Droit de la responsabilité civile

Droit de la responsabilité

  Le cours de droit de la responsabilité civile est une sous-partie du cours de droit des obligations. Sur cette page, se trouve 2 cours :

  • Cours n°1 : cours à jour de la réforme du droit des obligations.La réforme du droit des contrats est issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations.  La réforme ne modifie pas en profondeur le droit de la responsabilité même si des articles « phares » comme l’article 1382 ont changé de numérotation (devenu article 1240). Le droit commun des contrats se loge dans le titre III du code civil; tout comme la responsabilité délictuelle et la responsabilité du fait des choses, mais celles-ci ne sont pas réformées, seule la numérotation étant modifiée.
  • Cours n°2 : cours rédigé avant la réforme de 2016 mais il reste utile à l’étude de la responsabilité civile; La réforme de la responsabilité civile contractuelle et extracontractuelle fera l’objet d’un projet de loi ultérieur qui sera débattu devant le Parlement, en raison des enjeux politiques et sociaux qui sont liés à ce domaine du droit. »L’avant-projet de loi procède à une utile codification des règles jurisprudentielles, il prend également le parti d’intégrer des nouveautés dans le code civil dont certaines sont clairement défavorables aux entreprises qui se verront assigner en responsabilité.

L’obligation est un lien de droit en vertu duquel une ou plusieurs personnes sont tenues envers une ou plusieurs autres personnes de donner, faire, ou ne pas faire quelque chose. L’obligation permet au créancier d’exiger du débiteur une prestation, positive ou négative.
La responsabilité civile est l’obligation légale de réparer les dommages causés à autrui.

Le cours de droit des obligations est en effet divisée en deux parties :

  • – droit des obligations contractuelles : il s’agit du droit du contrat (étudié dans un autre cours)
  • – droit des obligations extra-contractuelles : il s’agit du droit de la responsabilité délictuelle appelé aussi droit de la responsabilité civile (étudié dans ce cours). Dans ce cours, on étudiera aussi la notion de quasi-contrat.

COURS n°1 : DROIT DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE

Article 1382 du Code civil (devenu l’article 1240 nouveau du code civil) : « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer » = obligation de réparer le mal.

Acte juridique = acte de volonté, consentement en vue de produire des effets de droit

Fait juridique = comportement qui peuvent parfois être licites mais qui sont souvent illicites.

Titre Préliminaire : Introduction à la responsabilité délictuelle

Responsabilité : être responsable de ses actes et assumer son comportement. C’est Rousseau et Montesquieu qui ont le mieux fait valoir le couple liberté – responsabilité. Si nous abusons de notre liberté, nous serrons responsable. On devra payer pénalement ainsi que civilement à l’égard des victimes. La liberté s’arrêt au moment où on cause un dommage à autrui.

Obligation légale de réparer le dommage qu’on a causé à autrui – idée d’un comportement anormal.

Section 1 : Histoire du droit de la responsabilité civile

Pendant très longtemps, quand une personne causait un dommage à une autre, celle-ci avait le droit de se faire justice à elle-même. Même à Rome, lorsque le voisin malmenait l’esclave du propriétaire ou brulait les récoltes, le citoyen romain avait le pouvoir de le faire saisir et de l’envoyer dans une prison, ainsi que de décider de l’indemnisation.

Petit à petit mais toujours en Droit de la responsabilité, est apparu la nécessité d’une intervention du juge pour que celui qui estime la responsabilité du défendeur et décide de l’indemnisation qu’il devait payer. C’est la notion de compensation pécuniaire qu’on appelle aujourd’hui les dommages et intérêts. Ce système s’est prolongé pendant tout l’ancien droit jusqu’à la RF où c’était une des activités su seigneur, roi ou de l’évêque. Les règles étaient principalement celles d’aujourd’hui.

Domat et Pothier ont développé cette responsabilité civile, de sorte que l’article 1382 du Code Civil (remplacé par article 1240 nouveau du code civil) est le fruit de cette réflexion.

Cependant suivant l’article 1382, il existe d’autres dispositions qui prévoient des cas particuliers. Ex : responsabilité du fait des animaux > je suis responsable si mon chien mort un passant – une tuile de mon toit tombe sur la tête d’un passant > ma maison j’en suis responsable – mon fils met un crayon dans l’œil se son camarade > je suis responsable – livreur de sushi qui cambriole le client > patron responsable de son livreur.

 

À la fin du XIXème siècle il y a eu une crise du droit de la responsabilité. Ce qui est assez étonnant, c’est qu’un des auteurs qui réfléchis voir encourage cette crise est Saley. Avec l’expansion des chemins de fer, et donc les accidents qui en découlent, les auteurs de doctrine ont considérés que ça n’entrait pas dans le champ de 1382 car la faute n’est pas toujours établis. Si on ne sait pas la cause exacte de l’incendie, on ne pourra pas indemniser la victime.

La Cour de Cassation influencé par la doctrine et notamment par Saley, a rendu des arrêts fondateurs à la fin du XIXème siècle en considérant que même s’il n’y a pas de faute, celui ou celle qui est à l’origine du dommage, le coupable sera obligé à réparer le dommage. Il y a une responsabilité sans faute > rupture majeure avec Domat et Pothier. Il s’agit d’une responsabilité objective, sans faute = division subjective / objective.

 

La faute a pu être doublée d’un nouveau fondement étant le risque. Cela s’est développé au moment de la Révolution Industrielle dans le cadre des accidents du travail. La fameuse présomption de responsabilité d’obligation de résultat se retrouve et permet d’établir la responsabilité même s’il n’y a pas de faute.

 Portalis et ses amis ont repris la vision de Pothier dans l’article suivant : « chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait mais encore sa négligence ou son imprudence ». Ce n’est pas seulement la faute subjective, intentionnelle mais c’est aussi la faute d’imprudence.

 Au XXème siècle, ce ne sont plus tellement les usines et les chemins de fer qui ont causés des dommages massifs, mais les véhicules. Dès que terrestres et à moteur ont commencé à se développer auprès de la population, il y a eu des accidents de plus en plus fréquents. On va retrouver la même difficulté. Des auteurs ont étendu la théorie des risques et ont considéré que dès lors qu’on a entre les mains un engin puissant, la responsabilité est automatiquement engagée en cas d’accident. Les auteurs et la Cour de Cassation se sont fondés sur l’article 1384 du Code Civil « on est responsable des choses que l’on a sous sa garde ».

 Conception plus objective de la responsabilité dès lors qu’on prend un risque. C’est pour cela que la Cour de Cassation a rendu des arrêts de principe.

Il y a des cas où on ne peut pas prouver la faute du défendeur mais du point de vue de la causalité, il est probable voir certain que le défendeur n’est pas à l’origine du dommage. Ex : voiture qui route normalement et brusquement en sens inverse il y a une moto qui vient percuter la voiture, le conducteur de la voiture est-il responsable ? Non, il n’a pas commis de faute et du point de vue de causalité il n’a rien à voir avec l’accident, mais il y a de plus en plus de décision qui considère qu’il doit payer.  Il n’y a plus de faute ni de causalité, or en droit des contrats toutes responsabilité suppose une faute présumé, un lien de causalité et un dommage. Cependant de plus en plus de juridiction n’ont pas hésité à condamner > phénomène sociologique qui est celui de l’assurance. L’État a rendu obligatoire l’assurance de responsabilité civile pour tout conducteur d’un véhicule à moteur terrestre. De plus pas forcément en matière de véhicule, toute entreprise, tout particulier s’assume obligatoirement ou facultativement = obligation aléatoire > payer dans l’éventualité d’un sinistre.

À partir de ce moment il y a eu un réflexe des juges irrationnel mais sociologique consistant à considérer qu’il valait mieux condamner le défendeur même si il n’y a pas de faute ni de lien de causalité. A émerger un nouveau fondement à la responsabilité civile encore plus objectif que le risque, c’est la notion de garantie > certitude fournie à un créancier. C’est l’idée qu’il y a aura toujours quelqu’un qui paiera et que la prise en considération de la victime est plus importante que celle de la faute prouvée ou présumée du défendeur. Cette idée, les auteurs classiques, les professeurs de la 1ère moitié du XXème n’étaient pas aller jusque-là, ils s’étaient tenu aux activités dangereuse. Mais le pas a été franchis par les arrêts de la Cour de Cassation puis par un auteur, prof de Lyon, Boris Stark (fiche thèse de 1947). Dans sa thèse il dit que le droit ne peut plus seulement être de la logique et de la technique juridique ; le droit c’est aussi la prise en charge des phénomènes sociaux et des risques quel qu’ils soient déclenchés par les sociétés post industrielle. C’est le 1er avoir eu l’idée très troublante consistant à faire un parallèle entre la responsabilité civile fondée depuis Rome sur la faute fondée ou présumée d’un individu, et d’autre part les mécanismes de protection sociale.

La Cour de Cassation avec l’aide des auteurs comme Stark s’est u peu dirigée comme ça. À partir du moment où on a un dossier en responsabilité civile, la plus part des victimes assigne le responsable et son assureur qui va lui-même désigner et payer l’avocat ; ça devient donc un procès entre l’assureur et le demandeur. Un individu dès lors qu’il subit un dommage physique, corporel, doit être pris en charge et indemnisé alors même que celui qu’il assigne n’est pas responsable. Stark a carrément proposé un régime légal de prise en charge par les organismes de protection sociale. Aujourd’hui on n’en est pas là, mais presque.

 

Auparavant ce besoin d’indemnisation des victimes avait été pressentit par les anciens, même si ils ne pensaient pas que ça serait aussi radical après la Seconde Guerre Mondiale. Fiche, extrait, Josserand 1936, dans cet article très court, il a tout dit, « l’Homme est en danger, il a besoin d’être protégé par le législateur ou le juge et de pouvoir s’en prendre à un responsable ».

Ces dernières années, les virus, les épidémies, il y a eu des procès en responsabilité délictuelle. Et l’État de plus en plus souvent, quand il n’est pas possible d’identifier un responsable, créer des fonds d’indemnisation qui vont assumer la charge financière de l’indemnisation des victimes.

Fiche, article de Mr Lequette, il évoque aussi cette image ; depuis l’aube de l’humanité il y a un certain nombre de phénomènes négatifs créant des dommages. 

 

Le critère fondamental de la responsabilité civile, qui est celui de la faute prouvée ou présumée, diminue en importance. C’est la raison pour laquelle, la Cour de Cassation, une bonne partie de la doctrine, et maintenant le législateur français et européen s’oriente vers des responsabilités objectives adossées à des assurances systématiques. Responsabilité objective qui vont être partagée entre les individus si on peut déterminer la faute individuelle ou des cas où l’on ne peut pas désigner de personne, c’est l’État qui se retrouve garant. Nous sommes rentrées dans une société de la garantie de réparation des dommages extra contractuelle, tout spécialement quand ils sont de nature corporels.

 

En droit des contrats on est encore dans le sillage classique des romains. En responsabilité extra contractuelle on l’a dépassé.

Il y a un auteur, Mme Viney, qui a fait sa thèse dans les années 60 appelé “le déclin de la responsabilité individuelle“. La responsabilité tirée du droit des obligations lui même tiré du droit naturel est brisé.

Le droit pénal reste tout de même fondé sur la faute même si elle est d’imprudence.

Dans le droit des contrats on est passé d’une philosophie et d’une technique totalement différente. Si dans de plus en plus de cas on condamne une personne parce qu’elle est assurée en se souciant du dommage (pas de la faute, pas de lien de causalité). Le dommage ne devient pas le seul élément constitutif de la responsabilité mais devient l’élément prépondérant qui emporte les autres.

 

Section 2 : Les sources de la responsabilité du droit contractuel

Au départ c’est le Code Civil de 1804 et les textes de Portalis &Co : article 1382 et suivants > textes très bien car large, et s’applique à toutes sortes de situations. Ces textes se sont suffis à eux même pendant très longtemps. Et la Cour de Cassation dans ces fameux grands arrêts, elle a utilisé au maximum les méthodes d’interprétation de la loi et notamment celles laissées par Saley ; de sorte qu’elle a appliqué ces vieux textes aux camions, voitures, avions, … Le petit inconvénient c’est que ça créer une masse jurisprudentielle importante, de sorte que lorsqu’on fait le cour de droit de la responsabilité, lorsqu’on est avocat, on passe plus de temps à s’immerger dans la jurisprudence qu’à lire les textes.

Les effets pervers c’est qu’on n’est pas à l’abri de revirement de jurisprudence ; par ex la Cour de Cassation dans l’affaire d’un piéton qui traverse un boulevard la nuit en dehors des passages, en courant quand il pleut, il est renversé et se retrouve avec 2 jambes cassés :

  • soit on considère qu’il est à l’origine de son propre dommage = pas d’indemnisation car par de faute du conducteur
  • soit on considère que les 2 sont responsables = partage de responsabilité, donc la moitié de la réparation
  • soit on considère (Stark) qu’il y a un dommage = réparation à 100% et tant pis pour sa faute

La Cour de Cassation, dans certains arrêts a dit, pas d’indemnisation du tout, dans d’autre partage et encore d’autre réparation intégrale = instabilité > problème d’un droit jurisprudentielle car droit mouvant. Cependant il restait, selon le juge, serviteur de la loi, encré sur une responsabilité objective et individuelle avec un minimum de causalité à la charge du défendeur (qui dit causalité dit faute présumée) ; c’est la raison pour laquelle, pour appliquer les idées de Stark de détacher complètement le droit de la responsabilité de ses racines de droit naturel, il fallait des lois, et en matière de droit de la circulation, la loi Badinter de 1985 a fait ce que la Cour de Cassation ne pouvait pas. La loi en matière de circulation a fait que le simple fait d’être au volant d’un véhicule et d’heurter quelqu’un à l’origine de son propre dommage, conduira à notre condamnation automatique.

 

Henri Mazaud a beaucoup défendu le fait que la responsabilité humaine est fondée sur la faute prouvée ou présumée puis le caractère commun de la responsabilité contractuelle et délictuelle. 

On voit que la cause étrangère diminue en responsabilité extra contractuelle dès lors qu’il y a dommage corporel. Ce qu’on trouve aussi en matière de santé > responsabilité presque automatique quant aux vaccins, médicaments, …

 

L’argent des fonds fait par l’État vient des assureurs qui eux le prennent de notre poche ; quand ce n’est pas l’impôt, c’est l’assurance. On paiera de plus en plus pour les dommages collectifs. Par conséquent des fonds ce sont créés, comme celui pour le terrorisme ; les victimes ou famille vont être indemnisés par l’État qui aura prix l’argent sur des fonds spéciaux des compagnies d’assurance. Il y a aussi des fonds sur l’amiante, sur le SIDA, …

 

Droit commun de la responsabilité contractuelle fondée sur les textes et la masse jurisprudentielle. On a aussi un droit spécial qui va encore plus loin, fondé sur la loi, c’est bizarre car c’est la loi qui déroge à la jurisprudence.

La question s’est posée de savoir comme pour la réforme du droit des contrats, il devrait y avoir une réforme du droit de la responsabilité extra contractuelle.

La loi de 1985 n’a pas été codifié dans le Code Civil, pratiquement aucune d’ailleurs, sauf celle relatif aux produits défectueux, aux articles 1386-1 et suivants du Code Civil.

Catala, qui est à l’origine du projet de réforme des contrats, considérait qu’en raison d’une réforme du droit des contrats, autant le faire en intégralité, il avait donc formé un groupe de travail dans l’optique de réformer le droit de la responsabilité extra contractuelle. Groupe formé d’ancien prof, comme Mr Dury ancien Président d’Assas, et Mme Viney ; il a rendu un projet codifiant beaucoup la jurisprudence en restant dans une technique juridique classique. Le ministère l’a mis dans un tiroir.

Dans la réforme des contrats on a vu qu’il y a des références aux mesures de réparation, causalité, dommage, … C’est la raison pour laquelle des article sont été écrit disant que si on refait le droit des obligations autant tout mettre ensemble : cause étrangère, perte d’une chance, … Il existait déjà un projet tout fait, mais pas de réponse.

Entre temps un 2ème groupe de travail présidé par Mr Terré à été mis en place, il a travaillé à son tour pour un projet de réforme sur la responsabilité extra contractuelle, mais ce projet est également dans un tiroir.

Par conséquent on va arriver à cette situation où on aura à la fin de l’année la réforme du contrat, mais sur l’interprétation, la formation, … mais des effets quand il n’est pas exécuté ? Non.

Avenir des sources : Il y aura de nouvelles directives de l’UE, et une nouvelle décision de la CJUE, et probablement la CEDH s’en mêlera sous couvert des droits fondamentaux. Quant au Conseil Constitutionnel il a rendu des décisions où il rappelle la responsabilité individuelle pour faute, mais ne semble pas hostile à la responsabilité objective.

 

Titre 1 : Les éléments constitutifs de la responsabilité délictuelle et personnelle

Personnelle = pour bien comprendre les mécanismes de responsabilité comme le voulait Portalis & Co., il y a 2 sortes de responsabilités > on est responsable de son propre fait, son comportement, responsable vis à vis des autres, mais on peut être responsable aussi du fait de ceux qu’on doit répondre, de ceux pour qui ont est garant. D’ailleurs il existe une assurance de responsabilité parentale obligatoire. Personnelle à la différence de pour autrui.

Le siège de cette responsabilité c’est l’art 1382 du Code Civil = texte qui donne les éléments constitutifs de la responsabilité personnelle > on a les principaux éléments « fait » « cause » « dommage ». Un texte d’une grande généralité qui fait qu’il peut s’appliquer à toutes les situations. Arrêt de la Cour d’Appel de Paris 2015 : L’Oréal et Cartier. Pas besoin de changer 1382 car méthode d’interprétation, Saley.

 

Chapitre 1 : Le fait générateur de la responsabilité extra contractuelle

Le fait est plus objectif que la faute, la faute est une subdivision du fait illicite.

Section 1 : La faute

La faute entrainant un dommage est forcément un fait illicite. C’est un élément commun aux responsabilités contractuelles et délictuelles de sorte qu’il n’est pas compliqué de faire une 1ère définition de la faute = comportement anormal, anti social de nature à causer un dommage à autrui.

Sous section 1 : La notion de faute

Chez les romains, la faute avait été définie très tôt par un juriste qui s’appelait Aquilius. Pendant des siècles, les juristes, avocats, professeurs évoquaient la faute aquilienne. C’est la faute standard, à la base de tout le droit de la responsabilité, comportement contraire à celui d’un bon père de famille. Lien sociologique entre la normalité et l’anormalité.

Planiol avait donné un rattachement proche de la morale et de la religion ; la faute c’est le fait de nuire à autrui par un écart de conduite. C’est aussi contraire au contrat social de Rousseau.

Dans l’avant projet Catala, la faute est définie comme fait illicite ou anormal.

Le projet Terré met plutôt l’accent sur le point de savoir si le fait est volontaire ou de négligence.

 

Pendant très longtemps civile, a été très proche de la faute pénale car point commun avec la morale. Le fait de transgresser ce que la loi interdit ou ce que les bonnes mœurs interdisent – Ex : les troubles anormaux du voisinage, il y a une sanction pénale. Ce distinguant entre les 2 grands types de fautes énoncées à 1382 et 1383 qu’on retrouve en pénal, la faute volontaire, en conscience mais aussi la faute de négligence ou d’imprudence. Evidemment quand c’est volontaire, la morale va être plus forte. Il est clair que les conditions de la responsabilité civile sont plus faciles à engager que celle de la responsabilité pénale, car en pénal il faut rechercher l’élément moral de l’infraction, de façon beaucoup plus précise et exigeante qu’en matière civile.

 

Internet : est-ce que cette faute aquilienne peut encore être utilisée dans le monde immatériel d’internet ? Oui :

  • méthode d’interprétation
  • internet = pur moyen matériel car on est derrière internet.

Le problème c’est que sur internet on peut poser beaucoup de faute. Sur FB, il y a des propos/images qui peuvent causer du mal > possibilité de cause des dommages à autrui. Ou les sites d’évaluation des restaurants, films, … Il y a aussi toutes sortes d’atteinte comme celle à la VP, dénigrement de la personne, concurrence déloyale.

 

Le texte de l’article 1382 ne distingue pas, même si à l’époque il n’y a avait pas internet. Mais compte tenu de sa généralité on peut s’en servir pour internet. Le problème c’est que sur internet, les auteurs de fautes, de fait illicite peuvent être anonyme ou pseudonyme et puis même si il y a leurs noms, encore faut-il pouvoir déterminer leurs domiciles ne serait ce que pour envoyer un huissier. En pratique, sur le fondement de l’article 1382, la plupart des victimes ne pouvait pas finalement retrouver l’auteur personnel, principal, préfèrent engager la responsabilité délictuelle de celui ou de celle qui lui fournit les moyens, le complice. Sur internet il y en a plusieurs, le 1er est le fournisseur d’hébergement (ex : Youtube, FB, …). La plupart d’entre eux, disent qu’il y a des milliards de donnés sur la plateforme et qu’en conséquent le contrôle n’est pas possible et donc pas du faute ; langage pas complètement idiot, mais pas complètement exact car les logiciels informatiques sont d’une telle précision que les plateformes peuvent parfaitement individualiser ce qui se passe chez elle. Ce langage consistant à repousser l’application du droit commun a été entendu par les pouvoirs publics ; l’UE a pris une directive en 2000 transposée par une loi de 2004. Cette directive pose une règle simple « le professionnel d’internet n’a pas d’obligation générale de surveiller, il n’est responsable qu’en cas de faute caractérisée » c’est à dire si il a été informé d’un comportement illicite sur la plateforme sans prendre de mesure pour y mettre fin. Cette information de la part de la victime obéit à un formalisme très strict énoncé par la transposition de 2004. Ici, l’UE écarte le principe de responsabilité individuelle pour faute simple, pour lui substituer la faute caractérisée. Pourquoi cette directive qui déroge au droit commun ? Car en 2000 c’était la révolution = culture ; l’idée a été de favoriser le commerce électronique en empêchant au maximum que les responsables d’internet voient leurs responsabilités s’engager.

C’est un régime très libéral qui a été mis en place, 16 ans après les professionnels d’Internet sont devenus des géants avec des forces économiques et sociales considérables qui ont bénéficié d’un parapluie juridique. Ils peuvent ainsi résister aux réclamations des victimes collatérales du fait du développement d’internet.

La CJUE et la Cour de Cassation ont rendu beaucoup de décisions qui manifestent que la responsabilité individuelle ne sera engagée que si il est prouvé qu’elle a eu connaissance des comportements illicites se déroulant sur la plateforme et qu’elle n’a rien fait pour y mettre fin.

 

La CJUE a étendu cette immunité relative tiré de la directive de 2000 profitant aux plateformes internet aux moteurs de recherche. Le problème se pose aussi au sujet des moteurs de recherche qui conduisent aux donnés illicites. La CJUE dans plusieurs années a fait bénéficier Google de cette immunité relative considérant que le moteur de recherche n’est qu’un instrument passif même si il conduit à des donnés illicites.

 

Aujourd’hui la faute aquilienne est toujours présente sur internet mais les conditions de poursuite pour engager la responsabilité délictuelle des individus sont rendues extrêmement difficile par l’État et la position des juridictions.

 

  • 1. Les rapports entre l’éthique et la responsabilité civile

Lorsque la faute est volontaire, il y a un rapport avec la morale. La faute civile devrait être synonyme de la faute éthique.

Il y a quelques années, la Cour de Cassation a estimé qu’une faute éthique ne donne pas lieu nécessairement à une responsabilité civile – Arrêt Ch. Com, 10 Sept. 2013 : concernant des experts comptables. Il arrive assez souvent qu’en client vienne confier ses intérêts pour faire un procès. Le client n’est pas content de son avocat et va donc en voir un 2ème. La q° est de savoir si le 2ème avocat/comptable récupère le dossier sans informer le 1er, prendre contact avec le 1er pour aménager la transition. Dans cette affaire le 2ème comptable commence à travailler sans avoir de contact avec le 1er, cela ne se fait pas, déjà c’est contraire à l’éthique. C’était tout près de la concurrence déloyale. La q° était donc de savoir si cette faute éthique était source de responsabilité délictuelle. La Cour de Cassation avait dit non car ne couvre pas les conditions de l’article 1382. Ce n’est pas une faute de récupérer un client mécontent d’un confrère, mais il y a l’éthique à respecter c’est a dire informer le confrère pour savoir si au moins il lui doit encore des honoraires.

 

Par conséquent on voit que le concept de faute n’est pas toujours sanctionné alors qu’il devrait l’être (ex d’internet et éthique).

Il existe un 3ème exemple relatif à la faute sportive. Arrêt 2ème Ch. Civ, 20 Nov. 2014 : il u a un rapport contractuel entre le joueur et l’organisateur du match, mais entre les joueurs il n’y a pas de contrat. En matière sportive peut-il  y avoir une responsabilité ou doit-on considérer qu’il y a une immunité ? Dans l’arrêt, il s’agissait d’un gardien de but qui avait taclé un joueur victime de plusieurs fractures. Il avait pris un carton jaune, faute éthique. Est-ce qu’il avait aussi commis une faute délictuelle ? La Cour dit que non car il faudrait une faute caractérisée.

En matière sportive il y a une notion d’acceptation des risques, ce qui fait qu’il y a une sorte d’acceptation de la victime d’un éventuel dommage.

 

Il y a donc un certain libéralisme dans de nombreux domaines du droit de la responsabilité civile sans une cohérence parfaite.

 

Dans le domaine de l’environnement, la Cour de Cassation accepte plus facilement d’engager la responsabilité délictuelle des personnes qui ont pris le risque par une faute pas forcément intentionnelle, de polluer l’environnement. Dans un arrêt de la Ch. Crim, Erika du 25 Sept. 2012 : la Cour de Cassation a considéré que la faute ça peut être aussi la témérité.

Il est donc difficile de trouver une cohérence complète entre les différentes juridictions touchant les différents domaines du droit.

 

  • 2. L’étendu et la forme des fautes

La jurisprudence et la doctrine ont distingués deux types de comportements et le projet Viney/Catala reprend et codifie ces deux types de fautes :

  • les fautes par action
  • les fautes par omission

 

Le 1er arrêt date de 1951, Branly : il y avait eu dans les années 50 un ouvrage de vulgarisation sur l’histoire de la radio et l’auteur du livre avait cité tout le monde sauf Branly. Il y a eu un procès qui reprochait à l’auteur et à l’éditeur de ne pas avoir mentionné le nom de Branly. La Cour de Cassation a estimé que c’était une faute par omission.

Dans l’un des arrêts d’AP de Mai 1984, il s’agissait d’un électricien qui n’avait pas bien vérifié l’installation électrique d’un appartement et nu enfant s’était électrocuté. La Cour avait retenue la faute par omission.

C’est à celui qui prétend qu’une personne lui a causé un dommage d’en administrer la preuve. Régulièrement, la jurisprudence pose des présomptions de responsabilité.

 

Sous-section 2 : Le mode d’appréciation de la faute

Dès lors que le critère est le comportement anormal, on apprécie la normalité au regard du comportement de la personne raisonnable = appréciation in abstracto. Qu’aurait fait l’individu raisonnable ? Tout tourne donc autour de la personne raisonnable et de ce que les juges en tireront. Cependant, la jurisprudence a affiné cette notion de personne raisonnable, les juges considèrent parfois que la personne raisonnable doit être appréciée au regard du secteur visé. C’est la 1ère limite de l’appréciation in abstracto.

La 2ème limite est plus générale, elle tient à la notion même de personne raisonnable. Il y a des personnes qui causes des dommages et qui ne sont pas raisonnable ; les déments et les enfants.

Pour l’enfant, la responsabilité suppose le discernement et la conscience de la portée de ses actes licites ou illicites. La doctrine et la jurisprudence y sont défavorables. En doctrine, l’enfant qui n’a pas l’âge du discernement est l’infans. D. Mazeaud était très hostile à cette responsabilité car selon lui, nous sommes responsables vis à vis d’autrui et de la société en tant qu’ayant conscience de nos actes. Cependant, les parents doivent avoir souscrit une responsabilité civile où ils s’engagent à être responsables des faits de leurs enfants. Cette question du discernement est aussi celle de l’imputabilité. Par conséquent, pendant très longtemps le système français a été celui d’une irresponsabilité de l’enfant. Cependant, à partir du moment où la responsabilité des parents s’imbriquait sur la responsabilité de l’enfant, la question se posait. Finalement dans ses arrêts d’AP de Mai 1984, la Cour de Cassation à procédé à un revirement en considérant que l’enfant même sil n’est pas conscient de ses actes, est responsable de ceux-ci de sorte qu’il doit réparer le dommage même si c’est l’assureur des parents qui le fera à sa place. La Cour de Cassation a utilisé un nouveau vocabulaire : elle a retiré le mot faute qui s’applique difficilement à un enfant inconscient et elle lui a substitué l’expression de « fait dommageable » ; la notion de fait est plus large que celle de faute.

S’agissant du dément, nous avons une coupure avec la responsabilité pénale. En pénal, le dément alors même qu’il a commis un acte grave n’est pas responsable pénalement. En droit civil ça a été le cas pendant très longtemps ; mais plus tard Carbonnier avait été chargé par le Garde des Sceaux de faire un texte pour prévoir la responsabilité civile du dément > article 414-3 du Code Civil « celui qui a causé un dommage à autrui alors qu’il était sous l’empire d’un trouble mental n’en est pas moins obligé à réparation »

 

Le Monde sur Twitter « Twitter supprime plus de 125 milles comptes pour comptes tenus terroristes » > preuve que ce que les plateformes ont la capacité d’identifier très précisément ce qui se passe chez elle.

 

Quelqu’un sous l’empire d’un trouble mental et qui provoque une infraction, sera irresponsable pénalement mais responsable civilement. Par conséquent, il devra indemniser sa victime. Peut-il indemniser sa victime ? Dans le cas du majeur dément, ses parents ne sont pas responsables pour lui. Ce texte suppose, sauf a être complètement symbolique, une assurance. Le majeur dément en règle générale est surveillé, il est onc fréquent que les victimes assignent l’établissement de soins ou le médecin. S’il n’y en a pas, il st possible que l’État par l’intermédiaire de fonds d’indemnisation, les indemnise.

 

Cas des personnes morales : une personne morale peut cause des dommages par l’intermédiaire de ses représentants. En effet, la personne morale est représentée par des personnes physiques qui agissent pour son compte. Ex du pollueur : le capitaine qui a pris la mer avec un navire en mauvais état, il a agi pour le compte de l’armateur (= société), par conséquent il faut admettre la responsabilité de la personne morale ; le droit civil l’a fait très vite, mais le droit pénal a mis du temps. Finalement le droit pénal s’y est mis sous l’empire de Badinter qui a mit en chantier la réforme du Code Pénal où il a intégré la responsabilité des personnes morales.

La question va être en droit civil comme en droit pénal, de savoir si la personne civile qui a commis l’acte illicite est aussi responsable ?  

 

Sous-section 3 : Les degrés de la faute

On a vu en droit des contrats qu’à priori il n’y a pas de degré dans la faute civile, toutes les faites dès lors qu’elles causent un dommage, entrainent la responsabilité de l’auteur. C’est aussi le cas en matière extra contractuelle et c’est la position prise par Aquilius.

Il existe des exceptions où le droit exige des fautes caractérisées, lourde ou grave. Exemple dans le domaine d’internet : la jurisprudence de la CJUE et les textes de la directive de 2000 prévoient que les plateformes ne voient leur responsabilité engagée qu’en cas de faute caractérisé.

Autre hypothèse, en matière d’accident du travail. Il y a des systèmes de plafonnement de la responsabilité du chef d’entreprise sauf s’il est prouvé qu’ils ont commis une faute inexcusable, et à l’inverse indemnisation des salariés sauf si faute inexcusable. La faute inexcusable vient soit aggraver la responsabilité des auteurs soit diminuer l’indemnisation des victimes. Pareil pour les accidents de la circulation où la victime est toujours indemnisée sauf si faute inexcusable.

Dans l’abus de droit il n’y a pas de degré, dès lors que quelqu’un abuse de son droit il y a une faute aquilienne donc réparation, peu importe que la faute soit volontaire ou d’imprudence.

 

Sous-section 4 : La preuve de la faute

La faute est un fait juridique qui se prouve donc par tout moyen.

Ex : quelqu’un qui est renversé dans la rue, le conducteur prétend qu’il a traversé en courant alors qu’il roulait normalement, en vrai le conducteur roulait très vite. Comment prouver ? Demander aux passants de témoigner. Puis il y a des présomptions. Bref, tous les moyens de preuves sont admissibles pour démontrer une activité illicite.

La charge de la preuve incombe au demandeur ; mais dans certains cas il est difficile de prouver la faute du défendeur de sorte que le juge voir parfois la loi va le dispenser de faire la preuve en lui octroyant une présomption de responsabilité.

 

Section 2 : La responsabilité pour risque

C’est notamment Josserand qui a assez bien théorisé cette notion du risque. Au fond en observant les comportements sociaux, on voit que beaucoup d’entre nous prennent des risques, de sorte que si on parle du fait que la faute n’est pas toujours facile à prouver (fond, charge, moyen), on peut estimer que dès lors que certains d’entre nous prenons des risques par nos activités, nous devons les assumer, de sorte que si on cause un dommage le juge sera moins sévère dans la nécessité de prouver la faute. S’il y a un accident il faut assumer > notion de risque créé.

Cette notion de risque qui vient s’ajouter à la faute aquilienne traditionnelle on le trouve aussi plus spécialement pour les entreprises, professionnels > notion de risque profit = celui qui a une activité économique, laquelle peut potentiellement causer des dommages à autrui. Par conséquent de nombreuses entreprises verront leur responsabilité engagée plus facilement dès lors qu’en ouvrant leur commerce, elles acceptent par avance le risque de cause un dommage à autrui. Cela explique aussi la responsabilité des chefs d’entreprise en matière d’accident du travail.

Est-ce qu’une faute morale suffit pour constituer une faute civile ? Il semblerait que oui – ex : comptable qui ne prévient pas son collègue en récupérant le dossier = faute éthique + civile/concurrence déloyale.

Le principe de précaution : quand on entreprend une activité à risque, il faut prendre ses précautions pour éviter que l’aléa, le risque se produise. Ex : boite de nuit qui insonorise au maximum.

 

Section 3 : Le fondement de la garantie du fait personnel

On a toujours l’idée que celui ou celle qui entreprend telle ou telle activité a conscience des risques qu’il peut causer par un comportement anormal. Il y a des cas où l’activité sera normale mais causera quand même un dommage à autrui. C’est l’idée de la socialisation des comportements dommageables > s’il y a un dommage, même s’il n’y a pas de faute prouvée, et même si le risque est faible, celui qui est à l’origine de l’activité sera néanmoins condamné – ex : accident de la circulation = la loi Badinter est allée plus loin que la jurisprudence et a consacré le fondement de la garantie et la socialisation de la réparation du dommage > le cycliste renversé par une voiture qui glisse sur la chaussée et qui est ensuite heurté par une autre voiture. S’il obtient la responsabilité de la 2ème voiture sur le fondement du risque il devrait être débouté. Si on conduit normalement, pourquoi le simple fait d’être au volant d’une voiture entraine notre responsabilité alors qu’une masse corporelle vient se trouver devant notre voiture.

Il a fait voter cette loi 40 ans après en reprenant l’idée de cet arrêt. S’il y a un dommage, il faut qu’il soit réparé, donc même si le conducteur y est pour rien il doit être condamné. Cette loi Badinter ne tient cependant pas compte de l’aspect psychologique de celui ou de celle qui va être condamnée alors qu’il est innocent. Certes l’assureur va payer mais il y aura un malus. Indépendamment de cela, un tribunal le condamnera en tant que responsable = choquant.

Soit on peut identifier un responsable alors même qu’il n’aurait pas commis de faute – ex : accident de la circulation ou responsabilité des produits défectueux, soit il n’y a pas de responsable individuellement et c’est l’État qui prendra en charge – ex : terrorisme / maladie.

Par conséquent, on voit que le dommage absorbe la faute ou la supprime et il absorbe aussi le lien de causalité. Josserand (texte fiche) avait anticipé ; on ne supporte plus dans notre société, un dommage sans réparation, il faut un responsable.

Dans l’avant projet Viney/Catala de 2007 il y a beaucoup de codification, et il y a une sorte d’équilibre que les auteurs ont voulu maintenir entre l’ancienne responsabilité de Portalis et les risques/garantie.

On trouve une assurance de responsabilité dans tous les domaines.

 

Chapitre 2 : Le lien de causalité

  La cause, la causalité c’est la raison d’un engagement contractuel et c’est la raison d’un évènement délictuel (domaine extracontractuel).

 Section 1 : Les principes

Un grand prof d’Assas, Esmein avait écrit au Dalloz il y a une cinquantaine d’année un article appelé Le nez de Cléopâtre où il reprend la pensée de Pascal selon laquelle il y a dans les évènements humains des chaines de causalité, et l’applique au droit de la responsabilité. Il y a plusieurs arrêts concernant un étudiant qui est renversé lorsqu’il se rend à un examen, redouble, triple et arrête ses études = chaine de causalité – peut-il demander une indemnisation au chauffeur pour dommage physique et perte d’une chance ? Il faut déterminer le rapport de causalité. Il est incontestable que si le conducteur n’avait pas renversé l’étudiant il aurait passé son examen, il est probable qu’il aurait validé. Avec cet événement originaire il y a bien un événement causal, de sorte que si on a une conception de la responsabilité civile libérale le conducteur devrait être condamné sur le fondement de la perte de chance ; certains arrêts l’admettent. Plus la chaine de causalité s’allonge plus les questions de probabilités deviennent difficiles à envisager. On pourra considérer qu’on se limiterait à la réparation du dommage physique.

En doctrine, on a théorisé 2 courants :

  • L’équivalence des conditions : toutes les causes se valent. Le défendeur qui est assigné est à l’origine du dommage même s’il est indirect et non immédiat. La Cour de Cassation s’est prononcé plusieurs fois sur la question des transfusions sanguines (sang contaminé) > accepter la condamnation de celui qui a causé l’accident (1) qui a conduit à la nécessité d’une transfusion sanguine (2). Parfois la victime assigne les 2 (skieur et hôpital), l’intérêt c’est que les 2 sont assurés.
  • Théorie antagoniste, plus causaliste qui s’attache à la cause immédiate et directe : causalité adéquate > le skieur de ne sera pas condamner mais l’hôpital oui.

Actualité réforme : les numéros du projet ont encore changé

  • Art 1382 du Code Civil = art 1240 de l’ordonnance
  • Art 1383 du Code Civil = art 1241 de l’ordonnance

Pas d’application immédiate  –>  Oct. 2016.

 

Le lien de causalité en matière extra contractuelle n’est pas traitée dans l’ordonnance. Les deux théories sont appliquées alternativement par la Cour de Cassation – Arrêt Ch. Civ., 9 Janv. 1943, Franck : quelqu’un qui avait oublié de fermer à clef sa voiture, la voiture est volée et le voleur dans son utilisation renverse un piéton. Voleur insolvable, est ce que la victime peut agir en responsabilité civile pour faute de négligence contre le propriétaire de la voiture ?

  • Équivalence des conditions : si le propriétaire de la voiture l’avait fermé, le voleur n’aurait pas pu facilement la voiture, donc n‘aurait pas pu renverser le piéton et donc pas de dommage > conducteur responsable
  • Cause immédiate et directe : la cause du dommage est la voiture donc le seul responsable est le voleur même s’il est insolvable —> Choix de la Cour.

Aujourd’hui en 2016, on ne sait pas trop quelle décision elle aurait pris. Mais ce n’est pas très important car avec l’extension de la garantie, il existe un fond d’indemnisation alimenté par les assureurs et permettant d’indemniser toute victime alors même que l’auteur du dommage est inconnu ou insolvable.

 

Dans d’autre cas, la Cour se montre plus libérale et fait jouer l’équivalence des conditions. Par exemple, il y a des décisions où à la suite d’un accident une victime devient dépressive et se suicide ; il est arrivé à la Cour de Cassation d’estimer que celui qui est à l’origine de l’accident doit réparer le préjudice moral de la famille alors qu’en réalité la cause immédiate c’est le suicide.

Affaire Perruche : l’enfant qui nait handicapé, la cause immédiate est la malformation génétique qui vient de la mère ou du père, mais une autre cause c’est la faute du médecin qui n’a pas diagnostiqué sérieusement. La Cour de Cassation a estimé que le médecin est responsable.

 

Depuis plusieurs années, il y a de nombreux procès au sujet de la responsabilité des laboratoires et des médecins, notamment au sujets des vaccinations (ex : SIDA, hépatite, …) et les maladies d’épidémies ; le problème se pause de la causalité et de la preuve.

Arrêt de la 1ère Ch. Civ., 10 Juillet 2013 (fiche) : vaccination contre l’hépatite B. 6 ans plus tard les vaccins, la personne a une sclérose en plaques. Aucune donnée exacte ne permet de déterminer la cause immédiate et directe de la sclérose > vaccination ou prédisposition de la victime ? « son histoire familiale et son origine ethnique ». La Cour de Cassation considère que celui à l’origine de la vaccination est responsable. Elle consacre alors la théorie de l’équivalence des conditions car on n’est pas sûr que la vaccination soit la cause directe et du point de vue de la charge de la preuve ; la Cour présume le lien de causalité.

 —>  Double dérogation, il n’est pas acquis que la vaccination est la causalité directe (6ans) et contrairement à l’art 1382/1240 du Code Civil la victime est dispensée de prouver le lien de causalité. La Cour de Cassation a utilisé une présomption qui peut être créée par le juge ou être issue de la loi pour alléger la charge de la preuve « présomption grave, précise et concordante », Art 1382 de l’ordonnance.

Aujourd’hui, la tendance majoritaire semble être l’équivalence des conditions ; il suffit que le fait reproché ai été une des causes possibles du dommage pour que le défendeur se trouve condamné.

 

Section 2 : Les corolaires

Plusieurs questions se posent :

  • Que se passe t-il quand le dommage apparaît longtemps après le fait générateur ? En réalité plus le temps s’écoule plus l’incertitude de la causalité s’aggrave – Arrêt de 2013 critiquable car dispense de preuve.

Il y a des cas où une victime subit un dommage physique (ex : jambe cassée) et au bout de 3 ans elle commence à boiter ; peut-elle faire un procès pour demander indemnisation de son nouveau dommage ? Oui, mais il faudra prouver que c’est bien le fait générateur. Le juge va nommer un expert pour apprécier la preuve. Il va donner son sentiment sur le rattachement entre l’accident et le nouveau dommage subi par la victime. Si probabilité de plus de 5% = indemnisation de la victime. Parfois ça sera moins évident : si victime à une fragilité osseuse génétique par exemple.

  • Que se passe t-il en cas de causalité partielle (plusieurs causes successives ou concomitantes) ? Dans l’arrêt Franck il y avait plusieurs causes. Est ce qu’on ne peut pas considérer que le défendeur ne pourra être responsable que pour la cause qu’on lui a imputée avec une probabilité suffisante ? La Cour de Cassation a fait jouer cette réparation à plusieurs reprises : Arrêt de 1969, Gueffier, la Cour a dit que celui qui est à l’origine partielle du dommage doit néanmoins être condamné pour le tout – accident de la route, une collision. Le passager assigne non pas le conducteur de la voiture dans laquelle il était, mais celui de la voiture avec laquelle il y a eu collision. Mais les 2 conducteurs sont à l’origine du dommage, de sorte qu’on devrait considérer que la victime devrait assigner les 2 conducteurs qui assumerait de moitié la réparation. Dans cet arrêt la Cour a dit que la victime peut assigner seulement un des responsables et le faire condamner au tout.

Il y a une autre hypothèse où la victime assigne les 2 conducteurs et donc obtenir une condamnation in solidum c’est à dire qu’on fait condamner plusieurs défendeurs mais on peut faire payer seulement un.

Lorsqu’une des causes est étrangère, ex du navire : le capitaine va en mer alors que météo très mauvaise, pollution > il faut que l’événement soit imprévisible et irrésistible. Les tempêtes sont annoncées par la météo marine.

Tendance à l’indemnisation le plus fréquemment possible.

 

Chapitre 3 : Le dommage

L’ordonnance du 10 Fév. 2016 ne change pas.

 Section 1 : Le principe

Qu’est ce que le dommage ? Portalis & Co. se sont tenus à ce terme car la loi pose les grands principes et le juge les appliquent. Ils n’ont pas défini le mot dommage, ils ont chargé le juge de le faire, et c’est ce que fait la Cour de Cassation.

Les avant-projets qui n’ont pas été pris par ordonnance, ont voulu codifier la jurisprudence. Mais il n e faut jamais codifier de trop près la jurisprudence sinon ça vieillit mal en cas de revirement. Dans les avant-projets que nous avons il y a plusieurs articles consacrés à la définition, au contenu, à l’application de la notion de dommage – ex : avant-projet Catala « est réparable tout préjudice certain consistant dans la lésion d’un intérêt licite patrimonial ou extra patrimonial, individuel ou collectif ».

La Cour de Cassation quelques soit les chambres a cette tendance générale d’ouvrir le plus possible la réparation du dommage. Arrêt : chien victime d’une maladie du fait d’un responsable. La Cour estime que le dommage moral de voir souffrir son chien doit être réparé.

La Cour de Cassation et la doctrine ont résumé cette philosophie indemnitaire dans la formule suivante : le principe de réparation intégrale. C’est un principe général de droit privé. La seule limite qu’avait posé la Cour de Cassation et qui figure dans l’avant-projet Catala est que le dommage doit être licite (ex : accident qui engendre un arrêt de travail, mais travail pas déclaré). Mais avec la CEDH considère qu’alors même qu’on est en situation illicite on peut se prévaloir d’un droit subjectif.

La Cour de Cassation admet également la réparation du dommage d’une personne morale.

 —>  Conception large du dommage et donc de sa réparation. 

Ce principe se résout essentiellement par une indemnisation en argent (davantage que dans la responsabilité contractuelle). Comme en matière contractuelle, c’est le juge qui sera amené à évaluer souverainement le dommage : appréciation souveraine des dommages et intérêts.

 

Section 2 : Le contenu du dommage

  • 1. Les caractéristiques du dommage réparable

Depuis le Droit de la responsabilité le dommage pour être réparé doit être certain ou probable s’oppose à ça le dommage éventuel ou hypothétique. Le dommage doit également être direct, directement provoqué par le fait illicite. Le dommage doit être la conséquence du fait illicite. Il y a des cas où ça ne pose pas de problème.

Il y a 2 sortes de dommages : le dommage factuel (ex : bras cassé) et le dommage futur. Quel est la différence entre le dommage futur, éventuel ou hypothétique ?   Arrêts :

  • lors d’une course hippique, le jockey cravache tellement son cheval qu’il s’écroule. Perte de chance pour les joueurs, mais on ne sait pas si le cheval aurait gagné, c’est hypothétique donc pas de réparation.
  • Jeune fille de 19ans qui est renversée et l’empêche d’aller à son bac français. La Cour de Cassation dit que la probabilité que la fille fasse des études est faible car 19ans et toujours en 1ère
  • Même hypothèse pour étudiant en médecine, étudiant brillant = réparation

Cela pose parfois des problèmes éthiques. Au sujet du SIDA : celui qui est contaminé par une faute d’un laboratoire, d’un hôpital > victime fait un procès au motif de la perte de chance de vivre plus longtemps, la Cour de Cassation dit oui. Mais accepte de réparer qu’une fraction du gain manqué car ce ne sont que des probabilités.

 

  • 2. Les préjudices économiques et patrimoniaux

= préjudice subit par la victime évaluable en argent et ayant des incidences sur son patrimoine.

 

  1. Les atteintes à la personne

Le plus souvent ce sont des atteintes au corps. Par conséquent si le corps est lésé dans sa matérialité, sa substance du fait d’un accident, et bien en vertu du principe de réparation intégrale, la victime devra être indemnisée > notion de dommage corporel. La jurisprudence admet de très longue date la réparation du dommage corporel quel qu’il soit. Dans un certain nombre de cas.

 

La jurisprudence admet depuis longtemps la réparation du dommage corporel de toutes formes, même les blessures. En effet, la victime sera transportée à l’hôpital sera hospitaliser, rentrer chez elle, s’en suivra une période de consolidation pendant laquelle elle ne pourra pas exercé une quelconque activité. Le juge va faire réparer intégralement le dommage corporel. Le juge reprend de toutes pièces le standard de l’incapacité.

Incapacité physique : il faut distinguer

  • L’incapacité provisoire (hospitalisation et consolidation) > cela a des conséquences sur le patrimoine, ce qui est immédiatement indemnisé. La prise en charge des frais, c’est la SECU qui va payer.
  • L’incapacité permanente : incapacité de reprendre une vie normale de façon permanente. Dommage beaucoup plus grave et on entre dans les calculs de probabilité et pour le préjudice futur. Le juge au jour où il statue va décider une indemnité pour la vie entière de la victime. Le juge raisonnera sur la perte d’une chance, le préjudice éventuel et le gain manqué.
  • Totale : à cause de l’accident la personne ne travaillera plus = le juge évalue le salaire qu’il aurait eu de l’accident à la retraite.
  • Partielle : la victime n’est pas totalement empêchée d’avoir une vite normale = le juge va accorder une indemnisation plus faible car il considère que la personne peut trouver un travail ou des alternatives.

Le juge va tenir compte va tenir compte d’un certain nombre de paramètres : l’âge, la profession, le sexe, … pour affirmer l’évaluation.

Si la victime meurt de ses blessures, elle n’est plus là pour réclamer la réparation. Il n’y a pas d’incapacité, il n’y a plus rien, elle est morte. La question est de savoir si ses proches peuvent demander la réparation du préjudice corporel irrémédiable ? La Cour de Cassation l’a admis, ce qui paraît normal.

Enfin pour être plus clair, l’incapacité permanente peut évoluer, c’est à dire que la jambe cassée peut se retrouver complètement paralysée plus tard. Donc le juge au moment où il statut n’a pas les paramètres et ne peut à savoir mais la victime pourra faire un nouveau procès au moment où le nouveau dommage se produira.

 

Les tribunaux français ont pris l’habitude d’échanger entre eux des statistiques, des sortes de tables, des grilles souvent exprimés en point et après en € qui correspond aux situations. C’est purement indicatif, mais cela fait gagner du temps. C’est ce que font les tribunaux.

 

  1. Les atteintes aux biens

Dans l’accident de ski, les skis sont brisés, les lunettes cassées, elle peut obtenir l’indemnisation des dommages causés à ses propres biens > nouvelles paire de skis, lunettes, …

C’est moins simple lorsqu’il s’agit de bien incorporel – ex : concurrence déloyale, Arrêt Andros : concurrent avait repris le design des publicités d’Andros. Procès pour réparation du préjudice économique > perte du Chiffre d’Affaires donc de la valeur du fond de commerce = préjudice indemnisé.

 

  • 3. Les préjudices non économiques

Comme leur nom l’indique, il n’y a pas d’atteintes au bien et à la personne mais il y a une atteinte à son âme et à ses sentiments. Le dommage qu’on appelle le dommage moral, qu’on a dans notre cerveau du fait du dommage illicite est réparable.

Pendant très longtemps, beaucoup de prof et la Cour de Cassation estimaient que le dommage moral n’était pas réparable pour des raisons à la fois philosophique et pratique. La principale raison : comment évaluer la souffrance ? Par exemple le chien renversé, le propriétaire souffre, mais qu’est-ce que ça vaut ? On entre dans le domaine de l’esprit, question qui remonte plus loin que le XIXème car elle est connue sous le nom latin de precium doloris, soit le prix de la douleur. La Cour de Cassation l’a posé sur l’idée qu’il fallait remettre la victime dans l’état où elle se trouvait avant le fait dommageable. Ce qui est clair c’est que s’il n’y avait pas eu de fait dommageable, il n’y aurait pas eu de souffrance.

La souffrance qui dure plus longtemps, la dépression, le chagrin, de la même façon lorsqu’en animal a été blessé ou tué, la Cour a accepté la réparation de la perte de l’animal, arrêt chienne Mirza. Puis la Cour de Cassation a fait une subdivision dans le préjudice moral, celui de l’angoisse ; par conséquent celui qui a subi un fait illicite et qui craint ensuite est réparable. La Cour laisse celle-ci à l’appréciation du juge. Enfin dans le préjudice moral réparable, la Cour a créer de toute pièce 2 postes :

  • Préjudice esthétique / Fiche TD : Arrêt de la 2ème Civ 11 Déc. 2014 : il s’agissait d’une victime d’attentat ? Elle a eu une déformation faciale au visage qui semblait pouvoir se guérir. C’est le fonds d’indemnisation qui seront condamné. La Cour considère qu’il doit y avoir réparation du préjudice esthétique même s’il est peut-être guérissable.
  • Préjudice d’agrément : on ne fait pas que travailler, survivre, on a aussi des agréments (plaisirs) dans la vie. Or un fait dommageable peut bouleverser ses agréments ou même voir les supprimer : le problème s’est posé pour le sexe ; par exemple quand un homme à la suite d’un accident devient impuissant > principe de réparation intégrale en équivalent / sport (athlète), la Cour admet la réparation de la privation d’une pratique sportive.

Les juges considèrent que ces listes/postes qu’on met dans l’assignation sont cumulables. La seule limite qu’a posée la Cour s’est que cette addition des postes ne doit pas enrichir la victime, injustement. La victime doit avoir prouvé l’existence de son préjudice poste par poste. Il faut justifier la privation d’agrément sinon la Cour de Cassation estime que c’est une forme de « punitive damages ». La Cour cassera si le juge prononce des peines privées sans justifier le préjudice car elle interdit de réparer le dommage au-delà du préjudice.

 

Arrêt 3ème Ch. Civ, 3 Déc. 2015 : cas du squatteur > celui qui s’installe dans votre propriété sans le moindre accord de volonté, il n’y a pas de contrat. S’il refuse de partir faut faire venir la police, et parfois au bout de 4 ans il veut toujours pas partir ; le CEDH n’ose pas le déroger, le squatteur a un droit fondamental à son domicile et donc ne peut pas être expulsé. La Cour a ordonné l’indemnisation du propriétaire (espérons qu’il soit solvable à et la Cour a estimé que le juge du fond avait violé le principe de réparation intégrale.

