De Gaulle et la création de la Vème République

LA NAISSANCE DE LA Vème REPUBLIQUE et le Général de Gaulle : 2 éléments indissociables

La Constitution de la Ve République, promulguée le 4 octobre 1958, marque une étape essentielle de l’histoire institutionnelle française. Étroitement liée à la figure du Général de Gaulle, elle reflète sa volonté de refonder les institutions dans un esprit de stabilité et d’efficacité, tout en tirant les enseignements des échecs des IIIe et IVe Républiques.

Une rupture avec le passé, dans la continuité du parlementarisme rationalisé

La Ve République se distingue par une nette rupture avec les régimes précédents, marqués par une instabilité chronique et une domination excessive du Parlement. Pourtant, elle conserve certains éléments du parlementarisme rationalisé, amorcé sous la IVe République. Cette continuité est accompagnée d’innovations majeures, en particulier dans la valorisation du pouvoir exécutif.

1. Un régime mixte et original

La rédaction de la Constitution est principalement le fruit du travail de Michel Debré, alors Premier ministre, qui décrit la Ve République comme un régime mixte, distinct des classifications classiques. Selon lui, elle repose sur une « responsabilité éminente du chef de l’État », reflétant l’idée gaullienne d’un Président de la République au rôle central.

Le Président n’est plus une figure symbolique ou honorifique : il devient le garant des institutions, doté de pouvoirs étendus tels que la dissolution de l’Assemblée nationale (article 12) ou le recours au référendum (article 11). Cette centralité présidentielle est une innovation majeure qui distingue la Ve République des régimes précédents.

2. Une innovation constitutionnelle et des pratiques évolutives

La Constitution se singularise par son caractère hybride et ses mécanismes destinés à garantir la stabilité :

  • Le gouvernement reste responsable devant le Parlement, mais des outils comme l’article 49-3 limitent les risques de paralysie législative.
  • Les rôles respectifs de l’exécutif et du législatif sont mieux définis, avec un Président de la République garantissant la continuité de l’État.

Au fil du temps, les usages constitutionnels ont accentué cette spécificité. Par exemple, l’élection du Président au suffrage universel direct, introduite par la réforme de 1962, renforce sa légitimité démocratique et son autorité.

 

Section 1 : le retour de de Gaulle en 1958 et l’apparition de la Vème République

En 1958, le Général de Gaulle revient au pouvoir dans un contexte exceptionnel, marqué par la crise algérienne et l’instabilité chronique de la IVe République. Son investiture comme président du Conseil, obtenue grâce à un savant mélange de soutiens politiques et de garanties démocratiques, marque le point de départ de la refonte constitutionnelle qui aboutira à la naissance de la Ve République.

I) une naissance dans le contexte mouvementé de la Guerre d’Algérie

La Ve République, instaurée en 1958, prend racine dans un contexte de crise profonde liée à la guerre d’Algérie. L’incapacité de la IVe République à répondre efficacement aux défis politiques et militaires de l’époque a précipité sa chute. La crise du 13 mai 1958 agit comme un élément déclencheur, permettant le retour au pouvoir du Général de Gaulle et amorçant une refonte des institutions françaises.

A) La crise du 13 mai 1958 : l’insurrection d’Alger et la rupture institutionnelle

1. Une révolte à Alger sur fond de guerre d’indépendance

Depuis 1954, la guerre d’Algérie divise la France entre les partisans d’une Algérie française et ceux favorables à l’indépendance. À Alger, les tensions explosent le 13 mai 1958 lors d’une manifestation en hommage à trois soldats tués par le FLN. Rapidement, la situation dégénère en insurrection : des manifestants investissent les locaux de la représentation française, contestant l’autorité civile parisienne.

Cette mobilisation est portée par des Français d’Algérie hostiles à l’indépendance, qui se sentent abandonnés par le pouvoir central. En réaction, des comités de salut public sont formés, sous l’égide du Général Massu, exprimant une volonté de rupture avec les autorités civiles. Ces comités traduisent une prise de contrôle progressive par les militaires.

2. La paralysie politique à Paris

À Paris, le même jour, le Parlement doit voter la confiance à Pierre Pflimlin, candidat à la présidence du Conseil, perçu comme favorable à des négociations avec les indépendantistes. Cette nomination attise les tensions, exacerbées par la crise algérienne, et fragilise encore davantage les institutions. La fracture entre le pouvoir civil à Paris et le pouvoir militaire en Algérie s’élargit, créant une situation de quasi-putsch.

