Les modes de scrutin aux élections à l’Assemblée nationale et au Sénat
es élections parlementaires en France diffèrent selon les modes de scrutin, qui peuvent être majoritaires, proportionnels ou mixtes, chacun ayant des implications particulières pour la représentation et la stabilité politique.
1. Les Différents Types de Scrutin en France
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Scrutin Majoritaire (élections présidentielle, législative, cantonale) : Le candidat qui obtient la majorité des voix est élu. Ce mode de scrutin favorise les grandes coalitions et une majorité claire pour gouverner.
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Scrutin à la Représentation Proportionnelle (élection européenne) : Les sièges sont attribués proportionnellement aux suffrages obtenus par chaque liste de candidats, favorisant la diversité et la représentation des minorités politiques.
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Scrutin Mixte (élections municipales, régionales, sénatoriales) : Ce système combine des éléments majoritaires et proportionnels pour équilibrer stabilité et représentation.
2. Mode de scrutin pour les députés (Assemblée Nationale)
Les députés sont élus au suffrage universel direct (SUD) au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Les conditions d’élection sont les suivantes :
- Institutions politiques et Droit constitutionnel
- Droit des Institutions administratives
- Les causes de la Révolution française
- L’après Révolution : du Directoire au Second Empire
- De la 3ème République à la 4ème République
- Le régime politique et démocratique de la France
- Les causes de la naissance de la Vème République
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Premier tour : Un candidat est élu dès le premier tour s’il obtient la majorité absolue des suffrages exprimés (plus de 50 %) et un minimum de 25 % des inscrits.
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Second tour : Si aucun candidat n’atteint ces seuils, seuls ceux ayant obtenu au moins 12,5 % des inscrits peuvent se présenter. À l’issue du second tour, la majorité relative suffit pour remporter l’élection.
Ce mode favorise la formation d’une majorité stable et encourage les alliances politiques, contribuant ainsi à la stabilité de l’Assemblée nationale.
3. Mode de scrutin pour les Sénateurs (Sénat)
Les sénateurs sont élus au suffrage universel indirect (SUI), par environ 150 000 grands électeurs (députés, conseillers régionaux et départementaux, et délégués municipaux). Le mode de scrutin varie en fonction du nombre de sièges à pourvoir dans chaque département :
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Scrutin majoritaire à deux tours : Appliqué dans les 70 départements qui élisent moins de quatre sénateurs. Ce scrutin favorise les candidats les mieux implantés localement.
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Scrutin proportionnel : Utilisé dans les 39 départements qui élisent quatre sénateurs ou plus, répartissant les sièges proportionnellement et assurant une meilleure représentation des minorités politiques.
Les sénateurs sont élus pour un mandat de six ans, avec un renouvellement par moitié tous les trois ans.
4. Cadre constitutionnel et législatif
L’article 34 de la Constitution délègue à la loi la détermination des modalités électorales des élections locales, législatives et sénatoriales, tandis que l’article 24 prescrit que les députés soient élus au suffrage universel direct et les sénateurs au suffrage universel indirect. La révision constitutionnelle de 2008 a fixé un plafond de 577 députés et 348 sénateurs.
5. Les effets politiques des modes de scrutin
Les modes de scrutin influencent directement la dynamique politique :
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Scrutin majoritaire : Favorise la création de majorités fortes et réduit la fragmentation parlementaire.
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Représentation proportionnelle : Permet une représentation plus large des partis et favorise la diversité, au prix d’une certaine instabilité gouvernementale.
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Système mixte : Utilisé pour certaines élections locales et sénatoriales, il permet de concilier stabilité et représentation proportionnelle.
Réflexions Historiques : Les Modes de Scrutin sous la IVe République
Sous la IVe République, la France adoptait principalement la proportionnelle, ce qui a engendré une forte fragmentation parlementaire et une instabilité gouvernementale marquée. C’est pour pallier cette instabilité que la Ve République a introduit le scrutin majoritaire à deux tours pour les élections législatives, favorisant la formation de majorités solides et une gouvernance stable.
1: les paramètres des modes de scrutin
But du mode de scrutin et ses objectifs
Un mode de scrutin est un dispositif essentiel dans tout système démocratique : il régit le processus électoral et oriente la manière dont les votes se traduisent en sièges dans une assemblée. Les modes de scrutin poursuivent deux objectifs souvent opposés, mais complémentaires, qui sont la représentation juste et l’efficacité décisionnelle.
