Les voies d’exécution ou procédures civiles d’exécution

 COURS DE VOIES D’EXÉCUTION (ou procédures civiles d’exécution)

  Une « voie d’exécution » est une procédure légale par laquelle sont mis en œuvre les moyens propres à obtenir de la partie condamnée, les prestations prononcées par un jugement ou par une sentence arbitrale devenus exécutoires.

 

L91 = loi du 9 juillet  1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution

D92 = décret d’application du 31 juillet  1992

Ord06 = ordonnance du 21 avril 2006 portant réforme de la saisie immobilière

D06 = décret d’application du 27 juillet  2006 modifié par le décret du 23 déc. 2006

Introduction aux voies d’exécution

 

Le droit des voies d’exécution ou des procédures civiles d’exécution a pour objet l’étude de procédures appelées saisies, celles-ci sont des moyens légaux mis à la disposition des créanciers qui ne peuvent obtenir de leurs débiteurs l’exécution volontaire des obligations dont ceux-ci sont tenus à leur égard. Ces mesures tendent donc à l’exécution forcée des obligations. Les biens du débiteur sont mis sous main de justice avant d’en poursuivre la vente pour payer les créanciers sur le prix.

 

La matière présente différents intérêts:

 

  •  intérêt pratique: les voies d’exécution permettent le recouvrement des créances, elles complètement donc le droit civil, commercial et du travail. Si la création des obligations relève du droit substantiel, les saisies en assurent l’effectivité notamment par leur rôle préventif. En effet, elles incitent souvent le débiteur à s’exécuter volontairement pour ne pas avoir à faire avec un huissier. Le lien avec la procédure civile est encore plus net car la procédure civile sanctionne en justice les droits et obligations des particuliers mais cette sanction judiciaire (décision de justice) ne contraint pas le débiteur à s’exécuter, les saisies prennent donc le relai puisque la force exécutoire de la décision de justice permet au créancier d’en obtenir l’exécution forcée. Toutefois, ce lien entre les voies d’exécution et la procédure civile n’est pas un passage obligé puisque qu’autres titres justifient parfois la mise en œuvre d’une saisie (ex: acte notarié). Ainsi, les procédures de saisies contribuent à l’effectivité des droits de créances et des décisions de justice.
  •  intérêt économique: la vie des affaires repose sur le crédit et celui-ci n’est possible que si le créancier a la certitude d’être payé.
  •  intérêt social: le créancier attend souvent, parfois avec impatience, le paiement de ce qui lui est dû (ex: créancier d’aliments), il doit donc disposer de moyens efficaces, simples et peu onéreux pour obtenir le paiement de sa créance. Mais la mise en œuvre d’une saisie est toujours un drame pour le débiteur qui la subit, sa vie pouvant en être bouleversée. Ainsi, le débiteur ne doit pas être acculé et donc doit lui aussi bénéficier d’une protection. Le législateur recherche donc un équilibre en l’impératif de protection des créanciers et de celui de protection des débiteurs, impératifs antagonistes.
  •  intérêt politique: l’inexécution d’un titre exécutoire ou d’une décision de justice risque de remettre en cause l’autorité de la justice et donc de l’Etat.

 

Section 1: Le domaine des procédures civiles d’exécution

 

L91 Article 1 « Tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard. » ainsi, les procédures civiles d’exécution permettent au créancier d’obtenir l’exécution d’une obligation en cas de récalcitrance du débiteur.

 

1) La récalcitrance du débiteur

Différentes raisons peuvent conduire le débiteur à ne pas payer son créancier ou encore à ne pas exécuter ses obligations.

 

A) Le débiteur est dans l’impossibilité de payer

Dans cette hypothèse, le débiteur connaît des difficultés financières, plusieurs cas de figure doivent être envisagés:

— Le débiteur peut obtenir du juge des délais de paiement, il y a alors suspension des poursuites. I.e. pendant les délais octroyés au débiteur aucune saisie ne peut être pratiquée.

— Le débiteur est surendetté: le créancier se trouve dans une impasse car si ses droits sont légitimes, sa poursuite est vaine si le débiteur fait l’objet d’une procédure de surendettement (loi Neiertz) car un plan conventionnel ou judiciaire peut alors être adopté avec un rééchelonnement des dettes du débiteur et le créancier se heurtera donc à la suspension des poursuites sauf pour les créances ne figurant pas dans le plan.

— Le débiteur est un commerçant, artisan ou exerce une profession libérale: la loi du 26 juillet  2005 de sauvegarde des entreprises et son décret d’application du 28 déc. 2005 (applicable 1er jan. 2006) instituent  4 procédures:

  • procédure de conciliation: elle peut déboucher sur un accord entre créanciers et débiteur qui sera soit constaté par le tribunal soit homologué par le tribunal. L’accord homologué suspend pour sa durée toute action en justice et toute poursuite individuelle des créanciers signataires (sur les meubles et immeubles).
  • procédure de sauvegarde: les créanciers antérieurs à l’ouverture de la procédure collective et les créanciers non privilégiés sont soumis à l’arrêt des poursuites. En revanche, les créanciers postérieurs y échappent i.e. seuls les créanciers postérieurs à l’ouverture peuvent mettre en œuvre une procédure civile d’exécution.
  • procédure de redressement judiciaire: les mêmes règles s’appliquent: seuls les créanciers postérieurs pourront mettre en œuvre une procédure civile d’exécution.
  • procédure de liquidation judiciaire: les créanciers sont soumis à la procédure collective pour le règlement de leurs créances puisque la procédure a pour objectif de liquider le passif de l’entreprise, il n’y a donc aucune place pour des poursuites individuelles des créanciers soumis à la procédure collective.

Ainsi, ces différentes procédures constituent pour l’essentiel de véritables obstacles à la mise en œuvre des procédures civiles d’exécution.

 

B) Le débiteur ne veut pas payer son créancier

Face à la résistance du débiteur qui ne veut le payer, le créancier dispose d’une alternative, il peut soit inciter le débiteur à s’exécuter en utilisant un moyen de pression (astreinte) soit avoir recours à la force pour obtenir l’exécution de l’obligation.

— Les moyens de pression se distinguent des voies d’exécution à un double point de vue:

  • ils n’aboutissent pas directement à la vente forcée des biens du débiteur contrairement au mesure d’exécution
  • ils ne permettent pas de mettre les biens du débiteur sous main de justice pour les conserver (i.e. pour éviter que le débiteur ne dilapide son patrimoine).

Ainsi, les moyens de pression se différencient des mesures conservatoires qui relèvent des procédures civiles d’exécution. Pourtant, ils sont importants car ils incitent de nombreux débiteurs à se libérer spontanément envers le créancier.

 

— L’astreinte: L91 règlemente l’astreinte, l’astreinte a un caractère comminatoire, il s’agit d’une mesure destinée à vaincre la résistance opposée à l’exécution d’une condamnation. Le débiteur est condamné dans ce cas à payer une somme d’argent dont le montant augmente selon une périodicité fixée par le juge jusqu’à exécution. Ce moyen indirect d’exécution, ce moyen de pression doit amener le débiteur à une exécution volontaire et non à une exécution forcée de son obligation.

2 cas de figure:

  •  le débiteur s’exécute volontairement: le créancier a donc obtenu satisfaction, il n’y a plus de place pour une quelconque saisie, le moyen a été efficace.
  •  le débiteur s’obstine et refuse de s’exécuter: le créancier peut demander au juge de l’exécution de liquider l’astreinte. Cette liquidation donne naissance à une créance de somme d’argent. A partir de là, si le débiteur ne règle pas spontanément cette somme, le créancier peut en obtenir le recouvrement grâce à une saisie. Dans ce cas, on considère que le recours à l’exécution forcée devient légitime.

Cependant il est parfois difficile de distinguer le bon débiteur du mauvais débiteur, c’est pourquoi le débiteur doit être préalablement mis en demeure de s’exécuter.

La mise en demeure ne suffit pas toujours et souvent un exploit de huissier doit être signifié au débiteur, il s’agit d’un acte particulier: le commandement de payer.

Un délai minimum de 8 jours est imposé entre le commandement de payer et l’exécution i.e. la saisie: L91 Article 20, l’huissier peut pratiquer une saisie à l’expiration d’un délai de 8 jours si le commandement de payer est resté sans effet, un répit est donc laissé au débiteur pour trouver de l’argent. Si ce délai de 8 jours permet au débiteur de réunir les fonds pour payer la créance c’est une bonne chose, mais pendant ce délai, le débiteur peut aussi dissimuler certains biens. C’est pourquoi dans ce cas, l’intervention de l’huissier perd son effet de surprise, le créancier n’est pas démuni car il peut toujours pratiquer au préalable une mesure conservatoire pour mettre les biens du débiteur sous main de justice i.e. pour les rendre indisponibles afin de pouvoir ensuite les saisir pour obtenir l’exécution de son obligation.

 

2) L’exécution d’une obligation

Les droits patrimoniaux d’une personne sont soit des droits réels soit des droits personnels (droit de créance). L91 Article 1 autorise seulement le créancier à contraindre le débiteur à exécuter ses obligations. Ainsi, l’exécution forcée ne vaut que pour les droits de créance mais toute exécution forcée n’est pas exclue pour les droits réels.

 

– en matière de propriété immobilière: la publicité foncière suffit pour opposer le droit de propriété aux tiers, ainsi, si un tiers s’introduit dans un immeuble c’est dans ce cas la possession qui est en cause et dès lors, par l’action possessoire, le propriétaire de l’immeuble peut faire respecter son droit de propriété. Dans ce cas, le recours à la force permet en réalité d’imposer aux tiers une obligation de ne pas faire i.e. ne pas s’introduire dans l’immeuble du propriétaire, il y aura donc place à une éventuelle mesure d’exécution de cette obligation de ne pas faire.

 

– en matière de propriété mobilière: la possession vaut titre (Code Civil Article 2279), elle vaut donc publicité de la propriété mobilière. Ainsi, si un tiers vole une chose, le recours à la force est possible pour obtenir la restitution de la possession de la chose volée car sera sanctionnée l’exécution d’une obligation de faire (restituer).

Ainsi, l’exécution forcée se justifie en réalité pour obtenir l’exécution d’une obligation de donner (1) ou d’une obligation de faire ou de ne pas faire (2).

 

A) L’exécution des obligations de donner

Toutes les obligations de donner ne justifient pas le recours à l’exécution forcée, il faut distinguer l’obligation de donner une somme d’argent et l’obligation de donner un corps certain ou une chose de genre.

 

1) L’obligation de donner une somme d’argent

L’exécution d’une obligation de donner une somme d’argent est le domaine de prédilection des saisies. En effet, Code Civil Article 2284 si le débiteur ne paye pas, le créancier peut saisir les biens meubles et immeubles présents et à venir de son débiteur pour se faire payer sur le prix (droit de gage général du créancier).

Plusieurs mesures d’exécution sont alors à la disposition du créancier: il peut saisir une créance du débiteur (saisie-attribution), un bien meuble (saisie-vente) ou un bien immeuble (saisie immobilière) afin de le faire vendre et de se payer sur le prix.

 

2) L’obligation de donner un corps certain ou une chose de genre

« L’obligation de livrer la chose est parfaite par le seul consentement des parties contractantes » (Code Civil Article 1138) i.e. le créancier est immédiatement propriétaire, c’est notamment le cas pour la vente (Code Civil Article 1583). Ainsi, si l’acquéreur n’est pas livré, il peut obtenir l’exécution forcée de cette obligation mais dans ce cas, il s’agit en réalité d’obtenir l’exécution d’une obligation de faire.

 

B) L’exécution des obligations de faire ou de ne pas faire

« Toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur » (Code Civil Article 1142). Ainsi, a priori, la contrainte est impossible pour les obligations de faire ou de ne pas faire mais la règle doit être nuancée, une distinction s’imposant selon la nature de la prestation à fournir:

  •  pour une prestation subjective (ex: commande d’un portrait à un peintre), la contrainte est impossible car il n’y a rien à saisir. Le débiteur sera condamné pour inexécution à verser un équivalent monétaire sous forme de dommages et intérêts. Le créancier pourra alors obtenir l’exécution de cette obligation de donner une somme d’argent (cf. supra.).
  •  pour une prestation objective (ex: livraison de la chose vendue), il y a une chose à saisir, il existe donc une saisie spéciale: la saisie-appréhension qui permet au créancier d’obtenir la livraison de la chose.

Le recours à la force n’est admis que pour contrer l’inertie du débiteur. Ainsi, les voies d’exécution concernent seulement les situations où le paiement du débiteur n’est plus spontané mais devient forcé.

 

Section 2: L’évolution des procédures civiles d’exécution

4 périodes peuvent être distinguées.

 

1) La période antérieure aux réformes

Même si les moyens de contrainte ont évolué, une réforme s’imposait.

A) L’évolution des moyens de contrainte privés

On est passé de la contrainte sur la personne à la contrainte sur les biens.

 

1) Les procédés antiques de contrainte sur la personne

 

Dès la plus haute antiquité, les sociétés humaines ont ressenti le besoin de veiller à l’exécution des engagements en cas de défaillance du débiteur. Ainsi, dans les systèmes juridiques primitifs, l’exécution se faisait sur la personne même du débiteur, personne qui constituait alors le droit de gage des créanciers.

En droit romain ancien, une procédure permettait au créancier de se faire justice à lui-même sur la personne du débiteur: manus injectio, tirée de la loi des 12 tables. Cette saisie de la personne pouvait durer pendant 60 jours. Passé ce délai, si la dette n’était pas réglée par les parents ou amis du débiteur, ce dernier était réduit à l’esclavage et adjugé au créancier. De plus, en cas de pluralité de créanciers, le débiteur pouvait être mis à mort et ses lambeaux étaient alors partagés entre les créanciers, ils étaient ensuite rachetés par l’entourage du débiteur ce qui permettait le paiement des créanciers.

En 1806, le Code de Procédure Civile prévoyait encore l’incarcération du débiteur défaillant pour le contraindre à payer ses dettes, il s’agissait de la contrainte par corps, devenue contrainte judiciaire depuis loi Perben II.

Abolie par la loi du 22 juillet 1867 en matière civile et commerciale, la contrainte subsiste en matière pénale et fiscale:

  •  en matière pénale: elle est prévue pour les condamnations à une amende ou à tout autre paiement au profit du Trésor public.
  •  en matière fiscale: elle est possible dans 2 cas:

–   en cas de condamnation par les juridictions répressives du contribuable qui s’est frauduleusement soustrait à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts directs.

–   en cas de défaut de paiement des impôts directs dont l’assiette ou le recouvrement a justifié les poursuites.

Selon les cas l’incarcération dure entre 15 jours et 1 mois selon le montant de la condamnation pécuniaire.

Hors de ces hypothèses, l’exécution sur la personne n’existe plus aujourd’hui, subsistent néanmoins quelques vestiges de la contrainte judiciaire en matière civile car certains moyens de pression font peser une menace sur le débiteur pour qu’il paye sa dette:

– poursuites pour abandon de famille: le débiteur qui n’exécute pas pendant plus de 2 mois une décision judiciaire ou une convention judiciairement homologuée le condamnant à payer à un enfant mineur, à un descendant ou à son conjoint une pension ou une contribution, encourt une peine d’emprisonnement de 2 ans et/ou une amende de 15.000 euros.

 – l’expulsion de l’occupant d’un immeuble sans droit ni titre constitue dans une certaine mesure un mode d’exécution contre la personne du débiteur, c’est pourquoi cette mesure d’exécution est minutieusement règlementée.

On privilégie aujourd’hui les procédés de contrainte sur les biens du débiteur.

 

2) les procédés modernes de contrainte sur les biens

En principe, l’exécution des obligations se fait en nature mais si ce mode d’exécution permet au créancier d’obtenir du débiteur la prestation voulue, son champ d’application est limité. Le débiteur d’une obligation de faire ou de ne pas faire ne peut être contraint à s’exécuter en nature contre son gré (Code Civil Article 1142).

Cependant, il existe malgré tout quelques cas d’exécution en nature:

– le créancier peut exiger du débiteur qu’il détruise ce qu’il a fait contrairement à son engagement, en cas de refus de la part du débiteur, le créancier peut être autorisé à le détruire aux dépends du débiteur i.e. aux frais du débiteur.

– en cas d’inexécution du débiteur, le créancier peut être autorisé à faire exécuter lui-même l’opération aux dépends de ce dernier.

ex: un bailleur s’engage à exécuter des travaux et ne s’exécute pas, le locataire peut, sous certaines conditions, faire réaliser ces travaux par une autre personne, aux frais du bailleur.

L’exécution en nature ayant un rôle restreint, l’exécution sur les biens i.e. l’exécution pécuniaire est le procédé classique d’exécution des obligations puisque le débiteur est tenu et répond de ses engagements sur l’ensemble de son patrimoine.

Les conditions d’exercice des procédures civiles d’exécution diffèrent selon qu’elle porte sur un meuble ou un immeuble: la saisie des biens meubles est régie par la L91 et son décret d’application D92 alors que la saisie immobilière est régie par l’Ordonnnance 06 et son décret d’application du 27 juillet 2006 modifié par le décret du 23 déc. 2006 (D06).

L’exécution sur les biens n’est pas nouvelle en soi, elle existait déjà sous l’ancien régime car dès les XIIIème et XIVème siècles il existait différentes saisies (saisie réelle, saisie-arrêt) qui permettaient au créancier d’obtenir le paiement de sa créance sur le patrimoine de son débiteur. Elles résultaient de coutumes qui ont été codifiées par la grande ordonnance de 1667 sur la procédure civile ordonnance prise à l’initiative de Colbert.

Le Code de procédure civile de 1806 a repris les 3 saisies exécutoires (la saisie-exécution, la saisie-arrêt et la saisie immobilière) et les différentes saisies conservatoires (la saisie gagerie, la saisie foraine et la saisie revendication) préexistantes. Depuis 1806, d’autres saisies conservatoires ont été ajoutées: la saisie conservatoire commerciale, la saisie des navires, la saisie des aéronefs et la saisie revendication.

Ce dispositif était compété par 2 procédures de distribution prévues pour la répartition des deniers entre les créanciers: la procédure d’ordre en matière immobilière (répartition du prix de vente des immeubles) et la procédure de contribution en matière mobilière (répartition du prix de vente des meubles).

Ces règles ont été satisfaisantes pendant près de deux siècles mais peu à peu, les faiblesses du dispositif ont été dénoncées et une réforme est devenue nécessaire.

 

B) La nécessité d’une réforme des procédures civiles d’exécution

— Le dispositif présentait des faiblesses:

  •  la saisie immobilière restait une procédure lourde, lente et complexe tout comme la procédure d’ordre.
  •  les saisies mobilières soulevaient des problèmes de compétence en raison de la multiplicité des juridictions susceptibles d’intervenir.
  •  la saisie-arrêt avait un caractère conservatoire (elle permettait de rendre le bien indisponible) mais aussi exécutoire et ne laissait ainsi en réalité que peu de place au titre exécutoire détenu par le créancier.
  •  de nombreuses saisies conservatoires faisaient double emploi avec la saisie conservatoire de droit commun créée en 1955.

 

— L’évolution du contexte économique et social devait être prise en compte: à l’origine, les voies d’exécution étaient marquées par une grande rigueur à l’égard du débiteur mais la société de consommation a banalisé la situation du débiteur qui use de plus en plus souvent du crédit. Certaines valeurs sociales sont aussi montées en puissance: la liberté individuelle, le droit à la vie privé et l’inviolabilité du domicile qui nécessitent une meilleure protection du débiteur.

 

— Le patrimoine mobilier des débiteurs ne se limite plus aux seuls meubles meublants.

Si les praticiens, les magistrats et les universitaires s’accordaient sur la nécessité d’une réforme, ils divergeaient sur l’ampleur du travail à entreprendre: toilettage ou réforme générale. Renonçant provisoirement à une réforme de la saisie immobilière, le gouvernement a préféré dans un premier temps rajeunir les saisies mobilières et les principes généraux qui les régissent. Une commission de réforme a été créée en 1988 et a abouti à la L91 et au D92, la réforme est entrée en vigueur au 1er jan. 1993.

 

2) La réforme des saisies mobilières

La réforme des saisies mobilières a été réalisée par la L91 et le D92, les objectifs étaient doubles: il s’agissait d’améliorer l’efficacité des procédures civiles d’exécution (A) tout en recherchant un équilibre entre la protection des créanciers et celle des débiteurs (B).

 

A) L’amélioration de l’efficacité des procédures civiles d’exécution

3 principes renforcent l’efficacité des procédures civiles d’exécution: l’unification des règles de compétence (1), la revalorisation du titre exécutoire (2) et la diversification des procédures de saisie mobilière (3).

 

1) L’unification des règles de compétence

Pour remédier aux difficultés relatives à la multiplicité des juridictions compétentes, la L91 a créé un juge de l’exécution (JEX) compétent pour tous les problèmes relatifs aux saisies. En principe, le président du TGI exerce la fonction de JEX mais il peut déléguer ses pouvoirs. Cette volonté de concentrer dans les mains d’un seul juge toutes les difficultés relatives à l’endettement et aux saisies a conduit à reconnaitre au JEX une compétence en matière de surendettement.

 

2) La revalorisation du titre exécutoire

La revalorisation du titre exécutoire est l’idée forte de la réforme car elle limite le recours au juge et améliore ainsi la situation du créancier d’une somme d’argent. En effet, le créancier muni d’un titre exécutoire n’a plus à demander une autorisation de saisir. En principe, la procédure est donc extrajudiciaire, il peut y avoir une saisie sans recours au juge, la saisine du juge ne devient nécessaire qu’en cas d’incident.

La distinction est ainsi plus nette entre les mesures d’exécution ouvertes au créancier muni d’un titre exécutoire et les mesures purement et simplement conservatoires offertes au créancier dont la créance est seulement fondée et qui nécessite donc l’obtention d’une autorisation judiciaire préalable. L’ancienne saisie-arrêt qui avait une nature mixte a purement et simplement disparu avec la réforme.

 

3) La diversification des procédures de saisie mobilière

Le législateur a pris en compte l’évolution de la consistance du patrimoine car aujourd’hui les fortunes sont essentiellement mobilières et les meubles essentiellement incorporels. Des saisies spécifiques ont été prévues pour certaines catégories de biens (VTM). Cette diversification des saisies en accroit l’efficacité.

 

B) La recherche d’un équilibre entre la protection des créanciers et la protection des débiteurs

La recherche d’un équilibre entre les droits respectifs des créanciers et ceux des débiteurs s’est accentuée lors de la réforme car le créancier doit pouvoir récupérer sa créance mais le débiteur ne doit pas pour autant être privé des moyens nécessaires à son existence et à celle des personnes dont il a la charge.

— Le législateur multiplie les mesures de protection du débiteur au risque même parfois de compromettre l’efficacité des saisies. Il veut en quelque sorte et, dans la mesure du possible, humaniser les saisies en essayant d’une part de traumatiser le moins possible de débiteur et d’autre part de prendre ne compte ses difficultés.

  •   le logement et l’environnement du débiteur sont protégés: l’expulsion est réglementée.
  •   le principe de la subsidiarité de la saisie des biens se trouvant dans le local servant d’habitation au débiteura été posé: si le débiteur a des meubles dans sa résidence secondaire et principale, il faut saisir d’abord les meubles de la résidence secondaire et le législateur prévoit dans ce cas que le créancier doit le plus souvent essayer de mettre ne œuvre une saisie sur un compte bancaire notamment lorsqu’il entend obtenir le recouvrement d’une créancier non alimentaire d’un petit montant (moins de 535 euros).
  •   en cas de difficulté financière, le juge peut aménager le règlement de la dette puisque le juge de l’exécution est également compétent en matière d’astreinte et de surendettement.

 

— Le législateur place le créancier muni d’un titre exécutoire dans une situation très avantageuse puisque celui-ci choisit la saisie qu’il entend mettre en œuvre, il peut donc toujours opter pour une mesure conservatoire si tel est son intérêt (i.e. rendre indisponible sans envisager la vente des meubles).

Cependant, la liberté du créancier n’est pas sans limite car existent 2 mesures préventives et une curative:

  •  mesures préventives:
  •   principe de proportionnalité: la mise en œuvre d’une mesure d’exécution ou d’une mesure conservatoire « ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation » (L91 Article 22) à défaut, il y aura mainlevée de la saisie.

Ex: je souhaite recouvrer 100 et saisis un bien de 100.000, il y a disproportion.

  •   principe de subsidiarité de la saisie-vente pour le recouvrement des petites créances non alimentaires: pour les créances non alimentaire dont le montant n’excède pas 535 euros, la saisie des comptes bancaires est privilégiée.
  •   mesure curative: l’abus de saisie: il s’agit d’une application particulière de l’abus de droit, le créancier peut être condamné au paiement de dommages et intérêts en cas de saisie abusive sur le fondement de Code Civil Article 1382.

 

3) La période postérieure à la réforme

Depuis les années 1990, l’évolution des procédures civiles d’exécution s’est poursuivie.

 

A) L’évolution en droit interne

Depuis 1991, des modifications ponctuelles sont intervenues: quelques modifications procédurales mais surtout le renforcement de la protection des débiteurs.

 

1) Les modifications procédurales

Le décret du 18 déc. 1996 a clarifié compétences du juge de l’exécution (JEX).

Le décret du 28 déc. 2005 Article 82 et 83 a modifié la saisie conservatoire des créances et la saisie des droits d’associé et des valeurs mobilières depuis le 1er mars 2006. L’objectif était de favoriser la transparence de la procédure et d’alléger la charge de travail du greffe.

 

2) Le renforcement de la protection des débiteurs

La loi du 23 jan. 1998 renforçant la protection des personnes surendettées en cas de saisie immobilière et la loi du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, ont modifié les saisies immobilières et l’expulsion.

Décret 11 sept. 2002 a institué un dispositif d’accès urgent aux sommes à caractère alimentaire figurant sur un compte saisi.

Loi Dutreil du 1er août 2003 pour l’initiative économique: l’entrepreneur individuel peut déclarer sa résidence principale insaisissable.

 

B) L’évolution en droit européen

En 2008, une procédure européenne d’injonction de payer devrait être mise en place mais en l’état actuel du Droit, l’évolution résulte de l’influence de la CEDH et de l’adoption de règlements communautaires.

 

1) L’influence de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales des citoyens (CEDH)

Cour EDH les saisies entrent dans le domaine de CEDH Article 6 §1, elles sont donc soumises au respect du délai raisonnable. Cette évolution s’est opérée en 3 temps:

  •   la phase d’exécution d’un jugement ou d’un arrêt a été jugée que faisant partie intégrante du droit à un procès équitable (Cour EDH Hornsby c/ Grèce).
  •   Art.6 §1 a été appliqué à une procédure d’exécution mise en œuvre à l’aide d’un acte (Cour EDH Estima Jorge c/ Portugal) car l’esprit de la CEDH commande de ne pas prendre le terme de contestation dans une conception trop technique et donc d’en donner une définition matérielle plutôt que formelle ce qui permet ainsi de reconnaitre le droit à un procès équitable même ne l’absence de procès. En l’espèce l’obtention du recouvrement de la créance avait duré 13 ans.
  •   la durée de l’exécution est intégrée à la durée du procès pour le calcul du délai raisonnable (Cour EDH Pinto de Oliveira c/ Portugal).

 

2) L’évolution en droit communautaire

La procédure d’exéquatur a progressivement disparu dans l’espace judiciaire européen grâce au règlement du 21 avril 2004 portant création d’un titre exécutoire européen pour les créances incontestées.

 

4) La réforme de la saisie immobilière

La réforme de la saisie immobilière était attendue depuis 1990 car sa procédure était jugée trop longue et formaliste. La loi du 26 juillet  2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie Article 24 a habilité le Gouvernement à réformer les dispositions relatives à l’expropriation (procédure de saisie) et à la procédure de distribution du prix de vente de l’immeuble (procédure d’ordre). L’Ord06 Code Civil Titre XIX « De la saisie et de la répartition du prix de vente de l’immeuble », l’ordonnance a été complétée par le décret d’application du 27 juillet  2006, réformé par le décret du 23 déc. 2006. La réforme est entrée en vigueur au 1er jan. 2007, elle poursuit un double objectif:

assurer une protection adéquate au débiteur en prohibant les expropriations injustifiées ou expéditives et surtout en évitant de brader l’immeuble qui constitue souvent l’élément principal du patrimoine.

offrir aux créanciers des procédures efficaces de recouvrement des créances pour les inciter à faire crédit: une intervention plus rapide du juge, prévision de modes alternatifs à la vente aux enchères, anticipation et limitation des éventuels incidents pouvant intervenir au cours de la procédure de saisie immobilière.

 

Section 3: Le caractère d’ordre public des procédures civiles d’exécution

Les textes régissant les procédures civiles d’exécution (mobilières comme immobilières) sont d’ordre public, les intéressés ne peuvent donc y déroger même d’un commun accord, ce caractère protège non seulement le débiteur mais aussi les autres créanciers:

  •   le créancier ne peut imposer au débiteur des clauses le privant de ses garanties légales
  •   les formalités d’exécution préservent les droits des autres créanciers puisqu’ils ont aussi pour droit de gage l’ensemble des biens meubles et immeubles du débiteur (Code Civil Article 2284).

Depuis l’ordonnance du 23 mars 2006 relatives aux sûretés, le pacte commissoire n’est plus prohibé i.e. les parties peuvent convenir que le créancier s’appropriera le gage en cas de non paiement par le débiteur.

Par contre, si le créancier souhaite vendre le bien affecté en garantie, il lui est impossible de déroger aux règles de procédures civiles d’exécution, la prohibition de la clause de voie parée étant maintenue aussi bien en matière mobilière (Code Civil Article 2346) qu’en matière immobilière (Code Civil 2201 al.2).

 

Les procédures civiles d’exécution sont régies par des règles générales (Partie 1), complétées par des règles spéciales propres à chaque catégorie de mesures. Plusieurs mesures sont offertes chronologiquement au créancier: tout d’abord, certaines tendent à garantir ses droits sans pour autant lui permettre de procéder immédiatement à l’attribution ou à la vente forcée des biens du débiteur (les mesures conservatoires) (Partie 2), ensuite d’autres mesures lui permettent d’obtenir effectivement le paiement de sa créance (les mesures d’exécution) (Partie 3) et enfin plusieurs dispositions permettant de répartir le prix du bien saisi et vendu (les procédures de distribution) (Partie 4).

 

 

 Plan du cours-de-droit.net :

  • Introduction
  • Section 1: Le domaine des procédures civiles d’exécution
  • Section 2: L’évolution des procédures civiles d’exécution
  • Section 3: Le caractère d’ordre public des procédures civiles d’exécution
  • Partie 1: Les règles communes à toutes les procédures civiles d’exécution
  • Titre 1: Les conditions d’application des procédures civiles d’exécution
  • Chapitre 1: Les conditions relatives aux personnes
  • Section 1: Les créanciers saisissants
  • Section 2: Les débiteurs saisis
  • Chapitre 2: Les conditions relatives aux biens saisis
  • Section 1: Le principe: la saisissabilité des biens du débiteur
  • Section 2: Les biens insaisissables
  • Chapitre 3: Les conditions relatives à la créance
  • Section 1: Les conditions de fond
  • Section 2: Les conditions de forme
  • Titre 2: La mise en œuvre des procédures civiles d’exécution
  • Chapitre 1: Les personnels des procédures civiles d’exécution
  • Section 1: Les personnes chargées de l’exécution
  • Section 2: L’autorité judiciaire
  • Section 3: Les tiers
  • Chapitre 2: Les opérations d’exécution
  • Section 1: Les principes applicables au déroulement des opérations d’exécution
  • Section 2: Les frais d’exécution
  • Partie 2: Les mesures conservatoires
  • Chapitre 1: Les règles communes aux mesures conservatoires
  • Section 1: Les conditions des mesures conservatoires
  • Section 2: La procédure applicable aux mesures conservatoires
  • Section 3: Les frais de la mesure conservatoire
  •  
  • Chapitre 2: Les différentes mesures conservatoires
  • Section 1: La saisie conservatoire des biens meubles incorporels (créances)
  • Section 2: La saisie conservatoire des biens meubles corporels
  • Partie 3: Les mesures d’exécution
  • Titre 1: Les mesures d’exécution en nature
  • Chapitre 1: L’expulsion
  • Section 1: Les conditions de l’expulsion
  • Section 2: Les opérations d’expulsion
  • Section 3: Le sort des meubles situés dans les locaux lors des opérations d’expulsion
  •  
  • Chapitre 2: La saisie-appréhension
  • Section 1: La saisie-appréhension de droit commun
  • Section 2: La saisie-appréhension des biens placés dans un coffre-fort
  • Titre 2: Les mesures d’exécution sur les biens
  • Sous-titre 1: Les mesures d’exécution sur les meubles incorporels
  • Chapitre 1: La saisie-attribution de droit commun
  • Section 1: Les conditions de la saisie-attribution
  • Section 2: Les opérations de la saisie-attribution
  • Chapitre 2: Les procédures spécifiques de saisie des créances
  • Section 1: Les saisies-attribution particulières
  • Section 2 : Les procédures spéciales de saisies relatives à certaines créances
  • Sous-titre 2: Les mesures d’exécution sur les meubles corporels
  • Chapitre 1 : La saisie-vente
  • Section 1 : Les conditions de la saisie-vente
  • Section 3 : Les issues de la saisie-vente
  • Section 4 : Les incidents de la saisie-vente
  • Chapitre 2: Les procédures spécifiques de saisies-ventes des meubles corporels et de certains meubles incorporels
  • Section 1: La saisie des récoltes sur pied
  • Section 2: La saisie de biens placés dans un coffre-fort
  • Section 3: La saisie des droits d’associé et des valeurs mobilières
  • Section 4: La saisie des véhicules terrestres à moteur (VTM)
  • Sous-titre 3: Les mesures d’exécution sur les immeubles
  • Chapitre 1: Les conditions de la saisie immobilière
  • Section 1: Les conditions relatives aux personnes
  • Section 2: Les conditions relatives à la créance
  • Section 3: Les conditions relatives aux immeubles
  • Chapitre 2: La procédure de saisie immobilière
  • Section 1: La saisie de l’immeuble
  • Section 2: La réalisation de la saisie immobilière: la vente de l’immeuble
  • Chapitre 3: Les incidents de la saisie immobilière
  • Section 1: Les incidents exclusifs d’une pluralité de créancier
  • Section 2: Les incidents résultant d’une pluralité de créancier
  • Partie 4; Les procédures de distribution
  • Chapitre 1: la distribution du prix de vente de l’immeuble
  • Section 1: La distribution amiable (art 112 à 121 décret 2006)
  • Section 2: La distribution judiciaire
  • Chapitre 2 La distribution de deniers

 

 

 

Partie 1: Les règles communes à toutes les procédures civiles d’exécution

 

Titre 1: Les conditions d’application des procédures civiles d’exécution

 

Chapitre 1: Les conditions relatives aux personnes

 

Les voies d’exécutions opposent deux personnes principales: celle qui pratique la saisie (le créancier saisissant, le saisissant) (Section 1) et celle qui subit la saisie (le débiteur saisi, le saisi) (Section 2).

 

Section 1: Les créanciers saisissants

Tous les créanciers peuvent saisir les biens de leurs débiteurs s’ils en ont la capacité et le pouvoir (L91 Article 1 al.1)

1) La capacité du créancier saisissant

A) La capacité requise

— Capacité d’administrer: « Sauf disposition contraire, l’exercice d’une mesure d’exécution et d’une mesure conservatoire est considéré comme un acte d’administration sous réserve des dispositions du code civil relatives à la réception des deniers » (L91 Article 26) ainsi, la capacité d’administrer suffit pour pratiquer une saisie.

2 exceptions:

  •   la saisie immobilière: la mise en œuvre d’une saisie immobilière est assimilable à un acte de disposition car le créancier s’engage à acquérir le bien mis aux enchères si celui-ci n’est pas adjugé, il doit donc avoir la capacité de disposer.
  •   la réception des deniers: est exigée pour la réception des deniers la même capacité que pour aliéner un bien i.e. la capacité de disposer (Code Civil Article 1241).

 

— Capacité d’ester en justice (non): la capacité d’ester en justice du créancier n’est pas requise puisque les procédures civiles d’exécution ont été déjudiciarisées.

Exceptions:

  •   la déjudiciarisation n’est pas totale, les saisies devenant judiciaires lorsque des incidents surviennent au cours de leur exécution et alors la capacité d’ester en justice devient nécessaire.
  •   la capacité d’ester en justice est toujours requise pour la saisie immobilière puisqu’elle reste judiciaire du début jusqu’à la fin.

 

B) Les personnes capables

— Le majeur de 18 ans a nécessairement la capacité de diligenter seul toutes les procédures civiles d’exécution puisqu’il est capable pour tous les actes de la vie civile.

 

— Majeurs incapables:

  •   majeur sous sauvegarde de justice: il a la capacité requise puisqu’il conserve l’exercice de ses droits.
  •   majeur sous curatelle: il a la capacité requise puisque les voies d’exécution ne figurent pas parmi les actes pour lesquels l’assistance du curateur est requise.

Exception: le juge des tutelles peut prévoir expressément que l’assistance d’un curateur sera nécessaire pour la mise en œuvre des voies d’exécution.

  •   majeur sous tutelle: il n’a pas la capacité, le tuteur doit donc mettre en œuvre la procédure de saisie.

 

—  Mineurs:

  •   mineur émancipé de 16 à 18 ans: il a la capacité de saisir puisqu’il est capable, comme un majeur, d’effectuer tous les actes de la vie civile.
  •   mineur non émancipé il n’a pas la capacité requise, les règles relatives à l’administration légale s’appliquent i.e. seul l’administrateur légal (parents) peut faire procéder à une saisie au nom et pour le compte du mineur.

 

2) Le pouvoir du créancier saisissant

Le créancier majeur et capable peut diligenter une procédure civile d’exécution et peut pour cela charger un mandataire de le représenter. Dans ce cas, le mandataire reçoit le pouvoir d’agir soit par une procuration (mandat général) soit par un mandat spécial. Le mandat spécial n’est pas nécessairement requis.

  •    Le représentant de l’incapable: il a nécessairement le pouvoir pour agir (cela découle des textes).
  •    Les époux: lorsque les créanciers sont mariés, si les époux ont une entière capacité pour saisir, leur régime matrimonial agit sur leur pouvoir.

Quel que soit le régime matrimonial, chaque époux peut pratiquer une saisie pour sauvegarder ses biens personnels.

De plus, les époux peuvent toujours se représenter mutuellement grâce au pouvoir que le régime matrimonial leur attribue au titre de la représentation conventionnelle ou judiciaire, dans le pire des cas (Article 217 et suivants Code Civil).

  •   régimes séparatistes: chaque époux peut pratiquer une saisie pour la sauvegarde de ses biens.
  •   régimes communautaires: chaque époux peut pratiquer seul une saisie pour la sauvegarde de ses biens propre mais également pratiquer seul une saisie pour la sauvegarde des biens communs.

 

– Cession ou de transmission de la créance par le créancier: l’ayant-cause peut pratiquer la mesure d’exécution que son auteur pouvait diligenter mais certaines formalités s’imposent:

  •   ayant cause universel ou à titre universel (les héritiers i.e. sans testament ou les légataires i.e. par testament): il doit justifier de sa qualité en notifiant l’acte de décès de son auteur au débiteur. En outre, il doit lui adresser soit un acte de notoriété, dressé par le notaire en cas de succession légale i.e. de succession sans testament, soit le texte de la partie du testament contenant le legs en cas de succession testamentaire.
  •   ayant cause particulier (cessionnaire ou légataire à titre particulier dans le cas du legs d’un bien déterminé): il doit prouver la transmission ou la cession.

–                     le cessionnaire doit nécessairement respecter les conditions de la cession de créance (Code Civil Article 1690).

–                     le légataire doit notifier la partie du testament contenant le legs particulier en sa faveur.

 

– Subrogation: le pouvoir de saisir appartient à toute personne subrogée dans les droits du créancier.

 

– Action oblique: les créanciers du créancier peuvent pratiquer une mesure d’exécution au nom de leur débiteur au titre de l’action oblique si la négligence du débiteur compromet leurs droits.

 

Section 2: Les débiteurs saisis

En principe, la saisie est diligentée contre le débiteur (1) mais il existe des exceptions (2).

 

1) Le principe: la mesure d’exécution diligenté contre le débiteur

En principe la saisie est diligentée contre le débiteur ou son ayant cause s’il est décédé. Des problèmes de capacité et de pouvoir se posent.

 

A) La capacité

– Débiteur majeur capable: la mesure d’exécution est directement pratiquée contre lui.

– Débiteur incapable:

  •   régime d’assistance (curatelle): la saisie est diligentée contre le débiteur lui-même mais le créancier doit obligatoirement faire intervenir le curateur.
  •   régime de représentation (mineur non émancipé ou majeur sous tutelle): la saisie est dirigée contre le représentant légal (parents ou tuteur), le débiteur n’a pas à être mis en cause.

 

B) Le pouvoir

Si le débiteur est engagé dans les liens du mariage, il faut composer avec les règles relatives au régime primaire et les règles propres aux régimes matrimoniaux.

– Le régime primaire: il s’agit de l’ensemble des règles applicables à tous les époux quel que soit régime matrimonial, les époux sont tenus solidairement des dettes relatives à l’entretien du ménage et à l’éducation des enfants (Code Civil Article 220). Ainsi, les créanciers peuvent saisir tous les biens du couple (biens communs et biens propres de chaque époux) si la dette est relative à l’entretien du ménage ou à l’éducation des enfants.

Exception: la solidarité est écartée pour les dépenses manifestement excessives eu égard train vie ménage, les dépenses à tempérament et les emprunts personnels à un époux sauf petit emprunt relatif à de petites dépenses ménage. Lors la solidarité est écartée, la mesure ne peut être diligentée que contre l’époux ayant contracté la dette puisque l’autre époux n’est pas tenu.

 

– Les règles propres aux régimes matrimoniaux:

  • régimes séparatistes: chaque époux est poursuivi par ses propres créanciers sur ses biens personnels.
  •  régimes communautaires:
  •  biens communs: en principe, les créanciers peuvent saisir les biens communs pendant le mariage.

Exception: fraude de l’un des époux à l’égard de l’autre.

  •   biens propres: en principe, les biens propres d’un époux ne sont saisissables que par ses créanciers personnels.

