DROIT ADMINISTRATIF

   « L’existence même du droit administratif est un miracle » Professeur Weil. Pourquoi est-ce un miracle ? Alors même que le droit administratif est ancré dans la réalité. Le préfet, peut limiter la liberté d’un individu au nom de l’intérêt général. Le droit administratif est présent partout et même dans les plus petites choses.

Le cours de droit administratif est divisé en deux parties:

  • la première partie est étudiée ici. elle correspond au semestre 1 de la l2 de droit
  • la deuxième partie consacrée aux finalités de l’action administrative (service public, police administrative, contrats administratifs…) est étudiée sous ce lien :

            Le droit administratif est quelque chose de très original, mais surtout quelque chose de très précaire. Le droit privé régit les relations entre particuliers, le respect du droit privé est assuré par le contrôle d’un juge, au besoin la force publique interviendra pour faire respecter cette décision du juge judiciaire. Les particuliers sont soumis au droit privé parce qu’ils sont obligés de le respecter, ils y sont forcés par un tiers ; l’Etat au moyen de la force publique. En revanche, le droit administratif régit les relations entre les particuliers et l’administration. Dès lors  l’autorité publique accepte de se soumettre à un droit, qu’elle pourrait ignorer puisqu’en définitif aucune autorité si ce n’est elle-même ne peut la contraindre à respecter le droit administratif. Le miracle de droit administratif c’est donc le respect spontané du droit administratif par l’administration. L’Etat est souverain mais il accepte de limiter sa souveraineté en posant les limites juridiques à son action.

Les particuliers sont soumis au droit privé parce qu’ils sont obligés de le respecter, ils y sont forcés par un tiers ; l’Etat au moyen de la force publique. En revanche, le droit administratif régit les relations entre les particuliers et l’administration. Dès lors  l’autorité publique accepte de se soumettre à un droit, qu’elle pourrait ignorer puisqu’en définitif aucune autorité si ce n’est elle-même ne peut la contraindre à respecter le droit administratif. Le miracle de droit administratif c’est donc le respect spontané du droit administratif par l’administration. L’Etat est souverain mais il accepte de limiter sa souveraineté en posant les limites juridiques à son action.

Processus, historique, progressif et long. C’est ce qui nous permet aujourd’hui de vivre dans un Etat de droit.

Voici le Plan du cours de droit administratif sur www.cours-de-droit.net : :

  • I – Définition du droit administratif
  • II – L’apparition du droit administratif
  • III – Les caractères du droit administratif
  • A) La signification du droit administratif
  • B) Les principes du droit administratif
  • 1)      Le caractère prétorien du droit administratif
  • a)      Un caractère prétorien affirmé
  • b)      La relativité actuelle du caractère prétorien du droit administratif
  • 2)      Le caractère autonome du droit administratif
  • 3)      Les principes directeurs du droit administratif
  • a) L’intérêt général
  • b) Les valeurs du droit administratif
  • IV – Les transformations contemporaines du droit administratif
  • A)     Les causes de la transformation
  • 1)      Les causes internes
  • 2)      Les causes externes
  • B)     Les effets de la transformation
  • 1)      La banalisation du droit administratif
  • 2)      Le maintien de la spécificité du droit administratif
  • V – Le droit administratif en Europe
  • Première PARTiE – LE FONDEMENT DE L’ACTiON ADMiNiSTRATiVE : LE PRiNCiPE DE LEGALiTE
  • Titre Premier –
  • le contenu de la légalité administrative : les sources hiérarchisées du droit administratif.
  • Chapitre 1 – Les transformations contemporaines des sources du droit administratif
  • Section 1. L’élévation des sources du droit administratif
  • I) La source constitutionnelle
  • A)     Le contenu des sources constitutionnelles
  • a)      La variété des règles constitutionnelles
  • 3)      Les caractéristiques des sources constitutionnelles
  • B) Le rang hiérarchique de la Constitution ; la primauté des sources constitutionnelles
  • 1. Une primauté sur la loi contrariée : les limites historiques du respect de la Constitution
  • 2. Une primauté sur la loi confortée
  • a)      L’évolution de la jurisprudence administrative
  • b)      La Question Prioritaire de Constitutionnalité
  • II – Le droit international
  • A) Le contenu des sources internationales
  • 1.      Les traités internationaux
  • a) La régularité de l’introduction des traités en droit français
  • b)      La condition de réciprocité
  • c)      Le caractère des traités internationaux
  • 2.      Le droit international non-écrit
  • B) Le rang du droit international
  • 1.      Le rang des traités internationaux
  • a) Le caractère infra-constitutionnel
  • b)      Le caractère supra-législatif
  • c)      L’articulation des traités entre eux
  • 2.      Les traités de droit international non-écrit
  • Section 2. L’européanisation des sources
  • I – Le contenu des sources communautaires
  • A) La spécificité des sources communautaires
  • B) La variété des sources européennes
  • 1.      Les sources européennes non-écrites
  • 2.      Les principes généraux du droit communautaire
  • II – Le rang hiérarchique du droit  l’Union Européenne
  • Section 3. La fragilisation des sources
  • I – La soft Law
  • II – Les difficultés soulevées par la soft Law
  • CHAPITRE 2 – LES SOURCES TRADITIONNELLES DE LA LEGALITE ADMINISTRATIVE
  • Section 1. Les sources législatives
  • I) La diversité des lois
  • A) Les ordonnances
  • B) Les lois référendaires
  • C) Les mesures de l’article 16
  • II) Le domaine de la loi ordinairee
  • A) Le domaine de l’article 34 de la Constitution
  • B) Le dépassement du domaine
  • III)  L’évolution contemporaine de la source législative
  • A) L’appauvrissement de la source législative
  • 1.      L’inflation législative
  • 2.      La fragilisation des lois
  • B) Les remèdes apportés
  • 1.      Le renforcement de la qualité des lois
  • 2.      La codification
  • Section 2. Les actes administratifs
  • I)    Les titulaires du pouvoir règlementaires
  • A) Les titulaires au niveau national
  • 1.      Les autorités en principe compétentes
  • 2.      Les autorités compétentes par exception
  • B) Au niveau local
  • II)  Les formes du pouvoir règlementaire
  • A) Le pouvoir règlementaire autonome
  • B) Le pouvoir règlementaire d’exécution de la loi
  • C) Les pouvoirs règlementaires spéciaux
  • III – L’encadrement du pouvoir règlementaireIV – Le rang des sources règlementairesV – Les principes généraux du droit
  • Titre II – Le contrôle de la légalité administrative
  • Chapitre 1er – La nature duale du contrôle de la légalité administrative
  • Section 1. Le contrôle non-juridictionnel
  • I)   L’importance relative des contrôles non juridictionnels
  • II)     La variété des contrôles non juridictionnels
  • A) Les recours administratifs
  • 1.      La variété des recours administratifs
  • 2.      Le régime juridique de ces recours
  • B) Le recours devant les autorités indépendantes
  • Section 2. Le contrôle juridictionnel
  • I)   L’histoire de la juridiction administrative
  • II)  L’organisation de la juridiction administrative
  • A)     Le conseil d’Etat
  • a) L’organisation du conseil d’Etat
  • b)      La composition du conseil d’Etat
  • B)     Les TA et CAA
  • 1.      L’organisation des tribunaux et des cours
  • 2.      La composition
  • C)     Les juridictions administratives spécialisées
  • III)   La compétence de la juridiction administrative
  • A)     La répartition des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires
  • 1.      La détermination du champ de compétence du juge administratif
  • a) La répartition des compétences prévue par la loi
  • b) La répartition des compétences fixées par la jurisprudence
  • c) Le problème des questions accessoires au litige principal2) Le règlement des conflits de compétence : le rôle du tribunal des conflits
  • a) L’organisation du tribunal des conflits
  • b) L’intervention du tribunal des conflits
  • B) La répartition des compétences au sein de la juridiction administrative
  • IV) Les principes généraux de la juridiction administrative
  • A) L’unité de la juridiction administrative
  • B) L’indépendance et l’impartialité
  • C) Le délai raisonnable de jugement
  • Chapitre 2 – La mise en œuvre du contrôle juridictionnel
  • Section 1. La typologie des recours juridictionnels devant le juge administratif
  • Section 2 – Le recours pour excès de pouvoirs
  • I)                    La saisine du juge administratif
  • A)     Les conditions tenant à l’acte attaqué
  • 1) Les caractères de l’acte attaqué
  • 2) Les actes incontrôlables
  • a) Les actes de gouvernement
  • b) Les mesures d’ordre intérieur
  • B) Les conditions tenant des représentants
  • 1. La capacité pour agir
  • 2. L’intérêt pour agir
  • C) Les conditions tenant au recours
  • 1. La forme du recours
  • 2. Les délais du recours
  • II)                  Le contrôle du juge administratif
  • A) Le champ du contrôle
  • B)      Pouvoirs d’instruction et de contrôle du juge
  • 1.      Les pouvoirs d’instruction du juge
  • 2.      L’intensité du contrôle du juge
  • C)     Les limites du contrôle ; la théorie des circonstances exceptionnelles
  • III)                La décision du juge administratif
  • A) La prérogative fondamentale : l’annulation de la décision
  • B) La diversification des prérogatives du juge de l’excès de pouvoir
  • C) L’efficacité de la décision du juge
  • Deuxième partie : Les finalités de l’action administrative / étudié sous ce lien :     

 

I – Définition du droit administratif

Il n’y a pas de définition arrêtée du droit administratif. La question de la définition du droit administratif intéresse les professeurs de droit public depuis de très longues années. Jean Ribeiro écrivait en 1953 qu’après « presque un siècle d’efforts et malgré les travaux des meilleurs esprits, aucune solution au problème de la définition du droit administratif et aucun critère d’identification n’avaient pu être trouvés. » Le juge administratif n’a jamais cherché à définir le droit administratif, contrairement au professeur qui lui cherche à le définir.

 

On pourrait tenter de le définir comme l’ensemble des règles régissant l’action de l’administration, cette définition très large pose deux problèmes :

  • C’est une définition trop large, d’une part l’administration est parfois soumise à l’application du droit privé. Par exemple ; l’administration peut passer des contrats de droit privé ordinaires. Elle peut ainsi agir comme une personne privée ordinaire. Ce sera le cas lorsqu’elle ne remplit pas une mission administrative d’intérêt général. C’est une définition trop extensive, elle dilue la spécificité du droit administratif et empêche la cohérence de la matière.

Il ne faut pas aussi oublier que l’administration est aussi soumise au droit constitutionnel. Par exemple, la question des relations entre le gouvernement et le parlement ne relève pas du droit administratif mais du droit constitutionnel. De même les relations extérieures menées par le gouvernement ne relèvent pas du droit administratif

  • C’est une définition trop resserrée, en principe le droit administratif s’applique à l’administration. L’administration ce serait l’ensemble des organes assurant une fonction exécutive et administrative au sein des personnes publiques. Mais, parfois, par exception, des personnes privées peuvent être soumises au droit administratif. Par exemple quand une personne privée gère sous le contrôle de l’administration une activité d’intérêt général.

 

Le droit administratif serait l’ensemble des règles particulières régissant l’activité administrative. Il y aurait deux types de règles.

–  Les règles institutionnelles ; ce sont les règles qui régissent l’organisation de l’administration, c’est-à-dire l’Etat, les collectivités territoriales, etc.

–  Les règles matérielles ; ce sont les règles qui régissent l’activité administrative exercée par l’administration ou exercée par des personnes privées sous le contrôle de l’administration.

Ces règles matérielles sont de deux sortes :

 

—  Ce sont les règles qui donnent des pouvoirs supplémentaires aux personnes exerçant des activités administratives. Par exemple ; l’administration peut exproprier. Une personne qui exerce une activité administrative, peut adopter des actes administratifs. Ces derniers ont une particularité ils s’imposent à “vous” directement, on doit les respecter spontanément.

—  Ce sont les règles particulières qui imposent, à la personne exerçant les activités administratives, des obligations particulières. L’administration ne peut agir que dans la poursuite de l’intérêt général. Dans le cas inverse, elle commet une illégalité. Lorsque l’administration adopte une décision elle va devoir respecter certaines formalités. Avant d’adopter son acte elle doit entendre le destinataire de l’acte, ou encore elle doit motiver sa décision. C’est-à-dire indiquer les raisons précises pour lesquelles elle a pris sa décision.

 

Les règles particulières c’est le droit administratif, par opposition aux règles de droit commun qui forment le droit privé. Le droit administratif est le droit commun de l’action administrative. Ce sont les règles qui sont appliquées en principe à l’activité administrative. Le droit administratif apparait comme cohérent et autonome. Le droit administratif n’est pas une juxtaposition de règles particulières.

 

Quel est le critère d’identification du droit administratif ?

 

Deux conceptions s’opposent historiquement :

  • Certains disent que le critère d’identification du droit administratif c’est le service public. L’école du service public dont la figure principale est Léon Duguit. Pour ces gens-là il y a droit administratif quand il y a activité du service public.
  • L’autre école, est l’école de la puissance publique. Pour d’autres auteurs, c’est le critère de la puissance publique. Le leader de ce courant de pensée c’est Maurice Hauriou. Le droit administratif s’applique quand est mis en œuvre un pouvoir de commandement. C’est donc quand il y a utilisation de techniques juridiques contraignantes face aux particuliers.

 

Pour la première école, l’unité et la cohérence du droit administratif se trouvent dans la finalité de l’activité administrative ; dans l’école de la puissance publique l’unité et la cohérence du droit administratif se trouvent dans les moyens de l’activité administrative.

 

Aucune de ces deux conceptions n’est pleinement valable. Aujourd’hui on a renoncé à trouver un critère unique d’explication du droit administratif. On combine les deux éléments, puissance publique et service public. Le droit administratif est trop complexe pour être réduit à un critère d’explication unique.

Le droit administratif serait donc l’ensemble des règles institutionnelles régissant l’organisation administrative et des règles matérielles c’est-à-dire l’ensemble des prérogatives et suggestions particulières propres à l’activité administrative. Le droit administratif est une composante du droit public. Le droit public est l’ensemble des règles régissant l’existence l’organisation et le fonctionnement de l’administration.

 

II – L’apparition du droit administratif

On peut voir en l’arrêt Blanco la date de naissance du droit administratif par le tribunal des conflits le 8 février 1873. Toutefois c’est excessif de dire que c’est la date de naissance. Néanmoins, l’arrêt est fondamental car il consacre l’inapplication des principes des règles de droit privé à l’administration. En ce sens, cet arrêt consacre l’autonomie du droit administratif.

 

Les racines du droit administratif sont même antérieures à la révolution Française. Le droit administratif trouve ses origines dans les règles administratives développées sous l’Ancien Régime. S’il n’existe pas alors d’administration au sens contemporain du terme, il y a quand même des règles spécifiques pour la prise en charge des besoins collectifs. Par exemple ; l’édit de Moulin de 1566, le Roi ne peut pas disposer librement des biens de la couronne. Ces règles anciennes, on peut les retrouver ponctuellement dans des arrêts.

 

Le droit administratif moderne va naître avec la Révolution Française. C’est sous la Révolution que va être posé un principe fondamental du droit administratif. Ce principe fondamental qu’il faut absolument connaître, c’est le principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires. Ce principe est posé par la loi du 16-24 aout 1790. Cette loi interdit à un juge de faire œuvre d’administrateur en jugeant les actes de l’administration. Le décret du 16 fructidor an III consacre ce principe. De façon très générale la Révolution française va entrainer une profonde réorganisation de l’administration. Cette réorganisation va permettre la naissance d’une organisation cohérente sur l’ensemble du territoire. Il y aura une organisation puissante et centralisée qui assurera la coordination de l’administration. Ce mouvement est continué par Napoléon. Notamment va être créé par la Constitution de l’an VIII le Conseil d’Etat, qui va être le juge de l’administration. Ce qui est frappant, c’est la méfiance envers les tribunaux judiciaires, cette méfiance découle du souvenir des parlements d’Ancien Régime, qui troublaient et paralysaient l’action administrative à la fin de l’Ancien Régime.

 

«  Rendre la justice en matière administrative c’est encore administrer » adage. C’est pourquoi il ne faut pas qu’un juge puisse le faire, on va considérer que la juridiction administrative ne doit pas être séparée de l’administration elle-même. C’est la théorie de la justice retenue. Celui qui rend la justice en matière administrative est le ministre jusqu’au XIXe.

 

On constate que le droit administratif va se développer et se perfectionner tout au long du XIXe siècle, mais c’est surtout pendant la seconde moitié du XIXe siècle. Ce développement doit beaucoup au Conseil d’Etat, il assiste le chef d’Etat ou le 1er ministre lorsqu’ils rendant la justice administrative. Mais en pratique c’est lui qui rend les décisions. Le tournant décisif va être la loi du 24 mai 1872. Cette loi fait du conseil d’Etat une juridiction  à part entière. Par l’arrêt Cadot du 13 décembre 1889 le conseil d‘Etat deviendra juge administratif du droit commun. La jurisprudence du conseil d‘Etat va jouer un rôle essentiel dans la création du droit administratif. C’est le juge  qui va donner sa cohérence au droit administratif. Le droit administratif est d’abord constitué de textes et la jurisprudence du Conseil d’Etat va lui donner toute sa cohérence en dégageant des principes généraux. L’âge d’or du droit administratif c’est entre la fin du XIXe et le début du XXe. En l’espace d’une quarantaine d’années le conseil d’Etat va rendre un grand nombre de grandes décisions qui vont faire jurisprudence et s’appliquer de manière générale. Le conseil d’Etat va ainsi dessiner les contours des grandes notions du droit administratif. Par exemple, la théorie de l’acte administratif, du contrat administratif, du service public, de la police. C’est au même moment que le droit administratif devient une matière universitaire, ce qui le consolide. A la fin du XIXe de grands auteurs vont apparaitre essayant de clarifier le droit administratif, tels qu’Edouard Laferrière qui écrit un Traité de la juridiction administrative en 1887. Qui est une somme considérable pour la compréhension du droit administratif et du juge administratif.

Le droit administratif s’appuie sur un couple indissociable, un droit propre à l’activité administrative, appliqué par un juge spécifique, le juge administratif. 

Le juge administratif est parfois perçu comme un juge de privilège, c’est-à-dire un juge qui va dans le sens de l’administration. Cette vision-là du juge rejaillit sur le droit administratif.

 

III – Les caractères du droit administratif

  1. A)La signification du droit administratif

Le droit administratif repose  sur une idée fondamentale simpliste, c’est l’idée d’une hiérarchisation des intérêts. L’activité administrative se distingue de l’activité d’une personne privée parce qu’elle obéit à une finalité supérieure qui est l‘intérêt général. Cet intérêt général n’est pas la simple addition des intérêts particuliers, il les transcende pour être déterminé de façon autonome et pour s’imposer à eux. L’administration peut prétendre agir dans l’intérêt général parce qu’elle est légitime, elle relève du pouvoir exécutif. Pouvoir exécutif qui est aux mains du gouvernement. Ce gouvernement est responsable devant le Parlement, ce dernier élu au suffrage universel. Cette primauté de l’intérêt général qui explique les pouvoirs supplémentaires de l’administration. Il y a par exemple, les pouvoirs qu’a l’administration en matière contractuelle, l’administration peut modifier, ou résilier un contrat de manière unilatérale. Les personnes publiques qui composent l’administration ne  peuvent pas faire faillite.

Il faut concilier l’intérêt général avec les intérêts privés. Intrinsèquement le droit administratif est un droit de compromis. L’idée c’est d’arriver à satisfaire l’intérêt général sans sacrifier les intérêts particuliers. Certes le droit privé est aussi un droit de conciliation et de compromis, il est plus simple d’arriver à ce compromis puisqu’on est en présence de personnes juridiquement égales. L’équation du droit administratif est plus complexe, plus subtil. Il faut assurer conciliation entre des personnes structurellement inégales. Le droit administratif recherche un équilibre permanent cet équilibre présente deux caractéristiques :

  • Il est subtil, donner trop de pouvoirs à l’administration peut avoir un effet liberticide. Mais si l’on privilégie les intérêts privés il y a un risque d’inefficacité de l’action publique.
  • Il est évolutif, la conciliation entre l’intérêt général et les intérêts privés s’opère différemment selon les époques. L’équilibre dépend des évolutions sociales, politiques, de la France. Fondamentalement l’évolution historique du droit administratif a été de conférer de plus en plus de droits aux intérêts privés. C’est l’évolution générale. Cela n’empêche que ponctuellement, des évolutions peuvent aller en sens inverse en donnant plus de prérogatives à l’administration. Par exemple ; la responsabilité médicale, en 1959 le Conseil d’Etat considère que pour engager la responsabilité de l’Etat en cas de faute médicale il faut une faute lourde commise par le médecin. C’est l’arrêt Rouzet. On privilégie le service public médical au patient. Désormais l’hôpital et le médecin prennent davantage en compte le patient. Aujourd’hui les patients considèrent que la médecine doit être une science exacte. Arrêt du Conseil d’Etat du 10 avril 1992, une faute simple (et non plus grave) suffit à engager la responsabilité de l’hôpital. Il y a donc un nouveau compromis entre l’intérêt des patients et l’intérêt de l’hôpital. Comme tout compromis, il ne satisfait jamais les parties en présence.

 

  1. B)Les principes du droit administratif

 

1)  Le caractère prétorien du droit administratif

  1. a)Un caractère prétorien affirmé

La jurisprudence a longtemps joué un rôle central dans la détermination des règles du droit administratif. Il faut se reporter à l’arrêt Blanco, le tribunal des conflits a créé un vide, puisque le droit privé est inapplicable, il va falloir créer un régime administratif de la responsabilité. Dans l’arrêt Blanco, le tribunal des conflits le fait, partiellement, mais il le fait. Car il dit quelles sont les grandes lignes de la responsabilité administrative. Il dit que la responsabilité de l’Etat ne doit pas être générale et absolue, il dit que les règles relatives à la responsabilité de l’Etat doivent varier selon les besoins du service public. Le tribunal des conflits désigne un cadre juridique très large de la responsabilité administrative, cadre juridique qui sera ensuite complété par le juge administratif grâce à sa jurisprudence. L’importance de l’écrit est beaucoup plus forte historiquement qu’en droit administratif. Cette jurisprudence administrative va s’inspirer des textes de loi, la jurisprudence va compléter le droit écrit. On peut par exemple citer ; le droit d’expropriation. Mais parfois, le juge administratif crée des règles à partir de rien. Il fait œuvre de création de droit. C’est le cas par exemple en matière de police administrative ou de responsabilité. Le conseil d’Etat a dégagé des principes généraux.

 

  1. b)La relativité actuelle du caractère prétorien du droit administratif

Aujourd’hui on doit nuancer le caractère jurisprudentiel du droit administratif, au cours des dernières années on assiste à une formalisation du droit administratif. C’est-à-dire que les règles sont reprises par des textes écrits. C’est des lois ou des règlements. Le droit administratif tend désormais à devenir ou redevenir un droit de plus en plus écrit. On a un mouvement de codification en droit administratif, on peut citer le Code de la propriété des personnes publiques. Adopté le 21 avril 2006, ce code régit les règles du droit administratif des biens, c’est-à-dire les règles relatives à l’acquisition, à l’utilisation et à la vente des biens de l’administration. Mais ce n’est pas le seul code.