3. Les origines du désespoir militaire

La défiance des militaires français envers le pouvoir civil s’explique par le traumatisme de la guerre d’Indochine. Les généraux refusent de revivre un sentiment d’abandon, craignant une perte similaire de l’Algérie. Les lois d’exception, qui leur confèrent des pouvoirs renforcés, participent à cette montée en puissance des militaires, alimentant une dynamique conflictuelle avec le gouvernement central.

4. Une situation explosive

La nuit du 13 au 14 mai, le Parlement accorde finalement sa confiance à Pflimlin, mais la rupture est consommée. Deux pouvoirs parallèles émergent : le gouvernement civil à Paris et les autorités militaires à Alger. Les tensions atteignent leur paroxysme, menaçant l’équilibre républicain.

B) Le rôle du Général de Gaulle : un rempart contre la guerre civile

1. Un « homme providentiel » pour les deux camps

Dans ce contexte de quasi-guerre civile, le Général de Gaulle s’impose comme l’homme capable de réconcilier les deux France. À Alger, son nom est scandé par les manifestants, et des figures influentes comme Jacques Soustelle et Georges Bidault plaident en sa faveur. Le 15 mai, le Général se déclare prêt à « assumer les pouvoirs de la République », bien qu’il reste ambigu sur sa position concernant l’Algérie.

2. Un retour par les voies constitutionnelles

De Gaulle, conscient des craintes liées à une possible dérive autoritaire, insiste sur un retour au pouvoir dans le respect des institutions. Lors de sa conférence de presse du 19 mai, il affirme : « Croit-on qu’à 67 ans je vais commencer une carrière de dictateur ? » Il se présente comme le garant de l’unité nationale et de la continuité républicaine.

3. Une figure d’autorité face aux militaires

Face à la menace d’un coup de force militaire (l’opération Résurrection, impliquant un débarquement en Corse), de Gaulle agit fermement pour éviter une guerre civile. Il adresse un message aux forces armées, leur demandant de rester sous l’autorité de leurs chefs, tout en affirmant son intention de prendre contact avec eux. Cette posture lui permet de canaliser la rébellion militaire tout en renforçant sa légitimité.

C) La transition vers la Ve République

1. La démission de Pflimlin et le message de René Coty

Le 28 mai, Pierre Pflimlin démissionne, incapable de gérer la crise. Le lendemain, le Président de la République, René Coty, adresse un message solennel au Parlement, déclarant qu’il fait appel au Général de Gaulle pour présider le Conseil. Il menace de démissionner si l’Assemblée refuse d’investir le Général.

2. Une investiture sous condition

Le Parlement accorde finalement sa confiance à de Gaulle, mais sous réserve de garanties constitutionnelles. Il reçoit les pouvoirs constituants, avec pour mission de rédiger une nouvelle Constitution qui répondrait aux faiblesses structurelles de la IVe République.

 

II ) l’investiture du gouvernement de Gaulle

La Vème République apparaît donc dans le contexte perturbé de la Guerre d’Algérie, appelée par les historiens « le détonateur algérien » qui va provoquer donc la fin de la IVème République.  

1. Un soutien politique et institutionnel stratégique

De Gaulle s’appuie sur le soutien déterminant du Président de la République, René Coty, mais il cherche également à rallier les principaux partis politiques. Pour cela, il offre plusieurs garanties :

  • Il accepte d’inclure dans son gouvernement des représentants des grands partis, comme Pierre Pflimlin (Parti Républicain Populaire) ou Guy Mollet (SFIO).
  • Il s’engage à se présenter personnellement devant l’Assemblée pour obtenir l’investiture, un geste qu’il avait refusé dans le passé.

Le 1er juin 1958, de Gaulle se présente devant l’Assemblée nationale de manière volontairement effacée. Après une brève déclaration, il quitte les débats, laissant Guy Mollet défendre son projet devant les parlementaires. Ce positionnement lui permet de projeter une image de neutralité et de hauteur. La composition éclectique de son gouvernement, réunissant des figures de différents horizons politiques, lui assure une majorité parlementaire.

2. Les trois lois du 3 juin 1958 : une refonte progressive des pouvoirs

Dès son investiture, de Gaulle soumet au Parlement trois projets de lois fondamentaux, adoptés et promulgués le 3 juin 1958, qui scellent les bases de la transition constitutionnelle :

  • Les pouvoirs spéciaux en Algérie : cette loi prolonge les pouvoirs spéciaux accordés aux autorités françaises en Algérie depuis 1951, permettant de garantir l’ordre public face aux tensions liées à la guerre.
  • Les pleins pouvoirs : cette loi accorde au gouvernement la possibilité de légiférer par ordonnances pendant six mois pour redresser l’État, concentrant ainsi l’ensemble des pouvoirs exécutifs et législatifs entre les mains de l’exécutif.
  • La révision de l’article 90 de la Constitution de 1946 : cette loi instaure une procédure exceptionnelle pour réviser la Constitution, transférant au gouvernement de Gaulle le pouvoir constituant. Cette révision vise à permettre l’abrogation de la Constitution de 1946 et son remplacement par une nouvelle.

