lui.
SECTION III : Les organes communautaires
Il existe trois types d’organes selon les traités :
– les organes consultatifs : ce sont des organes de conseil qui n’ont pas de pouvoir de décision mais qui sont utiles à la réflexion communautaire.
– les organismes financiers : la BCE, la banque européenne d’investissement.
– les organes subsidiaires.
Ils ne sont pas chargés de l’éminente mission d’assurer la réalisation des tâches confiées à la communauté. Et même s’ils sont prévus par les traités, on ne peut pas les considérer comme des pouvoirs publics de la communauté, dans la mesure où il n’ont pas du tout de pouvoir décisionnel. Mais ils ont une compétence générale et donc vocation à connaître de l’ensemble des domaines et des questions relevant des traités constitutifs. Cette situation hybride explique que les deux organes correspondant aux critères précisés (conseil économique et social et comité des régions) se voient officiellement assigné comme mission d’assister le conseil et la commission (article 7 §2) mais également le Parlement européen.
Le CESE a été institué dès l’origine par les deux traités de Rome (CEE et CEEA) et il est prévu par les articles 257 à 262. Il dispose désormais d’une compétence générale en raison de la suppression récente du comité consultatif qui exerçait des fonctions analogues dans le cadre du traité CECA.
Cet organe a pour mission de représenter l’ensemble des milieux économiques et sociaux, sachant que ces différents milieux sont formés par les employeurs, les travailleurs, les consommateurs et les associations culturelles et sportives.
La CESE représente les « forces vives » de la communauté, par opposition au Parlement qui représente « les peuples européens » en général. Ses membres doivent exercer leurs fonctions en toute indépendance et dans l’intérêt général de la communauté.
Depuis le dernier élargissement, le CESE est composé de 344 membres nommés pour quatre ans renouvelables, répartis entre les Etats membres selon le critère de la pondération (par exemple, la France a 24 sièges, tandis que Malte n’en a que 5).
Le traité de Nice a fixé un seuil à ce conseil économique et social européen : il avait décidé de plafonner le nombre de membres du CESE à 350. Le traité constitutionnel maintenait ce quota mais portait la durée des mandats de 4 à 5 ans, et envisageait une présidence et un bureau élu pour deux an et demi.
La CESE a une origine professionnelle. Avant le traité de Nice, chaque État membre devait faire des propositions dans la limite du double du nombre de sièges à pourvoir en s’inspirant d’un principe de répartition équitable entre les différentes catégories de la vie économique et sociale. Ensuite, le CESE statuait à l’unanimité après avoir recueilli l’avis de la commission, et, le cas échéant, des organisations européennes représentatives des différentes catégories socioprofessionnelles concernées.
Le traité de Nice avait voulu instaurer la majorité qualifiée, mais cela avait posé problème. Donc aujourd’hui, le conseil statue à la majorité qualifiée à partir des propositions faites par chaque État membre. Il n’est plus exigé une représentation des différentes catégories professionnelles ni le double des propositions.
Cette origine professionnelle se prolonge dans l’organisation interne du CESE car ils se répartissent en sections spécialisées en fonction des principaux domaines couverts par le traité.
Le CESE exerce trois types de missions :
– Il a un pouvoir consultatif : il peut être consulté dans trois hypothèses :
– dans certains cas, il doit rendre des avis obligatoires. S’il n’a pas été consulté, l’acte peut encourir l’annulation.
– il peut rendre des avis facultatifs : il doit consulter la commission et le conseil dans tous les cas où la commission le juge opportun.
– il peut rendre spontanément un avis si le juge opportun.
Dans la pratique, il a une plus grande influence sur la commission que sur le conseil.
– Il peut inciter la société civile à s’impliquer davantage dans l’élaboration des politiques de l’union.
– Il peut stimuler le rôle de la société civile dans les pays tiers, et contribue à mettre en place des structures consultatives à l’extérieur.
La région a été la grande oubliée des traités communautaires. C’est avec l’adhésion de la Grande-Bretagne, de l’Irlande et du Danemark que l’on va reconnaître à la région un certain rôle. C’est à partir de là qu’a été instauré un fonds européen de développement régional.
En 1986, à l’occasion de l’élargissement vers le sud, l’acte unique européen instaure la cohésion économique et sociale qui se voit fixer des objectifs ambitieux : il s’agit de développer l’ensemble des régions de l’union européenne.
Sur le plan institutionnel, l’instauration d’une représentation des collectivités infra-étatiques dans le système communautaire a fait l’objet de nombreuses réflexions et propositions. Certains ont proposé la création d’une chambre des régions. D’autres ont même proposé que le parlement soit transformé en une chambre des régions. Finalement, c’est la commission qui va proposer une assemblée des régions qui se serait réunie trois ou quatre fois par an et qui aurait pu auditionner le conseil et la commission.
