Cours de droit international privé

DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

  Le cours de droit international privé est une branche de droit privé en ce qu’il concerne les relations que des personnes privées, ressortissant d’États différents et résidant dans des Etats différents, peuvent nouer entre elles, en matière de famille, de contrat ou de nationalité.

Le droit international privé permet de résoudre les conflits entre différents droits internes d’États souverains.

 

La finalité du droit international privé est de régler les conséquences de la division du monde sur le statut civil des personnes, physiques ou morales, en cas de litiges entre les individus. En effet, en raison de la pluralité des lois internes et de la diversité des systèmes juridiques en présence, il faut un corpus de règles indépendantes pour développer des solutions et éviter la cacophonie ou les blocages juridiques.

Le Droit International Privé est donc la matière qui tend à régir une situation présentant un élément d’extranéité et régissant les relations entre les personnes privées.

Définitions de DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ :

DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ :  branche du droit qui a pour objet de régler les statuts et rapports juridiques des personnes privées prises dans une perspective internationale, en tant que membre de la société internationale.
Conflit de juridiction : concurrence de juridictions de différents ordres juridiques à connaître d’une même situation
Conflit de lois : concurrence de lois de différents ordres juridiques à régir une même situation.
ATTENTION : plusieurs juridictions peuvent être compétentes mais une seule loi est applicable. De même, un juge saisi peut appliquer toutes les lois du monde, par forcément la sienne.


For: juge saisi.

Règle de conflit : méthode de désignation des règles internationales applicables.
– indirecte : elle ne statue pas sur le fond mais désigne la loi applicable pour statuer sur le fond.
– bilatérale : désigne indifféremment la loi du for ou les lois étrangères.
– neutre : elle place sur un pied d’égalité la loi du for et les lois étrangères d’une part et elle est indifférente au contenu de la loi appliquée d’autre part.
INFLECHISSEMENTS de la règle de conflit :


Clause d’exception (échappatoire) : la loi applicable à telle situation est telle loi à moins qu’il ne résulte des circonstances qu’une autre loi est plus favorable.
Règle à coloration matérielle : En principe, la règle de conflit ne retient qu’une loi et une seule. Or, le plus souvent dans la pratique contemporaine, la règle de conflit est assortie de plusieurs rattachements. Elle perd alors sa neutralité et fait des choix substantiels.

CHAPITRE 1: LE STATUT PERSONNEL

A. Rappel sur la notion de statut personnel.

1. Notion.

C’est l’ensemble des matières touchant à la personne et qui s’applique à elle se manière permanente. Cela veut dire : nonobstant les déplacements internationaux de la personne ou ses activités internationales.

Parmi les matières incluses dans ce statut personnel figurent déjà le statut individuel de la personne, cela recouvre le nom, le domicile, la capacité.

Le nom et domicile ne donnent pas lieu à de nombreux conflits de lois contrairement à la capacité.

En revanche, la nationalité ne soulève pas de conflit de lois. Pour quelle raison ? Car pour qu’il y ait conflit de lois il faut qu’une autorité nationale accepte de faire appliquer une loi étrangère. Aux yeux d’un état donné, une personne a la nationalité de cet état ou ne l’a pas. Et si une personne a la nationalité d’un état dont l’autorité est saisie cette autorité ne connaît que cette nationalité. D’une autre manière, dans un conflit de nationalités mettant en cause la nationalité de l’autorité saisie, le conflit est nécessairement résolu en faveur de cette nationalité.

En la matière il n’y a véritablement de choix que lorsque les deux nationalités dont dispose l’individu soulèvent une question posée dans un état tiers. Alors si devant un tribunal français, une personne à la nationalité belge et marocaine, là il faudra faire un choix et à ce moment les juges choisiront la nationalité la plus effective.

 

Entre également dans la notion de statut personnel, le statut familial. A ce titre relèvent du statut perso toutes les questions relatives au mariage, les effets, les conditions, la formation, la dissolution etc. Il y a également les questions de filiations (quelle est la loi qui régit les effets de la filiation etc.). Ces questions se posent pour la filiation par le sang et pour la filiation adoptive.

 

2. Le rattachement du statut personnel.

Il convient de choisir un rattachement qui assure une stabilité. Il y en a traditionnellement deux : la loi de la nationalité de l’individu où qu’il soit et l’autre est la loi de son domicile (international) nonobstant ses déplacements.

Le domicile international est l’établissement d’un individu dans un pays associé à l’intention d’y demeurer.

En Droit international privé français le rattachement de principe est la nationalité(article 3 al3 du Code civil.). Ce principe connaît de multiples tempéraments aujourd’hui.

 

B. L’éclatement contemporain du statut personnel.

Les différents aspects du statut personnel ne sont plus soumis à la même loi. Ceci se constate en droit commun et sous l’influence du droit conventionnel.

1. Le droit commun.

 

Pendant tout le 19ème siècle l’article 3 al 3 s’est appliqué sans problème mais le principe a été moins approprié par la suite sous l’influence de deux facteurs.

a. Le développement de l’immigration.

 

La raison est que plus il y a d’étrangers dans un pays venant d’un grand nombre de pays différents, plus on est amené à appliquer des lois étrangères. Or une loi étrangère est moins facile à appliquer que la loi locale. Aussi les lois étrangères peuvent révéler un contenu difficilement acceptable pour l’ordre public français.

 

Cette difficulté on l’a connu au milieu du 19ème siècle du fait que les rois Italien et espagnol n’admettaient pas le divorce. Donc le principe de compétence de la loi nationale conduisait à refuser de prononcer le divorce d’époux espagnols ou italiens qui avaient immigrés en France. Le problème s’est résorbé avec l’introduction du divorce en droit italien et espagnol.

Aussi on connaît ce problème avec les lois d’inspiration islamique (polygamie et répudiation). Voilà pourquoi il y a eu une poussée en faveur de la loi du domicile.

 

L’article 3 al 3demeure mais ce principe connaît des exceptions de plus en plus nombreuses, la plus remarquable étant l’article 310 du Code civil d’une loi de 1975.Selon l’article 310, est soumis à la loi française, le divorce d’époux tous deux domiciliés en France. Même si les époux sont de nationalité commune étrangère on leur applique la loi française sur le fondement du domicile.

b. L’apparence de différence de nationalité au sein du groupe familial.

 

Pendant longtemps a été assurée l’unité de la nationalité au sein de la famille car selon les différents droits de la nationalité, la femme qui épousait un étranger acquérait la nationalité de son mari et elle était susceptible de perdre sa nationalité d’origine.

Aujourd’hui les temps ont changé et le principe consacré par la loi française depuis 1973 c’est que le mariage n’exerce de plein droit aucune influence sur la nationalité. C’est-à-dire que la française qui épouse un étranger ne perd pas la nationalité française et que l’étrangère qui épouse un français ne devient pas française. Dès lors que la femme conserve sa nationalité d’origine elle la transmet à ses enfants. Comme les enfants peuvent aussi recevoir la nationalité du père on va voir se multiplier les cas de doubles nationalités.

 

Le principe de la loi nationale s’avère être une source de complications. Ça serait plus pratique d’appliquer la loi du domicile.

Le droit français a soumis finalement à partir de l’arrêt RIVIERE 1953 la matière à la loi du domicile.

 

Simultanément l’analyse a amené au sein du statut personnel une dissociation des différents aspects pour les soumettre à des rattachements différents. Par exemple si les incapacités sont demeurées régies par la loi nationale en revanche les mesures de protection des incapables sont soumises souvent à la loi de la résidence habituelle. C’est un exemple d’éclatement du statut personnel.

 

2. Le droit conventionnel.

 

C’est le développement des conventions internationales et surtout les conventions multilatérales adoptées lors de la convention internationale de La Haye.

La conférence de La Haye a renoncé de produire une convention sur le statut personnel en général.C’est beaucoup trop vaste et c’est impossible en raison du fait que certains états sont pour la loi du domicile et d’autres pour la loi nationale.

La conférence a donc traité des questions plus étroites en fonction des besoins les plus pressants. Ces questions ont été la protection des incapables, les obligations alimentaires, l’adoption. On a donc eu une série de conventions de La Haye. La conséquence est un éclatement du statut personnel en ce sens qu’il y a par exemple une loi applicable à la question très étroite des obligations alimentaires et cette question ne sera pas nécessairement la même que celle appliquée à la filiation. On voit un émiettement du statut personnel.

 

Depuis 40 ans la conciliation a fini par s’opérer sur le critère de la résidence habituelle. Il ne s’agit pas vraiment d’un compromis entre la nationalité et le domicile (car la résidence est bien plus proche de la notion de domicile). Dans la définition du domicile entre un élément intentionnel, alors que dans la résidence habituelle on ne tient pas compte de l’intention.

 

Donc est apparu ce 3ème rattachement (la résidence habituelle) ce qui accentue l’émiettement du statut personnel.

En droit Français le statut personnel est régit par la loi nationale mais cela reste un principe très général qui connaît beaucoup d’exceptions.

 

SECTION 1: LA capacité

La capacité d’un individu devrait en principe être soumise à une règle de conflit de lois unique. On se demande déjà selon quelle loi on va apprécier le statut d’incapable qui permet de contester les actes passés par l’intéressé. La deuxième question est celle de savoir selon quelle loi organiser la protection de l’incapable.

I. Le statut de l’incapable.

L’article 3 al 3soumet la capacité des français à la loi française. Cette règle a été bilatéralisée de sorte que la capacité en Droit International Privé français relève de la loi nationale.Cette règle n’est pas universelle la preuve, aux USA on applique la loi de l’acte juridique.

A. Les incapacités visées.

1. Les incapacités légales.

Il y a d’une part les incapacités de jouissance qui empêchent une personne d’être titulaire d’un droit. Tandis qu’une incapacité d’exercice empêche une personne d’exercer un droit dont elle a jouissance.

a. Les incapacités de jouissance.

 

Une incapacité générale de jouissance équivaut à un refus de la personnalité juridique (avant, on parlait de mort civile). En France il n’existe plus d’incapacité générale de jouissance.

 

Plus pratiques sont les incapacités spéciales de jouissance qui empêchent de jouir de certains droits. Elles visent des actes particuliers. Elles sont susceptibles de relever de la loi personnelle quand elles sont édictées en fonction d’une caractéristique de l’intéressé. Par exemple, une interdiction de contracter mariage pour des personnes atteintes de certaines affections physiques ou mentales. Cela existe dans certains droits étrangers mais pas en droit français. Mais le plus souvent les incapacités spéciales de jouissance visent une certaine catégorie d’actes et elles sont édictées pour des raisons d’intérêt général et non pas en raison de la personnalité d’un individu. Ex : L’incapacité du médecin selon l’article 909 du Code civil de recevoir à titre gratuit d’une personne dont il a soigné la dernière maladie. Cette incapacité vise un type de relation qui unit le patient au médecin. Donc c’est selon la loi applicable à cette relation que l’interdiction s’appliquera ou non. Si c’est la loi française, l’incapacité va s’appliquer.

Ex : incapacité du tuteur de recevoir à titre gratuit de son pupille. Ici encore ce n’est pas la personnalité de l’individu qui est visée, c’est la relation en elle-même. Donc on appliquera la loi applicable à la tutelle.

 

b. Les incapacités d’exercice.

 

Une personne est titulaire d’un droit mais elle ne peut l’exercer que par l’intermédiaire d’un tiers. Cela concerne le mineur et le majeur interdit. Ici les caractéristiques de la personne sont prises en compte (jeune âge ou affection mentale). Cela vise un ensemble d’actes. Donc la raison de permanence s’applique. Il faut une continuité de statut. Les incapacités d’exercice sont régies par la loi personnelle c’est-à-dire la loi nationale.

 

Néanmoins on s’est parfois posé la question de savoir comme pour les incapacités spéciales de jouissance, si l’incapacité ne devrait pas plus plutôt être rattachée à une institution plutôt qu’à la personne. La question s’est posée dans deux contextes différents.

Pour les actes portant sur un immeuble : lex rei sitae. C’est la loi du lieu de l’immeuble. Il y a une tendance à appliquer la loi de situation de l’immeuble pour toutes les questions qui touchent à l’immeuble. Parmi ces questions il y a celle de la disposition de l’immeuble. Alors si un mineur dispose d’un immeuble faut-il apprécier sa capacité à l’aliéner selon sa loi personnelle ou selon la loi de l’immeuble ?

Dans l’arrêt « CHATEAU DE CHAMBORD », la cour de cassation s’est prononcée pour la loi personnelle. Le château appartenait à une famille dont la loi personnelle était la loi autrichienne. A l’occasion d’une succession le château a été attribué à l’aîné par un partage amiable. Or participait à ce partage des mineurs. La loi Française exige que lorsqu’il y a partage successoral faisant intervenir des mineurs, ce partage doive être judiciaire. Les mineurs invoquaient la nullité de ce partage selon la loi française. La cour, le 13 avril 1932 a dit que les héritiers d’un étranger peuvent partager amiablement un immeuble situé en France dès lors que leur droit national leur donne capacité pour se faire. Donc nonobstant le fait qu’il y a un immeuble, la capacité pour en disposer est régit par la loi personnelle et non par la loi de l’immeuble.

 

Une question analogue s’est posée à l’égard du contrat de mariage et la capacité à conclure un contrat de mariage. Un certain nombre de lois considèrent que s’applique la capacité générale, donc un mineur ne peut pas contracter un mariage. La loi française, elle, a une disposition particulière selon laquelle la capacité de se marier emporte celle de choisir son régime matrimonial = habilis ad nuptias, habilis ad pacta nuptiala (habile au mariage, habile au pacte matrimonial).

D’où la question, la capacité de contracter mariage doit-elle être appréciée selon la loi personnelle de l’individu ou bien selon la loi applicable au régime matrimonial ?

La question s’est posée dans l’arrêt « Patino ». Une mineure espagnole avait à la veille de son mariage conclu un contrat de mariage (séparation de biens) soumis à la loi de son mari, la loi Bolivienne. Elle intente en France une action en nullité du contrat fondée sur sa loi personnelle, la loi espagnole. La cour de cassation s’est prononcée pour la loi personnelle. Il s’agit bien d’une question de statut personnel en général. « C’est par une exacte qualification que les juges du fond ont vu dans les règles habilitant un mineur à la conclusion d’un contrat de mariage une simple modalité de son incapacité générale de contracter ressortissant de sa loi personnelle. » Donc l’article 1398 s’applique aux français et non pas aux contrats soumis à la loi française.

 

2. Les incapacités judiciaires.

 

Les incapacités des mineurs résultent généralement d’un jugement qui constate la protection de l’intéressé. Dès lors qu’il y a jugement on bascule dans le conflit de juridictions. Comment va-t-on apprécier le statut d’un individu quand le jugement est intervenu ?

a. Si le jugement est intervenu à l’étranger.

 

La reconnaissance de l’incapacité va être gouvernée par le principe de la reconnaissance des jugements étrangers en droit interne.

Cependant, il s’agit ici d’état de personne, donc la décision sera retenue sans exequatur préalablesauf à faire intervenir un contrôle ultérieur. Mais aussi l’effet de l’incapacité pourra se heurter à l’ignorance excusable du jugement étranger (voir infra).

b. Si le jugement d’incapacité est intervenu en France.

 

On va appliquer les règles de compétence des tribunaux français et les règles de conflit de lois. Par conséquent si l’intéressé est de nationalité française, les tribunaux français sont compétents où que soit domicilié l’intéressé (article 14 du Code civil) et ils appliqueront au fond la loi française (article 3 al 3 du Code civil)

 

S’il s’agit d’un étranger le tribunal sera reconnu compétent sur le fondement du domicile, si le domicile est en France voire sur le fondement de l’urgence s’il n’y a pas de domicile en France ; mais s’étant reconnu compétent le tribunal français devra consulter la loi personnelle de l’étranger pour choisir un régime de protection.

Ceci c’est la théorie, en fait l’autorité française qui serait saisie sur le fondement du domicile, de l’urgence ou de la résidence habituelle, peut être incitée à appliquer les mesures prévues par sa propre loi. Pourquoi ? Pour des raisons de commodité. Il est difficile de connaître les mesures de protection étrangères. Aussi une personne qui par hypothèse a un lien de rattachement avec le territoire français doit pour être protégée par les dispositions de la loi française quel que soit les dispositions de son statut personnel. On voit ici l’idée de lois de police.

 

B. Mise en œuvre de la règle de conflit.

 

On va examiner des incidents que peut rencontrer la règle de conflit.

1. Le renvoi.

 

Lorsque la loi étrangère qui est désignée par la règle de conflit de l’autorité saisie désigne elle-même l’autorité qui la désigne compétent = Renvoi.

Soit on renvoie à une loi tierce = renvoi au second degré.

Le renvoi résulte de ce que le système étranger adopte un autre raisonnement que le système du for. Dans notre cas ça sera quand la loi nationale étrangère soumet la loi de la capacité à la loi du domicile qui serait en France.

Ex : une personne étrangère domiciliée en France passe un acte dont elle invoque la nullité pour incapacité ; une autorité française applique la règle de conflit qui désigne la loi étrangère mais la loi étrangère désigne la loi Française.

On considère qu’il y a lieu de faire jouer le renvoi quand il a un effet validant et non pas dans le cas contraire.Donc si l’intéressé est capable selon la loi française mais incapable selon sa loi personnelle étrangère qui renvoie à la loi française on fera jouer le renvoi ce qui permet de maintenir l’acte.

2. Le conflit mobile.

 

Quand l’élément de rattachement retenu par une règle de conflit se modifie(ex : ici, quand l’incapable change de domicile)

Il faut savoir s’il faut continuer d’appliquer la loi ancienne ou tenir compte du changement : théorie de l’effet immédiat. Selon la théorie générale : la théorie de l’application immédiate l’emporte, les effets à venir de la situation sont régis par la loi nouvelle.

a. En cas de minorité.

 

Pas de difficulté à admettre qu’un mineur changeant de nationalité puisse devenir majeur si la loi nouvelle abaisse l’âge de la majorité. En droit comparé, l’âge de la majorité se situe entre 18 et 21 ans.

En revanche, si l’individu était majeur selon la loi de l’ancienne nationalité alors qu’il ne l’est pas selon la loi nouvelle, on hésitera à le faire redevenir mineur : pas de Jurisprudence.

b. En cas d’incapable majeur.

 

Cela suppose qu’une personne ait été déclarée incapable par la loi d’origine, puis change de nationalité. Faut-il considérer que les mesures prises sous la loi ancienne deviennent caduques ? : Un arrêt ancien l’a admis : la loi de la nouvelle nationalité ignorait les mesures de protection antérieurement prises selon la loi française, cependant c’est une décision unique, il est difficile d’en tirer un principe général. On pourrait dire que la mesure doit se prolonger tant que la décision n’est pas intervenue sous l’empire du nouveau statut.

 

Qui dit conflit mobile, dit possibilité de fraude pour échapper à des mesures impératives de la loi ancienne.

Les décisions de Jurisprudence, qui en matière d’incapacité ont résolu le conflit en cas de nationalité nouvelle, ont réservé l’hypothèse en cas de fraude à la loi. Le changement de statut personnel inspiré seulement  par le désir de tourner l’incapacité pourrait être frauduleux, cependant, pas de Jurisprudence.

 

3. L’intervention éventuelle de l’ordre public.

 

Une incapacité fondée sur la race, la religion serait déclarée contraire à l’Ordre Public français. Par ex : en matière de mariage, l’interdiction faite à une musulmane d’épouser un non musulman.

 

Dans le cas d’une incapacité résultant d’une condamnation pénale étrangère, le principe veut qu’un Etat n’applique pas le droit pénal étranger. Un Tribunal français ne prononcerait pas une incapacité par application d’une loi pénale étrangère, mais il ne serait pas interdit à un Tribunal français de prendre en considération, une décision prise à l’étranger pour l’application de la loi française.

 

L’ORDRE PUBLIC pourrait intervenir à l’encontre d’une loi étrangère insuffisamment protectrice, si par ex une personne n’est pas protégée par rapport à la nullité d’un contrat donné avec un consentement pas assez éclairé.

 

4. La question des lois de police.

 

Ce sont des dispositions impératives dans un pays donné qui fait échec à l’application normale de la règle de conflit.

Nonobstant le caractère international de l’opération, on ne prend pas la peine de consulter la règle de conflit, la loi du for doit obligatoirement s’appliquer. Certaines lois françaises peuvent être appliquées nonobstant la compétence d’une loi étrangère. ex : engagement d’un mineur allemand dans la légion étrangère française à 19 ans, en droit français, cela est possible dès 18 ans et donc la loi nationale du mineur est tenue en échec.

 

5. L’ignorance excusable des lois étrangères.

 

La sanction normale serait l’annulation des actes passés. Celui qui traite avec un incapable peut légitimement ignorer cette incapacité, et peut s’estimer lésé par l’annulation de l’acte. Il faut un équilibre entre la protection de l’incapable et la sécurité des transactions.

 

Q° importantes réglées dans les codes + arrêt de 1861 LIZARDI : un mexicain de 23 ans, majeur selon la loi française et mineur selon la loi mexicaine, il fait des achats puis agit en nullité des actes passés. Selon la règle de conflit, la vente devrait être nulle mais les vendeurs ignoraient le contenu de la loi mexicaine = refus d’annulation du contrat, pour la Cour de cassation, les vendeurs ont agi sans légèreté, sans imprudence et avec BF.

On dit souvent qu’il faut une ignorance excusable de la loi étrangère.

L’arrêt LIZARDI formule une règle matérielle, règle de fond à objet international : quand on traite avec un étranger, celui-ci ne peut arguer de son incapacité.

 

Ex de refus de la Jurisprudence LIZARDI : un banquier d’Annecy traitant avec une femme mariée suisse : il aurait dû connaître la situation. Le juge apprécie au regard de la prudence et de la connaissance du vendeur.

En somme, cette Jurisprudence s’est peu appliquée. Elle trouve néanmoins un intérêt par rapport aux incapables majeurs.

 

La solution LIZARDI est formulée par la convention de Rome de Juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. La convention exclu les règles de capacité dans son article 1, mais dans l’article 11, elle formule une règle matérielle semblable : « dans un contrat conclu entre personnes se trouvant dans un même pays, une personne physique qui serait capable selon la loi de ce pays ne peut invoquer son incapacité résultant d’une autre loi que si au moment de la conclusion du contrat, le cocontractant a connu cette incapacité ou ne l’a ignoré qu’en raison d’une imprudence de sa part ».

 

II. La protection des incapables.

A. Difficultés d’application de la loi personnelle.

 

Le 1er moyen est l’annulation des actes qu’ils ont passés, mais c’est une protection a posteriori qui permet de revenir sur des actes passés. Cela n’épuise pas la question sur le seul terrain patrimonial où il peut être nécessaire de prévenir les actes en mettant en place un régime de protection + toute la protection personnelle du mineur (et pas seulement patrimoniale).

 

En principe, c’est la loi qui fixe la protection. Mais quelques difficultés demeurent.

 

Un arrêt de la Cour Internationale de Justice a conduit à une Convention de la Haye le 5 oct. 1961 sur la protection des mineurs. Le 19 oct. 1996, une 2ème convention de La Haye a été signée pour résoudre les problèmes de la 1ère (mais elle n’est pas en vigueur), également a été adopté une convention à La Haye toujours, sur les incapables majeurs.

 

En Nov. 2003, un règlement européen est appelé à interférer avec la Convention de 1996.

 

Il paraît normal que ce soit la loi qui fixe la capacité qui fixe aussi le régime de protection. Pour la France se serait la loi nationale, c’est la solution retenue par la Convention de La Haye de 1902, le rattachement national est très répandu.

Si le tuteur et le pupille sont de nationalités différentes, on applique la loi nationale de l’incapable car il est au centre de la situation juridique.

 

Il y a un problème quand l’incapable ne réside pas dans le pays de sa nationalité, il est difficile de retrouver une corrélation entre la loi applicable à la capacité et les mesures de protection.

Il n’y a pas de problème quand il y a une protection familiale, c’est à dire qu’il y a représentation de l’incapable mineur par ses parents.

Il y a des difficultés quand on met en œuvre un régime de protection plus structuré tel qu’un conseil de famille (le conseil de famille a une nationalité et l’enfant en a une autre).

 

C’est encore plus difficile quand l’autorité publique intervient (assistance éducative ; aide sociale à l’enfance).Cette autorité publique fait une intervention totale quand les organes familiaux ne remplissent plus leur rôle (plus de famille ; déchéance de l’autorité parentale).

A ce stade il est difficile de faire fonctionner les organes de l’Etat quand l’enfant est à l’étranger. Il est plus normal que ce soit l’autorité publique de l’Etat de résidence qui intervienne. Ces autorités appliqueront leur propre droit. Les autorités ont vocation à intervenir sur toute personne se trouvant sur leur territoire.

 

En octobre 1964dans l’arrêt MARO la Cour de cassation a été amenée à juger, s’agissant d’un mineur étranger, que les dispositions françaises sur l’assistance éducative étaient applicables sur le territoire français à tous les mineurs qui s’y trouvent quelque soit leur nationalité ou celle de leurs parents. Cela constitue une loi de police.

Ces mesures ont vocation à s’appliquer à titre d’urgence lorsqu’il y a présence temporaire de l’enfant en France en attendant sa reconduite dans l’Etat de résidence habituelle.

 

Ce type de conflit (loi de la résidence et loi de la nationalité) a été illustré au niveau le plus élevé car la Cour Internationale de Justice (CIJ) a été appelé à en connaître au sujet de l’application de la Convention de 1902. Un Etat invoquant sa violation par un autre Etat.

 

CIJ affaire BOLL, 28 novembre 1958. Un enfant mineur né en 1945 de mère suédoise devenue néerlandaise par le mariage. La mère décède, la tutelle est confiée au père puis elle lui est retirée et est confiée aux autorités publiques nationales néerlandaises.

Entre temps l’enfant est confié aux services suédois de l’éducation protectrice du mineur. La tutrice néerlandaise réclame l’enfant aux autorités suédoises qui ont refusé pour éviter de faire trop de déplacement.

Un différend naît entre les Pays Bas et la Suède. La CIJ est saisie et dit que la convention ne traite pas d’autre chose que de la désignation de la personne responsable de l’enfant. Pour la Cour, la loi suédoise qui est la loi du domicile fait que «  l’éducation protectrice ne peut atteindre son but social que si elle est appliquée à tous les mineurs vivants en Suède ». Autrement dit on différencie le domicile entre la tutelle soumise à la loi néerlandaise et les mesures protectrices suédoises. Par conséquent bien que la Convention donne incontestablement compétence à la loi des Pays Bas, cette loi pourrait être paralysée par des mesures administratives prises par un organisme public dans l’Etat de résidence.

Cette affaire va entraîner l’adoption d’une nouvelle convention de La Haye le 5 octobre 1961.

 

B. La convention de La Haye de 1961 sur la protection des mineurs.

 

Cette convention concerne la compétence des autorités et la loi applicable en matière de protection des mineurs.

Elle est en vigueur en France. Elle est applicable à tous les mineurs qui ont leur résidence habituelle dans un des Etats contractants indépendamment de leur nationalité. Par mineur on entend une personne qui a la qualité de mineur par sa loi nationale et par la loi de résidence habituelle (conditions cumulatives). Si cette condition n’est pas remplie c’est le droit commun qui sera applicable.

Elle met l’accent sur la compétence des autorités pour prendre des mesures et non seulement sur la représentation juridique des mineurs (convention de 1902).

Elle vise toutes les mesures individuelles de droit public ou privé prenant en considération de la faiblesse de l’intéressé et visant sa personne ou ses biens.

La convention de 1961 s’est efforcée de ménager la loi nationale et la loi de la résidence habituelle.

 

1. La situation normale.

 

C’est la compétence de la loi personnelle. La convention de 1961 dit chaque Etat se voit reconnaître un rapport d’autorité résultant de plein droit de la loi interne de l’Etat dont le mineur est ressortissant.

Un rapport doit être considéré comme de plein droit lorsqu’il ne nécessite l’intervention d’aucune autorité judiciaire ou administrative (exemple, l’autorité exercée par les deux parents ou par l’un des deux).

La situation se modifie quelque peu par le décès de l’un des deux parents ou des deux parents, par le divorce, par la mise en danger des mineurs. Il y a rupture d’équilibre et il faut prendre des mesures. La convention de 1961 règle la compétence des autorités. On passe vers un conflit d’autorités.

 

2. Mesures de protection nécessaires.

a. Les autorités compétentes.

 

La compétence de principe est celle des autorités de la résidence habituelle du mineur (article 1 et 2 de la convention de 1961). Ces articles donnent compétence aux autorités judiciaires ou administratives de l’Etat de la résidence habituelle pour prendre selon leurs lois internes les mesures de protection nécessaires.

C’est la consécration de la jurisprudence BOLL. C’est dans un but d’efficacité. Les autorités locales sont les plus proches du mineur. Il y a connaissance des besoins, des mesures appropriées, de qui s’occupera le mieux du mineur.

 

Le critère est celui de la résidence habituelle et non celui du domicile. La notion de domicile a été abandonnée car le domicile est une notion de droit qui s’agissant des mineurs est fixé par la loi d’une manière qui varie selon les pays. L’inconvénient de la résidence habituelle est qu’on en change plus facilement que de domicile. Dans le domicile il y a une intention d’y demeurer et un esprit de retour mais la résidence habituelle est plus concrète.

b. Les autorités concurrentes des autorités de la résidence habituelle du mineur et de la loi nationale du mineur.

 

L’Etat national du mineur ne perd pas tout rôle. Nonobstant l’article 1, l’article 4permet aux autorités nationales de l’Etat d’intervenir à une double condition.

–          Il faut que l’intérêt du mineur l’exige.

–          Que les autorités nationales avisent préalablement les autorités de l’Etat résidence habituelle. A ce moment-là les autorités nationales prennent le dessus, il n’y a donc pas de rupture avec le système de la loi nationale.

c. Dialectique.

 

Selon l’article 8, nonobstant l’application des articles 3 et 4, les autorités résidence habituelle peuvent prendre des mesures de protection pour autant que le mineur soit menacé d’un danger sérieux dans sa personne ou ses biens.

d. La compétence au titre de l’urgence.

 

Compétence au titre de l’urgence (article 9), compétence de toutes les autorités du territoire ou se trouve le mineur ou des biens qui lui appartienne. (Exemple : cas de mineur en fugue). Les mesures cessent aussitôt que les autorités compétentes en fonction de la convention de 1961 auront pris les mesures exigées par la situation.

e. Mesures particulières : la garde ou le droit de visite après le divorce.

 

Quand il y a divorce, l’attribution de plein droit de la garde est inconcevable et par conséquent l’intervention d’un juge est nécessaire. La convention de 1902permettait de réserver la compétence au for du divorce. La France a originairement fait usage de cette réserve puis l’a abandonné en 1984.

 

Les problèmes de garde après divorce sont donc soumis depuis le 18 avril 1984 à l’application de la Convention de 1961selon les conditions d’application de celle-ci.

 

Les tribunaux français saisis d’un divorce international ne sont pas nécessairement compétents pour statuer sur la garde et le droit de visite. Ils ne le seront qu’en cas de coïncidence entre la loi en matière de divorce et celle de la loi pour les mesures à prendre.

Si le tribunal français est compétent selon les articles 14 et 15 du Code civil, l’enfant aura la nationalité française et le tribunal compétent le sera selon l’article 4 de la convention de La Haye.

Si tribunaux français sont saisis selon l’article 1070 du NCPC : En matière de divorce en droit interne, l’article 1070 donne compétence au tribunal du lieu de résidence de la famille ou à défaut, à celui de l’époux avec l’enfant mineur ou à défaut au tribunal du domicile du défendeur.

Si le tribunal français en matière internationale est saisi d’un divorce, et compétent en matière de divorce selon l’article 1070, la compétence du tribunal coïncide avec l’article 1 de la convention de 1961, donc compétence du tribunal français.

Il existe des situations ou cette coïncidence n’est pas assurée (plusieurs enfants dans plusieurs Etats) il y aura une pluralité de tribunaux compétents.

 

3. La reconnaissance des mesures prises

 

Attribution de compétence par la convention de 1973. Le but est la reconnaissance des mesures prises par les autorités.

Pour éviter la situation BOLL, les mesures prises par les autorités compétentes selon les articles 1 à 6 sont reconnues dans tous les Etats contractants.

Ça ne vaut pas pour les mesures prises au titre de l’urgence (article 8)car elles ont un caractère provisoire. Ce caractère se manifeste surtout dans l’hypothèse de l’enfant déplacé après que des mesures aient été prises.

 

Quand les mesures sont prises par l’Etat de la résidence habituelle (article 1) et que l’enfant change de résidence habituelle, les mesures demeurent aussi longtemps que les autorités de la nouvelle résidence habituelle n’en auront pas pris d’autres.

 

Si les mesures sont prises par les autorités de l’Etat national il importe peu que la résidence habituelle change, les mesures demeurent applicables.

4. Le bilan de la convention de 1961.

 

La convention n’a pas apporté la satisfaction qu’on attendait. Le mal vient de ce que l’on a introduit la compétence de l’autorité de l’Etat de résidence habituelle alors que la convention n’a pas voulu rompre avec la compétence des Etats nationaux.

 

Il en a résulté des heurts entre la loi de la résidence habituelle et la loi nationale. L’article 1vise la résidence habituelle et l’article 4 vise la loi nationale. L’article 4 est utilisé pour prendre le dessus sur la résidence habituelle et par conséquent les autorités de la résidence habituelle sont obligées de prendre des mesures sur le fondement de l’urgence pour pouvoir reprendre le dessus.

Difficulté de multiplier les rapports de plein droit (ex lège) et les mesures de protection (situations dans laquelle la protection du mineur vient d’une intervention législative).

 

Difficulté plus épineuse liée au maintien de la compétence de la loi nationale car il y a des situations ou les enfants naissent de parents de nationalités différentes. Ainsi l’enfant à une double nationalité. Il est considéré comme national de deux Etats différents et chacun veut prétendre sa compétence.

On arrive à une situation de blocage. Solution : l’Etat qui a  le dernier mot est celui où se trouve l’enfant, donc danger qu’un parent enlève l’enfant.

 

Il y a une nécessité de parachever l’évolution de la convention de 1961 par rapport à celle de 1902.

–          Convention de 1902 : le tout est soumis à la nationalité.

–          Convention de 1961 : panachage entre loi nationale et loi de l’Etat de la résidence habituelle.

–          Convention de 1996 : le tout est soumis à la résidence habituelle

 

C. La convention de 1996.

 

Les Etats membres de l’Union européenne l’ont signé le 1er avril 2003 mais il reste à la ratifier.

L’Article 52-3 de la convention de 1996,à la demande de l’Union Européenne organise une clause de déconnexion ce qui permet à des Etats contractants de la convention de La Haye de conclure des accords sur des matières qui prévaudront sur les textes généraux.

Idée avec la préparation de la convention de Bruxelles II sur la compétence des tribunaux et la reconnaissance des décisions en matière de divorce et de responsabilité parentale qui a vu le jour.

 

La convention de Bruxelles IIa été remplacée le 27 novembre 2003 par un autre règlement le règlement du Conseil (2201/2003 : compétence reconnue et exécution des décisions en matière matrimoniale et reconnaissance de l’autorité parentale (en vigueur le 1er août 2004 et destiné à s’appliquer à compter du 1er mars 2005).

 

La convention de 1996 et le règlement ne se superposent pas. Le règlement est relatif au conflit de juridiction et ne traite pas de la loi applicable. La convention fait les deux.

Les dispositions du règlement l’emportent lorsque l’enfant réside sur le territoire d’un Etat membre.

 1. Le champ d’application de la Convention de 1996.

 

Elle s’applique aux enfants à partir de leur naissance jusqu’à l’âge de 18 ans.

Pour les adultes il y a eu une autre convention en 1999.

 

L’objectif de la Conventionpour les mineurs résulte de l’article 1 : compétence de la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et des mesures de protection des enfants.

Les mesures de protection sont comprises de la manière la plus large. Les questions non couvertes sont l’adoption et les obligations alimentaires, elles font l’objet d’autres conventions.

2. Compétence pour prendre une mesure.

 

La convention de 1996rompt avec la convention de 1961 mais a quand même des dérogations mesurées.

a. Compétence de principe.

 

Compétence sous l’angle de conflits des autorités. Le principe est la compétence de l’Etat de résidence habituelle du mineur prend des mesures selon la loi interne. La compétence des autorités nationales en tant que principe a été abandonnée.

 

En cas de changement de résidence, c’est à dire de déplacement licite, la compétence revient aux autorités de la nouvelle résidence. Cependant, quand une mesure a été prise par l’ancien pays de la résidence habituelle, elle continue de s’appliquer mais l’Etat de la nouvelle résidence habituelle régit les conditions d’application.

Exemple : le gardien désigné à l’ancienne résidence habituelle le reste mais peut être que là ou avant il n’y avait pas besoin d’un accord pour que le gardien prenne une mesure, maintenant il en aura besoin.

 

Selon le règlement Européen et son article 9-1, les juridictions de l’ancienne résidence, en cas de déplacement, conservent leur compétence pendant trois mois à compter du déménagement pour modifier une décision concernant le droit de visite rendu dans cet Etat avant le déménagement lorsque le titulaire du droit de visite continue à résider dans l’Etat d’origine.

 

La Convention de 1996 a une alternative à la compétence de principe. La compétence d’urgence reconnue aux autorités de l’Etat ou se trouve l’enfant ou des biens appartenant à l’enfant.

Dans l’hypothèse du déplacement illicite de l’enfant (enlèvement) ou hypothèse de son non-retour quand déplacement licite après autorisation.

Convention de La Haye du 25 octobre 1980sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant : Le principe c’est d’organiser le retour le plus rapide possible de l’enfant dans l’Etat duquel il a été déplacé irrégulièrement.

Article 50 de la Convention de 1996 dit que ça n’affecte pas la convention de 1980 quand l’Etat est partie aux mêmes conventions.

 

Que faire quand un enfant résidant habituellement dans un Etat contractant est retenu dans un autre Etat ?

Il ne faut pas encourager le coup de force et entériner la compétence des autorités de l’Etat où l’enfant a été amené.

 

Il arrive que l’on ne puisse pas faire revenir l’enfant. On est alors obligé de prendre acte que l’environnement de l’enfant est celui de l’Etat où il se trouve.

Il faut comparer avec ces deux considérations.

Les autorités de l’Etat où l’enfant avait sa résidence habituelle conservent en principe leur compétence pour prendre des mesures jusqu’au moment où l’enfant acquiert une résidence habituelle dans un autre Etat.

Dans quel cas va-t-on considérer que l’enfant déplacé de façon illicite a une nouvelle résidence habituelle ?

–          Soit que la personne ayant autorité sur l’enfant a acquiescé au départ.

–          Soit que l’enfant ait résidé au moins un an dans l’autre Etat après que le titulaire du droit de garde ait eu connaissance du lieu où se trouve l’enfant et qu’aucune demande de retour n’ai été faite tandis que l’enfant s’est intégré dans son milieu.