Cette évolution vers un droit davantage écrit appelle deux remarques :

  • Ce n’est pas parce qu’il y a plus de droit écrit que le rôle du juge administratif est amoindri. D’une part parce qu’il s’agit de codes sectoriels, il n’y a rien d’équivalent au Code civil, il reste donc de la place pour le juge administratif. Il peut encore aujourd’hui consacrer des règles nouvelles de manière souveraine. Arrêt d’Assemblée du 24 mars 2006 société KPMG ; Le conseil d ‘Etat consacre un nouveau principe de sécurité juridique. Il a fait œuvre de création de droit.

Le rôle du conseil d’Etat reste essentiel, il prend simplement une forme nouvelle. Car le conseil d’Etat va intervenir en conseillant le gouvernement. Le conseil d’Etat a deux fonctions, juge et conseil au gouvernement par des personnes différentes. Il donne un avis au gouvernement sur les textes que ce dernier projette. Avec le droit écrit le conseil d’Etat va jouer un rôle plus important au moment de conseiller le gouvernement. Il va pouvoir l’influencer. Le conseil d’Etat contribuera indirectement à créer du droit administratif.

  • On peut se demander si cette formalisation du droit administratif est bénéfique, à priori c’est un progrès. Mais on peut se demander si le fait que le droit administratif de plus en plus écrit n’entraine pas un risque de fragmentation du droit administratif. Le caractère jurisprudentiel était un gage de souplesse du droit administratif. Il pouvait s’adapter aux évolutions sociales à travers de évolutions assez souples de sa jurisprudence.

 

2) Le caractère autonome du droit administratif

Le droit administratif est un droit autonome, donc les règles de droit privé lui sont étrangères. On peut dire qu’il est autonome aussi parce qu’il est appliqué par un juge qui lui est propre. L’ordre judiciaire avec la Cour de cassation au sommet qui applique le droit privé, et il y a l’ordre juridictionnel administratif avec à son sommet le Conseil d’Etat. Chacune de ces deux juridictions suprêmes est totalement souveraine par rapport à l’autre. Le droit privé est tout de même parfois appliqué par le juge administratif, mais cette importation du droit privé est volontaire, le juge administratif n’est pas contraint de le faire. Il applique le principe qui fonde le Code civil. C’est une manière de marquer son autonomie à l’égard du droit privé.

 

3) Les principes directeurs du droit administratif

Ce ne sont pas des sources du droit, ces « principes directeurs » est une expression qui sert à désigner ce que sont les grandes caractéristiques du droit administratif.  Ils expriment les valeurs sur lesquelles repose le droit administratif. Ce sont ces valeurs qui le distinguent du droit privé. Ces lignes directrices sont aussi des principes généraux du droit, qui sont des sources du droit.

 

  1. a)L’intérêt général

Ce principe est à la fois très simple et très compliquée. Siple parce que c’est une notion assez évidente de sens, mais complexe parce que c’est une notion floue qui n’a pas de sens précis. Il faut donc présumer que cet intérêt général existe. C’est quelque chose qui est très subjectif, très relatif, c’est-à-dire très variable. Il peut varier selon les époques, les évolutions politiques ou sociales. Cet intérêt général est une notion fondamentale du droit administratif. Mais une notion ambivalente car d’un côté l’intérêt général est le fondement des pouvoirs de l’administration. Il peut donc justifier un pouvoir des personnes publiques. Par exemple ; en principe une personne publique ne peut pas gérer une activité économique à moins que la loi l’y autorise, une personne publique ne doit pas concurrencer une personne privée. Conformément à la jurisprudence du 31 mai 2006, ordre des avocats à la Mairie de Paris, arrêt d’assemblée, par exception au principe l’administration peut prendre en charge une activité économique s’il en va du bien-être de l’intérêt général. Conseil d’Etat,  2 mai 1958 Distillerie de Magnac-Laval, en vertu de cette jurisprudence, l’administration dispose d’un pouvoir de résiliation unilatéral du contrat si un intérêt général le justifie. En principe en droit privé, l’une des parties ne peut pas résilier unilatéralement un contrat, mais là l’administration peut le faire en vertu de l’intérêt général.

 

L’intérêt général n’est invoqué que quand la loi ou la jurisprudence le prévoit. Il y a un risque c’est que l’intérêt général soit un simple alibi derrière lequel se retranche l’administration. Il ne faut pas que cet intérêt général soit arbitrairement fixé, il ne faut pas que le flou de la notion permette aux personnes publiques de faire n’importe quoi. C’est pour cela que le juge contrôlera l’intérêt général dont se prévaut l’administration. L’intérêt général est aussi une limite à l’action des personnes publiques, et à l’action de l’administration. Un acte administratif, ne peut être pris que dans un but d’intérêt général. C’est-à-dire que si une autorité administrative prend une décision à des fins d’intérêt privé alors elle commet un détournement de pouvoir donc une illégalité. Arrêt du 16 novembre 1900, Maugras, un maire ne pourra pas révoquer un agent de police au motif qu’il a verbalisé une de ses parentes. Il commet un détournement de pouvoir.

 

  1. b)Les valeurs du droit administratif

On peut se reporter à la devise de la République : « liberté, égalité, fraternité ». Le droit administratif est un compromis entre ces valeurs puisqu’elles peuvent être contradictoires.

  • La liberté ; au cœur du droit administratif. Elle est déclinée en de multiples libertés spécifiques. Toutes ces libertés, sont des libertés publiques qui ont une valeur normative et sont opposables à l’administration. Au regard du droit administratif, la liberté est le principe et la limitation de la liberté est l’exception. Le juge administratif vérifie que les limites apportées aux libertés par une personne publique sont à la fois proportionnées et justifiées. Justifiées c’est qu’il faut un motif d’intérêt général pour limiter la liberté. Proportionnées c’est que la restriction à la liberté ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger l’intérêt général.
  • L’égalité ; l’arrêt de principe, qui fait du principe d’égalité un principe général du droit administratif, c’est l’arrêt Section 9 mars 1951 société des concerts du conservatoire. L’égalité s’impose à l’administration, elle doit traiter l’ensemble des citoyens de la même façon, elle ne doit pas les discriminer. L’administration ne peut déroger au principe d’égalité  que si l’intérêt général le justifie. Cette égalité évolue sous l’influence du droit européen. En droit administratif français, l’administration peut traiter différemment des personnes dans des situations différentes, l’Etat doit traiter différemment des personnes placées dans des situations différentes pour l’UE.
  • La fraternité ; c’est l’idée de solidarité qui est au cœur du droit administratif. Toutefois, ce n’est pas un principe juridique. Mais cette idée de solidarité est présente en droit administratif. Notamment lorsque l’Etat instaure des tarifs spéciaux pour les personnes en difficulté économique. Ou bien, le droit au logement. On a également un développement de la responsabilité sans faute des personnes publiques, en principe une personne publique est responsable envers quelqu’un lorsqu’elle commet une faute par rapport à lui. Elle indemnise la personne en raison de la faute qu’elle a commise. Aujourd’hui se développe la responsabilité sans faute de l’administration, elle n’a rien fait, mais au nom de la solidarité elle va quand même indemniser le préjudice subi par un citoyen.

 

IV – Les transformations contemporaines du droit administratif

 

  1. A)Les causes de la transformation

1)      Les causes internes 

On pourrait dire que le droit administratif se transforme en raison de la « crise de l’Etat ». Cette crise de l’Etat, on peut y voir deux formes :

  • Une crise politique ; le droit administratif c’est le droit de l’Etat en action, ce sont des règles spécifiques justifiées et légitimées par la croyance que les personnes publiques, au premier rang desquelles l’Etat, doit faire le bien commun. Il y a une méfiance envers l’action publique, ce qui rejaillit sur le droit administratif, en ce sens que les gens acceptent de moins en moins les prérogatives supérieures dont dispose les personnes publiques.
  • Une crise économique ; aujourd’hui il y a des contraintes financières très fortes sur l’Etat et les personnes publiques. Aujourd’hui le droit administratif se doit d’être plus efficace et plus rentable. Il se doit de développer des règles plus efficaces sur le plan économique. L’action publique se doit aujourd’hui d’être davantage rentable. Ce qui oblige le droit administratif à se transformer, et ça le met en cause. Le droit privé apparait mieux armé que le droit administratif pour répondre à ces nécessités de rentabilités.

Aujourd’hui se développe une vision libérale des rapports sociaux et des rapports économiques, et dans cette vision libérale, l’action publique est suspecte. Suspecte d’être intéressée, et pour répondre à cette contestation le droit administratif va devoir évoluer.

 

2)      Les causes externes

Le droit administratif se transforme aussi en raison de la pression des sources du droit international et plus précisément des sources européennes. Ces sources européennes c’est d’abord le droit de la convention européenne des droits de l’homme, le droit européen c’est surtout le droit de l’Union européenne. Le droit de l’UE n’est pas si étranger au droit français. C’est un droit fondé sur des valeurs fondamentales que sont les droits de l’Homme, l’UE connait aussi la notion de service public. Il y a tout de même une différence, qui est sans doute que le droit européen est une inspiration plus libérale. Dans le cadre de l’équilibre entre l’intérêt collectif et les intérêts particuliers. Le droit européen fait prévaloir les libertés sur l’interventionnisme public. A partir années 80, le droit de l’UE a entrainé une ouverture à la concurrence de secteurs économiques autrefois gérés par l’Etat selon des méthodes de droit administratif. Cette ouverture à la concurrence a fait des règles de droit privé les règles principales de ces secteurs économiques. Ex : la poste, il y a 25-30 ans, c’était une administration de l’Etat qui dépendait du ministère des postes et télécommunications, c’était une activité administrative gérée par une administration de l’Etat. Aujourd’hui la poste est devenue une société anonyme de droit privé qui ne fonctionne plus selon les règles du droit administratif. Le juge contrôle le respect du droit de l’UE.

 

  1. B)Les effets de la transformation

1)      La banalisation du droit administratif

Ces trente dernières années, le constat général c’est celui d’une relative banalisation. Par ce terme, c’est une normalisation, un rapprochement avec le droit privé ordinaire. Ce rapprochement avec le droit privé, touche à la fois les règles de fonctionnement de l’administration et ses règles d’organisation. On peut citer la loi du 12 mars 2012, relative aux agents publics, cette loi a pour effet de développer et de banaliser le recours aux CDI dans l’administration. Donc ça contribue à développer un régime dual au sein de l’administration. D’un côté les fonctionnaires soumis à un régime de droit administratif, un statut de la fonction publique, et de l’autre les salariés employés au moyen de cdi de droit commun. Finalement tout ça conduit à rapprocher l’agent public du salarié de droit commun.  Ensuite concernant les règles de fonctionnement, on peut constater la montée en puissance de règles d’inspiration privatiste c’est-à-dire des règles de droit privé. D’abord ce sont les règles de concurrence, arrêt de section du 3 novembre 1997 société Million et Marais en vertu duquel les règles de concurrence telles qu’elles sont prévues par le Code de commerce sont applicables à l’administration. Arrêt de section du 11 juillet 2001 société des eaux du Nord, en vertu de cet arrêt sont désormais applicable aux personnes publiques les règles du droit de la consommation

Le droit administratif est né de la rencontre d’un droit spécifique et d’un juge spécifique. Un juge administratif c’est la garantie de l’autonomie du droit administratif. Si les règles qui composent le droit administratif se rapprochent du droit commun alors à quoi bon un juge spécifique pour les appliquer ?

 

2)      Le maintien de la spécificité du droit administratif

Le droit administratif conserve son originalité, malgré les transformations. Le droit de la concurrence avec l’arrêt Million et Marais par exemple, ce droit de la concurrence s’applique aux personnes publiques de façon originale. Le droit de la concurrence ne s’applique pas de la même façon aux personnes publiques et aux personnes privées. Les exigences de concurrence telles qu’elles découlent du code de commerce sont conciliées avec des impératifs spécifiques à l’action administrative. Les autorités administratives pourront déroger aux règles de concurrence pour des raisons d’intérêt général, comme la protection du service publique ou l’assurance de l’ordre public.

Plutôt que d’avoir un seul droit de la concurrence applicable de manière uniforme dans l’ensemble du droit français, on a une coexistence de deux droits de la concurrence.

Pour conclure sur cette évolution relative, Boulouis ; « Le droit administratif est l’ombre de l’Etat éclairé par la lumière du siècle. L’ombre varie avec le siècle et ses lumières, mais vouloir s’en défaire relève moins du libéralisme que de l’Utopie. »

 

V – Le droit administratif en Europe

Le choix français d’avoir un droit administratif appliqué par un juge administratif, n’est pas universel. Ainsi en Europe on constate une grande diversité dans la détermination et dans la sanction des règles applicables à l’administration. De façon schématique, il y a deux situations envisageables.

  • Le modèle français ; l’administration est soumise à un droit spécifique appliqué par un juge spécifique, c’est à peu près une moitié des Etats de l’UE. Par ex ; l’Allemagne, le Portugal, la Finlande, la Pologne.
  • Le modèle anglo-saxon ; l’administration est soumise au droit commun appliqué par le juge ordinaire, on le retrouve par ex ; au Royaume-Uni, au Danemark, et à Malte, c’est un modèle d’inspiration libérale. L’Etat ne peut prétendre incarner quelque chose de supérieur aux individus.

En réalité ces deux modèles ne sont pas si opposés que ça, aujourd’hui ils convergent. Sans se confondre, ces deux modèles ont des points communs. Par exemple, au Royaume-Uni, même si en principe le droit commun est applicable, on constate une multiplication des règles spécifiques  à l’administration. Le principe est relativisé par de nombreuses exceptions, en outre il existe depuis 1977 une procédure juridictionnelle spéciale pour les affaires impliquant l’administration. Finalement, depuis les années 2000 on a créé au Royaume-Uni au sein des tribunaux ordinaires, des formations spécialisées sur les affaires de l’administration.

Quel que soit le pays, il y a un souci unique qui est celui d’avoir  un contrôle juridictionnel efficace de l’administration car telle est la garantie de l’Etat de droit.

 

 

PREMiERE PARTiE

LE FONDEMENT DE L’ACTiON ADMiNiSTRATiVE : LE PRiNCiPE DE LEGALiTE

La notion de source du droit ; dans un sens générique la notion de source désigne les éléments à l’origine du droit, mais dans un sens juridique la notion de source désigne les procédés de création d’une norme juridique.

La norme juridique ; la norme est l’énoncé régissant de façon impérative le comportement d’une personne physique ou morale.

La hiérarchie des normes ; cette notion de hiérarchie des normes a été développée par Hans Kelsen. Selon cette théorie, le système juridique d’un Etat est organisé de façon hiérarchique toute norme, tire sa validité juridique d’une règle supérieure. Qui prévoit les conditions d’adoption de la règle inférieure et qui prédétermine son contenu le droit va ainsi se créer par degrés. La création du droit part d’une norme fondamentale unique, en droit français c’est la Constitution. Cette norme fondamentale unique va servir de fondement à l’élaboration de nouvelles normes, plus nombreuses qui seront-elles-mêmes déclinées en de nouvelles normes encore plus nombreuses. Ca désigne une pyramide des normes. Toute la création du droit est encadrée par une norme supérieure.

Constitution, Traités internationaux, Loi, Principes généraux du droit, Les actes administratifs.

L’administration est donc régie par le principe de légalité. Les personnes publiques agissent sur le fondement du droit et en conformité avec celui-ci. Lorsque l’administration prend un acte, elle doit le faire sur le fondement d’une règle supérieure. Si elle ne respecte pas ça il y a une illégalité.

L’ensemble des règles que doit respecter une personne publique est une somme gigantesque, il y a énormément de règles juridiques. On exerce un contrôle dual de la hiérarchie des normes. Il peut être non-juridictionnel (autorité administrative) sinon ce contrôle est juridictionnel, il va être réalisé par le juge administratif.

 

Titre Premier

le contenu de la légalité administrative : les sources hiérarchisées du droit administratif.

De façon très générale les sources du droit administratif ont un rang hiérarchique qui leur est propre. Historiquement il y a une source fondamentale de droit administratif, c’est la loi. C’est la source la plus importante. C’est l’héritage de la Révolution, la loi représente l’intérêt général. Il y avait une autre source, le règlement, il y a deux sources historiquement essentielles, ce sont la loi et le règlement.

Aujourd’hui ça a évolué, la loi et le règlement restent essentiels, ils sont plus nombreux mais elles jouent un rôle moins important d’un point de vue qualitatif. Parce qu’elles subissent la concurrence de nouvelles sources de droit administratif, qui montent en puissance. Ces sources, c’est Constitution, le droit international et le droit européen.

 

Chapitre 1 – Les transformations contemporaines des sources du droit administratif

Section 1. L’élévation des sources du droit administratif

 

  1. I)La source constitutionnelle

Longtemps cette source constitutionnelle n’a eu qu’une importance secondaire. D’une part la Constitution ne disait pas grand-chose sur l’organisation et le fonctionnement de l’administration c’était particulièrement le cas sous la IIIe république.

La théorie de la loi écran, l’idée est que le juge administratif refusait de contrôler un acte de l’administration par rapport à la Constitution dès lors que cet acte de l’administration était pris sur la base d’une loi. La loi faisait écran entre l’acte administratif et la Constitution. La constitution était secondaire car les citoyens ne pouvaient pas l’opposer à l’administration. Longtemps la constitution fut au sommet mais à part. Cette situation est désormais révolue car des auteurs ont tenté de réhabiliter la source constitutionnelle. Vedel ; « Les bases constitutionnelles du droit administratif » où il a tenté de montrer comment le droit administratif pouvait être à l’ombre de la constitution et du droit constitutionnel.

La QPC va permettre de surmonter les inconvénients de la théorie de la loi écran. La constitution va véritablement être contrôlée grâce à la QPC.

 

  1. A)Le contenu des sources constitutionnelles
  1. a)La variété des règles constitutionnelles

Ces règles constitutionnelles se sont multipliées à partir du 16 juillet 1971, décision sur la liberté d’association, le conseil constitutionnel a créé le bloc de constitutionnalité avec le préambule de la constitution de 1946, la DDHC de 1789. En plus, il y a les Principes fondamentaux reconnus par les lois de la république, et aussi les principes constitutionnels. Le bloc de constitutionnalité intègre la charte de l’environnement depuis 2005. Conseil d’Etat arrêt d’Ass, 3 oct 2008 commune d’Annecy, de façon générale ce bloc de constitutionnalité, contient des règles constitutionnelles qui organisent le pouvoir de l’administration et des règles constitutionnelles qui limitent le pouvoir de l’administration.

 

  • Qui organisent le pouvoir de l’administration : la constitution organise le pouvoir règlementaire. A travers les articles 13 et 21 de la Constitution, elle répartie la compétence entre le 1er ministre et le président de la République pour l’adoption des règlements. L’article 37 de la Constitution qui précise le champ du pouvoir règlementaire, « les matières autres que celles relevant de la loi, relèvent du pouvoir règlementaire. » Et ces matières relevant du domaine de la loi sont visées à l’article 34 de la Constitution. L’article 22 de la Constitution qui évoque le rôle des ministres, qui contresignent les actes du Premier ministre. L’article 72 de la Constitution, il évoque les collectivités territoriales. Il décrit l’organisation administrative de la France, il dispose aussi du principe de libre administration des collectivités territoriales. Il fixe aussi les prérogatives du préfet, et lui permet d’avoir un contrôle sur les actes des collectivités territoriales.
  • Qui limitent le pouvoir de l’administration : ce sont les règles qui encadrent le contenu des décisions de l’administration. Ces règles sont les droits et libertés constitutionnels qui sont contenus dans la DDHC et dans le préambule de 1946. Arrêt du 7 juillet 1950, arrêt Dehaene, assemblée. Pour la première fois le conseil d’Etat a appliqué le préambule 1946 et vérifié le respect du droit de grève. Le conseil d’Etat a enrichit le bloc de constitutionnalité. Il a dégagé un PFRLR, celui d’interdiction des extraditions à motif politique, arrêt d’ass. Koné 1996.

Toutes les règles constitutionnelles ne peuvent pas être invoquées par citoyen. Pour être invoquée par un citoyen outre l’administration, la règle constitutionnelle doit avoir certaines caractéristiques.

 

3) Les caractéristiques des sources constitutionnelles

Toutes les normes ne sont pas opposables à l’administration, le juge administratif considère que des règles constitutionnelles sont trop imprécises pour pouvoir être opposées à l’administration. Si la règle constitutionnelle est posée en des termes trop larges, trop imprécis, alors le juge ne peut pas les contrôler. Ces règles seront moins protégées, l’autorité de ces règles sera affaiblie. Cela vaut notamment pour le préambule de 1946. Parce que ce préambule pose des droits sociaux qui peuvent être plus des déclarations d’intentions que de véritables règles. On constate que le juge administratif va faire du cas par cas. Il considèrera certaines règles comme suffisamment précises pour être opposées à l’administration, elles auront ce qu’on appelle un effet direct, inversement d’autres n’auront pas d’effet direct et seront exclues du contrôle du juge. Par exemple, dans un arrêt du 25 septembre 1985, France Terre d’Asile le Conseil d’Etat a estimé que l’alinéa 4 du préambule de 1946 qui évoque le droit d’asile n’avait pas d’effet direct. L’alinéa 12 du préambule de 1946 n’a pas d’effet direct, c’est un arrêt du 29 novembre 1969 Tallagrand, on ne peut pas non plus s’en prévaloir contre l’administration.

 

Aujourd’hui on essaie de savoir quelles sont les dispositions de la Charte de l’environnement qui ont un effet direct, arrêt association Eaux et rivières de Bretagne du 19 juin 2006.cadot

 

  1. B)Le rang hiérarchique de la Constitution ; la primauté des sources constitutionnelles

De façon générale il faut conserver en tête le rang primaire de la Constitution, pour le juge français qu’il soit administratif ou judiciaire. La Constitution prime sur toutes les autres règles quelle que soit son origine conventionnelle, légale, ou administrative. Donc tout acte, tout comportement de l’administration contraire à la Constitution doit être considéré comme illégal, puisque contraire à la hiérarchie des normes. Il s’agit là du principe. C’est un principe clair, mais il est relativisé en raison de la spécificité du contrôle du juge administratif du respect des règles constitutionnelles. Ce contrôle est en partie inefficace, du coup la primauté de la constitution est elle-même relativisée.

 

  1. Une primauté sur la loi contrariée : les limites historiques du respect de la Constitution

Il faut avoir en tête que le juge administratif contrôle les actes administratifs, on saisit le juge administratif pour qu’il déclare un acte administratif illégal. Cet acte peut être soit individuel, soit règlementaire. Dans le cadre de ce contrôle de l’acte administratif le requérant peut invoquer toute règle de niveau supérieur, dont la Constitution. Cependant il est des cas où les règles constitutionnelles ne peuvent pas être contrôlées par le juge administratif. Il le refuse. Dans ces circonstances le requérant ne pourra pas opposer à l’administration la règle constitutionnelle. La situation est donc paradoxale, cela débouche sur une situation paradoxale où la méconnaissance potentielle de la Constitution ne donne lieu à aucune sanction juridictionnelle. C’est pour ça que la primauté de la constitution est relativisée, parce que dans certains cas le juge refuse de contrôler la constitution.

