Droit de la Sécurité Sociale

Droit de la Sécurité Sociale

Le droit de la Sécurité Sociale est une branche du droit social, qui prévoit notamment les dispositions concernant les accidents du travail, les maladies professionnelles et la question de la faute de l’employeur.
Il concerne aussi les cotisations sociales, l’incapacité, l’invalidité, les rentes ou les pensions. Dans ce cours, seront étudiés notamment l’histoire de la Sécurité sociale ou le système actuel de la couverture sociale en France…

INTRODUCTION

  1. Que faut-il entendre par droit de la Sécurité Sociale.

Le droit de la Sécurité Sociale est très étroitement lié au droit du travail car l’un et l’autre composent ce que l’on appelle en France, le Droit Social.

Cependant ce sont des disciplines, en définitives assez différentes, et leur présentation ne peut pas être la même. C’est a dire que lorsqu’on présente le droit du travail il n’est pas nécessaire de commencer par dire ce qu’est le « travail ». Généralement d’ailleurs on se contente de dire que tout travail subordonné, quelle que soit la nature de ce travail, relève du droit du travail. A l’inverse, il est absolument impossible de présenter le droit de la Sécu, sans présenter d’abord la Sécurité Sociale elle-même.

Voici le plan du cours de droit de la sécurité sociale :

  • INTRODUCTION
  • I. Que faut-il entendre par droit de la Sécurité Sociale.
  • A/ La Sécurité Sociale en elle-même.
  • B/ Sécurité sociale et protection sociale.
  • 1. Distinction entre Sécurité sociale organisation et l’aide et l’action sociale.
  • 2. Distinction entre Sécurité sociale et indemnisation du chômage.
  • 3. Confrontation entre la Sécurité Sociale organisation et la protection sociale complémentaire.
  • C/ Le droit de la Sécurité sociale.
  • 1. Le droit de la sécurité sociale et la sécurité sociale elle même
  • 2. Une articulation nécessaire entre le droit de la sécurité sociale et la sécurité sociale
  • II. La description de la Sécurité sociale entre assurance et solidarité.
  • 1. L’influence de l’assurance
  • 1.1 l’influence de l’assurance sur la nature des évènements couvert
  • 2. La composition de la couverture sociale
  • 1.1 La composition substantielle de la couverture sociale
  • a. une classification en volets
  • b. la classification en branche
  • 3. La composition organique de la couverture sociale
  • 4. L’empire de la solidarité
  • III. entre le modèle bismarckien et le modèle beveridgien, le système est les régimes de sécurité sociale
  • 1. les deux modèles de sécurité sociale
  • 1.1 Le modèle Bismarckien
  • 1.2 Le modèle Beveridgien
  • 1.3 Le système français de sécurité sociale par rapport aux modèles bismarckiens et beveridgiens
  • Conclusion :

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  • Partie 1 : Le système français de sécurité sociale
  • Titre 1 : La construction du système français de sécurité sociale
  • Chapitre 1 : La période antérieure à la création du système français de sécurité sociale
  • Section 1 : Les conditions de l’émergence de techniques nouvelles
  • Paragraphe 1 Les conditions socio-économiques
  • A) Une société du risques :
  • B) Une société des risques :
  • Paragraphe 2 Les conditions culturelles d’émergence de nouvelles techniques:
  • A) Les limites de l’individualisme :
  • 1) Les lacunes du recours à la responsabilité civile :
  • 2) Les limites de la technique de l’épargne :
  • B) La dynamique de la solidarité :
  • 1) La nécessité de la solidarité :
  • 2) L’effectivité de la solidarité :
  • Section 2 : La manifestation de l’émergence de techniques nouvelles :
  • Paragraphe 1 La mise en place d’une couverture des risques :
  • A) La couverture des risques d’origine professionnelle :
  • 1) La couverture des accidents du travail :
  • 2. La couverture des maladies professionnelles
  • B. La couverture des risques d’origine non professionnelle
  • paragraphe 2- la mise en oeuvre d’une couverture des charges
  • Chapitre 2. La création du système français de sécurité sociale
  • Section. 1 une création sous influences
  • 1- le rapport beveridge
  • A) L’environnement du rapport Beveridge
  • B) la contenu du rapport
  • C) la porté du rapport beveridge
  • Paragraphe 2- la persistance d’influences
  • A) l’influence mutualiste et la force du syndicalisme
  • B) l’influence et le poids des catégories socio-professionnelles
  • Section 2 – la création d’une organisation
  • Paragraphe 1- une création rapide
  • Paragraphe 2- une création limitée
  • A) l’ajournement de la généralisation de la couverture sociale
  • B) l’échec de l’unification de la couverture sociale

Chapitre 3. Le développement du système français de sécurité sociale

Section 1. La généralisation de la sécurité sociale

  • paragraphe 1. L’extension de la couverture maladie maternité aux indépendants
  • Paragraphe 2. L’extension de la couverture maladie/maternité aux personnes sans activité professionnelle
  • A. L’extension de la qualité d’assuré social
  • 1. L’extension volontaire de la qualité d’assuré social
  • 2. L’extension de l’affiliation fondée sur l’état de besoin
  • 3. L’extension de l’affiliation par la couverture maladie universelle
  • B. L’extension de la qualité d’ayants droit
  • a) observations / remarques
  • b) la loi du 2 janvier 1978
  • Section 2. L’amélioration de la couverture sociale
  • Paragraphe 1. La consolidation de la couverture sociale
  • A. L’amélioration de prestations existantes
  • 1. L’accroissement pur et simple du montant de la prestation
  • 2. L’amélioration des conditions de calcul du montant de la prestation
  • 3. L’amélioration des conditions d’attribution de la prestation
  • B. La création de nouvelles prestations
  • 1. Dans le cadre du système de sécurité sociale
  • a) le cadre des assurances sociales
  • b) le cadre des allocations familiales
  • 2. Hors du cadre du système de sécurité sociale
  • a. Les prestations complétives
  • b. Les prestations substitutives
  • c. Le RMI devenu RSA
  • §2 L’harmonisation des régimes de sécurité sociale
  • A. Les progrès de l’harmonisation
  • B. Les problèmes de l’harmonisation
  • Section 3 : La rationalisation du système de sécurité sociale
  • §1 La rationalisation par régulation
  • A. La logique du conventionnement médical
  • B. Les avatars du conventionnement médical
  • L’identité juridique des conventions médicales
  • §2 La rationalisation par distinction de principes directeurs
  • A. Les mérites et faiblesses de la distinction
  • B. Les résultats et les limites de la distinction
  • Les résultats
  • 1. Les limites
  • hapitre 4 : Le système français de sécurité sociale à l’épreuve des remises en cause
  • Section 1 : L’incertitude quant aux moyens
  • §1 Le débat sur la fiscalisation
  • A En termes de justice
  • B. En termes d’efficacité et d’opportunité
  • §2 L’émergence de la fiscalisation du financement de la sécurité sociale
  • A. La fiscalisation masquée
  • B. La fiscalisation déclarée
  • 1. La fiscalisation déclarée hors CSG
  • 1. La CSG
  • Section 2 : L’incertitude quant à l’organisation du système de sécurité sociale
  • 1 L’incertitude quant au paritarisme
  • A. Les avatars du paritarisme
  • B. La fin du paritarisme ?
  • §2 L’incertitude quant aux rapports de la sécurité sociale avec les pouvoirs publics
  • A. Une incertitude originelle
  • B. Une incertitude aujourd’hui accrue
  • 1. L’instauration des lois de financement de la sécurité sociale
  • L’encadrement de la procédure de nomination des directeurs de caisse
  • Section 3 : L’incertitude quant aux finalités du système français de sécurité sociale

A/ La Sécurité Sociale en elle-même.

Tout le monde croit savoir ce qu’est la Sécurité Sociale et pourtant, c’est une notion très complexe qui peut désigner 2 réalités tout à fait différentes selon le sens qu’on lui donne, et selon l’orthographe qu’on lui donne. En effet il y a 2 orthographes possibles (« sécurité sociale » et « Sécurité sociale).

La « sécurité sociale » sans majuscule.

La sécurité sociale désigne ce que l’on peut appeler un « objectif social » ou un « but social », ou encore une sorte « d’idéal collectif » ou de « valeur social » → C’est donc un « horizon social ». Dans ce sens, la sécurité sociale représente ce que l’on souhaite garantir à tous les résidents d’un pays.

Pierre Laroque, créateur du système de sécurité sociale en 1945 : « avec la sécurité sociale, nous voulons assurer à tous et spécialement aux travailleurs, la sécurité du lendemain « .

Cette vision dépasse donc le système de Sécurité Sociale proprement dit.

Exemple : cette sécurité du lendemain suppose par exemple, non seulement un système de Sécu, mais aussi une protection contre les licenciements abusifs. Parce que s’il n’y a pas cette protection, il est clair qu’il n’y a pas de sécurité du lendemain. De la même façon cette sécurité du lendemain suppose qu’il y ait un système de soin et hospitalier efficace, sinon il n’y a pas de sécurité du lendemain.

On voit donc que cette notion, ainsi entendue, dépasse de beaucoup le système de Sécurité sociale proprement dit.

C’est donc elle qui explique la création des systèmes de Sécurité Sociale.

La Sécurité sociale avec un S majuscule.

On désigne l’organisation cohérente, systématique, qui permet dans une certaine mesure, de se rapprocher de cet objectif, parce qu’il n’y a pas de sécurité sociale au premier sens du terme sans une organisation de la Sécurité sociale.

Parce que dans ce sens, la Sécurité Sociale est fondamentalement une organisation (cotisations, organisation qui versent des prestations).

Article L 111-1 alinéa 1 Code de Sécurité Sociale → « L’organisation de la Sécurité Sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale. » La sécurité sociale est donc une organisation, et celle-ci fonctionne sur le principe de solidarité nationale.

Il y a donc deux définitions qui ne sont pas sur le même plan :

–>« la sécurité sociale horizon »: c’est a dire au fond, l’idéal que représente la Sécurité Sociale et ce à quoi on voudrait parvenir (sécurité pour tous).

–>Et la « Sécurité sociale organisation », c’est a dire l’organisation concrète et effective, qui dans un pays, a été mise en œuvre et fonctionne pour, dans une certaine mesure, essayer d’atteindre cet objectif général.

A propos de l’organisation on peut se poser la question à nouveau, entre le droit du travail et celui de la Sécurité Sociale.

Il est clair que le droit de la Sécurité Sociale est fondamentalement le droit d’une organisation. En revanche le droit du travail n’est pas fondamentalement le droit d’une organisation.

Par exemple il n’y a pas plus d’organisation dans le contrat individuel de travail que dans n’importe quel autre contrat spécial.

En revanche, pour ce qui est des rapports collectifs du travail et notamment de la représentation du personnel, de l’entreprise, ou de l’action syndicale, là, il y a quelque chose qui effectivement ressemble à une organisation. Il y a par exemple des instances de représentation du personnel, et des syndicats qui sont des organismes aussi.

B/ Sécurité sociale et protection sociale.

Dans le langage courant et même dans le langage académique, les expressions Sécurité Sociale et protection sociale, sont, au moins en apparence, absolument interchangeables. Ce sont quasiment de pures et simples synonymes.

L’expression de « protection sociale » qui vient originairement du droit européen, est plus large que la « Sécurité sociale organisation » et sans aucun doute moins large que la « sécurité sociale horizon ».

La protection sociale est plus large que la Sécurité Sociale organisation → car intègre la Sécurité Sociale organisation qui prend l’appellation de système de Sécu, ainsi que d’autres composantes, qui sont au nombre de 3 :

l’aide et l’action sociale

l’indemnisation du chômage

la protection sociale complémentaire.

  1. Distinction entre Sécurité sociale organisation et l’aide et l’action sociale.

Cette distinction repose sur l’idée que les prestations de Sécurité Sociale sont des prestations contributives. Cela signifie qu’elles sont financées, en tout ou en partie, par les assurés sociaux eux-mêmes, sous forme de cotisations assises sur leurs revenus professionnels.

ASSURANCE CONTRIBUTIVE.

Au contraire les prestations d’aide sociale, et l’aide sociale, ne sont pas financées par leurs bénéficiaires, parce que, par hypothèse, ils ne pourraient pas les financer, puisque ces prestations d’aide et d’action sociale permettent de répondre aux besoins fondamentaux d’une personne, quand cette personne n’a pas les revenus professionnels pour satisfaire ces besoins. Elles sont donc fondamentalement des prestations non contributives

ASSISTANCE NON CONTRIBUTIVE.

S’agissant de l’assurance, en Sécu, ce n’est pas n’importe quelle assurance. C’est ce qu’on appelle l’assurance sociale, c’est-à-dire une assurance qui est organisée dans un esprit de solidarité. Par exemple, les assurés sociaux contribuent au financement des prestations de Sécurité Sociale en fonction de leurs revenus, et non en fonction de leurs risques.

Quant à l’assistance, c’est aussi aujourd’hui, un droit de citoyenneté. Le citoyen qui ne peut pas travailler, a droit en fonction de textes constitutionnels, notamment dans le préambule de 1946, à des moyens convenables d’existence de la part de l’État.

Pour éviter cette opposition excessive, on peut aussi se référer au sens de la sécurité sociale horizon. Si on veut vraiment garantir à tous la sécurité du lendemain, il faut naturellement verser des prestations de Sécurité Sociale à ceux qui les finance, mais il faut aussi venir au secours de ceux qui sont dans l’indigence par des prestations non contributives.

  1. Distinction entre Sécurité sociale et indemnisation du chômage.

L’indemnisation du chômage ne fait pas partie en France, du système de Sécurité sociale. Il y a bien en France depuis 1968 une indemnisation du chômage assez favorable d’ailleurs, mais elle est organisée à l’extérieur du système de Sécurité sociale, autrement que dans le cadre de la Sécurité sociale. Elle fait donc partie de la protection sociale.

Cette situation ne se retrouve pas dans tous les pays. Et dans un certain nombre de pays voisins, comme la Belgique, l’indemnisation du chômage fait partie de la Sécurité sociale. D’ailleurs, aucunes raisons techniques, ne s’oppose à l’intégration de l’indemnisation du chômage dans le système de Sécurité sociale. Cette indemnisation est en effet financée par des cotisations calculées en fonction du salarie (comme les cotisations de la Sécurité sociale), et elle est servie sous forme de prestation en espèce, d’indemnité journalière, qui ressemblent en tout point, aux prestations de Sécurité sociale. Donc rien ne s’opposerait techniquement à ce que l’indemnisation du chômage fasse partie du système de Sécurité sociale.

Pourquoi n’est-ce pas le cas en France ?

Il y a des raisons politiques, et peut-être une raison plus philosophique.

La raison politique au sens large, est que l’indemnisation du chômage n’a été organisée en France que tardivement. Elle a été mise en œuvre à la suite d’un accord par les partenaires sociaux du 31 décembre 1958.

La raison est sans aucun doute que la France s’est industrialisée plus lentement que les pays voisins (RU et Allemagne). La France est restée beaucoup plus longtemps un pays à majorité rurale, puisque jusqu’au début des années 1930’s, la population vivant dans les campagnes était majoritaire en France. Alors qu’aujourd’hui il ne s’agit que de 7% de la population globale.

Or dans une société de type rurale, il n’y a pas banalisation du chômage, dans la mesure où le chômage est surtout un risque industriel. Du reste les chômeurs sont souvent considérés comme des paresseux. Le chômage n’est pas du tout perçu comme un risque social dans les sociétés traditionnels.

Dans les années 1945 (libération), le chômage n’est pas un véritable problème, car la France est en pleine reconstruction après la IIGM, et donc le taux de chômage est peu élevé.

Les choses changent en 1958 pour plusieurs raisons. La France devient d’abord un pays industriel, et à majorité urbaine. De plus l’ouverture des frontières européenne à la suite du Traité de Rome de 1957 (CEE), fait prendre conscience qu’il y a désormais un risque de chômage. Cette ouverture des frontière va introduire une concurrence qui peut être dangereuse pour des entreprises mal équipées, et fragiles.

Évidemment les pouvoirs publics ont insisté auprès des partenaires sociaux pour qu’ils mettent en place une indemnisation du chômage ce qui sera fait en 1958.

Mais cela est trop tard pour que ce soit intégré dans le système de Sécurité Sociale (mis en place en 1945). C’est trop tard parce que le patronat s’est ressaisi. En 1945, le patronat n’avait pas le poids pour s’opposer au système de Sécurité Sociale avec des caisses gérées par des Conseil d’administration dans lesquels les représentants des salariés sont majoritaires.

Mais en 1958 il reprend de la force, et veut des organismes pour lesquels les représentants des employeurs soient en nombre égal à ceux des employés. Il considère que cette représentation majoritaire des salariés a conduit au déficit de la Sécurité Sociale. A partir de là il arrive à imposer à la création d’une organisation propre à l’indemnisation du chômage dont les Conseil d’administration sont gérés selon un strict paritarisme salarié / patronat.

La raison plus philosophique tient au fait que du point de vue de la théorie générale de la Sécu, et de la protection sociale, l’indemnisation du chômage ne ressemble pas à la couverture des autres risques sociaux. Et cela pour au moins 2 raisons.

Raison 1 : Le chômage ne ressemble pas dans sa nature même aux autres risques sociaux, comme la maladie, les accidents, la maternité, l’invalidité, la vieillesse, et le veuvage.

Ces risques sociaux touchent la personne en son physique. Alors qu’avec le chômage, c’est la situation économique et l’emploi de l’assuré qui est en cause.

D’ailleurs le chômage n’est pas un risque comme la maladie et l’accident qui sont aléatoires, mais c’est une situation. Dans le chômage, l’événement est antérieur au chômage. Par exemple le salarié est licencié et ne retrouve pas de travaille. Le chômage est la situation qui résulte de la combinaison de l’événement du licenciement et de l’impossibilité de retrouver un emploi.

Raison 2 : Aujourd’hui dans l’indemnisation du chômage il y a à la fois des prestations contributives et des prestations non contributives.

Les prestations contributives concernent l’assurance chômage, qui est financée par des cotisations patronales et salariales et qui consiste en des prestations versées selon une durée déterminée par la durée des cotisations.

Les prestations non contributives sont versées à des chômeurs, soit qui n’ont pas cotisés du tout, soit qui n’ont pas assez cotisés, soit qui sont en chômage depuis trop longtemps pour bénéficier encore de prestations assurantielles.

La raison politique reste la raison essentielle.

Les dispositions légales touchant l’indemnisation du chômage ne sont pas dans le Code de la Sécu, mais dans le Code du Travail.

  1. Confrontation entre la Sécurité Sociale organisation et la protection sociale complémentaire.

Il est extrêmement rare que les prestations de Sécurité Sociale (versés par les organismes de Sécu) couvrent l’intégralité des conséquences économiques des risques ou des charges garanties.

Exemple 1 : L’assurance maladie

L’assurance maladie peut verser aussi bien des prestations en nature (remboursement des dépenses de santé ou leur prise en charge) que des prestations en espèce (la compensation des salaires perdus du fait de l’arrêt de travail causé par la maladie ou l’accident).

S’agissant des prestations en nature, le principe est que sauf exception, elles ne couvrent pas l’intégralité de la dépense de santé (environ 70%). Un certain pourcentage reste à la charge de l’assuré (on l’appelle «ticket modérateur »). La raison de ce ticket modérateur est le soucis de responsabiliser les assurés sociaux (ne pas aller voir sans arrêts voir les médecins sans raison) et équilibrer les dépenses de la Sécurité Sociale.

Quant aux prestations en espèce, elles ne compensent que de façon partielle (aux alentours de 50% seulement et encore dans la limite d’un plafond qui ne correspond pas forcément au salaire perçu).

Par conséquent, pour être mieux rembourser, il faut cotiser auprès d’une mutuelle ou d’une compagnie d’assurance, qui en contrepartie remboursera tout ou partie du ticket modérateur.

Exemple 2 : L’assurance vieillesse :

La pension de retraite (financée par cotisations patronales et salariales) est au maximum de 50% du salaire moyen d’activité, et là aussi dans la limite d’un plafond mensuel (3000e) qui ne correspond pas aux salaires élevés.

Par conséquent s’il n’existait que les pensions de retraite de la Sécu, il y aurait baisse significative de leur niveau de vie.

Il fallait donc les laisser payer des cotisations complémentaire auprès d’organismes complémentaires, pour bénéficier de retraites complémentaire pour s’ajouter à celle de base de la Sécurité Sociale.

Comment ce fait-il que la Sécurité Sociale ne puisse pas tout payer ? Les raisons sont financières.

La protection complémentaire prend une place grandissante à la mesure des difficultés financières de la Sécurité Sociale. Car l’État veut toujours réduire la couverture de base de la Sécurité Sociale pour maîtriser les déficit de celle-ci en disant qu’il n’y a qu’à faire appel aux complémentaires.

Exemple 3: La Cour des Comptes dans ses derniers rapports sur les comptes de la Sécurité Sociale : fait aux alentours de 80 propositions de réformes.

Parmi elles, l’une parle du remboursement des lunettes par la Sécurité Sociale (qui rembourse mal l’optique). La proposition serait de dire autant que la Sécurité Sociale arrête les remboursement, puisque celui-ci est déjà dérisoire. Et que donc il ne faut aller qu’à la protection complémentaire (mutuelle).

La protection sociale complémentaire, surtout pour les salariés, et la protection sociale des entreprises est à l’intersection du droit du travail et du droit de la Sécurité Sociale.

Concernant la sécurité sociale horizon :

Celle-ci est naturellement plus large que la protection sociale. D’abord par la sécurité de l’avenir qui pose également d’autres problèmes que ceux concernés par la protection sociale, comme les problèmes de logement, d’environnement, des problèmes d’hygiène publique. Et ensuite, la protection sociale reste quand même très organisationnelle dans sa présentation. Donc de ce point de vue la protection sociale est plus proche de la sécurité sociale organisation qu’elle englobe et dépasse, que de la sécurité sociale horizon dont elle est un moyen de s’approcher le plus possible.

C/ Le droit de la Sécurité sociale.

° Il ne faut pas confondre le droit de la sécurité sociale avec la sécurité sociale elle même.

° Ce droit est indispensable à la mise en place et au fonctionnement de la sécurité sociale.

  1. Le droit de la sécurité sociale et la sécurité sociale elle même

Ce risque de confusion est assez vrai si l’on prend la sécurité sociale dans son sens le plus large, c-a-d la sécurité sociale horizon. Cette dernière relève des politiques sociales et ne se trouve pas strictement sur un terrain juridique.

Il est d’usage de dire qu’il y a deux conception de la sécurité sociale dans le monde:

– La conception Bismarckienne

L’objectif est de garantir aux travailleurs, essentiellement aux salariés, un maintient de leur revenu, en tout ou en partie, en dépit de la réalisation d’un risque ou d’un charge (maladie, invalidité, grossesse..).

– la conception Beveridigienne

A l’inverse, dans cette conception la sécurité sociale est présente pour garantir à chacun un minimum pour vivre.

Ce ne sont pas des conceptions juridiques.C’est un avant tout un objectif, une vision sociale.

° C’est une raison pour lequel on entend en matière de droit de la sécurité sociale, des jugements mondains qui paraissent complètement contradictoire.

Les problèmes de sécurité sociale se présentent comme des problèmes de premiers ordres dans une société.

° A l’inverse, le droit social peut paraitre comme un droit inintéressant, complexe et technique.

La distinction entre le droit de la sécurité sociale et la sécurité sociale est difficile à mettre en oeuvre. Dans un société moderne, il n’y a pas d’organisation sans droit. L’idée d’organisation faisant évidemment appel à une organisation juridique.

On trouve tout de même une distinction, le système de la sécurité sociale est un avant tout un choix politique et social et non pas un choix juridique.

Le choix entre deux système de sécurité sociale est encore une fois une question d’organisation, et non un choix juridique.

  1. Une articulation nécessaire entre le droit de la sécurité sociale et la sécurité sociale

Dans une société contemporaine, il arrive un moment ou les grands objectifs politiques économiques et sociaux ne peuvent être réalisé que si l’on recourt à la règle de droit.

Le droit de la sécurité sociale peut apparaitre comme un « outil » (les choix étant réalisé auparavant), cela étant le droit de la Sécurité Sociale est un maniement complexe qui pose des problèmes importants pour une raison principale:

– une sorte de tension irréductible entre tout ce qui relève de la Sécurité Sociale d’un côté et et tout ce qui relève du droit de la Sécurité Sociale de l’autre; en effet quelque soit les conceptions de la Sécurité Sociale, il y a toujours dans la sécurité sociale un tendance élargissante. C’est tout à fait vrai dans le rapport Beveridge: elle doit couvrir tous les risques et toutes les charges. On trouve une montée spontanée et universelle de la Sécurité Sociale..

à l’inverse le droit est tout de même fondé sur une distinction des catégories (lois, procédures, effets ..)

Dans la mise en oeuvre concrète de la Sécurité Sociale, le rôle du droit est plus ambivalent, plus contradictoire qu’on ne pense, en règle générale le rôle du doit peut conduire à amoindrir la portée d’un objectif de sécurité sociale, car il va imposer des distinctions qui peuvent être considérées comme appauvrissante.

La Sécurité Sociale et le droit de la Sécurité Sociale doivent être clairement distingués, mais cette distinction sert également à les articuler étroitement puisque pour devenir effectif, la Sécurité Sociale à évidemment besoin du droit de la sécurité sociale.

Il existe un droit de la protection sociale et la protection sociale, leur rapports sont exactement les mêmes que la Sécurité Sociale et le droit de la Sécurité Sociale..

  1. La description de la Sécurité sociale entre assurance et solidarité.

Il faut la comprendre que ce qui fait le coeur et l’originalité de la Sécurité Sociale c’est qu’elle est à la fois de l’assurance et de la solidarité, ils sont intimement liés.

L’exemple le plus fort de cette liaison intime c’est que les prestations sociales sont presque toutes des prestations contributives, c-a-d financés par les assurés sociaux eux mêmes. Par ailleurs les cotisations qui servent à financer cette prestation sont calculés non pas en fonction du risque mais en fonction du revenu.

  1. L’influence de l’assurance

La première influence, et la plus, forte est que les prestations de la sécurité sociale sont des prestations contributives. Elles sont toujours assurée en partie par les salariés ou par les assurés sociaux

Dissociation très forte entre les financeurs et les bénéficiaires dans l’assurance tandis que dans la Sécurité Sociale, les assurées sociaux contribuent aux financement social.

1.1 l’influence de l’assurance sur la nature des évènements couvert

Dans le cadre des assurances sociales , et des accidents du travail, la couverture de la sécurité sociale est toujours organisé pour pallier les conséquences économiques d’un certain nombre d’évènements aléatoires qui frappent les assurés sociaux et que l’on appelle, les risques et les charges. Cette thématique de prise en compte d’évènements aléatoire vient de l’assurance.

° Art L111-1c du code l’assurance sociale , AL 2 « l’organisation de la Sécurité Sociale garantit les travailleurs et leur famille contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gains » « cette organisation couvre également les charges de maternité de paternité et les charges de famille »

Les évènements aléatoires peuvent ou non se réaliser, cette idée d’aléas est une idée typique de l’assurance.

Les risques sont susceptibles de réduire ou de supprimer la capacité de gain des travailleurs, donc d’empêche le travailler de travailler et donc de recueillir le gain de son travail. Le risque est donc un évènement aléatoire qui à pour effet d’empêcher l’activité de travail temporairement ou définitivement. ex: maladie, maternité, vieillesse, décès, invalidité. et maladies professionnelles: accident de travail.

Les charges sont des événements aléatoires qui n’ont pas nécessairement pour effet d’empêcher de travail mais qui augmentent les dépenses de la personne du ménage, et donc d’altérer de compromettre, de réduire l’adéquation des revenus du travail aux dépenses de la personne.

S’agissant de sa portée, il s’agit d’une distinction utile mais dont il ne faut pas exagérer l’importance et surtout à propos de laquelle il ne faut pas faire une erreur d’analyse assez fréquent. Un même évènement peut à la fois être un risque et une charge, c’est le cas de la maladie par exemple. On s’aperçoit que les risques et les charges lors d’une analyse plus rigoureuses ne sont pas des évènements mais des qualifications donnée à des évènements.

Pour autant cette distinction reste très importante, elle est d’autant plus importante qu’elle est liée à d’autres distinctions fondamentales dans notre système de sécurité sociale et dans notre droit de la sécurité sociale. 3 distinctions :

1- celle des prestations en nature et celle dites en espèces

2- distinction de l’assuré social et de ses ayants droit

3- distinction des droits propres et des droits dérivés

°1. Les prestations en nature sont pour l’essentielles des prestations qui consistent à un remboursement des dépenses de santé par la sécurité sociale ou par la prise en charge directe par la sécurité sociale de ces prestations.

Les prestations en espèces sont des prestations qui compensent la perte de gain professionnel occasionné par la réalisation d’un risque au travail.

°2 Conception française dite socio professionnel de la sécurité sociale, c-a-d que la qualité d’assuré social est lié à l’exercice d’une activité professionnelle. C’est l’entrée dans la vie professionnelle qui donne la qualité d’assuré social.

Les ayants droit sont des personnes qui n’exercent pas d’activité professionnelle, mais qui ont un lien proche avec l’assuré social, lien tel qu’il est reconnu par la loi et qui leur permet d’accéder à une partie de la couverture sociale. Ces ayants droit sont le conjoint, le partenaire pacsé, la personne vivante en union libre, ses enfants et ses ascendants de l’assuré social.

Alors que les assurés sociaux peuvent connaitre des risques et des charges, les ayants droit ne peuvent connaitre que des charges.

°3 Elle est en réalité très proche de la distinction de l’assuré social et des ayants droits. Seul l’assuré social à des droits propres, c-a-d des droits qu’il détient en son nom propre et en sa qualité d’assuré social affilié en son propre nom aux assurances sociales et couvert en son propre nom aussi bien par la législation de la réparation des risques professionnelles que par les prestations familial.

En revanche les ayants droits n’ont que des droits dérivés puisqu’ils ne sont pas eux même assuré sociaux. Ces droits dérivés sont précisément des droits que les ayants droits tiennent par l’intermédiaire d’un assuré social dont ils sont proche dans le cadre familial ou dans le cadre d’une cohabitation. Ces droits dérivés sont tantôt très semblable aux droits propres tantôt nettement distinct.

Dans d’autres assurances sociales, les droits dérivés sont différent dans leur calcul et dans leur montant. C’est le cas notamment dans l’assurance vieillesse.

Dans ce cas l’assuré social qui part en retraite à le droit à une pension de retraite dont le montant est calculé en pourcentage du salaire d’activité et dépend de la durée de cotisation antérieure à l’assurance vieillesse. Le montant de la pension de retraite est montant du salaire antérieur et de la durée d’emploi de l’actuel retraité.

La pension de retraite est versé à la seule personne ayant cotisé.

Cependant si l’assuré social vient à décéder lors de la pension de refaite en laissant un conjoint vivant, celui ci pourra dans certaines conditions de bénéficier aux titres de ses droits dérivés d’une pension dite de réversion qui équivaut dans le régime général actuel à 54% de la pension de retraite de l’assuré social pré-décédé.

  1. La composition de la couverture sociale

on appelle couverte sociale, la couverture organisé par le système de la Sécurité Sociale..cette couverture à des caractéristiques nettement assurancielles puisqu’elle est réalisé à l’occasion de la réalisation d’évènements aléatoires (accident, naissance..) et le montant des prestations dépend des conséquences économiques et finassière de ces évènement sur l’assuré social et sa famille. Il en découle que la couverture social n’es pas véritablement homogène puisqu’elle dépend en grande partie de la nature des évènements couverts de ce faut la substance de la couverture sociale comme son organisation sont marqués par une grande diversité.

1.1 La composition substantielle de la couverture sociale

Dire que la couverture sociale à une substance hétérogène c’est insister sur la nécessité de classification à l’intérieur de cette couverture sociale, or précisément ces classifications existe jusque dans le code de la sécurité sociale. Deux principales :

  1. une classification en volets
  2. une classification en branche
  1. une classification en volets

Classification entre les assurances sociales, la réparation des accidents du travail, des maladies professionnelles et les prestations familiales. Il s’agit d’une distinction clef pour comprendre la sécurité sociale. Elle figure dans le code de la sécurité sociale puisque le livre III de la Sécurité Sociale, porte sur les assurances sociale, le livre IV sur la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles et le livre Vème sur les prestations familiales.

La clef consiste dans la nature et l’origine des événements couverts. En effet, les assurances sociales conservent la couverture d’évènement d’origine non professionnelle mais qui peuvent avoir des conséquences sur l’activité de travail et qui peuvent également avoir pour conséquence d’aggraver les dépenses de l’assuré social et de sa famille d’une façon ou d’une autre.

° Les assurances sociales: couvrent des risques et des charges d’origine non professionnelles (assurance maladie, assurance maternité, assurance invalidité, assurance vieillesse, assurance décès et l’assurance veuvage).

assurance maladie: perte de salaire causé par arrêt maladie et les dépenses de soins pour la nécessité de soigner cette maladie.

Bien que cette assurance sociale porte le nom d’assurance maladie, elle concerne également les accidents lorsqu’ils ne sont pas d’origine professionnelle. Pour ce qui est de ces accidents, l’assurance maladie couvre les dépenses de santé et la perte de salaire causé par l’arrêt de travail comme pour la maladie.

Tous les autres préjudices relève du droit de la réparation dans le cadre de la responsabilité civile et non pas du droit de la Sécurité Sociale.

L’assurance sociale est le principe selon lequel la couverture sociale est financé par les assurés sociaux eux mêmes (principes contributifs) étant entendu que les cotisations sont calculés en fonction du revenu de l’assuré social et non pas en fonction de son risque. C’est en cela que l’assurance est sociale.

Il s’oppose au principe d’assistance social qui concerne l’aide et et l’action sociale dans lequel les prestations ne sont pas d’origines contributives.

Les assurances sociales sont une déclinaison du principe d’assurance social selon les différents évènements aléatoires pris en compte par la couverture social. Ce sont les dispositifs techniques ou spécifiques qui mettent en oeuvre pour ce type d’évènement le principe général d’assurance sociale.

° La réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles:

Par la couverture de risque et de charge d’origine professionnelle qui sont en lien directe ou suffisant avec le travail, soit parceque survenu au lieu et au temps de travail, soit parceque leur relation avec le travail est manifeste.

L’organisation de la couverture est nettement différente de celle de la couverture des risques et des charges non professionnelles. Ce sont des prestations contributives mais qui sont financées par les seuls employeurs. Il n’y a pas de cotisations salariales. Ce la est du à l’origine de la législation des risques professionnels, qui est à chercher dans le droit de la responsabilité civile et spécialement de la responsabilité civile de l’employeur. Le droit de des accidents de travail s’est différencié de droit de la responsabilité civile mais il à gardé la règle d’origine selon laquelle ce sont les employeurs et eux seuls qui financent les prestations car on considère qu’ils doivent assumer seuls les risque Professionnels entrainé par leur entreprise.

Les dépensées de santé sont plus favorable que l’assurance sociale maladie (dépense santé couverte 100% contre 70%). En revanche si l’on compare aujourd’hui la réparation servie au cas de risques professionnelles et la réparation servi dans le cas de la responsabilité civile de droit commun. Aujourd’hui malheureusement la réparation des risques professionnels est assez souvent inférieur à celle des risques de doit commun ne serait parceque en matière de réparation des risques professionnels le principe est celui d’une réparation seulement forfaitaire.

