L’indifférenciation croissante des recours.
Rapproche de plus en plus étroit entre REP et du plein contentieux il faut bien souligner la diversité du plein contentieux. C’est la raison pour laquelle plus le REP se banalise plus forcément il est susceptible d’être considéré comme une modalité du recours de plein contentieux. On tend à revenir vers un contentieux administratif général. Ce phénomène résulte d’un mouvement de subjectivisation constante des contentieux (A), ce mouvement doit tout d’abord être salué, en revanche, au-delà d’un certain seuil la subjectivisation du contentieux administratif se réalisera néanmoins au détriment de la légalité.
A. La subjectivisation des recours
Elle apparait spectaculaire pour deux raisons complémentaires :
- Droit des contentieux publics
- Le contentieux des droits de l’homme
- Cour de Justice européenne (CJUE) : organisation, compétence
- Le rôle du juge nationale dans le contentieux européen
- L’invocabilité directe du droit européen
- Les caractéristiques du procès constitutionnel
- Le contrôle de constitutionnalité
· Cette subjectivisation rompt avec l’objectivisation de l’excès de pouvoir.
· Ce mouvement de subjectivisation s’étend au plein contentieux lui-même lequel apparait dès lors accentué.
1) L’assimilation progression du REP au plein contentieux
Il se traduit notamment par le renforcement du droit au recours (dimension individuelle). L’idée selon laquelle il convient de garantir aux individus la possibilité que leurs causes soient entendues dans des conditions telles qu’elle est toutes les chances de prospérer. Ce droit au recours possède donc une dimension profondément subjective et éclairante crument l’objectivité du REP. Comme le note Bertrand Seiller l’émergence de ce droit implique que le juge « ne feint plus d’ignorer que le procès fait à l’acte est un litige entre parties ». Le REP ne peut plus se contenter de rétablir la seule légalité objective mais tout en persistante à poursuivre cet objectif il ne doit plus négliger la portée de ses solutions à l’égard des parties.
On peut considérer que la CEDH n’est pas étrangère à ce phénomène de rapprochement entre le REP et recours de plein contentieux. En effet visant à garantir les droits de l’homme, et pouvant être saisi par tout individu elle est porteuse de droit et par extension du nécessaire de subjectivisation du contentieux. C’est ainsi que la CEDH a développé une jurisprudence très explicite en affirmant que « ce droit (le droit de la CEDH) serait illusoire si l’ordre juridique interne d’un Etat contractant permettait qu’une décision judiciaire définitive et obligatoire reste inopérante au détriment d’une partie » avant d’ajouter « quand introduisant un recours en annulation devant la plus haute juridiction administrative de l’Etat celui-ci (le requérant) vise à obtenir non seulement la disparition de l’acte litigieux mais aussi et surtout la levé de ses effets ». ARRET CEDH 19 MARS 1997 HORNSBY CONTRE GRECE.
Cette assimilation se traduit d’une part par la consécration du légalisme permettant d’assurer le REP et d’autre part, par le développement de règle commune à l’ensemble du contentieux administratif.
La première évolution significative du REP est tendant à sa banalisation résulte de la loi du 8 février 1995 octroyant un pouvoir d’injonction au juge administratif. Cette loi est transposée aux articles L911 du CJA, lequel permet au JA saisi de conclusion en ce sens de prescrire par la même décision l’édiction d’une mesure d’exécution par l’administration (article L912-1), par EXEMPLE, après avoir annulé pour excès de pouvoir une sanction contre un agent le JA peut enjoindre à l’administration de le réintégrer. Ou même l’édiction d’une nouvelle décision (article L911-2), EXEMPLE, l’idée que le juge peut enjoindre à l’administration de prendre une sanction moindre, plus adapté à la gravité de la faute. Le tout, potentiellement assorti d’une astreinte (article 911-1).
Cette nouvelle faculté d’enjoindre transforme son office et par extension la finalité. Tandis que le REP était traditionnellement conçut comme ne pouvant « poursuivre qu’un résultat négatif » (Gaston Jèze) alors qu’il était possible pour le cas du RPC de « demander l’exécution d’une prestation positive préalablement constatée et mesurée par le juge » et bien le REP est désormais susceptible de recourir à une telle possibilité. Ce qui est complètement nouveau est que le pouvoir d’injonction permet désormais outre l’annulation de l’acte un comportement de l’administration.