Ces lois s’accompagnent de garanties démocratiques pour éviter tout risque de dérive autoritaire. Parmi ces garanties figurent :

  • Le respect du suffrage universel.
  • La séparation des pouvoirs.
  • La responsabilité du gouvernement devant le Parlement, élément clé du parlementarisme.
  • L’indépendance de la justice pour protéger les libertés fondamentales.
  • Le maintien des liens entre la République et les peuples associés, dans le cadre d’une communauté française.

3. Une procédure de révision encadrée

Outre les garanties de fond, des conditions de forme sont imposées pour encadrer la révision constitutionnelle :

  • Le projet doit être soumis à un Comité consultatif constitutionnel, composé aux deux tiers de parlementaires.
  • Après avis du comité, il doit être présenté au Conseil d’État pour un second avis consultatif.
  • Le texte final doit être adopté en Conseil des ministres avant d’être soumis à un référendum populaire.

Ces dispositions visent à préserver une dimension démocratique et à dissiper les craintes d’un retour à un régime autoritaire.

 

III) La révision abrogation de 1958 : une répétition de l’histoire ?

1. Un parallèle avec 1940 : similitudes troublantes

Certains observateurs ont rapproché la situation de 1958 de celle de 1940, lorsque le Parlement a confié les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Plusieurs similitudes peuvent être relevées :

  • Une prise de pouvoir légale : dans les deux cas, les gouvernements tirent leur légitimité d’un vote du Parlement, qui leur délègue des pouvoirs extraordinaires.
  • Un contexte de crise : en 1940, c’est la défaite militaire face à l’Allemagne ; en 1958, c’est la guerre d’Algérie et la paralysie institutionnelle de la IVe République.
  • L’idée de l’homme providentiel : Pétain et de Gaulle sont appelés au pouvoir en raison de leur prestige historique (Pétain comme vainqueur de Verdun, de Gaulle comme leader de la Résistance).
  • Une délégation du pouvoir constituant : dans les deux cas, le Parlement abdique son pouvoir de révision constitutionnelle au profit du gouvernement.
  • Un vote sous pression : les parlementaires votent dans un contexte de peur et d’urgence, ce qui limite leur liberté de choix.

2. Des différences fondamentales

Cependant, des distinctions essentielles séparent les deux situations :

  • Le cadre démocratique de 1958 : la loi du 3 juin 1958 impose des garanties précises et respectueuses des principes démocratiques, contrairement à la loi du 10 juillet 1940, brève et ambiguë, qui ouvre la voie à un régime autoritaire.
  • Les objectifs constitutionnels : en 1958, il s’agit de renforcer les institutions démocratiques en réponse à une crise politique, tandis qu’en 1940, les pleins pouvoirs de Pétain conduisent à une suspension de la démocratie.
  • Le respect des libertés : la pratique du pouvoir par de Gaulle en 1958 ne porte pas atteinte aux droits de l’Homme, contrairement au régime de Vichy.

3. Un usage du pouvoir différencié

Comme l’exprime Georges Burdeau : « C’est bien davantage par le bon usage qu’il fait de la puissance que dans la manière dont il s’est imposé que le pouvoir rallie l’adhésion au groupe. » Cette distinction entre 1940 et 1958 réside dans l’usage du pouvoir. De Gaulle respecte les principes républicains, tandis que Pétain les détruit.

 

Section 2 : la pensée politique gaullienne et l’élaboration de la Constitution

La Constitution de 1958, qui marque la naissance de la Ve République, est étroitement liée à la pensée politique du Général de Gaulle. Élaborée en quelques mois, elle reflète ses convictions sur le rôle de l’État, l’équilibre des pouvoirs et la nécessité d’un exécutif fort pour garantir la stabilité et l’efficacité du régime.

A) Une élaboration rapide et méthodique

Le processus de rédaction de la Constitution est mené à un rythme soutenu pour permettre sa présentation à une date hautement symbolique : le 4 septembre 1958, anniversaire de la proclamation de la République en 1870. Cette volonté de se référer à l’histoire républicaine illustre l’importance de légitimer la nouvelle Constitution dans une continuité symbolique, tout en affirmant son caractère novateur.