° Les prestations familiales: Volet des prestations familiales (régies par le livre V du code de la Sécurité Sociale.) qui couvre les charges touchant l’entretien des enfants. Ce troisième volet est nettement différent des deux premiers, certes ils concerne des évènements aléatoires qui peuvent avoir et qui ont des conséquences économiques ou financières parfois très lourdes pour les parents et les familles. il y a aussi des différences significatives:

– on oppose les risques des assurances sociales en disant qu’il s’agit d’évènement malheureux et les évènements de prestations familiales dit évènements heureux. En réalité peu de sens : Ce qui compte ce sont les conséquences pécuniaires qui peuvent être lourdes du fait de cette naissance et l’obligation d’entretenir le enfants jusqu’à leur indépendance.

– s’agissant des prestations familiales, on retrouve la cotisation exclusivement patronale. c’est une origine historique car à l’origine les prestations familiales ont été spontanément crée par des employeurs, avant 1914 (cela concerne surtout le patronat chrétien). Le financement de ces prestations n’a jamais été demandé par les salariés. Aujourd’hui cela est encore la cas bien qu’ une partie des prestations familiales ce fait par des impôts

– depuis 1975 avec effet au 1 janvier 1978, le droit aux prestations familiales est déconnecté de toutes conditions d’activité professionnel (il n’es plus nécessaire d’air une activité professionnel). Par conséquent le volet des prestations familles et le volet de la couverture sociale française qui se rapprochent le plus d’un système de sécurité sociale de type universel

Rappel:

On distingue dans le monde deux types de Sécurité Sociale.: ceux dit socio-professionnel :

– on es assuré social si on exerce une activité professionnel

et ceux de types universel :

– seul une résidence sur le territoire national permet d’y avoir accès

La France possède un système de sécurité sociales plus socioprofessionnel et c’est plutôt le cas en matière d’assurance sociale et dans le cadre de la réparation des accidents de travail et de maladie professionnelles. Cependant tel n’es plus le cas en matière de prestations familiales.

Au terme de l’étude cette classification en volet, la composition substantielle de la composition de la sécurité sociale est donc assez hétérogène. Toutes ces prestations figurent dans le même code de système de sécurité sociale mais avec des principes de fonctionnement différents. En dépit de toutes ces différences, il existe un système de sécurité sociale suffisamment cohérent qui regroupe les questions en relation les unes avec les autres.

  1. la classification en branche

Elle n’es pas très éloigné de la classification volets mais elle s’en distingue de différentes façon, d’abord elle ne structure pas le code de la sécurité sociale et d’ailleurs ce n’es pas réellement une classification de nature juridique mais plutôt de nature financière et administrative puisqu’elle repose sur l’organisation administrative des branches et sur leur circuit de financement.

En deuxième lieu ce type de classification est beaucoup plus utilisé aujourd’hui dans les débats publics et les médias quand il est question de sécurité sociale que la classification en volet.

En troisième lieu c’est une classification fixé moins nettement que l’autre classification, elle est plus floue.

Dans cette classification en branche on distingue:

– on distingue la branche maladie, vieillesse et famille.

  1. La branche maladie concerne toutes les assurances sociales sauf la vieillesse et le veuvage et elle intègre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
  2. La branche vieillesse concerne exclusivement ‘l’assurance vieillesse et veuvage
  3. La branche famille concerne évidemment les prestations familiales

On voit bien les avantages de cette distinction, elle porte sur les trois questions cruciales:

– la couverture de la malade, de la vieillesse et des charges familiales.

Cette classification correspond à des circuits financiers facile à identifier puisque du point de vu du régime général:

LA branche maladie correspond à tout ce qui relève de la caisse nationale d’assurance malades des travailleurs salariés.

LA branche vieillesse …. à la caisse nationale .. CNAS. ???

LA branche famille : tout ce qui relève de la Caisse nationale d’allocations familiale. (CAF)

Il y a un grand réalisme de la classification en branche. Elle possède cependant les faiblesses du réalisme puisqu’elle peut se fragiliser avec les évolutions de la réalité. C’est ainsi que pour certains observateurs, il y a en réalité 4branches.

En effet à l’intérieur de la branche maladie, la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles joui depuis la loi du 25juillet 1994 de l’autonomie financière par rapport au reste de la branche maladie. De telle sorte qu’aujoudhui l’art L2002-2 du code de la Sec. Soc. fait des accidents et maladies professionnelles une quatrième branche.

en même temps cependant Cette nouvelle configuration de la classification n’en branche est plus fragile que la précédente puisque dans cette nouvelle configuration il y a trois branches qui ont à la fois l’autonomie administrative et financière qui sont la maladie, vieillesse et famille. Tandis que la quatrième branche n’a que l’autonomie financière puisque administrativement elle dépend des organismes de la branche maladie.

Pour d’autres auteurs il y à 5 branches, celles cités plus la branche recouvrement, c-a-d, les organismes de sécurité sociale chargé de recouvrer le produit des cotisations de sécurité sociale.

Dans Cette dernière il n’est question que de problèmes de prélèvement de cotisations. D’un point de vue administratif cela semble assez logique, elle recueille au niveau local et réparti le produit entre les caisses nationales des autres branches.

Organismes :

– URSSAF (union pour le recouvrement des cotisations de sécurités sociales et des allocations familiales) développer leur origine …

Il existe au moins un URSSAF par département. Les URSSAF du point de vue de leur nature juridique sont des organismes de sécurité sociale comme les autres qui sont gérés exactement de la même manière notamment par un conseil administratif. C’est donc devenu un élément central de notre vie national

Les URSSAF sont chapeautés par un organisme différent, l’ACOSS (agence centrale des organismes de sécurité sociale) qui recueille tout le produit de relèvement des URSSAF qui calcule la somme et qui en répartit ensuite le montant entre les 3 branches différentes branches. C’est un organisme de sécurité sociale qui à exactement le même point de vue juridique que l’URSSAF ou les autres systèmes de la sécurité sociale.

On peut donc en parler comme une branche de recouvrement car complète administrativement.

  1. La composition organique de la couverture sociale

Il faut entendre par composition organique tout ce qui touche à l’organisation de la sécurité sociale et qu’il faut bien reconnaitre qu’elle est assez hétérogène, assez complexe sont à mettre en relation avec l’influence de l’assurance.

Notre système de sécurité sociale est de type socioprofessionnel:

Dans un système de ce type n’es assuré social qu’une personne qui assure une activité professionnel et ensuit la couverture sociale elle même est spécifique à chaque grande catégorie socio-professionnel, c-a-d que chaque grande catégorie socio-professionnel est au fond libre de déterminer le type de couverture social qui lui convient. Ce qui justifie qu’a l’intérieur d’un même système de sécurité social, il existe différent régime de sécurité social. Autant de régime de Sécurité Sociale qu’il y a dans la société française de grandes catégorie socio-professionnel.

Il existe d’abord,

1 – le régime dit général, celui des salariés et les catégories assimilés (ex:les étudiants). C’est de très loin le régime le plus important en France, lié bien sûr au fait que en France les salariés sont à forte majorité , aux alentours de 80%..

2 – le régime dit spéciaux. liste des personnes visées par ce régime est donnée à l’article R.711-1 du code de la sécurité sociale. Il existe 122 régimes spéciaux. Les principaux d’entre eux visent la fonction publique( régime des fonctionnaires civils et militaires..), le secteur de l’énergie (régime EDF-GDF..), le secteur des transports (SNCF, RATP, gens de mer), le secteur de la culture, les clercs et employés de notaire, les ministres des cultes, les assemblées parlementaires..

Ces régimes s’expliquent par des raisons historiques; régimes crée avant le système de la sécurité sociale, et que les catégories de la salarié ont voulu conserver car plus favorable sur un certain nombres de points que le régime général. Ils connaissent aujourd’hui fréquemment des difficultés liées au vieillissement de la population couverte (dégradation du rapport démographique). Leur réforme inéluctable en particulier en matière de vieillesse, a néanmoins été repoussé.

3- les régimes autonomes, aujourd’hui plus ou moins regroupés dans le RSI (régime social des indépendants) qui concerne la couverture sociale des travailleurs indépendants ou plus précisément des travailleurs qui ne sont ni salariés ni exploitant agricole. On parle des « non-non »: ces derniers relèvent de deux catégories de régimes :

– des régimes d’assurance vieillesse institués en 1948 et coordonnés par l’ORGANIC (industriels et commerçant), la CANCAVA (artisans) et la CNAVPL (professions libérales) auquel s’ajoute la caisse nationale des barreaux français (avocats)

– du régime d’assurance maladie-maternité institué en 1966 pour l’ensemble des professions.

L’autonomie à été consacré face au refus d’être intégrés en 1946 dans le régime général en partant de l’idée selon laquelle chaque groupe social doit décider de l’importance de sa couverture sociale. Pour l’heure, l’assurance maladie des non-non ne comprend pas de prestations en espèces et le bénéfice des prestations est subornée au paiement des cotisations.

4 – le régime agricole, géré par la MSA elle même associé à la « mutualité 1900 » (assurance des risques propres à l’activité agricole) regroupe à la fois les exploitants agricoles et les salariés agricoles. Il est régi par le code rural et est placé sous la tutelle du ministre de l’agriculture assisté par un conseil supérieur des prestations sociales agricoles. Le régime agricole fait largement appel à la solidarité interprofessionnelle et nationale. Sii a couverture des salariés agricoles est identique à celle des bénéficiaires, la couverture des exploitants agricoles est plus incomplète: il ne bénéficient en effet ni des prestations d’invalidité ni d’indemnités journalières.

Peut on utiliser l’expression « mosaïque de régime » ? existe t’il encore réellement un « système de sécurité sociale » ?

  1. L’empire de la solidarité

En matière de Sécurité Sociale si l’influence de l’assurance est incontestable, c’est tout de même le principe de solidarité qui tient la première place et qui modèle l’assurance de telle façon qu’il s’agit en réalité d’une assurance sociale. Ce principe de solidarité figure dès l’art .L.111-1 du code de la Sécurité Sociale au premier alinéa.

Selon ce texte en effet: « l’organisation de la Sécurité Sociale est fondé sur le principe de la solidarité nationale« 

Cette disposition ne remonte pas il est vrai à l’ordonnance fondatrice de notre système de sécurité sociale qui est l’ordonnance du 4 octobre 1945. 1er alinéa remonte en effet seulement à une loi du 2 janvier 1978 relative à la généralisation de la sécurité sociale. Mais il est clair que dès 1945, le principe de solidarité est au coeur de notre système de sécurité sociale, à a fois parcequ’il en définit les objectifs et les méthodes. pas de sécurité pour tous sans principe de solidarité.

Ce principe de solidarité n’es pas une vague déclaration, en réalité ce principe de solidarité à des conséquences tout à fait concrètes sur le fonctionnement quotidien de notre système de sécurité sociale. Parmi ces conséquences figure la règle de calcul des cotisations selon laquelle les cotisations de sécurité sociale sont calculées non pas en fonction du risque comme il en est pour les primes d’assurance mais en fonction du revenu, de telle sorte que la sécurité sociale reste accessible aux personnes qui ont des risques élevés et des revenus faibles puisqu’elles n’auront à payer que des cotisations faibles.

Ce mode de fonctionnement des cotisations en fonction des revenus n’est praticable que si tout le monde cotise. Il ne s’agit pas que seul les personnes à revenus faible cotisent. Il faut donc pour que le système fonctionne véritablement que tout le monde cotise y compris les personnes à revenus élevés et à risque faible.

En réalité il n’y a de système de Sécurité Sociale possible que si l’affiliation à la sécurité sociale est strictement obligatoire. Sinon les personnes à revenus élevés et à risque faible iraient voir du côté de l’assurance privé qui leur proposeraient des primes plus faibles.

C’est sur ce point que nous sommes le plus loin du droit privé.

Pour autant le système de sécurité sociale n’es pas complètement hostile aux options aux choix à l’existence de contrat, d’accords..

2° financement des retraites dans le cas de l’assurance vieillesse:

– Financement par capitalisation: Il repose sur l’effort d’épargne antérieur de celui qui est aujourd’hui en retraite. Chacun se constitue sa futur retraite en capitalisant. Ce système à très longtemps été le système dominant jusqu’au 20ème siècle mais à très vite révélé ses faiblesses;

– En période d’inflation forte la capitalisation est fortement réduite en raison de la dépréciation monétaire.

– Il n’es aucunement solidaire, il dépend du système d’épargne de chacun ce qui plaisait beaucoup au 19ème et début 20ème, ou l’épargne tenait une place forte au sein des familles. Cependant il est à souligner que l’épargne ne profite qu’a ceux qui possède des revenus assez élevés, or tout l’objectif de la sécurité social c’est de fonctionner aussi bien pour les faibles revenus que pour les revenus élevés.

– Financement par répartition: ouvert dès 1945, les retraites actuelles sont financées par les cotisations des travailleurs actifs actuels. Ce sont ceux qui travaillent aujourd’hui qui financent les retraites des retraités d’aujourd’hui. Il est donc un dispositif de solidarité entre génération.

Il est parfaitement ouvert aux personnes possédant un revenu modeste et n’es aucune sujet à la dépréciation monétaire.

Si le financement par répartition consiste à faire payer les retraites actuelles par les actifs actuels, le montant de la refaite de chacun sera tout de même fonction notamment et largement de la durée de cotisation antérieur de chacun à l’assurance vieillesse.

Système solidaire mais qui possède une limite qui est aujourd’hui préoccupante.

Il suppose un bon rapport actif/inactif, que le nombre de travailleurs actif et cotisants soit le plus élevés possible et que le nombre de retraités soit le moins élevés possible. Deux éléments compromettent la qualité de ce rapport:

– Le premier élément est le chômage puisqu’il entraine une baisse des cotisations et donc indéniablement de l’assurance vieillesse. « la sécurité sociale est malade du chômage » P.Segguin

– Le deuxième élément est l’allongement du durée de la vie. Les retraites vivent plus longtemps en retraite.

L’existence et les conséquences pratiques de ce système de solidarité ont eu des effets sur la jurisprudence dont celle de la CJUE:

Un certain nombres de travailleurs indépendant ont en effet dans les deux dernières décennies du 20ème siècle contesté l’obligation d’affiliation à la sécurité sociale car elle leur donnait la possibilité de préférer s’affilier volontairement à l’assurance vieillesse et une monopole des organismes de sécurité sociale était contraire aux principes de libre concurrence entre entre établissement public selon le droit de l’UE. Possession dominante de la sécurité sociale s’abrogeant un monopole inadmissible.

Cette tentative à échoué dans deux arrêts: du 17 janvier 1993 POUCET et PISTRE : Les demandeurs contestaient les le paiement de cotisations de sécurité sociale dues aux caisses en question. Sans remettre en cause le principe de l’affiliation obligatoire à un système de sécurité sociale, ils estimaient qu’ ils devraient, à cette fin, pouvoir s’ adresser librement à toute compagnie d’ assurance privée, établie sur le territoire de la Communauté, et non pas devoir se soumettre aux conditions fixées unilatéralement par les organismes en question qui jouiraient d’ une position dominante contraire aux règles de libre concurrence posées par le traité (articles 85 et 86) que doivent respecter les entreprises.

Dans son arrêt, la Cour, affirme tout d’abord que « le droit communautaire ne porte pas atteinte à la compétence des États membres pour aménager leurs systèmes de sécurité sociale » (jurisprudence constante) Elle rappelle, en substance, que les articles 85 et 86 ne sont pas applicables aux « organismes qui concourent à la gestion du service public de la sécurité sociale(et) remplissent une fonction de caractère exclusivement social ». Car « Cette activité », poursuit le juge communautaire, « est, en effet, fondée sur le principe de la solidarité nationale et dépourvue de tout but lucratif ».

Il y a au fond deux mondes:

– le monde de la solidarité

– le monde de la concurrence (qui interdit l’abus de possession dominante)

Il n’es pas exclu que les organismes de sécurité sociale puissent dans certaines de leurs activités apparaitre comme des entreprises et relever de règles mais ce sont des activités marginales dans lequel n’apparait pas le principe de solidarité.

Le législateur français lui même à récemment insiste sur le rôle de principe de solidarité, par exemple:

– l’art. 1 de aout 2003 sur les retraites « la nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au coeur du pacte sociale qui unit les générations« 

– loi du 13 aout 2004 « La nation affirme son attachement au caractère universel obligatoire et solidaire de l’assurance maladie » Elle ajoute

– Art L.101 code Sécurité Sociale « indépendamment de son âge et de son état de santé, chaque assuré social bénéficie contre le risque et les conséquences de la maladie d’une protection qu’il finance selon ses ressources« 

En effet l’organisation de la sécurité sociale est fondée sur le principe de solidarité, es-ce à dire que le système est entièrement solidaire et que notamment il organise une redistribution des revenus des riches vers les pauvres ?

plusieurs raisons d’en douter :

  1. cette redistribution des riches vers les pauvres est très douteuse. on à coutume d’affirmer en disant que dans les assurances sociales du régime général les cotisations sont à la charge des employés et de l’employeur alors que les prestations ne sont versées qu’aux salarié. Donc on prendrait de l’argent aux employeurs pour le reverser aux salariés sous forme de prestation. Cette présentation des choses semble évidente mais douteuses car deux raisons :

– s’il n’existait de pas de cotisation patronales, il est vraisemblable que les salaires serraient plus élevés car les cotisation patronales font partie du cout du travail. Certains. pour certains auteurs, les cotisations relèvent du cout du travaille et non du patrimoine de leurs employés.

– en toute hypothèse, les cotisations patronales sont répercutés sur les prix de vente des produits. Au bout du compte la charge des cotisations patronales repose sur les consommateurs et non pas sur les employés.

Les actifs étant statistiquement les plus nombreux à cotiser et les moins nombreux à recevoir des prestations, alors que les retraités sont ceux qui reçoit le plus de prestation. Il entraine une redistribution de revenu mais pas exactement celui qui serait du principe de redistribution, plus celui de redistribution entre génération.

  1. existence d’un grand nombre de régime de sécurité sociale à l’intérieur du système, si le système de Sécurité Sociale était solidaire il devrait être exactement le même pour tous or c’est assez loin d’être le cas. il existe une grande diversité de régime « mosaïque de régime » qui ne se ressemble pas en tout point. Notamment la couverture sociale qui les organise peut être assez différente pour certains risques.

III. entre le modèle bismarckien et le modèle beveridgien, le système des régimes de sécurité sociale

  1. les deux modèles de sécurité sociale

1.1 Le modèle Bismarckien

Les assurances sociales sont nées en Allemagne à la fin du 19ème siècle principalement entre 1880 et 1890, à l’époque du Chancelier Bismarck.

Pour lui, le 2ème reich se doit d’être conservateur, il doit répondre aux besoins sociaux pour éviter que les salariés ne partent dans l’orbite des parties révolutionnaires.

Sa politique, guidée par un double souci de lutte contre les syndicats et contre la montée du parti socialiste, s’est traduite par la dissolution de ces organisations. En contrepartie, l’Etat a pris la responsabilité d’institutionnaliser la protection sociale, dispensée auparavant par de nombreuses  » caisses de secours « . Si Bismarck n’a donc pas du tout songé à proposer un modèle de sécurité social, Il crée néanmoins un système social audacieux à l’époque.

Les assurances sociales obligatoires sont apparues dans ce pays à partir de 1883.

Ces assurances sociales sont réservées aux salariés et plus précisément aux salariés de revenus modeste. Pour ceux qui ont une salaire moyen ou élevé on les envoies vers les assurances privées, en revanche création de service sociaux pour faible salaire, financés par:

– salariés eux mêmes

– les employeurs qui payent des cotisations

– l’Etat qui ajoute un financement étatique

Par la suite ce modèle sera imité par tous les états européens. En réfléchissant à ce modèle, on commencera à étudier un modèle social bismarckien.

Traits caractéristiques:

– On s’aperçoit que dans ce modèle la sécurité sociale est réservé aux travailleurs. la conception est donc un modèle socio-professionnel

– la Sécurité Sociale est financé par des cotisations assises sur les revenus du travailleurs

– ces prestations sont servies au cas par arrêt de travail ou au cas par dépense de santé

– les organismes de Sécurité Sociale ne sont pas du tout nécessairement des organismes étatiques, ils peuvent être parfaitement des organismes de droit privé.

Dans cette conception, la sécurité sociale est organisé en faveur des seuls travailleurs, donc en faveur de ceux qui possèdent un travail, elle leur garantit le maintien total ou partiel de leur revenus professionnels antérieur à la réalisation du risque.

La sécurité sociale à pour objectif d’éviter que les travailleurs tombent dans l’indigence au cas de réalisation d’un risque social qu’il s’agissent d’un risque professionnel ou couvert par les assurances privées.

Le travailleur n’es donc plus un indigent, mais cette sortie de l’indigence est fragile ou précaire car la moindre maladie ou accident auraient des conséquences catastrophiques : d’ou la création de ces institutions sociales. Finalité: éviter que les catégories qui ne sont pas dans l’indigence y retombent du fait d’un risque social.

On laisse de côté ceux qui sont déjà dans l’indigence. On les renvoi à la charité publique.

Le modèle dit beverdgien à pour effet de pallier à ces défauts

 

1.2 Le modèle Beveridgien

L’adjectif beveridgien fait référence à William Beveridge qui était un économiste et un homme politique anglais du XXème siècle. Beveridge était plutôt proche du parti libéral.

Il fut chargé par Winston Churchill au début de la seconde GM de crée une commission appelée à réfléchir sur la future sécurité sociale telle qu’on pourrait l’imaginer après la guerre. Ce rapport fut publié le 1er décembre 1942. Il eut un intense succès et devait inspirer la plupart des systèmes européens.

Dans ce rapport, Beveridge, loin de proposer de simples réformes d’un système anglais lacunaire qu’il considère comme «  » trop limité avec le système du plafond d’affiliation, trop complexe avec la multitude des caisses et mal coordonné «  , il propose une vision radicalement nouvelle de la sécurité sociale qui l’éloigne du modèle bismarckien où la sécurité sociale est faite pour les travailleurs.

Dans le modèle bismarckien:

– il s’agissait d’éviter que les travailleurs modestes retombent dans l’indigence en cas de réalisation d’un risque ou d’une charge.

– le financement des assurances sociales est assuré par des cotisations patronales et salariales assises sur les salaires.

– les organismes de sécurité sociale ne sont pas des organismes publics

– Le modèle bismarckien est de type socio professionnel, il ne s’adresse pas à tout de le monde.

Dans la vision beveridgienne en revanche :

– l’universalité de la protection sociale sur toute la population et sur tous les risques sociaux: on a l’objectif, par la sécurité sociale, de sortir de l’indigence ceux qui y sont (= généralement ceux sans travail). C’est une politique de plein emploi.

– l’uniformité des prestations, fondées plus sur les besoins que sur les revenus.

– l’unité, (même régime pour tout le monde) avec la gestion étatique de l’ensemble de la protection sociale: les organismes de sécurité sociale sont des organismes publics aussi déconcentrés que possible.

– le financement de la Sécurité Sociale par l’impôt.

Les ambitions de ces modèles sont différentes :

– Bismarckien : éviter que les travailleurs les plus modestes soient repris par l’indigence

– Beveridgien : faire disparaître l’indigence et la pauvreté

1.3 Le système français de sécurité sociale par rapport aux modèles bismarckiens et beveridgiens = voir dissertation, plus complète !!

Ces modèles Bismarckien et Beveridgien sont des modèles qui n’existent nul part à l’état pur.

Pour ce qui est du système français de sécurité sociale, la question est difficile et la réponse complexe d’autant plus que le dosage des modèles bismarckiens et beveridgiens à évolué depuis 1945.

En 1945, le système de sécurité sociale crée en France est sans aucun doute d’esprit plutôt bismarckien.

Il y a une formule connue de l’un des pères de la sécurité sociale en France, Pierre Laroque. Il a présenté le système comme voulant assurer aux travailleurs la sécurité du lendemain.

Si l’on décortique cette formule, elle est d’inspiration bismarckienne :

– elle s’adresse aux travailleurs

– elle considère implicitement que les travailleurs ont la sécurité du présent

– elle considère aussi qu’il faut mettre les travailleurs à l’abris d’un risque d’indigence.

Le système français de sécurité sociale est de type socio professionnel avec des régimes distincts pour chaque grande catégorie socio professionnelle.

On a le régime général pour les salariés et assimilés mais il ne sera pas un régime universel. On aura à coté du régime général :

– les régimes autonomes : salariés non agricoles

– le régime agricole

– des régimes spéciaux pour certaines catégories de salariés

Ces régimes sont financés par des cotisations salariales et patronales assises sur les salaires et marginalement par l’impôt.

Ces régimes sont gérés par des organismes dont la plupart sont de droit privé.

Cela explique le rattachement du droit de la sécurité sociale au droit du travail, il a été également enseigné par des juristes privatistes.

Cela ne signifie pas qu’en 45 il n’y a aucune trace beveridgienne. On a un secteur qui commence à s’affranchir de la conception socio professionnelle. C’est celui des prestations familiales.

Si les prestations familiales sont versées aux travailleurs chargés de famille, elles commencent aussi à être versées à des chômeurs ou travailleurs indépendants.

En 1945, elle est en partie universelle.

Le dynamisme de la politique familiale en France explique cela.

Aujourd’hui, le système n’est pas devenu beveridgien mais il s’est rapproché de cette vision et il mêle étroitement des éléments bismarckiens et beveridgiens.

En ce qui concerne les assurés sociaux, on retrouve les travailleurs mais aujourd’hui il s’agit de tous les travailleurs et pas seulement les salariés.

Dans certains secteurs de la sécurité sociale et notamment la couverture santé sont assurés sociaux des personnes sans activité professionnelle ou insuffisante. Des personnes couvertes par la CMU sans rattachement familial ni profession sont protégées pour la maladie et la maternité.

Si la personne a des revenus propres elle paie une cotisation de 8% sur ses revenus sinon c’est financé par l’impôt.

Le financement de la sécurité sociale est partagé entre cotisations sociales et l’impôt. L’impôt est apparu depuis 1991 grâce à la contribution sociale généralisée qui frappe tous les revenus avec au taux de 7,5% et rapporte davantage que l’impôt sur les revenus. Cette CSG contribue au financement d’environs 40% des prestations de Sécurité Sociale.

Par ailleurs, la plupart des organismes de la Sécurité Sociale sont restés de droit privé mais les caisses nationales de régime général sont administratives. Qu’il s’agisse d’organismes de droit privé ou public sont soumis à une tutelle de l’Etat de plus en plus étroite surtout depuis le vote chaque année par le parlement des lois de financement de la sécurité sociale.

Les prestations familiales sont devenues depuis 1998 universelles et déconnectées de toutes conditions d’activité professionnelle.

Conclusion :

Il est clair que le système de sécurité sociale est devenu complexe puisqu’il mêle plus étroitement des éléments bismarckiens et beveridgiens. Cette complexité était inévitable.

Pour autant, elle n’atteint pas les objectifs beveridgiens puisque l’indigence n’a pas disparu de notre société même si elle n’a plus la même forme.

Le cœur du système est sans doute resté bismarckien mais, aux alentours, on trouve beaucoup d’éléments beveridgiens.

Comment le système va t-il évoluer ? Vers Beveridge ? ce n’est pas évident parce que les français paraissent attachés à une relation forte entre sécurité sociale et travail. En revanche, le financement par l’impôt va augmenter, il n’est pas encore majoritaire mais nous ne sommes pas loin.

1) Le système et les régimes de sécurité sociale :

La distinction du système et des régimes de Sécurité Sociale est une distinction typiquement bismarckienne puisque si l’idée de système de Sécurité Sociale vient de Beveridge, la persistance de régimes de sécurité social vient de Bismarck.

  1. A) L’idée de système de sécurité sociale vient de Beveridge :

Il ne s’est pas contenté de donner, dans son rapport, à la sécurité sociale des objectifs très larges.

Il se donne des moyens de réaliser le modèle avec un plan de réalisation systématique.

Pour Beveridge, il faut protéger tous les résidents contre tous les risques et toutes les charges avec des prestations identiques pour tous et cela du berceau jusqu’à la tombe.

C’est le plan systématique par hypothèse, on couvre tout et on s’organise pour pouvoir le faire. Cela suppose une politique de plein emploi volontariste.

L’idée d’un système de sécurité sociale et d’un plan cohérent vient de l’inspiration Beveridgienne. Pour autant, le système de sécurité sociale peut aussi être analysé d’un point de vue plus abstrait que le point de vue Beveridgien. Le droit de la Sécurité Sociale apparaît d’abord comme le droit de ce système de Sécurité Sociale en articulation avec la législation d’autres secteurs de la société (droit des assurances, fiscal, travail, civil-famille, responsabilité civile pour la réparation des risques pro, droit des contrats).

Partie 1 : Le système français de sécurité sociale

Titre 1 : La construction du système français de sécurité sociale

Quelle est la date clé dans la construction de la sécurité sociale ?

L’institution a été créée en 1945. Pour autant, la période antérieure à 1945 n’est pas sans intérêt et est même indispensable à connaître pour saisir la portée véritable de la création du système de la sécurité sociale en 1945.

Chapitre 1 : La période antérieure à la création du système français de sécurité sociale

En réalité, avant 1945, et parfois bien avant, se sont manifesté des éléments nouveaux, des techniques nouvelles qui annonçaient le futur système de sécurité sociale à partir du moment où les conditions de cette émergence ont été réunies.

Section 1 : Les conditions de l’émergence de techniques nouvelles

Il faut être clair. On ne peut parler d’annonce de la future sécurité sociale qu’à partir de la révolution industrielle touchant la France dans les années 1830-40. Cette révolution est postérieure à la révolution politique de 1789.

On peut trouver des pistes antérieures comme sous Henri 4 qui mit en place des systèmes de retraites pour les soldats.

En réalité il n’y a de protection sociale au sens que nous entendons à partir de la révolution industrielle. Il y avait avant des systèmes de protections collectives mais c’était dans un esprit différent de celui des sociétés industrielles. Il s’agissait d’un droit des pauvres et des indigents plus qu’un devoir moral des riches.

Paragraphe 1 Les conditions socio-économiques

La révolution industrielle qui a commencé à toucher l’Angleterre au 18ème siècle, touche réellement la France sous le règle de Louis Philippe et se caractérise par 2 traits majeurs :

Cette révolution industrielle crée à la fois une société du risque et à la fois une société des risques.

  • A) Une société du risques :

La société d’Ancien régime pré industriel connaissait toutes sortes de risques mais, d’un point de vue global, la condition des personnes était fixée d’avance sans risque majeur.

La trajectoire des individus était fixée et ne se caractérisait pas par des aléas sociaux. C’est cela que change la révolution industrielle.

Le mécanisme, l’exploitation scientifique et technique de nouvelles sources d’énergie, la concentration de nouvelles usines auprès de ces sources d’énergie et le besoin d’une main d’œuvre nombreuse venant de la campagne qui quitte la société rurale pour vivre en ville.

Dans un premier temps, cette population perd un cadre de vie traditionnel certes limité et modeste mais qui avait ses protections traditionnelles pour entrer dans un mode de vie nouveau qui est plus prometteur à terme mais qui, dans la première période d’industrialisation, se révèlera impitoyable au niveau de la qualité de vie de la population ouvrière.

Les ouvriers sont attirés par les salaires mais en même temps ce revenu est très faible et subvient à peine aux besoins essentiels de la personne et de sa famille. Les travaux sont très durs et la durée très longue. Même les enfants étaient embauchés.

Le rapport Villermé qui était un médecin militaire a été appelé à enquêter sous Louis Philippe sur un phénomène inquiétant de l’époque. En effet, dans le Nord et l’Est de la France, la conscription était de plus en plus dure car de nombreux jeunes étaient déclarés inaptes au service militaire. Ce médecin devait trouver pourquoi.

Il s’aperçoit de la réalité de l’exploitation des ouvriers dans les industries et de leur insalubrité entrainant maladies et infirmités. Il dénonce cette situation.

Le législateur réagit dès 1841 avec une loi interdisant le travail aux enfants de moins de 8 ans et limite la durée du travail pour les plus de 8 ans.

C’est la question ouvrière et la question sociale qui est dominante dans la France de la seconde moitié 19ème.

Les trajectoires des individus sont devenues aléatoires et notamment pour les classes populaires. Ils peuvent espérer une amélioration de leur condition avec un travail stable et sûr étant correctement rémunéré. La grande majorité des ouvriers ne disposent pas de cette garantie.

On est entré dans une société du risque où on ne peut plus se contenter d’une protection classique.

  • B) Une société des risques :

Si par risque on entend l’évènement accidentel ou aléatoire ayant des conséquences néfastes pour celui qui le subit, il y a toujours eu des risques dès les premiers hommes.

En revanche, ce que modifie la société industrielle c’est d’une part qu’elle intensifie les conséquences de certains risques et dans une certaine mesure, elle crée même de nouveaux risques. Dans la créations de ces nouveaux risques, il faut citer les accidents du travail et les maladies professionnelles.

L’accident du travail est un risque apparu antérieurement à la révolution industrielle mais ce que crée la société industrielle est un type nouveau d’accidents dus aux machines.

L’accident du travail mécanique est un risque nouveau à plusieurs causes :

– introduction de machines dans les usines et ateliers

– les machines sont dangereuses car on ne sait pas les sécuriser à l’époque

– les cadences de travail sont telles que la fatigue est une cause d’augmentation du risque

– l’indiscipline des ouvriers ou formation insuffisante à la sécurité.

On ajoute à ces risques la maladie professionnelle car l’industrialisation entraine le travail sur des substances chimiques dangereuses (=plomb, mercure).

On trouve également l’aggravation des conséquences de risques traditionnels :

– La vieillesse

– La maladie

=>La condition des vieillards sous l’Ancien Régime relevait d’un minimum de garanties familiales et d’églises.

Dans la société industrielle coupée de ces racines rurales, la situation de l’ouvrier trop âgé est inquiétante. Il n’a pas de salaire ni retraite. Les membres de sa familles ont eux mêmes des salaires bas. La condition des vieillards est plus grave que sous l’Ancien Régime.

Il faut une protection sociale nouvelle.

=>Pour la maladie, il en est de même. Le salarié malade n’a plus de revenus et avec lui sa famille.

Les conditions socio économiques nouvelles caractérisées par la créations de nouveaux risques et aggravations de ceux existence crée le besoin d’une protection collective absolument nouvelle.

Cette protection supposait des conditions culturelles nouvelles qui n’étaient pas encore réunies.

Paragraphe 2 Les conditions culturelles d’émergence de nouvelles techniques:

Les problèmes nouveaux de la société industrielles caractérisée par des phénomènes de masse vont entrainer une évolution profonde des mentalités. En effet, les limites de l’individualisme révolutionnaire vont apparaître en même temps qu’une nouvelle dynamique de solidarité va s’affirmer.

  • A) Les limites de l’individualisme :

La révolution industrielle a été postérieure à la révolution politique de 1789. Elle se caractérise par des phénomènes collectifs de massification alors que la révolution politique de 1789 a été plutôt le triomphe d’un individualisme libéral à l’opposé des phénomènes de massification.

Cet individualisme fonde à l’époque le droit de la responsabilité civile et la confiance faite à l’épargne individuelle. Or, aussi bien la responsabilité civile que la technique de l’épargne vont révéler leurs limites, en présence de problèmes nouveaux nés de la révolution industrielle.

