Droit cambiaire: définition, évolution des effets de commerce

Les instruments cambiaires : les effets de commerce

Un effet de commerce est un titre négociable qui représente des créances payables au terme convenu sur le titre au profit de celui qui le détient.

Parmi les principaux effets de commerce on retient la lettre de change ou traite et le billet à ordre.

  • La lettre de change (ou traite) est un ordre écrit donné par le créancier à son débiteur de payer à l’ordre de lui-même ou d’une tierce personne une somme fixée à une date déterminée.
  • Le billet à ordre est un engagement écrit pris par un débiteur de payer à l’ordre d’une tierce personne une somme fixée à une date déterminée.

Section I : définition des effets de commerce :

Il n’y a pas de définition légale d’effet de commerce, définis par la doctrine unanime.

Effet de commerce : titre négociable qui constate au profit du porteur une créance de somme d’argent.

– Titre :

Le titre renvoie à l’idée de support, d’un écrit : support papier.

– Il constate une créance de somme d’argent :

  • Il s’agit toujours et seulement d’une créance de somme d’argent.

A la différence d’aux titres : les actions, donnant aussi le droit à l’actionnaire de voter (droits extrapatrimoniaux).

  • C’est une créance à court terme, VM : à log terme.
  • C’est une créance de type particulier, de nature cambiaire, avec tous les caractères attachés à la nature cambiaire, c’est à dire : littérale, rigoureuse à l’égard du débiteur, autonome (principe indépendance des signatures), abstrait (principe de l’inopposabilité des exceptions).

– un titre négociable :

Il peut circuler simplement et sûrement.

  • Simplement : par tradition (remise de la main à la main) ou par endossement.
  • Sûrement : la créance cambiaire est plus protectrice du porteur que la créance de droit commun, le droit cambiaire superpose à la créance fondamentale, une obligation directe du signataire du titre, qui vient garantir le porteur.

Section II : évolution des effets de commerce :

  • 1°)- Évolution des fonctions :

3 grandes phases.

Dans un premier temps, la lettre de change a été conçue comme un instrument de transport d’argent.

Elle est apparue au XIIe siècle, au moment où se sont développés les foires et les échanges commerciaux. Le contrat de change est inventé pour limiter les transports de fonds.

Sur le fondement de ce contrat, le négociant, avant de partir, remet à son banquier une somme d’argent, en contrepartie d’une lettre du banquier permettant au commerçant de recevoir une somme équivalente d’un autre banquier, correspondant du premier, dans une autre ville, parfois dans une autre monnaie (d’où le nom de change), sous déduction de la rémunération des deux banquiers.

Les banquiers ont très vite compris l’intérêt de ce procédé, à l’époque il était interdit par le droit canon, de rémunérer les prêts d’argent.

Considérant que l’opération ne s’analysait pas juridiquement en un prêt, ils ont facturé les contrats de change et en ont favorisé le développement.

NB : Mais pour le second banquier, l’opération correspond à un prêt.

Dans un second temps, à partir du XVIe siècle, la technique s’est généralisée et la lettre de change est devenue un instrument de paiement.

Les commerçants, au lieu de se faire verser les sommes par les banquiers correspondants afin de les faire remettre à leurs fournisseurs, se sont mis à remettre les lettres directement à leurs fournisseurs.

Elle est donc utilisée alors comme un instrument de payement.

La lettre de change a subi, ensuite, la concurrence des autres instruments de payement (chèques et virement), elle a été de moins en moins utilisée comme instrument de paiement. Mais elle a trouvé un nouvel essor, lorsque Paterson a inventé l’escompte.

Dans un troisième temps, au XVIIe siècle, la lettre de change est devenue un instrument de crédit, instrument privilégié de l’opération d’escompte.

  • 2°)- Évolution du droit :

Le droit de la lettre de change est marqué par deux facteurs :

  • La prohibition du prêt à intérêt, le droit cambiaire s’est construit dans les espaces laissés libres par cette prohibition.
  • C’est un droit conçu, comme un droit indépendant des particularismes locaux, un droit uniforme.

Le droit français de la lettre de change existe depuis le XVIIe siècle, l’ordonnance de Colbert de 1673 régit la lettre de change. Le Code de Commerce de 1807 a repris les termes de l’ordonnance pour la lettre de change.

Puis sous l’influence du droit anglais, une ordonnance de 1848 va venir affirmer pour la 1ère fois, le caractère abstrait de l’engagement cambiaire.

Mais c’est l’époque où le souci d’unification du droit émerge, des travaux d’unifications débutent dès 1910 et aboutissant en 1930, avec la signature de trois conventions internationales le 7/06/1930 à Genève.

  • loi uniforme sur la lettre de change ;
  • conflit de lois en la matière ;
  • les droits de timbres concernant les lettres de change.

Elles n’ont pas permis une parfaite unification du droit :

  • certains pays ne l’ont pas signée (USA et UK) ;
  • il y avait des réserves dans cette convention, qui ont permis aux États de préserver certains particularismes, notamment à propos de la provision ;
  • les interprétations jurisprudentielles différentes selon les pays ont contribué à l’éloignement des pratiques juridiques, en dépit d’un effort de publication des droits et jurisprudences dans la revue de droit uniforme.

En 1986, une nouvelle convention a été élaborée, par la Commission des nations unies pour le droit commercial international, afin de créer une lettre de change et un billet à ordre, à usage international.

Mais cette convention n’a été signée que par les USA, UK et Canada, et pour qu’elle entre e vigueur il faut qu’au moins 14 pays la signe.

En droit français, la convention internationale a été intégrée par deux décrets lois d’octobre 1935 : CCom110 à 189, aujourd’hui L511-1 à L512-7.

  • 3°)- Évolution du titre :

Y a-t-il un avenir pour les effets de commerce ?

L’effet de commerce, en matière d’instrument de crédit, est ce qu’il y a de plus sûr, sophistiqué, abouti, comme le chèque, pour les instruments de payement.

Mais comme le chèque, son support papier (coûts de traitement) est un handicap majeur.

La pratique s’engage donc dans deux voies, pour pallier cet inconvénient :

  • la dématérialisation des effets de commerce :

Il existe aujourd’hui des formes dématérialisées de lettre change : la lettre de change relevée magnétique.

Mais le législateur refuse de donner des instruments cambiaires à ce type de lettre de change.

  • La création de nouveaux instruments de crédit, de substitut aux instruments cambiaires : les bordereaux de cession de créance.
  • Ces instruments sont liés à la pratique française du crédit fournisseur.

Des voix commencent à s’élever pour remettre en cause cette pratique, afin de faire peser le crédit, non plus sur le fournisseur, mais sur l’entreprise cliente, comme dans d’autres pays européen.

La lettre de change perdrait alors l’un de ses principaux intérêts.