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Assurer une représentation équitable : Le scrutin doit permettre une représentation fidèle de chaque groupe politique en fonction du soutien que les électeurs lui ont accordé. Cela signifie que chaque parti devrait obtenir une part de sièges correspondant à sa proportion de voix. Le but est de constituer une assemblée représentative des choix des électeurs, où ceux qui reçoivent davantage de voix disposent d’une proportion de sièges plus importante. Une assemblée représentative est ainsi un miroir de la volonté populaire, reflétant la diversité des opinions exprimées par les citoyens. Pour garantir cette équité, le mode de scrutin doit être conçu de façon à minimiser les distorsions entre les intentions de vote et la répartition des sièges.
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Favoriser l’efficacité gouvernementale : En plus de la représentation, un mode de scrutin doit offrir aux électeurs le pouvoir de former une majorité cohérente, capable de gouverner de manière stable. Cela suppose que les électeurs puissent, par leurs votes, soutenir la formation d’une majorité ou favoriser l’alternance politique si telle est leur volonté. Une assemblée où aucun groupe n’obtient la majorité peut engendrer de l’instabilité ou des blocages décisionnels. Le mode de scrutin doit donc contribuer à l’efficacité de l’assemblée en facilitant l’émergence d’une majorité capable de diriger, tout en laissant place à une opposition constructive.
Cependant, ces deux objectifs sont souvent contradictoires. Un système de scrutin extrêmement juste risque de ne pas produire une majorité claire, rendant difficile la prise de décisions. À l’inverse, un mode de scrutin fortement orienté vers l’efficacité pourrait sous-représenter des opinions minoritaires, sacrifiant l’exactitude de la représentation pour la stabilité de la gouvernance.
Les principaux paramètres des modes de scrutin
Plusieurs paramètres influent sur l’équilibre entre ces deux objectifs. Parmi eux, le nombre de tours est l’un des plus déterminants.
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Un tour versus deux tours : Lors d’un scrutin à un seul tour, les électeurs peuvent être enclins à voter de manière stratégique, souvent pour le candidat ou le parti le plus susceptible de gagner, ce qu’on appelle le « vote utile ». Cela tend à avantager les grands partis, les formations moins populaires étant susceptibles de perdre des voix au profit de candidats mieux placés pour remporter l’élection. Ce type de scrutin favorise souvent l’efficacité en simplifiant le choix et en consolidant les majorités, mais au détriment de la diversité politique représentée.
Dans un système à deux tours, les électeurs ont d’abord la possibilité de soutenir leur candidat préféré lors du premier tour. Si aucun candidat n’atteint la majorité absolue, un second tour est organisé entre les candidats en tête. Au second tour, les électeurs peuvent alors se positionner de façon plus pragmatique, soit pour soutenir un candidat en particulier, soit pour en écarter un autre. Cette dynamique permet de mieux refléter les préférences initiales tout en assurant un choix définitif entre les candidats ayant le plus de soutien.
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Distinction entre scrutins proportionnels et majoritaires : Un autre paramètre majeur est le choix entre scrutin proportionnel et scrutin majoritaire. Dans un scrutin proportionnel, les sièges sont attribués aux partis en fonction du pourcentage de voix qu’ils ont reçu, favorisant une représentation fidèle de la diversité politique. Ce système tend à renforcer la justice électorale, mais peut rendre difficile la formation de majorités stables, nécessitant souvent des coalitions pour gouverner.
En revanche, le scrutin majoritaire attribue la totalité des sièges d’une circonscription au candidat ou à la liste ayant obtenu le plus de voix, ce qui favorise l’émergence de majorités claires. Ce système tend à simplifier la gouvernance en consolidant les grandes formations politiques, mais il risque d’exclure les partis plus petits ou minoritaires de la représentation.
Scrutin proportionnels |
Scrutins majoritaires |
Justes |
Efficaces |
Principe: il se présente aux électeurs des listes de candidats. Et chaque liste obtiendra un pourcentage de sièges correspondant au pourcentage de voies qu’elle a recueillies.
Dans la réalité c’est plus compliqué car il faut diviser le nombre de suffrages exprimés par le nombre de sièges. |
Principe: très simple. Les anglais et les américains les nomment « winner take all »: une circonscription donnée à un ou plusieurs sièges à pourvoir et les candidats qui arrivent en tête prennent tout. Il y a plusieurs variantes. |
Limites: · Nombre de circonscription: tous les électeurs votent les mêmes candidats dans le cadre d’une seule circonscription ou est-ce qu’il y a un découpage du pays? · s’il y en a plusieurs, quelle sera leur taille des circonscriptions? o Plus elles sont petites moins le scrutin est proportionnel Exemple: si on a 500 sièges à élire. On découpe 50 circonscriptions et 10 sièges par circonscription. Toute liste qui n’aura pas 10% n’aura pas d’élu. Si au lieu de 50 on en fait 25, ça veut dire que chacune élira 20 députés. Il faudra avoir 5% pour avoir un député.
