Le droit des brevets

Cours de droit des brevets d’invention

  Le droit des brevets est né au siècle des lumières. A l’origine, les brevets étaient considérés comme une forme de contrat social conclu entre l’inventeur et la société : la société protégeait l’inventeur en lui garantissant une rétribution pour la divulgation de son invention et, en retour, l’inventeur acceptait que l’on puisse faire usage librement de son invention.

Un brevet est un droit de propriété intellectuelle sur une invention. Les droits de propriété intellectuelle sont accordés à des personnes physiques ou morales, sur des créations mentales, comme le droit d’auteur sur un ouvrage ou les droits des musiciens sur leurs enregistrements, la marque de commerce distincte d’une entreprise pour ses produits ou le brevet sur une invention technologique. Le brevet confère à son détenteur (ou titulaire) le droit d’empêcher les autres de fabriquer, d’utiliser, d’importer ou de vendre cette invention dans le pays où elle est brevetée. Autrement dit, le fait de breveter une invention confère au titulaire du brevet un monopole sur cette invention. L’attribution de brevets est régie par les lois nationales de chaque pays; ces lois sont influencées par les lois internationales. Un brevet est habituellement accordé pour un temps limité (20 ans). Il peut préciser des conditions ou des exceptions aux droits exclusifs accordés au titulaire. Le brevet est analogue (mais non identique) à un droit de propriété sur l’invention, et en comporte bien les trois composantes (selon les art. 554-556 du code civil français) :

  • ·          l’usus (droit d’usage),
  • ·          le fructus (droit d’en recueillir les « fruits »),
  • ·          l’abusus, (droit d’en faire tous usages non prohibés par les lois),

Mais, il est :

  • ·          limité dans le temps : 20 ans dans le meilleur cas, souvent moins, rarement plus10 ;
  • ·          révocable par décision judiciaire, (juridiction civile);
  • ·          périssable, en cas de non paiement des taxes, annuités et redevances prescrites;
  • ·          négatif, car il constitue, pour son titulaire, un droit d’interdire plutôt qu’un droit de faire, ce dernier pouvant être sujet à restrictions.

Par le brevet, l’inventeur partageait la connaissance de son invention avec le reste de la société. Après Venise (statut de l’inventeur, 1474), les trois premiers pays à adopter des lois sur le brevet ont été l’Angleterre (statut des monopoles, 1623), les Etats-Unis en 1790 et la France en 1791. Depuis lors, tous les pays industrialisés et un grand nombre de pays en voie de développement ont adopté une législation pt>  

D’une manière générale, le droit des brevets vise à promouvoir l’innovation technologique et la dissémination de ses fruits. L’inventeur devient titulaire de droits exclusifs pour le contrôle de l’exploitation commerciale de son invention pendant plusieurs années et en retour, il divulgue la description détaillée de son invention, mettant ainsi les nouvelles connaissances à la disposition de tous. Cette divulgation permet à d’autres (chercheurs, etc.) de tirer avantage des connaissances acquises. En d’autres mots, l’objectif des brevets est de favoriser les développements techniques et industriels en accordant des droits aux inventeurs qui divulguent leurs résultats à la communauté. Le système est censé promouvoir la recherche en permettant aux inventeurs de se financer en vendant leurs droits aux producteurs.

 

Textes applicables :

  •                    Article L611-1 à L611-22 du CPI
  •                    Article R611-1 à R618-6 du CPI
  •                    Loi du 11 mars 2014

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  • Voici le plan du cours de droit des brevets : Chapitre 1 : La brevetabilité
  • Section 1 : Le domaine de la brevetabilité
  • Paragraphe   1   :   Les   exclusions   de   l’article   L611-10   du   CPI A. Les découvertes, théories scientifiques et méthodes mathématiques
  1. Les créations esthétiques
  2. Les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles en matière de jeux ou dans le domaine des activités économiques ainsi que les programmes d’ordinateurs
  3. Les présentations d’informations
  • Paragraphe 2 : Les exclusions de l’article L611-16 à L611-19 du CPI
  1. Les méthodes de traitement chirurgical ou thérapeutique du corps humain ou animal et les méthodes de diagnostics appliquées au corps humain ou animal
  2. Les inventions dont l’exploitation commerciale serait contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs (article L611-17 du CPI)
  • Le corps humain et ses éléments (article L611-18 du CPI)
  1. Les races animales (article L611-19 du CPI)
  2. Les variétés végétales
  • Section 2 : Les conditions de la brevetabilité
  • Paragraphe 1 : L’exigence du caractère industriel de l’invention
  • Paragraphe 2 : L’exigence de la nouveauté de l’invention
  1. La définition de la nouveauté
  2. Les évènements détruisant la nouveauté
  3. La divulgation
  4. Les antériorités
  • Paragraphe 3 : L’exigence d’une activité inventive
  1. L’état de la technique
  2. La perspective de l’homme du métier
  3. La non-évidence
  • Section 1 : Le dépôt de la demande
  • Paragraphe 1 : Les personnes habilitées à demander un brevet A. Qui a droit au brevet en principe ?
  1. Les principes
  2. Le système français
  3. Les inventions de salariés et de fonctionnaires
    1. La classification des inventions
  4. Les inventions de missions
  • Les inventions hors mission attribuable
  1. Les inventions appartenant au salarié
    1. Une procédure commune
  2. Les inventeurs étrangers
    1. Le principe
    2. L’exception
  • L’exception de l’exception
  • Paragraphe 2 : Les conditions de forme de la demande de brevet
  1. Principe de la prohibition des demandes complexes
  • L’exception de pluralité d’invention
  1. Les pièces de la demande
  1. La requête
  2. La description
  3. Les revendications
  4. L’abrégé
  5. Les pièces accessoires de la demande
    1. Les dessins
    2. Les documents justifiants d’une situations particulière
  6. Le lieu et la date du dépôt
  • Section 2 : La délivrance du brevet
  • Paragraphe 1 : L’examen de la demande de brevet
  • Les opérations assurées par les services de la défense
  1. L’examen minimal par l’INPI
    1. Le rapport de recherche documentaire
    2. La publication de la demande
  • Paragraphe 2 : Le rejet ou la délivrance du brevet
  1. Le rejet
  2. La délivrance du titre de propriété industrielle
  • Paragraphe 3 : Les recours contre les décisions du directeur de l’INPI
  1. Le recours contre une décision de rejet
  • Les recours contre une décision de délivrance du brevet
  1. L’action en nullité
  • Chapitre 3 : Les droits et obligations des titulaires des brevets
  • Section 1 : Les droits
  • Paragraphe 1 : La portée du monopole conférée par le brevet
  1. Les prérogatives du brevet
    1. La contrefaçon d’un produit breveté
  • La contrefaçon d’un procédé breveté
  1. Les limites des prérogatives du brevet
  • Le droit de possession personnelle antérieure
  1. Les brevets de préparation magistrale
  2. Les actes de l’article L613-5
  • Paragraphe 2 : L’exploitation contractuelle du monopole
  1. Les principaux contrats
  1. Les règles communes aux cessions et aux licences (L613-8 à L613-9)
  • Section 2 : Les obligations du titulaire
  • Paragraphe 1 : L’obligation de payer les annuités fiscales
  1. L’obligation
  2. La sanction
  • Paragraphe 2 : L’obligation d’exploiter l’invention objet du brevet
  1. Les licences obligatoires
  2. Les licences obligatoires de droit commun
  3. Le délai pour demander la licence
  4. Les motifs
  5. La procédure
  6. Les licences obligatoires de dépendance
  7. Les licences d’office
    1. Les licences d’office dans l’intérêt de la santé publique
    2. Les licences d’office dans l’intérêt de l’économie nationale
    3. Les licences d’office dans l’intérêt de la défense nationale
    4. Les licences d’office dans l’intérêt de l’élevage
    5. La licence obligatoire de brevet portant sur des produits pharmaceutiques destinés à l’exportation (= licence d’office)
  • Chapitre 5 : Les sanctions de la contrefaçon
  • Section 1 : L’action en contrefaçon
  • Paragraphe 1 : La compétence matérielle et territoriale
  • Paragraphe 2 : l’auteur de l’action en contrefaçon
  • Section 2 : La preuve de la contrefaçon
  • Paragraphe 1 : La charge de la preuve
  • Paragraphe 2 : Les moyens de preuve A. La saisie-contrefaçon
  1. La saisie en douane
  • Sur demande écrite du propriétaire du brevet ou du licencié
  1. Retenue d’office par l’administration des douanes
  2. Les actions pendant la retenue
  1. Le droit d’information
  • Section 3 : La sanction de la contrefaçon
  • Paragraphe 1 : Les sanctions en matière pénale
  1. Les peines contre les physiques
  2. Les peines contre les personnes morales
  • Paragraphe 2 : Les sanctions en matière civile
  1. Le principe et l’exception de l’engagement de la responsabilité de l’auteur de la contrefaçon
  • L’allocation de D&I
  1. Les autres sanctions
  2. Le système d’injonction préalable
  • La procédure de l’injonction préalable
  1. Les mesures ordonnées
Chapitre 1 : La brevetabilité
Brevetabilité : objet du brevet + conditions du brevet 
  • Article L611-10 du CPI : «Sont brevetables dans tous les domaines technologiques les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptible d’application industrielle».
  • Section 1 : Le domaine de la brevetabilité
  • Pas de définition légale des inventions mais on trouve des textes qui listent ce que ne sont pas des inventions brevetables = deux séries d’exclusions du domaine de la brevetabilité : 
  •    Article L611-10 du CPI : exclut un certain nombre de création au motif que ne sont pas des inventions mais des créations. 
  •  Article L611-16 à L611-19 du CPI : exclut un certain nombre de création qui pourraient être des inventions mais qui sont exclues pour d’autres raisons (exemple motif de santé publique).

 Paragraphe   1   :   Les   exclusions   de   l’article   L611-10   du   CPI

A. Les découvertes, théories scientifiques et méthodes mathématiques

  • 1ère raison (pour les découvertes et théories scientifiques) : l’Homme ne fait que constater quelque chose qui existe déjà, il ne crée par lui-même or une invention se caractérise par la  coordination volontaire par l’Homme de moyens matériels. 
  • 2ème raison : le brevet ne concerne pas la science pure (l’abstraction) mais il concerne la science appliquée (les réalisations concrètes). Ainsi les découvertes, théories ou méthodes sont purement théoriques : elles ne peuvent être des inventions car l’invention a toujours un aspect   concret.
  • Attention :  Souvent une découverte n’est pas brevetable mais le produit issu de cette découverte est brevetable.
  •  –>  Cass. Com. 31 mars 1954 : « est une découverte non brevetable l’affirmation générale selon laquelle il est possible d’améliorer l’acoustique d’une sale en utilisant des panneaux de toile d’amiante, sans faire connaître la nature du ou des procédés permettant d’utiliser cette propriété des toiles d’amiante ni les caractéristiques techniques des dispositifs employés. » ← On ne peut délivrer un brevet sur une simple affirmation.

B.       Les créations esthétiques

L’invention est quelque chose de technique et d’utile alors que la création esthétique est gratuite (a priori), arbitraire et ne vise que la satisfaction esthétique et non l’utilité.

= La protection des créations esthétiques ne relève pas des brevets d’inventions mais des droits d’auteurs et des dessins et modèles. Plusieurs hypothèses :

 

1.      Un objet n’ayant qu’un caractère esthétique 

Cet objet ne peut être protégé que par les droits d’auteurs ou par les dessins et modèles (cf ci-dessus).

 

2.      Un objet n’ayant qu’un caractère utile 

Il n’a pas de caractère esthétique : il peut être protégé par un brevet

 

3.      Un objet à la fois esthétique et utile 

Cet objet est à la fois esthétique mais il a également une utilité technique :

                   Si l’aspect esthétique est dissociable de l’aspect technique : c’est-à-dire que l’aspect esthétique n’est pas exclusivement dicté par les caractéristiques techniques = l’objet peut être protégé pour l’aspect esthétique par le droit d’auteur et pour l’aspect technique par le brevet d’invention.

 

                   Si l’aspect esthétique est indissociable de l’aspect technique : seule la protection par brevet est possible car l’aspect esthétique est imposé par les caractéristiques techniques.

 

C.Les plans, principes et méthodes dans l’exercice d’activités intellectuelles en matière de jeux ou dans le domaine des activités économiques ainsi que les programmes d’ordinateurs

 

Rappel : le brevet n’est pas fait pour des créations abstraites mais pour des réalisations  concrètes de créations abstraites  —> on distingue donc la méthode (non brevetable) du procédé (brevetable). En effet le procédé est la mise en œuvre concrète d’une méthode.

 

Exemple : On ne peut pas breveter une méthode de calcul. Par contre on peut brevet une machine à calculer qui met en œuvre cette méthode.

 

Exemple : Une nouvelle méthode comptable de gestion n’est pas brevetable mais un appareil qui met en œuvre cette méthode est brevetable.

 

 —> Les programmes d’ordinateurs 

Ils sont exclus pour des raisons historiques : avant les logiciels n’étaient pas distincts du matériel et quand le logiciel est devenu un marché autonome le choix a été fait de les exclure des brevets. Mais l’Office Européen des Brevets (OEB) et l’INPI ont réussi à délivrer des brevet pour des ligiciels.  —> Un programme d’ordinateur peut être brevetable si il apporte un effet technique supplémentaire c’est-à-dire montrer un effet technique au delà d’un échange d’informations entre le logiciel et l’ordinateur. Les programmes d’ordinateur ne sont donc pas brevetables.

 

D.Les présentations d’informations

= Caractère abstrait et non technique. Par contre on peut breveter un système qui présente des informations (exemple panneaux de signalisation).

