Cours de DROIT PÉNAL
Le droit pénal est régi par le Code pénal entré en vigueur en 1994. C’est la branche du droit qui a pour objet l’étude de la répression par l’Etat des comportements des individus qui crée un trouble à l’ordre social. Les auteurs classiques définissent le droit pénal comme une norme de conduite sanctionnée par une peine. Voici le plan du cours de droit pénal :
· Introduction Générale
· I. L’OBJET DU DROIT PÉNAL
· §1. La criminalité
- Droit pénal
- La détermination matérielle des infractions pénales
- La règle « Nullum crimen, nulla poena sine lege »
- Quelles sont les conséquences du principe de légalité criminelle?
- Les différents types d’infractions pénales et leurs classifications
- La nécessité d’un texte d’incrimination en droit pénal
- Qu’est-ce que l’amnistie en droit pénal?
· A. L’étude de la criminalité
· B. La lutte contre la criminalité
· 1- Évolution historique de la lutte contre la criminalité (Genèse du droit pénal)
· 2- Une diversité de forme de lutte contre la criminalité : La politique criminelle
· §2. L’objet spécifique : l’infraction
· A. L’étude de l’infraction
· B. La lutte contre l’infraction
· II. LA RÉPONSE SPÉCIFIQUE DU DROIT PÉNAL : L’INFRACTION
· §1. Originalité du droit pénal en tant que discipline juridique
· §2. Originalité du droit pénal parmi les disciplines juridiques
· Première Partie. LA DÉTERMINATION DES INFRACTIONS
· Livre I. Détermination matérielle des infractions : LE CRIME ET LE CRIMINEL.
· Titre 1. LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS
· Chapitre 1 Le crime, critère de détermination du criminel
· I. EXPOSÉ DE LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DE L’INFRACTION
· II. CONSÉQUENCES DE CETTE DÉTERMINATION
· §1. Conséquences pour l’incrimination
· §2. Conséquences pour la peine
· Chapitre 2 Le crime, critère insuffisant de détermination des criminels
· I. LA PRIMAUTÉ DU TROUBLE À L’ORDRE PUBLIC
· II. L’INDIFFÉRENCE À LA PSYCHOLOGIE DU DÉLINQUANT
· Titre 2. LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DES INFRACTIONS.
· Chapitre 1 Le criminel, critère de détermination du crime
· I. EXPOSÉ DE LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DE L’INFRACTION
· II. CONSÉQUENCES DE LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DE L’INFRACTION
· §1. Conséquences pour l’incrimination
· §2. Conséquences pour la peine
· Chapitre 2 Le criminel, critère insuffisant de détermination du crime
· I. LA DISPARITION DU CONCEPT D’INFRACTION
· II. NÉGATION DU CONCEPT DE CRIMINALITÉ
· Titre 3. LA DÉTERMINATION MIXTE DES INFRACTIONS.
· Chapitre 1 Caractère mixte du droit pénal français et incrimination
· I. LA PRÉÉMINENCE DE LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS
· §1. L’importance du résultat de l’infraction
· A . Constitution de l’infraction et existence du résultat
· B. Gravité de l’infraction et gravité du résultat
· §2. L’importance de l’élément matériel de l’infraction
· II . L’ASSOUPLISSEMENT DE CETTE DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS
· §1. Importance de l’élément moral de l’infraction
· Nécessité d’un élément moral
· A. Prééminence de l’élément moral
· §2. Caractère accessoire du résultat de l’infraction
· Chapitre 2 Caractère mixte du droit pénal français et sanction
· I. LE CARACTÈRE MIXTE DU DROIT PÉNAL AU STADE DE LA SANCTION ABSTRAITEMENT PRÉVUE
· §1. Prédominance de la conception objective
· §2. Assouplissement de la conception objective de l’infraction
· A. Relâchement
· B. Rupture
· II. CARACTÈRE MIXTE DU DROIT PÉNAL AU STADE DE LA SANCTION CONCRÈTEMENT SUBIE
· Livre II. Détermination formelle des infractions : LE CRIME ET LA LOI.
· Titre I. LE PRINCIPE DE LÉGALITÉ CRIMINELLE.
· Chapitre 1 Les présupposés politiques du principe de la légalité criminelle
· I. JUSTIFICATION POLITIQUE DE CE PRINCIPE
· §1. Légalité criminelle et légitimité politique
· §2. Légalité criminelle et opportunité répressive
· II. AFFIRMATION POLITIQUE DU PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ CRIMINELLE
· Section I. Le principe de la légalité criminelle.
· I. LA RÈGLE « NULLUM CRIMEN NULLA POENA »
· §1. La légalité des incriminations
· §2. La légalité des sanctions pénales
· II. LA NOTION DE LOI PÉNALE AU REGARD DU PRINCIPE DE LÉGALITÉ CRIMINELLE
· §1. Les sources nationales du droit pénal
· A. La loi
· B. Les règlements
· §2. Les sources internationales du droit pénal
· A. Conventions internationales ordinaires
· B. Conventions internationales privilégiées
· Section II. Les conséquences juridiques du principe de la légalité criminelle
· ÉTENDUE DE LA LOI PÉNALE
· §1. L’interprétation stricte de la loi pénale
· §2. La non rétroactivité de la loi pénale
· LA RÉGULARITÉ DE LA LOI PÉNALE
· §1. La régularité de la loi
· §2. La régularité du règlement
· Chapitre 3 L’évolution du principe de la légalité criminelle
· I. EVOLUTION POLITIQUE DU PRINCIPE
· ÉVOLUTION JURIDIQUE DE LA LÉGALITÉ DU PRINCIPE
· §1. Incriminations
· §2. Les sanctions
· Titre II. LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS.
· Chapitre 1 Classification légale des infractions
· I. LE PRINCIPE DE LA DISTINCTION CRIMES, DÉLITS ET CONTRAVENTIONS
· §1. Exposé du critère de distinction
· §3. Les intérêts de la distinction
· Chapitre 2 Les autres classifications des infractions
· I. CLASSIFICATIONS FONDÉES SUR LA NATURE DES INFRACTIONS
· §1. Critères de qualification d’infraction politique
· A. Les critères de qualification concevables
· B. Régime propre aux infractions politiques
· §2. Le régime juridique de l’infraction politique
· A. Règles de fonds
· B. Règles de procédure
· II. LES CLASSIFICATIONS FONDÉES SUR LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION
· §1. Les classifications fondées sur l’élément matériel de l’infraction
· Les classifications fondées sur la durée de l’élément matériel
· Fondées sur la complexité de l’élément matériel
· §2. Les classifications fondées sur l’élément moral de l’infraction
· Seconde Partie. LA DÉTERMINATION DE L’INFRACTION
· Livre I. L’incrimination
· Titre I. LA SOURCE D’INCRIMINATION : LE TEXTE D’INCRIMINATION
· Sous-titre I. La nécessité d’un texte d’incrimination
· Chapitre 1 La description de l’incrimination
· I. L’ÉNUMÉRATION DES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS CARACTÉRISTIQUES DE L’INCRIMINATION
· II. LA RÉUNION DES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS
· §1. Constitution de la réunion, nécessaire à l’incrimination de l’infraction
· §2. Le moment de constitution de l’incrimination
· Chapitre 2 La qualification de l’incrimination
· I. PRINCIPE DE L’UNICITÉ DE QUALIFICATION
· II. EXCEPTION : LE CUMUL DE QUALIFICATIONS
· Sous-titre II. La neutralisation du texte d’incrimination
· Chapitre 1 Les faits justificatifs
· Section I. Les différents faits justificatifs
· I. LES VÉRITABLES FAITS JUSTIFICATIFS
· §1. L’ordre de la loi et le commandement de l’autorité légitime
· §2. La légitime défense
· §3. L’état de nécessité
· III. HYPOTHÈSE DU CONSENTEMENT DE LA VICTIME
· Section II. La justification pénale
· I. DOMAINE DE LA JUSTIFICATION
· §1. Divers fondements possibles
· §2. Fondements consacrés par le droit positif
· EFFETS DE LA JUSTIFICATION
· Chapitre 2 L’Effet attaché à ces faits
· I. DIVERSITÉ DES AMNISTIES
· §1. Source unique de l’amnistie
· §2. Les mécanismes multiples de l’amnistie
· II. LES EFFETS DE L’AMNISTIE
· Titre II. LE CONTENU DE L’INCRIMINATION : LES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS
· Sous-Titre I. Élément matériel de l’infraction
· Chapitre 1 Le comportement
· INFRACTIONS DE COMMISSION
· I. INFRACTION D’OMISSION
· II. INFRACTION DE COMMISSION PAR OMISSION
· Chapitre 2 Le résultat
· Section I. Notion de résultat
· Section II. Nécessité du résultat
· INFRACTIONS MATÉRIELLES, FORMELLES ET OBSTACLES
· §1. Infraction formelle et matérielle
· §2. L’infraction-obstacle
· INFRACTIONS CONSOMMÉES ET TENTÉES
· §1. Les éléments de la tentative
· §2. La répression de la tentative
· Sous-Titre II. L’élément moral de l’incrimination
· Chapitre 1 L’imputabilité
· Section I. L’imputabilité de la personne physique
· LE DISCERNEMENT
· §1. Le discernement aboli
· §2. Le discernement obscurci
· A. La minorité
· B. L’altération des facultés intellectuelles et mentales
· LA VOLONTÉ
· §1. La définition de la contrainte
· §2. Effets de la contrainte
· Section II. L’imputation de l’infraction à une personne morale
· §1. Domaine de cette imputation (doublement circonscrit)
· §2. Conditions de cette imputation
· Chapitre 2 La culpabilité
· Section I. Les fautes
· I. L’EXISTENCE DE LA FAUTE
· §1. La faute intentionnelle
· §2. La faute d’imprudence
· §3. Les fautes de nature intermédiaire
· A. Dol indéterminé
· B. L’imprudence consciente
· L’ABSENCE DE FAUTE
· A. Infractions intentionnelles
· B. Les infractions d’imprudence
· §2. L’erreur de droit
· Section II. Les fautifs
· I. RESPONSABILITÉ PÉNALE DU FAIT PERSONNEL
· §1. L’auteur
· A. L’auteur matériel de l’infraction
· B. L’auteur moral
· §2. Le complice
· A. Incrimination de la complicité
· B. L’élément moral de la complicité
· C. La sanction de la complicité
· II. RESPONSABILITÉ PÉNALE DU FAIT D’AUTRUI
· §1. Les hypothèses de responsabilité pénale du fait d’autrui
· A . La sanction du fait d’autrui
· B La culpabilité par le fait d’autrui.
· Livre II. La sanction pénale
· Titre 1. LA SANCTION PÉNALE ABSTRAITEMENT PRÉVUE PAR LA LOI.