Exception: dette ménagère (Code Civil Article 220 cf. supra.).

 

2) Les exceptions

La mesure d’exécution peut par exception être diligentée contre un tiers (A) et parfois aucune mesure d’exécution ne peut être diligentée contre le débiteur (B).

 

A) La mesure d’exécution diligentée contre un tiers

— En matière de saisie immobilière, le droit de suite du créancier hypothécaire lui permet de poursuivre la saisie de l’immeuble entre les mains d’un tiers détenteur.

 

– En cas de saisie contre la caution réelle i.e. la personne qui a hypothéqué son immeuble pour garantir le paiement de la dette d’autrui. Dans ce cas, il ne s’agit pas véritablement d’une exception car la prétendue caution réelle s’est personnellement obligée sur son immeuble, c’est donc en vertu d’une obligation qui lui est personnelle que le créancier la poursuit.

 

B) L’impossibilité de diligenter une mesure d’exécution contre le débiteur

« L’exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d’une immunité d’exécution. » (L91 Article 1 al.3) i.e. aucune mesure d’exécution ne peut être diligentée contre les personnes morales françaises de droit public (Etat, établissement, collectivités territoriales), les Etats étrangers, les chefs d’Etat et souverains étrangers et les agents diplomatiques.

 

Chapitre 2: Les conditions relatives aux biens saisis

 

Les créanciers ont pour droit de gage général les biens présents et à venir du débiteur (Code Civil Article 2284).

 

Section 1: Le principe: la saisissabilité des biens du débiteur

En principe, les biens du débiteur sont saisissables, le créancier peut donc mettre en œuvre une mesure d’exécution sur ces biens dès lorsqu’ils appartiennent au débiteur (1) et qu’ils se situent sur le territoire français (2).

 

1) L’appartenance des biens au débiteur

A) Principes généraux

Le créancier peut saisir tous les biens du débiteur même s’ils sont détenus par un tiers. Cette situation ne doit pas être confondue avec la saisie d’un bien appartenant à un tiers car alors le débiteur n’a pas la propriété du bien.

– La saisie d’un bien appartenant à un tiers est nulle (car le bien n’appartient pas au débiteur), le tiers peut donc exercer une action en revendication ou en distraction pour récupérer son bien.

– La saisie immobilière d’un bien acquis en tontine est impossible du vivant des acquéreurs puisque par définition on ne connait pas le propriétaire du bien.

– Les biens déjà saisis sont en principe indisponibles (L91 Article 29 reprenant l’adage « saisie sur saisie ne vaut »). Cette règle, signifie seulement qu’il est interdit de procéder à une seconde saisie indépendante, d’ailleurs les textes prévoient l’existence d’un concours de saisies sur un même bien i.e. l’hypothèse où plusieurs créanciers pratiquent une saisie sur un même bien et se répartiront donc le prix du bien entre eux.

 

B) Cas particuliers

L’établissement et la preuve de la propriété du débiteur pose des problèmes pour les biens indivis mais aussi pour les comptes joints et les comptes professionnels.

 

1) Les biens indivis

— Principe d’insaisissabilité (Code Civil Article 815-17 al.2): tant que le partage n’a pas eu lieu, il est impossible de savoir si le bien indivis sera attribué au débiteur or s’il est attribué à un autre copartageant, celui-ci sera réputé propriétaire depuis le jour de la naissance de l’indivision conformément à l’effet déclaratif du partage, dans ce cas de figure il y aurait alors saisie des biens appartenant à un tiers or une telle saisie est nulle. Le principe est donc celui de l’insaisissabilité des biens indivis.

 

— 3 exceptions:

  •  l’insaisissabilité des biens indivis concerne uniquement les créanciers personnels de l’indivisaire et non les créanciers de l’indivision (i.e. les créanciers successoraux qui ont donc pour droit de gage l’ensemble des biens de l’indivision).
  •  la divisibilité automatique des dettes et créances (Code Civil Article 1220): les créanciers personnels de chaque indivisaire peuvent saisir la part de créance de leur débiteur car il n’y a pas, en vertu de ce principe, d’indivision sur les créances.
  •  les créanciers peuvent toujours provoquer le partage au nom du débiteur et même intervenir dans l’acte de partage (pour en surveiller le déroulement). Dans ce cas, le partage réalisé, ils pourront saisir les biens appartenant à leur débiteur.

 

2) Les comptes joints et comptes professionnels

Le débiteur n’a pas la propriété intégrale des sommes inscrites en compte joint ou professionnel.

— Pour les comptes joints: la saisie ne peut porter que sur la portion du solde créditeur correspondant à la part du débiteur. Dès lors, le créancier doit prouver l’existence et le montant des sommes revenant au débiteur (difficile).

 

— Pour les comptes professionnels: il faut distinguer selon que l’exercice du compte est obligatoire ou facultative:

  •  ouverture obligatoire: le professionnel n’a pas la libre disposition des fonds en compte. Dès lors, ce compte n’est pas saisissable par un créancier personnel du professionnel.
  •  ouverture facultative: le compte est saisissable par des créanciers personnels.

 

 

2) La localisation des biens sur le territoire français

Les tribunaux français sont compétents pour connaître des saisies pratiquées sur tous les biens du débiteur situés en France même si celui-ci est étranger ou domicilié à l’étranger. L’important est la localisation peu important la résidence et la nationalité. Le JEX territorialement compétent est celui du lieu d’exécution de la mesure si le débiteur demeure à l’étranger (D92 Article 9). La situation des biens en France est une condition nécessaire et suffisante pour pratiquer une saisie.

 

Section 2: Les biens insaisissables

L’insaisissabilité des biens peut être légale (1) ou volontaire (2) lorsqu’elle est permise par la loi.

 

1) L’insaisissabilité légale

L’insaisissabilité légale se justifie soit par l’intérêt général au sens large qui prime alors l’intérêt particulier du créancier saisissant (A) mais il se justifie également, le cas échéant, par un intérêt particulier: la protection du débiteur (B).

 

A) La prise en compte de l’intérêt général au sens large

Le législateur prend en compte l’intérêt général proprement dit ou les intérêts collectifs.

 

1) L’insaisissabilité justifiée par l’intérêt général proprement dit

Au titre l’intérêt général le législateur retient l’intérêt de l’Etat ou l’intérêt économique.

 

a) L’intérêt de l’Etat

Législateur préserve la défense de la nation mais aussi la souveraineté et l’indépendance des Etats.

 

a.1) La défense de la nation

— Les pensions et les rentes viagères d’invalidité versées aux personnes qui ont défendu la nation sont insaisissables.

— Exceptions: Cette insaisissabilité n’est pas absolue, en réalité, il existe 2 exceptions:

  • les créances garanties par un privilège général sur les meubles (ex: frais de justice, frais funéraires) et les créances alimentaires nées du mariage peuvent faire l’objet de retenues sur ces pensions et rentes à concurrence d’un cinquième (1/5) pour les créances privilégiées et d’un tiers (1/3) pour les créances « familiale ».
  • les débets envers l’Etat et les autres collectivités publiques peuvent faire l’objet de retenues jusqu’à concurrence d’un cinquième (1/5) de leur montant.

NB: le débet, terme de comptabilité publique, désigne la dette née d’une décision administrative ou juridictionnelle ayant constitué un comptable public ou un particulier débiteur à l’égard d’une personne publique.

 

a.2) La souveraineté et l’indépendance des Etats

La souveraineté et l’indépendance des Etats justifient ou expliquent les immunités d’exécution des personnes morales de droit public, immunités qui aboutissent en fait à une insaisissabilité de leurs biens. Ces immunités se retrouvent en droit interne et en droit international.

— En droit interne: l’immunité d’exécution résulte d’un principe général du droit selon lequel l’Etat, les collectivités territoriales et les établissements à caractère administratif bénéficient d’une immunité d’exécution attachée à leur statut. Elle s’explique par la présomption de solvabilité des personnes publiques et par le respect des règles de comptabilité publique (une dépense doit être inscrite ou budget pour pouvoir être engagée). L’immunité d’exécution conduit en fait à l’insaisissabilité des biens du domaine public ainsi que des créances de l’Etat sur les particuliers.

3 moyens permettent de remédier partiellement à cette insaisissabilité:

  •  le recours à un médiateur: le médiateur peut, en cas d’inexécution d’une décision de justice passée en force de chose jugée, enjoindre à l’organisme mis en cause de s’y conformer dans un délai qu’il fixe (loi du 3 jan. 1973 Article 11). Si cette injonction n’est pas suivie d’effet, l’inexécution de la décision peut faire l’objet d’un rapport qui sera publié au JORF et, le cas échéant, présenté au Président de la République (or personne n’aime être pointé du doigt).

 

  •  l’astreinte: depuis la loi du16 juillet 1980, une astreinte peut être prononcée à l’encontre des personnes morales de droit public en cas d’inexécution d’une décision de justice rendue par une juridiction administrative. Le Conseil d’Etat peut toujours décider que l’astreinte reviendra au fond d’équipement des collectivités locales et donc, en fait, indirectement à la collectivité débitrice (moyen surprenant d’inciter à l’exécution forcée !).

 

  •  le mandatement d’office: procédure introduite par la loi du 29 jan. 1993, toute décision de justice passée en force de chose jugée doit, dans un certain délai à compter de sa notification, être ordonnancée par le comptable public, à défaut, le créancier peut saisir l’autorité de tutelle pour qu’elle y procède d’office.

S’il s’agit d’une dette de l’Etat, le comptable public doit obligatoirement mandater la somme due au bénéficiaire du jugement sinon le créancier peut saisir la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) qui pourra prononcer une amende.

La loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l’administration (DCRA) a amélioré la condition des créanciers en réduisant le délai de 4 à 2 mois et en étendant la procédure de mandatement d’office aux décisions du juge des référés accordant une provision.

Face à l’intervention de plus en plus importante des personnes publiques dans la sphère économique, les juges du fonds ont eu tendance à restreindre le bénéfice de l’insaisissabilité consécutive à une immunité d’exécution en privilégiant la fonction de la personne publique sur l’organe lui-même. Pour mettre un terme à cette tendance, la Cour de cassation a affirmé nettement que le principe d’insaisissabilité des biens appartenant à une personne publique subsiste même si elle exerce une activité industrielle et commerciale.

 

— En droit international: les immunités d’exécution évitent de troubler les relations internationales par des mesures d’exécution compromettant la souveraineté et l’indépendance des Etats étrangers. Ces immunités résultent de principes non écrit régissant le droit international.

Ces immunités bénéficient aux Etats, à leurs représentants (ambassadeurs, consul, membres du corps diplomatique) et à certains fonctionnaires d’organisations internationales (ex: les membres du Conseil de l’Europe, de l’UNESCO).

A l’origine absolue, l’immunité d’exécution en droit international souffre aujourd’hui 2 exceptions:

  •  la nature de l’activité exercée par l’Etat: les créanciers doivent être protégés lorsque l’Etat sort de ses attributions régaliennes pour intervenir dans la vie économique. Ainsi, la Cour de cassation écarte l’immunité d’exécution « lorsque le bien saisi a été affecté à l’activité économique ou commerciale relevant du droit privé » (Cass 1ère Civ 14 mars 1984 « Société Eurodif »). Ainsi, le seul fait que le débiteur soit un Etat étranger ne justifie pas à lui seul le bénéfice de l’immunité d’exécution il faut en plus que le bien soit affecté à une activité relevant du droit public pour que l’Etat puisse utilement invoquer son immunité d’exécution.
  •  la qualification juridique du titulaire de l’immunité: dans le prolongement de la jurisprudence « Eurodif », l’immunité d’exécution est uniquement réservée aux biens publics de l’Etat étranger. Ainsi, « les biens des organismes publics, personnalisés ou non, distincts de l’Etat étranger« , peuvent être saisis « lorsqu’ils font partie d’un patrimoine que [l’organisme] a affecté à une activité principale relevant du droit privé » (Cass 1ère Civ 1er oct. 1985 « Sonatrach »). Ainsi, le contrôle étatique n’est pas suffisant pour assimiler ces organismes à des émanations de l’Etat, il n’y a assimilation des organises de droit public à l’Etat que s’il est prouvé que l’organisme n’a pas de patrimoine distinct de celui de l’Etat.

 

b) L’intérêt économique

Le législateur préserve le crédit de l’État et entend favoriser le commerce.

 

b.1) Le crédit de l’État

Les lois du 8 nivôse an VI et du 22 floréal an VII, posent la règle selon laquelle les rentes de l’Etat sont insaisissables, règle reprise par des lois postérieures.

Cette insaisissabilité se justifiait par la volonté d’octroyer un avantage compensatoire aux rentiers qui, sous la Révolution, avaient été victime de la banqueroute des deux tiers (banqueroute partielle décidée par le Directoire par la loi du 30 septembre 1797). La règle subsiste depuis la Révolution et renforce le crédit de l’Etat car elle est de nature à attirer les éventuels souscripteurs. Cette technique a été utilisée à plusieurs reprises au XIXème siècle pour favoriser l’émission de plusieurs emprunts.

 

b.2) L’intérêt du commerce

— Les effets de commerce, les billets à ordre et les chèques sont déclarés insaisissables pour assurer leur libre circulation et donc faciliter le crédit.

 

— Les navires en partance: l’intérêt du commerce maritime justifiait l’insaisissabilité des navires en partance mais pour éviter la paralysie du commerce maritime, la loi du 3 jan. 1967 sur le statut des navires a abrogé cette disposition et les navires en partance peuvent donc désormais être saisis.

Exception: pour limiter les inconvénients de la saisissabilité (impossibilité de partir), le Président du TGI en tant que JEX statuant en référé (urgence) peut autoriser le départ du navire saisi moyennant la constitution d’une garantie suffisante et en fixant le délai dans lequel le navire devra regagner le port de la saisie.

La liste des biens insaisissables est donc évolutive en fonction des besoins.

 

— Les sommes versées à une entreprise de travaux publics en rémunération d’un marché de travaux publics sont insaisissables: l’affectation de l’activité de l’entreprise de travaux publics à la réalisation de l’intérêt général justifie d’une certaine manière l’insaisissabilité, il s’agit un moyen de garantir l’achèvement de l’ouvrage.

2 exceptions: ces sommes sont saisissables pour le paiement des salariés et des fournisseurs qui contribuent à la réalisation de l’ouvrage.

 

2) L’insaisissabilité justifiée par l’intérêt collectif

L’intérêt des organisations professionnelles justifie l’insaisissabilité de certains biens. Ainsi, sont insaisissables les immeubles et objets mobiliers nécessaires aux réunions des syndicats, à leur bibliothèque et à leurs cours d’instruction professionnelle (Code du travail Article L411-12 al.2). L’insaisissabilité concerne seulement les biens du syndicat indispensables à son activité de défense des intérêts collectifs de la profession et également de formation professionnelle. Les autres biens du syndicat sont saisissables, la jurisprudence a d’ailleurs admis la saisissabilité d’un compte bancaire de la CGT.

 

B) La prise en compte de la protection du débiteur

Dans un souci d’humanité, l’insaisissabilité protège le débiteur en raison du caractère vital de certains biens corporels pour l’intéressé ou sa famille (1) ou encore en raison du caractère extrapatrimonial de certains (2).

 

1) L’insaisissabilité liée au caractère vital de certains biens du débiteur et de sa famille

L91 vise les biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail du saisi et de sa famille (a) et les provisions, les sommes et pensions à caractère alimentaire (b).

 

a) Les biens mobiliers nécessaires au travail et à la vie du débiteur et de sa famille

— « Ne peuvent être saisis: […] 4° Les biens mobiliers nécessaires à la vie et au travail du saisi et de sa famille » (L91 Article 14 4°). La liste des biens mobiliers insaisissables est reprise à l’identique: « Les vêtements ; La literie ; […] La table et les chaises permettant de prendre les repas en commun ; » etc. (D92 Article 39).

NB: la machine à laver le linge était saisissable avant 1992, de même qu’une vache, 12 chèvres et 12 brebis. Depuis 1997, le poste téléphonique permettant l’accès au service téléphonique fixe n’est plus saisissable mais le téléphone portable le reste.

Ainsi, tout objet se rattachant à une activité de loisir, tenant au confort, à la décoration ou à l’esthétique d’une habitation, à l’amélioration des conditions d’existence, i.e. tout objet superflu, non indispensable à la vie est saisissable (ex: le poste de télévision).

Les biens mobiliers nécessaires au travail du débiteur et de sa famille sont insaisissables car il faut permettre au débiteur de travailler pour payer ses dettes. Autrefois limitée aux outils de l’artisan, l’insaisissabilité vaut aujourd’hui quelle que soit la nature de l’activité professionnelle, elle concerne « les instruments de travail nécessaires à l’exercice personnel de l’activité professionnelle » (D92 Article 39) à l’exclusion du matériel de l’entreprise.

Exceptions: l’insaisissabilité de ces biens est relative, elle cesse dans 5 cas (L91 Article 14 4°): l’insaisissabilité cesse lorsque ces biens

  •  « se trouvent dans un lieu autre que celui où le saisi demeure ou travaille habituellement« 
  •  sont « de valeur, en raison notamment de leur importance [(ex: matériel de radiologie)], de leur matière, de leur rareté, de leur ancienneté ou de leur caractère luxueux« . Le flou de la formule légale entraine des divergences d’interprétation: pour certains la voiture du chauffeur de taxi est saisissable lorsqu’elle est luxueuse, alors que pour d’autres il s’agit d’un outil de travail insaisissable.
  •  « perdent leur caractère de nécessité en raison de leur quantité« 
  •  « constituent des éléments corporels d’un fonds de commerce« . En effet, dans ce cas, on considère que les biens perdent leur individualité et qu’ils font dès lors partie d’un ensemble, d’un tout saisissable.
  •  ces biens redeviennent saisissables « pour le paiement de leur prix » i.e. pour les sommes dues au fabriquant, au vendeur ou encore à celui qui a prêté pour acheter, fabriquer ou réparer.

Le juge de l’exécution est compétent, le cas échéant pour trancher toute contestation sur la nature saisissable ou insaisissable d’un bien.

 

— « Les objets indispensables aux personnes handicapées ou destinés aux soins des personnes malades ne peuvent jamais être saisis, pas même pour paiement de leur prix, fabrication ou réparation. » (D92 Article 42) Avant la réforme, ces biens figuraient dans la liste des biens insaisissables comme étant nécessaires à la vie ou au travail du saisi, ils pouvaient donc être saisis pour le paiement de leur prix. La jurisprudence les rendait insaisissables lorsqu’ils étaient intégrés à la personne humaine, ainsi une prothèse dentaire était insaisissable. Cette jurisprudence a perdu tout intérêt pratique puisque ces objets font aujourd’hui l’objet d’une insaisissabilité absolue.

 

b) Les provisions, sommes et pensions à caractère alimentaire

— « Ne peuvent être saisi[e]s: […] 2° Les provisions, sommes et pensions à caractère alimentaire«  (L91 Article 14 2°):

  •  Les créances ayant un caractère alimentaires sont insaisissables: par créance alimentaire on entend toutes les créances qui assurent la satisfaction des besoins vitaux d’une personne ne pouvant plus assurer elle-même sa propre subsistance. Ces créances ne se limitent pas aux créances alimentaires par nature, ainsi, pour la Cour de cassation, la prestation compensatoire est insaisissable dans son intégralité (alors qu’on peut lui trouver une double nature) (Cour de cassation 2ème Civ 10 mars 2005).

Exception: l’insaisissabilité n’est pas opposable au créancier d’aliments sous réserve du minimum de survie nécessaire à la subsistance du débiteur et de sa famille, minimum prévu par le législateur pour la saisie des rémunérations du travail (cf. infra.).

 

  •  Les rémunérations du travail sont partiellement insaisissables: l’étendue de l’insaisissabilité est déterminée dans les proportions et selon des seuils fixés par le Code du travail au titre de la saisie des rémunérations du travail (cf. infra.).

Les allocations de chômage sont soumises au même régime car elles visent à assurer une garantie en cas de perte d’emploi.

En revanche, le RMI est totalement insaisissable et le blocage des comptes courants ou de dépôt ne peut y faire obstacle (L92). Ainsi, le bénéficiaire du RMI peut effectuer des retraits mensuels sur son compte dans la limite du montant de l’allocation de RMI (440,86 euros depuis le 1er jan. 2007).

 

  •  Les prestations sociales sont totalement ou partiellement insaisissables: il s’agit des prestations versées par les caisses de sécurité sociale et par les caisses d’allocation familiale. L’insaisissabilité est, selon le cas, soit totale (prestation en nature de l’assurance maladie) ou partielle (indemnité de maladie). En principe, la portion insaisissable est la même que pour les salaires à l’exception des cas particuliers relativement nombreux.

 

— Ces créances demeurent insaisissables même si elles sont versées sur un compte bancaire i.e. le débiteur peut toujours exiger, tant que le créancier n’a pas demandé le paiement des sommes saisies, qu’une sommes équivalente à la portion insaisissable soit laissée à sa disposition. Dans ce cas, il doit justifier de l’origine des fonds figurant sur le compte et le cas échéant saisir le JEX pour déterminer la portion saisissable.

Procédure d’urgence: la procédure peut être longue dont le décret du 11 sept 2002 a institué une procédure d’urgence permettant la mise à disposition d’une somme à caractère alimentaire figurant sur un compte bancaire. Cette procédure s’applique aux saisies pratiquées depuis le 1er déc. 2002.

 

  •  champ d’application: la procédure d’urgence vaut pour toutes les saisies sur un compte bancaire, qu’il s’agisse de la saisie conservatoire des créances (mesure conservatoire) ou de la saisie-attribution (mesure d’exécution). Une seule demande peut être présentée par saisie, dans le mois de la demande.

La somme mise à disposition est doublement limitée: elle ne peut être supérieure ni au RMI pour un allocataire seul (440,86 euros au 1er jan. 2007) ni au montant du solde créditeur du compte (le débiteur n’a pas un droit au découvert au titre de cette procédure). Ainsi, si plusieurs comptes bancaires sont saisis, le débiteur doit être vigilant et demander le prélèvement de cette somme sur celui des comptes où il a le plus de chance d’obtenir la somme dans son intégralité.

Cette mise à disposition n’est pas un nouveau cas d’insaisissabilité mais une mise à disposition, elle se combine donc avec les autres textes et n’interdit pas la remise des autres sommes insaisissables et ne se cumule pas avec celles-ci, elle vient donc en déduction.

ex: un débiteur a 500 euros d’allocations familiales, il demande la mise à disposition de 440,86 euros, il pourra demander le surplus soit 51,14 euros.

ex: le débiteur obtient la mise à disposition de 200 euros représentant la totalité des allocations familiale, il demande la mise à disposition immédiate de la somme du RMI, il ne sera mis à sa disposition que 440,86 – 200 soit 240,86 euros.

 

  •  mise en œuvre: le débiteur ou cotitulaire du compte (en cas de compte joint) doit présenter une demande enfermée dans un double délai: dans les 15 jours de la saisie et avant la demande de paiement du créancier. Le délai étant exprimé en jours, le jour de la saisie n’est pas pris en compte pour la computation du délai donc le délai court le lendemain de la saisie. De plus, si ce délai expire un dimanche ou un jour férié il est reporté au premier jour ouvrable suivant. Si normalement le délai expire à 24 heures, le débiteur doit néanmoins tenir compte des heures d’ouverture des banques.

Concrètement le débiteur dépose un formulaire simplifié dont le modèle est fourni par arrêté et annexé à l’acte de saisie, il peut le cas échéant être retiré directement par le débiteur auprès des établissements bancaires. Le formulaire comprend des mentions obligatoires mais aucune sanction n’est prévue en cas d’irrespect de sa présentation.

 

  •  effets: dès qu’elle reçoit demande, la banque met immédiatement la somme à la disposition du débiteur sans que ce dernier n’ait à fournir un quelconque justificatif. La somme peut être remise en liquide, à défaut elle est affectée sur un compte spécial si le titulaire du compte souhaite en disposer en tirant des chèques ou en utilisant une carte bancaire.

 

2) L’insaisissabilité des biens extrapatrimoniaux

— Sont insaisissables « les souvenirs à caractère personnel ou familial » (D92 Article 39) L’insaisissabilité se fonde sur l’intimité, l’importance du souvenir, de la mémoire. Elle s’explique aussi souvent par l’absence de valeur marchande de tels biens (ex: les portraits de famille).

 

— La protection du droit moral de l’auteur, en principe les droits de propriété littéraires et artistiques sont saisissables mais la protection du droit moral conduit à restreindre cette saisissabilité. En principe, les manuscrits inédits sont insaisissables. De même, pour les œuvres d’art, en principe seuls les revenus de l’œuvre sont saisissables si bien qu’un tableau achevé non exposé est insaisissable en tant que tel.

 

— Si les droits de propriété industrielle (brevet et marque) sont saisissables, les inventions non brevetées sont insaisissables i.e. un brevet n’est saisissable qu’après son dépôt.

 

2) L’insaisissabilité volontaire

L’insaisissabilité peut résulter d’une manifestation de volonté expresse (D92 Article 38 insaisissabilités permises par la loi), elle peut être stipulée à titre principal (A) ou à titre accessoire (à une clause d’inaliénabilité) (B).

 

A) L’insaisissabilité stipulée à titre principal

L’insaisissabilité peut être stipulée à titre principal par un testateur ou donateur (1) ou par un entrepreneur individuel (2).

 

1) L’insaisissabilité stipulée par un donateur ou testateur

L91 Article 14 3° « Les biens disponibles déclarés insaisissables par le testateur ou le donateur [ne peuvent être saisis], si ce n’est, avec la permission du juge et pour la portion qu’il détermine, par les créanciers postérieurs à l’acte de donation ou à l’ouverture du legs« 

ex: une personne donne son immeuble à charge de rente viagère, dans ce cas, la clause permet au gratifié de conserver le bien pour exécuter la rente viagère.

Ce pouvoir reconnu à l’auteur d’une libéralité ne préjudicie pas aux droits des créanciers car le donateur ou testateur pouvait très bien ne rien donner ou léguer au donataire ou légataire. Cependant, l’insaisissabilité ne vaut que pour les créanciers antérieurs au legs ou à la donation. En effet, seuls les créanciers antérieurs pouvaient ne pas compter sur la libéralité. Ainsi, la règle est tempérée pour les créanciers postérieurs: l’insaisissabilité peut être écartée s’ils obtiennent une autorisation du juge et dans ce cas, le juge détermine la portion pour laquelle les biens donnés ou légués peuvent être saisis.

 

2) L’insaisissabilité stipulée par un entrepreneur individuel

Depuis la loi Dutreil du 1er aout 2003 pour l’initiative économique, Code de commerce Article L526-1 et suivants, l’entrepreneur individuel peut déclarer sa résidence principale insaisissable. Le législateur entend ici seulement, par cette technique, limiter l’obligation indéfinie aux dettes de l’entrepreneur individuel.

 

Champ d’application: cette faculté est réservée aux personnes physiques à l’exclusion des personnes morales puisque la forme sociétaire les protège déjà. La déclaration d’insaisissabilité ne vaut que pour la résidence principale.

 

Forme: la déclaration doit être faite par acte notarié. Dans un souci de protection des intérêts des créanciers, cette déclaration est soumise à une double publicité: publication à la conservation des hypothèque (ou au livre foncier en Alsace) et dans un registre légal pour les personnes immatriculées ou dans un journal d’annonces légales pour les personnes non immatriculées.

 

Portée: la déclaration d’insaisissabilité ne peut être opposée qu’au créancier professionnel dont la créance est née après la publication à la conservation des hypothèques. Ainsi, la déclaration n’est pas opposables aux créanciers personnels de l’entrepreneur ainsi qu’aux créanciers professionnels dont la créance est antérieure à la dite publication.

 

En cas de cession: en cas de cession de la résidence principale, l’entrepreneur individuel conserve le bénéfice de sa déclaration par l’effet de la subrogation réelle:

  • dans un premier temps, l’insaisissabilité se reporte sur le prix de vente
  • dans un second temps, sur la nouvelle résidence principale acquise par l’entrepreneur à 2 conditions:

–    l’acquisition intervient dans le délai d’1 an

–   l’acte de vente contient une clause remploi (de la somme perçue en vendant la première résidence principale)

L’insaisissabilité se reporte à hauteur des sommes remployées. Le surplus étant saisissable, la seconde résidence principale a une nature hybride, elle est partiellement saisissable par les créanciers professionnels postérieurs. Dans ce cas l’entrepreneur a intérêt à procéder à une nouvelle déclaration d’insaisissabilité pour le surplus mais cette nouvelle déclaration ne produira réellement ses effets qu’à compter de sa publication.

 

Fin de l’insaisissabilité: la déclaration d’insaisissabilité cesse de produire ses effets au décès de l’entrepreneur, elle n’est pas transmissible aux héritiers.

L’entrepreneur peut renoncer au bénéfice de sa déclaration. La renonciation devrait avoir un effet général et rétroactif mais certains auteurs considèrent que cette renonciation ne pourrait être qu’individuelle. En pratique, les établissements bancaires subordonneront leurs concours financiers à cette renonciation.

Ainsi, si la technique semble judicieuse, il n’en reste pas moins que la protection de la résidence principale sera souvent illusoire pour le petit entrepreneur. L’avenir nous dira si cette mesure permet définitivement de faire l’économie en droit français d’une réflexion sur le patrimoine d’affectation pour le patrimoine individuel.

 

B) L’insaisissabilité accessoire à une clause d’inaliénabilité

En matière de libéralités: les biens donnés ou légués affectés par une clause d’inaliénabilité sont insaisissables tant que cette clause est en vigueur (Cass 1ère Civ 15 juin 1994). Cette l’insaisissabilité est la conséquence directe de la loi du 3 juillet  1971 qui a consacré la validité des clauses d’inaliénabilité de biens donnés ou légués.

La clauses d’inaliénabilité est valable à 2 conditions (Code Civil Article 900-1):

  • elle doit être temporaire
  • elle doit être justifiée par un intérêt sérieux et légitime.

ex: intérêt moral: transmission bien de famille génération en génération, pécuniaire charge rente viagère.

Exceptions: même si la clause répond aux conditions requises, « le donataire ou le légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si l’intérêt qui avait justifié la clause disparait ou s’il advient qu’un intérêt plus important l’exige » (Code Civil Article 900-1).

Les juridictions du fond divergeaient mais la Cour de cassation n’admet pas l’action oblique d’un créancier en levée judiciaire de la clause d’inaliénabilité. Ainsi, tout au plus, le créancier peut demander la nullité de cette clause en démontrant l’absence d’intérêt sérieux et légitime.

 

En matière de procédures collectives: « le tribunal peut assortir le plan de cession d’une clause rendant inaliénable, pour une durée qu’il fixe, tout ou partie des biens cédés. » (Code de commerce L642-10 al.1). Cette clause d’inaliénabilité fait l’objet d’une publicité spéciale: mention en est faite par le liquidateur sur les registres publics sur lesquels les biens déclarés inaliénables et les droits qui les grèvent sont inscrits (pour immeubles: conservation des hypothèques) à défaut, mention en est faite soit au RCS pour un commerçant ou une personne immatriculée soit au registre ouvert à cet effet au greffe du TGI pour les personnes non immatriculées au RCS. La publicité doit mentionner la durée de l’inaliénabilité.

 

Chapitre 3: Les conditions relatives à la créance

 

La créance, cause de la saisie, ne justifie une saisie que si elle respecte certaines conditions de fond et de forme.

 

Section 1: Les conditions de fond

Les conditions de fond tiennent à l’objet de la créance et à ses caractères.

 

1) L’objet de la créance

La créance résulte d’une obligation, c’est donc un droit personnel détenu par une personne physique ou morale sur son débiteur en vertu d’un lien contractuel ou extra-contractuel (délictuel ou extra-délictuel ou légal). Si les créances de sommes d’argent sont le domaine privilégié des procédures civiles d’exécution il peut aussi s’agir d’une obligation de faire ou de ne pas faire et alors une distinction s’impose selon que la prestation est subjective ou objective (cf. supra.).

 

2) Les caractères de la créance

Avant la réforme seule une créance certaine, liquide et exigible pouvait justifier la mise en œuvre d’une mesure d’exécution. Les textes (L91 Article 2, Code Civil Article 2191 al.1) n’exigent plus aujourd’hui qu’une créance liquide et exigible, le caractère pose donc question.

 

A) Une créance liquide

En principe, la créance cause de la saisie doit être liquide (L91 Article 2): « la créance est liquide lorsqu’elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments permettant son évaluation » (L91 Article 4). Une astreinte ne peut donner lieu à aucune mesure d’exécution tant qu’elle n’est pas liquidée. Pour autant, la créance n’a pas à être chiffrée dès lors que le créancier précise les éléments permettant son évaluation (ex: taux et périodicité des remboursements pour les intérêts d’un prêt).

L’intérêt de cette exigence est qu’elle permet une adéquation entre le montant de la créance et la procédure diligentée contre le débiteur. En effet, si le créancier a le choix entre une mesure conservatoire et une mesure d’exécution, la saisie ne peut excéder ce qui est nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation. Ainsi, le montant de la créance doit être connu (évalué ou évaluable) pour pouvoir s’assurer que la saisie n’est pas disproportionnée.

 

Exception: cette condition présente des inconvénients pour les créanciers car en attendant l’évaluation de sa créance, il risque de se heurter à terme à l’insolvabilité du débiteur. Ainsi, la condition d’une créance liquide n’est pas requise pour les mesures conservatoires.

 

B) Une créance exigible

En principe, un créancier ne peut pratiquer une saisie que s’il est en droit d’exiger le paiement de la créance.

Une créance est exigible lorsque le paiement, au sens juridique du terme, peut en être immédiatement demandé.

  • les obligations conditionnelles sont, en principe, exclusives de toute procédure civile d’exécution puisque la condition affecte la naissance même de l’obligation.
  • les créances à terme ne donnent pas lieu à une mesure d’exécution sauf en cas de déchéance du terme.
  • aucune saisie n’est possible si le débiteur a obtenu des délais de grâce (Code Civil Article 1244 et suivants).

 

Exception: dans un souci d’efficacité, la condition d’exigibilité n’est pas requise pour les mesures conservatoires.

 

C) Une créance certaine

En principe, la créance cause de la saisie doit être certaine: est certaine la créance actuelle dont l’existence est incontestable. Sont donc exclues les créances éventuelles i.e. celles dont l’existence n’est pas encore établie.

La loi (L91 Article 2) ne vise pas expressément une créance certaine puisque la saisie peut être poursuivie sur le fondement d’un titre exécutoire provisoire mais dans l’esprit du législateur, la créance cause de la saisie doit être incontestable. Certains auteurs relativisent en effet cette omission du législateur en faisant valoir que:

–    L91 Article 2 ne concerne que les créances reconnues dans un titre exécutoire, la condition de certitude serait donc requise en dehors de ces hypothèses

–    cette omission ne remettrait pas en cause le principe de certitude pour les créances dont on veut se voir judiciairement reconnaître le principe et le montant.

 

Exception: la certitude n’est pas exigée pour les mesures conservatoires puisqu’elles peuvent être autorisées par le juge au créancier qui se prévaut d’une créance « qui paraît fondée en son principe » (L91 Article 67). Cette dérogation s’explique car la mesure conservatoire n’est qu’une précaution prise par le créancier (rendre indisponibles), elle ne tend pas directement à l’exécution sur les biens du débiteur.

Toutefois, pour convertir la mesure conservatoire en une mesure d’exécution, le créancier devra établir la certitude de sa créance.

 

Section 2: Les conditions de forme

La créance doit être constatée dans un titre exécutoire (L91 Article 2) i.e. le créancier doit fournir une preuve incontestable de sa créance par le titre exécutoire.

Exception: aucun titre exécutoire n’est pas exigé pour les mesures conservatoires.

Est un titre exécutoire, le titre ou l’acte permettant à son bénéficiaire de poursuivre l’exécution forcée en recourant si nécessaire à la force publique. L91 Article 3 énumère 6 titres exécutoires qui peuvent être regroupés en 2 catégories: les titres exécutoires juridictionnels (1) et les titres exécutoires non juridictionnels (2).

 

1) Les titres exécutoires juridictionnels

« Constituent des titres exécutoires : 1° Les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif » (L91 Article 3 1°).

 

A) Les décisions des juridictions judiciaires

« Constituent des titres exécutoires : 1° Les décisions rendues par les juridictions de l’ordre judiciaire […] lorsqu’elles ont force exécutoire » (L91 Article 3 1°).

 

1) Les décisions visées

Sont visées sans autre précision, « les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire » (L91 Article 3 1°), la nature de la décision importe peu.

Décisions rendues au terme d’une procédure contentieuse (jugement contradictoire ou non i.e. réputé contradictoire ou rendu par défaut).

 

Décisions rendues au terme d’une procédure ordinaire ou d’urgence (référé). La décision rendue au terme d’une procédure d’urgence constitue un titre exécutoire à titre provisoire, le créancier en poursuit donc l’exécution à ses risques et périls car si le titre est ensuite modifié, il devra restituer le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent.

 

Décisions rendues au terme d’une procédure gracieuse, il n’y a alors aucun débat.

ex: procédure d’injonction de payer: procédure simplifiée présentée par voie de requête unilatérale qui permet au créancier de poursuivre le recouvrement de petites créances civiles et commerciales en obtenant selon les cas, du juge d’instance, du juge de proximité ou du Président  du Tribunal de commerce, la délivrance d’une injonction de payer qui, à défaut d’opposition, devient exécutoire. L’injonction de payer est revêtue de la formule exécutoire par le greffe de la juridiction à l’initiative du créancier et est ensuite signifiée par huissier au débiteur qui dispose d’1 mois pour faire opposition: 2 hypothèses:

–    à l’expiration du délai le débiteur n’a pas fait opposition: l’ordonnance devient définitive, le créancier dispose d’un titre exécutoire.

–    le débiteur fait opposition: la procédure devient contentieuse, il va y avoir débat contradictoire et peut-être débouchera sur titre exécutoire.

 

Décisions rendues par les juridictions de tout degré: arrêts (Cour d’appel ou Cour de cassation), jugements (tribunal) et ordonnances (juge unique) émanant de juridictions françaises.

 

« 2° Les actes et les jugements étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarés exécutoires » (L91 Article 3 2°): les actes et jugements émanant d’une juridiction étrangère et les sentences arbitrales d’une juridiction française ou étrangère n’ont pas force exécutoire en France. La force exécutoire est conférée au terme d’une procédure d’exéquatur, engagée en principe devant le TGI statuant à juge unique. Le juge saisi, après avoir contrôlé la régularité de la décision notamment au regard de l’ordre public interne, donnera un ordre d’exécution. La Convention Lugano du 16 sept. 1988 et le règlement CE du 22 déc. 2000 réduisent les obstacles à la reconnaissance des décisions rendues dans les Etats-membres et allègent les formalités d’exéquatur en consacrant une procédure quasi automatique.

Exception: depuis l’entrée en vigueur (21 oct. 2005) du règlement du 21 avril 2004 portant création d’un titre exécutoire européen pour les créances incontestées, la procédure d’exéquatur ne s’impose plus pour les créances incontestées en matière civile et commerciale dans les Etats de l’Union à l’exception du Danemark. Ce règlement ne crée pas de véritables règles d’exécution communautaires puisque le titre exécutoire européen est exécuté dans les mêmes conditions qu’une décision rendue dans l’Etat où l’exécution est poursuivie. Ainsi le créancier qui a obtenu une décision certifiée en tant que titre exécutoire européen peut s’adresser directement aux autorités territorialement compétentes chargées de l’exécution, il devra fournir une expédition de la décision étrangère et du certificat du titre exécutoire européen et sera alors dispensé de la procédure exéquatur.

 

Injonction de payer européenne: règlement du 12 déc. 2006, applicable à compter du 12 déc. 2008 dans tous les Etats-membres à l’exception du Danemark.

 

  •   domaine: l’injonction de payer européenne s’applique en matière civile et commerciale, à l’exception des matières fiscales, dans les litiges transfrontaliers, quelle que soit la nature de la juridiction, pour les créances pécuniaires, liquides et exigibles.
  •   caractère facultatif: la procédure est facultative, ainsi, même en présence d’un élément d’extranéité, le créancier n’a pas l’obligation d’y recouvrir.
  •   forme de la demande: la demande est présentée sur papier ou par tout autre moyen de communication accepté par l’Etat membre d’origine et utilisable par la juridiction d’origine. La demande doit contenir des informations précises pour identifier et justifier la créance: nom et coordonnées du débiteur, montant.
  •   procédure: le juge saisi examine la requête en injonction de payer ainsi que sa compétence au regard des règles du droit international privé.

Si le juge accueille la demande, il délivre une injonction dans le délai de 30 jours à compter de l’introduction de la demande. L’injonction est signifiée au demandeur et au débiteur. Si le débiteur paye le créancier, la procédure s’arrête. Le débiteur peut aussi former opposition auprès de la juridiction d’origine dans un délai 30 jours. La juridiction d’origine devra donc trancher le litige (procédure contentieuse).

A défaut d’opposition, la juridiction d’origine déclare l’injonction de payer européenne exécutoire, l’injonction sera alors exécutoire dans les autres Etats sans qu’il soit nécessaire de faire constater sa reconnaissance i.e. sans besoin de recourir à la procédure d’exéquatur.

Exception: l’exécution demandée en vertu de l’injonction européenne peut être refusée dans l’Etat membre d’exécution si l’injonction européenne est incompatible avec une décision rendue ou une injonction délivrée antérieurement dans tout Etat membre ou dans un pays tiers.

 

2) La force exécutoire des décisions rendues par les juridictions judiciaires

Pour constituer un titre exécutoire, la décision interne ou d’origine internationale doit être exécutoire.

Une décision de justice est exécutoire à 3 conditions:

 

  •     la décision est passée en force de chose jugée: la décision ne doit plus être susceptible de recours suspensif d’exécution i.e. d’appel ou d’opposition car ces recours ont par essence effet suspensif). En effet, si est interjeté appel d’un jugement rendu en premier ressort, son exécution est suspendue sauf si les juges en ordonnent l’exécution provisoire.

NB: l’arrêt rendu par une Cour d’appel a force de chose jugée car le pourvoi (voie de recours extraordinaire) n’a pas d’effet suspensif.

NB: les ordonnances de référé sont de plein droit exécutoires par provision.