ð L’office du juge de l’excès de pouvoir change.
Dans cette optique le REP est susceptible de changer de finalité la volonté d’établir l’irrégularité de l’acte ne sera plus une fin en soi mais seulement un moyen ou encore un prétexte, pour pouvoir IN FINE imposer à l’administration une action particulière. Autrement dit, pour pouvoir imposer à l’administration le respect ou la reconnaissance d’une situation individuelle.
Si cette démonstration semble évidente dans l’hypothèse d’un REP pour un acte individuel et bien elle vaut tout autant dans certain cas en matière d’acte réglementaire. Hypothèse d’une fédération de militaire avait attaqué pour REP le refus du ministre de la défense de qualifier la guerre du golfe de campagne en temps de guerre parce qu’une telle décision empêchée les anciens combattants de bénéficier de la bonification des pensions prévues dans ce cas. Auparavant l’annulation du refus aurait été purement platonique puisque le ministre n’aurait été en rien contraint de procéder à la réévaluation des pensions. Or avec la loi de 1995 la situation est bien différente la fédération manifestement agit dans le but ultime d’enjoindre au ministre de procéder au ministre de procédé à la réévaluation dans le cadre de son refus initial. ARRET CE 17 MARS 2004 FEDERATION NATIONAL DES ANCIENS DE MISSION EXTERIEUR, avec la reconnaissance de ce pouvoir d’injonction au JA le REP n’est plus totalement hermétique à la dimension subjective. En d’autre terme les parties et leur situation font leur entrée dans le REP. Le JA exerce son pouvoir d’injonction eu égard aux circonstances de droit et de fait existant au jour de sa décision comme en matière de plein contentieux. ARRET CE 4 JUILLET 1997 EPOUX BOUZERAK.
Comme le note Bertrand Seiller « il s’agit donc d’un contentieux de plein juridiction qui se greffe sur le contentieux d’excès de pouvoir ». Il s’agit d’une hybridation entre le REP et le plein contentieux.
Cette assimilation progressive est également due au développement de règle commune à l’ensemble du contentieux administrative. Mais même à l’ensemble des contentieux publics. Une ébauche de droit commun des contentieux publics a ainsi vu le jour sous l’influence de la CEDH et en partie par le juge constitutionnel.
La structuration progressive de l’ordre juridique a permis l’essor du juge constitutionnel et son contrôle. Or, ce développement de la dimension formelle de l’Etat de droit va favoriser par ricochet cette mutation. Puisque, le juge constitutionnel est passé du rôle de simple régulateur des pouvoirs publics à celui de gardien des libertés fondamentales. C’est ainsi, que le conseil constitutionnel va tirer toutes les conséquences juridiques de l’article 16 de la DDHC va constitutionnaliser 3 impératives procéduraux dont certains étaient consacrés par le JA :
· Le droit à un recours effectif, CC DECISION 9 AVRIL 1996 DROIT A UN RECOUR EFFECTIF
· Le respect des droits à la défense, DECISION CC 2006 RESPECT DES DROITS A LA DEFENSE, consacré par le JA depuis l’ARRET TERY 1913.
· Le droit à un procès équitable DECISION 17 JUILLET 2006
Cette consécration constitutionnelle fait échos à la CEDH et à la jurisprudence qui lui est attachée. Intérêt de cette constitutionnalisation puisque cela ne s’applique expressément qu’au matière civil et pénal. La CEDH a développé une interprétation très large et très souple des matières civiles et pénales mais cela ne recouvrait pas le contentieux administratif.
On était rattaché par la CEDH à la matière civile, le contentieux des poursuites disciplinaire, les décisions restreignant le droit de propriété et le contentieux de la fonction publique. Et par l’interprétation large de la matière pénale la CEDH a aussi intégré le contentieux de toutes les sanctions prononcées par l’autorité ou une juridiction administrative. Autrement dit, la multiplication et l’imbrication des contentieux public suscitent l’émergence d’un maillage juridique. Il s’agit donc bien d’une structuration progressive de l’ordre juridique qui participe se faisant à la rationalisation de l’Etat. Mais qui n’en demeure pas moins à préserver les droits subjectifs des justiciables.