C’est en 1988 que la commission a créé par une décision, un conseil consultatif des collectivités régionales et locales. Ce conseil était, à l’époque, composé de 42 membres et nommé sur proposition conjointe de l’assemblée des régions d’Europe, de l’union internationale des villes et pouvoirs locaux, et du conseil des communes et régions d’Europe.
Ce conseil est entré en activité le 20 décembre 1988. Il était consulté sur les questions relatives au développement régional et à la politique régionale communautaire. Aujourd’hui, ce comité a été remplacé par le comité des régions instituées par le traité de Maastricht. Il a un caractère consultatif et est composé de représentants des collectivités régionales et locales.
Le traité de Nice précise le cercle des personnes susceptibles d’être membre de ce comité : il faut être membre d’un mandat électif ou politiquement responsable devant des assemblées élues. Par conséquent, si un mandat électif ou de responsabilité locale est perdu, alors la personne perd son mandat au comité régional.
Comme pour le CESE, ses membres sont nommés pour quatre ans renouvelables. Le traité de Nice a étendu les dispositions applicables au CESE au comité des régions : le plafond est fixé à 350 membres. Actuellement, il y en a 344. C’est la même chose pour la procédure de nomination : on est passé de l’unanimité à la majorité qualifiée.
En matière d’incompatibilité, il existe une incompatibilité entre une fonction de membre du comité des régions et membres du Parlement européen (traité d’Amsterdam). Ce comité des régions désigne son président et son bureau et établit son règlement intérieur soumis à l’approbation du conseil statuant à l’unanimité. Il est convoqué soit la demande du conseil, soit de la commission, mais il peut aussi se réunir de sa propre initiative.
Il doit rendre un avis lorsque son avis est sollicité par le conseil : il doit le rendre dans un délai supérieur à un mois. Si l’avis n’est pas rendu à l’issue de ce délai, le conseil peut passer outre l’absence d’avis.
Le traité d’Amsterdam a étendu les cas dans lesquels le comité des régions peut être consulté et a prévu qu’il puisse l’être par le Parlement européen. Il a revendiqué le droit de disposer d’un pouvoir décisionnel, mais cela lui a toujours été refusé.
La commission a conclu un accord avec le comité des régions, le 17 novembre 2005, destiné à régir leur coopération, visant à renforcer les interventions du comité des régions dans le processus de décision. Pour autant, il n’a pas de pouvoir véritablement décisionnel.
BILAN : le comité des régions est un organe récent (15 ans) qui essaie de faire preuve d’un activisme certain qui dissimule en fait un certain mal-être. Il voudrait jouer un rôle plus important. Il a demandé à plusieurs reprises d’être élevé au rang d’institution, il voudrait contrôler davantage le respect du principe de subsidiarité qui constitue un privilège d’intervention de l’autorité la plus efficace (local ou communautaire). Il joue le rôle de défenseur des collectivités locales et dans un certain nombre de domaines, sa consultation est obligatoire (mais ceux qui le consultent ne sont pas liés par l’avis qu’il rend).
Mais le comité des régions n’est qu’un organisme consultatif.
BCE : consacrer à l’UEM
BEI : consacrer aux questions d’investissement
Elle opère au sein du système européen de banques centrales (SEBC), qui est le bras séculier de l’UEM (premier pilier au sein du traité de Maastricht). Il se compose de deux éléments qualifiés d’euro systèmes :
– les banques centrales nationales des Etats membres (par exemple la Banque de France)
– la BCE
Aujourd’hui, les banques centrales n’ont plus qu’un rôle d’exécution et sont régies par le droit national. Ils sont indépendants des pouvoirs politiques et doivent respecter ce principe d’indépendance aussi appliquée à la BCE.
La BCE a été créé le 1er juillet 1998 conformément au traité de Maastricht. C’est une institution supranationale dont le siège est à Francfort, sachant qu’elle est guidée par le grand principe de l’indépendance. On a repris ici le système d’indépendance du modèle allemand qui prévoit l’indépendance du pouvoir monétaire sur le pouvoir politique pour éviter les empiétements. Elle possède la personnalité juridique et à partir de là, elle est dotée de la capacité de nouer des relations avec le monde extérieur. Actuellement, ce n’est pas une institution, mais le traité constitutionnel la qualifiait ainsi.