 

  • la décision est établie sous la forme d’une expédition exécutoire (la grosse): « nul jugement, nul acte ne peut être mis à exécution que sur présentation d’une expédition revêtue de la formule exécutoire » (Code de Procédure Civile Article 502). Ainsi, le titre exécutoire se caractérise en fait par l’apposition de la formule exécutoire sur l’expédition du titre. La copie du titre, lorsqu’elle est revêtue de la formule exécutoire devient une copie exécutoire. La formule exécutoire devant figurer sur l’expédition exécutoire ou sur la copie exécutoire est la suivante « En conséquence, la République Française mande et ordonne à tous Huissiers de Justice sur ce requis de mettre la dite décision à exécution, aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la République près les Tribunaux de Grande Instance d’y tenir la main à tous Commandants et Officiers de la Force Publique de prêter main-forte lorsqu’ils en seront légalement requis. En foi de quoi, la présente décision a été signée par le Président et le Greffier. »

 

  •   la décision est notifiée ou signifiée au débiteur: la décision est notifiée par acte d’huissier (signification) ou par le greffier.

 

B) Les décisions des juridictions administratives

« Constituent des titres exécutoires : 1° Les décisions des juridictions […] de l’ordre administratif [.] lorsqu’elles ont force exécutoire » (L91 Article 3 1°) à l’issue d’un contentieux de légalité ou de pleine juridiction. Cependant, le contentieux de l’excès de pouvoir est rarement susceptible de générer une créance.

Les décisions des juridictions administratives sont revêtues d’une formule exécutoire différente de celle des décisions judiciaires:  » La République mande et ordonne au [au préfet de la région…, préfet du …, OU au ministre de …  » en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement. » Cette formule exécutoire est à la fois plus simple et plus complexe:

  •  plus simple car elle confie directement l’exécution aux agents de l’administration
  •  plus complexe car il faut composer avec les immunités d’exécution des personnes morales de droit public, toutes les voies d’exécution de droit commun ne seront donc pas nécessairement applicables.

 

2) Les titres exécutoires non juridictionnels

Les titres exécutoires non juridictionnels sont: les actes authentiques, les actes assimilés à ceux-ci et les titres délivrés par les personnes morales de droit public.

 

A) Les actes authentiques

Constituent des actes authentiques, les actes notariés (1) mais aussi le titre délivré par huissier de justice en cas de non paiement d’un chèque (2) (L91 Article 3).

 

1) Les actes notariés

« Constituent des titres exécutoires : […] 4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire » (L91 Article 3 4°) i.e. les grosses i.e. les copies exécutoires, ce sont des expéditions que le notaire certifient conformes à l’original avant de les revêtir de la formule exécutoire. La formule vise « les présentes » et non tel jugement ou arrêt, désigne en fait la teneur de l’acte au lieu du jugement ou de l’arrêt.

La délivrance de la copie exécutoire est mentionnée sur la minute i.e. sur l’original de l’acte notarié qui demeure en l’étude du notaire.

Seul le notaire peut délivrer une copie exécutoire i.e. même un clerc habilité à lire les actes et à recevoir les signatures ne le peut.

Le notaire étant un officier public, son ministère garantit honorabilité et exactitude, ainsi dès qu’il a constaté existence et montant d’une créance, il est inutile d’exiger une vérification en justice.

Les acte sous seings privés reconnus sincères devant notaire et déposés en son étude sont assimilés à des actes authentiques: l’acte sous seings privés est déposé chez le notaire, il en est dressé minute. L’acte de reconnaissance dressé par le notaire peut être revêtu de la formule exécutoire et sera alors exécuté comme un acte authentique.

 

2) Le titre d’huissier en cas de non paiement d’un chèque

« Constituent des titres exécutoires : […] 5° Le titre délivré par l’huissier de justice en cas de non-paiement d’un chèque » (L91 Article 3 5°)

Le chèque tiré par le débiteur et remis en paiement au créancier est payable à vue mais le banquier peut constater une absence de provision sur le compte.

Si le non paiement persiste 30 jours à compter première présentation, le créancier peut demander au banquier de lui adresser un certificat de non paiement.

La notification ou signification du certificat de non paiement au débiteur par huissier de justice vaut commandement de payer. Si huissier n’obtient aucune justification du paiement dans les 15 jours de la réception de la notification ou de la signification, il délivre un titre exécutoire sur lequel il appose la formule exécutoire. Ainsi, au terme de cette procédure simple, le créancier sera titulaire d’un titre exécutoire.

 

B) Les actes assimilés à des actes authentiques

Il s’agit des procès-verbaux de conciliation (1) et de l’accord amiable des créanciers constaté au titre d’une procédure de conciliation en cas de procédure collective (2).

 

1) Les procès-verbaux de conciliation

« Constituent des titres exécutoires : 3° Les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties » (L91 Article 3 3°)

En principe, le juge a pour mission de concilier les parties et s’il y parvient, il constate l’accord intervenu et lui donne force exécutoire même si cet accord est intervenu hors de sa présence (conciliation par un tiers), en effet, « des extraits du procès-verbal constatant la conciliation peuvent être délivrés ; ils valent titre exécutoire » (Code de Procédure Civile Article 131). Le procès-verbal est établi par le greffier et signé par le juge et les parties, il a la nature d’un acte authentique puisqu’il fait foi jusqu’à inscription de faux de l’accord intervenu et de sa date.

Cet accord n’a de judiciaire que la signature du juge qui s’apparente d’avantage à la signature d’un officier public. Dans le silence des textes, il peut être utile de reproduire la formule exécutoire sur le procès-verbal de conciliation, ainsi, si une des parties refuse d’exécuter l’accord l’autre pourra l’y contraindre par une mesure d’exécution forcée.

 

2) L’accord amiable des créanciers constaté au titre d’une procédure de conciliation en cas de procédure collective

Depuis le 1er jan. 2006, une procédure permet aux créanciers signataires de l’accord d’obtenir un titre exécutoire en vue d’une éventuelle exécution forcée.

Le Président  du tribunal peut, sur la requête conjointe des parties, donner force exécutoire à l’accord. Cette décision est rendue à la vue d’une déclaration certifiée du débiteur attestant qu’il n’est pas en état de cessation des paiements ou que l’accord y met fin. L’accord des créanciers est alors constaté par une ordonnance du Président  du tribunal qui fait apposer la formule exécutoire par le greffier, pour que l’accord valle titre exécutoire.

 

C) Les titres exécutoires des personnes morales de droit public

« Constituent des titres exécutoires : 6° Les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d’un jugement. » (L91 Article 3 3°). En effet, pour faciliter le recouvrement des créances publiques, les personnes morales de droit public bénéficie du privilège du préalable. Ainsi, l’autorité qui se prétend créancière d’un débiteur récalcitrant peut émettre un titre exécutoire.

Cette prérogative est notamment utilisée en matière fiscale (avis à tiers détenteur de l’administration fiscale) et pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociales (contraintes des organismes de sécurité sociale):

  •   l’avis à tiers détenteur de l’administration fiscale: il s’agit une demande du comptable fiscal adressée à un tiers d’avoir à lui payer directement la dette fiscale du redevable dans la mesure de la dette du tiers envers le débiteur. L’avis est notifié au redevable (débiteur) et au tiers détenteur.
  •   la contrainte des organismes de sécurité sociale: le directeur d’un organisme de sécurité sociale peut décerner une contrainte pour le recouvrement des cotisations et des majorations de retard. La contrainte produit les mêmes effets qu’un jugement donc le directeur de l’organisme peut l’invoquer comme un titre exécutoire pour obtenir le recouvrement de sa créance.

 

La réforme ayant revalorisé le titre exécutoire, dorénavant, le créancier muni d’un titre exécutoire peut mettre en œuvre une mesure d’exécution et donc a fortiori une mesure conservatoire sans autorisation judiciaire préalable.

 

 

 

 

Titre 2: La mise en œuvre des procédures civiles d’exécution

 

Les procédures civiles d’exécution sont mises en œuvre par des personnels particuliers (Chapitre 1) qui effectuent des opérations d’exécution (Chapitre 2).

 

Chapitre 1: Les personnels des procédures civiles d’exécution

 

Plusieurs personnes interviennent dans la mise en œuvre d’une saisie: les personnes chargées de l’exécution, l’autorité judiciaire et des tiers.

 

Section 1: Les personnes chargées de l’exécution

Les agents du Trésor et de l’administration des douanes sont habilités à pratiquer une saisie mais le personnage central reste l’huissier de justice.

 

1) Le statut professionnel de l’huissier de justice

Monopôle: « Seuls peuvent procéder à l’exécution forcée et aux saisies conservatoires les huissiers de justice chargés de l’exécution. » (L91 Article 18), le monopôle de l’huissier de justice a été pose par l’ordonnance du 2 nov. 1945 (Article 1).

 

Accès à la profession: décret n°75-773 du 14 août 1975, différentes conditions sont requises:

  • être français
  • ne pas avoir été l’auteur de faits contraires à l’honneur, à la probité et aux bonnes mœurs
  • ne pas avoir été l’auteur de faits de même nature ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation ou mise à la retraire d’office, ou de retrait d’agrément
  • ne pas avoir été frappé de faillite personnelle
  • depuis le 1er jan. 1996, être titulaire d’une maîtrise en Droit ou de l’un des titres ou diplômes reconnus équivalent pour l’exercice de cette profession.

A l’issue d’un stage d’une durée de 2 ans, le candidat subit un examen professionnel qui ne peut être passé que 4 fois. A l’issue de l’examen, la nomination intervient par arrêté du garde des seaux suite à la demande formée par le candidat auprès du procureur de la République. Le candidat doit justifier d’une affectation à un office créé, cédé ou vacant. Le candidat prête serment devant le TGI dans le ressort duquel il exercera ses fonctions.

 

2) Les missions de l’huissier de justice

L’huissier de justice est un mandataire (A) et un auxiliaire de justice (B).

 

A) Les missions de l’huissier de justice mandataire

Lorsqu’il pratique une saisie, l’huissier est le mandataire de son client i.e. il doit avoir reçu mandat.

  •  § Forme: le mandat n’a pas à recouvrir la forme d’une convention spéciale « la remise du jugement ou de l’acte à l’huissier de justice vaut pouvoir pour toute exécution pour laquelle il n’est pas exigé de pouvoir spécial » (Code de Procédure Civile Article 507). Le mandat spécial est n’est requis que pour la saisie immobilière.
  •  § Acceptation: l’huissier est réputé avoir accepté le mandat dès lors qu’il conserve le titre exécutoire qui lui a été remis sans protester, le simple fait de conserver les pièces et de garder le silence ne vaut pas refus du mandat.
  •  § Obligations: en tant que mandataire, l’huissier a une obligation de diligence et un devoir de renseignement et de conseil: il doit mettre en garde son client et, le cas échéant, le dissuader d’agir.

 

B) Les missions de l’huissier de justice en tant qu’auxiliaire de justice

L’huissier de justice en tant qu’auxiliaire de justice a des obligations (1) et des prérogatives spécifiques (2).

 

1) Les obligations de l’auxiliaire de justice

En tant qu’officier public, l’huissier doit prêter son concours pour procéder à un acte d’exécution sauf

  • si la mesure requise présente un caractère illicite. Si le créancier insiste pour poursuivre une exécution illicite, l’huissier doit saisir le JEX.
  • si le montant des frais est susceptible de dépasser celui de la créance (il doit alors dissuader son client d’agir).

Si l’huissier refuse son concours sans raison, le créancier peut saisir le JEX, s’adresser au procureur de la République ou aux instances professionnelles (Président de la chambre départementale des huissiers de justice).

 

En tant qu’auxiliaire l’huissier a un devoir d’information à l’égard du débiteur, des tiers et des autorités. La signification d’un acte par l’huissier garantit la bonne information du destinataire. L’huissier doit faire connaître au débiteur ses obligations mais aussi ses droits (ex: possibilité de demander la vente amiable des biens).

 

L’huissier est tenu au secret pour les informations qui lui sont communiquées par le ministère public: il ne peut révéler directement ces informations au créancier.

 

2) Les prérogatives de l’auxiliaire de justice

Responsable de la conduite des opérations d’exécution, l’huissier dispose de certaines prérogatives liées à sa qualité d’officier ministériel chargé d’une mission publique.

« L’huissier de justice chargé de l’exécution peut requérir le concours de la force publique » (L91 Article 17): dans ce cas il remet au préfet sa réquisition, une copie du dispositif du titre exécutoire et un exposé des diligences accomplies vainement (D92 Article 50).

S’il doit pénétrer dans un local dont l’occupant est absent ou lui en refuse l’accès, l’huissier peut requérir le maire de la commune, un conseiller municipal ou un fonctionnaire municipal délégué par le maire, une autorité de police ou de gendarmerie, ou, à défaut, 2 témoins majeurs qui ne sont ni à son service ni au service du créancier (L91 Article 21).

 

L’huissier peut rechercher des informations auprès du ministère public et du préfet: avant la réforme, les administrations et les établissements bancaires se retranchaient derrière le secret professionnel pour refuser de délivrer toute information. Dorénavant, l’huissier porteur d’un titre exécutoire peut demander au procureur de la République d’entreprendre les diligences nécessaires pour connaître l’adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur, le nom du débiteur et, le cas échéant, le nom de son employeur à l’exclusion de tout autre renseignement (L91 Article 39).

En cas de saisie d’un VTM, l’huissier peut demander au préfet la communication des mentions portées sur le registre de la préfecture existant en vertu du décret du 30 sept. 1953 (publication des cartes grises), ces mentions lui permettent d’obtenir tout renseignement relatif aux droits du débiteur sur le VTM.

 

L’huissier dispose de moyens matériels de contrainte: l’huissier peut, sous certaines conditions, entrer dans un local, immobiliser un VTM grâce au sabot de Denver, faire ouvrir un coffre-fort dans une banque ou faire enlever et transporter des objets saisis.

 

Section 2: L’autorité judiciaire

En visant l’autorité judiciaire, législateur vise le JEX (1) et le ministère public (2).

 

1) Le juge de l’exécution

Pour regrouper entre les mains d’un juge spécialisé un contentieux dispersé, un nouveau juge a été institué: le juge de l’exécution (JEX).

 

A) Désignation du JEX

Le JEX a été créé en 1972 mais aucun texte n’étant intervenu pour la mise en œuvre des dispositions l’instituant, il est véritablement né avec la loi de 1991.

« Les fonctions de juge de l’exécution sont exercées par le Président  du TGI. [al.2] Lorsqu’il délègue ces fonctions à un ou plusieurs juges [du TI ou TGI], le Président  du TGI fixe la durée et l’étendue territoriale de cette délégation. » (COJ Article L213-5). L’ordonnance de délégation du Président  du TGI fait l’objet d’une large publicité destinée à informer les justiciables et les auxiliaires de justice: elle est adressée au bâtonnier de l’ordre des avocats et au président de la chambre départementale des huissiers de justice et affichée aux greffes des juridictions comprises dans le ressort du TGI et dans les mairies de ce ressort.

 

B) La compétence du JEX

1) La compétence d’attribution du JEX

Le JEX a une compétence exclusive dans 3 domaines (COJ Article L213-6), les autres juges doivent relever d’office leur incompétence lorsqu’ils sont saisis:

Les difficultés et contestations relatives à l’exécution forcée: de manière générale, le JEX dispose d’une compétence de principe pour les difficultés relatives aux titres exécutoires juridictionnels ou non et aux contestations qui peuvent s’élever en cas de mise en œuvre d’une mesure d’exécution. Depuis le 1er jan. 2007, cette compétence vaut également en matière de saisie immobilière.

Le JEX peut trancher toutes les difficultés nées de la procédure engagée (respect des délais, des formes imposées par les textes, il peut aussi statuer sur le caractère exécutoire du titre invoqué etc.).

  •   La compétence du JEX recouvre les questions d’interprétation: le justiciable n’a pas à saisir la juridiction qui a rendu la décision lorsqu’un problème d’interprétation se pose à l’occasion d’une saisie.
  •   Le JEX peut être saisi de contestation portant sur le fond du droit i.e. sur l’existence de la créance justifiant la saisie.

Limite: cette compétence a donné lieu à des dérives car certains plaideurs saisissaient le JEX pour trancher un litige relatif à un contrat alors même que ce litige n’avait pas pour origine un incident relatif à l’exécution. La Cour de cassation a rappelé dans un avis que le JEX ne peut intervenir qu’à partir du moment ou une mesure d’exécution ou conservatoire est en cours.

Limite: le JEX ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites et ne peut en suspendre l’exécution.

Exceptions:

  •   le JEX n’est pas compétent lorsque les contestations échappent à la compétence des juridictions judiciaires. Il s’agit d’une application du principe de la séparation des pouvoirs. Ainsi, le juge de l’expropriation est le seul compétent pour statuer sur les éventuelles difficultés liées à ses ordonnances.
  •   le juge d’instance est compétent pour la saisie des rémunérations du travail, pour les procédures de paiement direct des pensions alimentaires et pour les mesures conservatoires prises en matière d’infractions douanières (dispositions non abrogées lors de la réforme).

 

Les autorisations et les contestations relatives aux mesures conservatoires: le créancier qui n’est pas muni d’un titre exécutoire doit obtenir une autorisation du JEX pour procéder à une mesure conservatoire et le JEX est également compétent pour connaître des contestations relatives à de telles mesures.

Exception: si la mesure conservatoire tend à la conservation d’une créance relevant de la juridiction commerciale ET est demandée avant tout procès, le Président  du Tribunal de Commerce est compétent, le Président  du Tribunal de Commerce a donc une compétence concurrente avec le JEX.

Les demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageable d’une mesure conservatoire ou d’exécution forcée: différentes actions en responsabilité peuvent être liées à la mise en œuvre d’une saisie: la nature de la mesure en cause importe peu (conservatoire ou d’exécution).

  •   actions en responsabilité contre le créancier notamment pour saisie abusive
  •   actions en réparation consécutives à la résistance abusive du débiteur
  •   actions en responsabilité exercées contre un tiers qui refuse de concourir à la mise en œuvre d’une mesure d’exécution
  •   actions en responsabilité contre un agent de l’exécution (ex: contre le huissier de justice)

Conformément au principe de la séparation des pouvoirs, les juridictions administratives sont compétentes pour connaître des actions en responsabilité dirigées contre l’Etat notamment lorsqu’il refuse son concours (CE 30 nov. 1923 « Couitéas »).

 

2) La compétence territoriale du JEX

En droit commun, le tribunal territorialement compétent est celui du domicile du défendeur. En matière d’exécution, des possibilités supplémentaires sont ouvertes.

Si le débiteur demeure en France, le créancier dispose d’une option entre:

  •   le JEX du lieu où demeure le débiteur (règle de droit commun)
  •   le JEX du lieu d’exécution de la mesure.

Si le créancier présente sa demande devant l’un de ces juges, il ne peut plus ensuite la présenter devant l’autre (electa una via non datur regressus ad alteram).

 

Si le débiteur demeure à l’étranger ou dans un endroit en un lieu inconnu: seul le JEX du lieu d’exécution de la mesure est compétent.

 

En matière de saisie immobilière: est seul compétent le JEX du TGI dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi.

Exception: si la saisie immobilière porte sur plusieurs immeubles se situant dans des ressorts différents, le JEX dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi où demeure le débiteur est compétent et à défaut, le JEX du ressort dans lequel est situé l’un quelconque des immeubles.

 

C) La procédure devant le JEX

En droit commun, existent la procédure contentieuse et la procédure gracieuse. En procédure civile d’exécution, la procédure contentieuse a vocation à s’appliquer pour régler un litige relatif à l’exécution (1) tandis que la procédure gracieuse est utilisée généralement pour prévenir un dommage (2).

 

1) La procédure contentieuse

Outre la procédure contentieuse de droit commun (a) existe une procédure contentieuse spécifique réservée à l’huissier de justice rencontrant des difficultés d’exécution (b).

 

a) La procédure ordinaire

Les règles régissant la procédure ordinaire (instance, décision, voies de recours contre les décisions rendues par le JEX) ont été modifiées par le décret du 18 déc. 1996.

 

a.1) L’instance

Introduction: la demande est présentée par assignation i.e. par un acte adressé par le demandeur qui invite, par l’intermédiaire d’un huissier de justice, le défendeur à comparaître devant le JEX.

La demande comprend à peine de nullité la reproduction des textes relatifs aux modalités de la défense devant le JEX (D92 Article 11 à 14 et 19).

En matière d’expulsion, la peut demande peut, à titre dérogatoire et facultatif, être présentée par lettre recommandée au greffe.

En cas d’urgence, le JEX peut autoriser une assignation à heure fixe voire même d’heure à heure y compris les jours fériés ou chômés, mais le juge doit laisser un délai suffisant entre la convocation et l’audience pour que la partie assignée ait le temps de préparer sa défense.

 

Juge unique: en principe le JEX statue à juge unique mais

  •  le renvoi à la juridiction collégiale est de droit si les parties le demande dans les 15 jours de la réception de l’avis qui leur est adressé par LRAR attribuant l’affaire à un juge unique.
  •  le renvoi peut être décidé à tout moment par le Président du TGI ou son délégué soit sur demande du JEX (affaire compliquée) soit d’office.

Ministère d’avocat non obligatoire: en principe le ministère d’avocat n’est pas obligatoire devant le JEX mais les parties peuvent toujours se faire assister ou représenter.

Exception: la représentation est obligatoire pour la saisie immobilière.

 

Les personnes pouvant représenter les parties sont limitativement énumérées (D92 Article 12): l’avocat, le conjoint, les parents ou alliés, des personnes appartenant à l’entreprise. Si le représentant n’est pas un avocat, il doit justifier d’un pouvoir spécial.

 

Procédure orale: en principe, la procédure devant le JEX est une procédure orale mais les prétentions des parties peuvent être formulées par écrit notamment par une lettre adressée au JEX si l’adversaire en a eu connaissance avant l’audience (respect du contradictoire). Dans le cas d’une prétention par écrit, la partie n’est pas obligée de se présenter à l’audience, le juge rendu sera contradictoire. Toutefois, le JEX peut toujours ordonner que la partie se présente devant lui.

 

a.2) La décision du JEX

Notification: la décision rendue par le JEX est notifiée aux parties par le greffe par LRAR avec copie par lettre simple le même jour aux parties et à l’huissier.

Les parties peuvent toujours décider de faire signifier la décision.

Si les parties renoncent à ce que la décision leur soit notifiée, elle est alors réputée notifiée à la date de son prononcé.

 

Effets: la décision a force exécutoire dès sa notification. S’il s’agit d’une décision ordonnant la mainlevée (i.e. la fin) d’une saisie, elle entraîne dès son prononcé suspension des poursuites et suppression de l’indisponibilité mais le JEX n’est pas dessaisi du litige tant que l’exécution n’est pas terminée, il peut donc toujours se réserver la possibilité de vérifier l’exécution de sa décision en fixant une nouvelle audience où les parties lui rendront compte de l’exécution.

 

a.3) Les voies de recours

L’opposition est exclue car la décision du JEX est toujours susceptible d’appel dans un délai de 15 jours à compter de sa notification.

Exception: les décisions rendues par défaut peuvent faire l’objet d’une opposition puisque le décret du 18 déc. 1996 a abrogé D92 Article 27 excluant cette voie.

 

L’appel est formé dans les 15 jours de la notification, il est instruit et jugé selon la procédure avec représentation obligatoire devant la Cour d’appel.

Par dérogation au droit commun, l’appel n’a pas d’effet suspensif en matière de voie d’exécution.

Dérogation: un sursis à l’exécution peut être demandé au 1er Président  de la CA s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision rendue par le JEX. Toute demande abusive (dilatoire) peut être sanctionnée par des dommages et intérêts et une amende de 3.000 euros (depuis le 1er mars 2006). La Cour de cassation avait précisé que le 1er Président  avait un pouvoir discrétionnaire qui ne l’obligeait pas à motiver sa décision lorsqu’il était saisi d’une telle demande, mais selon le décret de 1996 le 1er Président  doit statuer non en s’attachant aux conséquences de la mesure mais au caractère sérieux du moyen et doit donc motiver en conséquence sa décision.

 

b) La procédure spécifique de règlement des difficultés d’exécution

Une procédure spécifique est réservée exclusivement à l’huissier de justice se heurtant à une difficulté ou à un obstacle matériel qui vient entraver les opérations d’exécution. Les règles de la procédure ordinaire (cf. a) sont applicables sous réserve des dispositions spécifiques (D92 Article 34 à 37).

Le JEX est saisi par le dépôt d’une déclaration écrite de l’huissier accompagnée du titre exécutoire et d’un exposé de la difficulté qui a entravé l’exécution.

L’huissier doit mettre en cause les parties intéressées en les informant de la difficulté rencontrée ainsi que des lieu, jour et heure de l’audience au cours de laquelle la difficulté sera examinée par le JEX. Ces déclarations sont données soit verbalement avec consignation dans un PV soit par LRAR.

Les principes généraux applicables à la procédure sont rappelés aux parties (notamment s’agissant de la représentation), les parties sont aussi informées que la décision du juge pourra dans ce cas être rendue même en leur absence.

La décision du JEX relative à une difficulté d’exécution n’a pas autorité de la chose jugée au principal.

 

2) La procédure gracieuse

a) Les cas d’ouverture de la procédure gracieuse

« Le JEX statue par ordonnance sur requête dans les cas spécifiés par la loi ou lorsque les circonstances exigent qu’une mesure urgente ne soit pas prise contradictoirement » (D92 Article 32 al.1) différentes situations:

  • pour autoriser le créancier qui n’a pas de titre exécutoire à pratiquer une mesure conservatoire sur les biens du débiteur
  • pour autoriser le créancier à pratiquer une saisie-vente lorsqu’il entend obtenir le recouvrement d’une créance non alimentaire inférieure à 535 euros dont le recouvrement s’avère impossible sur un compte bancaire.
  • pour autoriser l’huissier à pratiquer une saisie dans un local ne servant pas à l’habitation un dimanche ou un jour férié ou avant 6 heures du matin ou après 21 heures le soir.
  • en cas d’urgence
  • pour autoriser un huissier à accomplir un acte déterminé (ex: saisir les biens du débiteur entreposés dans le local d’habitation d’un tiers).

 

b) La procédure

La procédure de droit commun des ordonnances sur requête s’applique devant le JEX: la requête est remise ou adressée au greffe par le requérant ou, s’il y a représentation, par son mandataire, elle peut donc émaner d’un avocat ou du requérant lui-même car la représentation n’est pas en principe obligatoire devant le JEX.

La requête doit être présentée en double exemplaire et motivée.

L’ordonnance rendue est provisoire et non contradictoire, elle doit être motivée. L’ordonnance est exécutoire à la seule vue de la minute (original de la décision).

 

c) Les voies de recours

Le régime dépend de l’issue de la décision du JEX: 2 cas

En cas de rejet de la requête: seul l’appel de l’ordonnance de rejet est possible pour le requérant, dans les 15 jours de son prononcé sauf s’il est démontré que la minute de l’ordonnance n’a pas été remise au requérant ce jour là. L’appel est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse i.e. il doit être formé auprès du greffe du JEX qui a rendu l’ordonnance, l’appel formé directement devant la CA est irrecevable.

 

En cas d’accueil de la requête: l’ordonnance est portée à la connaissance du défendeur (qui n’était pas informé avant) et toute personne intéressée peut demander au JEX par déclaration au greffe ou LRAR de rétracter ou de modifier son ordonnance. Dès lors, le débat contradictoire est instauré (a posteriori) et au terme de cette procédure devenue contentieuse, le JEX peut rétracter ou confirmer son ordonnance. L’ordonnance pourra faire l’objet d’un appel puisque la procédure est redevenue contentieuse.

 

2) Le ministère public

Le ministère public assure une mission générale de surveillance de l’exécution des décisions de justice (A) et une mission spéciale de recherche d’informations (B).

 

A) La mission générale: la surveillance de l’exécution des titres exécutoire

« Le procureur de la République veille à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires » (L91 Article 11). A ce titre, il « peut enjoindre à tous les huissiers de justice de son ressort de prêter leur ministère » (L91 Article 12 al.1). Dans cette hypothèse, le recours au ministère public est le dernier recours du créancier car le procureur de  la République a une autorité sur les agents d’exécution, il dispose de moyens pour contraindre l’huissier à respecter ses obligations (ex: action disciplinaire).

Le procureur de la République peut même poursuivre « d’office l’exécution des décisions de justice dans les cas spécifiés par la loi » (L91 Article 12 al.2).

 

B) La mission spéciale: la recherche des informations sur le débiteur

Le créancier n’a pas toujours les renseignements utiles pour pratiquer une saisie à l’encontre du débiteur et l’huissier se heurtait souvent au secret professionnel (sauf pour le recouvrement des créances alimentaires puisqu’une loi de 1973 imposait aux administrations et organismes sociaux une obligation de fournir des renseignements). Depuis 1991, le ministère public recherche les renseignements concernant l’éventuelle solvabilité du débiteur.

Cette recherche se limite, à l’exclusion de tout autre renseignement, à la recherche de:

  •  l’adresse des organismes auprès desquels le débiteur a ouvert un compte sans que le solde de celui-ci puisse être communiqué.
  •  l’adresse du débiteur et de son employeur.

 

Le ministère public peut s’adresser à différents organismes (L91 Article 40): les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements habilités par la loi à tenir des comptes de dépôt (établissement bancaires).

 

Préservation de la vie privée du débiteur: les renseignements obtenus ne peuvent être utilisés que pour l’exécution des titres pour lesquels ils ont été demandés. Ils ne peuvent être ni communiqués à des tiers ni mentionnés dans un fichier nominatif. Le non respect de ces dispositions fait encourir les peines sanctionnant les atteintes à la vie privée soit 1 an d’emprisonnement et/ou 45.000 euros d’amende (CP L226-1).

 

Requête: l’huissier présente une demande par requête contenant (circulaire du 22 avril 1994):

  •  un énoncé des diligences sollicitées
  •  le relevé certifié sincère des recherches infructueuses
  •  la copie du titre exécutoire
  •  pour les personnes physiques: le nom, les prénoms, la date, la commune, le département de naissance et l’adresse personnelle.
  •  pour les personnes morales: le numéro SIREN, la dénomination sociale et le siège social.

 

Issue: le procureur de la République n’est pas obligé de donner suite à requête, il peut très bien enjoindre l’huissier à procéder à des recherches complémentaires après lesquelles une nouvelle requête sera possible le cas échéant.

Le défaut de réponse du procureur dans un délai de 3 mois à compter de la requête vaut réquisition infructueuse.

Dans les faits, cette mission reste souvent lettre morte en raison de la surcharge des parquets et de leur manque de moyens.

 

Section 3: Les tiers

« Les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur alors même qu’ils seraient détenus par des tiers » (L91 Article 13). Les tiers même s’ils ne sont pas concernés par saisie, peuvent jouer un rôle. Le concours de certains professionnels (tiers) peut être nécessaire à la mesure de saisie (ex: serrurier) et des renseignements peuvent –être demandés à d’autres tiers pour permettre la saisie. Une liste exhaustive des tiers ne peut être dressée mais il est mis à leur charge des obligations sous peine de sanction.

 

1) Les obligations des tiers

Les tiers sont tenus à des obligations positives (faire) ou négatives (ne pas faire).

  •  Certains tiers doivent apporter leur concours aux saisies diligentées:

–   le JEX peut enjoindre à un tiers de lui communiquer l’adresse du débiteur. Les tiers sont tenus d’une obligation particulière de communication des pièces.

–   même lorsque leur concours n’est pas requis, les tiers ont au minimum un devoir d’abstention, ils ne doivent pas, par leur comportement, empêcher ou rendre plus difficile la réalisation d’une saisie.

  •  Les tiers peuvent être astreint à des obligations particulières lors de certaines saisies: en cas de saisie-attribution sur un compte bancaire ou de saisie conservatoire de créances, le tiers banquier doit fournir sur le champ à l’huissier les renseignements relatifs à l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui affectent les dites obligations.

 

Le tiers peut toujours se prévaloir d’un motif légitime pour refuser de satisfaire aux obligations mises à sa charge.

ex: le tiers peut exciper de l’illicéité de la réquisition pour refuser son concours (refus d’ouvrir une porte car une saisie ne peut en principe être diligentée un dimanche).

 

2) Les sanctions de l’inexécution des obligations des tiers

Outre les sanctions pénales relatives à l’outrage à la justice et à la rébellion, il existe des sanctions civiles de 3 types (L91 Article 24):

  •   la garantie: si le tiers se soustrait à ses obligations, il peut être tenu au paiement des causes de la saisie i.e. de la créance, il est alors personnellement tenu à l’égard du créancier sous réserve de son recours contre le débiteur (souvent illusoire). La Cour de cassation a ainsi condamné un tiers au paiement des causes de la saisie car il avait fourni les renseignements le lendemain de la saisie alors qu’il n’avait aucun motif légitime et aurait dû les fournir sur le champ.
  •   les dommages et intérêts: le tiers qui met obstacle ou refuse son concours à mesure d’exécution peut être condamné au paiement de dommages et intérêts si son comportement est générateur d’un préjudice.
  •   l’astreinte: condamnation du tiers au paiement d’une certaine somme d’argent par jour de retard lorsqu’il ne s’exécute pas.

Des sanctions sont également prévues pour chaque obligation particulière en fonction de la saisie diligentée (cf. infra.).

 

 

 

 

Chapitre 2: Les opérations d’exécution

 

Section 1: Les principes applicables au déroulement des opérations d’exécution

Les opérations d’exécution doivent respecter les principes fondamentaux du contradictoire (1) et du respect de la vie privée et de l’inviolabilité du domicile (2).

 

1) Le respect du contradictoire

Si la présence du débiteur sur les lieux de la saisie est souhaitable pour faciliter les opérations mais celle du créancier risque de créer une situation conflictuelle. Ainsi, le créancier n’a pas à être présent lors des opérations d’exécution sauf si les modalités de l’appréhension du bien l’impose (ex: il est le seul à pouvoir reconnaitre le bien à saisir). Le respect du contradictoire ne passe pas par la présence des parties par un devoir de communication des pièces (A) et par une information particulière du débiteur (B)

 

A) Le devoir de communication des pièces

« Toute personne qui, à l’occasion d’une mesure propre à assurer l’exécution ou la conservation d’une créance, se prévaut d’un document, est tenue de le communiquer ou d’en donner copie, si ce n’est dans le cas où il aurait été notifié antérieurement » (L91 Article 27).

 

1) Champ d’application ratione personae de la communication des pièces

Le devoir de communication des pièces s’applique à « toute personne »:

  • les parties à la saisie (créancier et débiteur).

ex: si un débiteur prétend qu’un bien est insaisissable il doit communiquer tout document permettant de le prouver.

  •  les tiers, s’ils soutiennent que le bien saisi leur appartient.
  •  l’huissier doit communiquer les pièces dont il excipe (ex: titre exécutoire, autorisation de saisie conservatoire), mention en est faite dans l’acte dressé.

Le champ est plus large que celui du Code de Procédure Civile. En effet, en principe, le juge est garant du principe du contradictoire mais la réforme ayant déjudiciarisé les procédures civiles d’exécution mobilières, le JEX n’intervient plus nécessairement pour faire respecter le contradictoire, donc le champ a été étendue en la matière.

 

2) Champ d’application ratione materiae de la communication des pièces

Le devoir de communiquer des pièces ne se limite pas à l’instance devant le JEX, il concerne également les opérations de saisie i.e. l’acte de saisie lui-même et les actes préparatoires ou postérieurs. Ce devoir est général car il s’impose quelle que soit la mesure diligentée.

Il est prévu la communication d’un « document » (L91 Article 27), ce terme englobe donc les écrits mais aussi tout autre support (ex: photographies).

Limite: dispense lorsque les documents ont déjà été notifiés. ex: les documents communiqués lors de l’instance n’ont plus à être communiqués au débiteur.

Celui qui prétend que le document a déjà été communiqué doit le prouver par tout moyen (fait juridique, Article 1315 al.1).

 

B) L’information du débiteur

Les formes et le contenu des actes de saisie tendent à protéger le débiteur.

Ce sont en principe des actes d’huissier comprenant donc à peine de nullité des mentions obligatoires (Code de Procédure Civile Article 648) :

  •  la date de l’acte
  •  si le requérant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance
  •  si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement
  •  les nom, prénoms, demeure et signature de l’huissier de justice
  •  si l’acte doit être signifié, les nom et domicile du destinataire, ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social.

D’autres mentions propres à chaque mesure de saisie s’y ajoutent et tendent à assurer l’information des parties et surtout du débiteur. L’information du débiteur intervient directement soit lors des opérations de saisie (1) soit a posteriori (2).

 

1) L’information directe du débiteur

Pour assurer l’information du débiteur le législateur requiert une information écrite et orale:

  •  Information écrite: 2 techniques protectrices
  •  rédaction en caractère très apparents de certaines mentions dans l’acte de saisie: ces mentions sont souvent relatives aux droits du débiteur (possibilité de contester, délais, juridiction compétente) ou aux obligations mises à sa charge suite à l’acte de saisie.
  •  reproduction de certaines dispositions législatives dans l’acte de saisie: relatives notamment aux sanctions pénales et civiles encourues par le débiteur.
  •  Information orale: elle consiste à rappeler oralement au débiteur le contenu de certaines mentions de l’acte de saisie. Cette obligation ne se limite pas à la lecture des mentions mais met à la charge de l’huissier une véritable obligation de renseignement.

ex: en matière de saisie-vente, l’huissier doit informer le débiteur qu’il peut vendre à l’amiable les biens saisis (D92 Article 95).

L’huissier fait mention de ses déclarations dans l’acte de saisie. Ces mentions relatives à l’information orale et écrite sont requises à peine de nullité. L’exigence s’explique au regard des effets de l’acte de saisie (il rend les biens indisponibles).

 

2) L’information a posteriori du débiteur

Dans un souci d’efficacité, la saisie peut parfois être dans les mains d’un tiers ou sans information du débiteur (mesures conservatoires).

L’huissier dresse l’acte de saisie avant d’en informer le débiteur mais celui-ci doit en être informé dès que possible ainsi, l’acte de saisie dressé en cachette est dénoncé ou signifié au débiteur par huissier de justice, il s’agit d’un acte d’huissier qui comprend donc mentions obligatoires inhérentes à ces actes (cf. supra.).

L’information relative à la procédure est également assurée car une copie de l’acte de saisie établi en cachette est remise au débiteur et celui-ci est informé de ses droits (possibilité de contester la mesure, vente amiable) et obligations (effets de la saisie).

 

2) Les respect de la vie privé et l’inviolabilité du domicile

Pour respecter la vie privée du débiteur et l’inviolabilité de son domicile, l’huissier ne peut saisir à toute heure (A) mais doit quand même pouvoir entrer dans un local (B).

 

A) La localisation temporelle de la saisie: le temps de la saisie

Une saisie ne peut avoir lieu n’importe quel jour (1) et à n’importe quelle heure (2) (L91 Article 28).

1) Les jours de l’exécution

 

Principe: une saisie peut être pratiquée tous les jours sauf dimanches et jours fériés car ils sont consacrés au repos du débiteur.

Les jours fériés sont limitativement fixés par la loi, ainsi une mesure d’exécution peut très bien être diligentée un samedi même s’il se situe entre un jour férié et un dimanche. Ces dispositions s’appliquent que les locaux servent ou non à l’habitation. Ainsi, il est en principe interdit de procéder à une mesure d’exécution dans les locaux d’une entreprise exceptionnellement ouverte à la clientèle un dimanche.

 

Dérogation: en cas de nécessité, le juge peut délivrer une autorisation spéciale pour pratiquer une saisie le dimanche.

ex: saisir recettes d’un restaurant les réalisant le dimanche.

 

2) Les heures de l’exécution

 

Principe: aucune mesure d’exécution ne peut avoir lieu entre 21 le soir et 6 h le matin. i.e. il est interdit de commencer les mesures avant 6 h et après 21 h mais l’huissier peut continuer une mesure commencée avant 21 h. Cette règle permet d’éviter que le débiteur ne profite de la nuit pour retirer tout ou partie des biens.

 

Dérogation: le juge peut autoriser une exécution nocturne sauf si la mesure a lieu dans un local à usage d’habitation. Ainsi, lorsque la mesure concerne un local à usage d’habitation, l’interdiction est absolue. Cette possibilité de dérogation présente un intérêt pour les entreprises travaillant la nuit (ex: discothèque).

 

B) Les procédures d’entrée dans les lieux

Il existe 2 procédures: une pour entrer dans un local servant à l’habitation (1) et une autre pour entrer dans un local en cas d’absence ou de refus de l’occupant (2).

 

1) La procédure d’entrée dans un local servant à l’habitation

« A l’expiration d’un délai de 8 jours à compter d’un commandement de payer signifié par un huissier de justice et resté sans effet, celui-ci peut, sur justification du titre exécutoire, pénétrer dans un lieu servant à l’habitation et, le cas échéant, faire procéder à l’ouverture des portes et des meubles » (L91 Article 20)

 

Domaine: la procédure devant commencer par un commandement de payer, elle inapplicable aux mesures qui ne reposent pas sur un tel acte et notamment aux mesures conservatoires. La procédure s’applique donc essentiellement à la saisie-vente.

Procédure: le commandement de payer est un acte d’huissier, il doit reproduire le titre exécutoire afin que le débiteur sache pourquoi il doit payer. Le commandement est signifié par huissier à personne sauf impossibilité. Le débiteur a 8 jours pour s’exécuter à compter de la signification du commandement Le jour de la signification ne compte pas car le délai est exprimé en jours (Code de Procédure Civile Article 641 al.1). Si le dernier jour est un dimanche ou un jour férié, il est reporté au 1er jour ouvrable (Code de Procédure Civile Article L642 al.2). Si le débiteur s’exécute: la procédure s’arrête et son domicile est protégé. S’il ne s’exécute pas, l’huissier peut entrer dans le local d’habitation pour procéder à la saisie. L’huissier doit présenter le titre exécutoire à toutes les personnes présentes dans les lieux.

L’huissier ne peut procéder lui-même à l’ouverture des meubles, le débiteur doit les lui ouvrir, s’il refuse il faudra utiliser une autre procédure.

 

2) La procédure d’entrée dans un local en cas d’absence ou de refus de l’occupant

« En l’absence de l’occupant du local ou si ce dernier en refuse l’accès, l’huissier de justice chargé de l’exécution ne peut y pénétrer qu’en présence du maire de la commune, d’un conseiller municipal ou d’un fonctionnaire municipal délégué par le maire à cette fin, d’une autorité de police ou de gendarmerie, requis pour assister au déroulement des opérations ou, à défaut, de 2 témoins majeurs qui ne sont au service ni du créancier, ni de l’huissier de justice chargé de l’exécution.