1) Les lacunes du recours à la responsabilité civile :

Ces lacunes concernent la réparation des premiers accidents du travail dus aux machines et à la mécanisation du travail industriel. Lorsqu’un travailleur était victime au 19ème d’un accident mécanique à l’usine, il n’était pas privé sur le papier de moyens juridiques de faire valoir ses droits à réparation contre son employeur. Il disposait du droit de la responsabilité civile consignée aux art 1382 et suivant du code de Napoléon.

Ils pouvaient même espérer recevoir une réparation intégrale de son dommage dès lors qu’il prouvait l’existence d’une faute de l’employeur à l’origine de l’accident. C’était le mécanisme de la responsabilité pour faute.

La preuve de cette faute était quasiment impossible dans les faits. Dans beaucoup d’accidents, aucune faute n’était à proprement parlé susceptible d’être établie car l’insécurité des machines tenait au fait que la technique de l’époque restait rudimentaire.

Lorsqu’il y avait une faute, c’était généralement une faute de la victime notamment à cause du manque de formation ou du rythme de travail.

Dans toutes ces hypothèses l’employeur pouvait faire valoir que le responsable de l’accident était la victime et il était alors exonéré de toute responsabilité.

Il y avait les hypothèses où on trouvait une faute de l’employeur mais cette faute devait être établie en justice notamment par témoignages qui ne pouvaient venir que des collègues de la victime. Or ils étaient rares. Il n’y avait aucune protection sérieuse contre le licenciement et le chômage était grand.

Si un salarié venait à témoigner contre l’employeur au profit d’un camarade victime, il risquait d’être licencié.

Dans ces conditions, le droit formel à réparation intégrale n’avait aucune réalité et il n’y avait pas de réparation du tout.

On s’aperçoit que le droit classique de la responsabilité civile ne pouvait pas fonctionner dans le contexte nouveau de l’industrialisation et de la machinisation.

2) Les limites de la technique de l’épargne :

L’épargne est une économie sur les gains d’aujourd’hui en vue d’assurer les dépenses de demain. Dans une certaine mesure, l’épargne a classiquement été le moyen individuel de s’assurer la sécurité du lendemain.

Ce moyen a longtemps été dominant en France. Dans la mentalité française, l’épargne individuelle a toujours joué un rôle considérable.

On a longtemps opposé ce processus aux idées de protection collective.

Le 19ème a été un siècle d’exaltation de l’épargne. Les élites reprochaient aux ouvriers de ne pas savoir épargner et de dépenser toute leur paye au café.

De toutes façons les ouvriers ne pouvaient pas épargner car leurs salaires répondaient à peine aux besoins des travailleurs et de leur famille. Dans la phase d’industrialisation et d’accumulation du capital, les revenus du travail ne produisaient aucune épargne individuelle.

Il était hors de question de traiter les problèmes de maladies longues et de la vieillesse par la technique de l’épargne.

  • B) La dynamique de la solidarité :

Ce qui a caractérisé le 19ème c’est à la fois la nécessité de la solidarité et son expérience pratique.

1) La nécessité de la solidarité :

Le problème majeur posé par la question sociale au 19èmec’est celui d’une couverture adéquate pour une nouvelle population industrielle qui subit des risques importants alors qu’elle a des revenus modestes à très modestes.

Comment faire ?

Alors que la solidarité familiale ou paroissiale n’existe plus ou est très diluée dans les nouveaux faubourgs industriels des villes de l’époque.

Cette population ne peut pas épargner ni s’assurer auprès de compagnies d’assurances parce que le moteur même de l’assurance est de faire payer l’assurance en fonction de l’importance du risque et non pas en fonction de l’importance du revenu.

Si l’assureur garantit l’indemnisation des conséquences d’un risque, c’est à la condition de payer une prime calculée en fonction de la probabilité et de la gravité du risque.

Le problème est celui de savoir comment on peut organiser la couverture de personnes à risques élevés et des revenus faibles ?

On voit un élément de la solution qui serait de faire payer la couverture non pas en fonction du risque mais du revenu.

Cette solution n’est praticable qu’à une condition stricte. Ceux à revenus élevés et des risques faibles doivent être obligé de cotiser en fonction de leurs revenus. Ils ne doivent pas pouvoir s’évader vers l’assurance.

Il n’y a pas de sécurité sociale facultative.

La clé de la protection collective est l’affiliation et la couverture en fonction du revenu et non risque à condition qu’elle soit obligatoire pour tous. Cette idée de solidarité obligatoire va s’imposer d’autant plus nettement qu’elle va rencontrer une pratique effective de la solidarité dans certains milieux professionnels ou certaines régions.

2) L’effectivité de la solidarité :

Il faut rappeler le rôle important au 19ème des sociétés de secours mutuels. C’était des associations constituées spontanément entre ouvriers ou travailleurs de la même profession ou ville soit des ouvriers sous la présidence de l’employeur.

Cette société avait pour objectif en échange de cotisations faibles de verser des secours à leurs membres malades ou accidentés ou trop âgés pour travailler.

Ces sociétés, dans un premier temps ont été illégales car contredisaient les textes révolutionnaires interdisant les groupements entre travailleurs (loi le Chapelier et le décret d’Allarde).

Puis, elles ont été tolérées notamment sous le second empire (entre 1862 et 1870) et, finalement elles ont été consacrées sous la IIIème république avec la loi du 1er avril 1898 sur la mutualité.

Les cotisations étaient ou forfaitaire ou en fonction du revenu et servaient à s’aider mutuellement.

Les pratiques des sociétés de secours mutuel ont habitué une grande partie de la classe ouvrière à des comportements effectifs de solidarité en même temps qu’elles convainquaient les employeurs. En général, les travailleurs s’en occupant était diligents et ne recourraient pas à l’absentéisme.

Section 2 : La manifestation de l’émergence de techniques nouvelles :

Ces premières manifestations n’ont pas été propres à la France et se sont inscrites dans un mouvement assez large en Europe de

l’Ouest.

Il est vrai que la France n’a pas été particulièrement en avance pour la mise en place d’une couverture des risques et qu’elle l’a été davantage pour la mise en place d’une couverture des charges.

Paragraphe 1 La mise en place d’une couverture des risques :

Selon L111-1 du code de la sécurité sociale, les risques sont des évènements aléatoires qui ont pour effet de réduire ou de supprimer temporairement ou définitivement la capacité de travail d’un assuré social et donc sa capacité de gain. Ces risques peuvent être d’origine professionnelle lorsqu’ils surviennent du fait du travail ou d’origine non professionnelle lorsque la cause n’est pas dans le travail mais entrainent la perte de capacité du travail et donc de gain.

Il faut savoir que la couverture des risque professionnels posent des problèmes différents de ceux non professionnels. En France, la couverture des risques professionnels a été organisée assez avant la couverture des risques non professionnels.

  • A) La couverture des risques d’origine professionnelle :

On a deux types de risques selon qu’il soit un accident ou une maladie.

S’il s’agit d’un accident on parle d’accident du travail. Si c’est une maladie on parle de maladie professionnelle.

La distinction accident/maladie est difficile même si il est clair que l’accident est caractérisé par sa soudaineté tandis que la maladie est généralement d’apparition progressive à l’issue d’une phase d’incubation.

La maladie professionnelle révèle toujours un système de protection collective plus élaborée que la couverture des accidents du travail car la détection de la maladie est plus difficile de celle du caractère d’un accident.

La mise en place de la couverture des accident a été antérieure à la mise en place de la couverture des maladies professionnelles.

1) La couverture des accidents du travail :

La loi du 9 avril 1898 crée cette réparation des accidents du travail en France. Cette loi est la manifestation d’un phénomène loin d’être purement français puisqu’une réparation des accident a été mise en place en 1884, en Italie en mars 1898, en Espagne 1900…

C’est un phénomène européen mais en même temps la loi du 9 avril 1898 est très typique d’un moment clé de l’histoire de la 3èmeRépublique en France car c’est le moment où les républicains s’imposent sur un programme non plus radical mais réformiste. Il s’agit de faire voter des réformes réelles améliorant la situation des travailleurs sans que les bases de la société en soient ébranlées. On sent poindre l’idée phare de la loi de 1898 d’une législation de compromis qui doit aboutir à un compromis entre des intérêts contradictoires.

En matière de couverture des accidents du travail, il y avait précisément besoin d’un tel compromis car jusqu’en 1898, les intérêts des ouvriers victimes d’accident du travail étaient en pratique très gravement lésés car ils ne pouvaient presque jamais faire la preuve de l’employeur et n’avait donc jamais de réparation. A l’inverse, il fallait faire attention à ne pas écraser les employeurs sous le poids de la réparation des accidents du travail alors que très souvent, ces accidents n’étaient pas directement dus à une faute caractérisée de l’employeur.

D’où le principe de compromis posé dans la loi de 1898 : l’ouvrier victime d’un accident du travail aura désormais droit à une réparation automatique sans avoir à prouver la faute de son employeur et en contrepartie et contrairement au droit commun de la responsabilité civile, cette réparation ne sera pas intégrale mais seulement forfaitaire, c-a-d qu’elle couvrira uniquement la perte de la capacité de travail et de gain et aucun autre préjudice. Sauf en cas de faute extrême, la victime ne peut pas assigner son employeur.

A coté de ce compromis de politique juridique, on trouve un compromis de technique juridique.

En principe, la loi de 1898 a écarté la faute qui n’a plus de rôle dans la réparation des accidents du travail.

La faute n’est pas totalement écartée car on tiendra compte de certaines fautes très graves soit de l’employeur soit de la victime :

  • – la faute inexcusable
  • – la faute intentionnelle

En cas de faute inexcusable ou intentionnelle de l’employeur, la victime aura droit à une majoration de sa réparation et même à réparation intégrale si la faute est intentionnelle.

En cas de faute intentionnelle ou inexcusable de la victime, elle aura droit à une minoration de sa réparation forfaitaire voire l’absence de toute réparation en cas de faute intentionnelle.

La question est de savoir si ce compromis a été ou non favorable aux victimes et si il le reste ?

Jusqu’à la loi de 1898, la victime d’un accident du travail peut certes espérer sur le papier une réparation intégrale mais dans la très grande majorité des cas, cet espoir est chimérique puisque la victime ne pourra pas, le plus souvent, faire la preuve d’une faute de son employeur. Or, le droit de la responsabilité civile du code de 1804 envisage la faute.

La loi de 1898 garantit désormais aux victimes d’accident du travail une réparation autonome.

Cependant Depuis quelques années, dans la doctrine, une interprétation différente de la loi et moins favorable se manifeste. La loi de 1898 est présentée comme un faux compromis qui a été en réalité une tromperie au détriment des victimes d’accidents du travail. Ces auteurs observent qu’en 1896, la Cour de Cass. dans un arrêt a posé les jalons d’une responsabilité du gardien de la chose sans que la victime ait une faute à prouver, cette réparation est alors intégrale : art 1384 al 1 Code Civil. L’une et l’autre donnent droit à réparation sans faute prouvée mais l’arrêt de 1896 donne droit à une réparation intégrale tandis que la loi de 1898 ne donne droit qu’à une réparation forfaitaire.

La vraie question est de savoir si cette législation des accidents du travail reste aujourd’hui réellement favorable aux accidentés compte tenu de l’évolution spectaculaire du droit de la responsabilité civile au XXème siècle.

Il reste qu’aujourd’hui, le compromis de 1898 qui n’existe plus en tant que tel puisque la loi a été abrogée en 1946 mais qui s’est reporté dans le code de la Sécurité sociale peut apparaitre comme franchement défavorable puisqu’aujourd’hui, le droit civil connait des réparations intégrales sans faute prouvée (article 1384 alinéa 1er) alors que les accidents du travail continuent à ouvrir un droit à réparation forfaitaire.

Deux évolutions jurisprudentielles obligent à être plus subtils : en matière de détermination des accidents du travail, la jurisprudence considère aujourd’hui qu’est accident du travail tout accident survenu au temps et au lieu du travail, quelle qu’en soit la cause et il n’en va autrement que si l’employeur peut faire la preuve que la cause de l’accident est extérieure au travail, preuve très difficile à apporter.

Ensuite, la jurisprudence, depuis maintenant 10 ans, tend à majorer la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles et à la rapprocher d’une réparation intégrale. Il pèse sur l’employeur une obligation de sécurité de résultat en vertu de laquelle les tribunaux ont tendance à considérer de manière beaucoup plus fréquente que par le passé qu’il a eu à l’origine de l’accident une faute inexcusable de l’employeur ou d’une des personnes substituée à la direction. Il y a par conséquent une tendance à allouer à la victime une réparation majorée plus fréquente. Dans une décision du 18 Juin 2010, le Conseil constitutionnel, répondant à une QPC, a décidé que la limitation de la réparation de la victime aux cas de faute inexcusable n’était pas conforme à la Constitution. Pour lui, en cas de faute inexcusable de l’employeur, il faut réparer tous les préjudices de la victime et pas seulement ceux cités dans le code de la Sécurité sociale. On voit bien qu’il y a aujourd’hui une véritable politique jurisprudentielle en matière de réparation des accidents du travail qui consiste à rendre beaucoup plus fréquents les cas de faute inexcusable de l’employeur et dans ces cas de faute inexcusable, à rapprocher la réparation d’une réparation véritablement intégrale.

  1. La couverture des maladies professionnelles

Elle a été plus tardive que celle des accidents du travail car autant il est possible de rattacher un accident au travail et en tout cas au lieu et au temps du travail, autant le rattachement d’une maladie à la profession peut être compliqué.

La première législation en matière de maladie professionnelle sera votée en 1919 seulement et à l’époque, elle ne concernait que deux maladies professionnelles : la maladie causée par l’inhalation de vapeurs de plomb et la maladie causée par l’inhalation de vapeurs de mercure. Le même type de réparation s’établie : une réparation automatique et forfaitaire.

Par la suite, le nombre de maladies professionnelles couvertes augmentera beaucoup (plus de 100 aujourd’hui) mais le mode de détermination des maladies professionnelles reste plus étroit que celui des accidents du travail. Selon l’article L411-1 du code de la Sécurité sociale, tout accident survenu au lieu et au temps du travail est supposé être un accident du travail.

Au contraire, seulement les maladies qui figurent sur les tableaux officiels de maladies professionnelles sont des maladies professionnelles. Il faut ensuite que le salarié ait été exposé aux agents nocifs de chaque maladie professionnelle, agents nocifs qui doivent figurer eux-mêmes sur ces tableaux. Enfin, si le salarié, au moment où il tombe malade, n’était plus exposé aux agents nocifs, il faut qu’il n’ait pas dépassé le délai d’incubation de la maladie inscrit lui-même sur les tableaux. La détermination des maladies professionnelles reste plus étroite que celle des accidents du travail, même si une loi du 27 Janvier 1993 a un peu assoupli les règles de détermination des maladies professionnelles dans certains cas.

En revanche, pour ce qui est des règles de réparation des maladies professionnelles, ce sont les mêmes que pour les accidents du travail avec la même évolution jurisprudentielle.

  1. La couverture des risques d’origine non professionnelle

Il peut y avoir de nombreux éléments extérieurs à la profession (maladie, invalidité) qui ont cependant des conséquences sur l’exercice de l’activité professionnelle et qui peuvent réduire ou supprimer la capacité de travail et de gain. Ce problème s’est posé assez rapidement dans les grands pays industriels dès la fin du 19ème en Allemagne car à partir de 1881, le chancelier Bismarck a fait voté un dispositif d’assurance sociale au profit des travailleurs les plus modestes financé à la fois par des cotisations patronales et salariales et par une subvention fiscale de l’Etat. Les cotisations étaient calculées dès l’origine en fonction du revenu et non pas en fonction du risque.

Pourquoi la France a adopté un dispositif d’assurance sociale en 1930 comparable à ceux d’Allemagne et d’Angleterre ? Cela s’explique par la première guerre mondiale qui a modifié profondément la façon d’aborder les problèmes sociaux. Ensuite, du fait de sa victoire en 1918, la France a recouvré l’alsace et la partie de la Lorraine qui avaient été annexées par l’Allemagne donc la France a réintégré deux provinces dans lesquelles avait été instaurées entre 1911 et 1918 les assurances sociales allemandes. Ainsi, il n’était pas pensable de supprimer les assurances sociales donc il devenait difficile de ne pas en faire autant dans le reste du territoire français. De plus, la France devient un pays industriel.

Pour autant, l’adoption de la loi du 30 avril 1930 fut extrêmement difficile. Dans la Constitution de la IIIème République, la loi ne pouvait être votée que par les deux chambres : la chambre des députés mais aussi au Sénat donc le Sénat avait un pouvoir de veto sur les lois. Ce dispositif avait de très graves inconvénients : la lenteur des réformes et ces réformes dépendaient d’une chambre qui était élus au suffrage indirect (par les grands électeurs) et qui surreprésentait les campagnes.

Finalement, le Parlement parvint au vote de la loi du 30 avril 1930. Cette loi n’est pas votée par un Parlement de majorité de gauche et la majorité est plutôt conservatrice. D’ailleurs, le ministre du Travail Pierre Laval a joué un rôle important.

Cette loi crée 5 assurances sociales : la maladie, la maternité, l’invalidité, la vieillesse et le décès. Sont affiliés à ces assurances les salariés de ressources modestes seulement donc on crée une condition de ressources, c-a-d un plafond au-delà duquel on ne peut pas être affilié aux assurances sociales. Ces assurances sociales sont financées par des cotisations patronales et salariales qui étaient uniformes (4% du salaire).

Ce dispositif est très important car pour la première fois en France, il existe une couverture d’assurances sociales assez large au niveau des risques sociaux. De plus, à l’époque, la très grande majorité de la classe ouvrière est en dessous du plafond de ressources accompagnant les assurances sociales. En revanche, avec le recul du temps, on voit bien les limites du dispositif. D’abord, il ne s’adresse ni aux salariés de revenus moyens, ni encore moins aux salariés de revenus élevés. Ensuite, ce dispositif n’est pas géré par des organismes spécialisés et les assurés sociaux gardent le choix entre les compagnies d’assurance ou les mutuelles.

paragraphe 2- la mise en oeuvre d’une couverture des charges

Les charges sont au même titre que les risques, des évènements aléatoires ou qualification d’événements aléatoires mais que à la différence des risques, les charges ne portent pas atteinte à la capacité de travail et donc de gain de l’assuré social. En réalité les charges sans porter atteinte à cette capacité augmente les dépenses de l’assuré social de son ménage ou de sa famille. Cette définition donnée, il serait faux de penser que rien n’aurait été fait avant la fin des années 30 concernant la couverture des charges et notamment la loi du 30 avril 1930 sur les assurances sociales porte en réalité non seulement sur a couverture de certains risques (malade, invalidité, décès..) mais aussi sur la couverture de certaines charges liées à ces risques.

par exemple: la loi sur l’assurance maladie mis en 1930, couvre les conséquences de l’arrêt de travail liée à la maladie, mais couvre par ailleurs les charges maladies, c-a-d les dépenses de santé exposé par l’assuré social malade ou par un membre de sa famille.

En revanche nous allons parler de charges non liées à un risque, et notamment les charges de famille, c-a-d toutes les charges entrainées par l’entretien et l’éducation des enfants. En la matière la France a été plutôt en avance et le reste dans une assez large mesure par rapport aux autres pays Européens. Notre système de prestation familiales, c-a-d de prestation fournies pour couvrir les charges de famille est l’un des plus favorables d’Europe et c’est aussi l’un de ce qui est apparu le plus tôt.

Cela s’explique par des considérations moins sociales que démographiques. Il faut savoir en effet que la France à connu tout le long du 19ème siècle et dans les trois premières décennies du 20ème, une crise de la natalité absolument sans précédent qui a pu faire croire que la population française aller s’effondrer en nombre et qui a amené les pouvoirs publics à réagir rapidement.

En 1789, la population du royaume de France est d’environ 25millions d’hab. Mais qui était pour l’époque un chiffre élevé puisque le royaume de France avait à l’époque la deuxième population en Europe venant seulement après l’empire Russe. Une situation florissante qui perdure au siècle du 18ème, siècle florissant économiquement. Cette situation démographique à perduré jusqu’au milieu du 19ème siècle.

La France s’engage dans les batailles sans appréhension. Les batailles napoléoniennes très sanglante, « une seule nuit de Paris rattrapera le nombre de morts et de blessés ». Or le 19ème siècle va plonger la France dans une situation complètement opposé, la population va baisser jusqu’à atteindre des chiffres alarmants: En 1914, la France possède 39millions d’habitants.

Des politiques natalistes vont alors naître. On à invoqué une responsabilité de la révolution et des codifications napoléoniennes, conséquences fâcheuse du principe d’égalité successorale, pour trouver des causes de la frigidité populaire. (ex: école réactionnaire de Le pley)

Cependant on s’aperçoit que ce ralentissement de naissance aurait commencé au milieu du 18ème siècle pour des raisons qui deviennent énigmatique. Cette dénatalité est aggravé dans ses conséquences par les pertes très importantes de la première guerre mondiale.

Il s’agissait alors de créer des aides financières pour aider les familles à procréer. Paradoxalement le début des prestations familiales n’es pas venu dans un but de natalité ni dans une impulsion étatique.

En réalité les premières tentatives sont venues du patronnant et plus précisément de la frange du patronat influencé par les doctrines catholiques.

à la fin du 19ème siècle, la papauté à commencé à publier les encycliques, plus précisément la doctrine « rerum novarum » qui passe par l’attention plus grande aux besoins des travailleurs et notamment à leurs besoins familiaux. Cet encycliques va clairement demander aux employeurs de verser des compléments de salaire à leurs familles: il s’agissait d’adapter les salaires aux besoins des familles. Elle rencontre néanmoins rapidement l’opposition très forte des milieux patronaux mais aussi syndicaux. Pour ces premiers, il était impensable de calculer le salaire en fonction des besoins du travailleurs, cette fonction première était un prix équivalent à une quantité de travail qui pouvait varier en fonction de son intensité. à l’opposé les syndicalistes craignaient que l’adaptation d’un salaire aux besoins ne divisent le milieu des ouvriers en dehors de leur cause commune, l’aliénation de leur classe sociale.

En dépit de ces organisations, d’une spontanéité certains employeurs commencent à verser des sur-salaires chargé de famille, se met alors en route un engrenage qui va entrainer des conséquences inévitables.

Les entreprises versant des sur-salaires perdent alors de la compétitivité par rapport aux entreprises n’en réalisant pas. Ces entreprises se mettent donc en danger. La situation devient assez grave puisque ces entreprises se voient très rapidement confronter à un dilemme: abandonner les compensations de salaires, ne plus embaucher de chargé de famille ou faire en sorte que tout le monde soient obligé de verser des sur-salaire afin de niveler la concurrence.

Les entreprises concernées crée entre elles des caisses de compensation, soit, des caisses qui vont niveler le poids des sur-salaire entre les entreprises qui les versent. Evidemment ceci ne concerne que les entreprises qui n’adhèrent que de leur volonté dans ces caisses. Le véritable changement sera l’obligation de s’affilier avec des cotisations à cette caisse mutuelle de compensation par le biais de l’Etat ; loi du 11 mars 1932 pour des raisons démographiques. Il ne s’agit pas pour l’Etat de protéger la famille mais de créer une opportunité pour régler le problème de la natalité.

En 1946, il suffira de substituer les caisses d’allocations familles aux caisses compensation pour basculer dans le système de la sécurité sociale.

Deux éléments qui montrent que ces réformes ont eu un fort succès:

– la natalité française commence à remonter vers la fin des années 1930

– très vite et sans attendre 1946, les allocations familiales commencent à être versé non seulement aux salariés chargés de familles mais également aux chômeurs chargé de famille, on commence même à envisager leur extension aux travailleurs indépendants chargés de famille. Les prestations familiales sont le versant de la couverture sociale française qui prend le plus rapidement son autonomie vis à vis d’une conception strictement bismarkienne de la sécurité sociale.

Ce processus montre deux choses:

  • – on passe de 1932 jusqu’à 1946 du droit du travail au droit de la sécurité sociale, on passe de sur-salaires à des prestations pour charge de famille qui ne sont plus pensé comme des compléments de salaire versés par les employeur mais comme une couverture de la CAF.
  • – On s’aperçoit également au moment de la première guerre mondiale, que le système français de protection sociale commence à être relativement important. Mais est à la fois lacunaire et disparate, on ne peut d’ailleurs pas parler « d’un système ». On se trouve en présence de législation qui ne sont pas véritablement ordonnée, qui répondent à une logique différente.

– loi 1898 sur accidents de travailleur, qui se rapproche d’une responsabilité civile.

– loi 1930 sur les assurances sociales réservé aux salariés ayant une salaire des plus modestes

– loi de 1932 sur les allocations familiales qui sont d’autant de considérations d’ordres familiales que d’une politique de natalité.

Cela ne s’inscrit pas dans un véritable système de sécurité sociale français!

Chapitre 2. La création du système français de sécurité sociale

création fortement influencé par aussi bien la vision bismarckienen de la vision beveridgienne. Et c’est surtout la création d’une véritable organisation de la sécurité sociale. C’est une organisation relevant d’un plan systématique

Section. 1 une création sous influences

La date de 1945 n’est pas choisi au hasard ( période de libération ). Les corps sociaux influents sont en très nette difficulté, car corrompu avec le régime de vichy. Des réformes passent donc dans un contexte favorable à leur insertion. Il faut ajouter à cela que la création d’un système de sécurité sociale à été influencé par le rapport beveridge (décembre 1942).

Mais dès 1945, il est assez clair qu’il y a concurremment d’autres influences en France qui ne vont pas dans un sens analogue.

1- le rapport beveridge

Le 1er décembre 1942 est publié à Londres un rapport qui sera très important dans l’histoire de la sécurité sociale en Europe intitulé « National Insurance and Allied Services ». Il s’agit d’un rapport extraordinaire au sens premier du terme parcequ’il ouvre des chemins radicalement nouveaux, en fixant des objectifs tout à fait inédit. Pour autant ce rapport s’explique aussi par son environnement, même si son contenu et sa portée sont tout à fait exceptionnel.

A) L’environnement du rapport Beveridge

La guerre! la commission que préside B° est formée à l’initiative de Winston Churchill pour réfléchir à ce que devrait être la protection sociale après la guerre. Pendant toutes les années 30′ les pays d’Europe orientale ont connu une crise économique et sociale sans précédent. Elle a entrainé un chômage massif notamment en Angleterre et en Allemagne.

Les états dictatoriaux et totalitaires, l’Allemagne et l’Italie nazi, la russie stalienne ont énormément joué dans leur propagande sur le fait que les démocraties occidentales et libérales n’étaient pas capables de nourrir leur population à l’inverse d’eux mêmes.

Naît alors un objectif de libération politique mais également social: il fallait établir dans l’Europe libéré une meilleure protection contre l’indigence.

On se demande alors Comment libérer les états européens de l’état de besoin ?

Churchill a senti que la libération de l’Europe ne devait pas être une libération seulement politique mais aussi une libération sociale. Beveridge a parfaitement joué ce jeu en comprenant l’option politique de Churchill en sachant donner aux travaux de la commission et au rapport une portée sociale jusque là inconnue. Il ressort du rapport Beveridge un objectif radicalement nouveau puisqu’il propose de faire disparaitre l’indigence et l’état de besoin du Royaume-Uni d’abord et ensuite du monde entier.

B) la contenu du rapport

Le rapport à deux parties, l’une critique du dispositif social britannique de l’époque (1), et une partie plus prospective (2).

1- il montre par exemple que les lois anglaises n’ont quasiment rien prévu pour les prestations familiales. Notamment, Beveridge considère que cette législation sociale est beaucoup trop fragmentaire, lacunaire et qu’elle connait l’erreur majeure de se limiter aux seuls travailleurs de faibles ressources.

2- Beveridge considère que ces dispositifs sont insuffisants et qu’ils seraient incapables de faire sortir l’ensemble de la société du risque d’indigence. Il passe alors à la partie prospective de son rapport en expliquant ce qu’il faut faire à l’avenir. L’objectif décrit par Beveridge est un objectif qui jusque là n’avait jamais été donné aux politiques sociales: il s’agit de faire disparaitre l’indigence de la surface de la terre en commençant par le R-U. C’est la fameuse des métaphores des cinqs géants qui détruisent : la maladie, l’ignorance, l’insalubrité, l’oisiveté et l’indigence. Pour ce faire il faut faire un plan absolument systématique de sécurité sociale par la règle des trois U ( universalité, uniformité, unité ).

U1- L’universalité s’applique aussi bien aux évènements couverts (risques et charges) qu’aux personnes couvertes (assurés sociaux). Chacun devra être assuré social en sa qualité de résident mais également protégé « from the craddle to the tomb ».

U2- L’uniformité est le principe le moins bien reçu du rapport Beveridge. Cette sécurité sociale doit être absolument la même pour tous avec des prestations de montant identique pour tous. On abandonne la sécurité bismarckienne qui dépend des cotisations et effort antérieurs. Ici les dépenses de soins seront prodigués de la même manière mais de plus le salaire en retraite sera le même pour tous. Ce principe à été extrêmement critiqué, on parle d’un nivellement complet avec tout le monde au minimum (rapprochement avec la Russie soviétique). Même si sa volonté était contraire, il avait voulu glisser « un plancher » sous les pieds de la société libérale, il voulait un minimum social garantit à tous. Pour obtenir des salaires supplémentaires il fallait cotiser avec des institutions complémentaires.

U3- L’unité renvoie à l’idée que la sécurité sociale est un service public qui doit être géré par l’Etat, par des organismes publics, étant entendu que ces organismes publics doivent être aussi déconcentrés que possible et aussi simples d’accès que possible. Un seul régime de sécurité sociale pour tout le monde, d’ordre public géré naturellement par les autorités publiques mais totalement déconcentré. Système financé par l’impôt.

C) la porté du rapport beveridge

L’apport de Beveridge à été considérable et très rapidement sans attendre la libération. Pour autant on peut dire que si le rapport B° à eu par son ampleur et par son caractère systématique une très grande influence, la réalisation concrètes effective des systèmes de sécurité sociale en Europe, n’a jamais consisté à mettre en oeuvre purement et simplement le rapport Beveridge.

Paragraphe 2- la persistance d’influences

Pour ce qui est de la France, si le rapport Beveridge a joué un rôle indéniable dans la création de système de sécurité sociale française et qu’il a donné un élan n’es suivi qu’en partie, et en petite partie.

influence des mutuelles et des syndicats, mais également reprise de force de l’influents Bismarckienne lié au poids reniassent des catégories socioprofessionnelles

A) l’influence mutualiste et la force du syndicalisme

La mutualité doit être ici comprise surtout comme le principe selon lequel ce sont les intéressés eux mêmes en l’occurrence les mutualistes ou les assurés sociaux qui gèrent leur propres affaires. Les intéressés eux mêmes et non pas l’Etat, il s’ait d’une contradiction frontale entre la philosophie mutualiste et les principes du rapport beveridge.

La mutualité sortait de la seconde guerre mondiale et de l’occupation dans un état très inégale, d’autant plus que certains secteur mutualistes n’avait pas pris les distances nécessaires avec le régime de Vichy. Le poids de la mutualité en 1945 était sans doute affaiblie par rapport avec ce qu’il avait été par rapport à la troisième république. Cependant la mutualité gardait une influence assez forte pour imposer au moins sur le papier une gestion des nouvelles caisses de sécurité sociale non pas par l’Etat ou ses représentants mais par les assurés sociaux et leurs représentants. Ainsi s’affirmait selon les mutualistes, à côté de la démocratie politique, une véritable démocratie sociale.

Toujours selon les idées mutualistes, les caisses de sécurité sociale nouvellement crée ne seront pas des établissements publics mais tout au moins au niveau local et régional, des organismes de droit privé qui certes gèrent une mission de service public. Seul la caisse nationale du régime général en 1945 est un établissement public. Mais d’une part en 1945, la caisse nationale à peu de pouvoir réel sur les caisses régionales et locales (pas de hiérarchie admn° entre les caisses) et d’autre part tout comme les caisses régionales et locales, la caisse nationale bien qu’elle soit un établissement public est géré par un conseil d’administration dans lequel figure des représentants des assurés sociaux.

Toujours dans la perspective mutualiste, les représentants des assurés sociaux dans les conseils d’administration des caisses devront composer la majorité du conseil d’administration. Les représentants des employeur étant minoritaires. Aujourd’hui les CA des caisses sont constitué à parité absolue.

On voit ainsi que l’influence de la mutualité est très forte et qu’elle ne convergeaient pas avec certaines orientations du rapport beveridge.

A cette influence c’est ajouté celle des syndicats et plus particulièrement des S° des salariés qui ont obtenu en 1945 des succès très important touchant les relations de travail mais aussi le nouveau système de sécurité sociale.

L’ordonnance du 22 février 1945 prise par le gouvernement provisoire de la république française crée les comités d’entreprise. Même si ces derniers n’auront pas de véritable compétition de cogestion économique de l’entreprise.

D’autre part touchant le système de sécurité sociale, les syndicats de salariés représentants se voient confiés un monopole de présentation des candidatures aux élection des représentants des assurés dans les conseils d’administration des caisses.

Les mutualistes avaient obtenu que les représentants des assurés soient élus et qu’ils soient majoritairement au sein des CA des caisse. Les syndicats quand à eux obtiennent la prérogative importante s’agissant du régime général, celle d’avoir le monopole de la présentation des candidats.. Aujourd’hui clés représentants des assurés ne sont plus élus mais nommés par les syndicats représentants.

Les employeurs auront aussi leurs représentants élus qui seront minoritaires.

  • B) l’influence et le poids des catégories socio-professionnelles

Le rapport beveridge contredisait clairement ce que l’on peut appeler la vision bismarckienne de la Sécurité Sociale.. En 1945 qui se met en place est un système de type socio-professionnel, la qualité d’assuré social dans ce système ne dépend pas de la seule résidence régulière sur le territoire mais de l’existence de l’activité socio-professionnelle.

Certes cette nature socio-Professionnel du système français n’es pas évidente pour tous à cette époque, en effet le régime général qui est crée qui concerne dans un premier temps les salariés et assimilés est présenté à l’époque comme devant s’ouvrir à d’autres catégories socio-professionnel dès que la situation économique le permettra. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il se nomme le « régime général » : il à vocation à toute la population. Il reste dans une perspective beveridgienne. Mais en réalité la suite démontrera très rapidement que le régime général ne deviendra pas un régime universel, qu’il ne continuera à ne concerner que les salariés et assimilés et qu’il devra côtoyer d’autres régime que lui; les régimes autonomes des travailleurs indépendant, le régime agricole et même des régimes spéciaux à certaines catégories de salariés.

Comme on le voit, les influences qui ont présidé à la création du système de sécurité sociale ont été assez complexe.

Section 2 – la création d’une organisation

L’art L. 111-1 du code de la Sécurité Sociale énonce en son premier alinéa: « l’organisation de la sécurité sociale est fondé sur le principe de solidarité nationale ». Les premiers mots sont: l’organisation de la sécurité sociale perçu fondamentalement comme une organisation individualisée spécifique.

création très rapide mais est resté toutefois limité, certains des objectifs initiaux n’étant pas atteint et ne l’étant pas encore

Paragraphe 1- une création rapide

Cette création est le résultat de deux ordonnances, une ordonnance cadre du 4 octobre 1945 complété par une seconde du 19 octobre de la même année.