Ces règles communes ont permis l’enrichissement du droit au recours tout en submergeant par le caractère global la distinction traditionnelle des contentieux administratif. EXEMPLE, la réforme du nom et du rôle du commissaire du gouvernement en est une illustration. Institution mise en cause par la CEDH, le commissaire du gouvernement avait été perçut par sa présence, son rôle au moment de l’intervention dans l’instance et sa nomination comme entravant le droit à un procès équitable et au principe du contradictoire. La réforme d’où cette institution a fait l’objet permet ainsi un perfectionnement du droit au recours valable pour l’ensemble du contentieux administratif. D’où une confirmation d’une certaine atténuation, cette réforme repose sur la volonté de perfectionner le droit au recours (subjectivisation), de la même manière des deux côtés.
Le mouvement de subjectivisation du contentieux administratif provoque l’émergence d’autre règle commune à l’ensemble du contentieux, le renforcement du droit au recours induit notamment le perfectionnement de l’effectivité du recours. Si le pouvoir d’injonction reconnu au juge de l’excès de pouvoir participe de cette tendance, or le développement des procédures de référé permette de garantir l’effectivité du recours à priori tout en valant à l’égard de l’ensemble du contentieux administratif.
Quand bien même la plus part de ces procédures ont été consacré par la CEDH (voir ARRET HORSBY) en imposant au juge national le droit subjectif des requérants y compris dans le recours en annulation la CEDH pose le problème de la conservation de ces droits. En effet, ce n’est que si ces droits ont été conservé dès l’abord que le recours au juge conserve un intérêt et un enjeu et ce d’autant plus que le système administratif français se distingue du caractère non suspensive du recours juridictionnel.
Tandis diverses procédures dont l’efficacité demeuraient limitées la loi du 30 juin 2000 est venue consacrer un panel de référé, permettant notamment au requérant de préserver par anticipation ses droits subjectifs. La procédure de référé peut être définit en principe comme une procédure parallèle à la procédure au fond comme un jugement prima facie, permettant d’obtenir d’un juge dans un délai très bref une décision provisoire. Les référés apparaissent ainsi comme le corolaire du pouvoir d’injonction reconnu au juge. Car comme l’affirme Bertrand Seiller « en imposant d’emblée un certain comportement à l’administration le juge des référés garantis que la décision ultérieure au juge du fond pourra être convenablement être exécuté ».
Si plusieurs classification des référés est possible il est manifeste qu’hormis les référés s’intégrant dans la procédure au fond (les procédures ou les référés préparent le jugement, référé constat et le référé instruction). L’ensemble des référés a pour finalité la protection par anticipation des droits subjectifs des requérants tel est le cas des procédures d’attente en permettant de cristalliser la situation juridique du requérant en attendant le fond (référé mesure utile et référé suspension, il faut urgence et procédure au fond parallèle), ainsi que l’ensemble des procédure que l’on peut appeler substantiel qui sont-elle susceptible de vider la situation litigieuse elle-même et donc de mettre un terme au litige (référé liberté, référé provision et référé précontractuel et contractuel, sans l’appui principal au fond).
La subjectivation se traduit par un rapprochement du REP au plein contentieux, par la consécration de règles communes qui ont le même but de garantir les droits subjectives des administrés.
2) Accentuation du recours de plein contentieux
La subjectivisation du contentieux administratif apparait comme un mouvement de fond qui se cantonnerait au REP, elle touche également le recours de plein contentieux portant caractérisé dès l’origine par une subjectivité importante mais néanmoins incompressive. Ce mouvement se caractérise notamment par une tendance à la substitution du REP ainsi par le renforcement de la prise en compte de la subjectivité du RPC notamment par le perfectionnement des pouvoirs du juge. La subjectivisation au RPC est la plus éclatante de l’accentuation du RPC et révèle la volonté non pas seulement de nuancer la dimension objective mais c’est surtout pour l’abolir au bénéfice des justiciables. Il s’agit ici donc, d’un véritable renversement des perceptives. Cela se substituant à la défense de la légalité objective comme finalité l’action. Autrement dit, au-delà des aménagements dont il a fait l’objet qui ont permis d’insinuer une dose de subjectivité dans un contexte subjective. Le recours pour excès de pouvoir voit son champ se réduire. C’est ainsi que les sanctions administratives infligées aux administrés est récemment devenu un plein contentieux subjectif alors qu’il été REP ARRET ST ATOM. De même la dimension objective qui demeurait attaché parallèlement au contentieux contractuel dès lors que les requérants étaient des tiers au contrat a été progressivement amoindri et aujourd’hui supprimé.