Dans les mêmes conditions, il peut être procédé à l’ouverture des meubles. » (L91 Article 21)

Tous les locaux relèvent de cette procédure (locaux d’habitation, locaux professionnels). Elle s’applique notamment lorsque débiteur refuse d’ouvrir les portes des meubles. L’occupant peut viser un propriétaire, un locataire, un squatteur (occupant sans droit ni titre). L’huissier peut avoir recours aux services d’un serrurier.

 

Section 2: Les frais d’exécution

Les frais d’exécution sont souvent élevés voire excessifs. Ainsi, lors de la réforme, la question a donné lieu à un débat important. Il faut distinguer les frais relatifs aux mesures d’exécution forcées (saisies) de ceux occasionnés pour le recouvrement amiable des créances (L91 Article 32). Pour les frais relatifs aux procédures d’exécution forcées, une distinction s’impose selon que les opérations sont diligentées avec ou sans titre exécutoire.

 

Frais entrepris en vertu d’un titre exécutoire: les frais sont à la charge du débiteur quel que soit le type de mesure (exécution, conservatoire).

Exception: le créancier supporte ces frais s’il est manifeste qu’ils n’étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés. En cas de litige, le JEX tranchera.

Ces frais englobent notamment les honoraires de huissier et les débours (frais engagés par le huissier en raison de circonstances indépendantes de la tarification des textes: remboursement des droits fiscaux, frais d’affranchissement, frais de serrurier etc.)

 

Frais entrepris pour une exécution sans titre exécutoire: les frais restent à la charge du créancier, toute stipulation contraire est réputée non écrite. Toute clause de remboursement forfaitaire est donc nulle.

Exceptions:

  •  les frais d’un acte dont l’accomplissement est prescrit pas la loi sont à la charge du débiteur (ex: le commandement de payer nécessaire pour mettre en œuvre une clause résolutoire d’un bail).
  •  si le créancier établit le caractère nécessaire des démarches entreprises pour recouvrer sa créance, il peut demander au JEX de laisser tout ou partie des frais exposés à la charge du débiteur de mauvaise foi: le créancier doit démontrer la mauvaise foi du débiteur et le caractère nécessaire des dépenses.

 

Partie 2: Les mesures conservatoires

 

Les mesures conservatoires tendent à assurer la sauvegarde des droits du créancier (L91 Article 1 al.2), elles sont destinées à conserver un droit ou un bien afin de protéger le créancier en évitant que le débiteur n’en dispose ou s’en dessaisisse.

Les mesures conservatoires n’ont pas directement pour objet la vente des biens du débiteur pour payer le créancier mais s’en rapprochent car elles permettent la conservation du gage du créancier en vue d’une mesure d’exécution (les biens du débiteur sont mis sous main de justice). Ces mesures conservatoires présentent un intérêt pour le créancier qui veut attendre avant de procéder à une mesure d’exécution et pour les débiteurs car leur crédit est préservé.

 

Historiquement, il faut distinguer 3 périodes:

  •  Avec le CPP 1806 existaient des saisies conservatoires spécifiques: saisie gagerie (créance d’un contrat de bail), saisie foraine (pour garantir sur personne de passage étranger à la cité), saisie revendication (gage sur meuble corporel), saisie commerciale (pour une créance commerciale), saisie conservatoire des aéronefs.
  •  La loi du 12 nov. 1955 a introduit une saisie conservatoire de droit commun pour les biens mobiliers et 2 nouvelles sûretés judicaires (hypothèque conservatoire et nantissement conservatoire de fonds de commerce). Les règles de compétence étaient complexes et il y avait un risque de chevauchement entre la saisie conservatoire de droit commun et les saisies conservatoires spécifiques.
  •  La réforme de 1992 a apporté innovations majeures: simplification des saisies conservatoires, unification des saisies conservatoires par la suppression des saisies conservatoires devenues inutiles et élargissement du domaine des saisies conservatoires avec de nouvelles sûretés judiciaires (nantissement de parts sociales et de valeurs mobilières) et de

nouvelles saisies mobilières (saisie de biens dans un coffre-fort etc.).

 

Il existe 2 catégories de mesures conservatoires:

  •   les sûretés judiciaires: ce sont des garanties pouvant être constituées à titre conservatoire sur certains biens en vertu d’une autorisation de justice.

Ces mesures ont une double nature: d’une part elles évitent que le débiteur n’organise sont insolvabilité et sont donc rattachables aux procédures civiles d’exécution et d’autre part ce sont des sûretés réelles spéciales établies par décisions de justice qui se rattachent donc au droit de sûretés. Avant la réforme cette dualité a généré un conflit relatif à la disponibilité ou indisponibilité des biens grevés d’une sûreté judiciaire. En effet, si les sûretés judiciaires sont analysées comme des voies d’exécution, le bien est indisponible alors que si le caractère de sûreté est privilégié, les biens grevés restent aliénables et disponibles. La Cour de cassation était intervenue en qualifiant les sûretés judiciaire de sûretés et en reconnaissant donc que biens grevés restaient aliénables et disponibles (les créanciers restant protégés par droit de suite). La réforme a consacré la jurisprudence: « les biens grevés d’une sûreté judiciaire demeurent aliénables » (Article 79 al.1).

Les sûretés judiciaires reposent sur une double publicité: une publicité provisoire qui a vocation à être confirmée par une publicité définitive. La sûreté judiciaire prend rang au jour de la publicité provisoire. La publicité conserve la sûreté pendant une durée de 3 ans renouvelable.

 

  •   les saisies conservatoires

Certaines règles sont communes à toutes les mesures conservatoires (chapitre 1), d’autres sont spécifiques aux différentes saisies conservatoires (chapitre 2).

 

Chapitre 1: Les règles communes aux mesures conservatoires

 

Le souci du législateur de faciliter les mesures conservatoires se retrouve tant au niveau des conditions (Section 1) que des procédures (Section 2).

 

Section 1: Les conditions des mesures conservatoires

Outre les conditions relatives aux personnes (cf. partie 1), une mesure conservatoire ne peut être prise si la créance répond à certaines conditions spécifiques (1) et si le créancier a reçu une autorisation judiciaire (2).

 

1) Les conditions spécifiques relatives à la créance

« Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe [(A)] peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement [(B)] » (L91 Article 67).

 

A) Une créance apparemment fondée en son principe

Une créance est apparemment fondée en son principe si des conditions de fond (1) et de forme (2) sont remplies.

1) Les conditions de fond

Les conditions de fond sont relatives à l’origine (a), à l’objet (b) et aux caractères de cette créance (c).

a) L’origine de la créance

v Aucune distinction n’est opérée quant à l’origine de la créance, les mesures conservatoires peuvent donc être prises quelle que soit l’origine de la créance: il peut s’agit d’une créance ayant pour origine un contrat, un quasi-contrat, un délit ou un quasi-délit, il peut s’agir d’une créance fiscale, civile ou commerciale.

 

La créance n’a pas à avoir de lien avec le bien saisi ou le bien grevé d’une sûreté judiciaire.

ex: un nantissement de fonds de commerce peut être pris pour garantir une dette civile totalement étrangère à l’exploitation du fond.

 

b) L’objet d e la créance

Même si les textes ne le prévoient pas expressément, la créance doit porter sur une somme d’argent et non sur une obligation de faire.

2 arguments textuels justifient cette restriction:

– L91 Article 67 vise une menace dans « le recouvrement », ce vocable laisse entendre qu’il ne peut s’agir que d’une somme d’argent.

– D92 Article 212 exige que l’ordonnance « détermine le montant des sommes pour la garantie desquelles la mesure conservatoire est autorisée ».

Certains auteurs contestent cette limitation en estimant que la notion de créance est indépendante du mode d’exécution de l’obligation. Ils estiment ainsi que la créance dont l’objet est une obligation de faire ou de ne pas faire mériterait la même protection que celle portant sur une somme d’argent et il suffirait d’en donner une évaluation chiffrée pour se conformer aux exigences textuelles.

Pour l’instant, les juridictions n’admettent les mesures conservatoires que pour des créances de sommes d’argent.

 

c) Les caractères de la créance

Il est seulement exigé que « la créance parai[sse] fondée dans son principe« , elle n’a pas à être certaine, liquide et exigible et peut être conditionnelle ou contestée.

Lorsque la créance n’est pas liquidée, le juge qui autorise la mesure conservatoire doit en évaluer le montant à titre provisoire et il importe peu que le montant de la créance soit contesté (puisqu’il s’agit seulement d’une évaluation à titre provisoire).

 

L’exigibilité n’étant pas requise, une créance à terme peut tout à fait faire l’objet d’une mesure conservatoire (le terme affectant seulement l’exigibilité).

 

La créance n’a pas à être certaine mais le recours à une mesure conservatoire pour des créances conditionnelles a été discuté puisque 2 types d’évènements peuvent inciter le juge à refuser l’autorisation:

  •   évènement temporel: le créancier qui n’a pas de titre exécutoire doit pouvoir engager une procédure ou encore accomplir les formalités nécessaires à son obtention dans le mois qui suit l’exécution de la mesure conservatoire. Si le juge constate que cela sera impossible dans le délai, il refusera l’autorisation.
  •   évènement matériel: la reconnaissance de la certitude de la créance ne doit pas être trop aléatoire sinon le juge refusera son autorisation.

 

2) Les conditions de forme

En l’absence de précision légale, la forme de la créance importe peu: celle-ci peut être constatée dans un acte authentique ou dans un acte sous seings privés.

La créance n’a pas à être établie par écrit dès lors que l’écrit n’est pas une condition de validité de l’acte juridique dont résulte l’obligation.

Cependant, en l’absence de titre exécutoire, une autorisation judiciaire préalable est nécessaire. Ainsi, depuis la réforme, la forme de la créance n’a d’incidence que sur la nécessité ou non d’obtenir une autorisation judiciaire.

Si la créance est apparemment fondée en son principe, le créancier n’est autorisé à prendre une mesure conservatoire que s’il existe une menace pour son recouvrement.

 

B) L’exigence d’une menace au recouvrement de la créance

Il était prévu que le créancier ne pouvait solliciter l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire qu’en cas d’urgence et si le recouvrement de la créance semblait en péril (Code de Procédure Civile, Article 48 al.1, 53 et 54). En jurisprudence, l’urgence et le péril étaient en fait l’expression d’une même menace pesant sur la créance: le risque d’insolvabilité du débiteur. Ce risque d’insolvabilité devait être imminent ou sérieusement à craindre mais la jurisprudence n’exigeait pas que le débiteur ne puisse pas payer sa dette, il suffisait que le paiement soit menacé. Cette condition est aujourd’hui reprise puisque la mise en œuvre d’une mesure conservatoire est subordonnée à la preuve de « circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement » (L91 Article 67). Ainsi, la jurisprudence antérieure à la réforme conserve un intérêt même si les circonstances visées par le texte ne se résument plus au seul risque d’insolvabilité du débiteur.

S’agissant d’un fait juridique, cette preuve doit être rapportée par tout moyen. Ainsi, le créancier peut utilement invoquer une inscription de privilège (Trésor, SECU) ou une lettre restée sans réponse. De manière générale, la jurisprudence considère que le recouvrement de la créance est menacé si le débiteur ne règle pas une dette ancienne non contestée d’un montant relativement élevé pour laquelle il a été mis en demeure de payer ou encore si un courrier qui lui a été adressé est resté sans réponse. Il en est de même en cas d’insolvabilité ou de défaut de paiement du débiteur.

En revanche, si le débiteur ne s’acquitte pas de sa dette car il la conteste, on doit considérer que le recouvrement n’est pas menacé.

Ces circonstances de fait sont appréciées souverainement au cas par cas par les juges du fond.

L’utilisation des mesures conservatoires peut donc paraître délicate, il faut agir ni trop tôt, ni trop tard:

  •  le créancier ayant agi trop tôt pourrait être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire si le juge en ordonne la mainlevée.
  •  la mesure conservatoire pris trop tard risque de perdre toute efficacité si d’autres créanciers agissent avant le créancier prenant l’initiative de la mesure.

 

2) La nécessité d’une autorisation judicaire

En principe une autorisation judiciaire est nécessaire pour mettre en œuvre une mesure conservatoire (A), mais par exception le créancier peut en être dispensé (B).

 

A) Principe: l’obtention d’une autorisation judiciaire

L’intervention du juge est une garantie essentielle pour le débiteur qui n’est pas averti de la mesure requise par le créancier au risque qu’elle perde son effet de surprise et donc son efficacité. Il n’y a pas lieu à un commandement préalable i.e. à une information préalable du débiteur (L91 Article 67 reprenant Code de Procédure Civile  Article 48).

 

1) La juridiction compétente

La L91 innove sur le plan de la compétence d’attribution (a) et de la compétence territoriale (b).

 

a) La compétence d’attribution

Avant la réforme, les règles relatives à la compétence d’attribution étaient complexes, 2 distinctions s’imposaient:

– le moment où l’autorisation était sollicitée: on distinguait l’autorisation sollicitée en dehors de toute instance pendante et l’autorisation sollicitée en cours de procès.

– la nature et de l’importance de l’affaire: il fallait combiner ces éléments pour déterminer le juge compétent.

— Principe: depuis la réforme, le JEX a une compétence générale pour autoriser les mesures conservatoires sauf dérogation légale expresse. Le JEX est compétent même s’il y a une instance pendante devant une autre juridiction puisque qu’il connaît exclusivement des autorisations des mesures conservatoires et des contestations des difficultés de leur mise en œuvre (COJ Article L213-6), tout autre juge saisi d’une telle demande d’autorisation doit donc se dessaisir d’office.

 

— 2 dérogations:

  •  la nature commerciale de la créance: l’autorisation peut être accordée par le Président du Tribunal de Commerce à 2 conditions (L91 Article 69 al.1 et D92 Article 211 al.2):
  •  l’autorisation est demandée avant tout procès (condition supplémentaire ajoutée par la réforme): i.e. en l’absence de toute instance en cours aussi bien au fond qu’en référé. S’il y a une instance en cours, l’autorisation relève de la compétence exclusive du JEX et le Président du Tribunal de Commerce saisi doit se dessaisir d’office
  •  l’autorisation tend à la conservation d’une créance relevant de la compétence des juridictions commerciales.

Cette compétence du Président  du Tribunal de Commerce existait avant la réforme, elle permet au Président  du Tribunal de Commerce de surveiller les difficultés des entreprises.

 

  •  l’objet de la saisie est un navire: la L91 n’a pas abrogé la loi du 3 jan. 1961 (Article 70) et le décret 27 oct. 1967 relatifs à la saisie conservatoire des navires. Ainsi, l’autorisation émane du Président du Tribunal de Commerce ou à défaut du juge d’instance pour la saisie conservatoire d’un navire.

 

 b) La compétence territoriale

Le créancier avait le choix entre le juge du domicile du débiteur (défendeur) et le juge dans le ressort duquel étaient situés les biens à saisir (Code de Procédure Civile Article 48 al.1).

— Principe: aujourd’hui, « le juge compétent pour autoriser une mesure conservatoire est le JEX du lieu où demeure le débiteur » (D92 Article 211 al.1).

 

— Dérogation: « si la mesure tend à la conservation d’une créance relevant de la compétence d’une juridiction commerciale, elle peut être autorisée, avant tout procès, par le Président  du Tribunal de Commerce de ce même lieu » (D92 Article 211 al.2).

2) La procédure d’autorisation

L’autorisation judiciaire de pratiquer une mesure conservatoire revêt la forme d’une requête (a) que le juge accepte ou rejette par ordonnance (b).

 

a) La requête

L’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire est demandée par requête (D91 Article 210) qui doit comprendre certaines mentions (Code de Procédure Civile, Article 493 à 498):

  •  la désignation du magistrat auquel la requête est adressée
  •  les noms, prénoms et domiciles du créancier et du débiteur
  •  la désignation sommaire des biens concernés et de leur situation
  •  le montant de la créance ou son évaluation si pas liquidée
  •  la justification des motifs pour lesquels la mesure est demandée (la menace du recouvrement)
  •  l’indication précise des pièces invoquées
  •  la date
  •  la signature du demandeur

Le ministère d’avocat n’est pas obligatoire. La requête peut être présentée par tout intéressé. Elle doit être faite en double exemplaire.

 

b) L’ordonnance

S’agissant d’une ordonnance du requête, l’ordonnance est inscrite au pied de la requête, elle peut donc être préparée par le requérant et le juge se contentera alors de viser l’ordonnance et les pièces produites à l’appui.

Si le juge accorde l’autorisation, il vise, à peine de nullité, l’objet de la demande autorisée i.e. il indique les biens et le montant pour lequel la mesure peut être pratiquée. Cette somme correspond souvent au montant nominal de la créance mais si la créance n’est pas liquidée, le juge l’évalue d’après les éléments qui lui sont fournis dans la requête. Il s’agit d’une évaluation à titre provisoire, elle sera donc remplacée par le chiffre définitif au plus tard après l’obtention du titre exécutoire.

Tout en autorisant la mesure, le juge peut décider d’office qu’il réexaminera ultérieurement sa décision ou les modalités de son exécution lorsque le débat contradictoire sera instauré, le juge fixe la date de l’audience mais le débiteur peut toujours le saisir à une date plus rapprochée (D92 Article 213)

 

3) Les voies de recours du débiteur

Le débiteur dispose de 2 voies de recours: l’appel (a) et la rétractation (b).

 

a) L’appel

« Les décisions du JEX […] sont susceptibles d’appel devant une formation de la cour d’appel qui statue à bref délai » (COJ Article L311-12-1 al.5), Ainsi, l’appel en tant que voie de recours est toujours recevable contre l’ordonnance autorisant une mesure conservatoire.

« L’appel n’est pas suspensif« , le créancier donc peut poursuivre l’exécution de la mesure conservatoire.

Exception: « le premier président de la cour d’appel peut ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la mesure« 

 

b) La rétractation

Les conditions requises pour pratiquer une mesure conservatoire étant particulièrement souple et l’autorisation étant obtenue sans débat contradictoire, le débiteur doit pouvoir, à un moment donné, faire valoir tous les arguments nécessaires à la défense de ses intérêts. Ainsi, le juge qui a accordé l’autorisation peut, après un débat contradictoire, revenir sur sa décision initiale et donc la rétracter. Il a d’ailleurs pu se réserver la possibilité de réexaminer la mesure en prévoyant une date d’audience (cf. supra.). Le juge reste compétent pour rétracter son ordonnance jusqu’à l’achèvement de la procédure permettant au créancier d’obtenir un titre exécutoire.

Etendue des pouvoirs du JEX:

  •   saisi d’une demande de rétractation, le JEX prend en compte les éléments de faits postérieurs à l’ordonnance autorisant la mesure conservatoire car lorsqu’il statue au titre d’une demande de rétractation, le juge doit examiner tous les faits qui se sont produit au jour où il statue.

 

  •   le juge doit-il se limiter à l’examen des seules créances qui lui ont été initialement soumises ou peut-il prendre en compte créances postérieures à l’autorisation délivrée ? La Cour de cassation considère que le juge ne peut pas prendre en compte les créances postérieures. Cette solution est critiquée en doctrine car elle confère à l’ordonnance initiale une marque indélébile qui ne s’explique pas en cas de contestation or lorsqu’il saisit le juge d’une demande de rétractation, le débiteur conteste l’autorisation et l’affaire basculant dans sa phase contentieuse, elle devrait normalement faire l’objet d’un règlement global non limité à la requête initiale.

 

 

B) Les dispenses légales d’autorisation judiciaire

Avant la réforme, même muni d’un titre exécutoire, le créancier devait obtenir systématiquement une autorisation pour pratiquer une saisie conservatoire. Il en résultait un alourdissement considérable de la procédure et donc corrélativement une dévalorisation du titre exécutoire. Dans un contexte de déjudiciarisation et de revalorisation du titre exécutoire, il a été prévu 6 cas de dispense d’autorisation judiciaire pour pratiquer une mesure conservatoire (L91 Article 68):

  •   l’existence d’un titre exécutoire: cette dispense coïncide avec la revalorisation du titre exécutoire.
  •   l’existence d’une décision de justice n’ayant pas encore force exécutoire: il manque l’une des conditions pour que la décision ait force exécutoire (ex: expédition non revêtue de la formule exécutoire, décision par encore notifiée), cette dispense préserve l’effet de surprise déterminant dans la saisie conservatoire.
  •   le défaut de paiement d’une lettre de change acceptée, d’un billet à ordre ou d’un chèque: il va de soi qu’à partir du moment où le débiteur tire le chèque, il ne conteste pas le principe de la créance, le créancier peut donc logiquement pratiquer une mesure conservatoire sans autorisation.
  •   l’existence d’un loyer impayé lorsqu’il résulte d’un contrat écrit de louage d’immeubles: les juges font une application stricte de ce cas de dispense tant que regard de la notion de loyer que de celle de contrat écrit de louage d’immeubles. En effet, la dette s’étend uniquement aux loyers et aux charges contractuelles à l’exclusion de toutes les autres sommes dues au bailleur (ex: frais de relance, clause pénale etc.).

 

Dans ces 6 cas, on considère que le principe de la créance n’est pas ou n’est gère contestable mais le créancier doit toujours justifier de circonstances propres à menacer le recouvrement de sa créance pour pratiquer une mesure conservatoire, elles seront contrôlées a posteriori par le juge saisi d’une contestation par le débiteur.

 

Section 2: La procédure applicable aux mesures conservatoires

Le créancier autorisé à pratiquer une mesure conservatoire doit respecter les règles relatives à son exécution (A), sa dénonciation (B), sa conversion (C) et aux incidents (D).

 

1) L’exécution de la mesure conservatoire

Même autorisé judiciairement, le créancier ne peut exécuter une mesure conservatoire si d’autres moyens de recouvrement lui permettent d’obtenir satisfaction.

La mesure conservatoire doit être exécutée dans un délai de 3 mois à compter de l’ordonnance sinon l’autorisation judiciaire est caduque (D92 Article 214) Le délai court à compter du jour du prononcé de l’ordonnance. Puisque l’exécution est visée, une tentative d’exécution non suivie d’effet n’empêcherait pas la caducité de l’autorisation sauf cas de force majeure. Même si le délai de 3 mois n’est pas expiré, le créancier ne peut utiliser l’ordonnance qu’il a obtenue pour réitérer une mesure identique dont l’exécution ferait courir un nouveau délai de 3 mois.

L’exécution de la mesure conservatoire doit être dénoncée au débiteur.

 

2) La dénonciation de la mesure conservatoire

— « La notification au débiteur de l’exécution de la mesure conservatoire interrompt la prescription de la créance cause de cette mesure » (L91 Article 71). Est seulement exigée la notification de l’exécution même de la mesure, le créancier conserve donc le bénéfice de l’effet de surprise. S’agissant d’une notification et non d’une signification, l’intervention d’un huissier de justice n’est pas requise (Code de Procédure Civile, Article 665 et suivants.).

 

— « Lorsque la mesure est pratiquée entre les mains d’un tiers [(le débiteur du débiteur)], le créancier signifie à ce dernier une copie des actes attestant les diligences requises par l’article 215 [pour l’obtention, le cas échéant, d’un titre exécutoire cf. infra.], dans un délai de huit jours à compter de leur date. A défaut, la mesure conservatoire est caduque. » Le créancier doit donc informer le débiteur et le tiers. Constitue un tiers, toute personne qui se trouve dans un rapport de droit avec le débiteur saisi et à qui la mesure conservatoire impose des obligations. Tout tiers répondant à cette définition a donc le droit d’être informé comme le débiteur

Si la mesure conservatoire n’incite pas le débiteur à s’exécuter, elle peut ensuite être convertie en une mesure d’exécution.

 

3) La conversion de la mesure conservatoire

La mesure conservatoire est par essence provisoire, elle est destinée à faire pression sur le débiteur et n’a donc pas vocation à durer dans le temps. Ainsi, si le débiteur ne s’exécute pas, il est nécessaire de passer au stade de l’exécution et alors le créancier doit obligatoirement être muni d’un titre exécutoire.

 

  •  si le créancier a déjà un titre exécutoire: il peut directement pratiquer une mesure d’exécution, il convertit directement la mesure conservatoire en une mesure d’exécution correspondante.

 

  •  si le créancier n’a pas encore de titre exécutoire: il « doit, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, à peine de caducité [de la mesure conservatoire], introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire » (D92 Article 215, L91 Article 70). Le titre exécutoire permettra de convertir la mesure conservatoire en mesure d’exécution. Cette règle évite qu’une mesure conservatoire soit maintenue durant une durée indéterminée au préjudice du débiteur. En prévoyant que le créancier doit accomplir les formalités nécessaires, le législateur vise le cas où le jugement est rendu mais n’est pas encore revêtu de la formule exécutoire, il suffit alors d’obtenir une décision avec la formule exécutoire. A défaut, le créancier peut ou doit introduire une procédure au fond pour obtenir le titre exécutoire qui lui fait défaut. La saisie d’une juridiction incompétente est assimilée en jurisprudence comme une absence de saisie. Depuis la réforme, la conversion prend la forme d’une instance au fond, il n’existe plus d’instance en validité. Les modalités pratiques de conversion sont spécifiques à chaque mesure cf. infra.

Lorsque la carence du créancier est établie, il y a caducité, les juges n’ont aucun pouvoir d’appréciation.

Lorsqu’une mesure conservatoire lui est dénoncée, le débiteur peut réagir en demandant la mainlevée de la mesure ou la substitution d’une autre mesure.

 

4) Les incidents de la mesure conservatoire

Avant la réforme, 3 types d’incidents pouvaient survenir: la mainlevée totale ou partielle, la réduction ou le cantonnement de la mesure moyennant consignation et le concours de plusieurs saisies conservatoires. Aujourd’hui, il peut uniquement y avoir un concours de saisies conservatoires sur les biens meubles corporels du débiteur, dès lors, cet incident devient un incident spécifique à la saisie conservatoire des biens meubles corporels (cf. infra).

Stricto sensu, il existe 2 types d’incidents communs: la mainlevée et la substitution d’une autre mesure propre à conserver les intérêts des parties.

 

A) La mainlevée de la mesure conservatoire

« Même lorsqu’une autorisation préalable n’est pas requise, le juge peut, à tout moment, au vu des éléments qui sont fournis par le débiteur, le créancier entendu ou appelé, donner mainlevée de la mesure conservatoire s’il apparaît que les conditions prescrites par l’article 67 [cf. supra.] ne sont pas réunies. » (L91 Article 72 al.1)

 

1) Les conditions de la mainlevée

En principe, seul le débiteur peut demander la mainlevée de la mesure conservatoire et ce pendant toute sa durée i.e. jusqu’à son issue. Ainsi, le débiteur peut demander la mainlevée même dans les cas où il y a dispense d’autorisation judiciaire et alors le juge opère contrôle a posteriori des conditions de la mesure.

 

La mesure conservatoire peut être levée si ses conditions (L91 Article 67 et D92 Article 210 et suivants.) ne sont pas respectées i.e. si la créance n’est pas fondée dans son principe ou si la mesure est prise sur des biens n’appartenant pas au débiteur ou s’il n’existe aucune menace pour le recouvrement de la créance.

 

La mainlevée est obligatoire si le débiteur fournit une caution bancaire irrévocable conforme à la mesure exécutée.

 

2) La procédure de mainlevée

a) La compétence d’attribution

Principe: le JEX qui a ordonné la mesure est compétent pour statuer sur la mainlevée.

Exception: si la mesure porte sur une créance relevant de la compétence des juridictions commerciales, le Président  du Tribunal de Commerce est compétent.

 

b) La compétence territoriale

Il faut distinguer selon que la mesure a été prise avec ou sans autorisation judiciaire.

 

Si la mesure a été prise avec autorisation judiciaire: la demande est présentée devant le juge qui a accordé l’autorisation. Ainsi, si la décision du JEX est affirmée en appel, la demande de mainlevée doit être introduite devant la Cour d’appel qui s’est substituée au premier juge pour délivrer l’ordonnance.

 

Si la mesure a été prise en l’absence d’autorisation judiciaire: le JEX du lieu du domicile du débiteur est compétent.

 

3) Les effets de la mainlevée

La mainlevée peut être partielle ou totale mais elle est nécessairement pure et simple i.e. il ne peut être demandée aucune garantie de paiement au débiteur.

Pour éviter des mesures conservatoires abusives, « lorsque la mainlevée a été ordonnée par le juge, le créancier peut être condamné à réparer le préjudice causé par la mesure conservatoire » (L91 Article 73 al.2).

 

B) La substitution d’une autre mesure propre à sauvegarder les intérêts des parties

v « A la demande du débiteur, le juge peut, le créancier entendu ou appelé, substituer à la mesure conservatoire initialement prise toute autre mesure propre à sauvegarder les intérêts des parties » (L91 Article 72 al.2) et notamment les intérêts du créancier. Cet incident ne peut être soulevé que par le débiteur. Il remplace l’ancien incident de réduction ou de cantonnement moyennant consignation.

 

Aucune limite n’est posée quant aux mesures pouvant se substituer à la mesure conservatoire: il peut s’agir d’une autre mesure conservatoire ou d’une sûreté (ex: cautionnement bancaire) et dans ce cas, la mainlevée de la conservatoire est automatique si le débiteur fourni un cautionnement bancaire irrévocable.

 

Les règles de compétence propre à cet incident sont identiques à celles relatives à la mainlevée.

 

Section 3: Les frais de la mesure conservatoire

En principe, les frais de la mesure conservatoire sont à la charge du débiteur sauf décision contraire du juge.

 

 

Chapitre 2: Les différentes mesures conservatoires

 

« La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant au débiteur. » (L91 Article 74). Ainsi, à côté de la saisie conservatoire des créances (Section 1) et de la saisie conservatoire des biens corporels (Section 2), existent des saisies conservatoires spécifiques (Section 3).

 

Section 1: La saisie conservatoire des biens meubles incorporels (créances)

La saisie conservatoire des créances est la mesure conservatoire la plus simple et la plus courante car les sommes d’argents sont une richesse courante. Toutes les créances ne peuvent faire l’objet d’une telle saisie, les rémunérations du travail font l’objet d’un régime dérogatoire qui ne prévoit aucune saisie conservatoire.

 

1) Les opérations de saisie

Le déroulement des opérations de saisie (A) emporte certains effets (B).

 

A) Le déroulement des opérations de saisies

En raison même de la présence d’un tiers, il existe 3 étapes: la saisie débute par un acte de saisie (1) qui est ensuite dénoncé au débiteur (2) et qui peut éventuellement donner lieu à la nomination d’un séquestre (3) (D92 Article 234 à 239).

 

1) L’acte de saisie

La saisie doit être pratiquée dans les 3 mois de l’autorisation à peine de caducité de celle-ci (D92 Article 214 cf. supra.).

« Le créancier procède à la saisie au moyen d’un acte d’huissier de justice signifié au tiers » (D92 Article 234 al.1). La signification de l’acte de saisie se fait souvent dans l’acte de saisie. D92 Article 234 « Cet acte contient, à peine de nullité :

  • 1° L’énonciation des nom et domicile du débiteur ou, s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et son siège social ;
  • 2° L’indication de l’autorisation ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ;
  • 3° Le décompte des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée ;
  • 4° La défense faite au tiers de disposer des sommes réclamées dans la limite de ce qu’il doit au débiteur ;
  • 5° La reproduction de » L91 Article 29 al.3 (interruption de la prescription) et 44 (obligations incombant au tiers saisi suite à l’acte de saisie).

 

Le tiers saisi est tenu d’indiquer à l’huissier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur, les modalités qui les affecte et de lui remettre toutes les pièces justificatives en sa possession (D92 Article 237). Ces renseignements sont relatés dans l’acte de saisie.

« Le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus, s’expose à devoir payer [les causes de la saisie i.e.] les sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée si le débiteur est condamné [(le créancier obtiendra alors un recouvrement total de sa créance)] et sauf son recours contre ce dernier. [al.2] Il peut aussi être condamné à des dommages-intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère. » (D92 Article 238)

 

2) La dénonciation de la saisie au débiteur

« Dans un délai de 8 jours, à peine de caducité, la saisie conservatoire est portée à la connaissance du débiteur par acte d’huissier de justice » (D92 Article 236 al.1)

D92 Article 236 « Cet acte contient, à peine de nullité :

  •  1° Une copie de l’autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie a été pratiquée ; […]
  •  2° Une copie [de l’acte] de saisie ;
  •  3° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, den demander la mainlevée au JEX du lieu de son domicile ;
  •  4° La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations, notamment celles relatives à l’exécution de la saisie ;
  •  5° La reproduction des articles 210 à 219 [(relatifs aux conditions de validité de la saisie conservatoire)];
  •  6° [depuis le 1er déc. 2002] L’indication, en cas de saisie de compte, que le titulaire du compte peut demander au tiers saisi [(le banquier)], dans les 15 jours suivant la saisie, la mise à disposition d’une somme d’un montant au plus égal au RMI pour un allocataire, dans la limite du solde créditeur du compte au jour de la réception de la demande. »

 

3) La nomination d’un séquestre

« Tout intéressé [, y compris le tiers saisi,] peut demander que les sommes saisies soient consignées entre les mains d’un séquestre désigné, à défaut d’accord amiable, sur requête par le JEX » (D92 Article 235 al.1), le tiers est alors déchargé de toute obligation relative à la saisie.

« La remise des fonds au séquestre arrête le cours des intérêts dus par le tiers saisi » (D92 Article 235 al.2).

 

B) Les effets de la saisie conservatoire des créances

La saisie conservatoire des créances tend à rendre les biens saisis indisponibles (L91 Article 74 al.1 in fine), la créance est en quelque sorte gelée, elle ne peut plus faire l’objet d’une opération juridique pendant la durée de la saisie. Mais si la saisie est pratiquée sur un compte bancaire, l’indisponibilité ne frappe que les sommes saisies et non le compte lui-même qui a donc vocation à continuer de fonctionner, le compte n’est donc pas bloqué, les sommes sont simplement mises sur un compte bloqué séparé.

La créance étant dans les mains d’un tiers, il n’y a pas, au regard de la saisie de biens meubles incorporels, de délit de détournement d’objet saisi puisque ce délit suppose que le débiteur ait la garde de la chose saisie.

Avant la réforme, la saisie conservatoire rendait la créance totalement indisponible ce qui présentait des inconvénients pour le débiteur puisque son crédit était bloqué lorsque la saisie était pratiquée pour une somme supérieure à la créance invoquée. De plus, le créancier risquait un concours avec d’autres créanciers. La réforme a donc innové en limitant le montant de l’indisponibilité au montant de la créance du saisissant (1) et en prévoyant une consignation de plein droit des sommes saisies (2).

 

1) La limitation de l’indisponibilité au montant de la créance du saisissant

« Lorsque la saisie porte sur une créance ayant pour objet une somme d’argent, l’acte de saisie la rend indisponible à concurrence du montant autorisé par le juge ou, lorsque cette autorisation n’est pas nécessaire, à concurrence du montant pour lequel la saisie est pratiquée » (L91 Article 75 al.1). Il y a ainsi un cantonnement automatique qui se produit sans que le débiteur ait besoin de le demander: le débiteur concerne la libre disposition de la fraction de la créance sur le tiers qui excède le montant de sa propre dette envers le saisissant.

ex: un créancier de 1.000 saisit à titre conservatoire une créance de 5.000 du débiteur, l’insaisissabilité est cantonnée à 1.000 euros, le débiteur peut donc disposer de 4.000.

 

2) La consignation de plein droit des sommes indisponibles

L’indisponibilité partielle du fait du cantonnement ne suffit pas à elle seule à protéger les intérêts du créancier saisissant puisqu’il risque toujours de ne toucher qu’une faible partie de sa créance si d’autres créanciers du débiteur pratiquent eux aussi une saisie. Ainsi, « la saisie emporte de plein droit consignation des sommes indisponibles et produit les effets prévus à l’article 2075-1 du code civil [article abrogé par la réforme des sûretés] » (L91 Article 75 al.1 in fine).

Normalement, le tiers saisi consigne cette somme sans que le juge ait à intervenir. Le visa du Code civil permet de prévoir que cette somme est spécialement affectée au paiement de la créance du créancier. Le créancier se trouve donc dans une situation confortable puisque la somme consignée est affectée au créancier par privilège et préférence, le risque de concours avec d’autres créanciers est ainsi pratiquement exclu. En réalité, le créancier ne devrait subir que les limites du droit de préférence d’un créancier nanti i.e. il devrait être primé par le privilège du Trésor et par le privilège pour frais de conservation de la chose.

La consignation des sommes fait cesser les intérêts.

 

2) Les issues de la saisie conservatoire des créances

Si le débiteur s’exécute volontairement: le créancier ayant obtenu satisfaction, il y a mainlevée amiable ou judiciaire de la saisie conservatoire.

Si le débiteur ne s’exécute pas: la situation du créancier diffère selon qu’il est muni ou non d’un titre exécutoire:

  •  si le créancier a un titre exécutoire: il peut directement demander le paiement de la créance consignée, il s’agit d’une mesure d’exécution (A).
  •  si le créancier n’a pas de titre exécutoire: il doit convertir la saisie conservatoire en une saisie-attribution, mesure d’exécution correspondante pour les meubles incorporels (B)

 

A) La possibilité pour le créancier muni d’un titre exécutoire de demander le paiement de sa créance

« Si la saisie conservatoire porte sur une créance, le créancier, muni d’un titre exécutoire, peut en demander le paiement. Cette demande emporte attribution immédiate de la créance saisie jusqu’à concurrence du montant de la condamnation et des sommes dont le tiers saisi s’est reconnu ou a été déclaré débiteur » (L91 Article 76 al.2). Le créancier peut donc obtenir au final en paiement le montant de la créance consignée.

Le titre exécutoire peut préexister à la procédure de saisie conservatoire mais peut aussi être obtenu au cours de la procédure qui doit obligatoirement être introduite ou poursuivie dans le mois qui suit l’exécution de la saisie conservatoire (cf. supra.).

La possibilité d’attribution est une innovation de la réforme de 1991. Jusqu’à la réforme du droit des sûretés (ordonnance du 23 mars 2006), l’attribution devait nécessairement être judiciaire puisque tout pacte commissoire était nul. Dorénavant, un pacte commissoire peut être conclu. Ainsi, le créancier aura le même bénéfice qu’il agisse suite à une mesure conservatoire en étant titulaire d’un titre exécutoire ou si sa sûreté contient un pacte commissoire: la créance lui sera attribuée en paiement.

 

B) La conversion en saisie-attribution

« Le créancier qui a obtenu ou possède un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la vente des biens qui ont été rendus indisponibles jusqu’à concurrence du montant de sa créance » (L91 Article 76). Ainsi, le créancier qui n’a pas de titre exécutoire, peut, après obtention de ce titre (c’est à dire après, le cas échant, introduction d’une instance au fond dans le délai d’un mois à compter de l’exécution de la saisie conservatoire) convertir sa saisie conservatoire en saisie-attribution.

 

1) Les modalités de la conversion

D92 Article 240 « Le créancier qui obtient un titre exécutoire […] signifie au tiers saisi un acte de conversion qui contient, à peine de nullité:

  • 1° La référence au procès-verbal de saisie conservatoire ;
  • 2° L’énonciation du titre exécutoire ;
  • 3° Le décompte distinct des sommes dues en vertu du titre exécutoire, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
  • 4° Une demande de paiement des sommes précédemment indiquées à concurrence de [la dette du tiers] celles dont le tiers s’est reconnu ou a été déclaré débiteur.

L’acte informe le tiers que, dans cette limite, la demande entraîne attribution immédiate de la créance saisie au profit du créancier. »

 

« La copie de l’acte de conversion est signifiée au débiteur. » (D92 Article 241) « A compter de cette signification, le débiteur dispose d’un délai de 15 jours pour contester l’acte de conversion devant le JEX du lieu où il demeure. » (D92 Article 242 al.1) Depuis le 1er mars 2006, si le débiteur conteste la conversion, il doit dénoncer la contestation le même jour par LRAR à l’huissier qui a procédé à la saisie et en informer le tiers par lettre simple (D92 Article 242 al.2 et 3).

 

v « En l’absence de contestation, le tiers saisi procède au paiement sur la présentation d’un certificat délivré par le greffe ou établi par l’huissier de justice qui a procédé à la saisie attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans les quinze jours suivant la dénonciation de l’acte de conversion » (D92 Article 242 al.4).

« Le paiement peut intervenir avant l’expiration de ce délai si le débiteur a déclaré [par écrit] ne pas contester l’acte de conversion » (D92 Article 242 al.5).

 

2) Les effets de la conversion

La conversion a pour effet principal l’attribution immédiate de la créance au profit du créancier saisissant.

La conversion est donc une cession forcée de la créance et le créancier pourra vaincre l’éventuelle résistance du tiers saisi. En effet, le créancier pourra, le cas échéant, obtenir contre le tiers saisi un titre exécutoire et muni de celui-ci, il pourra pratiquer une saisie-attribution i.e. une véritable mesure d’exécution contre le tiers saisi ce qui aura pour effet de le contraindre au paiement de la créance.

Si le tiers paye volontairement, une quittance lui est délivrée par le créancier pour qu’il puisse justifier du paiement et ne pas payer une seconde fois.

Le paiement éteint l’obligation du débiteur et celle du tiers dans la limite des sommes versées.

 

Section 2: La saisie conservatoire des biens meubles corporels

La saisie conservatoire peut porter sur des biens meubles corporels appartenant au débiteur, elle permet ensuite au créancier de pratiquer, le cas échéant, la mesure d’exécution correspondante: la saisie-vente. Toutefois, la loi ne confère ni droit de gage ni droit de préférence au premier créancier qui pratique une saisie conservatoire sur les meubles corporel. Cette saisie conservatoire n’a donc d’intérêt que si elle est convertie très rapidement en une mesure d’exécution i.e. en une saisie-vente. Cependant, elle peut toujours être utilisée comme une simple mesure d’intimidation.

 

1) Le domaine de la saisie conservatoire des biens meubles corporels

La saisie conservatoire des biens meubles corporels peut être pratiquée sur tous les meubles corporels: meubles meublants, marchandises, animaux, machines et véhicules. Certaines juridictions avaient même admis, avant la réforme, la saisie conservatoire d’une prothèse dentaire.