· Sous-Titre 1. LA NATURE DES PEINES ABSTRAITEMENT PRÉVUES PAR LA LOI
· Chapitre 1 Opposition entre peines et mesures de sureté
·I. DIFFÉRENTES FONCTIONS DE LA SANCTION PÉNALE
· §1. La fonction répressive
· 2. Fonction préventive
· §
· II. DISTINCTION PEINE / MESURE DE SURETÉ
· §1. Le principe de la distinction
· §2. La remise en cause de la distinction
· §3. Le renouveau de la mesure de sureté
· Chapitre 2 Peines principales, complémentaires et accessoires
· I. LE PRINCIPE MÊME DE CETTE DISTINCTION
· §1. La peine principale
· §2. Les peines accessoires
· §3. Les peines complémentaires
· II. REMISE EN CAUSE DE LA DISTINCTION
· Chapitre 3 Peines de référence et peines de remplacement
· I. PEINES PRINCIPALES ALTERNATIVES ET PEINES PRINCIPALES DE RÉFÉRENCE
· §1. Peines principales alternatives
· A. Les peines principales alternatives en matière délictuelle
· B. Les peines principales alternatives en matière de contraventions
· §2. Peines principales de référence
· II. PEINES PRINCIPALES DE RÉFÉRENCE ET DE REMPLACEMENT Les peines principales alternatives ne sont pas les seules peines de remplacement.
· §1. La peine principale de référence remplacée par une peine principale alternative
· §2. La peine principale de référence remplacée par une peine complémentaire
· Sous-titre 2. LE QUANTUM DES SANCTIONS ABSTRAITEMENT PRÉVUES PAR LA LOI
· Chapitre 1 Le minimum légal de la sanction abstraitement prévue par la loi
· Section I. Indétermination du minimum de la sanction abstraitement prévue par la loi
· I. EXPOSÉ DE LA RÈGLE DE L’INDÉTERMINATION DES MINIMUMS LÉGAUX
· II. PORTÉE DE CETTE INDÉTERMINATION
· Section II. Exemption légale de la sanction abstraitement prévue par la loi
· Chapitre 2 Le maximum légal de la sanction abstraitement prévue par la loi
· Section I. Les seuils maxima de la sanction abstraitement prévue par la loi
· Section II. Aggravation légale des maxima
· I. L’AGGRAVATION REFUSÉE
· §1. La réitération d’infractions
· §2. Le concours d’infraction
· A. Le domaine d’application des règles nouvelles
B. Leur mise en œuvre
Introduction Générale
1- LES ENJEUX FONDAMENTAUX DU DROIT PÉNAL
– Politiques.
– Philosophiques : la conception que l’on se fait d’un criminel va de paire avec celle que l’on se fait d’un homme.
– Géopolitiques : on étudie la lutte de la société contre la criminalité.
– Relatif aux libertés individuelles : on pèse l’importance des libertés individuelles en fonction du taux de criminalité. Ainsi, ce n’est pas dans la Constitution que l’on trouve les libertés individuelles, mais dans le code de procédure pénale et le code pénal. Les lois mises en place pour punir ceux qui les enfreignent en disent plus long sur l’importance des libertés individuelles dans un pays que les grandes paroles que la Constitution proclame. On notera ici que la Constitution de l’URSS respectait en ses lettres les libertés individuelles autant que nous.
2- UNE LUTTE PARTAGÉE CONTRE LA CRIMINALITÉ
La criminalité : un terrain où le pénaliste ne sera pas tout seul.
D’autres disciplines vont s’intéresser à la criminalité. Le crime est un sujet trop grave pour être abandonné au seul pénaliste.
I. L’OBJET DU DROIT PÉNAL
Le DROIT PÉNAL RENVOIE AU CONCEPT DE CRIMINALITÉ.
L’objet du droit pénal est à la fois comme non spécifique (criminalité) et spécifique (l’infraction).
§1. La criminalité
A. L’étude de la criminalité
Le droit pénal entend faire reculer la criminalité.
Mais avant de s’en débarrasser, il faut bien qu’il ait pu l’étudier.
— La criminalité est un fait social.
La commission d’un crime a forcément des répercutions dans la société (atteinte à l’ordre public, trouble). Étudier la criminalité = étudier le crime.
— La criminalité est un fait humain.
Fait humain puisque acte commis par une personne (qui, faut-il le croire, a décidé de commettre ce crime en dépit des sanctions auxquelles elle s’exposait). Étudier la criminalité = étudier le criminel.
Le droit pénal est assez mal armé pour étudier à la fois crime et criminel. — Il peut très bien mal connaître le crime (chiffre noir de la criminalité = tous les crimes qui ne sont pas connus). — Même en connaissance du crime, le droit pénal peut-être impuissant en présence du crime (prescription de l’action publique par exemple). Le droit pénal étudie bien plus la criminalité légale que la criminalité réelle. — Le droit pénal ne sait rien de l’auteur d’un crime si celui-ci en est à son premier crime. — Et même pour ceux arrêtés et traduits devant un juge, le droit pénal ne les connaît que peu : la longueur des procès fait qu’entre la personnalité de l’arrêté et la personnalité du jugé, le fossé s’est très largement creusé (Réaction : enquêtes de personnalité au début de l’enquête). — Le droit pénal reste enfin par nature du droit. Il appelle donc en renfort d’autres disciplines pour obtenir des informations qu’il est incapable d’obtenir : vers les sciences criminelles en particulier. o La criminalistique : procédés scientifiques aidant à rechercher crimes et criminels (la police scientifique / la médecine légale) ; o La criminologie : on étudie les facteurs de la criminalité, qu’ils soient sociaux (chômage), individuels (on dira qu’un psychopathe est plus poussé que d’autres à commettre un crime) et aussi ses mécanismes. o La psychologie criminelle, la sociologie criminelle, la biologie criminelle (gêne du crime). La criminologie prétend cerner la criminalité réelle. |
B. La lutte contre la criminalité
Criminalité = multiples facettes = moyens de lutte diversifiés. Le droit pénal ne peut pas tout faire tout seul.
D’autres procédés ont existé avant le droit pénal pour lutter contre la criminalité : l’ensemble participe à la politique criminelle (plus judicieux d’appeler la politique anticriminelle).
1- Évolution historique de la lutte contre la criminalité (Genèse du droit pénal)
À l’origine : société de clans, bâtie autour d’ancêtres de grandes familles communes. Tout trouble commis est perçu comme complètement privé. Il faudra que la société évolue pour réaliser que le crime entraine surtout un véritable trouble public.
— La criminalité : facteur d’un trouble privé
— Crime commis analysé comme une agression entre deux clans : un clan agresseur et un clan agressé. Tu m’as agressé, je riposte. C’est LA VENGEANCE PRIVÉE (vendetta).
Responsabilité pénale (à l’époque) = responsabilité collective (le clan agressé peut punir n’importe quelle personne du clan agresseur).
— Idée va apparaître que vengeance privée = mécanisme dangereux et archaïque. La réaction se juridicise : à la vengeance privée va venir se substituer LA JUSTICE PRIVÉE (élaborer des règles d’encadrement de la vengeance).
LOI DU TALION : La riposte ne doit plus dès lors excéder l’agression « Pour un œil, un œil. Pour une dent, une dent ».
— Est encouragé le système de la composition volontaire : le clan agressé va établir une sorte de barème de riposte à l’agression : UNE TARIFICATION DU CRIME (Une femme tuée = mille moutons). Si la taxe n’est pas versée par le clan agresseur, la vengeance est autorisée.
— La criminalité : facteur de trouble public
Crime commis = affaire de la société entière. RÉPONSE COLLECTIVE À L’AGRESSION.
La sanction change de finalité : réparer un préjudice collectif (et non plus donner satisfaction au clan victime).
Composition volontaire => composition légale.
Ce système de tarification a évolué, des francs, en passant par la révolution, l’époque napoléonienne et le XIXe siècle.
Les peines corporelles sont supprimées en 1832, la peine de mort abrogée en 1981. Beaucoup d’infractions considérées initialement comme des crimes ont été ramenées à de simples délits. Des comportements jusqu’alors considérés comme infractions ne font plus partie du droit pénal : libéralisation de la contraception (1967), libéralisation de l’avortement, dépénalisation pure et simple de l’adultère (devenu faute civile depuis 1975). |
MAIS on peut également relever des signaux de sévérité renforcée : on voit le droit pénal s’étendre à des domaines de l’activité humaine qui lui étaient jusqu’alors étrangers : droit pénal économique et droit pénal social. Tous ces nouveaux domaines sont caractérisés par une grande sévérité. Droit pénal hésitant : s’accentue / se relâche = droite au pouvoir / gauche au pouvoir. C’est un peu ce qu’on appelle le complexe de Pénélope qui tricote le jour, puis détricote la nuit, puis retricote le jour… |
CODE PÉNAL DE 1992 : (mis en vigueur en 1994) : La montagne qui a accouché d’une souris. Tout un fromage pour un code qui ne vient pas bouleverser le système répressif. Il entérine certains principes jurisprudentiels et manifeste un renforcement considérable de la répression. Juridiquement, il contient une innovation considérable : la consécration de la responsabilité pénale des personnes morales.
Le droit pénal N’EST QU’UNE RÉPONSE PARMI D’AUTRES À LA CRIMINALITÉ. Il faut resituer ce dispositif juridique dans l’ensemble de lutte contre la criminalité : la politique criminelle.
2- Une diversité de forme de lutte contre la criminalité : La politique criminelle
1° Le droit pénal vise à réprimer les crimes.
2° Le droit pénal vise à prévenir l’infraction (réadaptation / réinsertion des délinquants).
Ces objectifs du droit pénal vont pouvoir être atteints par des moyens de nature différente : la politique criminelle.
— Des substituts pénaux peuvent parvenir à la prévention. Ferri, célèbre criminologue italien, a fait observer qu’un bon éclairage des rues la nuit était un moyen très simple de faire chuter la délinquance.
— Toute forme d’anormalité intéresse la politique criminelle : ses formes sont nombreuses (déviance, marginalité, différence).
La politique criminelle peut rapidement porter atteinte aux libertés individuelles tandis que le droit pénal ne s’attaque qu’à l’infraction = si le droit pénal a un objet d’étude qui ne lui est pas spécifique, il a une réponse qui lui est spécifique : l’infraction.
§2. L’objet spécifique : l’infraction
A. L’étude de l’infraction
INFRACTION = SON OBJET D’ÉTUDE SPÉCIFIQUE.
Le droit pénal, à travers les infractions qu’il va consacrer, va refléter ses valeurs. L’infraction n’est pas une donnée de la nature, elle est complètement artificielle.
Cela présuppose que l’on distingue dans une société donnée des évènements sociaux sur lesquels on va porter un jugement de valeur.
Toutefois, cette sanction n’est pas l’apanage du seul droit pénal. Le droit civil a bien des sanctions mais elles ne sont pas répressives. LA PLUS GRAVE DES SANCTIONS JURIDIQUES EST LA SANCTION PÉNALE.