 

Section 3 : Le dommage par ricochet

Cela désigne juridiquement des victimes qui ne sont pas la victime immédiate et directe du dommage. Ce sont des victimes indirectes mais néanmoins des victimes. Ce sont toutes celle qui vont souffrir elles-mêmes dans leurs patrimoines ou dans leurs cœurs du fait dommageable ; les parents, le mari/la femme, les enfants, les frères et sœurs. La Cour de Cassation, ce qui va être codifié, a considéré que ces victimes là même si elles n’ont pas subi au 1er chef le fait illicite, sont des victimes au 2sd degré mais que leur dommage n’est pas contestable, et que par conséquent leur dommage doit être réparé intégralement.

Pour le dommage économique, il y a des centaines d’arrêts sur l’hypothèse classique des conjoints où l’un travaille ou s’occupe des enfants et par conséquent tout les revenus de la famille viennent d’un des conjoints, s’il a un accident et qu’il ne peut plus travailler il n’y a plus de revenus, donc le conjoint subi lui-même également un préjudice économique.

Le dommage moral/souffrance évidemment c’est un poste les plus fréquemment réparé. L’ensemble des dommages subit par les proches doit être réparés.

Les proches c’est essentiellement la famille, et la Cour de Cassation a dû identifier les membres de la famille. Pendant très longtemps la Cour de Cassation a fait de la morale, de la mauvaise morale, estimait que les couples pas mariés empêchaient de considérer qu’un lien de droit existait. Puis une partie de la doctrine a été critiqué car la perte de revenus qu’on soit marié ou pas est réelle ; la Cour de Cassation admet donc maintenant la réparation par l’auteur du dommage et par son assureur aux couples même s’ils ne sont pas mariés.

Ensuite s’est posé la question pour les couples de mêmes sexes. La Cour de Cassation était très partagée. Finalement après beaucoup de réticence, elle a admis pour les mêmes raisons.

Les considérations morales doivent être chassées.

 

Se pose encore un problème quant au mariage islamique. En effet selon leur religion qui est une sorte de loi, les hommes peuvent avoir plusieurs femmes, ce qui est interdit en France/Europe. L’homme a un accident, est ce que ses 3 femmes peuvent demander réparation du dommage ? Il n’y a pas beaucoup de jurisprudence, mais elle est très partagée ; soit on dit non car ca revient à une sorte de reconnaissance de la polygamie, soit on dit oui avec des questions juridiques intéressantes qui font l’objet du projet de 2016 car on va avoir plusieurs créanciers. Peut-on admettre qu’elles réclament toutes les 3 la réparation intégrale du dommage ? Si oui, l’auteur du dommage doit payer 3 fois … Ou alors doit-on diviser 3 fois la réparation ?  

 

Parmi les victimes par ricochet il reste la question du divorce. Est-ce que le beau-père qui n’a pas de lien juridique avec la belle fille, peut réclamer la réparation du fait d’un dommage ? Oui, il est proche de la victime.

Cela vaut a fortiori pour les grands parents.

 

Il reste des catégories de victime par ricochet, les relations professionnelles. L’employeur peut être une victime par ricochet car l’employeur en cas d’employé blessé doit payer les indemnités maladies. La Cour de Cassation l’a admis.

Chapitre 4 : Les causes de non responsabilité

Si le demandeur ne prouve pas ou ne bénéficie pas de présomption qu’il existe un dommage, il sera débouté.

Pour qu’il y ait réparation il faut 3 éléments : faute, dommage et lien de causalité > cumulé.

Il est rare qu’il n’y ait pas de dommage, surtout que la jurisprudence se contente de présomptions de faute et de lien de causalité. Le dommage relève de l’évaluation souveraine, et peut être assez libérale.

 

Section 1 : Les causes extérieures à la victime

  • 1. Le fait justificatif

Si on prend l’ordre de la loi ou le commandement de l’autorité légitime – ex : vigile privé qui a reçu l’ordre de contenir un manifestant et qui le repousse trop fort, peut-il voir sa responsabilité engagée sur le fondement de 1382 du Code Civil ? Il n’est pas exclu qu’il puisse être exonéré de la responsabilité même s’il a été brusque et violent. Celui qui obéît à un supérieur et qui commet un dommage ne doit pas être responsable civilement et pénalement.

Mais il y a des limites, le commandement doit être légitime, chacun à un devoir de désobéissance. Il y a également une question de proportionnalité.

L’état de nécessité existe aussi en droit civil – ex : un SDF fracture la porte d’une boutique pour y passer la nuit à cause du droit. Le propriétaire peut-il exercer une action contre le SDF ? C’est l’état de nécessité. On l’admet en matière civile mais dans certaines limites.

Tout d’abord la proportionnalité, standard du droit pénal et civil. Puis, il existe des centres sociaux d’accueil, les SDF ne sont pas laisser à eux même.

 

  • 2. La cause étrangère

Il n’y a pas de responsabilité si le défendeur à lui-même subit une contrainte qui peut être une force majeure par un événement naturel ; celui qui marche dans la rue et glisse sur une plaque de glace car la municipalité n’a pas mis de sel, il casse la jambe de son voisin en tombant sur lui – il y a un dommage mais pas de faute, car cause étrangère. Par conséquent on peut admettre que dans un certain nombre de situation, le défendeur ne soit pas responsable. Arrêt de 2013, infection d’un malade (fiche) : on n’a pas tellement la certitude sur la cause scientifique de la maladie survenue, c’est la cause étrangère.

La cause étrangère peut aussi être le fait d’un tiers, le fait imprévisible et irrésistible. Celui qui contraint à faire un cambriolage car menacer par des voyous subit une cause étrangère, le fait d’un tiers qui est irrésistible.

 

  • 3. La coaction

Ex : groupe d’étudiant qui ski et qui heurte un autre skieur qui se retrouve blessé, pas de témoins. Est-ce que la victime va assigner le groupe ? Oui – Que va faire le juge en absence de preuve sur la faute et sur la causalité du dommage ? Doit-il débouter la victime dans le cas d’absence de certitude sur l’auteur ? Ça serait contraire au principe de réparation intégrale. Dans le doute on condamne le groupe. Celui qui va payer pour tous aura un recours contre les autres, c’est un recours en contribution qui divisera en général par fraction égale.

Dans le doute, on condamne tout le monde.

Il y a de la jurisprudence sur des adolescents qui mettent le feu ; le juge les condamne et donc les parents, condamnation in solidum.

Dans les hypothèses de viol collectif on retrouve la même théorie pour l’action civile devant la Cour d’Assise.

 

Section 2 : Les causes de non responsabilité propres à la victime

  • 1. La faute

Que se passe-t-il si au fond il a deux fautes ? Premièrement une faute du demandeur volontaire ou involontaire et la faute de la victime souvent d’imprudence mais qui peut être volontaire.

1ère hypothèse, la légitime défense ; fait justificatif propre à la victime. Le cas le plus classique c’est lors d’un cambriolage, si le bijoutier réagis et violente le cambrioleur, ce dernier peut agir contre le bijoutier en demandant des DOMMAGES ET INTÉRÊTS, mais comme il est à l’origine de son propre dommage : légitime défense du bijoutier. Les conditions sont les mêmes qu’en pénal, notamment la proportionnalité.

 

La faute de la victime est plus générale dans la responsabilité extracontractuelle. Ex : accident de ski, la victime a un niveau débutant et ski sur une piste noire ; le juge peut considérer une exonération totale au regard des circonstances, soit exonération partielle pour le défendeur.

 

La Cour de Cassation est mise devant la question de savoir s’il faut prendre en compte la faute de la victime et dans quelle mesure ?

  • Il existe un 1er courant, où l’on ne prend pas souvent en compte la faute de la victime car on veut réparer son dommage. C’est insupportable de voir une victime qui n’est pas indemnisée de son préjudice même si elle a commis une faute, on n’en tient pas compte et on répare à 100% (Loi Badinter). La logique de la réparation emporte sur tout le reste. C’est le principe directeur de la responsabilité extracontractuelle.
  • Le 2ème courant consiste en un partage de l’indemnisation entre auteur du dommage et la victime auteur d’une faute d’imprudence.

 

Il y a un courant majoritaire mais non unanime tendant à réparer alors même que la victime aurait commis une faute.

 

Le projet Catala a pris le parti, pour le dommage corporel, de ne pas prendre en compte la faute de la victime, sauf dans les cas extrêmes.  

Ex : skieuse musulmane qui ne veut pas que le médecin la déshabille pour la soigner, elle veut que ça soit un médecin femme mais il n’y en a pas. Il faut qu’elle prenne un hélico pour aller à Grenoble. Elle demande ensuite la réparation intégrale au skieur à l’origine du dommage. Est-ce que le défendeur peut lui opposer qu’elle a refusé les soins immédiats qui auraient pu lui permettre de guérir plus vite ? Elle a aggravé son dommage.

Ex : refus de transfusion sanguines des témoins de Jéhovah – le défendeur peut opposer le refus de soins, la Cour de Cassation l’accepte et le projet Catala aussi.

Dans le domaine de la santé publique, le Code de la Santé Publique permet en principe au médecin dans les cas les plus graves de passer outre le refus du patient. Si la patiente musulmane refuse d’être examiné par un médecin homme, en théorie il devrait passer outre.

Le droit doit trouver une solution à chaque problème même si c’est parfois très délicat. Cela rejoins un courant dans le droit des contrats, celui de minimiser son dommage > réduire le plus possible son dommage. Si on a besoin d’une transfusion sanguine, on ne refuse pas, si on le fait on doit assumer.

 

Le faute de la victime lorsqu’elle est prise en compte, est-elle opposable aux victime par ricochet ? La Cour de Cassation a répondu qu’il est logique d’opposer à la victime par ricochet la faute commise par la victime immédiate Ils verront limité la réparation de leur préjudice et non pas une réparation intégrale. Ceci est codifié dans la loi de 1985 dans la loi Badinter.

 

  • 2. Le consentement au dommage

Jurisprudence sur les rapports SM dans l’affaire de la CEDH, les médecins qui avait « torturer » une femme dans le cadre de relations sexuelles SM. L’arrêt avait choqué, car la CEDH avait condamné uniquement sur le fondement qu’elle n’était pas sur que la femme avait consentie, ce qui veut dire qu’à contrario la CEDH aurait accepté. Mais non, on ne peut pas parler de consentement à la commission d’un acte grave et anormal.

Au sujet de l’euthanasie, la famille peut faire un procès contre celui qui a aidé à mourir. Peut-on évoquer le consentement de la victime ?

Ce sont des cas extrêmes.

 

Il existe des cas plus courant du consentement de la victime dans les pratiques sportives. Est ce qu’il est possible de faire un procès à l’adversaire qui m’a blessé lors d’un match de Karaté ou autre ? Il n’y a pas de relation contractuelle, en participant on a accepté le risque. C’est la théorie de l’acceptation des risques, on accepte par avance.

L’école, le club prend pour le compte de ses membres sportifs, une assurance civile de sorte qu’il n’est pas exclut que le joueur qui a causé un dommage dans le cadre de l’activité, va réparer par le biais de l’assurance.

 

  • 3. Les prédispositions de la victime

Il y a plusieurs arrêts sur le suicide – ex : harcèlement moral au travail, le subordonné humilié par son patron se suicide. La famille peut-il faire un procès ? Oui. Le défendeur peut-il soutenir que la cause principale est la faiblesse morale du salarié ? Il apparaît clair que la clef se trouve dans la causalité, sans ces humiliations le salarié ne se serait pas suicidé, il est clair aussi que quand on est réprimandé on se se jette pas par la fenêtre > 2 causes : fragilité + employeur = il devrait donc y avoir un partage, la famille pourra faire condamner le patron mais pas 100% d’indemnisation.

 

Titre 2 : Les responsabilités objectives

L’originalité de la responsabilité objective c’est qu’elle est indirecte, le défendeur n’est pas à l’origine du dommage, ce qui a causé le dommage ce peut être une autre personne – ex : les parents d’un mineur. C’est la responsabilité du fait des autres personnes, la responsabilité civile extracontractuelle pour autrui.

 

Il existe aussi des responsabilités plus abstraites, plus originales. Certains défendeurs peuvent être responsable du fait de chose, de matière, qu’elles soient inertes ou en mouvement –ex : chute de neige du toit d’un chalet sur un skieur ; propriétaire responsable.

Ça n’est pas nouveau du point de vu historique. Il y a dans le Code Civil pour ces différentes situations aux anciens articles 1384 et suivants (maintenant 1242 et suivants).

 

Les parents sont garant de l’enfant, le propriétaire du chalet est garant de celui-ci, le propriétaire du chien est garant de son chien ; la garantie c’est le fondement principal de la responsabilité objective et subjective. Dans les 3 exemples, l’assurance en responsabilité civile est obligatoire (pas sur pour le chien), par conséquent c’est l’assurance qui payera pour réparer le dommage.

La technique contractuelle (aléatoire) de l’assurance est venue renforcer le fondement de la garantie mais conduit à des solutions parfois extrêmes – ex : cycliste/scooter qui se faufile entre les voitures et heurte le rétroviseur d’une voiture garée, tombe et se casse une jambe. La Cour de Cassation considère que le propriétaire de la voiture correctement garée, est responsable, et le cycliste sera dédommagé.

 

Chapitre 1er : La responsabilité du fait d’autrui

Art 1242 al 1er du Code Civil (nouveau) « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre »

 –>  Subjective : de son propre fait

 –>  Objective : causé par le fait des personnes dont on doit répondre > il existe d’autre personne que soit même. On est engagé du fait illicite de certaines personnes = présomption de responsabilité.

 

Dans la tradition de l’ancien droit et du DR codifié par Portalis & Co. en 1804, l’alinéa 1er de 1242 est le chapeau, donc une annonce de la suite de 1242 et des articles suivants. La Cour de Cassation a donné plus d’ampleur à cet alinéa.

 

Section 1 : La responsabilité de l’employeur

Ex : livreur de sushi qui renverse un piéton – est ce que l’employeur est responsable du fait du livreur ?  Celui qui est à l’origine du dommage c’est le livreur, l’employeur qui lui a donné la mission de faire la livraison n’y est pour rien, c’est le fait personnel de l’employé. La victime a une action contre le livreur, mais ce dernier est insolvable, est ce que la victime ne peut pas également agir en responsabilité civile contre l’employeur en tant que garant ? la réponse est à l’art 1242 al 5 « sont responsables les maitres et les commettants du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés » > dans le cadre des fonctions, c’est à dire qu’après le service, le livreur n’est plus dans le cadre de ses fonctions. Présomption de faute dans le choix de l’employé CULPA ENELIGENDO = faute de choix / faute de surveillance = CULPA VIGILANDO.

 

Sous section 1 : Les conditions de la responsabilité du fait du préposé

Il y a 3 conditions :

  • Existence d’un lien de préposition ou de subordination: il faut une autorité, faut prouver qu’on a sur celui qui a causé le dommage une autorité de droit ou de fait. Naissant du contrat de travail, l’employeur a une autorité. Pour lui donner des ordres. Mais l’autorité sur autrui ce n’est pas que le contrat de travail mais aussi d’autres situations que la Cour de Cassation a dû connaitre – ex : des stagiaires = pas de statut de travailleur, mais le maitre de stage est responsable du stagiaire en cas de faute. – ex : collaborateur n’a pas le statut de travailleur, il est censé être indépendant en droit de son patron. Si l’avocat collaborateur commet un dommage a à un futur client/partie adverse le patron sera responsable –ex : accompagnateur bénévole de colonie de vacances, la colonie (personne morale) est responsable en cas de faute. C’est un concept très extensif qui peut engager la responsabilité automatique. Les avants projets de réforme codifie cette jurisprudence.
  • Arrêt fiche TD ; conception large du lien de préposition, lien de préposition vis à vis d’une personne qu’est transférée provisoirement : personnel intérimaire. Dans las cas d’un vigile, la jurisprudence est hésitante, elle hésite entre la responsabilité du magasin ou de l’agence d’intérim.
  • Arrêt, 10 Déc. 2014 (fiche TD) : infirmière anesthésiste qui a mal surveillé le patient après une opération. La Cour considère que c’est la clinique qui est responsable et non pas le médecin supérieur à l’infirmière, et qu’il n’y a pas eu de transfert exclusif de l’autorité du médecin.
  • Le fait dommageablelui même, il faut qu’autrui est causé un fait dommageable. Il faut que l’employer au sens large est causé un dommage par une faute volontaire ou d’imprudence. C’est souvent le cas, mais il faut aussi se poser la q° de savoir si l’employer est pris dans un moment de folie/délire ou qu’il était complètement ivre, privé de discernement, l’employeur est-il responsable ? Oui, car on est responsable même si on est privé de discernement y compris les adultes, donc il est logique que celui qui doit répondre de l’employé soit responsable.
  • Lien de causalité : alinéa 5 « responsabilité du commettant pour le dommage causé par le préposé dans les fonctions». Souvent les dommages sont causés dans les fonctions, mais il se peut que l’employé cause un dommage en dehors de l’exercice de ses fonctions mais à l’occasion de ses fonctions – ex : livreur de sushi qui viole la fille à qu’il livre ; si il avait un casier et que l’employeur n’avait pas fait attention, l’employeur a commis une faute mais si il n’avait pas de casier, l’employeur est-il responsable ? – ex : livreur de sushi qui se sert du scooter pour un cambriolage après son service, pénalement l’employé n’est pas responsable, mais civilement c’est la théorie de l’abus de fonction. Il a été engagé pour livrer des sushis et pas pour cambrioler, il a abusé de ses fonctions. Pourquoi l’employeur serait-il responsable ?
  • La Cour de Cassation dans un arrêt de la 2ème Civ disait que l’abus de fonction du point de vu de la causalité (immédiate) qui est à l’origine du viol/cambriolage ? C’est celui qui a commis l’infraction. Les fonctions ont été détourné en un fait illicite (théorie de Josserand). À l’inverse la Ch. Crim saisit de l’action civile, considère que la garantie doit jouer et même si l’employé est sorti de ses fonctions et en a abusé, à partir du moment ou celles ci ont été « l’occasion/moyen » du dommage, l’employeur est garant. C’est une façon d’appliquer la théorie de l’équivalence des conditions.

 —>  Opposition des chambres, donc réunion en AP : dans le sens de la Ch. Civ > absence de responsabilité du commettant en cas d’abus de fonctions :

  • Arrêt de 1960 : employé qui utilise la voiture de l’entreprise et qui cause un accident
  • Arrêt de 1977 : chauffeur qui utilise la voiture en dehors de ses fonctions et qui cause un accident
  • Arrêt de 1983 : employé qui détourne de l’essence et est poursuivis par la police. Il décide de déverser tout le camion dans la rivière > abus de fonction, pas de responsabilité de l’employeur.

Après tout ces arrêts d’Assemblée Plénière, il y a un revirement de jurisprudence en 1988 où elle change complètement d’avis en refusant la théorie d’abus de fonction, et consacre la théorie de l’équivalence des conditions

  • Arrêt de 1988 : employé avait détourné des fonds pour le compte de son employeur mais les a mis dans sa poche. Par définition il n ‘est pas dans ses fonctions, mais s’il n’avait pas été employé pour récolter les fonds, le délit pénal n’aurait pas eu lieu > employeur responsable.

Ce revirement est expliqué par l’évolution du droit civil extracontractuelle, la volonté de garantir aux victimes une indemnisation dans tout les cas. Il y a bien une causalité, même si elle n’est pas principale, ça suffit.

Depuis, la Cour n’a pas changé d’avis :

  • Arrêt 2011 : prof de musique qui viol une élève. La Cour de Cassation considère que « ce professeur a trouvé dans l’exercice de sa profession, les moyens de sa faute ».
  • Arrêt 2ème Civ., 21 Mai 2015 : entreprise de transport ; un chauffeur se présente dans une boutique pour acheter/récupérer du matériel. Quelques minutes après un autre chauffeur de camion vient chercher le même matériel. Le 1er était un voleur qui s’était présenté avec des doc qui avaient l’air régulier, doc fabriqué par un employé de la société. La victime agis en responsabilité contre l’employeur, la Cour dit que l’employeur est responsable.

 

Si l’ordonnance n °2 codifie la jurisprudence, il y aura des formules au terme desquelles le commentant est considéré responsable de tout fait dommageable du préposé commis à l’occasion de ses fonctions

 

Sous section 2 : Les effets de la responsabilité du commettant

C’est une responsabilité automatique. Il ne peut pas justifier d’une cause étrangère ? Quid du préposé, est-il responsable cumulativement avec son employeur ?

C’est une présomption de responsabilité, donc automatique, de plein droit, le demandeur est dispensé de preuve du simple fait qu’il y ai un lien de préposition et que le préposé était dans le cadre des fonctions ?

 

Est-ce que cette responsabilité est totalement irréfragable ? Normalement non, une présomption, même sévère. La vraie cause étrangère serait la faute de la victime imprévisible et irrésistible, puis un cas de force majeure. Par conséquent l’employeur a de très forte chance de se faire condamner, mais il est assuré.

 

Logiquement, le vrai responsable, le seul responsable au regard de la causalité, c’est à dire l’employé, ne doit pas lui aussi être assigné ? Il est logique qu’il soit assigné. De sorte que pendant longtemps, les victimes agissaient contre les 2 pour obtenir leur condamnation in solidum. Parfois les victimes n’assignaient que l’employeur comme il est assuré (plus simple), et si donc l’employeur avait versé 500 000€, après avoir indemnisé la victime, l’employeur ou plutôt son assureur se retournait contre l’employé si celui-ci avait commis une faute pour se faire rembourser toute ou partie des DOMMAGES ET INTÉRÊTS > notion de recours contributoire ou recours subrogatoire (= celui qui paye à la place d’un autre et qui va se faire rembourser par le débiteur final). Le juge considérait que le 1er responsable était l’employé – Arrêt Costedoat, 2000 (proche des idées de Starck, Viney et Badinter) : il s’agissait de faire payer une partie de l’indemnisation par l’employé. C’était un pilote d’avion chargé de rependre les produits chimiques pour tuer les insectes ; il l’avait mal fait et cela avait causé des dommages aux voisins. Demande de condamnation de l’employeur et du préposé. La Cour de Cassation dit que le préposé n’est pas responsable lorsqu’il agit dans le cadre de ses fonctions. Elle a donc posé sans texte, une immunité juridictionnelle au profit du préposé. Il est probable que le projet codifie cette jurisprudence.

Pour : Ça ne sert pas à grand chose d’assigner l’employé car souvent insolvable et s’il fait une bêtise pendant ses fonctions, l’employeur est responsable.

Contre : Cela peut entrainer un certain sentiment d’irresponsabilité des préposés. De plus il y a un risque de jurisprudence extensive > à partir du moment où la Cour de Cassation a réduit presque à 0 les hypothèses d’abus de fonction, l’employé ne sera pas responsable alors même qu’il est totalement sorti de ses fonctions.

 —>  Nuance : Arrêt AP, Cousin, 2001 : Si l’employé a commis une faute pénale, il reste responsable vis à vis de la victime et aussi de l’employeur si celui-ci lui demande un remboursement.

Est ce que toute infraction pénale sera sous couvert de cette responsabilité, ou seulement certaines d’entres elles ? Pas clair.

Dans l’affaire Cousin, l’employé avait rédigé des faux > intentionnelle. Mais parfois il y a des fautes pénales d’imprudence.

 

Section 2 : La responsabilité du fait des mineurs

Mineurs = celui qui n’a pas encore 18 ans.

Essentiellement, ce sont les parents qui sont responsables mais il y a d’autres cas.

 

Sous section 1 : La responsabilité des parents

Art. 1242 al. 4 de l’ordonnance du 10 février 2016 (ex. art. 1384 du Code civil) « Le père et la mère en tant qu’ils exercent l’autorité parentale sont solidairement responsable du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux ».

 –>  « Le père et la mère » : il y a bientôt 3 ans, M. Hollande a fait voté la loi sur le mariage pour tous avec la précision technique du gouvernement pour couvrir le maximum d’aspect de la vie familiale. Il avait été prévu de modifier l’art. 1242 avec « le père et la mère ». Il y a eu un projet substituant « le père et la mère » par « les parents » > modification importante. Cela n’a pas été fait car trop politique. Mais attention, ce n’est pas le mari et la femme > peu importe qu’ils soient mariés ou pas, peu importe la situation familiale.

C’est du droit naturel, les parents, quand ils ont des enfants et tant qu’ils sont mineurs, sont responsables > on doit assumer.

 –>  « En tant qu’ils exercent l’autorité parentale » > ils sont obligés, ils n’ont pas le choix > présomption de responsabilité > la victime de l’enfant n’aura pas à prouver la faute de ses parents > responsabilité automatique

 –>  « Solidairement » > enfant fait à 2 sauf cas des mères célibataires

 

  • 1. Les conditions de la responsabilité des parents

Il faut un fait dommageable causé par l’enfant > pendant longtemps, il fallait une faute de l’enfant qui puisse discerner. Depuis des arrêts de 1984, la Cour de Cassation estime que le mineur, même privé de discernement, est responsable de ces actes > il suffit qu’il cause un dommage même s’il n’en a pas conscience. Le juge a une conception très large du fait dommageable causé par l’enfant. Dans le fond, le juge ne retient que la causalité, le fait, l’action, même non fautive, suffit à déclencher la responsabilité de l’enfant et donc des parents.

 

Il faut l’existence d’une autorité parentale : Les parents ont sur leurs enfants, jusqu’à leur majorité, une autorité parentale (morale et juridique > art. 372 et s. du Code Civil).

Que se passe-t-il si les parents se séparent ? Art. 373-2 du Code Civil > La séparation des parents est sans incidence. Cependant, est-ce si vrai que ça ? Un enfant de 12 ans va chez la mère (90% des cas). Le père a donc un droit de visite le weekend, vacances, etc. Si l’enfant cause un dommage, est-ce que les 2 parents sont toujours solidairement responsables au regard de l’art. 1242 ? Mitigé.

  • Si oui, alors c’est le droit naturel.
  • Si non, il faut faire de l’interprétation : article 1242 « habitant » donc logique que le père ou la mère n’habitant pas avec l’enfant n’est pas solidairement responsable de l’enfant. De plus, autre argument pouvant être invoqué, le parent qui reçoit le droit de garde, c’est à lui de surveiller son enfant.

Pendant longtemps, la Cour de Cassation a été hésitante mais il y a eu un revirement de jurisprudence avec un arrêt de 2012 où elle a condamné le parent n’habitant pas avec l’enfant.

Le cas des beau parents/frères et sœurs : ils ne sont pas cités dans l’article 1242 donc non, pas responsable.

 

Arrêt Ch. Crim., 29 avril 2014 : incendie a provoqué la mort de quelqu’un. La Cour de Cassation censure l’arrêt des juges du fond car l’enfant n’habitait pas avec le père > interprétation stricte de l’article 1242.

Il faut s’interroger sur cette question de cohabitation. Le dommage peut être causé dans des circonstances variées. Si l’enfant habite chez ses parents mais qu’il est en weekend chez les parents d’un camarade ou qu’il passe le mercredi chez ses grands-parents ou qu’il est en classe de sport et qu’il cause un dommage, sommes-nous toujours dans la cadre de la cohabitation et l’article 1242 s’applique-t-il ? Faut-il entendre cohabitation habituelle ou faut-il que le dommage ait été causé lorsque l’enfant cohabitait avec ses parents ? La Cour de Cassation est assez libérale et se montre large. L’enfant avec ses grands-parents > la Cour de Cassation estime que la condition de cohabitation est remplie.

La victime peut-elle assigner les parents mais aussi les gardiens de l’enfant lors du dommage ? (Terme « gardien » est un terme de droit de la famille). Qu’est-ce que la garde ? Notion matérielle et sociale = contrôle, surveillance donc qui a la surveillance ? Les parents du meilleur ami, les grands parents > les parents transfèrent la garde momentané et l’autorité. À ce jour, la Cour de Cassation le refuse donc elle considère que les parents restent responsables et garants. Ça a sa logique mais on pourrait concevoir d’avoir une sorte de responsabilité solitaire cumulative.

 

À l’école, si un enfant cause un dommage à un autre, ce sont les parents qui sont responsables. C’est pourquoi les écoles, lors de l’inscription, exige que les parents souscrivent une assurance de responsabilité civile.

De même pour la colonie de vacances.

 

Quoi qu’il en soit, on pourrait parfaitement concevoir 2 gardes :

  • Une garde permanente structurelle de l’enfant (celle des parents)
  • Une deuxième garde occasionnelle du comportement de l’enfant au moment du dommage lorsque l’enfant est confié.

 

  • 2. Les effets de la responsabilité des parents

  Les parents sont automatiquement responsables > il y a une présomption de responsabilité, c’est à dire que la victime est dispensée de prouver leur faute.

  Cependant, il y a une différence avec les commettants qui se trouve dans l’art. 1242 : « La responsabilité a lieu à moins que les pères et mères prouvent qu’ils n’ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité » = présomption simple de responsabilité que Portalis et ses amis ont posé.

Arrêt Bertrand de 1997 : enfant de 12 ans qui blesse quelqu’un. Les parents ont voulu s’exonérer en prouvant l’absence de faute > éducation et surveillance. La Cour de Cassation répond que seule la force majeure (cause étrangère imprévisible et irrésistible) ou la faute de la victime peut exonérer les parents > absence de faute insuffisante > application pure et simple de la garantie.

  Depuis lors, ça n’a pas bougé et ce sera probablement codifié dans l’ordonnance n°2.

  Reste la même question que pour les préposés, est-ce que l’enfant lui-même est responsable ou peut-il dire que les seuls à payer sont les parents ? Si l’enfant n’a pas de discernement, il est responsable personnellement, ça vaut donc a fortiori pour les enfants doté de discernement.

Arrêt 2ème Ch. Civ., 11 septembre 2014 : enfant de 15 ans qui a roué de coups un camarade et il est condamné in solidum avec ses parents, ce que la Cour de Cassation approuve > il n’y a pas d’immunité pour l’enfant.

 

Sous section 2 : Les responsabilités connexes de celle des parents

Al. 6 de l’article 1242 « Sont responsables les instituteurs et les artisans du dommage causé par leurs élèves et leurs apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance ».

 

  On comprend de ce texte qu’il y a d’autres personnes que les parents qui peuvent être responsables des mineurs.

  Instituteur : Il semble que l’instituteur soit lui aussi responsable de plein droit de l’enfant pendant le temps de la surveillance > responsabilité cumulative. Les juges ont commencé à interpréter ce texte comme ça et au XIXème siècle, il y en a beaucoup qui se sont suicidés car ils avaient été assignés et étaient insolvables. Cela a tellement fait de bruit politiquement que le texte a été modifié par le Parlement et prévoit « en ce qui concerne les instituteurs, les fautes devront être prouvées » > on repasse à la preuve de la faute et non pas à la présomption.

Critique : La parlement a t-il bien fait ? Le texte était en soit déjà très mauvais et mal interprété par les juges. Instituteurs = celui qui fait le cours mais ceux qui devraient être responsable c’est l’institution, l’école et non l’instituteur. On ne comprend pas pourquoi c’est la personne physique, employée de l’école qui est responsable et non la personne publique, cela n’a pas de sens. Les juges auraient dues l’interpréter au sens de l’institution.

Le vrai problème est de savoir si parallèlement à la responsabilité des parents il y a une responsabilité de l’école (primaire jusqu’au lycée) qui serait cumulative ? Problème non résolu.

Artisans : tenu pour responsable. Le parlement n’a pas modifié le texte pour eux donc en théorie, l’artisan employeur (le commettant du mineur) est responsable du fait du mineur.

  Ne pourrait-on pas admettre qu’il existe un principe qui fait que dès lors que quelqu’un a une autorité sur quelqu’un d’autre, mineur ou majeur, alors il en est responsable.

 

Section 3 – Principe général de responsabilité pour autrui

  Même pour les majeurs, il y a des questions qui se posent. Ex : vieille dame atteinte d’Alzheimer qui sort de la maison de retraite et qui met le feu. 

  Pendant longtemps, la Cour de Cassation n’a pas fait application de l’art. 1242 car les conditions n’étaient pas remplies donc elle est revenue à 1240 > la faute, nécessité d’une preuve de la faute personnelle.

  Cependant, la victime ne peut pas toujours prouver la faute du défendeur, il vaut mieux pour elle qu’elle jouisse d’une présomption de responsabilité. Il y a des cas où une personne a un contrôle, une surveillance, une autorité sur une autre qu’elle soit mineure ou majeure. Ainsi, si pendant le temps de son autorité la personne sous surveillance cause un dommage, ne peut-on pas considérer que cette personne disposant de l’autorité ne peut être de plein droit responsable ?

  Arrêt Blieck, 29 mars 1991, AP : il s’agit d’un majeur qui avait un handicap et il était de ce fait soigné dans un établissement spécialisé, mi clinique mi établissement psychiatrique. Il en sort pour aller voir une personne et a mis le feu à la forêt. La victime propriétaire de la forêt pourrait se retourner contre la personne handicapée > pénalement inattaquable mais pas civilement. Problème : il est insolvable. La victime assigne en responsabilité le centre dans lequel était soigné le majeur sur le fondement logique de 1240 > gardiens du centre ont eu un défaut de vigilance en laissant sortir ce patient > manifestement, ça n’a pu être prouvé. L’avocat a eu l’idée géniale de rester dans 1242 et de se saisir de l’al. 1er et d’en faire une nouvelle interprétation > considérer que l’al. 1er est en soit une règle de fond et non plus un chapeau sur les règles qui suivent. Si on lit l’al. 1er, le centre qui accueille en permanence en est gardien, il a le pouvoir d’autorité, il doit assumer les risques > consécration révolutionnaire de ce principe. Le centre est responsable de plein droit car il a accepté la charge de contrôler à titre permanent le mode de vie de la personne qui a causé le dommage.

 —> Ce principe général, revient à considérer que quelque soit la qualité de celui qui contrôle la personne, quelque soit les circonstances de ce contrôle, dès lors qu’il y a autorité, celui qui a autorité doit répondre. Le responsable pourra s’exonérer que s’il y a cas de faute étrangère, qui en générale ne sera pas remplie. Le problème c’est que la Cour de Cassation a en quelque sorte eu peur de son audace (arrêt surprenant), elle dit que ça va trop long. En doctrine il y a 2 camps : celui qui considère que c’est une bonne chose, et ceux qui estime qu’elle est sortie de son rôle. Cela peut bouleverser le droit de la responsabilité.

 

Qu’en est-il de l’avenir et du champ d’application de ce principe ?

Si on applique l’art 1242 al1 on est responsable des personnes qu’on doit répondre avec le critère de contrôle et de l’autorité, il est clair qu’un certain nombre de situations peuvent entre sous ce couvert : école, lycée, … Pendant la journée, le mineur est sous le contrôle et l’autorité de l’école de sorte que ce critère devrait s’appliquer. La Cour de Cassation estime que même si l’enfant n’est plus physiquement sous la responsabilité des parents, ces derniers restent responsables > cumulative ? ou alternative ? Cependant la Cour de Cassation n’est pas allée jusque-là, en 2016 il n’y a pas d’expansion de la jurisprudence aux établissements scolaires, même chose pour les colonies. Pour les majeurs, il faut distinguer, la jurisprudence considère que ce principe s’applique aux majeurs incapables. Pour les tuteurs/curateurs la réponse est moins sur. Et puis il y a des majeurs non vulnérables dans d’autre cas que la situation de commettant/préposé ; la Cour de Cassation dans un arrêt du 8 Juillet 2010 : match de foot où un joueur retire sa chaussure pour frapper un autre joueur. On recherche la responsabilité de la ligue n’ont pas en tant que commettant > la Cour de Cassation paraît considérer que la Ligue serait responsable parce qu’elle aurait le contrôle dans le cadre du match, des joueurs.

On voit donc que depuis l’arrêt de 1991, la jurisprudence n’est pas fixée. Il y a d’autre exemple avec les vieux qui sont en maison de retraire – Arrêt de la 1ère Ch. Civ., 15 Déc. 2011 : l’un des vieux se met à rouer de coup une autre personne âgée et le tue. La Cour considère que la maison de retraire n’est pas responsable de plein droit, de sorte qu’elle refuse le principe général.

On voit donc qu’en 2016, l’arrêt audacieux n’est pas partagé. On trouve l’illustration dans l’avant projet Catala qui codifie la réplique mais à minima ; il faudrait que la personne responsable ait été désigné comme telle principalement par une décision de justice, et qu’elle soit chargée de régler le mode de vie de l’auteur du dommage.

 

Chapitre 2 : La responsabilité du fait des choses

Dans l’article 1242 on trouve le mot « garde » synonyme d’autorité sur une personne, mais c’est aussi sur les choses. Ce texte chapeau annonçait en réalité la responsabilité du fait des animaux et des immeubles. Cependant au début du XIXème siècle, avec la Rév. Industrielle, il y a eu beaucoup d’accident ; de sorte que dans un certain nombre de cas les dommages étaient causés par des meubles sans qu’on puisse prouver la faute d’un responsable, la cause du dommage restant inconnue/indéterminée. Normalement si le demandeur victime ne parvient pas à prouver la faute, il sera débouté. Mais très rapidement un mouvement de solidarité s’est fait à l’égard des victimes et les juges ont recherchés un fondement pour qu’il y ai présomption de responsabilité et dispense de preuve sans attendre un renouvellement législatif. Pour cela ils ont été aidé par la doctrine, dont Saley qui avait suggéré à partir des textes existant de créer un régime de responsabilité sans faute prouvée. La Cour de Cassation a saisi la 1ère occasion pour rendre un arrêt de principe, arrêt de 1896, Teffaine : chaudière d’un bateau qui avait explosé et qui avait causé toute sorte de dommage. La cause de l’explosion reste inconnue, peut-on condamné le propriétaire ? Non si on ne peut pas prouver, mais la Cour de Cassation dit oui en appliquant à la lettre l’alinéa 1 de l’article 1242 > règle de responsabilité automatique du fait des choses. Josserand avait la même philosophie si ce n’est que dans la conférence de 1936 il est un peu réticent.

La Cour de Cassation ne s’est pas arrêté. Dans un arrêt de 1920 elle est saisit d’un autre cas où il s’agissait d’une gare à Bordeaux ; à l’époque les gares et trains étaient privés. Un incendie était né dans les hangars de Bordeaux et avait embrasé beaucoup de quartier. Ceux qui avaient été touché avaient fait un procès à l’exploitant de la gare, mais on ne connaissait pas l’origine de l’incendie. La Cour de Cassation avait considéré que le propriétaire de la gare et des éléments mobiliers/immobiliers était responsable de plein droit des dommages causés.

Un 3ème auteur est venu conforté cette idée de responsabilité autonome du fait des choses, Ripert. Puis en 1930, la Cour de Cassation en Assemblée Plénière rend un arrêt de principe dans une affaire qui avait commencé dans les années 1920 ; arrêt 1930, Assemblée Plénière, Jandheur : petite fille dans une ville de province renversée par un camion, elle était gravement blessée. On ignorait complètement les circonstances de l’accident : faute du chauffeur ? Petite fille ? Météo ? Garagiste ? Dans cet arrêt la Cour décide de s’appuyer sur le principe général posé en 1896 « la présomption de responsabilité établie par l’article 1384 al 1er à l’encontre de celui qui a sous sa garde la chose inanimée ayant causée le dommage ne peut être détruite que par la preuve d’une force majeure. Il ne suffit pas de prouver qu’il n’a commis aucune faute, ou que la cause du dommage est inconnue ». Le juge a de plus en plus tendance à ne pas se soucier de la faute du défendeur et de la causalité. De plus en plus avec la généralisation de l’assurance, mais c’est arrivé au XXème siècle alors que Teffaine c’était en 1896 (mais ça existait déjà). Quand la cour rend ses 1ers arrêts ce n’est pas la considération de l’assurance. Cet arrêt Jandheur a eu un succès considérable, en 2016 on est toujours sous son autorité à ceci près que Mr. Badinter a détaché du droit commun du Code Civil le domaine des accidents de la circulation. Cet arrêt à de nombreuse application à la montagne. L’arrêt Jand’heur dit aussi que l’article 1242 ne distingue pas si la chose était actionnée ou non par la main de l’Homme. Ça veut dire que la Cour de Cassation estime qu’il y a une indivisibilité entre l’action humaine et l’intermédiaire de la chose, on ne va pas s’en tenir au fait de la chose.

 

Section 1 : La chose cause du dommage

  • 1. La chose

Quelles sont les choses couvertes par l’article 1242 al 1er ?

Chose, bien = tous les éléments, matières appropriées. Ce sont tous les biens meubles, corporels. La Cour de Cassation a précisé (déjà dans l’arrêt Jandheur) les choses animées ou inanimées ou encore les choses inertes ou en mouvement – ex : quelqu’un qui tombe à la renverse dans la rue car vélo accroché sur le trottoir > La Cour considère le vélo comme inanimé et inerte en revanche si le propriétaire est dessus et pédale cela devient une chose en mouvement. Mais dans l’arrêt Jandheur peut importe que la chose soit en mouvement ou non. Ce sont aussi tous les immeubles : Art 1244 du Code Civil, assez restrictif > le fait de la ruine de l’immeuble, mais il peut y avoir d’autre hypothèse que la ruine. Peu importe aussi que la chose soit dangereuse ou pas dangereuse.

 —>  Dès lors que la chose est intervenue dans le dommage, quel qu’elle soit, le propriétaire est responsable.

À contrario on est pas responsable des res nullius = chose sans maitre. La neige d’un toit qui tombe sur un passant = propriétaire du chalet responsable ?

  • La neige vient de ciel donc res nullius
  • La neige s’est accumulé sur le toit, le propriétaire en est donc par une sorte d’accession au contrôle de la neige, ce n’est plus une res nullius.

S’agissant des res derelictae = chose abandonnée> l’ancien propriétaire est responsable, il n’avait qu’à pas les abandonner.

 

La Cour ne distingue pas non plus si la chose avait un dynamisme propre ou si elle était entièrement tributaire de la main de l’Homme. Il y a plusieurs arrêts au sujet des bouteilles de gaz/soda/bière : il peut arriver qu’une bouteille de gaz ou de soda explose sans explication. La Cour de Cassation dit que même si la chose était doté d’un dynamisme propre et que celui qui l’a manipulé n’y est pour rien, il sera responsable – Ex : dans un supermarché un acheteur hésite entre Coca/Bière, la bouteille explose et du verre vient sur le visage du client > le propriétaire du magasin est responsable, il est gardien de la chose.

 

En résumé le bien à l’origine du dommage sera la plupart du temps l’élément faisant joué la présomption de responsabilité.

 

Subsiste encore une question, celle du contact matériel entre la chose et la victime. La Cour de Cassation dans les années 40’ a statué sur l’hypothèse d’une voiture qui fait irruption à un croisement sans s’arrêter et fait peur à un piéton qui tombe > pas de contact physique/matériel mais conducteur responsable !

 

  • 2. La cause

 

La chose doit être la cause du dommage ; cause c’est à dire à l’origine. Simplement quand on y réfléchit, appliqué à l’article 1242 al 1er, c’est un peu plus compliqué que ça. En effet, il peut y avoir des situations où la chose a été en contact avec la victime sans qu’on soit sur qu’elle est la cause du dommage, de sorte qu’au concept de la causalité s’oppose la participation matérielle et l’implication > antonymes de la causalité. Une chose peut avoir participée matériellement ou être impliqué dans le dommage sans qu’elle soit à l’origine du dommage. La chose a parfois un rôle passif synonyme de participation matérielle ou d’implication à l’inverse de celle qui ont un rôle actif synonyme de causalité.

Dans ces conditions ont devrait considérer que se serait à la victime de prouver que la chose est bien à l’origine du dommage qu’elle subit, qu’elle a bien eut un rôle actif. On retrouve donc la question de la nécessité de prouver ou de présumer le lien de causalité. La Cour de Cassation dans sa majorité a plutôt une position allant vers la présomption de causalité (même si décisions dans les 2 sens) – Arrêt de 1941 : victime qui entre dans un bar et se prend les pieds dans une chaise, tombe et se blesse. Est-ce que la chaise est à l’origine du dommage ? Rôle actif, dans cet arrêt la Cour de Cassation présume la causalité, et considère qu’il faut condamner l’exploitant du bar.

Autre standard : position normale ou anormale de la chose – la chaise est placée normalement ou alors au milieu de l’allée. Si elle est normale on ne peut pas présumer qu’elle est à l’origine du dommage, si elle est au milieu c’est sans doute pour ça que la victime s’est pris les pieds dedans. La Cour de Cassation n’applique pas toujours ce critère. Autre ex : victime entrant dans un établissement et tombe sur un tuyau brulant et se brule. Mais le tuyau était dans un emplacement où il n’y avait pas de risque, de sorte que la victime a du chercher un peu > la Cour de Cassation estime que le tuyau a eu un rôle actif. Arrêt 2001 : piéton qui tombe sur une boite à lettre et se fait mal, peut-il agir contre le propriétaire ? La cause est très probablement l’imprudence de la victime mais la Cour considère que le propriétaire est responsable et que la chose est l’instrument du dommage.

 

La Cour de Cassation se contente de peu pour retenir que la chose aurait été l’instrument du dommage alors qu’elle aurait été passive.

Ce dernier temps il semble qu’elle soit revenue à une conception peu raisonnable :

  • Arrêt de 2012 : Quelqu’un va faire ses courses au supermarché (plot en béton sur les parking), le client distrait se prend les pieds dans le plot et assigne le supermarché ; la Cour dit que le plot avait une position normale et certes il a participé au dommage mais par un rôle passif.
  • Arrêt 2ème Civ., 13 Déc. 2012 (fiche) : accident de piscine (fréquent) > réglementation administrative : barrière autour = jurisprudence abondante qui considère que la piscine est une chose, donc propriétaire gardien. En l’espèce il s’agissait d’un adolescent qui plonge d’une hauteur et s’enfonce un pique d’une barrière dans les arbustes, dans le ventre et meurt. Si la Cour avait tenue compte des observations de Josserand, Lequette, elle aurait considéré que le propriétaire était responsable. Cependant ici, elle estime que le pieux métallique « n’était pas en position anormale et n’avait pas été l’instrument du dommage » ; la cause exclusive du dommage c’est la faute du garçon.
  • Arrêt 2ème Civ., 21 Mai 2015 (fiche) : accident de piscine lors d’une fête. Un des invités avait voulu plongé dans la piscine qui avait une profondeur insuffisante = fracassé le crane. On considère que le dommage découle de l’imprudence de la personne, qu’il n’y a pas d’anomalie de la piscine et qu’elle n’a pas joué un rôle actif.

Les projets de réforme du droit extra contractuelle vont dans ce sens : c’est la position de la chose, son état qui est le critère répartiteur.

Le droit administratif et le système d’assurances vont au-delà des obligations qui sont les leurs, – ex : alarme, barrière dans les piscines.

 

Section 2 : Le gardien

L’article 1242 al 1er  (ordonnance) évoque les choses que l’on a sous sa garde = condition de responsabilité. Qu’est ce qu’un gardien ? C’est celui qui a un pouvoir sur la chose. La Cour de Cassation, très tôt a donné la définition de la garde et ses limites : grand arrêt ayant donné lieu à plusieurs décisions, affaire Frank, 1941 : hypothèse assez fréquente du vol d’une voiture, le voleur renverse un piéton. La victime du voleur avait assigné le propriétaire de la voiture considérant qu’il en était le gardien (ancien art 1384). LA Cour lui répond non, il en était le propriétaire mais pas le gardien ; à cette occasion elle donne la définition de la garde « l’usage, la direction et le contrôle de la chose ». S’il y a un dommage qui a été causé et que la victime se fonde sur la garde, elle ne peut pas l’opposer au propriétaire car celui qui avait le pouvoir de fait au moment du dommage, c’était le voleur qui était au volant —>  La garde est ainsi un pouvoir de fait. Si on retient l’équivalence des conditions, du fait qu’il n’a pas fermé la voiture c’est la faute du propriétaire mais pas la présomption de responsabilité automatique.

 

Cette jurisprudence a été reprise plusieurs fois par la Cour et codifié dans le projet Catala « maitre de fait de la chose » et dans le projet Terré c’est « l’usage et la maitrise au moment du dommage ».

La garde doit ainsi être effective au moment du dommage, par conséquent il est vrai que la plupart du temps le propriétaire sera aussi gardien, mais pas toujours. Si quelqu’un me prête un bien et que je cause un dommage, je suis le gardien. Le problème c’est que si je ne suis pas solvable, la victime ne sera pas indemnisée. C’est la raison pour laquelle des propriétaires prennent une assurance (facultative) qui les protègent des dommages causés par eux même et les personnes qu’ils ont autorisé à se servir de la voiture par exemple. La technique de l’assurance va diminuer les effets répartiteurs de la jurisprudence Frank, le seul responsable est celui qui avait le pouvoir sur la chose. En d’autre terme, la garde d’un bien peut être transférer.

 

Le transfert peut être momentané, et il y a de nombreux arrêts sur le sujet du covoiturage. La Cour considère qu’elle a créer une présomption : on peut présumer que le propriétaire est le gardien. Il s’agit d’une présomption simple que celui-ci peut renverser.

Présomption qui a été maintenue dans le domaine de la circulation : quelqu’un est renversé par une voiture, le conducteur au moment du dommage n’est pas identifié. Cependant, par l’immatriculation on remonte au propriétaire ; il sera condamné en tant que gardien présumé sauf s’il prouve qu’on lui a volé. La garde est donc matérielle.

 

La Cour de Cassation a posé une limite reposant dans l’indépendance de la garde ; pour être gardien il faut avoir une autonomie et une indépendance. Si on prend la responsabilité du préposé, si on prend la jurisprudence Jandheur : qui est le gardien ? Selon le critère matériel c’est le chauffeur et l’employeur était le commettant responsable du fait de son préposé, finalement c’est lui qui devra payer > 2 étages, 2 applications de l’article 1384 al 1er. Mais il arrive que la Cour ne fasse pas se raisonnement et considère directement que c’est l’entreprise le gardien de la chose ; il lui arrive donc de consacrer une conception intellectuelle, juridique, théorique de la garde en contradiction avec la jurisprudence Frank. Lorsqu’elle le fait elle estime que celui qui a commis le dommage n’a qu’une détention, et que le vrai gardien c’est le propriétaire. Par conséquent dans ce type d’affaire il faut articuler la garde.

Il y a aussi des arrêts relatifs aux bateaux, à leur équipage : dommage causé par un membre de l’équipage ; la Cour dit que c’est le skipper qui est responsable, car c’est le gardien du bateau. Mais normalement non, car c’est le membre de l’équipage qui a le pouvoir de fait > Contradiction.

Il y a encore de la jurisprudence au sujet des balles de tennis, golf, foot : celui qui prend un ballon dans la tête qu’il soit spectateur ou joueur adverse > le pied dans le ballon est une appropriation de la chose, il est donc gardien. Mais certains arrêts considèrent que c’est le club > Confusion.

 

Arrêt Assemblée Plénière, 1984 : un enfant peut-il être gardien ? Le mineur de 17ans est évidemment gardien, mais celui sans discernement… ? Dans un de ces arrêts de 1984 un enfant en avait blessé un autre avec un bâton. Les parents de la victime assignent l’enfant comme gardien du bâton > La Cour a estimé qu’un enfant de 3ans peut être gardien. Selon le professeur, c’est pas très juste  —>  Un pouvoir suppose un discernement ; décision assez artificielle.

On voit donc la volonté acharnée de réparer le dommage causé à une victime.

 

Il reste une question, celle de savoir s’il peut y avoir plusieurs gardien d’une chose ? La garde peut être alternative ou cumulative ? En général il n’y a qu’une personne qui contrôle la chose.

À priori il n’est pas possible que 2 personnes aient sur la même chose des gardes différentes. Certains en doctrine ont considérés qu’il pouvait y en avoir deux : une garde théorique, juridique de garantie pure et simple et une garde effective (posée par l’arrêt Frank), mais au moment du dommage il n’y en a qu’un.

Pourtant la Cour de Cassation dans certain domaine, a posé une garde cumulative – ex : choses dangereuses qui ont un dynamisme propre. Le professeur Goldman qui avait sa thèse sur la garde ; à partir de ses recherches et de la jurisprudence il s’était demandé si dans certains cas, alors même qu’une personne s’est dépossédée de la chose, ne doit-elle pas rester gardienne étant donné la dangerosité de la chose ? Dans un arrêt de 1956, Oxygène liquide : transport de bouteille d’oxygène liquide. Au cours de la livraison par l’entreprise de transport, une bouteille explose causant des victimes. Qui est le gardien de la chose ? À priori c’est celui qui l’a transporté, cependant l’entreprise de transport n’a aucun pouvoir sur la composition interne de l’oxygène liquide. La Cour de Cassation suivant Mr. Goldman a considéré que le seul gardien c’est en quelque sorte celui qui a créé la chose, le fabricant. Elle a consacré une distinction entre la garde du comportement de la chose, et la garde de la structure (composition). Dans cette hypothèse sauf à ce que soit prouvée une faute du transporteur, le seul responsable sera le fabricant et peut être que dans certains cas, on pourra estimer que la garde est cumulative et condamner les deux comportements.

Arrêt 1995 : petite fille qui joue avec un cerceau qui lui cause un dommage du fait d’un vice de fabrication. Qui était le gardien au moment du dommage ? C’est le fabricant.

Cela étant cette exception au caractère effectif de la garde est cantonné aux choses dangereuses.

 

La Cour de Cassation a refusé d’étendre cette jurisprudence aux fabricants de cigarette. Les personnes qui ont des cancers aux poumons et qui meurent ne peuvent pas faire jouer la responsabilité des fabricants de cigarette (Arrêt de 2003).

 

Il existe une autre dérogation à la garde effective : celle où il y a plusieurs gardiens au moment du dommage. Il y a de la jurisprudence au sujet du sport (matchs) : le ballon blesse une victime, on n’arrive pas à identifier le joueur qui a tiré > La Cour considère que dans le doute on condamne tous les joueurs dans la partie du terrain d’où est venu le ballon = co-gardien.