Mais l’accentuation du RPC se réalise également au moyen d’un développement considérable au plein contentieux, qui se réalise par la mise en mouvement du plein contentieux. Et bien sûr le contentieux contractuel est le meilleur exemple (BEZIER I et BEZIER II).
La première étape de cette évolution provient du droit de l’union européenne considérant que les règles de publicité et de mise en concurrence sont essentielles pour l’établissement d’un marché commun et considérant que les Etats membres ne possédaient pas nécessairement les instruments juridiques permettant d’en assurer le respect l’Union a par une directive du 21 décembre 1989 créée le référé précontractuelle. Introduit par une loi du 4 janvier 1992 en France, était porteuse de deux éléments contrastant avec le contentieux contractuel français et fondé sur une conception subjective des rapports de droit :
· Cette procédure n’était ouverte au seule partie mais également au tiers ayant un intérêt à conclure le contrat et susceptible d’être lésé par le manquement invoqué. (forcément subjectif)
· Le juge disposait d’une large palette de pouvoir, et pouvait suspendre la passation du contrat, supprimer certaines de ces clauses ou encore ordonner à l’administration de se conformer à ces exigences. Interpénétration réciproque entre les contentieux.
Cette première étape ne pouvait que mener à une seconde puisque rien ne pouvait justifier que les tiers évincés bénéficient d’une telle protection avant mais pas après la conclusion du contrat. (Déséquilibre). C’est la raison pour laquelle ARRET ST TROPIC TRAVAUX n’a fait qu’étendre cette solution des juges des référés au juge du contrat. Mais ce faisant en compensation de l’octroi de cette nouvelle voie de droit au profit des tiers intéressés et bien le juge leur a fermé l’accès au juge de l’excès de pouvoir pour les actes détachables. Cette solution était à la manière du référé précontractuel teinté d’une forte subjectivité d’une part « seule les concurrents » évincées sont susceptible d’exercer cette nouvelle voie de droit, c’est-à-dire les personnes directement et personnellement lésées par la conclusion du contrat. Donc bien sur les candidats non retenus dans une procédure de marché public sont les plus visés. Cela signifie que cette solution ne s’étend pas aux tiers éloignés ou ordinaire type les usagers ou contribuable locaux caractéristiques de la conception souple de l’intérêt à agir tant le REP du fait de sa dimension objective. (On consacre une nouvelle voie de droit mais a moindre personne).
D’autre part l’extension des pouvoirs du juge référé précontractuelle au juge du contrat et les critères de mise en œuvre révèle la volonté de vider la situation litigieuse. Tandis que le juge du contrat se bornait jusqu’à lors a prononcer la nullité du contrat ou à confirmer sa validité il est désormais susceptible et invité à moduler sa décision en fonction des irrégularités et des intérêts en cause. C’est ainsi qu’il peut prononcer la résiliation du contrat ou de certaine de ces clauses ou les modifier eu égard à la gravité de l’illégalité (il s’agit donc d’une modulation du respect de la légalité, pas de sanction systématique). Il peut prononcer la poursuite des relations contractuelles assorti le cas échéant de mesure de régulation. Il peut aussi accorder des indemnisations en réparation du préjudice.
Il peut enfin, pour les illégalités les plus graves annuler totalement ou partiellement le contrat d’ailleurs le cas échéant avec l’effet différé. Mais seulement si une telle annulation ne porte pas une atteinte excessive à l’intérêt général mais également aux intérêts des cocontractants.
La troisième étape, rien ne pouvait justifier que certains tiers pouvaient justifier d’une protection alors que les parties elle-même en étaient dépourvues. Le juge étendu ainsi le bénéfice de ce schéma procédural a l’ensemble des parties au contrat et ce pour les deux branches de contentieux contractuelle (BEZIER I et II). Désormais le juge du contrat devenait un véritable juge du plein contentieux dont l’étendue des pouvoirs a pour raison d’être la nécessité de vider la situation litigieuse notamment en considération des droits subjectifs des requérants.