Le droit pénal va alors établir une hiérarchie entre ceux dont la gravité se suffit à une sanction civile et ceux pour lesquelles il faut une sanction pénale = INCRIMINATION.
Le système répressif se compose de deux branches : – La PROCÉDURE PÉNALE : on recherche, on constate l’infraction et on juge leurs auteurs. – Le DROIT PÉNAL : droit pénal général (règles communes à toutes les infractions) ¹ droit pénal spécial (étudie une infraction isolément envisagée. |
B. La lutte contre l’infraction
« La fin ne justifie pas les moyens ». Le droit pénal, parce qu’il est droit, est porteur d’une éthique. LE DROIT PÉNAL N’ENFREINT PAS LES LIBERTÉS INDIVIDUELLES.
II. LA RÉPONSE SPÉCIFIQUE DU DROIT PÉNAL : L’INFRACTION
DROIT PÉNAL ORIGINAL PARCE QU’IL EST DROIT.
§1. Originalité du droit pénal en tant que discipline juridique
Le droit pénal pose la question fondamentale de savoir les rapports qu’il est légitime d’instaurer entre la protection de la sécurité et la protection de la liberté.
On distingue alors deux modèles :
— Le modèle des États policiers et totalitaires : « l’interdit est la règle, le licite est l’exception ».
— Le modèle des États libéraux : Inversement, l’interdit pénal est ici l’exception, le licite est la règle. (article 5 de la DDHC : « Tout ce qui n’est pas interdit est donc permis »).
On a parfois prétendu qu’il n’y avait pas de différences entre ces deux modèles. Mais si l’on prend l’exemple du Jardin public dans un État policier (« Il est autorisé de marcher sur le chemin de terre ») et dans un État libéral (« Il est interdit de marcher sur les pelouses »), on se rend bien compte, au détour de cette histoire, de l’enjeu que représente la protection la sécurité sans sacrifier les libertés.
§2. Originalité du droit pénal parmi les disciplines juridiques
Deux grandes familles de disciplines juridiques :
– le droit privé
– le droit public.
Droit pénal, une des rares disciplines qui s’imprègne dans les deux.
Public = parce que vertical (régissant les rapports entre État et citoyen).
Privé = parce que horizontal (traits du droit privé).
Des juridictions privées statuent donc sur les litiges répressifs. ? L’enjeu est celui de la protection des libertés individuelles. Les garants des libertés individuelles dans ce pays sont les juges judiciaires (article 66 de la Constitution).
Première Partie. LA DÉTERMINATION DES INFRACTIONS
L’opération d’incrimination est relativement complexe. On peut l’envisager d’un double point de vue :
— de l’extérieur : comprendre ce qui distingue l’infraction des autres comportements qui ne sont pas incriminés.
— de l’intérieur : en examinant un fait incriminé en comparaison avec un autre fait qui est lui même incriminé.
Double aspect de l’incrimination : détermination des infractions (extérieur) et définition d’infractions (intérieur).
L’incrimination repose sur des jugements de valeur.
– Elle fait d’un tel comportement la matière de l’infraction.
– En France, c’est la loi, par le législateur, qui est le mode de détermination formelle des infractions.
Détermination formelle = faire un lien entre crime et loi.
Détermination matérielle = faire un lien entre crime et criminel.
Livre I. Détermination matérielle des infractions : LE CRIME ET LE CRIMINEL.
La criminalité c’est à la fois un crime et un criminel.
Dans le choix de qualifier un comportement d’infraction, le législateur peut être guidé par deux considérations :
– objective : référence à un comportement (CRIME).
– subjective : référence à une personne qui agit (CRIMINEL).
Le choix d’une conception objective ou subjective va exprimer une certaine conception du droit pénal, notamment au regard des libertés individuelles.
Est ce que le criminel est celui qui commet un crime (1) ou est ce que le crime est l’acte commis par un criminel ? (2)
(1) met en valeur le crime (objectif) = Dis-moi le crime et je te dirai le criminel.
(2) met en valeur le criminel (subjectif) = Dis-moi qui est criminel et je te dirai quel est son crime.
NOTRE SYSTEME EST MIXTE.
Titre 1. LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS.
Dans la déterminer objective, le plus important c’est le crime. LE CRIME DÉTERMINE LE CRIMINEL.
Chapitre 1 Le crime, critère de détermination du criminel
Ce système met l’accent sur le trouble à l’ordre public.
I. EXPOSÉ DE LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DE L’INFRACTION
Plusieurs idées pour définir le crime.
1° Un crime est un acte socialement anormal.
Pas faux mais imprécis : tout acte anormal n’est pas pour autant un crime.
2° Un crime est un acte affecté d’une anormalité grave.
Oui, mais qui va décider que le seuil de l’anormalité est atteint ?
3° On va dire que à partir du moment où un acte socialement anormal entraine un trouble à l’ordre public : il dépasse le seuil de gravité admis et JUSTIFIE UNE INCRIMINATION.
= on détermine la gravité de l’acte en fonction de sa conséquence. Il est grave parce qu’il trouble l’ordre public.
On agite la menace d’une peine, menace dont on espère un effet préventif, qui va dissuader l’auteur de causer un trouble à l’ordre public.
— Le législateur identifie un résultat qu’il redoute parce qu’il causerait trouble à l’ordre public.
— Partant de ce résultat, il identifie tous les types de comportements qui peuvent y mener, qu’il va incriminer.
Ex : Il veut éviter une atteinte à la propriété d’autrui. Il recherche les comportements qui peuvent la caractériser : il incrimine alors le vol, l’abus de confiance, la filouterie, l’escroquerie…
II. CONSÉQUENCES DE CETTE DÉTERMINATION
Une infraction a toujours deux composantes :
1° Un certain comportement interdit (incrimination).
2° Une sanction (la peine).
§1. Conséquences pour l’incrimination
Dans une conception purement objective :
1° La personnalité de l’auteur de l’infraction est indifférente.
Un système purement objectif admettrait la responsabilité pénale d’un enfant, ou d’un dément. Au MA, de tels systèmes existaient : on brulait un loup pour avoir tué.
2° Le caractère intentionnel de l’infraction est indifférent.
Aujourd’hui, une des premières choses qu’on va distinguer. Toute personne qui provoque la mort d’autrui va encourir une peine qui va varier selon son degré de préméditation.
3° La responsabilité pénale pourrait être collective.
4° Une tentative ne pourra pas être punie. Cf. Beccaria. Infraction manquée = aucun tort objectif causé à la nation.
§2. Conséquences pour la peine
1° Le taux de la peine sera déterminé abstraitement, en fonction du tort fait par l’infraction à la nation (pas du tout en considération de ce qu’a voulu l’auteur).
Le juge serait tarifé : système purement objectif de peine fixe.
2° Les fonctions de la peine :
– La sanction pénale a un effet dissuasif espéré.
– Si cette dissuasion n’est pas couronnée de succès : l’objectif de la sanction sera d’effacer le trouble causé.
Conception quasi-mathématique de la peine : infraction = un mal pour la société = au coupable un mal équivalent. ÉQUILIBRE DES DEUX TROUBLES. L’amendement passe à la trappe.
Par conséquent, ce système de détermination objective peut présenter des inconvénients, si appliqué de manière absolue.
Chapitre 2 Le crime, critère insuffisant de détermination des criminels
I. LA PRIMAUTÉ DU TROUBLE À L’ORDRE PUBLIC
Si la société réagit à la commission d’une infraction, c’est qu’il en a résulté un trouble.
Ex : le proxénétisme est une infraction en France. Mais la prostitution n’est pas incriminée. Il ne faut pas que la prostitution engendre un trouble.
Système objectif : la tentative qui ne sera pas punissable.
Cela peut paraître déraisonnable. Des gens existent qui sont malhonnêtes et maladroits : un tir raté, mais il a voulu tuer.
II. L’INDIFFÉRENCE À LA PSYCHOLOGIE DU DÉLINQUANT
Le fait que la personne a voulu tuer ou faire du mal passe à la trappe. Mais ce n’est pas parce que ce n’est pas arrivé que ca ne relève pas du droit pénal. Le danger est qu’on juge plus l’acte que l’homme, alors qu’il vaut mieux juger l’homme.
Il est très difficile d’être indifférent à la personne.
Si l’on prend en considération la personne plus que son acte, on va voir que parfois une personne a bien commis l’acte, mais on aura la volonté de ne pas la punir, parce qu’on découvrira que cette personne en agissant comme elle l’a fait, pour autant n’a pas commis de faute.
Il peut paraître absurde de condamner quelqu’un pour meurtre si cette personne a agi ainsi en proie à une crise de démence.
Il est difficile d’admettre que la peine puisse être déterminante sans tenir compte de la personnalité du délinquant.
On arrivera aisément à la conclusion que le meurtre doit être plus sévèrement réprimé que l’homicide par imprudence.
On devrait confier au juge le soin de moduler la peine en fonction de la personnalité de l’auteur et des circonstances. Dans le système objectif, tout cela est évacué.
Titre 2. LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DES INFRACTIONS.
La notion de crime devient seconde. Le crime est l’acte commis par le criminel. LE CRIMINEL, CRITÈRE DE DÉTERMINATION DU CRIME. Dis-moi le criminel et je te dirai le crime.
Chapitre 1 Le criminel, critère de détermination du crime
I. EXPOSÉ DE LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DE L’INFRACTION
Idée que le criminel n’est pas un homme comme les autres, mais un homme à part (personnalité criminelle).Conception opposée à la précédente.
– SYSTÈME OBJECTIF : criminalité = phénomène social.
L’anormalité d’un acte est l’anormalité de son résultat.
– SYSTÈME SUBJECTIF : criminalité = phénomène humain. `
L’anormalité d’un acte est liée à la personnalité de son auteur. L’intervention du droit pénal sera jugée légitime dès l’instant de la révélation de la personnalité criminelle, quand bien même aucune infraction n’a encore été commise.
Et vont alors jouer un rôle essentiel toute une série de spécialistes relevant de la psychologie, psychanalyse, de la biologie. Le rôle du juriste devient dans un système de cette nature, un rôle tout à fait secondaire.
II. CONSÉQUENCES DE LA DÉTERMINATION SUBJECTIVE DE L’INFRACTION
§1. Conséquences pour l’incrimination
Un tel système résulterait en une extension du champ du droit pénal : tout mode de vie qui dénoterait une inadaptation sociale (révélateur d’une personnalité potentiellement criminelle) serait légitimement incriminable. Ex : on incriminerait le vagabondage.
= LÉGITIME QUE L’INDIVIDU SOIT ARRÊTÉ AVANT MÊME D’AVOIR COMMIS UN ACTE NUISIBLE.
Notion d’infraction => notion d’État dangereux.
Mais comment définit-on l’état dangereux ? Beaucoup d’études s’y sont attaquées, plus ou moins sensées.
§2. Conséquences pour la peine
A. Conséquences pour les fonctions de la peine
La peine va devoir FAIRE DISPARAITRE L’ÉTAT DANGEREUX (¹ compenser un mal) : elle doit faire du délinquant un être adapté.