 

Il y a un siècle, la protection du mineur par la loi nationale ne posait pas de problème même s’il y avait des problèmes d’application à distance si l’enfant se trouvait à l’étranger. Ce problème a été illustré par l’affaire BOLL.

La convention de 1961 avec les articles 1 et 2 dispose que ce sont les autorités de la résidence habituelle qui sont compétentes mais on ne renonce pas à la loi nationale.

Il y a un va et vient entre les deux (loi nationale et loi de résidence habituelle). Des problèmes se posent si l’enfant a la double nationalité.

Du coup pour régler tous les problèmes, la convention de 1996 donne compétence de principe aux autorités de la résidence habituelle.

 

Sur le statut des incapables. Il s’agit de déterminer si une personne est capable ou non, on fait jouer le statut personnel. Seulement, il faut voir pour sa protection et cela nécessite des mesures.

La protection des mineurs : si le mineur se trouve en pays étranger, il fait faire fonctionner une protection  distance. Affaire BOLL. Convention de 1961. La grande innovation s’est de s’intéresser à la compétence des autorités et de poser que quand il y a des mesures à prendre ce sont les autorités locales qui agissent selon leur propre loi. Le problème c’est qu’on n’a pas renoncé à la loi nationale du mineur. Donc les autorités nationales peuvent agir. La convention dit que s’il y a un danger sérieux, ce sont les autorités de la résidence habituelles qui agissent.

Dans la mesure où la plupart des enfants concernés ont deux nationalités, deux états peuvent revendiquer leur compétence. Cela amène à des situations de blocages.

D’où la convention de 1996 qui parachève l’évolution en donnant compétence de principe aux autorités de la résidence habituelle.

 

La convention de 1996 ne peut pas s’empêcher de prévoir des dérogations :

b. Les dérogations possibles.

 

Ø       Les transferts de compétence

 

Possibilité de transférer la compétence à un Etat étroitement concerné par l’enfant.Cela veut dire d’abord que l’autorité de la résidence habituelle de l’enfant peut demander à une autre autorité de l’Etat contractant d’accepter la compétence pour prendre les mesures nécessaires si l’autorité de la résidence habituelle considère que ceci est dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

 

Le texte de l’article 8 précise quels sont ces états : par exemple c’est un état dont l’enfant a la nationalité.

L’article 8cite également un Etat où l’enfant possède des biens, un Etat saisi d’une demande en divorce entre les parents et puis un Etat avec lequel l’enfant présente un lien étroit. L’autorité requise peut refuser ou accepter ce transfert de compétence en fonction de sa propre appréciation.

A l’usage on ne sait pas si cette disposition sera fréquemment invoquée.

 

Inversement selon l’article 9, l’un de ces Etats qui vient d’être cité à l’article 8 peut demander, aux mêmes conditions, que la compétence normale lui soit transférée. Ici apparaît la hiérarchie des compétences. Le transfert ne se fera que sur accord avec les autorités de l’Etat de la résidence habituelle. Si l’autorité requise ne réagit pas, le transfert de compétence n’a pas lieu.

Le règlement communautaire 2003prévoit un régime analogue (article 15 : Renvoi à une juridiction mieux placée pour connaître de l’affaire).

 

Ø       En cas de procédure de divorce

 

L’article 10reconnaît la compétence possible du for du divorce s’il n’est pas celui de la résidence habituelle de l’enfant. L’article 10 prévoit la compétence du for du divorce si sa loi le permet mais avec deux séries de conditions :

 

–          Il faut d’abord que l’un des parents au moins ait sa résidence habituelle dans l’état du for et que l’un des parents ait la responsabilité parentale à l’égard de l’enfant. Attention il n’est pas nécessaire que ce soit le même parent.

 

–          Il faut que la compétence du for du divorce ait été acceptée par les deux parents et cela sous réserve de l’appréciation du tribunal selon laquelle la compétence du for du divorce est dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

 

La 1ère série de conditions sera fréquemment remplie. Ce qui sera plus dur c’est l’accord des deux parents et puis à cela s’ajoute l’appréciation du tribunal.

 

Pour illustrer ça, quelle serait l’appréciation du tribunal ?Ce que devra faire le tribunal ça sera de regarder où les mesures qu’il prendrait vont être destinées à s’appliquer.

Selon la convention, les autres Etats contractants seront obligés de reconnaître ces mesures. Seulement, la compétence du for du divorce cesse aussitôt qu’une décision a été rendue, ce qui veut dire qu’après un certain temps, on pourra demander à l’autorité de la résidence habituelle de l’enfant d’exercer sa compétence normale selon la convention, il faudra pour cela invoquer un changement de circonstance, un changement d’intérêt de l’enfant par exemple.

 

L’article 10réserve la compétence des articles 5 à 10. Ce sont la compétence de principe de l’article 5 et la compétence selon transfert des articles 8 et 9. Cela veut dire qu’il faut tenir compte de la situation pendant la procédure du divorce. Il n’est pas exclu que pendant cette procédure des mesures soient nécessaires et que les autorités compétentes selon l’article 5 prennent des mesures.

 

C’est l’article 13 qui invite les autorités d’un Etat à s’abstenir de statuer si des mesures correspondantes ont déjà été sollicitées des autorités d’un autre Etat contractant alors compétent. Ex : les conditions de l’article 10 étant remplies, un tribunal français est compétent pour statuer à l’issue du divorce sur l’autorité parentale. Or dans le début de la procédure le juge français a été sollicité. En vertu de l’article 13, les autorités de la résidence habituelle devraient s’abstenir d’intervenir.

 

 

Ø       Dispositions relatives à l’urgence

 

Dans ce cas les autorités de l’Etat où se trouve l’enfant ou d’un Etat où il possède des biens peuvent prendre des mesures d’urgence = article 11. Ces mesures cessent aussitôt que les autorités compétentes d’un autre état contractant, en particulier celles de l’article 5, ont pris les mesures exigées par la situation.

 

Donc la convention de 1996 fait un grand effort pour mettre fin aux conflits d’autorités en donnant compétence de principe aux autorités de la résidence habituelle mais cela n’empêche pas certaines dérogations.

3. La loi applicable.

a. Responsabilité parentale de plein droit.

 

Un enfant ne fait pas systématiquement l’objet de protection de la part de l’autorité publique. Donc dans le plus grand nombre de cas une responsabilité parentale s’exerce sur l’enfant de plein droit. La convention 1996 pose une règle de conflit selon laquelle l’attribution ou l’extinction de plein droit de l’autorité parentale est régie par la loi de la résidence habituelle. C’est une innovation très importante pour des pays comme la France.

 

Qui dit résidence habituelle dit « se soucier du conflit mobile » car on change souvent de résidence. En principe on s’interroge de savoir si on continue d’appliquer la loi ancienne ou bien si on applique immédiatement la loi nouvelle ? La convention ne se prononce pas. Elle règle des situations concrètes.

 

1ère situation : la loi de l’ancienne résidence habituelle prévoyait une responsabilité parentale de plein droit et la loi nouvelle n’en prévoit pas. Dans ce cas, dit l’article 16-3, le titulaire de l’ancienne responsabilité parentale conserve celle-ci dans l’Etat de la nouvelle résidence.

 

2ème situation (inverse à la 1ère): la loi ancienne n’attribuait pas de responsabilité de plein droit mais la loi nouvelle en attribue une. Dans ce cas la loi nouvelle reçoit effet = article 16-4.

 

3ème situation : l’ancienne loi attribue une responsabilité de plein droit et la loi de la nouvelle résidence aussi mais non à la même personne. Il faudra adapter le jeu des deux responsabilités parentales. Mais il y a l’article 17 qui énonce que l’exercice de la responsabilité parentale est régie par la loi de la résidence habituelle sous entendue actuelle.

b. Quand des mesures doivent être prises.

 

Quand des mesures doivent être prises, toutes les autorités saisies statuent selon leur propre loi. Le but depuis l’affaire BOLL c’est que les autorités n’aient pas à appliquer une loi étrangère.

 

Le principe est assorti d’exception (article 15-1) : dans la mesure où la protection de l’enfant le requiert, l’autorité saisie peut exceptionnellement appliquer la loi d’un autre Etat avec lequel la situation présente un lien étroit.

Si, compte tenu des éléments de faits, on sait que dans un avenir prévisible la résidence habituelle de l’enfant va être déplacée dans un autre pays (par ex ses parents sont des expatriés et on sait qu’ils vont devoir revenir dans leur pays d’origine) Aussi si on sait que la mesure est nécessairement destinée à s’appliquer dans un autre pays, ex : il s’agit de vendre un immeuble appartenant au mineur, immeuble situé dans un autre pays dont il n’est pas forcément mauvais de prendre en considération la loi de cet autre pays.

Lorsque les autorités ont pris des mesures et que la résidence habituelle de l’enfant change, il ne faut pas que ces mesures tombent automatiquement. Si la situation est stable elle n’a pas à être modifiée. C’est ce que la convention précise implicitement : «  la loi de la nouvelle résidence régit les conditions d’application des mesures prises ».

4. Reconnaissance des décisions.

 

Ces conventions ont été posées par des litiges sérieux dans lesquels aucun Etat ne décide de céder. Entre Etats contractants les mesures prises de plein droit sont reconnues dans les autres Etats, c’est l’objet de la convention. Seulement la convention prévoit des motifs de refus. Les motifs de non reconnaissance doivent être les plus restreints possibles car on est dans le domaine conventionnel.

 

Il y a d’abord comme motif le défaut de compétence indirecte de l’autorité : quand un tribunal exerce sa compétence il exerce sa compétence directe. Quand on invoque sa décision dans un autre Etat, le juge va regarder si le 1er juge était compétent, c’est la compétence indirecte. Donc le juge peut vérifier si l’état d’origine était compétent au regard de la convention.

 

Le 2ème motif c’est l’absence d’audition de l’enfant dans le cas où elle était possible compte tenu de l’âge de l’enfant et de sa présence.

 

Le 3ème motif est l’absence d’audition d’une personne prétendant qu’une mesure prise porte atteinte à son autorité parentale.

 

4ème motif : la possibilité de refus pour contrariété manifeste à l’ordre public compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant.

 

5ème et dernier motif : la contrariété de décision avec une mesure prise ultérieurement dans un Etat non contractant et remplissant les conditions nécessaires à se reconnaissance dans l’état requis. Cette convention est multi latérale. Il n’y a pas que les états contractants, il y a les états extérieurs qui peuvent être impliqués. Si une décision a été prise il y a trois ans dans un état contractant puis 3 ans après une décision a été prise dans un état non contractant, on va examiner la décision la plus récente selon le droit commun et non selon la convention. Il se peut que la décision satisfasse l’autorité de l’état requis. On a le droit dans ce cas de donner la préférence à la décision non conventionnelle.

5. Coopération entre les états contractants.

 

Rien n’est efficace si on ne s’assure pas une coopération. Les conventions de La Haye ont organisé un système d’autorité centrale. Dans chaque Etat contractant on décide d’une autorité centrale qui est chargée de communiquer avec les autres autorités centrales des autres états. Communication sur le contenu de la législation, communication sur les services disponibles dans les pays, communication sur la situation particulière d’un enfant déterminée, coopération pour rechercher un enfant qui est en fugue.

 

Voir www.hcch.com pour le texte des conventions.

 

D. La convention de La Haye du 13 janvier 2000 sur la protection international des adultes.

 

Cette convention est apparue en raison de plusieurs facteurs : l’allongement de la vie et une internationalisation croissante des situations. Pourquoi ? Car avec les migrations, il est plus fréquent que des personnes possèdent des biens dans des pays différents et dans les pays développés des personnes préfèrent s’installer dans les pays plus chauds.

 

On aurait pu étendre le champ d’application de la convention à l’enfant. Mais en fait il y a une spécificité s’agissant des adultes. Quand il s’agit d’enfant, l’essentiel est la protection de la personne. Et puis les problèmes les plus fréquents tiennent aux conflits entre les parents, tandis que l’enfant possède rarement des biens. Quand il s’agit d’adulte, ils possèdent toujours des biens et puis le problème est de trouver une personne s’occupant de l’adulte.

Donc on a estimé qu’il fallait élargir les saisines d’autorités.

S’ajoute à cela un autre élément. L’adulte aurait pu songer à organiser sa propre protection pour le jour où il n’aurait plus ses  facultés, ce qui permet de faire une certaine place à l’autonomie de la volonté.

1. Le champ d’application de la convention.

 

En raison d’une altération ou d’une insuffisance de leur faculté personnelle, ces personnes ne sont pas en état de pourvoir à leur intérêt. L’âge minimum est de 18 ans.

Lorsque des mesures auront été prises pendant la minorité, elles pourront continuer à s’appliquer après la majorité dès lors qu’elles remplissent les conditions de reconnaissance de la convention « adulte ».

Du point de vue matériel, les mesures sont celles qu’on trouve dans tous les droits nationaux concernant la protection d’un adulte ou de ses biens (pour nous c’est la curatelle, la tutelle).

2. Compétence des autorités.

 

Le système est  mi-chemin entre compétence concurrente (convention de 91) et les compétences hiérarchisées (convention de 96)

a. Compétence principale.

 

La compétence principale appartient aux autorités de la résidence habituelle. La convention prévoit un système de transfert de compétence à sens unique : des autorités de la résidence habituelle aux autorités d’un autre état. Sauf que le transfert peut se faire vers un Etat sur le territoire duquel se trouve une personne disposée à assumer la protection de l’adulte ou encore un Etat dont les autorités ont été choisies par l’adulte pour prendre des mesures tendant à sa protection.

b. Compétences concurrentes.

 

Selon l’article 7 il y a la compétence de l’autorité nationale de l’adulte.Cette compétence peut être exercée après avoir informé les autorités de la résidence habituelle (d’où l’importance de la coopération). Et aussi cette compétence ne peut être exercée si les autorités de la résidence habituelle ont fait savoir qu’elles prenaient les dispositions nécessaires ou si elles ont décidé qu’il n’y avait pas lieu de prendre des mesures.

Les mesures de ces autorités nationales cessent d’avoir effet dès que les autorités de la résidence habituelle auront statué sur la protection de l’adulte.

 

Est aussi prévue la compétence concurrente de l’autorité de la situation des biens = article 9. Ces autorités ont compétence pour prendre des mesures mais elles doivent veiller à la compatibilité des mesures qu’elles prennent avec celles prises par les autorités compétentes selon les articles 5 à 8.

 

Est également prévue une compétence d’urgence des autorités de l’Etat sur lequel se trouve l’adulte = article 10.

c. Une compétence originale : la compétence en matière médicale du fait de la présence de l’adulte : article 11.

 

Un adulte a besoin de soins. Il se trouve dans un Etat autre que celui de sa résidence habituelle (normalement compétent) pour être examiné dans un établissement spécialisé. S’il est décidé sur place de prendre un traitement il faudrait théoriquement en référer aux autorités de la résidence habituelle. Aussi l’article 11 permet à l’Etat où se trouve l’adulte de prendre les mesures concernant la protection de sa personne (médicales) ayant un caractère temporaire.

Donc s’il s’agit de mesures lourdes et permanentes, il faudra obtenir l’autorisation des autorités de la résidence habituelles.

 

3. La loi applicable.

a. La règle générale.

 

La compétence législative suit la compétence des autorités. Donc toute autorité habilitée à agir applique sa loi avec clause d’exception (lien étroit avec une autre loi).

b. Le mandat d’inaptitude : une originalité.

 

Régit par les articles 15 et 16. C’est une institution empruntée à certains droits nationaux. Il s’agit de pouvoirs de représentation conférés par un adulte pour être exercés lorsque l’adulte sera hors d’état de pourvoir à ses intérêts. L’originalité est que dans beaucoup de droits un mandat tombe quand une personne cesse d’être capable. Ici c’est l’inverse.

 

Le mandat peut être conféré par accord avec le mandataire, il peut être unilatéral, il peut porter aussi bien sur la gestion des biens que sur les mesures concernant la personne.

Le mandat est destiné à prendre effet quand le mandant ne peut plus veiller à ses affaires et cela doit être constaté par l’autorité judiciaire.

 

La loi applicable à ce mandat c’est la loi de la résidence habituelle de l’adulte au moment où le mandat est donné. Seulement il se peut que la loi de la résidence habituelle de l’adulte ne connaisse pas un tel mandat. Mais comme on est dans une hypothèse internationale, on peut choisir la loi applicable. Donc celui qui dresse ce mandat peut désigner la loi d’un Etat dont il possède la nationalité. L’intéressé peut même désigner la loi d’une ancienne résidence habituelle et il peut aussi désigner l’état de situation de ses biens.

En revanche si la loi de la résidence habituelle ne connaît pas cette institution ni aucune des autres lois, le mandat ne conférera aucun pouvoir, il faut pouvoir s’appuyer sur une de ces lois.

En outre, la loi choisie doit l’être par écrit.

 

Si un mandat a été régulièrement dressé, la loi désignée s’applique à la représentation de l’adulte. Il fallait se soucier du cas où les pouvoirs sont exercés d’une manière incorrecte et où la loi applicable ne présente pas de dispositions permettant de soulever la carence de mandataire. Donc la convention a introduit une règle matérielle selon laquelle la loi compétente peut retirer ou modifier les pouvoirs quand ils ne sont pas exercés d’une manière à assurer suffisamment la protection de l’adulte.

 

SECTION 2: L’UNION des personnes.

 

C’est un terrain privilégié des conflits de lois. Il y a deux raisons générales :

La diversité des lois internes : Il y a 30 ans il y avait encore des divergences importantes entre les pays occidentaux. Aujourd’hui les divergences portent surtout sur le mariage homo. On cible aussi le mariage polygamique et la répudiation.

 

La pluralité de lois personnelles applicables à un lien unique. On vise ici les mariages entre personnes de nationalités différentes, ou la recherche de paternité, ou l’adoption internationale et au sein de la famille aujourd’hui dans beaucoup de pays le mariage n’emporte plus de plein droit aucune conséquence sur la nationalité. Tout ceci lié aux migrations internationales, fait que les conflits de lois sont importants.

 

Sous Préliminaire :

On distingue le concubinage et les partenariats enregistrés.

 

I. L’union libre.

 

Ce phénomène social s’est bien développé avec le recul relatif du mariage. Etant donné la mobilité des personnes, la situation présente souvent un caractère international. Les concubins peuvent être de nationalités différentes ou ils ont la même nationalité mais vivent à l’étranger.

 

Le concubinage en France :En France le concubinage ne fait pas l’objet d’un statut. Il a été pris en compte par le droit social et par le biais du Pacs, le concubinage a fait l’objet d’une définition dans le Code civil dans l’article 515-8. Le concubinage est une union de fait. Ce n’est pas une union institutionnalisée.

 

Du point de vue des conflits de lois, le concubinage ne constitue pas une qualification propre. (C’est le 1er élément d’une règle de conflit). Par conséquent les questions susceptibles de se présenter vont relever d’une catégorie reconnue selon la nature de la question. Par ex s’il y a eu une convention entre les concubins et qu’un conflit s’élève on appliquera la règle de conflit pour les contrats. Si l’un deux décède, on appliquera la règle de conflit prévue pour les successions. S’il s’agit de responsabilité civile, on applique la règle de conflit prévue pour les délits.

 

La Jurisprudence est rare mais le plus souvent c’est la loi du domicile qui s’appliquera. Par ex, si c’est un problème de succession mobilière : on applique la loi du domicile du défunt. Mais quand il s’agit de relations personnelles, si les concubins sont de même nationalité, il serait envisageable d’appliquer la loi nationale commune en tant que loi des liens les plus étroits. Pour la théorie une autre approche serait d’élever le concubinage en catégorie de rattachement. Ça serait une qualification retenue pour donner naissance à une règle de conflit.

 

Mais aujourd’hui, la question est celle des partenariats organisés.

 

II. Les partenariats organisés.

 

Un certain nombre d’Etats, dont la France avec le PACS, ont introduit une réglementation de l’union libre qui fait produire à certaines unions des effets personnels et des effets patrimoniaux plus ou moins étendus. L’examen de ces législations fait ressortir qu’elles se divisent en deux groupes.

 

Selon certaines législations (qu’on trouve en Europe du nord et dans des Etats d’Amérique du nord) le partenariat organisé apparaît comme un véritable mariage : Il est réservé aux couples homosexuels et il comporte certaines restrictions par rapport au mariage lui-même tel que le refus de l’adoption conjointe ou le refus de la procréation médicalement assistée (quand il s’agit de femmes évidemment). On appliquera en principe à l’union les règles de Droit international privé prévue pour les mariages.

 

Mais d’autres droits, comme le droit Français, distinguent le partenariat organisé du mariage : cela donne naissance à une institution nouvelle. Dès lors que cette institution nouvelle présente un élément international, elle constitue une catégorie, il faut l’assortir d’un rattachement pour dire quelle loi est à appliquer.

 

Comment s’analyse en droit Français le Pacs ?

 

On pourrait y voir une forme contractuelle.L’article 515-1 du code civ définit le Pacs comme un contrat conclu entre deux personnes pour organiser leur vie commune. Autre aspect du Pacs Français : le pacs est résiliable unilatéralement comme l’est un contrat à durée indéterminée. Donc on rechercherait la loi applicable et à défaut, les liens les plus étroits.

 

En fait la possibilité de souscrire un pacs est régie par la loi personnelle : Le pacs est en fait une union de deux personnes. Puisque la finalité du Pacs c’est l’organisation d’une vie commune, cela inciterait à voir dans le pacs une sous-catégorie de statut personnel. Toujours dans le même sens, les dispositions relatives au pacs sont dans le titre « pacs » et non dans la partie des  « contrats ».

Sont prévues des interdictions relatives à l’inceste et des interdictions liées au mariage. Ce sont là des relations personnelles dont il s’agit.

L’article 513-3confie l’inscription de déclaration de pacs à l’étranger impliquant au moins un français aux agents Diplomatiques et consulaires. Donc leur attribution est la même qu’en matière d’état civil.

On en conclut que la possibilité de souscrire un pacs est régie par la loi personnelle.Donc deux Français peuvent conclure un Pacs où qu’ils se trouvent. Un français peut conclure un pacs avec un étranger si la loi personnelle de l’étranger le permet.

Enfin s’il s’agit de deux étrangers, ils ne pourront conclure un pacs en France que si leur loi personnelle prévoit une institution analogue.

 

Pour les cas des étrangers qui concluent un pacs en France : sont autorisés à conclure un pacs les étrangers résidant en France : l’article 515-3 donne compétence pour enregistrer un pacs au tribunal d’instance du lieu où les partenaires fixent leur résidence commune. On peut lire cette disposition comme autorisant toute personne autorisée à résider en France à souscrire un Pacs sans que l’on se heurte à des objections tirées de leur loi personnelle. Le seul risque que prendrait ces personnes c’est que d’abord ce pacs français ne soit pas reconnu dans leur état national voire que ce pacs Français soit remis en cause en France même par l’un deux ou par un tiers intéressé au motif qu’il contrevient  la loi personnelle de l’un ou des deux intéressés.

En matière de mariage il faut savoir que quand des étrangers veulent conclure un mariage en France, l’officier doit les interroger sur leur statut personnel pour savoir s’ils peuvent se marier selon cette loi personnelle. Ici, avec le pacs, il n’y a rien de semblable. Le pacs a été introduit comme si la France était seule au monde…

Il semble que dans l’état actuel on enregistre sans rien demander en matière de pacs.

 

III. La reconnaissance des partenariats étrangers.

 

C’est l’hypo d’une union célébrée à l’étranger et l’une des parties demande que la France en tire les effets. Donc on regarde en présence de quoi on se trouve.

 

S’il s’agit d’une union qui se veut être un mariage : on refuse de reconnaître l’union si elle implique un français car selon la loi française on ne peut se marier avec une personne de même sexe.

Si la loi étrangère autorise ce mariage homo on va voir si l’Ordre Public français s’oppose ou non à la reconnaissance de l’union (ordre public atténué).

 

Si l’union est de type Pacs et ne se veut pas être un vrai mariage : Ici la validité de l’union produira ses effets en France sous réserve que la loi personnelle étrangère ait permis la conclusion de ce partenariat.

 

 

 

SOUS-SECTION 1: LA formation du mariage.

 

Ca soulève un problème de qualification.

Déjà le problème de qualification se pose au sujet des fiançailles. Les fiançailles peuvent être considérées comme un vrai acte juridique.

Dans certaines législationsl’existence des fiançailles empêchait le mariage avec un tiers. De même la rupture de fiançailles donnait lieu à réparation. C’est donc le signe d’un vrai acte juridique.

 

En France les fiançailles n’ont jamais eu d’effet obligatoire. Le seul effet juridique était la possibilité d’une indemnisation en cas de rupture abusive.

 

En Droit international privé, on hésite entre qualification délictuelle pour la rupture ou la qualification contractuelle. Les droits étrangers qui y voient un acte juridique suivront cette qualification contractuelle sauf à y voir un acte personnel.

En France ce n’est pas le cas, la Jurisprudence a considéré qu’on était en matière délictuelle. Si on considère que c’est la loi du dommage qui s’applique, on appliquera la loi du domicile de la victime.

 

S’agissant du mariage : il résulte d’un accord de volontés.

 

I. Les conditions de fond.

 

Il s’agit de savoir si une personne peut contracter mariage. Il faut déterminer les empêchements qui pourraient s’y opposer ou les conditions applicables au consentement. Etant donné que c’est une question  personnelle, le droit français la soumet à la loi nationale respective des futurs époux.

 

A. Compétence de la loi personnelle des époux.

1. Le principe et sa mise en œuvre.

 

Le mariage des français en France et le mariage des étrangers en France : article 3 al 3 du Code civil. Le mariage c’est une question d’état des personnes. Donc il ne fait aucun doute que le mariage des français est régit pas la loi française et la règle ayant été bilatéralisée, le mariage des étrangers est régit par leur loi nationale. En 1993 : un franco algérien contracte en Algérie un autre mariage, sans dissolution du 1er mariage en France, donc le 2ème mariage est nul car contraire à la loi Française.

 

Quand on en dans le cas de bi nationalités, devant une autorité d’un état dont un des intéressés à la nationalité de cet état : Dans cette hypothèse seule cette nationalité (nationalité de l’état saisi) est prise en considération ou encore dit autrement, un conflit de nationalités mettant en jeu la nationalité de l’autorité saisie est toujours résolue en faveur de cette nationalité.

Cela signifie qu’un binational franco algérien serait considéré comme français en France et algérien en Algérie. Quand la loi attribue la nationalité locale à un individu, les autorités locales sont tenues d’appliquer cette loi.

 

Quand le conflit qui se présente devant une autorité donnée concerne deux nationalités étrangères : par ex devant un juge français s’élève une question de statut personnel pour un individu qui est algérien et tunisien. Le juge français va rechercher quelle est la nationalité la plus effective.

 

Pour revenir à l’aptitude à contracter mariage on parle d’application distributive des lois personnelles.

 

Problème du renvoi de la loi étrangère à la loi française.Il suffit que la loi d’un futur époux étranger désigne la loi du domicile si l’intéressé est domicilié en France ou que la loi étrangère renvoi au lieu de célébration qui serait la France.

On ne doit pas se prononcer de manière générale sur la question générale. Il n’y a pas lieu de dire que le système accepte ou rejette le renvoi. La réponse dépend de la matière en cause et précisément de la politique législative dans cette matière.

En France, en matière de mariage, c’est une politique de faveur au mariage qui domine. Comment cela va-t-il se traduire en terme de renvoi ? Si le renvoi permet de célébrer le mariage car la loi française le permet, tandis que la loi étrangère ne le permettrait pas : dans ce cas il faut accepter le renvoi. Inversement, si la loi personnelle étrangère permet le mariage, tandis que la loi française ne le permettrait pas on s’abstiendra de faire jouer le renvoi pour prononcer le mariage. Il en serait autrement que si la loi étrangère serait trop permissive.

2. Les empêchements bilatéraux.

 

Cette question se présente en cas de différence de nationalité des futurs époux.

En principe, les conditions de mariage dans une loi donnée visent l’aptitude individuelle à contracter mariage. Voilà pourquoi on a dit que l’on appliquait distributivement les deux lois.

 

Mais là où ça se complique c’est que certains empêchements à mariage prévus par une loi donnée, visent ou atteignent la personne de l’autre.Ex : une loi A qui interdit le mariage entre cousins, cette loi A vise les personnes de nationalité A mais si un personne de nationalité A souhaite épouser une personne de nationalité B dont la loi ne connaît pas cet empêchement, la loi de A atteint l’autre personne puisque le lien de parenté existe.

 

Un cas qui s’est présenté plusieurs fois au 20ème siècle était celui des lois qui interdisaient d’épouser une personne divorcée ou qui interdisaient d’épouser des personnes religieuses (lois espagnoles). Ces exemples sont surannés.

On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du 1er= article 147 du Code civil. Ceci interdit à un français de contracter un second mariage. Aussi cela interdit une française, d’épouser un étranger de statut polygame déjà marié. Ceci figurait dans la plupart des ouvrages mais c’est un arrêt de 2002 qui a déclaré cela (24 septembre 2002). Il s’agissait d’une française qui avait épousé en Egypte un Libanais déjà marié. Cette personne d’origine chrétienne s’était convertie à l’islam pour pouvoir contracter ce second mariage. La cour de cassation dit que l’article 147 du Code civ constitue un empêchement bilatéral et absolu.

 

Que faire quand l’empêchement bilatéral est édicté par une loi étrangère et frappe un(e) française ?Si un français divorcé prétend épouser un espagnol : pas possible à l’époque car la loi espagnole interdisait à une personne de se marier avec un divorcé. L’application distributive voudrait qu’on refuse de célébrer le mariage et des décisions anciennes ont effectivement acceptées de donner l’effet à l’empêchement étranger (dans le cas de l’empêchement espagnol). Puis on s’est aperçu que l’empêchement frappe d’une part un national et d’autre part heurte la politique législative de faveur au mariage.

Il y a un conflit entre deux ordres publics (OP étranger qui énonce l’empêchement et Ordre Public français qui ne juge pas bon d’édicter un empêchement de cette nature). L’ordre public français n’a pas à être à la remorque d’un ordre public étranger, ce qui conduit à passer outre un empêchement bilatéral étranger.

Ex, arrêt de 1971 de la cour constitutionnelle allemande. Il s’agissait de savoir si on allait célébrer en Allemagne le mariage d’un allemand divorcé et d’une espagnole. En vertu de la loi fondamentale allemande qui assure la protection fondamentale du mariage par l’Etat, on accepte le mariage. C’est une façon déguisée de dire que la loi étrangère est contraire à l’ordre public du for.

 

B. L’ordre public international.

 

La loi étrangère prévoit un empêchement que connaît le droit français mais selon des modalités différentes. Il faut distinguer selon la permissivité de la loi étrangère et le cas du mariage polygamique.

1. Le cas des lois permissives ou plus strictes.

 

Si l’empêchement est plus exigeant que la loi française, ex : loi étrangère qui fixe un âge du mariage plus élevé que celui prévu par la loi française, ce n’est pas contraire à l’ordre public français sauf si entrave excessive (accord des parents jusqu’à l’âge de 25ans par exemple).

 

S’agissant de l’instruction générale sur l’état civil, c’est une circulaire établit par le Garde des Sceaux à destination des officiers de l’état civil. Cette circulaire indique que « si les intéressés sont capables selon la loi française, et qu’ils persistent dans leur projet de mariage, l’officier peut célébrer le mariage tout en avertissant les intéressés que leur mariage risque de ne pas être reconnu à l’étranger. »

 

Maintenant si la loi étrangère est plus permissive que la loi française : sachant qu’un grand nombre d’empêchements à mariage selon le droit international privé français peuvent faire l’objet de dispense, sachant que tous les empêchements à mariage du droit français ne sont pas sanctionnés par la nullité, que quelques fois la nullité est prescrite rapidement, il semble que les lois étrangères plus permissives que le droit français ne sont pas par principe contraires à l’ordre public.

Par exemple, l’ordre public ne s’applique pas systématiquement à une loi étrangère autorisant le mariage à un âge plus jeune que la loi française.

Ce n’est pas qu’une question physiologique, c’est aussi une question d’aptitude à consentir au mariage, c’est pourquoi une loi étrangère qui permettra le mariage de trop jeunes enfants serait déclarée contraire à l’ordre public.

Autre exemple, empêchement tenant à la parenté ou l’alliance. Il est possible de rencontrer une loi plus permissive. Il faudra distinguer si l’empêchement est surmontable en droit interne par une dispense ou insurmontable car il exprime un minimum étroit (mariage prohibé en ligne directe et en ligne collatérale jusqu’au 2ème degré : entre frère et sœur). Une loi qui ne les prévoirait pas serait contraire à l’ordre public, ces empêchements sont insurmontables.

 

Si dispense impossible, l’empêchement français est appliqué bilatéralement.

Une loi étrangère qui ne prévoirait pas le délai de viduité (pas de mariage dans les 300 jours de la dissolution du premier mariage), cette loi étrangère pourrait être écartée car cet empêchement est peu contraignant alors que la confusion de paternité est un inconvénient sérieux. On peut dire que le délai de viduité est une loi de police.

Depuis 1975, il est prévu de mettre fin à ce délai par un certificat de non grossesse.

 

Dans la plupart des cas, il apparaît que le droit français respecte les lois françaises les plus exigeantes mais seulement si l’empêchement est connu de la loi française et dont les modalités seraient plus sévères.

2. Le mariage polygamique.

 

Ce problème se pose souvent avec le contact de plus en plus fréquent avec les lois islamiques.
Le droit français s’oppose au mariage de toute personne de statut personnel monogamique avec une personne au statut polygamique.

Il y a aussi une opposition au mariage polygamique en France entre deux personnes dont la loi personnelle le permet.

 

Qu’en est-il de la reconnaissance d’un mariage polygamique valablement célébré à l’étranger ? « Valablement » signifie que la loi personnelle des deux époux devait le permettre.

Ici, l’ordre public est susceptible de n’avoir qu’un effet atténué. Dans certaines situations ou l’ordre public français s’opposerait à l’application de la loi étrangère, il ne s’opposerait pas à la reconnaissance en France des effets de cette loi (arrêt RIVIERE).

 

Affaire CHEMOUNI : Chemouni était un israélite tunisien déjà marié qui a contracté en Tunisie un second mariage avec une femme de même statut que lui. Il s’installe en France et abandonne la seconde épouse pour vivre avec la première. L’épouse abandonnée fait une action en aliment. La Cour d’appel la déboute au motif qu’un tribunal français ne peut donner effet à une union polygamique pour des raisons d’OP. La décision est cassée en raison du fait qu’il ne s’agissait que de laisser se dérouler les effets de l’union = effet atténué de l’Ordre Public. La Cour de cassation condamne Chemouni a versé des aliments à la seconde épouse en 1958.

 

Pour échapper au versement des aliments, il forme un nouveau pourvoi en invoquant la nullité de son mariage. Il y a un rejet de sa demande en 1963. Des lors que le second mariage était valable au regard de la loi personnelle des deux époux, la qualité d’épouse légitime de la seconde femme avait été définitivement acquise par un mariage valablement contracté à l’étranger conformément à la loi compétente au fond comme en la forme.

On a là une opposition entre l’effet de plein droit de l’Ordre Public et l’effet atténué qui permet la reconnaissance du mariage à l’étranger.

Le refus de reconnaissance du mariage serait une solution injuste pour la seconde épouse qui a contracté mariage dans un environnement licite. Ce serait injuste de permettre à l’époux de se dégager des charges du mariage.

 

Pour revenir à la solution de l’arrêt de 1963 : Il y a eu reconnaissance de la validité du second mariage parce que la loi personnelle de chaque époux le permet. La solution est conforme au principe selon lequel l’aptitude à contracter mariage s’apprécie selon la loi personnelle de chaque époux. Seulement, on ne tient compte que de la capacité du mari et de la seconde épouse or, si la première femme est de statut personnel monogamique elle se trouve entraînée dans un mariage à trois !!!

Si une française épouse un homme de statut personnel polygamique elle contracte un mariage potentiellement polygamique. Il suffira que le mari contracte un second mariage à l’étranger (car interdit en France) avec une femme de même statut que lui.

 

C’est ici l’affaire BAAZIZ. Une française épouse un homme de nationalité française mais qui à la suite de l’indépendance de l’Algérie avait acquis la nationalité algérienne. Le mari contracte un second mariage avec une algérienne. Au décès du mari la seconde épouse veut faire valoir des droits à une rente. Opposition de la première femme. Il a été conclu à la validité du second mariage mais l’effet demandé (partage de la rente) a été refusé au nom de l’ordre public.

La Cour de cassation maintient le principe selon lequel la validité du second mariage s’apprécie selon le statut personnel, mais elle module les effets au moyen de l’exception d’ordre public.

 

Commentaires : Cette jurisprudence est contestée dans sa manière de procéder car on admet la validité du second mariage. La doctrine a proposé différents moyens d’empêcher cette situation.

 

Le 1er moyenserait de faire intervenir le premier mariage dans l’appréciation de la validité du second. La conception la plus hostile au mariage polygamique estime même que pour être valable, le second mariage doit être valable selon la loi personnelle de chacun des trois intéressés.

Deuxième proposition : on appréciera la possibilité d’un second mariage selon la loi du lieu de célébration du premier. Une française mariée au Maroc avec un marocain à pris le risque de voir son mari contracter un second mariage. En revanche celle qui s’est mariée en France était en droit de compter sur un mariage monogamique. Ce critère est un peu formel. Cela suppose une capacité de réflexion au moment du mariage qui n’existe pas toujours.

Une troisième opinionpropose de consulter la loi à laquelle le premier mariage se rattachait le plus étroitement. Ce n’est pas aussi formel que le lieu de célébration. On regarde la loi des parties, le premier domicile matrimonial.

 

La règle demeure que la validité du second mariage ne s’apprécie qu’au regard de la loi personnelle des deux époux.

La meilleure solution semblerait être la 1ère : faire intervenir la loi personnelle de la 1ère épouse. Cela peut paraître sévère pour la seconde épouse qui n’est pas sensée connaître le 1er mariage mais on peut opposer le mariage putatif.

 

II. Les conditions de forme du mariage.

 

Le mariage obéit à la règle « locus regit actum » mais le mariage n’est pas un simple contrat. C’est un acte qui donne naissance à un statut qui engendre des droits et des obligations précises et qui est appelé à une longue durée. C’est pourquoi selon la quasi-totalité des législations, le mariage n’est pas seulement un acte consensuel. Il y a presque toujours intervention d’une autorité publique. On peut parler de compétence de la loi et de l’autorité locale.

Il y a l’importance de la cérémonie religieuse dans certains pays. Il y a un lien entre la forme et le fond.

A. Compétence de la loi et de l’autorité locale.

 

Pourquoi admet-on que c’est la loi du lieu de célébration qui est compétente ?S’agissant du mariage, la loi du lieu de célébration est la plus accessible aux futurs époux. La 2ème raison est que le mariage est un acte grave donc on peut considérer qu’il est réservé aux autorités locales.