Hypothèse des enfants qui mettent le feu : dans le doute la Cour considère que les enfants sont co-gardien.

 

Section 3 : L’exonération du gardien

  À partir du moment où le demandeur jouit d’une présomption de responsabilité il est dispensé de prouver la faute/ lien de causalité, il n’a qu’à prouver le dommage. De sorte que pour ne pas être condamné, le gardien doit s’exonérer et faire la preuve contraire. Mais il ne suffit pas de prouver qu’il n’y a pas de faute ; ce qui compte c’est que la chose est été l’instrument du dommage. Donc la seule façon de prouver pour le défendeur, c’est de démontrer que la cause du dommage ce n’est pas sa chose.

Le 1er moyen : fait passif > s’il démontre que la chose était dans une position normale, n’é au qu’un rôle passif, était inerte = tout moyen. Dans ce cas-là il sera normalement exonéré, mais quelques arrêts condamnent quand même.

Le 2ème moyen : l’acceptation du risque par la victime – ex : Arrêt 2ème Ch. Civ., 4 Nov. 2010 : Course de moto où un pilote avait été blessé à la suite d’une collision avec un autre. Il assigne l’autre pilote, propriétaire de la moto et le constructeur. Les défendeurs avaient évoqué l’acceptation des risques (course de moto dangereuse). La Cour censure et applique strictement la responsabilité u fait de la moto. La loi est venue briser cette jurisprudence en consacrant la théorie de l’acceptation des risques dans le Code du Sport à l’article L321-3-1 = cause d’exonération.

3ème moyen : force majeur – ex : coup de vent qui a projeté la moto. Le défendeur peut normalement s’exonérer. Mais le fait étranger doit être imprévisible et irrésistible ; dans l’exemple si la météo avait prévu une tempête de vent > pas d’exonération pour force majeur.

4ème moyen : fait du tiers. La jurisprudence est très divisée, mais plutôt défavorable à l’exonération du fait du tiers –ex : bateau à moteur qui passe très vite devant un autre qui l’oblige à se décaler et heurte un autre petit bateau. En théorie il y a exonération mais il y a des arrêts dans les 2 sens. On peut dire que le fait du tiers, en théorie dès lors qu’il est imprévisible et irrésistible devrait totalement exonérer le gardien de la chose, mais en pratique la jurisprudence est restrictive.

5ème moyen (principale cause) : le fait de la victime. Dans de nombreux accidents, la cause principale voire exclusive du dommage c’est la victime elle-même par son imprudence. De sorte lorsqu’elle agit (ou sa famille) contre le gardien. L’idée de garantie est telle que quand une victime est à l’origine de son propre dommage et un gardien qui est assuré la plupart du temps, les juges estiment que le fait de la victime n’est pas exonératoire.

Il existe une solution intermédiaire entre l’exonération et la condamnation totale : le partage de responsabilité. La victime est considérée à l’origine partielle de son dommage de sorte qu’elle n’aura pas d’indemnisation totale, mais partielle.

Animé par son soucis d’indemnisation fondé sur la garantie, la Cour prend un certain nombre de liberté au regard de la causalité – ex : SNCF, RATP : un bus qui démarre, la porte est pratiquement fermée, quelqu’un court après le bus et tombe > action de la victime ou famille contre la société : la Cour considère qu’il y a matière à partage de solidarité. Mais en quoi le conducteur du bus est-il à l’origine du dommage ? On ne voit pas de causalité. La RATP devrait être totalement exonérée, et pourtant il arrive à la Cour de considérer un partage de responsabilité.

Arrêt 2ème Ch. Civ., 27 Mars 2014 : SNCF, passage à niveau sans barrière mais avec panneaux/feux : la victime démarre alors que le train passe, les deux dans la voiture meurent. Juge du fond qui exonère la SNCF, Cassation qui estime qu’il y a lieu à responsabilité de la SNCF, alors que la cause exclusive est l’extrême imprudence.

 

Il y a peu d’exonération, le gardien sera presque dans tous les cas, condamné. Dans un article, Tunc  dit qu’il n’y a pas de responsabilité car c’est l’assurance qui paye = pas très juridique. L’indemnisation par l’assureur est purement matérielle, il y a responsabilité car celui qui paie l’assureur c’est le gardien. Une personne innocente au regard de la causalité (pilier du droit), va être condamné.

 

Section 4 : La responsabilité du fait des produits défectueux

Une directive européenne s’est emparé du droit de la responsabilité du fait des choses, donc d’un morceau du droit civil, alors pourtant que ce n’est pas dans les traités fondateurs de l’UE, mais les autorités de l’UE (Commission, Conseil, CJUE) s’auto intronisent pour réglementer ou juger des matières qui ne sont pas dans leur compétence. 

Selon notre système constitutionnel quand une directive est prise, on n’a pas le choix ; alors on l’a fait tardivement car on n’était pas d’accord sur la méthode et sur le contenu.

Dans le Code Civil, il y a un chapitre 2 dédié à la responsabilité du fait des produits défectueux. Il s’agit d’une transposition de la directive. On a essayé de modifier quelques points, notamment que la question d’exonération.

Articles 1245 et suivants de l’ordonnance (avant articles 1386-1 et suivants). Pourquoi l’UE a voulu poser un texte ? Parce qu’il y a des accidents dans les 28 États membres et la plupart du temps ils sont causés à des consommateurs, soit dans le cadre d’un contrat soit dans un rapport extracontractuel. Le droit de la consommation est dans le domaine de compétence de l’UE. La Commission a ainsi imposé une réglementation sur les produits défectueux. Dans un certain nombre de cas, le fait de la chose qui cause un dommage résulte du fait de la chose défectueuse. Du fait que le domaine de ces articles est très vaste et recouvre l’article 1242 ; un de trop ?

 

 

  • 1. Le régime de responsabilité
  • L’article 1245 de l’ordonnance nous dit que «le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime ». Cet article fusionne les obligations de résultat et la responsabilité extracontractuelle du fait des choses.
  • L’article 1245-1 de l’ordonnance nous indique le type de dommages qui doivent être réparés : atteinte à la personne. Mais le même texte indique qu’il s’applique aussi aux dommages causés aux biens.
  • L’article 1245-2 de l’ordonnance nous parle des meubles mais aussi des immeubles quand les meubles ont été incorporés –ex : amiante dans les plafonds
  • L’article 1245-3 de l’ordonnance : souci consumériste, obligation de sécurité, un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on pourrait légitimement s’attendre.
  • L’article 1245-5 de l’ordonnance : nous donne une liste d’autres personnes que le producteur qui peuvent être à leur tour déclarées responsables : l’importateur du produit en provenance de l’étranger.
  • L’article 1245-6 de l’ordonnance : parle même du revendeur à la condition que le producteur ne puisse être identité.

 

La Cour est assez libérale. Avec le vaccin défectueux c’est les articles 1242 et 1245 = cumul de fondement. De façon hypocrite, l’article 1245-17 nous indique que ce régime spécial n’empêche pas la victime d’avoir recours au droit commun = option de choix pour la victime du régime plus favorable > condition de la responsabilité ou prescription ?

  • Responsabilité : Article 1245-8 de l’ordonnance « le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité »,il n’y a donc pas de présomption de responsabilité comme dans l’article 1242, ce n’est donc pas un clone de l’article 1242 mais de l’article 1240. Mais maintenant on a aussi l’article 1245-10 « leur producteur est responsable de plein droit». C’est contradictoire, il y a donc un texte de trop qui semble être l’article 1245-8
  • Prescription : elle est de 3ans à partir de la connaissance du défaut (article 1245-16 de l’ordonnance), il y a donc 2 ans de moins que dans le droit commun (article 1240 de l’ordonnance).

 

Arrêt 1ère Ch. Civ., 1er Juillet 2015 (fiche) : fabricant de vin, il y avait des morceaux de verre dans le vin. La bouteille de vin était donc un produit défectueux. L’embouteilleur et le producteur sont les garants mais une coopérative de vignerons ; des revendeurs avaient attaqués donc c’était dans le cadre d’un contrat. Mais ils avaient invoqué l’article 1245 et suivants de l’ordonnance. La Cour de Cassation considère que ce droit spécial s’applique parce que le bin est de ce fait impropre à la consommation et que le dommage économique des vignerons qui ont dû rapatrier toutes les bouteilles etc. C’est étrange la Cour aurait dû requalifier.

 

  • 2. Les causes d’exonération

Est-ce que le producteur responsable de plein droit peut s’exonérer ?

 L’article 1245-13 dispose que « le fait du tiers n’est pas exonératoire ».

L’article 1249-9 dispose que « l’autorisation administrative n’est pas exonératoire ». L’autorisation administrative permet à un produit d’être commercialisé = AMM (autorisation de mise sur le marché). Par conséquent on pourrait dire que vu que les spécialistes du ministère de la santé l’ont commercialisé et approuvé, le fabricant pourrait s’exonérer ; mais non.

 

L’article principal c’est l’art 1245-10 de l’ordonnance qui nous donne une liste de 5 cas d’exonérations, mais en réalité il y a des cas qui ne mériterait de pas être cité comme « le producteur peut prouver qu’il n’a pas mis le produit en circulation » > la plupart du temps, c’est lui, ou encore « que le défaut n’existait pas au moment où il l’a mis en circulation » > s’il est défectueux c’est dès son origine. Mais, il y a un cas qui est très important, il se trouve au 4èmemement  « le producteur est responsable du produit à moins qu’il ne prouve que l’état des connaissances scientifiques et techniques au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut ». Les groupes de pression du patronat se sont déchainés ; ce 4 est présenté en doctrine comme le cas d’exonération pour « risque de développement ». Ces connaissances scientifiques et techniques se rapport au bon père de famille ; le fabricant pourra s’exonéré que s’il prouve que les autres personnes raisonnables (concurrents, médecins) à l’époque n’auraient pas pu savoir non plus. Cela étant, dans les commentaires de ce texte il y a un courant restrictif à l’égard de cette exonération, qui se dessine. Quel est le fondement de cette exonération ? Est-ce que ça serait une sorte de force majeure d’ignorer les effets secondaires et imprévus du vaccin, médicament ? Possible. Mais il y en a un autre énoncé par le Mr. Laroumet que conformément à l’article 1245-10 de l’ordonnance que le risque qui est pris par le producteur de faire de le R&D = justification du risque > fondement de l’exonération car dans la société certains prennent des risques pour la communauté de sorte qu’il ne serait pas juste qu’il soit pénalisé.

Cela étant, les conditions étant assez restrictive, les producteurs de produits dangereux et potentiellement défectueux n’hésitent pas à avertir l’usager de la potentialité de dangerosité de la chose. C’est la raison pour laquelle, bien sûr dans le domaine des médicaments, des vaccins mais pas seulement, tout ce qui est potentiellement dangereux, fait l’objet de notices d’information. Même les risques les plus exceptionnels sont le plus souvent énoncés dans les notices. 

Cependant il y a une limite, lorsque le laboratoire rédige la notice, ce ne sont que les risques prévisibles. Si le médicament est tout nouveau, il y a des effets secondaires indésirables qu’il ne connaît pas dont l’article 1245-10 de l’ordonnance. Quand ce se produit, les producteurs, il y a eu de nombreux cas, souvent pour les jouets, rappellent les produits. Voilà pourquoi le concept assez nouveau qui vient du droit de l’environnement, le principe de précaution, qui consiste sans attendre que le dommage devienne massif, à prendre des mesures pour éviter qu’il le devienne > retire le produit du marché et informe les usagers qui ont déjà achetés le produit, qu’il ne faut plus l’utiliser.

Cette exonération fait elle-même l’objet d’exception, principalement dans l’article 1245-12 de l’ordonnance qui nous dit que « le producteur ne peut invoquer l’exonération lorsque le dommage a été causé par un élément du corps humain ». – ex : produit du corps humain qui sont utilisés pour faire des médicaments, ou directement pour soigner comme le sang. Cela doit encourager à appliquer le principe de précaution.

 

Chapitre 3 : Le droit spécial des accidents de la circulation

Il y a à part du Code, une loi du 5 Juillet 1985 qui a été initié par Mr. Badinter alors Garde des Sceaux. Elle n’a pas beaucoup été modifié, de sorte qu’il y a un avant et un après. L’avant de la loi Badinter, ce sont les grands arrêts de la Cour de Cassation qu’elle a commencé à rendre sur le fondement de l’article 1242 al 1er de l’ordonnance (ancien 1384) dans les années 1920 parce-qu’ il s’est avéré que les choses dangereuses se sont produits. De ce phénomène quantitatif, de cette omniprésence de la chose (voiture, camion, bateau), les contentieux se sont multipliés : de ce fait la Cour a amplifié considérablement sa jurisprudence et a rendu de nombreux grands arrêts jusqu’à la veille de la loi de 1985 Arrêt Desmares de 1982 : deux personnes qui traversent le périphérique à pied, se sont fait renversé et on fait un procès au conducteur > exonération du conducteur car la causalité c’est la faute de la victime. Ces grands arrêts été fondé sur les conditions de la responsabilité civile et pénale, qu’elle soit personnelle/subjective/objective, même dans ses arrêts les plus favorable à la victime et ses écarts, restait dans un cadre logique. Si on est logique, la cour devra parfois débouter la victime notamment dans les cas où c’est le fait de sa faute, et même si ça ne l’est pas, le conducteur n’y est pour rien.

 

Dans sa thèse, Starck a proposé de sortir de la responsabilité et de se fonder sur la Sécurité Sociale, ou créer un fond de garantie qui prendra automatiquement en charge. On abandonne la responsabilité pour lui substituer un système d’indemnisation sans procès = comme quand on tombe malade. Mais c’est Mr Tunc qui fut le professeur de Mr Badinter. Mr Tunc estimait qu’il fallait laisser tomber la responsabilité, le lien de causalité, … mais en même temps il était pas prêt ç ce qu’on mette en œuvre le système de Mr Starck. Dans les années 1960, il a écrit plusieurs articles proposant de sorte de l’article 1242 de l’ordonnance (Art 1384) et de faire un droit spécial pour les accidents de la circulation principalement où le juge n’aurait plus à rechercher, en cas de procès, les conditions de la responsabilité, où le juge condamnerait systématiquement le conducteur lui-même obligatoirement assuré. Et puis, à partir du moment où la probabilité d’être condamné était dans le système philosophique, était quasiment automatique, plutôt qu’il ait un procès, qu’on prenne des avocats et que ça nous revienne cher, Mr Tunc proposait qu’il suffise que l’avocat de la victime prenne contacte avec l’assureur du conducteur pour avoir son chèque. Donc on évite le procès et l’assureur, dans la certitude que son assuré soit condamné fera des économies d’avocat et fera un chèque tout de suite. C’est le contrat de transaction ; la transaction est le contrat par lequel des parties, des personnes qui sont en opposition, où l’une d’entre elle s’apprête à faire un procès à l’autre ou le procès a commencé é mais aucun jugement n’a été rendu, signent un contrat pour mettre fin à leur litige. En générale, la contrepartie étant que celui qui est défendeur fait un chèque. C’est un contrat extrêmement courant. Quoi qu’il en soit, le système de Mr Tunc est un peu pervers. C’est le même fondement que l’idée de Mr Starck, mais pas le régime car dans l’idée du dernier c’est la collectivité, la cité qui prend en charge l’indemnisation.

Quoi qu’il en soit, la loi fait l’exacte application de la théorie de Mr Tunc.

 

La Cour de Cassation a franchi la ligne rouge de l’absence de logique, d’une certaine injustice alors même que le droit, c’est la logique, de la justice de la rationalité. Le problème de la loi de 1985 transposant les idées de Tunc c’est : plus de logique, pas vraiment de justice. Dans son optique, il dit à plusieurs reprises qu’il se fonde sur l’assurance ; à partir du moment où le conducteur est assuré, même s’il n’y est pour rien, il va être condamné.

Deux conséquences négatives ne sont pas évoquées dabs l’article de Mr Tunc 

  • Aspect moral : comment peut-on se faire condamner alors qu’on n’y est pour rien ? Donc Mr Tunc ne peut pas écrire que le conducteur est irresponsable car il y a condamnation et traumatisme.
  • Aspect économique : On ne peut pas nous plus dire qu’il est irresponsable car l’assureur va augmenter les primes (bonus/malus).

L’assurance permet que la victime soit indemnisée alors même que le conducteur ne pourrait pas payer, mais c’est tout vu : il y a un procès, conducteur assigné et condamné avec les conséquences psychologique et économique > Mr Tunc ne peut pas parler d’irresponsabilité. Voilà pourquoi ce système n’est pas justice, celui de Starck aurait été mieux.

La thèse de Mme. Viney, le déclin de la responsabilité individuelle : Non, celui de la responsabilité subjective oui. En 2016, la responsabilité individuelle est toujours là.

La Loi Badinter est une demie mesure.

 

Section 1ère : Le champ d’application et la portée de la loi

L’article 1er de la loi de Juillet 1985 : « la loi s’applique même lorsqu’elles sont transportées en vertu d’un contrat, aux victimes d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ainsi que ses remorques, à l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies propres ».

 –>  Comme dans la responsabilité des produits défectueux, il y a une nouveauté qui peut apparaître un peu perturbante qui consiste à fondre les responsabilités contractuelles et délictuelles (peut importe que la victime est conclu un contrat avec le conducteur)

 –>  Impliqué : responsabilité matérielle > fait passif peut conduire à la condamnation.

 –>  Application de loi quand un tracteur blesse un promeneur : irrationnel

 —>  Application ultra large de la Cour de Cassation de la notion de véhicule terrestre à moteur – ex : tondeuse à gazon.

 

Arrêt 2ème Ch. Civ., 22 Mai 2014 : tondeuse à gazon dans un garage et fuite d’essence et explosion. Les habitants de la maison subissent un dommage important ; les parents meurent et les enfants sont blessés. La grand-mère des enfants invoque la responsabilité des parents > fond de garantie car ils sont morts. Elle invoque la loi de 1985 et le fond de garantie plaide que la tondeuse = où est l’accident de la circulation ? de sorte que les juges du fond sont convaincus et déboutent la grand-mère. Cassation ; un juge peut être conduit à interpréter de manière fantaisiste un texte de loi. La loi n’exige pas que l’accident se soit produit dans un lieu ouvert à la circulation. La Cour de Cassation a dénaturé la loi déjà extrêmement libérale. Le sinistre s’est produit à cause d’une fuite de carburant ; la Cour dit que la fonction de déplacement était en cause = virtualité du déplacement. Pourquoi l’avocat ne s’est pas fondée sur l’article 1242 ? La loi de 1985 rend automatique la condamnation et l’assureur a une obligation de faire une offre d’indemnité.  

 

Pour les vélos qui sont loués, il est intéressant d’interroger les entreprises qui gèrent les Vélib pour s’assurer qu’ils sont assurés au titre de la responsabilité civile. A priori, on va dire « NON » car celui qui a l’usage, la direction et le contrôle n’est pas l’entreprise de vélos.

Dans le cas d’un accident de la route, si sont impliqués un vélo et un scooter, la responsabilité du conducteur du véhicule terrestre à moteur est AUTOMATIQUE même s’il n’y est pour rien, en revanche, la responsabilité du conducteur du vélo ne sera pas retenue sur le fondement de la loi de 1985 mais éventuellement sur le fondement du droit commun avec l’article 1240 du Code civil la preuve de sa faute.

La distinction entre la qualité des personnes impliquées est importante.

Le piéton, lui, n’a pas de véhicule MAIS peut commettre de grandes imprudences (par exemple ? en traversant le boulevard périphérique) et sera soumis au droit commun de l’article 1240 du Code civil. La plupart du temps, le juge n’acceptera pas la prise en compte de sa faute.

Il y’a donc une condition juridique très différente selon qu’on est conducteur d’un véhicule à moteur ou conducteur d’un véhicule non moteur ou encore un piéton.

Ainsi, la Cour de cassation rend de nombreux arrêts sur le sujet.

Par exemple, voilà un scooter qui brule un feu rouge et est heurté par une voiture qui roulait normalement au feu vert. Sous le choc, il est projeté sur la chaussée et est heurté par une 2ème voiture qui arrivait également normalement. Il fait un procès, s’il est vivant, ou sa famille fait un procès, s’il est mort, aux deux conducteurs qui, au regard de la causalité, sont tous les deux « innocents », le conducteur du scooter étant la cause principale du dommage en ayant brulé le feu rouge. La Cour de cassation considère que : « Dès lors qu’il est éjecté de son scooter et trainé sur le sol, il perd sa qualité de conducteur pour devenir un piéton et le juge peut donc lui appliquer le bénéfice de la qualité de piéton ». Par ailleurs, lorsqu’il y’a une collision de deux véhicules à moteur, à ce moment là, ils peuvent l’un et l’autre se reprocher les fautes respectives qu’ils ont commises. C’est en quelques sortes le droit commun qui reprend ces titres d’application. Par conséquent, les conducteurs ne pourraient pas opposer au conducteur de scooter sa faute à partir du moment où il est devenu piéton. En revanche, si le conducteur du scooter le reste, on pourra lui opposer plus facilement sa faute.

La Cour de cassation utilise l’artifice de qualifier piéton, fusse, pour quelques secondes, celui qui était dans le conducteur du véhicule à moteur ce qui permettra d’analyser à 100%.

Tout ceci correspond à la philosophie de Tunc et Badinter.

Il y’a un standard : la victime a perdu la qualité de conducteur dès lors qu’elle est projetée de son véhicule (ce peut être aussi une voiture sous l’effet d’un choc, le conducteur étant sorti de la voiture).

Tout ceci n’est pas très juridique mais c’est la théorie de la garantie.

Enfin, le propriétaire du conducteur du véhicule à moteur, sur le fondement de l’article 1242 du Code civil, est présumé conducteur de sorte que s’il est actionné, il devra prouver que ce n’est pas lui qui conduisait et qu’il y’a eu transfert de la garde. On conserve ainsi les critères étudiés dans le droit commun de la garde car conducteur = gardien.

Ceux qui ne sont pas soumis à la loi sont les cyclistes, les piétons mais aussi les passagers. Le passager d’un véhicule à moteur peut invoquer la loi non seulement contre le conducteur d’un autre véhicule à moteur, partie à l’accident, mais aussi contre le conducteur lui-même et nous avons déjà dit qu’il y’a souvent des procès entre parents/ amis/ maris et femmes etc ce qui peut paraître assez étonnant mais on se dit qu’après tout, si c’est l’assureur qui paie, on peut faire des procès.

Pour résumer, il s’agit d’un domaine d’application extrêmement large, étendu par le juge.

La loi est elle-même très extensive dans le seul but d’indemniser ceux qui ont subi un dommage corporel dont la prise en considération est plus importante que la causalité de l’accident sur le thème de la garantie.

Section 2 : L’implication.

L’implication, c’est vraiment le noyau de la réforme. Comme nous l’avons dit, c’est le contraire de la causalité. En droit commun, il y’a deux théories de la causalité : la théorie de la causalité adéquate ET la théorie de l’équivalence des conditions.

La Cour de cassation a admis très rarement qu’il puisse y’avoir responsabilité sans causalité.

Avec la loi Badinter, l’exception devient la règle c’est-à-dire que la pure participation matérielle de la chose, LE FAIT PASSIF DE LA CHOSE, est insuffisante pour exonérer le conducteur du véhicule à moteur de la présomption de responsabilité pratiquement irréfragable qui pèse sur lui alors même qu’on ne peut pas faire autrement.

Il faut se tenir le plus à distance possible des voitures, des cyclistes qui sont devant nous pour ne pas être impliqué trop facilement en cas de collision. Et même si nous sommes prudents, nous ne sommes pas à l’abri.

Il y’a un certain nombre d’hypothèses déjà énoncées.

Par exemple, la voiture immobilisée soit à un feu rouge soit en stationnement régulier dans les places publiques, si un cycliste ou un piéton vient à être heurté, ces derniers pourront faire un procès, exiger de l’assureur du conducteur une offre d’indemnisation et s’il refuse ou propose une somme moins importante, une assignation peut alors être faite. Nous avons ici une participation matérielle, un fait passif, une normalité de la situation de la chose dans l’espace.

Un autre exemple, les accidents complexes c’est-à-dire que plusieurs véhicules sont impliqués. Prenons le cas du cycliste ou du piéton renversé par une voiture puis par une autre voiture qui vient l’écraser. Les deux sont impliquées. Les conducteurs seront condamnés.

Il faut savoir que l’implication est automatique car la seule présence sur les lieux de l’accident entraine l’implication et donc la condamnation. Ceci fait peur !

Dans la fiche de TD, un arrêt a été mis de la 3ème Chambre du 15 janvier 2015. Une voiture tombe dans un ravin au moment où une autre voiture arrive en sens inverse. Un procès a lieu fait par les victimes de la 1ère voiture et leur famille et les juges du fond déboutent parce qu’a priori, le véhicule venu en sens inverse n’y est pour rien. La Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel et considère qu’il y’a une responsabilité dès lors que la voiture « a joué un rôle quelconque » et ajoute « peu importe l’absence de contact et peu importe qu’il y’ait eu un fait perturbateur ». En d’autres termes, la simple présence matérielle sur les lieux de l’accident suffit à entrainer la responsabilité du conducteur.

Nous sommes dans un mécanisme de responsabilité individuelle. Il n’y a pas de déclin de la responsabilité individuelle. Autrement, il y’a un déclin de la causalité. Évidemment, l’assureur paie mais pour le compte du responsable. C’est un droit spécial de la responsabilité (par rapport aux accidents). Ça ne va pas car c’est INJUSTE de condamner quelqu’un qui n’y est pour rien dans les accidents. Il n’y a pas que l’aspect économique qui compte.

Patrice Jourdain, professeur à Paris I, coauteur de la responsabilité civile avec Mme Viney, considère que l’implication n’est pas la causalité, il faut abandonner la causalité et condamner systématiquement le conducteur qui est présent sur les lieux de l’accident. PY Gautier n’est pas du tout d’accord avec lui. L’essentiel de la jurisprudence va dans le sens de la condamnation.

L’avant-projet CATALA sur la responsabilité extracontractuelle reprend la loi de 1985 et codifie la jurisprudence de la Cour de Cassation et ceci semble donc être un mouvement irréversible.

On peut se renvoyer à la Conférence visionnaire de Josserand mise dans la fiche de TD 1 : la volonté de réparer prime.

Il y’a plusieurs arrêts dans l’hypothèse où le piéton est renversé par une voiture qui prend la fuite et est heurté par un conducteur qui arrivait normalement. Le piéton va donc assigner le 2ème conducteur. C’est imprévisible et irrésistible.

La Cour de cassation n’est pas toujours cohérente et il lui arrive d’avoir un sursaut de responsabilité et de revenir au mode de raisonnement du droit commun qui était le sien depuis le XIXème siècle.

A été mis dans la fiche de TD un arrêt de la 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation du 5 ou 6 février 2015. Il s’agissait de deux cyclistes qui voulaient doubler un fourgon et qui sont heurtés par un bus qui arrive en sens inverse. L’un est blessé. L’autre est tué. Les victimes, familles assignent le conducteur du fourgon. Les juges du fond refusent de mettre en cause sa responsabilité du fait de l’absence d’implication. L’implication peut alors avoir deux sens et est ainsi ambiguë. Soit on considère que l’implication est une forme de causalité et il faut au minimum l’équivalence des conditions (il faut que le véhicule soit une des causes de l’accident même si ce n’est pas la principale) soit on considère que l’implication correspond à la participation matérielle, au fait passif des choses. Le juge du fond a parfois un raisonnement étant plus proche des parties et des faits, un raisonnement, une logique. Donc, il y’a refus. Il y’a un pourvoi en cassation. On aurait pu penser que la Cour de Cassation censure mais NON « Il n’y a pas de manœuvre perturbatrice » et ce sont les victimes qui se sont déportées brutalement. Nous noterons qu’on est tout à fait dans le droit commun, aucune causalité au regard du fourgon ET la causalité principale est la faute de la victime. Pourquoi cet arrêt alors que d’autres notamment celui du 15 janvier 2015 va dans un sens contraire ? Selon les critères de la Cour de Cassation en théorie, il aurait du être condamné même s’il n’y a pas eu de contact car le contact n’est pas une condition ni en droit commun ni selon la loi de 1985. C’est un des rares libéraux.

Citons un autre arrêt mis dans la fiche de TD, l’arrêt de la 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation du 5 mars 2015. Il s’agissait d’un scooter, conduit par un garçon avec une passagère derrière et le scooter est heurté par une voiture en fuite ; sous le choc, le scooter et ses passagers viennent s’encastrer dans une voiture en stationnement ; après cela, le conducteur de la voiture qui a pris la fuite et qui est à l’origine du dommage percute une 2ème voiture. C’est une situation surréaliste. Les victimes assignent le propriétaire de la voiture en stationnement qui n’y est pour rien et c’est ce dernier qui interjette appel au procès avec l’INTERVENTION FORCÉE. Pour ne pas être le seul à être condamné, le propriétaire de la voiture stationnée fait un procès contre le 2ème conducteur de la voiture. Si on analyse ce cas en termes de droit commun, le seul responsable est le conducteur de la voiture en fuite. Il est clair que le propriétaire de la voiture stationnée n’y est pour rien et n’a subi que passivement le choc des corps venus s’écraser sur sa voiture. Le 2ème conducteur n’a pas heurté les corps des victimes et était simplement présent puisqu’il y’a eu une 2ème collision avec le véhicule en fuite. La Cour de cassation condamne les uns et opère un partage pour d’autres. À REVOIR, C’EST FLOU. S’agissant du propriétaire de la 2ème voiture qui n’a rien à voir avec l’accident si ce n’est qu’il est simplement présent sur les lieux, elle considère qu’il y’a eu « un enchainement discontinu des collisions ». Ce raisonnement aurait du s’appliquer au propriétaire de la voiture stationnée.

Si on fait de la synthèse, c’est difficile. MAIS il y’a très clairement un courant doctrinal majoritaire en faveur de l’interprétation de l’implication comme participation purement matérielle. C’est donc une rupture majeure.

Dans un procès en responsabilité, l’assureur est le représentant de l’assuré. Comment ça se passe ? La victime va tenter de connaître le nom de l’assureur du propriétaire du conducteur du véhicule à moteur. Il y’aura un procès si la transaction n’est pas conclue. Soit la victime assigne le conducteur défendeur et l’assureur si elle a obtenu son nom, soit la victime assigne le conducteur qui, lui, va faire venir au procès l’assureur. Dans 98% des cas, l’assureur va désigner un avocat, va le payer, lequel défendra les deux parties, l’assureur et l’assuré. S’il y’a une condamnation, seront condamnés le défendeur et l’assureur sachant que c’est l’assureur qui paiera. C’est bien une logique de responsabilité individuelle qui est maintenue. Quelqu’un qui n’y est pour rien dans un accident va être condamné, c’est fou ! Ça laisse quand même des traces dans les esprits.

 

Section 3 : Les causes d’exonération.

En étudiant l’article 1242 du Code civil, nous avons vu le système de présomption automatique de responsabilité mais une exonération possible.

La question se pose également pour le droit spécial. Le conducteur est automatiquement responsable alors même que son véhicule n’y est pour rien. À t-il une possibilité de s’exonérer ?

La loi a restreint, considérablement, les causes d’exonération et c’est logique puisqu’on peut être responsable sans causalité donc il est logique que la preuve de ce que la cause de l’accident est extérieure au conducteur ne joue pas de rôle. En d’autres termes, le caractère très restrictif des causes d’exonération manifeste que la causalité n’a pas de rôle à jouer dans les accidents de la circulation et que la réparation du dommage corporel, seule, compte. Pour s’en convaincre, il suffit de lire l’article 2 de la loi : « Les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d’un tiers par le conducteur ou le gardien du véhicule à moteur ». Commentons. On a vu que, dans le droit commun de l’article 1242 du Code civil, alors même qu’il y’a une présomption de la causalité, le défendeur peut prouver que la cause de l’accident n’est pas sa chose MAIS qu’une force majeure imprévisible et irrésistible ou le fait d’un tiers sont survenus. Or, dans le droit des accidents de la circulation, même si la causalité repose dans la force majeure ou dans le fait du tiers, peu importe. Par exemple ? Une pluie tombe sur l’autoroute de sorte qu’une voiture qui conduisait normalement se retrouve en aquaplaning et heurte un cycliste ou un piéton, la force majeure ne prévaudra pas et il sera condamné. 

Le conducteur qui n’y est pour rien sera condamné ; même si c’est son assureur qui paie, ce n’est pas logique ni juste. C’est ça qui surprend PY Gautier dans ces théories.

Reste une 3ème cause exonératoire, la plus délicate : LA FAUTE DE LA VICTIME. Aujourd’hui, il y’a de nombreux accidents de vélos renversés par des voitures ou autres. Que fait-on pour eux ? On a vu, en droit commun (1242), que la position de la Cour de Cassation varie et il y’a un point sur lequel elle n’a jamais varié : la victime dont le comportement est la cause principale de l’accident et dont le comportement a été imprévisible et irrésistible pour le défendeur, celui-ci pourra invoquer le fait exonératoire de la victime. Le comportement de la victime qui est équivalent à une cause étrangère est une cause d’exonération. Jusqu’à maintenant en droit commun, on avait la preuve par le défendeur d’une cause étrangère et à l’intérieur on y trouve la force majeure, le fait du tiers et la faute de la victime. Il lui est arrivé d’aller plus loin et a considéré que même si la faute de la victime n’est ni imprévisible ni irrésistible, comme c’est une cause des principales de l’accident, elle admettait que les juges du fond prononcent un partage de responsabilité (et n’aura que la moitié de l’indemnité). Soit exonération totale puisque faute équivalente à une cause étrangère, soit exonération partielle ; tout cela est fondé sur la présence de la causalité.

Si la loi sur les accidents de la circulation tend à s’échapper de la causalité, il est logique que la faute de la victime ne soit pas plus exonératoire que le fait du tiers ou encore que la force majeure. C’est le principe posé par l’article 3 de la loi. Cependant, elle peut jouer un rôle dans des cas très limités. Commençons par les cas pour lesquels elle peut jouer un rôle. L’article 4 de la loi dispose que : « La faute commise par le conducteur du véhicule à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation ». Reprenons l’exemple du scooter. Le scooter brule le feu rouge et heurte un camion ou une voiture qui arrivait normalement en sens inverse. Il y’a une collision de deux véhicules à moteur. Dans ce cas, le défendeur pourra invoquer l’absence de causalité c’est-à-dire la faute partiellement ou totalement exonératoire du conducteur. Qu’est-ce qui fait la différence entre le cycliste et le scooter ? Tout d’abord, c’est plus dangereux mais il y’a aussi une différence énorme qu’est l’assurance car le conducteur du scooter est forcément assuré de sorte que son assureur pourra lui-même prendre en charge une partie de l’indemnisation.

Un autre cas ? Alors même que la victime serait un cycliste ou un piéton, l’article 5 dispose que : « La faute commise par la victime a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages aux biens qu’elle a subis ». Par conséquent, le cycliste qui a brulé le feu rouge, s’il est renversé et blessé, aura une indemnisation systématique de son dommage corporel mais son vélo ne lui sera pas remboursé (ou encore même s’il avait son ordinateur sur lui).

Le dommage le plus fréquent est le dommage corporel.

L’article 3 (la suite) : « Les victimes sont indemnisées des dommages résultat des atteintes à leur personne sans que puisse leur être opposée leur propre faute, à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident ». Commentons. ? Le conducteur ne peut pas opposer à la victime sa faute SAUF si elle est inexcusable (premièrement) et si elle a été la cause exclusive (deuxièmement). Nous avons un principe de responsabilité automatiquement indifférent à la faute de la victime avec néanmoins une exception.

Si on a une conception très stricte de la cause exonératoire, la victime sera automatiquement indemnisée.

Si on relit Tunc : « Les fautes que tout le monde commet ne sont pas des fautes ».

Gautier n’est pas d’accord. Tunc a tort.

 

Tout va être dans l’interprétation des deux concepts. S’agissant de la faute inexcusable, c’est une notion abordée, quelque peu, en L2 au SEM 1. Souvenons-nous au sujet des clauses abusives, des clauses exonératoires de responsabilité, qu’il y’a une aggravation de la responsabilité du débiteur lorsqu’il a commis une faute grave, lourde, inexcusable (tout cela est synonyme) donc le standard commun à ces mots est la faute « d’une particulière gravité ». S’agissant de la cause exclusive, ça nous fait revenir à la causalité. C’est une situation tout à fait exceptionnelle donc Badinter invitait les juges à avoir une conception très restrictive de la cause du dommage. Sans surprise, la Cour de Cassation en a fait une application défavorable au défendeur et favorable à la victime toujours pour une raison de garantie d’assurance d’un côté et de dommage corporel d’un autre côté.

A été mis dans la fiche de TD un arrêt de la 2ème Chambre civile de la Cour de Cassation du 26 mars 2015. Il s’agissait de l’hypothèse d’un conducteur accompagné (la mère avec la fille de 17 ans qui lui apprend à conduire). La fille a un moment de panique et commence à perdre le contrôle de la voiture et la mère elle-même paniquée veut arrêter la voiture et actionne le frein à main. Donc, la voiture va percuter une 2ème voiture qui arrivait. On en revient à la même question. La mère meurt et ses héritiers vont un procès au 2ème conducteur, la voiture qui arrivait sur les lieux. La cause de l’accident est tout ce qu’il s’est passé à l’intérieur de la voiture. Les juges du fond, la Cour d’appel quoi, condamnent le 2ème conducteur. Celui-ci avait le moyen de s’exonérer, prouver que sa voiture n’y était pour rien (aucune causalité) MAIS comme la COUR DE CASSATION estime que la simple implication suffit du coup c’est mort (1er moyen) ET prouver que la cause correspond au fait du tiers, à la force majeure ou à la faute de la victime (2ème moyen). C’est l’extrême imprudence, le moment de panique de la mère, non conductrice, qui a provoqué l’accident. Les juges du fond estiment qu’il n’y a pas de faute inexcusable, ni exclusive.

Un autre arrêt, rendu il y’a une dizaine d’années. Il s’agit d’un piéton, ivre mort ; à 04h00 du matin, il marchait au milieu d’une route départementale non éclairée. Il est renversé par une voiture. Ses héritiers font un procès au conducteur de la voiture qui soumet la faute inexcusable/ exclusive. La Cour de Cassation estime que ce n’est pas une faute inexcusable. Si on a une conception aussi stricte, qu’est-ce qu’une faute inexcusable ???!!!

Une autre hypothèse. Un jeune homme, ivre mort, qui n’a pas le permis, conduit (son ami le laisse). Évidemment, il y’a un accident. Ils sont morts tous les deux (le conducteur + le passager). Il y’a alors un procès en responsabilité. Les juges du fond estiment que le conducteur qui a laissé son ami ivre mort disent qu’il y’a une faute inexcusable. La Cour de Cassation dit que la faute n’est pas inexcusable ni exclusive. N’IMPORTE QUOI…

Avec l’absence de prise en compte de la faute, c’est un verrouillage complet de la responsabilité automatique.

Les victimes seront indemnisées alors même qu’elles ont commis une faute inexcusable.

Le dernier alinéa de l’article 3 précise que même pour ceux qui ont moins de 16 ans, plus de 70 ans ou une incapacité permanente de 80% leur faute pourra leur être opposée si le dommage a été volontairement recherché. C’est donc l’hypothèse du suicide. La Cour de cassation interprète la notion « volontairement ». Quelqu’un de dépressif qui s’est jeté sous les roues du bus qui passait, est-ce que c’est volontairement ?

Rarement, le juge admettra la faute de la victime. S’il le fait, très exceptionnellement bien sûr, l’article 6 de la loi, reprenant la JURISPRUDENCE de la Cour de Cassation sur l’article 1242 du Code civil, déclare que sa faute sera opposable aux victimes par ricochet c’est-à-dire aux héritiers, aux proches.

Voilà pour ce droit spécial de la circulation.

Section 4 : Les actions récursoires.

C’est l’hypothèse qui celui qui paie la victime mais qui est en droit de se retourner contre le responsable ou un responsable pour être remboursé totalement ou partiellement (articles 28 et suivants de la loi).

La 1ère action récursoire est celle des organismes de Sécurité Sociale. Tous ceux qui, au moment de l’accident, pendant les soins et pendant la convalescence, vont payer les frais de l’ambulance, des pompiers, des médecins, du kinésithérapeute, sont en droit d’agir contre le responsable.

Ceux qui ont avancé les frais vont se faire rembourser par le conducteur et donc pas son assureur. Il y a d’une part le dommage par ricochet (proches) et d’autre part le remboursement des frais de l’accident > ce sont les tiers payeurs = autre personne qui paye à la place du responsable, qui avance les frais.

 

Il y a une 2ème action récursoire qui est celle des recours entre co-responsable. C’est une hypothèse déjà envisagée. Il y a un accident complexe (=plusieurs véhicules) > collision entre 2 véhicules.

Ex : transport bénévole > un ami me raccompagne = échange de consentement = contrat de transport bénévole. S’il y a un accident, ça pourrait être de la responsabilité contractuelle, mais peu importe depuis la loi de 1985, l’existence d’un contrat est indifférente. Certain considère qu’un service rendu entre ami ne relève pas du contrat (Mr. Carbonnier, théorie du non droit).

Quoiqu’il en soit, le plus fréquemment le passager ne va pas assigner son ami/parent conducteur de la voiture, mais plutôt le conducteur du 2ème véhicule. Parfois c’est choquant car c’est le conducteur de la 1ère voiture qui a commis une faute, mais c’est l’autre qui est assigné même s’il n’a commis aucune imprudence. Donc l’autre conducteur devra payer les DOMMAGES ET INTÉRÊTS.

La question est donc, dans un 2ème temps de savoir si celui qui a payé pour le tout, n’aurait pas un recours contributoire, une action récursoire à l’encontre du conducteur de la 1ère voiture ? Si on lit l’article 1er de la loi, il est logique que les 2 conducteurs soient responsables ; par conséquent combinant la loi de 1985 et le droit des obligations, les juges vont dans une situation comme celle-ci, déclarer recevable le recours contributoire – 2 hypothèses :

  • Causes de l’accident indéterminées : celui qui a payé pour le tout a un recours contributoire par part virile > fraction mathématiquement identique, on est 3 chacun doit un 1/3
  • Conducteur du 1er véhicule qui est à l’origine principale de l’accident : les juges admettent que la cause du dommage étant le fait du 1er conducteur et le 2ème conducteur n’y étant pour rien, si ce n’est sa présence et la participation passive du véhicule, c’est un fait qu’il ne pourra plus opposer (implication = participation matérielle). Mais, dans les rapports avec le 1er conducteur, on devrait pour admettre que le 2ème conducteur se fasse rembourser intégralement. Il n’y a aucune raison de ne pas admettre le recours contributoire du 2ème

 

Il existe une 3ème action récursoire, lors d’un accident de voiture les 2 conducteurs sont blessés. Est-ce que la loi spéciale s’applique ou est-ce que c’est le droit commun de la responsabilité extracontractuelle qui résulte de la jurisprudence à ce jour qui s’applique ?

  • Droit spécial : Il n’y a pas de réponse vraiment claire de la Cour de Cassation. Il s’agit d’une application réciproque, bilatérale de la loi. Le juge va condamner les deux conducteurs et va prononcer une opération très importante, c’est la compensation = fusion des dettes réciproques : celui qui doit 200 000 va donner à 100 000 à celui qui lui devait 100 000.

L’un des deux conducteurs a commis une faute (dommage de 200 000), l’autre n’a commis aucune faute (dommage de 100 000) ; dans ce cas, le juge admet tenir compte de la faute du conducteur victime. Seulement celui qui n’a pas commis de faute se fera indemniser, ou alors sur un dommage de 200 000, l’autre ne lui donnera que 80 000 et le juge prononcera la compensation. 

  • Droit commun : Selon l‘article 1242 al 1er, chacun est gardien de son véhicule. Si l’un des véhicules n’a été que l’instrument passif du dommage, il n’y aura pas condamnation de son conducteur. Avec le droit commun il y a plus de chance, indépendamment des fautes du point de vu de la stricte causalité, que le conducteur ne soit pas condamné.

 

Fiche TD, Ch. Crim., 5 Mai 2015 : deux véhicules, avec 2 passagers dans le 1er véhicule, l’un meurt. Le conducteur réclame en tant que victime par ricochet, au conducteur de l’autre voiture, l’indemnisation de la totalité du dommage. Peut-il le faire ? Et n’est-ce pas une façon de contourner sa propre responsabilité ? Les juges du fond ont partagé la responsabilité entre les 2 conducteurs, et le pourvoi a été rejeté.

 

Titre 3 : La combinaison des responsabilités

Section 1 : La combinaison à l’intérieur de la responsabilité extracontractuelle.

Il s’agit de l’hypothèse où il y’a plusieurs responsables possibles appelés coresponsables OU codébiteurs.

Le débiteur a deux sortes de dettes : les dettes contractuelles et les dettes extracontractuelles. Donc les dommages représentent une dette extracontractuelle.

 

En présence de coresponsables ou de codébiteurs, que doit faire le juge ? Doit-il prononcer une sorte de solidarité entre les codébiteurs ? La solidarité est un mécanisme essentiel (que nous étudierons bientôt) où un juge peut condamner plusieurs personnes et où le créancier a le choix de faire exécuter la décision c’est-à-dire payer le tout pour les codébiteurs à charge, pour celui qui paie le tout, d’exercer un recours contributoire.

Il y’a une 1ère hypothèse de coresponsables dans le cas d’une responsabilité personnelle d’une part, combinée avec une responsabilité du fait d’autrui d’autre part.

C’est l’exemple typique des parents et enfants. Depuis les arrêts de 1984, les enfants sont responsables de leur dommage alors même qu’ils n’ont pas de discernement. Les parents sont responsables du fait de leur enfant sans prouver l’absence de faute. Il y’a donc deux codébiteurs, l’enfant évidemment mineur mais représenté par ses parents et les parents. Il y’a donc un cumul de responsabilités. Comme nous l’avons étudié, ça n’a pas grand intérêt car c’est l’assureur des parents qui va payer.

En restant même dans la famille, on pourrait envisager une 3ème responsabilité. Si, au moment du dommage, l’enfant est à l’école, chez les parents de son meilleur ami, en colonie de vacances ou autres, on pourrait admettre qu’il y’ait deux responsabilités pour autrui (celle des parents car la Cour de Cassation n’exige pas la cohabitation au moment du dommage et celle du gardien de l’enfant au moment du dommage). Ça nous ferait donc 3 responsabilités. La Cour de cassation n’est pas encore allée jusque-là.

Il y’a une 2ème hypothèse avec une responsabilité personnelle et une responsabilité du fait d’autrui – ex : L’enfant était en vacances chez le parent du meilleur ami et celui-ci laissait sortir l’enfant jusqu’à 06h00 du matin avec des canettes de RedBull. Les enfants ont allumé un incendie. On a la responsabilité personnelle de l’enfant adolescent. On a la responsabilité des parents, semble-t-il. On a la responsabilité des parents du meilleur ami qui, eux, ont commis une faute. À nouveau, il y’a 3 responsabilités. Il s’agit ici de l’application de l’article 1240 du Code civil.

Il y’a donc un cumul de sorte que la/ les victime(s) vont, au moment de l’assignation, faire citer l’enfant représenté par ses parents et par les parents qui avaient la garde de l’enfant. La victime choisira celui/ celle qui devra payer pour tout le monde.

 

Il s’agit des rapports entre la responsabilité du fait des choses et la responsabilité du fait d’autrui. Le gardien de la chose est responsable. Les parents sont responsables du fait de leur enfant. Il y’a donc un cumul de responsabilité GARDIEN/ ENFANT/ PARENTS. En pratique, c’est l’assureur des parents qui paiera. Mais, il ne faut pas.

Prenons l’exemple des commettants et des préposés : Voilà un préposé qui conduit un camion qui renverse une petite fille. Qui est le gardien du camion ? Logiquement, c’est le préposé.  Ne pourrait-on pas considérer qu’il a conservé la garde du camion, gardien théorique ? Certains arrêts le considèrent. Ils estiment (avant la loi de 1985) que l’employeur est le gardien théorique mais c’est condamné par l’arrêt Franck.

 

  • Répondons à quelques questions posées :

 –>  L’articulation de la responsabilité du commettant/ préposé. On a vu l’arrêt Costedoat.

Si le préposé a commis une faute pénale, on a vu qu’il reste responsable de sorte qu’il y’aurait effectivement deux responsabilités voire une seule s’il a commis une faute pénale et que le juge considère qu’il est sorti de ses fonctions. À ce moment là, il n’y aurait plus qu’un responsable, le préposé. Mais, il n’est pas assuré. Donc PY Gautier est assez dubitatif sur l’indemnisation.

 

La faute pénale a-t-elle été commise dans les fonctions OU en dehors des fonctions ?

Le livreur de pizza qui viole la cliente constitue une faute pénale grave. La jurisprudence considère que ça a été l’occasion des fonctions.

Faut-il que la faute pénale soit intentionnelle ?

Restons sur l’exemple du livreur de pizza en scooter, en vélo. Pour livrer plus vite, il a renversé quelqu’un. Il est donc dans le cadre de sa mission mais n’a pas fait exprès. En droit pénal, c’est la notion de « coups et blessures involontaires » voire « homicide involontaire » si la victime est morte. Est-ce qu’il est responsable ? OUI, sauf à considérer que la faute pénale, faisant renaitre la responsabilité du préposé, ne devrait être qu’intentionnelle.

Quand nous avons ce genre de situations, nous développons : « on pourrait considérer ceci, cela ».

 –>  Dans le cas où l’enfant était à l’école, l’école pourrait être considérée comme responsable soit sur le fondement de la présomption de l’article 1242, alinéa 1er si on a une conception élargie de la garde soit s’il y’a une faute de la part de l’école qui peut être prouvée.

Fondamentalement, on va retomber sur l’obligation de résultat pour la sécurité des enfants qui fréquentent l’école de sorte qu’on aura une articulation entre deux responsabilités extracontractuelle, celle de l’enfant auteur du dommage et de ses parents et une responsabilité de la part de l’école.

 –> À propos de la faute prouvée de l’instituteur ?

Si l’instituteur ne surveillait pas assez les enfants et qu’il y’a eu un dommage, il sera assigné personnellement pour faute prouvée sur le fondement de l’article 1240 ou plutôt 1242.

 

Nous voyons donc qu’il y’a de nombreuses combinaisons possibles de la responsabilité personnelle ou indirecte mais toujours avec un but unique : assurer la réparation du dommage et trouver un garant qui paye, si possible, qui soit assuré.

L’articulation entre le droit spécial des articles 1245 et suivants (la responsabilité du fait des produits défectueux) et le droit commun de l’article 1242, alinéa 1er ?

La loi, expressément, permet à la victime de choisir le droit qui lui est le plus favorables quant aux conditions et aux effets de la responsabilité du débiteur.

Au regard du droit commun, il peut y’avoir des cas où d’autres codébiteurs sont responsables.

 

Nous voyons à quel point il est important de choisir, de retenir, de réfléchir sur le meilleur fondement, le fondement le plus rigoureux de l’action en responsabilité extracontractuelle. Pour cela franchement, c’est avec des Codes et des manuels qu’on peut choisir le meilleur fondement.

Section 2 : Les rapports entre responsabilités contractuelle et extracontractuelle.

Il y’a des cas pour lesquels l’existence d’un contrat est indifférente (comme pour la responsabilité des produits défectueux).

Par exemple, le bus de la RATP est responsable sur le fondement de la loi de 1985 (et non sur l’obligation de résultat).

 

Peut-être qu’à l’avenir, dans le droit dans lequel nous vivrons, cette distinction sera de moins en moins courante et qu’il n’y aura que des cas de responsabilité uniforme.

Le Parlement vient de voter une disposition modifiant le Code civil sur la responsabilité écologique. L’introduction du dommage écologique dans le Code civil. Cette nouvelle forme de responsabilité civile, cette variation de la responsabilité civile, est-elle cantonnée à la responsabilité contractuelle ou est-elle uniforme ? Le droit actuel est plutôt dans le sens d’une responsabilité uniforme et de plein droit.

Cela étant, il y’a quand même des cas où la distinction subsiste à commencer par les accidents eux-mêmes.

Par exemple, la salle d’attente du médecin ou et de l’avocat. Voilà quelqu’un qui chute dans la salle d’attente et subit un dommage quelconque. Est-ce que la responsabilité est contractuelle ? Est-ce que la responsabilité est extracontractuelle ? Il y’a des débats.

Alors, comment déterminer ce qui est contractuel de ce qui ne l’est pas ?

Tout d’abord, il y’a une règle importante posée par la Cour de cassation qu’est LE PRINCIPE DU NON CUMUL DES RESPONSABILITÉS. Qu’est-ce que ça veut dire ? Lorsqu’il y’a potentiellement deux types de responsabilités contractuelle et extracontractuelle, si la qualification contractuelle est la plus forte, la victime n’a pas de choix et est obligée sur le fondement de la responsabilité contractuelle. Le choix n’existe que lorsque c’est la loi elle-même qui en dispose ainsi (comme pour la responsabilité des produits défectueux).

Pourquoi est-ce que les victimes cherchent à s’évader du contrat ? Par rapport aux clauses de non responsabilité, aux obligations de moyens, aux dommages imprévisibles. Tout ceci fait que les victimes veulent avoir un fondement extracontractuel.

Reprenons l’exemple de la salle d’attente. La cliente tombe sur une chaise car elle n’a pas été bien mise à la place et se casse une jambe. Elle assigne le médecin qui est assuré. Il y’a deux fondements possibles. SOIT le fondement contractuel, l’obligation du médecin de s’assurer de la sécurité de la cliente dans la salle d’attente (aucune obligation de résultat car il y’a de forts aléas, les patients étant actifs dans la salle d’attente) ; ou alors, il faut prouver la faute de l’assistant(e). SOIT le fondement extracontractuel : LE FAIT DES CHOSES. La chaise est une chose donc l’avocat/ le médecin en est le gardien (+ position anormale) donc responsabilité de plein droit. Nous voyons bien la différence de régime.