– S.OBJECTIF : la peine est tournée vers le passé (réparer ce qui a été fait). Punir.
– S. SUBJECTIF : la peine est tournée vers l’avenir (éviter la récidive). Traiter.
o Peine n’est plus un blâme social, moralement neutre.
o Délinquant est plus un malade qu’autre chose.
B. Conséquences pour le régime applicable à la sanction
Cette sanction doit être au maximum ADAPTÉE À LA PERSONNALITÉ DU DÉLINQUANT.
— Il faut conférer au juge le maximum de pouvoirs pour qu’il puisse formuler la peine parfaitement adaptée à tel individu.
= INDIVIDUALISATION DE LA PEINE.
— Personne ne sait combien de temps prendra le traitement anti personnalité criminelle :
= PEINE INDÉTERMINÉE (notamment dans sa durée).
— Le droit pénal peut frapper dès l’instant que l’on constate l’état dangereux.
Le concept d’état dangereux est reconnu dans certains États d’US et peut entrainer une condamnation à une sentence de durée indéterminée.
A rapprocher avec notre beau pays. Mesures à l’encontre de criminels réputés dangereux, parce que présentant une forte probabilité de récidive (réforme de février 2008). Une personne qui a accompli sa peine, en raison de sa forte probabilité de récidive, peut être placée en rétention de sureté, alors même que cette personne devrait recouvrer sa liberté. Elle est placée en rétention de sureté pour une durée d’un an et au bout de ce délai on réexamine jusqu’à ce qu’on décide qu’il peut sortir. La personne est détenue non pas pour ce qu’elle a fait, mais pour ce qu’elle est.
Chapitre 2 Le criminel, critère insuffisant de détermination du crime
Critère insuffisant parce qu’à terme, cette analyse de la criminalité conduit à la disparition de l’infraction.
I. LA DISPARITION DU CONCEPT D’INFRACTION
ANALYSE OBJECTIVE : le crime qui est d’une importance cardinale.
ANALYSE SUBJECTIVE : le crime est un élément secondaire.
– Le crime n’est pris en considération qu’en tant qu’il extériorise une personnalité criminelle.
– On va porter une attention toute particulière à la victime.
Sans elle, pas de crime ! On traite aussi les victimes.
Ex : une jeune femme, jeune jolie court-vêtue est violée et quelques années plus tard est de ne nouveau violée. Est ce qu’il n’y aurait pas des victimes récidivistes ?
Danger pour les libertés individuelles : il s’agit de changer les mentalités.
II. NÉGATION DU CONCEPT DE CRIMINALITÉ
Ceux qui défendent cette approche de la criminalité considèrent que l’infraction est une notion à laquelle il faut substituer la déviance.
Une équipe de criminologues a annoncé qu’elle avait découvert la cause du crime : C’EST LA LOI.
Parce que S’IL N’Y A PAS DE LOI POUR DÉFINIR LE VOL, IL N’Y A PAS DE VOLEURS. (Une recherche qui a couté des milliers de dollars).
Le crime devient banal, « un simple désagrément de la vie en société, comme les tremblements de terre ». On a tous nos petites misères. Le problème criminel n’existe donc pas. On supprimerait le droit pénal pour le remplacer par un système d’assurance.
Bilan pas très satisfaisant : les deux systèmes ont leurs vertus et leurs insuffisances. De telle sorte qu’il peut être tentant de mixer le meilleur des deux.
Titre 3. LA DÉTERMINATION MIXTE DES INFRACTIONS.
MIXTÉ DU SYSTÈME FRANÇAIS.
— Ancien code pénal (1811) : orientation générale prioritairement objective.
— De nos jours, le caractère subjectif n’a fait que croitre.
Notre système répressif :
— INCRIMINATION, principalement objectif, pas exclusivement.
— PEINE, principalement subjectif, pas exclusivement.
Chapitre 1 Caractère mixte du droit pénal français et incrimination
Système à prédominance objective, mais prise en considération croissante de la personnalité du délinquant.
I. LA PRÉÉMINENCE DE LA DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS
— Notre système pénal accorde une grande place à la notion de trouble à l’ordre public.
Il incrimine en fonction de conséquences et du résultat du trouble à l’ordre public.
— On s’attache à l’acte incriminé en fonction du résultat qu’il engendre (subj.).
Acte interdit = élément matériel de l’infraction.
Conséquence = résultat de l’infraction.
§1. L’importance du résultat de l’infraction
– Est ce qu’il y a eu résultat ?
Existence même du résultat nécessaire à la qualification de l’infraction.
– Quel degré de gravité affectait le résultat ?
Plus le résultat est grave, plus l’infraction est considérée comme grave.
A. Constitution de l’infraction et existence du résultat
PAS D’INFRACTION SANS RÉSULTAT.
= En droit français, les infractions sont matérielles.
Conséquences : on ne réprime pas de principe la tentative.
– Tentative d’un crime = toujours punissable ;
– Tentative de délit = non punissable sauf disposition contraire.
– Tentative de contravention = jamais.
B. Gravité de l’infraction et gravité du résultat
Pour mesurer le degré d’anormalité et la gravité d’une infraction : RAPPORT ENTRE ACTE ET GRAVITÉ DU RÉSULTAT.
C’est le législateur qui le fait, en établissant une hiérarchie des infractions :
1° Crimes
2° Délits
3° Contraventions
Le législateur prend pour cela en considération son résultat.
Ex : incrimination des violences. En fonction du résultat de la violence, les violences vont aller de la simple contravention au crime.
– Violences => mort, crime.
– Violences => incapacité de + 8 jours, délit.
– Violences => incapacité de 8 jours ou -, contravention.
§2. L’importance de l’élément matériel de l’infraction
PAS D’INFRACTION SANS ÉLÉMENT MATÉRIEL.
= Comportement par lequel délinquant manifeste aux yeux de tous son intention ou son imprudence coupable.
Dans une analyse objective, on attache une importance à l’intention de la personne à condition qu’elle se soit matérialisée dans un acte.
Rêver de tuer sa voisine ou son voisin n’a jamais causé de trouble public.
II. L’ASSOUPLISSEMENT DE CETTE DÉTERMINATION OBJECTIVE DES INFRACTIONS
Concessions faites à l’analyse subjective :
– Le droit pénal attache également de l’importance à la psychologie du délinquant = ÉLÉMENT MORAL.
– On pourra attacher au résultat une importance secondaire.
§1. Importance de l’élément moral de l’infraction
Notre droit pénal n’a de signification que si la personne que l’on juge et condamne a commis une faute.
ÉLÉMENT MATÉRIEL + ÉLÉMENT MORAL = FAUTE PÉNALE (intentionnelle ou d’imprudence).
A. Nécessité d’un élément moral
PRINCIPE : PAS D’INFRACTION SANS FAUTE.
Illustration : le cas de la démence.
Le dément par définition ne commet pas de fautes, il n’a pas la lucidité suffisante pour être conscient de ses faits et ses gestes. Les comportements qui sont les siens ne sont pas des infractions. Il ne relève pas du droit pénal.
= solution de l’ancien code pénal « il n’y a ni crime ni délit lorsque le prévenu était en état de démence aux temps de l’action ».
= Le code pénal actuel a reproduit la même solution en des termes légèrement différents « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble psychique »
Cf. Article 122-1. Faits = terme pénalement neutre.
Pas d’infraction parce que pas d’élément moral.
B. Prééminence de l’élément moral
Parfois, L’ÉLÉMENT MORAL EST L’ÉLÉMENT ESSENTIEL DE L’INFRACTION.
Ex : un comportement en principe non incriminé. Si ce comportement est répété, il devient une infraction d’habitude.
– Or, objectivement, si un comportement est nuisible à la société, on va l’incriminer des sa première manifestation.
– Ici il n’est pas nuisible en tant que tel, mais la répétition va faire penser que celui qui le commet est une personnalité dangereuse.
§2. Caractère accessoire du résultat de l’infraction
Le Droit pénal minore parfois l’importance d’ordinaire accordée à un comportement incriminé.
Ex : l’incrimination d’association de malfaiteurs.
Le fait d’en être membre est un comportement pénalement incriminé (association de plusieurs personnes en vue de commettre une infraction).
= permet que l’on sanctionne les membres de cette association avant même qu’ils aient mis leur projet à exécution.
On intervient sans qu’il y ait eu de résultat ET POURTANT ON RÉPRIME : on sanctionne non pas le résultat, mais le désir de le provoquer.
DROIT PÉNAL = une orientation principalement objective + concessions subjectives.
Chapitre 2 Caractère mixte du droit pénal français et sanction
Ce mélange se retrouve pour les sanctions pénales : la personnalité du délinquant dicte les solutions en matière de sanctions pénales.
Il est important de distinguer deux types de sanctions :
1° La sanction abstraitement prévue par la loi : un voleur encoure une peine de trois ans de prison.
2° La sanction telle prononcée in fine par le juge : une peine inférieure et une peine différente.
I. LE CARACTÈRE MIXTE DU DROIT PÉNAL AU STADE DE LA SANCTION ABSTRAITEMENT PRÉVUE
§1. Prédominance de la conception objective
— La sévérité de la peine est calquée sur la gravité du trouble à l’ordre public.
= PLUS L’INFRACTION CAUSE UN TROUBLE IMPORTANT, PLUS ELLE EST SÉVÈREMENT PUNIE. PEINE = MAL INFLIGÉ AU COUPABLE, en compensation. |
— Dans notre système, la peine a aussi une fonction préventive.
= effet dissuasif.
— On considère que les pouvoirs du juge doivent être limités.
– Il existe dans notre système répressif, ce qu’on appelle la période de sureté (= une décision prise par le législateur qui précise pour telle infraction qu’en cas de condamnation il y aura par exemple une période de sureté de 15, 20, x ans). – Le législateur interdit au juge de prendre en faveur de ce nombre d’années une mesure autre (ex : liberté conditionnelle). = défiance à l’égard du juge est en harmonie avec les conceptions objectives. |
§2. Assouplissement de la conception objective de l’infraction
Assouplissement = lien étroit (obj.) gravité du résultat / gravité de la peine peut être relâché voire rompu.
A. Relâchement
LIEN PEINE/RÉSULTAT ÉTROIT = à résultat égal entre différents comportements, les peines seraient les mêmes.
Ce n’est pas le cas.
Ex : abus de confiance et escroquerie.
– Deux infractions au résultat identique : atteinte à la propriété d’autrui.
– La peine objective devrait être la même : l’escroc est plus sévèrement réprimé que l’auteur d’un abus de confiance, parce que le législateur prend en considération la personnalité de l’escroc et celle de l’auteur d’un abus : escroc trompe sa victime, pour qu’elle remette elle-même le bien qu’il convoite = RUSÉ / auteur d’un abus de confiance est quelqu’un a qui on a remis un objet entre les mains qui succombe à la tentation = FAIBLE.