 

Le principe fondamental est le principe selon lequel le juge refuse de contrôler un acte de l’administration lorsque cet acte a été pris sur la base d’une loi. L’administration a appliqué la loi en adoptant un acte administratif prévu par cette loi. Dans ces circonstances on dit que la loi fait écran entre l’acte administratif et la constitution. Le juge refuse de contrôler la constitutionnalité de l’acte administratif pris sur la base d’une loi parce que dans une telle hypothèse cela reviendrait pour lui indirectement à contrôler la constitutionnalité de la loi elle-même, et cela le juge administratif s’y refuse, le contrôle de la constitutionnalité de l’acte administratif ne doit pas être le prétexte au contrôle de constitutionnalité de la loi appliquée.

 

Il s’y refuse d’une part à cause de l’argument historique de la primauté de la loi, qui est l’expression de la volonté générale, c’est l’héritage révolutionnaire, la loi représente l’intérêt général elle est incontestable. Ce sont les raisons historique du début du XXe siècle.

Aujourd’hui c’est plus ambigu la loi n’est plus inattaquable, notamment la loi est soumise au contrôle de conventionalité des lois, le juge accepte de contrôler le respect par la loi des traités internationaux. Ce refus du juge de contrôler indirectement la constitutionnalité de la loi découle peut-être finalement d’une répartition des rôles depuis 1958. Contrôler la constitutionnalité de la loi c’est le domaine du Conseil constitutionnel.

 

Lorsqu’un acte administratif est fondé sur une loi, si cet acte est conforme à la loi mais contraire à la Constitution il n’y a pas d’effets parce que le juge ne peut pas contrôler la constitutionnalité d’un acte administratif car la loi fait écran entre l’acte et la constitution. Conseil d’Etat 6 nov. 1936 Arrighi ; théorie de la loi écran. En revanche, s’il n’y a pas de loi qui s’interpose alors le juge administratif peut contrôler l’acte administratif par rapport à la Constitution. Conseil d’Etat Ass. 11 juillet 1956 Amicale des annamites de Paris. Le conseil constitutionnel n’est pas le seul juge à faire du contrôle de constitutionnalité, le juge administratif fait lui un contrôle de constitutionnalité des actes administratifs. Le juge administratif est un juge constitutionnel parce qu’il assure le respect, par les actes administratifs, de la Constitution. En pratique la très grande majorité des actes administratifs sont pris en application d’une loi, donc souvent la théorie de la loi écran joue.

 

  1. Une primauté sur la loi confortée

Aujourd’hui les limites au respect de la Constitution par l’administration ont diminué, et ce pour deux raisons ;

 

  1. a)L’évolution de la jurisprudence administrative

Il y a deux jurisprudences qui ont permis au juge administratif de dépasser la théorie de la loi écran :

  • La théorie de l’écran législatif transparent ; c’est une hypothèse particulière, c’est lorsque l’acte administratif est fondé sur une loi qui se borne à habiliter l’administration, c’est-à-dire que la loi permet  l’administration de prendre un acte mais la loi ne prédétermine pas du tout le contenu de cet acte, parce que la loi ne contient aucune règle de fond. Dans cette hypothèse, le juge administratif accepte de contrôler la constitutionnalité de l’acte malgré l’existence d’une loi. Dans cette hypothèse le juge peut contrôler l’acte sans remettre en cause indirectement la loi. Puisque la loi ne dit rien sur contenu de l’acte alors l’acte peut être inconstitutionnel sans que la loi ne le soit. Conseil d’Etat 17 mai 1991 Quintin.
  • La théorie de l’abrogation implicite de la loi ; c’est une théorie qui permet au juge administratif de dire qu’une loi qui fait écran entre l’acte et la Constitution est devenue inconstitutionnelle c’est-à-dire qu’il s’agit d’une loi qui est antérieure à la règle constitutionnelle contraire, dans cette hypothèse-là le juge dit que la règle constitutionnelle postérieure a abrogé la loi dans ces conditions-là, l’acte administratif qui a appliqué la loi abrogée est illégal. Ass. 16 décembre 2005 syndicat national des huissiers de justice.

Si la loi est écartée par le juge administratif ce n’est pas parce qu’elle est inférieure à la Constitution, c’est simplement parce qu’elle est antérieure. Ce que le juge règle alors ce qu’il tranche ça n’est pas un problème de hiérarchie entre la loi et la constitution, c’est un conflit de type temporaire. L’acte administratif est inconstitutionnel parce qu’il applique une loi devenue inconstitutionnelle.

 

  1. b)La Question Prioritaire de Constitutionnalité

La QPC ne met pas fin à la théorie de la loi écran, mais elle protège les citoyens des effets négatifs de la théorie de la loi écran. Ce contrôle de constitutionnalité a posteriori, il n’est pas mis en œuvre par le juge administratif, et est mis en œuvre par le conseil constitutionnel. Le juge administratif demeure incompétent pour contrôler la constitutionnalité de la loi.

La QPC est prévue par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, son but est de renforcer l’autorité de la Constitution en faisant disparaitre les failles du contrôle de constitutionnalité. Elle permet donc une meilleure application du principe de légalité, elle va permettre une meilleure protection de la hiérarchie des normes en permettant que la loi soit mieux contrôlée. Jusqu’à la QPC le contrôle de constitutionnalité était imparfait en ce qu’il n’était qu’à priori, avant la promulgation de la loi et une fois promulguée la loi ne pouvait plus être remise en cause. En outre, il n’était pas automatique. La QPC veut répondre à ces limites elle va permettre au juge administratif de poser une question de constitutionnalité au conseil constitutionnel. Cette procédure est prévue à l’article 61-1 de la Constitution. Cet article dispose : «  Lorsqu’à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantis le conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du conseil d’Etat. » On constate que ça n’est pas une exception d’inconstitutionnalité parce que le juge administratif ne peut pas lui-même répondre à la question de la constitutionnalité de la loi.

 

La QPC fonctionne depuis le 1er mars 2010 après que l’article 61-1 ait été complété par la loi organique du 8 décembre 2009. Cette QPC peut être soulevée devant toute juridiction et à tout moment de la procédure. Elle peut l’être devant le juge administratif qu’il agisse en tant que juge du fond ou en tant que juge des référés. La QPC peut être soulevée en première en instance, devant les Tribunaux administratifs, en appel devant les Cours administratives d’appel, ou même en cassation devant le Conseil d’Etat. Cette question est posée au juge qui doit la transmettre ou au Conseil d’Etat, ou à la Cour de cassation (en cas de juridiction judiciaire). Dans le cadre de son rôle de filtre, le Conseil d’Etat vérifie que les critères du renvoi  au Conseil constitutionnel sont remplis, c’est ensuite le conseil constitutionnel qui contrôlera la loi et en prononcera l’abrogation ou non. On transmet la question au conseil d’Etat si trois conditions sont remplies :

 

  • La disposition législative contestée est applicable au litige et/ou à la procédure en cours.
  • La disposition législative contestée ne doit pas avoir été antérieurement déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. (L’exception ; on pourra quand même poser la QPC s’il y a eu un changement de circonstances, c’est-à-dire qu’il peut s’agir de circonstances de faits ou de circonstances de droit, cela peut être une évolution des règles constitutionnelles. Il peut aussi s’agir de changement de circonstances de faits, par exemple, il y a eu un changement de circonstances de faits à propos de la loi sur la garde à vue, dans une décision du 30 juillet 2010, le Conseil constitutionnel a déclaré des lois sur la garde à vue inconstitutionnelle (dans le cadre d’une QPC) cette loi avait été déclarée valable auparavant dans le cadre d’un contrôle a priori. La question avait quand même été soumise au conseil constitutionnel puisqu’il y avait eu un changement de faits qui était l’augmentation du nombre de gardes à vue, augmentation considérable qui dans les faits avait conduit à banaliser la pratique de la garde à vue.)
  • La QPC ne doit pas être dépourvue de caractère sérieux, c’est-à-dire qu’il existe une vraie raison de douter de la constitutionnalité de la loi. C’est le juge à qui on pose la question, et le Conseil d’Etat qui vont vérifier s’il y a un doute sérieux à travers un pré-contrôle de constitutionnalité par le Conseil d’Etat. Parfois ce dernier peut estimer qu’il n’y a pas de doute sur la constitutionnalité de la loi, et dans ce cas, il ne transmet pas au Conseil constitutionnel.

Dès que l’argument est soulevé devant le juge administratif il doit renvoyer au Conseil d’Etat puis devant le juge constitutionnel, immédiatement. Le juge peut répondre simultanément à la question de constitutionnalité de la loi et à la question de la conventionalité de la loi. Il y a un tempérament au principe, avec le droit de l’UE, la QPC n’est plus prioritaire. Par ailleurs, la QPC n’est pas d’ordre public, le juge ne peut pas soulever lui-même la question de la constitutionnalité de la loi. Conseil d’Etat 3 déc. 2009.

 

—  L’objet de la QPC ; toutes les lois ne peuvent pas faire l’objet d’une QPC. Premièrement les lois référendaires (article 11 de la Constitution) sont exclues de la QPC. C’est la symétrie avec la contrôle a priori. Parce que le Conseil constitutionnel refuse de contrôler l’expression directe de la souveraineté nationale. Deuxièmement, les lois de ratification de conventions internationales sont exclues de la QPC. Le conseil constitutionnel a opéré une extension du champ de la QPC en effet le conseil constitutionnel contrôle la constitutionnalité de la loi, mais aussi la constitutionnalité de l’interprétation de la loi par le juge ordinaire. Décision QPC du 6 oct. 2010 un requérant peut contester la portée effective d’une loi que lui donne son interprétation jurisprudentielle constante. Le conseil peut contrôler par le biais de la QPC une ordonnance à la condition qu’elle ait été ratifiée par le Parlement. Si elle n’est pas ratifiée elle devient règlement, si elle est ratifiée elle devient une ordonnance donc pas de QPC possible Conseil d’Etat 11 mars 2011.

—  La question de norme ; dans le cadre de la QPC le Conseil Constitutionnel ne peut contrôler que si le requérant atteste que cela va à l’encontre des droits et libertés garantis par le Bloc de Constitutionnalité. La QPC sert à protéger les droits fondamentaux. L’idée n’est donc pas que les justiciables puissent devenir les gardiens de la procédure législative ou les gardiens de la répartition constitutionnelle des compétences. Le conseil ne contrôle pas par exemple l’empiètement de la loi sur le domaine du règlement. Il y a simplement un tempérament, le conseil admet que l’on puisse contester dans le cadre de la QPC la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence. Cela vise le cas de l’incompétence négative du législateur, c’est-à-dire le cas où le législateur n’a pas usé sa compétence. C’est-à-dire qu’il a renvoyé à l’administration le traitement de certaines questions qui relèvent pourtant de sa compétence. En effet dans ces circonstances-là le conseil peut juger que l’incompétence négative a affecté un droit ou une liberté garantie par la Constitution. Autrement dit l’intervention du législateur est vue comme une garantie de la protection des droits et libertés. Dans le cadre de la QPC le conseil constitutionnel n’accepte pas d’être saisi de la question e la compatibilité de la loi avec une règle internationale.

La loi dite inconstitutionnelle est abrogée et elle n’est pas appliquée pour l’instance en cours, dans ce cas-là le requérant a gain de cause, l’acte est supprimé.

 

II – Le droit international

Il fait partie de la légalité administrative, dans un arrêt d’assemblée du 30 mai 1952 du Conseil d’Etat ; Kirkwood. Aujourd’hui l’article 55 de Constitution pose de manière conditionnelle la primauté du traité sur la loi. Cela n’est pas neutre parce qu’il y a énormément de traités, c’est une source importante du droit administratif. Historiquement, on a intégré le droit de l’union européenne dans le droit international. Le droit de l’Union européenne est spécifique, et est distinct du droit international classique.

 

  1. A)Le contenu des sources internationales

On distingue deux types de sources internationales, le droit écrit et le droit non écrit.

 

  1. Les traités internationaux

La constitution distingue deux types de traités, les traités au sens strict et les accords. La différence n’est pas matérielle, en droit international il n’y en a pas, mais en droit français la différence entre le traité et l’accord concerne la procédure et l’entrée en vigueur de la convention internationale. Les traités sont négociés et ratifiés par le président de la république, alors que l’accord n’est pas ratifié mais simplement approuvé par le gouvernement. Il y a une différence de procédure, mais sur le fond c’est la même chose. De façon générale le traité comme l’accord, se définit de manière très large : « Il s’agit d’un accord de volontés entre deux ou plusieurs Etats. » Pour être applicable en droit français et donc pour être contraignant à l’égard des autres personnes publiques, le traité doit respecter certaines conditions posées par l’article 55.

 

  1. a)La régularité de l’introduction des traités en droit français

Pour être régulièrement intégrés en droit français ils doivent être signés par la France, et le Conseil d’Etat et le juge administratif vérifient la réalité de cette signature. Le traité doit avoir été ratifié ou l’accord approuvé. Le juge administratif vérifie l’existence d’une ratification ou d’une approbation, il contrôle ça d’office, ensuite le juge administratif contrôle la régularité de la ratification ou de l’approbation il faut que le moyen soit soulevé par le requérant. Conseil d’Etat Ass. 18 déc. 1998 SARL du parc d’activités de Blotzheim.

 

Le contrôle de la régularité de la ratification passe par l’application de l’article 53 de la Constitution, en vertu de cet article certains traités ou accords, les plus importants doivent faire l’objet d’une autorisation législative pour être ratifiés ou approuvés. Le parlement vote une loi pour autoriser le président ou le gouvernement à ratifier ou approuver. Le juge administratif va vérifier que ces règles-là ont été respectées. Ce sont souvent les traités ou accords qui touchent à l’article 34 de la Constitution. Donc le juge administratif vérifie que la ratification ou l’approbation a été précédée d’une autorisation. Le juge vérifie lorsque le requérant attaque directement l’acte administratif. Conseil d’Etat Bamba Dieng 23 février 2002.

 

  1. b)La condition de réciprocité

Pour être applicable et pour que l’administration doive respecter le traité, encore faut-il que ce traité ou cet accord soit appliqué de manière réciproque par les autres Etats signataires, s’il n’y a pas d’application réciproque alors son traité perd son application juridique. Cette condition de réciprocité ne joue pas pour tous les traités, de façon générale ça ne joue pas du tout pour le droit de l’union européenne. Surtout il n’y a pas de réciprocité pour les traités relatifs à la protection de la personne humaine et pour les traités de caractères humanitaires. Assemblée 9 juillet 2010 Chériet-Benseghir, en vertu de cet arrêt le juge administratif peut contrôler lui-même le respect de cette condition de réciprocité, il s’agit-là d’un revirement de jurisprudence. Traditionnellement, le juge administratif se considérait incompétent pour contrôler la réciprocité, s’il était saisi de la question il devait surseoir à statuer et il devait poser une question préjudicielle au ministre des affaires étrangères, et la réponse du ministre s’imposait au juge, c’était la jurisprudence Ass. 9 avril 99 Chevrol-Benkeddach. La CEDH a condamné la France en raison de la jurisprudence Chevrol-Benkeddach, pour violation du droit à un traitement équitable.

 

  1. c)Le caractère des traités internationaux

Sur ce point la question est assez proche de la question de la Constitution parce que ne pourront être invoqués et opposés à l’administration que les traités internationaux qui sont d’effet direct « stipulations d’un traité / dispositions d’une loi ». On ne peut se prévaloir des stipulations d’un traité, que si ces stipulations sont précises et inconditionnelles c’est-à-dire que cette stipulation est d’effet direct. En principe les stipulations d’un traité n’ont pas  d’effet direct. Un traité est un contrat entre des Etats. Et parce que c’est un contrat il a un effet relatif. C’est-à-dire qu’il n’a d’effet qu’entre les Etats, il n’a donc pas d’effet direct pour les particuliers. Parfois le traité peut avoir pour effet d’accorder des droits aux particuliers. Il y a donc effet direct lorsque les stipulations du traité ont pour objet d’accorder des droits, d’imposer des obligations aux individus. Donc ces droits et obligations doivent être précis et inconditionnels. Il faut noter que le juge ne raisonne pas traité par traité, il ne raisonne pas en prenant en compte le traité dans sa globalité. C’est-à-dire que certaines stipulations d’un traité peuvent avoir un effet direct alors que d’autres ne le pourront pas. Par exemple, la Convention de l’ONU pour la protection des droits de l’enfant de 1990, certains de ses articles sont d’effet direct, s’imposent à l’administration, d’autres ne sont pas invocables par les particuliers. Le juge ne raisonne pas seulement article par article, il raisonne en termes de paragraphes dans le traité. Au sein d’un même article un paragraphe peut avoir un effet direct et d’autres pas. Conseil d’Etat Ass. 11 avril 2012 Gisti. Le conseil d’Etat dit, dans quelle condition une stipulation d’un traité peut avoir un effet direct : « Une stipulation d’un traité doit être reconnue d’effet direct lorsque eut égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale du traité ainsi qu’à son contenu et à ses termes, elle n’a pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats, et ne requiert l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers. »

 

Trois critères de l’effet direct d’une stipulation d’un traité :

—  Un critère lié aux parties ; les parties voulaient-elle créer des droits pour les particuliers ?

—  Le critère du traité dans son ensemble ; lorsqu’on prend l’ensemble des stipulations alors on peut supposer que le traité vise à créer des droits pour les particuliers.

—  Le critère lié à la stipulation invoquée elle-même. Il faut vérifier que cette stipulation invoquée est précise et inconditionnelle c’est-à-dire qu’elle ne demande pas d’acte national pour la préciser.

 

Si le traité ou la stipulation donne à l’Etat la liberté de déterminer lui-même l’étendue et les modalités du droit ou de l’obligation qu’il contient alors il n’y a pas d’effet direct. Parce que l’Etat a une liberté de déterminer le droit contenu dans le traité, alors ce droit n’a pas d’effectivité directe. Pour savoir si quelqu’un peut contester un acte administratif par rapport à un traité, il faut savoir si le traité a été régulièrement signé et ratifié, et il faut savoir si le traité est d’effet direct. Il faut donc vérifier les trois critères.

 

  1. Le droit international non-écrit

Ce droit international non-écrit renvoie à deux types de sources ; la coutume internationale d’un côté, et les principes généraux du droit international. A l’origine ce droit international non écrit n’avait pas de force contraignante à l’égard de l’administration. La situation a évolué à partir de 1946, plus précisément de la constitution de la IVe république. En effet l’alinéa 14 du préambule de 1946 dit que : « La République française fidèle à ses traditions se conforme aux règles du droit public international. » Or le droit international ce sont les règles du droit international écrites et non-écrites, et le préambule ne distingue pas entre le deux. Du coup, la coutume et les PGD internationaux deviendront des sources de la légalité administrative. Les arrêts qui ont confirmé ce sont d’abord : Ass.6 juin 1997 Aquarone pour la coutume. Dans cet arrêt le conseil d’Etat applique la coutume, et contrôle un acte administratif à l’égard d’une coutume internationale. La coutume internationale c’est la norme qui résulte d’une pratique internationale que les Etats considèrent comme obligatoire. Conseil d’Etat 28 juillet 2000, Paulin. Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat contrôle à l’égard d’un principe général du droit international. Le PGD international, c’est le principe commun aux ordres juridiques nationaux et qui a été transposé dans l’ordre juridique international.

 

  1. B)Le rang du droit international
  1. Le rang des traités internationaux

Le principe est que les traités sont supra-législatifs et infra-constitutionnels.

 

  1. a)Le caractère infra-constitutionnel

Le conseil constitutionnel a affirmé que la Constitution se trouve au sommet de l’ordre juridique interne. Le Conseil d‘Etat suit la même logique, arrêt Sarran Conseil d’Etat Ass. 30 oct.1998. Pour la Cour de cassation, c’est l’arrêt du 2 juin 2000, Fraisse.

 

La primauté de la Constitution sur le traité est assez relative parce qu’il n’y a pas toujours un contrôle juridictionnel efficace, du respect de la constitution par un traité. Conseil d’Etat Ass. 9 juillet 2010, Fédération nationale de la Libre pensée, dans cet arrêt le conseil d’Etat dit que le juge administratif est incompétent pour vérifier la conformité d’un traité à la Constitution. En définitive il n’y a qu’un seul mécanisme de contrôle des traités, c’est l’article 54 de la Constitution, relatif au contrôle a priori exercé par le conseil constitutionnel. Si le traité a été ratifié par les autorités françaises alors même que le conseil n’a pas été saisi, le traité en question deviendra intouchable. Ceci est une limite à la supériorité de la Constitution, puisque parfois personne ne peut contrôler le respect de la constitution par le traité.

 

  1. b)Le caractère supra-législatif

Le traité a une valeur supérieure à la loi. Historiquement le conseil d’Etat a suivi le même raisonnement que pour les lois.  C’est-à-dire qu’historiquement le conseil d’Etat se refusait à contrôler le respect d’un traité par la loi. On retombait dans la théorie de la loi écran. Si un acte administratif était conforme à une loi, qui était incompatible avec un traité, l’acte administratif était quand même valable, parce que le juge ne pouvait pas contrôler cette incompatibilité de la loi au traité. La loi faisait écran entre l’acte administratif et le traité, 1er mars 1968 Conseil d’Etat sect. Syndicat général des fabricants de semoule de France. Dans cette décision, le Conseil d’Etat dit qu’il ne lui appartient pas de contrôler la loi par rapport au traité, c’est au conseil constitutionnel de contrôler qu’une loi respecte un traité. Le conseil constitutionnel s’est déclaré incompétent pour contrôler le respect d’un traité par la loi, décision relative à la loi sur l’IVG 15 janvier 1975. Du coup, le conseil d’Etat a fait évoluer sa jurisprudence Conseil d’Etat Ass. 20 oct.1989 Nicolo. Le juge administratif est compétent pour contrôler la conventionalité des lois.

Si un particulier conteste un acte administratif, prit en conformité d’une loi, le requérant pourra invoquer que cette loi est contraire à un traité. Si cette loi est véritablement contraire au traité alors le juge administratif va estimer que la loi est inapplicable et donc la conséquence est que la loi étant inapplicable et ainsi l’acte administratif qui l’accompagne est illégal. La loi continue d’exister mais elle n’est simplement pas appliquée. Depuis l’arrêt Nicolo on a été face à un paradoxe, c’était que le respect des traités par le législateur et par l’administration était mieux garanti que le respect de la Constitution. Parce que le juge administratif était compétent pour écarter la loi inconventionnelle, mais pas la loi inconstitutionnelle. Ce paradoxe est résolu grâce à la QPC.

 

  1. c)L’articulation des traités entre eux

Les traités ont-ils tous la même valeur ? Oui, Conseil d’Etat Ass. 23 déc. 2011 Kandyrine de Brito Paiva, les traités ont la même valeur. Le juge ne peut pas faire primer un traité sur un autre, il n’est pas compétent pour contrôler un traité par rapport à un autre traité. Le juge peut seulement essayer de concilier les traités entre eux en les interprétants de manière compatible, mais si cette conciliation n’est pas possible alors le juge appliquera le traité dans le champ duquel la décision administrative a été prise. Le conseil d’Etat a admis que cette décision-là ne s’applique pas à l’UE, ce qui voudrait dire implicitement que le droit de l’union serait supérieur aux autres traités.

