Comment se passe la création et la disparition d’un État ?

SECTION 2 : La vie des Etats.

Un Etat n’est pas statique car il évolue de façon permanente dans sa forme, sa taille.

  • La création d’un État se produit lorsqu’un territoire, une population et un gouvernement sont établis et que cet État est reconnu par d’autres États en tant que sujet de droit international. Selon la Convention de Montevideo de 1933, un État doit remplir quatre critères pour être reconnu en droit international : une population permanente, un territoire délimité, un gouvernement en mesure d’exercer sa souveraineté, et la capacité à entrer en relations avec d’autres États.
  • La disparition d’un État peut se produire de plusieurs manières, notamment par l’annexion, la dissolution ou la fusion. Une annexion est le fait pour un État d’absorber un autre État ou une partie de son territoire. Une dissolution se produit lorsqu’un État se divise en plusieurs États indépendants. Une fusion est le fait pour deux ou plusieurs États de se joindre pour former un nouvel État.

Paragraphe 1 : La formation de l’Etat.

Il existe plusieurs procédés de formation d’un Etat.

A) Acquisition d’un territoire sans maitre.

C’est l’hypothèse où un Etat va acquérir un territoire qui est peuplé mais qui est sans maitre. Il s’agit d’un mode de formation d’Etat historique. Au 19ème siècle, cela était toujours possible : le Libéria. Ce procédé de formation a surtout servi à donner un fondement juridique aux colonisations des puissances européennes. La première hypothèse est celle de la découverte : il suffisait qu’un Etat découvre un territoire où il y a une population sans véritablement de maitre. Peu à peu, il y a le critère de l’effectivité qui devient déterminant c’est-à-dire que l’Etat colonial devait démontrer un contrôle effectif sur le territoire et la population (créer des administrations, envoyer des nationaux). Il peut y avoir des conflits entre les Etats : Groenland avec la Norvège et le Danemark. Ce principe a été largement utilisé par la France pour les territoires d’outre-mer.

Aujourd’hui, il n’existe plus de territoire sans maitre à l’échelle de la planète. On peut se poser des questions sur l’Antarctique (territoire mais pas de population) : une convention fait que c’est une zone neutre.

B) Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

1) L’origine de ce droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

C’est un principe né à la Révolution française et mobilisé après la 1ère GM par les USA et l’URSS pour essayer de mettre fin à l’exploitation coloniale. Ce principe a été consacré en 1945 dans la Charte des Nations Unies : article 1 paragraphe 2. L’objectif est de développer entre les nations des relations amicales fondés sur le principe de l’égalité des peuples et le droit de disposer d’eux-mêmes.

Il a été repris dans de nombreuses résolutions de l’ONU. Il y a au sein de l’ONU une volonté de permettre et de faciliter la décolonisation.

2) Le contenu de ce droit.

Il n’est pas facile à définir.

Peuple ? ce droit concerne uniquement les peuples colonisés. La résolution 1514 de 1960 explique qu’il s’agit d’un peuple soumis « à une subjugation, une domination et une exploitation étrangère ». On a admis aussi que cela pouvait s’appliquer à un peuple dont le pays exerce une discrimination raciale.

À disposer d’eux-mêmes : les peuples ont le droit de se constituer en Etat indépendant ou s’ils le souhaitent se rattacher à un Etat déjà existant. Quand ce droit est utilisé, le peuple va pouvoir devenir un Etat souverain indépendant. C’est un droit à usage unique c’est-à-dire que ce droit s’épuise en un seul usage. L’idée est d’essayer d’éviter une instabilité.

Il s’exerce le plus souvent par référendum sous la supervision de l’ONU depuis 1945. Mais il s’agit aussi régulièrement d’un droit qui s’exerce par des mouvements armés de libération nationale.

L’exercice de ce droit n’aboutit pas toujours à une indépendance : ex : Mayotte.

Ex : Timor oriental : colonie portugaise (proche de l’Indonésie) et en 1975, le Portugal quitte le Timor qui va être envahi par l’Indonésie qui dit que c’est une de ses provinces. Cela engendre des affrontements. En 1989, l’Australie, intéressée par des gisements pétroliers, conclue un accord avec l’Indonésie pour exploiter les gisements. Le Portugal a contesté ce traité entre ces deux Etats. Le Portugal a donc saisi la CIJ contre l’Australie. La CIJ en 1995 va en profiter pour consacrer le caractère erga omnes du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et va reconnaitre la valeur coutumière de ce droit et opposable à tous les Etats. C’est l’ONU qui a organisé le référendum pour que la population puisse s’exprimer. Cela a abouti à l’indépendance de cet Etat. Il est membre de l’ONU depuis 2002.

3) L’évolution récente de ce droit.

Ce droit a été mobilisé dans des circonstances différentes et notamment dans les années 1990 avec l’éclatement de plusieurs Etats en Europe centrale et occidentale (URSS, Yougoslavie). Ce droit va permettre de faire naitre de nouveaux Etats sur le sol européen. Certains Etats occidentaux se sont empressés de reconnaitre ces Etats comme indépendants en invoquant leur droit à l’autodétermination. Une fois que ces Etats ont été créé, on s’est refusé à reconnaitre comme Etats indépendant des enclaves minoritaires qui souhaitaient être indépendantes (Croatie avec des enclaves serbes : territoire de la Yougoslavie) car c’est un droit à usage unique.

L’invocation de ce droit des peuples ne suscite pas toujours la même réaction pourtant par le même Etat. Il va être plus ou moins reconnu suivant le contexte géopolitique.

