Définition et caractéristiques de la règle de droit
Le droit, omniprésent dans nos vies, façonne nos interactions, nos droits et nos devoirs au sein de la société. Ce cours introductif vous invite à explorer les fondements de cette discipline . Nous commencerons par définir le droit, en distinguant le droit objectif, ensemble de règles qui régissent la société, des droits subjectifs, prérogatives individuelles que chacun détient.
Nous plongerons ensuite au cœur de la distinction entre les règles de droit et d’autres normes sociales, telles que la morale et la religion, en soulignant leurs spécificités et leurs interactions. Nous examinerons enfin les caractéristiques fondamentales de la règle de droit : sa généralité, sa permanence, son caractère obligatoire et coercitif.
Définition du droit
Le droit est un ensemble de règles de conduite qui, dans une société, régissent les rapports entre les individus : c’est le droit objectif. Le terme désigne également les prérogatives reconnues aux personnes : leurs droits subjectifs. Entre l’ensemble des règles et les comportements des particuliers, il existe des relations étroites, constantes et réciproques.
Importance des règles dans la société
- Qu’est-ce que le raisonnement juridique ?
- Résumé de droit civil : famille, patrimoine, personne…
- L’organisation territoriale et politique (État, département…)
- Le droit objectif : caractère, définition, ses branches
- Quelles sont les sources du droit objectif ?
- Quelle est l’organisation des juridictions françaises ?
- Droits subjectifs : définition, sources, preuves
L’être humain vit en société, et pour que cette vie soit possible, chacun doit obéir à un certain nombre de règles. Aucun corps social ne peut exister sans une certaine discipline de ses membres. Le droit détermine donc un ensemble de normes de conduite ; il définit ce que chacun peut et doit faire pour que la vie en société soit possible.
D’autres articles sur la définition du droit, les branches du droit et la finalité du droit :
- Qu’est ce que le Droit ?
- Qu’est-ce que le droit et la justice?
- Une définition du droit et des branches du droit
- Le droit : définition du droit, caractères…
- Quelle est la finalité, le but du droit ?
Distinction du droit avec d’autres types de règles
Les règles de droit coexistent avec d’autres types de règles qui participent également à la régulation de la société. Les règles morales, religieuses et sociales établissent des normes de comportement, mais elles diffèrent de la règle de droit par leur nature, leur finalité et leur mode de sanction.
1. Règles morales
La morale est un ensemble de principes de comportement qui sont dictés par la conscience individuelle et visent le bien et le juste. La morale impose des obligations que chacun peut s’imposer à lui-même sans intervention de l’État.
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Convergence entre la morale et le droit : De nombreuses règles de droit coïncident avec les règles morales, car elles protègent des valeurs fondamentales communes. Par exemple, l’interdiction de tuer est à la fois une règle morale et une règle juridique inscrite dans le Code pénal ; le meurtre est sanctionné par des peines de prison et autres mesures punitives.
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Différences entre la morale et le droit : La morale est avant tout une règle intérieure, relevant de la conscience individuelle, et ses sanctions sont d’ordre personnel (ex. : le remords, la culpabilité). À l’inverse, le droit est coercitif et impose des sanctions extérieures et concrètes (ex. : amendes, emprisonnement). De plus, certaines règles morales ne sont pas traduites en règles de droit. Par exemple, la morale peut prôner la charité envers autrui, mais le droit ne consacre pas un devoir général de charité, bien que certaines obligations (comme l’aide familiale) existent.
2. Règles religieuses
Les règles religieuses sont des prescriptions issues de croyances et doctrines spirituelles. Certaines de ces règles rejoignent les règles juridiques, mais elles relèvent principalement de la sphère privée, surtout dans un État laïc comme la France.
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Convergence entre religion et droit : Certaines règles religieuses sont en accord avec les règles de droit, notamment en matière de comportements universellement condamnés, comme le vol. Par exemple, la règle religieuse « Tu ne voleras pas » est aussi une interdiction juridique sanctionnée par le Code pénal.
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Distinction et séparation des règles religieuses et juridiques : En France, depuis la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État, le droit français n’est plus subordonné aux normes religieuses. La laïcité est un principe constitutionnel de la République française (article 1 de la Constitution de 1958), qui affirme que l’État est neutre vis-à-vis des religions. Les règles religieuses relèvent de la sphère privée et n’ont pas force obligatoire en droit. Par exemple, l’interdiction religieuse du divorce dans le catholicisme ne s’applique pas en droit français, où le divorce est légalement autorisé.