B. Rupture
— MESURES DE SURETÉ = déterminées en fonction de la personnalité du délinquant.
— DIVERSITÉ DES PEINES ABSTRAITEMENT PRÉVUES.
Ex : le proxénétisme.
Quelles sont les peines applicables ?
– l’emprisonnement
– l’amende
– + parfois des mesures de sûreté : fermeture ou confiscation du fonds de commerce, retrait de licence de débit de boisson, confiscation des meubles ayant permis de commettre l’infraction aussi…
La rançon de ce large éventail de peines est l’indétermination de la sanction.
II. CARACTÈRE MIXTE DU DROIT PÉNAL AU STADE DE LA SANCTION CONCRÈTEMENT SUBIE
DROIT PÉNAL contemporain : le juge a le pouvoir de définir une peine fort éloignée de celle prévue par la loi = PEINE CONDITIONNÉE PAR LA PERSONNALITÉ DU DÉLINQUANT
La peine prévue est le prêt à porter, la peine concrète est le sur mesure.
— Le juge est libre de déterminer le taux de la peine.
o Il ne peut pas dépasser le maximum.
o PAS DE MINIMUM (sauf exceptions).
Ex : un délinquant qui encoure 20 ans d’emprisonnement et 15 millions d’euros d’amende. Le juge peut prononcer en définitive 1 euro d’amende sans avoir à ne donner aucune motivation. Le juge peut toujours assortir la peine qu’il prononce d’un sursis. L’intéressé peut donc ne pas connaître la prison. |
— Le juge a le pouvoir de dispense de peine (depuis 1975).
= Le juge peut dire 1) Vous êtes coupable MAIS 2) Je ne prononce contre vous aucune peine.
— Le juge pourra encore modifier la peine après la condamnation.
Le juge de l’application des peines peut LA MODIFIER ou LA RÉVISER (liberté conditionnelle par ex).
Livre II. Détermination formelle des infractions : LE CRIME ET LA LOI.
Deux questions.
1) Qui fait le tri ?
2) Une fois tri effectué, comment le citoyen en a-t-il connaissance ?
Réponse varie selon le système politique.
1) Le législateur.
2) Il le fait par une loi qu’il publie.
Loi = mode de détermination des infractions.
C’EST LE PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ CRIMINELLE.
Conséquence : dans un système politique comme le notre, les rapports entre le crime et la loi sont très étroits, au point que certains en déduisent que loi cause le crime.
Titre I. LE PRINCIPE DE LÉGALITÉ CRIMINELLE.
La loi va permettre la classification des infractions.
Ce principe ne peut pas être réduit simplement à sa traduction juridique. Il obéit à des présupposés qui sont de nature politique. Il faut admettre que ce principe puisse évoluer puisque ces présupposés politiques sont évolutifs.
Chapitre 1 Les présupposés politiques du principe de la légalité criminelle
Ce principe tel qu’il existe juridiquement a en amont une justification politique.
I. JUSTIFICATION POLITIQUE DE CE PRINCIPE
Question : comment peut-on dans une société donnée respecter les libertés individuelles tout en imposant un certain ordre ? A cette question, de multiples réponses politiques peuvent être données, pouvant sacrifier l’un ou l’autre.
= IL FAUT UN ÉQUILIBRE. Il faut que ceux qui fixent cet équilibre soient dotés de la légitimité nécessaire pour le faire.
§1. Légalité criminelle et légitimité politique
— DROIT PÉNAL suppose que l’on prenne la décision d’incriminer tel ou tel comportement.
INCRIMINER UN COMPORTEMENT : dire que la valeur atteinte par ce comportement est un pilier de l’ordre.
— Qui prend cette décision ?
– Dans une démocratie : la volonté populaire.
– Dans une démocratie représentative, le peuple va prendre cette décision par l’intermédiaire de ses représentants élus = POLITIQUEMENT LÉGITIMES.
= Le droit pénal n’est légitime que s’il a sa source dans une loi.
— La légalité suppose aussi : une incrimination est légitime si elle respecte un ÉQUILIBRE ENTRE LA DÉFENSE DE L’ORDRE ET LA SAUVEGARDE DES LIBERTÉS.
Le législateur n’est légitime à recourir au droit pénal que lorsqu’il n’y a pas d’autres moyens d’assurer l’ordre que de recourir au droit pénal (administratif, civil, pas suffisants). Article 8 de la DDHC : le Droit pénal est l’ultime recours. |
— Le principe de légalité criminelle implique le principe de la territorialité de la loi pénale.
Le droit pénal s’applique exclusivement sur le territoire de la République française, sous réserve de l’application de la loi pénale dans l’espace.
§2. Légalité criminelle et opportunité répressive
Cf. Lacordaire « Entre le fort et le faible, la loi libère et la liberté asservit ».
ÉTAT POLICIER : État posant des règles qu’il ne respecte pas.
ÉTAT DE DROIT = État posant des règles de droit auxquelles il se soumet lui-même. Conséquence : les incriminations ne peuvent pas sacrifier de manière excessive les libertés individuelles.
Principe de légalité criminelle = garantie contre l’arbitraire. Le droit criminel constitue une des branches les plus protectrices des libertés individuelles. |
II. AFFIRMATION POLITIQUE DU PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ CRIMINELLE
Principe consacré en France par la DDHC du 26 août 1789.
1° Article 5 : tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché.
2° Article 7 : nul homme ne peut être arrêté ni détenu que dans les cas prévus par la loi.
3° Article 8 : le droit pénal est l’ultime recours.
Principe repris dans les codes répressifs (Ancien et nouveau Code Pénal) :
Articles 111-2 (sources légitimes), 111-3 et 111-4.
Ce principe a valeur constitutionnelle :
– Le législateur doit lui même respecter.
– Le juge pénal n’a aucune compétence pour apprécier la constitutionnalité de la loi pénale.
QPC : à la suite d’une réforme de 2008, possibilité pour une personne devant le juge judiciaire de dire qu’une disposition n’est pas conforme à la Constitution. DOUBLE FILTRAGE. |
Avec la Constitution de 1958, on a opéré une répartition des compétences entre le parlement et le pouvoir exécutif : les articles 34 et 37 de la Constitution sont repris dans l’article 111 du Code Pénal.
1° La loi détermine les crimes et les délits. 2° Le règlement détermine les contraventions. |
Section I. Le principe de la légalité criminelle.
« Nullum crinem nulla poena sine lege ».
= PAS DE CRIME, PAS DE PEINE.
= PAS DE PEINE SANS LOI.
I. LA RÈGLE « NULLUM CRIMEN NULLA POENA »
La règle est donc double.
§1. La légalité des incriminations
SEULS LES ACTES EXPRESSÉMENT INCRIMINÉS PAR UN TEXTE SONT DES INFRACTIONS. Cf. Article 111-3 Code Pénal.
— Cette règle est absolue.
Aucune exception : aucun comportement incriminé sans texte.
— Cette règle est générale.
Elle vaut pour toutes les infractions quelle qu’en soit la gravité.
— Le législateur va dresser une liste des incriminations en autant de textes qu’il est nécessaire.
Ce texte doit être intelligible (contre l’arbitraire). Exigence du Conseil constitutionnel, confirmée par l’article 7 de la CESDH = principe de la légalité criminelle. |
— On ne peut pas sanctionner pénalement un comportement qui n’est pas prévu par la loi.
— Le juge ne peut incriminer lui même. Cf. Code pénal serait pour cela la grande charte de malfaiteurs.
§2. La légalité des sanctions pénales
« Pas de peine sans loi » : la sanction pénale qui sera infligée à celui qui aura transgressé l’incrimination sera celle prévue par le texte et uniquement celle là.
Le Conseil constitutionnel en a tiré des conséquences, et peut censurer une loi pénale pour non respect de ces principes :
1° Lorsque le législateur incrimine un comportement, IL DOIT RESPECTER LE PRINCIPE DE NÉCESSITÉ.
2° Le législateur DOIT RESPECTER LE PRINCIPE DE PROPORTIONNALITÉ : la peine doit correspondre proportionnellement à la gravité de l’infraction.
Le principe de légalité criminelle va avoir en lui-même des conséquences :
1° Dans le texte, LA NATURE DE LA PEINE DOIT ETRE DÉTERMINÉE : amende, privative de liberté, les deux…
2° Le texte doit PRÉCISER LA QUANTITÉ (quantum) :
– privation de liberté = la durée de la peine ;
– pour une amende = le montant.
Exigence de précision du législateur ó Exigence de respect du juge des bornes de la loi = Le juge ne peut prononcer pour un acte incriminé que la peine prévue dans cette incrimination (Motif de censure). |
II. LA NOTION DE LOI PÉNALE AU REGARD DU PRINCIPE DE LÉGALITÉ CRIMINELLE
Il faut distinguer deux grandes sources de droit pénal :
1° Les sources franco-françaises.
2° Les sources internationales.
§1. Les sources nationales du droit pénal
– LOI
– RÈGLEMENT.
— Sources nécessairement écrites.
Les usages ou la coutume ne peuvent pas en eux mêmes incriminer un comportement.
MAIS La loi peut en tant que source légitime du droit pénal faire référence à une coutume ou à un usage en l’intégrant dans les composantes d’une infraction.
Ex : on incrimine dans le code pénal les actes de cruauté envers les animaux, sévices sexuels compris. On fait réserve à certaines pratiques locales ininterrompues : les actes de tauromachie. Ces actes n’encourent pas de sanctions pénales parce que c’est une coutume locale. |
A. La loi
= Texte voté par le parlement.
= promulgué par le PR au journal officiel.
LA LOI ÉTAIT TRADITIONNELLEMENT LA SEULE SOURCE DU Droit pénal.
En 1958, sont intervenus les règlements.
1° Détermination des crimes et délits + amnistie = compétence exclusive du législateur (article 111-2 du Code Pénal).
2° Détermination des contraventions = compétence du pouvoir réglementaire (article 111-3 du Code Pénal).
MAIS Le conseil constitutionnel considère qu’en dépit de ces articles 34 et 37, rien ne s’oppose à ce que le législateur créer des contraventions. La loi du 11 octobre dernier qui interdit dissimulation des visages dans les espaces publics est une simple contravention. D’autres dispositions : – Article 16 de la Constitution confère au Président de la République le pouvoir d’intervenir en période de crise en dehors du domaine prévu par la loi. Il pourrait intervenir dans le domaine de la loi et créer des crimes et des délits. – Les ordonnances prévues par l’article 38 de la Constitution qui autorise la délégation du Parlement au bénéfice du pouvoir réglementaire. Le Parlement pourrait donc charger le pouvoir règlementaire de ratifier une ordonnance en matière pénale. |
Le code pénal actuel n’est que le résultat de quatre lois adoptées en 1792. Le code pénal contient tout le droit pénal, mais on trouve dispositions pénales dans bien d’autres codes : code du travail, de la santé publique, de l’urbanisme, de commerce…
B. Les règlements
Tous les textes qui émanent du pouvoir règlementaire ne sont pas des sources possibles pour le droit pénal.