 

Conclusion : Une invention n’est pas quelque chose de purement théorique, intellectuel,  abstrait ni une création esthétique. C’est en revanche une création technique utile et utilisable en pratique. La doctrine retient comme définition de l’invention que c’est une solution technique à un problème technique.

 

L’article L611-10 du CPI pose un principe de brevetabilité (en principe toutes les créations sont brevetables) et énonce des exceptions qui sont d’interprétations strictes : « Les dispositions du (exclusions) du présent article n’excluent la brevetabilité des éléments énumérés aux dites dispositions que dans la mesure où la demande de brevet ou le brevet ne concerne que l’un de ces éléments en tant que tel » :

 

                   En tant que tel : si une découverte en tant que telle n’est pas brevetable, une réalisation concrète qui met en œuvre cette découverte est brevetable

 

                   Que dans la mesure où la demande de brevet ou le brevet ne concerne que l’un de ces éléments :

 –>  CA Paris, 15 juin 1981, Schlumberger : un procédé de détection de gisement pétrolier faisait appel entre autres à un programme d’ordinateur. Mais le procédé ne se réduisait pas au programme d’ordinateur. Il faisait appel à d’autres éléments qui eux étaient brevetables. Et donc ce procédé est brevetable  —> si une création brevetable est associée à une création non brevetable, le brevet sera refusé à la création non brevetable et autorisé pour la création brevetable.

 

 —> Les textes et la pratique ont dégagé de la définition positive d’invention plusieurs catégories d’inventions :

                   Les inventions de produits : l’invention consiste en un produit ( : corps certain qui se distingue des autres par sa composition, sa structure ou sa forme) qui engendre un effet technique :

    Le produit peut être seulement en partie nouveau pour accéder au brevet

    On ne brevète que le produit et non le résultat du produit

    Le produit ne peut pas être un produit naturel (exemple un champignon)

 

                   Les inventions de procédés (ou de moyens) : procédé déterminé de fabrication d’un produit ou d’obtention d’un résultat :

    Le procédé consiste soit dans des manières d’opérer soit dan l’emploi d’organes ou d’instruments

    On ne brevète que le procédé et non le résultat du procédé

    Les brevets de procédé étendent leurs effets aux produits issus du procédé

                   Les inventions de dispositifs : produit spécialement conçu pour la mise en œuvre d’un procédé

 

                   Les inventions d’application : consiste à donner à un produit ou un procédé connu une fonction nouvelle. Ex : l’aspirine servait à soulager les douleurs auj on l’utilise pour traiter le cancer.

                   Les inventions de combinaison : consiste à combiner des moyens connus pour obtenir un résultat industriel nouveau (Attention :  Il ne suffit pas de les juxtaposer).

 

Paragraphe 2 : Les exclusions de l’article L611-16 à L611-19 du CPI

= Exclusions qui relèvent d’une autre logique : les créations peuvent être des inventions mais elles sont exclues pour d’autres raisons (exemple santé publique).

 

A. Les méthodes de traitement chirurgical ou thérapeutique du corps humain ou animal et les méthodes de diagnostics appliquées au corps humain ou animal

= Méthodes de traitement ou de diagnostic

L’exclusion s’explique par des raisons d’ordre moral et de santé publique : personne ne doit avoir le monopole de ces méthodes aussi essentielles pour la santé publique et le médecin peut donc pratiquer le plus efficacement la médecine (libéralisation de la pratique médicale).

 

Ces exceptions doivent être interprétées de manière stricte :

 

                    –>  CA Paris, 8 janvier 1962 : refus de la brevetabilité d’une méthode de prélèvement de l’hypophyse animale mais reconnaît la brevetabilité des appareils nouveaux susceptibles de mettre en œuvre cette méthode.

 

                    –>  Une méthode de traitement hygiénique n’est pas exclue de la brevetabilité

                    –>  Une méthode cosmétique n’est pas exclue de la brevetabilité

                    –>  Une méthode de chirurgie esthétique n’est pas exclue de la brevetabilité

 

 —> Quels sont les critères retenus pour savoir si on se trouve dans le champ de l’exclusion ?

                   Si le destinataire de la méthode est le personnel de santé : exclusion de la brevetabilité

                   Si le destinataire de la méthode est un industriel/commerçant : pas d’exclusions de brevetabilité

 –>  CA Paris 26 mars 1983 : admis la brevetabilité d’une méthode d’acquisition de données liées à l’hémodynamisme et prédécoupées à l’aide d’une horloge à partir desquels l’art du médecin sera d’établir un diagnostic car la méthode écrite pouvait être suivie par n’importe qui

 

 —> Le cas des médicaments : larticle L611-16 admet la brevetabilité des médicaments. Avant ils étaient exclus de la brevetabilité sur le fondement de la santé publique mais afin de financer l’industrie du médicament on a admis la brevetabilité selon certaines règles particulières aux médicaments :

 

                   Loi du 4 août 2008 : admet la brevetabilité de la 2nde application thérapeutique

                   Les brevets de médicaments sont accompagnés d’un CPP (Certificat Complémentaire de Protection) qui vient prolonger le brevet après son expiration.

 

B.Les inventions dont l’exploitation commerciale serait contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs (article L611-17 du CPI)

 

 —> Analyse in concreto

Sanction : peut intervenir à deux étapes

                   Au moment du traitement administratif de la demande de brevet par l’INPI : celui-ci peut  refuser de délivrer le brevet

                   Après le traitement administratif de la demande : toute personne intéressée peut engager une action en nullité devant les tribunaux judiciaires

Attention :  La contrariété à l’ordre public et aux bonnes mœurs ne peut pas résulter du seul fait que cette exploitation est interdite par une disposition législative ou règlementaire.  –>  La CA de Paris a refusé d’annuler un brevet concernant un système escamotable de remorque alors que la réglementation routière interdisait l’exploitation commerciale de ce système.

 

C. Le corps humain et ses éléments (article L611-18 du CPI) 

Article L611-18*1 du CPI : « Le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d’un de ces éléments, y compris la séquence totale ou partielle d’un gène, ne peuvent constituer des créations brevetables ».

 

 —> On exclut la brevetabilité du corps humain mais aussi la découverte d’un élément du corps humain. Par contre, l’application technique d’un élément du corps humain est brevetable.

 

Article L611-18*2 du CPI : « Est brevetable l’application technique d’une fonction d’un élément du corps humain, cet élément du corps humain n’étant couvert par le brevet que dans la mesure nécessaire à la réalisation et à l’exploitation de cette application particulière »  —> Rédaction différente de la directive.

 

La directive explique qu’un élément isolé du corps humain ou autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence totale ou partielle d’un gène peut constituer une invention brevetable. Dans le droit français, on n’admet que des inventions d’application.

 

L’article L611-18 du CPI énonce quelques exemples non brevetables :

 

                   Procédé de clonage des êtres humains

                   Procédé de modification de l’identité génétique de l’être humain

                   Utilisations d’embryons humains à des fins industrielles ou commerciales

                   Séquences totales ou partielles d’un gène prises en tant que telles

D. Les races animales (article L611-19 du CPI) 

= exclusion due à la tradition car pendant longtemps on pensait qu’on ne pouvait pas obtenir de brevets sur les races animales ( : groupes d’animaux caractérisés par un patrimoine génétique distinct des autres races et qui sont aptes à se reproduire) car on était en présence d’un procédé naturel.

 

Aujourd’hui grâce aux manipulations génétiques il est possible de prédire telle ou telle chose d’un animal. Cependant les races animales ne sont pas brevetables pour des raisons morales. Attention :  Cela n’exclu pas la brevetabilité non pas sur une race animale mais sur un animal isolé dont on a modifié le patrimoine génétique.

 

 –>  Affaire de la souris Harvard : manipulation du patrimoine génétique d’une souris afin qu’elle développe les symptômes du cancer humain. Cette manipulation a été brevetée aux USA et toutes les actions contre ont échoué car il s’agissait d’un animal isolé et non d’une race animale. OEB : Les avantages de la lutte contre le cancer surmontent les inconvénients de la moralité.

 

Condition : les inventions portant sur les animaux sont brevetables si la faisabilité technique de l’invention n’est pas limitée à une race animale déterminée + ne sont pas brevetables les procédés de modification de l’identité des animaux de nature à provoquer des souffrances sans utilité médicale substantielle pour l’Homme ou l’Animal.

 

Attention :  Ne sont pas brevetables les procédés essentiellement biologiques ( : phénomènes naturels comme le croisement ou la sélection) pour l’obtention des animaux car l’Homme n’en maîtrise pas le procédé + la microbiologie est quant à elle brevetable.

 

E.       Les variétés végétales

 

Règlement de 1994 qui instaure un régime de protection communautaire des variétés végétales : Une variété végétale est du point de vue botanique le plus petit ensemble végétal possible qui regroupe des végétaux qui partagent un patrimoine génétique commun et donc de très nombreux caractères exprimés communs qui les définissent mais aussi qui les distinguent des autres groupes de végétaux.

 

Attention :  L’exclusion ne signifie pas qu’on ne peut pas breveter des végétaux : si l’on crée un végétal on peut obtenir le brevet dès lors qu’il ne constitue pas une variété végétale.

 

Comme pour les races animales ne sont pas brevetables les procédés essentiellement biologiques pour l’obtention des végétaux, sauf concernant la microbiologie.

 

                   Végétal : brevet possible

                   Variété végétale : certificat d’obtention végétale sur la variété

 

Section 2 : Les conditions de la brevetabilité

 

Article L611-10 : il y a trois conditions de brevetabilité

 

                   La nouveauté

                   L’activité inventive

                   Susceptible d’application industrielle

 

Paragraphe 1 : L’exigence du caractère industriel de l’invention

 

L611-10 : « L’invention doit pouvoir être appliquée » + L611-15 : « si l’objet d’invention peut être fabriqué ou utilisé dans tout genre d’industrie, y compris l’agriculture. »

 

Industrie : au sens large c’est-à-dire toute activité humaine, artisanale, commerciale, agricole…

 

Cela signifie donc que le produit peut être fabriqué ou utilisé dans toute activité humaine : idée de mise en œuvre concrète de l’invention (cf supra). On peut tout de même breveté une invention qui n’est pas encore fabriquée ou utilisée. Cela explique l’indifférence du résultat obtenu et de la qualité : on peut  très bien breveté une invention qui n’a aucun intérêt économique  —> l’utilité n’est pas un critère.

 

 –>  Affaire Thomson : l’entreprise avait inventé un procédé de purification des bains de rinçage et de brillantage, invention vendue mais la société acquéreur a réalisé que cette invention n’avait aucun  intérêt ni même aucune utilité économique, le coût étant plus important que l’apport. La société agit donc en justice mais le Tribunal de Grande Instance de Paris a indiqué que le résultat constituait une régression mais ce n’était pas un obstacle car il n’y a pas de défaut industriel. En effet la valeur économique n’est pas figée et évolue dans le temps.

 

Paragraphe 2 : L’exigence de la nouveauté de l’invention

 

Article L611-10 1) : l’invention doit être nouvelle A. La définition de la nouveauté 

L611-11 : La nouveauté se juge par rapport à l’état de la technique  —> « une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. »

 

L’état de la technique : est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date du dépôt de la demande de brevet. Attention :  Ce n’est donc pas l’ensemble des connaissance mais les connaissances rendues accessibles au public.

 

B.       Les évènements détruisant la nouveauté

 

= Deux catégories d’évènements qui peuvent ruiner la nouveauté de l’invention :

 

                   La divulgation : le déposant révèle l’invention antérieurement au public ou l’inventeur révèle à un tiers l’invention et ce tiers révèle l’invention (mauvaise foi du tiers).

Exemple Apple vient de perdre en Allemagne son brevet sur une partie de l’Iphone car Steve Jobs avait fait une présentation dans une conférence de presse.

 

                   L’antériorité : les tiers révèlent l’invention mais ils sont cette fois-ci de bonne foi.

 

1.      La divulgation

 

a)  Le lieu de divulgation de l’antériorité

 

Le concept de nouveauté est un concept absolu ainsi « est destructrice de nouveauté toute divulgation ou antériorité peu importe le lieu de celle-ci en France mais aussi à l’étranger. »  —> en France mais aussi à l’étranger, peu importe le lieu de la divulgation.

 

b)  Le moment de la divulgation de l’antériorité

 

= Pas de limite dans le temps : ancienne ou nouvelle la divulgation doit simplement avoir eu  lieu avant le dépôt de la demande de brevet.

 

Exemple : les boutons de manchette  —> on a obtenu la nullité car on a retrouvé des boutons de manchette romains.

 

c)  Le bénéficiaire de la divulgation de l’antériorité

 

Le public : public au sens large c’est-à-dire toute personne quelconque qui n’est pas tenu au secret = pas de nombre exigé, il peut s’agit d’une seule personne à qui on divulgue l’invention.

 

Exemple : un inventeur qui montre son invention à une société sans protection de confidentialité. Difficultés de preuve : il faut manifester des obligations de confidentialité (expresses : plus simple à prouver).

 

d)  Le mode de divulgation de l’antériorité

 

= Indifférent  —> Article L611-11 parle d’une divulgation écrite ou orale, par tout moyen.

 

La seule exigence est qu’il y ait vraiment divulgation c’est-à-dire que l’invention ait été révélée au public de manière suffisante pour en permettre l’exécution. Il faut donc que dans le public se trouvent des personnes aptes à comprendre l’invention et à la reproduire :

 

                   Soit le public est identifié lors de la présentation : la juridiction va alors vérifier si le public était en mesure de comprendre et de reproduire l’invention

 

                   Soit le public n’est pas identifié : la jurisprudence présume qu’il y a une personne compétente au sein de ce public.

