Définition de liberté fondamentale, droits de l’homme…

La distinction entre libertés publiques, droits de l’homme, et droits et libertés fondamentaux

Le constat général est qu’il existe une pluralité de concepts dans le domaine des droits et libertés fondamentaux.

A) La pluralité des notions

Cette diversité des termes et leur évolution se retrouve dans les grands textes relatifs aux droits de l’homme (entendus de manière générale). On le voit à travers plusieurs textes, avec en droit interne la Constitution du 4 octobre 1958. Dans son préambule, il est question de « droits de l’homme » (le peuple français proclame solennellement son attachement aux droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmés et complétés par le Préambule de la Constitution de 1946). Dans la Constitution de 1958, l’article 34 (domaine de la loi) nous dit que « la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ». On a donc à la fois les Droits de l’Homme de 1789 et les Libertés Publiques.

On a également la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 aout 1789. Ce texte est une déclaration qui expose les Droits de l’Homme et du citoyen. Ces droits sont qualifiés de « droits naturels inaliénables et sacrés », on trouve aussi l’expression « droits imprescriptibles », et également de « droits inviolables de l’homme ». Ces droits sont :

  • Propriété

  • Liberté

  • Sûreté

  • Résistance à l’oppression

L’égalité n’est pas un droit naturel imprescriptible et inaliénable, car en droit français il n’existe pas d’égalité naturelle mais il existe une égalité formelle qui se manifeste de deux manières :

  • Égalité devant la loi

  • Égalité devant les charges publiques

Il y a également des droits relatifs aux grands principes du droit pénal dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen :

  • Présomption d’innocence

  • Légalité des délits et des peines

  • Non-rétroactivité de la loi pénale

On trouve aussi la responsabilité de tout agent public, la nécessité d’utiliser la force publique, ainsi que des libertés découlant d’un droit naturel à la liberté. La liberté est un principe gigogne, c’est un principe qui renferme un ensemble de principes. Il contient la liberté d’opinion, la liberté individuelle, la liberté de communication, la liberté d’expression.

Présents dans le bloc de constitutionnalité de la Ve République, on a le Préambule de la Constitution de 1946. Dans ce préambule, il est fait référence aux droits économiques et sociaux qui sont des droits de 2nde génération. On a d’abord les principes politiques économiques et sociaux particulièrement nécessaires à notre temps. On a également les PFRLR.

Le constituant de 1946 réaffirme solennellement les droits et libertés consacrés par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (les Droits de l’Homme).

Pour les textes internationaux, on peut citer 4 textes mentionnant un des termes employés :

  • La Charte des Nations-Unies

Signée le 26 juin 1945 et elle fixe des droits et obligations pour les États-membres et elle crée différents organes. Préambule : « Nous, peuples des Nations-Unies, résolus à proclamer à nouveau notre foi dans les droits fondamentaux de l’homme ». Article premier : « L’un des buts des Nations-Unies est de développer et d’encourager le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion ». C’est à partir de cela qu’apparaît la notion de « fondamentalité » et donc de droits et libertés fondamentaux. C’est dû essentiellement au traumatisme de la 2e Guerre Mondiale.

  • La Déclaration Universelles des Droits de l’Homme

Adoptée le 10 décembre 1948. Elle parle indistinctement des Droits de l’Homme ou des droits fondamentaux de l’homme. Elle contient à la fois des droits civils, économiques et sociaux. On retrouve la dignité de chaque être humain, le droit à la vie, la prohibition de l’esclavage et de la torture, ainsi que des traitements inhumains ou dégradants. Droit au respect de la vie privée et familiale. Liberté du mariage. La Déclaration Universelles des Droits de l’Homme n’a pas de valeur juridique contraignante.

On a créé deux pactes des Nations-Unies le 16 décembre 1966.

  • Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Il est entré en vigueur le 23 mars 1976, il fallait que tous ratifient.

  • Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels

Entré en vigueur le 3 janvier 1976.

L’objectif de ces pactes était de concrétiser les droits contenus dans la Déclaration Universelles des Droits de l’Homme. Il fallait leur donner une valeur contraignante.