Nous pouvons prendre un autre exemple. Il y’a un panneau comme quoi le professionnel n’est pas responsable des dommages subis par les clients dans la salle d’attente. Est-elle valable ? OUI et donc opposable. Il y’a de nombreux avantages.

Le même exemple, la cliente subit un dommage alors même qu’elle a payé toutes ses vacances. Que fait-on ? En matière contractuelle, NON. En matière extracontractuelle, OUI.

 

Par conséquent, nous voyons qu’il y’a souvent des cas où le commettant est en contrat avec la victime. Donc, sa responsabilité devrait être fondée sur le contrat avec l’existence de clauses limitatives de responsabilités possibles. Or, la Cour de cassation, dans des arrêts pas toujours très rigoureux, accepte de statuer sur 1242 alors qu’elle devrait statuer sur 1102 et 1103 du Code civil.

En tant qu’étudiant, dans ce genre de situation, il faut se poser les questions suivantes ?

Y’a-t-il un contrat ? En fonction de cela, quel est le régime de responsabilité à appliquer ?

Les seuls qui ont un choix (hormis le cas où la loi l’autorise) sont les héritiers et les groupes de contrat. Ainsi, il y’a deux catégories qui ont le choix :

 –>  Les héritiers pour leur(s) dommage(s) propre(s).

Par exemple, un passager est mort pour une raison X ou Y. L’héritier agit. Il peut se fonder sur le contrat en tant que prenant la place de celui qui est mort et donc c’est comme si c’était le mort qui exerçait l’action donc il trouve, dans le patrimoine, une action en responsabilité contractuelle. Au regard de l’article 1165 désormais 1199 du Code civil, il est tiers. Le contrat ne lui est pas opposable de sorte que s’il y’a des clauses ou quoi que ce soit, il peut très bien dire qu’il n’est pas le cocontractant. 

 

 –>  Les groupes de contrat.

Pendant très longtemps, les groupes de contrat étaient celui qui, étant malade, achetait un médicament. La victime, acheteuse de médicament ayant un rapport contractuel avec le pharmacien, a-t-elle une action directe de nature contractuelle contre le fabricant ? Cette action n’a pratiquement plus d’intérêt car nous avons le droit spécial uniforme de la responsabilité des produits défectueux.

De nombreux autres dommages peuvent avoir lieu. Par exemple, je vais à l’agence de voyage pour commander un séjour (billet d’avion + hôtel) qui, elle, s’occupe de tout ça. Le jour où j’arrive à l’aéroport, il y’a 10 heures de retard. Arrivée à destination, notre soit disant chambre au bord de la mère n’est qu’une épouvantable chambre. À mon retour, j’essaie de faire une action en responsabilité. Qui est le cocontractant ? L’agence de voyages. Nous n’avons conclu aucun contrat, ni avec la compagnie aérienne, ni avec l’hôtelier. Avons-nous une action contre les vrais responsables (la compagnie aérienne + l’hôtelier) ? OUI, sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle MAIS on pourrait considérer qu’avec la théorie des groupes de contrat, la victime ait une action directe contre le cocontractant de son cocontractant. C’est ça l’action des groupes de contrat ou des chaines de contrat. La Cour de cassation l’a admis dans les années 1980, 1990 : la victime peut agir en responsabilité extracontractuelle contre ceux à l’autre bout de la chaine alors même qu’il n’y a pas d’échanges de consentements.

La CJUE s’est emparée du sujet (cf. ses arrêts).

Il y’a une 2ème question qui est relative à la chronologie du contrat.

C’est l’hypothèse où il y’a bien un contrat. Il y’a des cas où il y’a bien un rapport contractuel. Le principe de non cumul risque de s’appliquer.

Voici les hypothèses :

Tout d’abord, les parties sont en train de négocier. L’une d’entre elles rompt les pourparlers. Quelle est la nature de la responsabilité de la partie qui rompt les PP ? Est-ce que c’est une faute contractuelle ou délictuelle car le régime n’est pas le même ? Tant qu’il n’y a pas eu d’échange définitif de consentement(s), c’est au regard de l’article 1240 que le juge appréciera l’existence d’une rupture abusive. Sachant que du point de vue de la réparation du dommage, ça ne changera pas grande chose car la Cour de Cassation et désormais l’Ordonnance du 10 février 2016 ne retiendront que la réparation du dommage prévisible et de la perte d’une chance. La réparation du dommage sera donc très limitée alors même qu’on est en matière de responsabilité extracontractuelle.

Si on va maintenant à l’autre bout de la chronologie, le contrat est fini. Quelle est la nature de la responsabilité d’une des parties en cas de dommage ? Une entreprise rompt un contrat pour aller chez un autre concurrent en lui disant ses forces et faiblesses. Est-ce que celui qui a subi la rupture des contrats peut assigner l’entreprise ? Il s’agit de la responsabilité post contractuelle. Quelle est la nature de la responsabilité post contractuelle ou délictuelle ? Comme il n’y a plus de contrat, le contrat est dissout. Il s’agit donc d’une responsabilité extracontractuelle. Il aura donc une action fondée sur l’article 1240

Imaginons le cas où les parties auraient mentionné des clauses post contractuelles soit les clauses de non concurrence le plus généralement. S’il est prévu qu’à l’expiration du contrat il est interdit de livrer les secrets de l’ancien concédant que néanmoins il le fait. La Cour de cassation considère que la clause subsiste alors même que le contrat a disparu : c’est ce qu’on appelle un mini contrat (c’est une appellation doctrinale). Ainsi, le concédant pourra assigner sur un fondement contractuel l’ancien concessionnaire et demander réparation de son dommage.

Reste l’hypothèse intermédiaire où le contrat est en cours. Que se passe-t-il ? Bah, la responsabilité est contractuelle MAIS ce n’est pas l’opinion de certains.

Est-ce qu’une rame de métro entre dans le domaine de la loi Badinter ? NON !!! Les rapports avec la RATP vont être régis par le droit commun, la responsabilité du fait des choses s’il n’y a pas de contrat. Le passager qui descend l’escalier avant de passer les portiques, il y’a un contrat lors qu’il entre dans les portiques.

Celui n’est pas encore monté dans la rame, quelle est la nature de la responsabilité ? Nous ne sommes pas dans un régime unifié mais la loi considère que dans tous les cas avec ou sans contrat il y’a une responsabilité de plein droit. A priori, puisqu’il y’a eu un échange de consentement au moment où on passe le badge (échanges de consentements tacites), il y’a alors un contrat de transport mais le transport proprement dit n’a pas débuté car je ne suis pas encore assis dans le métro ; donc en cas d’accident, est-ce bien la responsabilité contractuelle ? Certains auteurs notamment un grand professeur de Poitier Mr. Remy considère que la seule responsabilité contractuelle est lorsqu’il y’a la méconnaissance de l’obligation principale, de l’obligation caractéristique du contrat ; en l’espèce, celle-ci correspond au transport (je vais du métro Notre-Dame des Champs au métro Concorde). Par conséquent, s’il y’a une grève du métro ou si la rame s’arrête pendant des heures, il y’a bien une violation de la responsabilité contractuelle. Or, si j’ai un accident sur le quai, ce n’est pas une responsabilité véritablement contractuelle de sorte qu’on devrait basculer sur la responsabilité extracontractuelle (1242). Un autre exemple ? Le client qui se prend les pieds dans la chaise dans la salle d’attente du médecin/ de l’avocat ; Mr. Remy considère que ça ne relève pas du contrat. Ce n’est pas complètement idiot. Il y’a un contrat qui commence pour la RATP au moment où on franchit les portiques et dans ce contrat on trouve des obligations principales (transporter) et des obligations accessoires (la sécurité physique).

Le problème du droit de la responsabilité civile contractuelle et extracontractuelle c’est qu’on a trop tout raffiné. Le droit des obligations, c’est beau mais ça l’est encore plus quand ça reste simple. Le droit est la logique, la justice, la simplicité ; on a besoin de concepts simples. Or, nous sommes perdus quelques fois car c’est compliqué. Par conséquent, cette sophistication de la distinction contractuelle/ extracontractuelle selon la situation juridique n’apparaît pas comme étant une bonne chose mais il faut la connaître.

Lorsque le dommage est causé par un préposé, alors que la victime a un contrat avec le commettant, la responsabilité est-elle contractuelle ou extracontractuelle ?

Reprenons l’exemple du livreur de pizza. J’ai téléphoné pour commander la pizza. Il y’a un contrat. Au moment où l’entreprise accepte de me livrer, il y’a bien un contrat. Si le livreur de pizza cause un dommage, c’est une responsabilité contractuelle.? Il bouscule le petit vieux dans l’escalier : c’est extracontractuel. Il me dévalise : c’est contractuel. Pourtant, la Cour de Cassation ne distingue plus ! Elle raisonne de façon indifférenciée qu’il y’ait un contrat ou pas mais ce n’est pas très logique.

En ce qui concerne le fait des choses, c’est la même situation. Dans de nombreux cas, elle peut être contractuelle – ex : J’ai payé mon forfait pour remonter par le télésiège, j’ai un accident au milieu de la piste : c’est contractuel. Il y’a une différence avec le skieur qui me renverse, qui me blesse avec son bâton.

Si on prend l’exemple du restaurant, le poisson n’est pas frai, je suis malade pendant tant de jours. Dès lors que nous entrons dans le restaurant, le contrat se forme (sauf quand nous entrons seulement pour prendre des renseignements). Il s’agit d’une responsabilité contractuelle (obligation de résultat).

De plus, il ne faut pas oublier qu’il n’est pas exclu que dans l’exemple du poisson pourri, les articles 1245 et suivants peuvent s’appliquer (la responsabilité des produits défectueux).

Ces rapports de responsabilité contractuelle/extracontractuelle présentent de nombreux points de vue.

Les juges appliquent-ils plutôt la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ? Ça dépend.

S’il s’agit de la responsabilité contractuelle, la victime ne peut s’évader en allant chercher la responsabilité extracontractuelle.

C’est le principe du non cumul des responsabilités.

On verra ce qu’il y’aura dans l’Ordonnance n°2.

 

Section 3 : Responsabilité civile et responsabilité pénale.

Il y’a beaucoup de points communs.

Dans les infractions volontaires, l’exemple des enfants qui allument volontairement un incendie pour s’amuser s’agit d’une infraction punie par la loi pénale mais c’est aussi un cas de responsabilité civile (sur le droit commun OU sur le droit spécial).

Pendant très longtemps, notre droit privé qui englobe le droit civil et le droit pénal a connu le principe de l’identité des fautes pénales et civiles. Ce principe est encore là en 2016 mais a été affaibli.

Pour l’illustrer, voilà un Directeur de Société qui a commis des abus de biens sociaux (en prenant dans la caisse ou autre). C’est une infraction pénale = l’abus de biens sociaux. Les actionnaires de la Société ou la Société elle-même lui font un procès en responsabilité civile, l’actionnaire considérant qu’il a ruiné la Société. Il n’y a aucun contrat entre le Directeur et les actionnaires (de toutes les manières, peu importe !). Le juge civil considère que NON, il n’a pas engagé sa responsabilité, il n’a pas commis de faute car après tout un Directeur a le droit de faire ça. Peut-il y’avoir de jugements contradictoires ? Le juge pénal qui dit qu’il a commis une faute et le juge civil qui dit qu’il n’en a pas commise. Les deux juges sont liés ! Le juge civil est donc obligé de condamner et de retenir la faute parce que d’une part règne l’identité des fautes pénale et civile et d’autre part un autre principe de droit processuel qui vient renforcer, le principe de l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil. Ce qu’a jugé le juge pénal s’impose au juge civil. Il y’a ici une supériorité pénale sur le civil.

À l’inverse, le juge du Tribunal correctionnel a considéré qu’il n’y a pas d’abus de biens sociaux (notamment parce que l’élément moral n’existe pas : la conscience) donc il le relaxe. Le juge civil, saisi par les actionnaires en réparation de leurs DOMMAGES ET INTÉRÊTS, peut-il constater qu’il y’a une faute au sens de 1240 (ex 1382) ? NON, pour les mêmes raisons (identité des fautes/ autorité de la chose jugée).

Nous voyons que c’est important. Il y’a de nombreux secteurs de la vie où il y’a des points communs entre le droit pénal et le droit civil.

Cependant, il y’a des limites. Parmi ces limites, nous en avons déjà étudiées :

 –>  L’exemple du mineur (il y’a une différence entre le pénal et le civil).

Exemple : L’accident de skieurs dont un se casse la jambe. Il y’a un procès correctionnel, coups et blessures involontaires mais le juge pénal relaxe car il considère qu’il y’a des doutes etc. Donc, la victime ne peut pas assigner le skieur sur le fondement de 1240. MAIS, les jambes ont été cassées parce que les skis ont heurté de plein fouet les genoux de la victime. Est-ce que celle-ci peut invoquer 1242, alinéa 1er contre le skieur c’est-à-dire ne pas invoquer la responsabilité personnelle mais la responsabilité du fait des choses ? OUI. L’identité des fautes ne vaut que pour LES FAUTES SUBJECTIVES ; ainsi, sont exclues LES FAUTES OBJECTIVES.

On peut aller encore plus loin. Même dans la responsabilité subjective, on a vu qu’on est responsable de sa faute volontaire et de sa faute involontaire. Voilà un étudiant qui en bouscule un autre, qui tombe, qui se casse la jambe. Il est actionné sur le fondement des coups et blessures involontaires, il est relaxé. Le juge civil peut prendre en compte la négligence. Tout dépend des fondements utilisés par le juge pénal.

Les limites et les exceptions à l’identité des fautes pénale et civile sont finalement assez nombreuses. Le juge civil garde une marge.

Dans de nombreux cas, la victime loge son action civile devant le juge pénal. Premièrement, elle déclenche l’action publique, deuxièmement, elle demande au juge pénal la réparation de son dommage (ainsi, tout est regroupé devant le même juge, le juge pénal). Est-ce que ça change quelque chose ? NON. La Cour d’assises va se fonder sur l’article 1242, alinéa 1er, 4 ou 5 et accorder la réparation à la victime. Le juge pénal a compétence pour accorder une réparation à la victime. Même si le Tribunal correctionnel relaxe OU que la Cour d’assises relaxe sur une infraction volontaire, il pourra y’avoir réparation.

Un dernier point sur les rapports avec la responsabilité pénale : LA PRESCRIPTION.

C’est un point d’actualité car le Parlement est contraint d’adopter, en ce moment, une réforme de la prescription pénale. Il faut bien avoir en tête les problèmes de prescription car elles ne sont pas les mêmes s’agissant du pénal (à rechercher) et du civil (5 ans). Le projet conduit à doubler la prescription. Ça va causer des problèmes. La prescription pénale est plus longue que la prescription civile.

 

Il faut toujours bien distinguer l’action pénale ET l’action civile car elles se confondent sur certains points.

Titre IV : Le procès en responsabilité

Le procès en responsabilité extracontractuelle est l’action en justice de la victime contre l’auteur du dommage OU celui/ celle qui est responsable objectivement sans être l’auteur du dommage.

Section 1 : Le demandeur.

Qui est le demandeur au procès ?

La victime : ce peut être une personne physique OU une personne morale (par exemple : les CT demandant réparation du fait de la pollution).

Ces victimes sont des victimes DIRECTES ou PAR RICOCHET. Il peut donc y’avoir plusieurs victimes. De plus, il y’a tous ceux qui exercent des ACTIONS RÉCURSOIRES/ CONTRIBUTOIRES/ SUBROGATOIRES.

Tous ont pour point commun de réclamer la réparation d’un dommage individuel.

Peuvent-ils être représentés par des personnes morales dont le seul rôle serait de rétablir, d’une même voie, une pluralité de dommages individuels ? Reprenons la responsabilité des produits défectueux (1245 et suivants). Un médicament a eu des effets secondaires sur une femme enceinte, l’enfant est malformé. Sur toute la France, on a dénombré (pour la commercialisation de ce médicament) 3000 femmes et enfants touchés par le dommage. Alors, il peut y’avoir un procès. Parmi 3000, certains agissent, d’autres non OU bien les 3000 font chacun de leur côté un procès en prenant un avocat. C’est l’hypothèse très classique en droit processuel français. MAIS, ne pourrait-on pas concevoir qu’une seule personne agisse au nom des 3000 pour réclamer la totalité de l’indemnisation de tous leurs dommages confondus (du type, 80 millions d’euros au laboratoire responsable du médicament) ? OUI, c’est possible. Pour cela, la personne morale doit obtenir de ces 3000 femmes UN MANDAT.

C’est complètement faisable bien que ce soit difficile à gérer.

La Cour de cassation a rendu un arrêt très spectaculaire, en sa Chambre criminelle, en 2015. Il s’agit d’une affaire dans laquelle se trouvent 55 000 victimes qui elles avaient donné mandat à une association en tant que personne morale.

Allons encore plus loin. Est-il possible qu’une personne morale puisse engager l’action sans avoir de mandat (au nom de ces 3000 femmes toujours) ? La réponse est NON. Comment une personne peut agir au nom d’une autre sans pouvoir contracter ? MAIS, l’exemple est venu des USA où existe un mécanisme très compliqué, très sophistiqué : la CLASS ACTION c’est-à-dire l’action de classe. Ceci veut dire qu’un cabinet d’avocats, dès lors qu’il a connaissance d’un dommage subi par un grand nombre de personnes, peut si quelques unes leur donne un pouvoir assigner au nom de toute une collectivité pour obtenir la réparation des dommages individuels. Dans l’exemple, il suffit que 3 femmes viennent donner un mandat pour assigner le laboratoire au nom des 2997 autres femmes. Le procès a lieu. Les parties débattent sur la responsabilité du laboratoire, de l’entreprise. Si le juge considère qu’il/ elle est responsable, alors il condamne, ordonne le paiement de DOMMAGES ET INTÉRÊTS (des sommes considérables), l’avocat récupère l’argent et va aller rechercher toutes les victimes afin de répartir l’argent (en faisant des publicités dans les journaux, à la TV, sur Internet). C’est assez pratique mais c’est quand même très spécial. Et pourtant… Cette CLASS ACTION a tellement salivé qu’elle a été consacrée 2 fois dans nos Codes. Tout d’abord, il y’a deux ans soit en 2014 (en mars 2014) pour les consommateurs (ça fait du monde quand même !). MAIS, le Gouvernement a reculé à l’idée de confier ces actions de groupe aux cabinets d’avocats comme c’est le cas aux USA mais les a confiées aux ASSOCIATIONS DE CONSOMMATEURS. Ça n’a pas fait plaisir aux avocats. Puis, une deuxième CLASS ACTION a été consacrée par Mme Touraine en matière de santé. Donc, petit à petit, notre droit français est en train de s’ouvrir à cela (alors même qu’il n’y a pas de mandat). À ce jour, ça n’a pas un grand succès car les mœurs ne sont pas les mêmes qu’aux USA.

Peut on agir au nom d’une collectivité entière pour le préjudice moral subit par toute la collectivité ?  C’est la notion PRÉJUDICE COLLECTIF.

Exemple : Dans la MASTERCLASS à ASSAS, l’action publique et l’action civile ont été déclenchées par plusieurs associations de défense des droits des homosexuels.

Qui est la victime ? Qui peut demander des DOMMAGES ET INTÉRÊTS ?

Elle a donc causé un dommage a la Collectivité entière des homosexuels. Par conséquent, une personne morale peut agir au nom d’une Collectivité pour demander réparation d’un dommage collectif et non individuel.

 

Il y’a des problèmes concurrents avec l’antisémitisme. Qui peut agir ? Les associations de luttes contre l’antisémitisme. La Cour de cassation a décidé, dans les années 1970, qu’une personne morale défendant les intérêts d’une Collectivité peut demander la réparation du préjudice subi par celle-ci. C’est désormais codifié dans de nombreux Codes (le Code de procédure pénale, le Code du travail, le Code de commerce). Il ne faut pas confondre cela avec la CLASS ACTION. Ici, on demande la réparation d’un dommage subi par une Collectivité, un dommage subi tous les jours. Ça ne pose pas de problème. C’est une autre forme d’action en responsabilité.

Section 2 : Le défendeur.

Qui est/ sont le(s) défendeur(s) ?

Il y’a plusieurs défendeurs ou codéfendeurs.

Pour revenir aux accidents de la circulation, lorsqu’il y’a plusieurs véhicules impliqués dans l’accident, la victime, piéton ou passager, va assigner un ou plusieurs conducteurs.

Plus il y’a de codéfendeurs, mieux c’est pour la victime. Avec la théorie de la solidarité (= la condamnation IN SOLIDUM), la victime pourra obtenir réparation du total de l’indemnisation par l’un d’entre eux, en général le plus solvable.

 

Dans tous les cas de responsabilité civile au moins objectives, on aura un codéfendeur qui sera l’assureur. Si la victime a le nom de l’assureur, des parents, du conducteur, du commettant etc., il va l’assigner en même temps que le responsable, personne physique OU personne morale. Mais, s’il n’a pas les coordonnées, que fait-on ? L’assureur du défendeur interviendra alors au procès ; c’est la notion d’INTERVENTION. Une personne qui n’a pas été assignée peut, à tout moment, rentrer dans le procès pour venir soutenir les intérêts d’une des parties, ici le défendeur.

La victime a donc souvent un choix de la ou des personne(s) à assigner.

Rappelons le cas de l’enfant qui cause un dommage. La victime assigne ET les parents en tant que responsables de l’enfant ET l’enfant ET l’assureur. Le juge va rechercher les fondements et les personnes qui seront finalement condamnées.

 —>  Les procès en responsabilité civile mettent souvent en présence une pluralité de demandeurs et de défendeurs.

Section 3 : Le juge.

Quel est le juge compétent en matière de responsabilité extracontractuelle ?

Déjà, on va raisonner selon les ordres de juridictions.

Voilà un CRS qui a bousculé un peu fort un étudiant qui manifestait. Qui est responsable ? L’État ? Le CRS ? Quel juge va être saisi par la victime ? Le Tribunal administratif. Il y’a ainsi une répartition des compétences en matière de responsabilité entre les ordres de juridictions civils et administratifs. Dès le XIXème siècle, le Conseil d’État s’est prononcé dessus. SAUF dans les cas où la compétence est retirée au juge administratif et est confiée au juge judiciaire. Ex : Le chauffeur de Mme Belkacem qui conduit à toute allure et qui brule les feux rouges afin d’assister à une réunion PUIS renverse un étudiant qui passait par là. Qui est compétent ? Ce n’est pas le juge administratif ! C’est le juge judiciaire.

À l’intérieur des juridictions judiciaires, il y’a une répartition des compétences.

Le TDC est compétent pour les cas de responsabilité extracontractuelle entre commerçants (par exemple : la concurrence déloyale).

Il faut toujours bien faire attention pour décider devant quelle juridiction. L’exception d’incompétence ne pardonne pas (c’est-à-dire qu’on se trompe de juges).

Le juge est saisi. Parfois, il peut y’avoir la nécessité d’une expertise (par exemple, ne serait-ce que pour évaluer une incapacité permanente/ temporaire ; totale/ partielle). C’est le Code civil qui réglemente.

Si le juge estime qu’il y’a lieu à condamnation en application du droit commun ou du droit spécial, la réparation sera la plupart du temps en argent (= en DOMMAGES ET INTÉRÊTS) mais aussi en nature (par exemple : la personne qui crée une concurrence déloyale vis-à-vis de la victime comme l’arrêt CARTIER).

S’il y’a plusieurs responsables, défendeurs, le juge prononcera UNE CONDAMNATION IN SOLIDUM (tous condamnés pour le même fait, la victime choisira).

Le jugement rendu est un jugement dit DÉCLARATIF c’est-à-dire que le jugement déclare la responsabilité telle qu’elle s’est cristallisée au jour du dommage. De plus, le jugement rendu aura l’autorité de la chose jugée c’est-à-dire que, sous réserve des voies de recours, on ne pourra plus revenir sur la situation. La victime ne pourra pas faire un 2ème procès plus tard.

 

Prenons un exemple. Un skieur a renversé quelqu’un sur une piste. L’avocat de la victime agit sur le fondement de 1241. Le TGI décide qu’il n’y a pas eu de faute et déboute la victime. L’avocat de la victime avait invoqué dans l’assignation seulement 1241 MAIS la victime a été blessée a été blessée par un bâton donc il aurait du invoquer la responsabilité du fait des choses mais il n’y a pas pensé. La victime peut-elle faire un 2ème procès au même skieur en se fondant cette fois-ci sur 1242 ? NON ! La Cour de cassation considère qu’il y’a autorité de la chose jugée, il fallait invoquer tous les moyens lors du 1er procès.

Il y’a un 2ème cas différent. Une victime a subi un dommage et quelques années après, elle a de plus en plus de mal à marcher. Il y’a donc de nouvelles conséquences du dommage illicite qui se manifestent. Peut-elle actionner à nouveau le responsable pour demander un supplément d’indemnités ? Les défendeurs peuvent-ils lui dire « C’est bon, c’est fini ! ». Pour la CdC, il s’agit d’un nouveau dommage donc les défendeurs devront payer les suppléments.

Comme nous l’avons dit, la victime a un choix. La victime d’une infraction peut aller soit devant le juge pénal soit devant le juge civil. Une fois le choix fait, elle ne peut plus changer de voie. Par exemple, le skieur a assigné devant le TGI celui qui a heurté parce qu’il a bu trop de RedBull puis on l’informe qu’il peut aller au pénal car il s’agit de coups et blessures. Peut-il le faire ? En principe, NON. La règle est exprimée en adage latin : « Una via electa ». Quand il décide d’aller devant une juridiction, le choix est définitif.

Enfin, un dernier cas. Il peut arriver que le Procureur de la République de Chambéry décide de déclencher l’action publique contre le skieur (notamment pour ceux qui s’enivrent sur les pistes) ET notre victime skieuse, elle, assigne devant le TGI de Paris le défendeur. Donc, il y’a deux actions séparées avec des parties différentes. Qui va juger en 1er ? La règle est simple. Le juge pénal statuera en 1er. Le juge civil doit surseoir à statuer, doit attendre que le juge pénal se soit prononcé sur la faute ou l’absence de faute avant. C’est un autre adage : « Le criminel tient le civil en l’état. ».

 —>  Pour conclure, il y’a beaucoup de procédures dans les actions en responsabilité donc il faut bien connaître ces aspects.

 

DEUXIÈME PARTIE : LES QUASI-CONTRATS.

Il s’agit de situations dans lesquelles est applicable le régime des contrats alors même que ce ne sont pas vraiment des contrats (donc une situation extracontractuelle).

C’est le point de jonction entre le contractuel et l’extracontractuel.

Exemple : Un loueur de matériels de skis est propriétaire du magasin. Celui/ celle qui conçoit est celui/ celle qui vit avec l’exploitant du magasin (mariés ou non/ de même sexe ou non). Vu qu’ils sortent ensemble, ils collaborent à l’exploitation. C’est une situation courante dans les pays du monde entier. Très souvent, la femme collabore à l’exploitation de l’homme. L’exploitant du magasin ne paie donc pas de salaire à la femme qui travaille avec lui. C’est l’exemple typique des boulangers. Un jour, le loueur de matériels de skis rencontre quelqu’un d’autre, une jeune. Donc, nous avons notre caissière qui se retrouve sans ressources, sans métier, parfois même à un âge avancé. Peut-il/ elle obtenir y compris devant le juge une indemnisation de toutes ces années de collaboration gracieuse ? Analysons la situation. Il n’y a aucun contrat, aucun engagement, RIEN. Spontanément, ils ont collaboré ensemble. Il n’y a pas de fait illicite, il n’y a pas de faute de la part de l’exploitation ; il est indélicat, il l’a quittée. Il a profité de la collaboration gratuite de la femme ou de l’homme. S’il/ elle demande une indemnité, on ne voit pas de fondement (ni dans la responsabilité contractuelle/ ni dans la responsabilité extracontractuelle). Ne pourrait-on pas envisager un quasi contrat ? Et bah SI !!! Cette idée très forte a été défendue au XIXème siècle (notamment par Aubry et Rau, des professeurs de Strasbourg devenus Conseillers à la Cour de Cassation). La Cour de Cassation l’a consacré à la fin du XIXème siècle. C’est un des quasi contrats que nous allons étudier. Le terme latin ? L’ACTION DE IN REM PERSO (au sujet d’une prestation, d’une chose). Ici, la caissière/ la boulangère a volontairement donné ses efforts gracieux pendant des années et en attend maintenant un retour indemnitaire. Nous voyons donc qu’il y’a un fondement d’ÉQUITÉ. On trouve des situations analogues dans les pays de la COMMON LAW avec des mécanismes assez proches mais aussi dans des institutions comme le TRUST. Bref, il s’agit de mécanismes légaux laissés entre les mains des juges permettant d’indemniser sur le fondement de l’équité celui qui a volontairement enrichi (le loueur de skis/ le boulanger) tout en lui faisant faire l’économie d’un salaire.

Les Rédacteurs du Code civil n’avaient pas codifié l’action d’enrichissement sans cause. La Réforme de février 2016 a été l’occasion de procéder à la refonte du droit des quasi contrat.

On le trouve dans le Titre III : Les autres sources d’obligations. Cette 3ème source fait partie des autres sources, il s’agit alors de quasi contrats, énoncés aux articles 1300 et suivants.

Lisons l’article 1300 : « Les quasi contrats sont des faits purement volontaires dont il résulte un engagement de celui qui en profite sans y avoir droit. ».

 

Chapitre 1 : L’enrichissement sans cause.

 

Section 1 : Le fondement de l’enrichissement injustifié.

 

Il faut mettre l’article 1303 du Code civil.

C’est le cas où une personne, par son comportement/ ses actes, enrichit sans cause une autre personne de sorte qu’elle doit jouir d’une indemnité car le point essentiel c’est l’absence de cause. Nous comprenons pourquoi ce n’est pas une vraie définition, le terme « cause » a été retiré alors qu’il éclairait ce mécanisme.

Celui qui travaille pour autrui, que ce soit en tant que salarié OU à titre libéral, il y’a une cause (le salaire/ le paiement/ le contrat).

Celui qui achète un immeuble/ un tableau, il y’a une cause, c’est le contrat.

Là où il y’a contrat, il y’a une cause d’où l’expression de quasi contrats car il faut envisager des situations où il n’y a pas de contrat mais il faut envisager l’image du patrimoine, un qui s’enrichit, l’autre qui s’appauvrit.

La femme ou l’homme qui a collaboré au commerce et qui, de ce fait, n’a pas pris de travail dans l’entreprise ; il n’y a donc pas de cause. Certains versent des salaires, des indemnités à ceux qui les aident alors qu’ils sont dans une situation de couple mais d’autres non de sorte que se pose la question. Il n’y a pas de faute à faire travailler gratuitement quelqu’un avec qui on est en couple.

Un des grands arrêts Boudier de la Chambre des Requêtes (une Chambre de filtrage au XIXème et au début du XXème siècle) du 15 juin 1892. Il s’agissait d’un agriculteur qui avait acheté des engrais pour ses nouvelles récoltes, à crédit (fait accepté par le vendeur). L’agriculteur utilise les engrais, semence les champs et ne paie pas le vendeur et disparaît. Notre vendeur est impayé. Il assigne le propriétaire du champ car l’agriculteur était le locataire (= appelé aussi le fermier). MAIS, sur quel fondement ? La théorie de l’enrichissement sans cause. « Attendu que cette action dérivant du principe d’équité qui défend de s’enrichir au détriment d’autrui n’a été réglementé par aucune loi. Il suffit que le demandeur établisse un avantage qu’il aurait, par son sacrifice, procuré à autrui. ». C’est très bien écrit. Commentons. Nous voyons que c’est un principe d’équité, c’est un principe également moral car il est mal de s’enrichir au détriment d’autrui sans raison ; il y’a bien un sacrifice d’une personne qui a profité à l’autre. Ceci rejoint des mécanismes qui existent en droit comparé, en Common Law. Or, la différence est qu’en Common Law les juges sont habitués à cela. Ils créent des actions pour pratiquement chaque cas. Donc, on retrouve le système romain qui est un système de Common Law. Le juge, par souci d’équité, va créer une action pour régler. Cet arrêt a été très inspiré par Aubry et Rau. La Cour de cassation, sous l’influence d’Aubry et Rau, a été influencée par leur doctrine. C’est un mouvement d’un patrimoine à un autre patrimoine. Quelles ont été les suites de cet arrêt ? Comme nous ne sommes ni aux USA, au RU, au Canada ou encore en Australie, la Cour de Cassation elle-même et des auteurs de doctrine ont pris peur que la définition recouvre un champ d’application très large de sorte qu’elle a maintenu la théorie de l’enrichissement sans cause mais a mis des conditions restrictives. Quelles sont-elles ? Il y’a des conditions POSITIVES et il y’a des conditions NÉGATIVES.

 

Section 2 : Les conditions de l’enrichissement injustifié.

 

Commençons par les conditions positives :

Il faut d’abord un appauvrissement d’un patrimoine d’une personne appelée l’appauvrie. Il faut préciser que l’Ordonnance a codifié aux articles 1303 et suivants la jurisprudence de la Cour de Cassation y compris la jurisprudence Boudier restreignant le domaine de l’enrichissement sans cause et rénovant ce quasi contrat (= l’enrichissement injustifié). Quelles sont ces formes d’appauvrissement ?

L’appauvrissement, ce peut être une PERTE ÉPROUVÉE. Dans l’exemple de Boudier, le livreur a livré des sacs d’engrais donc il appauvrit ces stocks et ne reçoit rien en contrepartie alors que lui-même a payé le fabricant d’engrais ; ainsi, il y’a bien une perte.

L’appauvrissement, ce peut être également le GAIN MANQUÉ. Par exemple, la boulangère a travaillé 20 ans pour tenir la caisse ou encore servir les clients. Si elle n’avait pas décidé de collaborer dans l’entreprise de son compagnon/ de son mari, elle aurait travaillé dans une entreprise avec un salaire chaque mois donc elle a été privée de gagner 20 ans de salaires.

Il faut ensuite un enrichissement.

En prenant l’exemple Boudier, le propriétaire qui a une terre aride qui n’est pas vraiment rentable, grâce à ces engrais, ça améliore la situation ; ainsi, il se trouve enrichi positivement de sorte qu’il va pouvoir cultiver lui-même ou louer plus cher sa terre à un autre fermier. C’est ce qu’on appelle l’enrichissement positif.

L’exemple du boulanger qui a fait l’économie de 20 ans salaire. Il a profité gratuitement des services de la boulangère et s’est donc enrichi car il n’a pas sorti d’argent. C’est ce qu’on appelle l’enrichissement d’économie.

Enfin, il y’a l’absence de lien de causalité. C’est pour cela qu’on a dénommé pendant un siècle et demi l’enrichissement sans cause de quasi contrat. Dans l’exemple Boudier, le vendeur d’engrais n’a aucune raison d’enrichir le locataire d’une terre qu’il ne connaît même pas donc l’enrichissement est bien sans cause. De plus, l’exemple de la boulangère, il pourrait y’avoir une cause subjective, l’amour et plus prosaïquement la volonté de participer à l’entreprise car il est clair que, dans un certain nombre de cas, cette participation dans l’entreprise permettra de faire des bénéfices (de payer le loyer, d’envoyer les enfants à l’école, de partir en vacances), en d’autres termes, c’est une forme de contribution à la vie familiale.

Dans l’économie contemporaine, il y’a des situations d’enrichissement qui ne sont pas très loin de Boudier. L’hypothèse des vendeurs de matériels et des professionnels de l’Internet est importante (nous allons y travailler). Beaucoup d’Internautes achètent leurs ordinateurs, smartphones, tablettes ; parmi ces activités ludiques, il peut y’avoir évidemment des activités comme écouter de la musique, regarder des films/ séries de façon légale ou de façon illégale. Or, ces fabricants de matériels, à partir du moment où on sait qu’une bonne partie de leur utilisation sera liée aux industriels culturels, profitent des contenus culturels utilisés par les Internautes. De plus, il y’a tous les professionnels de l’Internet (c’est-à-dire les fournisseurs d’accès ou encore les fournisseurs d’hébergement) qui en profitent aussi de tout ça alors même que des contenus peuvent être protégés. Il y’a deux ans, un certain nombre de producteurs de musiques et de films se sont rassemblés pour faire valoir, par voie législative ou judicaire, qu’il s’agissait d’une situation d’enrichissement sans cause MAIS c’est une institution trop civiliste, trop technique et le Gouvernement a estimé qu’il n’était pas nécessaire de consacrer cette nouvelle hypothèse dématérialisée d’enrichissement sans cause. À ce jour, ils n’ont pas osé faire un procès à Apple ou encore à Google (et même Free). Donc, c’est bien dommage.

Voyons maintenant les conditions négatives :

La 1ère condition négative est qu’il ne faut pas de cause. 

Il est dommage que l’article 1303 ne le mentionne pas. Tout au plus, l’article 1303-1 utilise une périphrase (= un mot savant veuillant dire qu’on tourne autour du pot sans appeler un chat un chat) : « L’enrichissement est injustifié lorsqu’il ne procède ni de l’accomplissement d’une obligation par l’appauvri ni de son intention libérale ». Si on prend le cas du compagnon ou du conjoint qui collabore avec l’entreprise de l’autre ? L’article 214 du Code civil : « Les époux contribuent aux charges du mariage à propre option de leur faculté respective. ». Si le boulanger paie le loyer, les frais de scolarité, les vacances et que l’autre ne paie rien, on peut considérer que c’est une sorte d’exécution en nature des obligations du mariage. En revanche, pour les gens non mariés, ce n’est pas le cas. La Cour de cassation a accepté néanmoins de faire jouer la théorie de l’enrichissement sans cause.

La 2ème condition correspond à l’article 1303-2 : « Il ne faut pas que l’appauvrissement profite d’un acte accompli par l’appauvri en vue d’un profit personnel. ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Ça nous fait revenir à l’équité. L’appauvrissement est un acte qui est fait pour autrui, pas pour soi-même. C’est une condition qui n’est pas facile à remplir et ça étonne PY Gautier qu’elle ait été codifiée alors même que dans la jurisprudence Boudier elle n’y figurait pas.

Si on reprend l’exemple de la boulangère qui ne reçoit pas de salaire, on ne peut pas dire que c’est un profit personnel MAIS d’un autre côté, avec les bénéfices de l’entreprise, ce peut en être un. Du coup, cette condition n’est pas vraiment utile par rapport à sa codification dans l’Ordonnance du 10 février 2016.

Des réponses à des questions :

Dans les années 1930/1940, il y’a eu l’hypothèse du fermier qui achète des engrais payés et en semence la terre. Les semences, les engrais peuvent durer plus d’une récolte, plusieurs années. Il s’en va et laisse profiter le propriétaire qui récupère la terre, enrichie, de ce qu’il a mis comme engrais. A-t-il une action contre son ancien propriétaire ? Après tout, il n’y est pas tenu de se laisser les engrais. On peut concevoir que ce soit un enrichissement sans cause MAIS la Cour de cassation a refusé.

Que se passe-t-il s’il a commis une faute à l’occasion de son intervention ?

Il y’a un arrêt rendu une dizaine d’années par la Cour de Cassation au sujet d’un garagiste. Quand on envisage pour notre scooter, moto, de changer un ou plusieurs pneus ou encore certaines pièces et que nous déposons le scooter/ la moto pour faire un devis et que le garagiste, sans contrat, sans accord de volonté, remplace les pneus, les pièces. Le propriétaire du scooter/ de la moto dit : « Attendez, il n’y a pas de contrat ! ». Les enlève-t-on ? Les laisse-t-on ? La Cour de Cassation dit « Tant pis pour vous ! ». Aucune indemnisation s’il y’a une faute. L’indemnisation peut être modérée par le juge si l’appauvrissement procède d’une faute de l’appauvri. Il faut noter que c’est MODÉRÉ et non pas supprimé.

Faut-il que l’enrichi soit de mauvaise foi c’est-à-dire profiter en connaissance de cause ? Évidemment, NON SAUF pour l’exemple du boulanger qui fait des économies de salaires.

A été mis dans la fiche de TD un arrêt de la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation du 11 mars 2014. Même si l’enrichi est de bonne foi, il devra payer une indemnité. C’est un peu embêtant d’après PY Gautier. Il s’agissait d’un paiement du loyer au mauvais créancier.

Un autre cas ? L’annulation du contrat. Voilà quelqu’un qui a acheté un appartement, qui y a habité pendant 3 ans puis s’est aperçu qu’il y’avait des termites. Il demande l’annulation du contrat pour erreur sur les qualités essentielles et l’obtient. Il n’empêche que, pendant trois ans, il a profité de l’appartement. Est-ce que le propriétaire pourrait se fonder sur cet enrichissement en conservant les loyers ou en demandant une indemnité supplémentaire ? Concernant les loyers, aucun problème puisque dans les contrats à exécution successive, la résiliation, soit l’annulation, vaut que pour l’avenir. MAIS, pendant les trois ans, il a usé de l’appartement : peut-il demander une indemnité ? NON car il y’a eu un contrat mais aussi OUI ; en effet, les articles 1303 et suivants mettent en avant une restitution. L’article 1352-3 : « La restitution inclut la valeur de la jouissance que la chose a procurée. ». On pourrait estimer que ce texte est une forme de consécration légale de l’enrichissement sans cause.

Un dernier cas ? L’enrichissement sans cause est fondé sur un principe dit de SUBSIDIARITÉ. Ceci ne figure pas la jurisprudence Boudier mais la Cour de Cassation l’a ajouté dans un arrêt de 1915, toujours dans sa volonté de limiter ce qu’elle avait ouvert. De quoi s’agit-il ? Il s’agit d’un contrat d’entreprise. Parfois, les parties décident d’un prix fixe à l’avance. Donc, vous construisez ma maison pour 80 000 euros et puis c’est tout. Même si c’est plus compliqué que prévu (des travaux supplémentaires/ augmentation de la valeur des matières premières), c’est mort : c’est ce qu’on appelle le marché à forfait. Dans cette affaire, l’entrepreneur, sous le couvert de l’enrichissement sans cause, estimant qu’il avait enrichi injustement son client, demandait en réalité un supplément de paiement. La Cour de cassation lui répond que cette action ne doit être admise « que dans les cas où l’appauvri ne jouit d’aucune action naissant d’un contrat ou d’un délit et qu’elle ne peut être intentée en vue d’échapper à des règles contraignantes ». Dans l’arrêt de 1915, l’entrepreneur était coincé par le contrat puisqu’il avait accepté de construire, d’exécuter ses obligations sous un prix fixe, mal évalué et ne pouvait donc pas demander un supplément de prix car c’est le principe du marché à forfait. Pour s’évader de la règle contractuelle, son avocat avait imaginé de se placer sur le terrain des quasi-contrats. Or, ça n’a pas fonctionné car la Cour de Cassation a répondu « Non, vous n’avez qu’une action contractuelle, tant pis pour vous, vous ne pouvez pas vous en échapper ». C’est un peu le même mécanisme du principe du non cumul des responsabilités. Cette jurisprudence est aujourd’hui codifiée dans l’article 1303-3 : « L’appauvri n’a pas d’action lorsqu’une autre action lui est ouverte où se heurte un obstacle de droit. ». Le texte cite notamment la prescription. Voyez ainsi que cette action qui avait été très largement ouverte au XIXème siècle a été, au fur et à mesure, rétrécie par la Cour de Cassation elle-même pendant le XXème siècle et que nous trouvons ces restrictions dans l’Ordonnance du 10 février 2016.

 

Section 3 : Les effets de l’enrichissement injustifié.

 

Les effets correspondent au paiement d’une indemnité, d’une indemnisation.

L’article 1303 : « L’enrichi versera à l’appauvri une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement ». Comment comprendre ? La plupart du temps, les valeurs économiques seront différentes.

Prenons de la jurisprudence Boudier. Si le montant des engrais est de 10 000 euros, ça a permis au propriétaire terrien de faire 4 récoltes qui lui ont rapporté 40 000 euros. On a donc un appauvrissement de 10 000 et un enrichissement de 40 000. L’appauvri n’aura que 10 000.

Si on prend un autre exemple, l’exemple de la boulangère. On va prendre le SMIC multiplié par tant de mois, multiplié par tant d’années. Grâce à cela, la boulangerie a prospéré et, au moment où il la vend pour prendre sa retraite ou même aller ailleurs, le FDC vaut 600 000 euros et nous dirons que le total des salaires de la boulangère est autour de 80 000 (voire plus). En appliquant 1300, elle n’aura que l’équivalent de son SMIC alors qu’on aurait pu concevoir qu’elle participe à la plus-value de l’entreprise pour le boulanger, du terrain pour le propriétaire des terres agricoles. Donc, c’est vraiment une indemnisation A MINIMA.

Il y’a quelques exceptions évidemment comme toujours en droit. La principale d’entre elles est énoncée dans l’article 1303-4 « Si l’enrichi est de mauvaise foi, l’indemnité est égale à la plus forte des deux valeurs. ». Sur l’hypothèse de Boudier, ça ne sert pas à grande chose. En revanche, pour l’exemple du boulanger, on n’exclut pas cet article.

Chapitre 2 : Le paiement de l’indu.

 

Avant l’Ordonnance du 10 février 2016, ce quasi contrat, en doctrine ET en JP, s’appelait « la répétition de l’indu ». C’était codifié par Portalis et ses amis, reprenant l’expression de droit romain, aux articles 1235 ET 1376 et suivants. L’article 1235, tel qu’il existe jusqu’au 1er octobre nous donnait, de façon très didactique, la définition de la répétition de l’indu : « Tout paiement suppose une dette. Ce qui a été payé sans être dû est sujet à répétition. ». Voilà le terme que Mme Belkacem n’aimait pas, « répétition ». Avec l’Ordonnance du 10 février 2016, c’est la même partie aux articles 1302 et suivants et le terme « répétition » a été supprimé et a été remplacé par le terme « paiement ». L’article 1302 définit lui aussi : « Tout paiement suppose une dette. Ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. ». Outre l’influence de ceux qui estiment que le français doit être réforme (notamment par rapport aux accents). Que veulent dire ces textes ? Tout d’abord, une larme d’adieu à la répétition qui vient du latin « repetere » c’est-à-dire redemander OU demander à nouveau la chose qu’on a donnée.

L’article 1302 (à revoir pour la numérotation de l’article) : « Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû à celui de qui il l’a indument reçu ». Dans l’exemple, l’étudiant a reçu sur son compte bancaire 150 alors qu’il avait le droit à 40. Il y’a deux sortes d’étudiants : celui qui voit que 150, c’est bizarre mais le garde/ celui qui reçoit par erreur, l’erreur de celui qui a payé mais l’autre qui ne s’en est pas aperçu et dans ce cas, il y’a lieu à restitution. Autre hypothèse, l’abonnement au téléphone mobile. La facture est plus qu’elle ne doit l’être (+ que ce qui a été consommé) : ERREUR. Donc, l’étudiant paie ou se laisse prélever automatiquement sur son compte bancaire un montant de 100 euros alors qu’il n’aurait du que 20 euros mensuel ; il y’a un paiement indu et l’entreprise doit restituer ce qu’elle a reçu en trop. Souvent, ce sont des cas de trop perçus. Ceci est fondé sur l’économie, sur les défaillances humaines relayées par les défaillances informatiques.

Depuis les Romains, celui qui paie ce qui ne lui est pas dû est appelé le SOLVENS ET celui qui reçoit ce qui ne lui est pas dû est appelé l’ACCIPIENS. Évidemment, on ne retrouve pas cette terminologie dans l’Ordonnance. Sauf à ce que la doctrine évolue, cette terminologie devrait continuer à exister un certain temps. C’est un mécanisme destiné à rectifier les erreurs. Alors même que je suis dans un cadre contractuel, il faut rectifier les transferts injustes d’un patrimoine à un autre.

Quelles sont les conditions de la répétition de l’indu ?

Section 1 : Les conditions de la restitution de l’indu.

 

Il y’a principalement deux conditions.

La 1ère condition est qu’il faut un paiement indu, un paiement sans cause. Ce peut être partiellement ou totalement indu. Ex : Si la Caisse de SECU verse plus d’argent, qu’elle s’est donc trompée parce qu’on porte le même nom patronymique qu’un autre étudiant, il n’y a pas du tout de dette car le SOLVENS s’est trompé. L’étudiant qui a reçu en trop doit restituer car c’est un enrichissement injuste. Ex : Il y’a bien une dette de remboursement mais il y’a un surplus de remboursement. On peut avoir des erreurs par les banques aussi. La banque crédite notre compte d’un virement fait par quelqu’un à l’étranger de 10 000. Ce n’était pas dû. Donc, ça doit être remboursé.

  • 1. Un paiement sans cause.

 

On a un fournisseur qui reçoit un paiement alors qu’il n’a rien fourni. Il y’a donc un faux créancier et/ ou un faux débiteur. A partir de cette situation, la restitution est envisagée.

Se référer aux articles 1302/ 1302-1 et 1302-2. L’article 1302-2 nous donne une hypothèse différente ; c’est le cas où quelqu’un paie à la place de quelqu’un d’autre alors qu’il n’était pas tenu et qu’il n’a pas de mandat.

Par exemple, des étudiants sont en colocation (sans clause de solidarité) ; chacun paie un tiers du loyer au propriétaire/ au bailleur. Dans la plupart des baux, il y’a une clause de solidarité (= il suffit au créancier d’agir contre l’un des trois étudiants pour obtenir le paiement). Or, sans clause de solidarité, chaque étudiant doit payer un tiers du loyer chaque mois au propriétaire/ bailleur. Imaginons qu’un étudiant pense qu’il doit payer pour tout le monde et fait donc un chèque au propriétaire/ bailleur pour la totalité des loyers. En théorie, il devrait récupérer les 2/3 de l’argent payé.

La plupart du temps, une erreur est faite entre faux créancier et faux débiteur.

L’autre hypothèse est celle de l’annulation du contrat. Le contrat est annulé. Du fait de l’annulation, l’acheteur doit se faire restituer. On est plus dans les restitutions consécutives à l’annulation.

Enfin, on peut très bien une restitution de l’indu DANS UN RAPPORT CONTRACTUEL. La banque qui a crédité excessivement son client ; le mécanisme du quasi contrat pour le paiement indu pourra jouer.

  • 2. L’erreur.

 

Le paiement est sans cause car le SOLVENS (= celui qui a payé) s’est trompé. Ceci nous fait revenir au 1er semestre. C’est parce qu’il s’est trompé que le SOLVENS, le faux débiteur, demande la restitution.

Par exemple, la mutuelle étudiante qui a payé 200 au lieu de 20 s’est trompée.

Dans tous les cas, le SOLVENS s’est trompé. S’il payait quelqu’un en plus en connaissance de cause, ça s’appelle une libéralité ; ça devient un acte gratuit. Je fais un paiement à un étudiant car on l’aime beaucoup, c’est un acte à titre gratuit (cf. les qualifications vues au début de l’année).

Dans tous les exemples susvisés, la Mutuelle de Sécurité Sociale ou encore la Banque, les rapports entre propriétaires/ locataires, il n’y a pas de gratuité, ce sont des rapports onéreux car on est dans le cadre des contrats synallagmatiques.

Or, qui doit prouver quoi ? Est-ce que c’est au SOLVENS, demandeur à la restitution, de prouver qu’il s’est trompé ? Est-ce que c’est au défendeur de prouver qu’il n’a pas fait d’erreur ?  En théorie, ce devrait être au SOLVENS, au demandeur, de prouver qu’il y’a une erreur. Or, c’est un facteur psychologique. De plus, comme nous l’avons étudié en 1ère année avec les présomptions, ne peut-on pas présumer l’erreur ? Par exemple, la Mutuelle étudiante qui donne 200 au lieu de 20, ça n’a pas de sens qu’elle donne de l’argent en plus. On peut alors présumer que la Mutuelle s’est trompée, comme le Banquier. C’est la position qu’a pris la Cour de Cassation en présumant l’erreur. L’Ordonnance de 2016 aurait pu codifier cette jurisprudence mais ne l’a pas fait. Un arrêt d’AP de la Cour de Cassation à propos de l’URSSAF. Il s’agit d’un particulier, d’un assuré/ d’un cotisant qui a trop payé à la Caisse. Il arrive, en effet, que ceux qui doivent cotiser que l’URSSAF mais pas seulement, pour des économies de salaires, tend à faire payer à l’assuré ce qu’il doit puis faire des déclarations sur Internet de sorte qu’on peut se tromper. Le cotisant qui devait finalement verser 2000 a versé 4000. Et bien, il a fallu que l’AP tranche cette question car il doit prouver son erreur. L’AP a estimé qu’il y’a une présomption de l’erreur. À ce sujet, quelle peut être la nature de l’erreur ? On distingue LES ERREURS DE FAIT et LES ERREURS DE DROIT. Un exemple pour les erreurs de fait ? La machine a calculé qu’il fallait rembourser 200 à l’étudiant alors qu’il fallait seulement rembourser 20. Peut-il y’avoir une erreur de droit ? Le cotisant pensait qu’eu égard à ses tranches de revenus et au barème, il pensait devoir 4000 alors que non, il devait 2000. Un autre exemple (pour l’erreur de droit) ? L’étudiant colocataire pensait qu’il devait payer pour tout le monde (= avec une solidarité de plein droit) alors qu’elle n’existe pas SAUF en matière commerciale.

 

  • 3. Les cas d’exclusion.

 

Il y’a des cas où la restitution est exclue.

Si la dette est effectivement exigible, il n’y a pas d’abus.

La principale hypothèse où la restitution est exclue est celle où le SOLVENS a commis une faute. C’est le même principe d’enrichissement sans cause.

Le Banquier qui a réclamé 10 000 à un client, qui le lui donne alors qu’il ne devait rien car l’employé a commis une étourderie. Là, il y’a une grosse bêtise, une grosse erreur (pour diverses raisons). Ne peut-on pas considérer que la faute exclut le remboursement ? On peut faire un parallèle avec les vices du consentement (= l’erreur inexcusable) ! Comme pour l’enrichissement injustifié, l’Ordonnance de 2016 prévoit une demi mesure. Voilà ce que nous dit l’article 1302-3 : « La restitution peut être réduite si le paiement procède d’une faute. ». Il faut bien insister sur le terme « réduite » et non pas supprimer !