 

e)  La neutralisation de certains éléments ayant entraînés la divulgation

 

= Dans cette hypothèse la divulgation ne sera pas considérée comme destructrice de la nouveauté. Il faut distinguer deux hypothèses :

 

                   Divulgation avec accord de l’inventeur

                   Divulgation sans accord de l’inventeur

 

α. Les cas dans lesquels la divulgation a lieu sans laccord de linventeur

 

Article L611-13 du CPI : « la divulgation ne sera pas exclusive de nouveauté si elle résulte directement ou indirectement d’un abus évident à l’égard du demandeur ou de son prédécesseur en droit (en effet, on peut céder le droit à demander le brevet). »

 

Hypothèse où le demandeur a été victime d’un abus évident : acte grave ( : espionnage  industriel, violation d’un secret de confidentialité, vol…).

 

= N’entraîne pas la perte de la nouveauté à condition que la demande de brevet soit déposée dans les 6 mois de la divulgation illicite.

 

Article L611-13 : envisage également l’hypothèse dans laquelle le tiers malhonnête ne se contente pas de divulguer l’invention mais aussi demande de faire breveter à son profit l’invention comme s’il en  était l’inventeur. Cette antériorité (première demande) ne sera pas destructrice de nouveauté.

 

β. Les cas dans lesquels la divulgation a lieu avec laccord de linventeur

 

Par principe l’inventeur devrait être sanctionné mais dans trois hypothèses il apparaîtrait choquant qu’il le soit.

 

                   La divulgation a été réalisée sous le sceau du secret

 

L’inventeur peut avoir comme nécessité de révéler son invention pour des tests, des vérifications… mais à des personnes tenues au secret (par leur statut ou par des clauses de confidentialité). Solution : ces personnes ne sont pas considérées comme le public.

 

                   Les délais de priorité

 

 —> Le délai de priorité unioniste

 

Convention de Paris du 20 mars 1883 sur la propriété industrielle = le mécanisme prend en compte la difficulté pour l’inventeur à obtenir le brevet sur son invention dans plusieurs pays car dès lors qu’on dépose dans un pays, on perd la nouveauté dans les autres pays.

 

             : Les brevets européens sont territoriaux : les formalités sont européennes mais le brevet reste français, allemand, italien… Ainsi dans chaque pays il faut faire une demande de brevet qui est  publiée

= divulgation.

 

L’article 4 de la Convention de Paris donne ainsi un délai de priorité : l’inventeur qui dépose sa première demande de brevet dans un pays de l’Union (+ de 100 pays) dispose à compter de cette première demande d’un délai de 1 an pour déposer son brevet dans les autres pays unionistes. Ces dépôts ultérieurs qui interviennent dans le délai de 1 an ne pourront pas être rejetés pour défaut de nouveauté = ils prennent la date du premier dépôt.

 

L’article L611-12 étend le bénéfice du délai de priorité dans les cas où le premier dépôt a lieu dans un pays qui n’est pas partie à la Convention de Paris mais sous condition de réciprocité (c’est-à-dire que ce pays accorde un droit de priorité équivalent sur la base d’un premier dépôt français).

 

 —> Le délai de priorité interne

 

Article L612-3 : lorsque deux demandes de brevet sont successivement déposées par le même inventeur (ou son ayant-cause) dans un délai de 12 mois ou plus, le demandeur peut requérir que la seconde demande bénéficie de la date du dépôt de la première demande pour les éléments communs.

 

Hypothèse : brevet et second brevet de perfectionnement.

 

Attention :  Les deux systèmes de délais de priorité (interne et unioniste) ne sont pas cumulables. Par contre on peut cumuler les priorités internes si on ne dépasse pas le délai de 1 an.

 

                   Les expositions publiques

 

Les inventeurs avant de déposer un brevet, veulent connaître l’intérêt commercial de l’invention, ils  vont ainsi soumettre leurs inventions aux appréciations du grand public et des spécialistes. Ces expositions sont supposées révéler l’invention, il faut alors que l’inventeur s’assure que ces expositions ne ruinent pas la nouveauté.

 

Article L611-13 du CPI : la divulgation dans une exposition publique ne sera pas destructrice de nouveauté car l’inventeur dispose d’un délai de 6 mois pour déposer valablement son brevet.

 

La notion d’exposition : l’invention doit avoir été présentée dans une exposition officielle ou officiellement reconnue au sens de la Convention de Paris de 1928. Il faut donc déclarer l’exposition lors de la demande de brevet et produire un justificatif dans les 4 mois de la demande de brevet.

 

2.      Les antériorités

 

Antériorité : ne vient pas de l’inventeur lui-même (divulgation) mais d’un tiers.

 

Pour que l’antériorité ruine la nouveauté de l’invention revendiquée il faut constater une identité entre l’invention revendiquée et l’antériorité prétendue.  –>  « Pour être comprise dans l’état de la technique et privée de nouveauté, l’invention doit s’y trouver toute entière dans une seule antériorité au caractère certain avec les mêmes éléments qui la constitue dans la même forme, le même agencement et le même fonctionnement en vue du même résultat technique ».

 

On parle alors d‘antériorité compacte ou de toute pièce : on doit trouver la même invention et il doit y avoir une seule antériorité c’est-à-dire qu’il est interdit de faire une combinaison des antériorités.

 

 —> Peut-on retenir comme antériorité une demande de brevet qui n’a pas été publiée ?

 

                   S’il s’agit d’une demande de brevet étrangère non publiée elle ne peut pas constituer une antériorité.

 

                   S’il  s’agit  d’une  demande  de  brevet française, européenne     ou  internationale  qui désigne la France : qu’elles soient encore ou non publiées elles constituent une antériorité.

 

Dans le cas où on devraient donner le brevet aux deux demandeurs la première demande l’emporte sur la seconde : le second aura un droit de possession antérieur.

 

Droit de possession antérieur : « toute personne qui, de bonne foi à la date du dépôt ou de priorité d’un brevet, était sur le territoire français en possession de l’invention objet du brevet a le droit à titre personnel d’exploiter l’invention malgré l’existence du brevet. »

 

N.B. : A titre personnel : lui et lui seul peut l’exploiter mais cessible avec fonds de commerce, l’entreprise… sans devoir de redevance. Il ne peut pas concéder de licence.

 

Paragraphe 3 : L’exigence d’une activité inventive

L611-10 : pour être breveté l’invention ne doit pas seulement être nouvelle il faut aussi qu’elle ne soit pas si évidente qu’elle aurait pu venir à l’esprit d’un technicien normalement qualifié confronté au problème technique du seul fait de ses connaissance et de son expérience.

 

L611-14 : « Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique. » 3 éléments sont donc à prendre en compte.

 

 

1.      L’état de la technique

= assez proche de l’appréciation de la nouveauté : l’ensemble des connaissances rendues accessibles au public avant la date du dépôt de la demande de brevet ou de la date de priorité.

Attention :  On englobe les demandes de brevet même non encore publiées pour l’appréciation de la nouveauté. Or pour l’appréciation de l’activité inventive on ne prend pas en compte les demandes non publiées et on peut combiner les antériorités.

 

 

2.      La perspective de l’homme du métier

 

Modèle théorique abstrait :  –>  spécialiste du métier d’un niveau moyen avec des connaissances générales de base dans son domaine technique et il est censé s’intéresser aux domaines voisins.

 

Lorsqu’une invention couvre plusieurs secteurs techniques, la solution dégagée par la jurisprudence est que l’on admet que l’homme du métier puisse être une équipe de plusieurs personnes et ce même si la Cour de Cassation a refusé en 1995 d’admettre que l’homme du métier puisse être une équipe.

 

Attention :  D’un secteur technique à l’autre l’homme du métier va être plus ou moins compétent. Exemple : électricité : niveau bas. Domaine de la physique quantique : l’homme du métier va être à un niveau plus haut.  —> C’est un spécialiste normalement compétent dans son domaine technique.

 

 

3.      La non-évidence

= Critère qui fait le lien entre l’élément objectif et l’élément subjectif (cf 1 et 2). L’invention ne doit pas découler pour l’homme du métier de manière évidente de l’état de la technique. La jurisprudence a dégagé deux démarches afin de déduire ou non l’évidence de l’invention :

 

a)  La démarche subjective

 

= S’appuie sur la démarche intellectuelle de l’inventeur : on apprécie le raisonnement de l’inventeur en comparant cette démarche avec ce qu’on peut attendre de l’homme du métier. La jurisprudence a dégagé des indices :

 

                   Le préjugé vaincu : l’activité inventive est très probable lorsque l’inventeur a rompu avec les habitudes et est allé contre le courant de ce qu’enseignent les brevets antérieurs.

 

                   La difficulté vaincue : l’activité inventive est très probable lorsque l’inventeur pour réaliser l’invention a vaincu des difficultés techniques qui constituaient un obstacle de la technique industrielle courant.

 

b)  La démarche objective

 

= S’intéresse à l’invention elle même, c’est-à-dire que l’on s’intéresse au résultat ibtenu par l’inventeur. La jurisprudence a également dégagé des indices :

                   La durée de gestation de l’invention : plus elle est longue plus il est probable qu’il y ait activité inventive

                   Lorsque l’invention est en rupture avec les techniques connues

                   Lorsque l’invention apporte un avantage inattendu pour l’industrie qui dépasse ce que la technique industrielle courante pouvait espérer

                   Le succès commercial : peut être un indice mais insuffisante à lui-même

 

c)  L’approche problème-solution

 

                   1  —> Déterminer l’état de la technique la plus proche : obtenu par la combinaison de caractéristiques divulguées dans une seule référence, cette dernière constituant le point de  départ le plus prometteur pour effectuer un développement conduisant à l’invention.

                   2  —> Déterminer le problème technique objectif en considération de l’état de la technique la plus proche : déterminer en considération de l’état de la technique la plus proche le problème technique que l’invention revendiquée a visé.

                   3  —> Répondre à la question de savoir si la solution proposée pour le problème technique objectif était ou non évidente pour l’homme du métier en considération de l’ensemble de l’état de la technique.

 

Attention :  Il n’est exigé qu’une activité inventive (peu importe que l’effort de créativité inventive soit faible ou fort).

 

Chapitre 2 : la procédure de délivrance des brevets : conditions d’obtention du brevet 

 

L 612-1 à L612-20 du code de la propriété industrielle.

 

Section 1 : Le dépôt de la demande

Paragraphe 1 : Les personnes habilitées à demander un brevet

A. Qui a droit au brevet en principe ?

1.   Les principes

 

Deux systèmes possibles et le droit français participe des deux principes  —> système mixte.

 

a)  Le système du droit naturel

L’inventeur a un droit naturel sur son invention : si concurrence par plusieurs inventeurs c’est le premier inventeur qui a un droit sur son invention.

 

Le premier inventeur : question de pure chronologie de fait qui devient délicate à trancher. Exemple : décalage entre la conception intellectuelle et la trace papier, manque de preuve, questions des  inventions en équipe….

 

b)  Le système du premier déposant

Système qui se détache des principes de droits naturels : ce système donne droit au brevet au premier déposant (si plusieurs déposants, c’est le premier déposant qui a le droit). Ainsi le droit que l’on a sur le brevet n’est pas un droit naturel mais une formalité administrative.

 

2.   Le système français

Mélange des deux systèmes afin de satisfaire l’inventeur et le déposant + pour questions de preuves :

 

                   L611-6 du Code de la propriété industrielle, alinéa 1 « le droit au brevet appartient à l’inventeur ou à son ayant-cause. » = rattachement de principe au premier système. Ayant-cause : le droit de demander le brevet est déjà disponible, il peut déjà être cédé.

                   L611-6 du Code de la propriété industrielle, alinéa 2 « si plusieurs personnes ont réalisé l’invention indépendamment l’une de l’autre, le droit au brevet appartient à celle qui justifie de la date de dépôt la plus ancienne. » = rattachement au système du premier déposant.

                   L611-6 du code de la propriété intellectuelle, alinéa 3 « dans la procédure devant l’INPI le demandeur est réputé avoir droit au titre. » Pas besoin de se poser la question de savoir si le déposant est effectivement l’inventeur : éviter à l’INPI un contrôle extrêmement difficile. Cette règle ne vaut qu’entre l’INPI et le demandeur, la règle ne vaut pas envers les autres ainsi les tiers pourront contester le droit au brevet du déposant.

 

Situation de l’inventeur spolié : hypothèse où l’inventeur fait une invention et une autre personne  dépose un brevet. L’inventeur a une action en revendication encadrée dans un délai de 5 ans :

                   À compter de la publication de la délivrance du brevet si le breveté était de bonne foi

                   À compter de l’expiration du brevet si le breveté était de mauvaise fois

 

N.B. : Il existe un droit extrapatrimonial au profit de l’inventeur : le droit de figurer en tant que tel dans le brevet d’invention

 

 

B.       Les inventions de salariés et de fonctionnaires

 

L611-7 du code de la propriété intellectuelle : régime des inventions des salariés + ce régime s’applique aux agents de l’État, des collectivités publiques et des personnes morales de droit public  (sauf mesures réglementaires ou stipulations contractuelles plus favorables).

 

L611-17 : régime légal qui est un plancher minimal pouvant être aménagé plus favorablement contractuellement.

 

1.      La classification des inventions

 

a)  Les inventions de missions

 

L’article L611-7 1) du code de la propriété intellectuelle : « ce sont les inventions que le salarié fait soit dans l’exécution d’un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à des fonctions effectives soit dans l’exécution d’études et de recherches qui lui sont explicitement confiées. »

 

Le contrat de travail prévoit une mission inventive du salarié mais avec une nuance :

                   Dans le premier cas le contrat de travail donne explicitement au salarié la mission de  développer une invention déterminée (= la mission d’invention correspond à ses missions effectives).