Immeubles (non): les immeubles en sont exclus des saisies conservatoires car ils ne peuvent faire l’objet que d’une mesure conservatoire particulière: l’hypothèque judiciaire conservatoire.

 

Immeubles par destination (non): au regard du droit des biens, les immeubles par destination ont en principe une nature mobilière et peuvent donc faire l’objet d’une saisie conservatoire mais ils deviennent immeubles s’ils sont rattachés à un immeuble par nature au service duquel ils sont affectés (Code Civil Article 524) ou s’ils sont attachés à perpétuelle demeure (Code Civil Article 525) et alors, perdant leur nature mobilière, ils relèvent de la saisie immobilière et non de la saisie conservatoire des biens meubles corporels.

Exception: les meubles devenus immeubles par destination peuvent être saisis indépendamment pour le paiement de leur prix.

 

Meubles par anticipation (oui): les récoltes sur pied sont considérées comme des meubles par anticipation dans les 6 dernières semaines précédant la période normale de maturité, elles peuvent donc faire l’objet d’une saisie conservatoire de biens meubles incorporels dans ces 6 dernières semaines.

 

Monnaie (non): aucune disposition n’interdit de pratiquer une saisie conservatoire sur des espèces sonnantes et trébuchantes mais cette saisie semble exclue car la saisie conservatoire doit pouvoir être convertie dans une saisie-vente or la monnaie ne peut être vendue à un cours supérieur ou inférieur à sa valeur faciale, dès lors si une saisie conservatoire est pratiquée sur de la monnaie, il sera impossible de la convertir en une saisie-vente puisque la monnaie ne peut être vendue. Donc, en principe, il est impossible de pratiquer une saisie conservatoire sur de la monnaie.

 

2) Les opérations de saisie

Le déroulement des opérations de saisie (A) va produire certains effets (B).

A) Le déroulement des opérations de saisie

Il faut distinguer selon que le bien est en la possession du débiteur (1) ou se trouve dans les mains d’un tiers (2).

 

1) Les opérations de saisie des biens en la possession du débiteur

Les opérations de saisie passent par l’établissement d’un acte de saisie qui est ensuite notifié au débiteur.

 

a) L’acte de saisie

Sans commandement de payer préalable et titre exécutoire, l’huissier de justice ne peut pas, en principe, pénétrer dans l’habitation du débiteur pour pratiquer directement une saisie conservatoire. Cependant, le principe de l’inviolabilité du domicile du débiteur peut être transgressé dès lors que la mesure est précédée d’une autorisation préalable. Ainsi, avant de pratiquer la saisie, l’huissier doit présenter soit l’autorisation judiciaire préalable soit le titre exécutoire (qui dispense de l’autorisation). La saisie doit être pratiquée dans les 3 mois de l’autorisation à peine de caducité de celle-ci (D92 Article 214 cf. supra.).

 

v « Après avoir rappelé au débiteur qu’il est tenu de lui indiquer les biens qui auraient fait l’objet d’une saisie antérieure et de lui en communiquer le procès-verbal, l’huissier de justice dresse un acte de saisie » (ancien PV de saisie avant la réforme) (D92 Article 221 al.1) D92 Article 221 al.2 et suivants.

« Cet acte contient, à peine de nullité :

  •  1° La mention de l’autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ; ces documents sont annexés à l’acte ; […]
  •  2° La désignation détaillée des biens saisis [, le cas échéant avec des photographies en annexe de l’acte (D92 Article 221 al.11 et Article 90). Si aucun bien n’est saisissable ou si les biens n’ont aucune valeur marchande, l’huissier dresse un procès verbal de carence (D92 Article 92)] ;
  •  3° Si le débiteur est présent, sa déclaration au sujet d’une éventuelle saisie antérieure sur les mêmes biens ;
  •  4° La mention, en caractères très apparents, que les biens saisis sont indisponibles, qu’ils sont placés sous la garde du débiteur, qu’ils ne peuvent être ni aliénés, ni déplacés, si ce n’est [si une cause légitime rend leur déplacement nécessaire et avec information préalable au créancier avec indication du lieu de déplacement (D92 Article 91 al.2) ex: déménagement du débiteur], sous peine des sanctions [pénales de détournement d’objet saisi (CP Article 314-6)] […], et que le débiteur est tenu de faire connaître la présente saisie à tout créancier qui procéderait à une nouvelle saisie sur les mêmes biens ;
  •  5° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, den demander la mainlevée au JEX du lieu de son domicile ;
  •  6° La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations, notamment celles relatives à l’exécution de la saisie ;
  •  7° L’indication, le cas échéant, des nom, prénom et qualité des personnes qui ont assisté aux opérations de saisie, lesquelles doivent apposer leur signature sur l’original et les copies ; en cas de refus, il en est fait mention dans l’acte ;
  •  8° La reproduction de«  CP Article 314-6 (détournement d’objet saisi) et de D92 Article 210 à 219 (conditions de validité de la saisie conservatoire).

 

v Ces mentions tendent à assurer la protection du débiteur et à sauvegarder ses droits, c’est pourquoi elles sont exigées à peine de nullité. S’agissant d’une nullité de forme, la nullité de l’acte de saisie est subordonnée à la preuve d’un grief et ce même si la formalité omise est une formalité substantielle.

 

b) La notification de l’acte de saisie au débiteur

« Si le débiteur est présent aux opérations de saisie, l’huissier de justice lui rappelle verbalement le contenu des mentions des 4° et 5° de l’article 221 [(effets de la saisie et droits ouverts au débiteur)]. Une copie de l’acte portant les mêmes signatures que l’original lui est immédiatement remise ; cette remise vaut signification » (D92 Article 222 al.1).

 

« Lorsque le débiteur n’a pas assisté aux opérations de saisie, une copie de l’acte lui est signifiée [à personne ou à domicile selon les règles classiques de signification des actes de procédure], en lui impartissant un délai de 8 jours pour qu’il porte à la connaissance de l’huissier de justice toute information relative à l’existence d’une éventuelle saisie antérieure et qu’il lui en communique le procès-verbal » (D92 Article 222 al.2).

 

2) Les opérations de saisie des biens entre les mains d’un tiers

Les opérations de saisie débutent par la présentation de l’autorisation judiciaire préalable ou du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée.

 

L’acte de saisie (ancien PV de saisie) comprend les mêmes mentions qu’en cas de saisie des biens entre les mains du débiteur.

 

La saisie est pratiquée sans que le débiteur n’en soit informé, une étape supplémentaire s’impose donc:

D92 Article 224 « L’acte de saisie est signifié au débiteur dans un délai de 8 jours. Il contient en outre, à peine de nullité :

  •  1° Une copie de l’autorisation du juge ou du titre, selon le cas, en vertu duquel la saisie a été pratiquée ;
  •  2° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, d’en demander la nullité au JEX du lieu de son propre domicile ;
  •  3° La reproduction des articles 210 à 219 [(conditions de validité des mesures conservatoires)] ».

Ces mentions sont importantes car ce sera le débiteur qui contestera la saisie et non le tiers.

 

B) Les effets de la saisie conservatoire des biens meubles corporels

La saisie conservatoire rend indisponibles les biens saisis, ils sont placés sous main de justice (L91 Article 74 in fine, D92 Article 91 al.1). Ainsi, les biens saisis ne peuvent plus faire l’objet d’une quelconque opération juridique ou encore d’un déplacement matériel sauf cause légitime et si le créancier en est préalablement informé et que lui est indiqué le lieu de déplacement (D92 Article 91 al.2), sous peine sanctions pénales de détournement d’objets saisis (CP Article 314-6).

 

Efficacité de l’indisponibilité: l’indisponibilité des biens peut être gênante pour le débiteur notamment lorsqu’il est un commerçant et que la saisie porte sur des marchandises destinées à la vente. De plus, contrairement à la saisie conservatoire des créances, il n’y a aucun dispositif de plafonnement automatique de l’indisponibilité car il est impossible d’évaluer la valeur exacte des biens saisis. La saisie conservatoire des biens meubles corporels est donc un moyen de pression efficace mis à la disposition du créancier.

 

Mesures particulières assurant le respect de l’indisponibilité:

  •  « Le JEX peut ordonner sur requête, à tout moment, même avant le début des opérations de saisie, la remise d’un ou plusieurs objets à un séquestre qu’il désigne » (D92 Article 97 al.2).
  •  « En outre, si parmi les biens saisis se trouve un VTM, celui-ci peut être immobilisé jusqu’à son enlèvement en vue de la vente par l’un des procédés prévus [cf.infra] » (D92 Article 97 al.3).

L’indisponibilité des biens saisis ne protège pas totalement le créancier: si malgré la saisie le débiteur vend les biens, le créancier n’est pas certain de pouvoir les récupérer car si la vente est inopposable au créancier, le tiers acquéreur de bonne foi (présumée) peut lui opposer qu’« en fait de meubles, possession vaut titre » (Code Civil Article 2279).

 

Sanctions: les sanctions pénales du délit de détournement des biens saisis dissuadent le débiteur de les aliéner ou de les déplacer (CP Article 314-6).

 

3) Les issues de la saisie conservatoire des biens meubles corporels

Si le débiteur s’exécute volontairement: le créancier a obtenu satisfaction, il y a mainlevée amiable ou judiciaire de la saisie conservatoire.

Si le débiteur ne s’exécute pas: le créancier peut convertir la saisie conservatoire en une saisie-vente, mesure d’exécution existant pour cette catégorie de bien.

 

A) Les modalités de la conversion en saisie-vente

Le créancier qui n’a pas de titre exécutoire lorsqu’il pratique la saisie conservatoire doit, à peine de caducité de celle-ci, introduire dans le délai d’un mois une procédure pour obtenir le titre qui lui fait défaut (D92 Article 215, L91 Article 70). La conversion de la saisie conservatoire en saisie-vente se fait au titre d’une instance au fond et non plus d’une instance en validité comme c’était le cas avant la réforme. La conversion débute par un acte de conversion (1), suivi d’une vérification des biens saisis (2) et le cas échéant d’une notification au tiers lorsque le bien n’est pas en la possession du débiteur (3).

 

1) L’acte de conversion

D92 Article 226 « Le créancier qui obtient un titre exécutoire […] signifie [par huissier] au débiteur un acte de conversion qui contient, à peine de nullité :

  •  1° La référence [à l’acte] de saisie conservatoire ;
  •  2° L’énonciation du titre exécutoire ;
  •  3° Le décompte distinct des sommes à payer, en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
  •  4° Un commandement d’avoir à payer cette somme dans un délai de 8 jours, faute de quoi il sera procédé à la vente des biens saisis.

La conversion peut être signifiée dans le même acte que le jugement. »

 

2) La vérification des biens saisis

v « A l’expiration d’un délai de 8 jours à compter de la date de l’acte de conversion [si le débiteur ne s’exécute pas], l’huissier de justice procède à la vérification des biens saisis. Il est dressé acte des biens manquants ou dégradés » (D92 Article 227 al.1), en effet, le débiteur est gardien des biens, il ne doit donc pas les dégrader.

« Dans cet acte, il est donné connaissance au débiteur qu’il dispose d’un délai d’un mois pour vendre à l’amiable les biens saisis dans les conditions prescrites aux articles 107 à 109 qui sont reproduits » (D92 Article 227 al.2).

v « A défaut de vente amiable dans le délai prévu, il est procédé à la vente forcée des biens saisis » (D92 Article 229) (vente aux enchères) comme en matière de saisie-vente (cf. infra.). La vente des biens saisis n’a lieu qu’à concurrence du montant de la créance du créancier.

 

3) Les notifications en cas de saisie dans les mains d’un tiers

Lorsque la saisie conservatoire est pratiquée dans les mains d’un tiers, 2 notifications supplémentaires doivent intervenir:

  •  « le créancier signifie [au tiers] une copie des actes attestant les diligences requises par l’article 215 [pour obtenir un titre exécutoire], dans un délai de 8 jours à compter de leur date. A défaut, la mesure conservatoire est caduque. » (D92 Article 216)
  •  « une copie de l’acte de conversion est dénoncée [au tiers] » (D92 Article 226 al.7) même si aucun délai n’est prévu par les textes, la dénonciation doit intervenir avant l’enlèvement des objets saisis en vue de leur vente.

 

B) Les effets de la conversion en saisie-vente

« A défaut de vente amiable dans le délai prévu, il est procédé à la vente forcée [(vente aux enchères)] des biens saisis » (D92 Article 229) selon les modalités de la saisie-vente (cf. infra. saisie-vente Partie 3). Le prix obtenu est réparti entre les créanciers conformément aux procédures de distribution (cf. Partie 4).

 

4) Le concours de saisies conservatoires de biens meubles corporels

Ce concours est spécifiques à la saisie conservatoires des biens meubles corporels (car dans les saisies de biens meubles incorporels, l’indisponibilité est totale cf. surpa.)

« L’huissier de justice qui procède à une saisie conservatoire sur des biens rendus indisponibles par une ou plusieurs saisies conservatoires antérieures signifie une copie [de l’acte de saisie ou de conversion] à chacun des créanciers dont les diligences sont antérieures aux siennes » (D92 Article 230 et 231).

Si le débiteur ne vend pas les biens saisis à l’amiable: il est procédé à la vente forcée conformément aux règles applicables en matière de saisie-vente et le prix obtenu est distribué entre les différents créanciers (cf. Partie 4).

 

Si le débiteur présente des propositions de vente amiable: il transmet ces propositions au créancier saisissant

  •  si le créancier saisissant refuse les propositions: il est procédé à la vente forcée aux enchères publiques et à la répartition du prix.
  •  si le créancier saisissant accepte les propositions: il « en communique la teneur, par LRAR, aux créanciers qui ont saisi les mêmes biens à titre conservatoire » (D92 Article 232 al.1). « Chaque créancier doit, dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la lettre, prendre parti sur les propositions de vente amiable et faire connaître au créancier saisissant la nature et le montant de sa créance » (D92 Article 232 al.2)
  •  si les autres créanciers acceptent les propositions: la vente amiable est réalisée conformément à ces propositions et le prix obtenu est réparti entre les créanciers au marc le franc i.e. par tête. « A défaut de réponse dans le délai imparti, le créancier est réputé avoir accepté les propositions de vente« (D92 Article 232 al.3).
  •  si un des créanciers refuse les propositions: il y a vente forcée et distribution du prix entre les créanciers (cf. partie 4). « Le créancier saisissant qui fait procéder à l’enlèvement des biens en vue de leur vente forcée doit en informer, par LRAR, [les autres créanciers i.e.] les créanciers qui ont pratiqué une saisie conservatoire sur les mêmes biens avant l’acte de saisie ou l’acte de conversion, selon le cas. A peine de nullité, cette lettre indique le nom et l’adresse de l’officier ministériel chargé de la vente et reproduit en caractères très apparents l’alinéa qui suit » (D92 Article 233 al.1) « Chaque créancier doit, dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la lettre, faire connaître à l’officier ministériel chargé de la vente, la nature et le montant de sa créance au jour de l’enlèvement. A défaut de réponse dans le délai imparti, il perd le droit de concourir à la distribution des deniers résultant de la vente forcée, sauf à faire valoir ses droits sur un solde éventuel après répartition » (D92 Article 233 al.2).

 

Section 3: Les saisies conservatoires spécifiques

Les saisies conservatoires spécifiques portent soit sur des biens meubles corporels (1) soit sur des biens incorporels tels que les droits d’associé et les valeurs mobilières (2).

 

1) Les saisies conservatoires spécifiques sur les biens meubles corporels

Les spécificités de la saisie conservatoire peuvent tenir à la nature des biens saisis (navires et aéronefs relevant respectivement du droit maritime et du droit aérien), au lieu où sont placés les biens à saisir (coffre-fort) (A) ou à la nature de la créance cause de la saisie (qui justifie la saisie conservatoire). En effet, le créancier peut pratiquer une saisie conservatoire particulière: la saisie-revendication, en se fondant sur son droit, au moins apparent, d’obtenir la délivrance ou la restitution d’un bien corporel (B).

 

A) La saisie conservatoire des biens placés dans un coffre-fort

Pour l’essentiel, la saisie conservatoires des biens meubles corporels placés dans un coffre-fort reprend les règles saisies conservatoires des biens meubles corporel (D92 Article 278) mais présente des particularités car les biens se situent dans un coffre-fort (D92 Article 266, 267 et 278 à 282).

 

1) Les opérations de saisie conservatoire des biens placés dans un coffre-fort

a) Le déroulement des opérations de saisie

La saisie doit être pratiquée dans les 3 mois de l’autorisation à peine de caducité de celle-ci (D92 Article 214 cf. supra.).

L’acte de saisie: « la saisie des biens placés dans un coffre-fort appartenant à un tiers s’effectue par acte d’huissier de justice signifié à ce tiers » (D92 Article 266 al.1).

A ce stade, la saisie est réalisée, sans même l’ouverture du coffre. D92 Article 266 al.2″Cet acte contient, à peine de nullité :

  • 1° Les nom et domicile du débiteur et, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
  • 2° La référence au titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ;
  • 3° Une injonction d’interdire tout accès au coffre, si ce n’est en présence de l’huissier de justice.

Le tiers est tenu de fournir à l’huissier de justice l’identification de ce coffre. Il en est fait mention dans l’acte. »

 

La signification de l’acte de saisie: D92 Article 279 « Un acte d’huissier de justice est signifié au débiteur le premier jour ouvrable suivant l’acte de saisie […].

Cet acte contient, à peine de nullité :

  •  1° La dénonciation de l’acte de saisie ;
  •  2° La mention de l’autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ; ces documents sont annexés à l’acte ; […]
  •  3° L’indication que l’accès au coffre lui est interdit, si ce n’est, sur sa demande, en présence de l’huissier de justice ;
  •  4° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, den demander la mainlevée au JEX du lieu de son domicile ;
  •  5° La reproduction des articles 210 à 219 [(conditions de validité de la saisie conservatoire)]. »

 

b) Les effets de la saisie des biens placés dans un coffre-fort

« Toute saisie interdit l’accès au coffre sans la présence de l’huissier de justice. Celui-ci peut apposer des scellés sur le coffre » (D92 Article 267).

S’agissant d’une mesure conservatoire qui tend donc uniquement à conserver les objets présents dans le coffre, il n’est pas nécessaire d’ouvrir le coffre puisque le débiteur ne risque plus de dilapider les biens du fait de l’indisponibilité et de l’interdiction d’accès au coffre.

 

Le coffre peut être ouvert dans 2 cas:

  •  l’ouverture du coffre à la demande du débiteur: « A tout moment, le débiteur peut demander l’ouverture du coffre en présence de l’huissier de justice » (D92 Article 280 al.1) notamment pour pouvoir récupérer des biens insaisissables dont il a encore la libre disposition. L’huissier « procède alors à l’inventaire détaillé des biens qui sont saisis à titre conservatoire […] [il ne mentionne pas les biens insaisissable qui y figure]. Ces biens sont immédiatement enlevés pour être placés sous la garde de l’huissier de justice ou d’un séquestre désigné, à défaut d’accord amiable, sur requête par le JEX du lieu de la saisie. Le cas échéant, l’huissier de justice peut photographier les objets retirés du coffre, dans les conditions prescrites par l’article 90. » (D92 Article 280 al.2)

« Une copie de l’acte de saisie est remise [au débiteur présent] ou signifiée au débiteur [absent], avec la désignation, à peine de nullité, du JEX du lieu de la saisie devant lequel seront portées les contestations relatives aux opérations de saisie » (D92 Article 280 al.3)

  •  l’ouverture du coffre suite à la résiliation du contrat de bail: la résiliation du bail peut intervenir du chef de la banque (qui se méfie d’un locataire devenu insolvable) mais aussi du débiteur qui peut ne plus avoir intérêt à conserver un coffre auquel il ne peut avoir accès. « En cas de résiliation du contrat de location du coffre, le propriétaire de celui-ci en informe immédiatement l’huissier de justice » (D92 Article 281 al.1). L’huissier « signifie au débiteur une sommation d’être présent aux lieu, jour et heure indiqués, en personne ou par tout mandataire, pour qu’il soit procédé à l’ouverture du coffre, avec l’avertissement que, en cas d’absence ou de refus d’ouverture, elle aura lieu par la force et à ses frais. L’ouverture du coffre ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification de la sommation, sauf au débiteur à demander que cette ouverture ait lieu à une date plus rapprochée » (D92 Article 281 al.2).

 

2) Les issues de la saisie conservatoire des biens placés dans un coffre-fort

Si le débiteur s’exécute volontairement: il y mainlevée amiable ou judiciaire. Le débiteur retrouve la libre disposition de son coffre.

 

Si le débiteur ne s’exécute pas: le créancier doit engager une procédure pour obtenir le titre exécutoire nécessaire à la conversion de la saisie conservatoire en saisie-vente (exécution d’une obligation pécuniaire) ou pour pratiquer une saisie-appréhension permettant d’obtenir la délivrance ou la restitution de la chose saisie (exécution d’une obligation de faire).

 

B) La saisie-revendication

La nouvelle saisie-revendication (issue de la réforme, D92 Article 155 à 163) est une forme particulière de saisie conservatoire préparatoire à une saisie-appréhension. En effet, le créancier qui veut pratiquer une saisie-appréhension (mesure d’exécution forcée en nature) peut, en attendant que cette saisie soit pratiquée, rendre immédiatement indisponibles les biens à livrer ou à restituer par une saisie revendication. Mais la saisie-revendication n’est pas un préalable obligatoire à la saisie-appréhension (la mesure d’exécution correspondante). La saisie revendication est ainsi une précaution supplémentaire prise par le créancier.

En pratique, le créancier utilise le plus souvent la procédure d’injonction de délivrer ou de restituer car il est plus simple, plus rapide et moins onéreux de solliciter du juge une ordonnance d’injonction pour procéder immédiatement à une saisie-appréhension. Cependant, même dans ce cas, la saisie-revendication conserve un intérêt notamment en cas d’opposition de la personne qui doit remettre la chose (i.e. du débiteur) car en attendant le résultat de l’instance au fond, le créancier a intérêt à pratiquer une saisie revendication. En plus, en cas d’opposition, la jurisprudence estime que l’ordonnance d’injonction dispense le créancier de la nécessité d’obtenir une autorisation judiciaire préalable.

 

1) Le domaine de la saisie-revendication

« Toute personne apparemment fondée à requérir la délivrance ou la restitution d’un bien meuble corporel peut, en attendant sa remise, le rendre indisponible au moyen d’une saisie-revendication » (D92 Article 155 al.1). Cette saisie ne concerne pas les immeubles.

ex: certains membres d’une famille peuvent l’utiliser pour s’opposer à l’aliénation de souvenirs de famille dont d’autres membres proposent une vente publique.

La revendication et donc la saisie-revendication d’un bien meuble corporel n’est possible qu’à partir du moment où la règle « en fait de meubles, la possession vaut titre » (Article 2279) ne s’applique pas:

  •  le meuble est entre les mains le détenteur n’ayant pas la qualité de possesseur
  •  le meuble a été perdu ou volé car « celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la revendiquer pendant trois ans à compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve » (Code Civil Article 2279 al.2)
  •  le possesseur est de mauvaise foi, il ne peut donc se prévaloir de sa possession
  •  le créancier gagiste exerce un droit de suite pour récupérer la possession du bien gagé qu’il a perdu involontairement
  •  le bailleur d’immeuble utilise son droit de suite pour appréhender les meubles déplacés par le preneur sans son consentement, il doit agir dans les 40 jours si le mobilier garnit une ferme (bail rural) et dans les 15 jours si le mobilier garnit un logement d’habitation (bail d’habitation) (Code Civil Article 2332 1° privilège sur les meubles garnissant le local loué).
  •  le vendeur d’effets mobiliers impayés revendique la possession de la chose vendue, il doit agir dans les 8 jours de la livraison (Article 2332 4° al.2).

 

2) Les opérations de la saisie-revendication

a) Le déroulement des opérations de saisie-revendication

Autorisation préalable ou dispense: la saisie revendication étant une saisie conservatoire, une autorisation préalable du juge délivrée sur requête est nécessaire sauf dispense (cf. supra.) (D92 Article 155 al.2). « L’ordonnance portant autorisation désigne le bien qui peut être saisi ainsi que l’identité de la personne tenue de le délivrer ou de le restituer. Cette autorisation est opposable à tout détenteur du bien désigné » (D92 Article 155 al.3).

La saisie doit être pratiquée dans les 3 mois de l’autorisation à peine de caducité de celle-ci (D92 Article 156 al.1 et 214 cf. supra.).

 

Acte de saisie: D92 Article 159 « Après avoir rappelé au détenteur du bien qu’il est tenu de lui indiquer si ce bien a fait l’objet d’une saisie antérieure et, le cas échéant, de lui en communiquer [l’acte de saisie], l’huissier de justice dresse un acte de saisie. [al.2] L’acte de saisie contient, à peine de nullité :

  •  1° La mention de l’autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ; ces documents sont annexés à l’acte ; […]
  •  2° La désignation détaillée du bien saisi [, le cas échéant, avec des photographies en annexe de l’acte (D92 Article 155 al.11 et Article 90)] ;
  •  3° Si le détenteur est présent, sa déclaration au sujet d’une éventuelle saisie antérieure sur le même bien ;
  •  4° La mention en caractères très apparents que le bien saisi est placé sous la garde du détenteur, qui ne peut ni l’aliéner, ni le déplacer, si ce n’est [si une cause légitime rend leur déplacement nécessaire et avec information préalable au créancier avec indication du lieu de déplacement (D92 Article 91 al.2) ex: déménagement du débiteur], sous peine des sanctions [pénales de détournement d’objet saisi (CP Article 314-6)] et qu’il est tenu de faire connaître la saisie-revendication à tout créancier qui procéderait à une saisie sur le même bien ;
  •  5° La mention en caractères très apparents du droit de contester la validité de la saisie et d’en demander la mainlevée au juge compétent [i.e. du JEX qui a autorisé la saisie ou, en l’absence d’autorisation, du JEX (ou, lorsque le fondement de la saisie relève de la juridiction commerciale et avant tout procès, du Président du Tribunal de commerce) du domicile de la personne tenue de délivrer ou restituer le bien (D92 Article 156 al.3)] ;
  •  6° La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les contestations relatives à l’exécution de la saisie ;
  •  7° L’indication, le cas échéant, des nom, prénom et qualité des personnes qui ont assisté aux opérations de saisie, lesquelles doivent apposer leur signature sur l’original et les copies ; en cas de refus, il en est fait mention dans l’acte ;
  •  8° La reproduction de » CP Article 314-6 (détournement d’objet saisi), de D92 Article 155 et 156 (condition de la saisie-revendication) et de D92 Article 211 et 213 à 216 (conditions des saisies-conservatoires).

 

Significations:

  •  Si le détenteur est présent lors des opérations de saisie: « L’acte de saisie est remis au détenteur en lui rappelant verbalement les mentions […] 4° et 5° […]. Il en est fait mention dans l’acte » (D92 Article 160 al.1) « Une copie de l’acte […] lui est immédiatement remise. Cette remise vaut signification » (D92 Article 160 al.3).
  •  « Lorsque le détenteur n’a pas assisté aux opérations de saisie, une copie de l’acte lui est signifiée, en lui impartissant un délai de 8 jours pour qu’il porte à la connaissance de l’huissier de justice toute information relative à l’existence d’une éventuelle saisie antérieure et qu’il lui en communique [l’acte de saisie] » (D92 Article 160 al.4).
  •  « Si la saisie a été pratiquée entre les mains d’un tiers, détenteur du bien, l’acte est également signifié dans un délai de 8 jours au plus tard à celui qui est tenu de le délivrer ou de le restituer » (D92 Article 160 al.2)

 

b) Les effets de la saisie-revendication

La saisie-revendication place les meubles saisis sous main de justice i.e. les rend indisponibles (L91 Article 74 in fine, D92 Article 91 al.1) pour en assurer la conservation.

Les biens saisis ne peuvent plus faire l’objet d’une quelconque opération juridique ou encore d’un déplacement matériel sauf cause légitime et si le créancier en est préalablement informé et que lui est indiqué le lieu de déplacement (D92 Article 91 al.2), sous peine sanctions pénales de détournement d’objets saisis (CP Article 314-6).

Le détenteur continue à user du bien, au moins temporairement, mais « à tout moment, le JEX peut autoriser sur requête la remise du bien à un séquestre qu’il désigne » (D92 Article 161).

 

3) Les issues de la saisie-revendication

Le débiteur livre ou restitue spontanément le bien: il y a mainlevée amiable ou judiciaire de la saisie.

Le débiteur refuse de s’exécuter: la saisie peut déboucher sur une mesure d’exécution: la saisie-appréhension (D92 Article 163). Il n’y a pas, à proprement parler, conversion de la saisie-revendication en saisie-appréhension mais une succession de saisies ayant un objet différent. En effet, à l’indisponibilité de la saisie-revendication succède une remise ou une appréhension matérielle de la chose qui résulte directement de la saisie-appréhension (cf. infra.).

 

2) Les saisies conservatoires spécifiques sur les biens meubles incorporels: la saisie conservatoire des droits d’associé et des valeurs mobilières

Prenant en compte la valeur pécuniaire de certains biens incorporels, le législateur a autorisé (D92 Article 244 à 249) la saisie conservatoire des droits d’associé (parts sociales dans les sociétés de personnes) et des valeurs mobilières (titres émis par les sociétés de capitaux).

 

A) Les opérations de la saisie

1) Le déroulement des opérations de saisie

Un acte de saisie est dressé (a) avant d’être dénoncé au débiteur (b).

 

a) L’acte de saisie

Le créancier procède à la saisie en signifiant un acte de saisie (D92 Article 244):

  • s’il s’agit de parts sociales ou de valeurs nominatives: à la société émettrice ou à son mandataire
  • s’il s’agit de valeurs mobilières au porteur: à l’intermédiaire habilité

 

v D92 Article 244 « Cet acte contient, à peine de nullité :

  • 1° Les nom et domicile du débiteur ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
  • 2° L’indication de l’autorisation ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ;
  • 3° Le décompte des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée ;
  • 4° L’indication que la saisie rend indisponibles les droits pécuniaires attachés à l’intégralité des parts ou valeurs mobilières dont le débiteur est titulaire ;
  •   5° La sommation [à la société émettrice ou à l’intermédiaire habilité] de faire connaître l’existence d’éventuels nantissements ou saisies [antérieurs pratiqués sur les parts sociales ou valeurs mobilières]. »

 

b) La dénonciation au débiteur

Dans un délai de 8 jours, à peine de caducité, la saisie conservatoire est portée à la connaissance du débiteur par acte d’huissier de justice » (D92 Article 245 al.1)

 

v D92 Article 244 al.2 « Cet acte contient, à peine de nullité :

  •  1° Une copie de l’autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie a été pratiquée ; […]
  •  2° Une copie [de l’acte] de saisie ;
  •  3° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, den demander la mainlevée au JEX du lieu de son domicile ;
  •  4° La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations, notamment celles relatives à l’exécution de la saisie ;
  •  5° La reproduction des articles 210 à 219[(conditions de validité des mesures conservatoires)] ».

 

2) Les effets des opérations de saisie

L’acte de saisie rend les valeurs mobilières ou parts sociales indisponibles (L91 Article 74 in fine, D92 Article 91 al.1), elles deviennent donc inaliénables.

L’indisponibilité vaut également pour les droits pécuniaires (créances) qui y sont attachés (D92 Article 246 et 184), ils ne peuvent plus faire l’objet d’une mesure d’exécution i.e. d’une saisie-attribution par un autre créancier.

Si une saisie conservatoire est pratiquée sur des valeurs mobilières avant une saisie-vente, le créancier prend part à la distribution du prix mais les sommes qui lui reviennent sont consignées jusqu’à ce qu’il obtienne un titre exécutoire.

 

B) Les issues de la saisie

Si le créancier s’exécute volontairement: il y a mainlevée amiable ou judiciaire de la saisie conservatoire.

Si le débiteur ne s’exécute pas: le créancier peut convertir la saisie conservatoire en une mesure d’exécution

v forcée i.e. la saisie-vente des droits d’associé et des valeurs mobilières.

 

1) Les modalités de la conversion en saisie-vente

D92 Article 247 « Le créancier qui obtient un titre exécutoire […] signifie au débiteur un acte de conversion qui contient à peine de nullité:

  •  1° La référence [à l’acte] de saisie conservatoire ;
  •  2° L’énonciation du titre exécutoire ;
  •  3° Le décompte distinct des sommes à payer en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
  •  4° Un commandement d’avoir à payer cette somme, faute de quoi il sera procédé à la vente des biens saisis ;
  •  5° L’indication, en caractères très apparents, que le débiteur dispose d’un délai d’un mois pour procéder à la vente amiable des valeurs saisies […] ;
  •  6° Si la saisie porte sur des valeurs mobilières cotées, l’indication qu’il peut, en cas de vente forcée et jusqu’à la réalisation de celle-ci, faire connaître au tiers saisi l’ordre dans lequel elles devront être vendues ;
  •  7° La reproduction des articles 107 à 109 et 187 [(modalités de la vente amiable)]. »

 

« Une copie de l’acte de conversion est signifiée au tiers saisi [i.e. à la société émettrice ou à l’intermédiaire habilité] » (D92 Article 248).

 

2) Les effets de la conversion en saisie-vente

Le créancier obtient satisfaction comme s’il avait pratiqué une mesure d’exécution puisqu’il sera payé sur les fonds obtenus lors de la vente des biens (D92 Article 249).

Le débiteur peut toujours demander la mainlevée de la saisie (L91 Article 72 al.1 cf. supra.) ou la substitution d’une autre mesure propre à sauvegarder les intérêts du créancier (L91 Article 72 al.2 cf. supra.) (ex: un nantissement conservatoire des parts sociales ou des valeurs mobilières, il octroie alors d’une nouvelle sûreté  au créancier).

 

 

Partie 3: Les mesures d’exécution

 

Les mesures d’exécution forcées vont permettre au créancier d’une obligation muni d’un titre exécutoire d’obtenir par la force l’accomplissement de son droit et par conséquent l’exécution de sa créance. En l’absence de titre exécutoire, aucune mesure d’exécution ne peut être pratiquée, aucune autorisation préalable n’étant possible. Les mesures d’exécution sur la personne étant aujourd’hui écartées, le mieux est d’obtenir une exécution en nature lorsqu’elle est possible (cf. Code Civil Article 1142) (Titre 1). Mais si l’exécution en nature impossible, le créancier doit avoir mesure à une mesure d’exécution sur les biens du débiteur (Titre 2).

 

Titre 1: Les mesures d’exécution en nature

 

Ayant connu un regain de vigueur avec la réforme, mêmes si elles restent subsidiaires, 2 mesures permettent au créancier d’obtenir directement du débiteur l’exécution d’une obligation de faire: l’expulsion (chapitre 1) et la saisie-appréhension (chapitre 2).

 

Chapitre 1: L’expulsion

 

L’expulsion est l’action de faire sortir une personne, au besoin par la force, d’un lieu où elle se trouve sans droit.

NB: la procédure ne s’applique pas à l’expulsion du conjoint violent qui peut être ordonnée par le JAF sur le fondement de Code Civil. Article 220-1.

La L91 recherchait déjà un équilibre entre la défense du droit de propriété (côté créancier) et le respect du droit au logement (côté débiteur). La loi du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions a privilégié le droit au logement, objectif à valeur constitutionnelle. De même, la circulaire du 9 fév. 1999 limite l’expulsion locative pour impayé aux seuls locataires de mauvaise foi tout comme le fait la circulaire Borloo du 13 mai 2004.

Cette mesure étant dramatique pour le débiteur et sa famille, le législateur la réglemente minutieusement (L91 Article 61 à 66-1 et D92 Article 194 à 209) les conditions d’expulsion (Section 1), les opérations d’expulsion (Section 2) et fixe le sort des biens se trouvant dans les lieux (Section 3).

 

Section 1: Les conditions de l’expulsion

Certaines conditions sont communes à toutes les mesures d’expulsion (1), d’autres spécifiques aux mesures concernant les locaux affectés à l’habitation (2).

1) Les conditions communes à toutes les mesures d’expulsion

 

 

Art.62 L91 «  » on constate que l’habitation n’est pas une condition nécessaire pour pratiquer la mesure, dès lors tout local immobilier, tout bien immeuble quel qu’en soit l’affectation relève des conditions communes (ex: garage, habitation). Tout bien immobilier peut justifier une mesure d’expulsion dès lors que l’occupant n’a pas le droit de se maintenir dans le local. L’expulsion suppose que le créancier soit titulaire d’un titre exécutoire délivre un commandement de quitter les lieux.

 

A) Le titre fondant la mesure d’expulsion

La liste des titres exécutoires justifiant l’expulsion est limitative par rapport à celle énumérée cf. Supra. Tous les titres exécutoire de l’Article 3 L91 ne légitiment pas une mesure d’expulsion. Ainsi un bailleur peut demander expulsion de son locataire en vertu d’un bail authentique même si le notaire a expressément prévu dans le bail le recours à l’expulsion. L91 Article 61 vise seulement 2 titres exécutoires mais il faut y ajouter depuis le 1er jan. 2007 un troisième titre exécutoire justifiant l’expulsion: le jugement d’adjudication rendu en cas de saisie immobilière.

– la décision de justice: Le texte vise une décision de justice. Dès lors, toute décision de justice peut a priori justifier le recours à une mesure d’expulsion. Toutefois il existe une réserve, encore faut-il que cette décision ordonne l’expulsion.

– le PV de conciliation: le PV de conciliation doit être signé par les parties au litige et par le juge, la loi n’opérant aucune distinction (ubi lex…) tout PV de conciliation peut a priori justifier l’expulsion. ex: le PV de conciliation rendu en matière de divorce permet à l’un des époux d’avoir recours à une mesure d’expulsion contre l’autre.

– le jugement d’adjudication rendu à la suite d’une procédure de saisie immobilière: cf. infra.

De plus, ces titres doivent être exécutoires, ainsi, si le juge quel qu’il soit, octroi des délais de grâce au débiteur, le créancier doit attendre l’expiration de ces délais pour agir et donc obtenir l’expulsion.

Enfin, dans un souci de protection du débiteur Code de Procédure Civile, Article 503 ce titre doit être signifié au débiteur mais pour gagner du temps cette signification au débiteur peut avoir lieu en même temps que celle du commandement d’avoir à quitter les lieux.

 

B) Le commandement d’avoir à quitter les lieux

L’expulsion donne lieu à la signification d’un commandement d’avoir à quitter les lieux, il s’agit d’un acte de huissier mentions à peine nullité Article 194 D92:

– l’indication du titre exécutoire en vertu duquel l’expulsion est poursuivie

– l’indication de la juridiction devant laquelle peuvent être portées les demandes de délais et toutes les contestations relatives aux opérations d’expulsions

– date à partir de laquelle locaux doivent être libéré

– l’avertissement qu’à partir de cette date butoir il pourra être procédé à l’expulsion forcée du débiteur ainsi que de tout occupant de son chef (i.e. de sa famille).

Ce commandement est signifié à la personne que l’on veut expulser, signification à personne, à domicile ou par la remise de l’acte à l’étude de l’huissier de justice car depuis le 1er mars 2006 il n’y a plus de signification à mairie. Le propriétaire n’a pas à signifier ce commandement aux occupants du chef du débiteur.

Aucun délai légal n’est prévu entre la délivrance du commandement et l’expulsion proprement dite sauf pour les locaux affectés à l’habitation principale, il s’agit d’une condition spécifique à ces locaux.

 

2) Les conditions spécifiques aux mesures d’expulsion des locaux affectés à l’usage d’habitation

La doctrine adopte une définition large des locaux … : caravane, mobil home, bateau. Il importe peut que l’occupation du bien ne trouve pas sa source dans un contrat dès lors que le débiteur habite les lieux. I.e. ces règles spécifiques s’appliquent aux personnes occupant les lieux sans droit ni titre i.e. les squatteurs.

L91 Article 62 195 D92, conditions supplémentaires à celles communes. Tout d’abord, le commandement d’avoir à quitter les lieux comprend des mentions supplémentaires (A), le préfet du département du lieu de situation de l’immeuble doit être informé de la procédure engagée (B), enfin certains délais doivent être respectés (C).

 

A) Les mentions supplémentaires du commandement d’avoir à quitter les lieux

outre les mentions de Article 194, le commandement d’avoir à quitter les lieux comprend à peine de nullité la reproduction de Article 62 L91 ainsi que des articles 613 à 613-5 du Code de la construction et de l’habitation prévoyant que l’expulsion ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de 2 mois après le commandement et en aucun cas en hiver. Ce commandement spécial est impérativement signifié au domicile réel et non à domicile élu pour que les occupants aient une information précise de la mesure d’expulsion envisagée. Il existe une exception pour les occupants non dénommés sans doit ni titre (squatteur) l’acte peut alors être remis au parquet, à toutes fins.

L’acte doit en plus être dénoncé

 

B) La dénonciation du commandement d’avoir à quitter les lieux au préfet du département

L’huissier dénonce le commandement au préfet en lui envoyant par LRAR une copie de cet acte, il y joint une fiche de renseignement relatif à l’occupant et aux personnes qui vivent habituellement avec lui (famille). Cette dénonciation devrait normalement favoriser la prise en compte de la demande de relogement de l’occupant au titre du plan départemental d’action pour le relogement des personnes défavorisées. D’ailleurs, le juge qui ordonne l’expulsion dans une décision de justice ou qui statue sur une demande de délais de grâce peut très bien lui-même décider que sa décision sera transmise par son greffe aux représentants de l’Etat en vue d’une prise en compte de la demande de relogement. Le préfet du département tient un fichier de traitement automatique d’informations nominatives dont la finalité est la gestion des dossiers d’expulsions locatives. Ce fichier peut être consulté par les membres des commissions d’expulsions, par les huissiers, les services de police et le maire. Tout est fait pour favoriser le relogement des personnes expulsées mais le meilleur moyen d’assurer le relogement des personnes expulsées reste la prévention.

 

C) Le respect des délais

L’expulsion est soumise aux restrictions légales relatives aux heures et aux jours fériés. En outre, il est sursis à l’expulsion entre le 1er nov. et le 15 mars de l’année suivante à moins que les intéressés soient relogés dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille. Cette faveur ne vaut pas pour les occupants entrés dans les lieux par voie de fait (squatteur). Article 62 L91 l’expulsion a lieu au plus tôt 2 mois après le commandement d’avoir à quitter les lieux. En théorie, ce délai devrait laisser le temps à la personne expulsée de trouver un logement et donc de déménager pour éviter l’expulsion.