 

Section 2 : Les effets.

 

L’indu sera restitué au SOLVENS.

Ceci veut dire que dans l’exemple de l’étudiant qui reçoit 200 au lieu de 20 et qu’il les a dépensées pour aller au restaurant ou ailleurs. C’est un mécanisme objectif. Il pourra prétendre que le SOLVENS a commis une faute et donc proposer de rembourser qu’une partie seulement.

Il faut scruter l’état d’esprit. Si l’ACCIPIENS était de bonne foi, il devra rendre ce qu’il a reçu MAIS s’il était de mauvaise foi, la jurisprudence considère qu’il peut être condamné à des DOMMAGES ET INTÉRÊTS.

Il y’a un aspect moral. Si quelqu’un nous verse par erreur de l’argent qu’il ne nous doit pas, c’est de notre devoir moral de le lui rendre.

 

Chapitre 3 : La gestion d’affaire.

 

C’est le cas cité en 1er dans l’Ordonnance de 2016 (parmi les quasi-contrats).

C’est une autre hypothèse qui est proche du point de vue de l’absence de cause avec une expression assez imagée c’est-à-dire la gestion des affaires soit la gestion des affaires d’autrui. L’hypothèse est celle où quelqu’un prend en charge les affaires d’autrui. C’est une réaction humaine. Par exemple, sous la tempête produite hier soir à Paris, un portail est resté ouvert. Le propriétaire a prévenu le locataire. Le locataire est descendu afin de le refermer. Il a alors exercé un acte de gestion d’affaires ce qui a permis d’avoir une porte fermée pendant la nuit.

Il s’agit à nouveau de rapports entre la sociologie et le droit.

Parmi les juristes, à Rome, il y’en avait un : MUCIUS SCAEVOLA. Ce dernier est l’inventeur de la gestion d’affaires. D’ailleurs, le terme a été francisé. Au miracle, l’Ordonnance de 2016 a consacré l’expression latine « gestion d’affaires » aux articles 1301 et suivants (nouveaux) du Code civil.

Si on donne une définition plus juridique, c’est l’action/ le comportement par lequel une personne qu’on appelle le gérant prend en main spontanément les affaires d’autrui ; cet autrui est appelé le maitre de l’affaire.

C’est une action qui, a priori, est désintéressée. Par conséquent, on pourrait imaginer qu’elle soit gratuite ou encore qu’elle appartienne au domaine décrit par CARBONNIER, du NON-DROIT. C’est un acte d’ami. Au fond, en reprenant l’exemple de la tempête, c’est un acte d’ami désintéressé au profit du propriétaire.

Il y’a deux sortes d’actions :

 –>  Si le gérant s’est donné beaucoup de mal, peut-être mérite-t-il une récompense ? Il y’a donc une idée de récompense dans la gestion d’affaire. En effet, le maitre peut récompenser spontanément le gérant. Il faut une action en justice pour le faire payer.

 –>  Si le gérant subit un dommage à l’occasion de son acte désintéressé, que faire ?

En reprenant l’exemple de la tempête, imaginons qu’un gros coup de vente se produit et que le portail heurte le front de la personne en question : il y’a bien un dommage. Ne peut-on pas invoquer le dommage, payer le dommage subi ? Il n’y a pas de FAUTE, il n’y a pas de responsabilité du maitre car il n’a rien demandé ! Il y’a un point commun avec la responsabilité sans faute (pas de contrat, pas de faute).

C’est une institution d’équité, autre point commun avec l’enrichissement injustifié.

C’est une institution fondée sur la morale. Un acte désintéressé doit être récompensé. A fortiori, celui qui a subi un dommage doit être indemnisé.

 

Pour toutes ces raisons, l’action est aujourd’hui codifiée aux articles 1301 et suivants. L’article 1301 dispose que : « Celui qui, sans y être tenu, gère sciemment et utilement l’affaire d’autrui, à l’insu ou sans opposition du maitre de l’affaire, est soumis, dans l’accomplissement des actes juridiques et matériels, à toutes les obligatoires d’un mandataire. ». Commentons. Ce texte est très mal rédigé. Pourquoi ? La gestion d’affaire est une action pour recevoir une récompense. La personne soit le gérant est soumise à toutes les obligations. Ce qu’il faut retenir c’est le début du texte mais aussi l’effet soit l’effet par rapport au fait qu’il soit considéré comme un mandataire. Si c’est utile, c’est comme si le mandataire l’avait demandé. C’est COMME SI, il faut insister sur l’expression.

 

Section 1 : Les conditions.

 

Tout d’abord, il faut un comportement du gérant.

La plupart du temps, il s’agit d’un acte matériel (comme l’exemple de la tempête). Exemple : Celui qui trouve un portefeuille, un ordinateur, une carte étudiante, il le prend, conserve le bien, va aller-chercher le propriétaire ; là encore, il s’agit d’un acte matériel.

Parfois, ce peut être un acte juridique. Exemple : colocation SANS SOLIDARITÉ. L’un des étudiants, l’un des colocataires qui sait que l’autre est insolvable, n’a pas l’argent sur son compte bancaire car il est à découvert et donc le propriétaire pourrait l’expulser le mois prochain. Spontanément, il paie à la place de son camarade. Il s’agit d’un acte juridique.

On peut même envisager (comme le font de nombreux arrêts) une action en justice. Est-ce que quelqu’un peut agir en justice pour l’intérêt de quelqu’un d’autre alors même que ce quelqu’un d’autre n’a rien demandé ? La Cour de cassation est très réticente. MAIS, il y’a quelques exceptions légales. Une a déjà été citée (la semaine dernière) qui correspond à l’action de groupe introduite par une loi de 2014 et par l’Ordonnance de 2016. La loi accepte désormais que, dans certains cas, une personne morale agisse dans l’intérêt de la victime alors même que cette dernière ne lui a pas donné de mandat. Il s’agit donc d’une action positive de la part du gérant.

Puis, il faut avoir la volonté de gérer les affaires d’autrui. Il faut se référer à l’action désintéressée. En général, le maitre est identifié. MAIS, parfois, il s’avère que le maitre est inconnu. Il y’a plusieurs hypothèses (dans des arrêts) pour lesquelles des voyous sont en train de voler une voiture ou autre ET, un passant, courageux, s’interpose « Que faites-vous ? Arrêtez ! ». Or, le voyou le frappe ou lui tire dessus. L’acte désintéressé a été fait pour le propriétaire. Y’a-t-il une action pour se faire indemniser ? OUI !!! Par conséquent, nous voyons qu’il n’y a pas besoin de savoir l’identité du maitre (pour le gérant).

Une autre question sur l’élément psychologique. Peut-il y’avoir des hypothèses où l’acte n’est pas totalement désintéressé ? Dans l’exemple de la tempête, PY Gautier a fermé le portail pour éventuellement ne pas se faire cambrioler ; l’acte est désintéressé mais pas totalement. Est-ce que cela rend-t-il recevable l’action ? La jurisprudence admet que si l’acte est partiellement intéressé, l’action est recevable. Exemple : La Cour de Cassation s’est prononcée il y’a quelques années sur le cas d’une femme très endettée ET un de ses créanciers avait désintéressé les autres afin d’être sûr, le moment venu, de récupérer ses propres créances. Donc, l’acte était partiellement intéressé. La Cour de cassation a admis que l’action soit recevable. Cette jurisprudence est codifiée dans l’article 1301-4 : « L’intérêt personnel du gérant à se charger de l’affaire d’autrui n’exclut pas l’application de la gestion d’affaire. » (à revoir).

De plus, que se passe-t-il si le gérant fait son devoir, si en agissant positivement en faveur du maitre, il n’a accompli rien d’autre qu’une obligation légale ? A priori, l’action est exclue. C’est ce qui est prévu dans l’article 1301 (s’y référer). S’il est tenu, AUCUNE GESTION D’AFFAIRE. Pour l’illustrer, a été mis dans la fiche de TD un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du 13 janvier 2015. Cet arrêt est assez compliqué, pas vraiment bien rédigé. Il s’agissait d’une entreprise qui avait loué des véhicules (camions, voitures etc.) à un propriétaire et qui était tombé en faillite (= c’est le cas où l’entreprise ne peut plus payer ses dettes). Le propriétaire a une action en revendication de son bien, de sa chose. En attendant qu’il l’exerce, les camions/ les voitures doivent être entretenus. Lorsqu’une entreprise tombe en faillite, le TDC désigne une personne appelée le liquidateur. Au moment où le propriétaire devait récupérer ses biens, le liquidateur a invoqué la gestion d’affaires en disant qu’il a géré et pris soin des camions/ des voitures. La Cour de Cassation répond par la négative en disant qu’il avait l’obligation légale de s’occuper des biens du propriétaire. Donc, s’il y’a une obligation légale, il n’y a pas de gestion d’affaire. Est-ce vrai dans tous les cas ? PY Gautier n’en est pas totalement sur ! Voilà des voyous qui sont en train d’agresser une jeune fille, un passant s’interpose et est blessé à cette occasion. Est-ce qu’il peut demander à la jeune fille, à ses parents ou à l’assureur une indemnisation ? Rappelons que ça relève du droit pénal : nous avons tous l’obligation de porter secours à autrui quand il est en danger. De sorte que le maitre en l’espèce la jeune fille peut dire « Non, vous n’avez fait que votre devoir ! ». Or, la Cour de Cassation a bien admis la gestion d’affaire. Il y’a donc des limites à la notion d’obligation légale. Tant mieux parce que si la Cour de Cassation avait refusé, ça ne ferait qu’encourager l’égoïsme et l’indifférence de chacun au malheur d’autrui, ce qui constitue alors un mauvais message.

Autre question, toujours dans la condition de l’intention de gérer l’affaire d’autrui, que se passe-t-il s’il y’a un contrat entre le maitre et le gérant ? Ce sont des questions communes à tous les quasi-contrats. S’agissant du contrat dans la gestion d’affaire ? Il peut se produire qu’un des cocontractants fasse du zèle au profit de son cocontractant. La Cour de Cassation a statué à plusieurs reprises sur le cas du syndic de copropriété. Souvenons-nous (le droit des biens), beaucoup d’immeubles sont en copropriétés et, pour administrer la copropriété, les copropriétaires désignent un syndic, le représentant professionnel (un agent immobilier ou autre) ; en somme, c’est le mandataire. La Cour de Cassation s’est prononcée dans deux hypothèses, commentées par PY Gautier dans la Revue de Droit Civil. La 1ère hypothèse ? Le syndic va payer les salaires du gardien, va payer toutes les taxes auprès de la ville, va payer l’entreprise qui entretient l’immeuble et dépense donc de l’argent. L’argent qui paie est provisionné par la copropriété c’est-à-dire que, chaque année, les copropriétaires donnent une certaine somme. Or, il peut s’avérer que ces provisions soient insuffisantes. Comment faire ? Il manque des choses à payer ! Le syndic, sur ses Fonds professionnels, fait un chèque. Ensuite, il demande un remboursement aux copropriétaires. Ceux-ci répondent : « Nous vous avons donné une certaine somme. Nous ne vous remboursons pas ! ». Est-ce que le syndic a une action en gestion d’affaire ? La Cour de Cassation a répondu « NON » ! S’il y’a un contrat, le cocontractant, le mandataire doit respecter et tant pis pour lui s’il fait du zèle. Il aurait donc fallu que le syndic provoque une réunion d’urgence pour avoir d’autres Fonds. C’est un très mauvais message. PY Gautier a critiqué très fortement la solution parce que c’est quand même très mal récompensé. Il a payé et, grâce à lui, le gardien aura sa rémunération ET la ville aura reçu la taxe. Il a fait un ACTE UTILE. L’acte utile et désintéressé est récompensé. Par ailleurs, la Cour de Cassation n’a pas lu Pothier et elle a tort. Pothier, dans son Traité des contrats, a évoqué l’hypothèse en question. Pour lui, le mandataire doit être remboursé. Il y’a donc un fond d’équité mais aussi de morale. PY Gautier a donc critiqué cette JP.

Par ailleurs, la Cour de Cassation a rendu un nouvel arrêt, mis dans la fiche de TD, un arrêt de la 3ème Chambre civile du 16 octobre 2013. L’hypothèse n’est pas le dépassement du Fonds du syndic mais de l’expiration du mandat. Il peut arriver que les copropriétaires décident de changer de syndic. Les contrats de syndic sont des CDI. Les copropriétaires veulent alors engager un nouveau syndic. Or, le temps que ça se mette en place, il peut se passer plusieurs choses. Notre ancien syndic peut dire qu’au 31 décembre, c’est fini MAIS continue à recevoir des recommandés d’un des fournisseurs (comme de l’entreprise qui s’occupe de l’ascenseur) et paie alors même que le contrat est fini. Peut-il se faire rembourser ? Au fond, c’est la même question. La Cour de Cassation a répondu par la négative. On est dans une période post-contractuelle. Ainsi, il n’a pas d’action en remboursement. Dans la chronique de PY Gauthier, il a été critiqué cela pour les mêmes raisons voire a fortiori car si le mandat est expiré, il n’y a plus de contrat donc on pourrait raisonner en termes de rapports extracontractuels. Or, son acte a été utile car il a payé dans l’intérêt des copropriétaires. Quoi qu’il en soit, cette jurisprudence a été codifiée dans une loi de 2014 qui a modifié l’article 18 de la loi de 1965 sur la copropriété (en effet, les règles de la copropriété ne se trouvent pas dans le Code civil mais dans une loi à part) pour interdire au syndic de faire des avances de Fonds, donc interdire de faire des actes désintéressés et utiles. PY Gautier ne comprend pas et il est seul à ne pas comprendre. La seule explication est la méfiance à l’égard des syndics MAIS un syndic qui fait un acte utile pour la copropriété ne devrait pas provoquer de méfiance.

Ensuite, il faut l’utilité de la gestion des affaires du maitre. C’est ce qu’on retrouve dans l’article 1301 avec l’expression « utilement » ; ceci est répété dans l’article 1301-2.

L’utilité est un mot commun au vocabulaire juridique et au vocabulaire de tous les jours.

Dans tous les exemples, le comportement a profité.

Comme c’est un quasi-contrat (et que ça ressemble à un contrat), la question s’est posée de savoir quelle est l’étendue de la gérance ? Lorsqu’il intervient spontanément et puisqu’il intervient, son obligation est-elle de moyens ou de résultat ? La réponse à l’article 1301-1 : « Il est tenu d’apporter à la gestion de l’affaire tous les soins d’une personne raisonnable. ».

Avant, il s’agissait du bon père de famille mais comme il a disparu, il s’agit de la personne raisonnable. Par conséquent, son obligation n’est que de moyens.

Que se passe-t-il si l’intervention de celui qui veut empêcher le cambriolage est vaine et que le cambriolage a lieu ? La réponse est dans 1301-1. Il a fait ce qu’il a pu. Il obtiendra une indemnisation alors même qu’il y’a eu un échec. La Cour de Cassation a précisé que c’est au moment de l’accomplissement de l’acte qu’on apprécie son utilité. Donc, dans l’exemple des voyous, c’est à ce moment où le gérant intervient qu’on doit apprécier la situation. Il est logique de raisonner ainsi puisque c’est une récompense de l’acte désintéressé et qu’il ne faut pas décourager les actes désintéressés. Ce qui compte, c’est d’avoir TENTÉ !!! La tentative d’acte de générosité n’est pas punissable et est même récompensée.

Enfin, il faut que le maitre n’ait rien fait, qu’il n’ait pas su ou qu’il ait laissé faire. Revenons-en au texte à « à l’insu OU sans opposition du maitre ». C’est une condition qui semble assez naturelle.

A contrario, si le maitre demande, à ce moment-là, il s’agit d’un MANDAT.

Si au contraire, le maitre s’oppose, cela va de soi. MAIS, on voit mal le maitre dire dans les exemples donnés « Laissez-moi dans le désespoir, laissez-moi en danger ».

 

Il y’a des hypothèses, pour en revenir aux accidents de la circulation. Il y’a eu un accident. Une personne baigne en sang sur la route. On vient lui porter secours. MAIS, à cette occasion, des voitures roulant à toute allure nous renversent. Est-ce que le gérant blessé qui venait en secours à quelqu’un d’inanimé peut demander une indemnisation à celui-ci ou à son assureur ? La réponse est OUI !!!

 

Section 2 : Les effets.

 

Il s’agit d’un quasi-contrat. Par conséquent, le Code raisonne comme si c’était un mandat.

Donnons des textes du Code civil (de Portalis et ses amis) qui s’y réfèrent : les articles 1372 du Code civil.

Revenons-en au nouveau Code. L’article 1301-2 dispose que : « Celui dont l’affaire a été utilement gérée doit remplir les engagements contractés dans son intérêt par le gérant. Il rembourse au gérant ses dépenses et l’indemnise de ses dommages. ». Dans tous les cas, c’est comme un mandat, comme s’il avait un pouvoir. Ceci suppose que les conditions soient remplies cumulativement.

On doit néanmoins se poser la même question que pour l’enrichissement injustifié et la répétition de l’indu, que se passe-t-il si le gérant a commis une faute ? Et bien, dans ce cas, comme pour les autres quasi-contrats, l’article 1301-1, alinéa 2 dispose que « Le juge peut modérer l’indemnité due en raison des fautes du gérant. ». MAIS, les hypothèses seront assez rares. À ce sujet, un arrêt de la Cour de Cassation au sujet d’une caissière d’un supermarché. Un client a oublié son portefeuille à la caisse. La caissière le conserve et remet le portefeuille en le donnant à un individu qui se présente en disant qu’il a oublié son portefeuille ; or, elle s’est trompée, elle a commis une faute (elle aurait du vérifier l’identité de la personne en question).

 

COURS N°2 DROIT DE LA RESPONSABILITÉ CIVILE (AVANT LA REFORME)

Il y a plusieurs sources d’obligations :

— La loi est une source d’obligations, on parle d’obligations légales. 

— Les promesses sont une source d’obligations résultant de la volonté .

        – un acte juridique unilatéral : Une personne peut s’obliger par un acte juridique unilatéral qui est une source d’obligation . Par la manifestation de volonté exprimée par cet engagement unilatéral, cette personne s’engage en tant que débiteur.

       – un contrat : Le principe de l’autonomie de la volonté justifie qu’une personne puisse s’obliger par le biais d’une convention, le contrat. Le contrat est une source quotidienne d’obligations . La vie des particuliers comme des entreprises donne naissance à de très fréquents contrats, d’importance diverse  : vente, échange, louage, dépôt, prêt, etc.

— Des obligations peuvent naitre en dehors de toute volonté du débiteur. Il en est ainsi des obligations résultant des sources suivantes

  •          – le quasi contrat
  •         – le délit, qui donne naissance à la responsabilité. Ces obligations sont dites extra-contractuelles .  Les obligations extra-contractuelles sont généralement liées à des fautes ou à des risques. Les obligations extra-contractuelles résultent de principes concernant la  réparation des dommages

Introduction générale :  

Directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux, loi de transposition, 1386-1 à 1386-18.

En France il y a 5 articles depuis 1804 et tout le droit de la responsabilité civile est un droit jurisprudentiel. Les juges ont fait évoluer notre société. A travers l’interprétation, les juges ont forgés un droit de la responsabilité civile. Chapitre 2 : des délits et des quasi-délits.

Le droit de la responsabilité civile en droit anglais est le « TORTS ». Eux c’est un peu comme le droit comme on a connu, c’est un droit très quasuistique : il n’y a pas un droit s’il n’y a pas une action qui reconnait ce droit. remedies preceed rights. Le droit français est beaucoup plus conceptualisé.

En France on a conceptualisé le concept d’obligation. Qu’est ce qu’une obligation ? C’est un lien de droit entre deux personnes par lequel l’une d’elle peut être obligée de faire quelque chose. L’obligation est ce que les romains appelaient un « vinculum juris » ( : lien de droit). vinculi c’était les chaines qui retenaient les prisonniers.

En droit français on théorise qu’il y a différentes sources d’obligations. Qu’est ce qui peut créer des obligations : sources. Quelles sont les 6 sources possibles d’obligation en droit français ? Il y a la loi (loi fiscale comme source d’obligation fiscale), le contrat (c’est l’obligation volontaire qui oblige une personne à faire ou non quelque chose), l’engagement unilatéral de volonté (la chambre sociale de la cour de cassation reconnait cet engagement unilatéral de volonté comme source d’obligation), le délit, le quasi-délit, le quasi-contrat.

Le quasi-contrat n’a pas les effets du contrat car il manque le consentement. C’est un engagement involontaire et donc c’est commun aux délits et quasi-délits. Délits et quasi-délits c’est la responsabilité civile délictuelle (et pas responsabilité civile contractuelle, on l’a déjà vu, on ne va pas le revoir).

Article 1382 : tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Article 1383 : chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

La différence entre le délit et quasi-délit : le délit est un fait (volontaire) et intentionnel qui cause un dommage à autrui. Un quasi-délit, 1383, c’est l’imprudence ou la négligence et donc pas intentionnel.

On distingue un fait volontaire d’un fait intentionnel : un fait volontaire est lorsqu’une personne a consciemment fait quelque chose, c’est-à-dire qu’elle avait conscience de ses actes et on dit encore que la personne avait une capacité de discernement. La personne a la capacité de discerner le bien du mal. Qui n’a pas conscience de ses actes ? Deux types de personnes n’ont pas conscience de leurs actes : les infans ( : enfant(s) en bas âge qui n’a pas encore la capacité de discernement) et les aliénés (insuffisance de capacité intellectuelle). Même si c’est par imprudence c’est volontaire. Un acte volontaire est un acte commis par une personne qui a la capacité de discernement. Un acte intentionnel est lorsque la personne non seulement a voulu l’acte mais aussi qu’elle en a voulu les conséquences.

Donc si l’acte a causé un dommage ca veut dire que la personne a voulu causer ce dommage. Si on veut casser la vitre de l’amphi on prend les moyens qu’il fallait pour la casser alors que si on passe près de la fenêtre et qu’on tombe et qu’on la casse ce n’est pas intentionnel.

A priori on vise toujours 1382 car en droit français c’est le plus grand principe en droit de la responsabilité civile : c’est le principe de la réparation intégrale du préjudice. Ça signifie qu’en droit français, la responsabilité civile délictuelle est calquée sur le préjudice et non pas sur la faute, c’est-à-dire que si une faute minime a causé un très lourd préjudice, la responsabilité civil sera très lourde puisqu’il faut réparer tout le préjudice. Si une faute gravissime a causé un préjudice minime, la responsabilité civile sera minime. Ça ne dépend pas de la gravité de la faute : en principe la qualification de faute intentionnelle ou non intentionnelle est indifférente, on doit réparer tout le préjudice : principe de la réparation intégrale du préjudice.

Exemple : les délits de presse : on a un magasine avec des photos volées. La personne dont on a volé la photo fait un procès, responsabilité civile, elle ne peut que demander réparation de son préjudice. Les sommes de dommages et intérêts allouées en droit français ne sont pas très importantes. Comment évaluer le préjudice ? Il y a une marge d’appréciation par les juges. Mais souvent les juges vont évaluer en donnant une somme raisonnable. Or pour les magazines c’est très lucratifs. C’est ce qu’on appelle une faute lucrative : on commet une faute parce que ça rapporte de l’argent. On provisionne en comptabilité quand on sait qu’on va avoir une perte. Les magazines le font quand même parce qu’au final ils gagnent de l’argent.

En droit américain on a les dommages et intérêts punitifs : quand on calcule les dommages et intérêt partiellement en fonction de la faute. En droit français on y a réfléchi en disant que c’est souhaitable et on dit que ca serait intéressant d’introduire les dommages et intérêts punitifs en cas de faute lucrative : les gains qu’elle retire de sa faute est plus important que le dommage qu’elle cause par sa faute. Et donc elle gardera un bénéfice et du coup c’est injuste parce que ca incite à commettre la faute. On dit en droit américain que le journal doit « disgorge ». Si le profit va à la personne, le magazine va moins être tenté de recommencer.

En France on est un peu réticent à ce système car les juges savent que la star qui vient les voir vie souvent de ca. Projet en matière de responsabilité civile Catala : confié à madame Viney : ils ont trouvés un compromis : on introduit les dommages et intérêts primitifs mais tout n’ira pas à la victime, on peut donner une partie au trésor public.

En droit français les dommages et intérêts sont calqués uniquement sur le dommage et non pas sur la faute. Donc le caractère intentionnel ou non intentionnel de la faute n’importe peu. Indirectement il peut y avoir une petite incidence, principalement en droit des assurances (la faute intentionnelle n’est pas assurable par exemple). Les actions récursoires ( : recours d’une personne contre une autre) : quand on a plusieurs personnes qui ont fait un dommage il peut y avoir plusieurs action récursoires et on tiendra compte de la faute.

  • 1383 : faute non intentionnelle.
  • 1384 : différents cas de responsabilité causés par le fait des personnes dont on doit répondre. C’est ce qu’on appelle en droit français la responsabilité du fait d’autrui. C’est la responsabilité des pères et mères pour leur enfant mineur.
  • 1385 : responsabilité du fait des animaux
  • 1386 : responsabilité du fait des bâtiments en ruine.

Responsabilité civile délictuelle :  

  • ·         1382 et 1383 : responsabilité du fait personnel
  • ·         1384 : en 1804 c’est la responsabilité du fait d’autrui
  • ·         1385 et 1386 : responsabilité du fait des choses

On étudie donc les différents types de responsabilité civile. On verra dans l’ordre les différents types de responsabilité. En trois séances on va faire la responsabilité du fait personnel. On tire de l’article 1382 qu’il faut 3 conditions de mise en œuvre de la responsabilité du fait personnel : une faute, un dommage, un lien de causalité entre la faute et le dommage (et pas entre le dommage et la faute).

Le droit de la responsabilité civile il faudrait en faire une approche un peu culturelle car on a toujours tendance à croire qu’on est universel. On lie les bœufs par les cornes et les hommes par les paroles. On est dans une culture de parole. On pense que notre parole a prise sur l’avenir (contrairement au Japon par exemple). En matière de responsabilité on est aussi dans une certaine culture de la responsabilité qui est très différentes des autres cultures. On est dans une culture de la confession, de la culpabilité par rapport à la culture japonaise qui est une culture de la honte. En France quand on s’est confessé ça fait disparaitre la responsabilité. Alors que pour un japonais il ne faut pas que sa faute apparaisse en public.

Il y a trois grands types de responsabilité : responsabilité administrative, pénale, et civile (qui comprend la responsabilité civile délictuelle et contractuelle).

En France, quand un dommage a été causé par quelqu’un, il se peut que le fait générateur ( : la faute) soit une faute civile (1382 et donc dommages et intérêts) mais aussi pénale (sanction : emprisonnement, amende). Quand un fait tombe sous une qualification pénale et civile, la victime peut soit aller au pénal pour demander réparation pénale et au civil réparation civile ; mais c’est plus long et plus cher.

En France on autorise la victime à se constituer partie civile ou à se porter partie civile ou à exercer l’action civile : ca veut dire demander réparation de son préjudice civil à la juridiction pénale. Pour éviter la contrariété de jugement, quand le juge civil est saisi d’une action qui est aussi saisie au pénal, le juge civil doit sursoir à statuer pour statuer à son tour sur les intérêts civil : le criminel tient le civil en état. On ne verra que l’action en réparation ( : devant les juridictions civiles).

 

Voici le plan du cours de droit de la responsabilité et des quasi-contrats

Première partie : La responsabilité civile délictuelle 

Titre 1 : Les différents types de responsabilité civile délictuelle 

Sous-titre 1 : Le fait personnel 

Chapitre 1 : La faute 

  1. L’élément objectif 
  2. L’élément subjectif

Chapitre 2 : le dommage réparable 

  1. Les différents types de préjudice réparable ou les différentes catégories de dommage réparable
  2. Les atteintes aux biens
  3. Les atteintes à la personne

1)      Le dommage corporel 

  1. a)      Conséquence pécuniaires
  2. b)     Le dommage moral

2)      Le dommage purement moral 

  1. Les conditions de réparation du dommage (qui ne sont pas une limitation des types de préjudice) ou les caractères du dommage réparable

Chapitre 3 : Le lien de causalité 

  1. La définition du lien de causalité
  2. La preuve de la causalité

III.              La pluralité des causes 

  1. La force majeure
  2. Le fait de la victime
  3. Le fait d’un tiers

Sous-titre 2 : Le fait des choses 

Chapitre 1 : Régime général de la responsabilité  du fait des choses

  1. Historique
  2. Conditions de la responsabilité du fait des choses
  3. Première condition : une chose

1)     Responsabilité pour faute : 1382  

2)     Responsabilité du fait des choses : 1384 alinéa 1er  

  1. Deuxième condition : un fait de la chose
  2. Troisième condition : chose que l’on a sous sa garde/la garde de la chose

1)     Définition de la garde 

2)     Garde et discernement  

3)     Le caractère alternatif de la garde  

III.      Le régime de responsabilité du fait des choses 

Chapitre 2 : Les régimes spéciaux de la responsabilité du fait des choses 

  1. Les animaux
  2. Les bâtiments

 III.                        Responsabilité pour les accidents de la circulation 

  1. Régime spécial de la responsabilité du fait des produits défectueux

Sous-titre 3 : La responsabilité du fait d’autrui 

Chapitre 1 : Régimes spéciaux de responsabilité du fait d’autrui 

Section 1 : Responsabilité des pères et mères du fait de leur enfant mineur 

Section 2 : La responsabilité des commettants du fait de leur préposé 

  1. Le commettant
  2. Les conditions de la responsabilité du commettant

    °Condition n°1 : Le lien de préposition

    ° Condition n°2 : Faute du préposé

    ° Condition n°3 : Lien entre le fait dommageable et les fonctions du préposé

  1. Le régime de la responsabilité du commettant
  2. Le préposé

Chapitre 2 : Le régime général de responsabilité du fait d’autrui 

Les effets de la responsabilité

 Partie 2 : Les quasis contrats : 

  1. La gestion d’affaire
  2. La répétition de l’indu
  3. L’enrichissement sans cause

 

Première partie :  

La responsabilité civile délictuelle 

 

Titre 1 : Les différents types de responsabilité civile délictuelle 

On distingue la responsabilité du fait personnel, la responsabilité du fais des choses, la responsabilité du fait d’autrui.

 

Sous-titre 1 : Le fait personnel 

La principale est la responsabilité du fait personnel : quand on fait soi même quelque chose qui va entrainer un préjudice qu’on va réparer. Il faut les trois conditions et ça doit être cumulatif.

Chapitre 1 : La faute 

La faute est la première condition de mise en œuvre de responsabilité du fait personnel. Article 1382 et 1383. Le code civil de 1804 prévoyait les 5 articles, ils n’ont pas été beaucoup modifiés. En 1804 en réalité, le cœur du droit de la responsabilité était la responsabilité pour faute.

  • 5 et 6 c’est deux cas particulier de responsabilité du fait des choses.
  • 4 c’est des cas particuliers de responsabilité du fait d’autrui.
  • 2 et 3 c’est ce que les allemands et italiens parlent de la clause générale de l’article 1382 : c’est ce qu’on appellerait un principe général de responsabilité du fait personnel.

En 1804 le seul principe général de responsabilité qui existait est la responsabilité pour faute de l’article 1382. Ceci a rendu nécessaire de définir ce qu’était cette faute. Pendant très longtemps la faute comprenait deux éléments : il fallait caractériser deux éléments cumulatifs : un élément objectif et un élément subjectif.

 

  1. L’élément objectif 

Quand est ce qu’une faute peut être caractérisée ? L’élément objectif était de dire que l’élément objectif de la faute était d’abord un élément matériel, c’est-à-dire qu’il faut que quelque chose ait été commis. En d’autres termes il fallait un acte. Progressivement on a élargie cet élément objectif de la faute et on a assimilé aux actes les abstentions. Une abstention peut aussi être considéré comme une faute lorsque la personne aurait du agir. Son abstention peut être fautive. En droit des contrats on a la réticence dolosive. L’élément matériel de la faute ca peut être un acte (acte de commission ou d’omission) ou une abstention qui doit être fautive. Une parole peut aussi être fautive. Donc un acte peut être une parole. Une injure peut être passible de l’article 1382 et constituer l’élément matériel de la faute.

Arrêt de 1951 affaire Branly: historien qui avait écrit une histoire de la télévision et il n’avait pas cité le nom de Branly qui est considéré comme l’un des inventeurs de la télévision. Le fait d’avoir omis de citer un nom faisait que c’était une faute et si elle avait causé un dommage ca pouvait conduire à une réparation.

L’élément matériel est un fait personnel. Si une personne tombe avec un crayon et qu’elle nous crève un œil c’est la responsabilité du fait des choses. Alors que si elle tombe et nous fait mal avec son corps c’est la responsabilité du fait personnel.

Dans l’élément objectif de la faute il y a aussi un élément d’illicéité de l’acte. Un élément d’illicéité ça veut dire que l’acte est contraire au droit. Quand est ce qu’on peut dire qu’un acte est contraire au droit ? Planiol disait que la faute est la violation d’une obligation préexistante. En réalité cette définition est critiquable car c’est une définition circulaire. Il peut avoir faute même lorsqu’aucun texte ne prévoit une obligation préexistante. Le juge se fonde sur les PGD, sur des textes généraux et donc va trouver une obligation préexistante. Quand est ce qu’on peut dire qu’il y a une obligation préexistante ? En France on considère qu’il faut appliquer un standard d’appréciation : c’est un model de comportement.

Par exemple le standard de la bonne foi. Le standard pour apprécier la faute est le standard du bon père de famille (le bonus pater familias). C’est un homme moyen. On va se demander si un être normal aurait ou non du avoir un tel comportement. C’est un standard d’appréciation par le juge. On peut se demander si tel commerçant aurait du avoir ce comportement. C’est quand aucune loi ne le précise. Les anglais utilisent comme standard celui de l’homme raisonnable.

En réalité en matière de responsabilité civile ça ne pose pas tellement de difficulté la faute. Mais dans certaines matières, quand il y a d’autres types de dommages que ceux corporels comme en matière de concurrence déloyale, on va s’intéresser à la faute. En matière de jeux sportifs il y a eu beaucoup de litiges pour savoir si on doit appliquer 1382 ou non. Est-ce que toute règle du jeu, quand elle est violée, est une faute au sens de 1382 ? Il y a aussi des interférences avec la déontologie, il y a degré d’appréciation. C’est pour insister sur le fait que dans tous les domaines le juge doit apprécier si le comportement est ou non contraire au droit. C’est au juge d’apprécier cet élément d’illicéité.

La faute est un concept très général et dans tous les domaines il est possible de caractériser une faute. Est-ce que quand une personne exerce un droit, peut-elle être fautive ? On estime que oui : il peut y avoir faute dans l’exercice d’un droit. C’est l’abus de droit. Par exemple l’abus du droit d’agir en justice. Par exemple aussi lorsqu’un utilise l’action de façon disproportionnée : quelqu’un vol dans un grand magasin et le propriétaire menace de façon disproportionnée.

Donc élément matériel et élément d’illicéité.

  1. L’élément subjectif 

Autant il n’a jamais été nécessaire que l’acte soit intentionnel pour caractériser une faute. On considère que 1383 est aussi une faute qu’on appelle une faute d’imprudence ou de négligence. 1382 c’est le délit et 1383 c’est le quasi-délit. 1383 ne dit pas faute mais on considère que quand l’article 1383 dit fait c’est faute. Donc peu importe le caractère intentionnel.

En revanche pendant très longtemps il fallait un élément subjectif pour caractériser une faute, c’est ce qu’on appelait « l’élément d’imputabilité ». Ca signifiait que pour commettre une faute il fallait que son auteur ait la capacité de discernement, c’est-à-dire qu’il fallait que son auteur ait conscience de ses actes. En d’autres termes il fallait que la faute ait été volontaire. Sinon il n’y avait pas de faute et donc pas de responsabilité. En d’autres termes, un être privé de discernement ne pouvait pas être responsable puisqu’il ne pouvait pas commettre de faute puisque les trois conditions sont cumulatives. Un infans ou un aliéné n’étaient pas responsable puisqu’ils ne pouvaient pas commettre de faute.

Mais la responsabilité civile a énormément évoluée : on est allée vers une « objectivation de plus en plus grande de la responsabilité » parce que de plus en plus l’objectif du droit de la responsabilité civile a été d’indemniser les victimes. On avait une dette de réparation qui est devenue une créance d’indemnisation.

Le tournant s’est fait dans les années 1980. Il y avait déjà eu une évolution pour les aliénés car il y avait eu une loi de janvier 1968 qui avait ajouté dans le code civil un article qui désormais a été 414-3 du Code civil : celui qui a causé un dommage à autrui alors qu’il était sous l’empire d’un trouble mental n’en est pas moins obligé à réparation.

Est-ce que ça signifie qu’il n’est plus nécessaire d’avoir un élément subjectif de la faute ? Non sinon il n’y a plus besoin de ce texte. Il n’est pas responsable mais il est tenu à réparation. Mais il fallait démontrer un trouble mental. Et les enfants n’étaient toujours pas responsables.

L’évolution s’est faite par 4 arrêts (à retenir par cœur) de l’assemblée plénière de la cour de cassation du 9 mai 1984 :

Arrêt Derguini : concerne 1382. On avait une petite fille de 5 ans qui a traversé la route sur un passage protégé et elle est morte. Les époux Derguini demandent réparation du préjudice au civil. La cour d’appel partage de moitié la responsabilité. L’enfant a contribué à son dommage et donc 50%. Pour que l’enfant puisse être responsable de son dommage il fallait qu’il soit considéré comme fautif. Violation de la loi car défaut de discernement exclu toute responsabilité de la victime. Manque de base légale.

Arrêt Lemaire : concerne 1382. C’était un petit garçon de 13 ans qui a vissé une ampoule sur une douille et il est mort. Et il y avait un électricien, monsieur Lemaire, qui était passé avant et avait effectué des travaux d’électricité. Il y a eu une action au pénal (mais on fait au civil). Les parents ont demandé réparation à l’électricien et à l’entreprise dans laquelle il travaillait. L’électricien a dit que l’enfant avait commis une faute, il avait contribué à la réalisation de son propre dommage (la victime avait omis de couper le courant avant de faire son installation). C’est la faute de la victime : quand la victime a elle aussi commise une faute qui a contribué à la réalisation de son dommage, elle en est partiellement responsable. Ca exonère partiellement l’auteur de la faute principale. Attendu que les parties civiles font grief à l’arrêt d’avoir déclaré Lemaire responsable pour seulement moitié des dommages de l’accident… sans rechercher si ce mineur avait la capacité de discernement donc manque de base légale.

Dans les deux cas les parents ont dit que leur enfant avait commis une faute mais sans discernement. Le pourvoi disait qu’en caractérisant ou en retenant une faute et que c’était un enfant et donc il ne pouvait pas commettre une faute, violation de la loi. Ou alors manque de base légale en n’ayant pas assez motivé la décision.

Il y a 9 cas d’ouverture à cassation : violation de la loi, le manque de base légale, dénaturation, le défaut de motif, incompétence, contrariété de jugement, perte de fondement juridique, excès de pouvoir, et un autre.

Violation de la loi : non application de la loi ou mauvaise application de la loi. On a appliqué au litige une loi qui n’était pas applicable au litige. C’est une erreur de droit. Si la cour de cassation casse et que la seconde cour d’appel ne casse pas, elle commettra elle aussi une erreur de droit. Exemple : une cour d’appel dit que ya pas de faute mais elle condamne quand même avec 1382.

Manque de base légale : quand une cour d’appel n’a pas suffisamment motivé sa décision en fait (et pas en droit). La cour d’appel n’a pas caractérisé la présence d’un fait qui aurait permis à la cour de cassation d’exercer son contrôle. Exemple : la cour d’appel dit qu’il y a un dommage, un lien de causalité, sans caractériser la faute, et condamne.

Dénaturation : l’interprétation des actes juridiques relèvent du pouvoir souverain des juges du fond. Quand il y a une erreur grossière d’interprétation d’un acte clair. Si un témoignage dit quelque chose et que la cour d’appel dit autre chose. Mais il faut que ça soit clair.

Défaut de motif : la cour d’appel n’a pas motivé complètement tel ou tel point, c’est plus grave que le manque de base légale.

Dans les deux arrêts la cour d’appel a partagé la responsabilité et dans les deux cas ensuite c’est des arrêts de rejet. Dans Lemaire : la cour d’appel a pu retenir la faute et elle n’était pas tenue de vérifier si le mineur était capable de discernement. Et donc la capacité de discernement n’est pas une condition de la faute donc revirement de jurisprudence. Dans

Pour caractériser une faute, les juges du fond n’ont plus à caractériser la capacité de discernement. Ce n’est plus une condition de définition de la faute. Ca veut dire qu’il n’est plus nécessaire de caractériser un élément subjectif pour caractériser un comportement de fautif. La faute se réduit désormais à un élément objectif matériel et d’illicéité. Les arrêts de 1984 suppriment l’exigence de capacité de discernement pour caractériser la faute. C’est considérable car on passe à la considération de la victime et on détache toute considération morale du droit de la responsabilité civile. La faute civile se détache totalement de la faute morale.

Certains disent que la responsabilité de 1382 est une responsabilité objective, ce qui est une erreur car une responsabilité objective est une responsabilité sans faute. Or ici il faut une faute, même si elle n’est plus qu’objective. Avantage : les victimes sont indemnisées. On peut imputer à la victime enfant la faute alors que celle-ci est victime. Ici la victime a une moins bonne indemnisation car si on n’avait pas pu lui opposer sa faute elle aurait eu plus d’indemnités. Inconvénients : détachement de toute considération morale et donc déresponsabilisation. Tout d’un coup on a détaché la responsabilité civile de son ancrage dans la culpabilité.

  1. Analyse : L’absence de discernement n’est plus incompatible avec la faute
  2. La justification de l’arrêt : meilleur indemnisation des victimes
  3. Inconvénient de l’arrêt : risque de déresponsabilisation
  4. Portée de l’arrêt : détachement de toute considération morale

Donc : la faute désormais est une faute objective qui se réduit à son élément matériel et élément d’illicéité.

La cour de cassation a décidé que quand il y a eu un acte illicite de commis, parfois l’illicéité peut être justifiée et il y a eu de la jurisprudence sur la légitime défense et l’état de nécessité. Il y a eu des arrêts qui ont décidé que la légitime défense pouvait justifier l’illicéité au civil.

Arrêt du 22 avril 1992 : une dame était dans un véhicule en stationnement. Il y a eu trois hommes qui se sont approchés de la voiture, elle a blessé avec un pistolet une des trois personnes. Elle a été relaxé au pénal. La cour d’appel a jugé qu’elle était responsable. La cour de cassation a cassé la cour d’appel : attendu que la légitime défense reconnue par le juge pénal ne peut donner lieu en civil à la demande de dommages et intérêts.

Chapitre 2 : le dommage réparable 

C’est le préjudice réparable en matière de responsabilité civile. On le voit en matière de responsabilité du fait personnel, mais ça marche aussi avec les autres types de responsabilité.

Sur ce point le droit français est assez différent des autres droits européens et du monde. Le droit allemand et le droit italien, partent de l’idée qu’il y a des intérêts que le droit protège. Le droit protège certains intérêts et donc qu’il y a des intérêts légitimes juridiquement protégés, et lorsqu’il y a atteinte à l’un de ces intérêts, il y a réparation. La santé et la propriété sont des intérêts légitimes juridiquement protégés, et donc quand on porte atteinte à ces droits, il y a une réparation. Dans tous ces droits il y a une liste des intérêts protégés et cette liste n’est pas tout à fait exhaustive et donc on peut en ajouter de nouveaux. Mais la liste fixe les intérêts qui à un moment donné sont protégés.

Le droit français à cet égard est totalement à part. La clause générale de 1382 : il faut un dommage. En droit français, le dommage est une catégorie entièrement ouverte. Dès lors qu’il y a un dommage il est réparable. Ceci signifie qu’il n’y a pas de limite en droit français sur les types de dommages réparables !

Qu’est ce qu’un dommage ? Pendant très longtemps on n’a pas distingué un dommage d’un préjudice. Une partie de la doctrine essaye de dire que ce n’est pas tout à fait la même chose : le dommage serait l’atteinte à la personne ou à ses biens et le préjudice serait ce que le droit répare. La prof ne fait pas de distinction. L’atteinte en droit français est réparable selon 1382 et donc il n’y aura pas de décalage entre dommage et préjudice. La doctrine prend exemple d’une maison avec un petit mur qu’on veut détruire. Un camion a un accident et le détruit. Il y a atteinte à notre droit de propriété. Cependant, selon la prof, il serait souhaitable de limiter la liste des dommages.

Il faut distinguer entre dommage et préjudice d’une part et entre dommage réparable et préjudice réparable d’autre part ! Mais si on dit que le préjudice est réparable, le préjudice réparable n’a plus aucun sens, c’est une tautologie. La cour de cassation ne distingue pas encore, sauf avec des petites conditions. En droit français, tous les types de dommage sont a priori réparables.

Un dommage est une atteinte à un bien, à la propriété ou une souffrance, mais toute atteinte est a priori réparable. Les conditions ne portent pas sur les types d’atteinte. C’est une pente très glissante.

Qui peut demander réparation du préjudice ? Uniquement la victime du dommage. C’est celle qui a subit l’atteinte dans sa personne ou dans ses biens. On distingue couramment les victimes directes des victimes indirectes. Victimes indirectes ou victimes par ricochets. La victime directe est celle qui a subit le préjudice dans sa personne ou dans ses biens. La victime indirecte est celle qui n’a souffert d’un préjudice que parce qu’une première personne avec qui elle avait des liens, avait déjà subit un préjudice. Ce n’est que par ricochets qu’elle subit un préjudice. Ce n’est pas le fait dommageable qui a porté atteinte à sa personne ou à ses biens.

On distingue le préjudice matériel ou patrimonial par ricochet (par exemple des parents victimes d’un accident qui fait qu’il ne peut plus travailler et le salaire participait à l’entretien du ménage et du coup les enfants et le conjoint ont un préjudice patrimonial par ricochet) et le dommage ou préjudice moral par ricochet (c’est ce qu’on appelle aussi le préjudice d’affection, c’est quand un personne souffre de voir une personne chère avoir eu un dommage direct). Il faut un certain lien entre la victime directe et la victime par ricochet. Pour matériel il faut des moyens de subsistance par la victime directe. Pour moral il faut un lien particulier. Il n’est pas nécessaire qu’il y ait un lien de droit entre la victime directe et la victime par ricochet.

Pendant longtemps les juges avaient requis, notamment dans un couple, qu’il y ait un lien de droit. Pendant longtemps on a refusé à la concubine l’indemnisation en disant que le lien entre le concubin et la concubine n’était pas un lien de droit et donc il n’y avait pas de réparation possible.

Arrêt de 1970 Dangereux : elle a décidé pour la première fois, revirement de jurisprudence, il n’est pas nécessaire qu’il y ait un lien de droit pour qu’il y ait préjudice par ricochet.

La victime est donc directe ou par ricochet.

Pour être considéré comme victime il faut avoir la personnalité juridique, c’est-à-dire il faut être né vivant et viable. Pour les cadavres il peut y avoir atteinte à la mémoire des morts, ce sont les héritiers qui exercent l’action. Si on prend un embryon conçu, non encore né mais vivant et viable, on peut avoir un préjudice. Quand l’enfant sera né vivant et viable, les enfants pourront attaquer le médecin en responsabilité.

Adage : infans conceptus pro nato habetur quoties de ejus commodis hagitur : l’enfant simplement conçu est considéré comme né à chaque fois qu’il y va de son intérêt.

Pour certains dommages, il ne suffit pas d’avoir la personnalité juridique, c’est-à-dire d’être né vivant et viable. Pour certains types de préjudice, il faut avoir un corps ( : personnalité physique). La souffrance physique ne peut pas exister pour une personne morale. L’atteinte à la vie privée d’une personne morale ? Certains considèrent que oui mais en fait on peut trouver l’équivalent : elle a des secrets de fabrique, professionnels.

  1. Les différents types de préjudice réparable ou les différentes catégories de dommage réparable

Juridiquement, il n’est pas nécessaire que l’atteinte entre dans un type donné pour être réparée car en France la catégorie est ouverte. Mais la doctrine et repris par les juges, a forgé une typologie des différents dommages dont on peut demander réparation. Si ca rentre dedans c’est plus facile pour former sa demande. Il y a différentes catégorisations.

On distingue les dommages patrimoniaux des dommages extrapatrimoniaux. Patrimoniaux c’est quand il y a atteinte à un bien du patrimoine. Extrapatrimonial c’est par exemple un préjudice moral.

On peut voir une classification tripartite : dommage matériel (atteinte à un bien), corporel (atteinte à la personne) et moral (souffrance psychologique).

La prof ne reprend pas ces deux catégories car la classification tripartite n’est pas une souma-divisio car dans le corporel on a une partie morale et une partie corporelle. Il y a un peu de moral dans le matériel : on casse un vase très précieux qu’on tient de notre grand père. Donc ça conduirait à des répétitions. Patrimonial et extrapatrimonial est un peu dépassé car ça fait l’élément clé l’atteinte au patrimoine alors que le dommage corporel fait appel aux deux. La troisième raison est qu’il y a eu quelques lois modernes d’indemnisation. L’essentiel est le code civil de 1804, les articles 1382 et suivants.

Dans certains domaines on a estimé qu’il fallait des lois d’indemnisations, il y en a eu deux :

  • Loi sur la responsabilité du fait des produits défectueux qui a été codifiée.
  • Loi du 5 juillet 1985 Badinter qui régie les accidents de la circulation (donc pas régie par le code civil).

Dans ces deux grandes lois modernes on distingue souvent deux types d’atteinte : les atteintes aux biens et les atteintes à la personne. On expliquera d’abord les atteintes aux biens et ensuite les atteintes à la personne.

  1. Les atteintes aux biens

Dans les atteintes aux biens, c’est toujours une atteinte au patrimoine (mais l’inverse n’est pas vrai). Un dommage corporel peut être patrimonial mais il n’y a pas d’atteinte aux biens mais à la personne.

On peut avoir deux grands types de dommages :  

Un dommage matériel : c’est la destruction ou la détérioration d’un bien. La voiture, la maison sont démolies. Le dommage aux biens ici est entièrement réparable. On va réparer le préjudice du propriétaire du bien. Il y aura réparation intégrale du préjudice matériel. Par exemple on a une voiture cassé : est ce qu’on va réparer la voiture ou nous donner de l’argent pour en racheter une autre ? Le principe est que si le bien est réparable, la victime peut en demander la réparation sauf si la valeur de cette réparation est beaucoup plus chère que celle de son remplacement. Tout le dommage doit être réparé, y compris les dommages accessoires.

Un dommage purement économique : c’est une dénomination qui vient du droit anglais. C’est par exemple une perte de bénéfice ou une perte de gains. A cause d’un accident qui endommage la devanture de notre boutique, on doit fermer pendant une semaine. On a une perte de profit qui doit être réparée.

  1. Les atteintes à la personne

C’est plusieurs types de préjudice qu’on peut à nouveau classer. Il y aurait d’abord le dommage corporel et ensuite ce qu’on peut appeler le dommage purement moral.

1)      Le dommage corporel 

Le dommage corporel : lorsqu’il y a atteinte à l’intégrité physique de la personne (elle a été tuée). Lorsqu’une personne a été atteinte dans son corps, il va y avoir toute une série de préjudices qui vont découler de cette atteinte à cette intégrité corporelle. Il va y avoir des conséquences pécuniaires et des conséquences psychologiques.

  1. a)      Conséquence pécuniaires

Ce sont les pertes d’argents liées au préjudice corporel. La personne va devoir dépenser certains frais pour aller à l’hôpital. C’est les conséquences patrimoniales du préjudice corporel. Frais d’hospitalisation, médicaux, frais de conseil, d’avocat etc. le préjudice corporel peut conduire à une invalidité ou à une incapacité qui peut être temporaire ou permanente. Par exemple on a un accident de voiture, on en ressort paralysé d’une jambe, c’est une invalidité ou incapacité qui peut être permanente. IPP : invalidité permanente partielle, ITT : invalidité temporaire totale etc.

En droit français, l’évaluation du préjudice réparable relève du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond. Ca veut dire que la cour de cassation ne contrôle pas. Le risque est qu’il y ait des divergences d’appréciation considérable entre les différentes juridictions. Il y a eu une tendance à vouloir faire des barèmes d’indemnisation qui sont fait par des abaques. Mais les juges en France ont l’interdiction de se référer à ces barèmes.

Conséquences sur le revenu de la victime : si l’invalidité ou l’incapacité a conduit à une incapacité de travail, il y a indemnisation de la perte de revenu. On distingue là encore en fonction de si c’est temporaire, permanent etc.

  1. b)     Le dommage moral

Dommage moral : c’est le plus compliqué parce qu’il y a eu une inflation des catégories de préjudice moral. Du coup on a saisi des commissions et deux rapports pour essayer de mettre de l’ordre dans les typologies de préjudice corporel. Ils ont proposé une nomenclature de préjudice réparable en matière corporel.

  • Nomenclature Dintilhac
  • Rapport Lambert-Faivre

Ils proposent deux nomenclatures qui sont en passe d’être adoptés par le législateur mais ils sont aussi très critiqués.

On avait dans le classique d’abord le « pretium doloris » ( : prix de la douleur) qui est les souffrances physiques. Cette souffrance physique est réparable. Il y a la difficulté de savoir si la souffrance se monnaye. Difficulté d’appréciation (combien c’est en euros d’avoir mal). C’est donc les souffrances physiques et morales.

Il y a le préjudice esthétique : lorsqu’à la suite d’un accident une personne est défigurée par exemple. On est dans les conséquences morales du préjudice corporel. Si une personne connue a une cicatrice, ca tombe dans une perte de revenus.