                   Dans le deuxième cas le contrat de travail attribue une mission d’études et de recherches dans  un secteur technique déterminé mais sans que l’on ait identifié un problème technique déterminé.

 

α. Les missions d’invention des salariés

Dans les deux cas le droit au brevet revient à l’employeur : en contrepartie le salarié doit percevoir une rémunération supplémentaire qui est déterminée par les conventions collectives, les accords  d’entreprise et à défaut les contrats de travail individuels.

 

β. Les missions d’invention des fonctionnaires

Le système est différent pour la rémunération des fonctionnaires : il est prévu que si la personne publique ne procède pas à la valorisation de l’invention (car elle en est propriétaire), le fonctionnaire peut  disposer  des  droits  patrimoniaux  attachés  à  l’invention  dans  les  conditions  prévues  par  une

 

convention qu’il va conclure avec la personne publique employeur. La rémunération supplémentaire est constituée pour une part par une prime d’intéressement et par une prime au brevet d’invention.

                   La prime d’intéressement : rémunération versée au fonctionnaire et qui représente un pourcentage des revenus perçus chaque année au titre de l’exploitation de l’invention par la personne publique. Elle est versée annuellement (même si le fonctionnaire quitte sa fonction, même si il décède) jusqu’à la fin de l’exploitation du brevet.

                   La prime au brevet d’invention : prime forfaitaire fixée par un arrêté (3000€) versée en deux tranches, 20% après le dépôt d’une demande de brevet et 80% à la signature d’une concession de licence ou du brevet.

 

b)  Les inventions hors mission attribuable 

 

α. La notion d’inventions hors mission attribuable

Ce ne sont pas des inventions de mission mais elles ne sont pas complètement sans lien avec l’employeur. Ce sont soit :

                   Des inventions faites par un salarié dans le cours de l’exécution de ses fonctions

                   Des inventions dans le domaine d’activité de l’entreprise qui l’emploie

                   Des inventions réalisées par la connaissance ou l’utilisation de techniques/moyens spécifiques à l’entreprise ou de données procurées par elle. Le salarié a utilisé des données qu’il ne pouvait récupérer que dans l’entreprise.

Exemple : l’utilisation d’un ordinateur de l’entreprise n’est pas spécifique à l’entreprise, on peut le trouver dans n’importe quelle entreprise.

 —> Ces critères peuvent se cumuler, un seul un critère peut suffire à qualifier une mission hors mission attribuable.

 

β. Le régime des inventions hors mission attribuable

Ces inventions appartiennent par principe au salarié mais elles peuvent être attribuées à l’employeur à  sa demande (totalité ou partie de la propriété ou de la jouissance de ce brevet).

 

Si l’employeur exerce son droit d’attribution le salarié a alors droit à une contrepartie nommée le juste prix : en principe fixé par un accord entre le salarié et son employeur. À défaut d’accord le juste pris peut être fixé par la CNIS (commission nationale des inventions de salariés) ou encore le Tribunal de Grande Instance.  –>  Jurisprudence fluctuante sur le juste prix !

 

γ. La CNIS

La CNIS est une commission paritaire de conciliation. Compétence : statuer sur tous litige en matière d’inventions de salariés ou de fonctionnaires.

Exemple : Elle peut trancher sur le montant de la rémunération supplémentaire, le juste prix.

 

Composition : présidé par un magistrat de l’ordre judiciaire assisté de deux assesseurs, l’un représente les employeurs, l’autre les salariés. La commission peut se faire assister par des experts.

La saisine : soit par l’employeur soit pas le salarié.

Procédure : la commission formule une proposition de conciliation. Cette proposition est expressément acceptée par les parties au litige sinon elle est sensée être acceptée dans le mois après sa notification. Si elle est contestée c’est le Tribunal de Grande Instance qui est saisi et qui va statuer au contentieux conformément au droit commun.

 

c)  Les inventions appartenant au salarié

Ce ne sont pas des inventions de missions et ne sont pas attribuables à l’employeur : elles appartiennent tout simplement aux salariés.

 

2.      Une procédure commune

Procédure de dialogue et d’information mutuelle entre employeurs et salariés.

 

L’article L611-7 3) du code de la propriété intellectuelle impose des obligations à l’employeur et au salarié : l’employeur et le salarié doivent s’échanger des informations relativement à l’invention et toujours le faire par un procédé qui va laisser une trace qui va prouver que l’autre a bien reçu cette information.

                   Le salarié auteur d’une invention doit la déclarer immédiatement à l’employeur. En cas de pluralité d’inventeur : déclaration conjointe. Dans la déclaration doivent apparaître des éléments d’informations suffisants pour permettre à l’employeur de se faire une idée de la catégorie à laquelle appartient l’invention.

                   L’employeur accuse réception de cette information et si il constate qu’il manque des éléments il doit en faire la de aux salariés dans un délai de deux mois.

                   Si le salarié ne classe pas l’invention, alors l’employeur lui fait connaître de manière motivée le classement que lui retient dans un délai de 2 mois à compter de la réception de la déclaration.

Attention :  Tout au long de la procédure le salarié et l’employeur doivent s’abstenir de divulguer l’invention et si l’un des parties dépose une demande de brevet elle droit le notifier à l’autre sans délai et empêcher sa divulgation.

 

 

C.       Les inventeurs étrangers

 

1.      Le principe

 

Principe :  –>  Lefait 27 juillet 1948 Cour de Cassation : les étrangers jouissent en France de tous les droits privés à l’exception de ceux qui leur sont refusés par une disposition expresse.

 

2.      L’exception

= Subordination de la jouissance des droits de propriété industrielle à une exigence de réciprocité.

 

L611-1*3 du code de la propriété intellectuelle « L’étranger qui n’a en France ni domicile ni établissement ne jouit du droit au brevet qu’à la condition que les français bénéficient de la réciprocité de protection dans le pays étranger dont il est ressortissant. »

 

3.      L’exception de l’exception 

= Les conventions internationales peuvent éliminer l’exigence de réciprocité :

 

                   La Convention de l’Union de Paris de 1883 (176 États Membres) :

    Article 2 : principe du traitement national = pour d’assimilation de l’unioniste au national.  —> Les ressortissants de chaque pays de l’Union jouissent dans tous les autres États de l’Union (dont la France fait partie) du droit au brevet national sans aucune exigence de réciprocité.

    Article 3 : élargissement du principe du traitement national en assimilant aux ressortissants des pays de l’Union les ressortissants des pays qui ne font pas partie de l’Union mais qui sont domiciliés ou qui ont des établissements industriels ou commerciaux effectifs et sérieux sur le territoire d’un pays de l’Union.

Exemple l’Ethiopie ne fait pas partie de l’Union, alors il n’a pas le droit au principe du traitement national, par contre dès lors qu’il a domicile ou un établissement effectif et sérieux dans l’un des 176 pays, il peut bénéficier de ce traitement.

 

                   L’ADPIC ( Accord relatifs aux aspects des droits de propriété industrielle touchant au commerce), article 3 : « chaque pays membres accordera aux ressortissants des autres pays membres un traitement non moins favorable que celui qu’il accorde  à  ses  propres ressortissants. » + conception large de ressortissant (comme article 3 de la Convention de Paris).

 

Paragraphe 2 : Les conditions de forme de la demande de brevet

 A. Principe de la prohibition des demandes complexes 

= ou principe de l’unité de l’invention

En principe une demande de brevet ne peut porter que sur une seule invention. En effet c’est plus simple pour l’INPI. C’est aussi un principe bénéfique pour le public qui s’intéresse au brevet (cf idée de contrat social).

 

B. L’exception de pluralité d’invention 

 

Par exception on pet grouper dans une seule demande « une pluralité d’inventions liées entre elles de sorte qu’elles ne forment qu’un seul concept inventif. »

 

Exemple : une seule demande avec une pluralité de produit lorsque les produits relèvent d’un même concept inventif.

 

Si l’INPI note que la demande est complexe, elle en informe le demandeur et lui demande de  régulariser la situation :

                   Soit en divisant la demande : ces demandes divisionnaires gardent la date de la demande initiale

                   Soit en limiter ses revendications : afin de ramener à l’unité d’invention

 C. Les pièces de la demande 

1.      La requête

C’est elle qui exprime l’intention de l’inventeur de s’approprier l’invention et elle comporte un certain nombre d’indications :

                   L’identification du demandeur (+ l’identification du mandataire éventuel)

                   L’identification de l’invention par son titre

                   La nature du titre de propriété industrielle demandée

 

 —> La remise d’un exemplaire de la requête donne la date du dépôt de la demande.

 

2.      La description

 

Article R612-12 du CPI : donne la liste des informations que doit renfermer la description →

                   Le domaine technique auquel se rapporte l’invention

                   L’état de la technique antérieure tel qu’il est connu du demandeur

                   L’exposé de l’invention : tel qu’il va être caractérisé dans les revendications et qui va permettre la compréhension du problème technique et de la solution apportée pas l’invention

                   Les avantages de l’invention par rapport à l’état de la technique antérieure

                   Brève description des dessins le cas échéant

                   Exposé détaillé d’au moins un mode de réalisation de l’invention

                   La manière dont l’invention est susceptible d’application industrielle si ce n’est pas évident

 

Le description est essentielle : elle permet d’exécuter l’invention ← exigence posée pour la description : si « l’homme du métier ne peut pas la reproduire » alors la description est insuffisante = nullité du brevet.

 

 —> Le problème des inventions biotechnologiques 

 

Dans le domaine des inventions biotechnologiques il arrive parfois que l’invention dépende d’un matériaux biologique et il ne suffit pas de lire la description pour réaliser l’invention, il faut également avoir accès au matériau (exemple une séquence génique, une hormone…).

 

La loi impose du fait de la transposition de la directive 98-44 que « l’on dépose en même temps que la demande, la matière biologique auprès d’un organisme qui va avoir pour mission de conserver la matière biologique et la tenir à disposition de toute personne qui la demanderait. »

 

3.      Les revendications

 

Revendications : définition de l’objet de la protection demandée  —> l’étendue des droits conférés par le brevet est déterminé par la teneur des revendications. Ces revendications répondent à certaines règles :

                   Elles doivent être claires et précises : elles définissent l’objet du droit exclusif qu’est le brevet.

                   Elles doivent se fonder sur la description : lien nécessaire entre la revendication et la description, rejet possible de l’INPI de brevet dont les revendications ne se fondent pas sur la description. En effet on ne peut revendiquer plus que ce que l’on décrit.

                   L’article R612-17 donne une indication de rédaction des revendications non obligatoire mais suivie en pratique : « une revendication comprend normalement deux parties :

    Un préambule mentionnant la désignation de l’objet de l’invention et les caractéristiques techniques qui sont nécessaires à la définition des éléments revendiqués mais qui combinées entre elles font partie de l’état de la technique.

 

    La partie caractérisante : elle expose les caractéristiques techniques, qui en liaison avec les caractéristiques qui font partie de l’état de la technique, sont celles pour lesquelles la protection est recherchée.

 

Un brevet peut contenir plusieurs revendications, il n’y a pas de limites légales mais en pratique l’INPI restreint ce nombre en faisant payer une taxe supplémentaire pour chaque revendication au delà de 11.

 

On distingue deux types de revendications :

                   Les revendications indépendantes (ou revendications principales) : elle existe par elle-même et elle est autonome (énonce les caractéristiques essentielles de l’invention). Il peut y avoir plusieurs revendications indépendantes (une sur le procédé, l’autre sur le produit…).

                   Les revendications dépendantes : elles se rapportent à une ou plusieurs revendications précédentes qu’elles complètent par des caractéristiques techniques additionnelles. Formellement, le préambule est un renvoi à une revendication précédente. L’intérêt de faire cette distinction est que les revendications dépendantes permettent d’empêcher les tiers de déposer des brevets de perfectionnement. Elles sont également une solution de repli si jamais une revendication indépendante est annulée car l’annulation de la revendication indépendante n’annule pas nécessairement la revendication dépendante de celle-ci.

 

4.      L’abrégé

= Résumé de l’invention n’ayant aucune valeur juridique mais qui est établi à des fins d’informations techniques, il est repris par l’INPI pour permettre aux tiers de comprendre rapidement de quoi il s’agit. L’INPI impose de faire de moins de 250 mots la rédaction de l’abrégé, avec un titre, un résumé concis des problèmes techniques…

 

D.Les pièces accessoires de la demande

 

1.      Les dessins

Ces dessins ne sont pas obligatoires, ils sont recommandés lorsqu’ils sont nécessaires à la compréhension de l’invention.

 

2.      Les documents justifiants d’une situations particulière

Il est possible par exemple de revendiquer le bénéfice d’un délai de priorité (précédent dépôt dans un pays de l’UE par exemple). Il faut alors au moment de la demande revendiquer ce droit de priorité, il faut alors ajouter des pièces à la demande. Il en est de même lorsque l’on veut bénéficier de l’exception attachée à l’exposition (cf supra).

 

E.       Le lieu et la date du dépôt

 

Lieu : L612-1 du CPI  —>  La demande de brevet est déposée à l’INPI selon trois modes de dépôt :

                   télécopie

                   Courrier avec accusé de réception

                   Dépôt électronique pour des utilisateurs authentifiés et enregistrés auprès de l’INPI Il existe des délégations régionales de l’INPI de Paris en Province.

Date : L612-2 du code de la propriété intellectuelle « la date du dépôt de la demande est celle à laquelle le demandeur a produit les documents qui contiennent 3 éléments :

                   Une indication selon laquelle le brevet est demandé (requête)

                   Les informations permettant d’identifier ou de communiquer avec le demandeur (requête)

                   Une description, même non conforme aux exigences légales. »

 

On remarque que si il manque une des pièces nécessaire à la fixation de la date de dépôt, l’INPI adresse au demandeur une invitation à compléter sa demander dans un délai de 2 mois, si il ne le fait pas alors la demande est déclarée irrecevable.