Ex : le cas de la Crimée en Ukraine : c’est un territoire situé à l’Est de l’Ukraine. En Crimée, il y a essentiellement une population russe. Mais en 2014, il y a eu des mouvements séparatistes qui ont réclamé le droit à disposer d’eux-mêmes. Ils voulaient quitter l’Ukraine pour se déclarer indépendant ou se rattacher à la Russie. Un référendum a été organisé en Crimée contre l’accord de l’Ukraine. Ce référendum a plébiscité le rattachement à la Russie. Les autres Etats ont estimaient que la Crimée n’avait pas le droit de mobiliser ce droit car il ne peut être utilisé que lorsqu’un peuple est soumis à une domination étrangère.

Il faut distinguer le droit à l’autodétermination externe = droit des peuples à disposer d’eux-mêmes= droit de devenir indépendant ou d’être rattaché à un autre Etat. Ce droit ne peut être utilisé que si un peuple est soumis à une domination ; du droit à l’autodétermination interne= au sein d’un Etat, c’est la possibilité d’obtenir plus d’autonomie.

Le droit à l’autodétermination externe se réalise souvent contre l’Etat : Ecosse/RU. Si l’Etat est d’accord, on n’a pas besoin d’invoquer ce droit.

Ex : Nouvelle Calédonie : référendum l’année prochaine pour savoir si elle reste française.

Paragraphe 2 : Mutations et disparitions d’un Etat.

L’Etat évolue en permanence avec plusieurs mutations possibles mais des principes demeurent.

A) Le principe de la continuité de l’Etat.

1) Le contenu de ce principe.

L’Etat reste.

2) Exemples.

Pendant la seconde Guerre Mondiale ont a maintenu la personnalité juridique même si le gouvernement était parti en exil : France.

Etats baltes : Estonie, Lituanie et Lettonie : ils ont été annexés pendant la seconde Guerre Mondiale par la Russie. Quand l’URSS a éclaté, ces Etats ont proclamé leur indépendance à l’égard de l’URSS et ont prétendu qu’ils poursuivaient la personnalité juridique de l’Etat qui avait été créé avant la 1GM. Tous les Etats ont été d’accord. Cela facilite l’exercice de la personnalité juridique.

La seule limite de ce principe est la disparition de l’Etat.

B) La cession d’une partie du territoire d’un Etat à un autre Etat.

L’hypothèse est celle où un Etat va choisir de céder une partie de son territoire à un autre Etat en principe contre rémunération. Mais ce n’est pas toujours un choix. À plusieurs reprises, ces cessions ont pu naitre de défaites militaires.

Ex : France a vendu la Louisiane en 1803 pour 60 millions de francs aux USA.

La Russie a vendu aux USA l’Alaska en 1867.

L’Allemagne a restitué l’Alsace-Lorraine par le traité de Versailles de 1919.

On peut penser qu’aujourd’hui avant de vendre un bout d’Etat on consulterai la population.

C) Des démembrements d’un Etat existant.

Il y a une incidence sur l’existence de l’Etat avec des disparitions ou des créations d’Etat.

1) Le cas de la fusion d’Etats.

Il y a deux hypothèses.

a) La fusion simple.

C’est l’hypothèse de deux Etats existants et qui vont fusionner en un nouvel Etat. Les anciens Etats disparaissent et on a la création d’un nouvel Etat.

Ex : Tanzanie est née en 1964 de la fusion du Tanganyika et du Zanzibar.

Yémen, 1990 = Yémen du Nord + Yémen du Sud.

b) La fusion absorption.

Deux Etats existants fusionnent en un seul Etat sauf qu’un Etat absorbe l’autre. Il n’y a pas création d’un nouvel Etat mais il y a disparition d’un des deux Etats.

Ex : la réunification de l’Allemagne en 1990 : RFA et RDA. C’est la RDA qui a absorbé la RDA.

2) Le cas de la sécession.

Un Etat existant perd une partie de son territoire qui devient un nouvel Etat. L’Etat existant survit + création d’un Etat supplémentaire.

Ex : 1971 : le Bengladesh s’est séparé du Pakistan.

1993 : l’Érythrée se sépare de l’Éthiopie.

Cela a été utilisé comme terme de démembrement lors de la colonisation.

Le principe de l’intégrité territoriale vient freiner la sécession. La résolution 2625 de l’assemblée générale de l’ONU de 1970 dit que le principe d’autodétermination (peuple non colonisé) ne peut être interprété comme autorisant une action qui démembrerait totalement ou partiellement l’intégrité territoriale ou l’unit politique de tout Etat souverain et indépendant. Tout Etat a le droit au respect de son territoire.

La sécession doit être concertée et acceptée par l’Etat qui va être amputé.

Si la sécession ne se fait pas avec la concertation de l’Etat amputé, on considérera que c’est une méconnaissance du Droit International Public : peut être la Catalogne si elle se déclare indépendante sans l’accord de l’Espagne.

Ces sécessions sont considérées comme contraire au Droit International Public quand elles résultent de l’usage de la force. Ex : Crimée.

En pratique, il faut bien voir que lorsqu’une sécession se réalise malgré le Droit International Public, il arrive que ces hypothèses soient entérinées car la situation peut finalement être reconnue.

3) Le cas de la scission.

Un état perd son territoire qui est reparti entre deux ou plusieurs nouveaux états. On parle aussi de dissolution. Un état disparaît et deux ou plusieurs états sont créés. Le cas de l’ex Yougoslavie, divisée en plusieurs nouveaux états. Pareil pour la scission de l’URSS. Idem pour la Tchécoslovaquie (Slovaquie, République Tchèque).

4) L’annexion par la force.

Principe de non recours à la force armée sur le territoire d’un autre état. Question sur la Crimée.

Ces mutations sont très souvent des questions de fait qui peuvent plus tard être acceptées. Certaines situations de fait en violation avec le droit international peuvent quand même être acceptées.