Une dernière étape va se greffer à ce mouvement même si elle semble moins couler de source que les précédentes. En effet si d’un point de vue extérieur il semblait logique d’étendre à tous les tiers. Il a pourtant fait dans l’ARRET TARN ET GARONNE, si jusqu’à lors ce mouvement de subjectivisation du contentieux contractuel semblait hautement légitime et logique puisqu’il permettait de renouer avec la dimension profondément subjectif du contentieux. Cette dernière évolution semble se réaliser au détriment de la légalité objective, en ouvrant le prétoire du juge du contrat aux tiers le JA a définitivement clôturé la jurisprudence MARTIN, mais, cette substitution du RPC au REP implique alors que l’intérêt à agir est désormais conçut de manière plus restrictive, les tiers de l’excès de pouvoir ne sont pas les tiers du plein contentieux. En d’autre terme il conviendra de justifier d’un intérêt personnel et direct, empêchant en principe aux contribuables locaux ou usager d’un SP d’agir.
Plus critiquable encore est le choix du conseil d’Etat d’étendre en la matière la jurisprudence SYNDICAT SINERGON 2008, à l’ensemble du contentieux contractuelle déclenché par les tiers ordinaire. Cette solution qui ne devait initialement prévaloir que pour le référé précontractuelle ce qui était expressément fondé sur l’article L551-1 du CJA. Consiste a limité dans le sillage de l’intérêt à agir les moyens susceptibles d’être invoqué contre le contrat qui outre bien évidemment les moyens d’ordre public sont seulement ceux « en rapport direct avec l’intérêt lésé dont les requérants se prévalent ». Quand on est un tiers ordinaire on a accès au juge du contrat mais on ne dispose pas de la plénitude des moyens, EXEMPLE, les règles de publicité et de mise en concurrence lèses les seuls concurrents évincés et donc ne pourront pas être soulevé par les tiers ordinaires à l’appui de leur demande. En d’autre terme si le droit au recours est incontestablement renforcé par cette jurisprudence il bénéficie a un nombre moins important de personne et semble se réaliser dans une certaines mesures au détriment de la légalité objective. Il s’agit donc cette fois d’une véritable rupture dans le contentieux administratif, en fermant définitivement l’accès au juge de l’excès de pouvoir et en limitant les moyens de l’égalité invocable. Le juge supprime du contentieux contractuel l’idée selon laquelle (Frédéric Rolin) « le recours justifié par un intérêt froissé est une occasion pour contester toutes les irrégularités liées à cette actes ». Le requérant n’en n’est plus en rien l’auxiliaire du contrôle de la légalité, il n’est plus que le gardien de son intérêt propre lequel dès lors qu’il menait le contentieux tempère la nécessité pour l’administration de respecter la légalité objective.
B. La relégation de la légalité
Si la cause de l’indifférenciation croissante entre le REP et le RPC provient notamment d’un profond mouvement de subjectivisation de chacun de ces contentieux l’une de ces conséquences outre une meilleure garantie des droits subjectifs des administrés consiste par ricochet en une certaine modération du contrôle de la légalité objectif. Cette tendance se traduit principalement d’une part par une certaine neutralisation de l’illégalité (1) et d’autre part, par une atténuation de la sanction de l’illégalité (2).
1) La neutralisation de l’illégalité
Ce phénomène qui est dans une certaine mesure assez ancien mais qui s’est considérablement accéléré depuis les années 2000 est le résultat d’une double attitude de la part du juge :
· Consiste en une atténuation a priori des moyens de la légalité invocable à l’encontre des décisions administratives.
· Neutralisation au sens strict de certaine illégalité pourtant constaté
v Première hypothèse :
L’extension de la jurisprudence SMIRGEOMES à l’ensemble des contentieux contractuels par l’ensemble des tiers en est une illustration remarquable. Autrement dit, elle revient donc à limiter le nombre de moyen invocable par le requérant au nom du caractère éminemment subjectif du plein contentieux dans lequel elle s’inscrit désormais. Plus remarquable encore et de constater que cette logique de restriction des moyens invocables existent également dans le cadre du REP. Bien qu’il s’agit ici d’une limitation potentielle de ces moyens invocables. Alors que le REP est un procès fait à un acte dans le but du rétablissement de la légalité objective, le conseil d’Etat a aussi admis avec la JP ARRET CE DANTHONY 2011, que le vice de procédure ne conduirait plus systématiquement à l’annulation de la décision. En énonçant « qu’un vice affectant le déroulement d’une procédure administratif préalable et de la décision entaché d’un vice de procédure substantiel prise s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie qu’au regard des procédure concrète dans le cas d’espèce ».