Locus regit actumest une règle bilatérale. La bilatéralité de la règle se trouve consacrée par un texte (article 170 du Code civil). Le mariage contracté à l’étranger entre français et étranger sera valable s’il a été célébré en la forme locale.

La jurisprudence a ainsi été amenée à reconnaître la validité en la forme de mariage de français à l’étranger dans les formes les plus diverses.

Le plus souvent c’est une forme religieuse, mais aussi une forme purement privée, voir même une absence de forme qui existait en common law (mariage par cohabitation).

Inversement un arrêt de 2001 refuse de considérer comme mariée une femme congolaise en constatant que le Code de la famille de la République populaire du Congo exigeait à peine de nullité une célébration qui n’a pas eu lieu.

 

Difficulté de deux ordres :

–          Fraude à loi sur le mariage.

–          Mariage de complaisance en vue de faire une fraude à la loi sur l’immigration.

 

¨ Fraude à la loi. Respect des conditions de fonds.

 

L’article 170 du Code civilvalide les mariages de français(es) à l’étranger à condition que le mariage ait été précédé en France de la publication prévue par la loi française. Cette exigence a soulevé dans le passé la question de sa sanction.

Que faire s’il n’y a pas de publication en France ? La jurisprudence a pris pour critère la fraude à la loi. Si les français n’ont pas procédé à la publication pour échapper à la loi française, le mariage est nul. Si c’est une simple ignorance de leur part, le mariage est valable.

 

Cette jurisprudence est mal fondée car si les intéressés se sont mariés à l’étranger dans le but d’échapper à la loi française c’est qu’il y avait un empêchement. Il suffit d’appliquer la sanction des conditions de fonds prévue. Si l’empêchement ne peut plus être sanctionné car il est prescrit, c’est un contre sens d’annuler le mariage pour défaut de publication.

En 1966, un mariage contracté 20 ans avant en Israël par un français mineur et non autorisé. La Cour d’appel de Paris annule le mariage car la minorité était depuis longtemps prescrite ce qui a évité un divorce à l’intéressé (en effet une nullité l’avantageait beaucoup plus).

La bonne solution c’est de prévoir une nullité facultative laissant au juge le soin d’apprécier s’il faut annuler ou non le mariage.

 

¨ Mariage de complaisance.

 

C’est une conséquence de l’évolution des migrations internationales qui fait surgir la question des mariages contractés par des nationaux avec des étrangers cela afin de faciliter l’acquisition de la nationalité française ou l’acquisition d’une carte de séjour.

 

La loi du 26 novembre 2003 vise l’acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger d’un français. Le délai est passé d’un an à deux ans à compter du mariage si l’étranger justifie d’une résidence en France et à trois ans s’il ne réside pas en France.

 

On est sur le terrain de la fraude à la loi mais c’est différent. Dans l’hypothèse précédente, le mariage était l’objet de la fraude. Dans l’hypothèse du mariage de complaisance, le mariage n’est pas l’objet de la fraude, c’est le moyen de la fraude aux dispositions sur le statut des étrangers.

Le principe est que le mariage doit être annulé pour défaut d’intention matrimoniale.

Il est plus ennuyeux d’annuler un mariage célébré que d’annuler sa célébration.

La Loi du 24 août 1993a pris des mesures pour lutter contre cette pratique en s’opposant à la célébration de mariage dont on a des raisons de douter de la sincérité.

Cela vise aussi bien les mariages en France que les mariages célébrés à l’étranger.

 

 

[ 1ère situation : la loi française connaît un empêchement non connu par la loi française, donc se heurte à une politique législative.

2ème hypo : empêchement connu de la loi française mais qui présente des modalités différentes. On distingue selon que la loi étrangère est plus stricte ou permisse que la loi française.

Nouveauté : 3ème hypo : l’absence dans la loi étrangère d’un empêchement prévu par la loi française. C’est ici qu’il convient de faire passer la polygamie. Idem pour l’identité de sexe. Il faut examiner cette question du point de vue de l’Ordre Public français : il s’oppose certainement à ce que soit célébré en France un mariage homo permis par la loi personnelle des intéressés. Qu’en est-il de la reconnaissance des effets d’un mariage homo entre deux étrangers ? La reconnaissance est contraire à l’Ordre Public Français mais il faut nuance : la reconnaissance des effets personnelle sans doute. En revanche s’il d’agit d’effets purement patrimoniaux, il n’est pas exclu que l’Ordre Public n’est qu’un effet atténué et que l’on accepte de tirer les conséquences sur des biens situés en France de l’existence de cette union. 

Pour revenir aux conditions de forme du mariage.

 

2. Les mariages en France.

 

Autrefois la France prévoyait une condition de séjour. Cette condition a été supprimée par une loi d’octobre 1981. Afin de lutter contre les mariages de complaisance, une loi de 1993 a inséré un certain nombre de dispositions dans le code civil.

L’article 175-1 du Code civilpermet au ministère public de faire opposition au mariage s’il y a un intérêt.

L’article 175-2permet à l’officier de l’état civil de saisir le procureur de la République afin de faire surseoir au mariage lorsque « il existe des indices sérieux laissant présumer que le mariage envisagé est susceptible d’être annulé au titre de l’article 146. » L’article 146 dit qu’il doit y avoir consentement au mariage au risque du défaut de consentement matrimonial. Le sursis est prononcé pour un mois et peut être renouvelé une fois. La décision de sursis peut être contestée devait le TGI qui doit statuer dans les 10 jours.

 

Bilan de la loi : Tout ça n’est pas très efficace car ces textes n’élargissent pas les pouvoirs du MP et de l’officier de l’état civil. Cela a pour intérêt d’attirer l’attention sur ces textes, rien d’autre.

La loi du 26 novembre 2003 a ajouté une disposition selon laquelle l’officier de l’état civil ne pourra en principe publier les bancs et célébrer le mariage qu’après une audition commune des futurs époux ou même après un entretien séparé avec chacun d’eux s’il l’estime nécessaire.

3. Le mariage célébré à l’étranger.

 

3 dispositions sont applicables : article 146-1 qui exige dans tous les cas la présence du conjoint français à peine de nullité.

Ensuite selon l’article 170-1 l’agent diplomatique ou consulaire français chargé de transcrire l’acte, peut surseoir à la transcription et saisir le MP en France lorsqu’il existe des indices sérieux d’une méconnaissance de la loi française. Le MP dispose d’un délai de 6 mois pour demander la nullité du mariage.

Enfin un nouvel article 190-1 prévoit l’annulation du mariage pour fraude à la loi à la demande d’un époux de bonne foi ou du MP, demande formée dans l’année du mariage.

 

B. La compétence éventuelle de l’autorité de la loi étrangère.

 

On se pose cette question car en matière de mariage les exigences de forme ont un lien étroit avec le fond. Le mariage n’est pas un vulgaire contrat. C’est un acte qui engage les personnes, qui a un caractère sacré pour beaucoup comme en témoigne l’importance symbolique de la célébration du mariage. En matière de mariage donc on peut soumettre la forme au moins facultativement à la loi du fond. Cela veut dire par ex en France que si deux étrangers de même nationalité contractent mariage ils auraient le choix entre la forme locale ou une autre forme prévue par leur loi nationale. Ne pourrait-on pas reconnaître la compétence d’autorités étrangères sur le sol français pour célébrer le mariage ?

La question se pose pratiquement au regard des autorités Diplomatiques et consulaires d’une part et d’autre part pour les mariages confessionnels.

1. La compétence des autorités Diplomatiques et consulaires.

 

Quand les nationaux d’un état se trouvent à l’étranger et qu’intervient un changement dans leur état civil, il est souhaitable que ce changement puisse être constaté au moins par des fonctionnaires de leur pays. Par extension on est conduit à admettre que les mêmes autorités Diplomatiques et consulaires ne se contentent pas de transcrire des mariages célébrés en la forme locale mais qu’ils puissent célébrer eux-mêmes le mariage. Cela est effectivement admis mais sous des modalités diverses.

a. Le mariage d’un français à l’étranger.

 

L’article 48 du Code civildonne pouvoir aux agents Diplomatiques et consulaires à l’étrangers de recevoir les actes d’état civil concernant les français. On en a déduit la possibilité pour ces agents de célébrer les mariages de français.

La raison précise, c’était de contourner les formes religieuses éventuellement prévues par la loi locale. Mais en 1819 le texte a été interprété comme ne concernant que les mariages entre une française et un français. Une loi de 1901 a ajouté deux alinéas à l’article 170 d’où il ressort que dans un certain nombre de pays désignés par décret, les agents français célèbreront les mariages entre un français et une étrangère. Les pays qui ont ainsi été désignés par décret sont ceux qui ignorent le mariage civil selon la conception française (pays musulmans, pays d’extrême orient).  Mais curieusement en vertu d’une interprétation littérale, cette disposition est considérée comme ne s’appliquant pas au mariage d’une française avec un étranger.

b. Le mariage d’un étranger en France.

 

Le fait pour la France de permettre la célébration de mariages entre ses nationaux à l’étranger implique la reconnaissance par la France de mariages célébrés en France par les autorités étrangères dans les mêmes circonstances.

 

D’abord il y a des conditions préalables :

·          L’officier étranger doit avoir le pouvoir de célébrer le mariage selon sa loi.

·          Il faut que les époux aient tous les deux la nationalité de l’autorité célébrante sauf si une convention Diplomatique étend la possibilité au-delà. Mais dans tous les autres cas (différence de nationalité, absence de convention Diplomatique), le mariage doit être célébré devant l’officier d’état civil français.

Est donc absolument sans valeur le mariage célébré dans une ambassade ou consulat étranger lorsque l’un des époux est Français.

 

2. Les mariages confessionnels.

 

Les autorités religieuses ne sont pas des autorités étatiques. Mais dans certains systèmes on reconnaît un statut personnel religieux et donc à travers cela, le mariage peut être soumis à une forme religieuse. Et puis il y a aussi des pays où un mariage religieux se voit reconnaître un effet civil. Les époux ont les choix entre le mariage civil ou religieux.

a. Le mariage en France.

 

On pourrait envisager de reconnaître la validité d’un mariage religieux entre deux étrangers de même statut personnel et dont la loi nationale reconnaît la validité de ce mariage.

 

Mais il y a des raisons qui militent contre cette solution :

D’abord en France il y a tout ce qui tient au principe de laïcité qui est très fort dans l’ordre juridique français. La loi française érige en infraction pénale le fait pour un officier du culte de célébrer un mariage qui n’a pas été précédé par un mariage civil (article 433-21).

Pourquoi y a-t-il des conditions de forme aussi minutieuses ?Il faut vérifier préalablement les conditions d’aptitude et de consentement des futurs époux (s’assurer qu’ils ne sont pas déjà mariés). Pour cela il faut procéder à une publicité préalable du mariage. Aussi il est important que soit dressé au moment du mariage un acte qui en fasse la preuve de manière durable.

Ces conditions pratiques peuvent conduire à préférer le monopole des autorités publiques pour la célébration des mariages en France. En définitive, les dispositions sur la célébration des mariages en France et en particulier sur les autorités compétentes, sont des lois de police. Effectivement la validité d’un mariage purement religieux célébré en France n’a jamais été admise.

 

Mais la question a été soumise aux tribunaux sous une forme inversée. Un mariage a été célébré en France en la forme civile mais la loi personnelle d’un ou des conjoints exigeaient une célébration religieuse.

 

Il y a un siècle, les tribunaux ont accepté d’annuler des mariages civils célébrés en violation de l’exigence religieuse  par exemple entre juifs et russes. A l’époque en matière de conflit de lois, la loi nationale était toute puissante. C’était en opposition avec la conception de common law très territorialiste (on applique la loi locale).

A partir des années 20, les tribunaux se sont refusés au nom de l’Ordre Public, à prononcer la nullité de tels mariages pour complaire à une exigence religieuse. La motivation de l’Ordre Public a simplement cédée la place à une autre, dans l’arrêt CARASLANIS 1995. Les faits : mariage en France d’une française et d’un grec. La femme intente une action en divorce et le mari oppose la nullité du mariage. Nullité car la loi grecque impose une célébration religieuse. Question tranchée en faveur de la validité du mariage car la question civile ou religieuse du mariage est une question de forme, par conséquent la seule loi applicable est la loi française en vertu du principe locus regit actum. Cela cache un conflit de politiques législatives (idée de sacralisation du mariage et principe de laïcité).

Sont donc valables les mariages civils nonobstant l’exigence par une loi étrangère d’une célébration religieuse.

 

L’union civile célébrée en France, elle ne sera normalement pas reconnue à l’étranger (a fortiori s’il s’agit de deux étrangers de même nationalité). La loi des effets du mariage c’est en principe la loi nationale des époux (donc en l’espèce la loi grecque). C’était aussi la loi qui régissait éventuellement le divorce. Mais alors les époux risquent de se trouver dans une impasse. Un des époux ne pourra demander le divorce dans son pays car le divorce n’y est pas reconnu. Il a fallu admettre que quand la loi française avait permis la célébration du mariage en tant que règle de forme, elle est quand même obligée d’assumer aussi les effets du mariage lorsque la loi personnelle des époux ne reconnaît pas le mariage. C’est ce qui a été jugé dans l’affaire GHATTAS. Il a été jugé que lorsque le mariage n’est valable qu’au regard du droit français, la loi française est nécessairement compétente pour en prononcer la dissolution.

 

Quand un mariage civil a été célébré ainsi en France dans une situation de type CARASLANIS et que le mariage français vient à être déclaré nul à l’étranger, en principe cette décision ne peut être reconnue en France parce qu’elle n’a pas appliqué la loi considérée comme compétente dans la forme, ou qu’elle méconnaît l’Ordre Public français. On retrouve le conflit de politiques française et étrangère.

b. Le mariage célébré à l’étranger.

 

La Jurisprudence CARASLANIS, selon laquelle la question de la célébration civile ou religieuse est une question de forme, conduit à reconnaître la validité en France de mariages religieux célébrés à l’étranger. Il en sera ainsi si la loi locale prévoit la validité d’un mariage religieux.

 

Affaire ZAGHA de 1982 : c’était un mariage rabbinique donc religieux célébré en 1924 en Italie entre époux syriens. Puis le mari, après avoir divorcé dans des conditions douteuses, contracte en Israël un 2d mariage. Et puis après son décès, la 2de épouse conteste la validité du 1er mariage. La CA se prononce pour la validité du mariage en invoquant le caractère facultatif de la règle locus regit actum. Le raisonnement est de dire qu’en matière de mariage les époux auraient pu suivre la loi locale italienne mais ils ont préférés suivre la loi de leur statut personnel (loi syrienne = loi du fond). La CA relevait aussi que la validité du mariage était reconnue par l’ordre juridique italien par une sorte de renvoi de la loi civile italienne à la loi religieuse qui avait été appliquée. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi mais en ne retenant que le second des deux motifs c’est à dire le renvoi allégué de la loi civile italienne à la loi religieuse appliquée.

Cette décision est significative car on voit que la Cour de cassation ne tient pas à entériner le caractère facultatif de la règle locus regit actum.

 

III. La sanction des conditions de formation.

A. La loi applicable à la nullité.

 

Ici s’applique un principe général. La loi qui fixe les conditions de formation d’un acte est compétente pour régir les conséquences d’une inobservation de ces conditions. En d’autres termes si c’est la loi française qui est applicable à telle condition du mariage c’est cette même loi qui doit régir les conséquences de l’acte.

Selon que la nullité est alléguée pour une raison de fond ou bien de forme (méconnaissance de la loi locale) on appliquera la loi personnelle de l’époux ou la loi du lieu de célébration.

C’est cette loi qui déterminera les personnes qui peuvent agir en nullité, les délais pour agir, les causes d’extinction de l’action. On pourrait dire que ce sont des questions de procédure mais on voit bien que ces questions sont étroitement liées au fond donc c’est la loi de la condition méconnue qui va régir ces questions.

B. La loi applicable aux suites de la nullité.

 

Le Droit international privé Français opère une distinction entre la question du mariage putatif et le règlement des intérêts des époux si le bénéfice du mariage putatif est reconnu.

1. La question du mariage putatif.

 

Le Droit interne français inspiré par le droit canonique s’efforce de tempérer les inconvénients de la rétroactivité de la nullité. En Jurisprudence on constate que les tribunaux inspirés par un sentiment d’équité, ont appliqué le plus souvent la loi française sans préciser à quel titre. Mais la cour de cassation a été saisie de la question dans l’arrêt MOREAU de 1956 et la cour a jugé que la loi, d’où résulte la nullité du mariage, en régit les conséquences comme les tempéraments qu’elle y apporte. Ce qui veut dire que normalement on doit consulter la loi d’où résulte la nullité du mariage pour voir si cette loi prévoit ou non le bénéficie du mariage putatif et à quelles conditions. C’est un arrêt de principe mais la Jurisprudence conséquente continue à appliquer la loi française. Il est vrai qu’en droit interne les réformes successives ont élargies le bénéfice du mariage putatif, on peut se demander si une loi étrangère qui ne prévoirait pas le bénéfice du mariage putatif ne serait pas contraire à l’Ordre Public ? Ou encore si les dispositions sur le mariage putatif ne sont pas des lois de police applicables dans tous les cas de nullités invoquées devant un tribunal français ?

Cette conception a eu l’occasion d’être rejetée par un arrêt de la CA de Paris de 1996 mais dans des circonstances particulières.

 

En principe donc, il faut consulter la loi d’où résulte la nullité mais les tribunaux souvent appliquent la loi française sans respecter le principe conflictuel.

2. La question du règlement des suites.

 

La loi selon laquelle la loi de la nullité en régit les conséquences s’arrête à l’octroi ou le refus du bénéfice du mariage putatif. Cette loi va donc déterminer si oui ou non le mariage peut être considéré comme ayant existé jusqu’au jour de l’annulation. Si on répond oui, les effets du mariage vont être réglés par la loi qui aurait été appliquée au mariage valide.

Lorsque la loi appliquée à la nullité du mariage reconnaît le bénéfice du mariage putatif, il va falloir liquider les effets du mariage, c’est la loi qui s’applique normalement aux effets du mariage qui va s’appliquer.

Ex : deux époux ont contracté mariage. 10 ans après la nullité du mariage vient à être invoquée pour défaut de conditions de validité du mariage. La nullité est prononcée sur la loi personnelle méconnue. Selon cette loi personnelle on reconnaît le bénéfice du mariage putatif. Il faut donc régler les conséquences pécuniaires du mariage et liquider le régime mat qui a fictivement existé entre les époux Or la loi applicable n’est pas la même que celle en vertu de laquelle la nullité est prononcée.

 

Arrêt de 1958 : annulation d’un mariage entre un musulman et une Française. Le bénéficie de la BF est reconnu au mari. Il faut donc liquider la situation patrimoniale des époux et le mari demande l’application des règles de la communauté légale française. Il est jugé qu’on doit appliquer à cette question la loi qui aurait été compétente si le mariage aurait été valide et qu’en l’espèce il s’agit de la loi musulmane et non pas de la loi française.

 

2ème affaire : Une polonaise et un libanais vivaient à Paris, Le mari était de statut personnel chrétien. Le mari se converti à la religion musulmane. Ils vont à Beyrouth et un mariage est fait sur place. Les époux reviennent à Pairs et le mari invoque la nullité du mariage. Le mariage est effectivement déclaré nul en raison de l’empêchement bilatéral du côté de la femme. Mais les juges reconnaissent la BF des époux. La femme demande alors un partage de communauté selon la loi française. Cela illustre le raisonnement qu’on voit mais il se trouve que les époux à Beyrouth ont passé un contrat selon le droit musulman lequel ne connaît pas la communauté de biens entre époux et si en Droit International Privé français la loi applicable au régime mat c’est la loi du 1er dom matrimonial c’est à condition qu’il n’y ait pas eu de contrat de mariage.

 

SOUS-SECTION 2: LES effets du mariage.

 

Il faut savoir à quelle loi est soumis le mariage quand il y a un caractère international.

C’est une question assez rare devant le Tribunal, car s’il y a un désaccord sérieux entre les époux sur leurs droits et obligations, il y aura plutôt une action en divorce.

 

I. La loi applicable.

 

Du fait que le mariage déroule ses effets sur une longue période, il ne faut pas seulement déterminer le rattachement, il faut aussi envisager les modifications possibles (hypothèse de conflit mobile)

A. L’hésitation sur le rattachement.

 

Cela a été déterminé par la Jurisprudence à l’occasion du divorce parce que dans la conception traditionnelle, le divorce est considéré comme la violation des devoirs du mariage. Cette conception a reculé avec le divorce par consentement mutuel.

 

Le mariage se rattache au statut personnel, on doit donc partir du principe de l’article 3 Code civil et donc de l’application de la loi nationale.

Cependant, que faire en cas de nationalité différente des époux ?Avant la femme acquérait la nationalité de son mari, donc il n’y avait pas de difficulté à appliquer la loi nationale.

 

Arrêt FERRARI de 1922 : mari italien, femme française, époux séparés de corps ; la femme demande la conversion de la séparation de corps en divorce, mais le droit italien à l’époque ne connaissait pas le divorce. La femme obtient néanmoins satisfaction. Cette décision reconnaît dans toute hypothèse à un époux français le droit de divorcer selon la loi française.

Pour le mari italien, incertitude.

 

Cette difficulté a été levée dans l’arrêt RIVIERE (1953) qui soumet le divorce à la loi du domicile commun des époux. Il s’agissait de reconnaître un divorce prononcé à l’étranger. Puis arrêt LEWANDOWSKI, la règle du domicile commun a été appliquée pour prononcer le divorce entre une française et un polonais.

Cette règle du domicile s’applique même en cas de séparation des époux quand ils restent dans le même pays séparément.

 

Que faire quand les époux sont de nationalité différente et qu’ils ne sont pas domiciliés dans le même pays ?  Dans l’arrêt Tarwid  à c’est la loi du for, régulièrement saisi du divorce qui est compétente.

 

En matière de divorce, cette règle a été remise en cause. Avec la loi de réforme de 1975, une règle de conflit particulière au divorce a été introduite à l’article 310 Code civil : quand les époux sont tous deux domiciliés en France, quand bien même ils sont de même nationalité, on leur applique la loi française.

 

Q° : fallait-il après 1975 considérer que les règles de l’article 310 s’appliquaient à l’ensemble des effets du mariage ou seulement au divorce ?

Pour la doctrine, il semble que le but du législateur en introduisant l’article 310 ait été d’étendre les règles françaises nouvelles en matière de divorce.

En revanche, les rattachements précédents conservent toute leur valeur de principe ; si les époux sont de nationalité commune, il paraît normal que leur relation hors divorce soit définie par leur loi nationale commune, à défaut de loi nationale commune, on prendra la loi de leur domicile commun.

La cour de cassation a confirmé ce point de vue, en 1979, savoir si une donation d’un époux à l’autre peut être attaquée…la  cour de cassation a réitéré l’affirmation que la loi française régit les effets du mariage d’époux de nationalité différente ayant leur domicile en France. Il y a eu désolidarisation de la loi applicable en matière de divorce et de la loi applicable aux effets du mariage.

 

En l’absence de nationalité et de domicile commun, il ne semble pas opportun d’appliquer la règle Tarwid (celle du for saisi), ce serait la loi du dernier domicile commun.

 

B. Les conflits mobiles.

 

2 hypothèses : celle de changement de statut des deux époux et celle de changement de statut d’un seul époux.

1. Le changement de statut des deux époux.

 

Si le mariage est soumis à la loi de nationalité commune des époux, et que les époux acquièrent ensemble une nationalité nouvelle, par application des principes de conflits mobiles, la loi nouvelle régira les effets à venir du mariage.

 

Il faut tenir compte de l’hypothèse où le changement serait frauduleux, c’est à dire que la modification de l’élément de rattachement ne serait intervenue que pour échapper à la loi ancienne, cependant, c’est une hypothèse rare.

 

Si les époux changent de domicile, la solution sera identique, on appliquera la loi du domicile nouveau aux effets à venir.

2. Le changement de statut d’un époux seul.

 

Ex : époux de même nationalité, l’un d’eux changeant de nationalité. Si les époux deviennent de nationalité différente, leur rattachement change, on doit en principe appliquer la loi du domicile commun, cela entraîne le changement de la loi applicable aux effets du mariage. Cependant, ici, la fraude est plus plausible.

 

Arrêt Chemouni : tunisien d’origine, de même pour sa seconde femme. Il vient s’installer en France où il prend la nationalité française de sorte que la loi applicable à son second mariage est la loi française. Action en paiement d’aliment. Le mari demande la nullité du second mariage et dit que la loi des effets du mariage devenue loi du domicile commun et qui s’applique à la question des aliments, ne permet pas que soit attribué des aliments à deux femmes. Pour la Cour de cassation : la loi française régit depuis la naturalisation les effets du mariage des époux, mais ceci ne change rien quant au droit à aliment de la seconde épouse car ses droits découlaient directement pour elle de sa qualité d’épouse légitime définitivement acquise par un mariage valablement contracté à l’étranger.

 

L’analyse de cette solution est plus difficile en droit : la cour de cassation ne dit pas en vertu de quelle loi le droit à aliment est valable. S’agit-il de la loi tunisienne ? Et là la solution ordinaire du conflit mobile n’est pas appliquée. Car il y a conflit mobile quand la règle de rattachement est modifiée. En général, il y a deux moyens pour résoudre un conflit mobile : soit on continue d’appliquer la loi ancienne par la théorie des droits acquis, soit à compter du changement on applique la loi nouvelle pour les effets à venir (c’est cette hypothèse qui prévaut). Donc ici, la cour paraît consacrer la théorie des droits acquis. Aussi, on peut dire que le conflit mobile a joué normalement et que le droit à aliment est désormais reconnu selon la loi française.

Mais c’est quand même le droit français qui est appliqué pour les modalités de versement des aliments.

 

Dans d’autres cas cependant, les effets en France du second mariage d’un polygame, effets qui seraient soumis à un droit étranger, ont été repoussé en vertu de l’Ordre Public.

Affaire Baaziz : mari d’un française, français au moment du mariage a pris la nationalité algérienne et a contracté un second mariage avec une algérienne. Le changement de loi permet le second mariage, car les parties au second mariage sont tous les deux de nationalité algérienne. Au décès du mari, la seconde épouse demande à figurer en qualité d’épouse à l’Etat civil français. Dans un 1er arrêt la Cour de cassation a approuvé le refus au motif que la demande, formulée en termes généraux, ne permettait pas d’apprécier si l’usage qu’elle entendait faire de sa qualité de veuve était ou non conforme à l’Ordre Public français. La femme a alors demandé le partage d’une rente de conjoint survivant avec la 1ère épouse, ceci lui a été refusé au motif que l’Ordre Public français s’opposait à ce que le mariage polygamique contracté à l’étranger par celui qui est encore l’époux d’une française produise ses effets à l’encontre de celle-ci.

 

Sur la question de la détermination de la loi applicable : quand on a déterminé la loi applicable on recherche le domaine de la loi application.

 

II. Le domaine de la loi applicable.

 

Ayant déterminé la loi applicable au mariage il faut se demander quelles sont les catégories qui relèvent de la catégorie de rattachement « effets de mariage ».

A. Les effets personnels.

 

                Le mariage crée des obligations réciproques pour les deux époux.

1. Les effets réciproques.

 

Droits et obligations des époux. La loi des effets du mariage va régir les droits et devoirs des époux l’un vis à vis de l’autre. Ce sont donc les obligations telles que fidélité, cohabitation, assistance.

 

Le caractère est d’abord moral et cela se prête difficilement à une sanction par les tribunaux hors l’action en divorce. Néanmoins il y a quelques décisions qui confirment que ce type d’obligations constitue le cœur des obligations du mariage, ceci lorsqu’on est amené à invoquer l’Ordre Public français à l’encontre d’une loi étrangère par hypothèse applicable aux effets du mariage et qui présente une conception différente des effets du mariage que la nôtre.

Ex : un divorce prononcé en Algérie entre époux algériens aux torts de la femme au motif qu’elle résidait en France alors qu’elle était tenue de suivre en toutes circonstances de suivre son mari, détenteur de la puissance maritale. La CA refuse de reconnaître cette décision comme portant atteinte à l’Ordre Public.

Ex : la femme est française, le mari est marocain. Ils se sont mariés en France où tous deux résidaient. Le mari refuse de cohabiter avec la femme en invoquant une coutume musulmane magrébine lui interdisant la cohabitation tant que n’a pas été accompli une célébration religieuse. La femme demande et obtient le divorce aux motifs que les droits et obligations des époux découlaient de la loi française seule en tant que loi du domicile commun.

 

Ces deux exemples confirment que la loi applicable aux effets personnels du mariage c’est la loi applicable à ces effets.

2. Le statut individuel de la personne mariée.

 

Ex : le nom de la personne, son domicile, sa capacité. Là on peut hésiter entre la loi des effets du mariage mais aussi la loi personnelle de l’intéressé (loi nationale). Ex : la capacité de la femme mariée. Avant, l’incapacité de la femme mariée était justifiée par la faiblesse inhérente au sexe. Ce fondement appelle plutôt l’application de la loi personnelle. A une époque plus récente, en France, on a justifié cette incapacité par le souci d’unité de gouvernement du ménage. C’était l’idée que le gouvernement du ménage devait être entre les mains d’une seule personne. C’est donc ici la loi d’une seule personne qui doit s’appliquer et non plus la loi du ménage. Aujourd’hui, une loi étrangère frappant la femme mariée d’incapacité serait déclarée contraire à l’Ordre Public français.

 

Ex : l’incapacité Velléienne : c’est l’interdiction pour la femme mariée de se porter caution pour son mari. C’est une mesure de protection pour la femme. On pourrait trouver cette disposition en droit moderne sauf l’interdiction pour un époux de se porter caution pour l’autre. Ceci relève-t-il de la loi des effets du mariage ou bien de la loi personnelle d’un époux ? Puisqu’il s’agit d’éviter un abus d’influence d’un époux sur l’autre, ceci concerne leur rapport réciproque, par conséquent c’est la loi des effets du mariage que l’on va consulter pour savoir si un époux pourra se porter caution pour l’autre.

 

Ex : le droit pour la femme d’exercer au non une activité professionnelle sans le consentement de son époux. Ceci concerne les rapports entre les époux plus que le statut individuel de la femme. Par conséquent, c’est la loi des effets du mariage qui devrait régir cette question étant observé qu’ici encore qu’une loi étrangère exigeant l’autorisation du mari serait sûrement déclarée contraire à l’OP

 

La loi locale (celle du lieu où se trouvent les époux) pourrait aussi être appliquée nonobstant la loi des effets du mariage, au titre de l’urgence. Par exemple pour autoriser un domicile séparé.

On voit ici la notion de loi de police qui va se manifester également avec les effets patrimoniaux du mariage.

 B. Les effets patrimoniaux du mariage.

 

Ici on pense au régime matrimonial. Le RM constitue une catégorie de rattachement indépendante de la catégorie effet du mariage c’est pourquoi on étudiera la loi applicable au Régime Matrimonial (cf. infra).

Mais il y a des interférences entre les deux catégories. Il faut voir donc deux questions : celles du régime primaire et celle de l’obligation aux charges du mariage. Cela relève-t-il de la loi du Régime Matrimonial ou des effets du mariage ?

1. La question du régime primaire.

 

Le régime primaire : Le Régime Matrimonial c’est l’organisation des relations pécuniaires entres les époux. Cela veut dire la répartition des biens entre les époux. Plus fréquemment ils vont pendant le mariage recevoir par succession un patrimoine et pendant la vie conjugale ils vont acquérir des biens. Donc on recherche ce qui appartient à qui. En droit Français, les époux peuvent organiser ceci au moment du mariage en passant un contrat de séparation de biens et si les époux ne passent pas de contrat, la loi considère qu’ils ont tacitement adopté le régime légal qui est le régime de communauté d’acquêts. Le Régime Matrimonial cela signifie que pour savoir entre époux ce qui appartient à qui on va consulter le régime matrimonial (contrat ou régime légal). Les dispositions sont dans le Code civil. Mais au chapitre du mariage (article 210) la loi fait figurer un certain nombre de dispositions concernant les activités patrimoniales des époux en précisant que ces dispositions s’appliquent quelque soit le RM. C’est cela qu’on appelle le Régime Matrimonial primaire. Ex : article 220 du Code : chaque époux a le pouvoir d’engager l’autre par les dépenses effectuées pour les besoins du ménage ou l’entretien des enfants.

 

Pour revenir au conflit de lois : ce type de questions qui sont traitées en France à l’article 215 et suivant peuvent être considérés comme obéissant en Droit International privé à la loi des effets du mariage plutôt qu’à la loi du Régime Matrimonial. Mais l’article 226 du Code civil réserve sur certains points les conventions matrimoniales ce qui montre que la loi applicable au Régime Matrimonial pourrait être appliquée.

 

Autre possibilité : le fait que le droit interne français édicte un certain nombre de dispositions applicables indépendamment du RM (RM primaire) amène aussi à se demander si, dans une situation internationale, ces dispositions ne sont pas applicables à tous les époux en France au titre de lois de police.

 

La cour de cassation, a déclaré en 1985, mais de manière incidente que les dispositions du régime de base relevaient de la loi des effets du mariage.

Puis dans un arrêt de 1987, la cour de cassation a affirmé que les dispositions françaises étaient d’application territoriale ce qui évoque plutôt les lois de police. Cette conception est sans doute la plus exacte parce que les raisons qui poussent à édicter en droit interne des dispositions indépendantes du régime, existent même en présence d’un rattachement à une loi étrangère telle que la nationalité commune des époux.

 

Parmi les dispositions du régime primaire il y en a qui sont justifiées par l’urgence. Les articles 217 et 219 qui permettent à un époux en cas d’empêchement de l’autre d’exercer des pouvoirs qu’il ou elle n’a pas normalement. Ex : dans les 70’s une cambodgienne résidant à Paris sans nouvelle de son mari demande au juge de l’autoriser à contracter un emprunt hypothécaire afin d’acheter un fonds de commerce pour qu’elle puisse vivre. Le jugement déclare que les dispositions des articles 214 à 226 (régime primaire) du code civil doivent être comprises au nombre des lois de police au sens de l’article 3 al1 du Code civil.

La formule est sans doute trop générale. Mais pour d’autres dispositions, celles fondées sur l’apparence et la protection des tiers c’est bien fondé (article 221 et 222). Il résulte de ces articles que chaque époux a le pouvoir de se faire ouvrir un compte en banque sans égard aux dispositions du RM. Ceci vise à la sécurité des tiers comme du banquier qui traite avec une femme mariée. On ne peut pas attendre de ce tiers qu’il recherche si la femme n’est pas sous un RM étranger qui restreindrait la faculté pour cette personne la faculté d’exercer certaines opérations.

Les articles 221 et 222 s’appliquent donc à toutes les opérations passées en France au titre de loi de police.

Ex : Il s’agit de la disposition protégeant le logement familial. Un époux ne peut pas disposer seul des droits qui assurent le logement familial. Donc même si un époux est proprio d’un appart où ils habitent, il ne peut pas vendre l’appart sans la participation de l’autre époux. Cette disposition a un but de protection évident (de l’autre époux). On en conclut que cette disposition d’applique en France dès lors que le logement est situé en France.

2. Obligations alimentaires et contributions aux charges du mariage.

 

C’est le devoir de secours. La Jurisprudence s’était fixée pour l’application à cette question de la loi des effets du mariage (loi nationale commune ou loi du domicile commun). Mais ces solutions ont été remplacées par celles de la Convention de La Haye du 2 octobre 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires.

Selon l’article 1, la convention s’applique bien aux rapports entre époux et indépendamment de toute réciprocité.

 

[Aujourd’hui de plus en plus de questions sont régies par des conventions en particulier par des conventions de La Haye. Lorsqu’il existe une convention il faut se demander quand cette convention s’applique. En effet on peut très bien concevoir qu’une convention s’applique dans les rapports entre états contractants. Donc en matière d’obligations alimentaire, s’il s’agit d’une affaire franco-allemande, on va voir si la convention est applicable en France et en Allemagne sans quoi on en revient au droit commun (loi des effets du mariage).

Mais il y a une autre possibilité : les états qui ratifient la convention acceptent d’appliquer la règle de la convention sans distinction à toutes les situations internationales dont leurs autorités viennent à connaître. Donc on doit regarder si la convention s’applique avec ou sans réciprocité. S’agissant de la convention de 1973 (sur les obligations alimentaires), elle s’applique indépendamment de toute réciprocité. Donc la convention devient le droit commun.]

 

La convention adopte un système de rattachements successifs, ou un système de rattachements en cascade. L’article 4 donne d’abord compétence à la loi interne de la résidence habituelle du créancier. L’idée étant que le créancier étant par hypothèse dans le besoin, on va appliquer la loi de son environnement. Quand le créancier ne peut pas obtenir d’aliment (article 5), on applique la loi nationale commune des parties. L’article 6 ajoute que si l’article 5 est inefficace, on applique la loi de l’autorité saisie.

Les rattachements multiples servent à privilégier un certain résultat ici, le fait que le demandeur obtienne des aliments. On parle aussi de règle de conflit à coloration matérielle.

 

Par cette convention, l’obligation alimentaire se trouve érigée en catégorie autonome. Auparavant, l’obligation alimentaire entrait dans la catégorie effet du mariage. Avec la convention de 1973, on procède à un découpage différent, ce sont toutes les obligations alimentaires qui sont regroupées pour faire l’objet d’une catégorie de rattachement particulière.

Par conséquent l’obligation alimentaire entre époux se trouve apparemment détachée de la relation de mariage. Du reste l’article 2 de la convention déclare que les décisions rendues en application de la convention ne préjugent pas de l’existence d’une des relations fondant l’obligation aux aliments.

Cela veut dire que par exemple, un époux demande des aliments à l’autre on applique la loi de la résidence habituelle du demandeur et la convention dit que cela ne préjuge pas de l’existence de la relation de mariage. Mais si le demandeur oppose que le mariage est nul, se pose la question de savoir selon quelle loi apprécier l’existence de la validité du mariage ? Ceci constitue un exemple caractéristique d’un problème général de Droit International Privé appelé problème de question préalable.

 

Ici on est en présence d’une demande d’aliment qui constitue la question principale. La validité du mariage constitue la question préalable. L’alternative s’est d’apprécier la question préalable de la validité du mariage selon la loi applicable à la question principale c’est à dire les aliments. Autrement dit la validité du mariage sera appréciée selon la loi de la résidence habituelle du créancier d’aliment. Ou bien alors, deuxième possibilité, ne faut-il pas apprécier la question préalable de la validité du mariage selon la règle de conflit ordinaire du tribunal saisi (loi personnelle des parties normalement) ? Lorsque la convention fut adoptée on a dit que c’était la seconde solution qui devait s’appliquer. La validité du mariage est en question. Il y a une loi applicable à la validité du mariage. Donc on va regarder si le mariage est valable puis on étudiera la loi applicable à l’aliment. Oui mais certains on dit que si la loi du mariage ne reconnaît pas le mariage, la loi applicable aux obligations alimentaires se trouve privée d’effet. Si on vient consulter une autre loi on s’expose à ce que cette loi fasse barrage à la loi sur l’obligation alimentaire. C’est pourquoi l’opinion s’est développée qu’il fallait apprécier la validité du mariage selon la loi applicable aux aliments.