– Les simples circulaires de l’administration ne peuvent pas servir de fondement à une poursuite. SEULS LES RÈGLEMENTS.
Cf. articles 111-2 et 111-3 du code pénal.
« Les règlements sont faits de la somme des décrets (ministériels) et arrêtés (préfectoraux et municipaux) ».
L’article 37 introduit distinction : 1° LES DÉCRETS AUTONOMES. Code Pénal. articles R-610-1 et suivants. – décrets pris en Conseil d’état. – par un décret autonome le pouvoir réglementaire reçoit le pouvoir de créer des incriminations, et de décider quelle est la peine qui sanctionnera l’auteur de cette contravention. MAIS 1) Cette peine doit être déterminée dans les limites fixées par le législateur. Cf. article 131-12 : le législateur a précisé les montants maxima de l’amende en matière contraventionnelle = 1500 euros, maximum porté potentiellement à 3000 euros pour sanctionner des contraventions en état de récidive. 2) S’agissant des peines, une contravention ne sera JAMAIS sanctionnée par une peine privative de liberté. 2° LES DÉCRETS D’APPLICATION. – Le pouvoir exécutif peut intervenir en application d’une loi particulière. 1° Le législateur a créé une infraction. 2° Il laisse le soin à l’exécutif d’apporter les précisions nécessaires. 3° Le législateur a précisé la peine. – Le pouvoir réglementaire peut décider que la violation d’un de ses propres règlements constitue une contravention MAIS une contravention de première classe. * 1ère classe = la moins grave qui expose son auteur à une amende de 38 euros (= RÉGLEMENTS DE POLICE). |
§2. Les sources internationales du droit pénal
Deux types de conventions.
A. Conventions internationales ordinaires
— Des traités internationaux ont très directement une finalité répressive.
1° Des conventions internationales peuvent IMPOSER AUX ÉTATS SIGNATAIRES DE CRÉER UNE INCRIMINATION.
2° A des fins d’harmonisation, des conventions peuvent IMPOSER AUX ÉTATS SIGNATAIRES DE METTRE EN COMMUN UNE DÉFINITION DE TEL COMPORTEMENT.
— Hypothèse : La France ne respecte pas ses obligations.
ALORS : ce traité n’est pas une source de droit pénal = pas d’application directe dans notre ordre juridique interne.
— Hypothèse : La France respecte cette signature.
ALORS une juridiction française peut condamner celui qui ne respecte pas ce comportement. Ce n’est pas le traité qui condamne mais la loi qui en application du traité incrimine.
B. Conventions internationales privilégiées
LE TRAITÉ DE ROME : les actes dérivés (=règlements communautaires et directives). L’ensemble de ces actes dérivés a été à l’origine de ce qu’on a appelé le droit communautaire, devenu droit de l’Union.
Rôle du droit communautaire :
1° SOIT UNE SOURCE DE Droit pénal, au même titre que loi et règlement :
Le droit communautaire peut-il être source d’incrimination ? – Pendant très longtemps : NON ! Refus d’abandon de la souveraineté nationale par les États membres. *Le droit communautaire ne pouvait préconiser l’incrimination d’un comportement que par voie de règlement : règlement qui devait être suivi d’une loi française. – Puis, la CJCE (CJUE) en 2005 puis en 2007 a dit OUI ! Elle a rendu deux décisions : elle a jugé que le droit communautaire pouvait être source du droit pénal lorsque ce recours au droit pénal était nécessaire pour atteindre des objectifs du droit communautaire. Cf. Elle a pris cette décision en matière d’environnement = COUP D’ÉTAT : Une compétence pénale complète est reconnue à l’UE. Elle pourra INCRIMINER DIRECTEMENT sans passer par le relais d’une loi. |
2° SOIT EFFET NEUTRALISATEUR SUR LE Droit pénal INTERNE.
– Il faut supposer que dans le code pénal français existe une incrimination. – La personne poursuivie devant une juridiction française vient soutenir que ce texte n’est pas compatible avec le droit de l’UE. Au nom de cette contradiction, le juge français peut-il alors refuser de faire application du texte du code pénal ? — SI OUI : on reconnaît au droit de l’Union Européenne le pouvoir de NEUTRALISER LE DROIT PÉNAL FRANCAIS. — Pouvoir de neutralisation très tôt admis par la Chambre criminelle (pour règlements + directives communautaires). = PRIMAUTÉ DU DROIT DE L’UE, MÊME EN DROIT PÉNAL. Ex : « Plus de fromages que de jours dans l’année ». Arrêt de la Cour de cassation. Une grande enseigne qui achetait de l’emmental à un certain producteur. En France, texte définit l’emmental ! Nos amis étrangers ont inventé un procédé de fabrication du fromage sous film cellophane, parce que si on fait un fromage avec une croute, ca coute cher en lait !!! Premier fabricant assigne le second en justice pour publicité mensongère. La Cour de cassation a estimé que l’appellation du fromage sans croute trompeuse serait une atteinte à la concurrence pour les pays étrangers exportateurs de fromage. Primauté du droit de l’Union Européenne sur le droit français.
|
3° LE CAS PARTICULIER DE LA CESDH.
1) La CESDH est-elle d’invocabilité directe par les justiciables français ? – OUI : Elle est directement invocable par un justiciable français devant une juridiction française. – Le juge peut D’OFFICE FAIRE APPLICATION DES PRINCIPES DE LA CONVENTION. 2) La CESDH est-elle une source de droit pénal ? — Pouvoir de neutralisation du Droit pénal interne. = si un juge français constate une contradiction CESDH /droit interne, PRIMAUTÉ DE LA CESDH (Cour de cassation).
|
Section II. Les conséquences juridiques du principe de la légalité criminelle.
Le juge n’est donc pas source de droit pénal : LE JUGE EST LE SERVITEUR DE LA LOI.
I. ÉTENDUE DE LA LOI PÉNALE
Loi pénale : UNIQUE MODE DE DÉTERMINATION DES INFRACTIONS.
= Le juge, lorsqu’il fait application de la loi pénale, doit respecter les limites posées par le législateur.
§1. L’interprétation stricte de la loi pénale
LE PRINCIPE EST LA PERMISSION.
Cf. Article 111-4 : « interprétation stricte de la loi ».
— Le juge doit appliquer la loi et rien d’autre.
o Nécessité constitutionnelle (séparation des pouvoirs).
o Garantie des libertés individuelles.
— Le juge n’a aucun pouvoir créateur :
o Droit Pénal, monopole du législateur : LA JURISPRUDENCE N’EST PAS UNE SOURCE DE DROIT.
o Si le texte est clair, le juge ne fait qu’appliquer (sans interpréter).
— Néanmoins, limite avec la théorie des principes généraux du droit. Unique exception.
PGD = sources non écrites que la jurisprudence va consacrer, également en matière pénale. Cf. PGD : Pas d’infraction sans imputabilité. Cour de cassation a jugé qu’un enfant ne commettait pas d’infraction parce qu’il n’était pas conscient de ses actes. |
— Portée de la règle de l’interprétation stricte :
– « Interprétation stricte » = pouvoir d’interprétation reconnu au juge.
– MAIS pouvoir légitime que parce que la loi impose interprétation (PAS SI la loi donne d’emblée son sens).
1° TEXTE CLAIR: pas lieu d’interpréter = LE JUGE APPLIQUE. — Interdiction de recourir au raisonnement par analogie. MAIS Admission exceptionnelle du raisonnement par analogie. Ex : infraction de la filouterie d’aliments. Quelqu’un qui sait qu’il ne peut pas payer tout en commandant au restaurant = DÉLIT. = LORSQUE LE RAISONNEMENT PAR ANALOGIE EST PROFITABLE À LA PERSONNE POURSUIVIE. = POSSIBILITÉ DE TENIR COMPTE DU PROGRÈS TECHNIQUE. Ex : loi sur l’information de 1981. Incriminait comportements de la presse écrite (apologie des crimes de guerre dans les journaux) => vinyle.
|
2° TEXTE IMPRÉCIS : LE JUGE APPLIQUE QUAND BIEN MÊME. — Interdiction de commettre un déni de justice. – Texte purement et simplement absurde : le texte affirme le contraire de ce qu’il veut signifier. – Texte obscur : un texte qui peut être lu de différentes manières. Le juge doit rechercher la volonté réelle du législateur (travaux préparatoires). — Recherche fructueuse : applique selon l’interprétation originelle du législateur. — Recherche infructueuse : le juge doit retenir l’interprétation la plus favorable à la personne poursuivie. |
MAIS la Cour de cassation juge que par exception la juridiction peut refuser d’appliquer un texte si elle ne peut remédier à ces imperfections que de façon totalement arbitraire.
§2. La non rétroactivité de la loi pénale
Question de l’application de la loi pénale dans le temps.
1) Signification de la règle.
UN TEXTE RÉPRESSIF NE PAS RÉGIR DES SITUATIONS NÉES AVANT SA MISE EN VIGUEUR
= Impossible de punir une personne au nom d’un texte que par définition elle ne pouvait pas encore connaître.
2) Quelle loi va-t-on appliquer : l’ancienne ou la nouvelle ?
Ex : – une loi nouvelle vient transformer ce qui était un délit en crime. – une loi nouvelle vient transformer ce qui était un crime en délit. |
Le principe de la non rétroactivité de la loi pénale A ÉTÉ CONSACRÉ PAR LA CEDH.
— Pour les lois successives
— Pour les jurisprudences successives, notamment pour le revirement.
– Si cette jurisprudence s’opère au détriment de la personne poursuivie : Atteinte à la non rétroactivité. – Exigence que le revirement ne soit PAS BRUTAL : prévisible pour le justiciable. 1° Simple interprétation d’une position jurisprudentielle dans un arrêt = rétroactif 2° Revirement jurisprudentiel = non rétroactif.
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= Loi et jurisprudence sont au même niveau, alors que pour nous jurisprudence n’est pas source de droit.
Cette règle a VALEUR CONSTITUTIONNELLE. Elle s’applique au législateur lui-même.
— La non rétroactivité en matière pénale peut concerner une règle de droit pénal ou une règle de procédure pénale.
– Procédure pénale : une loi de procédure nouvelle s’applique immédiatement en principe aux procédures en cours.
– Droit pénal : mécanisme et limites.