 

Dans les 15 jours qui suivent l’arrivée des pièces il est attribué à la demande un numéro d’enregistrement national (à terme ce sera le numéro du brevet, le cas échéant).

 

Les pièces sont en français, mais on admet que les revendications puissent être dans une langue étrangère, avec une traduction à fournir dans les 2 mois.

 

Section 2 : La délivrance du brevet

Evolution dans le droit français : jusqu’en 1968, les brevets français étaient délivrés sans contrôle administratif donc aucune garantie n’était à fournir. 1968 : introduction d’un examen qui n’est pas complet (contrôle limité)  —> on est alors dans un système de mixte.

 

Paragraphe 1 : L’examen de la demande de brevet

Dès lors que la demande a été reçue et qu’elle a une date de dépôt elle est soumise à l’examen des services de la défense nationale, et ensuite à l’examen technique de l’INPI.

 

A.  Les opérations assurées par les services de la défense 

= Assurer un filtrage pour permettre de repérer les inventions qui pourraient servir à la défense nationale (≈ 1500 demandes/an font l’objet d’un traitement par les services de la défense nationale).

 

Le législateur a donc assuré à l’autorité militaire un droit de regard sur les inventions déposées : les demandes doivent leur être présentées dans un délai de 15 jours suivant le dépôt de la demande. Les services libèrent très rapidement les demandes sans rapport (seuls 10 à 15% sont retenus).

 

 —> La mise au secret 

 

Article  L512-9  prévoit  une  mise  au  secret  de  ces  inventions  pour  permettre  la  défense nationale

« interdiction de divulguer ou exploiter quelque invention que ce soit qui fait l’objet d’une demande tant qu’une autorisation en ce sens n’a pas été donnée par le ministre chargé de la propriété industrielle ou le ministre de la défense. » Cette mise au secret est garantie par des sanctions pénales.

 

Pour que cette mise au secret ne dure par trop longtemps on admet que le silence gardé par le ministre pendant 5 mois après le dépôt de la demande vaut autorisation de divulguer et d’exploiter. Ce délai de 5 mois peut être prorogé sur demande du ministre de la défense jusqu’à un an renouvelable.

 

Si la demande est retenue et véritablement vérifiée : le demandeur a droit à une indemnisation fixée par accord amiable ou par le Tribunal de Grande Instance en cas de désaccord.

 

B.       L’examen minimal par l’INPI

Rappel : L’INPI contrôle déjà formellement la demande (cf supra) et qu’un certain nb de règles sont respectées par la demande (les revendications claires et précises, une seule et unique demande..).

 

L’étape la plus essentielle est celle qui a vocation à émettre un avis sur les conditions de  la  brevetabilité : deux étapes qui se complètent.

 

1.      Le rapport de recherche documentaire

= L’INPI recherche des documents pour alerter le déposant mais aussi les tiers sur les antériorités susceptibles d’affecter la nouveauté ou l’activité inventive.

 

Cette recherche est effectuée pour le compte de l’INPI par la division de recherche de l’OEB (Office Européen des Brevets : La Haye).

 

a)  Le rapport de recherche préliminaire

Aux vues de recherches l’INPI rédige un rapport de recherche préliminaire : cite tous les documents repérés qui doivent être pris en compte pour apprécier la brevetabilité de l’invention + opinion de l’examinateur sur l’invention au regard des documents cités.

 

Ce rapport est notifié au demandeur et publié au bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI : permet aux tiers de présenter leurs observations). Soit il est publié en même temps que la publication de la demande de brevet ou alors après la publication de la demande de brevet (dès sa notification au demandeur). Le demandeur doit réagir au rapport de recherche préliminaire de deux façons dans un délai de 3 mois (renouvelable 1 fois) à compter de la publication du rapport de recherche :

                   Soit en admettant la pertinence des documents qui lui sont opposés et modifier sa demande en déposant de nouvelles revendications.

 

                   Soit en refusant de reconnaître la pertinence des documents révélés et présenter des  observations à l’appui des revendications maintenues.

 

N.B. : Il est possible pour le déposant de faire les deux cumulativement ( : problème avec un document mais les autres sont pertinents).

 

Attention :  Aucune appréciation ne sera faite sur la réponse du déposant : il est seulement obligé de répondre sinon c’est un motif de rejet de la demande.

 

Attention :  Pas de rapport de recherche pour les certificats d’utilité.

 

b)  Le rapport de recherche définitif

Conclusion : À l’issue de cette procédure le rapport de recherche définitif est établi qui se présente sous forme d’une liste des antériorités. Limite de l’examen : l’INPI ne s’engage pas sur l’appréciation de la brevetabilité.

 

2.      La publication de la demande

= Assurer l’information du public sur l’existence de cette demande en indiquant les principaux éléments techniques de la demande.

 

La publication intervient automatiquement à l’expiration d’un délai de 18 mois à compter du dépôt de la demande française ou de la date de priorité étrangère ou de la priorité interne la plus ancienne. Exception : le déposant peut demander la publication anticipée mais cela n’est possible que si le secret mis en place par la défense nationale a été levé.

 

À compter de cette publication et dans un délai de 3 mois après la publication du rapport de recherche les tiers peuvent présenter des observations qui ne peuvent porter que sur la nouveauté ou l’activité inventive de l’invention (liste de documents de nature à affecter la nature inventive).

 

L’INPI notifie l’observation de tiers au demandeur qui doit répondre et déposer des réponses ou une nouvelle revendication dans un délai de 3 mois renouvelable une fois à compter de la date de réception de la revendication.

 

Paragraphe 2 : Le rejet ou la délivrance du brevet 

A. Le rejet 

Ce rejet peut être total ou partiel (tout ou partie des revendications du brevet). Il est prononcé par le DG de l’INPI après qu’un délai de régularisation ait été accordé au déposant. Quelles sont les causes de rejet ?

 

1.      L’irrégularité de la demande (conditions de forme) 

                   Description insuffisamment détaillée de l’invention

                   Revendication imprécise

                   Revendication non fondée sur la description

                   Violation de la prohibition des demandes complexes et absence de division

                   Non paiement de la redevance

                   Défaut de réponse au rapport de recherche préliminaire

 

2.      Les rejets tenant à un défaut de brevetabilité 

L’INPI peut rejeter la demande s’il existe un défaut manifeste de brevetabilité (et non un simple doute) qui se présente dans trois hypothèses :

                   La demande concerne une création que la loi ne considère pas comme une invention :  exceptions de l’article L611-10.

                   La demande porte sur une invention non brevetable au terme des articles L611-16 à L611-19 : la contrariété aux bonnes moeurs, les traitements chirurgicaux thérapeutiques…

                   Le rapport de recherche montre un défaut manifeste de nouveauté et l’inventeur mis en demeure de modifier sa demande ne l’a pas fait.

 

 

B. La délivrance du titre de propriété industrielle

Si la demande n’est pas rejetée la procédure administrative se conclue par la délivrance du titre et sa publication. C’est le directeur général de l’INPI qui délivre le titre de protection au nom du demandeur ou du cessionnaire de la demande. La délivrance se concrétise dans l’apposition du sceau de l’INPI sur la demande de brevet. Cette décision de délivrance est notifiée au demandeur.

 

La publication de la délivrance se fait dans le BOPI à compter de un mois à compter de la date de la notification de la délivrance faite au demandeur.

 

À la suite un exemplaire complet est attribué au demandeur : titre juridique du brevet (même si le brevet est sensé exister depuis le dépôt de la demande).

 

Paragraphe 3 : Les recours contre les décisions du directeur de l’INPI 

A. Le recours contre une décision de rejet 

Le rejet n’intervient jamais par surprise : notifiée, motivée et possibilité de régulariser. Le déposant peut contester le rejet la demande devant la Cour d’Appel de Paris directement dans un délai de 1 mois à compter de la notification. Ensuite il peut y avoir un recours devant la Cour de Cassation par le directeur de l’INPI ou par le déposant.

 

B. Les recours contre une décision de délivrance du brevet 

Ici c’est un recours pour voir le brevet déclarer nul : la procédure est devant le Tribunal de Grande Instance de Paris. L’action en nullité du brevet repose sur l’article L613-25  —> cet article énumère la liste limitatif des cas de nullités du brevet :

 

                   Défaut de brevetabilité : au sens large  —> domaine ou condition de la brevetabilité. C’est à ce moment que l’on peut critiquer le défaut d’activité inventive (car le contrôle de l’INPI est vraiment minimal et ne porte par sur ce défaut).

                   L’insuffisance de description : la description n’est pas claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter, si ce n’est pas le cas cela peut être une cause de nullité.

                   L’extension de l’objet du brevet au delà du contenu de la demande initiale : « déclare nul le brevet si son objet s’étend au delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée ou lorsque le brevet a été délivrée sur la base d’une demande divisionnaire si son objet d’étend au delà de la demande initiale. » On vise l’hypothèse où l’extension du brevet résulterait des modifications de revendications intervenues au cours de la procédure d’examen.

                   L’extension de l’étendue de la protection après limitation : « déclare nul le brevet si après limitation l’étendue de la protection a été élargie. »

Exemple : invention est la revendication d’un produit qui associe les produits A B et C, au cours de la procédure on enlève le composé C. Formellement j’ai limité et réduit ma demande, mais en réalité on a élargi la portée du brevet : on revendique des produits plus larges A + B (et non A + B + C).

 

C.       L’action en nullité

 —> Qui peut agir ? Ceux qui ont un intérêt à agir : un concurrent ou alors le licencié ou cessionnaire du brevet (cession nulle pour défaut d’objet). Le ministère public peut également agir d’office en nullité d’un brevet en pratique c’est très rare.

Procédure : Action principale en nullité mais la nullité peut également être invoquée en réponse à une action en contrefaçon :

                   Soit on fait prévaloir la nullité par voie d’exception : pas de délai de prescription, les exceptions sont perpétuelles.

                   Soit par une demande reconventionnelle (défenseur qui formule une demande de nullité).

 

Délai de prescription : le code de la propriété intellectuelle ne l’évoque pas, c’est donc la prescription de droit commun qui joue  —> article 2224 code civil « 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait du connaître les faits permettant de l’exercer. » En pratique dans les 5 ans de la délivrance du brevet sauf à démontrer que le demandeur ne pouvait pas connaître au moment de la délivrance la cause de nullité.

 

Effet de la nullité : La disparition rétroactive du brevet donc le brevet n’est sensé n’avoir jamais existé donc les actes juridiques accomplis sur le brevet sont nuls. La nullité peut être totale ou partielle. Dans le cas d’une nullité partielle d’une revendication, l’article L623-27 renvoie le titulaire du brevet pour présenter une nouvelle rédaction de la revendication et le directeur de l’INPI peut rejeter la revendication modifiée pour défaut de conformité au jugement devant la CA de Paris.

 

L613-37 du code de la propriété intellectuelle : la décision d’annulation a un effet absolu, c’est-à-dire qu’une fois passée en force jugée, la décision anéanti le brevet à l’égard de tous (et pas seulement celui qui a engagé la procédure de nullité).

 

Chapitre 3 : Les droits et obligations des titulaires des brevets 

Section 1 : Les droits 

             : Un droit moral existe dans les prérogatives attachées au brevet au profit de l’inventeur qui a le droit d’apparaître en tant que tel dans le brevet. Pour le reste les prérogatives conférées par le brevet sont des prérogatives patrimoniales qui appartiennent au propriétaire du brevet.

 

Paragraphe 1 : La portée du monopole conférée par le brevet 

A. Les prérogatives du brevet 

Le code de la propriété intellectuelle ne défini pas positivement les droits conférés par le brevet, il les défini de façon négative en définissant la contrefaçon. Ce sont les articles L613-3 et 4 du code de la propriété intellectuelle qui définissent la contrefaçon et donc la portée des prérogatives attachées au brevet.

 

1.      La contrefaçon d’un produit breveté

 

La contrefaçon d’un produit breveté s’entend largement, il s’agit de :

                   La fabrication du produit breveté : ici c’est un acte de contrefaçon autonome c’est-à-dire que le seul fait de fabriquer une contrefaçon est une contrefaçon même si on ne la commercialise pas après.

                   La commercialisation du produit : l’offre ou la mise dans le commerce du produit breveté.

    L’offre : tout acte par lequel on propose à la clientèle d’avoir un accès effectif au produit breveté.

    La mise dans le commerce : « tout acte matériel qui permet de faire connaître le produit sur le marché. »

                   L’utilisation du produit breveté : acte de contrefaçon autonome

                   L’exportation, l’importation ou le transbordement du produit breveté : Ce sont des actes de contrefaçon autonomes, peu importe que le produit ait été commercialisé ou utilisé par la suite. Découle de la réforme du 11 mars 2014 : avant ce n’était pas des actes autonomes.

 —>  « L’importation est non seulement le fait de celui qui fait venir en France le produit mais également celui qui envoie le produit à destination de la France. » On peut penser qu’il faut analyser l’exportation de la même façon : celui qui envoie mais aussi celui qui passe commande du produit breveté.

Le transbordement : acte purement matériel  —>  transfert de marchandise d’un mode de transport à un autre. Les auteurs font valoir que puisque c’est un acte purement matériel cela ne modifie pas la situation juridique des marchandises.

                   La détention du produit breveté : seul acte qui n’est pas un acte autonome. La détention n’est un acte de contrefaçon que si il est réalisé aux fins d’offre, de mise dans le commerce,..

 

2.      La contrefaçon d’un procédé breveté 

 

                   : l’article L613-3 b) du CPI : sanctionne l’utilisation du procédé breveté.

                   Les produits obtenus par le procédé : l’article L613-2*2 du CPI : la protection conférée par un brevet de procédé s’étend aux produits obtenus directement par ce procédé.