 

On peut critiquer cette solution car on juge de la validité d’un mariage selon une loi applicable particulière applicable aux aliments mais si c’est une autre question qui s’élève on pourra juger de la validité du même mariage selon une autre loi. Autrement dit, selon les faits, les mêmes personnes pourront être considérées comme mariées ou non mariés. Autrement dit, dans la conception traditionnelle (avant la convention de La Haye) on faisait dépendre les aliments de la loi du mariage (l’accessoire suivait le principal). Dans l’interprétation qui domine aujourd’hui, c’est le principal (le mariage) qui se trouve dans la dépendance de l’accessoire (les aliments).

 

Toute cette discussion sur question principale et préalable, elle est faussée par la terminologie car dans le cas qui nous occupe on qualifie la demande d’aliment de question principale et la validité du mariage en question préalable. Or les aliments par rapport au mariage sont un accessoire ! Les aliments sont bien un effet du mariage.

 

SOUS-SECTION 3:

LA dissolution ou le relâchement du lien du mariage : le divorce international et la séparation du corps.

 

Le divorce a toujours soulevé des problèmes dans l’ordre international. Cela est dû à la grande diversité des législations. Donc les causes de divorce pouvaient être très variables d’un pays à l’autre et jusqu’à il y a 30 ans, le principe même du divorce était refusé par des législations comme l’Espagne et l’Italie.

Ces écarts de législation sont fortement atténués. Le divorce a été introduit dans la plupart des pays. Chaque pays européens ayant réformé le divorce en s’inspirant les uns des autres, les législations se sont rapprochées. Simultanément d’autres conflits sont apparus du fait du contact fréquent avec les droits musulmans et la pratique de la répudiation.

L’introduction en 1975 d’une règle de conflit législative a donné naissance à des difficultés particulières.

 

Les conflits peuvent s’élever quant aux causes du divorce, à la procédure et ses effets.

 

I. Les  causes du divorce et de la séparation de corps.

 

Le divorce est lié au mariage, c’est donc une question de statut personnel. Ceci a donc été soumis en France à la loi nationale. Le principe ne soulève pas de problème quand les époux sont de même nationalité et donc la règle a été appliquée d’innombrables fois entre époux français et sous sa forme bilatérale entre époux étrangers de même nationalité.

 

Cette application n’a pas été sans faille lorsque les époux sont domiciliés en France et qu’ils s’abstenaient d’invoquer leur loi nationale commune. C’est ici l’arrêt Bisbal dans lequel il s’agissait de deux époux espagnols dans les années 50. Le divorce a été prononcé selon la loi Française car aucun des deux époux n’a rappelé sa nationalité.

 

Le cas des époux de nationalité différente à embarrasser les tribunaux pendant longtemps (arrêt Ferrari, Rivière et Tarwid = quand les époux n’ont pas de nationalité commune ou de domicile commun c’est la loi du tribunal du for qui est compétente).

 

Par la loi du 11 juillet 1975, a été introduite une disposition relative au conflit de lois : l’article 310. « Le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française :

·          Lorsque l’un et l’autre époux sont de nationalité française ;

·          Lorsque les époux ont l’un et l’autre leur domicile sur le territoire français ;

·          Lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence alors que les tribunaux (français) sont compétents pour connaître du divorce ou de la séparation de corps. »

 

L’article 310 consacre ici une méthode unilatéraliste. Le texte fixe le champ d’application de la loi Française et d’elle seule. Certes l’article 3 al3 du Code civil qui pose la règle de principe en matière de statut personnel se présente de la même manière. Mais l’article 3 al3 a été bilatéralisé. C’est à dire qu’il se lit aujourd’hui ainsi : « l’état et la capacité des personnes sont régis par leur loi nationale. »

 

Pour revenir à l’article 310 du Code civil, on constate qu’il n’est pas possible de faire de même. Ne peut-on pas dire que le divorce est régi par la loi nationale commune des époux ? Non car le deuxième point dit « Le divorce et la séparation de corps sont régis par la loi française lorsque les époux ont l’un et l’autre leur domicile sur le territoire français ». Donc si deux époux brésiliens résident en France on ne peut leur appliquer la loi nationale commune.

De même pour le 3ème point en regardant le 1er point.

Donc chaque disposition empêche la bilatéralisation de l’autre.

 

Le législateur s’est uniquement préoccupé de l’application de la loi française au cas où il estimait qu’il fallait appliquer la loi Française.

Ceci est confirmé par la disposition du 3ème point : dès lors que la loi française n’est pas applicable en vertu des deux 1ers, le législateur s’en désintéresse, on applique la loi étrangère qui se veut applicable et c’est seulement si aucune loi étrangère ne se veut applicable qu’on appliquera la loi française.

 

A. Les rattachements du divorce.

 

L’article 310s’adresse au 1er au juge Français directement saisi d’une action en divorce. On se demandera dans quelle mesure il faut tenir compte de l’article 310 quand il s’agit non pas de prononcer un divorce en France mais de reconnaître un divorce prononcé à l’étranger.

1. Action intentée en France.

a. Epoux tous deux de nationalité française.

 

Situation simple : la loi française s’applique où que soit domiciliés les époux. Sur ce point l’article 310 ne fait que reprendre la solution traditionnelle qui découlait de l’article 3 du code civil.

Il a été envisagé au moment de la loi de changer cela et d’adopter une règle de conflit bilatérale soumettant le divorce à la loi du domicile des époux. Ceci a été repoussé en raison du lobby des représentants des français à l’étranger au Sénat.

b. Les époux ayant l’un et l’autre leur domicile en France.

 

La loi française est applicable sans égard à leur nationalité. Avant la loi française ne s’appliquait au titre de loi du domicile que si les époux étaient de nationalité différente. Aujourd’hui, même si les époux sont de même nationalité commune étrangère, c’est la loi française qui s’applique si le domicile (commun ou séparé) est situé en France.

 

Cette innovation a été introduite sans débat parlementaire. Cela  soulevé pas mal de critiques. La France est un pays d’immigration. Donc maintenir l’application de la loi nationale commune s’est s’exposer à l’application fréquente des lois étrangères les plus diverses avec les difficultés qui cela représente pour les tribunaux. Egalement, dans la mesure où ces immigrés sont désireux de s’intégrer dans le milieu social Français, il est préférable de leur appliquer la loi française plutôt que de maintenir l’application de leur loi d’origine. Inversement on peut faire observer que la situation matérielle des immigrés n’a plus rien à voir avec les anciens immigrés. Ceux-là étaient souvent en France sans esprit de retour. Or Aujourd’hui, beaucoup d’immigrés conservent des liens étroits avec leur pays d’origine. On constate qu’il n’est pas rare que des époux étrangers de même nationalité domiciliés en France aillent divorcer dans leur pays. Cela montre la volonté de relever de leur loi nationale plutôt que de la loi Française.

Dans le cas du Maroc, après la loi de 1975, ce pays a obtenu la conclusion d’une convention avec la France qui rétabli la compétence de la loi nationale dans les rapports entre les deux pays = Convention du 10 août 1981, article 9.

La réalité c’est qu’en matière de divorce, aussi bien la loi nationale que la loi du domicile ont un titre fort à s’appliquer. Il est donc dur de choisir une règle bilatérale exclusive. Dans le cas de la France, s’ajoute le fait que le France est devenue largement un pays d’immigration mais c’est simultanément un pays qui compte de nombreux nationaux à l’étranger et des nationaux qui ne se considèrent pas comme des immigrants. Le résultat c’est qu’on aboutit à cette disposition déséquilibrée.

c. Les autres cas.

 

Les époux ne sont ni tous deux français, ni tous deux domiciliés en France, néanmoins, un tribunal français est compétent et dans ce cas la loi Française ne s’applique que si aucune loi étrangère ne se reconnaît compétente. C’est une application subsidiaire.

 

Dans quels cas les tribunaux français sont compétents ? : C’est par transposition des règles internes de compétences, lesquelles en matière de divorce sont celles de l’article 1070 du NCPC : Le tribunal du lieu de résidence de la famille,  défaut le tribunal du lieu de la résidence de l’époux avec lequel vivent les enfants mineurs, à défaut le tribunal du lieu du défendeur.

 

La loi Française ne s’applique qu’à titre subsidiaire : ex, le mari est Français, la femme est allemande, les époux sont domiciliés en Allemagne. La loi française ne se veut pas applicable. On consulte la règle de conflit allemande. Elle désigne à défaut de loi nationale commune, la loi du domicile commun. Donc la loi allemande se reconnaît compétence et si le mari français a saisi le tribunal français en vertu de l’article 14, la loi française sera déclarée compétente.

article 14 : « L’étranger, même non résidant en France, pourra être cité devant les tribunaux français, pour l’exécution des obligations par lui contractées en France avec un Français ; il pourra être traduit devant les tribunaux français, pour les obligations contractées en pays étranger envers des français. »

 

Il faut voir toutes les difficultés que soulève ce texte :

Le texte énonce : « Lorsque aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence. » On va consulter la loi à laquelle la situation se rattache, il n’est pas question de voir toutes les lois du monde. C’est donc une obligation du juge. Ici on est dans un domaine où les parties n’ont pas la libre disposition de leurs droits, donc le juge doit lui-même rechercher au besoin si aucune loi étrangère ne se reconnaît compétence. Cela veut dire consulter un Droit International Privé étranger, la règle de conflit étrangère et non pas le droit étranger en lui-même.

Les droits de Common Law dans leur ensemble ne considèrent pas le divorce comme un objet de conflit de lois. Dans ces systèmes, le juge en matière de divorce n’applique que sa loi. Ne se pose que la question de savoir s’il y a un élément international, si le juge saisi est compétent ou non. Les juridictions françaises sont mal à l’aise avec ce système car il n’y a pas de règle de conflit, que des règles de compétence juridictionnelle.

 

2ème cas : une fois déterminé les lois étrangères à consulter, une fois déterminé leur règle de conflit, il se peut que deux lois étrangères se reconnaissent l’une et l’autre compétence. C’est l’hypothèse du cumul de lois applicables. C’est fort plausible car en matière de divorce il est tout aussi raisonnable de déclarer applicable la loi nationale que la loi du domicile.

Ex : Le divorce d’une belge domiciliée en Belgique et d’un espagnol domicilié en France. La loi Française n’est pas applicable (on n’est pas dans un des deux premiers cas de 310) mais la loi belge et espagnole revendiquait son application. La loi espagnole à l’époque en tant que loi nationale du mari, la loi belge car l’un des époux était belge. Que faire ? On ne sait pas car l’article 310 ne fournit aucune directive. On pourrait certes revenir au principe de la recherche des liens de droit les plus étroits avec les intéressés. Seulement ici, dans le cas présent comment déterminer que telle loi se rattache plus étroitement ? On pourrait prendre la loi du dernier domicile commun. Mais c’est un rattachement tourné sur le passé, peu convaincant.

La CA de Versailles a appliqué la loi Française…

 

3ème cas : Parmi les hypothèses relevant de ce cas figurent celle selon laquelle un des conjoints est de nationalité française sans que les époux soient domiciliés en France. Avant l’article 310, si les époux étaient domiciliés tous les deux à l’étranger, dans un même pays, on appliquait la loi du domicile commun. Par l’effet de la loi du domicile commun, l’époux français pouvait se trouver privé de la possibilité de demander le divorce et certaines décisions ont jugé en ce sens. Mais l’époux français, prisonnier du mariage, pouvait, en revenant s’installer en France, demander et obtenir le divorce selon la loi Française. Pourquoi ? Car l’arrêt Rivière n’était plus applicable. L’arrêt Tarwid s’applique : On appliquait la loi du for régulièrement saisi du divorce

Dans le droit antérieur, il y avait toujours la possibilité d’obtenir le divorce selon la loi française

Sous l’empire de l’article 310 cette faculté disparaît pour peu qu’une loi étrangère se reconnaisse compétence.

Il n’a pas fallu longtemps pour que la question soit soumise aux tribunaux s’agissant des femmes françaises mariées à des espagnols à une époque où la loi espagnole ne reconnaissait pas le divorce.

Le TI de Paris en 1977 a rusé avec l’article 310 en déclarant que la situation n’était pas envisagée par l’article 310 et appliquait la loi française au titre de l’article 3 al3 du Code civil. C’était jouer avec les mots car l’article 310 a réglé tous les cas de divorce.

Dans un arrêt de 1981, la cour de cassation, dans la même situation a affirmé que la situation relevait de l’article 310 du Code civil.

Le même arrêt du 1er avril 1981, tout en reconnaissant la compétence de la loi espagnole, a jugé qu’une loi étrangère prohibitive au divorce était contraire à la conception française actuelle de l’Ordre Public international qui impose la faculté pour un français domicilié en France de demander le divorce.

Commentaires : c’est un Ordre Public circonstancié. Il n’est pas dit qu’une loi étrangère qui ne permet pas le divorce est dans tous les cas contraire à l’Ordre Public français. C’est une proposition qualifiée. La contrariété à l’Ordre Public français résulte de ce que cette loi atteindrait un français domicilié en France. C’est une manifestation de l’Ordre Public de proximité. On ne prononce par une condamnation en général de la loi étrangère, on fait jouer l’Ordre Public en tenant compte de l’intensité des rattachements avec l’Ordre Public français.

On en est arrivé là pour corriger les effets d’une règle de conflit française pas très bien conçue.

 

Se pose la question de la reconnaissance d’un divorce prononcé à l’étranger. La reconnaissance est soumise à 5 conditions dont l’exigence que le jugement étranger ait appliqué la loi compétente d’après la règle française de conflit. Si est présenté à l’exequatur un jugement de divorce rendu à l’étranger, il faudrait que ce Jugement ait appliqué la loi que désigne l’article 310 du code civil.

 

Selon le 1er cas visé par l’article 310, si les deux époux sont de nationalité française, le juge étranger devra appliquer la loi française au divorce. En fait il n’est pas rare que des époux français établis à l’étranger s’épargnent les frais d’un divorce en France et aille à l’étranger pour que le divorce soit prononcé conformément à la loi française. Dans ce cas on ne va pas refuser de reconnaître le divorce. La Jurisprudence a fait appel à l’idée d’équivalence entre la cause de divorce admise à l’étranger et une cause admise par la loi française. Ce qui fait preuve d’une grande tolérance à l’époque où le droit français du divorce était très restrictif.

Depuis 1975, le droit français étant devenu plus libéral, il y a plus de chance pour qu’il y ait des équivalences entre le droit français et le droit étranger.

 

Les cas des époux tous deux domiciliés en France et ils ont obtenus un divorce à l’étranger. Le fait est qu’ils ont obtenu le divorce du fait qu’ils sont tous les deux de nationalité française. Si on appliquait l’arrêt Munzer, il faudrait repousser ce divorce, ce n’est pas réaliste. Pourquoi reprocher à des époux de même nationalité d’avoir divorcer dans leur état national ?

 

Si la loi française n’était pas applicable (3ème cas), va t on transposer l’article 310 ? Ce n’est pas l’esprit de l’article. Le juge étranger a prononcé un divorce et il l’a fait selon une loi qui se reconnaissait compétente. En définitif, même si théoriquement l’article 310 a vocation à être invoqué en cas de reconnaissance d’un divorce prononcé à l’étranger, il y a peu de chance pour que le divorce ne soit pas reconnu sur ce terrain.

 

B. Le fonctionnement de la règle de conflit.

1. Conflit mobile et fraude à la loi.

 

Si le rattachement prévu par la règle de conflit vient à changer, si les époux français prennent une nationalité étrangère, ou les époux domiciliés en France transfèrent leur domicile à l’étranger, il faut considérer que la loi applicable est celle du rattachement au moment de l’introduction de l’instance.

Ce qui est concevable, c’est une fraude à une loi étrangère commise par des époux qui voulant échapper à une loi plus contraignante argueraient d’un nouveau domicile en France.

 

De deux choses l’une, ou bien on constate que les époux ont acquis un domicile stable en France, donc il n’y a pas de raison de ne pas appliquer la loi française. Ou bien on estime que le domicile allégué n’a pas une consistance suffisante, le tribunal se déclarera incompétent ou n’appliquera pas la loi française.

 

Mais la question de la fraude à la loi en matière de divorce connaît un renouveau dans le contexte des divorces d’immigrés magrébins. Les tribunaux sont constamment saisis de la situation suivante : une épouse marocaine ou algérienne en France intentant soit une action en divorce, soit une action en contribution aux charges du mariage.

Le mari se rend en Algérie ou Maroc et répudie son épouse. Il oppose donc à l’action ouverte une fin de non-recevoir tirée de la dissolution du mariage. Ceci soulève la question de la conformité à l’Ordre Public de la répudiation.

Indépendamment de cette question, la décision étrangère invoquée par le mari a assez souvent été écartée pour le motif de fraude. On ajoute qu’il n’y a pas de lien de rattachement suffisant entre l’autorité qui a prononcé le divorce et les époux. On est en présence d’un forum shopping. C’est une action qui consiste à se rendre devant un tribunal pour obtenir une décision qu’on ne peut pas obtenir chez soi. Plus précisément, on a parlé de fraude à la compétence ou de fraude au jugement. Ces expressions font ressortir qu’on est allé chercher un jugement qu’on n’aurait pas pu normalement obtenir. Ce qui semble gênant c’est d’affirmer qu’il n’y a pas de lien entre l’autorité et la situation. Comment peut-on dire qu’une autorité marocaine est dénuée de lien avec le mariage entre deux marocains et que la loi marocaine n’a pas de lien avec les époux ? En outre avec la convention marocaine de 1981, la loi marocaine est reconnue applicable dans les relations franco marocaines, entre époux tous deux marocains domiciliés en France. En définitif, si la question c’était posée devant les tribunaux français, ils auraient refusé d’entériner la répudiation au nom de l’ordre public. Par conséquent lorsque le mari dans ces conditions se rend dans le pays d’origine des époux pour procéder rapidement à une répudiation on estime que c’est une fraude à l’Ordre Public.

2. L’ordre public.

 

L’Ordre Public a régulièrement été invoquée en matière de divorce. C’était une matière sensible, c’est une question de société. Avec l’article 310 du Code civil, la loi française est applicable dans le plus grand nombre de cas et les occasions d’appliquer la loi étrangère sont moins fréquentes qu’autrefois. Mais la question de l’Ordre Public se pose aussi à l’occasion de reconnaissance de divorce prononcé à l’étranger même si dans ce cas l’Ordre Public n’a qu’un effet atténué.

Qu’en est-il de l’Ordre Public français actuellement en matière de divorce ?Il faut distinguer selon que la loi étrangère est plus permissive que la loi française ou bien qu’elle est plus restrictive.

a. Les lois plus permissives.

 

Jusqu’en 1975, la politique législative française en matière de divorce était une politique restrictive. Le divorce était considéré comme un mal nécessaire et ne pouvait être prononcé que pour faute d’un époux ou des deux. Aussi opposait-on l’Ordre Public français aux lois étrangères qui permettaient le divorce dans des conditions plus larges. Ceci s’appliquait notamment aux lois qui autorisaient le divorce par consentement mutuel. Du point de vue de la théorie générale de l’Ordre Public c’est un exemple caractéristique. Avant 1975 on ressentait mal que seul le divorce pour faute pouvait être prononcé. C’est plus la défense d’une politique législative qui est menacée. Il ne fallait pas donner l’exemple du divorce par consentement mutuel.

Aujourd’hui le droit français du divorce a été libéralisé à tel point que les lois plus permissives sont plus rares. La question se pose tous les jours à propos de la répudiation islamique. La répudiation met en question la conception du mariage mais aussi et surtout le statut de la femme car la répudiation n’est ouverte qu’au mari. La répudiation permet de mettre fin unilatéralement au mariage sans avoir à justifier, de manière discrétionnaire. Ceci heurte complètement le sentiment élémentaire d’égalité qui doit régner entre les époux au sein du mariage. Il est donc exclu qu’un tribunal français prononce ou entérine une répudiation selon une loi étrangère. Ce qui pose problème c’est la question des répudiations prononcée à l’étranger et dont on demande la reconnaissance en France.

 

La répudiation n’est pas repoussée lorsqu’elle est intervenue du fait du consentement des deux époux. Ou bien que l’épouse y a acquiescée. Dans ces hypothèses la répudiation peut être assimilée à un divorce par consentement mutuel. Il n’y a donc pas d’objection à sa reconnaissance en France. En droit musulman, la répudiation est le seul mode de divorce.

 

Pour la répudiation unilatérale : toutes n’ont pas été repoussées comme contraire à l’Ordre Public. Mais la Jurisprudence est hésitante. Certaines décisions ont pris pour critère la possibilité pour la femme de faire valoir ses moyens de défense. Ce qui est, de l’avis des commentateurs autorisés, une perception erronée de la répudiation. La répudiation n’est pas un combat judiciaire entre les époux à armes égales.

D’autres décisions ont admis de reconnaître la répudiation dès lors que la femme avait reçu une compensation pécuniaire. Ce n’est pas un bon critère. Quand on regarde le montant de la compensation (3000 FRF) on remarque que ce n’est pas équitable, cela est même dérisoire.

 

La Cour de cassation à proposer aux répudiations l’Ordre Public tiré de la Convention EDH et ceci sur deux terrains. Certaines décisions ont d’abord opposé l’Ordre Public procédural lié au fait que la répudiation était prononcée de manière non contradictoire (arrêt de 1994), puis un arrêt de 1997 invoquant toujours la Convention EDH s’est placé enfin sur le terrain de l’égalité des époux lors de la dissolution du mariage. Ceci est tiré de l’article 5 du protocole n°7 additionnel à la Convention EDH.

 

Mais 4 ans plus tard la cour de cassation a semblé revenir à sa Jurisprudence précédente disant que l’Ordre Public ne s’opposait pas à une répudiation unilatérale dès lors qu’il y avait eu une procédure au cours de laquelle chaque partie avait fait valoir ses prétentions et défenses et que le jugement (algérien en l’espèce) avait garanti des avantages financiers à l’épouse = arrêt du 3 juillet 2001. De l’égalité des époux il n’est plus question.

 

Autre arrêt mais de la CA de Paris, non moins remarqué, du 13 décembre 2001 dans laquelle la CA réaffirme la contrariété à l’Ordre Public de la répudiation unilatérale.

L’explication se trouve dans le fait que de par la forme des décisions françaises on ne peut pas très bien apprécier et comparer les situations sous-jacentes d’un arrêt à l’autre or il peut arriver qu’une motivation soit utilisée pour rendre une solution d’équité. Ex : l’un de ces 1ers arrêts dans les années 80 qui a accepté de reconnaître une répudiation, quand on regarde bien la décision on voit que c’était le mari qui après avoir répudié sa femme, invoquait en France l’irrégularité de la dissolution du mariage. On comprend donc pour les juges l’ont empêché de parvenir à ses fins.

Certains admettent l’aspect personnel de la répudiation et de l’accepter car si le mari a décidé de répudier sa femme cela ne sert à rien de continuer le mariage.

En revanche, on opposerait l’Ordre Public aux effets pécuniaires de la répudiation dans la mesure où ce qu’obtient le cas échéant la femme est sans commune mesure avec ce qui est nécessaire à sa protection.

b. Les lois plus strictes.

 

Sous l’empire du droit antérieur à 1975, la politique législative française s’accommodait plus facilement des lois plus strictes étrangères y compris celles allant jusqu’à interdire le divorce ou bien une loi qui interdit le divorce pendant quelques années après le mariage.

Dans un cas seulement l’Ordre Public est intervenu dans des circonstances particulières. Affaire Patino : le mari était bolivien, la femme était espagnole, et par la combinaison du droit espagnol et du droit bolivien ne pouvait être prononcé ni le divorce prévu par la loi bolivienne ni la séparation de corps prévu par la loi espagnole. La cour de cassation a admis que là l’Ordre Public s’opposait à cette situation dans laquelle aucun remède n’était proposé aux époux, il a donc été admis la séparation de corps selon la loi française.

 

En 1975 avec la libéralisation du divorce on pouvait s’interroger sur une limitation de l’Ordre Public. Il n’y a pas eu de bouleversement. Le fait que la loi française soit devenue plus libérale, cela n’implique pas que soit déclarée contraire à l’Ordre Public des lois plus respectueuses que la loi française de la stabilité du mariage. Tout dépend du rattachement du divorce. Si deux époux ont la nationalité d’un état qui ne permet pas le divorce (Amérique latine), il n’y a pas de raison de permettre le divorce en France au nom de l’Ordre Public. Mais la question se pose dans un cas précis c’est celui de l’oubli du législateur en 1975, celui du conjoint français d’un époux étranger en l’absence de domicile commun en France. Nous sommes dans le 3ème cas de l’article 310. La loi française n’est pas applicable et on doit appliquer la loi étrangère qui se reconnaît compétence. Ça sera le plus souvent celle du conjoint français. La cour de cassation a dit que n’était pas contraire à l’Ordre Public une loi étrangère qui ne connaît que le divorce ou que la séparation de corps. Ceci a été jugé à propos de la loi tunisienne ne connaissant que le divorce et pas la séparation de corps. La loi esp ne connaissant que la séparation de corps et pas le divorce alors même qu’un époux français était en cause mais la cour de cassation a ultérieurement jugé que la conception française actuelle de l’Ordre Public impose la faculté pour un français domicile en France de demander le divorce = arrêt de 1981.

Concrètement, cela signifie qu’un français ou une française marié à un étranger domicilié dans le pays du conjoint dont la loi est plus restrictive que la loi française, normalement selon le 3ème point de l’article 310 c’est la loi étrangère qui va se reconnaître compétence. Le conjoint Français qui souhaite obtenir le divorce selon la loi française n’a de ressource que de transférer son domicile en France pour obtenir le divorce selon la loi française.

 

En toute hypothèse, lorsqu’on a appliqué la loi du divorce étranger, il ne faut pas qu’une restriction au divorce prévu par la loi étrangère procède de conception elle-même contraire à l’Ordre Public.

Ainsi une loi permettant de prononcer le divorce pour adultère de la femme mais qui ne permet pas à la femme d’invoquer l’adultère du mari est une restriction contraire à l’Ordre Public, au principe d’égalité entre les sexes.

 

II. La procédure du divorce et de la séparation de corps.

 

Expression « le divorce est une institution en forme de procès ». La procédure de divorce est en principe soumise à la loi du for par conséquent si à l’étranger la divorce n’emprunte pas la forme judiciaire on admettra la compétence de la loi locale.

Mais aussi, même si le divorce donne lieu à une procédure, c’est en général une procédure qui est liée au fait qu’il s’agit d’un divorce et non une procédure de droit commun. C’est pourquoi la loi du for risque d’être battue en brèche par la loi du fond.

A. La compétence de la loi locale.

 

Si le divorce est presque toujours judiciaire, un certain nombre de lois connaissent ou ont connu des formes de divorce non judiciaires. Les plus fréquents sont les divorces religieux mais on a connu aussi des divorces privés, divorces administratifs et même des divorces législatifs. Ces formes de divorce non judiciaires ont donné lieu à une Jurisprudence célèbre : arrêt de la cour de cassation qui a estimé que les tribunaux français n’étaient pas compétents pour prononcer le divorce de deux juifs russes dès lors que leur loi personnelle exigeait l’intervention d’un rabbin. On voit qu’on soumettait même la forme du divorce à la loi personnelle (Arrêt Levinçon). A l’époque il fallait appliquer autant que possible la loi personnelle.  Cette conception est Aujourd’hui abandonnée. Le personnalisme a reflué et le droit français n’a jamais admis que soit prononcé en France des divorces par d’autres autorités que des tribunaux. Du reste on ne pouvait pas maintenir la position de l’arrêt Levinçon car on pouvait aboutir à un déni de justice. Le droit Français n’admettant pas la validité de mariages religieux si la loi personnelle étrangère qui était religieuse ne reconnaissait pas le mariage civil français, il fallait bien que les tribunaux français acceptent le cas échéant de divorcer les époux.

Pourquoi ne pas admettre en France que soient prononcés des divorces religieux ou coutumiers ? Raison : le contrôle que souhaite exercer l’autorité publique sur la dissolution des mariages. On peut faire le parallèle avec la célébration du mariage. S’agissant de la dissolution d’un mariage par divorce, il est bon que l’autorité pub s’assure des conditions dans lesquelles le divorce est rendu d’autant plus que le divorce implique souvent des enfants. Il est donc normal que l’autorité pub prenne les décisions sur les conséquences du divorce.

En définitive, le caractère facultatif de la règle locus regit actum n’a jamais été admis en matière de divorce. Quelle que soit la nationalité des époux, on refusera de reconnaître des divorces consulaires, religieux et a fortiori des divorces privés qui auraient été prononcés en France. Ex de Jurisprudence : un acte de répudiation dressé à la mosquée de paris, un autre dressé au consulat général du Maroc à Paris. Il y a aussi l’affaire ZAgha : les époux de nationalité syrienne avaient procédé à un mariage religieux en Italie. Puis le mari avait contracté un second mariage en Israël et la 2ème épouse tentait de faire dire que le 1er mariage était sans valeur. La seconde épouse invoquait aussi le divorce prononcé par un tribunal rabbinique de Paris. Cet argument n’a pas eu de chance : un divorce religieux prononcé en France ne peut pas avoir d’effets civils. Réciproquement, la compétence de la loi locale est reconnue pour les divorces prononcés à l’étranger. Donc toute forme non judiciaire peut être reconnue pourvue qu’elle soit admise par la loi locale sous la seule réserve de l’ordre public. Ainsi des répudiations devant témoins selon la loi mosaïque, des répudiations devant notaires ou encore une déclaration conjointe des époux devant un officier de l’état civil.

B. Le domaine de la loi locale.

 

Il faut se demander où s’arrête la compétence de la loi du fond et où commence celle de la loi de procédure ?

 

Pourquoi ?Car en matière de divorce il y a des liens étroits entre la procédure et le fond. Il suffit d’observer qu’en droit français la procédure de divorce est régie pour l’essentiel dans le code civil. Voilà pourquoi la loi normalement applicable à la procédure (loi du for) est susceptible d’être concurrencée par la loi du fond. Ex : en matière de preuve, avant la réforme de 1975 il a été jugé que la preuve par aveu d’un époux qui avait été admise par un tribunal étranger se heurtait à la prohibition du divorce par consentement mutuel.

Un divorce avait été prononcé à l’étranger entre deux époux français à une époque où le droit français n’admettait que le divorce pour faute. Le tribunal étranger avait admis la faute des époux sur aveu. La cour de cassation  a donc refusé de reconnaître la compétence du for étranger sur la question de la preuve.

 

Les mesures provisoires : elles sont souvent nécessaires en début de procédure. Si le juge français est saisi d’un divorce mais que c’est une loi étrangère applicable au fond. En principe le juge français se prononcera sur les mesures provisoires selon la loi française sans égard aux lois applicables au fond du divorce. Mais ceci peut présenter l’inconvénient de rendre une certaine unité du divorce en amont avec les causes du divorce et en aval avec les effets du divorce. Or les mesures provisoires sont la préfiguration des mesures qui pourront être prises dans le cadre du divorce lui-même. C’est pourquoi en Jurisprudence s’est manifestée une tendance pour le juge aux affaires matrimoniales à prescrire des mesures provisoires selon la loi étrangère éventuellement applicable. Cela implique que le juge détermine d’entrée la loi applicable au divorce. Dans ce cas le droit français ne s’appliquerait plus que de manière exceptionnelle, au titre de l’urgence ou au titre de l’Ordre Public.

Cette question a aujourd’hui un champ d’application réduit du fait que l’article 310 ne laisse qu’une place résiduelle aux lois résiduelles.

Sur la garde des enfants c’est la convention de 1961 qui résout le problème.

 

III. Les effets du divorce et de la séparation de corps.

 

Après avoir vu la loi applicable il faudra traiter de certaines questions propres à la matière de la séparation de corps.

A. La loi applicable

 

La loi qui régit les causes de divorce (en amont) en vertu de l’idée de respect des ensembles législatifs semble avoir le plus le titre à régir les effets du divorce. Elle en a plus que la loi de procédure. Dans la mesure où c’est une autre loi qui s’appliquait aux causes du divorce, l’homogénéité veut qu’on applique la loi des causes du divorce.

Une autre loi qui pourrait s’appliquer est la loi personnelle des époux : on est dans la matière du statut personnel donc il s’agit de régir ici les effets d’un divorce entre deux personnes, on pourrait penser appliquer la loi personnelle des époux. Mais il s’agira dans ce cas des effets concernant les deux époux et leurs enfants. Appliquer la loi personnelle c’est s’exposer à des lois différentes si les époux sont de nationalité différente.

Donc en principe c’est la loi de la cause qui s’appliquera.

1. Les effets personnels.

a. La situation des époux eux-mêmes.

 

On va donc appliquer en principe la loi qui a régit les causes. Donc ces effets ce sont la rupture du lien dans le cas du divorce, le relâchement du lien dans le cas de la séparation de corps.

Il y a cependant certains effets personnels du divorce qui n’intéressent qu’un époux. Des effets ne sont pas réciproques comme la possibilité de contracter un nouveau mariage avec par exemple la question du délai de viduité. Voilà un effet du divorce qui est individuel donc on appliquera la loi personnelle de l’épouse concernée.

Il se pourrait que la loi personnelle ne reconnaisse pas le divorce. Ex : la loi du divorce est la loi du domicile des époux et la loi personnelle contredit la loi du domicile … ???

 

Dans le cas où l’on désigne la loi personnelle d’un époux, l’Ordre Public peut intervenir à l’encontre de cette loi. Par ex il y a eu des lois qui édictaient des restrictions au remariage du conjoint divorcé à titre de sanction lorsque le divorce était prononcé à ses torts (cas du droit Suisse auparavant). L’ORDRE PUBLIC a été opposée à ces dispositions dans la mesure où elles sont devenues anachroniques.

 

Autre cas : dans le cadre du droit mosaïque. Une institution particulière de ce droit qui interdit le remariage de la femme si le mari de lui n’a pas délivrer un acte qui porte le nom de gueth. Les tribunaux ne tiennent pas compte de cet empêchement et condamnent éventuellement le mari récalcitrant à verser des dommages et intérêts à la femme.

 

S’agissant du nom : cette question est à la charnière des effets individuels du divorce et de ses effets mutuels. Cela ne soulève pas de problème si le divorce est régi par la loi personnelle commune des époux. Lorsque le divorce est soumis à une autre loi comme la loi du domicile on considère que c’est la loi du divorce qui doit l’emporter. Mais aussi dans le cas où les tribunaux sont amenés à prononcer le divorce selon une loi étrangère on peut aussi envisager une loi d’application immédiate de l’article 264 alinéa 3 du Code civ : possibilité pour la femme de conserver l’usage du nom de son mari avec l’autorisation du juge.

b. La garde des enfants et droit de visite après le divorce.

 

Cela pose problème en raison de l’enchevêtrement des textes et puis de la situation que pose les enlèvements internationaux d’enfants.

 

¨ L’attribution de la garde.

 

C’est une question qu’on a déjà traité en étudiant les mesures de protection des incapables.

Il y a eu d’abord le régime de droit commun (avant la convention internationale) : la question était de savoir en l’absence de toute convention internationale si la garde des enfants au moment d’un divorce, était régit par la loi des causes du divorce ou par la loi personnelle de l’enfant (loi qui est différente dans cette hypothèse) ? Pendant longtemps la Jurisprudence a été favorable à l’application de la loi du divorce, la garde étant considérée comme un effet personnel du divorce. La raison est qu’en droit interne français, avant la réforme de 1975, l’attribution de la garde était liée au profit du divorce, selon qu’il a été prononcé aux torts de l’un ou l’autre. Puis la Jurisprudence interne a évoluée et prenait en considération l’intérêt de l’enfant (article 287 du code civ le consacre). Il apparaît que le centre du rapport juridique constitué par la garde juridique constituée après divorce c’est l’enfant et donc la Jurisprudence s’est prononcée par l’application de la loi personnelle de l’enfant. Cela soulevait une difficulté fréquente du fait de la double nationalité de l’enfant

 

Depuis 1984, ce sont les dispositions de la convention de La Haye de 1961 qui s’appliquent à l’attribution de la garde à l’occasion d’un divorce dès lors que le mineur a sa résidence habituelle en France. Dès lors c’est un rattachement autonome. Si le mineur a sa résidence habituelle en France les autorités françaises sont compétentes pour statuer selon leur loi. Mais aussi (complication) les autorités de l’état national du mineur conservent une compétence selon les articles 3 et 4 de la convention. C’est une des raisons pour lesquelles la convention de 1961 n’a pas bien fonctionné et c’est une des raisons qui a entraîné la rédaction de la convention de 1996.

 

Avant d’en arriver là il faut préciser que la question de la garde ne se pose pas qu’au moment du divorce. Bien sûr une décision va être prise au moment du divorce mais la question peut se poser également après le divorce car la situation n’est pas figée. Il peut y avoir un changement dans la situation respective des parents et des enfants et un déplacement des rattachements pertinents comme la résidence habituelle de l’enfant.

Dans tous les cas c’est toujours la convention de 1961 qui s’applique. En cas de déplacement licite de la résidence habituelle de l’enfant, on pourra toujours solliciter des mesures nouvelles de la part des autorités de la nouvelle résidence habituelle ou même des autorités de l’état national.

 

Il faudra tenir compte de la convention de 1996 dans un futur proche. Il ne faut pas oublier l’article 10 : on n’écarte pas toute possibilité pour le for du divorce de statuer sur la garde de l’enfant.

Il faut rappeler que la compétence du for du divorce va cesser dès que le divorce a été rendu. Par conséquent, si de nouvelles mesures sont demandées, elles le seront selon les règles de compétences normales c’est à dire devant les autorités de la résidence habituelle de l’enfant.

 

Sur le règlement du 27 novembre 2003 : Dans les relations entre les états membre de l’UE, ce règlement primera sur la convention de La Haye de 1996.

 

¨ La préservation de la garde en cas de déplacement ou de rétention de l’enfant à l’étranger.

 

Il s’agit d’enfant né de parents de nationalité différente. Une décision statut sur la garde au profit d’un des deux parents. L’enfant est alors enlevé par l’autre parent à l’étranger (à l’occasion de l’exercice du droit de visite par exemple).

 

Les tribunaux peuvent éventuellement tenir compte de ce risque de manière préventive au moment où ils statuent sur les droits de garde et de visite. L’autorité qui statut peut restreindre l’exercice du droit de visite à certains lieux précis voire interdire la sortie du territoire métropolitain ou assortir l’exercice du droit de visite de certaines garanties. Cela n’empêche pas que l’enfant soit déplacé illicitement ou soit retenu.

Ce problème ne peut être résolu que par des conventions. Il y a des conventions classiques qui sont inefficaces. Il y en a une qui est efficace et originale car elle organise une vraie coopération entre les états.