Or en indiquant ainsi qu’il se refuse à sanctionner une illégalité établie le conseil d’Etat semble assouplir la fonction disciplinaire du REP qui consiste en principe à sanctionner systématiquement chaque irrégularité commise par l‘administration. Il est enfin remarquable qu’hormis l’hypothèse que le vice de procédure brouille le sens de la décision, le caractère substantiel est donc sanctionnable de l’illégalité découle de la prise en considération de la situation individuelle des justiciable.
v Deuxième hypothèse :
On constate le développement d’une tendance pour le juge à accepter de rattraper l’acte destiné à être annulé parce qu’entaché d’une illégalité mais finalement en procédant à sa régularisation. Il existe plusieurs moyens en défense permettant de « sauver » la situation litigieuse pouvant être soulevé par le défendeur mais également par le juge lui-même.
Il existe 3 mécanismes :
Ø La substitution de base légale : c’est l’hypothèse dans laquelle lorsque la décision litigieuse est fondée sur un texte inadéquat mais qui est établit que l’administration aurait pris la même décision en vertu d’un autre texte comme son nom l’indique le juge peut lui substituer le texte adéquat au cours d’instance. Soit de sa propre autorité soit s’il est invoqué par le défendeur. Cette souplesse n’est toutefois permise que si elle ne prive pas le justiciable d’une garantie prévue par le texte initial. EXEMPLE, tel est le cas par exemple d’une reconduite à la frontière d’un étranger fondé sur les dispositions prévoyants cette possibilité en cas d’entrée irrégulière sur le territoire. Mais alors que l’intéressé n’était pas dans cette situation. Le juge peut alors préserver la décision en la fondant sur les dispositions relatives aux étrangers dont le titre de séjour aurait dépassé sa validité. Seulement si cette substitution ne prive pas l’intéressé d’un entretien préalable lui permettant de présenter ses observations. ARRET DE SECTION 3 DECEMBRE 2003 EL BAHI.
Ø La neutralisation des motifs : il s’agit pour le juge saisit d’une décision fondée à la fois sur des motifs légaux et illégaux d’écarter les seconds pour ne laisser que les premières. Il procèdera de la sorte que s’il estime que l’administration a pris cette décision qu’en retenant les motifs légaux ARRET CE ASSEMBLEE DAME PERROT 12 JANVIER 1968.
Ø La substitution de motif, Cette modalité se divise en deux branches :
· Hypothèse où elle intervient dans le cadre d’une compétence liée de l’administration : la décision prise sur un motif illégal et erroné doit en tout état de cause être prise sur un autre motif. Il est loisible au juge de substituer à sa propre autorité ou sur demande de l’administration de procéder à la substitution, hypothèse mal fondée d’un refus de décorer une personne alors qu’elle remplissait toutes les conditions requises pour l’être. ARRET DE PRINCIPE 8 JUIN 1934 AUGIER.
· Ou elle intervient dans le cadre d’une compétence discrétionnaire : le juge a ressèment étendu cette capacité en dehors de compétence liée, ARRET CE SECTION 6 FEVRIER 2004 MADAME HALLAL, il accepte ainsi de substituer un nouveau motif a tout ceux qui étaient initialement invoqués par l’administration et ce même si elle bénéficie d’une marge d’appréciation afin de mettre en œuvre sa compétence si,
o Le nouveau motif repose sur des faits existants à la date de la prise de décision
o Si l’administration aurait pris la même décision
o Seulement si la substitution ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée aux motifs substitués. EXEMPLE, pour le refus initialement illégal de délivrance d’un visa long séjour aux enfants étrangers d’une ressortissante française mais fondé en cours d’instance sur l’établissement du caractère frauduleux des certificats d’état civil fournis par la requérante.
Au-delà du fait que ces mécanismes participent de la même manière que la restriction des moyens de la légalité invocable finalement à l’assouplissement de la fonction disciplinaire du REP et plus généralement d’une certaine relégation de la légalité objective, cela signifie qu’on ne sanctionne plus mécaniquement toute illégalité. Cela révèle en outre une certaine fonction du juge dans l’office de l’excès de pouvoir. En effet, alors que classiquement le juge de l’excès de pouvoir étant garant du seul principe de légalité était dès lors face à une alternative qui peut être résumé ainsi (Léon Aucoc) « l’administrateur est-il resté dans la limite de ses pouvoirs ? » « S’il y resté le juge laisse substituer l’acte s’il en est sorti il l’annule ».