 

  1. Les traités de droit international non-écrit

La coutume et les PGD de droit international ont une valeur inférieure à la loi. C’est-à-dire que si une loi est contraire à la coutume internationale c’est la loi qu’on appliquera et la coutume qu’on écartera. Pour la coutume on s’est demandé s’il n’y avait pas un revirement de jurisprudence, avec l’arrêt Chériet-Benseghir.

 

Section 2. L’européanisation des sources

 

I – Le contenu des sources communautaires

  1. A)La spécificité des sources communautaires

Double spécificité des sources européennes, d’abord des spécificités d’un point de vue pratique. La spécificité du droit de l’union découle du nombre de textes adoptés dans le cadre de l’UE, chaque année l’union adopte des centaines de textes que les autorités françaises doivent intégrer en droit français. Il y a beaucoup de textes européens qui touchent des domaines sensibles du droit administratif. Les contrats administratifs, la fonction publique sont très largement européanisés par exemple. Tout le droit administratif subi l’effet des sources d’origine européennes.

 

Spécificité d’un point de vue juridique, pour le conseil constitutionnel le droit de l’UE constitue un ordre juridique spécifique, c’est-à-dire distinct du droit international. Cette spécificité se retrouve dans la jurisprudence du conseil d’Etat, dans la décision Kandyrine de Brito Paiva. Dans la décision GISTI, même chose, la solution ne vaut pas pour le droit de l’UE. Parce que pour le droit de l’UE seule la cour de justice de l’UE peut dire quel est le droit de l’Union d’effet direct ou non. Le droit de l’UE n’est pas régit uniquement par l’article 55 de la Constitution, il est aussi régi par le titre 15 de la Constitution et par l’article 88 paragraphe 5 de la Constitution, ce qui conduit à une autonomisation du fondement constitutionnel du droit de l‘union par rapport au droit international.

 

  1. B)La variété des sources européennes
  1. Les sources européennes non-écrites

L’union européenne fonctionne sur la base de deux traités :

–                    le traité sur l’Union Européenne

–                    le traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne

Ces traités constituent le droit primaire de l’UE. Ils contiennent plusieurs centaines d’articles dont certains sont dotés de l’effet direct. Seules les stipulations précises et inconditionnelles sont d’effet direct. La spécificité du droit de l’union est qu’il existe à côté de ce droit primaire un droit dérivé, c’est à dire que sur la base des deux traités, l’Union adopte de nouveaux actes qui auront une valeur juridique pour les États membres de l’union européenne

 

Il y a généralement trois types d’actes qu’adopte l’UE :

  • Les règlements
  • Les directives
  • Les décisions

Certains de ces actes créent directement des droits et des obligations pour les particuliers. Ce sont donc des actes qui ont un effet direct, ce sont les règlements et les décisions. Ensuite, il y a les directives, ce sont des actes qui en principe ne créent de droits et d’obligations qu’à l’égard des Etats. La directive fixe un résultat à atteindre mais laisse à l’Etat une liberté pour déterminer les moyens d’atteindre cet objectif. Cette directive nécessite un acte national de transmission, qui va permettre d’atteindre les objectifs visés par la directive. La conséquence est qu’une directive ne peut avoir d’effet direct car il faut une mesure nationale complémentaire. Cependant la Cour de justice va considérer dans un arrêt  Van Duyn du 4 septembre 1974, que les directives peuvent par exception avoir un effet direct.

 

Ass. 22 décembre 1978 Cohn-Bendit. Dans l’arrêt, le requérant ne peut pas se prévaloir du contenu de la directive pour se le faire appliquer par l’administration. Deuxième conséquence concrète le requérant ne peut pas contester un acte individuel de l’administration. Cette situation n’était pas tenable à terme. Sans admettre l’effet direct d’une directive le Conseil d’Etat va admettre qu’un justiciable, qu’un particulier puisse invoquer devant lui une directive. Il y a là la spécificité du droit de l’Union Européenne qui peut être invoqué sans effet direct.  Même sans effet direct, la directive est invocable. Elle est invocable car la directive même dépourvue d’effet direct est invocable contre un acte réglementaire c’est-à-dire un acte à portée générale ; 28 septembre 1984, Confédération des sociétés de protection des animaux. Ensuite le conseil d’État a admis que l’on puisse invoquer la directive même sans effet direct pour engager la responsabilité de l’État si celui-ci a méconnu la directive. Conseil d’Etat Assemblée, 28 février 1992, Rothmans International France et S.A Philippe Morris France. On peut attaquer la décision individuelle en disant que la loi ou le règlement qui a fondé la décision individuelle est contraire à la directive.

Au final on arrivait dans la situation où l’on pouvait invoquer une directive pour obtenir l’annulation d’un acte mais on ne pouvait pas invoquer la directive de manière positive c’est à dire pour se faire appliquer son contenu.

Le conseil d’État a fait un revirement de jurisprudence, plus d’arrêt Cohn-Bendit. C’est l’arrêt Perreux qui règle la question, arrêt d’assemblée du 30 octobre 2009, une directive peut avoir un effet direct à deux conditions :

–                    la directive  est précise et inconditionnelle

–                    l’État n’a pas transposé la directive en droit interne.

 

  1. Les principes généraux du droit communautaire

Les principes créés de manière prétorienne par la cour de justice. La cour de justice les a créé pour combler les lacunes du droit de l’UE. Elles ont un effet direct.

 

II – Le rang hiérarchique du droit  l’Union Européenne

Ce qui est simple c’est que le droit de l’UE a une valeur supra-législative. La jurisprudence de l’arrêt Nicolo joue parfaitement pour le droit de l’UE. La spécificité est que les Principes Généraux du Droit  communautaire priment sur la loi, Arrêt de section du 03 décembre 2001, Syndicat national de l’industrie pharmaceutique

 

Deux conceptions s’opposent :

  • Pour le juge administratif ; la constitution prime sur le droit de l’UE. Arrêt Arcelor du 26 janvier 2007. Du point de vue du juge administratif français, dans la hiérarchie des normes au sommet il y a la constitution et en dessous le droit de l’UE.
  • Pour la cour de justice l’UE, le droit de l’UE prime sur toutes les règles nationales même constitutionnelles. Aucune disposition même constitutionnelle, ne peut faire obstacle à l’application du droit de l’UE. Arrêt  du 11 janvier 2000, Arrêt Krein ; la constitution allemande interdit aux femmes de faire partir des unités de l’armée combattante. Une femme allemande voulait avoir ce droit, elle a invoqué le droit de l’UE qui interdit la discrimination entre hommes et femmes. La cour de justice va juger que la constitution allemande doit s’incliner devant le principe de non-discrimination hommes/femmes. La disposition constitutionnelle est contraire à une disposition européenne, donc la disposition prévue par la constitution doit être écartée.

 

Il y a là un conflit de jurisprudence. Les États peuvent être condamnés par la cour de justice européenne s’ils violent le droit de l’UE. Si le juge administratif impose la primauté de la constitution française, il risque de faire condamner la France par la cour de justice. Du coup le juge administratif va essayer d’aménager son contrôle de constitutionnalité pour essayer de concilier les deux positions. Cet aménagement du contrôle de constitutionnalité est opéré par l’arrêt Arcelor. Ça vise un cas particulier : il y a la société Arcelor qui attaque un décret en disant qu’il était contraire au principe d’égalité consacré par la constitution. Ce décret est la transposition d’une directive précise et inconditionnelle. Du coup comme la directive est précise et inconditionnelle, le décret transpose cette directive. Si le conseil d’État applique le principe d’égalité, il risque de faire prévaloir la constitution indirectement sur la directive qui est transposée. S’il ne sanctionne pas, la primauté de la constitution est remise en cause. La solution retenue va donc être que le conseil d’État va d’abord dire que transposer une directive est non seulement une obligation européenne mais aussi une obligation européenne établie par l’article 88-1 de la constitution. Dès lors qu’il y a cette obligation, le Conseil d’État va dire qu’il fait un contrôle particulier de constitutionnalité du décret c’est-à-dire qu’il va chercher à concilier l’obligation constitutionnelle de transposer avec les autres règles constitutionnelles qu’il contrôle. Ce contrôle particulier est un contrôle de constitutionnalités des actes réglementaires des transpositions de directives précises et inconditionnelles.

 

Ce contrôle est atypique :

  • Les règles constitutionnelles des règles de compétences et de procédés, le juge administratif va normalement les contrôler ; S’il y a un décret de transposition qui est pris dans le domaine de la loi, il est alors inconstitutionnel car l’autorité administrative était incompétente. Le juge administratif peut le faire car quand c’est en cause une règle de compétence ou de procédure la règle découle de l’acte administratif de transposition. Les règles de procédures et de compétences ne sont pas affectées.
  • Pour les autres règles constitutionnelles : il y a une spécificité. Le juge administratif doit rechercher s’il existe une règle ou un principe communautaire équivalent à l’égard de sa nature ou de sa portée à la règle constitutionnelle invoquée. Le juge doit voir s’il existe un principe communautaire d’égalité.
  • Soit il existe une règle communautaire équivalente : dans ce cas le juge administratif va vérifier si la directive précise et inconditionnelle est conforme à cette règle communautaire équivalente ; pour répondre à cette question le juge administratif doit saisir la cour de justice de l’UE. Si la directive respecte la règle communautaire équivalente à la règle constitutionnelle alors on peut considérer qu’elle respecte la règle constitutionnelle elle-même. Ainsi on pourra considérer que le décret est conforme à la constitution et rejeter le recourt. En revanche si la directive est contraire à l’acte communautaire alors la cour de justice va annuler la directive et le juge administratif va pouvoir annuler les dispositions qu’elle transpose.  En quelque sorte, le juge fait respecter la constitution à travers une règle communautaire équivalente et confie à la cour de justice le soin d’opérer le contrôle.
  • Soit il n’existe pas une règle communautaire équivalente : dans ce cas le juge administratif contrôlera normalement la règle constitutionnelle. Qui est spécifique à la France ; La France s’exposera à une condamnation et s’en doute la constitution devra être révisée.

 

En pratique il n’existe presque pas de règles constitutionnelles françaises qui n’auraient pas d’équivalent en droit de l’UE. On va donc souvent se tourner vers la cour de justice. La règle constitutionnelle de laïcité n’a pas d’équivalent en droit européen, c’est donc au juge que revient son contrôle.

 

—  Arrêt Arcelor, la directive respectait bien le principe d’égalité de constitutionnalité. Donc le décret qui transposait la directive était bien constitutionnel.

 

Le conseil ne peut pas contrôler la loi lorsqu’elle est le reflet, la reproduction d’un texte européen. Dans ces cas-là, il faut que le juge administratif pose une question préjudicielle à la cour de justice sur la conformité de la directive au droit communautaire. Décision QPC du 17 décembre 2010.

 

Le cas où un requérant conteste la conformité d’une loi de transposition par rapport à la convention européenne des droits de l’homme. A priori le requérant demande un contrôle de conventionalité de la loi. Mais il ne peut pas être mis en œuvre de manière classique parce qu’est en cause  une loi de transposition donc le droit communautaire. Si c’était une loi ordinaire le juge pourrait dire qu’elle est contraire au droit communautaire et l’écarterait. Mais là c’est une loi qui transpose une disposition communautaire. Plutôt que de contrôler la loi avec la CEDH, le juge administratif doit confronter la directive transposée par la loi aux directives de droit communautaire primaire. En effet

 

Si la cour de justice a invalidé la directive, le juge administratif écartera la loi car il la considèrera comme inconventionnelle, parce que la directive est contraire à la CEDH, et si la cour dit que la directive est conforme au droit communautaire, alors le juge rejettera l’argument du requérant tiré de l’inconventionalité de la loi de transposition. Arrêt de Section 10 avril 2008 Conseil National des Barreaux.

 

Section 3. La fragilisation des sources

I – La soft Law

On assiste aujourd’hui en droit administratif à la multiplication des actes d’orientation ce sont des actes adoptés par les autorités administratives afin de clarifier et de préciser leur action. Ce sont donc des actes à vocation informative et interprétative. Il s’agit pour l’autorité administrative de guider les administrés afin que ceux-ci puissent prévoir l’application du droit que fera l’administration. Ces textes, ces actes d’orientation ne sont pas du tout très peu organisés par le droit, les autorités administratives les emploient spontanément. La terminologie est d’ailleurs variable, on parle de ligne directrice, de recommandation, ou encore de circulaire non-impérative. Le problème qui se pose c’est que ces actes adoptés très souplement par les autorités administratives on ne connait pas bien leur portée juridique. On ne sait pas si ces actes sont créateurs de droit ou pas. D’un côté en principe ils n’ont pas de valeur normative, mais d’un autre côté ils ont une autorité de fait. Dans les faits ces actes sont appliqués souvent par l’administration. Ce sont donc des actes non juridiques, mais d’orientation. En pratique ils sont souvent élaborés en accord avec leur destinataire. Enfin ces actes d’orientation peuvent être soit unilatéraux, soit des actes conventionnels conclus entre une autorité administrative et une autre autorité administrative, ou une personne privée. Par exemple ; ce sont les contrats de plan entre l’Etat et la région.

 

II – Les difficultés soulevées par la soft Law

Elles sont nombreuses, on ne sait pas si ces actes sont de véritables sources du droit, le juge ne sait donc pas s’il doit les appliquer à l’administration, et sanctionner leur méconnaissance. On ne connait pas le rapport entretenu par cette soft Law et les administrés. Peuvent-ils attaquer ces actes devant un juge, peuvent-ils invoquer ces actes contre l’administration, en pratique le juge va vérifier au cas par cas la nature de cette soft Law. Arrêt du Conseil d’Etat, 11 oct. 2012, soc. Casino Guichard-Perrachon c’est un arrêt rendu à propos des avis de l’autorité de la concurrence, en principe pour le conseil d’Eta ces avis ne formulent que des recommandations, elles n’ont donc pas d’effet juridiques et ne peuvent en principe être contestées devant le juge. Inversement, l’administration n’a pas d’obligations à les appliquer, mais le Conseil d’Etat dans un second temps ; dit que par exception il peut arriver que ces avis contiennent des dispositions générales et impératives, dans ce cas-là ces avis deviennent de véritables actes juridiques normatifs et l’administration devra les appliquer et on pourra attaquer ces actes devant le juge administratif.

CHAPITRE 2 – LES SOURCES TRADITIONNELLES DE LA LEGALITE ADMINISTRATIVE

Section 1. Les sources législatives

Historiquement, la loi est la source privilégiée de l’action administrative, c’est-à-dire qu’au début du XXe siècle, c’est vraiment la loi qui est le corpus juridique le plus important pour déterminer les règles applicables par l’administration. Sous les 3e et 4e républiques on parle d’Etat légicentré. Car la loi est, non seulement, importante en nombre et surtout parce que la loi est incontestable. Historiquement la loi est la norme de référence privilégiée pour déterminer le comportement de l’administration. Ce constat historique est encore vrai aujourd’hui, mais il est relativisé. Les lois sont nombreuses, importantes mais elles ne sont plus incontestables puisqu’elles subissent l’emprise de la règle constitutionnelle du droit international et du droit européen.

Pour être applicable par l’administration et donc être une véritable source du droit, la loi doit présenter deux caractéristiques, d’une part elle doit être publiée, si elle ne l’est pas, les administrés n’en n’ont pas connaissance, Conseil d’Etat 13 déc. 1957 Barrod, ensuite la loi doit avoir fait l’objet de textes d’application. En l’absence de tels textes la loi sera inapplicable, à moins qu’elle soit en elle-même suffisamment précise pour être directement appliquée. Conseil d’Etat Ass. 26 mai 1995 Préfet de la Guadeloupe c. Etna

 

  1. I)La diversité des lois

Il y a des lois ordinaires votées par le parlement dans le domaine de l’article 34 de la Constitution.

 

  1. A)Les ordonnances

En vertu de l’article 38 de la Constitution le gouvernement peut prendre pour l’exécution de son programme des ordonnances s’il est autorisé par le parlement. Les ordonnances permettent de prendre des mesures dans le domaine de la loi, cette autorisation est limitée dans son objet, et limitée dans sa durée (elle est provisoire). Les ordonnances constituent des délégations temporaires du pouvoir législatif, par le parlement en faveur du gouvernement. Bien qu’elles soient adoptées par le gouvernement, ces ordonnances auront valeur de li une fois qu’elles auront été ratifiées par le parlement. En principe en vertu de l’article 38, il faut obligatoirement une ratification, c’est l’un des apports de la révision constitutionnelle de 2008. Si elles ne sont pas ratifiées par le parlement, ce ne sera donc pas un texte de valeur législative. L’ordonnance non ratifiée sera un acte administratif. Avant 2008, il n’y avait pas d’obligation de ratification, beaucoup d’ordonnances restaient des actes administratifs, et beaucoup faisaient l’objet d’une ratification implicite. C’est-à-dire que le juge administratif considérait que le parlement à l’occasion du vote d’une loi extérieure à l’ordonnance avait implicitement voulu ratifier l’ordonnance.

 

  1. B)Les lois référendaires

Article 11 de la Constitution, le président sur proposition du gouvernement peut organiser un référendum sur l’organisation des pouvoirs publics. Soit il s’agira d’une loi relative à la politique économique, sociale, et environnementale, ou il s’agira d’une loi relative à un service public. Soit il pourra s’agir d’une loi de ratification d’un traité international. La loi référendaire est spécifique en ce qu’elle est l’expression directe de la souveraineté populaire ; Elle n’est donc pas contrôlée par le conseil constitutionnel. La question se pose du contrôle de conventionalité des lois référendaires.

 

  1. C)Les mesures de l’article 16

Il est relatif aux pouvoirs de crise du président de la république. Dans cette situation-là le président peut par exception adopter des actes dans le domaine de la loi. Du coup il y a deux situations envisageables, soit la mesure présidentielle est adoptée dans le domaine de la loi, auquel cas elle sera considérée comme une loi qui ne pourra être contrôlée par le juge. Soit la mesure est adoptée en dehors du domaine de la loi, et dans ces cas-là on pourra attaquer directement l’acte présidentiel devant le juge administratif. Ass. 2 mars 1962 Rubin De Servens.

 

  1. II)Le domaine de la loi ordinaire
  1. A)Le domaine de l’article 34 de la Constitution

Le domaine de la loi est essentiel en droit administratif, parce qu’il permet d’identifier a contrario le champ du pouvoir règlementaire. Ce qui ne relève pas du domaine de la loi, relève du pouvoir des autorités administratives. Il énumère les matières qui impliquent le vote d’une loi. La loi fixe les règles relatives aux droits civiques et aux garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Le droit administratif est très important car il signifie que les limitations apportées aux libertés publiques doivent donc être en principe fixées par le législateur. La loi fixe aussi les règles relatives aux libertés, à la nationalité, à la capacité des personnes, au pluralisme et à l’indépendance. Elle fixe aussi les crimes, les délits, ainsi que les peines applicables à ces crimes et délits. La loi fixe les règles générales en matière fiscale. Elle détermine les principes fondamentaux le conseil constitutionnel a assimilé la fixation des règles à la fixation des principes fondamentaux. Ex ; La loi fixe les principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, la loi fixe les principes fondamentaux de la défense nationale, et la loi fixe les principes fondamentaux du régime de la propriété.

C’est une évolution de la 5e république antérieurement la compétence du législateur n’avait aucune limite, il pouvait agir dans n’importe quel domaine de la vie en société, désormais il est contraint.

 

  1. B)Le dépassement du domaine

La délimitation du domaine de la loi n’a pas eu l’importance voulue en 1958. La loi qui empiète sur le domaine du règlement n’est pas pour autant inconstitutionnelle. Conseil constitutionnel 30 juillet 1982 Décision sur le blocage des prix et des revenus.

Puisqu’il n’y avait plus de limites matérielles à l’intervention du législateur on a assisté à la substitution de la loi par rapport aux actes de règlement. Conseil constitutionnel 21 avril 2005 loi sur l’avenir de l’école, le conseil identifie les dispositions de nature règlementaire contenues dans la loi. Il ne les censure pas mais il dit quand même que ces dispositions sont de nature règlementaire. Ce qui a un effet concret, c’est que ces dispositions sont délégalisées. Ce ne sont plus des lois mais que des mesures que le gouvernement pourrait librement modifier au titre de dispositions réglementaires. Ces dispositions perdent leur valeur règlementaire.

Lorsque la loi dépasse le domaine de l’article 34 le gouvernement a deux armes pour réagir, armes définies par l’article 37 de la Constitution. D’une part les dispositions législatives adoptées dans le domaine du règlement avant 1958 peuvent être modifiées par décret du gouvernement. Pour les lois postérieures à 1958, le gouvernement peut saisir le conseil constitutionnel afin qu’il constate le caractère règlementaire de la loi. Une fois constaté le gouvernement pourra modifier la loi par décret.

 

III)                L’évolution contemporaine de la source législative

  1. A)L’appauvrissement de la source législative
  1. L’inflation législative

On constate une prolifération des lois qui a pour corolaire la baisse de la qualité rédactionnelle. Cette multiplication a pour effet de conduire à un droit plus morcelé où se multiplient des dispositions légales sectorielles. En outre la prolifération des textes, conduit à une moins bonne connaissance des textes par les administrés et les administrations qui ont du mal à les appliquer.

 

  1. La fragilisation des lois

Elle tient à deux arguments principaux, le premier c’est le développement des lois non-normatives, c’est ce qu’on appelle les lois « d’intentions », les lois « programmatiques ». Ce sont des lois qui fixent des principes généraux, des orientations mais ce sont des lois qui ne contiennent pas des règles juridiques précises. Ce sont souvent des lois qui poursuivent des motifs uniquement politiques, par exemple la loi du 23 févier 2005 sur les aspects politiques de la colonisation.

 

Lorsqu’une loi ne contient pas d’obligation juridique, lorsque la loi ne fixe donc que des objectifs ou des orientations, elle n’est pas applicable à l’administration. Elle n’est donc plus une source du droit que doit respecter l’autorité administrative. Conseil d’Etat Ass. 5 mai 1999 Rouquette.

 

Développement des législations de panique. Ce sont des lois votées en urgence, souvent votées sous l’effet de l’émotion pour répondre à un évènement médiatique particulier. Le plus souvent, elles sont très peu claires, très confuses, mal écrites, elles participent à un morcellement de droit car elles visent un problème spécifique révélé par un fait divers.

 

  1. B)Les remèdes apportés

Aujourd’hui on fait évoluer la source législative, qui passe par deux mouvements

 

  1. Le renforcement de la qualité des lois

C’est un mouvement contemporain qui vise à améliorer le contenu de la loi, c’est un mouvement jurisprudentiel d’abord, le conseil constitutionnel est plus rigoureux à l’égard des lois. Il consacre le principe d’intelligibilité, et d’accessibilité de la loi. Décision du 16 décembre 1999.