 

La 1ère convention est celle de Luxembourg du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière de garde. C’est une convention qui a été adoptée dans le cadre du conseil de l’Europe. Elle fait double emploi avec la convention de La Haye de1961. Cette dernière prévoit la reconnaissance des mesures en matière de garde entre les états contractants. Selon quelle procédure un état peut-il édicter des mesures lourdes d’exequatur qui relèvent de son droit ?

La convention de Luxembourg organise une procédure d’exequatur simple et rapide. Si l’enfant se trouve dans un autre état, on peut faire rapidement reconnaître une décision prise dans un autre état et l’appliquer.

L’articulation entre ces deux conventions posent des problèmes car il existe dans les deux des motifs de non reconnaissance des décisions or ces motifs ne sont pas les mêmes.

 

Beaucoup plus efficace est la convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfant.

Cette convention est ouverte aux états non membres des états membres de la conférence de La Haye. Elle est appliquée par 70 états. Mais sont absents de cette liste eux avec lesquels les problèmes sont les plus aigus.

L’objet de la convention s’est de garantir le retour immédiat de l’enfant dans l’état de sa résidence habituelle en cas de déplacement ou de non-retour illicite.

 

La situation visée est la suivante : un droit de garde a été reconnu à une personne ou à une institution selon le droit de l’état où l’enfant a sa résidence habituelle. Ce droit peut résulter d’une décision judiciaire ou administrative mais aussi de la loi. Conséquence : le droit de garde doit être effectivement exercé. Enfin l’enfant a été déplacé ou bien il est retenu de manière illicite c’est à dire en violation de ce droit de garde.

 

Quels sont les moyens mis en œuvre ? L’aspect essentiel est la mise en place dans chaque état d’une autorité centrale qui est chargée de coopérer de la manière la plus large avec les autres états en vue de satisfaire aux obligations de la convention. La 1ère de ces obligations est le retour de l’enfant dans l’état de sa résidence habituelle. Pour cela le demandeur qui peut être une personne ou une institution saisi une autorité centrale. Le demandeur peut saisir soit l’autorité centrale de son propre pays, soit le demandeur peut saisir directement l’autorité centrale étrangère en lui communiquant toutes les informations essentielles. Selon la convention, l’autorité ainsi saisie doit prendre ou faire prendre toute mesure propre à assurer la remise volontaire de l’enfant (article 10). Ces mesures consistent dans la localisation de l’enfant, assurer sa protection immédiate s’il est en danger, communiquer les informations au demandeur, et assurer la remise volontaire de l’enfant et son retour.

Il est précisé que l’autorité judiciaire ou administrative du pays où est l’enfant qui est saisie par l’autorité centrale locale doit procéder d’urgence (article 11). Ici on veut dire que dans la mesure où l’autorité centrale ne peut agir elle-même, les autorités locales saisies doivent agir selon leurs procédures d’urgence locale.

Le retour de l’enfant doit être organisé. Aucune action tendant à statuer sur la garde n’est possible aussi longtemps que les conditions d’application de la convention sont réunies. Cela signifie que lorsque des décisions ont été prises en matière de garde, ces décisions ne sont pas figées, il est possible de demander une modification. Dans notre cas, la défense fréquence est le non entretien de l’enfant et la demande de la modification de la garde. Mais cela est impossible. On veut bien discuter de la garde mais il faut d’abord restituer l’enfant. C’est là qu’on touche du doigt le caractère original de la convention qui ne concerne pas le fond du droit par rapport à la convention de Luxembourg qui vise à conférer un droit de garde.  Avec la convention il est question de mettre fin à une voie de fait, il n’est pas question de toucher au fond.

 

Les effets de la demande de restitution : L’autorité judiciaire ou administrative doit ordonner le retour immédiat de l’enfant. Mais ceci n’est pas sans différentes réserves. Tout d’abord ceci cesse d’être une obligation lorsque plus d’un an s’est écoulé. Dans ce cas le retour peut ne pas être ordonné s’il est établi que l’enfant s’est intégré dans son nouveau milieu.

Ensuite, selon l’article 13, l’autorité saisie n’est pas tenue d’ordonner le retour lorsqu’il est établi que la personne qui avait soin de l’enfant n’exerçait pas effectivement le droit de garde ou bien a acquiescé au déplacement. Ou bien encore lorsqu’il existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable.

Enfin l’autorité saisie peut ne pas ordonner le retour si l’enfant s’oppose à son retour alors qu’il a atteint un âge et une maturité justifiant qu’il soit tenu compte de son opinion. On note que la convention cesse de s’appliquer lorsque l’enfant a atteint l’âge de 16 ans

 

La convention constitue un progrès certain. La difficulté se présente avec les pays qui ne la ratifient pas (pays musulmans surtout) en raison des conditions particulières qui président à l’attribution de la garde dans les pays musulmans. L’enfant né d’un parent musulman est musulman. Un juge a le devoir de favoriser le maintien de l’enfant dans la religion musulmane.

Cela dit des accords bilatéraux ont été conclu entre la France et la Maroc, la Tunisie, l’Egypte et avec l’Algérie.

2. Les effets pécuniaires du divorce.

a. La pension alimentaire éventuelle entre époux.

 

La Jurisprudence appliquant la loi du divorce c’est à dire la loi des causes du divorce pour une raison d’homogénéité des ensembles législatifs.

La convention de La Haye de 1973 sur la loi applicable aux obligations alimentaires curieusement consacre cette solution. Ce qui est remarquable c’est que pour la détermination initiale de la pension et pour sa modification éventuelle, si un des époux vient solliciter une modification de ce qui a été décidé en matière alimentaire, il faudra retourner devant le juge du divorce. Si la question est régie par une loi étrangère, intervient la question de l’Ordre Public. Une loi étrangère qui ne prévoit pas de secours pécuniaire pour la femme divorcée ou répudiée est contraire à l’Ordre Public français. 

 

Une autre question importante est la convention entre époux en vue du divorce. Ces conventions ont jadis été déclaré contraire à l’Ordre Public Français car il s’agit d’état des personnes et que la conception traditionnelle dans l’état des personnes est qu’on est dans l’impératif donc aucune place pour l’autonomie de la volonté.

La loi sur le divorce de 75 et toutes les réformes sur le droit de la famille ont toutes été dans la direction d’un desserrement du caractère impératif pour faire une place à la volonté autonome des personnes. S’agissant du divorce lui-même, ce type de convention entre époux aménageant les suites du divorce est encouragé par la loi (article 230 et 246 du code civil).

Voilà pourquoi en matière internationale, l’attitude à l’égard de ce type d’arrangement entre époux doit s’assouplir.

On devrait accepter une convention entre époux si elle est valable selon l’une des lois à laquelle se rattache la situation. C’est à dire que les époux doivent pouvoir passer une convention sur les effets patrimoniaux du divorce en désignant une loi applicable qui tolère ce type de convention à condition bien entendu que cette loi présente un lien significatif avec la situation.

 

En dehors de la pension alimentaire, on peut considérer que les effets patrimoniaux dans l’ensemble relèvent de la loi du divorce. Quels sont ces effets ? Une prestation compensatoire, éventuellement des dommages et intérêts destinés à compensés le préjudice causé par le divorce. Il y a toute sorte de modalités possible avec une précision cependant. C’est que lors d’un divorce peuvent également être attribuées des réparations pour sanctionner des préjudices indépendants de la rupture du lien conjugal. Par ex en cas de brutalité d’un époux envers l’autre, en cas d’atteinte à son honneur, du point de vue du Droit International Privé cela relève d’une qualification délictuelle (on est plus dans le domaine du divorce), on appliquera la loi du lieu de survenance des faits.

 

S’agissant du régime matrimonial, il fait l’objet d’une qualification particulière, c’est à dire qu’il y a une loi applicable au régime matrimonial (on l’étudiera plus tard), c’est à dire que l’influence du divorce ou de la séparation de corps sur le RM relève de la loi applicable au RM et non pas de la loi du divorce.

 

 

B. Les questions propres à la séparation de corps.

 

La séparation de corps par définition ne met pas fin au mariage. Par conséquent le prononcé d’une séparation de corps entre les époux fait naître une concurrence entre la loi des effets du mariage (cf. 2) et la loi de la séparation de corps qui crée une situation nouvelle au sein du mariage.

 

Avant 1975, le même rattachement déterminait la loi des effets du mariage ainsi que la loi de séparation de corps et de ses effets. Cette loi était loi du système RIVIERE (loi nationale commune, à défaut loi du domicile commun qui s’appliquait aux effets du mariage et à la séparation de corps). En 75 est introduite une règle de conflit de l’article 310 propre au divorce et à la séparation de corps. Cette règle de conflit doit être cantonnée à la séparation de corps et ne pas s’appliquer aux effets du mariage, c’est l’avis général. De sorte qu’il peut y avoir une dissociation entre la loi des effets du mariage et la loi de la séparation de corps. Ex : deux époux étrangers de même nationalité domiciliés en France. En vertu de l’article 310, la loi française s’applique à une action en séparation de corps et si elle est prononcée s’applique aux effets de la séparation de corps. Mais les époux sont toujours mariés et si on maintient les effets du système RIVIERE c’est la loi nationale commune qui s’applique aux effets du mariage. Comment articuler cela ? On va dire que la loi de la séparation de corps détermine la mesure dans laquelle les obligations des époux sont affectées. Elle détermine aussi les circonstances qui peuvent mettre fin à la séparation. Dans le même temps, la loi des effets du mariage déterminera en principe l’étendue des obligations qui subsistent selon la loi applicable à la séparation du corps.

C’est une dichotomie subtile.

La loi de la séparation dans cette hypothèse.

Lorsqu’il y a un changement de rattachement entre la séparation et la demande de conversion de sorte que la loi qui est Aujourd’hui applicable au divorce n’est pas la loi selon laquelle la séparation a été prononcée. D’un côté il faut appliquer la loi du divorce mais dans la mesure où la conversion en divorce repose sur des faits qui ont motivés la séparation il faut que ces faits justifient le divorce selon la loi actuelle. La question a été mise en lumière par l’affaire Ferrari. Mme Ferrari était un française devenue italienne par son mariage. Une séparation de corps a été prononcée entre les époux en Italie de leur consentement mutuel. Puis Mme Ferrari a repris la nationalité française. La règle de conflit antérieure (nationalité italienne) n’était plus applicable. Mme Ferrari demande la conversion de la séparation de corps en France. Il a été jugé que la loi applicable au divorce était la loi française. Néanmoins, la conversion est refusée parce que la séparation de corps a été prononcée du consentement mutuel des époux et que le droit français, droit du divorce n’admettait pas le divorce par consentement mutuel. Donc ici quand la loi Aujourd’hui applicable au divorce n’est pas la loi de la séparation de corps dès lors que la conversion est un prolongement de la séparation, la conversion ne peut intervenir que s’il existait un motif au divorce semblable à cela de la séparation de corps. C’est un problème d’équivalence entre la loi de la séparation et la loi du divorce.

 

De ce qu’on vient de voir, il résulte que peut être converti en divorce en France une séparation qui est intervenue selon une loi qui ne connaît pas le divorce mais pour une cause (la séparation) qui est susceptible de conduire au divorce selon la loi française qui est devenue depuis applicable.

 

IV. Le règlement communautaire sur la compétence et l’exécution des décisions en matière matrimoniale.

 

La convention de Bruxelles de 1968 sur la compétence des jugements. Au fond, cette convention s’applique en matière civile et commerciale mais que les questions familiales en étaient exclues parce que la convention concernait la communauté économique européenne.

En la forme la convention de Bruxelles n’était pas un acte communautaire, c’était une convention internationale ordinaire conclue entre les états membres de la communauté.

 

Sur ces deux points le contexte a changé. Le traité de Maastricht de 92 a introduit de nouveaux piliers communautaires. L’un de ces piliers, le 3ème c’était la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures. A l’intérieur de l’article K 1 du traité était érigée en matière d’intérêt commun parmi d’autres la coopération judiciaire en matière civile. Dans ce domaine comme dans d’autres (art K 3 paragraphe 2C) il est établi que le conseil établisse des conventions dont il recommanderait l’adoption par les états membres. Ainsi a été préparée en 1997 une convention relative à la signification et à la notification dans les états membres des actes judiciaires et extra judiciaires en matière civile et commerciale.

Et puis en 1998, une autre convention appelée Bruxelles II sur la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale. S’agissant de conventions internationales, il fallait que ces conventions soient ratifiées par les états membres.

 

La dessus intervient en 1997 le traité d’Amsterdam qui va modifier la répartition des compétences. Ce traité d’Amsterdam procède à une communautarisation du 3ème pilier. C’est à dire que dans les matières concernées la compétence est transférée à la compétence. C’est un nouveau titre IV du Traité CE intitulé « Visas asile, immigration, et autres politiques liées à la libre circulation des personnes. ».

3 états ne participent pas à ce titre IV, le RU, l’Irlande et le Danemark. Ces états peuvent manifester leur volonté de se soumettre à ces mesures mais n’y sont pas obligés.

Quelles sont ces matières ?Elles sont énumérées à l’article 65 du Traité. Dans cet article on parle de simplifier la notification transfrontière des actes judiciaires. On parle de coopération en matière d’obtention des preuves, de reconnaissance et d’exécution des décisions en matière civile et commerciale et puis aussi favoriser la compatibilité des règles applicables dans les états membres en matière de conflit de lois et de compétence.

 

Le 29 mai 2000 ont été adopté 3 règlements du Conseil. Deux de ces règlements reprennent en substance le contenu des deux projets de conventions (97 et 98). Le règlement sur la signification des actes : n° 1348-2000.

Le 3ème règlement concerne les procédures d’insolvabilité.  C’est le 22 décembre 2000 que la convention de Bruxelles I a été transformée en règlement avec quelques modifications.

 

Le but de tout ceci, c’est de rendre plus facile l’adoption et la modification de textes que lorsque l’on procède par la voie de convention. Sur ce point on ne peut pas nier qu’ils ont raison. L’expérience des conventions de Bruxelles et de Rome montre que la négociation des conventions est longue et il en est de même pour la ratification.

 

Ce qui est gênant en revanche c’est l’anonymat dans lequel ces textes sont préparés, l’absence de travaux préparatoires et le caractère arbitraire qui se dégage parfois des dispositions. Selon Audit, avec l’article 65, les autorités communautaires sont prises d’une certaine frénésie : adoption de Rome II, un règlement Rome III sur la loi applicable aux obligations délictuelles et même des dispositions unifiant les règles de conflit en matière de divorce en matière matrimoniale.

 

Règlement 27/02/2003est applicable dans ces matières. Il entrera en vigueur le 1er août 2004.

Il y a aujourd’hui une mobilité croissante, il y a  une multiplication des mariages mixtes. Lorsque les choses se passent mal, il y a des problèmes juridiques accrus car chacun va s’efforcer de plaider dans son pays, les décisions prises pourront ne pas être reconnues dans l’autre état membre, et la question est douloureuse quand il y a des enfants. Le règlement précédent, celui de 2000, traitait du problème des enfants communs. Le nouveau règlement sépare presque complètement ce qui concerne le divorce (la désunion) et ce qui concerne la responsabilité parentale. Dans le chapitre 2 consacré à la compétence on a une section 1 sur la désunion et une section 2 sur la responsabilité parentale. La seule communication qu’il y a est en ce qui concerne la responsabilité parentale à l’article 12 alors que l’autorité compétente est normalement celle de la résidence habituelle de l’enfant, peut également rendre compétent le for du divorce, mais à des conditions déjà étudiées (cf. plus haut).

 

Donc on va parler de la compétence et de la reconnaissance des décisions en matière de désunion des époux. L’important étant que statut un for et un seul et que la décision qu’il rend soit reconnue sans discussion ou presque dans tous les autres états membres.

Le champ d’application du règlement c’est le divorce, la séparation de corps l’annulation du mariage = désunion du couple. Cela n’inclus pas les relations patrimoniales comme les RM et les successions.

Puisque la convention de La Haye de 1973 en matière de pension alimentaire donne compétence au for du divorce, dans la mesure où la convention est en vigueur dans l’état du for, le tribunal qui statut selon le règlement statuera aussi sur la pension alimentaire éventuelle.

Lorsque le for saisi du divorce aura statué néanmoins sur des questions patrimoniales relevant du RM, cette décision bénéficiera de la reconnaissance automatique dans les autres états membres selon la convention en ce qui concerne la désunion des personnes mais sur les autres aspects,  c’est le droit commun de l’état requis (Arrêt Munzer en France) qui s’appliquera.

A. Les règles de compétence.

 

Les chefs de compétence sont alternatifs et non hiérarchisés. En fonction de la situation des époux (nationalité, résidence), dans un cas donné, plusieurs tribunaux sont susceptibles d’être saisis. Etant donné qu’on est en matière contentieuse par hypothèse, cela présente l’inconvénient d’inciter le cas échéant un époux à agir rapidement pour fixer une compétence. Si les deux époux agissent en même temps cela oblige à s’occuper des conflits de compétence.

1. Les critères de rattachement.

 

                Ils sont fondés sur la résidence habituelle. Mais aussi un part est faite à la nationalité (normal puisque le divorce se relie à l’état des personnes)

 

En DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ on oppose volontiers nationalité et domicile. On a tendance à dire que dans les systèmes de Common Law, le statut personnel se rattache au domicile. Ambiguïté car en droit français le domicile = la résidence. Mais en droit anglais le mot domicile a une signification plus profonde : C’est le domicile d’origine au sens international que l’on acquiert à la naissance en fonction du domicile au même de sens de ses parents et on perd ce domicile d’origine que si dans sa vie on a eu une intention certaine de fixer son domicile au sens anglais dans un autre pays.

Ce second domicile on appelle ça le domicile of choice.

La notion de domicile est très stable. La notion anglaise de domicile n’est pas fugitive mais en fait n’est pas éloignée de notre nationalité.

Cette parenthèse explique pourquoi lorsque le règlement 2003 parle de la nationalité des époux, le règlement ajoute systématiquement ou dans le cas du RU et de l’Irlande le « domicile »

Selon l’article 3-1, sont compétentes les juridictions :

·          De l’état de la résidence habituelle des époux.

·          De leur dernière résidence habituelle dans la mesure où l’un des époux y réside encore.

·          De la résidence habituelle du défendeur.

·          En cas de demande conjointe, les juridictions de la résidence habituelle de l’un des époux.

·          Les juridictions de la résidence habituelle du demandeur s’il y a résidé depuis au moins un an avant la demande ou 6 mois, si l’intéressé est ressortissant de l’état en question ou s’il y a son « domicile » dans le cas du RU et de l’Irlande :…

·          Les juridictions de l’état de la nationalité commune des époux ou dans le cas du RU et de l’Irlande le domicile commun.

 

A cela l’article 5 ajoute qu’une juridiction d’un état membre qui a rendu une décision sur la séparation de corps est également compétente pour la convertir en divorce si sa loi le prévoit. Quand un rattachement de l’article 3 se réalise dans la communauté, aucune des juridictions pas désignées par l’article 3 ne peuvent être saisies.

C’est seulement lorsqu’aucun rattachement de l’article 3 ne se réalise dans la communauté, qu’une juridiction d’un état membre pourra connaître d’un divorce selon les règles de son droit commun.

2. La mise en œuvre des règles de compétence.

a. La vérification de la compétence : article 18

 

                article 18 : quand le défendeur a sa résidence habituelle dans un état contractant et qu’il ne comparait pas, la juridiction qui est saisie doit surseoir à statuer en attendant qu’il soit établi que le défendeur a été informé de l’action ou que toute diligence a été faite pour cela. L’idée de cette vérification est que toute personne ayant sa résidence habituelle dans la communauté doit être protégée des actions dont elle n’a pas connaissance.

b. La litispendance : article 19

 

                Le règlement offre une grande variété de for possibles. Le risque est que chaque époux intente une action devant le for qui est le plus commode pour lui.

L’article 19s’occupe du problème de manière originale, renforcée. Une condition habituelle de la litispendance est que les deux actions aient le même objet. Or dans le contexte de la désunion des époux il est envisageable qu’alors que l’un saisisse un tribunal d’une action en divorce, l’autre saisisse un autre tribunal d’une action en SC ou en nullité du mariage. Comme ces deux actions ne doivent pas se dérouler parallèlement il était nécessaire de prévoir une conception élargie de la litispendance. D’où l’intitulé de l’article : « litispendance et action dépendante »

 

La juridiction qui est saisie en deuxième doit surseoir à statuer jusqu’à ce que la compétence de la juridiction étrangère 1ère saisie soit établie. SI la compétence de la 1ère est établie, la seconde doit se dessaisir.

Mais l’article 19-3 dit que dans ce cas, l’époux qui était en demande devant la deuxième juridiction peut porter son action devant la 1ère saisie.

Cette situation est fréquente. Etant donné la primauté donnée à la 1ère juridiction en date, la question des dates est cruciale. Or l’expérience de la convention de Bruxelles a montré que les droits procéduraux nationaux divergents lorsqu’il s’agit de définir le moment auquel une juridiction est saisie. L’article 16 formule une règle commune et donne une définition communautaire de la date à laquelle une juridiction est réputée saisie.

B. La reconnaissance des décisions.

 

                Le but est de parvenir à une uniformité de statut au sein des états membres.

1. Les actes concernés.

 

                Ce sont naturellement les jugements mais le règlement va plus loin pour tenir compte du fait que déjà dans certains états le divorce n’est pas toujours judiciaire.

Le règlement s’applique aussi aux actes authentiques reçus et exécutoires dans un état membre.

Il s’applique aussi aux transactions conclues devant une juridiction.                                                         

Le modèle traditionnel du divorce judiciaire n’est pas exclusif des états membres de la communauté.

 

2. Les modalités de la reconnaissance.

 

                En droit commun quand on parle de l’effet des jugements étrangers, on distingue la reconnaissance des jugements et l’exécution. La distinction : la reconnaissance peut s’opérer de plein droit (sans qu’une décision française doit nécessaire), en revanche il faut passer par un exequatur quand la décision étrangère donne lieu à coercition sur les personnes ou exécutions sur les biens. Ainsi dans le règlement 2003 pour tout ce qui concerne la garde des enfants, une procédure d’exécution nécessaire est prévue mais en ce qui concerne la désunion des époux, il n’est pas besoin d’exécution, une simple reconnaissance suffit puisque le règlement ne traite pas des conséquences patrimoniales du divorce. Cette reconnaissance opère de plein droit dans les états membres et le règlement donne une précisions importante : aucune procédure n’est nécessaire pour la mise à jour des actes d’état civil (article 21-2).

 

Malgré que la reconnaissance opère de plein droit, elle est quand même subordonnée à certaines conditions de validité. Il y a quelques motifs exceptionnels de non reconnaissance.

A ce sujet quand il peut exister un doute, une personne peut avoir intérêt à solliciter une décision de reconnaissance ou du reste le conjoint peut avoir intérêt à intenter une action en non reconnaissance (action dénégatoire).

Malgré le principe de reconnaissance de plein droit, un époux peut tenter une action en reconnaissance ou en non reconnaissance d’un divorce prononcé à l’étranger.

3. Les motifs de non reconnaissance.

 

                Toute la philo du règlement est une circulation libre des décisions en matière matrimoniale.

S’agissant des motifs qui ne peuvent pas être soulevés : la compétence de l’autorité saisie n’a pas à être vérifiée : article 24

Toute révision au fond est interdite = article 26. C’est un examen d’ensemble d’une décision étrangère pour s’assurer qu’elle a été bien rendue aux yeux du juge requis.

Est exclu tout contrôle de la loi appliquée : il s’agira souvent de ménage mixte donc conflit de lois. Donc on pourrait concevoir que le juge s’assure que le juge étranger à appliquer les lois compétences selon les exigences du droit du juge requis.

Enfin, article 25, la reconnaissance ne peut être refusée au motif que la loi de l’état requis ne permet pas le divorce sur la base de faits identiques. Pas possible de repousser une reconnaissance en raison de la disparité des lois.

 

S’agissant des motifs exceptionnellement admis : Ils se rattachent tous pratiquement à l’idée d’Ordre Public.

L’absence de notification d’un acte introductif d’instance, à moins que le défendeur n’ait accepté la décision de manière non équivoque.

La contrariété manifeste à l’Ordre Public

L’inconciliabilité avec une décision rendue dans une autre instance opposant les parties dans l’état requis.

L’inconciliabilité avec une décision antérieurement rendue dans un état tiers et réunissant les conditions pour sa reconnaissance dans l’état requis.

 

SECTION 3: LA filiation.

SOUS-SECTION 1: LA filiation par le sang.

 

La filiation relève de l’état des personnes. Les questions qui en relèvent sont rattachées à la loi nationale. Seulement la filiation c’est un lien et c’est même un lien qui unit 3 personnes dans la filiation légitime. D’où des problèmes liés à la différence de nationalité.

Le plus souvent les conflits s’élevaient en matière de filiation naturelle. Aujourd’hui les déplacements migratoires des populations donnent lieu à une Jurisprudence nourrie en la matière. Ces conflits de lois sont apparus plus nombreux en matière de filiation légitime car la femme qui épouse un étranger conserve en général sa nationalité d’origine.

La Jurisprudence avait édifié un système dans lequel la même loi s’appliquait à l’établissement de la filiation ainsi qu’aux effets. Ce système est Aujourd’hui fini. La mise à bas du système est entamée par la convention de la Haye régissant certains aspects de la filiation tels que l’obligation alimentaire. Le législateur a achevé de détruire le système avec la loi du 3 janvier 1972. Des articles 311-14 à 311-18 ont été insérés sur les conflits de lois relatifs à l’établissement de la filiation.

 

I. L’établissement de la filiation.

 

Les solutions antérieures à 1972 : s’agissant d’établir une filiation naturelle, il fallait choisir entre la loi du parent et la loi de l’enfant. Choisir la loi du parent présentait un inconvénient c’est que le cas échéant ce n’était pas la même loi qui était applicable à la filiation maternelle ou paternelle. On a estimé également qu’entre les deux personnes, l’enfant était l’élément le plus important car il s’agit de pourvoir à son intérêt et la Jurisprudence s’est donc prononcée en définitive pour l’application de la loi de l’enfant.

 

En matière de filiation légitime il y a 3 personnes car le lien est indivisible. La Jurisprudence dans son dernier état a décidé d’appliquer la loi de la famille. Quelle était cette loi ? Elle était déterminée selon le système RIVIERE c’est-à-dire loi nationale commune des parents, et à défaut de cette loi, loi du domicile commun.

A. La détermination de la loi applicable.

 

En principe on commence par une simplification car le législateur en 72 pose une règle de conflit unique pour la filiation légitime et naturelle. Sans doute, le législateur a-t-il voulu marquer le principe d’égalité entre les filiations légitime et naturelle. Seulement c’est une erreur car filiation légitime et naturelle se distinguent objectivement par l’élément essentiel que constitue l’existence ou l’absence du mariage. Par conséquent ce n’était pas faire une discrimination aux yeux des enfants naturels en posant un R2C distincte. Cependant, le législateur n’a pas pu s’empêcher de poser des règles particulières pour chacune des filiations finalement.

1. Règles générales.

 

Il y en a plusieurs car l’article 311-14 édicte une règle de principe qui est de nature bilatérale mais cette règle de principe est aussitôt assortie dans l’article 315 d’une large exception en faveur de la loi française.

a. Le rattachement de principe.

 

L’article 311-14 : « la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant ; si la mère n’est pas connue, par la loi personnelle de l’enfant. »

 

Donc le rattachement est la loi personnelle de la mère.  La mère joue un rôle de 1er plan dans le rapport familial. On a fait valoir que ce critère est plus sûr car la mère est presque toujours connue alors que le contentieux porte souvent sur la paternité.

Critique de ce principe : C’est peu convaincant car en matière de filiation naturelle, il peut être curieux d’appliquer la loi de la mère à l’établissement de la paternité…

Pour la filiation légitime, on a critiqué de soumettre une relation à 3 personnes à la loi d’une seule. En plus il y a une généralisation par la femme mariée de sa nationalité d’origine. La mère aura fréquemment une double nationalité.

 

Sur la certitude de la maternité, dans cette disposition de l’article  311-14, est envisagé le cas où la mère n’est pas connue. Ici c’est la loi de l’enfant qui s’applique mais cela soulève un cercle vicieux. Dans tous les cas où l’action a pour objet l’établissement de la maternité naturelle, au départ de l’action, la filiation maternelle n’est pas établie cependant cette action postule la désignation de la mère prétendue d’où la question : faut-il se placer au départ de l’action donc considérer que la mère est inconnue et alors appliquer la loi personnelle de l’enfant ou bien puisque la demande désigne la mère, faut-il appliquer la loi de la mère désignée ? Dans un arrêt du 11 juin 1999, la cour s’est prononcée pour la loi de la mère désignée. Mais cette règle générale connaît un tempérament.

b. L’influence de la résidence habituelle des intéressés en France.

 

article 311-15 : si les intéressés (l’enfant légitime, son père et sa mère, l’enfant naturel avec son père ou sa mère) ont en France leur résidence habituelle, la possession d’état produit toutes les conséquences qui en découlent selon la loi française. Cela signifie que les dispositions françaises du droit interne sont d’application immédiate nonobstant la nationalité de la mère. Ici la possession d’état vise à protéger les situations établies. Il faut éviter la perturbation possible qu’entraînerait l’application de la loi de la mère.

Mais le droit interne ne prend pas seulement en compte l’existence de la possession d’état, il attache aussi des effets à l’absence de possession d’état à l’égard d’un époux. Faut-il appliquer les dispositions sur l’absence de possession d’état ? La Jurisprudence s’est prononcée pour l’application de 311-15 aux conséquences de l’absence de possession d’état.

2. Règles de conflits particuliers.

 

Trois règles figurent de 311-16 à 311-18 qui concernent la reconnaissance d’enfant naturel (311-17), la légitimation (311-16) et l’action à fin de subsides (311-18). Ces différentes règles ont deux points communs. Ces règles au fond visent à favoriser l’enfant au niveau de sa reconnaissance, de sa légitimation et de l’allocation de subsides. En Droit International Privé quand on veut favoriser une personne on le fait en ouvrant des rattachements. La règle de conflit devient un rattachement multiple.

a. La reconnaissance d’enfant naturel.

 

Dans le système antérieur on appliquait une loi unique, celle de l’enfant et ce, quel que soit le mode d’établissement de la filiation : action judiciaire ou reconnaissance et aussi quel que soit le parent concerné.

311-17formule une règle propre à la reconnaissance. La reconnaissance est valable selon le texte si elle a été faite en conformité soit de la loi personnelle de son auteur soit de la loi personnelle de l’enfant. La finalité substantielle de cette règle à coloration matérielle est de favoriser l’établissement de la filiation. Conséquence : si l’enfant a été reconnu et qu’une personne agit en nullité de la reconnaissance, la nullité ne pourra être prononcée que si elle est encourue selon les deux lois.

 

Cette disposition soulève des difficultés. La plus importante est celle de savoir si 311-17 doit être considéré comme une disposition autonome, dérogeant à l’article 311-14 (compétence de la loi de la mère), ou bien si l’article 311-17 n’est qu’un complément à 311-14, une règle supplémentaire qui ajoute des rattachements.

 

Si on prend la 1ère interprétation (article 311-17 = disposition autonome), la reconnaissance échappe à la loi de la mère lorsque la reconnaissance émane du père. Par conséquent si la reconnaissance du père est nulle selon 311-17 elle ne pourra pas être validée par application de la loi de la mère.

 

Selon la 2de interprétation (311-17 est un complément de 311-14), la reconnaissance d’un enfant naturel obéit aussi bien à la règle de 311-14 qu’à la disposition particulière de 311-17. En faveur de cette interprétation on peut dire qu’il serait incohérent, d’écarter le cas échéant une reconnaissance par le père qui ne serait valide que selon la loi de la mère alors qu’une action en recherche de paternité, obéirait à la loi de la mère. Rien dans les textes ne permet de choisir une interprétation plutôt que l’autre et la Jurisprudence est hésitante.

Un Arrêt de la cour de cassation de 1999s’est prononcé pour l’application de l’article 311-17 à une reconnaissance qui était faire par le père.

Si on admet que 311-14 s’applique aussi à une reconnaissance à ce moment-là la question se pose de savoir quelle loi consulter en 1er lieu. Pourquoi ? Car il est tout de même nécessaire de savoir selon quelle loi l’enfant est reconnu. L’interprétation la plus cohérente s’est de considérer que la filiation est régie en principe par la loi de la mère pour garder un semblant d’unité et de voir dans l’article 311-17 un complément qui permet le cas échéant de valider la reconnaissance lorsqu’elle ne le serait pas selon la loi de la mère. Lorsqu’une reconnaissance est annulable selon deux lois, par exemple la loi de la mère et la loi de l’auteur de la reconnaissance, et que cette reconnaissance est attaquée, l’esprit de l’article 311-17 (règle alternative) est de donner la préférence à la loi qui est la plus hostile à la remise en cause de la reconnaissance puisqu’on favorise la validité de la reconnaissance. Cela veut dire que par exemple, si les deux lois prévoient un délai pour exercer une action en nullité de la reconnaissance, on appliquera la loi qui prévoit le délai le plus cours. Dès lors que ce délai le plus cours est expiré on ne pourra pas prononcer la nullité de la reconnaissance en vertu de l’autre loi.

Autre exemple : si une des deux lois permet à une personne d’agir, tandis que l’autre loi ne permet à cette personne d’agir. Dans ce cas-là on appliquera la loi la plus restrictive. Donc si la reconnaissance est contestée par un tiers mais que cette contestation n’est pas possible selon l’une des deux lois, on s’opposera à la contestation en application de cette loi. Mais cela se complique quand une loi est plus favorable sur un point et moins favorable sur un autre point.

Autre difficulté, l’article 311-17 favorise le maintien des reconnaissances, seulement est on certain que le maintien d’une reconnaissance corresponde toujours au meilleur intérêt de l’enfant. L’expérience montre que beaucoup de reconnaissances sont mensongères et quand une reconnaissance est contestée souvent cela montre qu’elle ne correspond à la réalité.

 

Il y a une 2ème série de difficultés : l’article 311-17, peut conduire à ces conflits de filiation. Voici le cas où l’enfant reconnu est né d’une femme mariée et il est couvert par une présomption de paternité d’un autre que l’auteur de la reconnaissance. Or un des lois visées par l’article 311-17, ne s’oppose pas complètement à la reconnaissance par un tiers de l’enfant né d’une femme mariée. C’est la situation de l’article 334-9 à contrario en droit interne.

Ici, convient-il d’abord de faire tomber la présomption de paternité en vertu de la loi applicable qui est celle de l’article 311-14 ? Puis dans un 2ème temps convient-il de se prononcer sur la validité de la reconnaissance par le tiers selon une des lois applicables en vertu de l’article 311-17 ?

La deuxième manière de raisonner consiste à appliquer intégralement la loi de la reconnaissance. Donc on appliquera la loi de la reconnaissance à la question préalable du désaveu car il faut faire tomber d’abord la question de la filiation légitime. Cette 2ème solution apparaît contestable car elle aboutit à l’éviction de la loi qui s’appliquait jusque-là à la filiation et ceci du seul fait de la reconnaissance par un tiers dont on n’est pas certain qu’il soit le véritable père. Donc c’est la 1ère solution qui semble la meilleure.

 

Autre problème : L’article 311-17 vise plus d’une loi. C’est la possibilité de deux reconnaissances valables chacune selon une des deux lois différentes. Il n’y a ici aucune solution du point de vue du conflit de loi. On appliquera 311-12 qui prescrit de trancher en faveur de la filiation la plus vraisemblable.

b. La légitimation.

 

La Jurisprudence antérieure à la loi de 1972, avait fini par soumettre la légitimation dans son ensemble à la loi des effets du mariage c’est-à-dire loi nationale commune ou loi du domicile commun.

La loi de 1972 a multiplié les rattachements par faveur pour la légitimation, dans l’article 311-16. Selon ce dernier article, « le mariage emporte légitimation lorsque au jour où l’union a été célébrée, cette conséquence (la légitimation) est admise soit par la loi régissant les effets du mariage soit par la loi personnelle de l’un des époux soit par la loi personnelle de l’enfant. »

Théoriquement donc 4 lois sont possibles. Le rattachement est tellement multiple que l’on en vient à se demander si l’on est encore en présence d’une règle de conflit. On désignerait la loi la plus proche, c’est-à-dire la loi qui présente une situation qui présente les liens les plus étroits. Mais à partir du moment où on met sur un pied d’égalité les 4 rattachements possibles, on admet d’appliquer une loi qui n’est pas forcément la plus proche de la situation. Autrement dit, au lieu que la loi qui va être appliquée soit la conséquence de l’application de la règle de conflit, ici la loi appliquée va intervenir au départ du raisonnement. Si cette loi valide la légitimation et pas les autres, c’est cette loi qui est applicable. Donc du point de vue de la théorie, la règle de conflit traditionnelle recule face aux considérations de fond comme ici avec la légitimation.

Cela a conduit la cour de cassation à imposer au juge de rechercher d’office sans que les parties le demandent, si l’une des lois potentiellement applicable permet d’atteindre le but recherché

 

L’article 311-16va soulever des problèmes du même ordre que l’article 311-17. Le principal est la combinaison de l’article 311-16 avec les autres dispositions. D’abord, toute légitimation suppose une reconnaissance préalable. Donc on va trouver ici un problème qu’on a vu avec 311-17. Le problème est de savoir si la reconnaissance qui a précédé la légitimation, est soumise à sa loi propre déterminée par l’article 311-17 et peut être par l’article 311-14, et en cas de légitimation, la loi appliquée est-elle absorbée par l’article 311-16.

La question est encore plus compliquée, lorsque l’enfant dont il est question n’est pas un enfant naturel simple mais que cet enfant jouit d’une légitimité en vertu d’un mariage antérieur à la mère.

La Jurisprudence antérieure à 72 avait appliquée à l’ensemble des questions à la loi de la légitimation c’est-à-dire la loi des effets du mariage. Mais la 1ère Jurisprudence postérieure à 72 (jugement du TGI de Paris) a au contraire procédé analytiquement. C’est-à-dire que ce jugement s’est prononcé pour chaque question successive en appliquant à chacune la règle de conflit particulière qui la vise. C’est-à-dire qu’à la paternité du mari de la mère on applique 311-14. A la reconnaissance, l’article 311-17 et à la légitimation, l’article 311-16. C’était une solution compliquée. Un arrêt de la CA de Paris, a repris la position antérieure en appliquant directement l’article 311-16.

 

Sur la légitimation post nuptiale. Par ex quand le mari de la mère ne reconnaît l’enfant comme le sien qu’après le mariage. Normalement la légitimation par mariage doit s’appliquer de préférence à la règle de l’article 311-14. Mais l’article 311-16 parle de la situation au jour du mariage. Les commentateurs de la loi de 1972 ont fait observer que cette précision temporelle peut aller à l’encontre du but même de 311-16. Il est clair, que l’article 311-16 vise à favoriser la légitimation or il se peut que depuis le jour du mariage, les éléments de rattachement visés par 311-16, aient changés. Par ex, la loi personnelle des époux a pu changer. Il se peut que la loi ou les lois auxquelles conduirait aujourd’hui l’application de l’article 311-16, soient plus favorables que celles qui ont été désignées au moment du mariage. Il y a là une incohérence du législateur qui d’un côté favorise la légitimation la multiplication des rattachements et qui d’un autre côté bloque ces rattachements.