C’est une organisation à part, une sorte de sous-système, mais c’était le prix à payer pour appartenir au premier pilier du traité de Maastricht. Elle dispose de certaines spécificités sur les actes qu’elle peut adopter :
– spécificités sur les actes juridiques (elle adopte ses propres actes juridiques)
– elle peut conclure des accords externes (et dispose ainsi d’un pouvoir important)
– elle jouit d’un certain nombre de prérogatives en cas de contentieux
La BCE comporte :
– un directoire
– un conseil des gouverneurs
– un conseil général
– un comité économique et financier
La mission essentielle de la BCE est le maintien de la stabilité des prix. Donc, s’il y a une menace d’inflation, la BCE peut agir en jouant sur la variation du taux d’intérêt directeur. Aujourd’hui, les Etats qui participent à l’euro ont perdu leur autonomie en matière monétaire et en matière de change.
Aujourd’hui, la stabilité de la BCE est très critiquée. Elle s’inspire de la FED (banque centrale américaine), mais cette dernière a pour objectif la stabilité ET la croissance. La BCE n’est chargé que du maintien de la stabilité.
Le traité constitutionnel faisait de la BCE une institution, tout en reprenant ses compétences de principes en matière monétaire. Il rappelle que « la BCE est indépendante dans l’exercice de ses pouvoirs et dans la gestion de ses finances. Les institutions, organes et organismes de l’union ainsi que les gouvernements des Etats membres respectent cette indépendance ».
Créés à l’origine par le traité de Rome, elle avait pour mission originaire d’aider au développement économique de l’Europe communautaire par des prêts de longue durée et à des taux d’intérêt faibles.
Cette BEI s’inscrit dans le prolongement des banques publiques de développement. Mais progressivement, son rôle va évoluer. Ses activités pour se diversifier en direction des pays qui sont associés à la communauté (ACP : Afrique-Caraïbes-Pacifique, ou les PECO).
À partir de 1993, avec l’institution d’un fonds européen d’investissement, on assiste à un recentrage des aides et de son activité. Elle a notamment aidé les pays de l’Est à se développer. Ce fonds a également aidé à développer des réseaux d’infrastructures en matière d’énergie, de transports, de télécommunications ou encore de réseaux transeuropéens.
La BEI dispose d’une personnalité juridique autonome. Ses statuts figurent en annexe du traité de Rome. Elle dispose d’un capital réparti entre les Etats membres selon une clé de répartition ad hoc.
Elle est organisée en trois formations :
à l’unanimité ou à la majorité qualifiée selon les règles de pondération fondée sur le capital détenu par chaque État membre.
Même si la BEI fut envisagée dès le début par le traité de Rome, ce n’est pas une institution. La BEI ne reste qu’un organe.
Dans l’arrêt MERONI du 13 juin 1958, la CJCE s’est montrée assez défavorable à la multiplication d’organes de toutes sortes, car il y avait un risque de diluer les grandes institutions fondamentales et les amputés de leurs compétences. Mais la pratique il a largement emporté et ses organes se sont multipliés. Ils sont créés par les institutions et non par les traités : c’est ce qu’on appelle du droit dérivé.
On a vu l’apparition d’office ou d’agences qui se superposent aux différents organes techniques.
Le traité constitutionnel invoquait les « institutions, organes et organismes de l’union ».
À la différence des autres organisations internationales, qui souvent le prévoient formellement dans leur charte constitutive, les traités communautaires restent de leur côté extrêmement discret sur la création d’organes subsidiaires. Mais dans la pratique, ces organes vont apparaître et se développer pour deux raisons : la diversification et la complexification des missions de la communauté.
L’idée est de permettre aux institutions communautaires de disposer d’un pouvoir d’expertise. Aujourd’hui, d’une manière générale, toute nouvelle politique communautaire s’accompagne systématiquement de la mise en place de tels organismes qui sont aujourd’hui très nombreux.
Il est difficile d’établir une typologie car ces organismes sont très différents. Différents critères peuvent être retenus : – l’organe créateur (il s’agit souvent du conseil de la commission)
– la composition (groupes d’experts indépendants ou représentants des Etats membres)
– leur pouvoir (préparatoire, consultatif ou décisionnel)
Ces différents organes techniques n’ont pas tous la même place dans la hiérarchie des organes institutionnels de l’union :
– Les organes techniques subsidiaires : ils dépendent entièrement, pour leur composition et attribution, de l’organe créateur. Ces organes sont des comités techniques ou scientifiques qui donnent des avis à leur auteur, souvent en matière de santé publique ou de protection de l’environnement.
– Les comités relevant de la comitologie : la notion de « comitologie » regroupe de manière synthétique les différents comités techniques qui entourent la commission et qui l’assiste dans l’exercice de ses compétences exécutives. Ils ont un rôle officiel à jouer.