Donc le même nombre de voies donnera 25 ou 0 députés d’un parti. C’est donc un élément variant d’une grande importance. Exemple de l’Espagne: la province est une circonscription (= département).
Alors que la loi est la même, en vérité le système est réellement proportionnel quand les circonscriptions sont grandes.
On peut parfois instituer des seuils, c’est-à-dire fixer dans la loi un seuil en dessous duquel on ne participe pas: en Allemagne ce seuil est de 5%. Seules les listes qui ont eu plus de 5% peuvent participer, pour éviter une atomisation excessive. Pour éviter les partis trop nombreux. C’est ce qui s’est passé en Pologne …
Ce seuil produit lui aussi des conséquences capitales. Exemple de la Suède et du Danemark. Ils ont le même mode de scrutin. Sauf qu’il y a un seuil de 7% en Suède. L’existence de cette différence explique que la Suède a toujours eu des gouvernement homogène et le Danemark a toujours eu des gouvernement de coalition. Simple effet du seuil.
Ceci pour dire que lorsqu’on parle du mode de scrutin proportionnel, ce n’est qu’une indication car il y en a beaucoup.
Autres paramètres: le vote préférentiel: on peut modifier l’ordre de la liste. On vote pour la liste X avec 20 noms mais ce seront les 3 premiers élus qui y seront, or on peut choisir de mettre les 3 derniers. Panachage: on se fabrique sa propre liste à partir d’une liste donnée.
Système Australien: proportionnel à effet majoritaire.
Nombre considérable de modes de scrutin. |
Il y a des scrutins uninominaux et plurinominaux. Cependant les plurinominaux ont pratiquement disparu. Le dernier en France a disparu en 83: la liste qui gagnait prenait tout le conseil municipal.
En revanche dans le uninominal il y a le scrutin à tours et le scrutin à
Le scrutin a tours a organisé et fondé la démocratie britannique et inspiré la démocratie américaine. Principe: on vote, celui qui a le plus de voies a les sièges. On découpe des circonscriptions, chacune désignera un élu, et cet élu sera celui qui aura le plus de voies. Peu importe qu’il ait eu 30 ou 60% des voies.
Effets politiques: ce scrutin majoritaire à un tour favorise les grands partis. Les petits et moyens partis n’ont aucune chance d’obtenir des sièges. Ils sont condamnés à disparaitre. Cela favorise l’émergence de deux grands partis parce que le système s’auto-alimente: ils émergent et se maintiennent parce que les électeurs donneront le vote à eux, au lieu de la donner à un parti qui n’a aucune chance d’avoir des voix.
Ça explique que la Grande-Bretagne ait toujours connu le bipartisme. (travaillistes et conservateurs).
Le choix est très restreint, mais il est très efficace: il y a une majorité claire et une opposition claire.
Limites: ça peut être très injuste. L’objectif n’est pas de gagner bien mais de gagner souvent. Quand on gagne un siège peu importe avec combien de voix on l’a gagné. De la même manière, peu importe avec combien on a perdu le siège. Seule la voix qui donne le siège est décisive. L’objectif est d’arriver en tête dans un majorité de circonscriptions. Et l’idéal avec un nombre harmonieux de voix.
Conséquence: il peut se produire que le parti majoritaire en voix se trouve minoritaire en sièges. Si les voix sont mieux réparties il a pu gagné plus de circonscription avec moins de voix.
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Mais est-il véritablement juste? Oui, sauf les modifications comme l’effet de seuil, chaque parti a le nombre de sièges qui correspond à son nombre de voies. Mais est-ce vraiment le cas? L’Israël a la proportion unique. Que se passe-t-il? Deux grands partis. Ils recueillent traditionnellement à eux deux 90 % des voies et le reste se répartit entre des partis religieux. Et aucun des grands partis n’arrivaient à avoir la majorité à lui seul et il avait donc besoin du soutien des petits partis, qui avaient donc un rôle majeur. Ce sont les moins représentatifs et les plus extrémistes des partis qui vont choisir qui va gouverner selon avec qui ils s’allient et qui va cesser de le gouverner s’ils se retirent de l’alliance. => justice discutable. Mails il existe aussi de nombreux pays où le mode de scrutin proportionnel conduit à ne jamais avoir de majorité dans les urnes. Les électeurs ont un grand choix mais une faible influence car ce choix ne se traduit pas dans le mode gouvernemental car ensuite les députés doivent essayer de former une coalition.