Aujourd’hui on est favorable à la légitimation mais la lettre de 311-16 est en sens contraire.

c. L’action à fin de subsides.

 

Selon 311-18, donne compétence au choix de l’enfant soit la loi de sa résidence habituelle soit la loi de la résidence habituelle du débiteur. Ici le but est l’obtention d’aliments.

311-18n’est pas en compétition avec 311-14 parce que l’action à fin de subsides n’est pas une action d’état, elle est plutôt délictuelle. Mais cette question est peu importante car on considère que 311-18 est devenue caduque avec l’entrée en vigueur de la convention de La Haye de 1973 sur les obligations en matière alimentaire. Encore que, la convention vise les obligations découlant de relations de famille de parenté. Donc on pourrait aussi lire ceci comme excluant les actions purement alimentaires. Cela montre en passant les difficultés des conventions qui unifient les Droit International Privé entre plusieurs états. Les conventions de La Haye ont un objet mais les droits internes connaissent une variété d’institutions ce qui pour certaines d’entre elles posent la question de savoir si elles entrent ou non dans le champ d’application de la convention. Ici l’action à fin de subsides entre-t-il dans le champ d’application de la convention alors qu’elle vise les obligations découlant de relations de famille de parenté ?

d. La qualification.

 

                En matière de filiation il peut y avoir deux sortes d’actions : celles qui tendent à établir un lien de famille (les actions d’état) et celles qui ont une fin alimentaire qui obligent le défendeur à verser des aliments à l’enfant. Dans la mesure où en droit français il y a deux types de conflit : 311-14 pour les actions d’état ou l’article 311-18 ou bien la convention de La Haye pour les actions purement alimentaires. Quand une action est fondée sur une loi étrangère on voit que pour choisir la R2C applicable il faut qualifier cette action étrangère. Est-ce une action alimentaire ou une action d’état (311-14) ? On examine l’action étrangère selon son régime dans le droit étranger afin de déterminer si ce régime la fait appartenir plutôt aux actions d’état ou plutôt aux actions alimentaires.

Il faut placer l’étoffe étrangère dans les tiroirs du système international. L’état étranger caractérise ses règles, l’état du for les classe.

 

B. Le fonctionnement des règles.

1. La question du renvoi.

 

                Il y a une situation de renvoi quand la loi étrangère que désigne la règle de conflit du for désigne elle-même une autre loi. En général on applique le renvoi dans un but de coordination du système du for et du système étranger. La Jurisprudence antérieure à 72 ne faisait pas un sort à part à la filiation. Le renvoi était appliqué en matière de filiation. La loi de 72 a modifié les données du problème.

a. Le cas de l’article 311-14.

 

                Une situation de renvoi naît du fait que le rattachement choisi par le for et celui choisi par la loi étrangère ne sont pas les mêmes. A partir du moment où le législateur de 72 a choisi pour rattachement la loi de la mère et où ce rattachement constitue une singularité en droit comparé, il est plausible que la loi étrangère, loi nationale de la mère, désigne une autre loi. Quand la situation se produit faut-il faire jouer le renvoi ?

Les commentateurs ont dit qu’il fallait faire jouer le renvoi pour remédier à la désignation de la loi de la mère. Cet argument montre que l’application du renvoi a pour effet de déjouer la volonté du législateur. Si on veut respecter sa volonté, il faut donc refuser de faire jouer le renvoi. C’est ce qu’on fait les 1ères décisions : 3 arrêts de la Cour de Paris. Ces arrêts ont déclaré que l’article 311-14 ne laisse pas à la loi personnelle de la mère la faculté de désigner les règles de conflit applicables à la filiation mais contient une désignation directe et impérative de la loi applicable.

 

Deux observations sur ceci : Tout d’abord si on lit attentivement ce motif cela vaut en toute matière. Donc si on généralise cela, ça exclut le renvoi en toute matière ! Enfin il aurait été très simple pour le législateur d’éviter cette interrogation. Ajouter un mot : appliquer la loi interne de l’état dont la mère a la nationalité.

b. Le cas des autres règles : 311-16 à 311-18.

 

                Ces règles contiennent des rattachements alternatifs. Les rattachements alternatifs visent à favoriser un résultat. Ceci va commander l’attitude qu’il convient d’adopter en présence d’un renvoi. Si la loi désignée renvoi à une loi tierce moins favorable au résultat recherché, il est clair qu’on ne doit pas suivre le renvoi car ça serait déjouer le but de la règle alternative. Doit-on faire jouer le raisonnement inverse ? Si le renvoi conduit à une loi plus favorable, à ce moment-là on peut suivre le renvoi.

 

Les commentateurs ne sont pas favorables à cela car en entrant l’éventail des rattachements le législateur a suffisamment marqué la limite des lois que l’on peut raisonnablement prendre en considération. Donc les auteurs ont estimé qu’il n’y avait pas lieu de faire jouer le renvoi. Néanmoins, une décision a appliqué le renvoi dans le cas de l’article 311-17 (reconnaissance d’enfant naturel).

2. Le conflit mobile

 

                Modification dans le temps de l’élément de rattachement.

a. La règle de principe : l’article 311-14.

 

                La loi applicable est la loi de la mère au jour de la naissance. Ce qui en principe répond à la question du conflit mobile. Cela est parfaitement justifié en matière de filiation légitime car la légitimité d’un enfant se défini par la situation des parents au jour de la naissance. Seulement la règle de l’article 311-14 s’applique également en matière de filiation naturelle. Donc l’article 311-14 bloque la situation à la loi personnelle de la mère. La Jurisprudence antérieure en cas de changement de loi personnelle de l’enfant avait permis à l’enfant de se placer au moment le plus favorable pour lui. Autrement dit, si l’enfant avait une nationalité X à la naissance, acquérait une nationalité Y plus tard, la Jurisprudence l’autorisait à invoqué la loi la plus favorable. La loi de 72 a commis donc une erreur en fixant la situation au jour de la naissance. Si la mère changeait de nationalité et si sa nouvelle loi est plus favorable, c’est quand même la loi antérieure qu’il faudra appliquer.

Dans ce cas la cour a admis le recours à l’ordre public pour écarter la loi de la mère au jour de la naissance.

b. L’article 311-16

 

                Quand l’établissement de la filiation résulte d’un acte volontaire on doit se placer à la date de l’acte. Ainsi la reconnaissance volontaire est normalement soumise à la loi en vigueur au jour où elle est intervenue. En ce qui concerne la légitimation, l’article 311-16 dit que le mariage emporte légitimation quand cette conséquence est admise par l’une des lois qu’il désigne au jour où l’union a été célébrée. Ce texte soulève deux problèmes : le 1er est le cas de légitimation post nuptias : quand les lois désignées au moment du mariage seraient moins favorables à la légitimation qu’une loi applicable aujourd’hui à la suite d’un changement de loi personnelle. Néanmoins on est tenu par la lettre du texte.

 

2ème problème : c’est une autre forme de droit transitoire qui résulte non pas d’un changement de rattachement de la situation mais d’une modification de la loi interne désignée par la règle de conflit. Par exemple, la règle de conflit désigne la loi française et la loi française a changé en 72. Avec le texte de l’article 311-16 qui impose de se placer au jour du mariage, on doit prendre la loi désignée telle qu’elle était au jour du mariage. Si cette loi interne a été modifiée depuis dans un sens plus favorable à la légitimation on se trouve ici bloqué par la lettre de l’article 311-16.

c. L’article 311-15.

 

                Il se réfère à la possession d’état des intéressés quand ils ont leur résidence en France. Or la résidence habituelle ou la possession d’état résulte de l’écoulement du temps. Donc on ne peut pas se référer au jour de la naissance. L’interprétation qui parait la plus raisonnable c’est d’exiger que la possession d’état ait existé pendant une certaine durée après la naissance et que les intéressés aient encore leur résidence habituelle en France au moment où l’autorité est appelée à se prononcer sur la filiation.

C. Le domaine de la loi applicable.

                                                                            

                Dialectique permanente entre désignation de la loi applicable et domaine de la loi applicable.

En principe la loi que nous avons déterminée au point précédent va s’appliquer à toutes les questions de fond touchant à la filiation. Ceci s’oppose aux questions de forme quand un acte juridique est en cause car les questions de forme sont régies en principe par la loi du lieu de l’acte. Question de fond s’oppose à question de procédure. Les questions de procédures sont régies en principe par la loi du for saisi.

On va voir qu’il y a des transgressions de frontières car en matière de filiation la loi du fond va souvent exercer une attraction sur les questions de preuve et les questions de délais.

1. La preuve de la filiation.

 

                C’est l’objet même de l’établissement de la filiation. Pour établir une filiation il faut la prouver. C’est tantôt par présomption (paternité du mari de la mère), extra judiciairement (acte de naissance), tantôt en justice (par une recherche). Donc quand on parle de recherche en justice on est attrait vers la loi de la procédure. Mais la loi désignée comme applicable à la filiation va facilement absorber les questions de preuve.

 

Si je cherche à établir une filiation selon une loi étrangère, ce que je vais avoir à prouver c’est ce qu’exige la loi étrangère pour l’établissement de la filiation. La question de preuve est absorbée par la loi de la filiation. De même pour la charge de la preuve. En principe la charge de la preuve incombe au demandeur. Si on prend la présomption de paternité du mari, elle n’a rien à voir avec le fait que le mari soit demandeur ou défendeur à l’action. La présomption de paternité du mari n’est pas une question procédurale, c’est une question de fond.

Il y a donc attraction des questions de preuve par la loi applicable aux questions de fond.

 

Mais quand la filiation est établie par reconnaissance, on peut quand même hésiter entre la loi du fond et la loi du lieu où l’acte a été passé. Ainsi la loi française exige pour la validité d’une reconnaissance qu’elle ait lieu par acte authentique. L’attraction de la loi du fond voudrait qu’on exige un acte authentique même si la loi étrangère ne l’exige pas. On s’expose à tenir pour invalide une reconnaissance qui a été effectué à l’étranger. Voilà pourquoi il ne faut pas écarter la loi locale et admettre une transposition à l’acte étranger.

2. Le délai pour agir en justice.

 

                Ex : le délai pour une action en désaveu, le délai pour une action en recherche de paternité. Cela fait appel à la procédure. Qui dit procédure dit en principe loi du for. Seulement on sait que dans cette matière les délais brefs ou très longs, sont très étroitement liés à la politique législative de fond. Un délai bref signifie une hostilité à l’action. Une action imprescriptible signifie qu’on tient à la vérité. La conclusion s’impose qu’en matière de filiation, les délais tendant à être absorbés par la loi applicable au fond. Non seulement la durée du délai, son caractère (préfixe ou de prescription) et les circonstances qui sont susceptibles d’allonger le cours du délai. Tout ceci est sous réserve d’une intervention de l’ordre public.

D. L’ordre public.

 

                Le droit de la filiation traduit la conception que l’état se fait de la famille. Il n’est donc pas étonnant que quand une loi étrangère est rendue applicable l’Ordre Public ait été fréquemment invoqué. La politique législative française en la matière était fondée sur la hiérarchie des filiations et la défiance à l’égard de l’établissement forcé de la filiation naturelle. Cela conduisait à déclarer contraire à l’Ordre Public les lois plus permissives. En revanche on appliquait sans problème les lois plus strictes. Les dernières réformes ont transformé les droits de filiation et ont déplacé la ligne de partage entre ce qui est possible et ce qui ne l’est pas. Le champ des lois étrangères plus tolérantes que la loi française s’est réduite. Celui des lois plus strictes s’est accru. Comment cela se traduit il en matière d’op ? Cela n’est pas un bouleversement car les lois qui sont plus permissives que la loi française risquent maintenant de ne pas franchir le test de l’Ordre Public. Pour les lois plus strictes, on ne peut pas dire systématiquement que ces lois sont devenues contraires à l’Ordre Public français.

1. La filiation légitime.

 

                En matière de filiation légitime les questions ont trait à la présomption de paternité du mari de la mère. Jusqu’à la loi de 1972 cette présomption était difficile à renverser et dans les cas exceptionnels où on pouvait la renforcer, seul le mari pouvait intenter cette action = monopole marital du désaveu. Les lois étrangères qui admettaient le désaveu dans des conditions plus larges étaient contraires à l’Ordre Public français. Force de la présomption et monopole maritale ont disparu dans l’ordre nouveau donc l’Ordre Public intervient moins fréquemment.

 

S’agissant du désaveu par le mari, seul serait contraire à l’Ordre Public une loi qui permet de désavouer sans preuve suffisante de la non paternité ou sans procédure non contradictoire. Une loi plus stricte que la loi française peut être respectée sauf si elle interdit tout désaveu ou bien qu’elle écarte le désaveu dans les cas où la paternité parait impossible. C’est ce qui a été jugé à propos d’une loi étrangère qui maintenait la présomption de paternité alors que le mari était séparé de la mère à l’époque de la conception.

Une innovation de la loi de 1972 a été d’introduire la contestation de paternité par la mère : met fin au monopole marital du désaveu. Les lois étrangères qui ne permettraient pas la contestation par la mère pourraient se voir écartées en vertu de l’Ordre Public.

La Jurisprudence française est allée plus loin encore en n’annulant pas la reconnaissance d’un enfant qui jouit d’une légitimité par un tiers. Rien n’impose de ne pas respecter une loi étrangère qui écarterait systématiquement une telle reconnaissance.

Enfin on retrouve la question du délai. La loi de 1972 a mis fin à l’imprescriptibilité des actions d’état en établissement une prescription maximum de 30 ans. A la suite de cette réforme, la loi belge a été déclarée contraire à l’Ordre Public français.

2. La filiation naturelle.

 

                Entre 1804 et 1912 l’action en recherche de paternité naturelle était presque impossible. En 1912 l’action a été élargie mais demeurant très restrictive. Il y avait des cas d’ouverture restreint. La loi de 1972 n’a pas changé grand-chose sur ce point. Mais les réformes de 82 et 93 ont fait tomber ce système.

a. Le principe d’une action.

 

                Etant donné la politique législative longtemps hostile, les tribunaux se sont longtemps refusés à appliquer les lois étrangères plus souples. En revanche on appliquait les lois plus strictes.

Après 1972 : sans attendre que la loi interne abroge les cas d’ouverture de l’action, la cour de cassation avait admis qu’une loi étrangère qui ne prévoyait pas ce type de filtre, n’était pas contraire à l’Ordre Public à condition cependant que la loi étrangère présente des garanties quant au respect de la vérité biologique et qu’elle permette au défendeur d’assurer sa défense.

 

En ce qui concerne les lois plus strictes que la loi française qui sont beaucoup plus nombreuses, est maintenant déclarée contraire à l’Ordre Public français une loi qui interdit la légitimation des enfants adultérins. Mais toute loi étrangère plus stricte n’est pas nécessairement déclarée contraire à l’Ordre Public. La cour de cassation a formulé une doctrine de manière claire dans un arrêt du 3 novembre 1988. La cour dit que « les lois étrangères qui prohibent l’établissement de la filiation naturelle ne sont en principe pas contraires à la conception française de l’ordre public international dont la seule exigence est d’assurer à l’enfant les subsides qui lui sont nécessaires » On note l’évocation de l’action d’état et l’action alimentaire. L’action d’état qui n’est pas ouverte par la loi étrangère n’est pas contraire à l’Ordre Public, ce qui l’est en revanche c’est l’empêchement de l’action alimentaire.

Dans l’arrêt du février 1993 la cour de cassation a introduit un point important dans le principe. La cour de cassation réitère son affirmation mais ajoute qu’il en est autrement lorsque ces lois ont pour effets de priver un enfant français ou résident habituellement en France du droit d’établir sa filiation. C’est une restriction importante dès lors que l’enfant est français ou qu’il réside en France. Notons qu’on a ici un parfait exemple de la notion d’op de proximité. L’exception d’op s’oppose à l’application de la loi normalement compétente selon la règle de conflit car cette loi présente quelque chose de choquant dans le sentiment commun. Depuis une 20aine d’années, cette appréciation de l’Ordre Public ne se fait plus de manière absolue. Dans l’appréciation de l’Ordre Public intervient le lien plus ou moins étroit de la situation avec la France. La même loi étrangère n’est pas déclarée absolument contraire à l’Ordre Public français. C’est une notion plus fonctionnelle.

 

Il y a là un tempérament sérieux au principe énoncé et il n’est pas certain que se maintienne longtemps le principe de 1988.

b. Les modalités des différentes actions.

 

                Ce qui est critique en matière de filiation naturelle c’est la preuve de la paternité du défendeur. Les moyens de preuve vont être soumis au test de l’Ordre Public. Il y a là-dessus un grand nombre de décisions tenant à la règle allemande permettant d’établir la filiation du défendeur sur le serment de la mère. La position de la cour a été que l’établissement de la filiation sur la seule déclaration de la mère était contraire à l’Ordre Public français. En revanche la même jurisprudence ne s’opposait pas à ce mode de preuve lorsqu’il était corroboré par des indices, en particulier les relations de la mère et du défendeur au moment de la conception. Etait également contraire à l’Ordre Public français la disposition de la loi allemande selon laquelle le défaut du défendeur est assimilé à un aveu de sa part.

 

Toujours à propos des modalités de l’action, dans cette action de recherche de paternité naturelle, le droit français admettait les fins de non-recevoir, permettant de couper court à l’inconduite notoire de la mère. Etait contraire à l’Ordre Public français les lois étrangères qui ne connaissaient pas ce cas. Seulement la loi de 72 a permis l’octroi de subsides à la charge du défendeur nonobstant les relations de la mère avec un ou plusieurs autres. La loi de 1993 a supprimé l’exception d’inconduite notoire. Par conséquent on ne peut plus opposer l’ordre public aux lois étrangères sur ce point. Le seul fait qui permettrait d’invoquer l’Ordre Public est une loi étrangère qui ne prévoit pas de moyens de défense tiré de ce que le défendeur ne peut être le père de l’enfant.

 

Sur la question des délais : La politique législative hostile s’est traduite par un délai de 2 ans à compter de la naissance de l’enfant. Sur ce point, on n’a pas opposé l’Ordre Public aux lois étrangères prévoyant des délais plus longs.

 

II. Les effets de la filiation.

 

                Les règles de conflit de 72 ont soulevé une interrogation de taille car ces règles ne visent que l’établissement de la filiation. D’où la question de la détermination de la loi applicable aux effets. Aujourd’hui des questions très importantes relevant des effets de la filiation (responsabilité parentale et obligation alim) relèvent des conventions internationales.

A. Détermination de la loi applicable.

 

                Antérieurement à la loi de 72, la jurisprudence appliquait aux effets de la filiation la même loi qu’à son établissement. La loi qui s’appliquait à l’établissement de la filiation s’appliquait également aux effets. Cela montrait le principe de solidarité entre les conditions d’existence d’une institution et l’étendue de ses effets. C’est encore l’idée de respect des ensembles législatifs. Ça veut dire que si on se montre strict quant à l’établissement de la filiation on peut accorder aux effets de celle-ci une extension.

Le principe de solidarité conduirait à appliquer Aujourd’hui aux effets de la filiation la loi qui a permis son établissement selon 311-14 et s. Seulement comme ces articles ont été adopté sans réflexion, il y a toute sorte de raisons qui militent contre cette extension.

 

article 311-14 : si on le suit à la lettre pour les effets de la filiation, la situation serait figée au jour de la naissance nonobstant le changement de loi personnelle de la mère.

Objection plus importante : du fait de différentes règles de conflit il se peut que la paternité et la maternité ne soient pas établies selon la même loi. Or s’il y a des effets de la filiation qui sont individuels à l’un des deux parents, la question de la responsabilité parentale, elle, appelle l’application d’une loi unique.

On a donc préconisé le maintien des règles antérieures. Pour l’enfant légitime on applique la loi des effets du mariage et pour l’enfant naturel on applique la loi personnelle de l’enfant.

Cela dit ce débat n’est vraiment plus critique quand on voit les questions qui relèvent de la filiation.

B. Le domaine de la loi applicable.

1. La responsabilité parentale.

 

                Elle est régie actuellement par la convention de La Haye de 1961. Elle est appelée à être régie par la convention de 1996 et le règlement européen de 2003. Dans la mesure où une loi étrangère s’applique à la responsabilité parentale, il peut y avoir dans cette matière une intervention de l’Ordre Public. L’ORDRE PUBLIC interviendrait contre une loi étrangère qui n’impose pas certains devoirs élémentaires aux parents ou bien une loi qui prive l’un des parents de ses prérogatives normales. Ainsi une loi étrangère qui ferait une discrimination systématique entre le père et la mère ou qui ferait une discrimination fondée sur la religion de l’un ou de l’autre. Mais le régime des conventions de 61 et 93 et règlement 2003 donne compétence à la loi de la résidence habituelle de l’enfant donc il y a peu de place pour l’application de la loi étrangère.

2. Les obligations alimentaires.

 

                Importance pratique dans l’ordre international car le débiteur  de cette obligation peut entretenir l’espoir de se soustraire à cette obligation en mettant une frontière entre lui et le créancier. Les états en sont conscients et cela explique la prolifération des conventions. On en connaît une sur la loi applicable en matière d’obligation alimentaire ; On en connaît une autre sur la reconnaissance des décisions.

 

a. La loi applicable.

 

                Convention de 1973 s’applique aux obligations alimentaires en général donc aux obligations alimentaires contre les enfants.

Du fait que la convention porte sur les obligations alimentaires, cette question est détachée du statut personnel, ici de la filiation.

La convention dit que les décisions rendues selon la cour désignée ne préjugent pas de l’existence d’une relation de famille. Ce qui soulève le problème de la question préalable (déjà vu).

b. La reconnaissance et l’exécution des décisions.

 

                La convention de La Haye loi applicable a été accompagnée d’une autre portant sur l’exécution des décisions en matière d’obligation alimentaire. Normalement l’exécution d’une décision de ce genre relève dans chaque état du droit commun des jugements étrangers. Pour nous c’est le droit commun de l’exequatur. Ce droit commun permet d’opposer des objections à la reconnaissance des décisions. C’est pour alléger les conditions que l’on peut opposer à la reconnaissance d’une décision en matière alimentaire.

Normalement le droit commun permet de respecter les droits de la défense et l’incompatibilité avec l’Ordre Public. Sur les droits de la défense, en cette matière, il serait  trop facile pour le débiteur de faire défaut. Donc on va s’assurer que le nécessaire a été fait pour que le débiteur soit informé de l’action qui a été intentée contre lui.

La convention prévoit l’action d’une institution publique en exécution d’une décision qui lui a accordé le remboursement des prestations fournies.

 

La reconnaissance des décisions : lorsque la décision étrangère à statuer à la fois sur le lien de filiation et sur sa conséquence qui est l’obligation alimentaire, la reconnaissance de la décision peut être limitée à la partie alimentaire. On aura donc un exequatur a finalité partielle.

La convention de La Haye permet en outre que l’exécution soit demandée selon un autre instrument en vigueur entre l’état d’origine et l’état requis.

La convention de NY de 1956 EEV en France en 1960 : elle organise le recouvrement des aliments à l’étranger par une coopération entre les autorités des états concernés.

L’autre instrument est la convention de Bruxelles de 1968 devenue règlement 1044-22. Cette convention inclus une règle de compétence en matière alimentaire (article 5§2) et donc les décisions rendues en matière alimentaire peuvent être reconnues selon les modalités allégées sur règlement.

 

 

SOUS-SECTION 2:   La filiation adoptive.

 

                Problèmes juridiques : il y a de grandes dissemblances selon les législations quant à la conception de l’adoption et tenant au fait que le principe même de l’adoption dans certains pays est soit inconnu ou même interdit (pays musulmans).

D’autres états qui connaissent ce principe s’opposent à l’adoption par des étrangers.

Les adoptants en France souhaitent souvent une adoption plénière qui implique rupture des liens avec la famille d’origine.

 

Une 1ère législation est issue de la convention de la Haye de 1965 vite périmée car conçue dans un périmètre européen.

La conférence a repris la question et a donné lieu à la convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale qui date du 29 mai 1993. Cette convention adopte une approche particulière. Elle organise les rapports entre le pays de l’adoptant et celui de l’adopté. Ces dispositions de la convention se superposent au conflit de lois. Cette voie semble bien accueillie, elle est en vigueur dans une 60aine d’états. La convention s’applique quand l’enfant et les adoptants ont leur résidence habituelle respective sur le territoire d’états contractants. La convention ne remplace pas le mécanisme habituel de la convention. Les conflits de lois demeurent.

Cela a donné lieu à beaucoup d’hésitation jurisprudentielle et a abouti à une loi du 6 février 2001 introduisant dans le Code civil les articles 370-3 à 370-5.

 

I. Les conditions de fond.

 

                L’adoption tend à la création d’un lien de famille. C’est donc une question de statut personnel et les conflits de lois naissent le plus souvent d’une différence de nationalité entre les adoptants et l’adopté. Le conflit peut aussi tenir du fait d’une différence de résidence habituelle entre les intéressés.

A. La recherche d’une solution.

 

                Choisis-t-on la loi de l’adoptant ou celle de l’adopté ? On peut adopter une situation moniste ou dualiste.

 

Pour la solution moniste : on choisit soit la loi de l’adoptant ou la loi de l’adopté. En faveur de la loi de l’adopté, on fait valoir que c’est son intérêt qui est en jeu et que l’adoption va se traduire par une rupture de ses liens avec son milieu d’origine de sorte qu’il apparaît normal que ce soit la loi de l’adopté qui régisse la situation.

Mais on peut dire que l’adopté a vocation à acquérir la nationalité de l’adoptant et si sa loi ne connaît pas l’institution on opte pour la loi de l’adoptant.

C’est plutôt la loi des adoptants qui va avoir vocation à régir les effets de l’adoption. Tout ceci conduit à préconiser la loi des adoptants. Mais le choix unique de la loi des adoptants se heurte à une objection : à négliger la loi de l’adopté, on risque de créer des adoptions qui ne seront pas reconnues dans l’état d’origine de l’adopté.

 

Voilà pourquoi on se tourne vers les solutions dualistes : on prend en compte des deux lois. On pourrait appliquer cumulativement les deux lois. Seulement appliquer deux lois revient à appliquer la plus exigeante. Pire encore, étant donné que les conditions de l’adoption sont variées, à vouloir appliquer les deux lois on va en fabriquer une 3ème qui sera plus stricte que chacune des deux. Donc on préfère l’application distributive des deux lois. Ici la loi de l’adoptant s’appliquera aux conditions requises chez l’adoptant (conditions d’âge, se statut matrimonial). La loi de l’adopté, elle, déterminera notamment si l’enfant est adoptable. Mais il faut voir aussi qu’il y a certaines conditions qui ont un caractère indivisible. Ex : la différence d’âge exigé entre l’adoptant et l’adopté. Cette condition concerne l’un et l’autre. Donc l’une règlera les conditions qui intéressent l’un et l’autre et l’autre loi sera cantonnée aux conditions qui intéressent exclusivement l’intéressé.

Si on se reporte à la solution moniste, il ressort que c’est la loi de l’adoptant qui paraît la mieux indiquée pour prévaloir car l’adopté va se trouver intégré au milieu social de l’adoptant.

Arrêt Torlet : la cour de cassation a dit que les conditions comme les effets de l’adoption sont régis, lorsque l’adoption est demandée par une seule personne, par la loi nationale de celle-ci, la loi nationale de l’enfant, devant seulement déterminer les conditions du consentement ou de la représentation de l’adopté.

La loi de 2001a consacré la solution dans l’article 370-3 concernant des questions qui avaient posé problème.

1. La loi de l’adoptant.

 

                Selon 370-3, les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoptant. Dans les cas fréquents, l’adoptant est un couple et il est indispensable de déterminer une loi unique. Celle qui s’impose est la loi des effets du mariage ce qui confirme la suite de l’article 370-3 : la loi qui régit les effets de leur union. Quelle sera cette loi ? Elle sera déterminée selon le système Rivière : loi nationale commune des époux et à défaut, loi du domicile commun.

Mais l’article ajoute une restriction : l’adoption ne peut être prononcée si la loi personnelle de l’un et l’autre la prohibe. Le but est d’éviter des adoptions boiteuses qui se révèleront lors du retour dans le pays d’origine. La règle n’a donc d’effet propre qu’en cas de nationalité différente des époux car en cas de nationalité commune, la prohibition joue de plein droit. Par ex : époux marocains et algériens ne pourront pas adopter un enfant en France. On voit ici pointer le respect des lois qui prohibent l’adoption mais dans un cas très marginal lorsqu’il s’agit des adoptant.

2. La loi de l’adopté.

 

                C’est la question des lois qui prohibent l’adoption. D’un côté on peut estimer qu’il faut respecter ces lois sous peine de consacrer des adoptions qui s’apparentent à des enlèvements d’enfants. Mais de l’autre, on peut trouver regrettable que des enfants qui pourraient trouver une famille soient privés de cette possibilité. Cela paraît tellement grave que la question de l’OPI a été soulevé à l’encontre des lois étrangères prohibant l’adoption ou même simplement soumettant l’adoption à des conditions plus restrictives que la loi française. Les tribunaux se sont prononcés pour l’absence de contrariété à l’Ordre Public des lois étrangères plus restrictives. Il fallait donc affronter la question du rôle exact à reconnaître à la loi de l’adopté.

a. La jurisprudence antérieure.

 

                Elle s’était arrêtée à l’exigence d’un consentement éclairé des parents biologiques sur les conditions de l’adoption.

Dans l’arrêt Torlet une CA s’était refusée à prononcer une adoption plénière consécutive à une adoption en Grèce au motif que la loi Grecque ne connaissait pas l’adoption plénière (connaissait une adoption moins étendue) et donc que la mère ne pouvait pas avoir consenti à une adoption plénière française. La cour de cassation a cassé l’arrêt en déclarant que lorsque le consentement ne précise pas en considération de quel type d’adoption il a été donné, ce consentement vaut pour l’une ou l’autre des formes d’adoption que connaît le droit français. La cour de cassation a confirmé la Jurisprudence dans l’arrêt Pistre de 1990 rendu dans des circonstances analogues. Il s’agissait d’une adoption en France. La demande d’une adoption plénière d’un enfant brésilien avait été rejetée au motif que le juge brésilien n’avait autorisé qu’une adoption simple. La cour casse l’arrêt : le contenu même du consentement doit être apprécié indépendamment des dispositions de la loi nationale de l’adopté. En réalité, si on se tourne vers la loi de l’adopté ce n’est pas pour appliquer cette loi. Moins qu’une règle de conflit, on est passé à une règle matérielle, substantielle, une règle de fond de droit français selon laquelle l’adoption internationale était toujours possible avec le consentement de l’adopté ou de son représentant.

Arrêt Fonthou de 1995 vise l’article 3 du code civil. Cet arrêt juge que deux époux français peuvent adopter un enfant dont la loi personnelle ne connaît pas ou prohibe l’adoption à la condition qu’indépendamment de cette loi, le représentant du mineur ait donné son consentement en pleine connaissance des effets attachés par la loi française à l’adoption.

Ce que la loi va quand même déterminée c’est la personne qui a qualité pour consentir mais à partir de là c’est une règle matérielle française qui prend en charge la situation. Le représentant peut consentir à l’adoption nonobstant les dispositions de la loi personnelle.

On a reproché à l’arrêt de ravaler le consentement à une sorte de permission de sortie de l’enfant et d’aboutir le cas échéant à une rupture avec la famille par le sang qui n’aurait pas été réellement voulu par la famille. Par là on a reproché à cette Jurisprudence d’engendrer des adoptions boiteuses, adoptions susceptibles d’être remises en cause par la famille par le sang voir par l’adopté lui-même parvenu à sa majorité. On a dit que des droits étrangers européens confrontés au même type de dilemme, subordonnent l’adoption selon leur loi à la reconnaissance de leur décision par l’ordre juridique de l’adopté.

 

Ces critiques ont trouvé leur expression dans une circulaire du garde des sceaux du 16 février 1999 : il dit que l’adoption est impossible quand la loi de l’enfant l’interdit. Elle veut une appréciation rigoureuse de la portée du consentement donné à l’adoption de l’enfant. Seulement il n’appartient pas à une ordonnance de renverser la Jurisprudence de la cour de cassation. C’est ce qui explique que le législateur soit intervenu.

b. L’intervention du législateur.

 

                La loi de 2001 s’est attaquée à la question dans les articles 370-3 al2 et 3 où on trouve 3 dispositions.

L’adoption d’un mineur étranger ne peut être prononcée si sa loi personnelle prohibe cette institution. Donc la loi prend parti de l’ordonnance de 1999.

Ceci va dans le sens de la convention de La Haye de 1993 qui prévoit que les autorités compétentes de l’état d’origine doivent notamment s’assurer que l’enfant est adoptable. Mais il semble bien que la prise en considération de la loi étrangère se limite au principe même de l’adoption. Pourquoi ? Car le texte ne s’étend pas au type d’adoption autorisé. Si la loi étrangère ne connaît qu’une adoption moins étendue que l’adoption plénière française, cela n’empêcherait l’adoption plénière selon la loi française.

Autre remarque : mot « prohibe » dans le texte. Il y a des lois étrangères qui ne prohibent pas l’adoption car elles ignorent tout simplement cette institution. Le débat reste ouvert.

 

article 370-2 al2 : sauf si ce mineur est né et réside habituellement en France. C’est un tempérament à la règle précédente. Cela est bien bienvenu car les liens de l’enfant avec sa nationalité étrangère sont distendus ou ne sont même pas crées. Dans ces conditions, la loi étrangère même prohibitive doit lâcher prise.

 

article 370-3 al3 : on peut prononcer en France l’adoption d’un enfant étranger pourvu que sa loi nationale ne la prohibe pas. Il faut qu’il y ait un consentement à cette adoption. On va retrouver un certain nombre de règles inspirées de la Jurisprudence et de la convention de La Haye.

Le texte dit que qu’elle que soit la loi applicable, l’adoption requiert le consentement du représentant légal de l’enfant. Le consentement doit être libre et éclairé sur les conséquences de l’adoption, en particulier, s’il est donné en vue d’une adoption plénière, sur le caractère complet et irrévocable de la rupture du lien de filiation existant.

On retrouve ici une règle substantielle. Cette règle c’est la nécessité d’un consentement véritable.

On considère que la loi de l’adopté comme par le passé, déterminera les personnes habilitées à consentir et peut être aussi la forme du consentement (devant qui il doit être exprimé).

Enfin l’article 370-3 al3 ajoute deux autres précisions importantes que l’on trouve dans la convention de La Haye : le consentement doit être obtenu sans aucune contrepartie. L’autre c’est que le consentement doit être obtenu après la naissance de l’enfant. Ce sont à nouveau des règles matérielles.

 

II. La forme et la procédure de l’adoption.

 

                Une autorité publique est presque toujours amenée à intervenir. Dans les matières de statut personnel il y a un lien étroit entre la procédure et le fond. La question est réglée dans le code civil.

La convention de La Haye de 1993 vise à préparer les adoptions qui soient autant que possible inattaquables et assurer leur reconnaissance internationale.

A. La convention de La Haye.

 

                Elle assure une coopération d’autorité selon une méthode très éprouvée à la conférence de La Haye, la méthode des autorités centrales. Les personnes qui dans un pays donné désire adopter un enfant dont la résidence habituelle est dans un autre état contractant, ces pers doivent s’adresser à l’autorité centrale de leur propre état pour vérifier si ces personnes sont aptes à adopter et qu’il n’existe pas d’obstacles à l’entrée et au séjour permanent de l’enfant dans le pays. Puis cette autorité ça s’adresser à son homologue dans l’autre état qui va faire une enquête analogue sur l’adoptabilité de l’enfant et que le placement exigé est dans son intérêt. A la suite de ça, la procédure d’adoption peut s’engager dans l’un autre des états.

Il faut indique que quand la procédure doit avoir lieu après le déplacement de l’enfant dans l’état d’accueil, l’autorité centrale de l’état d’accueil est responsable de l’enfant.

B. La procédure judiciaire de l’adoption en France.

 

                Elle peut s’appliquer indépendamment du fait que la convention de La Haye est applicable ou non.

1ère question : celle de la compétence des tribunaux français pour prononcer une adoption. Le principe consiste à transposer les règles de compétence interne. Mais l’article 116 du NCPC précise que les tribunaux français sont compétents quand demeurent en France soit le requérant soit la personne dont l’adoption est demandée. Mais il ne faut pas oublier que les articles 14 et 15 sont applicables en toute matière et donc que la nationalité française des adoptants peut permettre de saisir les tribunaux français.

Lorsqu’on se propose d’adopter un enfant étranger qui est en France, il faut se soumettre à toutes les formalités requises pour le placement en vue de l’adoption. La raison est que les enfants étrangers doivent bénéficier de la même garantie que les enfants français. C’est par exemple la remise préalable de l’enfant à un organisme pour les enfants de moins de 2 ans.

III. Les effets de l’adoption en France

A. La détermination de la loi applicable.

 

                C’est dans le milieu de l’adoptant que l’adoption va dérouler ses effets et ceci avait conduit la Jurisprudence à conférer le rôle prépondérant à la loi de l’adoptant.

L’arrêt Torlet, posait que les conditions comme les effets de l’adoption sont régis par la loi de l’adoptant. Mais la loi de 2001 a rompu avec ce système.

article 370-4 du Code civil : les effets de l’adoption prononcés en France sont ceux de la loi Française alors que nous avons vu que c’est la loi des adoptants qui s’applique. Si les adoptants sont de nationalité commune, on applique leur loi. Pourquoi ce changement ? Ceci évite d’avoir à faire fonctionner en France des adoptions de type très divers. En la matière n’oublions pas que c’est le type même d’institution qui varie d’un pays à l’autre.

Question du secret des origines de l’enfant. Cette question ne doit pas être soumise à deux lois différentes.

 

Donc on a préféré l’unité de loi applicable aux effets de l’adoption (pour tous les enfants adoptés en France) à l’unité de statut législatif de chaque adoption.

 

Une question reste en suspens : celle du conflit mobile.

Si l’environnement des adoptants et de l’adopté change. Les effets paraissent immuables. Pour les adoptions effectuées sous l’empire de la convention de la Haye, elle édicte une règle matérielle portant sur le contenu minimum du lien d’adoption. …. Cf. traité

 

Il existe dans le droit musulman une institution, la Kafalah, qui ressemble à l’adoption mais qui n’en n’est pas une. C’est la prise en charge d’un enfant sans la création d’un lien de famille.

B. Le domaine de cette loi.

 

                Quelles sont les questions que cette loi va régir ?

Il y a deux grandes séries de questions : l’origine de cette filiation est une adoption. Donc la loi applicable aux effets de l’adoption va déterminer les conséquences de l’adoption sur les liens avec la famille d’origine. Elle va déterminer les conditions de la transformation éventuelle de l’adoption. La loi applicable aux effets de la filiation détermine les conditions dans lesquelles il peut être mis fin à l’adoption. Enfin c’est la loi des effets de l’adoption qui va déterminer les liens avec la famille de l’adoptant. Tout cela résulte du fait que le lien de filiation est un lien de filiation adoptive.