Il y a aussi troisièmement, le préjudice d’agrément : traditionnellement c’est défini comme la perte de la possibilité d’exercer une activité de loisir que l’on pratiquait avant le préjudice et qu’on ne peut plus exercer. C’était souvent loisir ou sport l’agrément. C’est l’aspect moral du préjudice corporel, c’est extrapatrimonial. Si on est violoniste et qu’on se coupe un doigt, c’est l’aspect pécuniaire. Si c’est professionnel c’est perte pécuniaire. Si c’est loisir c’est agrément.

La cour de cassation a élargi la notion pour y inclure toutes les atteintes non plus précisément à un loisir mais à toutes les activités de la vie courante, agrément normaux de l’existence. Par exemple altération de la capacité d’accomplir des gestes banaux. C’est tous les troubles de la vie quotidienne. L’assemblée plénière de la cour de cassation a essayé de précisé la définition du préjudice d’agrément et elle en a donné une définition plus précise (voir fiche page 24) dans un arrêt du 19 décembre 2003.

Arrêt du 19 décembre 2003 : le préjudice d’agrément est le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressentis dans les conditions d’existence. En réalité toute cette évolution de cette matière a été liée à une autre question accessoire : la question des recours des tiers payeurs. En fait c’est une question de droit de la sécurité sociale. Un tiers payeur est un tiers qui vient payer à la place de quelqu’un d’autre ou qui vient avancer une certaine somme. Si on a un accident de la circulation, c’est la sécurité sociale qui fait l’avance de tous les frais. La sécurité sociale va exercer une action pour récupérer les sommes qu’elle a avancée, c’est le recours des tiers payeurs.

On a la victime, le tiers payeur et l’auteur du dommage. Le tiers payeur a fait l’avance de certaines sommes à la victime. On dit quand un tiers paye à la place d’autrui de façon générale, on dit qu’il y a une subrogation. On dit que le tiers payeur est subrogé dans les droits de la victime vis-à-vis de l’auteur. Ca veut dire être mis à la place de quelqu’un. C’est comme si c’était la victime qui agissait. La victime avait une action en réparation contre l’auteur. Le tiers payeur peut agir contre l’auteur pour récupérer ce qu’il a avancé. Pendant très longtemps le juge évalue souverainement le préjudice sans avoir à motiver ni à dire des catégories. Le tiers payeur va avoir droit à une part puisqu’il a avancé de l’argent. La victime a aussi droit à une part de l’enveloppe du juge. Donc la victime et le tiers payeur agissent tous les deux contre l’auteur. L’enveloppe des dommages et intérêts qui sont donnés n’est pas énorme (si on a un enfant qui meurt on a 40 000€). Et donc en général il ne restait plus rien pour la victime.

Il a eu une première loi en 1973 qui a obligé les juges à distinguer dans l’enveloppe au moins 2 sommes : quelle est l’assiette soumise au recours des tiers et l’assiette non soumise au recours des tiers payeurs. Ca veut dire que la sécurité sociale ne pouvait se payer que sur la part soumise au recours. Cette réforme a obligé les juges à motiver.

Mais ça n’a pas suffit quand même car l’essentiel de l’assiette était soumise au recours. Il y a eu une réforme avec une loi du 21 décembre 2006 qui a imposé le « recours poste par poste ». ça signifie que désormais le tiers payeur ne peut exercer un recours que sur un poste de préjudice dont elle a fait l’avance. Ça signifie que le juge doit désormais non plus donner une enveloppe globale en divisant en deux, mais donner les chiffres poste par poste. On donne tant pour le pretium doloris, tant pour le préjudice d’agrément etc. Du coup la sécurité sociale ne peut prendre en poste que si elle démontre qu’elle a fait l’avance de ce poste. Sur certains postes, le préjudice d’agrément avait été très gonflé et du coup il y avait des recours possibles des tiers payeurs sur ce poste et ca conduisait à ce que la victime n’ait plus d’indemnisation.

Alors que depuis la réforme qui oblige le recours poste par poste et depuis la nouvelle nomenclature, il y a eu une influence et l’un des postes principaux proposés par ce rapport est le déficit fonctionnel (c’est un des postes clé des préjudices corporels) qui comprend toute une série de préjudices généraux liés au préjudice corporel. Ce déficit fonctionnel faisait double emploi avec le préjudice d’agrément, en comprenant les troubles généraux d’existence.

Du coup la cour de cassation en est revenu dans un arrêt du 28 mai 2009 (page 25) à une interprétation restrictive du préjudice d’agrément qui désormais reprend sa définition initiale, c’est-à-dire vise uniquement l’indemnisation de l‘impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique, sportive ou de loisir.

Arrêt du 19 décembre 2003 : le préjudice d’agrément est le préjudice subjectif de caractère personnel résultant des troubles ressenties dans les conditions d’existence. Cette formule s’applique même aux personnes qui se trouvent dans un état végétatif (dans le coma). C’est subjectif, donc personnel, donc pas soumis au recours des tiers payeurs.

Loi de 1973 : distingue personnel pas soumis au recours des tiers payeurs, et soumis au recours. Dans l’arrêt de 2009 on en revient à une interprétation très restrictive du préjudice d’agrément : loisir et sport. Mais du coup ca n’est pas soumis au recours des tiers payeurs.

Donc jusqu’à présent, si on récapitule : les conséquences morales du préjudice corporel :

  • pretium doloris
  • préjudice esthétique
  • préjudice d’agrément qui est loisirs et sports.

Et ca n’est pas soumis au recours des tiers payeurs ! On a trois préjudices personnels moraux du préjudice corporel non soumis au recours des tiers payeurs.

Plus récemment est apparu dans les années 2000 ce qu’on appelle aujourd’hui des dommages de masse. On voit apparaitre des préjudices de masse dans l’affaire du sang contaminé dans les années 1980. Cela a été démontré qu’on savait que si on ne chauffait pas le sang contaminé ca contaminerai les autres. S’il y a un micro-dommage, quelqu’un agit au nom de tout le monde, c’est très efficace pour les consommateurs, ca n’existe pas en France. Il y a aussi des dommages de masse. Dans les années 90 il y a eu toutes ces contaminations, les plus graves étant celles du virus du SIDA et hépatite C. La cour de cassation a créé dans les années 2003-2006-2009 le préjudice global qui est un préjudice de contamination. C’est les préjudices qui sont consécutifs à la déclaration de la maladie. Pour le SIDA on peut être séropositif mais ne pas avoir déclaré la maladie encore. C’est déclarable mais ca n’est pas le même préjudice, pareil pour l’hépatite C. il faut retenir 2003 et 2009 pour le préjudice d’agrément !

Arrêt du 30 juin 2005 : préjudice d’établissement a été défini comme « la perte d’espoir et de chance normale de réaliser un projet de vie familiale ». On donne comme exemple se marier, fonder une famille, faire des enfants. Il y a donc des demandes de nouveaux préjudices et la cour de cassation leur donne un nom.

Dernier préjudice qui a tout bouleversé : le déficit fonctionnel. On est toujours dans l’aspect moral du préjudice corporel. Dans le rapport Dintilhac, le déficit fonctionnel est défini comme « un préjudice extrapatrimonial découlant d’une incapacité constatée médicalement qui établit que le dommage subi a une incidence sur les fonctions du corps humain de la victime ».

On appelle fonctionnel car cela a une incidence sur les fonctions du corps humain. Le rapport dit que ca comprend non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime mais aussi la perte de la qualité de la vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après consolidation. Ca se veut le poste central du préjudice moral mais c’est défini de façon très large. Et c’est pour cela que la cour de cassation s’est dit que si elle absorbe la catégorie déficit fonctionnelle, elle ne peut pas garder le préjudice d’agrément défini comme cela qui était soumis au recours des tiers payeurs. On a donc le préjudice d’agrément non soumis au recours des tiers payeurs.

Arrêt de 2009 : voir attendu de principe.

Finalement c’est très large et ca a été critiqué par certains auteurs. C’est compliqué du au fait qu’on le soumet partiellement au recours des tiers payeurs. Il y a le risque qu’il soit vidé par le tiers payeur.

Récapitulation :  

1973 : distingue les postes personnels non soumis à recours et soumis à recours. Mais ca n’a pas suffit.

2006 : distinction poste par poste.

Maintenant on a dans les préjudices moraux résultant du dommage corporel : pretium doloris, préjudice d’esthétique, préjudice d’établissement, préjudice d’agrément, préjudice de contamination, préjudice déficit fonctionnel permanent et temporaire.

Dans l’atteinte à la personne on a dommage corporel avec des conséquences pécuniaires et des dommages moraux résultant du préjudice corporel avec les 6 qu’on a vu.

2)      Le dommage purement moral 

Il y a aussi le dommage purement moral : a priori on le met dans l’atteinte à la personne parce que c’est une souffrance psychologique, une souffrance morale. Mais on n’est plus dans le dommage corporel et donc la souffrance morale n’est plus liée à une atteinte à l’intégrité corporelle. C’est une souffrance morale pure qui peut accompagner un dommage aux biens.

Préjudice d’affection : souffrance morale par ricochet, du fait de l’accident subi par un être cher. Perte d’un être cher, souvenirs de famille etc. il y a aussi tout ce qui touche l’atteinte à l’honneur ou à la diffamation. Diffamation : imputation d’un fait précis et qui porte atteinte à l’honneur. Injure : insulte générale. Dans les deux cas on peut obtenir réparation de l’atteinte à l’honneur, mais c’est compliqué.

Affaire Lunus : un cheval était mort et son propriétaire avait demandé réparation du préjudice d’affection. En matière de droit du travail, un salarié avait eu 1€ seulement pour l’honneur. La cour de cassation a dit non, les juges doivent évaluer son dommage.

D’habitude les préjudices moraux étaient des sentiments moraux répertoriés mais il peut y en avoir d’autre. Il y a eu des arrêts qui sont allé un peu plus loin. Un magasine avait publié une photographie d’Alain Delomb et son fils mineurs. La mère avait refusé qu’on voit son fils dans les journaux. La mère a demandé réparation de son préjudice. Elle a obtenu réparation : préjudice moral direct et certain éprouvé par la mère et tiré de la méconnaissance de ses prérogatives d’autorité parentale. C’est un préjudice morale à elle, ce n’est pas un préjudice moral par ricochet de l’enfant. Ici ce n’est pas un préjudice moral répertorié.

Arrêt du 11 mai 2010 : il consacre l’existence d’un préjudice spécifique d’angoisse. C’est la première fois qu’on le nomme et qu’on dit que c’est un préjudice spécifique. Et donc on le consacre comme préjudice à part. C’est des salariés d’une société où il y a eu de l’amiante et il y a eu toute une série de salariés qui ont été malade. Il y a eu des salariés qui ont travaillé 30 ans dans une société où il y avait de l’amiante, ils ne sont pas malades, mais ils ont demandé réparation de leur préjudice d’anxiété. Dans cet arrêt, la cour de cassation consacre que le préjudice est caractérisé et qu’il y a un préjudice spécifique d’angoisse.

Avant il y a eu toute une série d’arrêt. Par exemple les antennes de téléphonie mobile. On ne sait pas si ca cause des dommages à une personne et donc on invoque le principe de précaution. Pour téléphonie mobile, la cour de cassation ne l’a jamais admis. Mais la cour d’appel l’avait admis. Ca peut aller très loin.

Arrêt 19 décembre 2006 : Une personne s’était fait implanter une sonde et ensuite on a appris que les sondes avaient un risque de défectuosité. Il ne savait pas si la sienne était défectueuse, il y avait une angoisse.

Dans les pays étrangers comme en Allemagne et Italie, ce n’est pas une clause générale de tous les dommages réparables mais on part d’une liste d’intérêts protégés. La cour de cassation italienne est allée très loin : elle dit que les intérêts protégés est notamment ce qui est protégé dans la constitution. Or dans la constitution italienne, on a beaucoup de droits fondamentaux et notamment le droit à la santé. Et à partir de ce droit à la santé on a que l’atteinte à la santé est pratiquement toujours un préjudice réparable. Elle a finis par admettre un dommage existentiel. En italien ca n’a pas la connotation métaphysique comme nous, pour eux c’est plutôt les troubles de l’existence quotidienne.

  • Arrêt du talon de la mariée : dommage existentiel.
  • Coupure d’électricité : dommage existentiel.

En 2008 la cour de cassation italienne a redéfini le dommage existentiel.

Aux EU les règles sont beaucoup plus restrictives que chez nous. Le préjudice moral aux EU est très restrictif, il faut avoir notamment touché la personne. Tout procès en matière de responsabilité civile c’est un jury populaire qui donne les dommages et intérêts. Comme il y a une très mauvaise sécurité sociale, les procès en responsabilité civile compensent un peu l’absence d’assurance sociale. En France et Italie on voit apparaitre un peu cela. C’est un moyen d’avoir un peu d’argent.

  1. Les conditions de réparation du dommage (qui ne sont pas une limitation des types de préjudice) ou les caractères du dommage réparable

Sur les types de dommage il n’y a pas de typologie de conditions. Mais il y a des conditions pour que le dommage soit réparé. Il y en a trois.

  • Le dommage doit être certain
  • Le dommage doit être direct
  • L’intérêt lésé doit être légitime

Le dommage doit être certain : un dommage certain s’oppose à un dommage éventuel, un dommage dont on n’est pas encore certain qu’il va survenir. Ca n’empêche pas de réparer les préjudices futurs dès lors qu’on est certain qu’ils vont survenir. Par exemple si une personne est handicapée à vie, elle peut obtenir une somme pour l’assistance d’une personne dans le futur. Ca n’empêche pas non plus la réparation de la « perte d’une chance » qui est même assez fréquemment demandé devant les tribunaux. L’hypothèse classique est qu’on a un étudiant qui s’apprête à passer un examen ou un concours, et il a un accident et il ne peut pas se présenter à l’examen ou au concours. On peut aussi avoir un avocat qui ne présente pas le dossier à temps et l’action est prescrite. Il y a une incertitude mais on est certain d’un dommage que la chance n’a pas pu être tentée. Pour réparer ce dommage réparable, les juges font un calcule de probabilité, c’est-à-dire qu’ils n’indemnisent pas à hauteur de tout le gain qu’on aurait eu si on avait réussi. On pondère le gain espéré par la probabilité de gain. On a beaucoup utilisé la perte de chance en matière médicale : un médecin qui ne donne pas le bon médicament, on va le condamner à indemniser la perte de chance de survie.

Le dommage doit être direct : il y a deux hypothèses principales. Premièrement, c’est ce qu’on appelle la question des préjudices en cascade. Un éleveur qui achète une vache qui est malade qui contamine tout le troupeau. On a un fait générateur initial d’où découle un premier, deuxième, troisième dommage etc. Au bout d’un moment le juge va dire stop. Un homme handicapé par son accident, ne pouvait plus quitter son lit, il y a eu un incendie et il est mort. Deuxièmement, les prédispositions de la victime. L’exemple classique du droit français est le borne à qui on crève l’autre œil, il devient aveugle. Les anglais ont la formule de l’homme qui a un crâne comme une coquille d’œuf : on lui donne un tout petit coup et les conséquences sont démesurées. En droit français les prédispositions de la victime ne sont pas une cause d’exonération pour l’auteur. Même s’il y avait des prédispositions de la victime, tout le dommage est considéré comme direct.

La nécessité que l’intérêt lésé soit légitime : ce n’est pas le dommage qui doit être légitime. On va vérifier quand même que l’intérêt lésé est protégé par le droit. Avant 70 le préjudice de la concubine n’était pas juridiquement protégé. C’est redevenu une condition au sens où parfois, la cour de cassation et le législateur ont décidé que certains préjudices n’étaient pas réparables. La question s’est surtout posée en droit français à propos de la naissance d’un enfant.

Arrêt de 1991 : femme qui voulait avorter et va voir le médecin. Mais l’enfant est toujours là, il est normal et donc on peut plus avorter. Elle demande réparation de son préjudice. L’existence d’un enfant ne peut constituer un préjudice préalable.

Arrêt 17 novembre 2000 Perruche : une mère qui avait une petite fille de 5 ans qui était enceinte. La mère a eu la rubéole. Elle fait une analyse et suite à une faute médicale (le premier résultat a dit qu’elle l’avait, le deuxième non, et le troisième on lui a dit qu’elle ne l’avait pas). L’enfant est né avec un handicap très lourd. Les parents ont fait un procès pour demander réparation de leur propre préjudice : moral et matériel.

La cour de cassation l’a admis. Les parents ont aussi demandé réparation du préjudice au nom de leur enfant. Là la cour d’appel et la cour de cassation a admis que les parents pouvaient demander réparation au nom de l’enfant : il y a un lien de causalité avec la faute du médecin. Et la cour de cassation l’a admis, ce qui a été très critiqué par une partie de la doctrine. La doctrine a dit que finalement on répare le préjudice d’être né. Puisque l’enfant, si la mère avait su elle aurait avorté. Mais on répare le préjudice résultant du handicap. Le parlement a adopté une loi du 4 mars 2002 : nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de la naissance. Mais c’était pas du tout le problème de l’espèce.

Le préjudice réparable est celui qui sera réparable quelque soit le fondement de la demande en responsabilité.

Résumé : est réparable tout type de préjudice en droit français. toute souffrance est audible devant les tribunaux. La doctrine a fait une typologie qui est reprise par les juges. Depuis la loi de 2006 le recours des tiers payeurs se fait poste par poste ce qui oblige les juges à motiver d’avantage.

Atteinte aux biens (préjudice matériel ou préjudice économique pur) et atteinte à la personne (soit un dommage corporel soit une souffrance psychologique pur ; aspect patrimonial (perte de revenu, invalidité) et moral ( pretium doloris, préjudice esthétique, préjudice d’agrément qui n’est plus qu’une perte de capacité de loisir ou de sport, préjudice de contamination qui est une enveloppe globale, préjudice d’établissement et le déficit fonctionnel qui est une atteinte aux conditions de vie normale). Déficit fonctionnel et préjudice fonctionnel c’est pareil.

Depuis 2009 le recours des tiers payeurs sur les préjudices d’agrément n’est plus susceptible de recours. Donc tiers payeurs que pour le préjudice fonctionnel. Le préjudice d’agrément est réservé exclusivement à la victime.

Avant consolidation c’est tout ce qui est temporaire, après c’est devenu définitif.

 

En droit français c’est très rare qu’on dise qu’un préjudice ne soit pas réparable en soi. Le seul exemple qu’on connaisse est l’arrêt Perruche. Ca parait très souhaitable que le fait d’être né ne soit pas réparable.

Autre cas où la cour de cassation décide quand même que le préjudice n’est pas réparable en soi : la perte des avantages illicites. On a un atelier clandestin où on les emploie et notre atelier brule, il était pas déclaré. Le préjudice n’est pas réparable. Une victime ne peut obtenir la réparation de la perte de ses rémunérations que si celles-ci sont licites.

Chapitre 3 : Le lien de causalité  

Le sens juridique s’éloigne du sens commun. La difficulté est de définir le lien de causalité au sens du droit de la responsabilité civile.

  1. La définition du lien de causalité

Pendant très longtemps et même encore maintenant la cour de cassation ne donne pas à proprement parlé de définition du lien de causalité. La faute il y en a une définition et c’est contrôlé. Le dommage n’est pas contrôlé mais les dommages réparables sont quand même définis. Ici les juges ont une marge d’appréciation et ils s’en servent souvent comme instrument de politique jurisprudentielle.

Exemple : un homme qui avait eu un accident de la circulation dont il était sorti assez lourdement handicapé puisqu’il a eu 3 enfants après l’accident. Les enfants ont fait une action en responsabilité contre l’auteur de l’accident en disant qu’ils n’ont pas pu avoir de vie normale avec leur père. Il y a un peu un lien de causalité quand même. On aurait du dire que ce n’est pas un préjudice réparable ou le préjudice est trop indirect, la cour de cassation a dit qu’il n’y a pas de lien de causalité alors qu’en vérité il y en a un. Mais la cour de cassation ne veut pas se lier.

Dans des arrêts récents elle commence à donner des éléments de définition. C’est la doctrine qui a proposé plusieurs définitions théoriques du lien de causalité. On peut en retenir principalement deux.

Premièrement, la théorie de l’équivalence des conditions : on dit qu’un fait est la cause d’un dommage au sens de l’équivalence des conditions lorsque sans ce fait le dommage ne serait pas survenu. On dit donc que le fait a été une condition sine qua non du dommage. On fait une appréciation rétrospective et on essaye de se demander ce qui se serait produit si la faute n’avait pas été commise. Si le dommage se serait quand même produit, il n’y a pas de causalité. Si lorsqu’on enlève la faute le dommage ne se serait pas produit, la faute est la cause du dommage. On parle de la théorie de l’équivalence des conditions car avec cette théorie un dommage peut avoir plusieurs causes qui sont toutes considérées comme équivalentes si elles ont toutes des conditions sine qua non. Le fautif pourra être condamné à réparer l’intégralité du dommage.

Deuxièmement la théorie de la causalité adéquate : on dit qu’un fait est la cause d’un dommage au sens de la causalité adéquate lorsque ce type de fait provoque en général ce type de dommage. C’est plus le sens commun de la causalité. Par exemple la causalité au sens physique.

Revirement de jurisprudence en 2010 : la responsabilité médicale n’est plus une responsabilité contractuelle mais délictuelle.

Le vaccin contre l’hépatite B, des personnes ont développés une sclérose en plaque. Ils ont fait un procès en disant que c’est ce vaccin qui leur avait transmis la sclérose en plaque. Tous les médecins n’étaient pas d’accord. La question porte sur la causalité. Attention aux cas pratiques. Il faut dire quel est le texte applicable sur quelle responsabilité, si on a 1383 il faut les trois conditions, et sur le lien de causalité il faut donner les deux définitions.

Une personne a un accident de la circulation grave, elle doit aller à l’hôpital et elle est contaminée par l’hépatite C. La question consiste à savoir s’il y a un lien de causalité entre le fait initial et la contamination. Si l’accident n’avait pas eu lieu, elle n’aurait pas été contaminée, l’accident a été une condition sine qua non, et donc on peut dire qu’il y a un lien de causalité au sens de l’équivalence des conditions. Mais on ne peut pas dire que quand on a un accident on est contaminé au cours d’une transfusion et donc au sens de la causalité adéquate on ne peut pas retenir un lien de causalité. Quand on en est là, on a un résultat différent mais on sait que dans ce type d’affaire la jurisprudence a tendance à retenir un lien de causalité et donc on peut penser qu’en l’espèce le lien de causalité sera retenu.

La cour de cassation n’utilise pas la formulation de ces deux théories. Mais parfois elle explique pourquoi elle retient la causalité.

Arrêt du 27 janvier 2000 : quelqu’un qui avait eu un accident de la circulation, il a été à l’hôpital, il est devenu aveugle. L’intervention qui a entrainé le trouble oculaire a été rendu nécessaire par l’accident de la circulation et donc ce trouble ne serait pas produit en l’absence de l’accident.

En droit positif la cour de cassation, quand dans un premier temps l’équivalence des conditions a fait qu’il y a eu un lien de causalité, quand il y en a beaucoup elle va faire un trie pour la responsabilité définitive en fonction des événements à l’origine. On retient que les fautes à l’origine du dommage. Mais parfois il y a des fautes de gravité différente. Une personne téléphone dans une cabine téléphonique, il oublie son chéquier, quelqu’un s’en empare et donc il y a des dommages.

Théorie de la causa proxima : la cour de cassation ne va retenir que la cause la plus proche du dommage.

La causalité est une façon d’appliquer une politique jurisprudentielle selon qu’on retient ou non la causalité.

Exemple : une personne va à l’hôpital, on lui dit qu’il a un cancer pour 6 mois, et puis il ne meurt pas. Il demande au médecin réparation de son dommage.

  1. La preuve de la causalité

Ca a conduit à des arrêts assez novateurs. Si on applique les règles de droit classique, c’est au demandeur qu’incombe la charge de la preuve. C’est à la victime de montrer que les conditions de mise en œuvre de l’article 1382 sont réunies. Il doit démontrer qu’il y a un lien de causalité et ce de façon certaine. Le risque de la preuve est lié à la charge de la preuve. Si quelque chose n’est pas prouvé, le risque pèse sur le demandeur. Ça devrait profiter au défendeur, à celui qui est poursuivi en responsabilité. Tout doute devrait peser sur la victime.

La difficulté a été dans les affaires médicales car il y a eu dans certaines affaires assez graves des hésitations scientifiques. Est-ce que le vaccin contre l’hépatite B provoque ou non la sclérose en plaque ? Il y a eu toute une série d’affaire médiatique. Le distilbène était un médicament qu’on donnait aux femmes qui faisaient des fausses couches. On s’est rendu compte 15-20 ans après, que leurs filles avaient des males formations de l’utérus et elles étaient stériles. La causalité difficile à trouver était qu’il y a eu plein de fabriquant de distilbène et donc il faut savoir qui on poursuit, la mère ne se souvient plus de la marque de médicament.

Affaires de transfusion sanguine : quand on a quelqu’un qui découvre qu’il est séropositif, qu’est ce qui lui a causé ca ? La preuve de la causalité est très compliquée. Le risque de la preuve pèse sur la victime.

La cour de cassation a voulu chercher des façons d’aider la victime. On a trois exemples de domaines où la cour de cassation a en faveur de la victime posé des règles pour faciliter la preuve de la causalité : les affaires de transfusion dans les années 80, puis dans les années 2006-7-8 les affaires d’hépatite B et de sclérose en place, et récemment l’affaire du distilbène.

Transfusion : la difficulté était de savoir quand une personne avait eu plusieurs transfusions, laquelle était à l’origine de la contamination. A l’époque il n’y avait pas de traçabilité des produits. La traçabilité est pour répondre à la question du lien de causalité. La victime pouvait démontrer qu’il n’y avait aucune autre cause possible de contamination, c’est le cas de la victime qui n’a eu qu’une seule transfusion, la cour de cassation admettait ce raisonnement. Pour les hémophiles c’était un peu compliqué, pareil pour ceux qui avaient eu plusieurs transfusions. La cour de cassation a même fini par poser dans ses affaires de transfusion une présomption de causalité : ca veut dire qu’elle a renversé la charge de la preuve, c’est une présomption simple réfragable. C’est au défendeur de prouver qu’il n’y a pas de lien de causalité.

Arrêt du 17 juillet 2001 et 9 mai 2001 : voir attendu de principe. La cour de cassation admet une présomption qui favorise la victime mais qui suppose de la part de la victime la preuve de deux choses mais qui sont plus faciles à prouver que la causalité. Premièrement, prouver que la contamination est survenue à la suite de transfusion. Deuxièmement, prouver qu’elle n’a aucun mode de contamination qui lui soit propre (il n’y a pas d’autre cause possible de contamination). Si elle prouve les deux on a une présomption de causalité. On doit donc prouver qu’il n’y a pas de lien de causalité. Cette présomption a été assez largement étendu par la cour de cassation dans les affaires de contamination. Mais il faut démontrer quand même un minimum.

Exemple : on a un éboueur qui ramassait les poubelles, il s’était piqué avec des seringues. Il a été séropositif et il a dit que c’était à cause d’un sac. C’était des sacs poubelles d’un médecin. La cour de cassation soutient la cour d’appel qui a retenu la responsabilité du médecin qui les avait jeté alors même que le médecin avait fait valoir qu’aucun de ses clients n’étaient séropositifs. L’expert disait que rien ne permettait d’exclure que la contamination était due à la piqure. C’est au médecin qui doit démontrer qu’il n’est pas responsable.

Affaire de l’hépatite B et la sclérose en plaque : au début la cour de cassation a dit que les experts disaient que rien ne permet de démontrer un lien. Dans les années 2000 il y a eu plein d’arrêts qui ont refusés la causalité. Il y a eu un arrêt en 2006 où la sclérose en plaque est apparue très peu de temps après. On dit souvent que concomitance n’est pas causalité.

La cour de cassation a fini par trancher, les deux arrêts du 22 mai 2008 : le CE avait déjà statué dans le même sens quelques temps avant, elle a allégé la charge de la preuve. Depuis cet arrêt la cour de cassation se contente de « présomption grave, précise et concordante ». L’arrêt de la cour d’appel avait débouté la demande. Attendu selon la cour de cassation que si l’action en responsabilité du fait d’un produit défectueux (il faut un défaut, un dommage et un lien de causalité) exige la preuve du dommage, du défaut, et du lien de causalité, une telle preuve peut résulter de présomption pourvu qu’elle soit grave, précise et concordante. Cet arrêt admet pour la première fois une preuve non pas directe de la causalité, mais on se contente de présomption dès lors qu’elles sont graves, précises et concordantes.

Affaire du distilbène : la difficulté est qu’il fallait savoir quel est le médicament qui a été pris et donc quel est le laboratoire responsable dans telle affaire précise. C’est une question d’imputabilité. Il y a un accord du corps médical pour dire que le distilbène provoque des malformations. Il y a un doute sur la causalité dans le sens de l‘imputabilité.

Arrêt du 24 septembre 2009 : revirement de jurisprudence. La difficulté est de démontrer quel est le laboratoire. La cour de cassation raisonne en disant que la victime doit prouver que sa mère a pris du distilbène et que donc la fille a été exposée à la molécule litigieuse. Dès lors qu’on prouve cela on peut poursuivre n’importe quel laboratoire qui devra démontrer qu’il n’est pas à l’origine du dommage. Renversement de la charge de la preuve.

Aux EU ils ont résolus différemment. Ils ont élaborés la théorie des parts de marché. Ils ont dit qu’il y avait 20 fabriquant à l’époque. Dans chaque affaire celui qui avait 20% de part de marché prendra 20% de responsabilité.

III.    La pluralité des causes 

Ca veut dire que quand on a une faute de l’auteur d’un dommage, il y a autre chose. Il n’y a pas que la faute de l’auteur qui est poursuivi. Il y a trois autres causes possibles, autre que la faute de l’auteur.

  1. La force majeure

La force majeure est une cause d’exonération de responsabilité parce que la force majeure va rompre le lien de causalité : il n’y a pas de lien de causalité entre la faute et le dommage. C’est donc une rupture du lien de causalité.

En droit la définition de la force majeure est très précise et très rigoureuse. Pour qu’il y ait cas de force majeure au sens du droit il faut que l’évènement présente trois conditions cumulatives. Ça peut être un fait de la nature, comme un cyclone ou une tempête. En général on appelle ça le « cas fortuit ». Mais le cas de force majeure ca peut être aussi le fait d’un tiers.

Trois caractères de la force majeure :  

  • Imprévisibilité
  • Irrésistibilité
  • Extériorité

Imprévisible : ça signifie qu’on ne pouvait pas prévoir l’événement, on ne pouvait pas s’y attendre.

Irrésistibilité : un événement irrésistible est un événement impossible à éviter.

Extériorité : c’est-à-dire que l’événement doit être extérieur à la sphère du débiteur qui l’invoque. Extérieur à la personne ou aux biens de celui qui l’invoque. Sinon on doit assumer. Par exemple la grève d’une entreprise n’est pas extérieure à l’entreprise. Si c’était une grève nationale, ça échappait à l’employeur et donc il peut dire que c’est un cas de force majeure.

Il y a eu des évolutions sur l’ensemble de ces conditions.

D’abord il y a eu une tendance de la jurisprudence à fusionner les deux premières conditions d’irrésistibilité et d’imprévisibilité. En effet, dans certaines affaires le dommage avait été prévu parce qu’il était prévisible mais le défendeur/débiteur avait fait tout ce qui était en son possible pour éviter le dommage mais il n’avait pas pu l’éviter quand même. Par exemple on prévoit un tremblement de terre ou une tempête exceptionnelle. Une personne défait son chapiteau, il le range bien mais le vente arrache tout. Les juges ont dit que ce qui compte est l’inévitabilité. Si la prévision n’a pas empêché la réalisation du dommage malgré toutes les précautions prises, on peut invoquer un cas de force majeure.

Arrêt du 1er octobre 1997 : l’irrésistibilité de l’événement est à elle seule constitutif de la force majeure lorsque sa prévision ne saurait lui permettre d’en empêcher les effets…

Il y avait une divergence entre plusieurs chambres de la cour de cassation et donc on a saisi l’assemblée plénière de la cour de cassation. Il y a eu deux arrêts, un en matière contractuelle et un en matière délictuelle.

Arrêt page 48: la RATP, on a trouvé sur une rame le corps sans vie d’une jeune femme, aucun témoin. L’époux de la victime agit et demande que la RATP soit condamnée à réparer le préjudice. La cour d’appel rejette et la RATP dit qu’il y a force majeure. Si la faute de la victime n’exonère totalement le gardien qu’à la condition de présenter les caractères de force majeure, c’est satisfait s’il y a imprévisible et irrésistible. Il n’y a pas extérieur mais c’était forcément extérieur à la RATP. Ayant retenu que la chute de la femme sur la voie ne pouvait s’expliquer (pas d’autre cause possible) que par l’action volontaire de la victime, que le comportement de celle-ci n’était pas prévisible car aucunes personnes de la RATP ne pouvait prévoir son comportement, il n’avait été constaté aucun manquement aux règles de sécurité (on parle de faute de la RATP et donc influence la cour de cassation) et que celui-ci ne saurait se voir reprocher de ne pas prendre toute mesure contre le passage de personnes voulant se suicider.

Il y a eu plein d’arrêts sur la SNCF. Par exemple une jeune homme qui habitait, il était monté à Rouen dans un train corail, il a ouvert la porte et il a sauté à sa gare, le train ne s’arrêtait pas.

Arrêt 13 juillet 2006 page 45: le comportement de la victime ne présentait pas le caractère de force majeure pour exonérer la responsabilité de la SNCF.

Arrêt de 2010 : une jeune femme était montée dans un train de nuit. Elle avait un wagon couchette. C’était verrouillé par rapport aux autres wagons. Elle est allée aux toilettes elle a été attaquée par quelqu’un qui l’a tué. La personne avait déverrouillé la porte. La cour de cassation dit qu’il n’y a pas de force majeure : la SNCF n’avait pas tout fait pour qu’il y ait des personnes qui accèdent aux wagons.

Quand il y a un accident de la circulation, le cas de force majeure n’est plus une cause d’exonération de responsabilité.

La cour de cassation, quand c’est RATP et SNCF, dit toujours qu’ils sont responsable, il n’y a jamais force majeure sauf quand il y a suicide. La force majeure n’est pas exonératoire, mais le suicide est exonératoire.

Arrêt du 14 avril 2006 : une entreprise qui devait fabriquer une pièce particulière (!) pour son client. Un bon commentaire d’arrêt est un commentaire où l’on commente les faits. L’autre fait déterminant est que c’était aussi une pièce très difficile à fabriquer et il y avait un salarié qui était très spécialisé pour le faire. Le salarié va voir un médecin et découvre un cancer généralisé et en 1 mois il était mort, il ne fabrique pas la pièce. L’entreprise ne peut pas livrer la pièce et il dit force majeure. D’habitude on disait que c’est pas extérieur à l’entreprise et donc ca n’est pas un cas de force majeure. Or ici on a retenu la force majeure. Certains auteurs ont dit que c’était la suppression d’extériorité. Là c’était inévitable, seul le salarié pouvait le faire. Même si c’était intérieur, on ne pouvait quand même rien faire et donc ca ne supprime pas vraiment la condition d’extériorité.

Les effets de la force majeure sont radicaux. La force majeure fait disparaitre la responsabilité personnelle. La force majeure est le système du tout ou rien : soit l’événement présente les conditions de la force majeure et il y a une exonération totale, soit il n’y a pas les conditions et donc aucune exonération totale. Si l’événement de la nature ne présente pas les caractères de la force majeure, il n’y a pas d’exonération.

  1. Le fait de la victime

Ça peut être un fait de la victime qui engage la responsabilité de la victime sur un autre fondement que 1382 : par exemple la victime est partiellement responsable parce qu’elle est responsable du fait d’une chose. On parle de fait de la victime de nature à entrainer sa responsabilité.

Ca peut conduire à une exonération partielle de l’auteur du dommage. Exemple de Derguini, Lemaire. Jamais exonération totale sauf si la faute de la victime remplie les conditions de la force majeure. Donc si le fait non fautif de la victime remplie les caractères de la force majeure il y a exonération totale de l’auteur. En revanche sinon il faut que la victime soit partiellement responsable, il faut que le fait de la victime engage sa responsabilité, pour qu’on puisse diminuer la responsabilité.

Avant la loi de 1985, les accidents de la circulation était de la responsabilité délictuelle. Très souvent quand quelqu’un est victime de la circulation, il y a au moins une faute de négligence qu’on peut lui reprocher. Les compagnies d’assurances faisaient des procès systématiques en invoquant une faute de la victime qui ne touchait rien pendant 10 ans 15 ans.

Arrêt Desmares de 1982 : la cour de cassation s’est énervée, elle a dit que la faute de la victime n’est plus exonératoire sauf si elle remplie les caractères de la force majeure. La cour de cassation ne pouvait pas dire que c’était seulement en matière d’accident de la circulation.

Ubi lex non distinguit nec nos distinguere debemus : où la loi ne distingue pas, nous non plus ne devons pas distinguer.

Dans cet arrêt la cour de cassation a dit que la faute de la victime n’était pas exonératoire, et ça valait pour tous les autres domaines. On a dit que cet arrêt était une provocation du législateur. Il faut savoir à hauteur de combien elle est exonératoire. En général on fait une appréciation selon la gravité respective des fautes.

Arrêt de 1981 : la cour de cassation a jugé que la faute de la victime directe est opposable également à la victime par ricochet. Si la victime par ricochet demande réparation de son dommage par ricochet, l’auteur peut lui opposer la faute de la victime pour diminuer son indemnisation.

  1. Le fait d’un tiers

Lorsque l’auteur d’un dommage invoque, pour s’exonérer de sa responsabilité, le fait d’un tiers, ca veut dire qu’il y a un coauteur. Si le fait d’un tiers a contribué à réaliser un dommage, il y a deux auteurs du dommage. Cette question du fait du tiers se pose quand il y a plusieurs coauteurs du fait du même dommage.

Supposons que la victime poursuivre le premier auteur, ce dernier va dire qu’il y avait une autre personne qui était avec lui et donc invoquer le fait du tiers pour cause d’exonération. En matière de responsabilité civile il y a une règle par faveur de la victime, on a posé le « principe de responsabilité in solidum ». Lorsqu’on a plusieurs coauteurs d’un même dommage ils sont toujours responsables in solidum.

Principe de responsabilité in solidum : on a deux temps chronologiquement.

Premier temps on a un rapport d’obligation à la dette. C’est de savoir qui est obligé à la dette vis-à-vis de la victime. Responsabilité in solidum répond que tous les coauteurs sont obligés vis-à-vis de la victime au paiement de l’entière dette. Ca veut dire que la victime dans le rapport d’obligation à la dette peut poursuivre l’un quelconque des coauteurs et lui demander le paiement total de sa dette. C’est le rapport entre les coauteurs d’une part et la victime d’autre part.

Deuxième temps qui est un rapport de contribution à la dette. Qui va contribuer au paiement de cette dette ? C’est le rapport des coauteurs entre eux. Chacun va contribuer à la dette à proportion de sa responsabilité dans le dommage. Supposons qu’ils étaient ¾ et ¼. Il y a une action récursoire (: recours en contribution à la dette) et là il doit demander 25 000 € si il a payé 100 000 €. On dit que dans le rapport de contribution à la dette, celui qui a payé la victime doit diviser sa dette. S’il a payé 300 000 € et qu’il devait 100 000, les deux autres vont devoir lui payer 100 000€.

Obligation solidaire : en droit civil, la solidarité ne se présume point, elle doit être prouvée. En droit des contrats, un contrat civil, la solidarité ne se présume pas mais doit être stipulée. Tout ce qu’on a vu pour l’obligation in solidum, ca vaut aussi pour l’obligation solidaire. Mais la solidarité, le premier et deuxième rapport, sont les effets primaires de la solidarité et ils sont communs à l’obligation in solidum et à l’obligation solidaire. Mais il y a des effets secondaires qui n’existent pas pour l’obligation in solidum. Les commerçants et professionnels sont censés se représenter les uns les autres au sens juridique du terme. si par exemple on fait une action contre l’un des codébiteurs, la prescription est interrompu vis-à-vis de tous les autres codébiteurs. Ca ne vaut pas pour l’obligation in solidum.

Arrêt 17 novembre 2000 Perruche : un enfant était gravement handicapé et il y avait une faute médicale qui n’était pas contestée. L’enfant avait un handicape, ce n’était pas contesté. Est-ce que le médecin devait réparer ? C’est aussi une question de lien de causalité. Ceux qui ont critiqués l’arrêt ont dit qu’il n’y a pas de lien de causalité parce que c’était un handicape congénital, le médecin n’avait rien fait pour que l’enfant ait ce handicape. Ici il n’y a pas de lien de causalité selon ceux qui ont critiqués l’arrêt. Si le médecin avait bien informé la mère qu’elle avait la rubéole, elle aurait avorté et donc l’enfant ne serait pas né. Il y avait un handicape qui n’est pas causé par la faute.

Prof : est ce que la solution juste est de donner l’argent aux parents ou à l’enfant ? Plutôt à l’enfant. Le médecin a l’obligation de soin et l’obligation d’information. Le médecin était responsable pour violation de son devoir d’information. Est-ce qu’il faut que la mère démontre que si elle avait eu l’information elle aurait avorté ? Non car c’est trop violent de dire devant son enfant que si elle avait su elle aurait avorté.

Sous-titre 2 : Le fait des choses 

 

Chapitre 1 : Régime général de la responsabilité  

du fait des choses 

C’est le cas quand le dommage est causé par le fait d’une chose, et en droit français ce domaine va très loin. On a un régime général et plusieurs régimes spéciaux régis par des textes spéciaux.

  1. Historique

On va d’abord commencer par l’historique. En 1804 on avait principalement la responsabilité du fait d’autrui, article 1382 et 1383 ainsi que deux régimes spéciaux : bâtiments et animaux. C’est une question de facilité car dans ces cas il n’y avait pas besoin de prouver une faute. Le droit de la responsabilité civile est très encré dans la société, il a donc beaucoup changé avec l’évolution de la société.

Avec l’industrialisation on s’est rendu compte qu’il y avait des dommages très graves qui pouvaient être causés par des machines sans qu’on puisse identifier la faute de quelqu’un.

Les juges ont commencé à se rendre compte que peut-être le régime de responsabilité pour faute était insuffisant de réparer certains dommages dont on estimait pourtant qu’ils devaient être réparés. Les juges ont été audacieux. 1ère grande date à retenir : Arrêt de 1896, Teffaine (ou «l’affaire du remorqueur).

Les juges du fond avaient beaucoup poussé le mouvement, et l’arrêt de 1896 est un arrêt de rejet, ce qui prouve bien que la solution avait été donnée déjà par les juges du fond.

Dans cette affaire, une machine, un remorqueur à vapeur, avait explosé et le mécanicien avait été atteint dans cette explosion et il est mort. Sa veuve a fait une action en responsabilité civile. La Cour d’appel avait dit que le propriétaire d’un bâtiment est responsable en cas de ruine de ce bâtiment (1386) donc par analogie, celui qui est propriétaire d’une machine doit être responsable en cas de vice de cette machine. La Cour de cassation a rejeté le pourvoi donc a bien admis la responsabilité du propriétaire du remorqueur, mais elle a changé le fondement. Ce fondement était proposé par certains auteurs, et ce fondement était de se servir de l’alinéa 1er de l’article 1384.

L’article 1384concerne des cas spéciaux de responsabilité du fait d’autrui. Article 1384, alinéa 1, était en fait dans l’esprit des rédacteurs du code civil une phrase de transition entre les articles 1382 et 1383, et les articles qui suivent (1385 à 1386). «On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l’on a sous sa garde». Cet article est inchangé depuis 1804.

Donc dans cet alinéa le rédacteur nous rappelle ce que l’on vient de voir dans les articles 1382 et 1383 (dommage que l’on cause par son propre fait), mais aussi comme on verra dans l’article 1385 (dommage causé par le fait des personnes dont on doit répondre) et dans l’article 1386 (dommage causé par les choses sous notre garde).

La Cour de cassation rejette le pourvoi et découvre, dans l’alinéa 1er de l’article 1384, un principe général de responsabilité du fait des choses.

La Cour de cassation dit que si on lit cet article, l’article nous dit qu’on est responsable des choses que l’on a sous sa garde. Donc si on lit cet article de façon autonome, on n’y voit plus une phrase de transition, on lui donne un sens propre. Alors que c’était évident dans l’esprit des rédacteurs que c’était une phrase de transition.

«Attendu que l’arrêt attaqué constate souverainement que l’explosion de [la machine], qui a causé la mort de [la victime] est due à un vice de construction. Aux termes de l’article 1384 du code civil, cette constatation qui exclut le cas fortuit et la force majeure, établit  vis à vis de la victime de l’accident, la responsabilité du propriétaire [de la machine] sans qu’il puisse s’y soustraire en prouvant soit la faute du constructeur de la machine, soit le caractère occulte du vice incriminé.» Ce n’est pas un attendu de principe général et abstrait, mais quand même on nous dit qu’on se fonde sur 1384 (alinéa 1er, même si ce n’est pas précisé).

On a un peu oublié cet arrêt car c’était des accidents du travail qui étaient majoritaires, et on a créé une loi en la matière. L’employeur n’avait pas commis de faute mais cela paraissait juste qu’il soit responsable.

Une très grande loi en matière de responsabilité, qui a servi de modèle à tout le droit de la responsabilité civile, a été adoptée. Loi du 9 avril 1898 deux ans après l’arrêt Teffaine, loi sur les accidents du travail.

Donc désormais les accidents du travail n’étaient plus régis par le droit civil. C’est devenu un régime spécial. Cette loi posait une responsabilité sans faute de l’employeur, ou encore responsabilité objective. Cela signifie qu’il n’est pas nécessaire de prouver la faute de l’employeur pour engager sa responsabilité, donc l’employeur ne peut s’exonérer de sa responsabilité en démontrant qu’il n’a pas commis de faute, ceci est inopérant, il reste responsable. En contrepartie, il y a une indemnisation forfaitaire des dommages du salarié, et le plafond peut être dépassé que si l’employeur montre la faute inexcusable de l’employeur.  Donc ici, même si l’employeur n’a commis aucune faute, c’est lui qui supporte quand même le risque.

Tous les accidents du travail étaient évacués par le biais de cette loi, donc l’article 1382 redevenait suffisant et on a un peu oublié l’arrêt Teffaine.

Entre 1896 et 1930, les juges ont essayé de limiter, ils ont bien accepté qu’on utilise l’alinéa 1er de l’article 1384 de façon autonome mais ils ont essayé de différentes façon d’en limiter la portée. Mais le problème est que c’est un article très général, qui vise les choses en général, donc si les juges faisaient un régime particulier, a priori ils auraient du faire un régime pour toutes les choses en général car ubi lex non distinguit (la loi ne distingue pas). Donc en théorie, les juges ne devaient pas distinguer.

Mais en réalité, dans tous les arrêts de 1900 à 1930, la Cour de cassation et les juges du fond n’ont eu de cesse d’établir des distinctions. C’est-à-dire que les juges ont dit par exemple que la responsabilité du fait des choses était seulement pour les choses dangereuses. Ou encore, il faut distinguer selon les choses viciées et non viciées: on applique le principe général de responsabilité du fait des choses que pour les choses viciées.

Donc les principales distinctions étaient :  

  • choses viciées / non viciées -> responsabilité du fait des choses que pour les choses viciées
  • choses dangereuses / non dangereuses -> responsabilité objective que pour les choses dangereuses
  • choses actionnées par la main de l’homme / choses non actionnées par la main de l’homme -> le régime de responsabilité objective ne s’appliqueraient qu’aux choses non actionnées par la main de l’homme, car si la chose est actionnée par la main de l’homme, alors c’est de la responsabilité du fait personnel et donc l’article est 1382 et donc il faudrait prouver la faute.

Donc on essayait de distinguer parmi les «choses» de l’article 1384.

Exemple: dommage causé par un ski=chose actionnée par la main de l’homme -> responsabilité personnelle.

Mais comme les principaux accidents étaient ceux du travail, ils étaient couverts par la loi de 1898, donc c’était moins à l’ordre du jour. Mais, au début du XXe siècle commencent à apparaître les véhicules automobiles, et très souvent il n’y avait pas nécessairement de faute du conducteur. Du coup, à nouveau des cas sont arrivés devant la Cour de cassation qui a fini par rendre un très grand arrêt qui pose de façon définitive la lecture audacieuse de l’alinéa 1er de 1384 c’est-à-dire responsabilité du fait des choses, principe général de responsabilité du fait des choses, qu’on découvre dans l’alinéa 1er de 1384.

Cet arrêt est l’arrêt Chambres réunies (ancien nom de l’AP), 13 février 1930, Jand’heur :

Visa: article 1384, alinéa 1er. C’est donc la règle de droit qui fonde sa solution, donc elle fait de cet article une règle de droit alors qu’avant c’était une simple phrase de transition.

En dessous du visa, on apprend le nouveau régime qu’elle propose pour l’alinéa 1er de l’article 1384: «la présomption de responsabilité établie par cet article à l’encontre de celui qui a sous sa garde la chose inanimée qui a causé un dommage à autrui ne peut être détruite que par la preuve d’un cas fortuit ou de force majeure ou d’une cause étrangère qui ne lui soit pas imputable. Il ne suffit pas de prouver qu’il n’a commis aucune faute ou que la cause du fait dommageable est demeurée inconnue».

-> Présomption de responsabilité. Cela signifie que c’est un régime de responsabilité objective. Car quand la responsabilité est présumée, on présume vraiment toute la responsabilité c’est-à-dire non seulement la faute mais aussi la causalité. Quand on utilise l’expression présomption de responsabilité, cela signifie qu’il n’est pas nécessaire de prouver la faute. On dit soit présomption de responsabilité, soit responsabilité objective, soit responsabilité de plein droit. Ces trois formules sont absolument synonymes et signifient que c’est une responsabilité sans faute, pas nécessaire de prouver la faute pour engager la responsabilité et en plus l’absence de faute n’est pas exonératoire.

-> «Chose inanimée» car la chose animée est un animal donc 1386.

-> La présomption de responsabilité ne cède que devant la force majeure (ou le cas fortuit, en général souvent les événements de la nature mais c’est synonyme de force majeure en droit civil), ou aussi devant la cause étrangère : en toute rigueur c’est un peu plus large, car la faute de la victime ou la faute du tiers sont des causes étrangères, mais au sens courant du terme on pourrait dire que c’est synonyme. Donc la présomption de responsabilité ne peut être renversée que par la démonstration d’un cas de force majeure (remplissant les trois caractères de la force majeure) ou d’un cas de cause étrangère c’est-à-dire une faute de la victime, même éventuellement ne remplissant pas les caractères de la force majeure mais à ce moment là ce sera une exonération partielle.

Le gardien peut également être exonéré par le fait d’un tiers, mais ce n’est pas exonératoire dans le rapport d’obligation à la dette, mais dans le rapport de contribution à la dette.

-> Ce n’est pas simplement une présomption simple de responsabilité. Elle n’est pas totalement irréfragable car on peut apporter une preuve contraire, mais l’absence de faute n’est pas exonératoire. On ne peut s’exonérer qu’en démontrant la force majeure ou la cause étrangère c’est-à-dire la faute de la victime. L’absence de faute n’est pas exonératoire. Le gardien (=celui qui a la garde de la chose) ne peut pas s’exonérer en démontrant qu’il n’a pas commis de faute. Également, si la cause est demeurée inconnue c’est-à-dire si on ignore la cause du dommage, (donc par exemple si le gardien n’arrive pas à prouver qu’il y a une cause étrangère) la présomption de responsabilité n’est pas renversée donc le gardien est responsabilité.

Faits:un camion automobile a renversé et blessé une mineure.

Cour d’appel : la Cour d’appel a refusé d’appliquer l’article 1384, alinéa 1, car a considéré que la voiture était actionnée par la main de l’homme, donc que cela ne constituait pas le fait de la chose que l’on a sous sa garde prévu par l’alinéa 1er. Ici c’est actionné par la main de l’homme, donc l’article est 1382. Dès lors, la victime était tenue d’établir à la charge du conducteur une faute qui lui fut imputable. Mais ici il n’y en avait pas.

Solution: cassation. (voir attendu)

En résumé, cet arrêt met un terme aux distinctions au sein des choses qui pourraient déclencher l’application de l’alinéa 1er de l’article 1384. Donc, cet arrêt applique l’alinéa 1er à toutes les choses (sauf s’il y a un régime spécial, et à l’époque c’était pour les animaux, les bâtiments en ruine et les accidents du travail). Donc il faut lire l’alinéa 1er de l’article 1384 comme posant un régime général de responsabilité objective, de responsabilité de plein droit, de responsabilité présumée pour toutes les choses causant un dommage à autrui.

Quelques mots théoriques sur cette évolution: il y avait eu un travail doctrinal très important fait par des auteurs, notamment Saleilles et Josserand. Ces auteurs avaient dit que face à l’évolution de la société, face à l’industrialisation, au machinisme…il fallait trouver un régime de responsabilité qui permette d’indemniser les dommages en dehors même de la faute du responsable. En clair, il fallait qu’il y ait une responsabilité sans faute. Comment ont-ils justifié ceci d’un point de vue théorique ?

Saleilles est l’auteur de la théorie du risque. La responsabilité civile, comme tout le droit, est un droit qui a fonctionné par sédimentation.

° Il y a d’abord eu la théorie du risque-profit: celui qui a le profit doit aussi avoir le risque qui en découle. Cette théorie est résumée par un adage latin : ubi emolumentum ibi onus = là où est le profit, là aussi doit être la charge.

° Mais en matière d’accidents de la circulation, il n’y a pas cette idée de profit. Donc il y a eu une deuxième branche de la théorie du risque: la théorie du risque créé. C’est-à-dire que celui qui introduisait un risque dans la société devait en assumer les conséquences. Donc s’il y a un dommage créé par une automobile, le conducteur doit en assumer les risques qu’il a introduits.

Donc cette théorie du risque était de dire que parfois la responsabilité devait être justifiée par autre chose que la faute, et l’on introduit le risque. Pas nécessaire dans ce cas de démontrer la faute.