Au niveau européen on a deux textes essentiels :

  • La Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales

Cette convention est fixée le 4 novembre 1950, elle parle des Droits de l’Homme et des droits fondamentaux. On compte aussi des protocoles additionnels. L’originalité de cette convention est qu’elle a un juge pour la protéger, la CEDH. Tout particulier peut saisir la CEDH si un État viole un droit de la Convention, avec une contrainte, il faut avoir épuisé les voies de recours interne. Les arrêts de la CEDH ont une simple valeur déclaratoire, et non pas de valeur exécutoire, contrairement aux arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne.

  • La Charte des droits fondamentaux

Elle date du 7 décembre 2000, elle a valeur juridique contraignante depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne Le 1er décembre 2009. Cette charte définit les droits fondamentaux des personnes au sein de l’Union Européenne.

Il y a 6 chapitres dans cette charte : Dignité / Liberté / Égalité / Solidarité / Citoyenneté / Justice

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B) Essai de définition

On se rend compte que ces 3 notions (Droits de l’Homme, Libertés Publiques, droits fondamentaux) sont en réalité historiquement marquées. Les Droits de l’Homme sont une notion ancienne. La notion de Libertés Publiques est spécifiquement française qui apparaît dans un contexte de légicentrisme (le Parlement ne peut pas mal faire car la loi est l’expression de la volonté générale, donc pas de contrôle de constitutionnalité). Le concept de liberté fondamentale est le plus récent et apparaît après la 2e Guerre Mondiale.

1) Les droits de l’homme

Ils correspondent à la doctrine du droit naturel. Idée qu’à côté de la loi de l’État il existerait un droit naturel centré sur l’homme. Au départ, on a considéré que les droits venaient du cosmos (Aristote : les hommes se promènent dans le cosmos et découvrent des droits naturels), puis on considère que ces droits proviennent de dieu. Tout ceci touche au droit naturel classique, qui est suivi du droit naturel moderne (philosophie des Lumières). Le droit naturel moderne (jusnaturalisme moderne) énonce que l’homme, par sa raison, va découvrir par un travail d’introspection des droits.

Ces droits sont avant tout ceux qui sont présents dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, c’est à dire la liberté et la propriété. Une fois que l’homme a découvert ces droits, il va les déclarer dans un texte, c’est la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789. On retrouve cette théorie chez les anglo-saxons et aux USA. Les hommes vont déclarer leurs droits à l’occasion de la Révolution Américaine. Les deux périodes sont concomitantes (fin du XVIIIe).

Pour la Révolution Américaine (1775 – 1783 : Guerre d’Indépendance / 1776 : Déclaration d’Indépendance américaine). On lit dans cette Déclaration que « Tous les hommes sont créés égaux, ils sont doués par le créateur de certains droits inaliénables, parmi ces droits se trouvent la vie, la liberté, et la recherche du bonheur. Les gouvernements sont établis parmi les hommes pour garantir ces droits et leur juste pouvoir émane du consentement des gouvernés ».

Si on compare cela à la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, on voit plusieurs choses. On voit que dans le texte américain, la nation s’émancipe et affirme son droit à l’indépendance. Dans le texte français, l’objectif est de créer les bases d’une société et les droits proclamés vont servir de fondements à cette société. Dans le texte américain, on situe historiquement la période, alors que dans le texte français, la déclaration apparaît abstraite, et à vocation universelle. Dans le texte américain, on fait expressément référence à dieu, dans le texte français, on parle « d’être suprême » qui est présent à titre de témoin pour observer la concrétisation de la société qui proviendra de la volonté générale. Dans le texte américain, on fait beaucoup référence à la loi naturelle, alors que dans le texte français, on a un légicentrisme prononcé. Si on observe la valeur de ces textes, les deux ont force déclaratoire, c’est à dire qu’on a créé ces textes en les percevant comme des textes à vocation philosophique. Pendant longtemps ces textes avaient une valeur déclaratoire, les juristes s’en sont méfiés, et ils ont choisi une notion dénuée de toute idée politique, celle de « liberté publique ».

2) Les libertés publiques

C’est dans les années 1950 qu’on crée un cours de Libertés Publiques (plutôt que de Droits de l’Homme) car les Libertés Publiques apparaissent comme plus concrète, et surtout comme un terme juridique. Ce sont des libertés proclamées par le législateur.