                   L’offre, la mise dans le commerce… : l’article L613-3 c) du CPI : « sont des actes de contrefaçon l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, l’exportation, l’importation, le transbordement ou encore la détention à ces fins obtenu selon le procédé breveté. »

                   L’offre  de  l’utilisation  du  procédé  breveté :  l’article  L613-3  b)  du  CPI  :  sanctionne  le fait

« d’offrir sur le territoire français l’utilisation du procédé breveté à condition toutefois que le tiers savait ou que les circonstances rendaient évidentes qui l’utilisation du procédé breveté était interdite sans le consentement du titulaire du brevet. »

                   La fourniture de moyens : L’article L613-4 du CPI sanctionne la contrefaçon par fourniture de moyens : « C’est la livraison ou l’offre de livraison sur le territoire français à une personne autre que celles habilitées à exploiter l’invention brevetée des moyens de mise en œuvre sur ce territoire de cette invention se rapportant à un élément essentiel de celle-ci lorsque le tiers sait ou lorsque les circonstances rendent évidentes que ces moyens sont aptes et destinés à cette mise en œuvre.

Exemple : une personne ne se rend pas elle-même contrefactrice mais elle fourni à autrui un certain nombre de moyens lui permettant de réaliser une contrefaçon.

 

    Sur le territoire français : peu importe que ce soit une entreprise étrangère. Par contre le texte exige que les moyens en cause soient destinés à une mise en œuvre sur le territoire français.

    C’est un acte de contrefaçon autonome.

    Les personnes en cause : personne non habilitée à exploiter une invention  —>  « ne sont pas considérées comme des personnes habilitées à exploiter l’invention toutes celles qui accomplissent un certain nombre d’actes pour lesquels il existe une limite aux droits du breveté. »

    Les moyens visés : tout matériel, tout produit de nature à être utilisé dans la réalisation d’une contrefaçon du brevet. Le texte parle bien des moyens essentiels de l’invention. La contrefaçon est constituée lorsque l’on livre au moins un élément essentiel de l’invention.Ainsi échappe à la poursuite celui qui a livré ou offert de livrer des marchandises ou produits d’une telle banalité qu’ils pouvaient servir à de multiples usages. Exception : lorsqu’une personne qui livre des produits banals mais qui incite à utiliser le produit livré pour commettre une contrefaçon.

    L’élément psychologique :  —>  « il n’est pas nécessaire que l’on démontre que le tiers avait connaissance du brevet mais seulement qu’il avait conscience de l’utilisation technique possible de son produit. »

 

                    —>  La contrefaçon par équivalent : la contrefaçon est constituée lorsque l’objet contrefaisant est une copie servile de l’invention (reproduction de l’invention). On laisse donc la possibilité pour un contrefacteur subtil à éviter la contrefaçon si il met en œuvre des moyens différents mais équivalents à ceux revendiqués. Ainsi  —>  « sont équivalents deux moyens de forme différentes mais qui exerçant la même fonction, c’est-à-dire le même effet technique premier, procurent un résultat semblable. »

 

 

B.       Les limites des prérogatives du brevet

L613-5 à L613-7 du CPI 

 

1.      Le droit de possession personnelle antérieure 

L613-7 : le droit de possession personnelle antérieure c’est-à-dire lorsque deux personnes font la même invention de manière indépendante et le brevet est attribué au premier déposant. Pour le deuxième déposant on lui reconnaît un droit de possession, ainsi le breveté a le droit d’exploiter l’invention sans redevance et le titulaire du brevet ne peut le poursuivre.

 

2.      Les brevets de préparation magistrale

Les brevets de préparation magistrale : fabriqués par le pharmacien sur ordonnance du médecin. Si le produit que le médecin donne ordre au pharmacien de fabriquer est un produit breveté, le breveté ne peut rien dire.

 

3.      Les actes de l’article L613-5

a)  Les actes à usage domestique

Les actes d’usage domestique : Ce sont des actes accomplis dans le cadre privé à des fins non commerciales (: professionnelles)

 

b)  Les actes accomplis à titre expérimental

 –> Le cas des génériques : médicaments protégés par un brevet tombés dans le domaine public : les obsessions des génériqueurs sont d’être le premier sur le marché à proposer les produits génériques.

Attention :Pour les produits de santé il faut obtenir les autorisations administratives de mise sur le marché. Situation : être prêt au lendemain de l’expiration du brevet mais avant cela il faut commencer à préparer l’exploitation du générique avant même qu’il ne soit tombé dans le domaine public et notamment dans le cadre des autorisations AMM il faut réaliser des essais cliniques, le brevet existe encore.

 

 —>  Ces essais sont-ils des actes expérimental ? L613-5 : le breveté ne peut pas s’opposer aux études et essais requis en vue de l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché pour un médicament ainsi qu’aux actes nécessaires à leur réalisation et à l’obtention de leur réalisation.

 

Même cas : la loi du 19 décembre 2011 a ajouté un d) bis à L613-5 pour soustraire au brevet les actes nécessaires à l’obtention du visa de publicité.

 

c)     L’introduction  sur  le  territoire    français  d’objets  destinés  à  être  lancés  dans    l’espace  extra- atmosphérique

Le breveté ne peut pas s’opposer à l’introduction sur le territoire français d’objets destinés à être lancés dans l’espace extra-atmosphérique : préserver l’action de l’industrie française.

 

d)  Le privilège de l’agriculteur

Le privilège de l’agriculteur ou du fermier ou encore la pratique des semences de ferme est une limite au droit du titulaire du brevet : hypothèse où un végétal est couvert pas un brevet, si un fermier acquiert licitement le matériel de reproduction de ce végétal alors l’agriculteur a ce privilège est qu’il peut utiliser le produit de sa récolte pour réensemencer ses champs.

 

N.B. : La même chose est prévu au profit de l’éleveur au détriment d’un titulaire d’un brevet sur un animal d’élevage.

 

e)  Le privilège de l’obtenteur

Le privilège de l’obtenteur : le breveté ne peut pas faire valoir son droit à l’encontre de l’obtenteur qui utilise son matériel breveté comme matériel de départ pour la création d’une variété nouvelle.

 

f)  L’épuisement du droit du breveté

L’épuisement du droit du breveté : à partir du moment où le produit breveté a été commercialisé par le breveté lui-même, ou par un tiers avec son consentement sur le territoire de l’EEE le breveté ne peut plus avoir de droit de regard sur l’usage que l’acheteur va faire ensuite de son produit.

 

Paragraphe 2 : L’exploitation contractuelle du monopole 

A. Les principaux contrats 

Parmi les principaux contrats dont le brevet peut faire l’objet il existe la cession ou la licence.

                   Cession : le cédant se désaisi de la propriété du brevet

                   Licence : l’inventeur conserve la propriété du brevet, il se contente de conférer au licencié un droit d’exploitation. Deux types de licence :

    Licence non exclusive ou licence simple : le titulaire du brevet conserve la possibilité de concéder d’autres licences.

    Licence exclusive : le titulaire du brevet s’engage à ne concéder aucune autre licence concurrente. Parfois il s’interdit la possibilité d’exploiter lui-même le brevet.

 

Les licences peuvent être conventionnelles ou imposées (par la loi ou l’État). Dans tous les cas, il existe des règles communes à ces cessions et licences.

 

B.  Les règles communes aux cessions et aux licences (L613-8 à L613-9)

                   La cession ou la licence peuvent concerner non seulement le brevet délivré mais aussi la simple demande de brevet.

                   Ces contrats de vente ou de licence sont des contrats solennels c’est-à-dire qu’à peine de nullité ils doivent être passés par écrit.

                   Tous les actes transmettant ou modifiant les droits attachés à une demande de brevet ou un brevet, doivent pour être opposables aux tiers être inscrits sur le registre national des brevets tenu par l’INPI = document public qui recueille et diffuse les informations sur la vie du brevet. C’est une condition d’opposabilité aux tiers.  —>  La jurisprudence a fait de cette inscription au RNB une condition de l’action en contrefaçon ou de la saisie-contrefaçon.

 

 

Section 2 : Les obligations du titulaire

Elles sont au nombre de trois :

                   L’obligation de l’INPI de divulguer l’invention

                   L’obligation de payer les annuités fiscales

                   L’obligation d’exploiter l’invention

 

Paragraphe 1 : L’obligation de payer les annuités fiscales

A. L’obligation

Cette obligation pèse sur le breveté avant même qu’il ne soit réellement breveté : dès le dépôt du brevet il faut payer les annuités. La première annuité est déjà incluse dans la redevance de dépôt lorsque l’on dépose la demande de brevet.

Tous les ans il faut payer l’annuité au plus tard le dernier jour du mois anniversaire du dépôt de la demande. Dépôt le 14 janvier 2014  —>  on a jusqu’au 31 janvier de chaque année pour payer.

Le montant progresse au fur et à mesure que le temps passe : on part d’un montant de 36€ pour la première redevance jusqu’à 720€. L’obligation pèse depuis le dépôt de la demande jusqu’à expiration du brevet (au plus tard 20 ans après le dépôt de la demande). Les redevances se renchérissent dans l’optique de dissuader son inventeur de renouveler le brevet si celui-ci n’est plus aussi intéressant qu’au départ.

 

B.       La sanction

La sanction est la déchéance du brevet : une fois le délai initial expiré on a encore un délai de grâce de 6 mois pour payer l’annuité avec une surtaxe (½ de l’annuité due). Si à l’expiration de ces 6 mois il n’y a toujours pas de paiement, le directeur de l’INPI peut prononcer la déchéance du brevet. Cette déchéance est rétroactive au jour de l’expiration du délai initial. Elle est publiée, notifiée au breveté. Elle peut être prononcée par le directeur d’office, soit à la demande du breveté lui-même, soit à la demande d’un tiers (un licencié par exemple).

 

Cette décision étant acquise, le breveté (ancien) peut encore sauver son brevet : il peut être relevé de sa déchéance par le directeur de l’INPI à condition de justifier d’une excuse légitime pour le non paiement (exemple la maladie, la mise en redressement judiciaire, la mise en liquidation…). Ce recours est très encadré avec le respect de deux délais :

                   Déposer la demande auprès du directeur de l’INPI dans un délai de 2 mois à compter de la cessation de l’empêchement

                   Le recours n’est recevable que dans un délai de 1 an à compter de l’expiration du délai non observé

 

Paragraphe 2 : L’obligation d’exploiter l’invention objet du brevet

Le législateur lorsqu’il délivre le brevet il poursuit l’intérêt général et que le breveté va exploiter le brevet au profit de la société. Si l’inventeur n’exploite pas le mécanisme du contrat social ne fonctionne pas. Le législateur a prévu une sanction contre cette inexploitation. À l’origine la sanction était la déchéance du brevet.

Actuellement, la sanction est l’octroi de licences légales : c’est-à-dire que ces licences ne sont pas conventionnelles mais elles sont de droit. Des tiers vont donc pouvoir exploiter l’invention au profit de la société en bénéficiant d’un système de licence légale. Il existe deux types de licences légales :

 

                   Les licences obligatoires : elles sont judiciaires (Tribunal de Grande Instance de Paris)

                   Les licences d’offices : elles proviennent d’un arrêté ministériel

A. Les licences obligatoires 

Il existe deux types de licences obligatoires :

                   Les licences obligatoires de droit commun

                   Les licences obligatoires de dépendance

 

1.      Les licences obligatoires de droit commun

Les articles L613-11 à L613-14 du CPI : organisent le régime des licences obligatoires de droit commun.

 

a)  Le délai pour demander la licence

Cette licence obligatoire ne peut pas être demandée à n’importe quel moment, soit :

                   À l’expiration d’un délai de 3 ans après la délivrance du brevet

                   À l’expiration d’un délai de 4 ans à compter du dépôt de la demande

 

En pratique il faut retenir le délai le plus long, ce n’est que lorsque que le défaut d’exploitation est caractérisé que l’on peut demander ces licences. Le plus souvent le délai le plus long est le délai de 3 ans car la procédure de délivrance du brevet prend plus de 3 ans généralement.

 

b)  Les motifs

 

L’article L613-11 du CPI liste ces motifs. Ainsi la licence de droit commun ne peut être demandée que dans 4 circonstances :

                   Le breveté n’a pas commencé à exploiter son brevet ou n’a pas fait de préparatifs effectifs et sérieux pour exploiter son brevet sur le territoire d’un État Membre de l’EEE.

                   Le breveté a commencé à exploiter son brevet sur le territoire d’un État Membre de l’EEE mais cette exploitation est abandonnée depuis plus de 3 ans.

                   Le breveté n’a pas commercialisé en France le produit objet du brevet en quantité suffisante  pour satisfaire aux besoins du marché français.  —>  exploitation trop faible.

                   Le breveté a commercialisé en France le produit objet du brevet en quantité suffisante mais cette commercialisation a cessé depuis plus de 3 ans.

 

Attention :On assimile l’importation de produit objet du brevet fabriqué dans un État de l’O.M.C. à l’exploitation du brevet.

 

c)  La procédure

Procédure devant Le Tribunal de Grande Instance de Paris : débat contradictoire  —>  le demandeur doit justifier de deux conditions :

                   Justification qu’il n’a pas pu obtenir du breveté une licence conventionnelle :

    Soit il a demandé la licence mais refus pur et simple

    Soit il a demandé la licence, elle a été acceptée mais à des conditions intenables

                   Justification qu’il est en état d’exploiter l’invention de manière effective et sérieuse : si le demandeur est contrefacteur les magistrats estiment qu’il a démontré de fait l’exploitation de manière effective et sérieuse.