1° MÉCANISME. — Une personne ne peut pas être poursuivie ni condamnée sur le fondement d’une loi nouvelle pour des faits commis antérieurement à la mise en vigueur de cette loi. — Cette interdiction vaut AUSSI BIEN POUR L’INCRIMINATION QUE POUR LA PEINE. — Suppose la connaissance des dates des faits et de l’entrée en vigueur de la loi. – Faits, compliqué : ils peuvent s’étendre sur une certaine durée. – Loi : le lendemain de sa publication au JO / Jour fixé par le législateur. — CERTAINES LOIS en matière pénale POURRONT OPÉRER DE MANIÈRE RÉTROACTIVE : on ne peut pas s’opposer à la rétroactivité d’une LOI PÉNALE PLUS DOUCE. = Rétroactivité in mitius. – On a même jugé que cette rétroactivité de la loi pénale plus douce a VALEUR CONSTITUTIONNELLE : le législateur ne pourrait pas décider d’y faire obstacle en le précisant. – Rétroactivité in mitius consacrée par la CESDH et le Pacte International relatif aux droits civils et politiques. – LA LOI PLUS DOUCE VA RÉGIR TOUS LES FAITS POSTÉRIEUREMENT COMMIS À SA MISE EN VIGUEUR ET LES FAITS ANTÉRIEURS.
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2° LIMITES. — UNE LOI PÉNALE PLUS SÉVÈRE VA POUVOIR OPÉRER DE MANIÈRE RÉTROACTIVE. – Loi interprétative : le législateur vient préciser sa pensée. La Cour de cassation considère que cette loi entre non pas en vigueur au jour de sa publication mais à la date à laquelle la loi qu’elle vient éclairer. – Certaines sanctions seraient « rétroactives par nature ». La Cour de cassation distingue : 1° Les peines proprement dites, non rétroactives. 2° Les mesures de sureté, rétroactives même si plus sévères. Cf. Le Conseil constitutionnel a jugé de même a propos de certaines mesures de suretés à propos notamment de la surveillance judiciaire, mesure qui va frapper une pers au moment de sa libération, alors que cette mesure n’existait pas du temps de sa condamnation. = JURISPRUDENCE EXTREMEMENT CRITIQUABLE EN RAISON DE SON ATTEINTE AUX LIBERTES INDIVIDUELLES. — SURVIE DE LA LOI PÉNALE ANCIENNE PLUS SÉVÈRE ? – Le législateur adopte une loi nouvelle pénale plus douce : normalement rétroactivité in mitius. – On pourrait envisager que le législateur dans un article de cette loi entende écarter cette rétroactivité. — EN PRINCIPE : Le législateur ne peut pas faire cela : RÉTROACTIVITÉ IN MITUS A VALEUR CONSTITUTIONNELLE. MAIS la Cour de cassation dans plusieurs arrêts a utilisé une formule curieuse : le principe de la rétroactivité in mitius doit jouer « en l’absence de dispositions contraires expresses ». – Formule qui rappelle que LE JUGE JUDICIAIRE N’EST PAS LE JUGE DE LA CONSTITUTIONNALITÉ DES LOIS. – Si le législateur le faisait, le juge ne pourrait pas vérifier (par rapport à la Constitution. UNE LOI PÉNALE DOIT ÊTRE CONFORME À LA CONSTITUTION ET AUX CONVENTIONS INTERNATIONALES. — Si une loi franco-française est contraire à un traité international signé par la France, le juge peut écarter la loi inconventionnelle. Il pourrait ainsi supprimer une disposition faisant obstacle à la rétroactivité in mitius d’une loi pénale plus douce par le biais du contrôle de conventionalité. — LIMITES. — Le principe de la rétroactivité in mitius est consacré par deux conventions internationales 1° Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques – une disposition qui impose la rétroactivité in mitius de la loi pénale plus douce MAIS SEULEMENT À PROPOS DES PEINES (et non pas à propos de l’incrimination). – La Cour de cassation a saisi cette rédaction imparfaite pour dire que ce texte n’interdit pas au législateur d’écarter la rétroactivité in mitius de la loi pénale plus douce si elle concerne une incrimination et non pas une peine. = Lecture très particulière, sans doute critiquable. Il aurait été facile de raisonner par analogie (si peines, alors incriminations). Mais la Cour de cassation très répressive ne l’a pas fait. Extrêmement choquant que la Cour de cassation gardien des libertés individuelles ait un parti pris quasi systématique pour les solutions les plus répressives et non pour celles qui sauvegardent le plus les libertés individuelles. 2° La CESDH – L’article 7 interdit l’application rétroactive de la loi pénale plus sévère. Cf. Arrêt Kokkinakis. il ne prenait pas clairement parti sur la rétroactivité de la loi pénale plus douce seulement sur la rétroactivité de la loi pénale plus sévère. Cf. Arrêt Scoppola. Cet arrêt a dit que l’article 7 imposait implicitement la rétroactivité in misus de la loi pénale plus douce. 1° Kokkinakis consacrait LA NON RÉTROACTIVITÉ DE LA LOI PÉNALE PLUS SÉVÈRE. 2° Coppola complète par LA RÉTROACTIVITÉ DE LA LOI PÉNALE PLUS DOUCE. Pour sanctions et peines. La CEDH a dit que si le législateur français voulait écarter la rétroactivité in mitius d’une loi pour une incrimination ou de pénalité plus douce : le juge judiciaire devrait ne pas l’appliquer. = LA SURVIE DE LA LOI PÉNALE PLUS SÉVÈRE N’EST DONC EN PRINCIPE PAS ADMISE. |
II. LA RÉGULARITÉ DE LA LOI PÉNALE
§1. La régularité de la loi
1- Contrôle de la conformité de la loi par rapport à la Constitution
— LE JUGE JUDICIAIRE N’EST PAS LE JUGE DE CONSTITUTIONNALITÉ DES LOIS.
– Même s’il y inconformité flagrante, le juge judiciaire doit appliquer.
– impossibilité pour le juge, élu par personne, de censurer celui qui est élu.
+ Contrôle a priori et a posteriori de la constitutionnalité des lois.
2- Contrôle par rapport aux normes internationales
— LE JUGE JUDICIAIRE EST LE JUGE DE CONVENTIONALITÉ DES LOIS.
Le traité international l’emporte sur la loi incompatible avec lui (article 55 de la Constitution).
§2. La régularité du règlement
Une personne poursuivie au cours d’un procès pénal invoque que le règlement qui lui a été appliqué est inconstitutionnel. Le juge pénal est-il compétent ?
— LE JUGE PÉNAL EST COMPÉTENT POUR APPRÉCIER LA RÉGULARITÉ D’UN ACTE RÉGLEMENTAIRE.
1- Les conditions du contrôle
Dans cette hypothèse : on est en présence d’une exception d’illégalité du règlement (le règlement pourrait être contesté comme contraire à la Constitution).
Le juge peut-il d’office procéder à ce contrôle de régularité ?
— LE JUGE PÉNAL PEUT D’OFFICE PROCÉDER À CE CONTRÔLE DE RÉGULARITÉ pourvu que son éventuelle illégalité « conditionne la solution du procès » (Cour de cassation).
2- La portée du contrôle
— La jurisprudence judiciaire n’a pas cessé d’étendre ce contrôle.
– Le juge judiciaire peut ainsi souligner l’incompétence de l’auteur de l’acte : sanctionnant un vice de forme, un détournement de pouvoir.
– Le juge judiciaire peut opérer le contrôle d’appréciation de l’acte.
* La seule chose que le juge judiciaire ne se reconnaît pas le pouvoir de faire : apprécier l’opportunité du texte réglementaire.
— LE JUGE PÉNAL PEUT SEULEMENT ÉCARTER L’ACTE : il ne peut pas le faire annuler (compétence des seuls TA).
Il faut attendre ainsi une uniformité de la jurisprudence : il faut attendre que soit soumis ce texte au contrôle de la Cour de cassation, qu’elle se prononce dessus et que les autres s’alignent. Si entre temps, texte annulé devant une juridiction administrative, la décision s’impose. |
Chapitre 3 L’évolution du principe de la légalité criminelle
Depuis XIXe siècle, le principe a évolué sensiblement. On aurait eu UN DÉCLIN DU PRINCIPE DE LA LÉGALITÉ CRIMINELLE.
I. EVOLUTION POLITIQUE DU PRINCIPE
— Un Parlement amputé de sa compétence pénale en matière de contraventions.
– Transfert d’une partie des compétences à l’exécutif : recul des libertés individuelles : Où est passée la légitimité de punir ?
– Un transfert conséquent :
o Contraventions ¹ peines très légères.
o 4/5e de condamnations sont des contraventions.
— Amplification du rôle du conseil constitutionnel.
– Extension de la compétence avec la QPC.
– Doute sur les membres du Conseil constitutionnel : élus mais juridiquement douteux. Est ce que c’est normal que des juges émérites en viennent à avoir moins d’influence dans certains domaines que des non juges ? Conseil constitutionnel, progrès, non RÉ-GRES-SION.
— Une évolution de l’internationalisation du droit.
– Une norme internationale peut paralyser une norme nationale incompatible : la souveraineté nationale vole en éclats.
– Les conventions internationales ont donné des pouvoirs considérables à leurs juridictions :
o neutraliser une disposition pourtant adoptée par les représentants légitimes d’un peuple (Alors que leurs juges ne sont élus par personne).
o Internationalisation = instauration silencieuse d’un arbitraire judiciaire sans bornes ?
Carbonnier, « La Cour européenne est une Cour qui est sortie de son lit et personne ne sait plus l’y faire rentrer ».
II. ÉVOLUTION JURIDIQUE DE LA LÉGALITÉ DU PRINCIPE
§1. Incriminations
Manifestations du déclin du principe de la légalité criminelle :
– une imprécision croissante des textes d’incrimination.
– les pouvoirs considérables conquis par les juges judiciaires en la matière (légalité criminelle se méfie du juge).
§2. Les sanctions
— Les mesures de sureté opèrent rétroactivement quand bien même elles constituent une disposition pénale plus sévère.
= déclin de la légalité criminelle.
— La peine doit être déterminée par législateur avec le plus de précision possible.
– Ancien code pénal : la peine était fixée entre un maximum et un minimum. Une peine pouvait aller de 5000F à 50 millions de F.
– Nouveau code pénal : la peine contient toujours un maximum et exceptionnellement un minimum.
Toute liberté au juge = déclin manifeste de la légalité criminelle.
Un maximum mais plus de minimum : renoncement du législateur face au pouvoir du juge.
— Un pouvoir de sanction reconnu à des autorités qui ne sont pas judiciaires.
Les AAI se sont vues confier des pouvoirs de sanction considérables, des amendes dont le montant peut être extrêmement élevé.
« On les dit indépendantes, pourquoi le préciser si ce n’est pas parce que de cette indépendance on pourrait avoir des doutes ? Le juge judiciaire est indépendant, mais on ne dit pas qu’il l’est. ».
= Déclin sournois de la légalité criminelle très préoccupant.
+ Toutefois un progrès de la légalité criminelle : la CESDH s’applique non seulement au domaine du droit pénal mais encore à la matière pénale.
Titre II. LA CLASSIFICATION DES INFRACTIONS.
Plusieurs classifications d’infractions.
Chapitre 1 Classification légale des infractions
Elle figure au premier article, article 111-1 du code pénal. Les infractions sont classées selon leur gravité en crimes, délits et contraventions par ordre de gravité croissant.
