La libéralité-partage : définition et condition

Définition et conditions de la libéralité partage

Toute personne peut faire entre ses héritiers présomptifs, la distribution et le partage de ses biens. À la différence du droit antérieur, le nouvel article 1075 du Code civil ne réserve plus aux père et mère ou autres ascendants la faculté de réaliser de son vivant une libéralité-partage (par donation ou testament) entre ses futurs héritiers

Section 1 : Définition et intérêts de la libéralité partage

  • La donation-partage est à la fois une donation et un partage. Elle permet, de son vivant, de transmettre et de répartir tout ou partie de ses biens. Elle se fait par acte notarié.
  • Le testament-partage est un acte par lequel une personne (le testateur) effectue un partage anticipé de sa succession entre ses héritiers. Les héritiers concernés reçoivent les biens au décès du testateur. S’ils refusent le testament-partage, ils ne peuvent pas réclamer leur part dans la succession.

Le partage est réalisé par l’ascendant lui-même. L’idée est d’éviter certains inconvénients du partage : l’idée est d’opérer une répartition rationnelle des biens entre les descendants ou d’autres héritiers. L’idée est de ne pas se laisser prendre par les aléas du partage. Les libéralités partage ont une nature mixte. Avant tout, la libéralité partage est un partage mais la spécificité est que le disposant désire réaliser lui-même ce partage de son vivant. En même temps, ce partage a pour support une libéralité et il va en emprunter en partie, sa nature. On a vraiment une coloration mixte pour ces libéralités partages. Cette nature mixte se retrouve dans les deux sortes de libéralités donation : la donation partage et le testament partage. Ces appellations n’ont pas été modifiées par la loi de 2006. Le disposant dispose de deux procédés : par la donation partage, il se dépouille immédiatement et irrévocablement de ses biens ; pour le testament partage, on a un instrument qui est toujours révocable et qui ne produit des effets qu’au décès du disposant. La donation partage présente l’avantage de permettre notamment à un ascendant âgé de transmettre une entreprise familiale désormais trop lourde à des plus jeunes. Celui qui va recevoir le bien est certain de le conserver : cet intérêt explique que le législateur est souhaité à élargir la donation-partage. Précédemment, pour développer la donation partage, c’était des dispositions fiscales qui avaient été développées. La donation partage présente aussi des inconvénients, le disposant se trouve dans une situation diminuée : il n’a plus le bien important dans ce patrimoine. Il peut exclure la donation partage d’une partie de ces biens, il peut aussi stipuler dans l’acte une rente viagère. Il y a une solution, c’est que le disposant se réserve l’usufruit des biens donnés. A ce moment là, l’un des avantages majeurs de la donation partage va disparaître. On peut se demander si un testament partage ne serait pas préférable : les effets ne se produiront qu’au décès. Néanmoins, le testament partage est une institution mal-aimée : elle peut utilisée.

Le but poursuivi par le disposant n’est pas tant de gratifier les bénéficiaires que d’opérer un partage. Le testament partage réalise un partage qui s’impose aux héritiers. Il n’y a pas besoin de l’accord des héritiers et d’autorisation judiciaire. Pour la donation partage, les héritiers n’interviennent qu’aux côtés du disposant.

Section 2 : Les conditions de la libéralité partage

La plupart des conditions de la libéralité partage sont déterminées par le but poursuivi par le disposant : procéder au partage de ces biens.

I : Les conditions dictées par la nature de partage de l’opération

  1. La volonté de partager

La condition essentielle de la libéralité partage est la volonté du disposant de partager ces biens entre les héritiers. Cette volonté de partage est très importante car elle va être caractéristique de la libéralité partage et va permettre de distinguer la donation partage d’opérations voisines comme par exemple, une donation rapportable qui va être une libéralité et qui va participer au partage. Dans ce cas, l’essentiel dans la volonté du disposant est la volonté de gratifier.

La jurisprudence donne la pas à la volonté du disposant plutôt qu’aux éléments matériels de l’acte. C’est la volonté de répartir ces biens qui animaient le disposant. Cet arrêt montre l’attraction de la qualification de donation partage.

  1. Les parties à la libéralité partage

Traditionnellement, la libéralité partage est une institution familiale.

  1. Les bénéficiaires

A l’origine, la libéralité partage est une institution familiale. A partir de 1988, on a eu une ouverture à des tiers.

La famille :

Au sein de la famille, les bénéficiaires ont évolué : les bénéficiaires principaux sont les descendants. A cet égard, la loi de 2006 a fait une plus large place aux petits enfants.