Ainsi en 1930 était définitivement posée la nouvelle lecture de l’alinéa 1er de l’article 1384. Ceci étant dit, tout n’était pas résolu pour autant.

Exemple: je suis propriétaire d’une voiture mais je la prête à quelqu’un, qui est le gardien ? Le propriétaire ou celui à qui on l’a prêté ? Donc il restait des difficultés à résoudre.

Il faut donc voir les conditions de la responsabilité du fait des choses. Quelles conditions doivent être réunies, que doit prouver le demandeur (la victime) pour pouvoir engager la responsabilité du fait des choses ?

  1. Conditions de la responsabilité du fait des choses

Quelles sont les conditions de l’article 1384 alinéa 1 ? Il faut toujours vérifier que les trois conditions sont réunies.

  1. Première condition : une chose

La première condition est qu’il faut une chose. Le terme est extrêmement général, on ne distingue pas selon la chose. Donc cela concerne toutes les choses pour lesquelles il n’y a pas de régime spécial.

Liste des principaux régimes spéciaux exclus de l’alinéa 1er :  

—   animaux

—   bâtiments en ruine (mais il y a eu une évolution de la jurisprudence que l’on va voir)

—   accidents de la circulation (loi de 1985)

—   produits défectueux (1386-1 à 1386-18)

—   accidents du travail (loi de 1898)

Pour ces régimes spéciaux, on n’applique pas l’article 1384 alinéa 1er.

D’autre part, il y a des lois spéciales, par exemple sur les aéronefs, ou encore des conventions internationales. Certains régimes sont plus favorables que l’alinéa 1er de 1384, qui lui même est plus favorable que 1382 puisqu’il n’y a pas à prouver la faute. Donc si on a un cas pratique avec une chose, il faudra partir sur l’alinéa 1er de l’article 1384 (on peut toujours regarder si 1382 est applicable mais le régime de 1384 est plus favorable). Donc les «choses» visées ici sont toutes les choses pour lesquelles il n’y a pas de régime spécial.

N’importe quelle chose : les meubles, les immeubles (sauf bâtiments en ruine), le sol, les parois, les murs, les baies vitrées, les trous (un fossé)… Donc c’est très large. Cela va très loin. Par exemple, on glisse sur le sol: responsabilité du fait des choses, pas besoin de prouver la faute.

Une question s’est posée pour les choses corporelles et incorporelles. L’article 1384 est applicable aux choses corporelles c’est-à-dire non seulement la matière solide mais encore les gaz ou l’électricité par exemple. La question s’est posée, et là il y a une divergence doctrinale, sur la responsabilité du fait des choses incorporelles, c’est-à-dire qui n’ont pas de corps. Que peut-on imaginer comme responsabilité du fait d’une chose incorporelle, c’est-à-dire qui n’a aucune consistance ? Les paroles par exemple. Mais si quelqu’un fait une injure ou une diffamation, ce n’est pas la responsabilité du fait des choses. Prenons l’exemple d’un logiciel: beaucoup d’auteurs notamment les spécialistes de propriété artistique nous disent qu’il n’y a pas de responsabilité du fait des choses incorporelles. Or ce sont ces auteurs qui veulent qu’il y ait une appropriation mais pas de responsabilité, ce n’est pas cohérent. Mais selon la prof, à partir du moment où il y a une appropriation, la responsabilité va avec la propriété. Si on nous vend un logiciel qui endommage notre ordinateur, cela peut causer un dommage et si le logiciel est défectueux on ne voit pas pourquoi il n’y aurait pas une responsabilité du propriétaire qui a vendu le logiciel.

En tout cas, la chose doit être susceptible d’appropriation. En d’autres termes, pas de responsabilité pour les res nullius. Sauf si quelqu’un s’empare de la res nullius et cause un dommage avec, on a fait un acte d’appropriation et on est donc responsable. Mais si on tombe dans la rue sur une canette de bière qui n’appartient à personne, personne n’est responsable en tant que gardien de la chose car c’était une res nullius (peut-être l’Etat sera responsable).

Droit comparé : dans pratiquement tous les pays européens et aux USA la responsabilité spéciale du fait des choses est limitée aux choses dangereuses, choses dotées d’un dynamisme.  

Exemple de cas pratique: pendant la canicule, une dame était morte dans son appartement et avait été seule pendant les vacances. Personne ne s’est occupée d’elle, et seulement la voisine s’en est rendu compte quand des coulures de la personne morte sont apparues dans son appartement qui est devenu inhabitable pendant plusieurs mois. La voisine a poursuivi la fille de la mère, sur le fondement de 1382 (la fille aurait dû venir, c’est une faute de pas être venu, elle doit réparer les conséquences) et sur le fondement de 1384 alinéa 1er (car la fille était responsable du corps de sa mère).

Il faut alors examiner les deux régimes.

Introduction: annoncer tout ce dont on va parler. Les deux régimes ont ici un intérêt. En l’espèce, la voisine poursuit la fille. Deux fondements juridiques sont invoqués et il nous faudra examiner successivement ces deux fondements.

1)     Responsabilité pour faute : 1382  

Sur ce fondement, l’article exige la réunion cumulative de trois conditions: faute, dommage, lien de causalité.

  • La faute: la faute est objective et requiert élément matériel et élément d’illicéité (plus besoin de la condition subjective depuis 1984).

Élément matériel en l’espèce = faute d’abstention (qui peut être retenue depuis l’arrêt Branly) donc l’élément matériel peut être caractérisé, la fille s’est abstenue de venir voir sa mère. Ce qui pose difficulté sera l’élément d’illicéité qui se juge par rapport à un standard général du père de famille, on recherche si une personne présentant les caractéristiques d’une personne de même type aurait du se comporter ou non de la sorte. En l’espèce on peut se demander ce qu’on peut reprocher à la fille, qu’aurait-elle du faire ? Est-ce une faute de ne pas aller voir ses parents ? En général aujourd’hui non. Mais on aurait pu considérer que dans une période dangereuse de canicule, que c’était une faute. Donc on peut envisager les deux.

  • Le dommage: les dommages réparables sont les frais de désinfection, de relogement…
  • Le lien de causalité

2)     Responsabilité du fait des choses : 1384 alinéa 1er  

Le cadavre est-il une chose ? A priori, un cadavre reste une personne, sacrée, donc on ne peut pas considérer que c’est une chose dont on a la garde. Cependant, ceci se discute. Mais en tant que voisin, on n’a pas à supporter que les fautes du voisin dépassent le seuil normal. Donc les troubles du voisinage, cela marchait assez bien pour ce cas pratique.

 

  1. Deuxième condition : un fait de la chose

Le lien de causalité se retrouve dans le fait de la chose. Le lien de causalité est dans le fait de la chose. Cela s’entend comme le lien de causalité entre la chose et le dommage.  La chose doit avoir eu un rôle causal dans la survenance du dommage.

La Cour de cassation utilise une autre formule, même si parfois elle utilise la formule de rôle causal. Mais elle utilise souvent comme formule que la chose doit avoir été l’instrument du dommage.

Arrêt du 19 novembre 1998: «La responsabilité du gardien d’une chose est subordonnée à la condition que la victime rapporte la preuve que cette chose a été en quelque manière, et fût-ce pour partie, l’instrument du dommage.»

Il ne suffit pas de montrer que sans la chose, il n’y aurait pas eu de dommage. Il faut que la chose ne soit pas seulement l’occasion du dommage, mais aussi l’instrument du dommage. Donc c’est autre chose que simplement le fait que la chose était là.

Exemple: une branche d’un arbre crève un œil de quelqu’un, il y a fait de la chose. Mais quelqu’un tombe d’un arbre en montant trop haut, il n’y a pas fait de la chose.

Ceci étant dit, il y a eu une évolution sur ce que l’on appelle les choses inertes. Une chose inerte n’est pas une chose immobile, mais c’est une chose qui ne peut structurellement pas bouger. C’est ce que l’on appellerait éventuellement un immeuble par nature. Exemple: le sol, une baie vitrée, les tables fixées au sol.

Il y a eu une évolution de la jurisprudence. La jurisprudence a été un peu chaotique en la matière car dans un premier temps elle est allée vraiment très loin, mais elle est ensuite revenue en arrière.

Première période où elle est allée très loin : même si la chose était inerte et même si la chose avait eu un rôle «purement passif» (rôle passif de la chose que l’on oppose à un rôle actif de la chose), le gardien de cette chose en était responsable. Les arrêts qui étaient allés très loin étaient par exemple l’arrêt de la boite au lettre (chercher ceci). Ou l’arrêt sur les baies vitrées: on rentre dans une baie vitrée qui n’a aucun défaut ni rien mais responsabilité quand même du gardien de la baie vitrée. Là, la Cour de cassation est allée très loin car non seulement pas d’idée de faute, mais surtout presque plus d’idée de causalité. Quand on dit rôle passif c’est-à-dire que la chose était là mais il n’y a rien d’anormal, elle n’a pas vraiment été l’instrument du dommage et pourtant on retenait la responsabilité. Mais la Cour de cassation a mis un terme à ceci.

  

Deux arrêts de revirement :  

1er arrêt : arrêt du 24 février 2005: une femme se heurte sur la baie vitrée : est-elle responsable ? Avec la jurisprudence classique, sûrement. Mais la Cour d’appel déboute la demanderesse de ces demandes en disant que la victime s’est levée, a pivoté à 90 degrés, s’est dirigée vers la terrasse sans s’apercevoir que la porte vitrée était pratiquement fermée et a percuté la baie vitrée qui s’est brisée. La victime indique qu’elle avait pu croire que la baie vitrée était ouverte compte tenu de sa transparence et que la baie vitrée était ouverte car on était en été. La chose n’a eu aucun rôle actif dans la production du dommage qui trouve son origine dans le mouvement de la victime. La Cour d’appel ne retient pas de responsabilité du fait de la chose.

La Cour de cassation casse et annule. Elle pose une règle de droit : «en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que la porte vitrée qui s’était brisée était fragile, ce dont il résultait que la chose, en raison de son anormalité, avait été l’instrument du dommage, la Cour d’appel a violé le texte susvisé».

La chose doit avoir eu un rôle actif, un rôle causal. Ici elle a été instrument du dommage car elle était anormale. C’est sous entendu depuis cet arrêt que la chose inerte n’est instrument du dommage que si elle est anormale. Donc ceci met une condition supplémentaire à la responsabilité du fait des choses inertes et donc restreint la responsabilité du fait des choses inertes: si la chose n’avait pas été anormale on n’aurait pas pu retenir la responsabilité du fait de la chose inerte.

2e arrêt : arrêt du 24 février 2005 : un plongeoir inerte fixé sur le sol. La Cour d’appel avait retenu que le tremplin avait été installé sur une plage en limite de plan d’eau afin de permettre aux utilisateurs de prendre leur élan (…) la présence d’un tel tremplin n’avait rien d’insolite (voir attendu sur le raisonnement de la Cour de cassation). On raisonne par rapport à la normalité. Et la Cour d’appel constate qu’il n’y a pas d’anormalité.

La Cour de cassation rejette le pourvoi et dit «en l’état de ces constatations et énonciations établissant l’absence d’anormalité de la chose, la Cour d’appel a exactement déduit que le tremplin n’avait pas été l’instrument du dommage».

-> Pas d’anormalité, donc pas de responsabilité.

Ces deux arrêts restreignent un peu : pour les choses inertes, il faut démontrer une anormalité sinon il n’y a pas de responsabilité. L’anormalité peut être une chose anormale en elle-même (vitre trop fragile), une chose anormalement placée (un tremplin mis trop haut ou pas assez haut)…

Il y a quelques années une dame avait glissé dans un magasin car il y avait une fritte par terre. Donc elle a du prouver que le sol était anormal, pour prouver qu’il était anormal elle devait prouver qu’il y avait une fritte.  Il y a eu aussi de la jurisprudence avec les feuilles de salade dans les supermarchés: est-ce normal ou anormal qu’il y ait une feuille de salade par terre dans un supermarché ?

  1. Troisième condition : chose que l’on a sous sa garde/la garde de la chose

1)     Définition de la garde 

Le responsable au sens de l’article 1384 alinéa 1er est le gardien de la chose. Mais qu’est ce que le gardien de la chose ? Définition de la garde: elle a été définie par un arrêt très célèbre:

Chambre réunies, 2 décembre 1941, FRANCK :  

Faits: un véhicule automobile appartenait au docteur Franck. Il avait confié le véhicule à son fils Claude, alors mineur, et l’automobile avait été soustraite frauduleusement (donc volée) par un individu demeuré inconnu dans une rue où Claude, le fils du propriétaire l’avait laissée en stationnement. Cette voiture, sous la conduite du voleur, a renversé et blessé un facteur, Monsieur Connot. Les consorts Connot, se fondant sur les dispositions de l’article 1384 alinéa 1er, ont demandé au docteur Franck réparation du préjudice.

Cour d’appel: pour rejeter la demande, la Cour d’appel déclare qu’au moment où l’accident s’est produit, Franck dépossédé de sa voiture par l’effet du vol se trouvait dans l’impossibilité d’exercer sa surveillance sur la voiture.

Cour de cassation: La Cour de cassation rejette sur ce point (mais elle casse sur un autre point). Elle dit: en l’état de cette constatation de laquelle il résulte que Frank, privé de l’usage, de la direction et du contrôle de sa voiture, n’en avait plus la garde et n’était donc plus soumis à la présomption de responsabilité dictée par l’article 1384 alinéa 1er du code civil, la Cour d’appel en statuant ainsi qu’elle l’a fait, n’a point violé le texte précité.

-> On tire de cet arrêt la définition de la garde:la garde se définit comme l’usage, la direction et le contrôle de la chose. Aujourd’hui encore elle se définit ainsi.

Sur le fait que le fils du docteur Franck était mineur: (voir manuel). Idée qu’il peut y avoir un transfert de garde: on ne transfert non pas volontairement la propriété de la chose, mais on transfert l’usage, le contrôle et la direction. Qu’est ce que l’usage, le contrôle et la direction ? Il y a eu une évolution de la jurisprudence mais ce n’est pas évident.

 L’usage : contrôle purement matériel de la chose. Celui qui utilise la chose.

 La direction : on pourrait supposer que quelqu’un ne manie pas la chose mais dirige. Par exemple, on donne à un enfant un couteau et on lui dit comment l’utiliser.

Dans la jurisprudence la plus récente et qui est à peu près constante, en réalité ce qui compte c’est vraiment pas seulement l’utilisation, mais que l’on ait aussi le pouvoir de contrôler l’utilisation de la chose.

Il y a une présomption simple de garde qui pèse sur le propriétaire de la chose. Le propriétaire de la chose en est présumé le gardien, mais c’est une présomption simple, il peut renverser la présomption en démontrant que la garde avait été transférée. Dans l’appréciation du transfert de garde, il y a l’idée d’avoir transférer en fait les moyens de contrôler la chose.

Exemple : contrat de dépôt. On dépose une chose chez le banquier par exemple. Le dépositaire n’a pas le droit d’utiliser la chose. Donc en général, on estime que le dépositaire n’en acquiert pas la garde puisqu’il n’en a pas l’usage. Mais si la chose est mal surveillée et cause un dommage, le dépositaire pourrait être considéré comme gardien.

Place de la faute dans la responsabilité du fait des choses :  

  • pas besoin de démontrer la faute
  • faute pas exonératoire
  • Mais: -normalité
  • garde

2)     Garde et discernement  

Un enfant brûle son voisin avec les allumettes de ses grands parents. Ou alors il tire sur le voisin avec le fusil des grands parents.

Y a-t-il eu transfert de garde? Si l’enfant a quatre ans, il n’a pas eu la garde du fusil ce sont les grands parents qui sont restés gardiens. Mais en toute rigueur il faut vérifier s’il y a usage, contrôle, direction. Or en l’espèce on peut dire que comme c’était une chose dangereuse les grands parents en avaient conservé la garde. Mais s’il avait 17 ans on peut dire qu’il y avait eu transfert de la garde.

Ici intervient la question du discernement. Si la garde est l’usage, contrôle et direction de la chose, autant l’usage ne nécessite pas de discernement, autant le contrôle et la direction peuvent exiger la capacité de discernement. Pourtant, dans l’un des quatre arrêts du 9 mai 1984, il y en a un qui concerne la responsabilité du fait des choses :

Ass plen. 9 mai 1984, Gabillet: un enfant alors âgé de trois ans en tombant d’une balançoire constituée par une planche qui se rompit, éborgna son camarade avec un bâton qu’il avait à la main. Les parents de l’enfant éborgné assignèrent les parents de l’autre enfant. À l’époque on poursuivait les parents en tant qu’ils sont responsables du fait de leur enfant mineur (article 1384 alinéa 4) et pas directement sur l’article 1384 alinéa 1er. Car à l’époque il fallait que l’enfant soit responsable lui-même pour que la responsabilité des parents puisse être engagée. Donc il fallait qu’il soit gardien de la chose.

Cour d’appel : l’enfant a été déclaré responsable sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1er. Les parents de l’enfant déclaré responsable disent qu’il faut la faculté de discernement et donc violation de l’article.

Cour de cassation : rejet du pourvoi. En retenant que l’enfant avait l’usage, la direction et le contrôle du bâton, la Cour d’appel qui n’avait pas, malgré le très jeune âge de ce mineur, à rechercher si celui-ci avait un discernement, a légalement justifié sa décision.

-> la capacité de discernement n’est plus une condition pour être gardien. On peut avoir l’usage, le contrôle et la direction alors même que l’on n’a pas la capacité de discernement. Ainsi, un infans et un aliéné peuvent être gardiens.

Donc, on peut tout à fait renverser la présomption simple de garde qui pèse sur le propriétaire mais c’est au propriétaire de démontrer que la garde a été transférée. Pour ce faire, il doit démontrer qu’il a transféré non seulement l’usage mais aussi le contrôle et la direction.

Récemment, il y a beaucoup d’arrêts (où là aussi on voit l’idée de faute) où le propriétaire d’une chose dangereuse transmet l’usage de cette chose dangereuse à quelqu’un ; il en reste propriétaire mais il en transmet l’usage.

Exemple : on a transféré l’utilisation d’un camion citerne.

La Cour de cassation a dit que même si quelqu’un utilise la chose dangereuse, si on ne lui a pas expliqué pourquoi la chose était dangereuse et de quelle façon éviter le danger, cela signifie qu’on ne lui a pas transféré les moyens de contrôler la chose. Si l’on ne transfère pas les moyens de contrôler la chose, c’est comme si l’on ne transférait pas le contrôle de la chose donc le propriétaire restait gardien malgré le transfert de l’utilisation de la chose.

Il peut y avoir transfert volontaire, mais également transfert involontaire de la chose : chose perdue ou volée. S’il y a transfert involontaire de la chose, il n’y a plus de garde de la chose car il n’y a plus d’usage ni de contrôle ni de direction de la chose.

3)     Le caractère alternatif de la garde  

Enfin, toujours sur la définition de la garde : la grande question qui se pose est sur le point de savoir si plusieurs personnes peuvent être gardiennes en même temps de la même chose.

En principe, la réponse est négative. On dit que la garde a un caractère alternatif et non pas cumulatif. Cela signifie qu’en principe deux personnes ne peuvent pas avoir au même moment les mêmes pouvoirs de garde sur la chose.

Arrêt du 19 octobre 2006 : trois enfants jouaient au jeu de faire des torches avec du foin et de les allumer avec du foin jusqu’à ce que la grange du voisin brûle. Les voisins se plaignent de savoir qui était gardien de la torche, qui était responsable du fait de la chose. La Cour d’appel avait retenu la responsabilité des trois enfants car les trois jouaient à faire des torches et à les allumer, donc il y a la garde des trois enfants.

   -> Cassation de l’arrêt : la Cour de cassation dit que dès lors que l’on peut identifier le responsable, la Cour de cassation veille au maintien du caractère alternatif de la garde. En l’espèce, elle relève que ce n’était pas discuté de savoir quelle torche avait finalement mis le feu au hangar. Même si les trois faisaient des torches, on sait très bien laquelle a brûlé le hangar, donc c’est tel enfant qui était gardien, donc c’est lui et ses parents qui doivent être responsables. Donc quand on peut identifier le responsable, caractère alternatif.

Affaire du voilier:plusieurs personnes dessus et il y avait un skipper du voilier et le voilier a causé un dommage. La Cour d’appel a dit : garde en commun du voilier par tous les membres de l’équipage. La Cour de cassation a cassé : responsabilité que sur le skipper car on pouvait identifier que c’était lui qui avait le contrôle du voilier donc on ne devait retenir que sa responsabilité.

Arrêt du 13 janvier 2005 : voir cet arrêt dans le fascicule de TD.

    -> Principe : caractère alternatif de la garde.

Deux exceptions :  

une vraie exception au caractère alternatif de la garde : c’est ce que l’on appelle la garde en commun. Celle-ci n’est utilisée que vraiment lorsqu’on ne peut pas retenir la responsabilité d’une personne en particulier. Cas où si on ne retenait pas la garde en commun on ne pourrait pas retenir la responsabilité donc on admet la garde en commun car c’est la seule façon de réparer le dommage. Cas classique: les accidents de chasse, quelqu’un est tué au cours d’une partie de chasse, l’ensemble des chasseurs avaient en commun la garde de la balle perdue qui a tué le chasseur. Mais si on arrive à identifier la balle particulière de tel fusil et que l’on arrive à retracer à qui était la balle, ce sera lui le responsable. Attention, ce n’est pas une responsabilité collective. C’est vraiment parce que l’on ne peut pas identifier que l’on retient la garde en commun, la garde commune.

Cette exception est très rarement mise en œuvre.

– une «fausse» exception au caractère alternatif de la garde : distinction entre ce que l’on appelle la garde de la structure et la garde du comportement. Arrêt du 5 janvier 1956,Affaire de l’oxygène liquide : une société avait expédié des bouteilles d’oxygène liquide dont une avait explosé au cours du transport. La Cour d’appel avait refusé de retenir la responsabilité de la société car elle appuie sa décision sur le motif que seul celui qui a la garde matérielle d’une chose inanimée peut être responsable de cette chose, ce qui n’était pas le cas de la société.

Mais CASSATION. «Au lieu de se borner à caractériser la garde par la seule détention matérielle, les juges du fond devaient, à la lumière des faits de la cause et compte-tenu de la nature particulière des récipients transportés et de leur conditionnement, rechercher si le détenteur, auquel la garde aurait été transférée, avait l’usage de l’objet qui a causé le préjudice ainsi que le pouvoir d’en surveiller et d’en contrôler tous les éléments».

Il faut lire cela à la lumière du chapeau de l’arrêt : «la responsabilité du dommage causé par le fait d’une chose inanimée est liée à l’usage ainsi qu’au pouvoir de surveillance et de contrôle qui caractérisent essentiellement la garde. À ce titre, sauf l’effet de stipulations contraires valables entre les parties, le propriétaire de la chose ne cesse d’en être responsable que s’il est établi que celui à qui il l’a confiée a reçu corrélativement toute possibilité de prévenir lui-même le préjudice qu’elle peut causer».

-> Cet arrêt a repris une distinction doctrinale faite par un auteur, entre la garde de la structure et la garde du comportement de la chose. C’était l’idée de dire que la distinction entre la garde de la structure et du comportement n’était valable que pour certaines choses particulières (nature particulière des récipients transportés). Cette distinction ne vaut que pour les choses dotées d’un dynamisme propre: choses qui peuvent imploser, exploser… Donc là il peut y avoir un gardien de la structure et un gardien du comportement. Mais ceci est une fausse exception car on a dit que le caractère alternatif de la garde signifiait que deux personnes ne peuvent pas avoir les mêmes pouvoirs de garde.

L’affaire de l’oxygène liquide était une façon de laisser le propriétaire responsable même s’il avait transféré l’utilisation, car il ne démontrait pas qu’il avait transféré le contrôle de la structure. Il est resté gardien de la structure.

Après cette affaire, la distinction entre la garde de la structure et la garde du comportement a été utilisée plutôt pour que le fabricant reste responsable de la structure alors même qu’il avait vendu la chose. Responsabilité du fait des produits défectueux : fabricant poursuivi non pas en tant que gardien mais en tant que responsable du fait du produit défectueux.

Donc on ne s’en sert plus vraiment comme cela mais à l’inverse on s’en sert pour rendre responsable celui qui n’a pas la propriété mais qu’il y a un vice dans la garde du comportement. On a utilisé ceci dans plusieurs arrêts notamment récemment.

Arrêt du 5 octobre 2006 : quelqu’un pas propriétaire d’une friteuse mais il y a eu une inflammation de l’huile bouillante…voir TD page 53.

Arrêt sur un aéroclub: quelqu’un loue un avion dans un aéroclub. La Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel de n’avoir pas retenu la responsabilité de l’aéroclub en disant que celle-ci n’aurait pu être recherchée qu’en sa qualité de gardien de la structure de l’appareil, alors qu’il résultait de l’enquête que l’aéroclub était en parfait état de vol. Donc s’il y a eu un problème ce n’est pas de vice ou de structure mais de comportement donc c’est celui qui l’utilise qui doit en être responsable. Donc il y a un certain renouveau de la distinction.

Mais si on a un arrêt à commenter :  

–   identifier qu’on est en matière de responsabilité du fait des choses (article 1384 alinéa 1er)

–   qui est propriétaire ?

–   est-ce que la garde est transférée ?

Résumé:   

  • La chose doit avoir été l’instrument du dommage, et pour les choses inertes uniquement il faut que la chose ait été anormale.
  • Il faut une garde : usage, contrôle direction
  • Plus besoin de discernement depuis Gabillet
  • Le propriétaire est présumé gardien mais peut prouver que cela a été transféré
  • En principe la garde est alternative

III.      Le régime de responsabilité du fait des choses 

Présomption de responsabilité. Le gardien ne peut s’en exonérer qu’en démontrant la force majeure ou la cause étrangère (fait de la victime): si la faute de la victime présente les caractères de la force majeure il y aura une exonération totale, si la faute de la victime ne présente pas les caractères de la force majeure il y aura une exonération partielle.

Faute d’un tiers mais c’est une dette in solidum.

Dans des arrêts un peu plus récent on a évoqué d’autres causes d’exonération possible que celle dans l’arrêt Jand’heur : la notion d’acceptation des risques par la victime. La victime n’a pas commis de faute mais il y a des risques liés à l’utilisation de la chose et la victime a accepté ces risques.

Exemple: le sport. Quand on joue à un sport on accepte les risques inhérents à ce sport. Mais il est évident que selon que le sport est plus ou moins dangereux, violent…les risques que l’on accepte ne sont pas les mêmes. L’acceptation des risques ne joue que pour les risques normaux des sports considérés.

Dernière cause d’exonération dont on a pu discuter: la légitime défense.

Arrêt 1992: la Cour de cassation avait jugé que la légitime défense reconnue par le juge pénal ne pouvait donner lieu devant la juridiction civile à une action en dommages et intérêts (donc y compris sur l’article 1384). Cela n’est pas évident car 1384 est une responsabilité sans faute.

Chapitre 2 : Les régimes spéciaux de la responsabilité du fait des choses 

On n’applique pas 1384 alinéa 1er. Les deux premiers régimes spéciaux sont les deux du code civil :

  • 1385 : les animaux
  • 1386 : les bâtiments
  1. Les animaux

On voulait un régime plus indulgent que 1382.

Article 1385 : «Le propriétaire d’un animal, ou celui qui s’en sert, pendant qu’il est à son usage, est responsable du dommage que l’animal a causé, soit que l’animal fût sous sa garde, soit qu’il fût égaré ou échappé.»

Le responsable est :  

  • le propriétaire
  • celui qui s’en sert

C’est plus souple que 1384 car c’est soit l’animal sous la garde de la personne, soit l’animal égaré ou échappé. Alors que dans le régime général, si la chose est égarée ou volée, c’est le voleur qui acquiert la garde. Mais ceci est facile à comprendre: une voiture par exemple peut causer un dommage seulement si quelqu’un d’autre que la personne qui l’a perdue s’en sert. Alors qu’un animal peut causer un dommage sans que quelqu’un s’en serve.

C’est une responsabilité de plein droit. On ne peut s’en exonérer que par les mêmes conditions vues pour la responsabilité générale.

Exemple: cavalier blessé par son cheval qui avait été effrayé par un taureau. Mais acceptation du risque car c’était une zone où l’on savait qu’il y avait des taureaux en liberté.

  1. Les bâtiments

Là aussi on voulait un régime plus indulgent que 1382.

Article 1386 : «Le propriétaire d’un bâtiment est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par une suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction.»

La responsabilité est uniquement en cas de ruine du bâtiment. Non seulement il faut que ce soit une ruine du bâtiment, et encore seulement lorsque la ruine est la conséquence soit du défaut d’entretien, soit du vice de construction. Conditions très restrictives.

Pendant un certain temps lorsqu’il n’y avait pas encore 1384 alinéa 1er, la Cour de cassation avait tendance à ouvrir plus facilement cet article. Mais maintenant, on a tendance à conclure plus ou moins à la désuétude de cet article car les conditions sont de toute façon les mêmes que 1384 alinéa 1er donc autant utilisé cet article là.

A priori, comme c’est un régime spécial on aurait pu se dire que si 1386 ne marche pas, on ne peut pas utiliser 1384 alinéa 1er. Mais en réalité, comme la Cour de cassation trouve que l’article est tombé un peu en désuétude, elle juge aujourd’hui depuis des arrêts de 2008 (2e civ, 16 octobre 2008) que si l’article 1386 du code civil vise spécialement la ruine d’un bâtiment, les dommages qui n’ont pas été causés dans de telles circonstances peuvent néanmoins être réparés sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1er.

Donc si 1386 ne marche pas, on utilise 1384 alinéa 1er qui est donc disponible.

La doctrine semble dire que c’est la désuétude de 1386.

Arrêt du 22 octobre 2009: un véhicule avait été endommagé par la chute de pierres provenant de la voûte d’un bâtiment. Ceci semble bien être la chute d’un bâtiment. Mais la Cour de cassation dit : attendu que si 1386 vise spécialement la ruine d’un bâtiment, les dommages qui n’ont pas été causés dans de tels circonstances peuvent néanmoins être réparés sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1er du code civil.

Sans qu’il soit nécessaire de déterminer le vice dont pouvait être atteinte la voûte, il résulte que c’est de cette voûte que provenaient les pierres.

-> On ne recherche même pas si on est dans le domaine de 1386 et on applique 1384 alinéa 1er. Mais deux autres régimes spéciaux ne tombent pas en désuétude: accidents de la circulation et produits défectueux.

  III.       Responsabilité pour les accidents de la circulation 

C’est une loi du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration des indemnisations des victimes et tendant à l’accélération des indemnisations des victimes : avant cette loi on l’appliquait aux accidents de la circulation. Quels étaient l’inconvénient de l’application du régime général aux accidents de la circulation avant 1985 ? Les conditions de mise en œuvre ne posaient pas de difficulté. Il restait la garde de la chose, le propriétaire est présumé gardien, il ne pouvait s’en exonérer que s’il pouvait montrer qu’il l’avait transmis à quelqu’un.

Le problème était dans le régime de l’article 1384 alinéa 1er : responsabilité de plein droit, responsabilité objective, présomption de responsabilité. Mais le gardien d’une chose peut s’exonérer selon cet article en démontrant soit un cas de force majeure, soit en démontrant la faute de la victime ou alors la faute du tiers dans le rapport de contribution à la dette. Force majeure totalement exonératoire, et faute de la victime partiellement exonératoire sauf si elle remplit les caractéristiques de la force majeure alors c’est totalement exonératoire. C’était assez fréquent qu’on puisse reprocher une imprudence. Les conséquences étaient une diminution de l’indemnisation de la victime alors même que c’était très grave. Une autre conséquence est que c’était les compagnies d’assurances qui indemnisaient, elles essayaient de gagner du temps et demandaient la faute de la victime. Si la victime n’était pas d’accord pour être indemnisée tout de suite ca prenait du temps et la compagnie d’assurance pouvait faire un procès. C’était un système très injuste. Les assureurs faisaient presque systématiquement du contentieux et ca durait très longtemps.

Il y avait deux objectifs qui ont été remplis dans la loi de 1985. La loi a 47 articles et en réalité elle est construite de façon originale. On va étudier les articles 1 à 6 qui prévoient le régime de l’indemnisation : on améliore l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation. Les articles 46 à 48 c’est les dispositions transitoires de la loi, elle s’applique immédiatement, y compris les procès en cours, y compris au stade de la cour de cassation. Articles 7 à 45 c’est des mesures procédurales pour accélérer l’indemnisation. La compagnie d’assurance doit faire une offre d’indemnisation dans les 8 mois après l’accident, sinon il y a des sanctions importantes. Il faut que ce soit une offre d’indemnisation substantielle, correcte.

On s’est demandé si la loi était une loi autonome ou si elle s’insérait dans le droit commun. Principalement c’est un régime autonome puisque les articles 1 à 6 suffisent pour savoir ce à quoi la victime a droit.

On va voir le régime :  

Article 1 de la loi de 1985 : il prévoit le domaine d’application du nouveau régime : « le domaine de la loi s’applique aux victimes des accidents de la circulation même lorsqu’elles sont transportées en vertu d’un contrat » : ca signifie que cette loi ne pose pas un régime de responsabilité délictuelle ni contractuel, ca transcende la distinction entre contractuel et délictuel. Peut importe que la victime soit transportée ou non en vertu d’un contrat puisqu’on a la réparation des dommages causés par un accident de la circulation. On peut avoir directe ou victime par ricochet, ca s’applique dans les deux cas.

Accident : c’est un événement fortuit, ca arrive par hasard de façon soudaine. En revanche n’est pas un accident un dommage causé volontairement par le propriétaire ou le conducteur du véhicule. Dans la partie amélioration de l’indemnisation, un des points important a été la mise en place d’une assurance obligatoire. Toute victime a donc une indemnisation de la part d’un assureur. Un des grands principes est que la recherche volontaire du dommage n’est jamais assurable. La cour de cassation a fait une interprétation assez large de la notion d’accident de la circulation et elle l’a appliqué même dans des lieux privés.

La question s’est posée aussi pour les compétitions sportives, est ce que c’est un accident de la circulation ? Oui, sauf dans les accidents entre concurrents parce que là c’est couvert par des assurances spéciales. Mais dès lors qu’un tiers circulait c’est couvert par la loi de 1985.

La difficulté a été de savoir quand est qu’on pouvait dire qu’il y avait accident de la circulation au sens qu’il y a une voiture à l’arrêt et un piéton ou un cycliste qui rentre dans la voiture. La cour de cassation a une interprétation très large de l’accident de la circulation, elle en a une interprétation fonctionnelle : dès lors que le véhicule était destiné à circuler, il y a accident de la circulation même si au moment de l’accident le véhicule ne circulait pas. Tout ce qui est destiné à circuler on considère que c’est un accident de la circulation.

« Dans lequel est impliqué un véhicule » : on se demandait ce que veut dire « impliqué ». On sentait que c’était une notion très importante pour l’application de cette loi car si on prend l’alinéa 1er de l’article 1384 on a le terme de « causalité » ou de « fait de la chose ». Est-ce qu’il doit y avoir fait du véhicule ? La question s’était posée quand le véhicule était par exemple à l’arrêt, est ce qu’on peut dire que le véhicule est impliqué dans l’accident, et responsable des dégâts causés par l’accident ? Si on raisonne en terme de causalité non car le véhicule n’a pas été l’instrument du dommage. Il y a des cas aussi où il n’y a pas de choc entre deux véhicules mais il y a les pleins phares. La cour de cassation a eu une définition très large de l’implication du véhicule et désormais on distingue très nettement l’implication et causalité, l’implication du véhicule ne nécessite pas qu’il y ait un lien de causalité. Même si ca ne perturbait pas la circulation on pouvait retenir l’implication du véhicule. Il y a eu une victime qui voit une voiture qui recule de loin et du coup elle tombe sur la chaussée, on dit que le véhicule est impliqué, ca donne une très grande marge pour l’application de la loi et pour l’indemnisation en fonction de la loi.

Il y a deux points plus complexes qui sont apparus dans la jurisprudence : on a hésité sur la notion d’implication du véhicule car on pensait que ca se dédoublait en deux.

La première hypothèse était les accidents complexes : c’est lorsqu’il y a plusieurs collisions en chaine ou plusieurs faits successifs. L’exemple type est une victime qui est sur l’autoroute, elle se fait renverser par une voiture, elle tombe sur la chaussée, ensuite ya deux voitures qui lui passent dessus et elle meurt. Qui est impliqué dans l’accident ? Est-ce que le premier véhicule est responsable de la mort ? Si on avait raisonné en termes de causalité on aurait dit que la mort n’a pas été causée par le premier, on aurait pu séparer les choses. La cour de cassation a considéré qu’en cas d’accidents complexes il fallait considérer qu’il y avait un « accident complexe unique ». Et dès lors même si on peut diviser l’accident, les juges ne doivent pas distinguer et chacun doit être responsable de tous les dommages et même s’il y avait un certain délai.

La deuxième hypothèse était un accident où le dommage n’apparait pas immédiatement. Là encore, par faveur pour la victime la cour de cassation, arrêt du 19 février 1997, a posé une présomption d’imputabilité du dommage à l’accident, même pour les dommages survenus postérieurement. C’est une présomption simple, le responsable pourra démontrer que le dommage survenu ultérieurement n’est pas imputable à l’accident de la circulation.

« Un véhicule terrestre à moteur » : c’est un engin qui se déplace sur la terre et qui a un moteur. Il y a eu de la jurisprudence avec les tondeuses à gazon.

« Remorque ou semi-remorque » : toute partie accessoire du véhicule mais qui sert aussi à se déplacer c’est aussi un VTM. Il faut que ce soit un accessoire nécessaire à la circulation d’un véhicule terrestre à moteur.

« A l’exception des chemins de fer et des tramways circulant sur des voies qui leur sont propres » : dès lors que l’accident a lieu sur ces voies, la loi de 1985 n’est pas applicable car en principe il y a un autre droit qui est applicable.

Il faut préciser le domaine de la loi de 1985 : quand on a un accident où sont impliqué 3 véhicules automobiles, 2 piétons et un cycliste par exemple. L’article 1er dit que c’est « les victimes d’un accident de la circulation ». On considère que ca ne s’applique que pour les accidents dans lesquels est impliqué un VTM. Mais la loi ne s’applique quand la victime est victime d’un accident de la circulation. Si l’action est intentée contre un piéton qui traverse la route, un véhicule doit s’arrêter brutalement et on a un cycliste qui se crash sur la voiture. On a bien un accident de la circulation dans lequel est impliqué un VTM donc elle s’applique, mais ca ne va pas dire que ca s’applique à toutes les situations. Supposons que tout le monde est blessé, le cycliste peut poursuivre le véhicule, le piéton ; le piéton peut poursuivre le véhicule et le cycliste ; le véhicule peut poursuivre aussi les deux. La loi n’est pas applicable à toutes les actions. Si on lit l’article 1er on ne va pas savoir la réponse. En réalité, pour continuer à étudier le domaine, on ne peut pas se contenter de l’article 1er.

Article 2 : c’est un article sur la force majeure ou le fait d’un tiers : le conducteur ou gardien du véhicule ne peut opposer la force majeure ou le fait d’un tiers aux victimes. On a déduit de ce texte que le responsable au sens de la loi de 1985 est le conducteur ou gardien d’un véhicule automobile. Donc en réalité la loi de 1985 n’est applicable qu’aux actions intentées contre un conducteur ou gardien au sens de la loi de 1985 c’est-à-dire aux actions où le défendeur est un conducteur ou gardien !!!

Donc les actions contre le piéton sont soumises au droit commun et donc pas 1985. Les actions contre le cycliste ne sont pas soumises à 1985. On applique la loi de 1985 pour les actions contre le conducteur. Dès qu’on va contre le véhicule c’est 1985 : piéton contre véhicule ou cycliste contre véhicule. Il faut que le conducteur soit le défendeur.

La définition du conducteur ou du gardien n’est pas évidente. Le conducteur est celui qui avait la maitrise du véhicule, celui qui était au volant du véhicule. Le gardien est le propriétaire du véhicule, celui qui a assuré le véhicule et qui n’était pas nécessairement au volant lors de l’accident. Ce n’est donc pas nécessairement la même personne. La loi de 1985 suppose qu’il y ait une victime et un gardien ou conducteur. Il faut que les deux personnes soient dissociées.

Article 2 : Les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d’un tiers par le conducteur ou le gardien d’un véhicule mentionné à l’article 1er.

Article 3 : Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident.

  Les victimes désignées à l’alinéa précédent, lorsqu’elles sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans, ou lorsque, quel que soit leur âge, elles sont titulaires, au moment de l’accident, d’un titre leur reconnaissant un taux d’incapacité permanente ou d’invalidité au moins égal à 80 p. 100, sont, dans tous les cas, indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis.

  Toutefois, dans les cas visés aux deux alinéas précédents, la victime n’est pas indemnisée par l’auteur de l’accident des dommages résultant des atteintes à sa personne lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi.

Article 4 : La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis.

Article 5 : La faute, commise par la victime a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages aux biens qu’elle a subis. Toutefois, les fournitures et appareils délivrés sur prescription médicale donnent lieu à indemnisation selon les règles applicables à la réparation des atteintes à la personne.

  Lorsque le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur n’en est pas le propriétaire, la faute de ce conducteur peut être opposée au propriétaire pour l’indemnisation des dommages causés à son véhicule. Le propriétaire dispose d’un recours contre le conducteur.

Ces articles voient le régime d’indemnisation mais en réalité ces articles définissent uniquement les causes d’exonération. Dans 1384 alinéa 1er ce qui faisait problème c’était uniquement les causes d’exonération. Le cœur du régime de la loi de 1985 consiste uniquement à limiter les causes d’exonération par rapport au droit commun. En droit commun on nous donne la force majeure et faute de la victime alors qu’ici victime par victime on nous explique quelles sont les causes d’exonération possible. Avec la loi de 1985 le régime consiste à limiter les causes d’exonération par rapport au droit commun mais elles indiquent un régime qui est différent selon une double distinction selon le type de dommage et selon le type de victime.

Distinction selon les types de dommage : par exemple l’article 5 on parle de dommages aux biens et article 3 dommages résultants des atteintes à la personne. Le régime ne va pas être le même selon les deux types de dommage et aussi selon les trois types de victime.

Dommage à la personne : Le cœur c’était les atteintes à la personne qui devaient être réparées mieux qu’avec le droit commun. L’article principal est l’article 3 qui pose de façon très détaillée ce régime d’indemnisation.

Article 3 : « les victimes, hors mis les conducteurs de VTM, sont indemnisé des dommages résultant des atteintes à la personne qui leur sont subit, sans que puisse leur être opposée leur propre faute, à l’exception de leur faute inexcusable cause exclusive de l’accident ». L’article 3 est un mini arrêt Démart ( ?). La faute n’est pas opposable à la victime, c’est une exclusion. L’interprétation de la notion de faute inexcusable cause exclusive de l’accident était déterminante.

11 Arrêt du 20 juillet 1987 : la définition de la faute inexcusable est : « seule est inexcusable au sens de l’article 3 la faute volontaire d’une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait du avoir conscience ». Formule très restrictive et très exigeante de la faute inexcusable. En donnant une définition très restrictive de la faute inexcusable, ca conduit très peu souvent à la diminution de l’indemnisation de la victime. Dans 10 de ces 11 arrêt la cour de cassation elle dit qu’il n’y a pas faute inexcusable.

Arrêt du 10 novembre 1995 : l’assemblée plénière a repris exactement la même définition mot pour mot en marquant bien qu’elle voulait avoir une vision restrictive.

Il n’y a qu’une série de cas où l’on considère que c’est une faute inexcusable : quand on franchi un muret ou un obstacle qui sépare des voies de circulation. Quand on franchi et qu’on traverse et qu’on se fait écraser, c’est inexcusable. C’est rarissime.

En plus il faut que ce soit la cause exclusive de l’accident. Elle n’est pas la cause exclusive dès lors qu’on peut trouver une autre cause du dommage. Par exemple si le conducteur roulait trop vite.

Article 3 alinéa 3 : ajoute que dans le cas visé notamment à l’alinéa 1er la victime n’est pas indemnisé par l’auteur de l’accident des dommages résultant des atteintes à la personne lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi.

Article 3 alinéa 2 : les victimes hors mis les conducteurs et les victimes de dommages corporels, lorsqu’elles sont âgées de moins de 16 ans ou plus de 70 ans ou quelque soit le dommage elles sont titulaires au moment de l’accident d’un titre qui leur reconnait un taux d’invalidité ou d’incapacité permanente de plus de 80%,  sont dans tous les cas indemnisés des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis. On ne peut leur opposer aucune cause d’exonération.

Article 3 alinéa 3 : les victimes protégées de l’alinéa 2, la victime n’est pas indemnisée lorsqu’elle a volontairement recherché le dommage qu’elle a subi.

L’article 5 : précise que les fournitures et appareils délivrés sur prescription médicale…réparé selon le régime de l’atteinte à la personne.

Article 4 : victime conducteur : la faute commise par le conducteur du VTM a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subit. Pour la victime conducteur a priori le régime est le même que le droit commun. Donc le cœur de la réforme c’est pour les victimes ordinaires et pour les victimes protégées. Le régime pour les victimes conducteurs est très sévère. L’article 4 vise uniquement le conducteur, si le gardien n’est pas conducteur, il peut très bien avoir été victime. Du coup il y a eu toute une jurisprudence sur la définition d’un conducteur puisque tout le monde veut échapper à la qualification conducteur.

La cour de cassation a donc précisée la définition du conducteur. Et comme c’est une qualification dommageable, on estime que c’est à celui qui invoque la qualité de conducteur de l’autre pour lui imposer sa faute, doit le démontrer. Le conducteur en principe est celui qui est au volant. Donc si quelqu’un est descendu d’un véhicule elle n’est plus conducteur. La question a été plus compliquée lorsque la partie a été éjectée : n’est plus conducteur celui qui a été éjecté du véhicule mais dans un accident complexe elle a tendance à dire que si ca s’est passé en même temps la victime blessée reste conducteur. La qualité de conducteur absorbe les victimes protégées.

La faute du conducteur pour pouvoir lui être opposé, la cour de cassation a décidé qu’il n’est pas nécessaire que la faute du conducteur ait été la cause de l’accident, il suffit qu’elle ait concourue à son propre dommage. Le fait de ne pas porter la ceinture c’est pas ca qui cause les accidents mais ca cause notre dommage. Il y a eu une évolution de la jurisprudence car dans un premier temps la cour de cassation a été sévère vis-à-vis des conducteurs qui avaient consommés de l’alcool et des stupéfiants : si la personne avait bu ca avait causé l’accident, il y avait une présomption de causalité entre l’alcoolémie du conducteur et son dommage.

L’assemblée plénière de la cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence dans deux arrêt du 6 avril 2007 : elle exige pour qu’on puisse opposer la faute au conducteur que soit rapporté la preuve de la causalité entre la faute du conducteur et son dommage. Il faut une faute causale par rapport au dommage.

Dans le premier arrêt on avait un motocycliste qui avait été victime et on avait démontré qu’il avait un taux d’alcoolémie de 0,85g et la cour d’appel avait jugé qu’un tel comportement était fautif mais qu’en réalité cette faute n’avait pas été la cause du dommage dans la mesure où il avait été démontré que le conducteur qui avait été en collision avec lui n’avait pas respecté un stop alors que lui roulait normalement. Sa faute n’avait joué aucun rôle causal dans la réalisation du dommage. On veut une faute causale pas dans l’accident mais dans la réalisation du dommage.

La victime conducteur peut elle-même exercer plusieurs actions, il faut qu’elle poursuive un conducteur ou gardien d’un autre véhicule. Mais il y a toute sorte d’action qui sont possibles. La victime conducteur peut envisager de poursuivre soit le gardien ou conducteur d’un autre véhicule soit le gardien de son propre véhicule. Lorsque la victime conducteur poursuit un autre conducteur ou gardien d’un autre véhicule la question qui s’est posée est qu’on s’est demandé dans quelle mesure l’indemnisation du dommage corporel par le conducteur victime pouvait être réduite. C’est une responsabilité sans faute. Il y a eu une controverse qui a été tranchée par une chambre mixte en 1997 et qui a jugé en fait que c’est les juges du fond qui apprécient souverainement dans quelle mesure la faute diminue la réparation mais l’indemnisation n’est pas exclue si l’autre conducteur n’a commis aucune faute. C’est donc pas la comparaison des fautes, c’est une appréciation souveraine des juges du fond. Pareil lorsque la victime conducteur agit contre le gardien, il y a eu le cas d’une femme qui faisait de l’autostop qui a été pris en charge par une personne qui s’est révélée ivre du coup elle a pris le volant mais elle n’avait pas le permis de conduire. Les héritiers ont demandé réparation au gardien du véhicule. La cour d’appel a rejeté la demande en disant que la victime devait prouver une faute du gardien. Mais la cour de cassation a cassé : le conducteur s’il n’en est pas gardien a droit à indemnisation sauf si elle a commis une faute directe ou par ricochet.

Article 2 : les victimes, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d’un tiers par le conducteur ou gardien d’un véhicule. Cet article vaut pour les 6 cas du tableau. La force majeure ou le fait d’un tiers ne sont pas des causes d’exonération. Le fait d’un tiers on pourra le faire intervenir dans le rapport de contribution à la dette mais pas dans le rapport d’obligation à la dette.

Article 5 aliéna 1 : la faute commise par la victime a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages aux biens qu’elle a subit. Ce sont les trois types de victime, la faute leur est opposable pour limiter la réparation des dommages aux biens. La faute simple au sens de 1382 leur est opposable, ca pourrait aller jusqu’à exclure totalement l’indemnisation de dommage aux bien. si une personne n’avait pas fait attention en traversant avec une bicyclette, on réparera ses dommages corporels mais pas ses dommages aux biens.

Article 5 alinéa 2 : lorsque le conducteur d’un VTM n’en est pas propriétaire, la faute de ce conducteur peut être opposé au propriétaire pour l’indemnisation des dommages causés à son véhicule. Le propriétaire dispose d’un recours contre le conducteur.

Article 6 : Le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d’un accident de la circulation est réparé en tenant compte des limitations ou exclusions applicables à l’indemnisation de ces dommages.

C’est le cas des victimes par ricochet. Le régime est assez similaire au droit commun. Le préjudice subit par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d’un accident de la circulation est réparé en tenant compte des limitations ou de l’exclusion applicable à l’indemnisation de ces dommages.

Si on a un enfant de moins de 16 ans est victime d’un accident de la circulation, on ne peut que lui opposer la faute simple pour les dommages aux biens ou la recherche volontaire du dommage pour la personne. On va lui faire bénéficier des protections particulières de la victime directe à la victime par ricochet. La victime par ricochet est traitée comme la victime directe.

Si lorsque la victime par ricochet est conducteur, on peut se demander si elle peut bénéficier du conducteur. Si le passager du véhicule était un proche du conducteur. On pouvait dire qu’il est conducteur et donc c’est l’article 4 qui dit qu’on peut opposer la faute au conducteur et ca ne distingue pas si c’est victime par ricochet ou non. On pouvait dire que c’était l’article 6 qui s’appliquait car c’était spécial. Une chambre mixte a été réuni le 28 mars 1997 : on applique l’article 4 : victime par ricochet conducteur on peut lui opposer sa faute simple.

Cas pratique : on a un piéton qui est pressé, c’était un feu vert, il y a une voiture qui freine brusquement mais il y a une deuxième qui lui rentre dedans et du coup la première rentre dans le piéton. Il a vase magnifique de chine en main très cher. Tout est cassé et le piéton est tué. Les héritiers viennent nous voir pour nous demander ce qu’il en est.

On répond comme dans l’ordre du cours d’aujourd’hui. On dit d’abord puisqu’on a affaire à un accident dans lequel a priori est intervenu une voiture donc on peut songer à l’application de la loi de 1985. Il faut vérifier si la loi de 1985 s’applique. On a bien deux VTM, on a un accident de la circulation tel que défini par la jurisprudence ( : quelque chose qui est intervenu de façon impromptue). On a donc affaire à un accident de la circulation dans lequel on a un VTM qui est intervenu donc a priori la loi de 1985 s’applique. Mais ca ne s’applique que dans le cas où le défendeur est conducteur ou gardien. L’action contre l’un ou l’autre conducteur sera soumis à la loi de 1985.

On a un accident complexe car il y a deux carambolages successifs et deux VTM impliqués mais la jurisprudence ne fera pas la différence donc il vaut mieux poursuivre les deux en même temps. Le régime : il est différent selon la personne et les biens. Il y a bien un dommage à la personne puisque le piéton a été tué. Ca rentre dans les atteintes à la personne. Ca dépend du type de victime pour l’indemnisation. On sait que ce n’était pas une victime conducteur, on suppose que c’est une victime ordinaire et donc le régime de réparation sera celui ordinaire.

Article 4 : la difficulté consiste à savoir si le piéton a commis une faute inexcusable. La cour de cassation a donné une définition qui est dans le code civil. Or ici on nous dit simplement que la victime a traversé une route simple, donc pas de faute inexcusable. Il n’y a pas de faute inexcusable faute exclusive de l’accident. Grand 2 le vase : pour les dommages aux biens la faute simple de la victime lui est opposable. Or on peut supposer que le fait de traverser la rue sans faire attention est une faute au sens du droit commun et donc cette faute pourra être opposée à la victime.

On conclue que la loi de 1985 a voulu réparer beaucoup plus aisément le dommage à la personne puisque le dommage à la personne lui sera entièrement réparé alors que le dommage aux biens ne sera pas réparé entièrement.

 

Biens  

Personnes 

Victimes ordinaires 

Faute au sens de 1382

Faute inexcusable cause exclusive de l’accident

Recherche volontaire du dommage

Victimes conducteurs 

Faute causale par rapport au dommage

Faute causale par rapport au dommage

Victimes particulièrement protégées : les moins de 16 ans, plus de 70 ans, et ceux qui ont un taux d’invalidité ou d’incapacité permanente supérieur à 80% 

Faute au sens de 1382

Recherche du dommage.