Elles intègrent les assurances sociales (intégrés dans la loi de 1930 auparavant) dans le nouveau dispositifs en les étendant à tous les salarié quelque soit leurs revenus professionnel et les étendant aux cadres. En même temps l’ensemble des salariés est affiliés aux nouvelle caisses, alors qu’en 1930 les assurés sociaux avaient la liberté de s’assurer auprès des mutuelles ou des assurances : monopole des organismes des sécurité sociale donc.

L’année suivante; deux lois du 22aout et du 30 octobre 1946 intègrent à leur tous les prestations familiales, et les réparations des accidents de travail et maladie professionnelle pour la seconde. Pour ce qui est des prestations familiales, les nouvelles, les nouvelles caisses d’allocation familiales se substituent aux nouvelles caisses de compensation.

La seconde relative au contentieux de la sécurité sociale crée selon ses termes « une organisation du contentieux de la Sécurité Sociale. » confié en première instance à des commissions des première instance à des commissions de premières instance composées d’un magistrat professionnel, et d’un représentant des salariés et des employeurs selon le principe de l’échevinage. Ces commissions de première instance (aujourd’hui tribunaux des affaire sociales) sont des juridictions de l’ordre judiciaire et non pas de l’ordre administratif. En appel dans un premier temps on va devant le TGI ( ojd cour d’appel ) et en cassation. Longtemps ‘est la chambre sociale qui s’est vue attribué le contentieux de la Sécurité Sociale.. Depuis quelques années, pour des raisons de surcharge, c’est la deuxième chambre civil de la CC qui est compétente pour ce contentieux.

En même temps que ce système de Sécurité Sociale est organisé, il reçoit un début de consécration constitutionnelle dans le préambule de la constitution de 27 octobre 1946. Ce préambule étant toujours de droit positif, faisait partie du bloc de constitutionnalité. Il est vrai que la droit de 1946 ne mentionne pas l’expression de « sécurité sociale ». C’est doublement étrange car il est rédigé au moment même de la création du système de Sécurité Sociale, et ensuite parce que le projet antérieur de la constitution écarté par référendum mentionnait le droit à la Sécurité Sociale parmi les droit constitutionnellement protégé.

Pour autant on considère que ce préambule, s’il ne mentionne pas explicitement le droit à la Sécurité Sociale, il me mentionne au moins implicitement, puisqu’il énonce que « la nation garantie à l’enfant à la mère et au vieux travailleur, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs »: garantie d’une assurance maladie, vieillesse et des prestations familiales. Par la suite d’autre textes fondamentaux seront plus explicite. Le préambule est considéré comme fondement suffisamment le droit à la sécurité sociale sur le terrain constitutionnel.

Il faut d’ailleurs distinguer le droit à a sécurité sociale et le droit de la sécurité sociale, la première est le droit à ce bien social, la seconde est la mise en oeuvre de ce système.

Paragraphe 2- une création limitée

évoquée une création limité, n’a de sens que au regard d’objectifs initiaux qui auraient été plus large et qui donc n’auraient pas été atteint. les objectifs initiaux étaient vraisemblablement d’étendre la couverture sociale, spécialement la couverture santé à l’ensemble de la population et vraisemblablement aussi dans le cadre d’un système aussi homogène que possible. Or, sur ces deux terrains, c’est l’échec au moins partiel puisque la généralisation de la sécurité sociale à l’ensemble de la population est ajournée en 1945 et ensuite parceque la couverture sociale se révèle très rapidement hétérogène d’autres régimes venant côtoyer le régime général.

  • A) l’ajournement de la généralisation de la couverture sociale

Le terme de généralisation de la couverture sociale apparait assez vite parce que ce n’es pas un système universel que l’on va mettre en œuvre. En d’autres temps, le système français de sécurité sociale sera socio-professionnel. Dans ce système donc, il ne peut pas être question par hypothèse d’universalisation de la couverture, les assurés sociaux n’ayant pas leurs qualité par leur seule résidence en France mais qu’en raison de leur activité professionnel. En revanche un système de type socio-professionnel peut être généralisé s’il couvre toute les catégories socio-professionnel. Or cet objectif qui est incontestablement un objectif des pères fondateurs n’es pas atteint puisque le nouveau système de la Sécurité Sociale dans un premier temps ne concerne que les travailleurs salariés et assimilés. on remet à plus tard la couverture sociale des indépendants qu’il s’agisse des exploitants agricoles ou des travailleurs non salariés, non agricole (commerçants, artisans, industriels, professions libérales). La raison invoqué pour cet ajournement est une raison économique. Ce fut sans doute une décision compréhensible et raisonnable mais c’est peut être aussi l’occasion manquée de mettre en oeuvre la même couverture pour tous car l’esprit public en 1945 y était assez favorable, il le sera beaucoup moins par la suite.

il s’y ajoute sur le terrain de la couverture santé un autre ajournement, c’est celui de la couverture de la population dite « interstitielle » c-a-d la population qui est dans les trous des catégories socio-professionnel: rentiers, ou absence de travail par exemple..

Il est évident que l’ajournement de la couverture des catégories de travailleurs indépendants entrainait à fortiori l’ajournement de la couverture de la population interstitielle. La suite révèlera la difficulté très grande de couvrir correctement la population interstitielle dans un système de type socio-professionnel.

  • B) l’échec de l’unification de la couverture sociale

unification : mise en œuvre d’une couverture unique pour tous dans le cadre d’un même système et d’un même régime. C’était évidemment une idée forte du rapport beveridge et même une idée des pères fondateurs. En effet, Une loi du 22 mai 1946 est votée prévoit la généralisation des assurances sociales et même une loi du 13 septembre 1946 qui annonce pour le 1 janvier 1947 la mise en place d’une assurance vieillesse pour tous dans le cadre du régime général.

Or il se trouve que le temps passe et rien de tel ne se produit. Dès juillet 1947, le législateur avoue qu’il ne mettra pas en place une assurance vieillesse unique mais qu’il créera des régimes autonomes d’assurance vieillesse pour les travailleurs indépendants. Ces derniers avaient obtenu le droit à des régimes autonomes car il ne voulait pas être intégré dans le régime général et payer des cotisations semblables aux salariés et employeurs, quitte à payer moins pour recevoir moins. Il n’y aura donc pas de projet de sérieux d’unification de la couverture sociale, aujourd’hui encore elle n’existe pas.

Il y a d’ailleurs eu plus grave concernant l’unification. Un décret du 8 juin 1946 maintenait à titre provisoire à côté du régime général, certains régimes dit spéciaux propres à des catégories spécifiques de salarié. Dès avant 1940, certaines catégories de salariés ou plus largement de travailleurs dépendant avaient obtenu avant qu’il soit question d’un système de Sécurité Sociale de disposer de dispositif propre, de couverture sociale assez avantageux. C’était le cas notamment des fonctionnaires, des slavisé des chemins de fer et transport publics. Lorsque fut crée en 1945 le système de sécurité sociale, il paru normal d’intégrer ces dispositifs spéciaux dans le régime général. En réalité, ces dispositifs spéciaux offraient une couverture plus favorable que celle du nouveau régime général. Elles ont obtenu à titre provisoire le maintien de ces avantages par le décret de 1946 : un provisoire qui dure pourtant car il en est toujours question aujourd’hui.

Dans les régimes spéciaux pas les mêmes raisons de douter de l’unification : ces régimes possèdent un employeur qui est à même de payer de lourdes cotisations patronales.

Le bilan de 45-46 est assez partagé alors. bilan décevant puisque la couverture sociale de 1945 n’a pas concerné toute la population et s’est étendu au rythme de la population que très lentement et dans le cadre de régime socio-professionnel distinct les uns des autres.

Chapitre 3. Le développement du système français de sécurité sociale

Sans doute trois grandes tendances explique le développement du système de la Sécurité Sociale après 1945:

1- la tendance à la généralisation de la couverture sociale

2- tendance à l’amélioration de la couverture sociale

3- tendance à la rationalisation de CS.

Section 1. La généralisation de la sécurité sociale

Par généralisation on entend dans un système de type S-P, l’extension de la sécurité sociale à l’ensemble des catégories S-P et spécialement aux catégories indépendantes de même qu’a la population interstitielle. Cette généralisation à surtout concerné les assurances sociales parceque la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles à été très longtemps limité aux seuls salariés et qu’elle n’es étendu qu’a certaines indépendant que depuis une quinzaine d’année dans des modalités particulières. A l’inverse, en matière de prestations familiales, on es allé beaucoup plus loin que la simple généralisation puisque depuis 1978 les prestations familiales sont dues à toute personne résidant en France et ayant des enfants à charges même si cette personne n’a pas d’activité professionnel : déconnexion des prestations familiales par rapport à un condition d’activité professionnelle.

Par conséquent la généralisation touche surtout les assurances sociales; l’assurance maladie maternité et l’assurance vieillesse de l’autre.

pour la couverture maladie, la généralisation de la couverture sociale est en réalité un double processus, d’abord un processus d’extension de la couverture maladie maternité aux indépendants et ensuite un processus d’extension de la couverture maladie maternité à la population interstitielle.

Paragraphe 1. L’extension de la couverture maladie maternité aux indépendants

Par travailleur indépendant, on entend soit les exploitants agricoles, soit les travailleurs indépendants qui ne sont pas des exploitants agricoles et que l’on appelle aussi les travailleurs non salariés, non agricoles (surnommés les ni-ni, les TNSNA). On distingue 4 sous catégories de travailleurs non salariés non agricoles : les artisans, les commerçants, les industriels et les professions libérales.

– S’agissant des exploitants agricoles, l’extension de la couverture maladie/maternité, dans le cadre de leur régime propre, s’est faite en 1961 sous le nom de l’AMEXA (l’Assurance Maladie/Maternité des Exploitants Agricoles) Elle est gérée dans le cadre de la mutualité sociale agricole (la MSA).

Longtemps, l’AMEXA n’a versé que des prestations en nature, c-a-d le remboursement ou la prise en charge des dépenses de soin et pas des prestations en espèce, c-a-d l’indemnité compensant la perte de revenus du fait de l’arrêt de travail. De même, les prestations en nature étaient moins étendues que celles du régime général.

Aujourd’hui, la tendance est à une harmonisation assez nette car les prestations en nature sont proches de celles du régime général. Pour ce qui est des prestations en espèce, on voit apparaître des prestations en espèce nouvelles, notamment en cas de maternité ou d’adoption. L’instauration de l’AMEXA ne semble pas avoir fait de difficultés particulières à l’époque mais les exploitants agricoles étaient assurés de conserver leurs spécificités.

– S’agissant des TNSNA, l’extension a été réalisée par une loi de 1966 qui s’est heurtée à une résistance très forte et parfois violente d’une partie des catégories socioprofessionnelles concernées et notamment d’assez nombreux artisans et petits commerçants qui estimaient que les cotisations qui allaient leur être demandées étaient excessives. Il y a eu des périodes de vive contestation et finalement, le législateur est arrivé à un compromis avec la loi du 6 janvier 1970 qui est parvenue à apaiser les esprits.

Depuis la loi de 1970, les TNSNA bénéficient de l’assurance sociale maladie/maternité dans le cadre d’un régime autonome qui leur laisse le choix de l’organisme assureur. Selon le vœu initial des intéressés, la couverture mise en place dans le cadre de ce régime autonome est restée très longtemps moindre que celle du régime général. En effet, les catégories concernées souhaitaient avoir leur propre rapport cotisation/prestation, c-a-d des cotisations plus faibles que celles du régime général, quitte à avoir une couverture moins importante.

Précisément, très longtemps, s’agissant des prestations en nature de la branche maladie, ont été très limitées en ce qui concerne le petit risque, c-a-d la maladie de faible gravité et de faible durée. La tendance est celle d’une harmonisation avec les prestations en nature du régime général. Les prestations en espèce étaient au départ absentes et restent aujourd’hui relativement limitées, même si elles sont en indéniable progrès, comme dans le régime agricole.

Paragraphe 2. L’extension de la couverture maladie/maternité aux personnes sans activité professionnelle

Ce fut le problème le plus difficile car un système de type socioprofessionnel ne se prête pas facilement à la couverture des personnes sans aucune activité professionnelle. C’est la contradiction entre d’une part, un système de sécurité sociale de type socioprofessionnel et d’autre part, l’affirmation de plus en plus nette d’un droit fondamental à la santé pour tous qui passe par l’organisation d’une couverture sociale maladie/maternité qui s’adresse à tous. Ainsi, le législateur n’a réussi à surmonter cette tension que par la mise en place de la Couverture Maladie Universelle.

Le législateur a eu très vite conscience qu’il fallait généraliser cette couverture par des mesures spécifiques et particulières. C’est dans ce cadre là qu’en 1948, le législateur a organisé le régime social étudiant, c-a-d l’affiliation des étudiants à la sécurité sociale, spécialement à la couverture sociale maladie/maternité, avec des dispositions spécifiques. Il a fallu un esprit de réforme important car une analyse traditionnelle refusait la création de ce régime propre au motif que les étudiants n’avaient pas d’activité professionnelle. Ainsi, le législateur s’est fondé sur les travaux de la Charte de Grenoble qui présentait l’étudiant comme un jeune travailleur en formation sur la base de laquelle a pu être organisée l’affiliation à la sécurité sociale.

A côté de ces dispositions spécifiques, le législateur a cherché à étendre la qualité d’assuré social à d’autres que les personnes exerçant une activité professionnelle et à étendre la qualité d’ayant droit à d’autres que le conjoint et les enfants d’un assuré social.

  1. L’extension de la qualité d’assuré social

Il y a extension de la qualité d’assuré social chaque fois que cette qualité est attribuée à des catégories de personnes qui n’ont pas d’activité professionnelle. Or, l’extension de la qualité d’assuré social à des personnes sans activité professionnelle s’est réalisée de 3 manières :

– en faisant appel à la volonté des personnes concernées avec la mise en place des possibilités d’acquisition volontaire de la qualité d’assuré social.

– sur la constatation d’une situation de besoin spécifique.

– sur la mise en place d’une couverture maladie universelle (CMU).

  1. L’extension volontaire de la qualité d’assuré social

Il s’agit d’un dispositif qui avait été annoncé par une loi du 4 juillet 1975 et qui a été mis en œuvre par une loi du 2 janvier 1978. La loi de 1975 avait été votée au début du septennat de Mr V.G.E et elle reprenait un des éléments du programme présidentiel de VGE en 1974 qui était la généralisation de la sécurité sociale. C’est d’ailleurs ainsi que s’est intitulée la loi de 1978 : « généralisation de la sécurité sociale ».

Dans un système qui restait socioprofessionnel, cette généralisation ne pouvait passer que par des dispositifs particuliers pour la population interstitielle, c-a-d se trouvant en dehors des grilles classiques des catégories socioprofessionnelles. Le dispositif particulier imaginé était d’ouvrir aux personnes relevant de cette population interstitielle la possibilité de s’assurer personnellement et volontairement auprès du régime général pour bénéficier des prestations en nature de l’assurance maladie/maternité. Ce dispositif a pris le nom d’assurance personnelle et il a été ouvert jusqu’à la création de la CMU qui l’a abrogé.

C’était un dispositif reposant sur la volonté de l’intéressé mais une fois que l’intéressé était entré dans le dispositif, il ne pouvait le quitter que s’il devenait assuré social au titre d’une activité professionnelle ou s’il prenait la qualité d’ayant droit d’un assuré social. En réalité, le succès du dispositif reposait sur l’accès volontaire à l’assurance personnelle et donc sur la volonté des personnes concernées.

Il est assez vite apparu que le dispositif souffrait de graves défauts. Tout d’abord, c’était un dispositif cher avec des cotisations élevées car les intéressés devaient s’assurer pour les prestations en nature du régime général sans pouvoir compter sur les cotisations patronales. Or, cette catégorie interstitielle n’a pas les revenus suffisants pour payer des cotisations élevées.

Il est vrai que les cotisations pouvaient être prises en charge par l’aide sociale mais on se heurtait à un second problème assez fréquent en aide sociale : la connaissance très imparfaite de la population interstitielle par les organismes sociaux. Dans bien des cas, les personnes concernées n’étaient pas contactées ou n’étaient pas informées.

Ce dispositif n’est donc révélé insuffisant et mal pensé par rapport aux besoins réels de la population interstitielle, c’est pourquoi le législateur a repris la question d’un autre point de vue assez vite.

  1. L’extension de l’affiliation fondée sur l’état de besoin

L’affiliation ne repose plus sur la volonté de la personne concernée mais sur la constatation de son état d’indigence et sur son défaut de couverture sociale. Cette seconde stratégie d’extension a été réalisée à l’occasion du vote de la loi sur le RMI en 1988.

Le RMI, remplacé en 2008 par le RSA, a été la première garantie générale de ressources minimales à toute personne dans le besoin mise en place par le législateur français. Dans les dispositifs de la loi du 1er décembre 1988, il suffisait que les ressources de l’intéressé soient inférieures à un plancher de ressources garanties pour qu’il perçoive une allocation dite différentielle, c-a-d égale à la différence entre le plancher de ressources garanties et les ressources personnelles par hypothèse inférieures de l’intéressé. Cette allocation différentielle était accompagnée de la conclusion d’un contrat d’insertion entre l’allocataire et les pouvoirs publics destiné à permettre une meilleure insertion sociale et professionnelle de l’intéressé.

Or, on s’est aperçu dans les travaux préparatoires de la loi de 1988 qu’un nombre encore très important de personnes susceptibles de relever du futur RMI restaient privées de toute couverture sociale pour diverses raisons en dépit du dispositif d’assurance personnelle qui existait à l’époque. On estimait que ce défaut de couverture sociale caractérisait entre 20 et 25% des bénéficiaires du futur RMI. Ce nombre étant trop élevé, on constate l’échec de la généralisation tentée entre 1975 et 1988.

C’est pourquoi, la loi de 1988 contenait une disposition spécifique selon laquelle les bénéficiaires du RMI qui seraient dépourvus de toute couverture sociale au moment de leur entrée dans le dispositif seraient désormais obligatoirement affiliés au régime général pour les prestations en nature de l’assurance maladie/maternité, étant entendu que leurs cotisations seraient automatiquement prises en charge par le service départemental de l’aide sociale.

Ce dispositif parait complet, car à côté de l’assurance personnelle volontairement contractée est créée une affiliation obligatoire pour les bénéficiaires du RMI non encore couverts et que les cotisations étaient automatiquement prises en charge par l’aide sociale.

Cependant, le législateur de 1988 n’avait pas clairement estimé que la propension réelle ou non des bénéficiaires potentiels du RMI à s’engager dans le dispositif du RMI. Sans doute le législateur partait de l’hypothèse que la grande majorité des bénéficiaires potentiels du RMI demanderaient à s’engager dans le RMI.

Or, les années postérieures ont montré qu’une fraction de la population interstitielle continuait à ne pas se présenter au guichet des organismes sociaux compétents pour instruire les dossiers d’accès au RMI. Cette fraction limitée peut s’expliquer pour plusieurs raisons.:

– D’abord, il faut être conscient de la grande diversité de la population interstitielle composée d’individus différents. La catégorie interstitielle n’est pas une catégorie professionnelle donc elle est composée de personnes qui ne se considèrent pas comme indigentes tandis que d’autres sont dans une marginalisation complète.

– Ensuite, cette partie de la population interstitielle est très difficile à contacter car elle est peu connue des services sociaux.

– De plus, certaines personnes craignent l’enquête sur dossier de candidature qui est susceptible d’être faite par les organismes sociaux qui peut révéler une situation qui ne souhaite pas être connue.

Le résultat est qu’en 1996, certains estimaient que 400 000 personnes étaient à nouveau privées de toute couverture sociale. Les autorités politiques ont fait deux propositions dont la seconde aboutit au vote de la CMU.

La première proposition a été le fait d’Alain Juppé, premier ministre de Chirac à l’époque, qui a présenté à l’Assemblée nationale un projet de réforme assez profond de l’assurance maladie et de l’assurance vieillesse du régime général. Il a proposé la création d’une assurance maladie universelle susceptible de couvrir la totalité de la population. Ce projet ne s’est pas concrétisé car d’une part;

– le plan dit Juppé de réforme de la sécurité sociale a fait l’objet, à l’automne 1995, d’une contestation sociale très importante portant sur le volet des retraites. A la fin de l’année 95, Juppé a été contraint de retirer le volet retraite de son plan pour apaiser les tensions et concernant le volet maladie, il s’en est tenu à la partie institutionnelle en ne retenant pas le projet d’assurance maladie universelle.

– D’autre part, ce projet d’assurance maladie universelle paraissait, à l’époque, assez flou. D’abord, son appellation était très ambigüe puisque ce projet semblait abandonner l’affiliation socioprofessionnelle pour une affiliation fondée sur la seule résidence. Or, dans la présentation de son projet, Juppé était resté relativement ambigu sur la portée de la réforme et sans doute, il s’agissait plutôt d’une généralisation plus énergique de la couverture maladie que d’une universalisation proprement dite. Cette ambigüité a fait que ce projet a été plus ou moins laissé de côté.

– En 1997, la dissolution de l’Assemblée nationale par Chirac est suivie d’élections législatives donc une nouvelle cohabitation s’instaure avec Mr Jospin comme 1er ministre. Ainsi, va être votée assez vite la loi du 27 juillet 1999 qui institue une couverture maladie universelle (la CMU).

  1. L’extension de l’affiliation par la couverture maladie universelle

En réalité, l’appellation est assez trompeuse car la loi de 1999 n’a pas transformé notre système de sécurité sociale en système universel dans lequel la qualité d’assuré social dépendrait de la seule résidence en France.

Certes, l’article 1er de la loi du 27 juillet 1999 pourrait le laisser croire puisqu’il énonce qu’ « il est créé pour les résidents de la France métropolitaine et des DOM une couverture maladie universelle qui garantira à tous une prise en charge des soins par un régime d’assurance maladie et aux personnes dont les revenus sont les plus faibles, le droit à une protection complémentaire et à la dispense d’avance de frais ». Ce texte semble indiquer qu’il se situe dans une affiliation universelle puisqu’il est question des résidents et il est également précisé que cette couverture garantira à tous une prise en charge des soins.

Toutefois, il ne faut pas s’y tromper car la CMU n’est pas une affiliation universelle. D’ailleurs, le nouvel article L380-1 du nouveau code de la Sécurité sociale énonce que la personne sera affiliée au titre de la CMU lorsqu’ « elle n’a droit à aucun autre titre aux prestations en nature d’un régime d’assurance maladie et maternité ». Cela signifie que l’affiliation CMU est strictement subsidiaire. En effet, ou bien la personne est déjà assuré social ou déjà ayant droit d’un assuré social et à ce titre, elle n’est pas concernée par la CMU ; ou bien la personne n’est ni assuré social, ni ayant droit d’un assuré social et alors elle relève de la CMU. La CMU est un dispositif de secours fondé sur le critère de la résidence et de la diligence mais qui vient compléter un système qui reste absolument socioprofessionnel pour la grande majorité des assurés sociaux. C’est l’ultime filet de protection dans un système socioprofessionnel.

Même si cette loi ne réalise pas une affiliation universelle, elle est très importante pour 3 raisons :

  1. Toute personne résidant en France depuis au moins 3 mois et qui se tient pour dépourvue de couverture sociale est automatiquement affiliée au régime généralet acquiert immédiatement droit aux prestations en nature maladie et maternité sur simple déclaration de cette personne à une caisse de sécurité sociale. En d’autres termes, il suffit à toute personne qui se pense dépourvue de couverture sociale de se rendre devant un organisme de sécurité sociale pour que cette personne soit automatiquement et immédiatement affiliée au régime général et qu’elle ait droit aux prestations en nature précitées.

Il reviendra alors à la caisse devant laquelle cette personne aura déclaré sa situation de déterminer a posteriori si cette personne relève effectivement de la CMU. Si la personne relève de la CMU, la personne devient affiliée à la CMU. Si, en réalité, la personne est assuré social ou ayant droit d’un assuré social, ce qu’elle ignorait, la personne sera affiliée à ce régime.

Cette règle est très efficace si la personne concernée fait cette démarche.

En réalité, le dispositif CMU ne s’en remet pas à la seule démarche des personnes concernées puisqu’il permet aux organismes sociaux d’affilier au régime général de la sécurité sociale toutes les personnes dont ils ont connaissance du défaut de couverture.

Là, le dispositif risque d’être dans certains cas trop efficace car un arrêt de la Cour de cassation de 2010 révèle la situation d’une personne qui n’avait pas de couverture sociale, qui, à l’occasion d’une hospitalisation, a été affiliée à la CMU et qui s’est retrouvée devoir payer des cotisations élevées.

  1. C’est un dispositif très efficace aussi sur le terrain de l’effort de cotisations demandé.

En effet, à partir du moment où une personne est affiliée à la CMU, elle devra payer une cotisation si ses revenus dépassent un plafond fixé par décret. Si, en revanche, ses revenus sont inférieurs à ce plafond, elle sera automatiquement exonérée de toute cotisation.

On voit de ce point de vue que les affiliés au titre de la CMU ne sont pas nécessairement des indigents car ce sont des personnes qui n’ont pas d’activité professionnelle ni de relation familiale très proche mais qui peuvent avoir un patrimoine relativement important. Il n’y a donc pas équivalence absolue entre affiliation à la CMU et indigence.

On peut imaginer que la très grande majorité des affiliés CMU est composée de personnes indigentes ou de faibles ressources donc il y a exonération complète des cotisations.

  1. Une disposition nouvelle de la loi de 1999 concerne la prise en charge par les pouvoirs publics, non seulement de la couverture de base au titre de l’assurance maladie/maternité, mais aussi de la couverture complémentaire pour les personnes de faibles ressources. Les personnes de faibles ressources et a fortiori les personnes indigentes sont exonérées de cotisations pour la CMU mais elles peuvent aussi voir leurs cotisations prises en charge pour la couverture complémentaire.

Dans la branche maladie, la sécurité sociale prend en charge une partie de la dépense de soins et elle laisse à la charge de l’assuré social la partie restante. Cette partie restant à charge peut être à son tour couverte au titre de la protection complémentaire, soit par une mutuelle, soit par une compagnie d’assurance, soit par une institution de prévoyance. Cette protection complémentaire est financée par les cotisations complémentaires. Jusque là, les efforts en faveur de la personne indigente ou de faibles ressources s’étaient centrés sur la protection de base laissant sans solution la protection complémentaire.

Depuis 1999, dans le cadre de la CMU, les personnes de faibles ressources peuvent bénéficier d’une prise en charge de leur couverture complémentaire et donc leur accès aux soins en est d’autant facilité. Cette prise en charge de la couverture complémentaire peut aussi être exercée auprès de personnes qui ne relèvent pas de la CMU car elles ont une activité professionnelle mais elles ont des revenus trop faibles pour se payer une protection complémentaire.

Après des enquêtes, le dispositif parait efficace, aussi bien pour la CMU de base que pour la CMU complémentaire. Dans les médias, la CMU est souvent critiquée parce que des bénéficiaires de la CMU abuseraient de ces droits, ce qui est le signe que le dispositif fonctionne.

Cela étant, ce dispositif est strictement subsidiaire donc il suppose que la personne ne soit ni assuré social, ni ayant droit d’un assuré social.

  1. L’extension de la qualité d’ayants droit
  2. a) observations / remarques

On appelle ayant droit les personnes qui n’ont pas la qualité d’assuré social mais qui sont liées à un assuré social par un rapport de proximité suffisant, soit un rapport de famille, soit un rapport d’alliance. Aux termes de l’article L313-3 du code de la Sécurité sociale, il s’agit pour l’essentiel du conjoint et des enfants mineurs de l’assuré social à quoi s’ajoute, dans certaines conditions, les ascendants de l’assuré social qui sont à sa charge, qui vivent sous son toit et qui participent à l’entretien du ménage de l’assuré social.

La qualité d’ayant droit est liée à la conception socioprofessionnelle du système de sécurité sociale puisque dans une conception universelle, chaque personne aurait la qualité d’assuré social, qu’elle exerce ou non une activité professionnelle. Cependant, la qualité d’ayant droit a fait l’objet, depuis ces dernières décennies, d’un processus d’extension très significatif qui s’est appuyé sur les transformations des mœurs et de la vie familiale pour ouvrir la couverture sociale à davantage de personnes et de la sorte servir le mouvement de généralisation de la couverture sociale.

Au départ, c-a-d dans la première loi des assurances sociales du 30 avril 1930, le cercle des ayants droits est très limité puisqu’il ne concerne que le conjoint (n’exerçant pas d’activité professionnelle) et les seuls enfants légitimes de l’assuré social. Il s’agit seulement de la personne mariée avec l’assuré social. La personne vivant en union libre ou en concubinage avec l’assuré social n’est jamais considérée comme un conjoint au sens juridique du terme.

Il est implicitement entendu qu’en règle générale, c’est le mari qui travaille et qui a donc la qualité d’assuré social et c’est la femme, mère de famille sans activité professionnelle, qui a la qualité d’ayant droit.

L’instauration du système de sécurité sociale en 1945 étend la qualité d’ayant droit mais elle ne concerne que les enfants de l’assuré social dans la mesure où à partir de 1945, sont également ayants droits de l’assuré social, non seulement ses enfants légitimes mais aussi ses enfants naturels (enfant pas né de personnes mariées) et adultérins (enfant né pendant le mariage de l’assuré social mais pas du conjoint de l’assuré social). Les enfants recueillis par l’assuré social, c-a-d des enfants qui sont peut être ceux des assurés social mais avec lesquels il n’y a pas de lien juridique de filiation sont aussi des ayants droits.

  1. b) la loi du 2 janvier 1978

La question des ayants-droit d’assurance maladie-maternité a été relancée dans les années 70 du XXème s., pour une série de raisons assez différentes mais qui ont convergé dans le sens de cette tendance à l’extension. Il y a eu des raisons de type sociétale et propre au système de Sécurité Sociale.

  1. Pour ce qui est des raisons propres à la Sécurité Sociale, c’est le souci de la généralisation de la Sécurité Sociale. Ce que l’on appelait la généralisation de la Sécurité Sociale à l’époque de VGD était l’extension de la couverture maladie-maternité à l’ensemble de la population, d’où l’occasion de saisir de nouvelles catégories d’ayants-droit qui traditionnellement n’étaient que le conjoint marié et les enfants légitimes.
  1. Les raisons sociétales sont les transformations des mœurs et notamment les mœurs familiales et dans les 70’s une vision plus large du couple,notamment pour les couples non mariés. Dans le courant des années 70, une nouvelle revendication se fait jour avec le relatif recul du nombre des mariages et le développement de l’union libre qui est d’étendre la qualité d’ayant droit, non seulement au conjoint de l’assuré social mais aussi à la personne vivant en union libre et en concubinage avec l’assuré social. C’est une période où on souhaite donner des droits aux familles naturelles (familles non fondées sur le mariage). Cette revendication est prise en compte par la loi du 2 janvier 1978, loi de généralisation de la sécurité sociale, qui étend la qualité d’ayant droit à la personne qui vit maritalement avec un assuré social et qui se trouve à sa charge effective, totale et permanente. Par conséquent, dans cette loi, au moins une certaine forme de concubinage faisait son entrée dans le cercle des ayants droits de l’assurance maladie/maternité.

Cette loi de 1978 est d’ailleurs assez significative du caractère double de ce mouvement d’extension parce qu’il s’agit à la fois de reconnaitre de nouvelles formes de vie ensemble et de vie familiale et de généraliser la couverture sociale. Le souhait de généraliser la couverture sociale, du moins la couverture maladie/maternité, a grandement incité le législateur à étendre la qualité d’ayant droit.

1) La limite purement formelle

est que la qualité d’ayant-droit était reconnu à la personne en vie maritale, mais pas dans le même texte que pour le conjoint marié. Pour le conjoint marié, le texte en cause est l’art. L313-3 du Code de la Sécurité Sociale : on a l’impression que pour le Code de la Sécurité Sociale les personnes en vie maritale sont des ayants-droit mais pas des membres de la famille. En effet pour ces personnes, c’est l’art. L161-14 du Code de la Sécurité Sociale qui les envisage.

2) limite substantielle

Elle s’est révélée plus fâcheuse. C’est précisément que la L2 janvier 1978 parle de vie maritale. Dans la décennie qui a suivi la L1978, il est apparu une nouvelle revendication qui est la revendication de l’égalité des couples de même sexe par rapport aux couples de sexes différents. Un certain nombre de concubins de même sexe ont réclamé le bénéfice de la qualité d’ayant-droit en disant qu’ils étaient en situation de vie maritale.

Ce mouvement est également causé par les débuts de l’épidémie du sida qui frappe majoritairement les personnes homosexuelles donc elles ont besoin d’une couverture sociale. Cette revendication va aller jusque devant la Cour de cassation qui va se prononcer dans un arrêt du 11 juillet 1989 : des concubins de même sexe peuvent-ils avoir la qualité d’ayant droit d’un assuré social ? C’est un problème d’interprétation de la loi de 1978. La chambre sociale de la Cour de cassation fût très partagée et elle le fit savoir. L’arrêt de 1989 énonça que la vie maritale devait s’entendre comme la vie entre mari et femme sans pour autant être marié. La vie maritale suppose la différence des sexes et donc des concubins de même sexe ne peuvent pas être en situation de vie maritale ni revendiquer la qualité d’ayant droit. C’est une interprétation rigoureuse de la notion de vie maritale. On peut se demander si la Cour de cassation n’a pas fait un appel discret au législateur en faisant savoir qu’elle avait beaucoup hésité avant de rendre sa décision.

Une loi du 27 janvier 1993 va étendre la qualité d’ayant droit à la personne qui vit avec un assuré social depuis au moins un an et qui est à sa charge effective, totale et permanente. Cette loi ne censure pas la jurisprudence de 1989 ; elle n’énonce pas que la vie maritale peut aussi concerner des concubins homosexuels mais se contente d’ajouter au premier alinéa de l’article L161-14 du code de la Sécurité sociale relatif à la vie maritale un deuxième alinéa qui ajoute l’hypothèse de vie avec un assuré social. Il y a donc désormais deux cas d’extension :

– la vie maritale ;

– et la vie avec un assuré social.

Il est très clair que dans l’esprit du législateur, il s’agit de permettre l’extension de la qualité d’ayant droit au concubin homosexuel qui vit avec un assuré social.

. Cependant, la formulation très générale de la loi de 1993 a pu susciter certaines difficultés : on s’est demandé si le deuxième alinéa de l’article L 161-14 n’allait pas englober des situations très au-delà du concubinage homosexuel et même du concubinage simplement.

La formulation de la L1993, « la vie avec l’assuré social » avait certes le mérite d’ouvrir la qualité d’ayant-droit aux concubins de même sexe, mais elle avait le défaut de recourir à une notion qui n’est pas juridique et qui pouvait d’ailleurs dépasser et de beaucoup les objectifs des auteurs de la L27 janvier 1993. Il y avait dans la réforme de 1993 une ambiguité qui n’avait pas été levée et qui avait été intentionnellement non levée : l’ambiguité était de savoir si la vie avec était le simple fait de vivre sous le toit de quelqu’un d’autre et vivre à sa charge, ou celui d’avoir de surcroit une vie sexuelle avec cette personne.

