Les impositions de toute nature et autres prélèvements

La distinction entre les impositions de toute nature et les autres prélèvements obligatoires

Un prélèvement qui ne peut-être qualifié ni de taxe parafiscale ni de rémunération de service rendu ni de cotisations sociales entre dans la catégorie des impositions de toute nature. C’est une définition négative. Décision n°82 124 L du 23 juin 1982 sur les redevances perçues par les agences de Bassin qui ne pouvaient être considérées ni comme des taxes parafiscales ni comme des rémunérations de service rendu, mais comme des impositions de toute nature.

Distinction entre les impositions de toute nature et les taxes parafiscales

Les taxes parafiscales étaient définies par l’article 4 de l’ordonnance de 1959: prélèvements perçus dans un intérêt économique ou social au profit d’une personne morale de droit public ou privée autre que l’Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs. Ces taxes étaient établies par décret en Conseil d’Etat. Elles sortaient de la compétence législative. Leur reconduction devait quand même faire l’objet d’une autorisation législative.

Critère organique: Ni l’Etat, ni les collectivités locales, ni les EPA Etablissements Publics Administratifs ne pouvaient percevoir de taxes parafiscales. Le Conseil d’Etat avait annulé une taxe parafiscale perçue par un EPA, arrêt d’Assemblée du CE du 20 décembre 1985 Syndicat national des industriels de l’alimentation animal.

Critère matériel: la taxe parafiscale devait être perçue dans un intérêt économique (restructurations industrielles, compensation de certaines nuisances) et social (promotion, culture, formation professionnelle).

Si la taxe parafiscale ne répondait pas à ses critères, le CE prononçait l’annulation du décret pour incompétence de l’autorité réglementaire. Arrêt CE du 26 octobre 1990 Union Fédérale des Consommateurs UFC où le Conseil d’Etat annule un décret qui institue une taxe parafiscale sur les produits pétroliers au motif que cette taxe ne répondait pas aux objectifs sociales et économiques de la taxe parafiscale.

Désormais, depuis la LOLF les taxes parafiscales ont été transformées en imposition de toute nature mais il faut que l’organisme qui bénéficie de cette imposition de toute nature poursuive une mission d’intérêt général.

Distinction entre les impositions de toute nature et les redevances de service rendu.

Ces prélèvements obligatoires sont prévus par l’article 4 de la LOLF. La rémunération de service rendu ne peut-être établie que par décret. La jurisprudence a donné une définition : elles doivent avoir pour objet de couvrir les charges d’un Service Public déterminé ou les frais d’établissements d’exploitation d’entretient d’un ouvrage public. Pour être légales, les rémunérations de service rendu doivent trouver leur contrepartie directe et proportionnelle dans les prestations fournies par le service ou dans l’utilisation de l’ouvrage, CE 21 novembre 1958 Syndicat National des Transporteurs Aériens. Repris dans la décision du 6 octobre 1976. La qualification de service rendu va emporter plusieurs conséquences :

– quand elle concerne l’Etat, elle doit être établie par décret en Conseil d’Etat.

– quand il s’agit de personnes publiques autres que l’Etat. Ex: Université, elle doit-être établie par l’autorité délibérante de ces autres personnes publiques.

-le juge peut rectifier la qualification opérée par les textes réglementaires. Pour qualifier un prélèvement de rémunération ou de redevance de service rendu, le Juge Administratif utilise plusieurs éléments :

* recherche l’existence d’un service rendu, de prestations fournies par le service ou des avantages résultant de l’utilisation de l’ouvrage. Ex: le CE a considéré que les péages d’autoroute constituent des rémunérations de service rendu, CE 14 février 1975 Epoux Merlin. A contrario, l’absence de contrepartie interdit de considérer que l’on est en présence d’une rémunération ou de redevance de service rendu.

*recherche si le produit de la redevance est intégralement affecté aux dépenses du service prestataire. Si par hasard, le produit de la redevance est affecté en tout ou en partie à un service autre que celui qui fournit la prestation, on ne peut être en présence de service rendu.

*Si la rémunération est utilisée exclusivement par le service prestataire, le Juge Administratif recherche si la redevance est la contrepartie exacte et directe du service rendu. C’est le critère de l’équivalence qui crée une corrélation entre le service rendu et la redevance. La redevance ne doit-être due que par les usagers effectifs. On ne peut donc considérer comme une rémunération de service rendu une redevance perçue auprès de certains usagers alors qu’il apparait que d’autres usagers que ceux qui paient la redevance bénéficient également du service. CE 18 janvier 1985 D’Antin de Vaillac. Concerne une redevance perçue auprès des propriétaires des forêts des Landes. En contrepartie de la protection de la forêt par les pompiers. Le juge a considéré que cette rémunération n’est pas une rémunération de service rendu car les autres propriétaires de bois qui n’exploitent pas la forêt vont bénéficier également d’un service de lutte contre l’incendie.

Distinction imposition de toute nature et cotisations sociales.

Les cotisations sociales constituent un prélèvement obligatoire qui n’est assimilable ni à l’impôt ni comme des redevances pour service rendu. Le Conseil d’Etat a défini les cotisations sociales comme des versements de caractère obligatoire qui ouvre droit à des prestations et avantages servis par les divers régimes d’assurance sociale, CE 93 325 DC du 13 août 1993 Maîtrise de l’immigration. L’INSEE définit les cotisations sociales comme « les apports des personnes protégées ou de leurs employeurs à des institutions octroyant des prestations sociales en vue d’acquérir et de maintenir le droit à ses prestations ». Elles se distinguent ainsi des impositions de toute nature car leur versement ouvre droit à une contrepartie.

Le régime juridique des cotisations sociales va être un régime différent de celui des impositions de toute nature. La loi fixe les principes généraux des différents régimes sociaux et le règlement détermine la nature des cotisations, leur assiette, leur taux et leurs modalités de recouvrement.

À la différence des impositions de toute nature, les cotisations sociales ne sont pas approuvées par le Parlement. On assiste depuis ces dernières années à une fiscalisation des finances sociales qui va permettre de compenser la diminution des cotisations sociales liée à une politique de baisse des cotisations, par des impôts notamment par les contributions sociales généralisées qui est affectée à l’assurance maladie. En 1996, elles représentaient 19% des ressources de la sécurité sociale, en 2002 elles ne représentaient plus que 16%. Elles sont jugées trop lourdes parce qu’elles frappent le travail. C’est pourquoi on les transforme en imposition de toute nature. Il y a une critique au regard du droit communautaire, il y a une tension entre le droit européen qui tente à banaliser les cotisations sociales et à faire rentrer dans le droit privé.