 

Le breveté peut se défendre en justifiant le défaut d’exploitation par des excuses légitimes  —>  notion vague qui laisse une grande marge d’appréciation aux juges. Exemple admis : le souci du breveté d’exploiter le brevet B de perfectionnement (que le brevet A de base).

 

Si la licence est finalement octroyée, cette licence obligatoire est non exclusive (= comme les licences d’office). C’est le tribunal qui fixe les éléments essentiels : champ d’application territorial, durée de la licence et le montant des redevances… On peut revenir vers le Tribunal pour faire réviser ces conditions d’application de la licence (exemple en cas de changement de situation   économique…).

Attention :Si le licencié ne respecte pas les conditions telles qu’elles ont été fixées par le Tribunal de Grande Instance la licence peut être retirée.

 

N.B. : Cette licence obligatoire est cessible avec le fonds de commerce, l’entreprise à laquelle elle est attachée. Ce n’est qu’une licence qu’il n’agit pas avec rétroactivité : par exemple pour le contrefacteur ce n’est qu’à compter de l’obtention de la licence qu’il est dans une situation licite, avant il reste condamnable.

 

2.      Les licences obligatoires de dépendance

L’article L613-15 du CPI fixe le régime de ces licences. Cette licence correspond à l’hypothèse d’un brevet et d’un perfectionnement sur une invention.

                   Lorsqu’une même personne fait le brevet de base et le perfectionnement : pas de difficulté

                   Lorsque ce sont des personnes différentes sont titulaires du brevet initial et du brevet de perfectionnement de l’invention. Il se crée alors assez naturellement une dépendance juridique entre ces deux personnes car le titulaire du brevet de perfectionnement ne peut exploiter son invention sans exploiter l’invention de base : il ne peut donc exploiter son brevet qu’avec l’accord du titulaire du brevet de base (c’est-à-dire être licencié). Inversement, le titulaire du brevet initial peut exploiter son invention mais il est plus intéressant d’exploiter son brevet avec son perfectionnement. C’est cette situation de dépendance juridique qui a amené le législateur a prévoir la situation en cas de blocage : si le titulaire du brevet initial refuse de donner son accord au titulaire du brevet de perfectionnement.

 

 –> Dans ce cas là l’inventeur du brevet de perfectionnement peut obtenir du Tribunal de Grande Instance de Paris une licence obligatoire à une condition : il faut que le perfectionnement découvert constitue un progrès technique important et présente un intérêt économique considérable.

 

La procédure est exactement la même que la procédure de licence obligatoire de droit commun : même justifications, qu’il ait essuyé un refus etc…

 

À titre de réciproque le titulaire du brevet initial peut également obtenir sur requête au Tribunal de Grande Instance une licence réciproque sur le brevet de perfectionnement.

 

N.B. : dans le domaine des brevets biotechnologiques il existe des licences obligatoires pour le titulaire d’un certificat d’obtention végétale lorsqu’il ne peut pas exploiter sa variété sans le consentement d’un titulaire d’un brevet sur une invention végétale.

 

B.       Les licences d’office

 

Ce sont des licences essentiellement administratives, sauf pour le montant des redevances qui peut être fixé par le Tribunal de Grande Instance de Paris.

 

Il existe plusieurs catégories de licences d’offices, 4 françaises et 1 créée par un règlement communautaire de 2006.

 

1.   Les licences d’office dans l’intérêt de la santé publique

 

L613-16 et L613-17 du CPI.

 

a)  Les deux conditions d’obtention de la licence

Le critère est l’intérêt de la santé publique : un arrêté ministériel peut donc placer sous licences d’office trois types de brevet  —>

 

                   Un brevet délivré pour un médicament, un dispositif médical, un dispositif médical de diagnostic in vitro, un produit thérapeutique annexe ( : produit qui entre en contact avec des éléments du corps pour en assurer la conservation…).

                   Un brevet délivré pour un procédé d’obtention de ces médicaments, dispositifs ou produits, mais aussi les brevets délivrés pour des produits nécessaires à l’obtention des médicaments,  dispositifs ou produits et encore des brevets pour des procédés de fabrication de tels produits..

                   Un brevet délivré pour des méthodes de diagnostic in vivo

 

 –> Il faut que ces produits, procédés ou méthodes ne soient mis à disposition du public qu’en quantité ou en qualité suffisante, ou à des prix anormalement élevé ou que le brevet soit exploité dans des conditions contraires à l’intérêt de la santé publique ou constitutives de pratiques déclarées anticoncurrentielles.

 

b)  La procédure

La procédure normale : le ministre chargé de la propriété industrielle est tenu de rechercher un accord amiable avec le titulaire du brevet en question et ce n’est qu’en cas d’échec qu’il pourra adopter un arrêté de licence d’office. À compter de ce premier arrêté, toute personne qualifiée est autorisée à demander au ministre l’octroi d’une licence d’exploitation.

 

L’arrêté fixe le champ d’application territorial de la licence, la durée.. mais ne fixe pas le montant des redevances qui doit être convenu entre le licencié et le titulaire du brevet et ce n’est qu’en cas d’échec que le montant de la redevance sera fixé par le Tribunal de Grande Instance.

 

Cette licence est non exclusive, cessible avec le fonds de commerce etc…

 

2.   Les licences d’office dans l’intérêt de l’économie nationale

Cette licence ne peut pas concerner les brevets concernant les produits, procédés et méthodes de diagnostic qui relèvent du champ de la licence d’office dans l’intérêt de la santé publique.

 

1ère condition : Le ministre chargé de la propriété industrielle adresse au titulaire du brevet une mise  en demeure d’entreprendre l’exploitation, de manière à satisfaire aux besoins de l’économie nationale. Cette mise en œuvre faire courir un délia de 1 an pendant laquelle le titulaire du brevet doit entreprendre cette exploitation sachant que ce délai peut être prorogé sur le breveté justifie d’excuses légitimes et semble compatible avec les exigences de l’économie nationale.

 

2ème condition : Au bout de ce délai l’exploitation est constatée ou une insuffisance en quantité ou en qualité quand même entreprise et on constante que cela porte préjudice au  développement  économique et à l’intérêt public. Dans ce cas là un décret un conseil d’État peut soumettre le brevet au régime de la licence d’office. À compter de la publication de ce décret, toute personne qualifiée peut demander au ministre chargé de la propriété industrielle la délivrance d’une licence d’exploitation.

 

Cette licence est là encore non exclusive, elle est cessible avec le fonds de commerce ou l’entreprise auxquels elle est attachée. C’est ausis l’arrêté qui fixe la durée, le champ d’application territorial.. les redevances doivent être convenues et à défaut, fixées par le Tribunal de Grande Instance.

 

3.   Les licences d’office dans l’intérêt de la défense nationale

L’article L613-19 du CPI. La seule personne qui peut demander la licence d’office, il peut le faire par l’intermédiaire du ministre chargé de la défense et l’arrêté émane du Ministre chargé de la propriété industrielle.

 

On retrouve les mêmes caractéristiques des licences d’office précédente : champ d’application, durée, redevances par le Tribunal de Grande Instance à défaut d’accord. La seule adaptation est que si les redevances sont fixées par le Tribunal de Grande Instance les redevances sont fixées en chambre du conseil de manière confidentielle. Ce n’est pas forcément l’État lui-même qui va l’exploiter, il peut confier l’exploitation à un tiers.

 

N.B. : L’État peut aller jusqu’à exproprier une invention dans l’intérêt de la défense nationale, avec indemnité pour le breveté exproprié (négociée avec l’État et à défaut d’accord fixée par le Tribunal de Grande Instance).

 

4.   Les licences d’office dans l’intérêt de l’élevage

L’article L5141-13 du code de la santé publique relatif à une licence d’office portant sur les brevets portant sur les médicaments vétérinaires. Cet article a deux objectifs :

                   La licence d’office dans l’intérêt de la santé publique peut s’appliquer aux médicaments vétérinaires si leur mauvaise exploitation nuit à la santé publique.

                   Par exception il est possible d’appliquer la licence d’office dans l’intérêt de l’économie nationale aux médicaments vétérinaires ou dans l’intérêt de l’économie de l’élevage.

 

Les ministres compétents : les ministres de l’agriculture et de la propriété industrielle.

 

5.   La licence obligatoire de brevet portant sur des produits pharmaceutiques destinés à l’exportation (= licence d’office)

L’origine de cette licence est les négociations dans le cadre de l’O.M.C. et de l’ADPIC : dans le cadre de ces accords les États doivent faire évoluer leur législation pour que les médicaments soient brevetables.

 

Cela ne pose pas de problème dans les pays développés mais plus de problème pour les pays en voie de développement car si à terme il peut y avoir des brevets sur les médicaments cela peut poser  des problèmes de santé publique. En effet si on admet un brevet sur le médicament, seul le titulaire du brevet pourra le commercialiser et à un prix supérieur au prix pratiqué si il n’y avait pas eu de brevet. Ce renchérissement des brevets pose un réel problème dans ces pays en développement qui n’ont pas  les moyens financiers d’accéder à ces médicaments et qui connaissent pourtant des pandémies.

 

Conférence à Doha en 2001 : reconnaître aux États Membres de l’O.M.C. la possibilité de recourir aux licences obligatoires dans des situations d’urgence sanitaire. Mais ce n’était pas encore suffisant car l’économie de ces pays en développement ne dispose pas de la capacité industrielle pour produire les médicaments sous couvert de la licence obligatoire.

 

L’O.M.C. a adopté l’idée d’autoriser les entreprises des pays développés à obtenir une licence  obligatoire pour fabriquer des médicaments en vue de leur exportation vers les pays en développement.

 

Mécanisme en deux temps :

                   Obtention d’une licence de fabrication et de commercialisation dans le produit exportateur

                   Demande des pays importateurs accompagnées de licences obligatoires afin de permettre l’importation et la commercialisation des médicaments

 

 —>  Le règlement de l’UE du 17 mai 2006 a été adopté afin d’harmoniser la délivrance de telles licences d’exportation et de fabrication. Ce règlement est traduit dans le droit français à l’article L613-17-1 du CPI qui met en place la procédure pour obtenir ce type de licence.

 

 

 

Chapitre 5 : Les sanctions de la contrefaçon

Section 1 : L’action en contrefaçon

Paragraphe 1 : La compétence matérielle et territoriale

L’article l615-17 du CPI donne une compétence matérielle au Tribunal de Grande Instance de Paris exclusive. Ce Tribunal de Grande Instance a également compétence pour connaître des faits de concurrence déloyale connexe aux faits de contrefaçon. Il est très fréquent qu’en cas d’action en contrefaçon on agisse en concurrence déloyale à titre subsidiaire.

 

Attention : Cet article n’exclut pas la possibilité d’arbitrage.

 

Paragraphe 2 : l’auteur de l’action en contrefaçon

L’article L615-2 du CPI : L’action en contrefaçon peut être exercée par

                   Le titulaire du brevet

                   Le licencié exclusif : après avoir vainement mis en demeure le titulaire d’agir, sauf stipulations contraires. En effet, il se peut que le contrat de licence interdise le licencié exclusif d’agir, soit il peut être contractuellement dispenser de mettre en demeure le titulaire d’agir avant de pouvoir lui-même agir.  Si le licencié agit, cela n’exclut pas l’action du titulaire du brevet à l’isntance.

                   Les licenciés non exclusif :

    de licence légale (obligatoire ou d’office) : peuvent agir après avoir vainement mis en demeure le titulaire d’agir

    de licence conventionnelle : ne peuvent pas agir en contrefaçon

 

Section 2 : La preuve de la contrefaçon

La contrefaçon est un fait juridique, elle peut donc être prouvée par tous moyens (article L615-5 du CPI). De plus l’article L615-5-1-1 autorise les juridictions à ordonner d’office toutes les mesures d’instruction légalement admissibles.

 

Paragraphe 1 : La charge de la preuve

C’est au demandeur à l’action de prouver la réalité de la contrefaçon ( : droit commun). Sauf dans une hypothèse : pour la preuve de la contrefaçon d’un brevet de procédé d’obtention d’un produit. Dans cette hypothèse il est quasiment impossible pour le titulaire de prouver de lui-même que le tiers que l’on poursuit a effectivement obtenu le produit prétendument contrefaisant par l’utilisation de son procédé breveté.

 

Par conséquent, il y a une possibilité pour la juridiction de renverser la charge de la preuve. Le tribunal peut ordonner au défendeur de prouver que le procédé utilisé pour obtenir le produit est différent du procédé breveté. Si le défendeur n’arrive pas à apporter cette preuve, alors tout produit fabriqué sans le consentement du titulaire sera présumé obtenu par le procédé breveté dans deux cas :

 

                   Si le produit obtenu par le procédé breveté est nouveau

                   Si la probabilité est grande que le produit identique a été obtenu pas le procédé breveté alors  que le titulaire du brevet n’a pas pu en dépit d’efforts raisonnables déterminer quel procédé a été utilisé.

 

Paragraphe 2 : Les moyens de preuve

A. La saisie-contrefaçon

C’est le mode de preuve par excellence dans le domaine de la contrefaçon des brevets. La saisie- contrefaçon est une procédure distincte de l’action en contrefaçon que l’on déclenche pendant l’action  en contrefaçon par laquelle toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon soupçonnant l’existence d’une contrefaçon et la présence d’éléments de preuve en un lieu donné, sollicite par requête le président du Tribunal de Grande Instance de Paris aux fins d’obtenir une ordonnance l’autorisant à dépêcher sur place un huissier de justice généralement accompagné d’un expert afin de faire constater  et décrire avec ou sans prélèvement d’échantillons des éléments de preuve de la contrefaçon.

 

Les éléments de preuve directe que l’on peut saisir :

                   Les procédés contrefaisant

                   Des éléments matériels qui traduisent le procédé contrefaisant mis en œuvre ainsi que tous document se rapportant à la contrefaçon

                   Documents techniques, comptables..