Le conseil constitutionnel censure désormais les dispositions législatives sans contenu normatif.

Le mouvement peut être à l’origine des pouvoirs publics eux–mêmes, révision constitutionnelle de 2008 cherche ainsi à améliorer la qualité de la loi. Pour cela elle a fixé une obligation constitutionnelle, un procédé d’évaluation des projets de loi. C’est-à-dire que tout projet de loi doit être accompagné d’une étude d’impact qui doit évaluer ses effets concrets, et qui doit aussi évaluer la nécessité d’un projet de loi.

 

  1. La codification

La codification c’est regrouper les règles législatives applicables au sein d’un code organisé de manière cohérente. C’est un remède à la prolifération des lois. C’est pour cela qu’on avait créé une commission supérieure de codification en 1989 afin d’améliorer l’accès au droit. La codification est un moyen d’améliorer l’accès au droit, parce qu’on rassemble et qu’on classe dans des codes thématiques la législation en vigueur. La codification peut se faire à droit constant, c’est-à-dire que c’est un simple regroupement des règles de droit, parfois ce n’est pas un regroupement à droit constant, exceptionnellement on changera les règles. La codification est donc le moyen de rationaliser les règles légales et un moyen de faire disparaitre les règles légales devenues inutiles.

 

Section 2. Les actes administratifs

Les autorités administratives peuvent prendre des actes administratifs, ceux-ci peuvent être soit unilatéraux, soit contractuels. Le pouvoir règlementaire renvoie aux actes unilatéraux. Le pouvoir de rendre unilatéralement un acte contraignant est la première des prérogatives de puissance publique de l’administration. Cela permet à l’administration d’imposer un comportement sans avoir besoin d’obtenir l’acceptation des personnes qu’elle vise. Ces actes administratifs unilatéraux peuvent être soit réglementaires, soit individuels. L’acte réglementaire est un acte de portée générale et impersonnelle. L’acte ne vise pas une personne en particulier mais une catégorie de personnes définies de manière abstraite. Un acte règlementaire, visera la catégorie générale et impersonnelle des étudiants par exemple, l’acte individuel a un destinataire particulier identifié par l’acte. L’acte réglementaire par sa généralité se rapproche d’une loi. Par exemple, une mesure de police est un acte règlementaire parce qu’elle n’a pas de destinataire précis.

Les actes individuels sont normatifs, créent une obligation juridique mais seulement à l’égard d’une seule personne. Ils ne sont donc pas purement et simplement assimilables aux autres sources du droit. Les actes administratifs, se classent en fonction de leur objet et de leur contenu (général et impersonnel d’un côté, individuel de l’autre). Parfois on classe l’acte administratif en fonction de son auteur, par exemple on distingue les décrets qui sont pris par le président de la république ou le premier ministre des arrêtés pris par les ministres.

 

  1. I)Les titulaires du pouvoir règlementaires

 

  1. A)Les titulaires au niveau national
  1. Les autorités en principe compétentes

En vertu de l’article 22 de la Constitution le premier ministre a la compétence de principe au niveau national pour adopter des actes règlementaires. Cela correspond à sa mission définie par l’article 21 de la Constitution. Les actes règlementaires pris par le premier ministre peuvent être contresignés par le ministre chargé de l’application de l’acte règlementaire. C’est-à-dire le ministre qui est compétent pour prendre des mesures règlementaires ou individuelles d’exécution du décret du premier ministre.

 

L’article 13 de la Constitution dispose que le président de la république signe les décrets délibérés en conseil des ministres. Donc pour les décrets, pour les actes règlementaires délibérés en conseil des ministres c’est le président de la république qui est compétent. Les cas de décrets délibérés en conseil des ministres sont rares, ils sont prévus soit par la constitution, soit par une loi, soit par un acte règlementaire. L’article 36-1 de la Constitution, l’acte règlementaire qui proclame l’état de siège est un acte pris par le président en conseil des ministres. Les actes pris en conseil des ministres doivent être contresignés par le premier ministre et les ministres responsables de leur exécution.

 

Il n’y a pas de liste précise des actes délibérés en conseil des ministres, en effet, le président peut librement choisir d’inscrire à l’ordre du jour du conseil des ministres un projet d’acte règlementaire. Même si cela n’est pas prévu par un texte. Une fois que le président a  adopté un acte règlementaire en le signant, il n’y a que lui qui peut modifier ou abroger cet acte règlementaire. Quand on va prendre un décret, soit cet acte doit être délibéré en conseil des ministres, dans ces cas-là l’acte est délibéré en conseil des ministres et il relève du président de la république. Soit l’acte ne doit pas forcément être délibéré en conseil des ministres, si le président choisi de l’inscrire à l’ordre du jour alors l’acte relève de sa compétence. Seul lui pourra le modifier, Ass. 10 sept. 1992 Meyet.

 

            En revanche, lorsque l’acte règlementaire est signé par le président mais non délibéré en conseil des ministres, alors le premier ministre reste compétent pour cet acte. C’est le critère de la délibération sui compte, pas le critère de la signature. Conseil d’Etat 27 avril 1962, Sicard.

 

Le président et le premier ministre sont les autorités à pouvoir prendre des mesures qui valent pour tout le territoire français, ils ont un pouvoir règlementaire général. Certains décrets sont qualifiés de décrets en Conseil d’Etat, ce sont les décrets les plus importants, ce sont des décrets qui doivent recueillir l’avis du Conseil d’Etat avant leur signature. L’avis du conseil d‘Etat ne lie pas le président ni le premier ministre, sauf quand il s’agit d’un avis conforme.

 

  1. Les autorités compétentes par exception

Par exception le pouvoir règlementaire peut être attribué à d’autres autorités administratives dans le territoire.

  • Ça peut d’abord être un ministre, un décret ou une loi peut déléguer à un ministre la compétence pour adopter des mesures règlementaires. Ces mesures règlementaires, doivent être sectorielles et limitées. Décision du 22 janvier 1990 du conseil constitutionnel. En l’absence de délégation e loi ou de décret, les ministres n’exercent pas le pouvoir règlementaire. Arrêt Conseil d’Etat 23 mai 1969 société distillerie Brabant.
  • On a aussi admis une délégation de l’autorité règlementaire à des autorités administratives indépendantes. Cette délégation doit être limitée dans son champ et dans son contenu. La compétence de l’autorité administrative sera limitée d’un point de vue sectorielle, et dans le contenu de l’acte. Conseil constitutionnel 17 janvier 1989, pouvoir règlementaire résiduel du CSA.

 

  1. B)Au niveau local

En application de l’article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales disposent du pouvoir règlementaire pour l’exercice de leur compétence. Cela permet aux collectivités locales de préciser au niveau local les règles générales fixées au niveau national. L’        acte règlementaire local peut être adopté soit par l’assemblée délibérante de l’assemblée territoriale, ex un conseil municipal. Dans ce cas-là on parle de délibération. Soit l’acte règlementaire local peut être adopté par l’exécutif de la collectivité territoriale, ex ; le maire. A côté de cela, certaines autorités locales représentant l’Etat peuvent adopter des actes règlementaires dans le champ géographique de leur compétence. C’est par exemple le cas des préfets.

 

  1. II)Les formes du pouvoir règlementaire
  1. A)Le pouvoir règlementaire autonome

Innovation de l’article 58, ce sont les règlements pris en dehors du domaine de l’article 34, mais tout acte règlementaire qui entrerait dans le champ de l’article 34 serait illégal en raison de l’incompétence du président ou du premier ministre car ils empiètent sur le domaine du législateur. En pratique il y a moins de règlement autonome que

 

  1. B)Le pouvoir règlementaire d’exécution de la loi

Il découle de l’article 21 de la Constitution, le premier ministre est chargé de l’exécution de la loi. Ce pouvoir est le pouvoir d’adopter des mesures générales et impersonnelles qui complètent une loi. Il permet d’apporter un complément normatif à la loi.

 

  1. C)Les pouvoirs règlementaires spéciaux

Ce sont deux jurisprudences à connaitre. Deux pouvoirs règlementaires d’origine jurisprudentiels.

  • Le pouvoir règlementaire du chef de service, arrêt de section du 7 février 1936 Jamart, le chef de service peut adopter un acte général et impersonnel pour organiser le fonctionnement du service qu’il dirige. C’est un pouvoir règlementaire interne à l’administration. Il vise à assurer la continuité et le bon fonctionnement du service administratif. Le chef peut adopter un acte règlementant le droit de grève, mais ce dans le respect de la législation nationale. Ça peut être soit le ministre, soit le préfet, soit le directeur d’un établissement public.
  • Arrêt Labonne du 8 août 1919, le pouvoir règlementaire en matière de police. Le chef de l’exécutif peut adopter tout acte général et impersonnel, au niveau national pour des motifs liés à la protection de l’ordre public. Au moment de l’arrêt c’était le président de la république, aujourd’hui c’est le premier ministre qui dispose de ce pouvoir.

 

III – L’encadrement du pouvoir règlementaire

Les titulaires du pouvoir règlementaire ne peuvent pas renoncer à exercer leur pouvoir règlementaire, le juge administratif vérifiera ainsi que les dispositions règlementaires déterminent avec une précision suffisante les modalités d’application de la loi. Le juge administratif censure l’incompétence négative du pouvoir règlementaire, c’est-à-dire la compétence du pouvoir règlementaire qui n’est pas exercée suffisamment. Conseil d’Etat 18 juillet 2008, Fédération de l’hospitalisation privée. Parfois, l’autorité qui dispose du pouvoir règlementaire est obligée de prendre un règlement, elle est contrainte d’adopter un acte, c’est en fait l’obligation d’exécuter la loi. Cette obligation est assortie d’une précision, le pouvoir règlementaire doit prendre l’acte règlementaire d’exécution dans un délai raisonnable. Le raisonnable est apprécié souverainement par le juge, il n’y a pas de délai préétabli. Le caractère raisonnable s’apprécie en fonction de la complexité de la loi, et des textes à adopter. Ensuite le conseil d’Etat est aussi prudent parce qu’il fixe un délai raisonnable, car il dit que cette obligation d’adopter des mesures règlementaires ne vaut que pour les mesures nécessaires à l’application de la loi. L’administration est forcée de donner pleins d’effets aux dispositions législatives.

L’autorité de police, est obligée de prendre des mesures y compris règlementaires en cas de péril grave résultant d’une situation particulièrement dangereuse pour l’ordre public. Dans ces cas-là, et notamment sur le fondement de la jurisprudence Labonne, on doit adopter un acte, il y a une obligation d’agir, Conseil d’Etat arrêt de section du 23 oct. 1959 Doublet. Autre exemple, l’obligation de transposer les directives en adoptant un règlement, cf. Arcelor.

Il faut aussi connaitre le fait que l’administration et le pouvoir règlementaire, est obligé d’abroger un acte règlementaire. Cette obligation vaut lorsque l’acte règlementaire est illégal. Dans ces cas-là, l’administration doit le supprimer, peu importe que l’acte règlementaire ait été illégal dès l’origine ou qu’il soit devenu illégal du fait d’un  changement de circonstances, de droit, ou de fait. On peut demander à l’administration d’abroger un acte illégal. Conseil d’Etat Ass. 3 février 1989, Compagnie Alitalia.

Parfois l’administration a  une obligation de modifier un acte règlementaire ; Villemain, arrêt Conseil d’Etat Ass. 28 juin 2002. En vertu de cette jurisprudence Villemain, lorsqu’il y a une loi nouvelle, qui crée une situation juridique nouvelle, l’administration a l’obligation de modifier les actes règlementaires applicables, afin de les rendre compatibles à cette situation juridique nouvelle. L’administration doit le faire dans un délai raisonnable.

 

IV – Le rang des sources règlementaires

Les règlements ont une valeur infra-législative, infra-constitutionnelle, et infra-conventionnelle. Ils sont donc tout en bas de la hiérarchie des normes, ils sont aussi en dessous des PGD.

  • S’est posé la question, historiquement, du rang des règlements autonomes. Le règlement autonome est un règlement pris hors du domaine de la loi, sur le fondement de l’article 37. Certains auteurs se sont demandé si ces règlements autonomes ne pouvaient pas avoir valeur législative. La réponse est non, ponctuellement ces règlements autonomes sont affranchis du respect de la loi, mais ce n’est pas parce qu’ils sont supérieurs à la loi, c’est uniquement parce qu’il n’existe pas de loi dans leur domaine d’adoption. Du coup ils ne sont pas subordonnés à la loi. Mais, si par hasard, une loi existe dans le domaine traité par le pouvoir règlementaire autonome, le pouvoir règlementaire sera subordonné, même s’il est autonome.
  • S’est également posé la question de la hiérarchie entre les règlements. Les actes règlementaires nationaux adoptés par le premier ministre ou par le président, s’imposent sur tous el actes règlementaires, locaux, ou même nationaux. Les actes règlementaires doivent respectés par les décisions individuelles de l’administration.

 

V – Les principes généraux du droit

Ces principes généraux du droit sont consacrés par le juge administratif, ils ne sont pas créés par n’importe quel juge administratif, seul le conseil d’Etat a l’autorité pour les consacrer. En tant que juridiction suprême de l’ordre administratif.

Pour certains auteurs les PGD ne sont pas créés par le juge, ils sont seulement révélés par lui, c’est-à-dire que les PGD préexistent dans l’ordre juridique et le juge ne fait que constater leur existence afin de les sanctionner. Les PGD ont joué un grand rôle dans la construction du droit administratif. Le juge administratif n’est pas que le censeur de la loi, il est aussi le créateur du droit.

 

Comment le juge administratif et le conseil d’Etat consacrent un PGD ?

            Le juge peut s’inspirer de la législation en vigueur pour dégager un PGD. Il s’inspire, mais n’applique pas le texte. Les lois sont une source d’inspiration des PGD. Quand plusieurs lois convergent vers un même sujet, le juge pourra déduire de cette convergence un PGD. Le juge peut ensuite s’inspirer de la Constitution. Cela lui permet de dégager sous forme de PGD des droits fondamentaux, les droits constitutionnellement garantis existent aussi sous forme de PGD. Le Conseil d‘Etat dégage un PGD qui est le respect du droit à la vie familiale normale, il s‘inspire du préambule de 1946. Le conseil d’Etat peut aussi s’inspirer des textes internationaux. Le Conseil d’Etat historiquement s’est inspiré du Code civil pour dégager un PGD, plutôt que de l’appliquer directement (ce qui serait contraire à l’autonomie du droit administratif) le juge préfère dégager un PGD. Conseil d’Etat Ass. 8 juillet 2005, société Alusuisse-Lonza-France ou Conseil d’Etat Ass. 1 avril 1988, Bereciartua-EcharriConseil d’Etat Ass. 26 oct. 1945, Aramu ; premier arrêt qui a consacré expressément un PGD.

 

Les PGD sont des valeurs de la société, que va dégager le juge. Il y a énormément de PGD, le principe de légalité est un PGD, 9 mars 1951, société des concerts du conservatoire. La liberté du commerce et de l’industrie est aussi un PGD. Le conseil d’Etat peut dégager des PGD en matière sociale, par exemple, le PGD d’interdiction du licenciement des femmes enceintes. L’un des terrains privilégiés des PGD c’est le domaine des relations administration – administrés. Un administré à toujours le droit de faire un recours pour excès de pouvoir. L’administré a aussi le droit de voir ses droits de la défense garantis par l’administration. L’interdiction pour l’administration de prendre des actes rétroactifs. Les PGD sont une création continue, par exemple, Conseil d’Etat sect. 4 oct. 2012, Monsieur C., dans  cet arrêt le Conseil d’Etat a dégagé les PGD du droit des concours. Arrêt d’assemblée du 3 juillet 1996, Koné ; interdiction des extraditions à motif politique.

 

Ces PGD ont valeur supra-décrétale et infra-législative. La loi peut déroger aux PGD. Le requérant utilise un PGD pour faire annuler un acte administratif uniquement. Le PGD ne peut servir qu’à contester un acte administratif.

 

Titre II

Le contrôle de la légalité administrative

La loi du 16 – 24 aout 1790, complétée par le décret (qui a valeur législative), du 16 fructidor an 3 ont eu pour effet d’exclure tout contrôle des actes de l’administration par des juges ordinaires. En conséquence de ces deux textes l’administration est devenue son propre juge. Le conseil d’Etat existait déjà, mais il n’avait qu’un rôle consultatif, il assistait le ministre dans l’exercice de la justice administrative. C’est ce qu’on appelait la théorie du ministre juge. Dans les faits, le ministre suivait systématiquement l’avis du Conseil d’Etat, donc cette première période est délicate parce que l’administration est juge d’elle-même. Il y avait même un doute sur l’existence d’une justice administrative. Mais, la loi du 24 mai 1872 fait du Conseil d’Etat une véritable juridiction, parce qu’il rend des décisions au nom du peuple français. C’est donc la fin de la justice retenue, on passe à la justice déléguée. Le conseil d’Etat se voit confier la mission de régler les conflits administratifs.

Cette loi ne met pas fin à la théorie du ministre juge, parce qu’on considère en 1872 que le Conseil d’Etat n’a qu’une compétence d’appel, avant de le saisir, il faut saisir le ministre. Il reste compétent en premier ressort pour juger l’administration. Cette situation prend fin par l’arrêt Cadot du 13 décembre 1889, désormais il n’y a plus à saisir le ministre, le conseil d‘Etat devient le juge de droit commun en matière administrative. A partir de cette date-là c’est un véritable contrôle juridictionnel qui se développe, avec le conseil d’Etat comme juge administratif, le recours pour excès de pouvoir devient essentiel. Dans le contrôle de la légalité administratif c’est le contrôle juridictionnel du juge administratif qui est fondamental. Cependant, on peut noter un relatif développement du contrôle non juridictionnel. C’est-à-dire un contrôle de légalité fait par l’administration elle-même. Ce contrôle se développe mais reste beaucoup moins important que le contrôle juridictionnel.

 

Chapitre 1er – La nature duale du contrôle de la légalité administrative

 

Section 1. Le contrôle non-juridictionnel

On assiste à un développement contemporain du contrôle non-juridictionnel, ce contrôle reste néanmoins temporaire, et sa grande spécificité est d’être très varié dans ses formes et procédures.

 

  1. I)L’importance relative des contrôles non juridictionnels

Ce sont les contrôles faits par une autorité administrative et non par un juge. Ce mode de contrôle s’explique pour deux raisons principales :

  • L’engorgement de la juridiction administrative ; pour assurer la bonne administration de la justice il faut juger vite. Or l’augmentation du nombre d’affaires devant la juridiction administrative, fait que les procédures se sont allongées, le délai de jugement est de plus en plus long. On a donc essayé de trouver des modes alternatifs de règlement des litiges pour décharger le juge. Cela est d’autant plus important que l’Etat peut se faire condamner si la décision n’a pas été rendue dans un délai raisonnable.
  • Certains considèrent que les procédures juridictionnelles sont trop formalistes, et qu’elles manquent de souplesse. Ce qui est un facteur de risque pour le justiciable. Ensuite la procédure juridictionnelle conduit en pratique l’administration à raidir sa position. Il y a une logique de confrontation entre l’administration et l’administré qui sera arbitrée par un juge. Il n’y a pas de recherche de compromis entre l’administré et l’administration, l’idée c’est que le contrôle juridictionnel est trop conflictuel pour permettre une bonne relation entre l’administration et l’administré.

Dans le cadre du contrôle juridictionnel, le juge va appliquer purement et simplement le droit, alors que dans le contrôle non juridictionnel en revanche, on pourrait envisager de tempérer la légalité par de l’équité. L’administration ferait elle-même œuvre d’équité lorsque l’administré la saisit de son problème.

 

  1. II)La variété des contrôles non juridictionnels

Il existe un contrôle parlementaire de l’administration, au titre de l’article 24 de la Constitution, le parlement contrôle le gouvernement et évalue les politiques publiques. L’article 48 de la Constitution dispose qu’une semaine sur quatre de l’activité parlementaire est réservée à ce contrôle. Le contrôle de l’administration, et particulièrement le respect de la légalité par l’administration est fait par le parlement C’est un contrôle plus politique que juridique, mais il a trait aux relations gouvernement – parlement. C’est plutôt un contrôle qui relève du droit constitutionnel.

 

  1. A)Les recours administratifs
  1. La variété des recours administratifs

Ils sont de deux types ;

  • Le recours gracieux ; c’est un recours engagé devant l’autorité administrative qui a pris la décision contestée. L’administré demande à l’administration de reconsidérer sa décision. C’est-à-dire soit de la faire disparaitre, soit de la modifier. L’idée c’est que l’administré puisse informer l’administration des problèmes posés par son acte, en lui demandant de reconsidérer cet acte. C’est gracieux parce que c’est devant l’autorité qui a pris l’acte.
  • Le recours hiérarchique ; c’est un recours engagé devant le supérieur hiérarchique de l’autorité qui a pris la décision contestée. Par exemple, le préfet a pris une décision qui ne plait pas, on va demander au ministre de transformer sa décision. Certaines autorités, n’ont pas de supérieurs hiérarchiques (Président, 1er ministre, pas de recours hiérarchique possible), l’autorité hiérarchique peut modifier ou retirer la décision de son subordonné. Elle peut le faire pour des raisons juridiques ou d’opportunité.

 

  1. Le régime juridique de ces recours

Le recours gracieux, comme le recours hiérarchique, sont soumis à des règles communes. D’abord, le point commun c’est que ces recours existent toujours. C’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire qu’une loi prévoie ces recours pour qu’on puisse les exercer. Conseil d’Etat 20 avril 1956, école professionnelle de dessin. Les recours administratifs ont pour effet de proroger le délai de recours contentieux, cela veut dire que l’exercice d’un recours administratif va avoir pour effet d’arrêter et de conserver le délai de recours juridictionnel. Quand on fait un recours administratif, le recours juridictionnel de deux mis est arrêté et il recommencer à courir intégralement à partir de la décision de l’autorité administrative saisie. Le recours administratif ne doit pas voir pour effet de limiter le recours juridictionnel. Il doit donc protéger le délai de recours juridictionnel.

Il y a des règles très variables qui dépendent du type de recours administratif en cause. Parfois els recours sont facultatifs, parfois les recours sont obligatoires. Par exemple, le décret du 10 mai 2012 qui généralise à titre expérimental le recours administratif obligatoire pour les agents civils de l’Etat. Pour ces agents, s’ils souhaitent contester un acte administratif qui est relatif à la situation, ils doivent nécessairement engager un recours administratif préalable. S’il ne le fait pas, il ne pourra pas saisir le juge administratif ensuite.

La majorité des recours administratifs sont facultatifs, mais exceptionnellement le recours est obligatoire.

 

  1. B)Le recours devant les autorités indépendantes

Le défenseur des droits, est une autorité qui a regroupé et fusionné différentes autorités administratives indépendantes.

–          La HALDE

–          Le médiateur

–          Le défenseur des enfants

–          La commission nationale de déontologie de la sécurité

 

Ce défenseur des droits en vertu de l’article 71-1 de la Constitution, veille au respect des droits et libertés des administrés par les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, ainsi que par tout organisme investi d’une mission de service public. Dans le cadre de sa mission de garantie des droits et libertés il va veiller au respect de la légalité par l’administration.