Les descendants qui viennent à la succession: s’agissant de descendant, le texte a pris en compte les différentes réforme de la filiation, peu importe la qualité de la filiation (légitime ou naturel), peu importe que sa filiation soit adoptive, peu importe que sa filiation soit incestueuse : il faut seulement qu’il s’agisse d’enfants ou de descendants qui ont vocation de leur chef ou par représentation à la succession de l’ascendant. La libéralité partage devrait nécessairement comprendre tous les descendants qui viennent à la succession : avant la réforme de 1938, la jurisprudence prononçait la nullité absolue si on oubliait un descendant. La loi de 1938 donne plus de sécurité aux héritiers : elle avait limite la portée de cette solution. L’action en nullité pour omission d’héritier a été supprimée en 1971 : cette action a fusionné avec l’action en réduction qui est devenue la sanction unique des règles des libéralités partage. L’action en réduction ne lui donne plus droit qu’à sa réserve.

La loi de 2006 a élargit la donation partage et le testament partage aux descendants qui ne viennent pas à la succession: on parle de libéralité partage avec saut de génération. On appelle ça des libéralités partage transgénérationnelle. En réalité, jusqu’en 2006, on pouvait déjà envisagé une donation partage qui bénéficie à certains petits enfants. Si un enfant était prédécédé, les petits enfants issus de lui pouvaient venir à la donation. En 2006, ils peuvent venir à la donation partage même si leur propre auteur est toujours vivant. L’idée est de permettre de gratifié des petits enfants qui s’installent et qui ont besoin d’hériter d’avantage que d’autres déjà installées dans la vie. D’après l’article 1078-4 du Code civil : il faut l’accord de la génération intermédiaire. Il ne s’agit pas vraiment d’une pure renonciation anticipée : c’est un consentement à ce que les descendants soient substituer dans les droits de leur auteur. L’enfant donne son consentement à ce que son ou ses propres enfants soient substitué à lui dans ses droits successoraux. Il faut le consentement du donateur, des donataires et des enfants qui renoncent à tout ou partie de leur droit. Il faut donner ces consentements dans l’acte même de donation partage. Cet acte sera pratiquement toujours un acte authentique puisque l’article 1075 du Code civil soumet les donations partage aux dispositions des donations entre vifs. Cela s’explique par l’absence d’aléa : on renonce à demander la réduction. La renonciation des enfants peut être totale : la renonciation ne peut être que partielle : l’enfant peut désirer garder une partie de ses droits et renoncer à une partie de ses droits pour qu’ils soient transmis à ces enfants. Quand elle est partielle, elle permet de réunir dans la donation partage, enfants et petits enfants. On peut aussi envisager une donation partage avec un enfant unique : article 1078-5 alinéa 1 du Code civil. Les biens concernés par cette donation partage sont les biens présents, des biens qui auraient été antérieurement donnés par l’ascendant à un de ses enfants. Cette incorporation d’une donation antérieure pour une donation partage est prévue à l’article 1078-1 du Code civil. Pour la donation transgénérationnelle, ça va permettre de substituer au donateur, les propres enfants du donataire initial. Quand il y a des descendants de même degré, une donation partage traditionnelle permet de faire une répartition par tête ; quand il y coexiste de générations différentes, on va partager par souche : c’est l’égalité par souche qui compte.

Les héritiers non descendants: la loi de 2006 a voulu permettre à « toute personne de faire entre ses héritiers présomptifs, la distribution et la partage de ses biens et de ses droits ». On peut se demander quel est l’intérêt de cette présomption puisqu’on pouvait adresser des libéralités à des héritiers présomptifs. En l’absence d’héritier partage, la donation partage ne présente pas beaucoup d’intérêt. En présence d’héritier réservataire, la donation partage permettra le cas échéant, de figer les évaluations pour le calcul de la réserve et de la réduction : le fait d’inclure ces donations dans une donation partage permet de figer les dates d’évaluation dans la réserve et la quotité disponible. C’est le cas où le disposant est marié mais n’a pas d’enfant ; décès où il a des conjoints survivants et des enfants.

Les tiers:

C’est un élargissement plus rare qui existe depuis la loi du 5 janvier 1988. Il est possible de faire bénéficier d’une donation partage d’autres personnes que les descendants. Des conditions strictes ont été déposées. Avant 2006, 3 conditions devaient être réunies :

au moins 2 descendants devaient être allotis dans la donation partage

les biens des ascendants devaient comprendre une entreprise individuelle à caractère industriel ou commerciale ou artisanal ou agricole ou libéral.

la donation partage devait attribuer aux autres personnes que des biens affectés à l’exploitation de l’entreprise

Cette fabuleuse ouverture n’a pas séduit la pratique. Cette donation partage n’a eu aucun succès. Face à cette non performance, soit en la supprimait soit on la réformait. Le législateur a choisit de la réformer en profondeur : il a choisi de la maintenir en l’élargissant : article 1075-2 du Code civil. Il peut s’agir des droits sociaux d’une société : cette société doit exercer une activité à caractère industriel, commercial, agricole, artisanal ou libéral et le disposant doit exercer une fonction dirigeante dans cette société. Par ailleurs, aux côtés du tiers, il pourra s’agir de tous les bénéficiaires visées sur les libéralités partages (descendants non héritier présomptif ou héritier présomptif non descendant). Il n’y a plus d’exigence de 2 descendants allotis. Les conditions propres à chaque forme de société et les conditions statutaires doivent être respectées.