 

Question de limiter non seulement les causes d’exonération qu’on peut opposer à la victime mais aussi la procédure. Articles 7 à 27 de la loi de 1985.

L’idée principale était d’accélérer les procédures d’indemnisation, pour que l’assureur ne fasse pas trainer les choses. Le législateur a voulu obliger l’assureur à faire une offre d’indemnisation dans un délai très bref. Ca a été codifié dans le code des assurances. Le délai maximal pour des dommages corporels est de 8 mois maximum, l’assureur doit proposer une offre. Il peut y avoir une offre provisoire et une offre définitive à compter du jour où la consolidation a été effectuée, le délai est de 5 mois.

Quand il y a un dommage corporel l’assureur doit faire une offre d’indemnisation qui couvre tous les dommages, y compris les dommages aux biens. Le tout est fait sous menace de sanction très grave, à la fois pour le cas où l’offre d’indemnisation est tardive, ou si elle est insuffisante. Dans le cas où l’offre est insuffisante ou tardive, l’assureur devra verser la différence avec des indemnités de retard qui ont un taux d’intérêt très élevé (les intérêts sont doublés). En plus l’assureur doit verser des pénalités au fonds de garantie. La victime peut quand même renoncer à faire un procès et transiger avec l’assureur. La transaction peut être remise en question que pour des cas très limités.

La victime a toujours un droit de dénoncer la transaction dans les 15 jours et il y a des règles particulières de protection pour que le consentement de la victime soit assuré. Subsidiairement on prévoit que lorsqu’on ne peut pas retrouver l’auteur du dommage ou que l’auteur n’est pas assuré, il y a un fonds de garantie. On a vu tout ce qui était l’obligation à la dette.

Après il y a des rapports de contribution à la dette. La question des recours entre coauteurs dans la loi de 1985 : c’est l’idée qu’un conducteur ou gardien a indemnisé la victime, s’il y avait d’autres personnes il y aura des actions récursoires. La question est de savoir si c’est un recours contre d’autres coauteurs impliqués selon la loi de 1985 ou selon le droit commun. La cour de cassation a dit que c’était un recours qui se faisait en fonction de leur faute respective, faute causale, selon le degré de participation à la réalisation du dommage. Le conducteur ou gardien peut recourir contre une personne au sens du droit commun. En général on fait selon la responsabilité effective sinon tête par tête. La cour de cassation a déclaré certaines actions récursoires irrecevables.

L’idée générale est par exemple le cas des recours contre des personnes responsables du fait de la victime. Par exemple on a un conducteur qui répare le dommage corporel causé à un enfant et il fait un recours contre les parents qui n’ont pas surveillés l’enfant. Juridiquement ca serait possible mais ca reviendrait à retirer une partir de ce qu’on a donné : arrêt du 20 avril 1988. La cour de cassation a décidé que l’action était irrecevable. Elle a déclaré irrecevable le recours contre les héritiers ou le conjoint de la victime car sinon ca aurait pour effet de vider l’indemnisation : arrêt du 28 juin 1999.

Théorie de la garantie : c’est la thèse de Starck de 1947 qui s’appelle Essai sur la responsabilité civile considérée en sa double fonction de garantie et de peine privée. C’est absurde de distinguer selon les types de fait générateur, on devrait distinguer selon les types de dommage. Il devrait être responsable même sans faute. Et les autres dommages purement économiques ou moraux, la responsabilité économique joue le rôle de peine privée. Certains dommages sont tellement graves qu’il faut une garantie d’indemnisation.

Responsabilité du fait des choses en 1804 seulement deux régimes spéciaux : animaux et bâtiment en ruine. Ensuite on découvre un principe général de fait des choses avec l’article 1384, arrêt Jandl’heur. Ensuite accident de la circulation. Le régime est concentré sur le fait de diminuer les hypothèses de faute de la victime qu’on peut lui opposer.

  1. Régime spécial de la responsabilité du fait des produits défectueux 

Ce régime a son origine dans une directive communautaire du 25 juillet 1985. C’était une directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux. Elle devait être transposée avant le 25 juillet 1988. En France les choses ont trainées. La nouvelle directive laissait sur certains points l’appréciation aux Etats membres. Elle a été condamnée plusieurs fois pour manquement. Les directives ont un effet direct : il faut qu’elles soient suffisamment précis, non conditionnées. Effet direct vertical et non pas horizontale. Arrêt Marchal.

On a fini par transposer cette directive par une loi du 19 mai 1998 et ce régime a été transposé dans le code civil. La nouvelle loi a été codifiée et on a ajouté les articles 1386-1 à 1386-18 du code civil.

Article 1386-1 : le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime. ca veut dire que le nouveau régime de la responsabilité transcende la distinction délictuelle et contractuelle. La personne responsable est le producteur et donc ca a posé des difficultés dans la transposition.

Article 1386-2 : explique les dommages qui sont réparés par le nouveau régime. La responsabilité du fait des produits défectueux est ce qu’on appelle l’obligation de sécurité entendue au sens que quelque chose va cause des dommages soit à la personne soit aux biens, par le produit défectueux. Ce n’est pas les dommages résultant de ce que le produit est défectueux lui-même, qui rentre dans l’action en garantie du vendeur ou de résolution du contrat. C’est le dommage que le produit cause à d’autres biens ou à des personnes, c’est uniquement la sécurité. Les dispositions du présent titre s’appliquent à la réparation du dommage suite à l’atteinte à la personne. Elle s’applique aussi à la réparation du dommage supérieur à un montant déterminé par un décret qui résulte à une atteinte à bien autre que le produit défectueux lui-même. L’obligation de sécurité pour la responsabilité contractuelle c’est uniquement corporel. Ici c’est à la fois les atteintes aux biens et à la personne. Pour le décret c’est la loi de 2004 car au départ la loi qui avait transposé avait appliqué le régime même en deçà de 500€. La CJUE nous a condamnés en 2002 en disant que la directive prévoyait un forfait et donc il ne fallait pas modifier le forfait. Le décret du 11 février 2005 a fixé comme par hasard 500€.

Qu’est ce qu’une atteinte à un bien ? On a vu atteinte aux biens et atteintes à la personne. Il y avait atteinte à un bien stricto sensu mais on peut aussi y mettre un préjudice purement économique. Par exemple l’entreprise a un manque à gagner. Il faut savoir si ca rentre dans le domaine de la directive. La réponse est non, il faut entendre atteinte à un bien comme un dommage purement matériel, comme un bien endommagé. Les dommages purement économiques seraient réparés uniquement pour le cocontractant qui a un manque à gagner, responsabilité contractuelle.

On s’est demandé si le nouveau régime s’applique uniquement dans un rapport professionnel-consommateur. La directive avait visé les produits de consommation privée. Et là encore il y a eu une controverse en France car il fallait savoir où on allait transposer cette directive. Certains étaient partisans de codifier cette directive dans le code de la consommation et donc seulement entre professionnels et consommateur. Sinon c’était dans le code civil pour tout le monde. La doctrine a tranché pour le code civil. On n’a pas été condamné pour l’instant et donc le régime a priori est applicable à toutes les relations.

Arrêt du 24 juin 2008 : la chambre commerciale a posé une question préjudicielle à la CJUE pour savoir si on peut appliquer le nouveau régime pour des biens destinés à l’usage professionnel. La CJUE a laissé cette possibilité.

Article 1386-3 : explique les produits qui sont couvert par ce régime de responsabilité. Le code civil adopte une définition très large de la notion de produit : est un produit tout bien meuble même s’il est incorporé dans un immeuble. Les immeubles ne sont pas des produits. Y compris les produits du sol, de l’élevage, de la chasse et de la pêche et l’électricité. On l’a appliqué aux médicaments, aux cigarettes.

Article 1386-4 : il explique ce qu’est un produit défectueux. C’est le cœur du nouveau régime. La définition a été reprise d’une loi adoptée en France depuis 1983. Ca ne doit pas s’entendre au sens courant du terme, à savoir une voiture présente un défaut. Ca c’est un vice selon le droit des contrats, ou un vice caché au sens du droit de l’amende. Ici c’est : un produit est défectueux lorsqu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre.

Sécurité est à rapprocher de l’article 1386-2 : un bien qui ne cause pas de dommage à une personne ou à un autre bien. Il faut compte tenu du contexte, de vente, de production, présentation du produit, ca créé une attente auprès du consommateur du bien. L’alinéa 2 précise : il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l’usage qu’il peut en être attendu, et du moment de sa mise en circulation. On tient compte de l’information qui est donnée autour du produit. Cet article indique bien en réalité aussi les conditions de cette mise en œuvre de la responsabilité des produits défectueux. Pour mettre en œuvre le nouveau régime il va falloir uniquement démontrer le défaut. Il faut un défaut, un dommage causé par le produit et un lien de causalité. Mais c’est donc un régime de responsabilité sans faute ! il n’est pas nécessaire de prouver la faute, c’est un régime de responsabilité objective ! L’aliéna 3 précise qu’un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu’un autre a été mis sur le marché et est plus perfectionné.

Article 1386-5 : précise la notion de mise en circulation du produit. Pour qu’un produit puisse être soumis au régime il faut qu’il ait été mis en circulation. Un produit est mis en circulation lorsque le producteur s’en est dessaisi volontairement. En réalité ce qu’on chercher c’est quand est ce que le produit a été mis sur le marché, quand est ce qu’il est sorti du processus de fabrication. La CJUE a précisé ce point : il y a mise en circulation au sens de cet article lorsque le producteur l’a fait volontairement sortir du processus de fabrication. Ca peut être un peu en amont de la mise sur le marché.

Article 1386-6 : il indique qui est responsable au sens de la directive. On nous dit que est producteur, assimilé à un producteur et qui ne peut pas être assimilé à un producteur. Ca sous entend que le responsable est le producteur mais ca ne le dit pas. Est producteur lorsqu’il agit à titre professionnel le fabriquant d’un produit fini, le producteur d’une matière première ou le fabriquant d’une partie composante. Fabriquant c’est objet artificiel. Sur ce point il y avait eu une grande controverse puisque la directive prévoyait cette responsabilité du producteur.

La responsabilité est canalisée sur le producteur : même s’il y a d’autres personnes qui interviennent dans le processus de production, c’est seulement le producteur qui est responsable. On avait appliqué le régime de la directive aussi à toute personne qui importe le produit par exemple ou à toute personne qui impose sa marque. On avait mis que le loueur, le vendeur, le fournisseur pouvaient être responsable. On a été condamnés par la CJUE dans l’arrêt d’avril 2002 en disant qu’on devait canaliser la responsabilité sur le producteur et donc seul le producteur était responsable. On avait une action récursoire et donc in fine on avait la même chose. La CJUE veut faire en sorte que la responsabilité soit le plus léger possible, elle veut harmoniser par le bas ( : harmonisation maximale). On impose le même régime à tout le monde, et en général le même régime c’est le régime le plus bas. Le droit de la consommation est perçu comme une entrave à la concurrence. Maintenant la seule personne responsable est le producteur. On prend celui qui a mis en circulation, on prend le premier seulement. Est assimilé à un producteur : toute personne agissant à titre professionnel

  • soit qui se présente comme producteur en apposant sur le produit sa marque, son nom ou un autre signe distinctif
  • soit celui qui importe un produit dans l’UE

Le dernier alinéa on mélange avec le droit de la construction : quand il est applicable on applique le droit de la construction et non pas la directive.

Article 1386-7 : hypothèse où le producteur ne peut pas être identifié : il peut y avoir une responsabilité subsidiaire du vendeur, loueur ou tout fournisseur professionnel. Tous les vendeurs intermédiaires ou même les loueurs peuvent être responsables. Mais ils peuvent être exonérés de leur responsabilité s’ils désignent leur propre fournisseur ou le producteur dans un délai de 3 mois.

Article 1386-8 : on précise : en cas d’un dommage causé par le défaut d’un produit incorporé dans un autre… le producteur de la partie composante et le producteur du produit en entier sont responsables solidairement. Ensuite le producteur de la partie principale pourra faire une action récursoire.

Article 1386-9 : le demandeur (précise la charge de la preuve qui pèse sur la victime, droit commun) doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.

Ensuite on précise le régime de responsabilité : régime de responsabilité de plein droit, sans faute, objective. Le producteur ne peut pas s’exonérer en démontrant qu’il n’a pas commis de faute. Ceci dit, on précise certaines façons par lesquelles le producteur peut s’exonérer de sa responsabilité.

Article 1386-10 : le producteur peut être responsable du défaut alors même que le produit a été fabriqué dans le respect des règles de l’art ou des normes existantes ou qu’il a fait l’objet d’une autorisation administrative. Le producteur a fait comme on fait d’habitude, il a respecté les règles de l’art. Il a aussi respecté les normes existantes, par exemple il fabrique une TV, il y a des normes AFNOR, le produit rempli la norme qui a été mise pour la fabrication de tel produit. Pour fabriquer un médicament il faut une autorisation administrative. Le producteur peut tout de même être responsable. Si en revanche on a un décret ou un arrêté qui dit qu’il faut absolument faire comme ceci pour produire tel produit. Et si ensuite le défaut est du précisément à ce qu’on a ajouté parce que le décret disait qu’il fallait l’ajouter, là c’est une cause d’exonération. Le premier cas ce n’est pas la norme qui est à l’origine du produit défectueux.

Article 1386-11 : principal article sur les causes d’exonération pour le producteur. Le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve (présomption de responsabilité, c’est le producteur qui doit prouver pour s’exonérer) :

  • il peut prouver qu’il n’avait pas mis le produit en circulation : attention l’absence de mise en circulation n’est pas une cause d’exonération de responsabilité.
  • il peut prouver que compte tenu des circonstances il y a lieu que le défaut ayant causé le dommage n’existait pas au moment de mise en circulation ou qu’il a été causé postérieurement.
  • Il peut prouver que le produit n’a pas été destiné à la vente ou à toute autre forme de distribution. Ca rejoint un peu l’absence de mise en circulation.
  • La directive laissait une option aux Etats membres pour « les risques de développement » pour savoir s’ils étaient ou non une cause d’exonération pour le producteur. C’est un défaut qui au moment où le produit a été mis sur le marché était indécelable car au moment de l’évolution scientifique et technique on ne pouvait pas savoir que le produit était défectueux. On l’état de la science on ne pouvait pas le connaitre. Arrêt de 1886 : a l’époque on ne pouvait pas savoir que l’association de deux molécules pouvait présenter un risque pour la santé avec un médicament. Avant la directive les producteurs et les vendeurs ne pouvaient pas s’exonérer en montrant que c’était un risque de développement. La directive nous a laissé libre. La France ne voulait pas que ce soit une cause d’exonération. Il y a eu une négociation. On était dans les années 1980 et à l’époque il y avait l’affaire du sang contaminé qui avait été un traumatisme. L’article dit : il peut prouver que l’état des connaissances scientifiques et technique au moment où le produit été mis en circulation n’a pas permis de déceler l’existence du défaut.
  • Il peut prouver que le défaut est du à la conformité du produit avec des règles impératives d’ordre législative ou réglementaire.

On rajoute dans cet article que le producteur de la partie composante n’est pas non plus responsable s’il établit (il était responsable in solidum avec celui qui avait fait la partie principale) que le défaut est imputable à la conception du produit dans lequel il a été incorporé ou aux instructions données par le producteur de ce produit».

La charge de la preuve de la cause d’exonération pèse sur le producteur.

1° : En toute rigueur, une cause d’exonération est lorsque la responsabilité est d’ores et déjà engagée. Donc il faut distinguer les conditions de mise en œuvre de la responsabilité, si l’une fait défaut il n’y a pas de responsabilité, mais si elles sont toutes réunies il y a responsabilité mais on peut s’en exonérer. Donc l’absence de mise en circulation du produit ne devrait pas être une cause d’exonération car cette absence de mise en circulation empêche la mise en œuvre de la responsabilité puisque c’est une des conditions de la mise en œuvre de la responsabilité. Mais ce n’est pas grave c’est la rédaction qui est un peu mauvaise.

2° : On réintroduit l’idée de causalité. Par exemple si le produit est consommé après la date de péremption. Il faut que ce soit un défaut qui n’existait pas du tout au moment de la mise sur le marché, c’est-à-dire pas qu’il était latent, il faut qu’il n’existe pas du tout à ce moment là.

3° : Cela rejoint un peu l’absence de mise en circulation. Ce serait par exemple si par mégarde un produit s’est retrouvé dans un processus commercial alors que le producteur ne destinait pas à la vente. Cela rejoindra souvent l’absence de mise en circulation.

4° : Ceci est le point qui a été le plus controversé. On peut dire que c’est en grande partie à cause de ceci que la transposition de la directive a été retardée. La directive laissait une option aux Etats membres pour ce que l’on appelle les risques de développement. Elle laissait une marge d’appréciation quant au point de savoir si ce que l’on appelle les risques de développement étaient ou non une cause d’exonération pour le producteur. Un risque de développement est un défaut qui, au moment où le produit a été mis sur le marché, était indécelable parce qu’en l’état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation, on ne pouvait pas savoir que le produit était dangereux, défectueux. C’est un risque, puisque personne ne peut savoir, une potentialité de danger. La grande question était de savoir qui supporte ce risque. Il y a eu énormément de lobbys des producteurs.

Arrêt de 1986: une personne avait pris un médicament et, quelques temps après, en association avec le premier médicament, elle en avait pris un second. Elle a eu des dommages graves et a fait un procès contre le fabricant de l’un et l’autre médicament et il a été démontré qu’à l’époque, on ne pouvait pas savoir que l’association des deux molécules pouvait présenter un risque pour la santé. Ceci était typiquement un risque de développement. Les producteurs ont dit qu’ils ne savaient pas. La Cour de cassation a dit que c’était les producteurs qui devaient supporter le risque de développement. Donc en droit français, avant la directive, les producteurs ne pouvaient pas s’exonérer en démontrant que c’était un risque de développement.

Il y a eu un compromis fait en deux temps. Le 4° est la première partie du compromis. Le risque de développement pèse sur le consommateur. Mais 2e temps du compromis, article 1386-12.

Article 1386-12 : « le producteur ne peut invoquer la cause d’exonération prévue au 4èmement de l’article 1386-11 lorsque le dommage a été causé par un élément du corps humain ou par les produits de celui-ci ». C’est mal rédigé car on pense toujours que quand il y a quelque chose qui arrive d’un endroit ca arrivera toujours de cet endroit. C’était pour couvrir les affaires sang contaminé. Mais le vrai problème est dans les cas où il faut une garantie d’indemnisation, c’est-à-dire pour les cas les plus graves pour la santé humaine. Mais ca ne rentrera pas toujours dans cet article. Si un poulet cause beaucoup de dommage à beaucoup de personnes, on ne pourra pas appliquer cet article.

Cet article est très mal rédigé. On pense toujours que quand quelque chose arrive d’un endroit cela arrivera toujours du même endroit. On a voulu dire à l’opinion publique que bien sûr s’il y a une nouvelle affaire comme le sang contaminé, les producteurs seront responsables. Cet article 1386-12 était pour couvrir les affaires type sang contaminé, le sang est bien un produit issu du corps humain. Mais dans quel cas il ne faudrait vraiment pas que le producteur puisse s’exonérer ? Dans les cas où il faut une garantie d’indemnisation, c’est-à-dire cas les plus graves pour la santé humaine. Or ce ne sera pas toujours des cas où c’est un élément ou un produit du corps humain. Par exemple, la vache folle. L’article 1386-12 n’est pas applicable. Selon la prof, on aurait dû parler de «dangers de masse pour la santé humaine».

Donc le risque de développement est une cause d’exonération, sauf quand le dommage a été causé par un élément du corps humain ou par les produits issus de celui-ci.

5° : Le producteur a respecté des règles, et ce sont ces règles là qui ont conduit au défaut. Il y a un défaut parce que l’on a respecté ces règles.

Alinéa 2 : Il y a deux hypothèses. Soit le défaut est dû au mode de fabrication imposé par le producteur du produit total, soit c’est le produit dans son ensemble qui est défectueux. Dans ces deux cas, le responsable est le producteur du produit total.

ARTICLE 1386-13 :  

«La responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d’une personne dont la victime est responsable».

La faute de la victime ou d’une personne dont la victime est responsable. Faute de quelqu’un qui aurait contribué à la réalisation du dommage pour la victime. Pas beaucoup de jurisprudence sur cet article.

ARTICLE 1386-14 :  

«La responsabilité du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage».

ARTICLE 1386-15 :  

Clauses limitatives de responsabilité. Peut-on stipuler des clauses exclusives ou limitatives en matières de fait des produits défectueux ? Non.

Alinéa 1er : «Les clauses qui visent à écarter ou à limiter la responsabilité du fait des produits défectueux sont interdites et réputées non écrites».

Ce n’est pas l’entier contrat qui est annulé mais uniquement la clause, qui est réputé non écrite.

Alinéa 2 : «Toutefois, pour les dommages causés aux biens qui ne sont pas utilisés par la victime principalement pour son usage ou sa consommation privée, les clauses stipulées entre professionnels sont valables».

Cet alinéa prévoit un cas où par exception, la clause limitative de responsabilité serait valable uniquement à deux conditions : que la clause soit stipulée entre professionnels et que le dommage ait été causé à un bien qui n’est pas utilisé par la victime principalement à son usage privé.

Donc a contrario, la clause n’est jamais valable si c’est un dommage à la personne. Et même si c’est entre deux professionnels, si l’un des professionnels utilise le bien à titre privé, la clause n’est pas valable. Il faut que le dommage soit causé à un bien qui n’est pas utilisé à titre privé.

ARTICLE 1386-16 :  

Cet article de même que 1386-17 prévoit le délai de prescription.

Article 1386-16 : «Sauf faute du producteur, la responsabilité de celui-ci, fondée sur les dispositions du présent titre, est éteinte dix ans après la mise en circulation du produit même qui a causé le dommage à moins que, durant cette période, la victime n’ait engagé une action en justice».

La prescription est de dix ans après la mise en circulation. C’est-à-dire que le régime des produits défectueux joue pendant les dix années après la mise en circulation. Mais si un dommage survient après, cela ne signifie pas que le producteur ne sera pas responsable, mais il ne le sera pas sur le régime de la directive mais sur un autre régime. Cependant quand il y a faute on peut continuer d’utiliser la directive. Ceci étant dit c’est inutile car s’il y a une faute, c’est que l’on peut utiliser 1382 aussi.

Aussi l’action en justice interrompt la prescription de dix ans.

On voit bien que le texte dit dix ans après la mise en circulation du produit. On s’est donc demandé ce qu’est la mise en circulation du produit : est-ce la même définition que celle que l’on a vue étant une condition de la responsabilité ? Car là c’est un point de départ de la prescription.

La CJUE a donné une définition un peu différente de la mise en circulation. Il faudra donc parler de la mise en circulation au sens du point de départ du délai de 10 ans. Produit doit être entré dans un processus de commercialisation. On a voulu être favorable au consommateur. Plus on reporte le point de départ, plus cela lui est favorable.

ARTICLE 1386-17 :  

Prévoit la prescription de l’action en réparation. Donc action intentée par la victime.

«L’action en réparation fondée sur les dispositions du présent titre se prescrit dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur».

Donc il faut qu’il connaisse le dommage, le défaut et l’identité du producteur. Le délai ne court pas tant que le demandeur ne connaît pas les trois. On assimile à la connaissance l’ignorance illégitime : le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage. C’est-à-dire il ne le connait pas mais il a été négligent, dans ce cas le point de départ n’est pas reporté.

ARTICLE 1386-18 :  

A priori, cet article précise quel est le domaine de la directive, au sens quels sont les autres régimes qui demeurent possibles en plus de celui de la directive. C’est-à-dire que la directive dit qu’elle fait un régime de responsabilité sans faute pour les produits défectueux, mais elle vient s’insérer dans un droit où il y a plein d’autres régimes (ex: action en résolution…)

Est-on obligé de se fonder sur la directive, ou peut-on préférer d’autres régimes ? Car la France est très protectrice et il y a en France des régimes plus favorables que les produits défectueux.

Ex: association de deux médicaments dont on ne savait pas qu’elle pouvait avoir un défaut de sécurité. Si c’est un médicament, en utilisant la directive cela rentre dans le risque des développements et le producteur peut s’exonérer. Alors que sur le droit français, ce n’est pas une cause d’exonération.

Donc est-ce que la directive efface tous les autres régimes ?

La directive semblait a priori tout à fait conciliante sur ce point car l’article 13 de la directive utilisait une formule qui a été reprise textuellement à l’article 1386-18 du Code civil. La directive disait à peu près pareil que cet article.

«Les dispositions du présent titre ne portent pas atteinte aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre du droit de la responsabilité contractuelle ou extra contractuelle ou au titre d’un régime spécial de responsabilité».

On a recopié l’article de la directive.

En lisant cet article, on a bien l’impression que l’on peut utiliser tout ce qu’on veut. Ceci serait l’interprétation évidemment favorable au consommateur et à la victime, elle n’utiliserait la directive que quand elle lui serait favorable. Mais la France a été condamnée sur une jurisprudence qu’elle avait, dans laquelle elle continuait d’appliquer tous les régimes. Toujours dans l’arrêt du 25 avril 2002, la CJUE a jugé que la directive ne saurait être interprétée (ne peut pas être interprétée) comme laissant aux Etats membres la possibilité de maintenir un régime général de responsabilité du fait des produits défectueux différent de celui de la directive.

En clair, on ne peut pas maintenir un régime général de responsabilité du fait des produits défectueux différent de celui de la directive. Cela signifie qu’un régime de responsabilité sans faute comme celui des produits défectueux. Si c’est un régime de responsabilité sans faute, on doit utiliser le nouveau régime.

La cour ajoute qu’une place est simplement maintenue (alors que la précision n’était pas prévue dans le texte) simplement pour les régimes de responsabilité contractuelle ou extra contractuelle reposant sur des fondements différents. Donc on ne peut maintenir que des régimes reposant sur des fondements différents tels que la garantie des vices cachés ou la faute.

Donc on ne peut maintenir de régime sans faute du type des produits défectueux.

On s’est demandé ce que ceci signifie et on se le demande encore. En effet il faut passer en revue toutes les autres actions qui existaient.  A priori, tout ce qui est responsabilité sans faute est supprimée pour les produits défectueux :

  • Article 1384 alinéa 1er responsabilité sans faute
  • Article 1147 obligation de résultat responsabilité contractuelle qui est une responsabilité sans faute
  • A priori obligation de sécurité de résultat

Donc la CJUE nous dit qu’on peut quand même utiliser 1382. Mais là il faut prouver la faute donc c’est un régime évidemment beaucoup moins favorable. Du coup, cela a posé des questions. Arrêt récent du conseil d‘Etat.

Conseil d’Etat, 4 octobre 2010 : cet arrêt est très intéressant car il pose à la CJUE des questions préjudicielles.

Il y a la loi du 4 mars 2002 qui pose une responsabilité médicale applicable autant dans les cliniques publiques que privées. Mais le Conseil d’Etat a par ailleurs une jurisprudence sur la responsabilité médicale qui est assez favorable à la victime dans les hôpitaux publics car responsabilité sans faute des dommages causés par la défaillance des produits et appareils utilisés.

Du côté du droit privé, la responsabilité médicale est une responsabilité pour faute, sauf pour les produits et matériels utilisés par les médecins. Dans ce cas c’est de l’obligation de sécurité de résultat donc responsabilité sans faute.

Le Conseil d’Etat demande : est-ce qu’on peut dire qu’il y a une spécificité de la responsabilité publique et maintenir la directive :  

La directive de 1985 permet-elle la mise en œuvre d’un régime de responsabilité fondée sur la situation particulière des patients des établissements publics de santé en tant qu’il leur reconnaît notamment le droit d’obtenir de ces établissements, en l’absence même de faute de ceux ci la réparation des dommages causés par la défaillance des produits et appareils qu’ils utilisent, sans préjudice de la possibilité pour l’établissement d’exercer un recours en garantie contre le producteur ?

Peut-on maintenir un régime de responsabilité différent et prévoir une responsabilité particulière ?

 

Sous-titre 3 : La responsabilité du fait d’autrui 

 

Une personne doit répondre d’une autre personne. Idée que l’on est responsable pour autrui. Réticent à ce type de responsabilité car c’est une forme de responsabilité collective. La responsabilité collective n’est pas du tout dans nos cultures. L’idée de rendre responsable tout le monde pour le fait commis par quelqu’un, il faut y faire attention. Mais des responsabilités de fait d’autrui apparaissent naturelles et ont été prévues depuis 1804. Le plus naturel est la responsabilité des pères et mères du fait de leur enfant mineur.

Article 1384 du Code civil. Avant c’était un article de transition. L’article 1384 étaient des cas particuliers de responsabilité du fait d’autrui.

Les principaux existaient dès 1804 et même dès le droit romain :  

  • Les pères et mères du fait de leur enfant mineur
  • Les maîtres et commettants du fait de leurs domestiques et préposés
  • Instituteurs et artisans du fait de leurs élèves et apprentis

Donc 5 régimes : pères et mères, commettants, maîtres, instituteurs, artisans.

En fait, cela fait trois régimes car maîtres et commettants c’est le même régime, et instituteur et artisans pas tout à fait le même donc on peut dire qu’il y en a quatre. On va principalement voir deux régimes. Le maitre du fait des domestiques est un régime désuet.

Artisan du fait des apprentis : lié à un contrat d’apprentissage. Contrat quand un apprenti est formé par un artisan mais en même temps il est payé. Salaire moindre car il y a également une formation. Donc responsabilité des artisans du fait de leur apprenti.

Mais les deux principaux régimes que nous allons voir sont les plus courants : père et mère du fait de leur enfant mineur, et commettants du fait de leur préposé.

Ces régimes sont pratiquement inchangés depuis 1804. Les textes sont pratiquement inchangés. La seule chose qui a été changée dans les pères et mères est que l’on parlait de garde des enfants, père et mère qui ont le droit de garde des enfants mais on a changé garde par «autorité parentale». C’est un changement purement rédactionnel et une adaptation du vocabulaire par rapport au droit de la famille. Sinon, texte inchangé depuis 1804 tant pour les commettants que pour les pères et mères.

En réalité, la responsabilité n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était en 1804. Régime totalement bouleversé. L’idée générale d’évolution est assez complexe. Tous les régimes se sont assouplis pour une meilleure indemnisation des victimes.

Exemple de dissertation: «La ligne d’évolution générale du droit de la responsabilité civile». Le principe: vers une meilleure indemnisation des victimes / Des régimes toujours favorables à la victime. Tout ce qui va dans le sens d’une meilleure indemnisation. Donner les grandes lignes de l’évolution. Titre assez simple et très parlant. Il faut faire comprendre que la ligne d’évolution a été la meilleure indemnisation de la responsabilité civile. Toujours plus souple: accidents de la circulation, produits défectueux sauf points où l’UE freine. Chercher les exceptions à cette évolution. Quelles sont les exceptions : un micro point que sont les choses inertes, le droit de l’UE avec les produits défectueux, et la responsabilité des préposés. UE qui met un frein à la meilleure indemnisation.

En 1804, il y avait des cas spéciaux de responsabilité du fait d’autrui prévus à l’article 1384 par ses différents alinéas.

Com du coté de la responsabilité du fait des choses il n’existait pas de principe général de responsabilité du fait d’autrui. Or la question s’est posée notamment en 1930 quand on a découvert dans l’alinéa 1er de 1384 un principe général de  responsabilité du fait des choses, on s’est demandé ce qu’il en était du fait d’autrui car en effet cet alinéa 1er dispose que l’on «est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre (…)».

Jand’heur parle du fait des choses. Alors quid du fait des personnes dont on doit répondre ? Est-ce à dire qu’il faut aussi un principe général de responsabilité du fait des personnes dont on doit répondre en dehors des cas particuliers de 1384 ? A l’époque on avait dit non car fait des choses on peut concevoir qu’on doive assumer la responsabilité de toutes les choses qu’on a sous sa garde, mais qu’est ce que cela signifie le régime de responsabilité du fait des personnes dont on doit répondre. Ceci est purement tautologique. Être responsable des personnes dont on doit répondre = être responsable des personnes dont on est responsable. Donc cela ne nous dit rien sur le régime. En plus à la différence du fait des choses, ici les cas étaient déjà prévus. On ne voyait pas vraiment dans quels cas la responsabilité pouvait être engagée. A priori on ne voyait pas dans quels cas on pouvait étendre le régime.

Ceci étant dit, en 1991 est apparue devant la Cour de cassation une affaire où s’est révélé finalement nécessaire d’appliquer l’alinéa 1er à la responsabilité du fait des personnes, car on était dans un cas où finalement, aucun des cas spéciaux de 1384 n’étaient applicables et pourtant on estimait que c’était opportun de retenir la responsabilité du fait de quelqu’un d’autre.

Pour qu’une personne soit responsable d’une autre, il va falloir un lien spécial entre les deux personnes.

Assemblée plénière, 1991, BLIECK: depuis cet arrêt, il existe un principe «général» de responsabilité du fait d’autrui. Alinéa 1er de l’article 1384.

Le principal des régimes de responsabilité du fait d’autrui sont les régimes spéciaux. Il est tout à fait rare que l’on utilise l’alinéa 1er.

 

Chapitre 1 : Régimes spéciaux de responsabilité du fait d’autrui 

 

Section 1 : Responsabilité des pères et mères du fait de leur enfant mineur 

Article 1384, alinéa 4 code civil. Cet article n’a pas changé dans sa lettre mais a radicalement changé dans la façon dont il est appliqué par les juges.

«le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causés par leurs enfants mineurs habitant avec eux».

L’article prévoit les conditions de mise en œuvre de la responsabilité des pères et mères. Plusieurs termes peuvent être interprétés c’est pour cela qu’il y a eu une évolution.

Il y a CINQ conditions qui sont cumulatives. S’il en manque une seule, les père et mère ne sont pas responsable sur le fondement de ce régime particulier qui est un régime favorable.

   ° Première condition: «le père et la mère». Il faut un lien de filiation au sens juridique du terme. C’est le père au sens juridique du terme, et la mère au sens juridique du terme ; c’est-à-dire qu’il faut que la filiation soit établie.

Si un père biologique n’a pas reconnu son enfant, il n’est pas responsable. Mais le lien de filiation peut être quelconque: adoptive, dans le mariage, hors mariage… Tout ce qui compte c’est un lien de filiation juridiquement établi.

  ° Deuxième condition: «en tant qu’ils exercent l’autorité parentale». En plus du lien de filiation, il faut l’autorité parentale. L’autorité parentale, quand les parents se séparent, est a priori exercée conjointement. Donc les deux parents sont a priori responsables.

Si l’un n’a pas l’autorité parentale et que l’enfant est en vacances chez ce parent, il ne peut pas y avoir responsabilité sur 1384 alinéa 4.

  ° Troisième condition: «enfant mineur». Condition de la minorité de l’enfant. Il doit avoir moins de dix-huit ans. Mais si l’enfant est émancipé dès 16 ans, il n’y a plus de responsabilité non plus. Ceci étant dit, les victimes pourraient intenter à ce moment-là une action en responsabilité pour faute contre les parents qui ont émancipé l’enfant trop tôt (même si cela n’arrive pas souvent).

  ° Quatrième condition: «habitant avec eux». La condition de cohabitation. Là, il y a eu toute une jurisprudence assez complexe. A priori, la condition de cohabitation telle qu’elle est rédigée, on a l’impression qu’il s’agit d’une condition purement matérielle qu’est le fait d’habiter sous le même toit.

Ceci étant dit, la difficulté qu’il y a eu dans la jurisprudence est que souvent, le dommage était causé alors que l’enfant était par exemple en vacances chez des amis ou chez des grands-parents: pouvait-on dire qu’il habitait avec les parents si au moment du dommage il était hébergé par quelqu’un d’autre ? Est-ce que cela fait cesser la condition de cohabitation ? Si on en a une acception matérielle, cela fait qu’il n’y a plus de cohabitation.

Mais l’idée était que si l’enfant causait un dommage c’est soit on l’a mal surveillé, soit mal éduqué. Donc on s’était dit que même s’il n’habite pas avec les parents il y a quand même une idée de responsabilité si le dommage est dû à un manque d’éducation.

Donc dès le départ la Cour de cassation a eu une interprétation un peu moins matérielle de la cohabitation que le texte laissait penser.

Au départ, en 1804 la responsabilité des pères et mères était une responsabilité pour faute. C’est-à-dire qu’en réalité, c’était la faute des parents qui conduisait à ce qu’ils soient responsables de leur enfant mineur. On présumait la faute des parents c’est-à-dire on présumait que si un dommage avait été causé, cela signifiait qu’il y avait une faute d’éducation ou une faute de surveillance. Ce n’était donc pas nécessaire de démontrer la faute des parents. Cependant ensuite, les père et mère pouvaient s’exonérer en démontrant qu’ils n’avaient pas commis de faute c’est-à-dire pas de faute d’éducation ni de faute de surveillance.

Donc pendant longtemps on a plutôt regardé à quoi était dû la cessation de cohabitation. Et, si par exemple il n’y avait plus de cohabitation parce que l’enfant avait fugué, on considérait qu’il y avait faute des parents qui n’auraient pas dû laisser fuguer l’enfant donc cela n’a pas fait cesser la cohabitation. Donc appréciation de la faute.

Si c’était un manque de surveillance quand des personnes gardaient l’enfant par exemple les grands parents, on mettait sur eux la responsabilité.

Mais la responsabilité des parents est devenue de plus en plus objective, donc on a apprécié de plus en plus de façon juridique la cohabitation, l’interprétation a été de plus en plus juridique c’est-à-dire de moins en moins matérielle. En plus, depuis un revirement de jurisprudence du 19 février 1997, arrêt Bertrand : l’absence de faute n’est plus exonératoire.

Donc c’est devenu beaucoup plus une garantie d’indemnisation puisque c’est désormais un régime de responsabilité de plein droit, de responsabilité présumée. L’absence de faute n’est plus exonératoire, ce qui a conduit encore à une évolution de la condition de cohabitation.

D’ailleurs le même jour que l’arrêt Bertrand, le 19 février 1997, Samda (voir fiche TD): dans cet arrêt il s’agissait d’un cas où le mineur, au moment du dommage, était hébergé chez l’autre parent qui n’avait pas l’autorité parentale. Il n’avait pas l’autorité parentale donc il ne pouvait pas être responsable peu importe qu’il y ait cohabitation ou non. «L’exercice d’un droit de visite et d’hébergement ne fait pas cesser la cohabitation du mineur avec celui des parents qui exerce le droit de garde».

À partir de cet arrêt il fallait interpréter la cohabitation comme une cohabitation habituelle, lieu où l’enfant habite habituellement. La cohabitation en l’espèce était habituelle chez sa mère, même si au moment des faits il était chez son père.

Ensuite il y a eu d’autres arrêts où de plus en plus la cohabitation était appréciée de façon juridique. Arrêt de 2005 où les parents avaient l’autorité parentale mais l’enfant avait été élevé par sa grand mère depuis douze ans où il habitait chez elle. Mais la Cour de cassation a dit que cela n’avait pas fait cesser la cohabitation entre l’enfant et la mère. Cela revient à dire que l’autorité parentale et la cohabitation seraient la même chose. Dans des arrêts récents c’est toujours très juridique.

Par exemple autre arrêt assez marquant des années 2000 : enfant placé en internat. L’internat ne fait pas cesser la cohabitation.

Donc plusieurs auteurs disent que la cohabitation est purement juridique, elle s’identifie avec la condition d’autorité parentale, donc il faut supprimer celle de la cohabitation car celui qui a l’autorité parentale il y a toujours la jurisprudence. Selon la prof ce n’est pas tout à fait exact. Les arrêts disent bien que cela ne fait pas cesser la cohabitation au sens que la cohabitation est la résidence habituelle de l’enfant. Or l’idée de résidence habituelle de l’enfant n’est pas la cohabitation matérielle, c’est plus juridicisé. Si on dit résidence habituelle de l’enfant, sens précis en droit de la famille, personne chez qui le juge a fixé la résidence de l’enfant.

Rappel des conditions de mise en œuvre de l’article 1384 alinéa 4 :  

–                     Lien de filiation

–                     Autorité parentale

–                     Minorité

–                     Cohabitation : idée de résidence habituelle de l’enfant.

Les parents sont responsables du dommage causé par leur enfant mineur habitant avec eux. Pendant très longtemps, l’interprétation de cet article avait consisté à dire qu’il fallait d’abord que l’enfant engage sa responsabilité d’une façon ou d’une autre pour que les père et mère soient responsables.

Responsabilité du fait d’autrui : une personne va être responsable pour autrui, mais cela n’enlève pas la responsabilité du «autrui». Au contraire la responsabilité d’autrui est une condition préalable pour la mise en œuvre de la responsabilité du garant. Donc il faut en principe que «autrui» soit d’abord responsable, que sa responsabilité puisse être engagée. Or l’enfant mineur, s’il n’a pas de discernement, ne pouvait pas être responsable avant 1984. Donc si on avait exigé que l’enfant fut responsable pour que les père et mère puissent être responsables du fait de leur enfant mineur, cette responsabilité aurait difficilement été mise en œuvre.

Il a fallu trouvé un équilibre : l’enfant, a priori, si on oubliait qu’il peut ne pas avoir de discernement, il faudrait exiger qu’il soit lui même responsable c’est-à-dire qu’il ait commis une faute qui cause un dommage à autrui. On s’est dit qu’on supprimait la nécessité d’un élément d’imputabilité, mais il fallait quand même exiger l’élément objectif : un élément matériel et un élément d’illicéité. Donc, la Cour de cassation exigeait, pour que les père et mère soient responsables du fait de leur enfant mineur, que l’enfant ait commis ce que l’on appelait un « fait objectivement illicite ». Ce fait était justement l’élément objectif de la faute. Ainsi, on résolvait la difficulté. En même temps on n’exigeait pas l’imputabilité car sinon il n’y aurait jamais eu de responsabilité des parents du fait de leur enfant privé de discernement, mais en même temps l’enfant n’était pas responsable pour n’importe quoi, il fallait quand même qu’il ait commis un fait illicite.

Mais depuis 1984, cette difficulté a disparu.

NB: si l’enfant est gardien d’une chose et a causé un dommage avec une chose, il peut y avoir responsabilité du fait d’autrui en tant que l’enfant a été responsable comme gardien.

Donc depuis 1984 il faut une faute de l’enfant pour que les parents puissent être responsables du fait de leur enfant mineur, puisque désormais un être privé de discernement pouvait commettre une faute.

Le 9 mai 1984, il y a eu quatre arrêts. On en a vu trois, le 4e est l’arrêt Füllenwarth :

Ass plen, 9 mai 1984, Füllenwarth: un enfant tire une flèche en direction de son camarade.

Commentaire sur le pourvoi qui était mauvais: on reproche à la cour d’appel d’avoir retenu la responsabilité du père sans avoir recherché si l’enfant avait ou non un discernement. Mais c’est un mauvais argument puisque la cour de cassation se contentait d’un fait objectivement illicite pour mettre en œuvre l’article 1384 alinéa 4.

«Pour que soit présumée, sur le fondement de l’article 1384 alinéa 4 du code civil, la responsabilité des père et mère d’un mineur avec eux, il suffit que celui-ci ait commis un acte qui soit la cause directe du dommage invoqué par la victime».

Comment la doctrine avait commenté ceci à l’époque ?

Avant c’était une faute présumée. Maintenant dans cet arrêt c’est une responsabilité présumée. Avant on pouvait s’exonérer en démontrant l’absence de faute. Maintenant on ne peut s’exonérer qu’en démontrant la force majeure ou la cause étrangère.

Avant cet arrêt, on disait qu’il fallait que l’enfant ait commis un fait objectivement illicite, il fallait une faute objective (qui est maintenant une faute). La nouvelle formule de l’arrêt dit qu’il faut que l’enfant ait «commis un acte qui soit la cause directe du dommage». Est-ce que ceci est une faute objective ? Faute objective, c’est élément matériel et élément d’illicéité. Or dans ce que l’on dit ici, il suffit que l’enfant ait causé un dommage, donc il n’y a plus d’élément d’illicéité. Sauf que certains ont relevé une connotation d’illicéité dans le mot «commis».

Mais après cet arrêt, la Cour de cassation a continué à dire comme avant :

  • Il faut une faute de l’enfant (car maintenant c’est faute objective donc illicéité et élément matériel=faute)
  • C’est une présomption de faute et on a laissé les parents s’exonérer par la démonstration d’absence de faute.

Il y a eu une évolution avec plusieurs arrêts.

D’abord, il y a eu le fait que en 1997, il y a eu l’arrêt Bertrand de 1997 : c’est un revirement de jurisprudence et depuis cet arrêt, la responsabilité des père et mère est effectivement une présomption de responsabilité, une responsabilité de plein droit, et depuis cet arrêt les père et mère ne peuvent plus s’exonérer en démontrant qu’il n’ont pas commis de faute, ils ne peuvent s’exonérer qu’en démontrant le cas de force majeure ou la cause étrangère (faute de la victime). Donc il y a eu cette première évolution, l’arrêt Bertrand.

Surtout, il y a eu un revirement de la 2e civ de la Cour de cassation :

Arrêt 2e civ, 10 mai 2001 :  

Sur le premier moyen: VISA article 1384 alinéa 4 et 7 (à moins que les père et mère ne prouvent qu’ils n’ont pu empêcher le fait). L’alinéa 7 avait toujours été interprété en disant que les parents peuvent prouver qu’ils n’ont pas commis de faute, ni de surveillance ni d’éducation. ATTENDU: «La responsabilité de plein droit encourue par les père et mère du fait des dommages causés par leur enfant mineur habitant avec eux n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute de l’enfant».

-> Depuis cet arrêt, il n’est plus nécessaire que l’enfant ait commis une faute pour que les père et mère soient responsables pour eux.

L’arrêt déboute la victime de sa demande et rejette la responsabilité des père et mère. La cour d’appel dit qu’il fallait d’abord envisager la responsabilité d’autrui avant de voir si quelqu’un est responsable de ce fait d’autrui. Elle dit que l’examen de la responsabilité de l’enfant est un préalable à la détermination de la responsabilité de ses parents. La cour d’appel dit que le fait de l’enfant ne saurait engager sa responsabilité et donc qu’il n’y a pas lieu d’examiner la responsabilité de ses parents.

Commentaire de la motivation d’arrêt d’appel : elle dit ce qui était l’état de la jurisprudence. Mais c’est mal formulé qu’elle dise qu’il n’a pas été responsable par «maladresse» car selon 1383 on peut être responsable par maladresse. Mais le vrai argument est que c’est un jeu et qu’il y a acceptation des risques normaux, ici les risques normaux n’ont pas été dépassés, donc enfant pas responsable.

Cependant il y a CASSATION. C’est un revirement de jurisprudence car désormais la responsabilité des père et mère n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute de l’enfant. On n’a donc plus à regarder si autrui à commis une faute pour voir si les parents ont commis la faute.

L’arrêt ne dit que «faute» donc il resterait que l’enfant doit être responsable en tant que gardien. Mais ce n’est pas le cas il faut l’entendre au sens large, pas besoin d’être responsable en tant que gardien.

Les père et mère sont responsables du fait des dommages causés par l’enfant mineur. On en revient à la formule de 1384 alinéa 4 qui dit que les parents sont responsables du dommage causé par leur enfant mineur. Donc tout ce qu’il faut c’est un dommage causé par l’enfant mineur. Donc pas besoin de faute ni de garde d’une chose. C’est un pur fait dommageable de l’enfant. Nécessité d’un fait dommageable, d’un fait qui ait causé un dommage.

Cet arrêt a été contesté par la doctrine. Ce qui peut justifier l’arrêt peut être la volonté d’indemniser. (voir livre pour critique de la doctrine)

NB: Théorie de l’efficient breach of contract : la théorie de l’inexécution efficace du contrat. Selon cette théorie couramment appliquée par les juridictions aux Etats-Unis, quand il y a un intérêt à ne pas exécuter le contrat, le droit doit favoriser la non-exécution. Qu’est-ce qu’une inexécution efficace ? On calcule le critère de Pareto : est-ce que l’utilité globale est augmentée? Selon ce critère, l’utilité globale est la somme des utilités individuelles. C’est-à-dire l’utilité de chaque personne. Selon Fabre-Magnan cette théorie est affligeante.

Assemblée plénière, 13 décembre 2002 : l’assemblée plénière a repris exactement la même formule que l’arrêt de 2001. «Il suffit que le dommage invoqué par la victime ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur». Cet arrêt réaffirme que la faute de l’enfant n’est pas une condition de la mise en œuvre de la responsabilité des père et mère. Il suffit d’un fait dommageable de l’enfant.

On est garant du dommage causé par autrui, même si autrui n’est pas responsable.

Avant l’arrêt de 2001, autrui devait être responsable devant la victime, et le responsable du fait d’autrui était responsable.

Mais que se passe-t-il maintenant depuis 2001 quand il y a à la fois un responsable du fait d’autrui, et autrui qui est responsable ? Ils sont responsables in solidum c’est-à-dire que la victime peut poursuivre l’un quelconque des deux et demander la réparation. Ensuite, dans le rapport de contribution à la dette, action récursoire de l’un contre l’autre. En général la victime agit contre les parents qui sont plus solvables. Théoriquement, les parents ont un droit de recours sur leur enfant mais ils ne l’exercent jamais. Mais théoriquement il y a ce régime classique. Dans le cas où l’enfant n’a pas commis de faute et les parents sont quand même responsable pour lui, dans ce cas, la victime ne peut pas agir contre l’enfant.

FAIRE ATTENTION À CECI DANS UN CAS PRATIQUE.

Quel est le régime de la responsabilité des père et mère ?

Avant les parents pouvaient s’exonérer en démontrant qu’il n’avait pas commis de faute: ni faute de surveillance, ni faute d’éducation.

Pour engager leur responsabilité civile, il suffisait d’une faute de surveillance ou d’éducation. Donc il fallait qu’il n’y ait ni l’une ni l’autre pour s’exonérer.

Civ 2e, 19 février 1997, Bertrand : «L’arrêt avait exactement énoncé que seule la force majeure ou la faute de la victime pouvait exonérer [le père] de la responsabilité de plein droit encourue du fait des dommages causés par son fils mineur habitant avec lui, la Cour d’appel n’avait pas à rechercher l’existence d’un défaut de surveillance du père».

La responsabilité des père et mère n’est plus une responsabilité pour faute présumée. C’est une responsabilité de plein droit, une responsabilité objective, une présomption de responsabilité dont ils ne peuvent plus s’exonérer qu’en démontrant force majeure ou cause étrangère c’est-à-dire la faute de la victime. La faute du tiers n’est pas une cause d’exonération dans le rapport d’obligation à la dette, cependant dans le rapport de contribution à la dette c’est-à-dire l’action récursoire on peut poursuivre le tiers.

NB : les pères et mères, s’il y a lien de filiation et autorité parentale et cohabitation pour les deux, sont solidairement responsables.

Section 2 : La responsabilité des commettants du fait de leur préposé 

Article 1384 alinéa 5.

Il y a toujours une victime, toujours un autrui qui est le préposé, et toujours un responsable du fait d’autrui qui est le commettant. Mais on ne peut concevoir une responsabilité du fait d’autrui que selon le lien entre AUTRUI et le RESPONSABLE DU FAIT D’AUTRUI. Il faut un lien qui justifie que le second soit responsable du premier. Il faut un lien particulier qui explique et justifie la responsabilité du fait d’autrui.

Pour les père et mère, c’est évident, il y a un lien entre parents et enfant qui justifie tout à fait que les parents soient responsables de leur enfant.

Ici, commettant et préposé, dans quels cas cela va jouer ? Interprétation restrictive car la responsabilité du fait d’autrui demeure l’exception par rapport au principe de la responsabilité individuelle.

Il faut définir la relation de commettant à préposé. Se pourrait-il que pour un acte ponctuel, quelqu’un soit commettant et l’autre préposé ?

Classiquement, le lien de commettant à préposé est un lien d’autorité entre deux personnes qui fait que l’un a le pouvoir de donner des ordres à l’autre, et que la personne à qui on donne des ordres soit tenue de les respecter.

Pour les parents et enfants, il fallait un lien de droit : lien de filiation. Alors que le lien entre commettant et préposé n’est pas nécessairement un lien de droit. Cela peut être un lien de fait.

Par exemple, le plus souvent, le lien va être un lien d’employeur à salarié. On voit bien que c’est un lien de commettant à préposé: l’employeur peut donner des ordres au salarié sur l’exécution de son travail et il doit obéir à ses ordres car il s’y est engagé dans le contrat de travail. Classiquement, le critère du contrat de travail est ce que l’on appelle le critère de subordination. Lien de subordination juridique entre l’employeur et le salarié.

ATTENTION: il ne faut pas utiliser le terme de «lien de subordination». En droit de la responsabilité civile, le lien entre commettant et préposé est un lien de préposition. Le lien de subordination est pour le contrat de travail. La définition est plus large que le simple lien de subordination qu’est le contrat de travail. Il peut y avoir lien de préposition sans contrat du tout. Donc le lien de préposition est un lien d’autorité mais plus large que le lien tiré du contrat de travail.

Classiquement, c’était une responsabilité du fait d’autrui tout à fait traditionnel. Cela signifie que le préposé doit être responsable vis-à-vis de la victime. S’il est responsable vis-à-vis de la victime et s’il y a ce lien particulier de commettant à préposé, on rajoute le commettant. Donc ils sont tous deux responsables.

On va d’abord voir la situation du commettant, puis la situation du préposé.

  1. Le commettant

L’idée essentielle est de savoir quand le commettant va être responsable du fait de son préposé, autrement dit quelles sont les conditions de la responsabilité du commettant du fait de son préposé ?

  1. Les conditions de la responsabilité du commettant

Article 1384, alinéa 5: «Les maîtres et commettants sont responsables du dommage causé par leur domestique et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés».

Pour les commettants, c’est un régime classique de responsabilité du fait d’autrui. Il y a trois conditions que la jurisprudence a toujours déduit de l’article 1384 alinéa 5 du code civil :

    °Condition n°1 : Le lien de préposition

Voir plus haut ce qu’est l’exigence de ce lien. Exigence q