3. Règles sociales
Les règles sociales ou règles de courtoisie organisent les comportements quotidiens et les relations interpersonnelles dans la société (ex. : politesse, respect d’autrui). Bien qu’elles ne soient pas contraignantes comme la règle de droit, elles contribuent à la bonne entente sociale.
- Exemple : Dire bonjour ou remercier quelqu’un est une norme de courtoisie, mais elle n’a pas de sanction juridique.
En somme, si la règle de droit peut s’inspirer de la morale ou de la religion, elle s’en distingue par son caractère impersonnel, obligatoire, et coercitif, puisqu’elle s’impose à tous avec des sanctions extérieures en cas de violation.

Caractéristiques de la règle de Droit
La règle de droit possède quatre caractéristiques fondamentales : elle est générale et abstraite, permanente, obligatoire, et coercitive.
1. Généralité et abstraction de la règle de droit
La règle de droit est générale et abstraite, ce qui signifie qu’elle s’applique de manière indifférenciée à toutes les personnes qui se trouvent dans la situation qu’elle régit, sans distinction individuelle.
- Exemple 1 : L’article 1591 du Code civil dispose que « le prix de vente doit être déterminé ». Cette disposition s’applique à tout contrat de vente et, par conséquent, à toute personne concluant une vente.
- Exemple 2 : La règle imposant le port de la ceinture de sécurité en voiture concerne spécifiquement les occupants d’un véhicule, sans exception, dès lors qu’ils se trouvent dans cette situation.
- Exemple 3 : La loi impose aux commerçants certaines obligations, qui s’appliquent à toute personne ayant cette qualité, définie selon le droit commercial.
Cette généralité permet à la règle de droit de traiter tous les cas similaires de manière uniforme, assurant ainsi l’égalité devant la loi.
2. Permanence de la règle de droit
La règle de droit est permanente : elle est conçue pour être durable et s’appliquer de manière continue à partir de son entrée en vigueur jusqu’à sa modification ou son abrogation. La règle de droit n’est donc pas limitée dans le temps, sauf si elle est spécifiquement établie pour une durée déterminée.
3. Obligation et coercition
La règle de droit est obligatoire, ce qui signifie que chacun est tenu de s’y conformer. Ce caractère obligatoire peut être de deux types :
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Règles impératives : Ces règles s’imposent de manière absolue et ne peuvent pas être écartées par un accord contraire. Elles protègent l’ordre public et les bonnes mœurs, ou les droits fondamentaux. Par exemple, l’article 6 du Code civil précise qu’« on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l’ordre public et les bonnes mœurs ».
- Exemple : Le mariage impose un régime par défaut, la communauté réduite aux acquêts, mais cette règle est supplétive : les époux peuvent choisir un autre régime matrimonial, comme la séparation de biens.
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Règles supplétives : Ces règles s’appliquent par défaut, mais peuvent être écartées si les parties conviennent d’autres dispositions. Elles interviennent principalement en droit contractuel et successoral.
- Exemple : En matière de succession, en l’absence de testament, la loi détermine les héritiers. Mais une personne peut rédiger un testament pour répartir ses biens selon ses souhaits, dérogeant ainsi à la règle supplétive.
En France, bien que certaines règles, notamment en droit civil, soient supplétives, une majorité des normes sont impératives, particulièrement dans les domaines touchant aux droits fondamentaux, à la protection de la personne et à l’ordre public.
4. Coercition de la règle de droit
La règle de droit est coercitive, c’est-à-dire qu’elle est assortie de sanctions en cas de non-respect. Cette coercition garantit que la règle de droit est respectée et applique la contrainte nécessaire pour en assurer l’observance.
Sanctions de la règle de droit
La règle de droit est une norme obligatoire, et son non-respect entraîne diverses sanctions coercitives pour en assurer l’application. Ces sanctions varient selon la nature de la règle violée.
1. Sanctions répressives
Les sanctions répressives visent à punir l’auteur d’une infraction à la loi pénale par l’application d’une peine. Elles comprennent :
- Peines privatives de liberté : telles que l’emprisonnement, lorsque l’infraction est grave (crimes et délits).
- Amendes : des peines pécuniaires imposées pour certaines infractions.
- Peines complémentaires : telles que le retrait du permis de conduire ou des interdictions professionnelles.
Ces sanctions sont prononcées par le juge pénal dans le cadre de la répression des comportements socialement inacceptables.
2. Sanctions administratives
Les sanctions administratives sont des sanctions imposées en cas de violation d’une règle relevant du droit administratif, souvent pour des infractions aux règlements ou aux décisions des autorités administratives.