Rien dans les travaux préparatoires ni dans la formulation du 2ème alinéa de l’art. L161-14 du Code de la Sécurité Sociale ne permettait et ne permet toujours de répondre clairement à cette question. Ce n’est pas nécessairement que cette question soit extrêmement fréquente. On ne voit pas ce qui imposerait la notion de vie sexuelle, mais cette vision n’est pas partagée par certains auteurs.

Le législateur de 1993 pour ce qui est de la condition de vie avec s’est contenté de préciser au dernier alinéa de l’art. L161-14 que pour ce qui est de la qualité d’ayant-droit liée à la vie avec l’assuré social, cette disposition « ne peut s’appliquer qu’à une seule personne remplissant ces conditions, par assuré social ». C’est-à-dire que l’ayant-droit au titre de la vie avec l’assuré social est une seule personne. On peut imaginer qu’un assuré social aient recueilli à son domicile deux ou trois personnes, entièrement à sa charge, sans relations sexuelles : il ne pourra donner la qualité qu’à une seule de ces personnes.

Sur ce point il faut mettre en garde contre une interprétation fausse de cet alinéa et qui dit que dans ce dernier alinéa c’est le mariage polygamique qui est visé. L’art. L161-14 ne concerne pas le mariage, ce qui concerne le mariage c’est l’art. L313-3 du Code de la Sécurité Sociale (et il n’y a pas de dispositions de ce type). Le mariage polygamique n’est pas admis en droit de la sécurité sociale mais ce n’est pas sur le fondement de l’alinéa 2 de l’art. L161-14 mais sur la jurisprudence générale de la Cour de cassation fondée sur l’art. L313-3.

Depuis 1993, il s’est passé deux choses importantes :

  • L15 novembre 1999 relative au PACS
  • L27 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de même sexe

la Loi du 15 novembre 1999 relative au PACS

Elle a ajouté un nouvel élément à l’art. L161-14 puisqu’elle complète le premier alinéa en ajoutant à la personne qui vit maritalement avec un assuré social la personne liée à l’assuré social par un pacte civil de solidarité.

La L1999 est venue empiler une nouvelle qualité d’ayant-droit sans aucunement modifier les autres.

La L27 mai 2013 ouvrant le mariage aux personnes de même sexe

Il y a dans la L2013 des dispositions sociales importantes, mais il n’y a pas d’ajout ni à l’art. L161-14 et l’art. L313-3. C’est normal puisque le conjoint à la charge de l’autre dans le cadre d’un mariage entre personnes de même sexe est le même conjoint que celui de l’art. L313-3. C’est la qualité de conjoint qui change de définition : il faut entendre désormais toute personne mariée avec une autre, qu’il s’agisse d’un mariage entre personne de sexes différents ou de même sexe.

Cela a été modifié non seulement pour l’art. L313-3 du CSS, mais aussi pour tous les textes du droit général qui concerne des conjoints.

En revanche, il y a un point qui a été modifié implicitement dans l’art. L161-14 du Code de la Sécurité Sociale par la L27 mai 2013.

La Cour de cassation avait dit par vie maritale il faut entendre des personnes de sexes différents puisqu’on ne peut pas se marier entre les personnes de même sexe. Or depuis 2013, on peut se marier lorsque les personnes sont de même sexe. Il peut donc y avoir vie maritale entre les personnes de même sexe.

Donc l’arrêt de la Cour de cassation du 11 juillet 1989 n’est pas désavoué puisqu’il se situait dans un autre contexte juridique du mariage, mais il est aujourd’hui clairement dépassé puisque le mariage peut également concerner des personnes de même sexe et donc la vie maritale.

Mais dans ce cas, est-ce que l’alinéa suivant sur « la vie avec » a encore une utilité ? Puisque cet alinéa suivant ne s’expliquait dans la L1993 que parce que la vie maritale ne pouvait concerner que des personnes de sexe différent. Est-il encore utile de se référer à cette notion ? Le législateur ne devrait-il pas abroger cet alinéa qui s’appuie une définition très vague ? Ce qui est certain, c’est que rien ne va être changé.

L’objectif reste toujours le même en sécurité sociale : c’est la couverture sociale pour le plus grand nombre, c’est la généralisation de la couverture maladie-maternité notamment par l’extension de la qualité d’ayant-droit. Il serait contradictoire d’aller supprimer un alinéa qui permet d’étendre la couverture à des personnes qui ne rentrent pas dans les situations des autres alinéas, notamment pour les personnes qui vivent avec un assuré social sans avoir de relation sexuelle. Que fera-t-on de ces personnes si on supprime cet alinéa ?

=> Au final, on a une sorte d’échelle d’extension. Il y a d’abord le conjoint qui est par hypothèse un ayant droit (article L313-3) ; ensuite, la personne qui vit en situation de vie maritale (article L161-14 alinéa 1er) ; le partenaire dans le cadre d’un PACS (article L161-14 alinéa 2) et enfin, la personne qui vit avec un assuré social et qui se trouve à sa charge effective, totale et permanente depuis plus de 12mois (article L161-14 alinéa 3).

L’hypothèse d’un assuré social qui a un conjoint à sa charge mais qui ne vit pas avec lui et qui vit avec une autre personne qui est également à sa charge se pose. C’est le cas le plus fréquent du mari dont la femme ne travaille pas et qui entretient sa femme mais qui ne vit pas avec elle mais qui vit avec une autre femme à sa charge ou l’inverse. La même personne peut-elle avoir deux ayants droit, à savoir son conjoint et la personne avec laquelle elle vit ? Dans ce cas, ces deux personnes seraient ayants droit car d’une part, pour ce qui est du conjoint, il n’est pas exigé pour qu’il soit ayant droit qu’il vive avec l’assuré social et il n’est d’ailleurs même pas exigé qu’il soit à la charge de l’assuré social. Il suffit qu’il ne soit pas assuré social lui-même. D’autre part, pour la personne qui vit avec l’assuré social, elle doit être à sa charge et si c’est le cas, elle peut être ayant droit.

circulaire du 9 mai 2000 : un seule personne peut être ayant droit au titre de conjoint.

Faut-il considérer cette législation comme progressiste ? La réponse apparaît comme évidemment positive. De plus, cette législation permet d’étendre la qualité d’ayant droit donc elle est dans le sens de la généralisation de l’assurance maladie/maternité et dans la reconnaissance concrète et directe d’un droit à la santé. En même temps, pour certains, ce n’est pas le cas. Cette idée viendra de certains milieux féministes qui préfèreraient un système de type universel car pour ces cercles, l’extension de la qualité d’ayant droit maintient la sujétion des femmes à leur mari ou leur conjoint. Pour eux, la seule solution progressiste serait de déclarer que tous les résidents français aient la qualité d’ayant droit sinon, on maintient une certaine hiérarchie entre les hommes et les femmes. Statistiquement, les ayants droits sont majoritairement des femmes donc cette législation ne ferait que renforcer la vision classique de l’inégalité des sexes.

Notons que cette extension de la qualité d’ayant droit ne concerne que les ayants droits de l’assurance maladie/maternité, ce qui est une grave limite de notre système. Cette extension ne concerne pas les ayants droits de l’assurance vieillesse car la pension de réversion de l’assurance vieillesse versée aux ayants droits d’un assuré social décédé n’est servie qu’au conjoint survivant avec lequel l’assuré social était marié. Il est absolument faux de prétendre que le droit de la sécurité sociale met sur un strict pied d’égalité toutes les familles. L’extension de la pension de réversion aux concubins se heurte aux difficultés économiques que cela engendrerait et il faudrait faire la preuve de la réalité de la durée du concubinage, preuve difficile à faire.

Section 2. L’amélioration de la couverture sociale

Le déficit de la sécurité sociale est pour l’essentiel le déficit du régime général. Il ne s’agit pas de l’amélioration par l’élargissement par le cercle des bénéficiaires, mais par son accroissement substantiel c’est-à-dire ce qu’elle offre à ses bénéficiaires. En ce sens là, parler d’amélioration de la Sécurité Sociale est assez paradoxal de nos jours et peut paraître provoquant puisqu’il n’est question que de rétraction de la couverture sociale dans les débats actuels.

L’air du temps est plutôt à la régression de la couverture sociale, qui serait trop lourde, avec des charges trop importantes sur les entreprises et les particuliers, etc…

Pour autant, il y a quand même de temps en temps certaines améliorations de la sécurité sociale qui passent soit par la consolidation de la couverture sociale, soit par l’harmonisation des régimes de sécurité sociale.

Paragraphe 1. La consolidation de la couverture sociale

Cette consolidation peut être réalisée soit par l’amélioration des prestations existantes, soit par la création de nouvelles prestations.

  1. L’amélioration de prestations existantes

Cette amélioration peut être de trois types différents ou peut prendre trois formes différentes :

  • forme la plus simple : accroissement pur et simple du montant de la prestation
  • un peu plus complexe : amélioration des conditions de calcul du montant de la prestation
  • la plus technique : amélioration des conditions d’attribution de la prestation
  1. L’accroissement pur et simple du montant de la prestation

Ce peut être l’augmentation en euros de la prestation ou si la prestation est calculée en pourcentage d’une autre prestation dans ce cas augmentation du pourcentage.

En ce qui concerne l’augmentation du pourcentage, il y a l’exemple de la pension de réversion dans l’assurance vieillesse. Il faut rappeler que dans l’assurance vieillesse, la prestation principale versée à l’assuré lui-même est la pension de retraite. Il y a une pension versée à l’ayant-droit de l’assuré social, qui ne peut être que son conjoint survivant (avec l’évolution de 2013).

Cette pension de réversion, qui est un droit dérivé, est calculée en proportion de la pension de retraite qu’aurait du percevoir le pré-décédé. Il s’y ajoute dans le régime général une condition de ressource.

Ce taux de la pension de réversion était de 52% de la pension de retraite. En 1995 ce taux est passé à 54%.

En ce qui concerne l’allocation de rentrée scolaire, c’est une prestation familiale particulière qui est relativement récente qui vient compenser en partie les dépenses assez importantes liées à la rentrée scolaire pour les familles de revenus modestes. C’est une prestation qui est sous condition de ressources.

C’est une prestation importante, qui est typiquement une prestation de compensation de charges, d’autant plus qu’elle a des effets économiques non négligeables, y compris des effets favorables à certains types d’entreprise puisqu’elles solvabilisent certains produits scolaires.

Or, cette allocation de rentrée scolaire est longtemps restée à un niveau très faible. Son montant dans les premières années du XXIè s., a été multiplié par plus de 3. Il ne correspond toujours pas à la charge réelle, mais il s’en rapproche plus qu’auparavant.

  1. L’amélioration des conditions de calcul du montant de la prestation

La pension de retraite est la prestation principale de l’assurance vieillesse. C’est un droit propre pour l’assuré social retraité, qui s’est acquis ses droits de retraite. Alors que la pension de réversion est un droit dérivé pour le conjoint survivant avec de faibles revenus.

Cette pension de retraite n’a pas été pensée en 1945 comme un dispositif vraiment essentiel de la couverture sociale, même si elle représentait un droit important. Le législateur de 1945 avait cependant modifié sur un point capital l’assurance vieillesse telle qu’elle avait été créé par la L30 avril 1930. Dans cette loi le financement des pensions de retraite était assuré par le principe de capitalisation. L’ordonnance de 1945 fait basculer le financement des pensions de retraite dans la technique de répartition, c’est-à-dire que ce sont les actifs d’aujourd’hui qui financent les retraites d’aujourd’hui.

Pour autant, les retraites en 1945 ne représentent sans doute pas un poids extrêmement lourd parce que la durée moyenne de vie est moins forte qu’elle ne l’est aujourd’hui. La retraite est prévue au taux maximum à 65 ans, ce qui à l’époque est un âge avancé et que du reste, à 65 ans cette pension de retraite sera servie au taux dit maximum, mais qui est en réalité de 50% du revenu d’activité antérieur. Le montant de la prestation en lui-même ne sera portée au chiffre le plus élevé que si l’assuré a cotisé à l’assurance vieillesse pendant 37 ans et demi.

Il s’y ajoute que le salaire d’activité, dont on tient compte pour le calcul de la pension de retraite. Le salaire n’est pas nécessairement le salaire d’activité total de l’assuré, c’est un salaire sous plafond c’est-à-dire la partie du salaire qui ne dépasse pas un certain plafond appelé le plafond de la sécurité sociale qui à l’époque n’est pas très élevé.

En 1945, on est face à un dispositif certes important symboliquement et pratiquement puisqu’il vient de basculer dans la répartition ; mais il risque finalement de ne concerner que très peu de personnes et assez peu longtemps. L’âge minimum est fixé à 65 ans ce qui est un âge élevé et les personnes survivantes seront relativement peu nombreuses.

Dans ces conditions il n’y a pas lieu de s’étonner que pendant plusieurs décennies la branche vieillesse n’ait pas posé de problèmes très importants. Ce que l’on appelle très vite le déficit de la sécurité sociale est bien plutôt un déficit de la branche d’assurance maladie que celui de la branche vieillesse.

Les pouvoirs publics dans une ordonnance de 1967 scinde la caisse unique du régime général en 3 caisses nationales :

  • maladie
  • vieillesse
  • allocations familiales

C’est dans le dessein et dans l’objectif avoué de mettre la branche vieillesse et la branche famille à l’abris de la tentation de la branche maladie de se financer sur elles. La branche maladie est en déficit et la branche famille est en excédent à l’époque (la branche vieillesse n’est pas dans une situation aussi critique que la branche maladie).

L’assurance vieillesse ne pose pas de problèmes.

Cependant la situation va changer dans les 70’s parce qu’il va y avoir de plus en plus souvent la revendication sociale d’un droit à l’abaissement de l’âge de la retraite. Cette revendication de l’abaissement de l’âge de la retraite devient une thématique forte des syndicats de salariés. Il se produit une articulation entre cette revendication syndicale et salariales et les programmes politiques de l’époque, notamment le parti socialiste, qui intègre l’abaissement de la retraite à 60 ans.

La question va être très clairement posée lorsqu’à l’élection présidentielle de 1981, Mitterrand est élu. La gauche entend réaliser cet objectif d’abaissement dans les plus brefs délais.

La grande réforme en la matière est réalisée par deux ordonnances du 26 et du 30 mars 1982 au début du premier septennat de François Mitterrand dans le cadre d’un engagement d’un abaissement de l’âge de la retraite à 60 ans. En effet, ces deux ordonnances réalisent l’abaissement de la retraite à 60 ans. Cet abaissement consiste à permettre aux assurés sociaux de partir à la retraite dès l’âge de 60 ans avec un taux maximum de 50% s’ils ont, à cet âge, cotisé à l’assurance vieillesse pendant au moins 150 trimestres, c-a-d pendant 37 ans et demi. Cela signifie qu’à partir de 1982, un salarié a pu partir en retraite dès l’âge de 60 avec un taux plein de 50% s’il avait commencé à travaillé au plus tard à 22 ans et demi en cotisant de manière continue.

Il est vrai que la réforme de 1982 laissait sans solution certains problèmes.

– En effet, s’agissant des problèmes touchant certaines catégories de la population, on a pu remarquer que la réforme était en définitive surtout favorable aux personnes qui étaient entrées très tôt sur le marché du travail et dont la carrière professionnelle n’avait pas eu d’accro (pas de chômage).

Les personnes qui ont fait des études supérieures longues ou qui ont connu des périodes de chômage importantes et les femmes sont défavorisées par cette réforme. Par conséquent, la réforme de 1982 concerne, pour l’essentiel, des hommes étant arrivés jeunes à l’emploi et ayant très peu connu le chômage, ce qui était fréquent à l’époque.

– Le réforme de 1982 laissait de coté les perspectives négatives en matière démographique et de rapport actif/inactif dans les décennies à venir. Il faut rappeler qu’en vertu du principe de solidarité, les retraites de la sécurité sociale sont financées selon le principe de la répartition et non pas selon le principe de la capitalisation. Ce sont donc les actifs d’aujourd’hui qui financent les retraites d’aujourd’hui, étant entendu que les retraites futures des actifs d’aujourd’hui seront financées par les personnes qui seront actives demain. Ce financement ne fonctionne véritablement bien que si le rapport actif/inactif n’est pas trop déséquilibré au détriment des actifs. Ce risque de dégradation du rapport actif/inactif est un risque réel.

Tout cela étant en réalité déjà prévisible en 1982 et on a parfois reproché au législateur de 1982 de ne pas en avoir tenu compte. Or, ce reproche est excessif, surtout au vu de la présentation de la réforme de Mr Mauroy.

La réforme de 1982 qui, dans l’esprit de certains de ses auteurs et notamment de Mr Mauroy, était destinée aux générations entrées sur le marché de l’emploi dans l’immédiate après guerre, a assez vite rencontré une série de difficultés d’ordre socioéconomiques et démographiques qui ont mis l’assurance vieillesse dans une situation très complexe.

En vertu du principe de solidarité, nos retraites de la sécurité sociale sont financées selon le principe dit de la répartition, c-a-d non pas par les cotisations antérieures des actuels retraités mais par les cotisations actuelles des actuels actifs.

Par conséquent, le bon financement des retraites dans un système par répartition repose sur un équilibre démographique suffisant entre actifs et inactifs. Cet équilibre démographique est au contraire menacé s’il y a trop d’inactifs ou s’il n’y a pas assez d’actifs.

Or, à partir de 1982, la situation va se dégrader aussi bien du point de vue des inactifs que de celui des actifs. Du point de vue des inactifs, le nombre de retraités et la durée des retraites vont augmenter à la fois en raison de la réforme de 1982 et d’un phénomène démographique de très longue portée qui est la tendance à l’allongement de la durée moyenne de la vie. A l’inverse, le nombre des actifs et notamment des actifs cotisants se réduit à la fois en raison du chômage et dans une moindre mesure de la baisse de la natalité.

Face à cette situation, il y a plusieurs réponses possibles mais dont certaines sont techniquement ou politiquement très difficiles à mettre en œuvre.

. La 1ère réponse aurait consisté à abandonner le financement par répartition et à passer à un financement par capitalisation, c-a-d dans lequel les actifs actuels sont appelés à cotiser pour leur future retraite. Outre les objections de type idéologique ou politique qu’il peut susciter, le passage d’un financement par répartition à un financement par capitalisation est pratiquement impossible

. La 2nde réponse consisterait à changer non pas de principe de financement mais de moyens de financement, c-a-d qu’on abandonnerait les cotisations sur revenus professionnels ne pesant que sur les employeurs et les salariés et on passerait à un financement par l’impôt pesant sur l’ensemble des contribuables. Cette réforme de financement par l’impôt a déjà, dans certains secteurs de la sécurité sociale, un début de réalisation (augmentation de la TVA ou de la CSG). En revanche, pour les retraites, cette fiscalisation du financement n’a pas eu une très grande portée parce que le droit comparé montre notamment que les systèmes qui financent les retraites par l’impôt sont des systèmes dans lesquels les retraites ainsi financées sont fixées à un niveau minimum.

Il n’y a alors plus que 3 solutions :

1 – Résorber le chômage puisque si le chômage venait à baisser sensiblement, le financement des retraites et de la sécurité sociale s’en trouveraient très améliorés. Or, cela est difficile à mettre en place.

2 – Diminuer le montant des retraites puisque le financement devient de plus en plus difficile. C’est une solution très dure sur le terrain social et qui n’a pas été souhaitée par les pouvoirs publics même si les réformes réalisées depuis 1982 ont presque toutes conduit à une diminution indirecte mais très effective dans certains cas du montant des retraites.

3 – Augmenter la durée des cotisations ainsi que revenir sur l’abaissement de l’âge de la retraite. C’est la voie dans laquelle se sont installés les pouvoirs publics à partir du second septennat de François Mitterrand (1988-1995). Le gouvernement de Balladur a fait voter par le parlement de l’époque une loi de réforme du régime des retraites : la loi du 22 juillet 1993. Cette loi ne revient pas sur l’abaissement de l’âge de la retraite à 60 ans. En revanche, la durée des cotisations exigée pour bénéficier d’une retraite au taux plein dès l’âge de 60 ans passe de 37 ans et demi de cotisations à 40 ans de cotisations.

  1. L’amélioration des conditions d’attribution de la prestation

L’exemple principal concerne la réparation des maladies professionnelles. La définition des maladies professionnelles est assez différente de celle des accidents du travail. Cette dernière est ouverte, par opposition à la définition fermée des maladies professionnelles. Selon l’article L411-1 du code de la Sécurité sociale, tout accident survenu au temps et au lieu du travail est présumé être un accident du travail. Cette définition est si large que la jurisprudence a pu considérer comme accident du travail des suicides sur le lieu du travail ou même un meurtre sur le lieu du travail. Cette définition est si large qu’elle déborde de beaucoup l’hypothèse de l’accident dû au machinisme.

Il n’y a rien de tel pour les maladies professionnelles car l’étiologie (étude des causes) des maladies est beaucoup plus complexe que celle des accidents du travail, évènements faciles à situer dans l’espace et dans le temps alors que les maladies ont des causes souvent complexes, progressives et elles ne se déclarent pas nécessairement d’un seul coup. Il est donc impossible de tenir pour maladie professionnelle toute maladie survenue au temps et au lieu du travail.

Dès lors, le législateur a choisi un tout autre système beaucoup plus restrictif : le système dit des tableaux. En effet, pour qu’une maladie soit considérée comme professionnelle, il faut d’abord qu’elle figure sur un tableau officiel des maladies professionnelles annexé au code de la Sécurité sociale, régulièrement complété.

En second lieu, le salarié doit avoir été exposé, au cours de son activité professionnelle, à l’un des agents nocifs figurant également sur un tableau officiel pour la maladie professionnelle considérée.

Jusqu’en 1993, même si le salarié souffre d’une maladie figurant sur la liste des maladies professionnelles, il ne pouvait pas être couvert au titre des maladies professionnelles s’il n’avait pas été exposé à un des agents nocifs figurant sur le tableau des agents nocifs. Il fallait encore que le salarié soit en cours de délai officiel de prise en charge, c-a-d que si le salarié avait déjà cessé, au moment où il est tombé malade, d’être exposé à un agent nocif, il fallait qu’au moment où il tombe malade, qu’il n’ait pas dépassé le délai d’incubation de la maladie figurant dans les tableaux. De 1919 à 1993, ce système des 3 tableaux (maladies professionnelles, agents nocifs et délai d’incubation) a fonctionné.

Aujourd’hui, lorsqu’un salarié s’estime victime d’une maladie professionnelle, il vaut mieux pour lui que sa situation réponde aux 3 tableaux officiels car il aura beaucoup plus de chance de se voir déclarer en maladie professionnelle.

La loi du 27 janvier 1993 a apporté un assouplissement lorsque la maladie concernée ne répond pas aux tableaux. Cet assouplissement n’est autorisé que dans deux cas : lorsque la maladie a entraîné la mort du salarié où l’assouplissement profite à ses ayants droits et lorsque la maladie a entraîné pour le salarié une incapacité permanente de travail d’au moins 25%.

Dans ces deux cas, en effet, soit la famille du salarié, soit le salarié lui-même sont autorisés à faire établir que bien qu’elle ne corresponde pas en tous points aux tableaux, la maladie considérée a bien eu sa cause dans l’activité professionnelle du salarié. C’est une preuve difficile à établir et c’est une procédure particulière puisque le dossier doit être présenté devant une commission médicale composée de 3 médecins dont le médecin régional du travail et l’avis de cette commission lie la caisse.

Cette loi a été assez fraîchement accueillie par la doctrine et à l’époque, le professeur St-Jours a même évoqué « une réforme en trompe l’œil ». Il la considérait comme insuffisante pour être vraiment significative. Aujourd’hui, avec le recul, ce jugement paraît trop sévère. Certes, la proportion de maladies professionnelles hors tableaux reste assez faible mais cela n’est pas dérisoire, surtout que le nombre global de maladies professionnelles a beaucoup augmenté au cours des deux dernières décennies. Aujourd’hui : environ 70 000/an alors qu’il y a 20 ans : environ 20 000/an. Cela tient à un meilleur repérage des maladies professionnelles.

En 1993, dans le texte originaire de la réforme, la maladie professionnelle hors tableaux ne pouvait être prise en compte que s’il y avait décès du salarié ou incapacité permanente du salarié d’au moins 66%, ce qui supposait donc dans les deux cas une maladie particulièrement grave. Un décret de 2002 a ramené le taux d’incapacité permanente minimum à 25%, ce qui permet de prendre en compte un plus grand nombre de maladies professionnelles hors tableaux.

En même temps, on peut observer que la réduction du taux d’incapacité minimum requis est venue du pouvoir réglementaire tandis que l’assouplissement général vient du pouvoir législatif, ce qui correspond à la motivation constitutionnelle des compétences législatives et réglementaires en droit de la sécurité sociale. Selon l’article 34 de la Constitution, le législateur est compétent en matière de sécurité sociale en ce qui touche aux droits fondamentaux alors que le reste relève de la compétence réglementaire, ce qui fait que par exemple, il revient de décider au législateur de décider si les maladies professionnelles sont élargies aux incapacités permanentes mais il revient au pouvoir réglementaire de préciser le taux requis. Le législateur pose les principes en matière de prestations et le pouvoir réglementaire fixe les chiffres. Cette ventilation des compétences, en règle générale, est dénoncée parce qu’elle donne parfois l’impression que le pouvoir réglementaire, en fixant des chiffres trop restrictifs, reprend d’une main ce que le législateur a accordé sur le terrain des principes.

Toujours en matière de maladies professionnelles, la LFSS du 23 décembre 2000 a créé un fond d’indemnisation destiné à offrir aux victimes de l’amiante une réparation intégrale de leur préjudice (le FIVA). Le FIVA est un établissement public national qui, dans les 6 à 9 mois de la demande d’indemnisation posée par la victime, doit faire une offre d’indemnisation que la victime a 2 mois pour accepter ou pour contester devant le juge administratif. Parallèlement, le FIVA, s’il est appelé à verser cette indemnité, dispose d’une action récursoire contre le responsable de l’exposition à l’amiante.

Les améliorations des prestations et notamment des conditions d’attribution des prestations ne viennent pas seulement de la loi puisqu’elles peuvent aussi venir de la jurisprudence qui a un rôle très positif. Il y a notamment depuis plus de 10 ans un exemple jurisprudentiel très célèbre de cette amélioration. Elle concerne la réparation des ATMP qui est en principe automatique mais forfaitaire. Elle n’est susceptible d’être majorée qu’aux cas de faute inexcusable ou intentionnelle de l’employeur ou d’une personne substituée à l’employeur.

La faute inexcusable étant une création de la loi de 1898 sur les ATMP mais ne l’avait pas définie. Cette notion a été définie par la Cour de cassation en 1941. C’était un arrêt tellement restrictif que les cas de faute inexcusable constatés ont été très peu nombreux chaque année pendant toute la 2ème moitié du 20ème.

A partir des années 2000 et notamment dans plusieurs arrêts de 2002, la Cour de cassation a énoncé qu’il pesait sur l’employeur, en vertu du contrat de travail, une obligation de sécurité de résultat. Elle a ajouté qu’en vertu de cette obligation, l’employeur était en situation de faute inexcusable dès lors qu’il avait connu ou qu’il aurait pu connaître le risque d’accident ou de maladie et qu’il n’avait cependant pris aucune mesure significative pour prévenir ce risque.

Dans un premier temps, la portée de cette jurisprudence a été très discutée, l’obligation de sécurité de résultat apparaissant assez ambigüe. Or, par la suite, cette définition s’est révélée assez nettement plus large que celle de 1941 et par conséquent, les cas de faute inexcusable constatés paraissent être en augmentation sensible. La constatation de la faute inexcusable entraîne une majoration de la réparation qui est très favorable à la victime donc cette amélioration vient de la jurisprudence.

Du reste, ce n’est pas seulement le juge de cassation qui peut jouer un rôle positif puisque c’est aussi le juge constitutionnel car le Conseil constitutionnel, dans une décision du 18 juin 2010, a lui-même contribué à améliorer la situation des accidents du travail de manière assez significative également, toujours sur le terrain de la faute inexcusable. En effet, aux cas de faute inexcusable, le code de la Sécurité sociale améliore la réparation notamment par l’indemnisation de chefs de préjudice qui sont énumérés par le code et qui ne sont pas couverts s’il n’y a pas de faute inexcusable. Or, cette liste de chefs de préjudice indemnisés aux cas de faute inexcusable ne couvre pas tous les préjudices susceptibles d’être endurés par la victime de la faute inexcusable de l’employeur.

Une QPC a donc été posée en demandant que soit déclaré contraire à la Constitution le caractère limitatif de cette liste. En effet, le Conseil constitutionnel a énoncé qu’il n’était pas conforme à la Constitution de limiter la majoration de la réparation à certains chefs de préjudice seulement.

Cette liste de préjudices spécialement réparés aux cas de faute inexcusable partait d’une bonne intention mais pour le Conseil constitutionnel, il faut réparer tous les préjudices subits par la victime et pas seulement ceux présents sur la liste.

Il y a donc un double mouvement d’amélioration de la réparation par le législateur et le Conseil constitutionnel.

  1. La création de nouvelles prestations

Il ne faut pas se limiter au cadre du système de sécurité sociale et aller dans le reste de la protection sociale.

  1. Dans le cadre du système de sécurité sociale

Il y a 3 secteurs : le secteur des assurances sociales, de la réparation des ATMP et des prestations familiales. En matière de création des nouvelles prestations, le secteur de la réparation des ATMP n’est pas très significatif avec surtout des améliorations. En revanche, dans les deux autres secteurs, il y a eu de nombreuses nouvelles prestations.

a) le cadre des assurances sociales

Dans la loi du 30 avril 1930, il n’y avait que 5 assurances sociales, à savoir l’assurance maladie, l’assurance maternité, l’assurance invalidité, l’assurance vieillesse et l’assurance décès. Le veuvage ne faisait pas l’objet d’une assurance sociale spécifique. En revanche, il pouvait être couvert dans le cadre de l’assurance vieillesse par une prestation particulière : la pension de réversion de l’assurance vieillesse versée au conjoint survivant d’un assuré social retraité décédé. La pension de réversion est une fraction (54%) de la pension de retraite que percevait l’assuré social décédé.

Cependant, la pension de réversion créée par une loi de 1935 supposait que le conjoint survivant ait un âge minimum fixé à 55 ans et par conséquent, rien n’était prévu pour les veufs ou les veuves de moins de 55 ans.

Cette situation est apparue au fil du temps injuste : d’abord du point de vue de l’égalité des sexes car elle pénalisait lourdement les femmes souffrant d’un veuvage précoce (3/4 veuves pour 1 veuf) et le veuvage précoce est une situation très nombreuse. Or, plusieurs de ces femmes se retrouvaient sans ressources ou avec de faibles ressources au moment du décès de leur conjoint, c’est pourquoi une loi du 17 juillet 1980 a, sans supprimer les pensions de réversion, ajouté une allocation de veuvage dans le cadre d’une nouvelle assurance sociale : l’assurance veuvage.

La vie de cette nouvelle assurance sociale a été très mouvementée, à tel point qu’elle a été supprimée par la loi de réforme des retraites du 21 août 2003, la loi Fillon.

Dans un premier temps, cette allocation a été conçue dans condition peu claires mêlant des techniques normalement opposées. Au départ, il s’est agit d’une allocation sous condition de ressources versée aux veufs ou veuves de moins de 55 ans, à condition qu’ils ne soient pas remariés ni ne vivent en couple de fait et étant entendu que cette allocation était strictement temporaire (3 ans) et de plus, elle était dégressive car son montant baissait chacune des deux années suivant la 1ère.

Ce dispositif assez peu généreux s’expliquait par la façon très particulière dont l’allocation de veuvage avait été conçue. Il s’agissait de donner à un veuf ou une veuve en difficulté un coup de main temporaire lui permettant de tenir le coup financièrement pendant le temps strictement nécessaire à la recherche d’un emploi. Par conséquent, on était finalement très proche d’une prestation de secours ou d’aide social aux veufs ou aux veuves de faibles ressources. En même temps, cette prestation était financée exclusivement par les cotisations salariales au taux de 0,1% sur l’ensemble de leurs revenus professionnels. Il s’agissait alors d’une prestation mêlant des techniques d’assurance et d’assistance sociale. Le législateur a baissé la durée du versement de l’allocation à deux ans et la dégressivité a été abandonnée.

La loi de 2003 supprime l’allocation veuvage qui, il est vrai, devenait moins nécessaire puisqu’elle supprimait aussi l’âge minimum de 55 ans pour le bénéfice d’une pension de réversion. Le législateur prévoyait une suppression progressive jusqu’au 1er janvier 2011. La loi du 9 novembre 2010 a rétabli l’âge minimum de 55 ans pour le bénéfice des pensions de réversion donc in extrémis (juste avant la suppression de l’assurance veuvage en 2011), le législateur a rétabli l’assurance veuvage pour les veufs de moins de 55 ans avec presque les mêmes caractéristiques qu’auparavant. Dès lors, il y a aujourd’hui 6 assurances sociales. Ce dispositif prend en compte les situations de veuvage et de solitude nombreuses dans la société mais seulement de manière assez partielle.

b) le cadre des allocations familiales

l’API était destinée aux parents, le plus souvent à la mère, qui, en raison des circonstances de la vie, se retrouvait seuls pour élever un ou plusieurs enfants à charge sans avoir les ressources suffisantes pour le faire. On reconnaît ici une situation sociale souvent évoquée aujourd’hui qui est la situation des familles monoparentales lorsque l’enfant vit avec un seul de ses deux parents. Ces familles sont assez nombreuses et toutes les enquêtes des dernières années montrent qu’elles sont particulièrement vulnérables aux situations de pauvreté et d’indigence. Si jusque vers les années 60/70, les personnes âgées ont été surreprésentées dans les populations indigentes, aujourd’hui, ce sont plutôt les jeunes sans travail et les familles monoparentales.

La création de l’API par la loi du 17 juillet 1996 a été un progrès très important de la couverture sociale. Ce progrès s’appuyait sur une technique innovante puisque l’API a été l’une des premières prestations sous condition de ressources passant techniquement par le versement d’une allocation différentielle. Le législateur et le pouvoir réglementaire fixaient un plancher de ressources garanti du parent isolé qui percevait une allocation égale à la différence entre ce plancher de ressources garanti et ses ressources propres par hypothèse inférieures. C’était déjà l’annonce de la technique du RMI créé en 2000.

L’API a fait l’objet de critiques très vives. L’API a semblé une allocation insuffisamment tournée vers l’insertion durable des familles monoparentales. Il a été reproché au dispositif de l’API de ne pas engager le parent isolé dans un processus d’insertion professionnelle lui permettant de subvenir par lui même à ses besoins. Il a été reproché d’installer durablement le bénéficiaire dans une situation d’assistance. C’était une prestation temporaire qui durait jusqu’à ce que le dernier enfant ait 3 ans. L’absence de processus d’insertion pouvait inciter notamment certaines mères à avoir des enfants pour bénéficier de l’API. On retrouve l’idée que les pouvoir publics pouvaient encourager une situation d’assistance. C’est pour cela que des processus d’insertion furent proposés aux bénéficiaires de l’API avec des résultats contrastés.

Aujourd’hui, l’API n’existe plus en tant que tel car elle a été intégrée dans les nouveaux RSA créés par la loi du 1er décembre 2008. Cette loi prévoit deux types de situations : selon que le bénéficiaire du RSA est un parent isolé. S’il est un parent isolé, il bénéficie d’un plancher de ressources supérieur à celui garanti aux personnes seules sans enfant. En même temps, le bénéficiaire du RSA parent isolé s’engage dans le processus de réinsertion conforme au RSA.