 

Deuxième groupe de conséquence : résultent du fait qu’il y a un lien de filiation. On y trouve les rapports personnels et patrimoniaux entre les adoptants et l’adopté. Sur ce point beaucoup de ces questions sont régies par des conventions de 1961 sur l’autorité parentale, de 1973 sur l’obligation alimentaire.

IV. Les adoptions prononcées à l’étranger.

A. Selon le droit commun.

 

                Il est fréquent que des français qui adoptent un enfant étranger procèdent à une adoption à l’étranger. Ils vont donc vouloir faire reconnaître cette adoption en France. Ce qui soulève les questions des conditions et des effets de la reconnaissance.

Le problème vient du fait que l’adoption prononcée à l’étranger peut avoir des effets moins étendus que ceux d’une adoption plénière française. D’où une 3ème question : celle d’une nouvelle procédure en enfant à partir de l’adoption prononcée à l’étranger

1. Les conditions de la reconnaissance.

 

                L’adoption relève de l’était des personnes. Les décisions étrangères rendues en matière d’état des personnes ont en principe effet de plein droit en France (pas besoin d’exequatur). Une transcription va seulement être nécessaire. A cette occasion l’officier de l’état civil doit s’assurer de la régularité internationale de la décision. Il est prudent de la part des adoptants d’obtenir une décision de justice afin de rendre la décision incontestable et inattaquable.

 

Compétence de l’autorité qui a prononcée l’adoption : on reconnaîtra la compétence de l’état national ou de résidence soit de l’adoptant soit de l’adopté. Selon les critères de l’arrêt Cimitch : il faut un lien caractérisé entre le juge d’origine et la situation.

Arrêt Munzer : condition que le juge étranger ait appliqué la loi compétente selon la règle de conflit française. Cette condition sera rarement remplie dans cette hypothèse dans la mesure où e juge étranger étant le juge de l’état nationale de l’enfant, aura appliqué intégralement la loi de l’enfant.

Cette condition est inutile et condamnée à disparaître.

 

Enfin sur l’ordre public : il peut intervenir même sous sa forme atténuée. Il intervient pour faire respecter l’intérêt de l’enfant ou l’intérêt des parents par le sang. De ce point de vue, la Jurisprudence française n’a pas donné l’exemple car sous l’empire de la Jurisprudence Torlet on se contentait d’un consentement à l’adoption des parents biologiques et ceci valant dans le doute pour les deux formes de l’adoption française (simple et plénière).

La circulaire de 1999, donnait une indication intéressante (bien qu’elle n’ait aucune valeur impérative) : la prohibition du droit français de la remise directe aux adoptants d’un enfant de moins de 2 ans (article 348-5 du code civ) est une règle qui devrait entraîner le rejet d’une adoption étrangère intervenue dans ces conditions.

Quand l’adoption étrangère satisfait ces conditions quels en sont les effets ?

2. Les effets de la reconnaissance.

 

                Deux voies possibles :

Attacher à l’adoption étrangère que les effets reconnus par le jugement étranger.

Ou alors : du moment qu’on reconnaît l’adoption, il appartient à la loi applicable aux effets de l’adoption de gouverner dorénavant ces effets.

 

La loi de 2001a choisi une autre voie : article 370-5. Ce texte amène à regarder si l’adoption étrangère présente plutôt le caractère d’une adoption simple ou plénière et donc à lui faire produire les effets de l’une ou de l’autre.

Le texte ajoute que si l’adoption étrangère est assimilée à une adoption simple, elle pourra être convertie en adoption plénière si les consentements requis ont été donnés expressément en connaissance de cause = souci de rompre avec la Jurisprudence antérieure.

3. Hypothèse de demande nouvelle en France.

 

                Les adoptants à l’étranger peuvent choisir de demander l’adoption en France en s’appuyant sur l’adoption prononcée à l’étranger. En particulier le jugement étranger pourra servir de base à une adoption plénière en établissant l’abandon de l’enfant ou encore en étant considéré comme le lien de parenté qui dispense de la remise de l’enfant à ouvre.

 B. La convention de La Haye.

 

                La convention de La Haye assure la reconnaissance d’une adoption prononcée dans un état contractant dans les autres états contractants. La convention pose une règle importante : s’agissant de la rupture d’un lien de filiation préexistant, elle n’est acquise que si cet effet est produit dans l’état où la décision a eu lieu.

 

 

 

CHAPITRE 2:

La responsabilité extracontractuelle

 

                Il y a un mouvement de spécialisation des règles de conflit. Ce mouvement a été initié par les conventions de LH. On a renoncé à faire une convention générale. On a préféré faire une convention sur la loi applicable aux accidents de la circulation routière une sur la loi applicable à la responsabilité du fait des produits.

Projet communautaire : ROME II.  Accentue le mouvement de spécialisation. Ce projet date du 22 juillet 2003. Il entrera en vigueur le 1er janvier 2005.

Ce projet contient différentes règles particulières applicables par ex en matière de concurrence déloyale ou d’atteinte à la vie privée. Pourquoi ? Car selon les matières, l’équilibre entre les parties ne se situe pas forcément de la  même manière.

Tout ceci amène à étudier les règles générales et spécifiques.

 

SECTION 1: LES règles générales.

I. Détermination de la loi applicable.

A. Le droit commun Français encore en vigueur.

 

                Comme partout on énonce en France le principe que la loi applicable au délit est celle du lieu du délit : lex loci delicti. Ce principe trouve un fondement dans l’article 3 al 1 : « les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui habitent le territoire ».

Ce principe a été consacré par l’arrêt LAUTOUR de 1948, sous sa forme bilatérale.

Accident de camion survenu en Espagne. La cour de cassation a affirmé que la loi applicable était la loi espagnole.

 

Qu’est-ce le lieu du délit ?

L’expression lieu du délit ne soulève pas de problème quand tous les éléments matériels de la situation sont réunis dans un même pays. C’est le cas avec les accidents d’automobile ; dans ce cas-là, le conflit de lois tiendra à la nationalité ou au domicile étranger d’une partie.

En revanche la détermination du lieu du délit soulève des problèmes quand les éléments matériels sont dispersés en différents pays. On a pris l’habitude de parler de délit simple dans le 1er cas, et de délit complexe dans le 2d. 

1. Les délits simples.

 

                Dans ce cas-là il y a deux problèmes qui peuvent surgir.

Le 1er problème est l’hésitation à appliquer la loi du lieu du délit lorsque les faits sont survenus à l’étranger mais entre parties ayant la nationalité du for ou ayant toutes deux leur domicile sur le territoire du for. Ça se produit quand les parties avaient un lien entre elles (voyage en commun), cela se produit aussi sans qu’il y ait la présence de ce lien.

D’un côté il semble préférable pour la prévisibilité du droit d’appliquer quoi qu’il arrive la loi du lieu du délit. Mais de l’autre, un sentiment instinctif de la justice pousse à se dire, à quoi bon appliquer la loi étrangère alors que le litige se produit entre deux nationaux.

Dans la Jurisprudence française, les tribunaux ont été sensibles à l’inopportunité d’appliquer la loi étrangère alors que les deux parties sont françaises. Les juges, pour arriver à appliquer la loi commune aux parties, ont recouru à des stratagèmes.

 

Le 1er consiste à écarter la qualification délictuelle au profit d’une autre qui mène à l’application de la loi française. Ex : en cas de voyage commun à frais partagés, on peut y voir un contrat tacite entre les parties. On applique la loi de la volonté commune dans le contrat.

Autre moyen : qualifier la question litigieuse de procédurale. Cela est possible notamment à l’égard de la prescription de l’action.  Ex, en Espagne, la prescription est d’un an en matière de circulation routière. Mais comme c’est une question de procédure, on peut la régir par la loi du for.

Autre moyen : faire jouer l’exception d’OP contre la loi étrangère, pourtant dans des conditions où on ne peut pas dire que la loi étrangère était gravement choquante. Ex : loi qui ne répare que le préjudice économique, loi prévoyant une prescription plus courte que la loi française = contraire à l’Ordre Public.

Ces stratagèmes sont l’ouvre des juges du fond. Ils ont souvent été censurés par la cour de cassation. Ex : arrêt KEIGER. Accident en Allemagne. La loi allemande ne prévoit que la réparation du préjudice économique. La CA de Paris applique la loi française en invoquant le but social des lois françaises. L’arrêt est cassé. Quelle que soit la nationalité des parties, les obligations extracontractuelles sont régies par la loi du lieu où est survenu le fait qui leur a donné naissance.

La cour de cassation s’est séparée de cette position qu’en cas de contrat tacite. Ici les parties ont la libre disposition de leurs droits. Donc si les parties n’invoquent pas l’application de la loi étrangère et ont contracté en désignant la loi française, alors que le délit a lieu à l’étranger, c’est la loi française qui s’appliquera.

 

Dans le cas des accidents de la circulation routière, la convention de LH de 1971, si elle donne compétence à la loi du lieu de l’accident, prévoit une exception lorsque les véhicules sont immatriculés dans le même état. Ainsi, dans ce domaine, la question est pratiquement traitée. Dans les autres cas il serait raisonnable d’assortir la règle lex loci delicti d’une exception consistant à dire : « à moins que la situation ne présente un lien plus étroit avec une autre loi ».

Ceci n’est pas dans l’esprit de la cour de cassation mais le règlement européen prévoit une telle exception. Donc pour quelques mois encore, la loi reste celle du lieu du délit même en cas de nationalité commune ou domicile commun.

 

2ème problème : Quand dommage et fait générateur sont dans le même pays on doit comprendre dommage immédiat.

Une victime dans un pays étranger peut invoquer son préjudice corporel qui continu dans le pays où elle a son domicile.

Le problème s’est aussi posé en amont, en matière de compétence juridictionnelle : convention de Bruxelles : compétence de la juridiction du domicile du défendeur et compétence en matière délictuelle de la juridiction de la loi du lieu du délit. Les victimes, en disant que le dommage était subi à leur domicile également, ont tenté d’invoquer la compétence des juridictions de leur domicile. La cour de cassation corrige alors l’interprétation, elle dit qu’il faut entendre la loi du lieu du dommage immédiat.

Ceci a été jugé dans le cas d’un préjudice par ricochet = voyage organisé au Cambodge au cours duquel des français décèdent dans une noyade. Des parents des victimes demandent réparation de leur préjudice moral en France. Sur le terrain délictuel l’action des parents est rejetée car la loi cambodgienne ne prévoit pas la réparation du préjudice moral. Les victimes invoquent le fait que leur préjudice moral est souffert à leur domicile et non pas au Cambodge. Mais la cour de cassation rejette le pourvoi, déclarant que la loi applicable à la réparation du préjudice moral subi par les victimes par ricochet est celle du lieu où ce dommage s’est réalisé et non celui où le préjudice moral est subi.

C’est donc le lieu de préjudice de la victime immédiate qui est pris en compte= arrêt du 28 octobre 2003.

Autre lecture de l’arrêt : le dommage est bien subi en France mais le fait dommageable est survenu à l’étranger et les liens les plus étroits de la situation sont avec la loi du fait dommageable c’est à dire le Cambodge = délit complexe.

2. Les délits complexes.

 

                Il y a délit complexe lorsque le fait générateur est survenu dans un pays tandis que le dommage lui-même a été subi dans un autre. Cependant la dispersion peut être beaucoup plus grande. Le fait générateur peut être dispersé dans différents pays. Ex : une pièce fabriquée dans un pays, assemblée dans un 2ème, les tests ont été faits dans un 3ème, dommage subi dans un 4ème pays.

Ex : atteinte à la vie privée dans un pays par la diffusion de magasine dans différents pays.

 

La question est discutée. L’attente du défendeur porte sur la loi du lieu où il agissait. Le demandeur peut dire qu’il a été atteint en tel lieu, il comptait sur la protection de la loi de ce lieu et veut donc voir cette loi appliquée.

Le droit comparé révèle une dispersion entre les deux solutions (fait générateur, dommage).

Autre solution : donner le choix au demandeur. C’est la pire solution. En droit de la RC on qualifie toujours le demandeur de victime car il a subi un dommage mais la question est de savoir si le dommage doit être réparé par une autre personne.

La doctrine française préfère la loi du lieu du dommage. Les raisons :

 

–          On dit que le dommage c’est la condition 1ère de toute responsabilité.

–          En cas de dispersion de ces facteurs, une répartition du dommage entre plusieurs pays n’empêche pas une application distributive des lois correspondantes. Au contraire, une dispersion du fait générateur ne peut pas se résoudre par une application distributive des lois.

–          Dernier argument pour la loi du dommage : c’est la conception moderne de la RC qui fait que le droit de la RC est tourné vers la réparation plus que vers la sanction d’un comportement fautif. Le dommage serait donc plus significatif.

 

Point de vue de la Jurisprudence : les juges du fond appliquaient tantôt la loi du lieu du dommage tantôt la loi du lieu de l’acte fautif. Mais la situation a changé. La cour de cassation s’est prononcée dans 3 arrêts.

Arrêt HORNIY PRADO 1983 : la loi territoriale compétente pour gouverner la responsabilité extracontractuelle est la loi du lieu où le dommage a été réalisé. Il s’agissait d’un mandataire qui avait détourné des valeurs mobilières en France et qui les avait vendues en Esp par l’intermédiaire de deux banques françaises. La remise des titres aux banques, ainsi que l’ordre de vente étaient intervenus en France, de sorte que l’acte fautif et le dommage étaient réalisés en France. Donc l’arrêt n’est pas significatif.

 

Arrêt GORDON & BREACH 1997 : Une revue américaine de sciences publie un article à destination des bibliothécaires des universités. La revue est diffusée en France par abonnement. Une action en concurrence déloyale est lancée. La CA se refuse à appliquer la loi française. Elle déclare que c’est la législation des USA qui doit s’appliquer. Puisque c’est la loi américaine, la CA sursoit à statuer. La Cour de cassation censure cet arrêt le 14 janvier 1997. Elle reprend la formule consistant à appliquer la loi du fait dommageable. Ce lieu s’entend aussi bien de celui du fait générateur du dommage que du lieu de réalisation de ce dernier. Cette formule est malheureuse.

 

Elle est reprise d’un arrêt de la CJCE Mine de potasse d’Alsace. Le tribunal compétent et la loi applicable ce n’est pas la même chose. S’agissant du tribunal compétent on peut être plus souple car le tribunal compétent ça ne préjuge pas la loi applicable. Donc on peut offrir un certain choix au demandeur en matière de juridiction car le choix de la juridiction n’entraîne pas nécessairement application de la loi du for. En matière de conflit de lois, il ne devrait y avoir qu’une seule loi applicable, celle des liens les plus étroits.

Ici la formulation laisse penser que la réalisation d’un dommage en France pouvait fonder la compétence des tribunaux français mais en outre l’application de la loi française à l’ensemble de la situation ce qui aurait pu donner naissance à un forum shopping. Cependant la Cour de cassation précisait quand même que tant le fait générateur constitué par la diffusion des revues que le lieu de réalisation du dommage, se situait en France. Cette précision change la portée de l’affirmation précédente. Cette précision, entraîne que la loi française ne pouvait être applicable qu’aux faits locaux et non pas à l’ensemble de la situation. Autrement dit, en fait on n’est plus en présence d’un délit complexe mais en présence d’un délit simple.

La cour de renvoi a fait application de cette conception en reprenant la formule de la cour de cassation mais la cour de renvoi rajoute qu’il s’agit du dommage allégué dans le présent litige qui se situait en France. Se trouve ainsi consacré une théorie, la théorie de la mosaïque : chaque état dans lequel se réalise un dommage a vocation à statuer selon sa loi sur les conséquences locales du comportement reproché. La cour de renvoi s’est prononcée sur le dommage allégué en France.

 

Arrêt : cas de figure d’un dommage unique et d’une dispersion du fait générateur. Cela ne pouvait que renforcer la solution en faveur de la loi du dommage. Mais ce n’est pas seulement sur ce fondement que la décision a été rendue, c’est aussi sur le fondement des liens les plus étroits.

Diverses sociétés anglaises avaient confié à deux sociétés Françaises, la construction d’une plateforme pétrolière ceci en vue de forage dans le secteur britannique de la mer du Nord.

Le LRS, organisme anglais avait délivré un certificat de conformité de la plateforme. 10 ans plus tard, la plateforme se brise et les sociétés anglaises agissent en responsabilité délictuelle contre les sociétés françaises et le LRS au motif en particulier que la mission de certification du LRS c’était exercé au moins en partie en France.

Pour n’a-t-on pas agi en responsabilité contractuelle ?L’action a été exercée mais n’a pas abouti.

La CA de paris refuse d’appliquer la loi française pour la responsabilité délictuelle. C’est la prépondérance reconnue à la loi du lieu du dommage justifiée ici par la fonction d’abord réparatrice en non pas punitive, de la responsabilité civile.

Le pourvoi en cassation est rejeté. La cour de cassation relève qu’il y avait multiplicité des lieux de commissions des faits générateurs, qu’il y avait lieu de rechercher le pays qui présentait les liens les plus étroits. Selon la CA, les juges avait pu valablement appliquer la loi écossaise.

Il y a donc une prépondérance pour la loi du lieu du dommage. Mais limitation : elle ne s’appliquerait qu’à la réparation du dommage local.

Le défendeur qui se voit demander réparation dans un pays donné et qui va devoir répondre du dommage selon la loi locale, pourra le faire que s’il pouvait raisonnablement s’attendre à voir sa responsabilité engagée selon cette loi.

Ainsi dans l’arrêt GORDON AND BREACH, l’éditeur qui distribuait des revues en France pouvait répondre de ses actes selon la loi française, cela n’est pas forcément injuste. Donc la notion de prévisibilité est importante.

 

D’où la question de l’internet.

Avec le développement de l’Internet, la discussion sur le délit complexe prend une dimension planétaire car l’Internet se prête à la diffusion instantanée et universelle d’ouvres protégées, d’actes de concurrence déloyale, d’atteinte à la vie privée, à la considération etc… Est on en présence d’un vide juridique ? Non pas du tout, le problème est connu.

Si on applique la loi du fait générateur on est conduit à appliquer la loi du serveur ou du FAI, à supposer tout ceci localisable.

Cela présente l’inconvénient de voir les intéressés s’installer dans un paradis cybernétique.

On est amené à appliquer la loi du dommage du coup en limitant la réparation au dommage local = théorie de la mosaïque. Cela ne suffit pas car l’émission d’un message suffit à l’exposer à toutes les lois du monde. C’est pourquoi il faut tempérer ceci, ce que l’on pourra faire en tenant compte de l’orientation du message : quel est le public que l’auteur du message entend normalement cibler ?

Jurisprudence sur la compétence juridictionnelle : Le tribunal français est-il compétent ? Il se trouve compétent quand le message pouvait être considéré comme ciblant le public français ou vise des activités en France. On s’achemine vers l’application de la loi du lieu du dommage.

 

B. Le  projet de règlement communautaire.

 

                La règle générale est dans l’article 3 du projet. En la forme le projet est calqué sur la convention de Rome.

L’article 3contient un principe de rattachement qui est unitaire, un tempérament et une clause d’exception à quoi il faut ajouter (article 10), la possibilité pour les parties de se mettre d’accord sur la loi applicable.

1. Le principe.

 

                C’est l’article 3.1 qui désigne la loi du pays où le dommage survient ou risque de survenir quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quel que soit le pays dans lequel des conséquences indirectes du dommage surviennent.

 

Commentaires : on a une solution unitaire. On ne fait pas de distinction entre délit simple et complexe puisque c’est la loi du lieu du dommage quel que soit le pays du fait générateur.

Loi du lieu du dommage : dans la majorité des cas, il s’agira du pays de résidence du demandeur, personne physique ou morale. Mais il s’agit du dommage directement subi (immédiat). En cas de dommage subi en différents pays, on appliquera distributivement les lois des pays concernés, du moins si le for s’estime compétent.

2. Tempérament : loi de la résidence habituelle.

 

                article 3.2 : lorsque le demandeur et le défendeur ont leur résidence habituelle dans le même pays, on applique la loi de ce pays.

3. Le lien manifestement plus étroit avec un autre pays.

 

                article 3.3 pour les deux cas précédents, prévoit une clause d’exception en cas de lien manifestement plus étroit avec un autre pays. C’est la notion de centre de gravité qui doit intervenir.

4. Précision commune aux 3 cas.

 

                Le règlement préfère la loi du dommage à la loi du fait générateur mais chaque fois qu’on fait ça il faut penser à une réserve : tenir compte des règles de sécurité et de comportement en vigueur au lieu et au moment de la survenance du fait générateur du dommage.

Pour comprendre il faut revenir aux accidents de la route : la convention de LH de 71 prévoit une exception quand les deux véhicules sont immatriculés dans le même pays. Mais s’agissant d’apprécier les règles de conduite, c’est la loi italienne qui s’applique. La convention de LH de 71 précise bien qu’il faut toujours tenu compte du code de la route du lieu de l’accident.

L’idée du règlement est la même : si celui qui agissait dans un pays étranger s’est conformé à des règles impératives dans ce pays, on ne peut pas le lui reprocher. Voilà pourquoi il doit être tenu compte des règles de sécurité et de comportement. Il pourra ainsi se disculper d’une réparation.

En droit français, la Jurisprudence a admis un accord tacite des parties qui plaide selon la loi française quand bien même le délit est incontestablement survenu à l’étranger. Le projet de règlement contient une disposition plus générale : l’article 10 intitulé « liberté de choix ».

Selon l’article 10.1 : les parties peuvent convenir par une convention postérieure à la naissance du différent de soumettre l’obligation non contractuelle à la loi qu’elles choisissent. C’est une solution très opportune.

 

II. La mise en oEuvre de la règle de conflit

A. Le renvoi

 

                La question du renvoi ne s’est pas posée avant. Les délits étaient en général localisés en un même lieu.

Aujourd’hui, compte tenu de l’assouplissement dans des systèmes, la règle de conflits pourrait conduire à une situation de renvoi à la loi du lieu des éléments matériels, à la loi de la nationalité commune, à la loi qui présente des liens les plus étroits etc…

 

Le système français désigne une loi étrangère. Si cette dernière estime qu’en fait elle n’est pas la plus concernée et renvoi à une autre il n’y a pas de raison de ne pas suivre ce renvoi.

Mais ces considérations sont théoriques dès l’instant qu’entrera en vigueur le règlement car celui-ci en cas de résidence habituelle commune écarte la loi du dommage pour appliquer la loi de cette résidence. En plus le règlement contient une clause d’exception qui permet de désigner directement une autre loi avec laquelle on constate qu’il y a des liens plus étroits que la loi de réalisation du dommage. Donc on peut penser que la règle de conflit française permet de désigner la bonne loi ce qui rendrait inutile tout renvoi. Mais de toute façon le projet de règlement écarte expressément le renvoi : article 20.

B. Ordre Public et loi de police

1. L’ordre public.

 

                L’Ordre Public a été régulièrement invoqué par des plaideurs pour écarter l’application de la loi étrangère du lieu du délit quand elle était moins favorable que la loi française.

Il se peut effectivement, que la loi étrangère en matière de Responsabilié Contractuelle heurte certaines conceptions fondamentales du for (conceptions françaises en l’occurrence). Ex : une loi qui subordonnerait la réparation à des conditions trop restrictives ou bien une loi qui fixerait un plafond de réparation rendant la réparation dérisoire. Ex : la Common Law traditionnelle avait une règle selon laquelle la victime qui a contribué à son dommage si peu que ce soit est privée de tout droit à réparation. Cette règle a probablement été remplacée aujourd’hui.

En revanche le fait pour la loi étrangère d’obliger le demandeur à prouver une faute, là où la loi française fait peser une responsabilité de plein droit, n’est pas contraire à l’Ordre Public = Arrêt LAUTOUR 1948

Loi étrangère qui limite la réparation au préjudice éco à l’exclusion du préjudice moral = elle n’est pas contraire à l’Ordre Public français = arrêt KEIGER, arrêt CAMBODGE 2003

Dans pas mal de systèmes, la limitation de la réparation du préjudice c’est souvent la contrepartie d’une responsabilité sans faute.

Les prescriptions plus courtes que celles de la loi française ne sont pas en soi contraires à l’Ordre Public français (ex : prescription d’un an en droit espagnol en matière d’accident de la circulation).

Projet de règlement réserve l’Ordre Public du for article 22 mais il le fait dans la forme restrictive de la plupart des conventions.

Cette forme restrictive ressort de l’usage de l’adverbe « manifestement ».

Le projet ajoute une disposition spécifique : la question des dommages et intérêts non compensatoires. Ils vont au-delà de la simple compensation du préjudice. La disposition spécifique du règlement est que l’application d’une disposition étrangère qui conduirait à des dommages et intérêts non compensatoires tels que des dommages et intérêts exemplaires ou punitifs est contraire à l’Ordre Public communautaire.

Derrière cela il y a essentiellement le droit américain. Dans certains domaines, ce droit prévoit expressément des dommages et intérêts exemplaires notamment en matière d’anti trust. On inflige à l’auteur de la contravention des « trouble damages » = on multiplie les Dommages Intérets par 3.

Il y a aussi les pratiques connues de jurys américains qui attribuent des Dommages Intérets hors de proportion.

Ex : affaire LEWI. Grosse entreprise canadienne LEWI a fait des affaires aux USA avec une petite entreprise américaine. Litige qui se passe devant un jury. Condamnation de plusieurs millions de dollars. 75 millions de Dommages et Intérets et 400 millions de Dommages et Intérets punitif !!!

2. Les lois de police.

 

                Le projet de règlement prévoit aussi l’application des lois de police du for ou des lois de police étrangères. De nombreux demandeurs ont essayé d’invoquer la loi du 5 juillet 1985 en tant que loi de police. Mais cette argumentation a été systématiquement rejetée par la cour de cassation.

 

SECTION 2: LES règles particulières à certains délits.

 

                La conférence de LH s’est préoccupée d’unifier les règles de conflit en ce domaine. Mais c’est illusoire. Du coup on a pris les choses une à une, d’où deux conventions : une sur les accidents de la circulation routière, l’autre sur la responsabilité du fait des produits. Ces deux conventions s’appliquent sans condition de réciprocité.

Le règlement Rome II prévoit des règles particulières moins détaillées.

I. Les accidents de la circulation routière.

 

                C’est la convention du 4 mai 1971.

A. Le champ d’application.

 

                Ce champ d’application concerne les accidents de la route et eux seuls. La convention exclu certaines responsabilités tels que celle des vendeurs, réparateurs de véhicules.

La convention ne régit que la responsabilité extra contractuelle, ce qui exclut la responsabilité des transporteurs (responsabilité contractuelle). Mais il appartient au for de déterminer selon ses propres conceptions s’il s’agit d’une responsabilité délictuelle ou contractuelle.

B. La loi applicable.

 

                Pourquoi la 1ère convention en matière de RC a-t-elle portée sur les accidents de la circulation routière ? C’est en raison du nombre d’accidents survenant dans un pays entre personnes issues d’un autre pays et de la tendance marquée en DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ américain à ne plus parler de loi applicable au délit mais de rechercher la proper law = loi qui présente les liens les plus étroits.

Mais il est apparu qu’il fallait tout de même éviter une règle trop souple comme la proper law car la prévisibilité demeure primordiale dans ces questions. La prévisibilité permet aux compagnies d’assurance de régler amiablement les sinistres entre elles.

Voilà pourquoi on n’a pas cédé à la tentation d’appliquer la proper law. On a trouvé un compromis par voie de principe et d’exception.

 

article 3 : la loi applicable est la loi interne de l’état sur le territoire duquel l’accident est survenu.

Ce qui fait l’intérêt de la convention ce sont les exceptions qu’elle présente.

Elles sont accès sur le critère de l’état d’immatriculation du ou des véhicules impliqués. Pourquoi l’immatriculation du véhicule ? Car cela coïncide avec la résidence du propriétaire du véhicule donc du stationnement habituelle du véhicule et aussi le pays où il est assuré.

Ajoutons que contrairement au domicile, l’immatriculation du véhicule ne prête pas à contestation.

Dans quel cas va-t-on se tourner vers l’état de l’immatriculation ? Déjà quand un seul véhicule est impliqué dans l’accident. La loi du lieu d’immatriculation va s’appliquer si le demandeur c’est une personne transportée bénévolement (passager) et qu’elle n’a pas sa résidence habituelle dans l’état du lieu de l’accident.

Cette loi va s’appliquer si le demandeur se trouvait sur les lieux de l’accident hors du véhicule et que cette personne avait sa résidence habituelle dans l’état du lieu d’immatriculation.

Le texte ajoute qu’en cas de pluralité de victimes, la loi applicable est déterminée séparément à l’égard de chacune d’elles.

Lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans l’accident, on applique les dispositions précédentes si tous les véhicules sont immatriculés dans le même état.

 

En cas de collision au Maroc entre un véhicule français et un véhicule local : l’action opposant le conducteur français et son passager français, la CA a appliqué la loi française car les deux parties étaient françaises. Cette interprétation est condamnée par la Cour de cassation. Peu importe que le conducteur de l’autre véhicule ne soit pas attrait dans la procédure du moment qu’un second véhicule est impliqué dans l’accident.

C. Domaine de la loi applicable selon la convention

 

                La loi désignée selon les règles précédentes va régir les différents aspects de la responsabilité. Donc les conditions de la responsabilité, les causes d’exonération, la nature du dommage réparable, la transmissibilité du droit à réparation, la responsabilité du fait d’autrui (commettant et préposé) vont être régies pas cette même loi.

Quelle que soit la loi déclarée applicable, il doit être tenu compte des règles de circulation et de sécurité en vigueur au lieu et au moment de l’accident= article 7.

Question de l’action directe de la personne lésée contre l’assureur du responsable. La loi applicable à cette question est la loi désignée selon les articles 3 et 4. Mais dans les cas où l’on désigne la loi du lieu de l’immatriculation et que cette loi ne prévoit pas l’action directe, tandis que la loi du lieu de l’accident la connaît, l’action directe peut être exercée. C’est une règle de conflit alternative.

La convention va encore plus loin : si aucune des deux lois ne prévoit d’action directe, l’action directe peut encore être exercée selon la loi du contrat d’assurance.

 

II. La responsabilité du fait des produits.

A. Le domaine de la convention.

 

                Convention du 1er octobre 1997 : l’article 1 parle de la loi applicable à la responsabilité des fabricants pour les dommages causés par un produit. Cela vise donc tout dommage causé par un produit à une personne ou aux biens. Cela ne vise par le dommage subi par le produit à moins qu’il ne s’ajoute à d’autres dommages.

La convention exclut sa propre application lorsque la propriété ou la jouissance du produit a été transférée à la personne lésée par celle dont la responsabilité a été invoquée. S’il s’agit d’un acheteur lésé par un produit, la convention ne s’applique dans les rapports avec le vendeur.

Cette formulation évite de parler de contrat ou de délit. Ces mots n’apparaissent pas. Cette formulation autorise à appliquer la convention entre un sous acquéreur et un fabricant car aucun transfert de propriété dans ce cas-là.

La Jurisprudence interne française qualifie l’action du sous acquéreur de nécessairement contractuelle.

La cour de cassation en 1997, a rejeté l’application de la convention à l’action récursoire d’un vendeur intermédiaire contre le fabricant en déclarant que la convention ne s’appliquait qu’à la convention extra contractuelle. Cette décision a pour effet d’introduire dans la convention des termes qu’elle n’emploie pas. Mais un arrêt est revenu sur la solution le 7 mars 2000. Elle décide que la convention ne fait pas de distinction entre la responsabilité encourue. On s’en tient aux termes de l’article 1er qui exclut l’application de la convention.

 

La convention exclut les rapports entre vendeur et acquéreur. Des législations incluent l’usage du produit à l’acquéreur même. article 1386-1 du code civil. Ceci pourra conduire à la situation suivante : si le produit cause un dommage à l’acheteur et à un tiers (acquéreur qui est venu prendre possession du produit), on est amené à appliquer deux lois différentes. Le moyen d’éviter cela serait d’étendre l’application de la convention dans les rapports entre vendeur et acheteur.

B. La détermination de la loi applicable.

 

                Le lieu de mise en vente, le lieu d’usage ou de consommation du produit. Dans de tels cas de dispersion il faut rechercher la proper law. L’inconvénient de la règle est son imprécision. Pour éviter cela, sans avoir à déterminer un rattachement unique, la cour a eu recours au groupement des points de contacts. On procède par rattachements déterminés mais non pas par rattachement unique.

La méthode consiste à prendre l’un ou l’autre des deux pôles avec les rattachements concernés. La loi applicable c’est celle du territoire sur lequel le fait dommageable s’est produit. Mais ce lieu doit être également soit celui de la résidence habituelle (victime), soit celui de l’établissement principal du défendeur, soit celui de l’acquisition du produit par la victime. On voit que les rattachements sont prévus, ils sont définis.

 

L’article 5 prévoit une autre combinaison qui s’articule autour d’un autre pôle : la résidence habituelle de la victime si cet état est également celui de l’établissement principal du défendeur ou celui du lieu d’acquisition du produit.

Mais s’il y a une dispersion telle que les rattachements ne sont pas envisageables, dans ce cas le demandeur peut choisir entre la loi du principal établissement du défendeur et celle de survenance du fait dommageable.

 

Article 7 : atténuation selon laquelle ni la loi du fait dommageable ni celle de la résidence habituelle de la victime ne peuvent être invoquées si le défendeur ne pouvait raisonnablement prévoir que le produit serait mis dans le commerce dans l’état considéré.

 

Le projet de règlement inclus une disposition sur la responsabilité du fait des produits article 4. Les auteurs du règlement ne l’ignoraient pas et l’article 25 prévoit que les conventions restent en vigueur. Ça serait donc le 1er janvier prochain la convention de LH qui continuerait de s’appliquer en France. Seulement on ne peut pas exclure que la convention soit dénoncée. Il faut reconnaître que la disposition du règlement est plus simple que la disposition de LH. Selon le règlement la loi applicable est celle de la résidence habituelle de la personne lésée.

Mais si le défendeur établi que le produit a été commercialisé dans ce pays sans son consentement, la loi applicable est celle de la résidence habituelle du défendeur.

L’article 4, renvoi aussi à l’article 3 (règles générales du règlement, à connaître, c’est à dire loi du fait dommageable …).

 

III. Les règles particulières du projet de règlement.

A. Les atteintes aux droits de la vie privée et aux droits de la personnalité.

 

                La dispersion des éléments de rattachement peut être importante. Dispersion du fait dommageable, de l’atteinte du fait de la diffusion de certains magazines et le fait générateur lui-même peut être constitué par une chaîne d’événements

Un jugement de 1976 déclare que les faits litigieux doivent être appréciés pour la diffusion en France en application de l’article 9 du code civ et pour la diffusion en Allemagne, en application du droit allemand.

Il y aurait un préjudice français et allemand. Le dommage l’emporte sur le fait générateur.

Sur cet incident, sur le plan de la compétence juridictionnelle, le tribunal français ne s’est pas déclaré incompétent pour le préjudice subi en Allemagne.

Dans une seconde affaire, le tribunal déclare que la loi française est applicable au fond dès lors que le dommage dont il est demandé réparation s’est réalisé en France.

Autre jugement de 1983 sur Caroline de Monaco : déclare la même chose.

Il se dégage de cette Jurisprudence qu’un dommage est constitué dans chaque pays par la diffusion de la publication et que les tribunaux français sont prêts à réparés chaque dommage selon la loi locale. Il y a donc fractionnement du préjudice et éventuellement application distributive des lois.

Ce texte permet en matière délictuelle d’assigner un défendeur non pas dans l’état de son domicile mais dans l’état du lieu où le fait dommageable s’est produit.

 

Question : de quel dommage le tribunal français peut connaître ? Ici intervient l’arrêt FIONA SHEVIL de la CIJ : selon le tribunal saisi selon article 5-3, s’il n’est que le lieu de la diffusion, il est compétent que pour connaître la loi du lieu du dommage local. S’il est la loi du lieu de la publication il est compétent pour connaître de l’entier dommage.

Certains auteurs avaient préconisé une autre solution qui consistait à appliquer la loi du domicile du demandeur. Pourquoi ? Car il s’agit d’une atteinte à la personnalité et que le domicile d’une personne c’est le siège de ses intérêts.

Audit est plus favorable à la solution de la mosaïque car chaque diffusion dans un pays donné réalise un dommage distinct.

 

Il ne formule pas de rattachement spécifique. Il renvoi pour la désignation de la loi applicable au principe de l’article 3 (loi du lieu du dommage direct qui sera normalement celui de la diffusion). Pourquoi avoir prévu une disposition spécifique ? C’est que la question des atteintes à la vie privée par voie de presse fait intervenir une autre question, celle de la liberté de la presse. On est entre la liberté de l’information et le respect de la personnalité. Or selon les états le curseur n’est pas placé au même endroit. Ex : en GB on est plus soucieux de la liberté de la presse. C’est le contraire en France.

L’apport spécifique de l’article 6 du projet de règlement est une restriction selon laquelle la loi désignée par l’article 3 doit être écartée au profit de la lex fori lorsqu’elle se révèle incompatible avec les principes fondamentaux du for en matière de liberté de la presse. Il y a aussi dans l’article 6 une autre disposition : dans quelles conditions le demandeur peut-il exiger une correction de l’article ? On se réfère alors à la loi du pays de l’organisme dans lequel il est établi

B. La concurrence déloyale objet de l’article 5.

 

                Il y a un consensus : la loi appropriée c’est la loi du marché affectée. L’article prévoit le rattachement à la loi de l’état sur le territoire duquel les relations de concurrence ou les intérêts collectifs des consommateurs sont affectés ou risquent d’être affectés.

Fréquemment, le comportement qui est reproché va être une entente entre sociétés qui sont installées l’une et l’autre dans le même pays pour se partager le marché d’un autre pays. Serait inapproprié alors la règle de l’article 3 (loi de la résidence). Donc il fallait introduire cette règle visant le territoire sur lequel les relations risquent d’être affectées.

L’idée de marché a fait intervenir des considérations macro éco, avec les pratiques restrictives de concurrence. Il y en a qui ne concerne que deux personnes (espionnage industriel, manipulation d’un secret commercial). Dans cette hypothèse donc il n’y a pas de raison que la personne lésée ne bénéficie pas de l’article 3, dans ce cas on applique donc les règles de l’article 2 par renvoi de l’article 5-2.

 

Il reste cependant qu’il paraît difficile de distinguer les deux hypothèses : dans quel cas va-t-on voir que l’action ce restreint à deux personnes ? Certains comportements qui intéressent au 1er chef deux personnes relèvent néanmoins de la loi du marché, ex : l’abus de puissance économique.

C. Les atteintes à l’environnement.

 

                On entend par là les atteintes aux personnes et au milieu écolo lui-même. La condition commune c’est que ces atteintes soient le résultat d’une activité humaine.