Exemple : En matière d’urbanisme, le Code de l’urbanisme impose un permis de construire pour la surélévation d’un bâtiment. En cas de travaux entrepris sans ce permis, l’administration peut exiger la démolition de la construction non conforme.
3. Sanctions civiles
Les sanctions civiles ont pour but de réparer le préjudice causé à autrui. Elles se fondent sur la responsabilité civile, définie à l’article 1240 du Code civil (ancien article 1382) : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » En matière civile, les sanctions peuvent inclure :
- Dommages et intérêts : pour indemniser la victime du préjudice subi.
- Exécution forcée : enjoindre à la partie fautive de respecter ses obligations contractuelles.
- Annulation ou résiliation d’un contrat : en cas d’inexécution grave des obligations contractuelles.
4. Sanctions non étatiques
Dans certains domaines, comme le commerce international, les sanctions ne sont pas toujours prononcées par les juridictions étatiques. Les parties peuvent convenir de recourir à l’arbitrage en cas de litige. L’arbitre, choisi par les parties, rend une décision appelée sentence arbitrale, ayant force obligatoire et pouvant être exécutée comme un jugement. L’arbitrage est notamment courant dans les contrats internationaux.
5. Cas particuliers
Dans certains cas, la règle de droit n’est pas assortie de sanctions directes, bien qu’elle conserve un caractère obligatoire.
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Absence de sanction présidentielle : Selon la Constitution de 1958, le Président de la République doit promulguer les lois votées par le Parlement, mais il n’existe pas de sanction prévue s’il ne le fait pas.
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Règles de droit international public : Les règles qui régissent les relations entre États sont souvent difficiles à faire respecter en raison de la souveraineté nationale. Bien que des sanctions existent (ex. : sanctions économiques, diplomatiques), elles sont d’application complexe et dépendantes du consentement des États.
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L’obligation naturelle : Certaines obligations sont qualifiées de naturelles, c’est-à-dire qu’elles consacrent un devoir moral sans en imposer l’exécution par voie judiciaire. Contrairement aux obligations civiles, elles ne peuvent être exécutées de force, mais une fois accomplies, elles sont considérées comme juridiquement valables.
Exemple : Le Code civil prévoit une obligation alimentaire naturelle entre frères et sœurs, qui peut être remplie volontairement sans recours à la justice.
EXERCICES PRATIQUES
Exercice 1
Situation : M. et Mme Durand ont été invités à dîner par M. et Mme Martin. À la fin du repas, les époux Durand sont partis sans remercier ni dire au revoir aux hôtes. Les époux Martin souhaitent les poursuivre en justice pour que cette impolitesse soit sanctionnée.
Analyse :
Le comportement des époux Durand relève de la courtoisie et des règles de savoir-vivre, qui sont des règles sociales. Bien que leur départ sans remerciement puisse être considéré comme un manquement aux règles de politesse, il n’enfreint aucune règle de droit. Les règles de courtoisie ne sont pas juridiquement contraignantes et ne peuvent pas faire l’objet de sanctions légales. En conséquence, les époux Martin ne peuvent pas engager de poursuite judiciaire contre les époux Durand pour ce comportement, car il ne s’agit pas d’une violation de la loi.
Exercice 2
Question : Quelle est la nature de l’interdiction de fumer dans les lieux publics ?
Réponse :
L’interdiction de fumer dans les lieux publics est passée d’une simple règle de courtoisie à une règle juridique avec la promulgation de la loi Évin en 1991. Cette loi a introduit des restrictions légales strictes en matière de tabagisme dans les lieux publics, assorties de sanctions en cas de non-respect. Cette évolution montre qu’une règle de bienséance ou de courtoisie peut devenir une règle de droit lorsqu’elle est codifiée par une loi et assortie de sanctions juridiques. Aujourd’hui, l’interdiction de fumer dans les lieux publics est donc une norme obligatoire dont la violation peut entraîner des amendes et d’autres sanctions légales.
Le cours d’introduction au droit privé est divisé en plusieurs fiches :
Définition du droit Les rapports entre le Droit et la Justice Les sources non écrites du droit Les sources écrites du droit (constitution, loi, traité…) Droit subjectif Application de la loi dans le temps et l’espace Distinction acte juridique et fait juridique Personne physique et personne morale Les grands principes de procédure civile Organisation juridictionnelle en France
Quelques questions relatives au cours sur la définition et les caractéristiques du droit
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Qu’est-ce que le droit objectif ?
- Le droit objectif est un ensemble de règles de conduite qui, dans une société, régissent les rapports entre les individus.