Parmi les grandes libertés, on trouve ce qui concerne la liberté individuelle, la liberté personnelle (dans la liberté personnelle il y a le droit au respect de la vie privée et familiale, et la liberté de commerce notamment). On va avoir des lois sur la liberté d’opinion, la liberté religieuse, et la liberté d’expression. Enfin, la liberté de réunion, et la liberté de manifestation. Toutes ces libertés qui vont être traitées par le législateur sont des libertés publiques car à cette époque, on est en pleine période de légicentrisme. Surpuissance de la loi, et il n’y a pas de contrôle de constitutionnalité.

  • Loi de 1881 sur la liberté de réunion

  • Loi de 1881 sur la liberté de la presse : régime libéral (pas d’autorisation)

  • Loi de 1884 relative à la création des syndicats professionnels

  • Loi de 1901 relative au contrat d’association : régime libéral car création possible sans autorisation ni déclaration préalable.

  • Loi de 1905 relative à la séparation des Eglises et de l’État

La laïcité n’est pas un droit de l’homme. Son but est de rendre plus effective la liberté religieuse.

Suivant les époques, en observant ces libertés et les actions du législateur, on va avoir soit un régie répressif, soit un régime préventif.

Régime préventif : L’ensemble de l’exercice des libertés était soumis soit à déclaration soit à autorisation préalable.

Régime répressif : En cas d’atteinte aux Libertés Publiques, le juge intervenait. Dans ce cadre là, on voit que c’est avant tout le juge judiciaire qui intervient par le biais de la voie de fait (atteinte par les pouvoirs publics à la liberté d’un citoyen).

Voie de fait : L’administration exerce des pouvoirs tellement éloignés du droit que cela enlève le bénéfice du juge administratif, et donc le juge judiciaire est compétent.

Il n’y a voie de fait justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire, que dans la mesure ou l’administration, soit a procédé à l’exécution forcée dans des conditions irrégulières d’une décision même régulière portant une atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit a pris une décision ayant l’un ou l’autre de ces effets, à la condition toutefois que cette dernière décision soit elle-même insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative.

Le juge administratif a pu protéger des droits et libertés, par exemple avec l’arrêt Conseil d’État, « Benjamin », 1933. C’est un contrôle de proportionnalité. Le juge vérifie l’adéquation entre l’atteinte à la liberté occasionnée et les nécessités de protection de l’ordre public.

Avec l’arrivée du contrôle de constitutionnalité en 1958, c’est la fin de la suprématie législative. Contrôle de conventionnalité en 1975 avec l’arrêt Jacques Vabre.

3) Les droits fondamentaux

Ces droits fondamentaux sont une notion présente dans la charte des Nations-Unies, mais cela apparaît surtout dans la loi fondamentale allemande du 23 mai 1949. Elle comporte un chapitre premier intitulé « droits fondamentaux ». Ce concept revêt un caractère contraignant en l’occurrence.

Dans l’article premier de la loi fondamentale, cet article dispose que ces droits fondamentaux nient les pouvoirs législatifs, exécutifs, et judiciaires à titre de pouvoirs directement applicables.

L’article 19 nous dit qu’il ne doit en aucun cas être porté atteinte à la substance d’un droit fondamental. Les droits fondamentaux s’appliquent aussi aux personnes morales nationales. Quiconque est lésé dans ces droits par la puissance publique dispose d’un recours juridictionnel. C’est un recours direct du citoyen devant la Cour constitutionnelle. Il y a cependant un système de filtre.

Au dessus des droits subjectifs appartenant aux individus, on a des droits objectifs qui s’imposent à la société, et ces droits objectifs sont présents dans la Constitution, ils ont une valeur juridique supérieure aux droits subjectifs.

En France, cette notion est introduite dans les années 1990, elle va connaître un certain succès pour 3 raisons :

  • C’est un retour à la thématique des droits de l’homme auxquels les français sont historiquement attachés.

  • On a une approche plus juridique, plus concrète avec cette notion axée sur l’effectivité de la garantie des droits, protégés en premier lieu par le juge constitutionnel.