La disposition du règlement renvoi à la règle de l’article 3 §1 : application de la loi du lieu où le dommage environnemental est survenu (+ les deux exceptions)

Le rattachement du principe au lieu du dommage pourrait inciter un opérateur à s’installer à proximité des frontières et déverser des produits nocifs dans un fleuve en comptant sur la réglementation moins stricte du pays voisin. Voilà pourquoi l’article 7 autorise le demandeur a fondé ses prétentions sur la loi du pays où le fait générateur du dommage c’est produit. On aboutit à une règle alternative. Cependant on risque alors de se heurter à la question suivante : le défendeur va objecter que son activité est conforme aux normes de l’état où il agit. Pour statuer sur cette question il faut faire intervenir la règle de l’article 13 : il faut toujours tenir compte des règles de sécurité et de comportement en vigueur au lieu et au moment de la survenance du fait générateur. Donc le juge devra faire la balance de toutes les circonstances.

D. Règles particulières aux atteintes de droit de propriété intellectuelle.

 

                Cela inclus le droit d’auteur, les droits voisins, le droit pour la protection des bases de données et l’ensemble des droits de propriété industrielle (marques, brevets, dessins et modèles). Il existe dans ces domaines un grand nombre de conventions internationales. La solution qui se dégage est le principe de territorialité qui consiste à appliquer la loi du pays pour lequel la protection est revendiquée. Si le dépositaire d’une marque invoque la contrefaçon de cette marque dans le pays A et B on appliquera pour chacun la loi locale. On applique la loi dont jouit le titulaire dans chaque pays.

C’est la solution du règlement : article 8-1.

Précision qu’on trouve à l’article 10-1 : permet aux parties de conclure un accord sur les suites de la responsabilité : il fait exception pour les atteintes aux droits de la propriété intellectuelle. Tout accord est interdit.

 

CHAPITRE 3: Les contrats internationaux.

 

                La question de la loi applicable ici a fait l’objet d’une évolution. Cette évolution a conduit au début du 20ème siècle a proclamé le principe de la loi d’autonomie ou encore l’autonomie de la volonté qui autorise les parties au contrat international à désigner la loi applicable au contrat.

Il existait néanmoins de grandes disparités dans la manière de comprendre ce principe outre le fait que des pays n’ont pas admis l’autonomie de la volonté et continuent à appliquer le principe de la loi du lieu de conclusion du contrat.

En Europe occidentale, les divergences appelaient à une unification.

On a abouti à la convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles du 12 juin 1980.

article 2 : aucune condition de réciprocité : cela signifie que la convention s’applique même si elle désigne la loi d’un état non contractant.

A la faveur du traité d’Amsterdam, en matière de statut personnel un grand nombre de règle de Droit International Privé sont passées dans l’orbite communautaire. La communauté a projeté la transformation de la convention en règlement.

Effet : ce règlement aura ainsi une interprétation uniforme soumise à la CJCE.

 

La convention pose des règles générales de rattachement et des règles spéciales.

 

SECTION 1: LES règles générales

I. La loi applicable au fond.

 

                Lorsque s’est répandu le concept d’autonomie de la volonté l’idée était de rechercher dans tous les cas la volonté des parties au contrat, volonté parfois exprimée dans le contrat mais à défaut on recherchait la volonté implicite des parties. Donc c’était un principe de solution très subjectif. Cette conception est Aujourd’hui discréditée en doctrine. On lui reproche d’être artificielle en tant qu’on recherche une volonté implicite. Ce discrédit se manifeste clairement dans la convention de Rome dans laquelle on trouve l’article 3 (« liberté de choix ») et l’article 4 (« loi applicable à défaut de choix »). Donc c’est une approche dualiste.

A. Choix de la loi par les parties.

1. Principe de liberté.

 

                C’est la disposition fondamentale de la contention de Rome : article 3-1 : le contrat est régi par la loi choisie par les parties. C’est une formule lapidaire mais elle est remarquable pas ce qu’elle ne dit pas et ce qu’elle dit.

 

Ce qu’elle ne dit pas c’est qu’il n’est pas exigé que le contrat présente un lien avec le pays dont la loi est choisie. Cette hypothèse est quand même rare. Pourquoi ce libéralisme ? Car l’expérience démontre que quand la loi est négociée, les parties insistent chacune pour voir appliquer sa loi. Lorsque les parties sont en position d’équilibre, on ne trouvera d’accord que dans une loi tierce. Il y a à cela une autre raison : dans certaine matière il y a des lois très techniques. Ex : le droit anglais en matière maritime. Du coup on peut désigner le droit anglais pour un transport qui n’a rien à voir avec l’Angleterre.

Ce qui ne dit pas non plus l’article c’est l’adjectif « international ». La raison est qu’on estime que certains contrats conclus entre parties établis dans le même état peuvent néanmoins participer à une opération internationale.

Dans la convention, c’est la disposition de l’article 3-3 qui règle la question : Si tous les éléments du contrat sont localisés dans un pays, que les parties ont désigné une autre loi, le choix de la loi n’est pas écarté mais on appliquera intégralement les dispositions impératives de la loi de ce pays s’il y en a.

Tel n’est pas le cas lorsque le contrat est international. Quand c’est le cas, le choix de la loi de A autorise à ne pas appliquer une disposition impérative de la loi B.

 

On pourrait envisager que l’entrepreneur souhaite que le contrat avec le sous-traitant soit soumis à la même loi. Il n’est pas inenvisageable qu’un contrat interne soit soumis à une loi étrangère.

2. La manifestation du choix.

 

Il y a un siècle les contrats étaient totalement imprégnés de l’autonomie de la volonté. La conséquence est qu’on recherchait la volonté des parties en toute hypothèse. Donc on recherchait leur volonté implicite à travers les éléments du contrat et même selon une théorie allemande, leur volonté hypothétique. C’est celle que les parties auraient eu si elles avaient envisagés la question du droit applicable.

Cette doctrine a été critiquée car sous couvert de volonté implicite, le juge examine le contrat tel qu’il a été conclu et au regard des éléments le juge disait que la volonté implicite des parties désignait la loi X, donc sous couvert de recherche de volonté au procède à une localisation objective du contrat.

Ces critiques ont eu leur effet, c’est pour cela que dans la convention de Rome l’article 3-1 que le choix des parties doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Cela signifie que si le choix ne ressort pas clairement du contrat, il ne faut pas rechercher une volonté implicite, on passe à l’article 4 avec la loi applicable à défaut de choix. Cela traduit un compromis. Les négociateurs ont estimé que même dans des cas où il n’est pas dit que le contrat sera régi par la loi X, il peut arriver que néanmoins, la volonté des parties ne soit pas douteuse. Autrement dit, entre le choix exprès et l’absence de choix, la convention n’a pas pu ménager une sorte de zone grise. C’est pourquoi les rédacteurs de la convention n’ont pas éliminé toute idée de volonté implicite. Ils l’ont refoulé mais ne l’ont pas éliminé.

En s’appuyant sur la Jurisprudence antérieure à la convention de Rome, voyons quels sont les cas qui pourraient relever de ces formules de la convention de Rome.

 

D’abord les cas où le choix de la loi sans être exprès résulterait des dispositions du contrat.

Ex : les parties ont fait usage d’un contrat type. Il y a des organismes professionnels qui supervise le commerce et qui établissent des contrats types dans le contexte d’un certain ordre juridique. De sorte que, si venait à s’élever une difficulté non résolue par le contrat type, on se référa au droit dans lequel ce contrat a été élaboré.

 

Autre Ex : si le contrat, sans se référer expressément à une loi donnée, contient une clause qui fait référence au Code civil Français. Dans ce cas il est possible d’inférer dans l’esprit des parties que ce droit régit l’ensemble du contrat.

 

Autre Ex : lorsque l’opération qui a été conclu par les parties qui se rattache à deux lois, or il s’agit d’un type d’opération qui est connu de l’une de ces lois et non de l’autre. Dans ce cas, il paraît normal de déclarer que la volonté des parties est d’appliquer la loi qui connaît ce type d’opération.

Ex : bail conclu au Maroc sur une terre : bail a moitié fruit : non connu du droit français mais connu du droit marocain. Donc on applique le droit marocain.

Ex : Le trust : ce n’est pas un contrat. Mais si on a constitué un trust qui présente des rattachements avec la Franc et l’Angleterre, on appliquera la loi anglaise.

Ex : existence dans le contrat d’une clause attributive de juridiction en cas de litige aux tribunaux d’un pays donné (tribunaux allemands). On estime en général que ceci implique le choix du droit allemand car les parties ne font pas véritablement la distinction entre juridiction compétente et loi applicable : « celui qui choisit le juge choisi le droit ».

 

Aussi le texte parle des circonstances de la cause : un élément à écarter c’est la langue employée dans le contrat  ou les négociations. Elle ne peut être à elle seule considérée comme indiquant le choix d’une loi correspondante. Ce qui semble répondre le plus à l’idée de circonstances de la cause et l’idée de contrats liés. L’expression de contrats liés peut recouvrir plusieurs hypothèses : Une qui est très fréquente est celle d’une succession de contrats entre les mêmes parties. Ex : des parties ont conclu un CDI de 3 ans. A l’expiration du contrat, les relations se poursuivent entre elles. Si le contrat d’origine contenait une clause de droit applicable, il est légitime de considérer que sauf indication contraire, le droit désigné à l’origine s’applique aux relations nouvelles.

La question est plus délicate quand il s’agit de contrats qui ont des structures autonomes et qui sont liés d’un point de vue fonctionnel. Ex : contrat cadre qui entraine des contrats d’exécution. La loi applicable a été désignée dans le contrat cadre mais non en vue des autres contrats. Il ne semble pas que l’on puisse considérer que le choix de la loi dans le contrat cadre vaut pour les contrats d’exécution. Peut-être arrivera-t-on à cette conclusion mais ça ne devrait pas l’être selon l’article 3, ça le serait plus selon l’article 4.

Autre type de contrats liés : les sûretés conventionnelles. Un contrat et une sûreté qui garantit l’exécution du contrat. La Jurisprudence française antérieure à la convention de Rome avait jugé que bien que le contrat de cautionnement est soumis à sa loi propre, il y a lieu de présumé qu’il est régi par la loi de l’obligation garantie. Donc si une partie française cautionne un contrat soumis à la loi italienne, on présumait que le contrat de cautionnement était soumis à la loi italienne. Sous l’empire de la convention de Rome, la présomption n’est pas lieu d’être. Si le contrat de cautionnement ne désigne par la loi applicable, on applique l’article 4 : loi applicable à défaut de choix.

 

Conclusion : pour les contrats internationaux, il faut faire le choix de la loi applicable !

3. Les prolongements de principe de liberté.

 

Le choix des parties implique le choix d’une loi unique. La doctrine est hostile au dépeçage du contrat : cela consiste à appliquer éventuellement des lois différentes à différentes parties du contrat.

La doctrine était hostile à ça en application de l’idée que les obligations issues d’un contrat forment un tout. On peut craindre qu’à appliquer notamment un droit aux obligations d’une partie et un droit aux obligations de l’autre, cela n’entraîne un certain déséquilibre entre les parties.

Et pourtant, l’article 3-1 al3 de la convention de Rome, dit que par ce choix les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat. Pourquoi cette volte-face ? Car il y a eu conscience de la complexité de beaucoup de contrats internationaux. La loi ne convient pas forcément à tous les aspects du contrat. Les parties auraient même pu conclure des contrats séparés dans certains cas.

 

Les parties peuvent-elles désigner une loi non étatique ? La loi non étatique c’est quoi ? On connaît les principes UNIDROIT ou les principes de droit européen des contrats. Si les parties hésitent entre deux lois, n’est-il pas possible que les parties désignent les principes UNIDROIT ? Sans doute mais que faire si on ne trouve pas dans ces principes une règle pour la difficulté qui s’élève ? Il sera possible de rechercher en dernier recours les principes qui s’appliquent selon l’article 4.

Mais si le contrat se rattache étroitement à l’un des deux pays et que dans le droit de ce pays il y a une règle impérative qui prétend s’appliquer à ce type d’opération c’est ce qu’on appelle une loi de police.

L’article 1-4 dit que si les parties ont désigné les principes UNIDROIT on les applique mais cela ne préjuge pas l’application d’une loi de police qu’on découvrirait dans le droit de l’un des états dans lequel se rattache le contrat.

B. La loi applicable en l’absence de choix.

 

Lorsque les parties n’ont pas fait usage de la liberté de choix de l’article 32 on détermine la loi applicable de manière objective = article 4. Dans l’article 4 on distingue une règle générale qui est assortie de présomptions et une clause de réserve qui ramène au principe.

1. Le principe.

 

A défaut de choix selon l’article 3, le contrat, dit l’article 4, est régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Cette formule synthétise les approches objectives qu’on trouvait dans différents droit nationaux. C’est l’idée de proper law du droit anglais. En Allemagne on parlait de centre de gravité. En France on parlait de théorie de localisation. Aux USA on parlait de groupement de points de contact.

Le progrès par rapport aux théories antérieures c’est que avant on s’attachait au lieu de conclusion du contrat ou bien au lieu d’exécution. Mais le lieu de conclusion n’est pas un rattachement significatif. Déjà avant on disait que le lieu de conclusion pouvait être fortuit alors aujourd’hui c’est pire !

Le lieu d’exécution c’est beaucoup plus significatif. Le problème est que l’exécution ne se produit pas toujours dans le même pays.

La règle des liens les plus étroits n’est pas une règle de conflit. Le propre d’une règle est d’entraîner une conséquence déterminée. Parler des liens les plus étroits c’est rappeler le principe qui sous-tend toutes les règles de conflits.

En matière contractuelle, si on est amené à rechercher la loi applicable c’est qu’il y a un désaccord sur le fond entre les parties, et cela risque de se traduire par un désaccord sur le droit applicable.

2. Les présomptions.

a. Présomption  générale.

 

article 4 : présomption générales et particulières.

article 4-2 : il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou l’établissement qui dit fournir la prestation.

Ce qui est fondamental c’est la notion de prestation caractéristique.

On a beaucoup de contrats usuels, des contrats nommés. Or il a été observé que dans la plupart, la prestation d’une des parties consiste à rémunérer ce que fait l’autre. Donc on a une prestation en argent, et une autre prestation qui, elle, est caractérisque. Dans le contrat de vente c’est le transfert de propriété. Dans le contrat de bail, c’est le bailleur qui met à disposition. Dans le contrat de travail le travailleur accompli des tâches. Dans tous les cas l’autre partie exécute une prestation indifférenciée, le versement d’une somme d’argent.

L’article 4-2 appelle des commentaires :

La localisation du contrat par la prestation caractéristique ne se fait pas de manière immédiate. La règle de désigne pas le lieu d’exécution de la prestation caractéristique mais l’établissement de celui qui fournit cette prestation. En effet cela est plus sûr dans le sens où la prestation peut s’exécuter dans différents pays ou bien alors il y a des cas où le lieu d’exécution lui-même n’est pas significatif. Ex : pour la vente on déterminerait le lieu de livraison. Mais juridiquement, dans la vente internationale le lieu de livraison c’est le lieu où les marchandises passent du contrôle du vendeur sous le contrôle de l’autre. Or en matière internationale, ce lieu peut se situer au magasin du vendeur ou de l’acheteur et en une multitude de points entre ces deux endroits. On fait allusion ici au Incoterms.

Aussi cela permet pour une entreprise de voir l’ensemble de ses contrats soumis à la même loi.

article 4-2 : si la prestation doit être fournie par un établissement autre que l’établissement principal, c’est le lieu de cet autre établissement qui est pris en considération.

b. Les présomptions particulières.

 

article 4-3 pour les contrats portant sur un immeuble et l’article 4-4 pour les contrats de transport.

De manière générale, lorsqu’un contrat a pour objet un immeuble, du point de vue des conflits de loi, il faut en principe distinguer les questions contractuelles et les questions réelles.

Les questions réelles sont soumises à la lex rei sitae tandis que les questions contractuelles (rapports d’obligation entre les parties) obéissent à la règle de conflit prévue par les contrats.

Si les parties n’ont pas désigné la loi applicable à leur contrat il semble normal de soumettre le contrat à la loi de l’immeuble pour ne pas scinder la loi applicable au transfert de propriété et la loi de relation entre les parties. L’immeuble exerce une force d’attraction sur les contrats qui ont comme objet un immeuble. article 4-3 : quand le contrat a pour objet un droit réel immobilier, il est présumé que le contrat présente les liens les plus étroits avec le pays où est situé l’immeuble. Donc si une personne vend un immeuble dont elle est proprio dans un pays étranger, dans que la loi applicable ne soit désignée, la présomption est en faveur du situs rei. Ceci n’interdit pas aux parties de stipuler une loi applicable pour les questions non réelles.

L’article 4-3 dit que si le contrat a pour objet un droit réel immobilier ou un droit d’utilisation d’un immeuble. On vise ici le contrat de bail. Le contrat de bail est un contrat qui engendre des droits personnels. Mais l’immeuble encore excerce sa force d’attraction. Lorsqu’est loi un immeuble dans un pays donné, si les parties n’ont pas désigné la loi applicable il est normal de présumer que la loi applicable est celle de la loi du lien de l’immeuble.

A cela s’ajoute une autre raison : les baux font souvent l’objet de dispositions impératives en droit interne. Tout ceci concourt que les liens les plus étroits sont ceux de la situation de l’immeuble.

Ne sont visés que les contrats portant sur un droit réel et le contrat de bail. Donc la présomption de 4-3 ne s’applique pas aux autres contrats qui peuvent avoir pour objet un immeuble. Ex : le contrat d’architecte.

Cette présomption peut être combattue. Ex : si un allemand proprio d’une villa en France loue celle-ci à un autre allemand. La présomption en faveur de la loi du lieu de l’immeuble sera moins fondée que la loi nationale commune des parties. Le débat est ouvert.

c. La non application des présomptions.

 

Ex : le contrat d’échange. On ne peut que revenir à la directive des liens les plus étroits car pas de prestation caractéristique.

Le contrat de concession ou de franchise : un fabricant s’engage à fournir un distributeur qui s’engage à vendre telle quantité de produits. L’expérience de la convention de Bruxelles à montrer la quasi impossibilité de déterminer qui du concédant ou du concessionnaire fournit la prestation caractéristique.

Enfin l’expérience du DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ indique que même lorsqu’on a choisi un rattachement privilégié tel que la prestation caractéristique, il se peut que dans un cas donné, on s’aperçoive que ce rattachement ne conduit pas à la « bonne loi », c’est à dire qui ne semble à pas la plus appropriée.

En matière contractuelle : ex du contrat de prêt. Dans un contrat de prêt l’obligation caractéristique est celle du prêteur. Par conséquent l’application de 4-2 conduirait à l’application de la loi de la résidence du prêteur. Mais ceci va s’appliquer à ces emprunts obligataires émis dans différents pays. Donc 4-2 conduirait à soumettre l’emprunt obligataire à des lois différentes selon la résidence habituelle des souscripteurs. Il est préférable que l’emprunt soit soumis à une loi unique et de délaisser la présomption de 4-2.

C’est pourquoi l’article 4-5 précise que les présomptions des paragraphes 2 et 3 sont écartées lorsqu’il résulte de l’ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays. On appelle ça une clause de réserve ou clause d’exception qui permet de désigner une autre lui que celle initialement prévue. En soit, l’insertion de cette clause de réserve n’est pas anormal mais Audit pense que c’est dommage car ce qui venait avait n’était que des présomptions dont la nature permet qu’elle soit combattue. Dans la clause de réserve est redondante mais c’est aussi un encouragement pour les parties à discuter sur la loi applicable.

 

II. La loi applicable à la forme du contrat.

 

Il arrive que la validité du contrat soit contestée pour défaut de respect d’une règle de forme. C’est l’article 9 qui indique la loi à appliquer pour la forme. La convention soumet la forme de manière alternative soit à la loi qui régit le contrat au fond soit à la loi du lieu au le contrat a été conclu. Ces règles de conflit ont une coloration matérielle. Ici le but est de permettre la validité du contrat en la forme. Cette faveur à la validité se manifeste aussi dans le sens où beaucoup de contrats internationaux sont des contrats entre absents alors la convention dit qu’il suffit que le contrat satisfasse aux conditions de forme de la loi de l’un des pays où se trouvaient les parties.

Les règles de conflit alternatives soulèvent quelques difficultés techniques d’application. Imaginons que le contrat soi annulable selon deux lois potentiellement applicables (loi du fond et loi du lieu de conclusion). Dans ce cas il faut choisir entre la loi des effets de la nullité et la loi qui prononcer la nullité. S’il ressort de l’examen du contrat que le contrat n’est annulable que selon l’une des lois (avec l’autre loi il y a prescription par ex)  dans ce cas l’esprit de l’article 9 est de tenir compte du délai de prescription le plus bref et de ne pas annuler le contrat.

Des règles impératives prendront souvent le caractère de lois de police. La convention se soucie de l’application des lois de police mais que cette une application exceptionnelle. En matière de forme, la convention s’est préoccupée d’une application plus certaine des règles de forme impérative : on retrouve le contrat ayant pour objet un droit réel immobilier. L’article 9-6 dans ce cas impose l’application des règles de forme impérative de la loi du situs rei.

 

 

III. Les mécanismes généraux des conflits de lois.

 

La convention contient des dispositions relatives aux lois de police, aux renvoi et à l’Ordre Public.

A. Les lois de police.

 

Une loi de police en matière internationale c’est une disposition que le juge applique nonobstant le fait que la situation relève ou pourrait relever d’une autre loi selon les principes normaux du conflit de lois. Pourquoi faire intervenir une loi de police ? Car cette disposition apparaît trop impérative pour que la situation lui échappe. On fait abstraction du rattachement normal. La question des lois de police présente une importance particulière en matière de contrat. Pourquoi ? Car les principes normalement applicables c’est la loi d’autonomie. Selon l’expression de la loi d’autonomie selon la convention de Rome, les parties jouissent d’une liberté quasi absolue. Dans le droit des biens, la responsabilité etc… le rattachement est objectif, ce qui fait qu’on applique la loi du pays avec lequel la situation présente des liens étroits.

En matière contractuelle, le rattachement c’est la volonté des parties, c’est donc purement subjectif. Donc il y a un risque que ne soit pas désignée une loi à laquelle le contrat se rattache de manière très étroite et qui contient une disposition particulièrement impérative.

En l’absence de choix on applique la loi de la résidence de la partie qui fournit la prestation la plus caractéristique. Une entreprise qui vise le marché français et qui s’installe dans un pays limitrophe pour y faire de la VPC en pays choisi en raison du fait que les dispositions de sa loi sont plus favorables à l’entreprise qu’à l’autre partie.

D’où l’importance de l’article 7 de la convention : « loi de police ».

article 7-1 : « lors de l’application en vertu de la présente convention de la loi d’un pays déterminé il pourra être donné effet aux dispositions impératives de la loi d’un autre pays avec lequel la situation présente un lien étroit, si et dans la mesure où, selon le droit de ce dernier pays ces dispositions sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat. Pour décider si effet doit être donné à ces dispositions impératives il sera tenu compte de leur nature et de leur objet ainsi que des conséquences que découleraient de leur application ou de leur non application. »

 

Analyse du texte : Le texte permet d’appliquer une loi de police au détriment de la loi du contrat. On va distinguer l’hypothèse et les effets de la disposition et ses conditions.

1. L’hypothèse.

 

« Lors de l’application de la loi d’un pays déterminé ». Donc l’article 7 vaut pour la loi du fond et de la forme. Cette loi a été désignée soit selon l’article 3, 4 ou 9 et une partie demande à ce que cette loi soit écartée sur un point donné au motif que la loi d’un autre pays se veut applicable. De quel pays émane cette loi qui se veut applicable au détriment de la loi désignée ? On ne distingue pas selon qu’il s’agit d’une loi de police du for ou d’une loi de police étrangère. Jusque-là, en droit positif, on connaît dans chaque pays pas mal d’exemples dans lesquels un juge français par ex étant soumis à une loi étrangère considère qu’une loi impérative du  for doit s’appliquer à ce contrat. En revanche en droit positif les exemples dans lesquels un juge accepte de tenir en échec la loi du contrat pour satisfaire à une loi de police étrangère sont rares.

 

article 7-2 qui pour rassurer les états prévoient que en cas de conflit entre une loi de police du for et une loi de police étrangère c’est la loi de police qui prévaut.

Pourquoi cette couverture de l’article 7 qui ne distingue pas entre loi de police du for et étrangère ? Les lois de police sont souvent teintées de droit public et en droit public on connaît le principe de l’égoïsme d’état. Aucun état ne collecte les impôts d’un autre ni ne réprime les infractions d’un autre…

En matière de loi de police ce n’est pas que du droit public. C’est une matière un peu hybride. Or en droit moderne, tous les états ont été amenés à prendre de réglementation éco et soc, ils ont donc des préoccupations communes car l’interdiction du commerce des armes, des stupéfiants, le respect du patrimoine culturel, la lutte contre le blanchiment de capitaux. On voit que chaque état édicte des dispositions qu’il considère comme importantes. Le but est de ne pas repousser systématiquement les lois étrangères pour que ses propres lois de police ne subissent pas le même sort à l’étranger.

2. Effets de l’article 7-1.

 

Il n’est pas dit on appliquera la loi de police. L’avant-projet de convention disait qu’il serait tenu compte de la loi de police. Le texte adopté dit qu’il pourra lui être donné effet.

Le juge est donc très libre de sa décision. Pourquoi ? Car par hypothèse il s’agit de déroger à la loi qui est normalement applicable donc c’est quelque chose qui ne va pas de soi.

Par exemple on lui donnera effet en suspendant l’exécution d’un contrat ou en refusant d’ordonner l’exécution d’un contrat qui a été conclu en violation de la réglementation d’une autre loi.

3. Les conditions.

a. Une disposition internationalement impérative.

 

« Si selon le droit de ce pays les dispositions sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat ». C’est pratiquement la définition de la loi de police. Il faut donc que non seulement la loi soit impérative mais que cette loi prétende aussi s’appliquer en matière internationale. Il faut que cette disposition soit considérée comme internationalement impérative.

Un contrat de vente : Le droit français contient des dispositions sévères qui interdisent au vendeur de s’exonérer de la garantie des vices cachés. C’est une disposition impérative du droit français. S’il s’agit d’une vente internationale, et qu’elle est soumise à une loi étrangère choisie par les parties et que cette loi ne connaît pas limite cette garantie, le juge français devra se plier à cette limitation de garantie édictée par la loi étrangère.

Parmi les dispositions impératives en vigueur dans un pays donné, il y en a quelques-unes qui vont être considérées comme tellement impératives que même s’il y a un contrat international elles doivent s’imposer par rapport à la loi choisie. Ce sont des lois de police internationalement impérative.

Donc un juge qui va faire jouer l’article 7 devra s’assurer en 1er que la disposition invoquée qui n’est pas tirée de la loi du contrat se veut réellement applicable.

Comment le savoir ? Il y a des dispositions du pays concerné qui visent expressément les relations internationales.

Lorsqu’il s’agit de dispositions relevant du droit des contrats, dans ce cas il arrive que dans la législation même il soit dit que ces dispositions s’appliquent à tout contrat conclu en France ou conclu par des personnes résidant en France. Dans ce cas-là on voit que la disposition se veut applicable.

3ème hypo plus délicate : celle dans laquelle la disposition interne impérative ne dit rien quant à son impérativité internationale. Ça sera au juge de recherche si d’après le but poursuivi, la disposition de vent applicable.

Quand il s’agit d’une loi étrangère le juge n’a qu’à regarder la Jurisprudence étrangère. C’est plus facile quand il s’agit d’une loi de police de son for.

 

Distinction entre l’article 3-3 et 7-1.

L’article 3-3 dit que le contrat est régit par la loi choisie par les parties sans même exiger que le contrat soit international. Si le contrat est purement interne, toutes les dispositions impératives du contrat doivent être respectées, même si on a choisi une loi étrangère.

En revanche si le contrat est international, les exigences du droit français sont moindres et seules les dispositions internationalement impératives interviennent.

b. Loi de police légitime.

 

Il faut encore que la revendication d’application soit légitime. Il faut que la loi ait un titre raisonnable à s’appliquer à ce contrat. « La loi d’un état avec lequel la situation présente un lien étroit » On ne va pas bouleverser l’éco d’un contrat pour satisfaire à une condition d’application qui ne serait pas légitime.

C’est au juge de voir si le contrat se rattache suffisamment étroitement avec l’état qui édicte la règle pour que la disposition soit appliquée comme loi de police.

c.lois de police étrangère

 

« Il sera tenu compte de leur nature et de leur objet ». ex : Si la disposition dont l’application est revendiquée, si son respect est assorti de sanctions pénales, cela démontre l’intérêt primordial que l’état attache à son respect. En ce qui concerne leur objet, il y a des domaines qui sont plus facilement reconnus comme étant de police, ex : loi sur la concurrence. Tout ce qui touche à la protection de l’Ordre Public comme le trafic de stupéfiant.

« Il faudra tenir compte des conséquences de leur application ou de leur non application. » On va rechercher si en n’appliquant pas la loi de police, on méconnaîtrait un intérêt important que l’état édicte. Il faut aussi comparer cet intérêt dont la loi de police est revendiquée à celui de l’autre dont la loi du contrat serait écartée.

Ex : il s’agit du gel des avoirs iraniens dans les banques sous contrôle américain par le Présidente Carter en 1980. LA question était la suivante : à quelle loi sont soumis les dépôts ? Loi française ou américaine ?  D’un côté du point de vue français les mesures américaines étaient légitimes. Mais de l’autre, les conséquences pour la place bancaire de Paris étaient gênantes pour les personnes venant déposer les fonds car ils se verraient refusés pour satisfaire les dispositions d’une loi étrangère.

Ex : Affaire du gazoduc sibérien de 1981. L’union soviétique ne disposait pas de toute la technologie nécessaire et avait fait appel aux entreprises occidentales. Le président Reagan prend un décret interdisant toute livraison par une personne sous la juridiction des USA à destination du gazoduc sibérien. Ce décret visait même les entreprises or des USA sous contrôle américain. C’est ainsi que des entreprises établies en France n’ont pas pu s’exécuter. Soc SENSOR de droit Néerlandais qui devait vendre des sismographes à une entreprise française à destination du gazoduc sibérien. L’entreprise française agit devant le tribunal de La Haye. La loi applicable est la loi du vendeur donc la loi américaine ne s’applique pas. Le vendeur si qu’il y a une disposition impérative et s’il livre il tombe sous des sanctions pénales. La communauté européenne est intervenue auprès de Reagan et le décret a été modifié. Le tribunal de La Haye a rendu sa décision. La loi applicable est la loi Néerlandaise. Selon la convention de Rome un tribunal Néerlandais serait prêt à appliquer une loi de police étrangère mais on estime ici que les intérêts américains ne sont pas suffisamment affectés et le tribunal à ordonner la livraison du matériel.

Cela a donné mauvaise presse aux lois de police étrangère surtout quand elles sont trop politiques. Certains états n’étaient pas d’accord déjà sur l’application de lois de police étrangère. Cela s’est traduit dans la convention de Rome : les états en ratifiant la convention peuvent formuler une réserve par laquelle ils excluent l’article 7-1, ce qui a été fait par l’Allemagne, le RU, le Luxembourg.

B. L’exclusion du renvoi.

 

La convention de Rome exclu le jeu du renvoi.

La convention est d’application universelle c’est à dire qu’elle s’applique même lorsqu’elle désigne la loi d’un état tiers. Il est donc possible que la règle de conflit d’un état désigné renvoi à une autre loi : par ex, celle du lieu de conclusion.

 

L’article 15 de la convention exclue tout renvoi. C’est quelque chose qui est admis lorsque la loi compétente a été choisie par les parties. Lorsque le rattachement est la loi d’autonomie, si les parties ont désigné une loi X, ce n’est pas pour être renvoyé dans une loi Y.

Quand la loi est désignée comme celle de la loi des plus étroits. Là encore, à supposer que la loi désignée renvoi à une autre, cette autre loi serait moins rattachée au contrat.

article 15 : aujourd’hui dans une convention internationale pour exclure le renvoi on dispose « la loi applicable c’est la loi interne de l’état. »

L’article 15 est rédigé différemment.

C. L’exception d’Ordre Public.

 

Elle figure dans la convention de Rome. C’est un mécanisme de sauvegarde. La convention de Rome s’applique quelle que soit la loi désignée. Cela dit en DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ on s’efforce de modérer le recours à l’Ordre Public. ex : article 16 de la convention de Rome. Selon ce texte l’application d’une disposition de loi désigner par la convention ne peut être écarté que si cette application est manifestement incompatible avec l’Ordre Public de for.

On relève que c’est une formulation négative pour bien montrer qu’il s’agit d’une exception. Il faut s’attacher d’après le texte à une disposition particulière. C’est une appréciation in concreto.

Enfin c’est l’adverbe manifestement qui soulève le caractère restrictif qui doit présider à l’usage du texte.

 

SECTION 2: LES règles particulières à certains contrats.

 

Le droit interne des contrats d’un pays comme la France se soucie de la protection d’une certaine catégorie de contractants réputés faibles.

Or cette protection doit être assurée dans le contexte international.

Pourquoi ? Car le principe de la loi d’autonomie ne manquerait pas d’être utilisé par la partie forte pour insérer dans le contrat d’adhésion une clause de loi applicable pour désigner un droit non protecteur de la partie faible.

On sait que la partie faible a la possibilité pour jouer la protection d’invoquer l’article 7 (loi de police protectrice). Mais ce remède est inadéquat à grande échelle. Il faut aller devant un juge. La loi de police s’applique disposition par disposition or il peut y en avoir plusieurs d’impliquer. Et l’application des lois de police d’appréciation imprévisibles.

Or il faudrait agir de manière préventive.

C’est ce que fait la convention de Rome en assurant l’application systématique de la loi la plus proche de la personne protégée dans deux catégories de contrats essentiels : les contrats de consommations (article 5) et le contrat individuel de travail (article 6). Le contrat d’assurance est exclu de la convention de Rome.

La technique utilisée pour la protection est la même dans le deux cas : la convention désigne une loi objectivement applicable. Pour le contrat de conso, c’est la loi du lieu de résidence du consommateur. Pour le contrat de travail c’est le lieu d’exécution du travail.

 

Il reste possible de désigner la loi applicable au contrat selon l’article 3 mais l’article 5 précise que ce choix ne peut avoir pour résulter de priver l’intéresse de priver l’intéressé de la protection que lui assure la loi objectivement applicable.

I. Les contrats conclus par les consommateurs.

A. Le champ d’application de l’article 5.

1. L’objet du contrat.

 Il s’applique quand le contrat a pour objet la fourniture d’objets mobiliers corporels ou de service ou le financement de telle fourniture (contrat de crédit). Les contrats d’achats d’immeubles ne sont donc pas visés.

Son exclut les contrats de fourniture de services qui doivent être fournis exclusivement dans un pays autre que celui de la résidence habituelle du consommateur. Une personne qui retient des prestations hôtelières dans un pays étranger ne doit pas réclamer la protection de la loi de sa résidence habituelle.

2. Les personnes.

 

On trouve une définition du consommateur : c’est celui qui contracte pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle.

Donc celui qui contracte dans l’exercice de sa profession, même s’il est un profane à l’égard de ce qu’il achète n’est pas considéré comme un consommateur.

B. Quelle est la loi applicable ?

1. La loi objectivement applicable.

 

Cette loi c’est celle de la résidence habituelle du consommateur mais il faut pour bénéficier de cette protection qui d’autres éléments se joignent. Le plus important est que le consommateur ait été d’une façon quelconque sollicité dans l’état de sa résidence. La conclusion du contrat doit avoir été précédée d’une proposition spécialement faite ou d’une publicité et le consommateur y a accompli les actes nécessaires à la conclusion du contrat.

Donc la VPC est ainsi visée.

 

2ème cas visé par l’article 5 : Le professionnel ou son représentant a reçu la commande dans l’état de la résidence habituelle du consommateur. Si on est démarché dans l’état de notre résidence habituelle par une entreprise étrangère et que la marchandise est reçu dans l’état de la résidence habituelle, la protection joue.

2. Désignation de la loi applicable.

 

Désigner la loi applicable ne peut avoir pour effet de priver le consommateur de la protection qui lui assure les dispositions impératives de la loi de sa résidence habituelle.

On va toujours faire jouer la loi la plus favorable au consommateur.

Quand on parle des dispositions impératives de la loi de la résidence habituelle on vise toutes les dispositions internes et internationales.

 

Sur les consommateurs, il faut ajouter que nous sommes dans un domaine où il y a eu toute sorte de directives chacune assortie de dispositions de conflit.

Audit est convaincu que les rédacteurs des directives ignoraient l’existence de la convention de Rome.

II. Le contrat individuel de travail.

A. La loi applicable en l’absence de choix.

 

Le texte envisage différentes situations :

Cas où le travailleur accompli son travail dans un même pays : la convention désigne la loi du lieu d’exécution habituelle du travail. Ainsi tous les salariés d’une même entreprise sont soumis à la même loi.

La réglementation du travail est dans l’ensemble impérative, ainsi le respect de cette réglementation est assuré par la règle de conflit sans avoir à parler de loi de police. Le texte ajoute que cette loi s’applique même en cas de détachement temporaire du travailleur dans un autre pays. Le texte ne distingue pas selon la durée du rattachement. Mais il semble qu’au-delà d’une certaine durée, c’est la loi étrangère qui va prendre place.

 

Cas où le travailleur n’accomplit pas habituellement son travail dans le même pays. Ex : un représentant qui dessert plusieurs pays ou un chauffeur routier. Dans ce cas la loi applicable est celle de l’établissement qui a embauché le travailleur.

 

Ces deux dispositions laissent ouvert un certain nombre de situations comme le travail qui s’exécute hors de la juridiction d’un état ex : travail sur une plate-forme en haute mer. On devrait appliquer la loi de l’entreprise qui a embauché. Pour les travailleurs à bord d’un navire, on applique la loi du pavillon. Il y a le cas du personnel de l’aéronef : ce personnel ayant une affectation principale à terre, on doit appliquer la loi correspondante.

B. Choix par les parties de la loi applicable.

 

Le choix de la loi est possible mais ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur du bénéfice de la loi objectivement applicable.

Utilité du choix : dans tous les contrats de travail internationaux on a des cadres expatriés à partir d’un pays industrialisé donc le choix de la loi permet de maintenir l’application de la loi du pays d’origine alors que la loi va s’exécuter dans un pays de moindre protection.

La réserve : on va être obligé d’examiner les points sur lesquels la loi de l’exécution du travail est plus favorable que la loi désignée. On va alors procéder à un dépeçage du contrat. Etant donné la grande variété de contrats de travail, l’expérience montre la difficulté de l’opération. Arrêt chambre sociale de la cour de cassation du 12 novembre 2002. L’écueil à éviter est une analyse disposition par disposition. La cour de cassation a indiqué dans l’arrêt qu’il fallait procéder par ensemble d’avantages se rapportant à la même cause. Par ex : tout ce qui est lié à l’ancienneté. Mais dans son arrêt la chambre sociale n’a pas fait ce qu’elle a dit.

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