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Qu’est-ce que le droit subjectif ?
- Le droit subjectif désigne les prérogatives reconnues aux personnes.
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Pourquoi les règles sont-elles importantes dans la société ?
- Les règles sont importantes dans la société car elles permettent de maintenir l’ordre et la discipline nécessaires pour que la vie en société soit possible.
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Quelles sont les différentes catégories de règles qui régulent la société ?
- Les différentes catégories de règles qui régulent la société sont les règles morales, les règles religieuses et les règles sociales.
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Qu’est-ce que la morale et comment se distingue-t-elle du droit ?
- La morale est un ensemble de comportements dictés par la conscience. Elle se distingue du droit par le fait que toutes les règles morales ne relèvent pas du droit et que les sanctions de la morale sont personnelles, tandis que celles du droit sont extérieures.
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Quels sont les exemples de règles morales qui coïncident avec le droit ?
- Un exemple de règle morale qui coïncide avec le droit est l’interdiction de tuer, qui est à la fois une règle morale et une règle de droit pénal.
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Pourquoi toutes les règles morales ne relèvent-elles pas du droit ?
- Toutes les règles morales ne relèvent pas du droit car certaines, comme la charité envers autrui, ne sont pas consacrées par le droit.
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Qu’est-ce que les règles religieuses et comment se distinguent-elles des règles juridiques ?
- Les règles religieuses sont souvent des règles juridiques, mais elles ne le sont pas toujours. Par exemple, la religion catholique interdit le divorce, mais cette interdiction n’est pas une règle juridique en France.
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Quelle est la situation des règles religieuses en France depuis la loi de 1905 ?
- Depuis la loi du 9 décembre 1905, il y a séparation de l’Église et de l’État en France. La Constitution de 1958 proclame que la France est un État laïc, et les activités religieuses relèvent de la sphère privée.
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Quelles sont les quatre caractéristiques de la règle de droit ?
- Les quatre caractéristiques de la règle de droit sont : elle est générale et abstraite, permanente, obligatoire et coercitive.
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Qu’est-ce que la généralité et l’abstraction de la règle de droit ?
- La généralité et l’abstraction de la règle de droit signifient qu’elle s’applique à toute personne qui s’inscrit dans la situation qu’elle décrit ou pour toute personne qui vient à y entrer.
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Qu’est-ce que la permanence de la règle de droit ?
- La permanence de la règle de droit signifie qu’elle est durable et constante dans le temps. Elle s’applique dès son entrée en vigueur, jusqu’à sa modification ou son abrogation.
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Qu’est-ce que l’obligation et la coercition de la règle de droit ?
- L’obligation et la coercition de la règle de droit signifient qu’elle s’applique et que chaque individu est tenu de s’y conformer. Ce caractère obligatoire a des intensités variables : elle est soit impérative (on ne peut pas y déroger par une convention contraire) ou supplétive (quand il est possible de la remplacer par une autre).
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Quels sont les exemples de règles impératives et supplétives ?
- Exemple de règle impérative : Article 6 du Code Civil.
- Exemple de règle supplétive : Les contrats de mariage, où l’on peut choisir entre plusieurs possibilités, même si le régime légal est la « communauté réduite aux acquêts (possessions) ».
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Quelles sont les différentes sanctions de la règle de droit ?
- Les différentes sanctions de la règle de droit sont les sanctions répressives, administratives, civiles et non étatiques.
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Qu’est-ce qu’une sanction répressive ?
- Une sanction répressive consiste en une peine infligée à celui dont le comportement se trouve incriminé par la loi pénale.
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Qu’est-ce qu’une sanction administrative ?
- Une sanction administrative est une sanction lorsqu’on a violé un texte administratif.
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Qu’est-ce qu’une sanction civile ?
- Une sanction civile consiste à réparer le préjudice subi par une personne du fait de notre comportement.
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Qu’est-ce qu’une sanction non étatique ?
- Une sanction non étatique est une sanction qui n’émane pas d’une autorité étatique, comme dans le cas de l’arbitrage en commerce international.
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Quels sont les cas particuliers où la règle de droit n’est pas assortie de sanctions ?
- Les cas particuliers où la règle de droit n’est pas assortie de sanctions incluent la Constitution de 1958 (promulgation des lois par le Président de la République), les règles de droit international public, et les obligations naturelles.
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Qu’est-ce qu’une obligation naturelle ?
- Une obligation naturelle est une règle de droit qui consacre juridiquement un comportement sans l’imposer et sans qu’il soit susceptible d’exécution forcée.