Toutefois, le délai de 2 mois peut être soit réduit ou supprimé soit prorogé.

– le délai réduit ou supprimé par une décision spéciale et motivée du juge lorsque les personnes dont l’expulsion a été ordonnée sont entrés dans les locaux par voie de fait.

– le délai peut être prorogé pour une durée qui ne peut excéder 3 mois lorsque l’expulsion aurait pour la personne concernée des conséquences d’une exceptionnelle dureté. La charge de la preuve incombe au débiteur. En plus il faut ici tenir compte des délais octroyés le cas échéant par le juge des référés ou de l’exécution prévus par Article 613-1 du Code de la construction et de l’habitation, délais accordés aux occupants de locaux à usage d’habitation ou à usage professionnel si leur relogement ne peut pas avoir lieu dans des conditions normales satisfaisantes. Ces délais spécifiques ne peuvent être inférieurs à 3 mois et supérieurs à 3 ans. Pour octroyer ces délais, le magistrat tient compte de la bonne ou mauvaise volonté de l’occupant dans l’exécution de ses obligations. Ensuite, la décision accordant des délais est notifiée au préfet, de ce fait, le préfet refusera le concours de la force publique s’il est sollicité avant l’expiration des délais.

 

 

Section 2: Les opérations d’expulsion

Les opérations d’expulsion proprement dites sont conduites par huissier de justice, il peut en cas de besoin, requérir le concours de la force publique après avoir dressé un procès verbal de tentative d’expulsion relatant les difficultés rencontrées.

L’huissier dresse un PV dans lequel il consigne l’ensemble des opérations, cet acte comprend, à peine de nullité les mentions de D92 Article 199:

– la description des opérations auxquelles l’huissier a procédé ainsi que l’identité des personnes dont le concours a été nécessaire

– la juridiction compétente pour statuer le cas échéant sur les contestations relatives aux opérations d’expulsion

Le PV est signé par toutes les personnes mentionnées et, en cas de refus de l’une d’elles, l’huissier en fait mention.

Si l’occupant est présent, le PV lui est remis en main propre, à défaut, il lui est signifié à personne ou à domicile.

L’expulsion permet seulement au propriétaire des lieux de récupérer les locaux mais des problèmes supplémentaires peuvent se poser lorsque des meubles se trouvent dans les lieux lors des opérations d’expulsion.

 

Section 3: Le sort des meubles situés dans les locaux lors des opérations d’expulsion

L’expulsion tend uniquement à libérer le local occupé irrégulièrement, elle ne conduit pas au paiement du créancier. Cette mesure ne concerne pas les meubles situés dans les locaux. Ainsi, l’occupant peut les enlever librement mais n’y est pas obligé ainsi certains meubles peuvent rester dans les lieux soit parce qu’ils ont fait l’objet d’une saisie antérieure (1) soit parce que l’occupant négligeant ne les a pas enlevé (2).

 

1) Le sort des meubles antérieurement saisis

Si les meubles ont fait antérieurement l’objet d’une mesure conservatoire ou d’exécution, 2 situations doivent être distinguées selon D92 Article 200:

– la personne expulsée indique à l’huissier le lieu où ces biens doivent être transportés: dans ce cas, l’huissier dresse un inventaire des biens meubles dans le PV d’expulsion le lieu où ils doivent être transportés aux frais de l’expulsé. La mesure conservatoire ou d’exécution se poursuit normalement.

– la personne expulsée n’indique pas le lieu où les biens doivent être transportés: l’huissier dresse l’inventaire dans le PV et indique le nom et l’adresse du séquestre auquel ils sont remis. A partir de là, la saisie se poursuit entre les mains du séquestre.

Dans les 2 cas, le PV est dénoncé au créancier qui a pratiqué la saisie et à ce titre, si le propriétaire de l’immeuble (celui qui a pris l’initiative de la mesure d’expulsion) veut se joindre à la saisie antérieure, il peut le faire en formant opposition lorsque le PV est dénoncé au créancier antérieur.

 

2) Le sort des meubles non saisis

2 cas de figure lorsque des meubles non saisis se trouvent dans les lieux lors de l’expulsion.

L’expulsé indique un lieu dans lequel les meubles doivent être déposés, l’huissier les fait alors transporter en ce lieu aux frais de la personne expulsée qui peut en disposer librement (puisqu’ils ne font pas objet d’une mesure de saisie par hypothèse).

L’expulsé n’indique aucun lieu, alors les meubles sont soit laissés sur place soit entreposés dans un autre lieu, dans ce cas, le PV contient les mentions requises par D92 Article 201:

– l’ensemble des biens figurant dans les lieux (inventaire des biens) et l’huissier indique si les biens ont ou non une valeur marchande

– mention du lieu et des conditions d’accès au local où sont déposés si sont déplacés

– la sommation à la personne expulsée en caractères très apparents d’avoir à les retirer dans le délai non renouvelable d’1 mois à compter de la signification de l’acte, il est précisé qu’à défaut, les biens non retirés seront vendus aux enchères publiques ou déclarés abandonnés.

– la convocation de la personne expulsée d’avoir à comparaître devant le juge de l’exécution du lieu de situation de l’immeuble à une date déterminée qui ne peut être antérieure à l’expiration du délai d’1 mois, afin qu’il soit statué sur le sort des biens qui n’auraient pas été retirés avant le jour de l’audience. Dans ce cas, le propriétaire de l’immeuble et l’huissier ne sont pas responsables de la conservation des meubles sauf faute prouvée de leur part. Dès lors, à l’expiration du délai d’1 mois si l’expulsé à retiré les meubles, le propriétaire de l’immeuble en informe le juge l’huissier par écrit ou par déclaration au greffe. A défaut, l’huissier saisit le juge par le dépôt d’une copie du PV d’expulsion et le juge fixe une date d’audience qui est portée à la connaissance de l’huissier de justice, du propriétaire et de l’expulsé. L’expulsé peut encore retirer ses meubles jusqu’à la date de l’audience, si c’est le cas, le propriétaire en informe le juge par lettre simple ou par déclaration au greffe et l’audience est annulée. A défaut de d’enlèvement des meubles, lors de l’audience, la décision du juge varie selon que les biens ont ou non une valeur marchande:

– si les biens ont une valeur marchande: le JEX ordonne leur vente aux enchères publiques, même si ces biens sont en principe insaisissables. Cette vente est faite selon les règles applicables à la saisie-vente, les frais et la créance du bailleur seront payés sur le prix de vente obtenu lors de la vente aux enchères. S’il y a un surplus, il est consigné au profit de l’expulsé qui en est informé par LRAR par l’officier ministériel ayant réalisé la vente.

– si les biens n’ont aucune valeur ne marchande: le juge les déclare abandonnés, les papiers et les documents personnels sont alors placés sous enveloppe scellée et conservés pendant 2 ans par l’huissier qui en avise par LRAR la personne expulsée. A l’expiration du délai de 2 ans, si les documents n’ont pas été réclamés, l’huissier les détruit après avoir dressé un PV mentionnant précisément les documents officiels et les instruments bancaires détruits. La loi ne précise pas le sort des autres meubles (autres que les documents officiels). Les lois spécifiques ayant pour objet la vente des biens sont par définition inapplicables puisque les biens n’ont aucune valeur marchande, aucune vente n’est donc recevable. Dans le silence des textes, les auteurs considèrent majoritairement que le juge doit ordonner la destruction des biens.

 

Chapitre 2: La saisie-appréhension

 

La saisie-appréhension a été introduite par la loi de 1991. Avant la réforme, celui qui obtenait satisfaction dans une action pétitoire devait en fait solliciter du juge qu’il ordonne en même temps la restitution du bien, à défaut, il devait demander, le cas échéant, en référé une autorisation supplémentaire au juge pour pouvoir intervenir et pendant ce temps, le débiteur pouvait réagir ce qui présentait un inconvénient majeur.

L91 Article 56, D92 139 al.1, 140 à 154 et Article  275 à 277.

La saisie-appréhension la saisie d’un meuble corporel qui permet, en vertu d’un titre exécutoire ou d’une injonction du juge, de s’en rendre maître entre les mains de celui qui est tenu de la remettre (i.e. le débiteur lui-même) ou d’un tiers détenteur afin que ce bien soit délivré ou restitué à son propriétaire ou au créancier gagiste. La saisie-appréhension permet donc l’exécution forcée des obligations de livrer ou de restituer une chose. Elle est notamment ouverte à l’acquéreur d’un meuble corporel lorsque le vendeur ne lui livre pas la chose (obligation de livraison), ouverte au déposant lorsque le dépositaire ne restitue pas la chose déposée (obligation de restitution).

La saisie-appréhension n’a pas d’effet conservatoire, elle ne rend pas le bien indisponible, elle présente donc un inconvénient majeur parce que le débiteur informé de la mesure peut tout à fait déplacer le bien. Dès lors, il faut remédier à cet inconvénient, c’est pourquoi en pratique cette saisie est souvent précédée de la saisie revendication.

Comme pour les autres mesures de saisie, le législateur a prévu plusieurs saisies appréhension, il y a une saisie-appréhension de droit commun (Section 1) et une spécifique pour les biens placés dans un coffre-fort (Section 2).

 

Section 1: La saisie-appréhension de droit commun

Il existe 2 saisies-appréhension de droit commun: la première est réservée au créancier muni d’un titre exécutoire (1), la seconde permet au créancier d’obtenir le titre qui lui fait défaut grâce à une procédure simple et relativement rapide: la saisie-appréhension sur injonction du juge (2).

 

1) La saisie-appréhension opérée en vertu d’un titre exécutoire

La saisie-appréhension peut être pratiquée par tout créancier muni d’un titre exécutoire (judiciaire ou notarié) dès lors que ce titre exécutoire constate l’obligation du débiteur de délivrer ou de restituer la chose. Cette saisie-appréhension de droit commun peut être pratiquée soit entre les mains du débiteur lui-même (A) soit entre les mains d’un tiers (B).

 

A) La saisie-appréhension entre les mains du débiteur

L91 Article 56 l’huissier appréhende les meubles que le débiteur doit livrer ou restituer en vertu d’un titre exécutoire sauf si le débiteur propose d’en faire le transport à ses frais. En fait, la saisie-appréhension est pratiquée contre le débiteur de l’obligation de restitution ou de livraison du bien qui doit être identifiable dans le titre exécutoire. En clair, l’huissier commence par signifier un commandement de livrer ou restituer au débiteur (1) avant de rédiger un acte de remise volontaire ou d’appréhension du bien selon les cas (2).

 

1) La signification du commandement de délivrer ou de restituer au débiteur

Pour favoriser la remise amiable du bien, la procédure débute par un commandement de livrer ou restituer par la personne tenue de la remise i.e. au débiteur. Ce commandement peut être signifié dans le même acte que le jugement lorsque le créancier se prévaut d’un titre exécutoire judiciaire. Cet acte comprend des mentions à peine de nullité D92 Article 141:

– la mention du titre exécutoire en vertu duquel remise ou livraison est exigée

– l’indication que la personne tenue de la remise peut dans un délai de 8 jours transporter à ses frais le bien désigné dans un lieu et dans les conditions indiquées

– mention qu’à défaut de remise volontaire dans le délai de 8 jours, le bien sera appréhendé aux frais du débiteur

– mention que toute contestation devra être portée devant le JEX du domicile du débiteur

2 cas dans lesquels le commandement préalable n’est pas requis:

– la personne tenue de la remise est présente lorsque l’huissier se présente et qu’elle refuse directement d’effectuer le transport du bien à ses frais

– le titre est une ordonnance d’injonction revêtue de la formule exécutoire: le commandement n’est pas requis si d’une part le bien se situe entre les mains de la personne visée par l’injonction et si, d’autre part, l’appréhension est entreprise dans les 2 mois où l’ordonnance d’injonction a été rendue exécutoire.

S’il y a dispense, le bien est appréhendé directement sur présentation du titre exécutoire.

Dans le cas contraire, s’il y a un commandement délivré, l’huissier de justice doit attirer le débiteur sur le fait qu’il dispose d’un délai de 8 jours pour remettre volontairement de bien et doit lui indiquer qu’à défaut de remise volontaire, il se présentera pour appréhender le bien. Lors de cette seconde visite, l’huissier dressera un acte de remise volontaire ou d’appréhension du bien selon le comportement du débiteur

 

2) L’établissement d’un acte de remise volontaire ou d’appréhension du bien

Quelle que soit l’issue de la tentative de remise amiable du bien, un acte doit être dressé. Cet acte constate, selon les cas, soit la remise volontaire, soit l’appréhension du bien et comprend systématiquement un état détaillé de celui-ci. A ce titre, le bien peut être photographié et les photographies annexées.

Si le bien est appréhendé pour être remis au propriétaire, une copie de l’acte est remise ou notifiée par LRAR à la personne tenue de livrer ou restituer le bien i.e. au débiteur.

 

Des formalités supplémentaires sont requises si le bien est appréhendé pour être remis à un créancier gagiste. Dans cette hypothèse, la saisie-appréhension n’est qu’une étape puisque la procédure tend en réalité à l’attribution de la propriété du gage. En effet, si le créancier gagiste n’a qu’une détention fictive du bien, la saisie-appréhension va lui permettre d’exercer effectivement son droit de rétention avant précisément de poursuivre la réalisation du gage si le débiteur est défaillant. Ainsi, la saisie-appréhension est alors souvent suivie d’une autre saisie: la saisie-vente. Dans ce cas, l’huissier rédige un acte particulier qui sera remis ou signifié au débiteur selon qu’il est présent ou absent, cet acte est une passerelle entre la saisie-appréhension et la saisie-vente, il comprend des mentions à peines de nullité D92 Article 145:

– une copie de l’acte de remise ou d’appréhension

– le lieu où le bien est déposé

– le décompte des sommes réclamées par le créancier en principal, frais et intérêts échus avec indication le cas échéant du taux d’intérêt

– l’indication en caractères très apparents que le débiteur a 1 mois pour procéder à la vente amiable du bien saisi (idem saisie-vente)

– la date à partir de laquelle, à défaut de vente amiable, il y aura vente forcée i.e. aux enchères publiques

– la reproduction de textes: D92 Article 107 à 109 relatifs à la vente amiable

Si le bien est appréhendé pour être remis au créancier gagiste, l’acte de remise ou d’appréhension vaut saisie sous la garde du créancier, le bien passe sous la garde du créancier puisqu’il en obtient la détention. Il sera ensuite procédé à la vente du bien selon les règles applicables à la saisie-vente.

 

Le bien à appréhender n’est pas forcément en la possession du débiteur, la procédure est alors différente.

 

B) La saisie-appréhension entre les mains d’un tiers

Cette saisie-appréhension peut par ex être pratiquée sur un véhicule automobile lorsqu’il fait l’objet d’un contrat de crédit bail ou déposé chez un garagiste, le bien n’est pas en possession du débiteur qui doit restituer la chose, des formalités supplémentaires sont donc requises. Ces formalités D92 Article 146 à 149.

 

1ère étape: la procédure débute par la signification au tiers d’une sommation de remettre le bien. Cette sommation contient des mentions à peines de nullité Article 146 al.2 D92:

– une copie du titre exécutoire en vertu duquel la remise est exigée

– l’injonction d’avoir dans un délai de 8 jours soit à remettre le bien désigné soit à communiquer le cas échéant à l’huissier les raisons pour lesquelles le débiteur s’oppose à la remise

– l’indication selon laquelle les difficultés peuvent être portées à la connaissance du JEX du lieu où demeure le destinataire de l’acte

 

2ème étape: la sommation est dénoncée à la personne tenue de délivrer ou restituer le bien i.e. au débiteur, par LRAR.

 

3ème étape: suite à la sommation 2 cas de figure:

– le tiers remet le bien dans les 8 jours: l’huissier dresse un acte de remise comprenant, comme pour la saisie-appréhension entre les mains du débiteur un état détaillé du bien avec éventuellement photos en annexe. Cet acte est remis ou notifié à la personne tenue de la remise de la chose (i.e. du débiteur).

– le tiers retient le bien: l’huissier constate que la remise n’a pas été effectuée. A partir de là, le créancier a 1 mois, à compter de la signification de la sommation pour saisir le JEX du domicile du tiers afin qu’il ordonne la remise du bien. Ce délai d’1 mois permet aussi au tiers détenteur de saisir le JEX de toute contestation. Dans ce cas, lorsque le JEX est saisi, il a 2 possibilités:

— si la contestation du tiers est fondée, il ordonne la mainlevée de la saisie appréhension.

— si la contestation n’est pas fondée, il rend une décision enjoignant au tiers de remettre le bien au créancier. Si le bien se situe dans le local d’habitation du tiers détenteur, le juge doit également, à la demande du créancier, rendre une ordonnance autorisant l’huissier à pénétrer dans ce local.

4ème étape: après le jugement, l’huissier se présente chez le tiers pour procéder à l’enlèvement des biens. Il dresse un acte selon les cas de remise ou d’appréhension du bien. Cet acte rend compte du procédé utilisé pour appréhendé le bien et comprend un état détaillé du bien remis ou appréhendé ainsi que le cas échéant des photographies en annexe.

 

5ème étape: après l’enlèvement du bien chez le tiers, la personne tenue de la remise (i.e. le débiteur) en est informé. L’acte de remise volontaire ou d’appréhension est ainsi remis ou notifié au débiteur selon qu’il est présent ou absent.

 

La saisie-appréhension reste une procédure relativement lourde notamment en cas de résistance du débiteur (saisie du JEX nécessaire). C’est pourquoi, le D92 a introduit une autre forme de saisie-appréhension qui repose sur une injonction du JEX.

 

2) La saisie-appréhension sur injonction du juge

Si le créancier n’a pas de titre exécutoire, une procédure lui permet d’obtenir rapidement un titre pour appréhender le bien. Cette procédure particulière repose sur le mécanisme se l’injonction de faire Article 149 à 154 D92.

2 temps: dans un premier temps, le créancier sollicite du JEX une ordonnance au titre d’une procédure gracieuse (A), procédure gracieuse qui peut éventuellement dans un second temps déboucher sur une procédure contentieuse (B).

 

A) La procédure gracieuse devant le JEX

Le JEX du lieu où demeure le débiteur est saisi par requête à fin d’injonction d’avoir à délivrer ou à restituer le bien considéré selon le cas. Cette requête contient à peine d’irrecevabilité: la désignation du bien accompagnée de tout document justifiant la demande de remise. Dès lors, le juge saisi statut sans débat (procédure gracieuse) et a 2 possibilité:

– rejette la demande: le créancier peut encore se retourner vers la phase contentieuse classique (agir au fond) pour obtenir un titre exécutoire. Si obtient une condamnation du débiteur au fond, il pourra exécuter une saisie-appréhension classique (cf. supra.)

 

– estime que la demande est justifiée: rend ordonnance portant injonction de délivrer ou restituer le bien, cette décision est signifiée à la personne tenue de la remise i.e. au débiteur, la signification contient à peine de nullité sommation d’avoir dans les 15 jours soit à transporter à ses frais le bien au lieu et dans les conditions indiquées soit de former opposition contre l’ordonnance du JEX auprès du greffe du juge l’ayant rendu. Dès lors, à l’issue de cette procédure gracieuse 3 cas de figure:

— la personne tenue de la remise obtempère dans un délai de 15 jours: la procédure s’arrête, le créancier a obtenu satisfaction.

 

— le débiteur est passif, il ne remet pas la chose et ne forme pas opposition contre l’ordonnance du JEX: le créancier peut rendre l’ordonnance du JEX exécutoire en demandant au greffe l’apposition de la formule exécutoire sur ladite ordonnance. Cette formalité accomplie, l’ordonnance produit les effets d’une décision contradictoire. Ainsi, à partir de là, le JEX ne peut plus empêcher ou différer ou surseoir à la restitution, le créancier dispose alors d’un titre exécutoire. Dans ce cas, le créancier pourra pratiquer une saisie-appréhension (car titre exécutoire) mais le créancier se trouve dans une situation favorable car dans ce cas de figure, le commandement d’avoir à livrer ou restituer la chose n’est pas requis (cf. supra.) dès lorsque le bien se situe dans les mains de la personne visée par l’injonction et que l’appréhension est entreprise dans le délai d’1 mois de la signification de l’injonction.

 

— le débiteur forme opposition dans les 15 jours, la procédure bascule dans une phase contentieuse.

 

B) La procédure contentieuse

Le détenteur du bien (le débiteur le plus souvent) peut faire opposition auprès du greffe du JEX ayant rendu l’ordonnance, par déclaration contre récépissé (présentation au greffe) ou par LRAR. En cas d’opposition, le créancier doit saisir la juridiction compétente selon le droit commun pour statuer sur la délivrance ou le cas échéant la restitution du bien. Le créancier doit agir rapidement car le délai pour agir est de 2 mois à compter de la signification de l’injonction sous peine de caducité de l’ordonnance. Puisque ce délai court à compter de la signification de l’injonction, ce délai est en réalité amputé du délai de 15 jours qui est laissé au détenteur pour former opposition.

2 hypothèses:

– le tribunal saisi de l’opposition rejette la demande: la personne déboutée peut interjeter appel dans le délai d’1 mois à compter de la signification de la décision de rejet.

– le tribunal accueille la demande, muni d’un titre exécutoire, le créancier pourra poursuivre la saisie-appréhension de droit commun sans avoir à délivrer de commandement préalable (situation favorable).

 

Par cette procédure, le créancier peut obtenir un pseudo titre exécutoire qui lui permet de procéder à l’appréhension du bien alors qu’au départ il n’a pas de titre exécutoire. Toutefois, cette procédure crée en réalité une situation hybride, en effet, pendant le délai de 15 jours imparti au débiteur pour s’exécuter ou contester, le bien reste disponible et le débiteur peut donc toujours le déplacer. Il est donc utile d’adjoindre à la demande d’injonction i.e. dès le début de la procédure, une demande pour rendre ce bien indisponible i.e. une demande de saisie revendication.

 

Si la saisie-appréhension porte sur un VTM, elle présente certaines particularités car alors la saisie-appréhension peut s’accompagner de mesures supplémentaires adaptée à la nature spécifique du bien appréhendé. Le créancier peut notamment immobiliser le bien grâce au sabot de Denver (cf. infra.).

 

Section 2: La saisie-appréhension des biens placés dans un coffre-fort

D92 Article 275 à 277, dans ce cas, la procédure combine les règles relatives à la saisie-appréhension de droit commun et des règles spécifiques pour tenir compte du lieu de situation des biens appréhendés.

Comme pour toute saisie appréhension, le créancier doit être muni soit d’un titre exécutoire soit d’une injonction délivrée par le JEX.

Muni de ce titre exécutoire ou injonction, l’huissier dresse un acte de saisi qui est adressé au propriétaire du coffre. Cet acte comprend des mentions à peine de nullité D92 Article 266:

– le nom et domicile du débiteur ou la désignation ou siège social si personne morale

– le titre en vertu duquel la saisie est pratiquée (titre exécutoire ou injonction)

– l’injonction d’interdire tout accès au coffre sauf demande à un huissier de justice

Cet acte évite que le coffre ne soit vidé puisqu’il interdit l’accès au coffre, en cas de besoin, l’huissier peut apposer des scellés.

 

Un commandement de délivrer ou restituer est signifié à la personne tenu de la remise i.e. du débiteur, il est signifié le premier jour ouvrable suivant l’acte de saisie, il comprend à peine de nullité les mentions D92 Article 275:

– la dénonciation de l’acte de saisie

– la mention du titre exécutoire ou de l’injonction en vertu duquel la saisie est pratiquée

– la désignation précise du ou des biens réclamés

– un commandement d’avoir à remettre le ou les biens réclamés avant la date fixée pour l’ouverture du coffre et précisant qu’à défaut, l’ouverture aura lieu aux frais du débiteur

– l’indication des lieux jours et heures fixés pour procéder l’ouverture du coffre

– indication du JEX du lieu de situation du bien pour connaître des contestations éventuelles

 

En l’absence de remise volontaire, le coffre est ouvert mais cette ouverture ne peut intervenir que 15 jours après la signification du commandement au débiteur. Au jour et heure, l’huissier ouvre le coffre et procède à un inventaire de tous les biens s’y trouvant si débiteur absent ou des seuls biens appréhendés si le débiteur est présent. Si en ouvrant le coffre, l’huissier ne trouve pas les biens à appréhender, il dresse un PV de carence. Si les biens figurent dans le coffre, il dresse un acte relatant les opérations de saisie comprenant à peine de nullité les noms, prénoms et qualités des personnes ayant procédé aux opérations et dans les mains desquelles les objets ont le cas échéant été remis. Une copie de cet acte est remise ou signifié au débiteur selon qu’il est présent ou non.


A partir de là, le débiteur retrouve la libre disposition du coffre à partir du jour où les biens sont enlevés (le jour de l’ouverture en général). Pour le reste idem procédure saisie appréhension.

 

Titre 2: Les mesures d’exécution sur les biens

 

L’exécution sur les biens constitue le mode d’exécution le plus courant aujourd’hui. Si le débiteur ne s’exécute pas volontairement, le créancier peut obtenir le paiement de sa créance sur les biens composant le patrimoine du débiteur i.e. sur les meubles corporels ou incorporels du débiteur. 3 catégories de mesures d’exécution: les mesures d’exécution sur les meubles incorporels, les mesures d’exécution sur les meubles corporels et les mesures d’exécution sur les immeubles

 

Sous-titre 1: Les mesures d’exécution sur les meubles incorporels

 

Les mesures d’exécution sur les meubles incorporels consistent en une saisie-attribution. La saisie-attribution est la saisie de droit commun des créances de sommes d’argent (chapitre 1) mais il existe aussi des procédures spécifiques à certaines créances (chapitre 2).

 

Chapitre 1: La saisie-attribution de droit commun

 

 La saisie-attribution est une saisie mobilière exécutoire qui permet à tout créancier muni d’un titre exécutoire (condition préalable) constatant une créance liquide et exigible, de saisir entre les mains d’un tiers, les créances de somme d’argent de son débiteur afin d’obtenir paiement de la sienne. Son nom s’explique car l’acte de saisie emporte attribution immédiate au saisissant, de la créance saisie, cette attribution immédiate ne vaut qu’à concurrence du montant de la saisie.

L91 Article 42 à 47 et D92 Article  55 à 79

La saisie-attribution a été substituée par la réforme à la saisie-arrêt. La situation du créancier est améliorée car la saisie-attribution se veut plus rapide et plus efficace que la saisie-arrêt.

 

Section 1: Les conditions de la saisie-attribution

Certaines conditions sont relatives aux personnes (1), d’autres aux créances (2).

 

1) Les conditions relatives aux personnes

3 personnes sont concernées: le créancier, le débiteur et le tiers saisi (i.e. le débiteur du débiteur). Les conditions relatives au créancier et au débiteur ont été étudiées dans la Partie 1, l’accent doit donc être mis sur le tiers saisi.

Le tiers saisi est le débiteur du débiteur saisi, c’est entre ses mains que la saisie-attribution est pratiquée. Dès lors, le tiers saisi doit être un tiers par rapport au débiteur mais aussi par rapport au créancier. En effet, dès lors que le tiers saisi doit être un tiers:

– le tiers saisi ne doit avoir aucun lien de droit avec le créancier i.e. le tiers saisi détient des sommes dues au débiteur en vertu d’un pouvoir propre et indépendant. Ce tiers saisi peut être un notaire, un séquestre ou encore le représentant légal d’un incapable.

– le tiers saisi doit être débiteur du débiteur saisi, dès lors, le tiers saisi est lié au débiteur par un lien d’obligation, ce n’est que si ce lien existe qu’il sera débiteur du débiteur.

– le tiers saisi ne peut être le saisissant lui-même, c’est le problème de l’ancienne saisie-arrêt sur soi même. En effet, avant la réforme, le créancier pouvait pratiquer une saisie entre ses propres mains: hypothèse où le créancier et le débiteur étaient réciproquement créancier et débiteur l’un de l’autre. L’ancienne saisie-arrêt n’était possible que si les conditions de la compensation légale n’étaient pas remplies. Aujourd’hui, la saisie-attribution n’ayant plus de caractère conservatoire (contrairement à l’ancienne saisie-arrêt), il est impossible d’envisager une saisie-attribution sur soi-même.

 

2) Les conditions relatives aux créances

Elles concernent la créance du créancier i.e. la créance cause de la saisie (A) mais également la créance du débiteur sur le tiers saisi i.e. la créance objet de la saisie (B).

 

A) La créance cause de la saisie

Depuis la réforme, la saisie-attribution est réservée (plus de caractère conservatoire) au créancier muni d’un titre exécutoire. Ainsi, en l’absence de titre exécutoire, un créancier ne peut pas pratiquer de saisie-attribution. La créance cause de la saisie doit être certaine, elle doit être liquide i.e. le titre exécutoire doit contenir une évaluation monétaire chiffrée de la créance et enfin, elle doit être exigible lorsqu’est pratiquée la saisie, cela signifie qu’une créance à terme ne peut justifier une saisie-attribution sauf toutefois si le débiteur est déchu du terme ou si le terme a été convenu en faveur du créancier et que celui-ci y renonce.

Pour autant, le titre exécutoire n’a pas à être exécutif, il peut s’agir d’un titre exécutoire à titre provisoire et alors le créancier poursuit la saisie à ses risques et périls.

 

B) La créance objet de la saisie

La créance objet de la saisie concerne seulement les créances de sommes d’argent du débiteur sur le tiers saisi, il ne peut s’agir d’une créance de livraison d’objets mobiliers corporels. Dès lors, toutes les créances sont concernées dès lors l’obligation du tiers saisi existe au jour de la saisie, la créance peut exister en germe dans le patrimoine du débiteur i.e. il peut s’agir d’une créance conditionnelle, d’une créance à terme, d’une créance à exécution successive sous réserve de particularité.

2 limites:

– aucune saisie n’est possible lorsque la créance fait l’objet d’une indisponibilité totale ou partielle

– les créances ne peuvent faire l’objet d’une saisie-attribution lorsqu’elles sont sorties du patrimoine du débiteur i.e. dès lors qu’il y a eu cession de créance.

 

Section 2: Les opérations de la saisie-attribution

Le déroulement emporte certains effets.

1) Le déroulement des opérations de saisie

La saisie débute par un acte de saisie (A) qui est ensuite dénoncé au débiteur (B).

 

A) L’acte de saisie-attribution

Lorsqu’il pratique une saisie-attribution, l’huissier dresse et signifie un acte de saisie au tiers saisi dont le contenu est règlementé (1), ensuite, le tiers saisi doit lui fournir certains renseignements (2), cette saisie peut en cas de besoin donner lieu à une consignation (3).

 

1) Le contenu de l’acte de saisie

L’huissier procède à la saisie en rédigeant un acte contenant des mentions requises à peine de nullité D92 Article 56:

– nom et domicile du débiteur si perso physique, dénomination et siège social si personne morale

– énonciation du titre exécutoire en vertu duquel la saisie est pratiquée

– le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêt et avec le cas échéant indication du taux d’intérêt, indication des intérêts à échoir dans un délai d’1 mois pour envisager une éventuelle contestation de la saisie

– indication que le tiers saisi est tenu personnellement envers le créancier et qu’il lui est interdit de disposer des sommes réclamées dans la limite de ce qu’il doit au débiteur

– la reproduction de textes: L91 Article 43 al.1 et 44 et D92 Article 60 à 66 relatifs à l’attribution immédiate de la créance au créancier saisissant, obligation de déclaration du tiers saisi et sanction, éventuelles contestation

– l’heure de la signification de l’acte: cette dernière mention n’est pas requise à peine de nullité

L’acte est ensuite signifié au tiers saisi par huissier, à personne ou à domicile. Cet acte met à la charge du tiers saisi une obligation particulière de déclaration.

 

2) L’obligation de déclaration du tiers saisi

D92 Article 59 al.1 le tiers saisi déclare sur le champ à l’huissier l’étendue de ses obligations à l’égard du débiteur ainsi que les modalités qui les affecte, il lui remet donc toutes les pièces justificatives qu’il détient, mention en est faite dans l’acte de saisie.

 

Contenu: les renseignements à révéler portent sur toutes les sommes dont le tiers est détenteur ainsi que sur les modalités qui les affectent, il convient d’y ajouter toutes les opérations juridiques antérieures concernant les dites créances (ex: déclaration d’une cession de créance). Ces renseignements doivent être fourni sur le champ i.e. immédiatement. Tout retard est assimilé à un refus de renseignement. Cette obligation de déclaration est particulièrement importante eu égard aux sanctions encourues par le tiers saisi.

 

Sanctions: D92 Article 60 prévoit 2 types de sanctions selon la gravité du manquement du tiers: le tiers peut soit refuser sans motif légitime d’apporter son concours à la saisie ou ne pas coopérer loyalement et donner des renseignements inexacts:

– refus d’apporter son concours: le tiers saisi peut être condamné à la demande du créancier à payer les causes de la saisie i.e. les sommes dues au créancier sous réserve de son recours contre le débiteur (souvent vain). Il peut donc être condamné à payer plus que ce qu’il doit au débiteur saisi.

– coopération déloyale: le tiers peut être condamné à payer des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère.

Certains auteurs considèrent que le tiers saisi peut être contraint, au besoin, sous astreinte à exécuter son obligation de déclaration.

Le tiers saisi peut toujours refuser de fournir les renseignements requis ou dans un délai raisonnable s’il se prévaut d’un motif légitime. 2 conceptions du motif légitime:

– conception objective: le tiers saisi ne pourrait se fonder que sur une règle de droit pour refuser de fournir les renseignements requis.

– conception subjective: le motif légitime est assimilé à la bonne foi du tiers saisi qui justifie son comportement par une excuse qui lui est personnelle.

Dans un premier temps, les juges du fond ont retenu une acception stricte du motif légitime i.e. la conception objective. Pourtant, le tiers saisi ne doit en réalité être condamné que s’il ne veut pas ou ne peut pas invoquer sa bonne foi ou s’il a commis une faute personnelle, c’est pourquoi la Cour de cassation s’est orientée vers la conception subjective, elle prend en compte les circonstances personnelles qui ont empêché le tiers saisi de fournir immédiatement les renseignements à l’huissier de justice (ex: l’huissier avait eu à faire à une secrétaire donc personne incompétente pour fournir ces renseignements). Il existe un contentieux important car les créanciers n’hésitent pas à agir contre le tiers saisi puisque la condamnation du tiers saisi leur permet d’obtenir indirectement une garantie supplémentaire pour le paiement de leurs créances. C’est pourquoi la Cour de cassation se montre particulièrement vigilante afin que la loi ne soit pas détournée de sa finalité (donner des renseignements et non une garantie supplémentaire).

 

3) La consignation éventuelle

D92 Article 57 tout intéressé (y compris le tiers saisi) peut demander à ce que les sommes saisies soient consignées entre les mains d’un séquestre. Ce séquestre peut être désigné à l’amiable ou à défaut par le JEX saisi par requête. Les fonds sont consignés jusqu’à l’issue de la procédure de saisie. La saisie réalisée, elle sera

 

B) La dénonciation de la saisie-attribution au débiteur

Le débiteur n’étant pas encore informé de la procédure, la saisie doit être portée à sa connaissance, c’est pourquoi l’acte de saisie lui est dénoncé par l’huissier par voie de signification. La dénonciation comprend à peine de nullité les mentions D92 Article 58:

– une copie du PV de saisi dressé auprès du tiers saisi

– mention en caractères très apparent que les contestations doivent être portée dans délai 1 mois suivant signification de l’acte, date d’expiration

– la désignation de la juridiction compétente pour connaître des contestations

L’acte rappelle au débiteur qu’il peut autoriser par écrit le créancier à se faire remettre sans délai les sommes qui lui sont dues, par le tiers saisi

Cette dénonciation peut intervenir dans les 8 jours de la signification de l’acte de saisie sous peine de caducité.

 

2) Les effets des opérations de saisie-attribution

L’objet même de la saisie-attribution est d’attribuer au créancier les sommes d’argent saisies. Dès lors, si le paiement fait partie intégrante de la procédure, il ne peut pas intervenir tant qu’il existe des contestations ou qu’il y a un risque de contestation, il convient donc de distinguer les effets des opérations de saisie en l’absence et en présence de contestations.

 

A) Les effets des opérations de saisie-attribution en l’absence de contestation

La saisie-attribution emporte 2 types d’effets: des effets immédiats et un effet différé.

1) Les effets immédiats de la saisie-attribution

L91 Article 43 la saisie-attribution a 2 effets immédiats. L’acte de saisie emporte, d’une part, l’attribution immédiate ET exclusive de la créance au saisissant (au créancier) et d’autre part, l’indisponibilité des sommes saisies à concurrence du montant pour lesquels la saisie est pratiquée.

 

a) L’attribution immédiate de la créance

La saisie-attribution opère une véritable cession judiciaire de créance. Cette attribution immédiate est attachée à la seule signification de l’acte de saisie. Dès cet instant, le tiers saisi a pour débiteur le créancier saisissant à concurrence des sommes pour lesquelles la saisie a été pratiquée. Ainsi, les sommes saisies sortent immédiatement du patrimoine du débiteur, dès lors, le créancier se trouve dans une situation particulièrement avantageuse car la saisie-attribution crée un véritable « privilège » à son profit. En effet, l’ouverture ultérieure d’une procédure collective à l’encontre du débiteur ne peut plus lui préjudicier puisque les créances ne figurent plus dans le patrimoine du débiteur. De même, la signification postérieures de saisies attribution pratiquées par d’autres créanciers, même privilégiés, ne remet pas en cause l’attribution immédiate de la créance. Cette saisie exclut donc tout concours entre les créanciers sauf s’il y a signification le même jour de saisie entre les mains du même tiers et alors les saisies sont réputées simultanées, ainsi, si les sommes saisies ne permettent pas de désintéresser tous les créanciers, ces derniers entre en concours, ils seront donc payés au marc le franc sans que l’on tienne compte des éventuelles causes de préférence, i.e. par tête.

 

Cependant, il existe une réelle exception au principe d’attribution immédiate de la créance. En effet, la saisie-attribution pratiquée sur une créance indisponible dans les mains d’un tiers n’a aucun effet attributif, c’est notamment le cas lorsque la saisie-attribution est faite entre les mains d’un séquestre (en vertu précédente saisie-attribution).

 

b) L’indisponibilité des sommes saisies

L’indisponibilité interdit toute opération juridique sur les sommes saisies.

Dans les relations entre le créancier et le tiers saisi, l’indisponibilité est importante car le créancier ne peut être payé immédiatement. L’attribution immédiate ne signifie pas le paiement immédiat, la créance pouvant être notamment à terme.

Dans les relations entre le débiteur et le tiers saisi, l’indisponibilité interdit toute opération entre eux deux, l’indisponibilité interdit au tiers saisi de payer le débiteur d’origine au risque de devoir procéder à un second paiement (au profit du créancier saisissant) « qui paye mal, paye deux fois ». Cette indisponibilité fait également obstacle à toute éventuelle compensation, novation, cession ou remise de dette de la part du débiteur au profit du tiers saisi. Il ne peut plus y avoir d’opération juridique sur la créance entre le tiers saisi et le débiteur.

L’indisponibilité est limitée au montant des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée.

ex: A a une créance contre B de 200, saisie-attribution auprès de C qui devait 500 à B. L’indisponibilité ne vaut que pour 300.

 

2) L’effet différé de la saisie-attribution: le paiement du créancier

En principe, le paiement du créancier est différé mais dans certains cas, il peut être anticipé.

 

a) Le principe: le paiement différé

L91 Article 45 en l’absence de contestation dans le mois de dénonciation de la saisie, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée. Pour cela, il justifie auprès du tiers saisi d’un certificat de non contestation qui lui est délivré par le greffe ou qui peut être établi par l’huissier qui a procédé à la saisie. Ainsi, le créancier saisissant doit attendre l’expiration du délai d’1 mois laissé au débiteur pour contester la saisie, avant de pouvoir obtenir le paiement de la créance.

Au terme de ce délai d’1 mois, le tiers saisi procède au paiement ce qui emporte des conséquences. Ce paiement au profit du créancier saisissant éteint à concurrence des sommes versées l’obligation du débiteur à l’égard du créancier saisissant mais elle éteint aussi l’obligation du tiers saisi à l’égard du débiteur. Du fait de cette double extinction (de deux créances), le créancier en informe le débiteur et délivre une quittance au tiers saisi (pour qu’il puisse justifier de l’extinction de sa dette à l’égard du débiteur). Le créancier saisissant conserve ses droits à l’égard du débiteur tant que le tiers saisi n’a pas payé la créance, sous réserve que l’absence de paiement ne soit pas en réalité lié à la négligence de du créancier. En effet, en cas de négligence du créancier, il perd ses droits à concurrence des sommes dues par le tiers saisi.

ex: A créancier saisissant est créancier de 300, B débiteur saisi est créancier de 100. En pratiquant la saisie, A peut obtenir le recouvrement de 100, il pourra toujours agir auprès de B pour 200. Si A ne fait rien, il perd ses droits à auteur de 100, il ne pourra demander que 200 à B.

 

b) Les exceptions: le paiement anticipé

2 cas dans lequel le débiteur peut autoriser la remise anticipé des fonds

– D92 Article 58 al dernier le débiteur peut autoriser par écrit le créancier à se faire remettre sans délai par le tiers saisi les sommes qui lui sont dues.

– D92 Article 61 al.2 le paiement anticipé peut intervenir avant l’expiration du délai de contestation si le débiteur déclare par écrit ne pas contester la saisie.

 

B) Les effets des opérations de saisie-attribution en cas de contestation

En cas de contestation, la procédure devient nécessairement judiciaire.

 

1) La procédure de contestation

La procédure de contestation relève de la compétence exclusive du JEX. Si la simplicité et la rapidité de la saisie-attribution ont supprimé beau nombre d’incident, toutes les contestations n’ont pas pour autant disparu. Ces contestations doivent être formées dans le mois de la dénonciation de la saisie au débiteur. Ces contestations sont ensuite dénoncées à l’huissier de justice par LRAR. Si les contestations émanent du débiteur, le tiers saisi en est informé par lettre simple. Dès lors, toutes les parties à la procédure de saisie-attribution peuvent élever une contestation. 3 types de contestations possibles:

– les contestations du débiteur: elles peuvent porter sur le non respect des conditions de fond ou sur l’irrégularité de la procédure de saisie, le débiteur peut tout à fait se prévaloir à ce titre d’une éventuelle compensation.