I. LE PRINCIPE DE LA DISTINCTION CRIMES, DÉLITS ET CONTRAVENTIONS
§1. Exposé du critère de distinction
1) Classification légale du point de vue du législateur
— Une fois que le législateur a décidé d’incriminer un comportement, il doit préciser immédiatement si cette infraction est :
– UN CRIME
– UN DÉLIT
– UNE CONTRAVENTION
— Il va le faire par référence au système de valeurs de notre société :
– meurtre = crime, parce qu’atteinte à la vie.
– vol = délit, parce qu’atteinte à la propriété.
– Injure = contravention.
— Il va ensuite en déduire la peine :
– Crime = peine criminelle
– Délit = peine délictuelle
– Contravention = peine contraventionnelle.
Cf. Parcours décrit à l’article 111-2 du code pénal.
2) Classification légale du point de vue du juge et à travers lui les citoyens.
— Comment puis-je savoir si une infraction donnée constitue un délit, un crime ou une contravention ?
On se réfère au code pénal :
— Texte prévoit une peine délictuelle, DÉLIT.
— Texte prévoit une peine criminelle, CRIME.
— Texte prévoit une peine contraventionnelle, CONTRAVENTION.
— Pour que ce système fonctionne, il faut une nomenclature des peines. Nous l’avons : peine délictuelle, criminelle ou de police.
= Pour déterminer la gravité de l’infraction, on va se référer à la peine prévue par le législateur (Ne pas se fier à la peine prononcée in fine par le juge).
§2. Mise en œuvre du critère de distinction
Le code pénal a considérablement enrichi l’arsenal des peines et des mesures de sureté. Il a consacré la responsabilité pénale des personnes morales, il a donc du trouver des peines nouvelles.
Toutes ces peines ne permettent pas toutes de dire qu’on est en présence d’un crime, délit ou d’une contravention. Il faut donc introduire la notion de peines de référence.
Cf. Article L131-1 du code pénal.
1- Quelles sont ces peines de référence ?
— Des peines de référence pour le crime : RÉCLUSION OU DÉTENTION CRIMINELLE.
– réclusion criminelle (infractions de droit commun)
– détention criminelle (infractions politiques).
— Le législateur prévoit que ces peines de réclusion ou détention varient selon certains seuils :
o A perpétuité
o 30 ans
o 20 ans
o 15 ans
o 10 ans
— Exception à l’absence de minima : le minimum est de 10 ans.
Pourquoi ce minimum ? POUVOIR D’INDIVIDUALISATION DE LA PEINE. Une réclusion criminelle prévue pour un maximum de 20 ans : le juge a priori peut descendre aussi bas qu’il le veut. Le juge décide une peine de 8 ans. – Mais ce ne sera plus de réclusion ou de détention parce que le minimum c’est 10 ans. – Il doit alors l’appeler peine d’emprisonnement. Peine délictuelle MAIS C’EST UN CRIME : la peine qui compte c’est celle abstraitement prévue par la loi mais non pas celle conclue par le juge. |
— Des peines de référence pour les délits : l’EMPRISONNEMENT ET L’AMENDE CORRECTIONNELLE.
— En soit la nature de l’amende ne nous dit pas si c’est une contravention ou un délit.
L’amende :
– peine correctionnelle
– peine de police
= La loi fixe pour le délit un minimum de 3750 euros.
— L’emprisonnement peut être de 10, 7, 5, 3 , 2 ans ou encore 6 mois et 2 mois.
Cf. Article 131-4 du code pénal.
Cette échelle indique le délit : mais elle ne s’impose pas au juge, libre de prononcer 3 ans, 18 mois, 3 mois, 4 mois…
— Des peines de référence pour les contraventions : les AMENDES
— Pas de peine privative de liberté (ancien code pénal : emprisonnement de police)
— Plusieurs classes d’amendes :
1e classe : 38 euros (maximum)
2e classe : 150 euros
3e classe : 450 euros
4e classe : 750 euros
5e classe : 1500 euros
+ Contravention dont la récidive est punissable, 5e classe doublée et portable jusqu’à 3000 euros.
2- Comment ces peines de référence sont-elles utilisées ?
— POUR LES PERSONNES PHYSIQUES.
On reconnaît la gravité d’une infraction grâce à la peine abstraitement prévue par la loi.
Un texte qui prévoirait un jour de réclusion criminelle serait un crime. Un texte qui prévoirait un emprisonnement à perpétuité, serait un délit. |
Pour l’amende, il faut tenir compte aussi de son taux :
– jusqu’à 1500 euros, amende de police.
– à partir de 3750 euros et au delà, amende correctionnelle.
— POUR LES PERSONNES MORALES.
S’agissant des peines :
— Elles servent de référence.
— Elles vont servir d’instruments de comparaisons.
ON IMPUTE À UNE PERSONNE MORALE UN VOL. – On analyse la peine prévue par la loi pour le vol pour une personne physique. – On va arriver à la conclusion que le vol est un délit pour une personne physique comme pour une personne morale. |
§3. Les intérêts de la distinction
1) Au regard du droit pénal
— AU REGARD DE L’INCRIMINATION.
— Élément matériel de l’infraction
1° Pour la tentative — La tentative de crime est toujours punissable. — La tentative de délit n’est pas punissable sauf si la loi dit le contraire. — La tentative de contraventions n’est jamais incriminée. 2° Pour la complicité — Tous punissables en matière de crimes et de délits — Pas tous punissables en matière de contraventions |
— Elément moral (psychologie de l’auteur)
o Les crimes sont tous des infractions intentionnelles : pas de crimes commis par simple imprudence.
o Les délits sont tous intentionnels sauf lorsque la loi se contourne d’une imprudence.
o Les contraventions : nature de la faute, intentionnelle ou imprudence, est indifférente.
— AU REGARD DE LA PEINE
— Quantum de la peine
Peine abstraitement prévue par la loi = MAXIMUM APPLICABLE. Plus de minimum, SAUF : — en matière de crimes — pour la récidive, le concept des peines planchers. |
— Règles qui ont trait à l’exécution des peines
1° Pour le sursis — prévu pour les peines correctionnelles et de police. — Non prévu pour les crimes. 2° Pour la durée de la prescription — Crimes : 20 ans. — Délits : 5 ans — Contraventions : encore plus court. |
2) Au regard à la procédure pénale
Différence de régimes pour chacun des stades d’une procédure.
— Stade de poursuite
1° Pour l’enquête policière de flagrance : – possible pour les crimes : enquête de flagrant crime – possible pour les délits : enquête de flagrant délit – impossible pour les contraventions. |
2° Pour la durée de prescription de l’action publique – Crime : 10 ans – Délit : 3 ans – Contravention : 1 an |
— Stade d’instruction
o obligatoire pour les crimes
o facultatif pour les délits
o inexistant pour les contraventions
Au cours d’une instruction, la personne mise en examen peut être placée en détention provisoire. – Mesure possible pour les crimes. – Possible sous certaines conditions pour les délits. – Impossible pour les contraventions. |
— Stade de jugement : décisive pour la détermination de la compétence des juridictions de jugement.
o Crime : Cour d’assises
o Délit : Tribunal correctionnel
o Contravention : tribunal de police
Procédure de comparution immédiate : 1. possible en délit 2. exclue en crimes |
Chapitre 2 Les autres classifications des infractions
I. CLASSIFICATIONS FONDÉES SUR LA NATURE DES INFRACTIONS
§1. Critères de qualification d’infraction politique
A. Les critères de qualification concevables
Quand on veut définir l’infraction politique on peut le faire de manière objective (infraction politique) et subjective (délinquant politique).
1) Conception objective
— Des infractions seraient objectivement politiques en fonction de la nature de leurs résultats :
– infraction qui vise à renverser le régime constitutionnel
– infraction qui vise à remettre en cause le fonctionnement des pouvoirs publics
– infraction qui met en cause libertés politiques fondamentales (de manifestation, de protestation)
– infraction électorale
— Infractions connexes à une infraction politique
– Une infraction commise à l’occasion d’une guerre civile est politique.
– On le fera même si les auteurs de cette infraction n’entendent pas se livrer à ce contexte politique.
2) Conception subjective
— Une infraction est politique par référence à la psychologie de l’auteur. Si le mobile est politique, l’infraction est politique (= INFRACTION COMPLEXE).
Ex : un assassinat est une infraction de droit commun. MAIS si la victime est un chef d’état, c’est une infraction politique. |
B. Régime propre aux infractions politiques
1) Indications fournies sur cette question par la loi
Pas de définition de l’infraction politique dans le Code Pénal.
— DISTINCTION NETTE POUR LES CRIMES.
— Une peine de détention criminelle : crime forcément politique. Espionnage, trahison, mouvement insurrectionnel sont sanctionnés par des détentions criminelles.
— PAS DE DISTINCTION POUR LES DÉLITS.
— Délits de droit commun comme délits politiques seront sanctionnés par une peine d’emprisonnement.
Le code pénal ratifie la notion d’infraction connexe. – Le Code Pénal considère comme politiques les infractions connexes à une insurrection lorsque du moins ces infractions sont commises pour participer à l’insurrection. CE NE SONT PAS DES CRIMES POLITIQUES. – Les crimes contre l’humanité sont DES CRIMES DE DROIT COMMUN. |
2) Indications apportées par la jurisprudence
— La jurisprudence est plutôt favorable à la position objective : on examine le résultat de l’infraction et non pas les mobiles de l’auteur.
— INFRACTIONS COMPLEXES = INFRACTIONS DE DROIT COMMUN. La jurisprudence n’a pas pris en compte le mobile politique de l’auteur : « L’assassinat par sa nature et quels qu’en étaient les mobiles constitue un crime de droit commun »
MAIS pour les infractions moins graves (contre les biens) la jurisprudence a tenu compte du mobile politique pour qualifier l’infraction de politique.
— L’EXTRADITION.
Lorsque la France reçoit une demande d’extradition d’un pays d’étranger, une chambre de l’instruction consultée pour donner au gouvernement un avis. Les magistrats tiennent compte des mobiles de l’extradition demandée pour décider si les infractions commises étaient politiques.
Si l’infraction est politique, la France refuse l’extradition.
— La jurisprudence a eu tendance à adopter la théorie des infractions connexes. Les juges ont considéré une infraction politique parce qu’elle était connexe à des éléments politiques.
MAIS la Cour de cassation a déjà refusé l’infraction connexe lorsqu’en présence de comportements « particulièrement odieux » (Cf. Arrêt de 1849). Au fond les juges ne se posent pas la question de savoir si infraction est politique ou de droit commun, ils vont se demander si l’auteur de l’infraction mérite d’être considéré comme l’auteur de l’infraction politique.
§2. Le régime juridique de l’infraction politique
Régime de l’infraction politique peut être plus sévère que le régime de l’infraction de droit commun. Mais globalement le régime de l’infraction politique est plus favorable.
A. Règles de fonds