 

Loi organique du 29 mars 2011, qui a pour but d’assurer l’indépendance du défenseur des droits. Cette indépendance est garantie à l’égard de l’administration elle-même parce que le défenseur des droits est inamovible et parce qu’il ne reçoit aucune instruction dans l’exercice de ses fonctions.

 

Ce défenseur des droits peut être saisi par tout citoyen qui s’estime lésé dans l’exercice de ses droits et libertés. Il peut être saisi directement par un administré. Il a un pouvoir d’enquête et peut demander toute explication à l’administration mise en cause. Il peut entendre toute personne utile à la résolution du problème dont il est saisi. Le problème, c’est que le défenseur des droits ne prend que des recommandations, c’est la limite de son intervention, parce que ces recommandations n’ont pas de portée contraignante à l’égard de l’administration mis en cause, elle doit seulement informer le défenseur des droits dans le délai fixé par le défenseur, des suites qu’elle a donné à la réclamation de l’administré, et des suites données à la recommandation du défenseur. Si elle ne réagit pas à la recommandation, le défenseur des droits va rédiger un rapport public, il n’a pas d’autorité, seulement les dénoncer aux yeux de tous.

Des recours en progrès mais largement inefficaces, car souvent ils sont portés devant l’autorité qui a fauté, et recours inefficace car aussi ils sont portés vers des autorités indépendantes sans pouvoir contraignant. C’est donc le recours juridictionnel le plus important.

 

Section 2. Le contrôle juridictionnel

Le juge judiciaire peut aussi connaitre des agissements de l’administration. Le conseil constitutionnel contrôle la légalité des actes de l’administration, il contrôle les élections présidentielles, les actes règlementaires d’organisation du scrutin. La CEDH parfois contrôle les actions de l’administration et les condamne

 

  1. I)L’histoire de la juridiction administrative

–          Tout part de la loi des 16 – 24 aout 1790, complétée par le décret du 16 fructidor an 3.

–          L’article 52 de la Constitution du 22 Frimaire an 8, qui crée le conseil d’Etat (13 décembre 1789).

–          Loi du 28 pluviôse an 8 ; cette loi crée les conseils de préfecture. Ce sont les ancêtres des tribunaux administratifs, ils avaient pour mission d’assister le préfet dans la résolution de litiges dont il était saisit.

–          Loi du 24 mai 1872 ; fait du conseil d’Etat une véritable juridiction.

–          L’arrêt Cadot de 1889.

–          Décret du 30 septembre et 28 novembre 1953, les décrets qui créent les tribunaux administratifs. Jusqu’en 1953, l’ordre juridictionnel administratif se résumait au conseil d’Etat. Il y a désormais des tribunaux et le conseil d’Etat. Les tribunaux administratifs seront les juges de droit commun, et le conseil d’Etat la juridiction d’appel ou cassation.

–          La décision du Conseil constitutionnel, du 22 juillet 1980, il consacre un PFRLR qui est celui de l’indépendance de la juridiction administrative.

–          La décision du 23 janvier 1987 du Conseil constitutionnel, dite « conseil de la concurrence », elle consacre constitutionnellement une partie de la compétence du juge administratif.

–          La loi du 31 décembre 1987, qui crée les Cours administratives d’appel. Qui seront les juges d’appel du contentieux administratif.

–          La loi du 8 février 1995 qui permet au juge administratif d’adresser des injonctions à l’administration, éventuellement sous peine d’astreinte.

–          La loi du 30 juin 2000, qui crée les procédures d’urgence, les référés en matière administrative.

–          La décision du Conseil constitutionnel du 3 décembre 2009, au considérant 3, dit que le Conseil d’Etat est placé au sommet d’un ordre de juridictions reconnu par la constitution. C’est la consécration constitutionnelle de l’existence de l’ordre juridictionnel administratif.

On peut se demander aujourd’hui si la juridiction administrative n’est pas victime de son succès, en 2011, 182 916 affaires ont été enregistrées par les tribunaux administratifs, sur dix ans on constate une hausse 48% des affaires enregistres devant les juridictions administratives.

D’une part parce qu’il y a une évolution sociologique ; les décisions des autorités administratives sont remises en question, et d’autre part parce qu’on a des contentieux de masse. C’est des affaires en nombre très important. Par exemple, le contentieux du droit au logement, ou des reconduites à la frontière. La juridiction administrative va évoluer, dans ses méthodes, par exemple avec le développement du juge unique. En pratique 60% des affaires jugées par le tribunal administratif est jugé par un juge seul. Ce sont en général les litiges les moins importants, dix cas sont jugés à juge unique (R. 182-13 du Code de justice administrative). L’Etat fixe avec les juridictions des contrats et objectifs pour fixer le nombre d’affaires à juger.

Il y a une logique de productivité et de management au sein de la juridiction administrative, la loi fixe un triple objectif :

  • Réduire les délais
  • Maintenir la qualité
  • Améliorer l’efficience des juridictions

Au début des années 200 1/3 des affaires attendaient depuis plus de deux ans, aujourd’hui c’est 14%, les durées moyennes de jugement sont de 10 mois et 27 jours devant les Tribunaux administratifs, 11 mis et 16 jours pour les CAA, et le conseil d’Etat 8 mois 7 jours.

 

  1. II)L’organisation de la juridiction administrative

 

  1. A)Le conseil d’Etat

Il est historiquement présidé par le premier ministre, mais en pratique celui-ci ne joue aucun rôle, et c’est le vice-président du conseil d’Etat qui a exercé la fonction de président du conseil d’Etat dans les faits. En 2000, la loi a consacré cette situation « La présidence du conseil d’Etat est assurée par le vice-président. »

La juridiction suprême chargée de juger l’administration était présidée par le chef de l’administration, qui supprimait cette neutralité. A présent le Conseil d‘Etat est expressément indépendant.

 

  1. a)L’organisation du conseil d’Etat

La spécificité du conseil d’Etat est liée à la dualité de ses fonctions. Le conseil d’Etat n’est pas qu’une juridiction administrative, il est aussi comme son nom l’indique un conseiller juridique du gouvernement. Il est divisé en sept sections. Parmi lesquelles, six ont une fonction administrative

  • La section de l’administration conseille le gouvernement sur des questions d’administrations
  • La section des finances, qui conseille sur les finances publiques, la fiscalité
  • La section de l’intérieur, compétente pour aider le gouvernement dans tous ce qui concerne les individus, etc.
  • La section sociale compétente en matière d’emploi, etc.
  • La section du rapport et des études, qui a un rôle d’analyse.
  • La section des travaux publics, compétente en matière de contrats administratifs.

 

Ces sections conseillent le gouvernement, elles sont ainsi consultées sur tous les projets de lois, sur tous les projets d’ordonnances, et enfin sur certains décrets, qui sont les plus importants. La section concernée rend un avis sur le projet de texte, avis qui est réservé au gouvernement, il n’est pas public. Par ailleurs, le gouvernement peut saisir une section sur n’importe qu’elle question de droit. Le conseil d’Etat joue maintenant un rôle de conseil auprès du Parlement, depuis la révision constitutionnelle de 2008. En effet depuis cette date, le conseil d’Etat peut être consulté sur toute proposition de loi, et le conseil d’Etat est saisi par le président de l’assemblée où la proposition de loi a été déposée.

 

A côté de ça, il y a la section du contentieux qui exerce la fonction juridictionnelle, elle-même divisée en 10 sous-sections spécialisées. Cette section du contentieux est celle qui rend les décisions en matière de justice administrative. Cette dualité de fonction pose problème du point de vue de l’impartialité, en effet le conseil d’Etat peut connaitre deux fois le même texte. Il peut en connaitre quand il est consulté pour l’adoption, et il peut le connaitre quand il est saisi contre le texte en question.

 

D’un point de vue contentieux le conseil d’Etat joue un rôle très important, on dit de lui qu’il assure une fonction de régulation de l’ordre juridictionnel administratif. Cet ordre juridictionnel administratif est composé de plusieurs juridictions. Les juridictions de premier ressort, les juridictions d’affaires, les juridictions spécialisées. Cet ordre juridictionnel administratif est complexe du fait du nombre de juridictions qui interviennent. Le rôle du conseil d’Etat en tant que juridiction suprême c’est d’assurer la cohérence, l’unité de l’ordre juridictionnel administratif, et cela de deux points de vue :

  • Le conseil d’Etat doit assurer la cohérence de l’ordre juridictionnel administratif, du point de vue de la compétence des juridictions. Il se pose des questions de répartition des compétences entre juridictions administratives, et c’est au conseil d’Etat de trancher en tant que juridiction suprême. Dans le cadre de ce pouvoir de régulation le conseil d’Etat va être compétent, lorsqu’aucune juridiction administrative n’est compétente, il a ainsi une compétence subsidiaire.
  • Le premier cas c’est quand deux juridictions administratives se sont déclarées incompétentes.
  • Parfois une juridiction administrative ne peut pas trancher l’affaire pour laquelle elle est compétente. Sec. 17 oct. 2003, Dugoin. Litige qui devait être tranché par la cour des comptes, le problème c’est que quelques mois avant de trancher le litige, la cour des comptes avait rendu son rapport annuel dans lequel elle avait directement mis en cause la personne qu’elle devait juger en tant que juridiction. Si elle avait jugé l’affaire, la décision de la cour de comptes aurait violé le principe d’impartialité des juridictions. Le conseil d’Etat a jugé que dans cette hypothèse-là, l’affaire devait lui être transmise.
  • Le conseil d’Etat doit assurer la cohérence du point de vue du fond du droit, c’est-à-dire qu’il veille à l’unité de la jurisprudence administrative. D’abord par son rôle de juge de cassation, et il joue aussi ce rôle de gardien de la jurisprudence, par le fait qu’il peut être saisi par une juridiction administrative pour donner un avis consultatif. Si une juridiction administrative est confrontée à une difficulté juridique sérieuse et une difficulté qui peut se poser dans de nombreux litiges, alors elle peut demander au Conseil d’Etat un avis sur cette question. Il rend un avis non obligatoire mais qui dans les faits est suivi par les juridictions.

 

  1. b)La composition du conseil d’Etat

Le conseil d’Etat est composé de 300 membres. Ils sont recrutés à la sortie de l’ENA, mais ils sont aussi recrutés au tour extérieur, c’est-à-dire nommé par le gouvernement, et ce choix est complètement discrétionnaire. Il y a simplement une condition d’avis préalable du vice-président du conseil d’Etat. Il n’y a aucune condition de compétence, d’expérience pour être nommé par le gouvernement. Arrêt Casanova, 25 février 2011. M. Casanova a contesté la nomination d’Arnaud Klarsfeld au conseil d’Etat. Le recours a été rejeté pour défaut d’intérêt.

 

  1. B)Les TA et CAA

Les TA date de 1953, les CAA datent de 1996.

 

  1. L’organisation des tribunaux et des cours

Il existe 42 TA, dont 11 en outre-mer. Ils ont un rôle essentiellement juridictionnel à quelques exceptions près. Ils peuvent aussi avoir un rôle consultatif, lorsque le préfet de département demande un avis, et ils ont aussi un rôle de conciliation. C’est-à-dire qu’ils agissent comme conciliateur entre les parties pour que celles-ci puissent atteindre une solution à leur conflit de manière négociée. Les TA sont organisés en chambres qui sont spécialisées selon la taille du tribunal. Ces chambres rendent des décisions de première instance, avec soit un juge unique, soit une formation de jugement classique de trois juges. Exceptionnellement, il y a des formations plénières.

Pour les cours, c’est la même chose, une compétence consultative extrêmement résiduelle lorsqu’elles sont saisies pour avis par le préfet de région, et à côté de ça une fonction juridictionnelle essentielle qui est une compétence d’appel. Les cours sont organisées en chambres, et les décisions sont rendues à 3 juges ou plus pour les décisions importantes.

 

  1. La composition

Il y a plus de 1000 magistrats recrutés à la sortie de l’ENA, ou à la sortie d’un concours complémentaire, ou par un concours extérieur. Ces nominations au concours extérieures sont encadrées, il y a des conditions de nomination assez stricte. Pour le coup c’est paradoxal, il est plus difficile de nommer quelqu’un ici, que dans le conseil d‘Etat.

La carrière du juge administratif est gérée par le conseil supérieur des TA et des CAA, présidé par le vice-président du conseil d’Etat.

 

  1. C)Les juridictions administratives spécialisées

Il en existe une cinquantaine, ce sont des juridictions administratives qui interviennent dans des contentieux spécifiques et assez pointus. Par exemple, la cour nationale du droit d’asile est compétente pour le contentieux du droit d’asile. Il existe aussi la commission centrale d’aide sociale, compétente en matière d’aide sociale, et la juridiction compétente en matière universitaire. Ces juridictions sont prévues à l’article L-712-4 du Code de l’éducation, en premier ressort, c’est le conseil d’administration de l’université qui est compétent en tant que juridiction. Lorsqu’il agit en tant que juridiction, il se constitue en section disciplinaire composée d’enseignants et d’étudiants et présidé par un de ses membres, et elle rend des décisions publiques et motivées. La contestation en appel se fait devant le conseil national de l’enseignement supérieur qui est présidé par le ministre de l’enseignement supérieur.

 

Parfois il est difficile d’identifier les juridictions administratives spécialisées, souvent parce que la loi ne qualifie pas toujours. Arrêt Bayo 12 déc. 1953. C’est la jurisprudence qui fixe les critères d’une juridiction spécialisée.

  • D’abord un critère organique, c’est-à-dire comment est organisé l’instance en question
  • Puis un critère matériel, c’est-à-dire comment fonctionne l’institution en cause.

 

III) La compétence de la juridiction administrative

Le juge administratif est-il compétent ?

Quel juge administratif est compétent ?

 

  1. A)La répartition des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires
  1. La détermination du champ de compétence du juge administratif

La question de la répartition de compétence entre le juge judiciaire et le juge administratif est compliquée pour deux raisons. D’abord il n’existe pas de critère unique pour déterminer la compétence du juge administratif par rapport à celle du juge judiciaire. Il existe au contraire trois critères qui vont être combinés par le juge :

–          Le critère matériel ; la mission en cause dans le litige, service public ? & quel type de service public ?

–          Le critère formel ; l’existence de prérogatives de puissance publique.

–          Le critère organique ; la personne publique est-elle en cause au litige ?

 

Les limites du champ de compétence du juge administratif et du juge judiciaire sont fixées par les décisions de trois institutions différentes. Le conseil d’Etat, la Cour de cassation, et le tribunal des conflits. Si les jurisprudences sont convergentes, les décisions ponctuelles ne sont pas toujours concordantes. Il peut exister des divergences d’appréciations, parce qu’elles interprètent les règles de manière différente. De façon générale, les frontières délimitant les compétences juridictionnelles sont mouvantes et dépendent du choix du législateur et de l’évolution de la jurisprudence.

 

A travers la question de la compétence des juridictions, on touche au défaut primordial du dualisme juridictionnel, la complexité de la répartition des compétences nuit au justiciable. Le justiciable est confronté à des règles compliquées et évolutives, donc il ne peut pas toujours anticiper de façon certaine la juridiction qu’il doit saisir. S’il saisit le juge judiciaire à la place du juge administratif, son recours sera rejeté comme irrecevable. Le juge judiciaire n’a pas d’obligation à transmettre le dossier à la juridiction administrative, et inversement.

 

  1. a)La répartition des compétences prévue par la loi

Parfois le législateur dit quel juge est compétent, il s’agit d’une compétence exclusive du législateur. Le pouvoir règlementaire ne peut pas opérer la répartition des compétences en disant quel juge il faut saisir. CE. Ass. 30 mars 1962, association nationale de la meunerie. Le législateur peut prévoir une compétence en faveur du judiciaire. Loi du 31 décembre 1957, le juge judiciaire est compétent pour toutes les actions en responsabilité du fait d’accident de la circulation causé par un véhicule. Le juge judiciaire est compétent pour tous les litiges en matière de sécurité sociale, loi du 4 octobre 1946. Le juge judiciaire est compétent en matière d’imposition indirecte, loi du 5 ventôse an 12. Enfin, le juge judiciaire est compétent, pour les dommages subis par les élèves de l’enseignement public, loi du 5 avril 1937.

 

Inversement, dans d’autres cas, le juge administratif est privilégié, par exemple, l’article L-2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, le juge administratif est compétent pour tous les litiges relatifs aux autorisations et aux  contrats d’autorisation d’utilisation du domaine public.

 

Le problème qui s’est posé, est de savoir si le législateur est complètement libre d’attribuer un contentieux au juge administratif ou au juge judiciaire. La réponse est non, la Constitution encadre le choix du législateur. C’est la décision conseil de la concurrence, 1996 du conseil constitutionnel. Cette décision permet d’identifier un noyau-dur de la compétence de la juridiction administrative. Ce sont des compétences constitutionnellement garanties du juge administratif. Ni la loi, ni la jurisprudence ne peuvent y porter atteinte. Cette compétence, constitutionnellement garantie du juge administratif, dépend de deux critères :

  • La nature de l’acte attaqué ; pour relever de la compétence du juge administrative, il faut que l’acte soit pris par une personne publique. Les actes pris par les personnes privées ne relèvent pas constitutionnellement du juge administratif. Il faut que l’acte attaqué, pris par une personne publique, se rattache à la fonction exécutive. Donc les actes qui se rattachent aux fonctions juridictionnelles ou parlementaires ne relèvent pas constitutionnellement de la compétence du juge administratif. Les actes de gestion de l’administration, c’est-à-dire soumis au droit privé, ne relèvent pas de la compétence constitutionnelle du juge administratif.
  • L’objet du recours ; seule l’annulation et la réformation des décisions relèvent de la compétence du juge administratif en vertu de la constitution. C’est-à-dire que les questions d’interprétation, d’appréciation de validité, ou encore d’indemnisation ne relèvent pas de la compétence juridictionnelle du juge administratif. Cela permet au législateur de dire que le juge pénal est compétent pour l’appréciation de validité des actes administratifs.

 

Certaines matières sont dévolues par nature au juge judiciaire, pour ces matières, le législateur peut faire ce qu’il veut. on considère traditionnellement que le juge judiciaire est le gardien de la liberté individuelle, de même on considère traditionnellement que le juge judiciaire est le gardien de la propriété privée. L’article 66 de la Constitution rappelle à propos de la liberté individuelle. Dans un arrêt du 18 décembre 1947 Hilaire, le tribunal des conflits avait jugé que la sauvegarde de la liberté individuelle et la protection de la propriété privée rentre essentiellement dans les attributions de l’autorité judiciaire. Par exemple, cela explique que le juge judiciaire est compétent pour contrôler les actes d’hospitalisation forcés décidés par le préfet. Autre exemple, la décision administrative de placement et de maintien d’un étranger en rétention, est attaquable devant le juge administratif.

 

Le législateur peut par exception, donner compétence au juge judiciaire dans le but d’assurer une bonne administration de la justice en unifiant les règles de compétence au profit du judiciaire. Le législateur peut créer des blocs de compétence, par exemple, le législateur a pu confier au juge judiciaire le contentieux des décisions du conseil de la concurrence. Les pratiques concurrentielles peuvent faire l’objet de poursuites pénales qui relèvent de la compétence du juge judiciaire. Le juge judiciaire était déjà compétent pour une partie du contentieux de la concurrence. Le législateur a choisi de regrouper dans les mains du judiciaire.

 

Le législateur peut déroger à la compétence constitutionnelle du juge administratif dans l’intérêt de la bonne administration de la justice afin d’unifier les règles de compétences au profit du juge.

 

  1. b)La répartition des compétences fixées par la jurisprudence

Dès lors qu’il n’y a pas de répartition fixée par la loi, c’est le tribunal des conflits qui s’en charge. Il existe des solutions jurisprudentielles précises fixant la répartition des compétences. Il existe deux théories jurisprudentielles. Elles découlent du fait qu’il existe des matières relevant naturellement de la compétence du juge judiciaire (propriété privée, liberté individuelle). Première théorie jurisprudentielle à connaitre, théorie de la voie de fait. Elle existe depuis le 19e siècle, exemple, arrêt Lacombe. Cette théorie est liée au principe selon lequel le juge judiciaire est gardien de la liberté individuelle. Il y a voie de fait lorsque l’administration porte une atteinte grossièrement irrégulière à une liberté fondamentale, ou au droit de propriété. Il y a donc deux conditions, une action grossièrement illégale de l’administration, arrêt de principe : ass. 18 nov. 1949 Carlier, il y a voie de fait lorsque la mesure décidée par l’administration «  est insusceptible d’être rattachée à l’exercice d’un pouvoir appartenant à l’administration. ». Tribunal des conflits 4 juillet 1934, Curé de Réalmont contre maire de Réalmont, en l’espèce le maire avait décidé d’enlever la grille en fer forgé, pour installer un urinoir contre l’église. 4 nov. 1991, Beladjimi, un véhicule privé mal garé pendant sept jour, le maire l’a envoyé à la casse au lieu de l’envoyer à la fourrière.

 

On constate une tendance des juridictions judiciaires, et surtout des juridictions inférieures, à apprécier très souplement cette condition. Il y a une tendance à apprécier de manière large la théorie de la voie de faits, pour élargir sa compétence. Le tribunal des conflits à une vision plus stricte de la voie de faits.

 

La deuxième condition est l’atteinte à une liberté fondamentale, ou propriété privée. Ça peut être n’importe quelle liberté publique. Quand il n’y a pas de liberté fondamentale, il n’y a pas de voie de fait. Il n’y a pas de voie de fait en matière de chasse par exemple, parce qu’il n’y a pas de liberté fondamentale. Lorsqu’il y a voie de fait, le juge judiciaire est compétent pour constater la voie de fait même quand c’est un acte administratif, et il est compétent pour indemniser la voie de fait. Le juge administratif quant à lui peut constater une voie de fait, mais il ne peut pas l’indemniser.

—  La théorie de l’emprise, arrêt de principe, 17 mars 1949, tribunal des conflits : le juge judiciaire est gardien de la propriété privée. Cette théorie est remplie quand deux conditions sont réunies :

o   Atteinte grave à un droit réel immobilier, dont le droit de propriété. C’est-à-dire qu’il faut une dépossession, momentanée ou permanente, de la personne privée. Une simple gène, dans la jouissance dans son droit de propriété, ne constitue pas une atteinte grave, et donc ne constitue pas une emprise.

o   Il faut que cette atteinte grave soit irrégulière, c’est-à-dire illégale, l’administration a  commis une illégalité. Si il y a une atteinte grave à la propriété, alors le juge judiciaire va être compétent pour indemniser la personne privée propriétaire. En revanche seul le juge administratif est compétent pour apprécier l’emprise.

Il est parfois difficile de distinguer l’emprise de la voie de fait. De façon générale on peut considérer que toutes les voies de faits sont aussi des emprises, en revanche l’inverse n’est pas vrai. Toutes les emprises  ne sont pas des voies de faits, tout dépend de la gravité l’irrégularité faite par l’administration. Si l’atteinte grave est grossièrement irrégulière, alors l’emprise est une voie de fait, mais si elle n’est pas irrégulière alors il n’y a pas de voie de fait.