– les contestations du tiers saisi: même si c’est rarissime, le tiers saisi peut contester l’existence ou le montant de sa dette envers le débiteur.

– les contestations du créancier: un litige peut se nouer entre le créancier et le tiers saisi notamment à propos des renseignements que le tiers saisi doit lui fournir. Le créancier peut aussi se voir opposer un refus de paiement de la part du tiers saisi et alors le créancier ne peut faire autrement que de saisir le JEX, le JEX pourra alors délivrer au créancier un titre exécutoire contre le tiers saisi. Hypothèse d’une pluralité de saisies opérées le même jour, différents entre les créanciers saisissants.

 

2) Les effets de la contestation

Pour éviter les contestations purement dilatoires, le juge peut ordonner à titre provisionnel le paiement d’une somme d’argent en prescrivant, le cas échéant, des garanties si le montant de la créance du saisissant ou encore si la dette du tiers saisi n’est pas sérieusement contestable. De plus, si la contestation ne concerne qu’une partie de la dette, le juge peut tout à fait ordonner l’exécution de la saisie pour la partie de la dette non contestée, il y aura alors exécution partielle de la saisie-attribution.

Dès lors, le JEX peut rendre différents types de décisions:

– accueillir totalement la contestation: la saisi attribution perd sa raison d’être, la procédure s’arrête, le juge ordonne la mainlevée de la saisie-attribution.

– accueillir partiellement la contestation: le juge donne effet à la saisie-attribution uniquement pour un montant qu’il détermine (ex: contestation relative aux intérêts).

– rejeter la contestation: la procédure se poursuit, le tiers saisi doit payer le créancier

Dès lors que le juge a tranché la contestation, la créance est définitivement acquise au créancier saisissant, il pourra donc demander son paiement au tiers saisi sur justification de la décision rejetant ou accueillant partiellement la contestation. Le tiers saisi payera le créancier avec les effets classiques du paiement.

 

Chapitre 2: Les procédures spécifiques de saisie des créances

 

Il en existe 2 catégories: les saisies attribution de créances particulières (Section 1) et les procédures spéciales relatives à certaines créances (Section 2).

 

Section 1: Les saisies-attribution particulières

Il en existe 2: la saisie-attribution des créances à exécution successive (1) et la saisie-attribution des comptes bancaires (2).

 

1) La saisie-attribution des créances à exécution successive

Cette saisie reprend les conditions et la procédure de la saisie-attribution de droit commun sous réserve des spécificités tenant au fait qu’il s’agit d’une créance d’une nature particulière (exécution successive). Ces particularités concernent essentiellement le paiement D92 Article 69 à 72.

En l’absence de contestation dans le mois de la dénonciation de la saisie au débiteur, le tiers saisi doit payer le saisissant sur présentation du certificat délivré par le greffe ou l’huissier attestant de l’absence de contestation. Dans ce cas, au fur et à mesure des échéances, le tiers saisi se libère entre les mains du créancier ou de son mandataire qui en donne alors quittance et en informe le débiteur (le débiteur sera ainsi payé en plusieurs fois).

En cas de contestation, un séquestre désigné soit par accord amiable soit sur requête par le juge de l’exécution reçoit les échéances. Si les sommes consignées auprès du séquestre sont suffisantes pour désintéresser le créancier, le juge saisi des contestations ordonne en même temps la mainlevée de la saisie et le greffe en informe le tiers saisi.

Le tiers saisi doit payer jusqu’à l’extinction de la dette du saisi et en est d’ailleurs informé par le créancier saisissant ou jusqu’à l’extinction de sa propre dette et dans ce cas il doit en aviser le créancier saisissant. Cette information du tiers saisi ou du créancier saisissant selon les cas, relative à l’extinction de la dette se fait par LRAR.

 

2) La saisie-attribution des comptes bancaires

La saisie-attribution des comptes bancaires présente 4 spécificités par rapport à la saisie-attribution de droit commun, D92 Article 73 à 79, elles concernent l’obligation de déclaration (A), le contenu de l’acte de dénonciation de la saisie au débiteur (B), l’indisponibilité (C) et la liquidation des opérations en cours (D).

 

A) L’obligation spécifique de déclaration

Le banquier (tiers saisi) doit non seulement déclarer tous les comptes ouverts dans son établissement lorsqu’un huissier se présente, au nom de son client : les comptes de dépôt, les comptes courants, un PEL etc. ainsi que le solde de ces comptes dans l’état où ils se trouvent au jour de la saisie. Dans le silence des textes, le banquier doit mentionner aussi bien les soldes créditeurs que les soldes débiteurs. Le banquier ne peut opposer le secret professionnel pour refuser de fournir ces renseignements, dans le cas contraire il peut être condamné à payer les causes de la saisie.

 

B) La dénonciation de la saisie au débiteur

Lorsque la saisie-attribution est pratiquée sur un compte bancaire, l’acte de dénonciation comprend les 3 mentions de l’Art.58 (cf. supra.) ainsi qu’une mention supplémentaire spécifique depuis le 1er déc. 2002 : on doit y trouver l’indication que le titulaire du compte peut demander au tiers saisi (le banquier), dans les 15 jours de la saisie, la mise à disposition d’une somme d’un montant maximum égal au RMI pour un allocataire dans la limite du solde créditeur du compte au jour de la réception de la demande.

 

C) Le régime particulier de l’indisponibilité

En matière de saisie-attribution de droit commun, l’indisponibilité vaut uniquement pour le montant de la créance cause de la saisie.

En revanche en matière de saisie-attribution de comptes bancaire, D92 Article 74 l’acte de saisie rend indisponible l’ensemble des comptes du débiteur qui représentent des créances de sommes d’argent, l’indisponibilité est donc totale. Cette règle a un effet pervers pour les particuliers et les entreprises qui voient l’intégralité de leurs comptes bancaires bloqués (comment peuvent-elles alors payer ?). Ainsi, une pratique bancaire s’est développée pour limiter ces travers, elle repose sur une lecture extensive de l’article 76 al.2 D92, elle permet de limiter pour partie l’indisponibilité dès lors qu’une garantie est offerte au créancier.

Cependant, cette règle de l’indisponibilité totale connaît 2 exceptions :

– au vue des renseignements fournis par le tiers saisi (banquier), le créancier saisissant peut limiter l’effet de la saisie à certains comptes du débiteur, dans ce cas l’indisponibilité ne sera que partielle mais cela selon le bon vouloir et à l’initiative du créancier.

– accord des parties ou décision du JEX : par l’effet d’un accord entre les parties ou d’une décision du JEX, il peut être mis fin à l’indisponibilité totale de la saisie des comptes bancaires par la constitution d’une garantie irrévocable pour le montant des sommes réclamée. C’est sur cette exception que s’est développée la pratique bancaire qui admet une garantie non irrévocable.

 

D) La liquidation des opérations en cours

Le solde des comptes bancaires peut être affecté par la régularisation d’opérations en cours au moment où est pratiquée la saisie.

L91 Article 47 les opérations en cours sur les comptes bancaires lors de la saisie doivent être liquidées dans les 15 jours ouvrables. Ainsi, les opérations créditrices et débitrices sont comptabilisées.

Au crédit se trouveront toutes les remises antérieures à la saisie en vue de l’encaissement de chèques ou d’effets de commerce non portés en compte au jour de la saisie (car technique des dates de valeur).

Au débit se trouveront les chèques remis à l’encaissement avant la saisie (tirés par le débiteur) ainsi que les retraits en billetterie.

Cependant, ces opérations créditrices ou débitrices n’affectent le compte que dans la mesure où leur résultat cumulé est négatif et supérieur aux sommes non frappées par la saisie au jour de leur règlement.

ex: ensemble des opérations créditrices fait 100, débitrices 50, au final solde de + 50, n’affecte pas le montant des sommes saisies.

ex: si l’inverse, solde de – 50, si le créancier a saisi 300 il n’a pu que saisir 300 moins le débit soit 250.

Si le total des opérations en cours au moment de la réalisation de la saisie se traduit par un débit, celui-ci s’impute en priorité sur les sommes qui excédaient le montant de la créance du saisissant au jour de la saisie. A ce titre, si ce débit doit être imputé sur les sommes rendues indisponibles par la saisie, la banque doit fournir un relevé de toutes les opérations qui ont affecté les comptes depuis le jour de la saisie.

ex: saisie pour 1.000 euros sur un compte de 5.000, il reste 4000 de disponible, la liquidation des opérations s’élève à 5.000 euros, tout sera imputé. ??

ex: idem mais opérations liquidatives 3.000, sont imputés sur les 4.000. ??

 

Si le débiteur est titulaire de plusieurs comptes, le paiement s’effectue en prélevant en priorité les fonds disponibles à vue sauf si le débiteur prescrit un autre ordre de paiement.

 

Section 2 : Les procédures spéciales de saisies relatives à certaines créances

Les procédures spéciales de saisie de créances concernent la saisie des rémunérations du travail (1) et le recouvrement des créances alimentaires (2)

 

1) La saisie des rémunérations du travail

Avant même la réforme, la saisie des rémunérations du travail obéit à des règles spécifiques en raison du caractère alimentaire et donc vital de la créance objet de la saisie.

Seule une partie des rémunérations du travail est saisissable (A), les opérations de saisie en tant que telles présentent des particularités (B) et les dernières particularités sont relatives à la cessation de la saisie (C).

 

A) La fraction saisissable des rémunérations du travail

Par rémunérations du travail on entend les sommes dues à titre de rémunération aux personnes salariées travaillant (salaires et primes) et ce, que le contrat de travail soit ou non en cours d’exécution. Ainsi a été admise la saisie du montant d’une condamnation prononcée par le Conseil de prud’homme à titre de rappel de salaire et de congés payés.

En revanche, les frais remboursés aux salariés sont exclus des sommes saisissables.

Une partie seulement des rémunérations du travail sont saisissable. La partie insaisissable est inversement proportionnelle au montant de la rémunération du travail : elle est d’autant plus élevée que le montant de la rémunération du travail est faible. Cela se comprend car lorsque le débiteur a de faibles revenus, il consacre une part importante de son salaire aux dépenses alimentaires.

Code du travail Article R145-2 fixe la proportion, les seuils sont révisés annuellement par décret en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation. Aujourd’hui décret n°2006-1738 du 23 déc. 2006 applicable depuis le 1er jan. 2007.

De 0 et 3310 euros inclus, rémunérations saisissables de 1/20, de 3310 à 6500, saisissable à raison 1/10 … 12920 à 16120 1/3, 16120 à 19370 2/3, au-delà de 19370 intégralement saisissable.

Ces seuils sont en fait majorés de 1250 euros par personne à charge du débiteur sur justification.

 

En principe, cette insaisissabilité partielle n’est pas opposable au créancier d’aliments. Cependant, avant même la réforme, la Cour de cassation a limité cette règle, elle considère en effet que le débiteur ne doit pas être privé d’un minimum de survie. Lors de la réforme, le législateur a entériné la solution jurisprudentielle en décidant que dans tous les cas, le débiteur doit conserver une partie de sa rémunération. La somme laissée au débiteur au titre de ce minimum de survie correspond au montant du RMI pour un allocataire lorsque le débiteur est seul.

 

On distingue donc 3 parties dans les rémunérations perçues par le débiteur :

– 1ère partie correspondant au RMI : absolument insaisissable même par un créancier alimentaire, au 1er jan. 2007 440,86 euros

– 2ème partie correspondant à la partie qui excède le RMI mais qui ne figure pas encore dans la fraction saisissable : ne peut être saisie que par les créanciers d’aliments, leur paiement est imputé en priorité sur cette 2ème partie, ce n’est que s’ils n’obtiennent pas satisfaction que l’on puisera sur la 3ème partie

– 3ème partie : fraction saisissable en vertu de la loi (sens large) par tous les créanciers. Si un créancier d’aliment n’a pas été intégralement désintéressé sur la partie 2, il est payé sur la partie saisissable avant les autres créanciers.

 

B) La procédure de saisie des rémunérations

Code du travail Article L145-1 à -3, contrairement aux autres mesures d’exécution sur des biens meubles, cette saisie des rémunérations du travail a nécessairement un caractère judiciaire.

La saisie des rémunérations du travail suppose l’intervention du juge d’instance par dérogation à la compétence du JEX. ATTENTION

Il s’agit du juge d’instance du lieu où demeure le débiteur qui est compétent pour connaître de cette saisie.

Cette saisie comporte une particularité car les opérations de saisie sont obligatoirement précédées d’une tentative de conciliation.

 

1) La tentative de conciliation

Eu égard à ses effets, la saisie des rémunérations du travail ne doit être pratiquée qu’en l’absence d’accord entre le débiteur et le créancier, tout doit être mis en œuvre pour obtenir un accord entre le créancier et le débiteur avant la mise en œuvre de la saisie. La saisie est donc toujours précédée à peine de nullité, d’une tentative de conciliation.

Pour y parvenir, le juge d’instance est saisi par requête qui est selon les cas remise ou adressée au greffe du tribunal, requête à laquelle doit être jointe une copie du titre exécutoire. Cette requête contient :

– des mentions permettant l’identification du débiteur et du tiers saisi (l’employeur)

– montant de la créance et taux d’intérêt

– précisions relatives aux modalités de versements des sommes dues

Après le dépôt, le greffe informe le créancier avec un récépissé lorsqu’il a fait sa demande verbalement, ou par lettre simple lorsqu’il a envoyé sa requête : il indique les lieux, jours et heures de la tentative de conciliation. Le greffe convoque le débiteur en vue de la conciliation, elle est envoyée par LRAR. La convocation du débiteur contient un certain nombre de mentions :

– mentions éléments d’indentification du créancier

– date et lieu de la tentative de conciliation

– sommes réclamées par le créancier : montant de la créance, intérêts échus et à échoir avec taux d’intérêt

– mention selon laquelle le débiteur doit élever lors de l’audience de conciliation toutes les contestations qu’il pourrait faire valoir le cas échéant

– reproduction de dispositions relatives aux possibilités et modalités de représentation devant le juge d’instance

Cette convocation à l’audience de conciliation doit être fait 15 jours au moins avant la date fixée pour l’audience.

 

Lors de l’audience :

– si le créancier ne comparaît pas, le défendeur peut requérir un jugement mais le juge d’instance peut toujours renvoyer l’affaire à une audience ultérieure dans la perspective d’engager une conciliation.

– si le débiteur ne comparaît pas : en principe, il est procédé à la saisie, sauf si exceptionnellement le juge décide qu’une nouvelle convocation est nécessaire.

Lors de l’audience de conciliation, le juge tente de concilier les parties :

– il parvient à un accord entre le créancier et le débiteur : la saisie ne se justifie plus, il y aura paiement volontaire.

– à défaut d’accord, le juge va vérifier le montant de la créance et va statuer sur les éventuelles contestations du débiteur. Le juge rend un procès verbal de non conciliation qui va permettre de procéder à la saisie.

 

2) Les opérations de saisie

a) Le déroulement des opérations de saisie

L’originalité de la saisie des rémunérations du travail réside dans le fait que c’est le greffier du TI qui est chargé de procéder à cette saisie (et non un huissier de justice).

La saisie est pratiquée par le greffier du TI. En principe, il est procédé à la saisie dans les 8 jours de l’établissement du PV de non conciliation. Toutefois, si l’audience de conciliation a donné lieu à un jugement (le juge a tranché des contestations), ce délai de 8 jours ne court qu’à l’expiration des délais de voies de recours contre ce jugement.

L’acte de saisie (dressé par le greffier et non par un huissier) contient des mentions :

– éléments d’indentification du débiteur et du créancier

– précisions relatives aux sommes réclamées : montant créance avec taux d’intérêt et intérêt échus et à échoir

– le mode de calcul de la fraction saisissable du salaire et les modalités de règlement de cette fraction saisissable

– l’injonction consécutive à l’obligation de déclaration pesant sur le tiers saisi (employeur), de déclarer les sommes dues au salarié

– la reproduction des textes relatifs aux différentes obligations de l’employeur (obligations de déclaration et de paiement)

 

L’acte de saisie est ensuite porté à la connaissance de l’employeur et du débiteur. Cet acte est notifié à l’employeur par LRAR puis une copie de cet acte en est donnée au débiteur par lettre simple, copie dans laquelle il est indiqué au débiteur qu’en cas de changement d’employeur, la saisie sera poursuivie entre les mains du nouvel employeur.

 

b) Les effets de la saisie en l’absence d’incident

En l’absence de contestation et d’incident, la notification de l’acte de saisie emporte 2 obligations à la charge de l’employeur : chronologiquement, l’employeur a d’une part une obligation de déclaration et d’autre part une obligation de paiement.

l’obligation de déclaration: dans les 15 jours où l’acte a été envoyé par LR à l’employeur, l’employeur doit faire connaître la situation de droit du salarié ainsi que les éventuelles cessions ou les autres saisies en cours d’exécution. Sauf motif légitime, en cas d’inexécution ou de mauvaise exécution de cette obligation, l’employeur peut être condamné par le juge, notamment au paiement d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 3000 euros depuis le 1er mars 2006.

 

l’obligation de permettre le paiement du créancier: l’employeur a l’obligation de permettre le paiement du créancier car concrètement il ne paye pas le créancier, il adresse tous les mois au greffe du TI un petit chèque d’un montant égal à la fraction saisissable des rémunérations du travail, ce chèque est libellé directement au nom du créancier s’il est seul à avoir pratiqué une saisie, il va être transmis au créancier par le greffe.

Cette obligation fondamentale est assortie d’une sanction efficace : en cas d’inexécution, l’employeur peut être déclaré débiteur des retenues qu’il aurait dû opérer i.e. être personnellement tenu à hauteur de la fraction saisissable.

 

c) Les effets de la saisie en cas d’incident

2 types d’incidents : certains sont relatifs à la pluralité de créanciers, d’autres à des circonstances directement liées aux parties à la saisie.

 

c.1) Les incidents relatifs à la pluralité de créanciers

Tout créancier, même en l’absence de tentative de conciliation, peut intervenir à la saisie pour participer à la répartition des sommes saisie. Elle se fait par requête remise contre récépissé ou adressée au greffe. Le greffe notifie l’intervention du ou des créanciers au débiteur et au créancier qui sont déjà dans la procédure de saisie en cours. Cette intervention peut être constatée à tout moment dès lors que la procédure de saisie est encore en cours.

De plus, l’employeur est informé qu’il doit verser les sommes saisissables à l’ordre du régisseur installé auprès du greffe du TI, puis les sommes versées sont réparties entre tous les créanciers saisissants au moins tous les 6 mois sauf si les sommes permettent de désintéresser les créanciers dans un laps de temps plus court.

Un état de répartition (des sommes entres les créanciers) doit être dressé, il peut être contesté dans les 15 jours de sa notification (à chaque créancier). A défaut de contestation, les sommes sont attribuées aux créanciers tels que fixé dans l’état de répartition. en cas de contestation, le versement ne peut intervenir qu’après l’intervention du juge.

Il existe encore des règles spécifiques lorsque l’incident résulte d’un avis à tiers détenteur ou d’une demande de paiement direct.

 

c.2) Les incidents liés à des circonstances liées aux parties

pluralité d’employeurs: lorsque le débiteur perçoit des rémunérations de plusieurs employeurs, le juge doit déterminer le ou les employeurs chargés de procéder aux retenues des sommes saisissables. Si un seul employeur peut verser l’intégralité des sommes saisissables, la saisie sera, pour simplifier, pratiquer sur lui.

 

cessation du lien de droit entre le débiteur et l’employeur (fin du contrat de travail) : l’employeur en informe le greffe et n’a plus à transmettre la fraction saisissable tous les mois. Les fonds détenus par le régisseur du greffe du TI sont normalement répartis entre les créanciers (même si le délai de 6 mois n’est pas encore atteint).

 

changement d’employeur: la saisie est poursuivie entre les mains du nouvel employeur, ceci, sans conciliation préalable (même saisie poursuivie et non nouvelle saisie). La demande de poursuite de la saisie doit être présentée dans l’année de l’avis donné par l’ancien employeur avertissant le greffe de la cessation du contrat de travail, à défaut, la procédure de saisie initiale prend fin.

 

changement de domicile du créancier ou du débiteur:

— le créancier changeant de domicile doit en aviser le greffe.

— En cas de changement de domicile du débiteur 2 cas de figure selon que ce changement s’accompagne ou non d’un changement d’employeur :

—- changement de domicile (ressort d’un autre TI) et d’employeur : le créancier poursuit la saisie devant le nouveau TI territorialement compétent, dans ce cas, sa demande doit être présentée dans l’année de l’avis donné par l’ancien employeur à la suite de la cessation du contrat de travail.

—- changement de domicile uniquement (ressort d’un autre TI) : la saisie est poursuivie devant le nouveau TI territorialement compétent, les dossiers de saisie sont transmis au nouveau tribunal territorialement compétent. Une fois la transmission effectuée, le greffe du TI initialement compétent en avise les créanciers car la procédure se poursuit devant un autre TI.

 

C) La cessation de la saisie des rémunérations du travail

La saisie des rémunérations du travail prend fin par la mainlevée, elle sera le plus souvent amiable (émane de l’accord entre créancier et débiteur). Si le débiteur demande la main levée, il doit remettre ou adresser une déclaration au greffe à la quelle il doit joindre l’accord formel et écrit des créanciers. En l’absence d’accord de tous les créanciers, la saisie prend uniquement fin à l’égard de ceux qui ont consenti à la mainlevée (mainlevée partielle).

 

La mainlevée sera judiciaire dès lors que le juge pourra constater l’extinction de la dette du débiteur, à défaut d’accord amiable. La mainlevée est notifiée par LRAR dans les 8 jours à l’employeur, elle le libère de ses obligations à l’égard des créanciers.

 

2) Le recouvrement des créances alimentaires

Le caractère alimentaire de la créance à recouvrer justifie parfois une simplification de la procédure de recouvrement. 2 procédures spécifiques : recouvrement direct (A) et recouvrement public (B), on peut ajouter la procédure de recouvrement des pensions alimentaires des enfants mineurs par les CAF (C).

 

A) Le recouvrement direct des créances alimentaires

Loi du 2 jan. 1973 cette procédure permet au créancier d’aliment d’obtenir rapidement et sous des formes simplifiées le recouvrement de sa créance.

 

1) Les conditions

La procédure est subordonnée à 3 conditions cumulatives :

– l’existence d’une créance alimentaire résultant d’une décision de justice exécutoire. Au titre des créances alimentaires sont visées les pensions consécutives à l’obligation alimentaire fondées selon les cas sur un lien de parenté ou d’alliance, la prestation compensatoire versée en cas de divorce lorsqu’elle prend la forme d’une rente, les subsides dus à un enfant naturel dont la filiation n’a pas été établie (action à fins de subside).

– un défaut de paiement inexcusable : cette procédure de recouvrement particulière peut être mise en œuvre dès qu’une échéance de la pension n’est pas payée à son terme. Le créancier d’aliment devra prouver le caractère inexcusable du défaut. Le créancier pour établir la carence devra mettre en demeure le débiteur par LRAR ou par huissier de justice.

– l’existence d’un tiers saisi : le créancier peut exercer son droit au recouvrement de sa créance à caractère alimentaire contre tout tiers qui doit au débiteur d’aliments des sommes (ex : salaires) ou contre toute personne dépositaire de fonds (ex : banquier) du débiteur.

Il n’est nullement nécessaire de dresser une sommation de payer au débiteur (un commandement de payer suffit).

 

2) La procédure

Le créancier s’adresse à l’huissier du lieu de sa résidence (car les créances alimentaires sont par exception, portables et non quérables).

La procédure suppose que l’huissier de justice ait des renseignements suffisant sur le débiteur et le tiers à saisir : les services administratifs de l’Etat, des collectivités territoriales peuvent lui communiquer toutes les informations nécessaires.

L’huissier notifie au tiers dans les 8 jours la demande de paiement direct par LRAR. La lettre reprend le décompte des sommes dues dans la limite de 6 mois (max 6 mois d’arriéré car si pas agi pendant 6 mois c’est qu’en avait pas besoin). Cette procédure vaut pour les échéances postérieures à la demande. L’huissier informe ensuite le débiteur par LRAR.

 

3) Les effets

Les effets sont énergiques, la notification de la demande de paiement à des effets énergique car elle vaut attribution des sommes au créancier. De plus, le tiers saisi doit payer directement le créancier sur les sommes qu’il doit au débiteur. Ce paiement se fait aux échéances arrêtées par le jugement fixant la pension alimentaire.

De plus, l’obligation du tiers n’est pas suspendue en cas de contestation de la demande de paiement direct. Le débiteur doit contester la demande devant le TI ???

 

4) La fin de la procédure

Par l’extinction de la créance d’aliment ou par la mainlevée amiable. La mainlevée peut être demandée par le débiteur sur production d’un certificat délivré par huissier attestant qu’un jugement a éteint la pension ou qu’elle n’est plus due en raison de la loi.

Par l’extinction de la dette du tiers saisi, dans ce cas, le tiers saisi averti dans les 8 jours le créancier d’aliments en justifiant de la cessation ou de la suppression des rémunérations ou de la clôture des comptes bancaires.

La procédure de recouvrement direct des pensions alimentaires n’a pas toujours donné satisfaction au créancier donc loi du 11 juillet  1975 a introduit la procédure de recouvrement public

 

B) Le recouvrement public des pensions alimentaires

Plus efficace la procédure de recouvrement direct, elle est faite par les agents du Trésor public.

1) Les conditions

La procédure de recouvrement public complète la procédure de recouvrement direct, elle est donc soumise aux conditions de fond de la procédure de recouvrement direct.

Cette procédure est subsidiaire par rapport à la procédure de recouvrement direct, pour y avoir recours, le créancier d’aliments doit justifier d’avoir usé en vain d’une autre voie d’exécution. Pour ce faire il fourni une attestation par exemple du greffier de la juridiction mentionnant échec ou du huissier de justice mentionnant diligence ayant échoué.

2) La procédure

La procédure se déroule en deux phases: une phase de vérification (a) et une phase d’exécution (b).

 

a) La phase de vérification

La procédure débute par une demande présentée au procureur de la République du TGI dans du ressort du domicile du créancier (créances alimentaire sont portables). Cette demande n’est soumise à aucun formalisme : papier libre, envoi par LRAR, dépôt auprès des services du ministère public etc. La requête contient des renseignements relatifs au débiteur, on y joint les documents justifiant les procédures suivies ayant échoué et d’une expédition ou d’une copie certifiée conforme du jugement fixant la pension alimentaire. Saisi de la demande, le proc en examine la régularité avant de rendre sa décision et de la faire connaître au demandeur par lettre simple. 2 possibilités :

– le proc rejette la demande : la procédure s’arrête, le créancier peut contester la décision devant le TGI qui statue alors rapidement, une ordonnance sera rendue mais n’est susceptible que d’un pourvoi en cassation.

– le proc accueille la demande : il doit notifier au débiteur sa décision par LRAR confirmée par lettre simple qui précisent les sommes sur lesquelles porte la procédure, la lettre informe le débiteur qu’il doit se libérer de ces sommes dans les mains du comptable public, qu’il peut contester la procédure et que ses contestations doivent être portées devant le TGI. Le proc de la République adresse au trésorier payeur général (TPG) du département de son ressort un état exécutoire émis contre le débiteur, indiquant le montant des termes échus et impayés au titre des 6 derniers mois et des termes échus et à échoir à compter de cette date. Ensuite, phase d’exécution.

NB : LRAR donc peu de frais.

 

b) La phase d’exécution

Le TPG du département confie au comptable public du domicile du débiteur l’état exécutoire, le comptable public va recouvrer les sommes dues par le débiteur majorées de 10 % pour les frais de recouvrement. Le recouvrement a lieu selon les procédures applicables en matière de contributions directes. Administration des services de l’Etat et des collectivités publiques communiquent au comptable tous les documents en leur possession.

A compter de la notification de la décision du procureur de la république qui accueille la demande de recouvrement, le débiteur doit s’acquitter de sa dette entre les mains du comptable du Trésor qui paye ensuite le créancier. Il ne peut plus se libérer directement entre les mains du créancier.

Si le débiteur paye les arriérés et les termes de la pension pendant 12 mois consécutifs, il peut être autorisé, par le procureur de la République, à se libérer directement auprès du créancier.

En cas de nouvelle défaillance dans les 2 ans, le créancier pourra de nouveau solliciter une procédure de recouvrement public.

 

En réalité, lorsque le débiteur est totalement démuni, ces procédures spécifiques révèlent leurs propres limites, c’est pourquoi, en cas de nom paiement d’une pension alimentaire d’un enfant mineur, les CAF peuvent, le cas échéant, prendre le relai.

 

C) Le recouvrement des pensions alimentaires d’un enfant mineur par les Caisses d’allocations familiales

Loi du 22 déc. 1984 les enfants mineurs créanciers d’une pension alimentaire impayée bénéficient d’une aide spécifique pouvant prendre 2 formes :

– une procédure de recouvrement de la pension alimentaire impayée

– versement d’une allocation de soutien familial

La procédure de recouvrement suppose :

– le non paiement d’une pension alimentaire allouée par décision de justice à un enfant mineur

– l’échec d’une action civile de recouvrement

– un mandat donné à la CAF (de recouvrer les créances)

La CAF va dresser un état des frais de recouvrement et des sommes à recouvrer : recouvrement des termes échus dans les 2 années précédant la demande et des termes à échoir. L’état est rendu exécutoire par le préfet qui va le transmettre au TPG. Puis on procède comme pour le recouvrement public.

 

Si le débiteur est insolvable, le créancier pourra demander en parallèle le versement de l’allocation de soutien familial.

 

A ces procédures spécifiques doivent être ajoutées les mesures d’exécution portant sur les autres meubles incorporels mais ces autres mesures spécifiques peuvent en réalité déboucher sur une vente (vente des biens), elles s’apparentent donc d’avantage à la procédure de saisie-vente et c’est pourquoi même si la procédure porte sur des meubles incorporels, nous les traiterons dans les procédures d’exécution des meubles corporels.

 

 

 

 

Sous-titre 2: Les mesures d’exécution sur les meubles corporels

 

La saisie-vente, ancienne saisie exécution, constitue la procédure de droit commun applicable à la saisie des meubles corporels (chapitre 1), toutefois, il existe à côté des procédures spécifiques pour certains meubles corporels ou incorporels (chapitre 2).

 

Chapitre 1 : La saisie-vente

 

L91 Article 50 à 55, D92 Article 81 à 138 la saisie-vente est une saisie qui permet à tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible de faire procéder, après un commandement, à la saisie et à la vente des meubles corporels de son débiteur, dans ce cas, le créancier est payé sur le prix de vente des biens.

 

Section 1 : Les conditions de la saisie-vente

Si la saisie-vente vaut pour tous les meubles corporels (1), toutes les créances ne permettent pas d’y recourir car a un caractère subsidiaire (2).

 

1) Les conditions relatives au bien saisi

La saisie-vente vaut pour tous les meubles corporels appartenant au débiteur, qu’il soit en sa possession ou en celle d’un tiers. En sont exclus, les biens meubles incorporels et les immeubles i.e. les immeubles par nature ainsi que les immeubles par destination. Toutefois, il existe 2 exceptions :

– L91 Article 14-5 in fine : les immeubles par destination peuvent être saisis indépendamment du fonds lorsque la saisie est poursuivie pour le paiement du prix de ces immeubles. Cette exception se justifie au regard du privilège du vendeur.

– L91 Article 50 al.1 in fine en prévoyant saisi d’un bien chez un tiers permet la saisie-vente de biens à livrer

 

Tous les biens meubles corporels peuvent faire l’objet d’une saisie-vente dès qu’ils appartiennent au débiteur selon droit des biens, régime matrimonial, indivision. Même si le bien meuble corporel appartient au débiteur, le bien fondé de la saisie-vente dépend directement de la créance cause de la saisie.

 

2) Les conditions relatives à la créance cause de la saisie

En principe Article 50 L91, tout créancier peut procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur pour obtenir le recouvrement de sa créance.

Mais Article 51 L91 soumet la saisie-vente du mobilier se situant dans le local d’habitation du débiteur à certains conditions : en effet, le créancier ne peut pas pratiquer une saisie-vente pour recouvrer une créance non alimentaire inférieur ou égale à 535 euros dès lors que le recouvrement peut être obtenu par la saisie d’un compte de dépôt ou par la saisie des rémunérations du travail. C’est pourquoi la saisie-vente est en principe subsidiaire pour les petites créances. Si le créancier souhaite mettre en œuvre une saisie-vente pour une créance inférieure à 535 euros, il doit obtenir au préalable une autorisation du JEX (donnée si les autres saisies sont impossibles).

 

Section 2 : Les opérations de saisie

1) Le déroulement des opérations de saisie

Les opérations de saisie débutent par un commandement de payer (A), l’huissier pourra alors dresser un acte de saisie (B).

 

A) Le commandement de payer

Le commandement de payer comprend des mentions obligatoires (1) et ses effets conditionnent le déroulement ultérieur de la procédure de saisie (2).

 

1) Le contenu du commandement de payer

Le commandement de payer est un exploit d’huissier signifié en tout lieu où le débiteur se trouve. Cette signification ne peut avoir lieu à domicile élu. De plus, dans un souci d’efficacité et de rapidité, le commandement de payer peut être délivré en même temps que la signification du jugement lorsque le titre exécutoire est une décision de justice.

Le commandement de payer comprend à peine de nullité mention D92 Article 81 :

– mention du titre exécutoire en vertu duquel la mesure est poursuivie

– décompte des sommes réclamées en principal, frais et accessoires avec taux d’intérêt

– un commandement fait au débiteur d’avoir à payer la dette dans un délai de 8 jours en informant le débiteur qu’à défaut, il peut être contraint au paiement par la vente forcée de ses biens mobiliers.

Pour les créances non alimentaires d’un montant inférieur à 535 euros, le commandement de payer contient injonction ?? de communiquer dans les 8 jours à l’huissier l’adresse de son ou ses employeurs ou désignation de son ou ses comptes bancaires. Le débiteur a le choix de la mesure d’exécution : employeur ou banque. Si dans le délai de 8 jours, il n’a pas fourni ces renseignements, l’huissier pourra procéder à la saisie-vente dans les conditions de droit commun.

 

2) Les effets du commandement de payer

Le commandement de payer est valable pour une durée de 2 ans (il peut être invoqué pendant 2 ans), il a 3 effets principaux :

– il vaut mise en demeure de payer et fait donc courir les intérêts moratoires (par opposition aux intérêts compensatoires)

– il interrompt la prescription

– il faut courir un délai de 8 jours au terme duquel les biens du débiteur pourront être saisis s’il ne s’exécute pas volontairement : le délai lui permet de faire un paiement total ou partiel.

A l’expiration du délai de 8 jours, si le débiteur s’exécute intégralement, la procédure s’arrête. A défaut, l’huissier se déplace chez le débiteur pour procéder à la saisie en dressant un acte de saisie. Il ne peut agir avant l’expiration du délai de 8 jours mais doit agir dans les 2 ans sinon un nouveau commandement de payer est nécessaire avant de dresser l’acte de saisie.

  1. B) L’acte de saisie

2 cas de figure lorsque l’huissier se présente pour dresser l’acte de saisie: les biens se trouvent dans les mains du débiteur (1) ou d’un tiers (2).

 

1) L’acte de saisie des biens entre les mains du débiteur

En cas de besoin, l’huissier peut obtenir au préalable une autorisation de pénétrer dans les lieux et peut, le cas échéant, se faire assister si le débiteur est absent ou lui refuse l’entrée dans les lieux pour l’inventaire. Lorsque l’huissier se présent chez le débiteur 3 cas de figure :

– les locaux sont vides : l’huissier peut requérir des informations nécessaires pour retrouver le débiteur et pour poursuivre la procédure de saisie-vente.

– les biens garnissant les lieux n’ont aucun valeur marchande ou il s’agit uniquement biens insaisissables : l’huissier dresse un procès verbal de carence.

– des biens sont saisissables et ont une valeur marchande : il dresse l’acte de saisie. L’acte de saisie comprend mentions de D92 Article 94

— mention du titre exécutoire en vertu duquel

— désignation détaillée et précise des biens (pour éviter que le débiteur ne puisse y substituer des biens d’une valeur inférieure), photos peuvent être annexée

— si le débiteur est présent : déclarations éventuelles du débiteur au sujet d’une saisie antérieure des mêmes biens

— mentions en caractères très apparents que biens indisponibles, placés sous garde du débiteur … doit faire connaître saisie

— indication que le débiteur a délai d’1 mois pour procéder vente amiable

— personnes le cas échéant, doivent signer sinon huissier constate absence signature

— reproduction dispositions Article 314-6 CP, détournement d’objet saisi, D92 Article 107 à 109 dispositions sur vente amiable

 

Si l’huissier trouve des sommes en espèce, il doit respecter une procédure particulière. Elles peuvent être saisies dans la limite de la créance du créancier, elles sont consignées dans les mains de l’huissier qui en fait mention dans l’acte. L’huissier précise au débiteur qu’il a un délai d’1 mois à compter de la signification de l’acte pour former une éventuelle contestation devant le JEX.

 

Si le débiteur est présent, l’huissier lui remet une copie de l’acte de saisie qui vaut signification à personne.

Si le débiteur est absent, l’huissier signifie au débiteur l’acte de saisie à personne ou à domicile. Dans ce dernier cas, le débiteur a un délai de 8 jours pour informer l’huissier des éventuelles saisies antérieures su les biens et de lui en communiquer l’acte de saisie (PV de saisie).

 

Si l’on craint que le débiteur ne soit pas suffisamment vigilant pour la conservation des biens saisis, le JEX sur requête peut ordonner la remise des biens à un séquestre.

 

2) L’acte de saisie des biens entre les mains d’un tiers détenteur

Dans ce cas, sur présentation du commandement de payé signifié au débiteur et à l’expiration du délai de 8 jours laissé pour qu’il s’exécute volontaire, l’huissier peut saisir dans les biens d’un tiers les biens que celui-ci détient pour le compte du débiteur. L’huissier commence à inviter le tiers à déclarer les biens qu’il détient pour le compte du débiteur et parmi ceux-ci, ceux qui, éventuellement ont fait l’objet d’une saisie antérieure. Si le tiers est absent lorsque l’huissier se présente, l’huissier lui adresse une sommation d’avoir à déclarer dans un délai de 8 jours s’il est détenteur de biens pour le compte du débiteur et s’ils ont fait l’objet d’une saisie antérieure.

Le tiers a 3 possibilités:

– il refuse de répondre et/ou fait une déclaration inexacte ou mensongère: il peut être condamné au paiement des causes de la saisie.

– il déclare ne détenir aucun bien pour le compte du débiteur: l’huissier dresse un acte qui est remis ou signifié au tiers, avec l’indication en caractères très apparents des sanctions encourues en cas de déclaration mensongère. La procédure s’arrête si la déclaration est exacte.

– le tiers confirme la détention des biens: l’acte de saisie peut être dressé

mentions Article 101 D92:

– mentions du titre exécutoire

– mentions du nom et domicile du tiers

– déclaration du tiers et mention caractères très apparents des sanctions

– désignation des biens saisis

– mention en caractère très apparent que les biens sont indisponibles, qu’ils sont placés sous la garde du tiers, qu’ils ne peuvent être ni aliénés ni déplacés sauf cause légitime sous peine de sanction pénale et que le tiers est tenu de faire connaître à tout créancier l’existence de la procédure en cours.

– mention que le tiers peut refuser la garde des biens saisis

– mention que le tiers peut faire valoir…

– désignation de la juridiction compétente

– nom des personnes présentes, signature ou mention de refus

– reproduction des dispositions du CP

Si le tiers est présent, l’huissier lui remet l’acte, sinon, il lui signifie l’acte en lui laissant un délai de 8 jours pour préciser si les biens ont fait l’objet d’une précédente saisie. A l’issue de ce délai l’huissier informe le débiteur des opérations de saisie réalisées en lui signifiant la saisie réalisée entre les mains du tiers. L’huissier informe le débiteur qu’il dispose d’un délai d’1 mois pour procéder à la vente du ou des biens saisis.

 

2) Les effets des opérations de saisie

L’acte de saisie rend les biens indisponibles en attendant l’issue de la procédure. Les biens sont ainsi placés sous la garde du débiteur ou du tiers. Toutefois, le tiers peut refuser d’assumer cette garde et dans ce cas, l’huissier procède à la désignation d’un gardien et procède à l’enlèvement des biens. Les biens étant simplement indisponibles, le débiteur ou le tiers conserve l’usage des biens mais ils ne peuvent en aucun cas être aliénés ou déplacés sous peine de sanctions pénales pour détournement d’objets saisis. L’acte de saisie gèle la situation pendant un délai d’attente d’1 mois. Ce délai permet au débiteur de former une éventuelle contestation devant le JEX mais aussi de rechercher le cas échéant un acquéreur amiable pour ses biens car la vente amiable est une des issues de la saisie-vente.

 

Section 3 : Les issues de la saisie-vente

Si le débiteur ne s’exécute pas volontairement, la saisie-vente débouche sur la vente des biens saisis, 2 modalités:

 

1) La vente amiable des biens saisis

A compter de la notification de l’acte de saisie, le débiteur a 1 mois pour procéder à la vente amiable de ses biens, ce délai est impératif. La vente amiable est privilégiée car elle permet le plus souvent d’obtenir un meilleur prix notamment s’il s’agit d’un bien d’une nature spécifique. Cependant, en pratique, les propositions reçues après le délai d’1 mois ne sont pas automatiquement rejetées car elles sont souvent favorables au créancier.