Même si elle a formellement disparue, l’API subsiste avec ses traits essentiels dans le cadre du RSA et elle conserve un plancher de ressources garanti plus favorable qu’aux personnes n’étant pas parent isolé. Non seulement, l’essentiel de la prestation a été substantiellement maintenu mais le nouveau dispositif est meilleur du point de vue de l’insertion professionnelle que l’ancien dispositif. Toutefois, l’inclusion dans le RSA, même avec un régime plus favorable, fait tout de même courir le risque qu’un jour, les pouvoirs publics découvrent qu’il faille faire des économies sur le RSA qui se feront sur la diminution de l’allocation pour les parents isolés. Si ce scénario se réalisait, il serait plus facile de supprimer, dans le cadre du RSA, le régime particulier des parents isolés qu’il n’aurait été facile de supprimer l’API si elle était restée autonome.

  1. Hors du cadre du système de sécurité sociale

Le système de sécurité sociale n’est qu’un élément de la protection sociale dans son ensemble ; les autres éléments de la protection sociale étant l’aide et l’action sociale, l’indemnisation du chômage et la protection sociale complémentaire.

Les prestations nouvelles concernent respectivement la protection sociale complémentaire, l’indemnisation du chômage et l’aide et l’action sociale. Tout comme la protection sociale complémentaire dans son ensemble, ces prestations nouvelles tantôt viennent compléter des prestations de sécurité sociale déjà existantes (les prestations complétives); tantôt viennent pallier l’absence de prestations de sécurité sociale qui pourraient exister mais qui n’ont jamais été mises en œuvre (les prestations substitutives).

Les prestations complétives

L’exemple le plus significatif concerne les retraites complémentaires des salariés qui viennent s’ajouter à la retraite de base servie aux salariés par le régime général de sécurité sociale. La retraite de base du régime général de sécurité sociale est marquée par deux voire trois limites très importantes.

  1. La première limite est que le taux de cette retraite est au maximum de 50% du salaire d’activité antérieur. C’est le taux plein.
  1. La deuxième limite est qu’en toute hypothèse, ce n’est pas nécessairement le salaire intégral qui est pris en compte pour le calcul de la pension de retraite mais le salaire sous plafond, c-a-d le salaire jusqu’à hauteur d’un plafond fixé en 2012 à 3 300 euros mensuels, ce qui signifie que le montant maximal d’une pension de retraite, réserve faite de quelques majorations pour conjoint ou enfant à charge, dépasse à peine 1 500 euros mensuels.

Pour tous les salaires, quelque soit leur montant, la règle du taux plein à 50% est très pénalisante. De plus, pour les salaires moyens et élevés, la règle du plafond est également très pénalisante puisqu’une personne percevant en fin d’activité un salaire de 5 ou 6 000 euros mensuels ne pourra espérer qu’une retraite de base jusqu’à 1 500 euros mensuels. On comprend alors que les retraites complémentaires aient été d’abord mises en œuvre pour les cadres moyens et supérieurs et qu’elles aient été ensuite étendues à tous les salariés.

  1. La troisième limite date de la loi Balladur de 1993. Le salaire d’activité pris comme référence jusqu’à la limite du plafond est un salaire moyen, non plus des dix meilleures années d’activité, mais des 25 meilleures années d’activité. Or, plus le nombre de meilleures années d’activité moyennes augmentent, plus cette moyenne baisse.

=> Tout cela fait que la moyenne des retraites de base est assez faible, autour de 1 200 euros mensuels, d’où la création assez rapide de retraites complémentaires. Ces retraites auraient pu être créées dans le cadre du système de sécurité sociale étroitement entendu. Cela n’a pas été le cas essentiellement parce qu’au départ, les retraites complémentaires ont correspondu surtout à une initiative du patronat qui n’a pas souhaité intégrer le nouveau dispositif dans le système de sécurité sociale.

Jusqu’en 1967, dans les conseils d’administration des caisses de sécurité sociale, les représentants des salariés étaient en majorité et les représentants des employeurs en minorité. Le patronat considérait que cette composition des CA des caisses n’était pas justifiée et qu’elle encourageait des dépenses excessives, les syndicats de salariés ne se montrant pas assez rigoureux dans la gestion des deniers sociaux et des cotisations sociales selon le patronat.

Ainsi, le patronat obtient des pouvoirs publics la possibilité de créer un système strictement paritaire dans lequel les représentants des employeurs sont en nombre égal à celui des salariés.

Dès 1967, sont créées des retraites complémentaires pour les salariés cadres par un accord national interprofessionnel de 1967 qui fédère en une association nationale un grand nombre d’institutions de retraite complémentaire de cadres qui vont, d’une part prélever des cotisations complémentaires à celles de la sécurité sociale patronales et salariales, et d’autre part verser des retraites complémentaires : l’AGIRC (l’Association Générale des Institutions de Retraite Complémentaire). Les cotisations de retraite complémentaire des cadres sont calculées sur la quasi-totalité du salaire des cadres et pas sur le seul salaire sous plafond.

Pour les non cadres, la nécessité de créer des retraites complémentaires était au départ moins pressante puisque par hypothèse, les rémunérations des non cadres sont inférieures à celles des cadres et que le plafond correspondait à peu près au maximum d’un salaire de non cadre.

En revanche, pour les non cadres, comme pour les cadres, le taux plein à 50% était pénalisant. Cela explique que l’on ait fini par créer des institutions de retraite complémentaire des non cadres par un accord national interprofessionnel de 1961 qui sont fédérés dans une association nationale : l’ARRCO (l’Association des Régimes de Retraite Complémentaire).

Aujourd’hui, ces institutions sont toujours présentes. Elles jouent dans la couverture du risque vieillesse un rôle important puisque sur l’ensemble des retraites perçues par les salariés, les retraites complémentaires sont majoritaires. Le niveau de vie des retraités actuels est plus qu’à la moitié assis sur les retraites complémentaires. Ces retraites complémentaires expliquent que le revenu moyen d’un retraité soit légèrement supérieur au revenu moyen d’un actif.

Les institutions restent distinctes du système de sécurité sociale alors que le système de sécurité sociale a copié, à partir de 1967, la caractéristique majeure des institutions de retraite complémentaire qui est la gestion strictement paritaire.

Il y a tout de même deux ressemblances majeures entre les retraites complémentaires et la retraite de base. D’une part, tout comme la retraite de base, les retraites complémentaires sont financées selon le principe dit de la répartition en vertu duquel les retraites complémentaires, comme la retraite de base sont financées sur les cotisations des salariés actuellement actifs. Cette identité est une caractéristique du système français de protection sociale par rapport à la plupart des autres systèmes comparables.

Dans les autres pays européens notamment, si les retraites de base sont toujours financées selon le principe de répartition, les retraites complémentaires sont financées soit par capitalisation, soit par une combinaison de capitalisation et de répartition. Seules les retraites complémentaires françaises sont intégralement financées par répartition. En France, la capitalisation ne commence à fonctionner que pour les retraites supplémentaires, c-a-d qui viennent éventuellement s’ajouter aux retraites de base et complémentaires, qui sont surtout servies à des cadres supérieurs.

Depuis une loi de 1972, les retraites complémentaires sont, comme la retraite de base, strictement obligatoires, c-a-d que toute entreprise doit affilier l’ensemble de ses salariés à une institution de retraite complémentaire. Elle doit donc payer, tout comme les salariés, des cotisations de retraite complémentaire et en contrepartie, tous les salariés ont droit à une retraite complémentaire.

Notre système de retraite complémentaire est administrativement complètement distinct du système de sécurité sociale qui perçoit ses propres cotisations et qui verse ses propres prestations mais par plusieurs points essentiels, ce dispositif de retraite complémentaire ressemble beaucoup à la retraite de base de la sécurité sociale puisqu’il est obligatoire et qu’il est financé selon le principe de la répartition. La couverture du risque vieillesse en France, pour ce qui est des salariés, ne dépend pas seulement du système de sécurité sociale proprement dit mais aussi d’un dispositif qui relève de la protection sociale complémentaire.

Les prestations substitutives

Il s’agit de prestations qui ont été créées en dehors du système de sécurité sociale pour couvrir des éventualités qui auraient pu être couvertes par le système de sécurité sociale mais qui ne l’étaient pas pour diverses raisons. L’exemple le plus typique est celui des prestations de chômage mais il y a aussi un exemple plus récent touchant une situation de plus en plus préoccupante qui est celui des prestations versées aux cas de dépendance et spécialement aux cas de dépendance d’une personne âgée.

α. Les prestations au cas de chômage

L’indemnisation du chômage et particulièrement de chômage total ne fait pas partie de la sécurité sociale mais de la protection sociale complémentaire dont elle est un élément important. La rencontre entre l’indemnisation du chômage et la sécurité sociale a été manquée en France dès le début.

La France s’est industrialisée tardivement par rapport au Royaume-Uni et l’Allemagne, elle est longtemps restée un pays majoritairement agricole et rural pour lequel le chômage et spécialement le chômage industriel avait très peu de sens. La France était marquée par une assez forte suspicion vis-à-vis des chômeurs souvent considérés comme des paresseux quémandeurs d’assistance. Jusque vers 1945, les chômeurs étaient au mieux des malchanceux qui méritaient peut être, et encore pas toujours, des secours et des prestations d’assistance mais pour lesquels il était exclu de créer une véritable couverture sociale.

Lorsque le système de sécurité sociale est créé en 1945, il n’intègre pas la couverture du chômage dans la nouvelle couverture du chômage, à la fois en raison de cet état d’esprit traditionnel qui reste assez dominant et aussi parce qu’en 1945, on pense que les nécessités de la reconstruction du pays feront qu’il y aura très peu de chômage. En effet, de 1945 à 1975, « les 30 glorieuses », il n’y aura qu’un chômage dit frictionnel, c-a-d un chômage de très pas niveau, inéluctable dans une société en forte croissance.

Par conséquent, en 1945, on ne voit pas la nécessité de créer une assurance sociale chômage venant s’ajouter aux 5 assurances sociales de 1930.

Les choses vont bouger surtout grâce à l’ouverture du marché commun européen à partir du traité de Rome du 26 mars 1957 car les autorités publiques françaises et les partenaires sociaux se rendent très vite compte que l’ouverture du marché commun risque d’entrainer un fort chômage dans la mesure où il est évident que de nombreuses entreprises françaises vieillies ou vieillissantes risquent de ne pas survivre à cette ouverture et qu’il y a donc la probabilité d’une forte augmentation du chômage.

C’est pourquoi les partenaires sociaux envisagent la création d’une assurance chômage sur le modèle des assurances chômage, étant aidés par le changement politique majeur en France : la création de la Vème République en 1958. La Vème République se présentant comme un régime de modernisation de la société et donc la création d’une assurance chômage.

En même temps, le patronat, tout comme pour les retraites complémentaires, ne veut pas entendre parler d’une intégration de la nouvelle assurance chômage dans le système de sécurité sociale car il a le sentiment que le système de sécurité sociale lui échappe, qu’il n’en a pas une maîtrise suffisante et il veut contrôler de près l’indemnisation du chômage.

C’est pourquoi on reprend la technique des retraites complémentaires : les partenaires sociaux concluent en 1958 un accord national interprofessionnel qui sera généralisé par le gouvernement et qui crée une assurance chômage gérée par une association constituée selon la loi de 1901 : l’UNEDIC (l’Union pour l’emploi dans l’industrie et le commerce) relayée sur le terrain par des ASSEDIC (Associations pour l’emploi dans l’industrie et le commerce). L’UNEDIC et les ASSEDIC sont gérés par des CA où les représentants des employeurs sont en nombre strictement égal à celui des représentants des salariés.

Les partenaires sociaux se mettent d’accord tous les 4 ou 5 ans sur une convention d’assurance chômage ensuite agréée par les pouvoirs publics, convention qui fixe pour chaque période le taux des cotisations salariales et patronales ainsi que la durée et le montant des prestations. L’indemnisation du chômage se caractérise par une autonomie assez forte des partenaires sociaux par rapport à l’Etat puisque ce sont les partenaires sociaux qui fixent le taux des cotisations et le montant des prestations, même si l’agrément ministériel des conventions laisse au gouvernement la possibilité de peser indirectement sur ces éléments.

De 1959 jusqu’à 1973, ce nouveau dispositif d’assurance chômage va fonctionner sans à-coups particuliers, essentiellement parce que la France est en période de croissance économique et que le chômage reste très limité. Les choses vont considérablement se dégrader à partir des années 70, c-a-d de la crise économique qui commence en 1973 avec un début du renchérissement du prix du pétrole. Jusqu’en 1973, le prix du pétrole était à un niveau très bas et à partir de 1973, les augmentations massives entrainent un ralentissement de la croissance et un début d’une augmentation du chômage.

Cette situation place les organismes d’indemnisation du chômage dans une situation financière de plus en plus difficile avec l’augmentation des chômeurs à indemniser et une baisse des cotisations.

Dans les années 80, des difficultés de négociation des nouvelles conventions d’assurance chômage apparaissent et, surtout du coté du patronat, de thématiques nouvelles qui vont finir par entraîner des réformes très importantes du dispositif d’indemnisation du chômage.

Au début des années 80, le patronat veut introduire et y parvient, une distinction qui jusque là, n’avait jamais été invoquée, entre ce qui relèverait de l’assurance et ce qui relèverait de la solidarité dans l’indemnisation du chômage. En effet, pour le patronat, il y a deux catégories de chômeurs : ceux qui ont travaillé et cotisé à l’assurance chômage suffisamment longtemps pour avoir droit à une assez longue durée d’indemnisation assurantielle du chômage (l’assurance) et ceux qui n’ont jamais travaillé, ceux qui n’ont pas travaillé assez pour se constituer des droits à une longue indemnisation du chômage et ceux qui sont au chômage depuis trop longtemps pour avoir encore droit à l’assurance chômage (la solidarité). Pour le patronat, l’objectif est d’alléger le financement de l’assurance chômage.

En 1984, le patronat obtient la séparation nette de ceux qui relèvent de l’assurance (responsabilité des partenaires sociaux + financement par cotisations) et de ceux qui relèvent de la solidarité (responsabilité de l’Etat + financement par l’impôt).

Depuis 1984, il y a deux dispositifs d’indemnisation du chômage : l’indemnisation assurantielle et l’indemnisation assistantielle (le régime de solidarité chômage). Les mêmes organismes versent ces prestations différentes.

Cette idée de distinguer l’assurance et la solidarité va s’exporter au-delà de l’indemnisation du chômage et atteindre, dans les années 90, certains secteurs de la sécurité sociale proprement dite, notamment la couverture vieillesse.

Dans les années 90, c’est l’assurance chômage qui fait l’objet de nouvelles revendications patronales car le patronat estime que le dispositif d’assurance chômage n’incite pas assez les chômeurs indemnisés à rechercher activement un emploi. Ce dispositif conduirait à des attitudes trop passives des demandeurs d’emploi et il conviendrait d’activer les dépenses d’indemnisation du chômage, c-a-d qu’au lieu de verser sans aucune condition des prestations aux chômeurs, il faudrait que ces prestations soient configurées de telle sorte qu’elles incitent les chômeurs à retrouver rapidement un emploi.

En 1992, l’allocation d’assurance chômage qui, jusque là, était d’un montant uniforme pendant toute sa durée de versement, devient une allocation dégressive, c-a-d que son montant baisse au fur et à mesure de la durée du chômage. L’objectif est d’inciter l’allocataire à accepter un emploi le plus vite possible.

Ce système dégressif a été très critiqué en raison de son injustice. Notamment, il relève presque du contre sens puisque la situation financière du demandeur d’emploi est en toute hypothèse meilleure en début qu’en fin de chômage, à quoi il faut ajouter qu’en début de période de chômage, le demandeur d’emploi reçoit des indemnités de licenciement. Ce n’est pas la période où ils ont le plus besoin de protection. Or, c’est à cette période que l’indemnité sera la plus élevée selon le système dégressif. A l’inverse, si le chômage se prolonge, le demandeur d’emploi voit sa situation se dégrader en même temps que son allocation chômage diminue.

La dégressivité n’est donc pas une bonne idée et a été abandonnée à partir de 2001. L’allocation actuelle n’est pas dégressive mais homogène pendant toute sa durée de versement.

Toutefois, il reste le souci d’activation puisqu’en même temps qu’il reçoit ses premières prestations d’assurance chômage, le demandeur d’emploi indemnisé doit conclure une sorte de contrat avec les organismes compétents qui détermine ces objectifs de retour à l’emploi, les efforts qu’il entend faire en ce sens et les aides, notamment en formation et en stage, qui peuvent lui être allouées. Aujourd’hui, l’indemnisation du chômage est très liée à ce dispositif plus ou moins contractuel.

En 2008, les pouvoirs publics ont franchi un nouveau pas dans ce souci d’activation des dépenses d’indemnisation du chômage puisqu’ils ont fusionné les ASSEDIC et l’ANPE par la création des organismes de Pôle emploi qui font de la recherche d’emploi et des services de l’assurance chômage.

La durée et le montant de l’indemnisation du chômage restent dépendants de la durée de cotisation et de travail antérieur au chômage dans des conditions qui restent relativement favorables au demandeur d’emploi par rapport aux pays européens comparables mais le souci d’activation des dépenses d’assurance chômage est devenu dominant dans les conventions d’assurance chômage et dans l’esprit des pouvoirs publics alors que la situation économique actuelle rend la recherche d’emploi assez problématique.

Les règles juridiques touchant l’indemnisation du chômage sont inscrites dans le code du travail, ce qui est aussi un signe du souci de lier l’indemnisation du chômage et l’emploi.

β. Les prestations au cas de dépendance

Le terme de dépendance est doté de sens très différents selon les différents versants du droit social. En droit du travail, l’expression de travailleur dépendant a à peu près le même sens que le terme de travailleur sous subordination juridique d’un employeur. Il y a quasiment synonymie entre travailleur subordonné et travailleur dépendant. La notion de travailleur dépendant est en réalité plus large que celle de travailleur subordonné au sens strict dans la mesure où elle intègre aussi par exemple les fonctionnaires.

Cette définition se retrouve aussi en droit de la sécurité sociale lorsque par exemple, le code de la Sécurité sociale considère comme affiliés aux assurances sociales du régime général les travailleurs salariés ou dépendants à quelque titre que ce soit. Au fond, est un travailleur dépendant toute personne qui est susceptible de recevoir des directives, voire des ordres, dans l’exercice de son travail. Au contraire, ce qui caractérise les travailleurs indépendants est qu’ils ne reçoivent pas de telles directives ou de tels ordres.

Ce n’est pas dans ce sens que les prestations substitutives au cas de dépendance sont abordée mais dans un sens plus pratique et physique. Dans ce sens là, on dit d’une personne qu’elle est dépendante lorsqu’elle ne peut plus pourvoir seule aux gestes essentiels de la vie quotidienne ; lorsqu’elle a donc besoin de l’aide d’une autre personne pour se lever, pour faire sa toilette, pour s’habiller…

En langage contemporain, la dépendance ainsi définie est une perte d’autonomie et elle constitue une charge supplémentaire pour la personne qui en est frappée qui est source de dépenses supplémentaires parfois très lourdes, notamment lorsque l’aide dont la personne a besoin doit être rémunérée.

La dépendance peut survenir à tout âge et peut même frapper des personnes jeunes, notamment à la suite d’un accident de voiture (paralysie). Statistiquement, les personnes dépendantes sont sans doute en majorité des personnes âgées voire très âgées. Il est assez clair que l’allongement de la durée de la vie qui est aussi un allongement de la durée de la vieillesse a pour conséquence une augmentation des cas de dépendance de la personne âgée. 1 million de personnes sont dépendantes aujourd’hui.

Ce problème est devenu un problème social et il est généralement présenté comme un risque social nouveau. En réalité, au sens technique du terme, c’est moins un risque social qu’une charge, notamment lorsque la dépendance frappe des personnes très âgées. Ces personnes ne sont plus, depuis longtemps, sur le marché de l’emploi, leur capacité de travail n’est donc plus du tout en cause.

En revanche, la dépendance est une charge supplémentaire pour la personne âgée concernée, soit qu’elle doive rémunérer les personnes qui l’aident, soit qu’il faille payer le prix de son hébergement dans un établissement spécialisé. Toute la question est de savoir comment financer ces dépenses qui menacent d’augmenter de manière importante et comment permettre à toutes les personnes dépendantes de rémunérer une aide ou de payer l’hébergement en établissement.

Au titre des efforts, il faut saluer la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées et à l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2002.

Il ne fait aucun doute que cette nouvelle allocation (l’APA) n’est pas une solution globale au problème de la dépendance et d’ailleurs, Mr Sarkozy avait annoncé une solution d’ensemble pour l’année 2011 sachant que la loi de 2001 ne serait pas suffisante. Cette solution d’ensemble a été reportée à plus tard suite à la crise de 2008 et on envisage désormais un texte nouveau pour 2013/2014 mais il est à craindre que les mêmes causes économiques et financières emportent les mêmes effets.

L’APA se présente comme une prestation d’aide sociale nouvelle et non comme une prestation de sécurité sociale. Cette prestation relève non pas du code de la Sécurité sociale mais du code de l’action sociale et des familles. Elle est rangée par le législateur dans la catégorie des prestations en nature et elle consiste pour l’essentiel dans la rémunération d’heures d’aide à domicile ou dans la prise en charge de l’hébergement en établissement.

Sa gestion est pour l’essentiel confiée au département puisqu’elle est accordée par décision du président du conseil général du département et elle est servie par le département sur proposition d’une commission présidée par le président du conseil général ou son représentant. Cette commission se prononce au vu d’une enquête très approfondie sur la situation et les besoins de la personne ; les personnes étant placées en 6 groupes suivant la gravité de la dépendance. Le contentieux de la prestation relève des juridictions d’aide sociale.

Ce n’est pas une prestation sous condition de ressources, contrairement à la plupart des prestations de l’aide sociale. On n’est donc pas vraiment dans la logique de l’aide sociale. D’autres traits du régime juridique de l’APA ne correspondent pas bien au régime ordinaire des prestations d’aide sociale. Même des personnes de revenus élevés peuvent donc être candidates à l’APA.

Or, les ressources des personnes sont prises en compte, non pas pour l’attribution de principe de l’APA, mais pour le calcul de son montant. En d’autres termes, le montant de l’APA sera d’autant plus élevé que la personne sera gravement dépendante avec de surcroît de faibles ressources. A l’inverse, ce montant sera très faible pour la personne de revenus élevés et de dépendance réduite. Le montant de l’APA sera simplement moyen pour la personne de revenus élevés et de forte dépendance ou pour la personne de revenus faibles et de dépendance limitée.

Le financement de cette APA est l’un des problèmes de la prestation puisqu’il est complexe et a été compliqué par la loi de 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées qui a créé une caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (la CNSA) et qui surtout, a posé le principe d’une journée supplémentaire de travail non rémunérée pour les salariés permettant d’allouer le produit de cette journée non rémunérée au financement de la dépendance. La loi de 2004 a eu pour conséquence de priver les salariés d’un des jours fériés jusque là chômés sans augmentation de salaire ; le produit de cette journée étant affecté au financement de la dépendance.

La question du financement est de plus en plus grave. On cherche de nouvelles ressources soit de nature fiscale, soit par une 2nde journée de travail non rémunérée mais surtout selon quel principe élargir la couverture de la dépendance.

Il y a 3 voies possibles :

– faire basculer la couverture de la dépendance dans la sécurité sociale, ce qui est appelé la création d’un 5ème risque qui serait financé par les cotisations salariales et patronales et qui fonctionnerait comme un risque de sécurité sociale. C’est une voie très peu probable parce qu’elle modifierait radicalement le régime juridique de la dépendance et qu’aujourd’hui, ce régime juridique est très étroitement lié au département et on voit mal cette compétence passer des départements aux caisses de sécurité sociale.

– transférer la couverture de la dépendance à l’assurance privée en créant une assurance obligatoire qui le serait dès un âge au moins relativement jeune, ce qui permettrait d’avoir des primes relativement élevées. Cette voie a deux graves conséquences : d’une part, l’assurance est calculée en fonction du risque et non pas du revenu donc c’est une voie difficile pour les revenus modestes et d’autre part, à supposer qu’elle soit acceptable à termes, cette voie laisse complètement de coté le problème de la couverture des personnes actuellement dépendantes et qui n’ont pas cotisé à l’assurance. On retrouve ici une des limites de la capitalisation qui est qu’elle ne résout aucun problème du présent.

– élargir et renforcer ce qui existe déjà avec une augmentation des financements et donc des prélèvements obligatoires sur les personnes. Dans la période de rigueur actuelle, cette réforme sera très difficile à mettre en œuvre.

  1. Le RMI devenu RSA

Il a été créé par une loi du 1er décembre 1988 sous le gouvernement de Monsieur Rocard. Le RMI n’est pas une prestation créée à partir de rien. En effet, il a été annoncé par une série de prestations d’esprit voisin avec l’API créée à la fin des années 70. De plus, sur un terrain local et départemental, des initiatives de création de revenus minimum communaux ou de revenus minimum départementaux se sont développés dans les années 80.

La loi de 1988 n’a donc pas été une innovation radicale mais c’est tout de même une réforme très importante parce qu’elle est d’une portée beaucoup plus large que les initiatives qui l’ont immédiatement précédées. Par exemple, si l’on compare le RMI de 1988 à l’API des années 70, l’API garantit un minimum de ressources, comme le RMI, mais à la différence du RMI, elle ne concerne qu’une catégorie spécifique de personnes dans le besoin : les parents élevant seuls un ou plusieurs enfants à charge alors qu’ils ont de faibles ressources. L’API ne concernait que les familles monoparentales. Au contraire, le RMI concerne toutes les personnes de faibles ressources quelque soit la cause de leur indigence et quelque soient les caractéristiques particulières de leur situation.

En d’autres termes, toute personne dont il apparaît que les ressources sont inférieures au plancher fixé au titre du RMI a droit désormais à une allocation au titre du RMI.

Les initiatives locales et départementales ne concernaient que les résidents dans la commune et le département alors que e RMI concerne tous les résidents sur le territoire national.

C’est une prestation absolument générale versée à tous ceux sur le territoire national dont les ressources sont inférieures à un plancher déterminé par décret.

Cette prestation est exactement égale à la différence entre le plancher de ressources déterminé par décret et les ressources personnelles de l’intéressé par hypothèse inférieures à ce plancher. C’est donc une allocation différentielle. En d’autres termes, en 1988, le montant du RMI avait été fixé à 2 000 francs mensuels. Si la personne avait des ressources de 1 500 francs mensuels, elle recevait 500 francs mensuels au titre du RMI. Si elle n’avait aucune ressource, elle recevait 2 000 francs mensuels au titre du RMI.

Ce serait faire une grande erreur sur le RMI que de le voir comme une prestation purement monétaire parce qu’au contraire, il s’inscrit dans une analyse très originale de l’indigence et de la pauvreté. En effet, pour les concepteurs de la loi de 1988, la pauvreté est certes une question d’argent et de ressources mais ce n’est pas d’abord une question d’argent. Pour eux, si la personne est pauvre, ce n’est pas d’abord parce qu’elle manque d’argent mais parce qu’elle n’est pas convenablement insérée socialement et professionnellement dans la société. On trouve ici, pour la 1ère fois, le thème de la précarité et de l’exclusion. La pauvreté n’est plus analysée principalement comme une question de manque d’argent mais comme une question de défaut d’insertion entrainant le manque d’argent. On pourrait dire qu’on n’est pas pauvre parce qu’on manque d’argent mais qu’on manque d’argent parce qu’on est pauvre pour défaut d’insertion, d’exclusion ou de marginalisation. Par conséquent, pour eux, il ne servirait à rien de se contenter d’un versement de somme d’argent au titre de l’allocation différentielle sans aider la personne et sa famille à s’insérer ou à se réinsérer dans la société.

C’est pourquoi le versement de l’allocation différentielle s’accompagne de la conclusion d’un contrat d’insertion entre le bénéficiaire et éventuellement ses proches d’un côté et d’un autre, une commission locale d’insertion (CLI) ; contrat aux termes duquel les parties définissent un parcours d’insertion et les moyens que les pouvoirs publics acceptent de mettre au service de l’accompagnement de leur cocontractant.

La conclusion de ce contrat d’insertion qui est un des aspects essentiels de la loi de 1988 a fait l’objet de commentaires abondants et d’appréciations très contrastées.

Certains se sont étonnés de ce dispositif qui leur a paru ne pas correspondre au caractère fondamental du droit au RMI car il leur a paru contradictoire, dans le même temps, d’affirmer le droit au RMI comme un droit essentiel et de le subordonner à la conclusion d’un contrat d’insertion. Cette critique n’est pas absolument convaincante car le contrat d’insertion n’est pas, dans le dispositif de la loi de 1988, une condition du versement de l’allocation différentielle. Il est plutôt un accompagnement de ce versement. Il reste la possibilité de sanctions contre un allocataire qui ne respecterait pas les termes de son engagement contractuel.

Il y a 2 limites au dispositif du RMI :

– la population concernée par le RMI et les contrats d’insertion s’est révélée être très hétérogène et notamment au regard des perspectives d’emploi. Le nombre de bénéficiaires du RMI a très rapidement augmenté et sur ce nombre important, à peine 20% avait des chances sérieuses de trouver ou retrouver rapidement un emploi. Parmi ces 20%, il y avait des personnes qui étaient très proches du marché de l’emploi (étudiants) et qui avaient simplement besoin d’un coup de pouce temporaire pour être embauché.

Au-delà de ces 20%, les autres personnes sont assez éloignées du marché de l’emploi et vont très vite avoir des difficultés à trouver un emploi stable. La seule réinsertion envisageable est une insertion sociale.

– la contradiction entre la recherche d’une insertion professionnelle pour des personnes en situation de grande précarité et un marché de l’emploi de plus en plus sévère, contraint, marqué par un chômage de masse.

Au total, le RMI semble avoir été efficace pour ce qui est d’une meilleure couverture, d’une meilleure insertion sociale des personnes isolées et d’un meilleur accès à l’emploi des personnes qui en étaient assez proches. En revanche, le RMI n’a pas amélioré significativement la situation des personnes en grandes difficultés.

Plus récemment, une loi du 1er Décembre 2008 a substitué le RSA à l’ancien RMI. Les concepteurs de la loi de 2008, au premier rang desquels Martin Hirsch, ont voulu se situer dans l’esprit et dans le sillage de la loi de 1988. Le RSA est un successeur du RMI : le plancher de ressources garanties au même niveau, l’allocation différentielle, la conclusion de contrats et des conditions d’âge et de ressources semblables.

Pour l’essentiel, ces différences sont au nombre de deux :

– le RSA est sans doute beaucoup plus centré que l’ancien RMI sur le travail et l’emploi. L’idée fondamentale est que c’est le travail qui est la véritable protection et la véritable garantie pour les personnes. Dans la loi de 1988, l’objectif était l’insertion sociale puis professionnelle alors que dans la loi de 2008, le travail est essentiel. Il faut tout faire pour amener ceux qui le peuvent à travailler et il faut supprimer ce qui, dans le RMI, pouvait désinciter à la recherche du travail et au travail.

Dans le dispositif de l’ancien RMI, si le bénéficiaire du RMI trouvait un emploi, l’allocation au titre du RMI était automatiquement réduite voire disparaissait. Ces personnes perdaient l’allocation différentielle + se voyaient octroyer des charges en plus.

Le système du RSA est tel que l’engagement dans un tel emploi soit immédiatement bénéficiaire pour la personne. Le but est que la personne puisse cumuler, au moins dans un premier temps, son allocation différentielle + son salaire.

– le RSA ne s’applique pas seulement aux personnes indigentes qui, par hypothèse, n’ont pas d’emploi mais il s’applique aussi à une nouvelle catégorie de personnes : les travailleurs pauvres, c-a-d des personnes qui ont un emploi salarié mais dont les caractéristiques sont telles que cet emploi salarié ne les sort pas de l’indigence ou de la pauvreté.

Pour les travailleurs pauvres, le RSA permet d’améliorer la rémunération des travailleurs. En d’autres termes, à la différence de l’ancien RMI qui ne s’adressait qu’à des personnes sans travail, le RSA a deux versants : le RSA socle et le RSA chapeau. Le RSA socle concerne les personnes qui n’ont pas d’activité salariée (ancien RMI) alors que le RSA chapeau, innovation de la loi de 2008, s’ajoute à la rémunération faible du travailleur pauvre pour lui permettre de bénéficier des ressource susceptibles de le sortir de l’indigence par l’addition de ses faibles revenus d’activité et de l’allocation différentielle.

Il est à craindre que le bilan du RSA soit aussi contrasté que celui de l’ancien RMI. Certes, le RSA est incontestablement plus incitatif que l’ancien RMI dans la recherche d’un emploi et la conclusion d’un contrat de travail, certes il a aussi le mérite de prendre à bras le corps la situation des travailleurs pauvres et de voir que la pauvreté n’est pas seulement un problème d’absence d’emploi mais la situation très mauvaise de l’emploi fait que le résultat du RSA ne saurait être que limité.

  • 2 L’harmonisation des régimes de sécurité sociale

On ne parle pas de l’harmonisation du système de sécurité sociale, celle ci est une question communautaire qui est celle de savoir dans quelle mesure la construction de l’UE s’accompagne d’un rapprochement des systèmes de sécurité sociale des États membres. C’est une question importante car on imagine mal une UE cohérente avec des systèmes différents d’un pays à l’autre mais en même temps, les instances européennes n’ont jamais mis en œuvre, une véritable harmonisation généralisée et volontariste. Si harmonisation, il y a, elle vient plutôt du rapprochement plus ou moins logique, lié à la situation d’ensemble des pays européens.

De cet échec relatif, il y a un signe incontestable qui est le succès, au contraire, net, non pas de l’harmonisation mais de la coordination des systèmes de sécurité sociale des pays européens. Cette coordination consiste à éviter que la libre circulation des travailleurs dans l’UE ne se retourne pas contre les travailleurs s’ils passent d’un pays à forte protection sociale à un pays à faible protection sociale.

Ici, il ne s’agit pas de l’harmonisation des systèmes européens mais de l’harmonisation des régimes de sécurité sociale à l’intérieur du système français de sécurité sociale.

Il y a eu à partir des 70’s, une sorte de retournement chez les catégories indépendantes vis à vis de la couverture sociale. Jusqu’en 1970, les indépendants se sont battus pour avoir leurs propres régimes et ils ont, en pleine connaissance de cause, demander à bénéficier d’une couverture plus limitée que celles des salariés pour limiter le poids de leurs cotisations.

Aujourd’hui, les indépendants restent très attachés à leur propre régime, l’harmonisation n’est pas l’unification, ils ne veulent pas se fondre dans le régime général. Mais ce qui a changé c’est que ceux ci souhaitent avoir une couverture sociale qui ne soit pas trop différente de celle des salariés et pas trop limitée par rapport à celle du régime général. Cette revendication très nouvelle commence dans les 70’s.

Cette harmonisation va obtenir certains résultats. Par exemple, aujourd’hui, les prestations en nature en matière d’assurance maternité sont extrêmement proches dans les deux régimes, de même, les prestations de retraite sont moins radicalement différentes qu’elles n’étaient il y a 4 décennies.

Cependant, ces progrès de l’harmonisation ont engendré de nouveaux problèmes.