Ces deux théories sont proches, mais les effets ne sont pas les mêmes. Le juge judiciaire peut constater la voie de fait, mais ne peut pas constater l’emprise.

 

La jurisprudence combine trois critères :

  • Le critère organique, en principe le juge administratif est compétent lorsque l’administration est partie au litige. En principe lorsqu’on est face à une personne publique, on sera en pratique face à une juridiction administrative.
  • Le critère formel, lorsque l’on est en présence de prérogatives de puissance publique, le juge administratif est en principe compétent. Peu important que ces prérogatives de puissance publique soient mises en œuvre par une personne publique ou privée. quand c’est une personne publique qui n’agit pas dans les prérogatives de puissance publique le juge judiciaire sera en principe compétent.
  • Le critère matériel, en principe le juge administratif est compétent lorsqu’est en cause une activité d’intérêt général donc de service public. Cependant il existe deux types de service public, les services publics administratif pour lesquels le juge administratif est exclusivement compétent et il existe des services publics industriels et commerciaux pour lesquels le juge judiciaire sera en principe compétent.

 

La combinaison des trois critères, est complexe et variable selon les domaines en cause. Les critères sont exprimés soit cumulativement, soit alternativement.

 

En matière de service public le critère formel est essentiel c’est-à-dire que le juge administratif est compétent lorsque sont en cause des prérogatives de puissance publique. Peu importe que ce soit une personne publique ou une personne privée ou que ce soit un service public administratif ou un spic. Dès lors qu’il n’y a plus de prérogatives de puissance publique, la nature du service public en cause est essentielle. Si c’est un spa c’est le juge administrative, si c’est un spic c’est le juge judiciaire. Le critère organique intervient, si vous êtes dans le cadre d’un service public administratif géré par une personne privée en l’absence de prérogatives de puissance publique, le juge judiciaire est compétent.

 

Si on est face à une personne publique gérant une activité administrative, en pratique c’est quasiment toujours le juge administratif qui sera compétent, de la même façon le juge administratif sera dans la quasi-totalité des cas, compétent lorsque l’on est face à une personne privée exerçant des prérogatives de puissance publique. Si l’on n’est pas dans ces deux cas de figure alors ce sera sûrement le juge judiciaire.

 

  1. c) Le problème des questions accessoires au litige principal

Le problème des questions accessoires est une des difficultés principales posées par le dualisme juridictionnel, l’hypothèse de la question accessoire est la suivante : un juge administratif ou judiciaire est saisi d’un litige pour lequel il est compétent. Simplement pour résoudre ce litige il doit incidemment résoudre une question qui est accessoire à la résolution du litige et cette question relève de la compétence de l’autre juge de l’autre ordre juridictionnel. C’est par exemple le cas lorsque le juge administratif est saisi d’un recours pour excès de pouvoir et qu’il doit pour résoudre le problème répondre à la question de la validité d’un titre de propriété privée. Ou inversement, le juge judiciaire est saisi d’un litige au cours duquel est mise en cause la légalité d’un acte administratif. Pour résoudre ce problème, il existe le mécanisme de la question préjudicielle c’est-à-dire que le juge qui est saisi sursoit à statuer pendant que la question est renvoyée au juge de l’autre ordre juridictionnel qui répondra à la question et renverra la réponse au juge initial, qui pourra alors prendre sa décision.

La question préjudicielle permet un respect de la répartition de compétence mais est un facteur de rallongement de la procédure juridictionnelle. La procédure peut atteindre un délai déraisonnable.

—  Premier cas de figure ; La question peut être posée par le juge judiciaire au juge administratif. Le principe est que le juge administratif est seul compétent en principe pour statuer par voie de question préjudicielle sur la légalité des décisions prises par l’administration dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, et cela lorsque la question est soulevée à l’occasion d’un litige relevant de la compétence du juge judiciaire. Il existe des exceptions, d’abord pour le juge pénal, ensuite pour le juge civil :

–  C’est l’article L-111-5 du code pénal, « Le juge pénal est compétent pour interpréter et pour apprécier la légalité d’un acte administratif lorsque cet examen est nécessaire à la solution du litige pénal pour lequel il est saisi ». le juge pénal peut lui-même interpréter et apprécier la validité des actes administratifs. Ce juge pénal est compétent pour les actes individuels et pour les actes règlementaires.

–  Pour le juge civil c’est différent, l’état du droit est régit par deux décisions du tribunal des conflits, décision septfonds du 16 juin 1923, en vertu de cette jurisprudence du tribunal des conflits, le juge civil peut interpréter les actes réglementaires, mais ne peut pas interpréter les actes individuels. Dans ce cas, il doit poser la question au juge administratif. Le juge civil ne peut jamais apprécier la légalité d’un acte administratif individuel ou réglementaire. Jurisprudence modifiée par le tribunal des confits, le 17 octobre 2011, SCEA du Chéneau, cet arrêt précise la jurisprudence septfonds de deux façons, d’abord le tribunal des conflits dit que le juge civil n’est plus obligé de poser une question préjudicielle lorsqu’il apparait manifestement au vu d’une jurisprudence établie que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal. Cela veut dire que le juge judiciaire n’a plus à saisir le juge administratif d’une question préjudicielle lorsque la jurisprudence administrative est suffisamment claire et sûre pour que le juge civil l’applique directement. Le tribunal des conflits concilie la jurisprudence septfonds avec les exigences de la bonne administration de la justice, et les exigences d’un jugement dans un délai raisonnable. Ensuite la jurisprudence du Chéneau ajoute une deuxième précision, le juge civil peut apprécier la validité d’un acte administratif lorsque cette validité est contestée par rapport au droit de l’UE. Le juge judiciaire peut apprécier la légalité de n’importe quel acte administratif par rapport au droit de l’UE.

—  Deuxième cas de figure ; lorsque le juge administratif doit poser une question préjudicielle au juge judiciaire. De façon générale le juge administratif en pose dans trois cas de figures :

–  Il y a un problème d’interprétation ou de validité d’un acte de droit privé.

–  Un problème juridique lié à l’Etat ou à la capacité d’une personne. Ex ; savoir si une personne est de nationalité française ou non.

–  Lorsqu’il pose un problème de propriété privée.

La jurisprudence du Chéneau joue aussi en faveur du juge administratif, lorsqu’est en cause la validité d’un acte de droit privé par rapport à l’UE le juge administratif peut y répondre sans poser de question préjudicielle au juge judiciaire. Conseil d’Etat Sect. 23 mars 2012, fédération Sud Santé, par exemple, si est contestée la validité d’une convention collective (acte privé) par rapport au droit de l’UE, le juge administratif peut y répondre en saisissant la CJCE.

 

2) Le règlement des conflits de compétence : le rôle du tribunal des conflits

 Le tribunal des conflits a pour mission de trancher les conflits de compétence qui apparaissent entre juridiction administrative et juridiction judiciaire. C’est en conséquence un arbitre entre les deux juges. Il a aussi de façon générale pour mission de trancher les conflits de décision entre juge administratif et juge judiciaire lorsque ces conflits de décision entrainement un déni de justice.

  1. a)L’organisation du tribunal des conflits

Le tribunal des conflits est créé par la loi du 24 mai 1872, avant cette loi c’était le conseil d’Etat lui-même qui jouait ce rôle. Le tribunal des conflits a une organisation paritaire puisqu’il est composé de quatre conseillers à la Cour de cassation et de quatre conseillers d’Etat. Il est présidé par le ministre de la justice, mais la présidence du ministre est avant tout honorifique. Le ministre n’interviendra que s’il y a partage des voix au sein du tribunal des conflits. Cette hypothèse ne s’est produite qu’à 11 reprises depuis la création du tribunal des conflits. Toutefois, il est contestable de faire intervenir le ministre au sein d’une institution juridictionnelle. D’autant plus qu’il y ait doute que le ministre aille en faveur de la compétence du juge administratif, par exemple, dans l’arrêt Blanco c’est le ministre de la justice qui fait pencher la balance en faveur du juge administratif.

 

  1. b)L’intervention du tribunal des conflits

Deux situations sont envisageables :

  • Le tribunal des conflits intervient comme garant de la répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Plus précisément, le tribunal des conflits est alors le gardien de la compétence du juge administratif. C’est l’hypothèse du conflit positif, c’est l’hypothèse où l’administration est mise en cause devant un juge judiciaire, dans cette situation le préfet peut rédiger un déclinatoire de compétence. C’est un acte écrit et motivé dans lequel le préfet explique les raisons pour lesquelles selon lui le juge administratif est compétent et non pas le juge judiciaire, il transmet ce déclinatoire au juge judiciaire saisi. Celui-ci a lors le choix, soit il suit l’avis du préfet et va se déclarer incompétent. Soit il rejette le déclinatoire du préfet, dans ce cas, le préfet a quinze jours pour prendre un arrêté de conflit, lui aussi motivé. Cet arrêté de conflit oblige le juge judiciaire à saisir le tribunal de conflits. On dit alors que le préfet élève le conflit.
  • Lorsque le tribunal des conflits intervient avant tout pour protéger le justiciable, c’est d’abord l’hypothèse du conflit négatif. Le conflit négatif c’est lorsque les deux ordres de juridiction se sont déclarés incompétents. C’est-à-dire qu’un justiciable a saisi successivement le juge judiciaire et le juge administratif, mais qu’aucun d’eux ne s’est déclaré compétent, ne trouvant aucun juge il peut saisir le tribunal des conflits. Qui annulera le jugement de la juridiction qui s’est déclarée à tort incompétente. En principe ce conflit négatif ne doit pas se produire parce qu’on a adopté le décret du 25 juillet 1960 et ce décret vise à prévenir les conflits négatifs et les empêcher. La juridiction qui est saisie après une première décision d’incompétence rendue par une juridiction de l’autre ordre juridictionnel doit saisir le tribunal des conflits si elle s’estime elle aussi incompétente.
  • A côté du conflit négatif, il y a aussi le conflit de décision. C’est l’hypothèse dans laquelle un justiciable est confronté à deux décisions contradictoires rendues par les deux ordres de juridiction, et ces deux décisions au fond son contradictoires. Dans cette situation-là le justiciable, peut saisir le tribunal des conflits. Ce qui est tout à fait particulier c’est que dans cette hypothèse, le tribunal des conflits va rendre une décision sur l’affaire, et pas sur la compétence. Il annule les deux jugements en cause et tranche lui-même l’affaire au fond. TC 6 juillet 2009, Bonatto.

 

  1. B) La répartition des compétences au sein de la juridiction administrative

De façon générale, les tribunaux administratifs sont les juridictions administratives de droit commun. Ils sont toujours compétents à moins que la loi en dispose autrement. Chacun des tribunaux administratifs a une compétence territoriale, et le tribunal administratif territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se trouve l’autorité administrative qui a pris l’acte contesté. Ex ; le TA de Nantes couvre les litiges de la Loire atlantique, Maine et Loire, Mayenne, Sarthe, Vendée. Par exception la loi peut parfois dire qu’une juridiction autre est compétente en premier ressort. Cela sera soit le conseil d’Etat ou une juridiction administrative spécialisée. Ensuite, les CAA sont compétentes pour connaitre des décisions de premier ressort rendues par les tribunaux administratifs, par exemple, la CAA de Nantes est compétente pour les décisions des tribunaux suivants ; Caen, Orléans, Rennes, et Nantes. On ne peut pas dire que les CAA sont les cours d’appel de droit commun, parce que les CAA ne sont pas compétentes pour les jugements de premier ressort rendues par les juridictions administratives spécialisées.

Quant au Conseil d’Etat, il a une triple compétence, il est avant tout un juge de cassation, donc il connait les pourvois contre les décisions des CAA. Il est parfois juge d’appel, notamment pour les décisions des juridictions administratives spécialisées. Enfin, le Conseil d‘Etat est parfois compétent directement en premier ressort. Il statue directement en premier et dernier ressort. De façon générale ce sont les litiges les plus importants qui vont directement au conseil d’Etat, par exemple les recours contre les actes règlementaires d’un ministre. La tendance est à la réduction de la compétence de premier ressort du conseil d‘Etat, par exemple, un décret du 29 juin 2010 a transféré les compétences du conseil d’Etat vers le TA de Nantes. Cela vaut pour deux types de décisions administratives, les recours contre les décisions de naturalisation, et les recours contre les refus d’attribution de visa.

 

  1. IV) Les principes généraux de la juridiction administrative
  1. A)L’unité de la juridiction administrative

Article 2 du code de justice administrative, qui dispose que les décisions des juridictions administratives sont rendues au nom du peuple français. C’est-à-dire que la justice administrative est rendue de façon indivisible au nom de l’Etat. Le conseil d‘Etat a appliqué ces principes dans un arrêt de section du 27 février 2004, mademoiselle Popin. Le conseil d’administration de la fac de Strasbourg a rendu une décision au nom de l’Etat, donc elle devait poursuivre l’Etat. Toutes les décisions de justice administratives sont rendues au nom de l’Etat, et engagent la responsabilité de l’Etat.

 

  1. B)L’indépendance et l’impartialité

L’indépendance de la juridiction administrative est un PFRLR, décision du Conseil constitutionnel du 22 juillet 1980. Par exemple le conseil constitutionnel a censuré une loi qui soumettait à un contrôle parlementaire l’action de la cour des comptes. Un tel contrôle parlementaire était attentatoire à l’indépendance de la juridiction administrative, 25 juillet 2001. Les membres des TA et CAA sont qualifiés de magistrats par la loi. A ce titre ils sont indépendants et inamovibles. Les membres du conseil d’Etat ne sont pas qualifiés de magistrats, ils conservent un statut particulier. Ils n’y a pas de garantie légale à l’indépendance et inamovibilité des conseillers d’Etat.

 

Quant à l’impartialité, c’est un principe fondamental des juridictions administratives, le Conseil d’Etat dit souvent dans sa jurisprudence que l’impartialité est « l’un des principes généraux applicables à la fonction de juger. » du coup, par exemple, est contraire à ce principe d’impartialité le fait que l’auteur de la décision administrative attaquée siège au sein de la juridiction qui examine l’affaire. CE sect. 2 mars 1973, Arbousset. De façon générale, l’impartialité de la juridiction administrative doit être assurée de deux façons :

  • L’impartialité subjective ; c’est-à-dire que c’est une impartialité qui est appréciée par rapport à la personne du juge. En gros, compte-tenu de la personne du juge, il ne faut pas que celui-ci privilégie pour des raisons personnelles une personne en particulier.
  • L’impartialité objective ; qui s’apprécie en dehors de toute considération de personne. C’est-à-dire qu’il faut que les règles générales d’organisation et de procédure de la juridiction administrative doivent garantir objectivement son impartialité. C’est à cette occasion là que s’est posé la question du cumul des fonctions du conseil d’Etat. La CEDH au milieu des 90’s a condamné le Luxembourg en considérant que le conseil d’Etat luxembourgeois ne respectait pas le principe d’impartialité du fait de sa dualité de fonction, arrêt Procola. Depuis cette jurisprudence on a renforcé la différence et l’autonomie de la section du contentieux. Désormais le code de justice administrative dit que les membres du conseil d’Etat ne peuvent pas juger des recours dirigés contre un acte qu’ils ont connu auparavant dans le cadre des fonctions administratives.

 

  1. C)Le délai raisonnable de jugement

Arrêt Magiera, du 28 juin 2002 d’assemblée qui consacre un principe du droit au jugement dans un délai raisonnable. Si la juridiction administrative juge l’affaire dans un délai trop long, alors la responsabilité de l’Etat sera engagée. Toute personne a le droit à être jugée dans un délai raisonnable.

 

La question est de savoir comment le conseil d’Etat apprécie le délai raisonnable ? De manière stricte, il est réticent à engager la responsabilité de l’Etat pour cause d’un délai trop long. Ce qu’on peut noter c’est que le conseil d’Etat apprécie le délai raisonnable de manière globale, il regarde la durée de la procédure, et la durée de chaque instance. Le conseil d’Etat ne tient pas compte que du simple délai, il regard aussi les caractéristiques de l’affaire, plus l’affaire est compliquée en droit et en faits moins le délai à de chance d’être déraisonnable. Si le requérant contribue à la longueur de la procédure, on ne condamne pas l’Etat. Enfin, le conseil d’Etat observe la gravité de l’affaire en cause.

 

Chapitre 2 – La mise en œuvre du contrôle juridictionnel

On a adressé deux limites principales au contrôle juridictionnel fait par le juge administratif. Elle concernait le fait que le recours juridictionnel traduit devant une juridiction administrative n’est pas suspensif. On considérait qu’une décision de l’administration était illégale, ce n’est pas parce qu’on saisissait le juge que cette décision contestée n’est pas applicable. La décision au contraire est exécutoire et doit être appliquée malgré le recours juridictionnel. L’article 4 du code de justice administrative prévoit que les requêtes n’ont pas d’effet suspensif. La juridiction administrative rendait sa décision après que l’acte ait été accompli. Il n’était pas possible en cas d’illégalité de l’acte de supprimer les effets qu’il avait produit. Comme le recours juridictionnel n’est pas suspensif, il se peut que la décision du juge vienne trop tard, à un moment où l’acte a produit ses effets.

La deuxième critique était le manque d’efficacité de la décision du juge, il ne disposait pas d’un pouvoir d’injonction pour obliger concrètement l’administration à respecter et à exécuter sa décision juridictionnelle. Et longtemps, on a constaté que l’administration parfois refusait d’exécuter les décisions du juge administratif, et le juge n’avait pas les moyens juridiques pour la forcer à l’exécuter.

Cette double critique est effacée parce que le juge aujourd’hui est outillé pour répondre à ces critiques. Il peut suspendre provisoirement l’exécution des actes administratifs, en cas de recours juridictionnel, et il peut adresser des injonctions sous peine d’astreinte financière à l’administration.

 

Section 1. La typologie des recours juridictionnels devant le juge administratif

On peut définir le recours juridictionnel comme l’acte de procédure par lequel une personne, saisit une juridiction de premier ressort de prétentions dont elle veut faire reconnaitre le bien fondé. Il existe en droit administratif plusieurs types de recours juridictionnels. Ils sont en général présentés de manière variée. Il existe de manière générale deux types de classification des recours juridictionnels :

–          La classification formelle des recours juridictionnels ; c’est une classification fondée sur le critère des pouvoirs du juge administratif. Elle a été développée par Laferrière au XIXe siècle. Pour lui il existe quatre types de contentieux :

o   Le contentieux d’annulation ; où le juge peut annuler un acte administratif contesté, qui correspond au recours pour excès de pouvoir, ou au recours en cassation.

o   Le contentieux de pleine juridiction ; le juge a des pouvoirs élargis, il peut non seulement annuler la décision, mais aussi la réformer. Il peut aussi condamner financièrement l’administration. Ce contentieux correspond au recours de plein contentieux.

o   Le contentieux de l’interprétation ; le juge dans ce contentieux ne fait qu’une déclaration soit sur le sens d’un acte administratif c’est le recours en interprétation devant le juge administratif, soit sur la légalité de l’acte administratif, qui est le recours en appréciation de la légalité dans le cadre d’une question préjudicielle.

o   Le contentieux de la répression ; où le juge administratif est compétent pour condamner une personne qui a commis une infraction. C’est un cas extrêmement résiduel, qui correspond au contentieux des contraventions de grandes voieries, où le juge administratif est comme un juge pénal. Il ne juge plus l’administration mais l’administré qui a porté atteinte au domaine public.

–          La classification matérielle ; qui est fondée non plus sur les pouvoirs mais sur la question posée au juge. Elaborée par Léon Duguit au début du XXe siècle. Il distingue deux types de contentieux :

—  Le contentieux objectif ; qui correspond au cas où la question posée au juge est la question de la conformité d’un acte administratif à l’ensemble des normes juridiques s’imposant à l’administration. Ça correspond à un recours pour excès de pouvoir, à un recours pour appréciation de légalité et à certains recours de plein contentieux.

—  Le contentieux subjectif ; la question posée au juge est celle de savoir si une personne peut se voir reconnaitre un droit subjectif c’est-à-dire un droit qui est propre à sa personne. Par ex ; le droit d’être indemnisé d’un préjudice subi. Entre dans ce contentieux subjectif, l’autre partie des recours de plein contentieux.

Pour l’instant le juge administratif privilégie la classification formelle, c’est-à-dire que la distinction fondamentale c’est la distinction entre recours pour excès de pouvoir où le juge annule et recours de plein contentieux où le juge a des pouvoirs très élevés.   

 

Section 2 – Le recours pour excès de pouvoirs

On peut définir le recours pour excès de pouvoir comme le recours tendant à obtenir du juge administratif qu’il annule une décision après en avoir reconnu l’illégalité. Selon la formule de Laferrière « Le recours pour excès de  pouvoir est un procès fait à un acte ». Le recours pour excès de pouvoir est toujours possible même sans texte. Il existe contre tout acte administratif. C’est un PGD du CE, 7 fév. 1950, Dame Lamotte. Historiquement le recours pour excès de pouvoir a été l’instrument de soumission de l’administration au droit. Il a pu jouer ce rôle car il est largement ouvert. Pas d’avocat, gratuité ou quasi-gratuité, et condition de recevabilité plutôt souple.

 

  1. I)La saisine du juge administratif

La saisine du juge dans le cadre du recours pour excès de pouvoir n’est pas entièrement libre, on distingue plusieurs conditions tenant à l’acte attaqué, au requérant lui-même, et enfin au recours pour excès de pouvoir.

 

  1. A)Les conditions tenant à l’acte attaqué

Pour être attaquable dans le cadre d’un REP, l’acte attaqué doit présenter certains caractères, mais parfois le juge considère que certains actes sont inattaquables.

 

1)  Les caractères de l’acte attaqué

Pour faire l’objet d‘un recours pour excès de pouvoir, l’acte administratif doit faire grief, c’est-à-dire que l’acte administratif produit des effets juridiques et modifie l’ordonnancement juridique. C’est-à-dire que l’acte attaqué modifie le droit existant soit en ajoutant aux règles antérieures, soit en supprimant des règles en vigueur, soit en appliquant ces règles en vigueur à un cas particulier. Qu’il s’agisse d’une application positive des règles soit d’une application négative. Certains actes sont considérés comme ne produisant pas d’effet juridique, ils ne pourront pas être considérés comme pouvant faire l’objet d’un REP. Il peut s’agir des actes préparatoires qui préparent une décision administrative, mais ne décident rien eux-mêmes, ça peut être les actes confirmatifs qui se bornent à répéter quelque chose qui existe, ou encore acte interprétatif ou d’orientation qui n’ont pas d’effet contraignant.

 

2) Les actes incontrôlables

Cela correspond à une spécificité du recours pour excès de pouvoir. Deux grands types d’actes qui sont normatifs, donc qui créent du droit ne peuvent pas pour autant faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Le juge de l’excès de pouvoir refusera de contrôler ces deux types d’actes si un requérant lui demande.