1. L’organisation du processus d’élaboration

L’élaboration de la Constitution s’appuie sur un dispositif efficace orchestré par un comité d’experts, sous la direction de Michel Debré, principal rédacteur du texte. Ce comité travaille en collaboration avec un comité interministériel, composé de membres du gouvernement, dont des personnalités prestigieuses comme René Cassin, juriste et père de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

La méthode repose sur une navette entre ces deux comités :

  • Le comité d’experts rédige les articles.
  • Les articles sont ensuite transmis au comité interministériel pour validation.

Ce mécanisme permet une rédaction rapide et cohérente. Dès la fin du mois de juillet 1958, un premier projet de Constitution est prêt.

2. Consultation des instances consultatives

Le projet de Constitution passe par plusieurs étapes de validation :

  • Le Comité consultatif constitutionnel (composé de 2/3 de parlementaires et 1/3 de personnalités désignées par le gouvernement) reçoit le texte pour examen. Après 15 jours de délibérations, il émet un avis largement favorable, avec seulement 4 abstentions. Quelques modifications sont néanmoins suggérées.
  • Le Conseil d’État procède à une expertise technique du texte, apportant également des amendements pour en affiner la formulation.

Ces étapes confèrent au projet une légitimité technique et politique avant son adoption définitive.

3. Adoption et promulgation

Le 3 septembre 1958, le projet final est arrêté lors d’un conseil des ministres présidé par René Coty. De Gaulle le présente solennellement le 4 septembre 1958, place de la République, marquant ainsi l’importance symbolique de cette nouvelle étape institutionnelle.

Un référendum national, organisé le 28 septembre 1958, valide le texte à une large majorité. La Constitution est finalement promulguée le 4 octobre 1958, établissant officiellement la Ve République.

B) Une Constitution imprégnée de la pensée politique gaullienne

Sur le fond, la Constitution de 1958 incarne les principes fondamentaux de la pensée politique du Général de Gaulle. Ses idées constitutionnelles, mûries depuis les discours de Bayeux (1946) et d’Épinal (1947), trouvent une concrétisation dans le texte.

1. L’exécutif fort : un pilier de la stabilité

L’un des aspects centraux de la pensée gaullienne est la nécessité d’un chef de l’État fort, capable de garantir la stabilité et l’indépendance de l’exécutif face aux pressions partisanes. Cette vision se traduit par :

  • La création d’un Président de la République doté de pouvoirs étendus, qualifié de « clé de voûte des institutions » par Michel Debré.
    • Le Président peut dissoudre l’Assemblée nationale (article 12).
    • Il dispose du droit de recours au référendum (article 11).
    • En cas de crise grave, l’article 16 lui confère des pouvoirs exceptionnels.
  • La séparation des rôles entre le Président et le Premier ministre, qui dirige le gouvernement et engage sa responsabilité devant le Parlement, dans un cadre parlementaire rationalisé.

2. L’équilibre des pouvoirs : éviter les dérives du passé

De Gaulle cherche à corriger les déséquilibres des régimes précédents :

  • Sous la IIIe et la IVe République, l’instabilité gouvernementale et la prééminence d’un Parlement divisé avaient affaibli l’État.
  • La Constitution de 1958 introduit des mécanismes pour encadrer le Parlement, notamment :
    • Des sessions limitées dans le temps.
    • Une fixation de l’ordre du jour par le gouvernement.
    • Une procédure de motion de censure exigeant une majorité absolue pour être adoptée (article 49-3).

Ces dispositions reflètent l’idée gaullienne selon laquelle les institutions doivent transcender les querelles partisanes, en garantissant la continuité et la souveraineté de l’État.

3. La souveraineté populaire et le recours au peuple

Un autre élément clé de la pensée de Gaulle est son attachement à la souveraineté populaire. Il considère que, face à des institutions souvent paralysées par des intérêts partisans, le peuple doit pouvoir être directement consulté. Cette idée se concrétise dans :

  • Le recours au référendum, comme outil d’arbitrage direct du peuple (article 11).
  • L’élection du Président de la République au suffrage universel direct, instaurée par la réforme de 1962, bien que non prévue initialement en 1958.

4. L’indépendance de la justice et les libertés fondamentales

Conscient des risques de dérive autoritaire, De Gaulle intègre à la Constitution des garanties fortes pour protéger les droits fondamentaux. Le préambule de la Constitution de 1958 renvoie explicitement à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et au préambule de la Constitution de 1946, inscrivant ainsi les libertés fondamentales dans le cadre constitutionnel.

Isa Germain

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