  1. Les progrès de l’harmonisation

L’harmonisation n’a pas concerné les prestations familiales puisqu’elles sont quasiment universalisées, ni la réparation des accidents du travail.

Elle a surtout touché la branche maladie et la branche vieillesse, pour ce qui est de ces deux branches, elle a débuté dans les années 1970 et s’est continuellement maintenue depuis.

Cependant, l’harmonisation n’est pas l’unification et d’ailleurs, une des lois des 70’s, loi du 27 décembre 1973 dite loi Royer a annoncé «les régimes dont bénéficient les commerçants et artisans seront progressivement harmonisés avec le régime général en vue d’instituer une protection de base unique dans le respect de structure qui leur soit propre». On harmonise la couverture même dans le respect de l’autonomie.

Dans les décennies qui suivront cette loi, l’harmonisation de la branche vieillesse se confirmera et celle de la branche maladie sera mise en route avec des succès indéniables pour ce qui est des prestations en nature, très proches de celles du régime général et des succès plus limités mais réels pour ce qui est des prestations en espèce.

Cette politique d’harmonisation a donc été un succès mais qui a apporté de nouvelles difficultés.

  1. Les problèmes de l’harmonisation

Ils sont essentiellement de nature financières. Il faut en effet, financer un processus d’harmonisation qui consiste pour l’essentiel à améliorer la couverture sociale des régimes autonomes et agricole alors même que ces régimes tendent à l’époque même de l’harmonisation, à devenir démographiquement déficitaires.

En effet, dans la plupart des régimes autonomes et plus encore dans le régime agricole, les assurés sont nombreux à quitter leur activité professionnelle à l’âge de la retraite, même si celui ci est tardif, alors que les nouveaux arrivants dans le régime sont presque toujours nettement moins nombreux que les départs en retraite.

La plupart des régimes autonomes et le régime agricole dans son entier, connaissent un processus de vieillissement démographique qui se répercute évidemment sur leurs charges et aussi sur leurs ressources, par le fameux effet de ciseaux quand il y a à la fois augmentation des dépenses et baisse des ressources.

Par conséquent, la situation démographique de ces régimes à partir des 70’s aurait plutôt du conduire soit à une augmentation significative des cotisations soit à une baisse tout aussi significative des prestations soit à leur absorption pure et simple par le régime général qui est le seul régime démographiquement bénéficiaire.

Or, aucune de ces trois solutions n’étaient acceptables pour les catégories socioprofessionnelles indépendantes qui au contraire, tout en restant nettement autonomes, voulaient voir leur couverture sociale se rapprocher de celle des salariés.

La solution à ce problème difficile a été trouvée par une loi du 29 décembre 1974 qui a posé en règle, le principe dit de la compensation démographique. Selon ce dernier, les régimes démographiquement bénéficiaires c’est à dire ceux qui enregistrent davantage d’entrée d’assurés que de départ en retraite, subventionnent en partie, les régimes démographiquement déficitaires dans le cadre d’une technique qui reste très complexe, dite de compensation démographique. Chaque année, chaque exercice détermine la somme, la subvention que les régimes bénéficiaires devront verser au régimes déficitaires.

Ce système est, évidemment critiquable en soi puisqu’il conduit certains régimes à en subventionner d’autres, ce qui n’était pas prévu au départ et il ne fait nul doute, qu’il serait plus cohérent de passer à un régime unique, qui serait, pour le coup, véritablement, général. Comme ce n’est pas envisageable et du fait que les régimes spéciaux qui sont eux-mêmes déficitaires veulent pourtant perdurer, il n’y avait pas beaucoup d’autres solutions techniques que celle de la compensation démographique.

On peut voir dans cette compensation, un exemple de solidarité entre régimes comme il existe une solidarité entre les assurés sociaux. Il est clair que ce principe de compensation n’est pas un exemple très convaincant de rationalisation de notre système de sécurité sociale.

Section 3 : La rationalisation du système de sécurité sociale

C’est depuis les 70’s et 80’s du XXe siècle, que le thème de la rationalisation de notre système est passé sur le devant de la scène puisque chacun sent bien que cette rationalisation est indispensable.

Cependant, le thème de la rationalisation est un thème très ambiguë. Parce qu’il est susceptible d’orienter dans deux directions assez différentes.

Dans un premier sens, la rationalisation est une mise en ordre d’un ensemble d’un dispositif peu cohérent. Dans ce sens là, la rationalisation n’est pas vraiment contestable ni comme objectif ni comme processus. Dans un sens plus discutable, la rationalisation peut ressembler au rationnement lorsqu’il s’agit surtout de réduire les dépenses de façon drastique, rigoureuse.

De cette ambiguïté, il y a un exemple assez significatif qui est celui de l’ancienne allocation de parents isolés.

Avant 2008, celle ci était une prestation familiale autonome consistant à une garantie de ressources catégorielles d’un niveau de garantie supérieur à celui du RMI. Évidemment, il y a eu des critiques sur ce qui apparaissait pour certains de doublon redoutable, pourquoi maintenir cette allocation à partir du moment où il existait une garantie de ressources générales. On invoquait au titre de la rationalisation et de la simplification, la nécessité d’intégrer l’API dans le RMI.

Mais évidemment cette proposition de rationalisation cachait assez mal une volonté de réduire la sécurité sociale, si cette absorption dans le RMI avait pour effet de réduire le montant des ressources garanties aux parents isolés.

Par conséquent, les propositions de rationalisation ressemblent assez souvent à des tentatives de rationnement et de limitation de la couverture sociale.

La loi du 20 décembre 2008 a intégré l’allocation de parents isolés dans le RSA sans pour autant réduire le montant particulier des ressources garanties pour les parents isolés. Cette loi a démenti les craintes de ceux qui redoutent la rationalisation rationnement.

Évidemment, on peut se demander jusqu’à quand, le montant des ressources garanties ne sera pas ramené au montant des personnes en difficulté en général.

Quelque soit le débat sur le coté positif ou non du processus de rationalisation, celui ci est assez nettement engagé aujourd’hui, au point que l’on ne peut pas l’envisager dans son ensemble.

Donc deux exemples :

— rationalisation par régulation

— rationalisation par distinction de principes directeurs

  • 1 La rationalisation par régulation

De cette rationalisation par régulation, il y a de nombreux exemples, dont celui du conventionnement médical.

Les conventions médicales sont des accords collectifs concluent entre un ou plusieurs régimes de sécurité sociale et un ou plusieurs syndicats de médecins ou de profession médicale, en vue, notamment, de s’entendre sur le montant des honoraires médicaux demandé aux assurés sociaux se soignant, honoraires dits conventionnels sur la base desquels seront calculés les remboursements ou les prises en charge des caisses de sécurité sociale.

  1. La logique du conventionnement médical

Il faut d’abord prendre conscience que l’instauration en France du système de sécurité sociale à partir de 1945 et d’une assurance maladie-maternité n’a pas pour autant conduit à faire disparaître la médecine libérale ce qui aurait pu être le cas si avait été organisé une médecine de caisse ou une médecine salariée ou une médecine publique.

Or s’il n’y a pas nécessairement contradiction entre une couverture sociale des dépenses de santé et la médecine libérale, il y a au moins le risque de fortes tensions principalement sur le terrain des honoraires demandés et des remboursements effectués par les caisses de sécurité sociale.

En effet, dans un système de ce type, où il y a une protection sociale et en même temps une médecine libérale, ceux qui décident les dépenses ne sont pas ceux qui les paie.

Ceux qui décident les dépenses sont les médecins et leurs clients et ceux qui en supportent la charge sont moins les clients que les caisses qui vont être amenées à rembourser les dépenses. Les ordonnateurs ne sont pas les payeurs, c’est évidemment une situation dangereuse, puisque dans un système de ce type, le payeur n’a pas la maitrise des dépenses qu’il devra pourtant payer directement ou rembourser.

Dans ce système, il y a deux risques opposés :

— soit le payeur accepte de rembourser quelque soit les honoraires demandés : le payeur risque de se retrouver en cessation de paiement. Donc le risque de faillite des organismes de sécurité sociale

— soit le payeur n’accepte pas de ne pas maitriser la dépense : il y a le risque que les remboursements deviennent très inférieurs aux dépenses réellement exposées. Là ce sont les assurés sociaux qui risquent de se retrouver en grande difficulté.

Il faut bien dire que la distinction de l’ordonnateur de la dépense et de celui qui assume la charge est lourde de péril.

En France, la solution trouvée a été assez différente et c’est celle du conventionnel. C’est à dire que les syndicats de médecin et les caisses s’accordent périodiquement et régulièrement sur le montant des honoraires conventionnels demandés aux assurés sociaux et c’est sur ce montant conventionnellement décidé que les assurés sociaux seront effectivement remboursés ou pris en charge.

L’idée à la fois simple et astucieuse est de faire reposer la solution sur le contrat entre les syndicats de médecins et les caisses. Ce contrat ne porte pas atteinte à l’existence d’une médecine libérale puisque la liberté consiste à pouvoir contracter. En même temps, ce contrat s’il est conclu, donne aux organismes de sécurité sociale, la garantie que les honoraires ne seront pas excessifs par rapport aux possibilités de remboursement et donne aux assurés sociaux, la garantie que les remboursements ou les prises en charge ne seront pas dérisoires par rapport aux honoraires effectivement demandés.

Le conventionnement médical est la bonne solution quand on veut garder à la fois, un véritable système de sécurité sociale et une médecine véritablement libérale. Mais cette logique du conventionnement médical est beaucoup plus simple à exposer dans son principe qu’à mettre effectivement en pratique. En effet, depuis 1985, l’histoire du conventionnement médical est extrêmement tumultueuse.

  1. Les avatars du conventionnement médical

Le conventionnement médical a été vite mis en œuvre mais dans les premiers temps, il a été mis en œuvre dans le cadre départemental c’est à dire dans chaque département, la caisse primaire locale et les syndicats locaux des médecins s’entendaient ou non sur une convention médicale.

S’ils arrivaient à un accord, les assurés sociaux du département étaient remboursés sur la base des honoraires demandés.

A l’inverse, les assurés sociaux étaient remboursés sur la base d’un tarifs d’autorité, très inférieur aux honoraires demandés.

Cette idée de département correspondait assez bien à la vision mutualiste qui prévoit que c’est au niveau le plus près du terrain que l’on doit gérer la couverture sociale.

Le résultat est qu’à la fin des 50’s, il y avait quand même plus d’une trentaine de départements (dont Lyon, Paris..) qui n’avaient pas de convention médicale et dans lesquels, par conséquent, les assurés sociaux n’étaient pas correctement remboursés. Même si à l’époque le principe de l’égalité était moins présent il était malgré tout choquant que certains soient mal remboursés.

Dès les débuts de la 5e République, le Gouvernement de De Gaulle a essayé de s’attaquer à ce problème en tendant d’ouvrir une brèche dans l’opposition des syndicats de médecins dans les départements non conventionnés.

Un décret du 12 mai 1960 a permis aux médecins des départements non conventionnés, d’adhérer à une convention type en dépit que les syndicats majoritaires du département n’aient pas voulu signer de convention. Ces derniers, on les exposait à être désavouer de leur base puisque l’on permettait à des médecins indépendants d’adhérer à ces conventions.

La consultation de la presse de l’époque surprend aujourd’hui par la violence du ton et de la polémique tournant autour du décret de 1960. Le conflit a duré une dizaine d’années jusqu’à ce que les syndicats décident de changer de stratégie. Le décret de 1960 a eu un certain succès et les syndicats étaient menacés d’être désavoués par leur base. De leur coté, les pouvoirs publics ne voulaient pas que ce conflit s’éternise et étaient prêts à faire certaines concessions.

En définitive, en 1971, les pouvoirs publics et les syndicats sont arrivés à un accord, modifiant très sensiblement le dispositif. A partir de cette date, la convention devient nationale. Si la convention est signée et agréée par le Gouvernement, elle s’appliquera à l’ensemble des médecins sur le territoire national sauf retrait individuel des médecins préférant ne pas être conventionnés.

Le système du conventionnement national est un meilleur système que celui du conventionnement départemental puisqu’il rétablit l’égalité entre les différents départements et parce qu’il pèse en faveur de la conclusion d’une convention plus fortement que le système départemental.

En même temps, les pouvoirs publics, qui au fond dans cette affaire étaient doublement gagnants, acceptèrent de faire un pas vers les syndicats en intégrant à leur demande, une disposition dans le Code de la sécurité sociale, rappelant les principes essentiels de la médecine libérale. Le texte aujourd’hui, figure à l’article L 162-2 du Code de la sécurité sociale.

Ce dispositif national a assez bien fonctionné dans les 10 premières années, c’est à dire jusque vers 1980 c’est à dire jusqu’à ce que la crise économique devienne très profonde. Dans ces 10 premières années, il a été relativement facile de conclure des conventions, ensuite, le nombre de médecins **refusant le conventionnement s’est révélé extrêmement faible (1%), il s’agissait pour l’essentiel de médecins établis dans de très grandes villes, aux spécialités très pointues et une clientèle choisie et préférant demander des honoraires très élevés. Donc succès de la loi de 1971.

Les choses vont se gâter assez vite à partir de 1980 parce que la crise économique, le chômage, les problèmes financiers des organismes de sécurité sociale vont créer une situation dangereuse laissant de moins en moins de marge aux négociateurs.

Les médecins vont demander à chaque négociation, un relèvement des honoraires conventionnels et de leur coté, les organismes de sécurité sociale vont s’y opposer ou freiner ces demandes de plus en plus fortement.

De telle sorte que dans la troisième convention, est mis en place un nouveau secteur parmi les médecins conventionnés qui est celui du secteur 2.

Dans le secteur 1, les médecins conventionnés pratiquent purement et simplement les honoraires conventionnels.

En revanche, le secteur 2, les médecins peuvent pratiquer des honoraires supérieurs aux conventionnels, leur client restant remboursé sur la base des honoraires conventionnels.

Il y a trois catégories de médecins : les médecins conventionnés du secteur 1, les médecins du secteur 2 et les médecins non conventionnés.

La création du secteur 2 a suscité de très forte polémique et a transformé le visage de la médecine en France. On voit bien la raison du secteur 2. Il s’est agi pour les organismes et les pouvoirs publics, de donner satisfaction partielle à la revendication de la revalorisation des honoraires sans pour autant que cette revalorisation s’applique à l’ensemble des médecins.

Le message était le suivant : soit vous vous contentez du faible relèvement des honoraires du secteur 1 ou bien vous ne vous en contentez pas et vous passez dans le secteur 2 pour pratiquer des honoraires plus importants et les clients restant remboursés sur les honoraires conventionnés, avec le risque de perdre des clients.

Le risque de ces deux secteurs a été très vite dénoncé avec celui de la médecine à deux vitesses : une médecine des pauvres et une médecine des riches. Autrement dit, resteront dans le secteur 1, les médecins modestes et dans le secteur 2, les médecins de quartier aisé. La conclusion la plus redoutable serait que les meilleurs médecins s’installent dans le secteur 2 et que seuls les riches bénéficient d’une meilleure médecine.

Au bout du compte, plus de 30 ans après, le sentiment sur ce double secteur est assez partagé. Il n’est sans doute pas exact de prétendre qu’il aurait contribué à une médecine qui serait purement et simple discriminatoire avec une clientèle aisée et une clientèle en difficulté. Cependant, une partie des craintes exprimées en 1980 s’est quand même réalisée, l’opposition n’est pas tellement entre meilleur et moins bon médecin mais plutôt entre médecine générale et médecine spécialisée.

Ce qui est certain c’est que cette dualité des secteurs a compliqué l’analyse de la couverture maladie et rend moins clair les rapports entre les assurés sociaux, leurs médecins et les organismes.

Cependant, par la suite, le conventionnement a suivi d’autres avatars encore plus redoutable, notamment parce que le conventionnement a du s’accommoder d’une prise en main comptable de la branche maladie par les pouvoirs publics.

Jusqu’en 1996, les parties au convention médicale sont au moins, relativement libres de fixer les dispositions conventionnelles. En réalité, les pouvoirs publics suivent de très près la négociation de la nouvelle convention et que celle ci n’entrera en vigueur que si le Gouvernement le souhaite.

Ils restaient quand même assez libres et en témoigne les controverses qui jusqu’en 1996 touchent la façon de maitriser l’augmentation des dépenses de santé, controverses qui opposent les tenants d’une maitrise comptable et une maitrise médicalisée.

La maitrise comptable estimait que pour chaque année, il fallait fixer une enveloppe de dépenses de santé à ne pas dépasser, dans le cas contraire, les organismes n’auraient pas continué leurs remboursements. De l’autre coté, la maitrise médicalisée pensait plutôt qu’il fallait en concertation avec les médecins, réfléchir à des protocoles de soins à la fois efficaces et le moins couteux possible.

Cette discussion entre ces deux maitrises montrait bien que les partenaires sociaux étaient relativement libres dans les négociations.

Les choses ont changé avec le plan Juppé de 1996 non pas que l’on soit passé à une maitrise comptable pure et simple mais parce que l’évolution des dépenses d’assurance maladie est désormais très strictement encadrée, de telle sorte que les conventions médicales finissent par être de simples décisions.

Depuis 1996, le Parlement vote chaque année, en décembre, une loi de financement de la sécurité sociale pour l’exercice suivant. Dans cette loi, le Parlement vote la fixation d’un objectif particulier que l’on appelle l’ONDAM (l’objectif national des dépenses d’assurance maladie). Il prévoit les dépenses provisionnelles de la branche maladie pour l’exercice suivant. On pourrait penser que ce vote fait passer à une maitrise comptable puisque normalement, la branche maladie ne devrait pas dépenser dans l’exercice suivant, davantage que ce qui a été déterminé par le Parlement dans le l’ONDAM. De toute façon, on voit mal comment, le conventionnement médical ne serait pas impacté par les lois de financement de la sécurité sociale et par la détermination annuelle d’un ONDAM.

En réalité, la situation est un peu plus complexe, nous ne sommes pas dans une véritable maitrise comptable. Nous serions dans une telle situation, si le dépassement de l’ONDAM était énergiquement sanctionné soit par des pénalités touchant les médecins et les professions de santé soit par des pénalités touchant les assurés sociaux soit par des pénalités touchant à la fois les uns et les autres. Cela revient à montrer son impossibilité car les pouvoirs publics et les caisses nationales ne peuvent prendre le risque d’un conflit avec les syndicats des médecins et l’opinion publique, en arrêtant certains remboursements ou en limitant les remboursements aux motifs que l’ONDAM a été dépassé. En réalité, le véritable problème est beaucoup moins celui de savoir si l’on est en présence d’une médecine comptable que de savoir si l’ONDAM est un service sérieux.

En fait, les pouvoirs publics préfèrent plutôt que des pénalités, jouer de tout un registre d’instrument qui essaye de faire respecter un chiffrage qui ne soit pas trop éloigné de l’ONDAM, notamment, il est fixé, sur des périodes pluri annuelles, des conventions nationales d’objectif et de gestion qui tentent d’approcher le plus près possible du chiffre de l’ONDAM.

Pour autant, les dispositions des lois de financement de la sécurité sociale ont un effet au moins indirect sur le conventionnement médical parce qu’on voit mal les organismes nationaux de sécurité sociale accepter de signer des conventions qui contrediraient les lois de financement ou qui prendraient beaucoup de libertés avec les objectifs financiers des lois de financement de la sécurité sociale.

  1. L’identité juridique des conventions médicales

Cette identité a évolué avec l’évolution du système de sécurité sociale et elle est aujourd’hui assez complexe. Ce qui est certain c’est qu’il s’agit d’accords collectifs ou de contrats collectifs qui sont de nature administrative. Ces accords sont négociés et conclus entre d’une part, un ou plusieurs syndicats représentatifs de médecins et d’autre part, des instances représentatives des caisses nationales de la sécurité sociale notamment UNCAM et depuis peu UNOCAM.

L’intégration de cette dernière dans le cadre des négociateurs et signataires est révélatrice de l’importance qu’a prise l’assurance complémentaire et de la relative régression de la protection de base. En effet, la signature de l’UNOCAM est indispensable dans les conventions où c’est la couverture complémentaire qui assure la majorité des remboursements.

Les conventions peuvent concernées soit l’ensemble des médecins soit d’un coté, les médecins généralistes et de l’autre, les médecins spécialistes. A l’issue de la négociation, s’il y a un accord, celui ci ne peut entrer en vigueur que s’il est homologué par deux ministres : de la santé et de la sécurité sociale. Cette homologation doit être donnée rapidement, dans un délai de 21 jours et peut tout à fait être donnée tacitement. En revanche, s’il n’y a pas d’accord, il faut passer par un règlement arbitral.

Compte tenu de l’encadrement dans lequel les conventions sont insérées, même si la négociation de ces conventions est difficile, la jurisprudence notamment celle du Conseil Constitutionnel, y voit des actes règlementaires alors qu’il s’agit au départ d’accords collectifs.

  • 2 La rationalisation par distinction de principes directeurs

Il s’agit de la distinction des principes d’assurance et de solidarité qui est une distinction qui s’est implantée dans notre système de sécurité sociale à partir des 80’s. Tout d’abord, en étant réalisé hors sécurité sociale, dans le cadre de l’indemnisation du chômage et ensuite en s’implantant dans la sécurité sociale elle-même, principalement, dans la branche vieillesse.

Cette distinction consiste à opposer deux types de prestations : les prestations fondées sur le principe de l’assurance et qui sont donc contributives. Cela signifie qu’elles sont financées par les assurés sociaux eux-mêmes. Les prestations fondées sur un principe de strict solidarité qui sont non contributives et financées par l’impôt. L’idée est que c’est la confusion de ces deux prestations qui crée des problèmes financiers parce qu’elle met à la charge des organismes, des dépenses de solidarité qui ne devraient pas exposer car la solidarité doit être gérée par l’État. A l’inverse, les prestations contributives doivent être gérées par les partenaires sociaux et par les représentants des assurés sociaux.

  1. Les mérites et faiblesses de la distinction

Cette distinction a, au moins, toutes les apparences de la logique. Cette dernière est que, en effet, il y a une forte distinction entre les prestations financées par leurs bénéficiaires (assurés sociaux) et les prestations financées par d’autres que leurs bénéficiaires, c’est à dire les prestations non contributives.

Il est, de même, extrêmement logique que les prestations contributives soient gérées par des représentants des bénéficiaires et ceux qui les payent et qu’inversement, les prestations non contributives soient gérées par l’État. On peut penser que la confusion qui régnait entre ces deux prestations avant 1980 pouvait être un élément de désordre et de déséquilibre financier. Toute opération de clarification financière est à priori, utile.

Pour autant, ces mérites qui ne sont pas négligeables, ne sont pas non plus sans faiblesse. La distinction présente des faiblesses assez graves. La principale faiblesse est que la distinction de l’assurance et de la solidarité méconnait ce qui fait l’originalité même de la sécurité sociale qui est, au contraire, la fusion intime de l’assurance et de la solidarité, notamment dans le calcul des cotisations d’assurance sociale.

En effet, les assurances sociales sont des prestations contributives puisqu’elles sont financées par les assurés mais celles ci sont calculées selon un principe de solidarité puisqu’elles sont calculées non pas en fonction du risque mais en fonction du revenu.

Par conséquent, la sécurité sociale n’est pas fondée sur un principe d’assurance mais sur un principe d’assurance sociale, c’est à dire sur une fusion de l’assurance et de la solidarité qui est le trait distinctif de la sécurité sociale. Par conséquent, vouloir distinguer les deux éléments, c’est en réalité, contester l’existence même de la sécurité sociale et c’est à terme, préparer sa disparition puisque tant qu’à distinguer les deux termes, arrivera un jour où l’assurance reviendra aux assurances privées et la solidarité reviendra à l’assistance.

Cette critique n’anéantit pas la distinction des prestations contributives et des prestations non contributives. En effet, distinguer celles ci, a du sens, il faut malgré tout montrer que cette distinction est dangereuse. En effet, s’il est clair que la sécurité sociale est essentiellement fondée sur des prestations contributives, il ne faut pas s’interdire dans le cadre de la sécurité sociale, d’introduire, quand c’est nécessaire, du non contributif.

Exemples :

— les prestations en nature de l’assurance maladie sont contributives, mais les prestations versées aux ayants droit ne sont pas contributives parce que l’assuré social ne paye pas de cotisation supplémentaire pour ceux ci. On peut soutenir que les prestations en nature de l’ayant droit ne sont pas contributives.

— Dans la branche vieillesse, la prestation de retraire est contributive mais la pension de réversion est non contributive car le conjoint survivant n’a jamais payé de cotisation. Serait-il logique de dire que les pensions de retraite restent dans la sécurité sociale et sortir les pensions de réversion ? Non.

— L’assuré social qui n’a pas suffisamment cotisé et qui n’a pas acquis des droits suffisamment ne va pas obtenir une pension de retraite mais un minimum vieillesse qui n’est pas contributif. Serait-il logique de faire sortir ce minimum de la sécurité sociale et de le faire gérer par l’État ? Non.

La distinction entre les prestations contributives et non contributives est cohérente mais dangereuse parce qu’elle risque d’enfermer le non contributif et de le donner à l’État ce qui n’est pas avantageux.

  1. Les résultats et les limites de la distinction
  2. Les résultats

Le premier résultat est assez ancien puisqu’il remonte à 1984 puisqu’il porte sur l’indemnisation du chômage avec la distinction très nette d’un régime d’assurance chômage d’un coté et d’un régime de solidarité de l’autre. Le régime d’assurance chômage gère les prestations contributives qui sont financées par des cotisations patronales et salariales assises sur le salaire et qui sont versées pendant une durée limitée en fonction d’ailleurs de la durée antérieure de cotisation. La principale prestation de ce régime d’assurance chômage étant l’allocation du retour à l’emploi.

Ce régime d’assurance chômage est géré par les partenaires sociaux.

De l’autre coté, le régime de solidarité chômage concerne les prestations non contributives qui sont financées par l’impôt et gérées par les pouvoirs publics. La principale prestation étant l’ASS, allocation solidarité spécifique. Cette allocation est réservée soit à ceux qui n’ont jamais cotisé ou pas assez pour avoir droit à l’assurance chômage soit à ceux qui ont épuisé leur droit à l’assurance chômage parce qu’ils ont dépassé la durée de chômage indemnisée.

Des accords entre ces deux régimes permettent un système de guichet unique c’est à dire que les allocataires ont toujours affaire au même guichet, mais ce sont deux régimes distincts.

Les prestations d’assurance chômage sont plus élevées que les prestations de solidarité chômage.

Par la suite, cette idée de distinction s’est implantée en sécurité sociale elle-même, plus précisément sur le terrain de la couverture vieillesse avec la loi du 22 juillet 1993, la création du fonds de solidarité vieillesse (FSV) qui s’est substitué le 1 janvier 1994 à l’ancienne fonds national de solidarité. Le FSV est un établissement public de l’État à caractère administratif qui a pour objet de financer tout ce qui dans la branche vieillesse est non contributif et relève à ce titre, de la solidarité nationale. Il s’agit essentiellement, des prestations vieillesse non contributives c’est à dire des prestations qui constituent le minimum vieillesse pour ceux qui n’ont pas cotisé ou insuffisamment pour se constituer une retraite décente mais il s’agit aussi des avantages non contributifs qui viennent compléter la pension de retraite.

  1. Les limites

Il est possible que la distinction de l’assurance et de la solidarité est atteint ses limites parce que l’on constate qu’elle ne s’est pas étendue hors de la branche vieillesse dans le système de la sécurité sociale. Il avait été question dans les 90’s, pourtant, que cette distinction s’implante également dans la couverture maladie, on aurait ainsi crée un EPA qui aurait géré les prestations non contributives de l’assurance maladie et notamment les prestations en nature versées aux ayants droit ou à l’occasion de dépenses exposées par les ayants droit.

Ce projet était avancé avec une certaine insistance. Mais il ne s’est pas réalisé car les promoteurs de ce projet ont été pris de vitesse par les pouvoirs publics au moment de la création de la CMU par la loi du 27 juillet 1999. Or la CMU, loin d’opposer le contributif et le non contributif, se présente comme une couverture qui est tantôt contributive et tantôt non contributive selon que les ressources de l’assuré social sont ou non supérieures à un plancher. Si elles sont inférieures, la couverture est non contributive, si au contraire, si les ressources sont supérieures au plancher, la couverture sera contributive et l’assuré payera des cotisations avec un taux à 8%.

Chapitre 4 : Le système français de sécurité sociale à l’épreuve des remises en cause

Période qui se caractérise par une triple incertitude susceptible d’entrainer des remises en cause, une incertitude sur les moyens de financement de la sécurité sociale, sur l’organisation (les rapports avec les pouvoirs publics) et sur les fins ou finalités ultimes de la sécurité sociale.

Section 1 : L’incertitude quant aux moyens

Il s’agit ici d’une incertitude sur les moyens de financement qui n’est pas un débat théorique mais au contraire une discussion. Il s’agit du débat sur la fiscalisation du financement de la sécurité sociale.

  • 1 Le débat sur la fiscalisation

Faut-il continuer à financer la sécurité sociale exclusivement ou majoritairement par des cotisations assises sur le salaire ou faut-il passer à un financement majoritaire ou exclusif par l’impôt, frappant tous les revenus voire le capital ou le patrimoine ?

Depuis 1945, la sécurité sociale a été et reste, majoritairement financée par des cotisations, mais depuis quelques années, est apparu un financement par l’impôt, encore minoritaire mais de plus en plus significatif.

Le débat porte sur les mérites comparés de l’impôt et des cotisations est nettement ouvert. C’est un débat qui porte à la fois sur le terrain de la justice et sur celui de l’efficacité.

  1. En termes de justice

Du point de vue de la justice, il faut reconnaître que l’impôt tout au moins, l’impôt direct portant directement sur les revenus ou sur le patrimoine a incontestablement, des mérites supérieurs à ceux des cotisations.

En effet, les cotisations par hypothèse, ne frappent que les revenus du travail alors que l’impôt peut frapper tous les revenus et également le capital ou le patrimoine. A priori, il paraît plus juste de frapper tous les revenus, le capital et le patrimoine que de frapper seulement les revenus du travail.

Cela paraît d’autant plus juste que beaucoup de prestations de sécurité sociale s’adressent aujourd’hui non seulement aux travailleurs mais à des personnes qui n’ont pas nécessairement d’activité professionnelle, comme les prestations familiales et la CMU.

Avec a généralisation de la couverture maladie et l’universalisation de la CMU, il paraît logique que le financement soit élargi à d’autres sources que les seuls revenus du travail.

Sur un terrain plus technique, l’impôt présente aussi un autre avantage en matière de justice dans les prélèvements. En effet, le taux de l’impôt peut être progressif c’est à dire qu’il peut augmenter avec les tranches de revenu alors que le taux des cotisations est toujours fixe quelque soit le montant des revenus.

En définitive, en termes de justice, on ne voit pas ce qui plaide en faveur des cotisations par rapport aux impôts directs. Les impôts indirects c’est à dire ceux sur les dépenses sont beaucoup moins justes.

  1. En termes d’efficacité et d’opportunité

Ici, à nouveau l’impôt prend l’avantage mais ce n’est pas, ici, un avantage incontestable. En effet, ayant une assiette plus large c’est à dire frappant tous les revenus et pas seulement ceux du travail mais également le capital et le patrimoine, l’impôt, par hypothèse, est susceptible d’avoir un produit plus important que les cotisations. Par conséquent, à la fin de l’opération des prélèvements, le produit relevé par l’impôt sera plus élevé que celui des cotisations. De plus, cette différence d’efficacité est d’autant plus marquée en période de chômage. En effet, dans une telle période, le produit des cotisations est menacé par le chômage alors que le produit de l’impôt est menacé mais pas dans les mêmes conditions puisqu’il frappe d’autres revenus qui sont autres que le travail. En période de fort chômage, il faut mieux un financement par l’impôt que par les cotisations.

Quels avantages restent-ils pour les cotisations ?

Il y a tout de même des points forts, favorables aux cotisations, le plus important d’entre eux est que les cotisations professionnelles maintiennent un lien étroit entre le travail et la sécurité sociale, construisant ainsi un véritable statut social du travailleur qu’il s’agisse des travailleurs salariés ou aujourd’hui aussi des travailleurs indépendants. C’est aussi le financement par cotisation qui permet aux représentants des assurés sociaux et des employeurs de gérer par l’intermédiaire de leurs représentants les conseils d’administration des caisses de sécurité sociale.

Enfin, c’est ce financement qui donne aux travailleurs, le sentiment que dans une certaine mesure, la sécurité sociale reste leur affaire.

Il est clair que tout cela disparaitrait si le financement par cotisation était entièrement remplacé par un financement par l’impôt. En réalité, une fiscalisation complète du financement de la sécurité sociale modifierait très profondément la nature même de la sécurité sociale qui deviendrait progressivement un service public absolument comme un autre et dont la gestion par les représentants des assurés sociaux, n’aurait plus de sens.

Du reste, il est aujourd’hui assez peu vraisemblable que l’on aille rapidement vers une fiscalisation complète du financement, le financement par l’impôt est encore aujourd’hui assez nettement minoritaire. Cependant, il ne faut pas se cacher que la fiscalisation a déjà connu des progrès importants qu’il faut examiner en droit positif.

  • 2 L’émergence de la fiscalisation du financement de la sécurité sociale

Cette émergence n’est pas toujours complètement ni suffisamment perçu, car à coté d’une fiscalisation déclarée c’est à dire une fiscalisation explicite, il y a une fiscalisation masquée qui est en effet, masquée par des procédés ou des techniques qui n’évoquent pas directement l’impôt mais qui en définitive accroissent le rôle de l’impôt dans le financement de la sécurité sociale.

  1. La fiscalisation masquée

On peut parler de fiscalisation masquée chaque fois qu’un dispositif revient au moins indirectement et implicitement à accroitre la part de l’impôt dans le financement de la sécurité sociale. Les exemples de fiscalisation masquée sont assez nombreux. Le principal d’entre eux, étant celui qui est constitué par les différentes exonérations de charge sociale entrainées par les politiques de l’emploi.

En effet, les politiques qui tendent à favoriser l’emploi et à inciter à l’embauche, n’ont pas beaucoup d’armes mais elles ont celles de l’exonération temporaire des cotisations de sécurité sociale pour les employeurs qui acceptent d’embaucher dans des conditions difficiles ou qui acceptent d’embaucher des publics et des demandeurs d’emplois, en situation difficiles (séniors et jeunes demandeurs d’emplois). En contrepartie de ce risque, les employeurs se voient pour l’emploi ainsi crée, bénéficier d’une exonération temporaire de cotisations patronales et parfois, celles ci concernent aussi les cotisations salariales.

Ce type de dispositif s’explique par la considération qu’une des causes du chômage se trouve dans le cout trop élevé du travail salarié et notamment dans le poids trop important des charges sociales. C’est la raison pour laquelle ces exonérations sont mises en place.

Évidemment, ces exonérations qui relèvent de la compétence du législateur, ont pour conséquence immédiate, une réduction des ressources de la sécurité sociale, en une période où la sécurité sociale est pourtant gravement déficitaire. Dès lors, de deux choses l’une, ou bien ces exonérations ne sont pas compensées et elles aggravent le déficit de la sécurité sociale et en définitive, la politique de l’emploi est financée au détriment de la sécurité sociale ou bien ces exonérations sont compensées par l’État qui va verser une subvention aux caisses de sécurité sociale à hauteur du produit des exonérations (l’État paye aux caisses, l’équivalent que les cotisations donnaient). Évidemment, cette compensation se fait sur le budget de l’État avec des sommes qui sont financées par l’impôt. Dans les exonérations de cotisations, on voit comme si c’était l’impôt qui payait les cotisations. Évidemment, cela revient à augmenter la part réelle de l’impôt dans le financement de la sécurité sociale.