 

  1. a)Les actes de gouvernement

Ce sont des actes qui sont insusceptibles de tout recours juridictionnel. Les justiciables ne peuvent pas demander l’annulation des actes de gouvernement et les justiciables ne peuvent pas non plus demander l’indemnisation du préjudice qu’ils subissent éventuellement du fait de ces actes. Ce sont des actes complètement inattaquables par les particuliers. Peu importe que ces actes respectent la légalité administrative, en principe ils y ont soumis. Mais de toute façon, le juge ne pourra pas apprécier leur légalité. Puisque tout recours contre eux est irrecevable.  Ces actes de gouvernement bénéficient d’une immunité juridictionnelle qui est très contestable au regard de l’exigence de l’Etat de droit. Parce que l’administration peut faire ce qu’elle veut dans ces actes, elle est affranchie du contrôle juridictionnel. A ce titre on peut dire que la catégorie des actes de gouvernement constitue une des matières les plus controversées du droit administratif. C’est ce que disait en 1896 un auteur.

Cette catégorie apparait de plus en plus anachronique parce que c’est une sorte de réminiscence de la raison d’Etat qui doit être imposée sans limite aux citoyens. Malgré tout, ces actes de gouvernement continuent d’exister aujourd’hui, mais l’on constate que c’est une catégorie en voie de disparition, car depuis un certain nombre d’année, des actes qui étaient des actes de gouvernement ne le sont plus. Donc le juge accepte de contrôler de nouveaux actes.

 

Il y a deux grandes catégories d’actes de gouvernement. Leur point commun à tous ces actes, c’est que ce sont des actes qui sont en partie étrangers à la fonction administrative ;

  • Les actes de gouvernement interne : ce sont des actes qui concernent le fonctionnement de l’Etat et plus précisément les relations entre les pouvoirs constitutionnels. A ce titre ce sont des actes qui sont très politiques. C’est par exemple, les actes relatifs aux rapports entre le gouvernement et le parlement, par exemple, un acte de dissolution du parlement est un acte de gouvernement que ne peut pas contrôler le juge administratif. Autre exemple, les actes relatifs aux rapports entre le gouvernement et le conseil constitutionnel, on ne peut pas contester la décision de nommer une personne au conseil constitutionnel. CE ass. 9 avril 1999, Mme Ba. Sont aussi des actes de gouvernement interne, les actes qui sont pris par d’autres pouvoirs constitutionnels, les actes pris par exemple par le parlement, une décision du parlement relative au régime de pension d’un parlementaire est un acte de gouvernement incontrôlable. CE ass. 25 oct. 2002, Brouand, autre exemple la décision d’un membre du conseil constitutionnel de suspendre ses fonctions est un acte de gouvernement incontrôlable, CE 6 mai 2005 Hoffer, enfin, la décision du président de la république d’organiser un référendum est un acte de gouvernement incontrôlable par le juge administratif CE 23 fév. 2005 Hoffer.
  • Les actes de gouvernement externe : ce sont des actes considérés par le juge comme inséparables de la conduite des relations internationales de la France. Ce sont donc des actes à connotation diplomatique, ils sont très politiques à nouveaux. CE ass 24 sept 1995, association Greenpeace France. La décision d’engager des forces militaires au Kosovo est un acte de gouvernement externe, CE 5 juillet 2000, Mégret. Le juge administratif n’a pas à empiéter sur le domaine du politique. La décision de conclure un traité international est un acte de gouvernement incontrôlable par le juge CE sect. 1er Juin 1951, Société des Etats et Wolfram du Tonkin. Ce sont des actes qui sont importants puisque la conclusion d’une convention internationale aura des conséquences en droit administratif.

 

  1. b)Les mesures d’ordre intérieur

Ce sont des décisions de l’administration qui modifient le droit en vigueur donc qui ont des effets contraignants mais que le juge refuse néanmoins de contrôler et cela pour deux raisons. La première, est que ce sont des actes qui produisent des effets juridiques trop réduits pour que ce soit la peine de les contrôler. En quelque sorte le juge administratif, considère que ces actes sont trop négligeables pour devoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Ex ; l’affectation d’un étudiant à un groupe de TD n’est pas recevable par le juge administratif parce qu’il n’a qu’une portée intérieure et des effets réduits. Les mesures d’ordre intérieur peuvent être des actes qui sont internes à l’administration, c’est-à-dire que ce sont des actes qui sont nécessaires au fonctionnement du service tel que voulu par le chef de service. Si le juge acceptait de contrôler ces actes alors il pourrait empêcher le fonctionnement normal et régulier du service. C’est par exemple le choix d’un chef de service d’affecter l’un de ses agents à un poste ou à un autre. Ex ; le président de l’université de Toulouse. Comme les actes de gouvernement, les mesures d’ordre intérieur diminuent en nombre. Très longtemps, le juge a refusé de contrôler les mesures prises par une organisation pénitentiaire, considérant que c’était des mesures d’ordre intérieur, ce qui n’offrait aucune garantie juridique au détenu. Cette vision là aujourd’hui est récusée par le droit administratif.

 

  1. B)Les conditions tenant des représentants
  1. La capacité pour agir

Pour pouvoir tenir le juge d’un recours pour excès de pouvoir, le justiciable doit avoir la capacité juridique de le faire. Ainsi les mineurs ou les incapables majeurs ne pourront pas introduire de recours pour excès de pouvoir. Seuls les représentants légaux de ces incapables pourront introduire le recours pour excès de pouvoir à leur profit

 

  1. L’intérêt pour agir

Pour attaquer un acte un requérant doit avoir un intérêt à en obtenir l’annulation. On ne peut pas attaquer n’importe quel acte administratif devant le juge de l’excès de pouvoir. Il faut être suffisamment concerné par cet acte administratif. Si on n’est pas concerné par l’acte on n’a pas intérêt à agir et le recours sera rejeté. Historiquement, le juge administratif a toujours fait preuve de souplesse dans l’appréciation de cet intérêt, le but du juge a été d’ouvrir le recours pour excès de pouvoir le plus possible afin de mieux contrôler l’administration. Parfois, le juge peut considérer que la qualité d’un requérant lui donne nécessairement intérêt à agir. Dans ces circonstances, le juge ne raisonne plus par rapport à l’individu, et à son intérêt mais raisonne par rapport à une catégorie de requérants. Le juge va considérer par exemple, que tous les contribuables locaux quels qu’ils soient  ont un intérêt à agir pour contester une décision de la municipalité ayant un impact financier. Tous les contribuables peuvent contester l’acte de la commune. De la même façon, tous les usagers d’un service public quels qu’ils soient auront intérêt à contester une décision de l’administration relative à l’organisation de ses services publics.

En dehors de ces catégories, il va falloir démontrer l’intérêt à agir. Pour qu’un requérant ait intérêt à agir, il faut qu’il soit affecté par l‘acte administratif « dans des conditions suffisamment spéciales, certaines et directes » ce sont les termes du commissaire du gouvernement Théry dans l’arrêt de section, Damasio.

–          Spéciale : l’intérêt est spécifique, propre au requérant

–          Certaine : l’intérêt n’est pas hypothétique

–          Directe : l’intérêt est réel.

En pratique, le juge fait preuve de souplesse et de pragmatisme. Cette souplesse est ambivalente parce que d’un côté elle est favorable à l’intérêt du requérant, d’un autre côté il n’est pas toujours facile de prévoir l’intérêt du juge administratif sur l’intérêt à agir. Il faut que l’acte attaqué ait un rapport avec l’objet social de la personne morale  ou avec les intérêts propres de cette personne morale, par exemple un syndicat ou une association ne peuvent attaquer un acte que si cet acte affecte l’intérêt collectif qu’elles défendent. Elle ne pourra agir si cet acte n’affecte que l’intérêt individuel de l’un de ses membres.

 

  1. C)Les conditions tenant au recours
  1. La forme du recours

De façon générale le recours pour excès de pouvoir est très peu formaliste. La requête doit être écrite, en français, complète. Il faut que la requête ait un objet, c’est-à-dire qu’il faut une demande précise. La requête doit contenir des arguments juridiques.

 

  1. Les délais du recours

En principe le délai de recours contre une décision administrative est de deux mois, à partir de la publicité de l’acte. Cette publicité peut être assurée par une publication de l’acte, (soit au JOFR, soit dans un bulletin d’information) soit par un affichage de l’acte lorsqu’il s’agit d’un acte règlementaire. Pour les actes individuels, la publicité est assurée par une notification de l’acte. C’est-à-dire que l’acte est envoyé à son destinataire. Au-delà des deux mois, le recours pour excès de pouvoir est irrecevable. Ce délai est assez bref, afin d’assurer la sécurité juridique. La stabilité des situations juridiques serait fragilisée si tous les actes administratifs qui ont créé ces situations juridiques pouvaient être remis en cause à tous moment.

Il y a deux tempéraments à ce délai, il n’est opposable que lorsqu’il a été transmis au requérant. C’est-à-dire que l’on doit lui préciser le délai qu’il a, en le mentionnant lors de la notification de l’acte individuel. Si on ne précise pas alors il n’y a plus de délai.

Parfois, le délai va recommencer à courir (Cf. recours administratifs, qui prorogent le délai de deux mois). Normalement après deux mois on ne peut plus attaquer directement un acte administratif. Mais pour un acte règlementaire, donc de portée générale, un requérant peut contester incidemment cet acte par voie d’exception lorsqu’il fait un recours contre une décision individuelle appliquant cet acte règlementaire. Quand l’administration prend un acte à portée générale, il y a deux mois pour contester mais on pourra quand même le contester passé ce délai, après qu’il nous soit appliqué individuellement.

 

  1. II)Le contrôle du juge administratif

 

  1. A)Le champ du contrôle

C’est ce qu’on appelle les cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir. Pour contester un acte, un justiciable invoque les moyens juridiques. Ces moyens juridiques sont des arguments qui permettent d’obtenir l’annulation d’un acte. Ces arguments, ces moyens juridiques, sont regroupés en plusieurs catégories qu’on appelle les « cas d’ouverture ». Ces cas d’ouverture sont eux-mêmes regroupés en deux groupes :

–          La légalité externe de l’acte administratif ; ça regroupe les cas d’ouverture qui ont trait à la façon dont a été adopté l’acte administratif. Il y a deux cas d’ouverture ;

o   L’incompétence, l’autorité administrative n’avait pas le pouvoir juridique pour prendre l’acte. Elle peut être matérielle, temporelle, ou territoriale.

o   Le vice de forme ou le vice de procédure, le moyen invoqué contre l’acte c’est qu’il a été adopté illégalement la procédure suivie ou la forme de l’acte n’était pas la bonne. Le juge administratif ne sanctionne ces vices, que s’ils sont substantiels. C’est-à-dire qu’il ne les sanctionne que s’ils sont très graves au point qu’ils affectent le contenu même de l’acte administratif.

–          Le groupe de la légalité interne ; ce sont les moyens juridiques qui se rattachent au contenu de l’acte et pas à ses moyens d’élaboration. Il y en a quatre ;

o   La violation de la loi, qui regroupe les moyens tirés de la méconnaissance de la règle juridique par l’administration.

o   L’erreur de droit, qui regroupe les moyens qui portent sur les motifs juridiques de la décision.

o   L’exactitude matérielle des faits, ce sont les moyens tirés de ce que l’administration a mal pris en compte les faits d’espèce.

o   Le détournement de pouvoir ou de procédure, c’est-à-dire que l’administration a été malhonnête elle a utilisé ses pouvoirs à des fins autres que celles pour lesquelles ils sont prévus.

Certains moyens juridiques sont tellement importants que le juge les contrôle d’office, ce sont les moyens d’ordre public, ex : l’incompétence est un moyen d’ordre public.

 

  1. B)Pouvoirs d’instruction et de contrôle du juge
  1. Les pouvoirs d’instruction du juge

Le code de justice administrative organise la procédure contentieuse, il s’agit d’une procédure de type contradictoire, elle est écrite, les parties s’échangent des mémoires par écrits et les conclusions orales sont d’une moindre importance.  La procédure est inquisitoriale, c’est-à-dire que le juge peut décider des mesures d’instruction lorsqu’elles sont nécessaires à la résolution des litiges. Il peut notamment ordonner des expertises. Le juge peut obliger l’administration à communiquer des documents en sa possession pour qu’il puisse les transmettre à l’autre partie, CE ass. 28 mai 1954, Baren, jurisprudence précisée par l’arrêt Perreux.

 

  1. L’intensité du contrôle du juge

Il existe une gradation du contrôle du juge de l’excès de pouvoir, le contrôle du juge est variable dans son étendue et dans son intensité. Parfois il y a une absence de tout contrôle, tel est le cas lorsque l’administration est dans une situation de pouvoir discrétionnaire. Le juge administratif laisse une entière liberté à l’administration, il ne montre pas le bien-fondé de sa décision. Par exemple, le juge ne porte aucun contrôle sur les appréciations portées par un jury de concours ou d’examen sur la valeur d’une copie. Le juge n’exerce aussi aucun contrôle lorsque l’administration est dans une situation de compétence liée. Dans ces cas-là, comme l’administration est obligée de prendre la décision, si le juge contrôle la décision, il ne contrôle pas son bien-fondé.

 

Le contrôle restreint du juge, le juge ne contrôle alors que l’erreur manifeste commise par l’administration. C’est-à-dire qu’il ne sanctionne que les erreurs grossières flagrantes commises par l’autorité administrative. C’est par exemple le cas pour le contrôle juridictionnel des sanctions infligées à un agent public, le juge ne censurera la décision que si celle-ci est véritablement et grossièrement erronée.

 

Le contrôle normal, c’est le contrôle de principe, le plus généralisé où le juge contrôle normalement et censure toute erreur ou illégalité de l’administration. Il va contrôler si les faits sont présents, et si les faits peuvent justifier la décision.

 

Dans le contrôle maximum, le juge va au-delà du contrôle de la légalité pour empiéter sur un contrôle d’opportunité. Le juge contrôle la stricte adéquation, la stricte proportionnalité de la décision administrative. Ce contrôle-là se retrouve en matière de police, où le juge fait un contrôle de proportionnalité c’est-à-dire qu’il vérifie si ces mesures étaient nécessaires, et on le retrouve en matière d’expropriation. CE ass. 28 mai 1971 Ville Nouvelle Est, pour que l’administration puisse exproprier il faut une déclaration d’utilité générale.

 

  1. C)Les limites du contrôle ; la théorie des circonstances exceptionnelles

Le conseil d’Etat crée la théorie des circonstances exceptionnelles durant la Première Guerre mondiale, en situations exceptionnelles comme la guerre, l’administration doit pouvoir agir avec plus de latitude. Le juge administratif va apprécier plus souplement les décisions administratives. Il y a des actes administratifs normalement illégaux qui peuvent quand même être admis par le juge au regard des circonstances particulières dans lesquels ces actes ont été pris ; Heyriès 28 juin 1918, en l’espèce M. Heyriès a été exclu de la fonction publique au début de la 1GM l’administration a pris un décret qui suspendait tous les droits de la défense des fonctionnaires. M. Heyriès va dire que son renvoi est illégal parce que le décret en question est lui-même illégal. Normalement le décret était illégal, mais le juge administratif va rejeter son recours, en période de guerre l’administration peut suspendre l’application de la loi garantissant les droits de la défense des fonctionnaires. CE Dol et Laurent 28 février 1919, en période de guerre toujours, risque sanitaire et d’espionnage si on ne fait rien contre la prostitution. Décision du préfet déclarée légale par le juge administratif.

Il y a deux conditions pour que la théorie puisse jouer :

  • Evènements particulièrement graves et imprévus.
  • Impossibilité pour l’administration d’agir légalement.

Il faut retenir que la théorie des circonstances exceptionnelles ne signifie pas la débâcle de la légalité. Le principe de légalité continue de jouer, simplement le contenu de la légalité a changé, les circonstances exceptionnelles créent une légalité d’exception dont le juge va fixer le contenu et les limites. La légalité d’exception affectera les règles de compétence, de forme et de procédure et même de fond du droit. Le conseil d’Etat fixe les limites  de la légalité, les requérants peuvent attaquer les actes de l’administration, arrêt d’ass. Canal, 19 oct. 1962.

 

III) La décision du juge administratif

  1. A)La prérogative fondamentale : l’annulation de la décision

Si le recours pour excès de pouvoir est fondé le juge annule l’acte attaqué. L’annulation a un effet rétroactif, c’est-à-dire que l’acte est censé n’avoir jamais existé. Il disparait depuis la date de son entrée en vigueur. Tous les effets que l’acte a créé doivent être corrigés cela est compliqué pour les actes règlementaires. Tous ces effets disparaissent, non seulement pour le requérant, mais aussi pour les tiers. Par exemple si l’acte individuel est annulé l’administration doit rétablir le requérant dans ses droits. Pour les actes à portée générale, les actes individuels pris sur le fondement de l’acte annulé, devront disparaitre s’ils n’ont pas encore épuisé leurs effets juridiques. Enfin l’annulation de la décision permet à l’administration de reprendre une nouvelle décision si elle le souhaite, mais elle devra être différente, c’est l’autorité de la chose jugée. L’administration peut reprendre la même sur le fond, mais en changeant les éléments qui ont justifié son annulation, par ex : une autorité prend un acte et elle est incompétente pour le prendre.

 

  1. B)La diversification des prérogatives du juge de l’excès de pouvoir

L’idée principale est que désormais l’exercice du pouvoir d’annulation de l’acte dont dispose le juge de l’excès de pouvoir ne conduit plus nécessairement à la disparition totale de l’acte attaqué. En effet, le juge de l’excès de pouvoir a aujourd’hui le pouvoir de moduler dans le temps les effets de sa décision d’annulation ; CE Ass. 11 mai 2004, association AC ! C’est-à-dire qu’avec cette décision, le juge de l’excès de pouvoir peut décider que son annulation ne vaudra que pour l’avenir. C’est-à-dire que l’acte n’est remis en cause seulement à partir de la date de la décision du juge. Les effets antérieurs à la décision du juge ne sont pas remis en cause. Dans ces cas-là, il n’y a plus d’effets rétroactifs à la décision du juge. Aujourd’hui le juge peut annuler, annuler simplement pour l’avenir, ou encore ne rien faire. Ses pouvoirs se diversifient.

Le fait que l’annulation ne vaille que pour l’avenir, fait qu’en pratique cette annulation est comparable à une abrogation. Le juge peut même décider d’annuler l’acte pour l’avenir, mais simplement à partir d’une date postérieure à la décision. Par exemple, le juge rend une décision le 13 juillet 2013, il va pouvoir dire que l’acte est illégal mais qu’il n’aura plus d’effets pour l’avenir à partir du 13 octobre. Entre le 13 juillet et le 13 octobre, l’acte fera encore effet, puisqu‘il est différé dans le temps. C’est dans le but que l’administration puisse corriger l’acte avant que les effets de la décision ne se produisent.

Le juge peut annuler l’acte, il disparait pour le passé et pour l’avenir, il peut annuler pour l’avenir, l’acte ne disparait qu’à partir de la date de l’annulation. Enfin, le juge peut décider d’annuler pour l’avenir à partir d’une date ultérieure, et donc l’acte disparaitre pour l’avenir simplement à partir de cette date-là. Il y a toutefois des conditions à l’exercice de ce pouvoir de modulation. Il faut que l’intérêt général justifie le pouvoir de modulation du juge. Donc l’intérêt général permet de déroger au caractère rétroactif de la décision d’annulation du juge.

 

Il y a deux autres éléments :

  • Le juge de l’excès de pouvoir peut exceptionnellement corriger l’acte plutôt que l’annuler. Par exemple, le juge de l’excès de pouvoir peut modifier une base légale erronée, pour lui justifier une nouvelle base légale justifiée. C’est-à-dire que l’administration s’est trompé de base légale, et le juge n’annule pas la décision de l’administration, il lui substitue la bonne base légale qu’aurait dû retenir l’administration. CE Sect. 3 décembre 2003, El Bahi.
  • De la même façon, le juge de l’excès de pouvoir peut substituer un motif de droit ou de fait nouveau au motif de droit ou de fait irrégulier contenu dans la décision administrative. En procédant à cette substitution, le juge corrige l’illégalité de l’acte et n’a donc plus l’obligation de l’annuler. CE Sect. 6 février 2004, Hallal.

CE Ass. 29 juin 2001, Vassilikiocis, dans sa décision d’annulation, le juge de l’excès de pouvoir peut imposer à l’administration des obligations spécifiques qui découlent de cette annulation. Il annule l’acte de l’administration, et il adresse des instructions à  l’administration quant aux conséquences à tirer de cette annulation. La conclusion de tout cela c’est que le recours pour excès de pouvoir se rapproche du recours de plein contentieux, parce que le juge dispose de pouvoirs plus étendus que la simple annulation de l’acte.

 

  1. C)L’efficacité de la décision du juge

En principe la décision du juge de l’excès de pouvoir bénéficie de l’autorité de la chose jugée. C’est-à-dire que cette décision ne peut pas être remise en cause ni par l’administration, ni par une autre juridiction. Donc l’administration à l’obligation de respecter la décision du juge, et les juges ne peuvent plus rejuger la même affaire. Un requérant ne peut pas aller devant un nouveau juge pour lui faire réexaminer, parce que le problème a déjà été résolu.

Certaines décisions du juge ont une autorité relative de chose jugée, c’est-à-dire que l’autorité ne vaut que pour le justiciable concerné. Un autre justiciable pourra engager la même procédure, sans se voir opposé l’autorité de chose jugée. Cela vaut notamment pour les décisions de rejet du juge. A côté de ça, il y a les décisions qui ont une autorité absolue de chose jugée. C’est-à-dire que la décision du juge vaut pour tout le monde, elle vaut erga omnes. C’est essentiellement le cas, des décisions d’annulation du juge de l’excès de pouvoir.

 

Un problème s’est posé, qui n’est d’ailleurs pas spécifique au juge de l’excès de pouvoir, mais à tous, c’est le problème de savoir comment on va forcer l’administration à exécuter la décision du juge. Historiquement l’approche que l’on a retenue est une approche pédagogique et non contraignante. Le décret du 30 juillet 1963 crée au sein du conseil d’Etat la commission du rapport et des études (qui deviendra une section du conseil d’Etat) elle a pour mission d’assister l’administration dans l’exécution des décisions de justice. Cette approche non contraignante était inefficace. En pratique on constatait que l’administration n’exécutait pas les décisions du juge. Du coup on a instauré des mécanismes contraignants. Le premier est créé par la loi du 16 juillet 1980, cette loi permet au juge (en l’occurrence le conseil d’Etat) de prononcer des astreintes contre l’administration en cas d’inexécution d’un jugement. C’est une condamnation pécuniaire à laquelle est condamnée l’administration en cas de non-exécution ou d’exécution retardée. Cette solution n’ pas été pleinement efficace. On a donc mis en place un troisième dispositif, par la loi du 8 février 1995. Cette loi a profondément réformé la question  de l’exécution des décisions du juge administratif. Elle permet à tout juge administratif d’adresser des injonctions à l’administration. C’est-à-dire que le juge peut adresser des instructions à l’administration et lui imposer des mesures positives à prendre. Par exemple, le juge peut enjoindre à l’administration de prendre une décision dans un sens déterminé, ou il peut enjoindre à l’administration de procéder à une nouvelle instruction d’un dossier. Ces injonctions sont le cas échéant, accompagnées d’astreintes.

 

Deuxième partie :

Les finalités de l’action administrative

Isa Germain

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Isa Germain

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