 

Les éléments de preuve indirecte que l’on peut saisir :

Toujours aux mêmes fins probatoires (car la saisie-contrefaçon n’a qu’une fin probatoire et non de bloquer l’activité) est également possible « la description ou la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour fabriquer ou distribuer le produit ou pour mettre en œuvre les procédés prétendus contrefaisant. »

 

La juridiction peut subordonner l’exécution de la mesure à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l’indemnisation du saisi, si on se rend compte a posteriori qu’il n’y avait pas de contrefaçon.

 

 —> Délai pour agir : Dans un délai de 20 jours ouvrables ou 31 jours civils si ce délai est plus long, à compter du jour  est intervenu la saisie le requérant doit se pourvoir au fond au civil ou au pénal sinon la demande de saisie est annulée à la demande du saisi sans qu’il n’est a fournir aucun motif et sans préjudice de DOMMAGES & INTÉRÊTS  qu’il est a démontrer.

 

Cette saisie-contrefaçon se trouve également dans la propriété intellectuelle (et droits    voisins).

C’es donc un élément essentiel du droit de propriété industrielle.

 

B.       La saisie en douane

Ce n’est pas à proprement parlé un moyen de preuve, il s’agit seulement de bloquer en douane les marchandises. C’est souvent l’occasion pour les titulaires de propriété industrielle de procéder à la prise de moyen de preuve et notamment la saisie-contrefaçon peut se faire à l’égard de marchandises retenues en douane.

 

La saisie en douane est un mécanisme qui permet aux douanes de retenir des marchandises suspectées d’être contrefaisantes. La retenue en douane a pendant très longtemps pas existé en droit des brevets mais la loi du 11 mars 2014 a étendu aux brevets le mécanisme de la retenue en douane. Ces nouvelles règles dépendent d’un décret qui n’est pas encore adopté. Cette retenue en douane peut se déclencher selon deux schémas différents :

 

1.      Sur demande écrite du propriétaire du brevet ou du licencié 

Les marchandises qui peuvent être retenues sont toute marchandise qui franchit la frontière française en provenance d’un autre membre de l’UE, à l’exception des marchandises qui sont juste de passage dans en France. N.B. : Il existe également un processus concernant les marchandises qui viennent d’autres pays de l’UE et qui entrent dans l’UE  —> ici c’est le procédé de retenue en douane de l’UE dès que des marchandises franchissent la frontière douanière de l’UE.

 

Dès que les marchandises sont retenues, la retenue est notifiée au demandeur. On lui indique la nature et la quantité de ces marchandises, on lui adresse des images. La retenue en douane  est également notifié au détenteur des marchandises retenues. La retenu est également notifiée au Procureur de la République.

 

Le demandeur a alors un délai de 10 jours ouvrables qui tombent à 3 jours ouvrables si ce sont des denrées périssables à compter de la notification pour justifier soit de mesures conservatoires décidées par le Tribunal de Grande Instance sot qu’il s’est pourvu en contrefaçon devant les juridictions civiles ou pénales compétentes et qu’il a constitué les garanties suffisantes dans le cas où les marchandises ne seraient pas contrefaisantes. À défaut, la retenue en douane sera levée de plein droit. Le délai peut être prorogé de 10 jours sur requête motivée du demandeur.

 

2.      Retenue d’office par l’administration des douanes

Les douanes repèrent les marchandises suspectées d’être contrefaisantes même en l’absence de demande écrite. La retenue est notifiée au propriétaire du brevet, au Procureur de la République. Le propriétaire  a alors 4 jours ouvrables pour déposer une demande écrite, à défaut la retenue en douane est levée. Si demande écrite : procédure demande écrite ci-dessus.

 

3.      Les actions pendant la retenue

L’administration des douanes peuvent inspecter les marchandises, prélever des échantillons, réaliser  une saisie-contrefaçon sur les marchandises qui e trouvent entre les mains des douanes pour obtenir des éléments de preuve, PV d’huissier qui constate des éléments contrefaisants.

 

Si la retenue est réalisée sur demande écrite, les marchandises peuvent être détruites sous le contrôle d’un agent des douanes a 3 conditions cumulatives :

 

                   Le demandeur a confirmé par écrit le caractère contrefaisant des marchandises

                   Le demandeur a confirmé qu’il consent à la destruction sous sa responsabilité

                   Le détenteur des marchandises a confirmé par écrit qu’il consent à la destruction des marchandises

 

Si ce sont des marchandises qui franchissent la frontière extérieure de l’UE ce n’est pas la retenue en douane de droit interne qui peut être actionnée mais la retenue en douane organisée par le règlement 608 2013 de l’UE du 12 juin 2013 (entrée en vigueur le 1er janvier 2014). La retenue de droit interne s’est inspirée de ce règlement donc on retrouve les mêmes procédures : soit demande écrite par avance soit une retenue d’office.

 

C.       Le droit d’information

C’est comme la saisie-contrefaçon un mécanisme que l’on retrouve dans tous les droits de propriété intellectuelle. Ce droit permet à un titulaire d’un droit de propriété industrielle d’avoir accès à des documents ou informations susceptibles de le renseigner sur les circuits commerciaux de la contrefaçon.

 

La juridiction peut être saisie au fond ou en référé (avant même l’introduction de l’instance en contrefaçon). Elle peut ordonner, au besoin sous astreinte, la production de documents ou informations de tout document ou information. Ces documents peuvent permettre de déterminer l’origine et les réseaux de distribution de produit argué de contrefaçon.

 

 —> À qui peut-elle ordonner la production de tels documents ?

 

                   À toute personne trouvée en possession du produit prétendu contrefaisant

                   À toute personne mettant en œuvre des procédés argué de contrefaçon

                   À toute personne qui fourni les services utilisés dans des activités prétendues contrefaisantes

                   À toute personne qui intervient dans la production, la fabrication ou la distribution de ces produits.

La juridiction peut refuser d’ordonner la production si il existe un empêchement légitime : exemple la confidentialité de certaines données sensibles

 

Section 3 : La sanction de la contrefaçon  

La contrefaçon est pénalement et civilement condamnée (l’une ou l’autre, l’une et l’autre). Paragraphe 1 : Les sanctions en matière pénale 

Ces sanctions sont prévues par l’article L615-14 du CPI contre « toute personne qui sciemment commet une contrefaçon. »

 

A.Les peines contre les physiques

La contrefaçon est un délit pénal punit de 3 ans d’emprisonnement et de 300 000€ d’amende. Il y a des circonstances aggravantes :

 

                   Lorsque la contrefaçon est le fait d’une bande organisée ou

                   Lorsque la contrefaçon est commise sur un réseau de communication au public en ligne ou

                   Lorsque les faits portent sur une marchandise dangereuse pour la sécurité et la santé de l’homme ou de l’animal.

 

Ces circonstances aggravantes font que la sanction passe à 5 ans d’emprisonnement et 500 000€ d’amende. Cet article prévoit un doublement de ces peines en cas de récidives ou si le contrefacteur était lié conventionnellement au  titulaire  du  brevet.  Il  existe  également  des  peines  complémentaires pour les personnes physiques :

 

                   Privations des droits d’élection ou d’éligibilité pour certaines tribunaux

                   Le retrait des circuits commerciaux au frais du coupable des objets jugés contrefaisants et de toute chose qui a servi ou qui été destinée à commettre une infraction

                   Destruction aux frais du condamnés ou remise à la partie lésée

                   Diffusion du jugement aux frais du condamné

B. Les peines contre les personnes morales 

Pour les peines prononcées contre les personnes morales : une peine d’amende qui est portée au quintuple de ce qui est prévu (5 x 300 000€ ou 3 x 300 000€). Cet article renvoie également à une liste de peine principale : exemple la dissolution, l’interdiction d’exercer une activité, la fermeture définitive de l’établissement…

 

Pour les peins complémentaires : destruction, publication du jugement, remise à la partie lésée…

 —> mêmes peines que pour les personnes physiques.

Paragraphe 2 : Les sanctions en matière civile 

A.Le principe et l’exception de l’engagement de la responsabilité de l’auteur de la contrefaçon

L615-1 du CPI : « Toute atteinte au droit du propriétaire du brevet constitue une contrefaçon de nature à engager la responsabilité de son auteur. » En principe l’acte de contrefaçon engage la responsabilité civile de son auteur peut importe qu’il soit de bonne ou mauvaise foi.

Par exception l’article L613*3 réserve le cas particulier du contrefacteur qui n’a pas fabriqué le produit contrefaisant : celui qui offre, qui met dans le commerce, qui exporte, qui détient à ses fins… Celui-ci n’engage sa responsabilité que si il a commis ces faits en connaissance de cause.

 

B. L’allocation de Dommages & Intérets 

 

L’élément essentiel de la sanction de la contrefaçon sont les DOMMAGES & INTÉRÊTS . L615-7 du CPI « pour fixer les DOMMAGES & INTÉRÊTS  la juridiction doit prendre en considération distinctement trois éléments :

 

                   Les conséquences économiques négatives subies par la partie lésée dont le manque à gagner et la perte subie

                   Le préjudice moral causé à la partie lésée

                   Les bénéfices réalisés par le contrefacteur y compris les économies d’investissement  intellectuel, matériel et promotionnel que celui-ci a retiré de la contrefaçon. »

 

Les bénéfices réalisés par le contrefacteur n’est pas forcément le préjudice subi par le titulaire du droit de propriété industrielle, en effet parfois le contrefacteur exploite mieux le produit que le breveté. Ainsi parfois le contrefacteur vendu plus de biens que le breveté.

 

Il ne s’agit pas d’introduire la pratique des « punitive damages ». En revanche cette prise en considération des bénéfices du contrefacteur a pour objectif de dissuader le contrefacteur en retirant tout intérêt dans la contrefaçon (car on le prive de tout bénéfice). Les juridictions françaises par rapport à cette évolution sont restées relativement prudentes en continuant à appliquer les solutions traditionnelles ( : réparation du préjudice) mais de plus en plus elles attribuent tout ou partie des bénéfices du contrefacteur dans les DOMMAGES & INTÉRÊTS  alloués.

 

Il est prévu dans l’article L615-7 qu’à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée la juridiction peut allouer à titre de DOMMAGES & INTÉRÊTS  une somme forfaitaire (lorsque la partie lésée ne peut pas révéler ses bénéfices ou lorsque l’on ne peut pas apprécier les bénéfices du contrefacteur) qui doit être supérieure au montant des redevances qui auraient été dues par le contrefacteur si il avait été licencié. Cette somme forfaitaire n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

 

C.       Les autres sanctions

Au civil est également possible le rappel ou le retrait des circuits commerciaux : « en cas de condamnation civile pour contrefaçon, la juridiction peut ordonner que les produits reconnus comme contrefaisants et les matériaux ou instruments qui ont servi à leur fabrication soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement des circuits commerciaux détruits ou confisqués au profit de la partie lésée. »

La juridiction peut aussi ordonner aux frais du contrefacteur toute mesure appropriée de publicité du jugement.

Délai de prescription : L615-8 du CPI prévoit que « Les actions en contrefaçon prévues par le présent chapitre sont prescrites par 5 ans à compter des faits qui en sont la cause. » Le chapitre en question (chapitre 5) concerne les actions civiles et pénales donc il semble qu’en droit des brevets le délai de prescription quinquennal s’applique aussi bien aux actions civiles que pénales en contrefaçon. Au plan pénal la contrefaçon est un délit or le délai de prescription des délits est de 3 ans, ainsi on a un délai dérogatoire au délai de droit commun.

 

D.Le système d’injonction préalable

1.      La procédure de l’injonction préalable 

En attendant d’obtenir une décision sur l’action en contrefaçon (délai long) on a mis en place un système d’injonction préalable. L615-3 du CPI prévoit que « toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner au besoin sous astreinte à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente au droit conféré par le brevet ou à empêcher la poursuite d’acte argué de contrefaçon. »

 

Dans la pratique c’est une demande en référé mais il est possible de demander ses mesures sur requête (non contradictoire) mais c’est très rare. Les juridictions ne s’y aventurent que lorsque l’on peut atteindre un contrefacteur que dans certaines situations (exemple des contrefacteurs étrangers qui ne sont présents qu’à un moment donné et sans être prévenu pour éviter qu’ils ne fassent disparaître les preuves).

 

La juridiction ne va effectivement donner une mesure que si les éléments de preuve raisonnablement accessibles au demandeur rendent vraisemblables qu’il y a atteinte au brevet ou qu’une atteinte est imminente. La juridiction peut subordonner l’exécution des mesures qu’elle ordonne à la constitution de garanties par le demandeur.

 

2.      Les mesures ordonnées

 

L’article L615-3 du CPI prévoit que la juridiction peut :

                   Interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon

                   Subordonner la poursuite des actes à la constitution de garanties par le contrefacteur présumé

                   Prévoir la remise entre les mains d’un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte au droit  du brevet afin d’empêcher leur mise dans le marché

                   Ordonner la saisie-conservatoire des biens (mobiliers et immobiliers) si le demandeur justifie de circonstances de nature à compromettre le recouvrement de DOMMAGES & INTÉRÊTS .

                   Ordonner la communication des documents banquiers, comptables, commerciaux ou autres informations pertinentes pour déterminer les biens objets de la saisie

                   Accorder une provision au demandeur lorsque l’existence du préjudice du demandeur n’est pas sérieusement contestable.

 

Ces mesures si elles sont ordonnées avant une action au fond doivent être confirmées par une action au fond au civil ou au pénal ou par un dépôt de plainte au Procureur de la République dans un délai de 20 jours ouvrables ou 31 jours civils à compter de la date de l’ordonnance, à peine de nullité de l’ordonnance.

 

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