  1. L’auteur

Traditionnellement, l’auteur de la donation partage va être un seul ascendant partageant. Il va partager les biens qui lui appartiennent. Il est possible de faire des partages conjonctifs ou cumulatifs.

Des partages conjonctifs :

C’est l’hypothèse de parents qui voudraient faire un partage de l’ensemble de leurs biens. Souvent, les parents souhaitent procéder à la répartition des biens de l’un et de l’autre en même temps. La loi leur interdit de faire un testament conjonctif. Le législateur n’a pas levé cette interdiction. La jurisprudence a eu l’occasion de rappeler que ce n’était pas possible. Il faut donc écarter cette donation en cas de testament partage. En cas de donation partage, les ascendants peuvent faire un partage conjonctif : ils peuvent partager leur biens propres et leurs biens communs dans un même acte.

La question s’est posée à propos des familles où des enfants ne sont pas communs aux deux parents ? La Cour de cassation avait refusé cette possibilité dans un arrêt de 1981. Certains auteurs estimaient que des enfants qui ne sont ceux que de l’un des époux peuvent être appelés à une donation conjonctive que si ces enfants reçoivent que des biens du chef de leur auteur et certains considéraient que dans ce cas seuls les biens propres pouvaient être transmis ; d’autres estimaient qu’on pouvait le faire sur des biens communs. La loi de 2006 a clarifié les choses : article 1076 alinéa 2 du Code civil : la loi a autorisé ces donations de partage conjonctive même au profit d’un enfant non commun sur les biens propres et sur les biens communs sans que le conjoint soit codonateur. Cette précision est intéressante fiscalement : si le conjoint était considéré comme codonateur, n’étant pas parent, les droits de mutations seraient maximales. Ces textes lèvent des incertitudes mais il apporte une nouvelle incertitude : il vise les deux époux, si la famille se recompose dans mariage, le texte s’applique-t-il ? Pas de réponse.

Un partage cumulatif :

C’est une hypothèse relativement fréquente : un des parents décède. Sa succession reste dans l’indivision. Normalement, le survivant, s’il veut faire une donation partage ne peut pas comprendre dans cette donation, les biens de la succession car il ne lui appartienne pas complètement. La Cour de cassation a admis la validité d’un partage cumulatif lorsque cette opération se fait par acte entre vifs à condition que tous les enfants majeurs et capables acceptent le partage. Cette opération est réalisée dans un même acte mais elle est double : elle englobe un partage amiable des biens de l’époux prédécédé et une donation partage des biens du survivant.

Dans le partage conjonctif, on a un partage des deux époux alors que le partage cumulatif, c’est la partage qui est fait par l’ascendant survivant.

II : Les conditions dictées par la nature de libéralité de l’opération

  1. Les conditions de forme

Ce sont celles de la donation et du testament.

Elles ne peuvent être réalisées que par acte authentique. Il est arrivé que la jurisprudence admette la validité de donation partage déguisée ou que soit admis une donation partage portant sur des meubles par don manuel. Pour le testament partage, le disposant a le choix entre les 4 formes de testament.

  1. Les conditions de fond

L’idée, c’est qu’une libéralité partage ne peut se faire que par l’intermédiaire d’un acte à titre gratuit. Hypothèse où un père avait partagé avec ses enfants un bien indivis mais le père ne procurait aucun avantage gratuit à ses enfants : on a considéré qu’il y avait un simple partage. Par ailleurs, comme une libéralité, elle est susceptible d’une charge qui s’imposerait au gratifié. Les charges ne doivent pas être telles que la libéralité disparaîtrait. L’article 1075 alinéa 2 du Code civil renvoie aux formalités, conditions et libéralités prescrites.

III : Les conditions relatives aux biens de libéralité de l’opération

Le disposant peut s’il le souhaite ne faire qu’un partage partiel. Les biens qui ne seront pas accomplis dans le partage : s’il s’agit d’une donation partage, les biens doivent être des biens présents. On peut aussi mettre des biens déjà donnés par l’ascendant à certains copartageants. On va avoir des biens acquis en emploi ou remploi des biens donnés. On peut avoir aussi des biens qui font l’objet d’une donation antérieure. En plus, on peut mettre des biens qui ont fait l’objet d’aucune libéralité.