Or, ils e trouve que le législateur est allé faire de la compensation financière, une règle de principe puisque la loi du 25 juillet 1994 a précisé que «toute mesure d’exonération totale ou partielle de cotisation de sécurité sociale donne lieu à compensation intégrale au régime concerné par le budget de l’État pendant toute la durée de son application». → Article L 131-7 du Code de la sécurité sociale. C’est à dire que lorsqu’il y a exonération, il y a compensation par l’État.

Il est vrai que, d’une part, la disposition de l’article L 131-7 n’a qu’une valeur législative, elle n’a pas à priori de valeur constitutionnelle. Le principe de compensation financière n’est pas un principe de valeur constitutionnelle donc rien n’empêche le législateur à l’occasion d’une exonération de préciser qu’elle ne sera pas compensée mais il faudra qu’il le précise sinon il y a lieu à compensation. Cet article issu de la loi de 1994 dispose que si le législateur ne dit rien, il y a lieu à compensation. D’autre part, même s’il y a lieu à compensation, celle ci peut tarder à venir, les pouvoirs publics peuvent ne pas la verser tout de suite. Par conséquent, il ne faut pas penser que le vote de cette loi a réglé le problème. Quand c’est le cas, il s’agit d’une fiscalisation masquée. Certes, ces exonérations sont provisoires mais vu qu’elles se renouvellent, il y a quand même une part des cotisations qui sont concernées.

  1. La fiscalisation déclarée

L’exemple type est la fameuse CSG (contribution sociale généralisée) crée par la loi de financement de 1991, du 29 décembre 1990. La CSG est devenue un impôt majeur dans le système français puisque son produit est assez largement supérieur à celui de l’impôt sur le revenu. Il faut savoir que le budget de la sécurité sociale est supérieur à celui de l’État.

Cela ne veut pas dire que le droit de la sécurité sociale est devenue la branche du droit la plus importante mais dans l’organisation actuelle de l’État, le système de sécurité sociale est une pièce majeure. Mais la CSG n’est pas la seule, il existe également une fiscalisation déclarée hors CSG.

  1. La fiscalisation déclarée hors CSG

Il s’agit de toutes les impositions qui participent au financement de la sécurité sociale et qui ne rentrent pas dans la contribution sociale généralisée. Ces impositions ont toujours plus ou moins, existé. Il y a sans doute, depuis 1945, jamais eu de période où l’impôt n’ait en rien participé. Il y a toujours eu des contributions frappant certaines boissons alcoolisées ou médicaments au profit de la sécurité sociale.

La nature juridique exacte de ces contributions a pu faire difficulté et leur qualification en impôt a pu être parfois contestée pour deux raisons :

— ces taxes et contributions sont souvent affectées directement et explicitement au système de sécurité sociale ou d’un régime de sécurité sociale. Or, l’une des caractéristiques de l’impôt est qu’en principe, il n’a pas d’affectation spécifique. Le fait que ces contributions aient une affectation, a fait douter l’impôt.

— La raison d’être de ces taxes est étroitement liée aux problèmes financiers de la sécurité sociale. S’il y a une contribution au profit de la sécurité sociale sur certains alcools c’est parce que la consommation de ces produits créée un certain nombre de maladies qui vont représenter autant de charges pour les caisses de sécurité sociale.

Pour autant, le Conseil Constitutionnel a le plus souvent considéré que ces contributions faisaient parties des impositions de toute nature visées par l’article 34 de la Constitution, qui suivent le régime juridique des impôts purs et simples c’est à dire qui sont de la compétence exclusive du Parlement. Par conséquent, ces contributions sont bien un élément de fiscalisation déclarée du financement de la sécurité sociale même si leur produit est assez modeste.

Toujours dans cette fiscalisation déclarée hors CSG, il faut citer une contribution proche de celle ci qui est la CRDS (contribution aux remboursements de la dette sociale). La CRDS a été institué dans le cadre du plan Juppé par une ordonnance du 24 janvier 1996. Elle était au départ destinée à apurer le déficit des années 1994 à 1996 en finançant la nouvelle caisse d’amortissement de la dette sociale appelée la CADES. Cette dernière est financée par la CRDS et destinée à apurer le déficit.

Cette disposition était présentée comme provisoire. On a levé cet impôt, le temps de rembourser le déficit. Une fois fait, l’impôt disparaitrait, une période de 13 ans était prévu donc jusqu’à 2009. Aujourd’hui, la CRDS existe encore, certes elle a abondé les caisses mais le déficit a continué dans les années ultérieures.

C’est un impôt assez bien pensé parce qu’il correspond bien à ce que les spécialistes de la fiscalité considèrent comme les meilleurs standards de l’impôt. Il existe deux standards dont, l’impôt de taux très modeste mais sur une assiette très large. La CRDS correspond à ce profit puisqu’elle porte sur l’ensemble des revenus du travail ou du capital et son taux est de 0,5%. La CRDS fait également partie des impositions de toute nature en dépit de son affectation exclusive au remboursement de la dette sociale et la CRDS relève de la compétence exclusive du législateur tant pour la détermination de son assiette que de son taux.

  1. La CSG

Elle a été créée par la loi du 29 décembre 1990. L’originalité de la CSG ne doit pas laisser penser que la CSG n’aurait eu aucun précédent. Déjà en 1983, J.Delors ou en P.Seguin, avait mis en œuvre des mesures qui annonçaient déjà, d’une certaine façon, la CSG. En 1987, sous le Gouvernement de J.Chirac, les États généraux de la sécurité sociale avaient proposé la création d’une mesure très comparable à la future CSG.

Pour autant, le mérite principal de la création de la CSG revient à Rocard, c’est une création importante qui a modifié sensiblement la physionomie du financement de la sécurité sociale. C’est en même temps, au moins au départ, une idée originale.

Dès sa naissance, la CSG est en effet, présentée comme un impôt qui est appelé à se substituer en partie aux cotisations de sécurité sociale, parce que l’impôt est à la fois plus juste et plus efficace, que les cotisations. Le produit de la CSG est dès le départ, affecté exclusivement au financement de la sécurité sociale. Cela signifie que dès le départ, la nature juridique de la CSG a fait difficulté. En raison de cette affectation exclusive au financement de la sécurité sociale.

Le Conseil Constitutionnel dans sa décision relative à la CSG a vu dans celle ci, une imposition relevant des impositions de toute nature et depuis d’ailleurs, le Conseil Constitutionnel n’a jamais abandonné cette jurisprudence.

En même temps, l’affectation exclusive au financement de la sécurité sociale a entretenu un doute persistant, aggravé par la jurisprudence de la CJCE puisque dans l’interprétation des règlements communautaires de coordination de système de sécurité sociale, notamment du règlement du 14 mars 1971, la CJCE a interprété la CSG comme une cotisation empêchant de la sorte, la France, de prélever la CSG sur les revenus du travail d’une personne domiciliée en France mais travaillant à l’étranger.

La Cour de cassation, de son coté, a commencé dans ses arrêts initiaux à considérer qu’il s’agissait d’une imposition, puis depuis quelques années, elle s’est rangée sur la position de la CJCE, comme estimant qu’il s’agissait d’une cotisation. Dans un arrêt du 31 mai 2012, la chambre sociale de la Cour de cassation énonce que si la CSG est bien un impôt du point de vue du droit français, elle peut être considérée comme une cotisation pour ce qui est de l’application des règlements communautaires en matière de coordination des systèmes européens de sécurité sociale. Depuis cet arrêt, la chambre sociale semble considérer que la nature de la CSG est une nature fonctionnelle qui peut varier en fonction du cadre juridique concerné.

Cet impôt particulier est en réalité, constitué de quatre contributions sociales différentes :

— la contribution sociale sur tous les revenus professionnels (salariés ou indépendants) d’activité et de remplacement

— la contribution sociale sur les revenus du patrimoine

— la contribution sociale sur les produits de placement

— la contribution sociale sur les gains de jeux, depuis 1996

Ces contributions figurant aux articles L 131-6 s. du Code de la sécurité sociale.

En effet, la CSG tente de toucher l’ensemble des revenus d’une personne (assiette large) même si quelques revenus, aujourd’hui de moins en moins nombreux, échappent à son emprise. Au fond, c’est un impôt sur le revenu ou plutôt un impôt sur les revenus.

A l’origine, le taux de la CSG était très réduit puisqu’il était de 1,1%. Du reste, la CSG à l’origine, ne devait pas augmenter le montant global des prélèvements puisque en compensation de l’affectation originelle de la CSG au financement des prestations familiales, les cotisations d’allocation familiale était réduite d’autant.

Enfin, il faut signaler que le Gouvernement était resté très ferme sur la règle selon laquelle, le montant de la CSG payé par le contribuable, ne pourrait pas être déduit de l’assiette de l’impôt sur le revenu, précisément en raison de son caractère fiscal.

Par conséquent, on se trouvait en présence d’un impôt bien pensé, d’assiette très large, de taux bas, se substituant des cotisations concurrentes et ne pouvant pas être déduit de l’impôt sur le revenu.

Cependant, pour comprendre l’évolution de la CSG, il faut savoir qu’aujourd’hui, son taux est de 7,5%.

En 1993, sous la 2nd cohabitation Mitterrand/Balladur, le Gouvernement fait passer le taux de 1.1% à 2.4%. La raison invoquée était les graves difficultés financières de la branche vieillesse et notamment la distinction mise en place par la loi de 1993, de l’assurance et de la solidarité en matière de vieillesse. En 1993, est crée un fonds de solidarité vieillesse destiné à servir les prestations vieillesse non contributives notamment le minimum vieillesse et les avantages non contributifs s’ajoutant à la pension de retraite. Ce fonds serait désormais financé par le 1.3% de CSG s’ajoutant au 1.1% qui lui, continuerait à financer les prestations familiales.

En 1997, nouvelle augmentation du taux qui passe 2.4% à 3.4%, le point supplémentaire étant affecté au financement de la branche maladie.

En 1998, présidence de J.Chirac, taux qui passe de 3.4% à 7.5% ce qui est une augmentation extrêmement sensible. Le système mis en place est que l’augmentation profite à la branche maladie et en contrepartie quasiment plus de cotisation pour les prestations maladie.

La CSG n’est pas, quand même, du point de vue de la justice, irréprochable puisque son taux n’est pas progressif. C’est un taux qui n’augmente pas en fonction des revenus. La CSG n’est pas ce qui peut s’imaginer de mieux, certains proposent de passer à une CSG au taux progressif comme pour l’impôt sur le revenu. D’autres proposent de fusionner la CSG et l’impôt sur le revenu, il est évident que cette fusion aurait pour effet de doter ce nouvel impôt, d’un taux progressif. Évidemment, c’est une question qui sera discutée dans le cas de la remise à plat du système français avec M. Ayrault.

Section 2 : L’incertitude quant à l’organisation du système de sécurité sociale

Les pères fondateurs du système français de sécurité sociale ont très clairement voulu que ce système soit autonome par rapport à l’État et clairement distinct de celui ci. Ils ont souhaité que ce système soit géré non pas par l’administration publique mais par les représentants élus des assurés sociaux et des employeurs dans le cadre du conseil d’administration des nouveaux organismes de sécurité sociale.

De ce point de vue, les pères fondateurs du système français de sécurité sociale se distinguaient clairement des propositions du rapport Beveridge qui intégrait la sécurité sociale dans le système étatique.

Aujourd’hui, il est difficile où on en est car il y a d’un coté, le formel et de l’autre, le réel. Du point de vue formel, le système est resté assez largement autonome par rapport à l’État et reste marqué par le soucis d’une gestion paritaire par les partenaires sociaux. Il y a toujours des organismes de sécurité sociale qui ne font pas partis des services de l’État qui ont toujours des conseils d’administration avec des représentants. Mais en même temps, si on essaye d’aller voir le réel, celui ci est que le système est de plus en plus encadré et surveillé par l’État et que beaucoup des décisions importantes en matière de sécurité sociale se prennent au niveau du Gouvernement et des pouvoirs publics et pas vraiment au niveau des caisses. La réalité du paritarisme est de plus en plus incertaine.

Cela ne signifie pas que le système français de sécurité sociale est prêt à changer de nature mais c’est une évolution possible.

  • 1 L’incertitude quant au paritarisme
  1. Les avatars du paritarisme

Comme beaucoup d’autres termes de la protection sociale et de la sécurité sociale, le terme de paritarisme est susceptible de prendre plusieurs sens et plus précisément de prendre deux fois de suite, deux sens différents. Il existe donc quatre figures possible.

Dans une première analyse, on peut opposer le paritarisme pur à ce que l’on appelle le paritarisme octroyé.

Dans le paritarisme dit pur, ce sont les partenaires sociaux qui gèrent et qui décident en matière de sécurité sociale, le rôle de l’État étant seulement un rôle de soutien et d’encadrement des dispositions et des règles décidées par les partenaires sociaux eux-mêmes.

Dans le paritarisme octroyé, les partenaires sociaux, certes, interviennent mais ils n’interviennent qu’à l’initiative et sur autorisation ou délégation du législateur.

Du point de vue de cette première distinction, il est clair que le système français de sécurité sociale relève depuis sa naissance du paritarisme octroyé et non pas du paritarisme pur. La meilleure preuve en est, sur le terrain juridique, que c’est le législateur qui décide de l’existence des prestations et de l’existence des cotisations et que c’est le pouvoir règlementaire qui fixe le taux des cotisations et le montant des prestations. Les partenaires sociaux n’ont ni le pouvoir de créer des cotisations ou même des prestations ni même celui d’en fixer le montant. Le pouvoir des partenaires sociaux se réduit donc à un pouvoir de gestion d’un système dont les grandes caractéristiques ne sont pas décidées par eux.

Il est vrai que cette analyse, si elle est exacte en matière de sécurité sociale, l’est sans doute un peu moins en matière d’indemnisation du chômage puisque la, les partenaires sociaux conclus des conventions d’indemnisation du chômage qui peuvent fixer le montant mais même en cette matière, les conventions n’entrent en vigueur que si elles sont agrées par les pouvoirs publics et étendues par eux, en définitive, la décision finale revient aux pouvoirs publics.

Dans ce paritarisme octroyé, il faut également tenir compte d’une deuxième distinction possible selon que l’on utilise l’expression de paritarisme dans un sens large ou dans un sens strict.

Dans un sens strict, il n’y a paritarisme que si le nombre des représentants des employeurs et celui des représentants des salariés est exactement le même dans tous les conseils d’administration des différentes caisses.

Au contraire, dans un sens plus large ou plus souple, il y a paritarisme, dès lors que siègent dans les conseils d’administration des différentes caisses, des représentants des employeurs et des représentants des assurés sociaux même s’ils n’y siègent pas en nombre égal. Il faut signaler que notre système de sécurité sociale a connu des périodes où la représentation des assurés a été majoritaire et celle des employeurs, minoritaire mais qui n’a jamais connu de période où la représentation des employeurs a été majoritaire et celle des assurés, minoritaire.

En effet, du point de vue du paritarisme strict ou large, nous sommes dans une période de paritarisme strict, puisque la représentation des employeurs et assurés est identique dans tous les conseils d’administration des caisses, ce qui fait d’ailleurs, qu’il est difficile à un représentant des assurés, d’être président du conseil d’administration d’une caisse s’il n’a pas l’appui au moins implicite d’une partie des représentants employeurs. Ce qui explique que les présidents des conseils d’administration soient assez souvent issus des syndicats de salariés dits réformistes et très rarement des syndicats de salariés contestataires essentiellement la CGT.

Ce paritarisme strict n’a pas toujours été la règle puisqu’en 1945, c’était un paritarisme souple avec une représentation nettement majoritaire des assurés mais ce paritarisme a été très vivement contesté par le patronat qui a obtenu satisfaction en 1967 et en 1996 lors du plan Juppé.

  1. La fin du paritarisme ?

Le patronat a en définitive, obtenu un paritarisme au sens strict, ses représentants sont en nombre strictement égal à celui des salariés. On aurait pu imaginer qu’ayant obtenu cette satisfaction, le patronat ne remette pas en cause le principe même du paritarisme. Or, c’est pourtant ce qui s’est passé au début des années 2000 lorsque le patronat a décidé de pratiquer la politique dite de la «chaise vide» dans les conseils d’administration des caisses.

La raison en était non pas une raison de sécurité sociale mais une raison du droit du travail puisque le patronat reprochait vivement à Mme Aubry d’avoir cherché à financer la réforme des 35h en partie grâce aux ressources financières des caisses de sécurité sociale. Le patronat a estimé que ce type de financement montrait que les partenaires sociaux n’avaient pas de pouvoir réel dans les caisses puisque c’était le Gouvernement qui décidait et qu’il fallait faire une grève dans la représentation des caisses.

On a pu craindre dans les années 2000/2005, que cette grève annonce la fin du paritarisme et la nationalisation complète des caisses, la sécurité sociale relevant désormais des pouvoirs publics.

Il y a donc eu une crise de la conception même de la sécurité sociale et de la vision par les employeurs.

Cette crise semble apaisée aujourd’hui et il n’est plus question de remettre en cause l’organisation traditionnelle du système de sécurité sociale.

Pour autant, on a quand même l’impression d’un autre point de vue que le paritarisme a perdu beaucoup de son importance et de son inspiration pour plusieurs raisons :

— toutes les décisions importantes relèvent de l’État

— le paritarisme strict ne donne pas aux assurés sociaux, notamment aux salariés, le sentiment de peser réellement sur les décisions

— depuis 1996, dans les conseils d’administration des caisses du régime général, les représentants des salariés et des employeurs ne sont plus élus par l’ensemble des salariés et employeurs mais désignés par les organisations syndicales les plus représentatives ou les groupements d’employeurs habilités à cet effet.

Il est clair que la suppression des élections privent la représentation des assurés sociaux d’une partie de sa force et de son dynamisme.

Le paritarisme n’est pas mort mais mène une petite vie.

  • 2 L’incertitude quant aux rapports de la sécurité sociale avec les pouvoirs publics

Cette incertitude a toujours existé depuis 1945, elle n’est pas nouvelle mais s’est assez fortement accrue surtout depuis 1996.

  1. Une incertitude originelle

Il faut avoir conscience que dès le début de sa création, notre système de sécurité sociale est dans une position ambiguë vis à vis des pouvoirs publics. Certes, il est crée comme un système autonome qui ne fait pas partie de l’État ni de l’administration publique dont les organismes sont au moins, au niveau local et régional, des organismes de droit privé gérés par les conseils d’administration où l’État n’est pas spécifiquement représenté et dont les agents sont des salariés. Incontestablement, elle correspond davantage à la vision mutualiste de la sécurité sociale qu’à la vision beveridgienne qui faisait de la sécurité sociale, un service public.

On retrouve ici sans doute, l’une des idées assez forte dans les milieux de la résistance, pour créer une démocratie sociale venant relayer la démocratie politique mais distincte d’elle. Cependant, dès le départ, sans que ce soit dit clairement, l’influence de l’État est très forte, parce qu’il est hors de question que les décisions en matière de cotisations et de prestations relèvent des partenaires sociaux et de surcroit, non content de décider de celles ci, l’État exerce une tutelle étroite sur les décisions des organismes de sécurité sociale qui est une tutelle à la fois sur les personnes et sur les actes.

Autrement dit, l’État contrôle et agrée ou non, par exemple, le recrutement des directeurs de caisse et de surcroit, des décisions prises par le conseil d’administration surtout lorsqu’elles concernent des décisions financières, ont besoin d’un agrément de l’État. Dès 1945, on peut se demander si l’autonomie du système de sécurité sociale n’est pas plus formelle que réelle.

  1. Une incertitude aujourd’hui accrue

L’évolution depuis 1945 n’a pas milité en faveur d’une plus grande autonomie du système de sécurité sociale. En effet, les problèmes financiers récurrents de la sécurité sociale, en même temps que l’importance des masses financières concernées par le budget de la sécurité sociale font que l’État n’a pas pu se désintéresser de la gestion du système de sécurité sociale mais qui s’est de plus en plus impliqué.

De la sorte, l’incertitude sur les rapports de la sécurité sociale et des pouvoirs publics s’est accrue avec un pallier important en 1996 dans le cadre du plan Juppé qui accroit l’emprise de l’État, avec notamment l’instauration des lois de financement de la sécurité sociale. Mais il y a aussi, à coté, d’autres signes de cette emprise grandissante de l’État, par exemple, la réforme de la procédure de la nomination des directeurs des caisses, réforme qui n’est pas tout à fait anecdotique.

  1. L’instauration des lois de financement de la sécurité sociale

Les lois de financement de la sécurité sociale existent depuis une loi organique du 22 juillet 1996 prise dans le cadre du plan Juppé, qui a donné compétence au Parlement, pour voter chaque année, une loi dite de financement de la sécurité sociale pour l’année suivante.

Évidemment, les lois de financement de la sécurité sociale font immédiatement penser aux lois de finances. Elles sont d’ailleurs votées à la même époque et touchent l’exercice suivant comme les lois de finances. Pour autant, il ne faut pas les confondre parce qu’il s’agit chaque année de deux lois nettement distinctes et ensuite parce que l’objet de ces deux lois n’est pas exactement le même.

La loi de finances concerne l’impôt et le budget de l’État c’est elle qui autorise aussi bien le recouvrement des impôts que les dépenses publiques financées par ces impôts. En matière d’impôts et de lois de finances, le Parlement a donc un pouvoir souverain d’autorisation des recettes et des dépenses.

Ce qui fait qu’un impôt non voté par le Parlement, n’a aucune valeur et qu’une dépense non autorisée par le Parlement, est nulle. Le vote de l’impôt est le cœur même de la compétence du Parlement.

La loi de financement de la sécurité sociale ne peut pas avoir ce même objet, dans la mesure où les impôts ou impositions de toute nature ne représentent pas la majorité de son financement et dans la mesure aussi où les cotisations prélevées sur les revenus du travail n’ont pas la nature juridique d’impôt et ne peuvent donc être entièrement régies par un vote parlementaire.

Du reste, faire des lois de financement de la sécurité sociale de pures et simples lois de finances serait revenu à déposséder les partenaires sociaux des pouvoirs qu’ils leur restent dans la gestion du système de sécurité sociale.

Par conséquent, les lois de financement de la sécurité sociale n’ont pas pour objet d’autoriser les dépenses et les recettes en matière de sécurité sociale mais ont en réalité pour objet, de prévoir le montant vraisemblable des recettes et des dépenses, c’est à dire de prévoir le rendement probable des cotisations et de prévoir également les dépenses probables que devront exposer les caisses. Dans ces prévisions, le Parlement vote notamment un objectif national des dépenses d’assurance maladie (ODAM) c’est à dire le montant prévisionnel des dépenses d’assurance maladie qu’il serait trop opportun de ne pas dépasser.

La loi de financement de la sécurité sociale consiste dans le vote d’objectifs prévisionnels de recettes et de dépenses.

Il est assez difficile de se prononcer sur leur portée exacte.

Vont-elles trop loin ? Le plan Juppé n’a t-il pas donné au Parlement, des pouvoirs exorbitants ? C’est ce que pense le syndicat force ouvrière qui a été dès le départ, très hostile au plan Juppé. Pour ce syndicat comme pour une partie des autres syndicats, le produit des cotisations appartient aux salariés ou assurés sociaux mais pas à l’État. De la même façon, l’affectation des cotisations devrait appartenir aux partenaires sociaux et non à l’État. En votant une loi de financement de la sécurité sociale qui porte sur les cotisations et les prestations, l’État irait au delà de sa compétence normale et l’on assisterait à une étatisation regrettable de notre système de sécurité sociale.

A ces critiques, les partisans des lois de financement rétorquent que l’État ne peut pas se désintéresser d’un budget qui dépasse celui de l’État, qui est plus ou moins en déficit et qui alimente les déficits publics.

L’État ne va t-il pas assez loin ? Les lois de financement servent-elles à quelque chose ? Exemple : que ce passe t-il si les dépenses de santé dépassent les objectifs prévus ? Effectivement, les seules sanctions véritables d’un dépassement sont politiquement et socialement impraticables. Elles consisteraient, en effet, à partir du moment où l’objectif est dépassé, à ne plus rien rembourser.

Dans ces conditions, on peut avoir le sentiment que la loi de financement n’est qu’une sorte de recommandation de bonne pratique, qui doit être suivie, à l’inverse, il faudra s’accommoder.

En réalité, les choses sont plus complexes et il n’est pas exact de dire que les prévisions de la loi de financement sont purement formelles. D’abord, on remarque que la tendance au dépassement de l’objectif (ODAM) n’est pas aussi importante qu’on aurait pu le penser et parce qu’il existe depuis 1996, des mécanismes qui servent au moins indirectement à faciliter la mise en œuvre effective de la loi de financement.

Exemple : depuis 1996, les pouvoirs publics signent avec les caisses nationales de sécurité sociale, des conventions dites «conventions nationales d’objectif et de gestion» qui ont pour objet de mettre en pratique dans les rapports entre l’État et les caisses, les mesures votées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale.

Par conséquent, c’est un mécanisme contractuel qui tend en quelque sorte, à responsabiliser les caisses nationales et à les impliquer dans la réalisation pratique des mesures de loi de financement de la sécurité sociale.

Le contenu est étroitement dépendant des mesures votées dans le cadre des lois de financement.

A quoi il s’ajoute qu’une fois la convention nationale d’objectif votée, chaque caisse nationale va alors conclure avec chaque caisse régionale de sa branche, des conventions d’objectifs décentralisées comprenant les décisions prises par la convention nationale.

Il y a une sorte, désormais, de mécanisme contractuel en cascade qui n’a qu’un seul objectif, celui de faire respecter par les organismes, les lois de financement votées.

Il ne s’agit pas de sanction à proprement parlé, mais il est évident que ces mécanismes ont une certaine efficacité. La loi de financement n’est pas une simple collection de vœux pieux.

Finalement, le législateur organique de 1996 a t-il trouvé la bonne distance pour les lois de financement de la sécurité sociale ? On serait tenté de dire que oui sauf une importante réserve qui est qu’évidemment il s’agit d’un dispositif très compliqué. On a le sentiment que le plan Juppé qui dans une large mesure a réussi, il a en quelque sorte sauvé ce qui restait de l’autonomie de la sécurité sociale en complexifiant davantage les rapports entre la sécurité sociale et les pouvoirs publics.

  1. L’encadrement de la procédure de nomination des directeurs de caisse

Il s’agit ici des caisses régionales et locales car les caisses nationales sont des établissements publics. Dans ces caisses régionales et locales, les directeurs sont des salariés. En effet, les caisses régionales et locales sont des organismes de droit privé même s’ils gèrent une mission de service public. Leur employeur est la caisse dans laquelle ils exercent les fonctions de direction.

Dans les débuts du système de sécurité sociale, la nomination de ces directeurs correspondait à sa qualité de salarié c’est à dire que le directeur était nommé en tant que tel par le conseil d’administration de la caisse concernée. C’est ce qui s’est passé jusqu’en avril 1996.

Il y avait cependant, avant cette date, deux éléments différents d’un simple recrutement de droit privé :

— le directeur devait être choisi par le conseil d’administration sur une liste d’aptitude établie par le ministère des affaires sociales.

— Cette nomination supposait un agrément du ministre, qui pouvait être retiré en cours de fonction.

Les auteurs du plan Juppé ont estimé que ce dispositif n’était pas suffisamment encadré notamment ils ont estimé qu’il laissait trop de pouvoir de décision aux caisses régionales et locales par rapport aux caisses nationales.

L’ordonnance du 24 avril 1996 a mis un dispositif assez différent. Dans ce dernier, le conseil d’administration n’a plus la liberté de choisir qui il veut, à partir de 1996, il revient au directeur de la caisse nationale dont dépend l’organisme, de proposer trois noms possible. A partir de ce moment :

— soit le conseil d’administration de l’organisme concerné choisit l’un des trois noms et dans ce cas, pas de problème. La personne doit toujours être inscrite sur la liste d’aptitude et il y a la nécessité d’un agrément du ministre.

— Soit le conseil d’administration ne choisit aucun des trois noms et dans ce cas, c’est le directeur de la caisse nationale qui fait ce choix à sa place.

La loi du 13 aout 2004 de réforme de l’assurance maladie est allée encore plus loin puisque désormais c’est le directeur de la caisse nationale qui nomme lui même les directeurs des caisses régionales et locales.

Cela signifie qu’il y a désormais une hiérarchie entre les caisses qui commence à ressembler à une hiérarchie administrative. De plus, cela signifie que le conseil d’administration de l’organisme concerné est un employeur étrange puisqu’il n’a même plus le pouvoir de recruter et nommer lui-même le directeur de la caisse.

Est-ce à dire que le conseil d’administration est devenu une coquille vide ? Non, car la loi de 2004 si elle a retiré au conseil d’administration, le pouvoir de recruter directement le directeur de la caisse régionale, elle lui donne le pouvoir de s’opposer à cette nomination à la majorité qualifiée des 2/3 de ses membres. Ce droit d’opposition n’est pas négligeable mais il est quand même d’exercice très limité parce que réunir dans un conseil d’administration de caisse, sur un véto, une majorité des 2/3 n’est pas facile. Ce droit ne s’exercera que dans des cas très particuliers.

En définitive, la sécurité sociale n’est pas encore sous l’autorité des pouvoirs publics mais cela y ressemble beaucoup.

Section 3 : L’incertitude quant aux finalités du système français de sécurité sociale

Cette incertitude n’est sans doute pas d’aujourd’hui, elle a existé dès la création du système en 1945. Certes Pierre Laroque avait fixé en quelque sorte, la finalité essentielle qui était celle d’assurer aux travailleurs, la sécurité du lendemain. Mais cette finalité était suffisamment large et générale pour couvrir deux conceptions très différentes de la sécurité sociale.

Dans la première conception liée à la vision bismarckienne de la sécurité sociale, il s’agit fondamentalement d’assurer aux travailleurs qui vient à connaître et à subir un risque ou une charge, la garantie d’une partie au moins de son revenu professionnel antérieur.

Tandis que dans la seconde conception possible, issue de la vision beveridgienne, il s’agit d’assurer à tous, dès aujourd’hui, la garantie minimale de ressources pour vivre, seul moyen de faire échapper l’ensemble de la population à l’indigence.

Dans la conception bismarckienne, on parle plus de garantie de revenus parce qu’il s’agit de revenus du travail tandis que dans la conception beveridgienne, on parle de garantie de ressources, pour ne faire aucune référence particulière.

Il est vrai que depuis 1945, les deux conceptions ont eu tendance à se rapprocher et à se mêler, chaque système concret de sécurité sociale se caractérisant par un dosage particulier de vision bismarckienne et de vision beveridgienne. Le système français de sécurité sociale au départ, assez nettement bismarckien a intégré d’assez nombreux éléments beveridgien sans pour autant, perdre son architecture bismarckienne.

Dans la situation actuelle, il est assez difficile de dire si les finalités du système français de sécurité sociale sont plutôt d’éviter aux travailleurs, le risque d’indigence ou de sortir de l’indigence, ceux qui y sont déjà.

On serait tenté de répondre que peut-être notre système de sécurité sociale a cette double finalité, à la fois, éviter l’indigence à ceux qui n’y sont pas et sortir de l’indigence, ceux qui y sont. Cependant, ce double objectif est aujourd’hui mis à mal par la crise économique et financière en même temps que par le poids des dépenses de sécurité sociale et la crainte que ces charges de sécurité sociale limitent ou réduisent la compétitivité de nos entreprises dans un contexte de concurrence mondialisée ou globalisée.

Dans ce contexte préoccupant pour les finances de notre protection sociale, la tentation est grande de réduire la sécurité sociale à quelques objectifs jugés fondamentaux ou majeurs en laissant à l’assurance ou aux mutuelles, tout ce qui n’est pas ses objectifs de base. Autrement dit, le système de sécurité sociale deviendrait un système de pure garantie de base ou minimale, tout le reste relevant d’autres techniques. Dans la conception la plus radicale de cette tendance, la sécurité sociale serait réservée à ceux dont les ressources sont les plus faibles, se limiterait à des garanties de ressources minimales et tout le reste relèverait de d’autres dispositifs.

Il y a quelques éléments en ce sens, par exemple, la montée forte des prestations sous conditions de ressources, notamment dans les prestations familiales et aussi la fiscalisation au moins partielle du financement de la sécurité sociale. Poussée à l’extrême, cette tendance finirait par réduire la sécurité sociale à une sorte d’aide sociale plus systématique que l’aide sociale actuelle et mieux organisée.

C’est un scénario possible mais pas le plus probable ni le plus vraisemblable.

Il en est un autre scénario, sans doute plus envisageable car déjà en partie mis en œuvre, qui ne remet pas en cause la sécurité sociale en elle-même, qui ne la ramène pas à une aide sociale mieux organisée, qui la maintient dans son existence et dans ses grandes missions mais qui modifie le rapport d’importance et d’influence entre la sécurité sociale de base et la protection sociale complémentaire.

De ce point de vue, la couverture des dépenses de santé est assez significative d’une évolution possible. En effet, la couverture organisée par le système de sécurité sociale a tendance à se réduire. Les institutions de protection sociale complémentaire étant alors appelées à combler ou à augmenter le terrain laissé par le système de sécurité sociale. Cette évolution n’est pas invraisemblable et a, par certains cotés, un aspect inquiétant parce que le recours à la protection sociale complémentaire n’est pas uniformément accessible et il peut notamment dépendre en partie des revenus.

Exemple : salariés qui ont une protection sociale complémentaire d’entreprise très avantageuse mais également d’autres, où la protection sociale complémentaire est très réduite. Il sera difficile de réduire ces différences entre les branches et les entreprises.

Dans ce deuxième scénario, la sécurité sociale ne disparaît pas mais il lui est difficile de se passer du relai d’une protection sociale complémentaire qui est moins solidaire.

Également dans la branche vieillesse, les retraites de base ne sont pas négligeables mais restent à un niveau relativement modeste et le niveau de vie des retraités actuels tient beaucoup au cumul de la retraite de base et complémentaire c’est à dire de la protection sociale complémentaire.

Il y a enfin, un troisième scénario qui est le plus optimiste, dans lequel, non seulement le système français de sécurité sociale garde ses objectifs classiques et traditionnels, en continuant à assurer une protection sociale de base décente mais ce système s’enrichit de nouvelles couvertures et de nouvelles prestations. Évidemment, ce scénario n’est pas non plus le plus vraisemblable mais il n’est pas complètement à exclure. Il suppose une amélioration très significative de la situation économique et financière.

En tout cas, l’idée même de sécurité sociale garde un certain pouvoir de rayonnement et d’attraction comme le montre le succès de l’expression de «sécurité sociale professionnelle» qui fait référence à tout un ensemble de dispositifs destiné à permettre aux travailleurs de connaître des situations de mobilité ou mutation professionnelle dans des conditions qui ne soient pas trop préjudiciables ou dommageables pour eux.

Cela montre que l’idée de sécurité sociale reste une idée forte dans le présent et aussi une idée d’avenir.

 

 

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