On constate que le développement du pouvoir du juge de l’excès de pouvoir tende à assouplir cette analyse. Comme le note bertrand séyé « ces mécanismes habilitent le juge administratif a corrigé l’acte, il devient l’ultime maillon du processus d’élaboration de l’acte administratif ». ces mécanismes tendent a rapprocher le juge de l’excès de pouvoir a celui du juge de plein contentieux, ils assouplissement le fait que le juge refuse de faire acte d’administrateur. Ces évolutions se font néanmoins au prix d’une certaine atténuation dans la défense de la légalité objective.
2) L’atténuation des conséquences de l’illégalité
Si les mécanismes précédant permettaient au juge a ne pas avoir à sanctionner toute illégalité qu’il constate et bien d’autre tendent à assouplir les modalités de la sanction, ces instruments transcendent d’ailleurs les distinctions. Quand bien même l’administration aurait commis une illégalité mais qui ne serait pas susceptible de rattrapé par le juge. Le juge dispose encore d’une marge d’appréciation s’agissant de la sanction de cette illégalité. EXEMPLE, la finalité du pouvoir de modulation dans le temps des effets des annulations contentieuses qu’il sait lui-même reconnu.
D’une part, le juge peut décider de retarder temporairement l’annulation elle-même, cela signifie qu’elle conserve son caractère rétroactif mais il ne se produit que passer un certain délai laissé à l’administration pour se plié à l’exigence du juge celle-ci n’a rien fait. Et donc ceci est une entorse au respect du principe de la légalité toléré de manière transitoire qui n’a d’autre justification que le respect des droits subjectifs des administrés. En effet, ce maintien temporaire de la décision litigieuse s’explique par la volonté de préserver une situation juridique certes illégale mais dont la remise en cause immédiate entrainerait de grave conséquence sur la situation des requérants. ARRET CE ASSEMBLEE 2001 MONSIEUR TITRAN.
D’autre part, le juge peut désormais moduler les effets temporel de l’annulation, le juge est alors susceptible de supprimer le caractère rétroactif de l’annulation qu’il prononce, ARRET CE ASSEMBLEE 11 MAI 2004 ASSOCIATION AC ! Ainsi les effets passés de la décision illégale sont maintenus et ces disparitions ne sont décidées que pour l’avenir et une disparition qui peut même se produire dans un avenir lointain. Et bien évidemment de telles modulations sont encore une fois justifiées par le fait de préserver les droits des administrés. Rapidement approprié par le juge de plein contentieux dans l’ARRET ST TROPIC TRAVAUX, on étend ARRET ASSOCIATION AC, et ajoute la modulation dans le temps des effets de la jurisprudence.
CONCLUSION : si cette motivation est louable, il n’en demeure pas moins qu’elle participe à un certain bouleversement du REP et du contentieux administratif et plus généralement de la culture juridique française. Il était en effet admis de longue date que le REP péché d’une part, par sa modération et d’autre part par sa brutalité. Assigné à une fonction disciplinaire et une fonction d’épurement de l’ordre juridique, le juge de l’excès de pouvoir ne disposé que de moyens limités et primitifs lui permettant seulement de sanctionner l’administration fautive. Ce caractère primitif impliqué certes une sanction systématique de l’administration mais également l’impossibilité de prendre en considération les conséquences de la décision prise par le juge. S’il convenait de tempérer l’objectif absolue du REP en revanche une subjectivisation trop importante du plein contentieux profitant au droit au recours ne semble pourtant se réaliser qu’au détriment de la légalité objective. Si les intérêts individuels sont mieux garantis qu’auparavant n’est-ce pas dans une certaines mesures au détriment de l’intérêt général ? En effet, il est possible de constater notamment en ce qui concerne la limitation des moyens de l’illégalité, la neutralisation des vices, la modulation dans le temps, que le respect des droits subjectifs des administrés qui sur le fondement de mise en œuvre de ces divers mécanismes peuvent justifier certaines entorses à l’intérêt général qui veut que l’ordonnancement juridique soit apuré. Il s’agit donc d’un changement de paradigme profond reflétant le basculement d’une dimension formelle de l’Etat de droit en faveur d’une dimension substantielle de l’Etat de droit.