Concrètement, le débiteur informe l’huissier par écrit des propositions d’achat des biens mobiliers saisis et lui indique le délai proposé par l’acquéreur pour consigner le prix. L’huissier communique ces propositions au créancier par LRAR. A partir de là, les créanciers ont un délai de 15 jours pour prendre partie (i.e. donner ou non leur accord), leur silence vaut acceptation des propositions. Si les propositions de vente sont acceptées directement ou par silence, le débiteur procède à la vente amiable du ou des biens saisis, le prix est consigné entre les mains de l’huissier du créancier saisissant. Le respect du délai de consignation est important à 2 points de vue:

– il conditionne le transfert de propriété et la délivrance du bien

– à défaut de consignation dans le délai convenu, la vente amiable est inopérante (il y aura vente forcée des biens saisis)

Si l’un des créanciers refuse les propositions faites par le débiteur, la vente aux enchères publiques est possibles mais n’est pas systématique. Elle ne peut intervenir avant l’expiration du délai d’1 mois imparti au débiteur pour vendre ses biens à l’amiable, délai qui est alors augmenté en cas de besoin, du délai de 15 jours laissé aux créanciers pour prendre partie. La vente amiable est favorisée au maximum. Finalement, ce n’est qu’à l’expiration d’un délai de 6 semaines (1 mois + 15 jours) qu’il sera procédé

 

2) La vente forcée des biens saisis

Des formalités préalables sont nécessaires avant de procéder à la vente par adjudication.

 

A) Les formalités préalables

Il en existe 2: une publicité pour obtenir le meilleur prix, un PV de vérification des biens saisis.

 

1) La publicité préalable

Cette publicité est obligatoire, elle est effectuée par affiche indiquant précisément les lieux, jours et heures de la vente aux enchères et la nature des biens saisis qui vont être vendus. Ces affiches sont apposées à la mairie de la commune où demeure le débiteur ainsi qu’au lieu de vente. La vente par adjudication peut également être annoncée le cas échéant par voie de presse, cette formalité plus coûteuse est souvent utilisée pour la vente des biens d’une certaine valeur ou présentant des spécificités.

Cette publicité a lieu au plus tôt 1 mois après l’acte de saisie éventuellement augmenté de 15 jours s’il y a eu des propositions de vente amiable, et au moins 8 jours avant la date fixée pour la vente forcée.

Le débiteur est informé par huissier des lieux, jours et heures de la vente aux enchères par huissier.

 

2) Le PV de vérification des biens saisis

Ce PV dresser la l’huissier permet de s’assurer qu’aucun bien n’a disparu ou été dégradé. Si des biens ont disparu ou été, l’huissier dresse un PV de disparition ou de détérioration.

2 conséquences:

– libère le gardien

– fixe la limite temporelle dans laquelle les créanciers saisissant ou opposant peuvent faire valoir leur droit sur le prix de vente. Après la rédaction de ce PV, les créanciers opposant ne sont plus recevable, est favorisé le créancier poursuivant.

 

B) La vente par adjudication

La vente forcée des biens saisis est faite par un officier ministériel: le commissaire priseur. Il a un monopôle dans la ville où se situe son office. Dans les communes où il n’y a pas de commissaire priseurs, la vente est réalisée par les notaires, huissiers, commissaires priseurs des villes avoisinantes. La vente est réalisée au lieu où se situent les biens saisis ou dans une salle des ventes. Si le déplacement des biens risque d’être onéreux ou difficile, la vente peut très bien se faire sur place.

L’adjudication est faite au plus offrant après 3 criées. Lorsque les enchères s’arrêtent, l’officier chargé de la vente rappel 2 fois le dernier prix avant de prononcer l’adjudication.

La vente est arrêtée lorsque le prix des biens vendus assure le paiement en principal, frais et intérêts de la créance cause de la saisie ainsi que les frais d’huissier.

L’adjudicataire doit payer le prix comptant et pour assurer l’effectivité des paiements, ceux-ci se font souvent en espèce ou par chèque de banque certifié. A l’issue de la vente l’officier ministériel dresse un acte avec les biens vendus, les montants perçus et la liste des adjudicataires.

Puisque le paiement se fait comptant, l’adjudicataire devient immédiatement propriétaire mais avec l’accord du commissaire priseur, il peut éventuellement verser le prix dans un délai convenu et alors il prendre possession du bien au moment du paiement.

La vente par adjudication produit tous les effets d’une vente à l’exception de la garantie des vices cachés qui n’est pas due au profit de l’adjudicataire. De plus, le produit de la vente est insaisissable tant qu’il n’est pas affecté au créancier poursuivant.

Enfin, si l’adjudicataire ne peut payer le prix, le bien est revendu à la folle enchère i.e. nouvelle vente aux enchères. Si le prix de vente de la seconde adjudication est inférieur à celui de la première, la différence est à la charge du fol enchérisseur (i.e. du premier faux acquéreur).

 

Section 4 : Les incidents de la saisie-vente

En principe, la saisie-vente est une procédure extrajudiciaire mais elle devient judiciaire en cas d’incident i.e. si d’autres créanciers viennent en concours avec le créancier saisissant (1) mais aussi si des tiers se prétendent propriétaires des biens saisis (2) ou encore si le saisi (le débiteur) invoque une cause de nullité (3).

 

1) Les concours de saisies

Même si la L91 a limité au maximum l’intervention des tiers, d’autres créanciers peuvent s’associer à cette procédure, ils disposent de 3 moyens:

– ils peuvent s’opposer à la première saisie

– étendre la première saisie

– demander à être subrogés dans les poursuites

 

A) L’opposition à la première saisie

Tout créancier muni d’un titre exécutoire ayant une créance certaine, liquide et exigible peut former opposition à la saisie-vente, il dénonce un acte d’opposition au premier créancier mais il doit se manifester avant la vérification des biens saisis. L’acte contient la mention du titre exécutoire, le montant des sommes réclamées avec taux…

Prenant acte du ou des oppositions, le premier créancier poursuit la procédure de saisie-vente et une fois celle-ci réalisée, le prix obtenu sera réparti entre les différents créanciers grâce aux procédures de distribution (cf partie 4).

 

B) L’extension de la première saisie

Elle peut se faire au profit des créanciers qui ont pratiqué une saisie conservatoire ou de ceux qui sont munis d’un titre exécutoire. L’huissier qui a connaissance d’une première saisie (par le débiteur ou le tiers qui doit le lui déclarer) ne peut pas se contenter de diligenter une procédure d’opposition, il doit en fait identifier les biens qui n’ont pas encore été saisis pour procéder à une extension de la procédure initiale i.e. pour étendre l’assiette de la première saisie. Ainsi, tout créancier opposant peut en fait étendre la saisie initiale à d’autres éléments du patrimoine du débiteur. Dès lors, un inventaire complémentaire est dressé puis signifié au premier créancier ainsi qu’au débiteur. Le premier créancier informé d’une modification de la consistance du patrimoine du débiteur peut lui aussi procéder à une saisie complémentaire.

Cette extension de l’assiette de la saisie influe sur le déroulement de la saisie du fait du nouveau délai d’1 mois laissé au débiteur pour pouvoir vendre ses biens à l’amiable.

Art.122 D92 En principe, il est procédé à la vente aux enchères publiques de tous les biens restant à l’expiration de tous les délais impartis pour procéder à la vente amiable. Mais parfois, la vente forcée peut être organisée en plusieurs fois pour tenir compte de l’expiration de chaque délai d’1 mois.

 

C) La subrogation des les poursuites du premier saisissant

Suite à l’opposition des créanciers, le premier saisissant poursuit seul la vente mais les créanciers qui se sont associés à la procédure peuvent être subrogés dans les droits du créancier poursuivant si celui-ci ne procède pas à la vente forcée à l’expiration des délais. Ce cas est fréquent en pratique car le premier créancier qui a connaissance de l’existence d’autres créanciers peut très bien ne pas souhaiter poursuivre la vente qui ne lui procurera plus le même avantage. Le créancier doit alors faire délivrer par huissier une sommation au premier créancier de procéder dans les 8 jours aux formalités de la mise en vente par adjudication des biens saisis. Ce n’est que si cette sommation est infructueuse que le créancier est subrogé de plein droit dans les droits du premier saisissant. A partir de là, le premier créancier est déchargé de ses obligations, de plus, il doit remettre au créancier subrogé les pièces utiles pour que celui-ci puisse poursuivre la procédure.

 

2) Les contestations des tiers

Seuls les biens appartenant au débiteur peuvent faire l’objet d’une saisie. L’huissier ne vérifiant pas la propriété des biens saisis, les risques de saisir les biens d’un tiers ne sont pas exclu. Le tiers peut donc faire obstacle à la saisie. D92 Article 128 réserve au tiers une action spécifique: action en distraction de biens saisis.

 

A) L’action en distraction de biens saisis

Cette action est ouverte plus largement que l’action en revendication. En effet, Code Civil Article 2279 al.2 l’action en revendication suppose que le propriétaire allègue le vol ou la perte du bien. Pour l’action en distraction, le tiers n’a pas à justifier de l’existence d’un vol ou d’une perte. La demande est présentée au JEX du lieu de la saisie et elle doit être présentée avant la vente des biens. Elle peut être présentée par lettre simple ou LRAR ou par assignation. Dans tous les cas, elle doit être accompagnée des titres attestant de la propriété. Si le tiers agit avant la distribution du prix de vente, l’action se reporte sur le prix par le mécanisme de la subrogation réelle.

En revanche, si les sommes ont été distribuées, Article 129 autorise le tiers à recourir à l’action de droit commun i.e. à intenter une action en revendication i.e. le tiers ne peut alors agir qu’en cas de vol ou perte des biens saisis.

 

B) Les effets de l’action en distraction de biens saisis

C’est une action conservatoire, provisoire qui tend à extraire de la saisie, de la vente, par la simple apparence de la propriété sans qu’il soit statué au fond sur le point de savoir qui est le véritable propriétaire. Le juge peut:

– rejeter la demande: le bien peut être vendre et la procédure de saisie se poursuit normalement

– accueille la demande: il exclut le ou les biens du lot des biens saisis, ce n’est qu’une procédure conservatoire i.e. la question de la propriété, s’il y a lieu, sera tranchée au fond au titre d’une action pétitoire intentée devant le TGI. La saisie-vente se poursuivra pour le surplus des biens saisis.

 

3) Les contestations du débiteur

Le débiteur peut contester la validité de la saisie mais aussi la saisissabilité des biens.

 

A) La contestation de la validité de la saisie
Jusqu’à la vente des biens, le débiteur peut demander la nullité de la saisie pour vice de forme (une mention manque) ou pour vice de fond (extinction de la créance, non propriété du bien). Si le juge prononce la nullité, la saisie est nulle et non avenue i.e. sans effet. Cependant, si la nullité est prononcée après la vente mais avant la distribution du prix, le débiteur peut dans ce cas simplement réclamer la restitution du produit de la vente.

En principe, l’action en nullité ne suspend pas les opérations de saisie. Toutefois, en pratique, l’huissier a souvent tendance à suspendre les opérations de saisies comme c’est le cas pour les contestations relatives à l’insaisissabilité des biens.

 

B) La contestation relative à l’insaisissabilité des biens

Elles sont portées devant le JEX, le débiteur a 1 mois pour agir à compter de la signification de l’acte de saisie. Dans ce cas, le créancier est entendu ou au moins appelé à l’audience et cette demande suspend la procédure de saisie pour les biens dont le caractère saisissable est contesté. La procédure se poursuit pour les autres biens, la vente peut être poursuivie pour les biens dont le caractère saisissable n’est pas contesté.

2 cas de figure:

– le juge fait droit à la demande: les biens sont déclarés insaisissables et donc exclu de la procédure de saisie-vente, il y a alors une réduction de l’assiette de la saisie.

– le juge déboute: les biens sont saisissables, ils peuvent être vendus selon la procédure normale.

 

Chapitre 2: Les procédures spécifiques de saisies-ventes des meubles corporels et de certains meubles incorporels

 

A côté de la procédure de droit commun, le législateur a organisé des saisies-ventes spécifiques pour tenir compte de la particularité des biens saisis.

 

Section 1: La saisie des récoltes sur pied
 Supprimée par la loi de 1991 mais réintroduite par Article 134 à 138 du décret de 1992. Le créancier muni d’un titre exécutoire va même des mains de justice des récoltes encore pendantes aux branches et aux racines en vue d’en procéder à la vente lorsqu’elles seront parvenues à maturité.

 

1) Le domaine

D92 Article 134 cette procédure de saisie peut être utilisée pour saisir tous les végétaux non détachés du sol mais aussi tous les fruits de la terre même s’ils ont la qualité d’immeubles par nature car cette saisie est pratiquée peu de temps avant la maturité. Dans ce cas, les fruits ont alors la nature de meubles par anticipation puisque la saisie est pratiquée dans les 6 semaines qui précèdent l’époque habituelle de la maturité. Ce délai de 6 semaines est requis à peine de nullité.

Ainsi, si les récoltes sont de natures différentes et ont donc des dates de récolte différentes il doit y avoir autant de saisie que d’espèces à saisir.

Cette saisie est exclue dans 2 cas:

– lorsque l’immeuble fait l’objet d’une saisie immobilière car la saisie de l’immeuble emporte saisie des fruits

– si les fruits, même détachés du sol, conservent une nature immobilière: immeuble par destination (paille et foin jugés nécessaires pour l’exploitation d’un domaine agricole).

 

2) Le déroulement des opérations de saisie

La procédure débute par un commandement de payer ensuite, l’huissier se déplace sur les lieux pour dresser l’acte de saisie. L’acte contient les mêmes mentions que l’acte de saisie dressé en cas de saisie-vente d’un bien se situant entre les mains du débiteur mais au lieu de désigner les biens, l’huissier doit décrire le terrain où sont situés les biens en précisant la contenance, la situation et la nature des fruits. Pour le surplus, la procédure de droit commun s’applique, les récoltes sont indisponibles, elles sont placées sous la responsabilité du débiteur qui en a la garde.

 

3) La vente des récoltes saisies

Comme pour la procédure de droit commun, le débiteur peut rechercher un acquéreur amiable et le proposer au créancier saisissant mais en pratique, cette possibilité est peu usitée. En effet, la saisie des récoltes sur pied étant pratiquée 6 semaines seulement avant la récolte, le débiteur ne dispose que d’un délai de 10 jours environ avant la date prévue pour les enchères publiques (1 mois, jours fériés). La vente doit être annoncée par des affiches apposées à la mairie et au marché le plus proche du lieu des récoltes. Les affiches indiquent le jour, heure et lieu de la vente, précisent le terrain des récoltes, la contenance et la nature des fruits.

L’huissier vérifie les formalités. La vente se fait au lieu des récoltes ou au marché le plus proche. Cependant, en raison du risque de dépérissement, le JEX peut, sur requête de la partie la plus diligente, désigner un séquestre ou commettre un tiers pour procéder à la récolte ou la faire vendre (si le débiteur risque de ne pas le faire).

La récolte vendue, la distribution du prix aura lieu entre les différents créanciers.

La récolte permet de désolidariser au plus tôt la récolte de la terre lorsque le fermier est un exploitant non propriétaire du terrain et de la récolte. Si propriétaire du terrain et des récoltes, une telle procédure échappera à la saisie immobilière.

 

Section 2: La saisie de biens placés dans un coffre-fort

Conformément Article 266 à 274 D92 les particularités tiennent à l’acte de saisie…

 

1) L’acte de saisie

La saisie est effectuée par un acte d’huissier qui est signifié au banquier. Cet acte comprend à peine de nullité mentions Article 266 al.2 D92:

– nom et domicile du débiteur, dénomination ou siège social

– mention du titre exécutoire et l’injonction faite au tiers d’interdire tout accès au coffre sauf présence huissier

Le tiers fournit à l’huissier toutes les informations pour ouvrir le coffre, en cas de besoin l’huissier peut apposer des scellés.

L’huissier adresse commandement de payer au débiteur.

 

2) Le commandement de payer

Le créancier signifie au débiteur un commandement d’avoir à payer dans les 15 jours. Il comporte dénonciation de la saisie précédemment pratiquée. La signification doit intervenir le 1er jour ouvrable après l’acte de saisie. Ce commandement peut être signifié en même temps que la décision de justice condamnant le débiteur.

Mention 268 al.2 D92 à peine nullité:

– dénonciation de l’acte de saisie

– mention du titre exécutoire

– décompte des sommes dues en principal …

– le commandement d’avoir à payer la dette avant la date fixée pour l’ouverture du coffre

– le commandement d’assister en personne ou par mandataire … mention en cas refus coffre ouvert à ses frais

– date et lieu ouverture du coffre

– possibilité de contester la saisie devant le JEX du lieu du coffre

En cas d’inexécution de part du débiteur, il sera procédé à l’ouverture du coffre.

 

3) L’ouverture du coffre

Le coffre est ouverte au plus tôt 15 jours après la signification du commandement de payer sauf si le débiteur demande à ce qu’il soit procéder à cette ouverture avant l’expiration du délai. De plus, si le débiteur est absent au moment de l’ouverture du coffre, l’ouverture a lieu en présente d’un mandataire ou préposé, les frais sont avancés par le créancier mais supportés par le débiteur. L’huissier dresse l’acte de saisie par un inventaire des biens du coffre.

 

4) L’inventaire du coffre

L’huissier doit dresser un inventaire détaillé des biens du coffre. Si le débiteur est présent, il se limite aux seuls biens saisis, ils sont enlevé et place sous la garde d’huissier ou d’un séquestre. En l’absence du débiteur, l’huissier dresse un inventaire de tous les biens, les biens non saisis sont remis dans les mains d’un tiers ou séquestre.

L’huissier dresse un acte relatant ensemble des opérations Article 271 D92:

– nom, prénom, qualité des personnes présentes et personnes auxquelles les biens ont été remis

– les personnes chargées de la garde des biens doivent apposer leurs signatures sur l’original et les copies, en cas refus mention en est faite sur l’acte

Une copie de l’inventaire est remise ou signifiée au débiteur et aux personnes auxquelles des biens ont été remis.

Art.272 D92 mention du lieu où les biens saisis ont été déposés, indication en caractère très apparent que le débiteur dispose d’un délai d’1 mois pour procédure à la vente amiable des biens, date de la vente forcée.


Après l’enlèvement des biens, le débiteur retrouve le libre accès à son coffre. Pour le surplus, comme pour la procédure de saisie-vente de droit commun, le débiteur a 1 mois pour procéder à la vente amiable des biens saisis. A l’expiration, il est procédé à la vente forcée dans les conditions de droit commun.

 

Section 3: La saisie des droits d’associé et des valeurs mobilières

Même s’il s’agit de meubles incorporels, les droits d’associé et les valeurs mobilières peuvent faire l’objet d’une saisie Article 178 à 193 D92.

 

1) Les opérations de saisie

Les opérations de saisie se déroulent comme pour la saisie-attribution i.e. pour une saisie portant sur des meubles incorporels. Ce sont les opérations de vente qui s’apparentent à la procédure de saisie-vente.

Cette saisie suppose l’intervention d’un tiers. La saisie débute par un acte d’huissier signifié à la personne morale ou à la personne détenant le compte. Cet acte contient des mentions à peine de nullité Article 182 D92:

– identification du débiteur

– indication du titre exécutoire

– décompte des sommes en capital …

– mentions précisant les effets de la saisie i.e. indisponibilité totale des valeurs saisies

– sommation faite au tiers d’avoir à faire connaître les nantissements ou saisies concernant cet acte.

Cette saisie rend les titres et leurs produits financiers indisponibles, les biens ne peuvent plus être aliénés.

Mainlevée possible si consigne une somme suffisante pour désintéresser le créancier.

La saisie est dénoncée dans les 8 jours au débiteur sous peine de nullité, par acte d’huissier.

183 al.2 D92 :

– copie du PV de saisie

– indication caractères très apparents que le débiteur dispose d’un délai d’1 mois pour contester la saisie

– désignation juge compétent

– débiteur 1 mois pour procéder à vente amiable

– indication que débiteur peut en cas de vente forcée faire connaître au tiers saisi jusqu’à l’expiration des délais, l’ordre dans lequel il souhaite que ses biens soient vendus

depuis 1er mars 2006, en cas de contestation, le débiteur doit la dénoncer par LRAR à l’huissier et doit en informer le tiers par lettre simple.

Si le débiteur ne s’exécute pas, les valeurs et droits d’associé seront vendus.

 

2) Les opérations de vente

La vente forcée est effectuée à la demande du créancier sur présentation d’un certificat délivré par le greffe ou depuis le 1er mars 2006 par huissier, attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le délai d’1 mois à compter de l’acte de saisie ou du jugement rejetant contestation.

La vente peut être amiable ou forcée. La vente amiable est soumise aux conditions de droit commun. La vente forcée est particulière du fait de la nature des biens à vendre. A défaut de vente amiable, le créancier peut demander la vente forcée des biens saisis mais les modalités de la vente diffèrent selon qu’il s’agit de valeur cotées en bourse ou de valeurs non cotés ou parts sociales.

– valeurs cotées: dans le mois de la signification le débiteur peut donner l’ordre de vendre les valeurs mobilières saisies, le produit de la vente est alors indisponible entre les mains de l’intermédiaire habilité et affecté à la créance du créancier saisissant. Si le produit désintéresse le créancier, l’indisponibilité cesse pour le surplus des valeurs mobilières. Jusqu’à la réalisation de la vente, le débiteur peut indiquer au tiers saisi l’ordre de vente des valeurs, sinon ce choix appartient au créancier.

– valeurs mobilières non cotées et parts sociales: elles sont vendues aux enchères publiques, un cahier des charges est rédigé en vue de la vente, il rappelle le déroulement de la procédure… une copie de ce cahier des charges est notifiée à la société qui en informe les associés, le même jour, les créanciers opposants sont sommés d’en prendre connaissance. 1 mois au plus ou 15 jours au moins avant la vente, celle-ci est annoncée par voie de presse ou d’affichage. Le débiteur et les créanciers sont informés de la date de la vente par voie de notification. Les produits de la vente sont répartis entre les créanciers conformément aux procédures de distribution.

 

Section 4: La saisie des véhicules terrestres à moteur (VTM)

L91 Article 55 et 58, D92 Article 164 à 177. Par VTM on entend tout engin immatriculé propulsé par un moteur qui se déplace sur la terre. Aujourd’hui les voitures sont souvent saisies c’est pourquoi le législateur a facilité la saisie de ces véhicules en prévoyant 2 mesures de saisie spécifiques mais ces VTM restent des biens meubles corporels, ils peuvent donc être l’accessoire d’une procédure civile d’exécution de droit commun.

 

1) Les procédures spécifiques de saisie

Il en existe 2: saisie par déclaration à la préfecture, saisie par immobilisation du véhicule

 

A) La saisie par déclaration à la préfecture

Tous les VTM doivent être immatriculés. Il s’agit d’une saisie immatérielle L91 Article 57 et D91 Article 165 à 169.

Cette procédure est réservée au créancier muni d’un titre exécutoire, c’est plus une mesure de pression que d’exécution car elle ne débouche ni sur la vente ni sur l’appréhension du véhicule. Elle interdit simplement toute transaction concernant ledit véhicule. Le débiteur ne pourra changer de véhicule sans s’exécuter pour obtenir la mainlevée de la saisie.

L’huissier signifie à la préfecture d’immatriculation une déclaration de saisie/

– titre exécutoire

– renseignements relatifs au véhicule

– sommes dues

– …

Dénoncée dans les 8 10 ? jours au débiteur par acte d’huissier. Le débiteur est informé qu’aucun certificat, il a 1 mois pour contester devant JEX.

Dès la déclaration à la préfecture, le bien est indisponible pour une durée de 2 ans. Le débiteur ne peut plus vendre son véhicule puisqu’aucun certificat d’immatriculation ne peut plus lui être délivré.

La mainlevée peut être donnée par le créancier lorsqu’il a obtenu le paiement intégral de sa créance dans le délai de 2 ans, à défaut la mainlevée peut être obtenue judiciairement par le débiteur soit … soit règlement intégral du créancier.

La déclaration cesse de produire ses effets au bout de 2 ans. A l’expiration, la mesure est normalement caduque mais le créancier peut réitérer la procédure.

Si le véhicule est gagé, les droits du créancier gagiste sont sauvegardés, il l’emporte face à d’autres créanciers. Cette saisie n’a d’intérêt qu’en l’absence de gage sur le VTM. Le créancier a donc tout intérêt à demander un certificat de non gage avant de pratiquer la saisie.

 

B) La saisie par immobilisation du véhicule

Art.58 L91, 170 à 177 D92. Il s’agit d’une saisie matérielle. Le créancier doit être muni d’un titre exécutoire. L’huissier immobilise le véhicule grâce au sabot de Denver. Cette saisie met une pression psychologique sur le débiteur: elle gêne et à une connotation morale importante.

 

1) La réalisation de l’immobilisation

Art.58 L91 l’huissier immobilise le véhicule en quelque lieu qu’il se trouve, par tout moyen, dès lors qu’il n’entraîne aucune détérioration du véhicule.

ex: sabot de Denver, enlèvement d’une roue, démontage d’une source d’alimentation etc.

L’immobilisation se fait sur place s’il se trouve dans un lieu, l’huissier indique de façon apparente son nom et numéro de téléphone le cas échéant sur l’appareil utilisé pour l’immobilisation. Il peut faire procéder à l’enlèvement du véhicule dans les 48 heures et le faire transporter chez un dépositaire.

Si l’immobilisation est réalisée par transport directement, l’huissier fait immédiatement procéder au transport chez le dépositaire qui en devient gardien.

L’huissier dresse un acte relatant l’ensemble des opérations, mentions à peine nullité 172 D92:

– titre exécutoire

– date et heure de l’immobilisation, lieu de l’immobilisation et éventuellement lieu où transportés

– description sommaire du véhicule, détérioration visibles, photos possible

– absence ou présence débiteur

Cet acte vaut saisie, le véhicule devient indisponible, le propriétaire en devient gardien sauf si le véhicule est transporté et c’est alors de dépositaire.

Si le débiteur est absent, l’huissier l’avise en lui adressant une lettre simple avec mentions.

 

2) Les issues de l’immobilisation

Si le débiteur ne s’exécute pas, 3 cas de figure:

 

a) La vente du véhicule

L’huissier signifie au débiteur dans les 8 jours de l’immobilisation un commandement de payer, mentions Article 174 D92:

– copie du PV d’immobilisation

– décompte des sommes réclamées

– avertissement qu’à défaut de paiement et passé délai 1 mois pour vente amiable, vente aux enchères

– le débiteur peut contester la procédure devant le JEX de son domicile ou du lieu d’immobilisation du véhicule

– reproduction Article 107 à 109 D92

La procédure de droit commune de saisie-vente s’applique. Toutefois, si un gage a été inscrit sur le véhicule, l’huissier doit informer le créancier gagiste des propositions de ventes amiables ou de la mise en vente aux enchères.

 

b) L’appréhension du véhicule aux fins de remise au propriétaire

D92 Article 176 le propriétaire muni d’un titre exécutoire est doté d’une action spécifique: l’huissier va signifier dans les 8 jours de l’immobilisation au débiteur un acte contenant mention Article 176 D92 à peine de nullité:

– copie PV d’immobilisation

– injonction faite au débiteur de se présenter dans les 8 jours à l’étude de l’huissier pour convenir des conditions de remise, de transport du véhicule avec indication qu’à défaut le véhicule sera transporté à ses frais, pour être remis au propriétaire

– indication que le débiteur peut porter ses contestations devant le JEX de son domicile ou de l’immobilisation

Si le véhicule n’est pas remis volontairement à son propriétaire, le véhicule est appréhendé et transporté aux frais du débiteur.

 

c) L’appréhension du véhicule au fin de remise au créancier gagiste

 Dans ce cas, la remise du véhicule au créancier gagiste ne constitue que l’une des étapes de la saisie, elle précède souvent la vente du véhicule. Dans les 8 jours de la signification l’huissier signifie au débiteur acte mention nullité Article 177 D92:

– copie PV immo

– injonction d’avoir dans les 8 jours à se présenter… à défaut transporté à ses frais…

– décompte distinct des sommes en principales, frais…

– avertissement en caractères très apparent… délai 1 mois pour vente amiable sinon ventes aux enchères publiques

– indication contestation peuvent être portées devant le JEX domicile du débiteur ou d’immobilisation

La remise du véhicule, volontaire ou forcée, ne clôture pas la procédure. Une deuxième phase est nécessaire. En l’absence vente amiable dans le délai d’1 mois, le véhicule est vendu aux enchères publiques. Cependant, le véhicule ne se trouve plus entre les mains du débiteur, dès lors, celui-ci n’a plus la maîtrise de la procédure.

 

2) La saisie du véhicule accessoire à une autre procédure civile d’exécution

La saisie du VTM peut être accessoire à une saisie-vente ou saisie conservatoire

 

A) La saisie du véhicule accessoire à une saisie-vente

Si le véhicule se trouve dans les lieux où est pratiquée une saisie-vente, il n’est qu’un élément de la liste des biens saisis par huissier, le véhicule est alors frappé d’indisponibilité comme les autres biens immobiliers même s’il n’est pas immobilisé. Ainsi, le débiteur ne peut plus faire aucun acte de disposition ou d’administration sur ledit véhicule, il peut juste s’en servir comme gardien. L’huissier peut immobiliser le véhicule lorsqu’il se présente chez le débiteur pour pratique saisie-vente, il doit alors respecter les modalités prévues pour l’immobilisation: l’immobilisation est alors mentionnée dans l’acte de saisie-vente. Conformément au droit commun, le débiteur peut procéder à la vente amiable du bien dans un délai d’1 mois, à défaut le véhicule sera vendu aux enchères.

 

B) La saisie du véhicule accessoire à une saisie conservatoire

Lorsqu’il pratique une saisie conservatoire, l’huissier qui trouve chez le débiteur ou un tiers un VTM, peut procéder à son immobilisation. Toutefois, dans ce cas, on hésite sur la procédure d’immobilisation à appliquer: procédure de l’Article 171 D92 comme en matière de saisie-vente (mention dans l’acte de saisie conservatoire) OU procédure Article 172 (PV d’immobilisation distinct de l’acte de saisie conservatoire). Dans le silence des textes, il paraît raisonnable de respecter procédure Article 171 D92 car procédure de l’Article 172 suppose que l’on indique le titre exécutoire en vertu duquel la mesure est pratiquée or par définition le créancier qui pratique une mesure conservatoire n’est pas forcément titulaire d’un titre exécutoire.

 

 

 

Sous-titre 3: Les mesures d’exécution sur les immeubles

 

« La saisie immobilière tend à la vente forcée de l’immeuble du débiteur ou, le cas échéant, du tiers détenteur en vue de la distribution de son prix » (Code Civil Article 2190).

La saisie immobilière était pendant longtemps une procédure longue, lourde et formaliste, elle pouvait durée de 6 à 18 mois sans incidents et entre 2 et 3 ans en cas d’incident. N’ayant pas été réformée en 1991, elle avait juste fait l’objet de quelques modification par les lois des 23 jan. et 29 juillet  1998. La réforme est intervenue par l’ordonnance n°2006-461 du 21 avril 2006 (ayant ajouté Code Civil Article 2190 à 2216) et son décret d’application n°2006-936 du 27 juillet  2006 modifié par le décret n°2006-1805 du 23 déc. 2006. La réforme est entrée en vigueur le 1er jan. 2007, elle s’applique aux procédures en cours n’ayant pas encore donné lieu au dépôt de l’ancien cahier des charges ainsi qu’aux procédures de distribution du prix de vente d’un immeuble dont l’ouverture de l’ordre n’a pas encore été requise.

La réforme poursuit un double objectif:

  •  assurer une protection adéquate au débiteur en prohibant les expropriations injustifiées ou expéditives et en évitant de brader l’immeuble qui constitue souvent le seul bien important de son patrimoine.
  •  offrir aux créanciers des procédures efficaces de recouvrement pour les inciter à faire crédit.

La saisie immobilière est une procédure judiciaire.

 

Compétence territoriale: « la saisie immobilière est poursuivie devant le JEX du TGI dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi » (D06 Article 2), avant la réforme, elle relevait de la compétence du TGI).

Représentation obligatoire: « les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat » (D06 Article 5).

 

Chapitre 1: Les conditions de la saisie immobilière

 

La saisie immobilière obéit à des conditions spécifiques (par rapport à la Partie 1) relatives aux personnes (Section 1), à la créance (Section 2) et à l’immeuble (Section 3).

 

Section 1: Les conditions relatives aux personnes

Des conditions concernent le créancier saisissant (1) et d’autres le débiteur saisi (2).

 

1) Les conditions relatives au créancier saisissant

v En principe, tous les créanciers peuvent pratiquer une saisie immobilière puisque leur droit de gage général concerne l’ensemble des biens meubles et immeubles du débiteur (Code Civil Article 2284). Il peut donc s’agir d’un créancier hypothécaire, privilégié ou même chirographaire. Cependant, pour le créancier chirographaire, la saisie n’a aucun intérêt si la valeur de l’immeuble est inférieure au montant du passif privilégié, elle est donc souvent pratiquée par un créancier hypothécaire ou privilégié.

 

v « Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière […] » (Code Civil Article 2191 al.1).
Lorsque la poursuite est engagée en vertu d’une décision de justice exécutoire par provision, la vente forcée ne peut intervenir qu’après une décision définitive passée en force de chose jugée » (Code Civil Article 2191 al.2). En effet, cette procédure portant atteinte au droit de propriété du débiteur, elle ne peut donc être engagée sur le fondement d’un titre provisoire (ex: ordonnance de référé.).

Si le créancier se prévaut d’une décision rendue par défaut, il doit attendre l’expiration du délai d’opposition avant de poursuivre la saisie (Code Civil Article 2191 al.3).

 

2) Les conditions relatives au débiteur saisi

Le plus souvent, la saisie est directement pratiquée contre le débiteur (A) mais à titre exceptionnel, l’immeuble peut être saisi dans les mains d’un tiers (B).

 

A) La saisie entre les mains du débiteur saisi

En principe, la saisie est pratiquée directement auprès du débiteur mais il faut tenir compte des règles protectrices des incapables.

« Les immeubles d’un mineur, même émancipé, ou d’un majeur en curatelle ou en tutelle ne peuvent être saisis avant la discussion de leurs meubles » (Code Civil Article 2197 al.1), la saisie immobilière devient alors subsidiaire.

2 exceptions:

  • pour « la saisie des immeubles indivis entre un majeur et un mineur ou un majeur en curatelle ou en tutelle, si la dette leur est commune » (Code Civil Article 2197 al.2).
  • « dans le cas où les poursuites ont été commencées alors que le majeur n’était pas encore placé sous curatelle ou sous tutelle » (Code Civil Article 2197 al.2 in fine).

 

« En cas de saisies simultanées de plusieurs de ses immeubles, le débiteur peut demander au juge le cantonnement de celles-ci [ou] une conversion partielle des saisies en hypothèque » (Code Civil Article 2196).

 

B) La saisie entre les mains d’un tiers détenteur

La saisie a lieu entre les mains d’un tiers lorsque le débiteur a transmis la propriété de l’immeuble affecté en garantie à l’un de ses créanciers. Dans ce cas, le tiers n’est pas obligé personnellement à la dette mais il est tenu car il détient l’immeuble, il est tenu propter rem. Cette hypothèse reste exceptionnelle car en principe le tiers est informé par le notaire et la purge est effectuée au préalable avant la vente.

S’il n’a pas été procédé à la purge, le créancier peut se prévaloir de son droit de suite et « la saisie immobilière diligentée par les créanciers titulaires d’un droit de suite est poursuivie contre le tiers détenteur du bien » (Décret de 2006 Article 16), le tiers souffre alors la saisie mais il dispose de plusieurs garanties:

  •  il peut imposer au créancier de discuter préalablement à la saisie de l’immeuble, tous les autres immeubles hypothéqués en garantie de la même dette, encore entre les mains du débiteur. Ce bénéfice de discussion ne peut être opposé qu’au créancier disposant d’une hypothèque générale. Il peut être invoqué jusqu’à la dénonciation de la saisie immobilière.
  •  il peut payer et désintéresser le créancier: ce sera notamment le cas s’il n’a pas déjà payé le prix au vendeur (débiteur) et si la créance hypothécaire de 1er rang est inférieure ou égale au prix de vente. Dans ce cas, l’acquéreur est subrogé dans les droits du créancier.
  •  il peut délaisser l’immeuble i.e. en abandonner la possession au créancier saisissant pour ne pas avoir à subir la saisie. Dans ce cas, les poursuites sont engagées contre un curateur désigné par le TGI.

 

Section 2: Les conditions relatives à la créance

  •   « Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière » (Code Civil Article 2191) Ainsi, la saisie immobilière est soumise aux mêmes conditions que les autres saisies, le caractère certain n’est pas repris (cf. supra).
  •   Conformément au principe de proportionnalité des mesures d’exécution, le montant de la créance doit être en correspondance avec la valeur saisie (cf. supra.). Ainsi, le créancier ne peut saisir plusieurs immeubles qu’en cas d’insuffisance du bien saisi pour satisfaire la créance.
  •   Le créancier doit saisir en priorité l’immeuble qui lui est affecté en garantie, même s’il se situe entre les mains d’un tiers (il a un droit de suite). Ainsi, un créancier ne peut poursuivre la vente forcée d’un immeuble qui ne lui est pas affecté en garantie que si les immeubles qui lui ont été affectés en garantie sont insuffisants à la satisfaire. Cela suppose de savoir au préalable la valeur de l’immeuble, ce qui peut donner lieu à contestations.

 

Section 3: Les conditions relatives aux immeubles

Tous les immeubles sont saisissables mais il existe des restrictions.

 

1) Le principe: les immeubles saisissables

« La saisie immobilière peut porter sur tous les droits réels afférents aux immeubles, y compris leurs accessoires réputés immeubles, susceptibles de faire l’objet d’une cession » (Code Civil Article 2193). Sont ainsi visés tous les immeubles (Code Civil Article 517): immeubles par nature (terre, récoltes sur pied), par destination (Code Civil Article 524), par l’objet auquel ils s’appliquent (Code Civil Article 526): l’usufruit, les droits réels principaux: nue propriété.

« La saisie d’un immeuble emporte saisie de ses fruits, sauf l’effet d’une saisie antérieure [i.e. si les fruits ont déjà fait l’objet d’une saisie] » en vertu du principe accessorum sequitur principale (Code Civil Article 2194)

2) Les restrictions à la saisissabilité

Outre les restrictions communes (Partie 1), les restrictions propres ont pour objet d’éviter saisies inopportunes:

– certains droits réels ne peuvent être saisis: les servitudes puisqu’elles sont indissociables du fond, droit d’usage et d’habitation car incessibles

– en cas de saisie simultanée, le débiteur peut solliciter le cantonnement de la saisie à un ou plusieurs biens, limite de l’assiette.

 

Chapitre 2: La procédure de saisie immobilière


L’immeuble est saisi (Section 1) avant d’être vendu (Section 2).

 

Section 1: La saisie de l’immeuble

La procédure se déroule en 2 temps: le créancier doit accomplir un certain nombre de formalité (1) avant l’audience d’orientation (2).

 

1) La procédure jusqu’à l’audience d’orientation

Jusqu’à l’audience d’orientation, le créancier doit accomplir des formalités tendant à la saisie de l’immeuble (A) et des actes préparatoires à la vente (B).

 

A) Les formalités tendant à la saisie de l’immeuble

Les opérations de saisie diffèrent selon que la saisie est pratiquée entre les mains du débiteur ou d’un tiers détenteur.

 

1) Les opérations de saisie entre les mains du débiteur

« Un commandement de payer valant saisie est signifié au débiteur à la requête du créancier poursuivant » (D06 Article 13 al.1).

 

a) La signification du commandement de payer

a.1) Le contenu du commandement de payer

— D06 Article 15 « Outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice, le commandement de payer valant saisie comporte [à peine de nullité]:

  •  1° La constitution d’avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile ;
  •  2° L’indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré ;
  •  3° Le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l’indication du taux des intérêts moratoires ;
  •  4° L’avertissement que le débiteur doit payer lesdites sommes dans un délai de 8 jours, qu’à défaut de paiement, la procédure à fin de vente de l’immeuble se poursuivra et qu’à cet effet, le débiteur sera assigné à comparaître à une audience du JEX pour voir statuer sur les modalités de la procédure ;
  •  5° La désignation de chacun des biens ou droits sur lesquels porte la saisie immobilière [i.e. son assiette], telle qu’exigée par les règles de la publicité foncière ;
  •  6° L’indication que le commandement vaut saisie de l’immeuble et que le bien est indisponible à l’égard du débiteur à compter de la signification de l’acte et à l’égard des tiers à compter de la publication de celui-ci au bureau des hypothèques ;
  •  7° L’indication que le commandement vaut saisie des fruits et que le débiteur en est séquestre ;
  •  8° L’indication que le débiteur garde la possibilité de rechercher un acquéreur de l’immeuble saisi pour procéder à sa vente amiable ou de donner mandat à cet effet et la mention que cette vente ne pourra néanmoins être conclue qu’après autorisation du JEX ;
  •  9° La sommation, lorsque le bien fait l’objet d’un bail, d’avoir à indiquer à l’huissier de justice les nom, prénom et adresse du preneur ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
  •  10° L’indication qu’un huissier de justice pourra pénétrer dans les lieux afin de dresser un procès-verbal de description de l’immeuble ;
  •  11° L’indication du JEX territorialement compétent pour connaître de la procédure de saisie et des contestations et demandes incidentes y afférentes ;
  •  12° L’indication que le débiteur qui en fait préalablement la demande peut bénéficier, pour la procédure de saisie, de l’aide juridictionnelle s’il remplit les conditions de ressources [requises] ;
  •  13° L’indication, si le débiteur est une personne physique, que s’il s’estime en situation de surendettement, il a la faculté de saisir la commission de surendettement des particuliers instituée par l’article L. 331-1 du code de la consommation.

[Mentions supplémentaires éventuelles:]

  •  Si le créancier saisissant agit en vertu d’une transmission, à quelque titre que ce soit, de la créance [i.e. d’une cession de créance] contenue dans le titre exécutoire fondant les poursuites, le commandement vise l’acte de transmission à moins que le débiteur n’en ait été régulièrement avisé au préalable.
  •  Lorsque le commandement de payer valant saisie est signifié à la personne qui a consenti une hypothèque sur l’un de ses biens pour garantir la dette d’un tiers [(cautionnement réel)], le délai de sommation prévu au 4° est porté à 1 mois.

Les mentions prévues au présent article sont prescrites à peine de nullité. Toutefois, la nullité n’est pas encourue au motif que les sommes réclamées sont supérieures à celles qui sont dues au créancier »

 

— « Lorsque la saisie porte sur des immeubles situés dans le ressort de plusieurs bureaux des hypothèques, il est établi un commandement de payer par ressort. » (D06 Article 14)
   

a.2) La signification du commandement de payer

Le commandement de payer est signifié à personne ou à domicile (D06 Article 13).

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