  • On sort de la logique des Libertés Publiques.

Le succès de cette notion va être confortée par la Jurisprudence protectrice du Conseil Constitutionnel. On ne sait pas vraiment à partir de quand un droit pourra être qualifié de fondamental. On estime que cela appartient au juge constitutionnel. On estime aussi qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les droits et libertés fondamentaux, mais des exemples peuvent venir contrecarrer cette idée.

Exemple : D’un côté on a des droits tels que le droit à la sûreté, qui est un droit fondamental, cela implique des obligations de l’État. Le droit d’obtenir un emploi est aussi un droit fondamental, mais il apparaît moins « important » que le droit à la sûreté.

 

C) La définition des droits et libertés fondamentaux

Il faut partir du concept de liberté pour distinguer la notion des droits de l’homme et des droits fondamentaux.

  • La définition ontologique des libertés

Il s’agit d’identifier l’essence même des libertés (il s’agit probablement de sans plomb 95). Cette définition se place sous l’angle du rapport de l’homme et du monde. La liberté, dans le cadre de ce rapport, est un pouvoir d’autodétermination en vertu duquel l’homme choisit lui-même son comportement.

Cette auto-détermination s’oppose donc au déterminisme. Deux courants se sont donc opposés. Le premier courant, selon lequel l’homme est libre, a été soutenu notamment par l’Eglise catholique, et par Descartes. Le second courant, selon lequel l’homme est le jouet de la prédestination, est celui d’Hegel. Les libertés s’exercent par essence, sans que l’intervention d’autrui soit nécessaire. Elles exigent qu’une habitude d’abstention pour s’accomplir.

Les droits, dans cette définition philosophique, recouvrent sous une même appellation, deux types de pouvoirs différents. D’une part, ils désignent des pouvoirs d’auto-détermination et ils apparaissent alors comme des libertés. Toute liberté est susceptible d’être qualifiée de droit. Les droits désignent aussi des pouvoirs que l’homme n’exerce pas sur lui-même, mais sur autrui, et ils se différencient ici des libertés, car ils se rapportent à des pouvoirs d’exiger d’autrui un comportement positif et pas seulement une abstention.

  • La définition politique des libertés

On se place ici dans le rapport homme – pouvoir. Dans ce cadre-là, la liberté c’est la sphère d’action qui échappe à la contrainte sociale. C’est Gilles Lebreton qui nous le dit. Deux sens de la liberté au sens politique :

    • La liberté peut être conçue comme une liberté-participation, c’est la possibilité pour le gouverné de devenir gouvernant. L’homme échappe à la contrainte sociale en devenant maître de son devenir politique (droit de voter, droit d’être élu…).

    • La liberté peut être vue comme une politique-autonomie. C’est la sphère d’autonomie individuelle du gouverné qui résulte de l’interdiction faite au gouvernant de s’immiscer dans sa sphère d’autonomie (droit à la sûreté…).

  • Critiques autour des définitions des libertés

Des définitions données ont été trop restrictives :

Les libertés à protéger seraient pour certain celles qui sont énoncées dans le préambule de la Constitution de 1946 et dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

Les libertés qu’on doit protéger sont celles qui sont à valeur constitutionnelles.

On a aussi des définitions trop extensives :

Les libertés sont l’ensemble des droits fondamentaux qui dans un État moderne et libéral sont indispensables à une véritable liberté. C’est trop extensif car on fait rentrer toutes les libertés et tous les droits, quelque soit leur valeur, et cela créé une hétérogénéité qui fait perdre à la notion de liberté toute consistance juridique.

La définition qui a été retenue est celle de Lebreton selon qui « les libertés sont des pouvoirs d’auto-détermination qui visent à assurer l’autonomie de la personne humaine, sont reconnus par des normes à valeur au moins législative, et bénéficient d’un régime juridique de protection renforcée, même à l’égard des pouvoirs publics ». Cependant cette définition ne prend pas en compte les droits de créance. De plus, elle fait la part belle au seul concept de libertés et oublie d’aborder le concept de droits. Or, depuis 1990, le Conseil Constitutionnel parle expressément de « droits fondamentaux ».