Dans certains pays ça marche bien: Danemark, Pays-bas, on prend le temps de choisir les grandes lignes.
En Belgique ça marche beaucoup moins bien: avec des crises ministérielles qui peuvent durer des mois, car on n’arrive pas à former une majorité.
De plus dans les campagnes électorales ils font campagne contre ceux dont on est le plus proche: par exemple les LFI ne craindraient pas trop la concurrence des Républicains mais des communistes, des Verts…de tous ceux avec qui ils peuvent faire des coalitions: ils voudraient convaincre les électeurs de gauche de voter pour eux et ne s’occuperaient pas de la droite et vice versa.
Il n’en demeure pas moins qu’ils sont très répandus et que l’essentiel de l’Europe vote au scrutin proportionnel mais il est des cas (Allemagne) où ils ont des proportionnels mais qu’ils s’accommodent de deux grands partis. |
Scrutin uninominal majoritaire à deux tours : Le scrutin uninominal majoritaire à deux tours (UM2T) est un mode de scrutin utilisé en France pour l’élection des députés, visant à favoriser des majorités stables et à limiter la fragmentation politique. Voici les principales caractéristiques de ce mode de scrutin :
Face aux critiques de sous-représentation de certains courants politiques, l’idée d’introduire une dose de proportionnelle dans les élections législatives refait régulièrement surface, notamment pour améliorer la représentativité et répondre aux exigences de diversité politique. Depuis 2022, ce débat est relancé et soutenu par plusieurs figures politiques, notamment Emmanuel Macron.
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2: les élections des parlementaires sous la Vème république
1. Élection des Sénateurs :
Les sénateurs représentent les collectivités territoriales (régions, départements, communes) et sont élus par un collège électoral spécifique. Ce collège comprend les conseillers départementaux, régionaux, les maires, ainsi que des délégués supplémentaires dans les communes de plus de 9 000 habitants. Ainsi, l’élection sénatoriale est indirecte, reflétant la représentation des territoires.
Le mode de scrutin varie selon le nombre de sénateurs à élire dans chaque département :
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Scrutin majoritaire à deux tours : appliqué dans les départements élisant jusqu’à trois sénateurs.
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Scrutin proportionnel : utilisé dans les départements élisant quatre sénateurs ou plus.
Cette dualité de modes de scrutin au sein du Sénat permet une représentation diversifiée des territoires.
2. Élection des Députés :
Depuis 1958, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours (UM2T). Ce système, instauré sous l’impulsion de Guy Mollet, vise à favoriser la stabilité gouvernementale en permettant l’émergence de majorités claires à l’Assemblée nationale.
Le déroulement est le suivant :
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Premier tour : un candidat est élu s’il obtient la majorité absolue des suffrages exprimés.
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Second tour : en l’absence de majorité absolue au premier tour, les candidats ayant recueilli au moins 12,5 % des électeurs inscrits peuvent se maintenir. Le candidat arrivant en tête au second tour est élu.
Ce mode de scrutin encourage les alliances entre partis politiques, favorisant ainsi la formation de coalitions et la modération des discours pour attirer un électorat plus large.
3. Débats Récents sur le Mode de Scrutin :
Ces dernières années, le débat sur l’introduction d’une dose de proportionnelle aux élections législatives a ressurgi. En mai 2024, le président Emmanuel Macron a proposé d’instaurer « une part de proportionnelle » dans le mode de scrutin législatif, suscitant des discussions au sein de la majorité et de l’opposition Le Monde
Cette proposition vise à mieux refléter la diversité politique du pays et à répondre aux critiques concernant la sous-représentation de certaines formations politiques à l’Assemblée nationale.
En août 2024, face à une situation politique bloquée, le débat sur la proportionnelle a été relancé, certains acteurs politiques estimant que ce changement pourrait apporter une meilleure représentativité et une gouvernance plus stable Le Monde
4. Réformes et Améliorations Proposées :
Plusieurs propositions ont été avancées pour améliorer le système électoral :
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Introduction d’une dose de proportionnelle : afin de mieux représenter la diversité politique et de permettre une représentation plus équitable des partis minoritaires.
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Réduction du nombre de circonscriptions : pour simplifier le découpage électoral et assurer une meilleure cohérence démographique.
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Garantie d’un découpage impartial des circonscriptions : en renforçant le rôle de la commission indépendante chargée de superviser le découpage, afin d’éviter le « gerrymandering » et d’assurer une représentation équitable des électeurs.