Ce sont souvent des structures mixtes puisque généralement, les Etats membres désignent deux membres qui les représentent. Mais ils sont étroitement placés sous la dépendance de la commission qui en assure la présidence et le secrétariat qui fixe l’ordre du jour et ses travaux.
Ces différents comités, en ce qui concerne la votation, ressemblent au conseil puisqu’ils votent selon les règles de la majorité qualifiée. Leurs pouvoirs sont très codifiés et dépendent étroitement de l’exercice de la fonction exécutive en droit communautaire.
C’est une pratique relativement récente même si elle a des antécédents dans certains traités comme Euratom qui prévoyait le centre commun de recherche et l’agence des approvisionnements. Mais c’était une création assez mesurée.
Aujourd’hui, ces organes subsidiaires ont proliféré. Ont ainsi été créés :
– l’agence européenne pour l’évaluation des médicaments
– l’autorité européenne fiscale communautaire
– …
Ces agences sont dans les 1er, 2ème et 3ème piliers du traité de Maastricht.
Dans le deuxième pilier, on retrouve Europol, créé par une convention signée le 26 juillet 1995, et entré en vigueur le 1er octobre 1998. Cet organe vise à aider les Etats membres à collaborer plus étroitement et plus efficacement dans la prévention de la lutte contre le crime international organisé.
Aujourd’hui, la pratique la plus récente va dans la création d’agences qui présentent un lien avec la santé et la sécurité :
– agence pour la sécurité maritime après l’affaire Erika
– agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l’information
Dans le troisième pilier, on retrouve également une agence européenne de défense créée le 12 juillet 2004. C’est un organisme intergouvernemental qui est placé sous la direction du conseil et du haut représentant pour la PESC (politique européenne de sécurité commune). Cet organe est compétent pour tout ce qui concerne les questions de défense.
Certains de ces organes ou agences disposent de la personnalité juridique. On en dénombre 16 actuellement. On distingue un degré de sophistication structurelle qui varie et est plus ou moins poussé.
Le parlement européen s’est inquiété de cette prolifération qui pourrait amoindrir son contrôle politique ou budgétaire mais aussi remettre en question les pouvoirs propres de la commission ou du conseil.
L’intérêt de ces agences traduit un souci de décentralisation et d’adaptation aux techniques modernes de la gouvernance, puisque dans des domaines très techniques, ces agences permettent de s’appuyer sur des avis d’experts qui ne sont pas obligatoires et n’ont pas de fonction décisionnelle. Mais cela permet de conforter les choix des politiques.
Par leur apport en information, ces organismes améliorent la visibilité et la transparence, par des questions réputées complexes et peu à la portée du grand public.
CONCLUSION :
La CE, puis l’UE, fut longtemps qualifiée d’objet politique non identifié puis de fédération d’Etats nations par Jacques Delors. Aujourd’hui, c’est ce vers quoi l’on tend, mais on n’y est pas encore arrivé.
Il est incontestable que l’union européenne fut une réussite, au moins au regard de la paix en Europe. La deuxième réussite, plus contestable actuellement, réside dans les mécanismes institutionnels mis en place dans les années 50 qui fonctionnent grâce des adaptations régulières au fil des traités. Le Parlement européen en est un exemple.
Cette union européenne vise incontestablement un idéal de démocratie et de prospérité économique. Elle a constitué et constitue encore aujourd’hui un formidable objet d’attraction (PECO).
Cet élargissement à 25 puis à 27 était risqué dans la mesure où même s’il fut très préparé, l’acquis communautaire ne va pas de soi. Certaines régions sont en retard au niveau du développement économique, et les pays sont de plus en plus nombreux et hétérogènes.
De plus, le budget de l’union européenne reste aujourd’hui très limité. L’euro (union monétaire), de nature fédérale, ne s’est pas doublé d’une union économique.
L’avenir de l’Europe est compromis dans l’immédiat, et le NON à la constitution européenne n’a pas arrangé les choses. Le traité constitutionnel a été ratifié par 18 membres mais il n’entrera jamais en vigueur. Toutefois, on peut s’en servir.
Aujourd’hui la crise paraît profonde, du fait que le traité fut refusé par 2 des Etats fondateurs.
L’Espagne et le Luxembourg sont à l’origine d’un appel, lancé le 27 janvier 2007 au nom des 18 pays qui ont ratifié le traité, réunis à Madrid, pour sortir de l’impasse en améliorant le traité, tout en conservant sa substance.
Aujourd’hui, c’est l’Allemagne qui préside l’union européenne. Elle devrait proposer un nouveau texte.
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Il faut apporter une réponse rapidement : il y aura un nouveau traité certes, mais il devra réviser les institutions actuelles.
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