Le droit de la nationalité

Droit de la nationalité et de la condition des étrangers

    Le droit de la nationalité et des étrangers est un droit complexe qui concerne les citoyens français et ceux qui aspirent à le devenir. Naturalisation, droit du sol et du sang, binationalité, apatridie… Des concepts que ce cours tente de clarifier.

Il y a deux choses à bien comprendre. 

  —>  D’abord, dans la conception française du droit international privé, qui est la conception la plus large parmi les conceptions que l’on a de cette manière dans les différents pays. 

 

Le Droit International Privé comprend quatre branches à savoir non seulement les conflits de lois et de juridictions mais aussi le droit de la nationalité et la condition des étrangers. 

 

Il faut que vous sachiez dans certains autres pays, notamment aux pays anglo-saxons et aux pays de tradition germanique, le droit international privé ne concerne que les conflits de lois et les conflits de juridictions. C’est ainsi qu’en Allemagne, le droit de la nationalité relève plutôt du droit constitutionnel ou du droit public en général et que dans beaucoup d’autres pays aussi, la condition des étrangers est plutôt rattachée aux libertés publiques. 

 

 

A l’inverse, en France nous sommes attachés à cette conception large du DIP, elle a d’ailleurs des justifications et notamment l’une de ses justifications les plus profondes est qu’aussi bien dans le droit de la nationalité, la condition des étrangers que dans les conflits de lois et de juridictions, il y a un élément d’extranéité c’est-à-dire un élément étranger soit réel, soit virtuel, c’est le cas du droit de la nationalité : se demander si une personne est française ?

 

On peut dire que la justification de la conception large du Droit International Privé en France repose sur un élément d’extranéité. Sur le terrain non plus de la structure politique, mais juridique, ces quatre branches peuvent relever de politiques comparables, par exemple, un pays d’immigration qui reçoit de nombreux immigrants et les intégrer rapidement aura des règles de reconduction des étrangers favorables, un accès rapide à sa nationalité et pour ce qui est du statut personnel en matière de conflit de loi, il aura tendance à donner compétence à la loi du domicile plutôt qu’à la loi nationale, puisque de la sorte il appliquera sa propre loi aux récents immigrants.

 

 —>  Deuxième point, dans ces quatre branches, il ne fait aucun doute que les branches considérées comme les plus importantes sont les deux branches conflictuelles c’est-à-dire les conflits de lois et les conflits de juridictions. 

 

Et,  c’est  en  effet  classiquement  le  cœur  du  droit  international  privé  avec  notamment  l’existence  de  ces  règles de conflits qui détermine le tribunal compétent ou la loi applicable pour les règles de conflits de lois qui sont donc à ce titre des règles d’aiguillage et non pas des règles substantielles. Or, en matière de droit de la nationalité et en matière de condition des étrangers les règles de conflits sont extrêmement rares et que la plupart des règles sont en réalité des règles substantielles, malléables. 

 

Cela ne signifie pas pour autant que le droit de la nationalité ou la condition des étrangers serait sans intérêt, ou n’aurait qu’un intérêt anecdotique. D’abord, il faut se méfier d’une vision trop académique des questions. Dans la vision académique, ce qui est le plus intéressant, le plus complexe, c’est les règles de conflits. 

 

Dans la réalité sociale, les questions dont on parle c’est beaucoup plus souvent du droit de la nationalité et la condition des étrangers. Le débat actuel sur l’identité nationale croise complètement les deux branches du Droit International Privé considérés comme secondaires. La question de l’identité nationale est réglée simplement par le droit de la nationalité française. Voici le plan du cours :

 

 Voici le plan du cours de droit de la nationalité ou du droit des étrangers :

 

  • PARTIE 1   : LE DROIT DE LA NATIONALITE
  • Sous titre 1 :   La théorie générale de la nationalité
  • Chapitre 1 : le concept de nationalité dans l’ordre international
  • Section 1 : le principe de souveraineté exclusive de chaque Etat 
  • Section 2 : les tempéraments au principe 
  • Chapitre 2 : le concept de nationalité dans l’ordre interne
  • Section 1 : la nationalité comme appartenance 
  • Paragraphe 1 : 
  • La distinction de la nationalité de droit et de la nationalité de fait
  • Paragraphe 2 : 
  • L’alliance de la nationalité de droit et de la nationalité de fait
  • Paragraphe 3 : 
  • Les rapports entre citoyenneté et nationalité
  • Section 2 : la nationalité comme allégeance 
  • Paragraphe 1 : 
  • La nationalité du point de vue de l’État
  • Paragraphe 2 : 
  • La nationalité du point de vue de la personne
  • Chapitre 3 :
  • Les conflits de nationalité
  • Section 1 : le conflit négatif 
  • Paragraphe 1 : 
  • La prévention de l’apatride
  • Paragraphe 2 : 
  • Le traitement de l’apatride
  • Section 2 : le conflit positif 
  • Paragraphe 1 : 
  • La position actuelle de la question
  • Paragraphe 2 : 
  • Les droits et obligations du plurinational
  • Paragraphe 3 : 
  • Le statut personnel du plurinational
  • Sous-titre 2 : Le droit positif de la nationalité française
  • Chapitre préliminaire : Évolution historique du droit de la nationalité française
  • Section 1 : Le Code Napoléon 
  • Section 2 : La Loi du 10 Aout 1927 
  • Section 3 : Le Code de la Nationalité Française
  • Section 4 : La loi du 9 Janvier 1973 
  • Section 5 :  L’ère  des  turbulences 
  • Paragraphe 1 : 
  • La  remise  en  cause  de  certains  modes  d’accès  à  notre  nationalité
  • Paragraphe 2 : 
  • Une stabilité au moins relative
  • Chapitre 1    :  Etre Français
  • Section 1 :  L’Attribution  de  la  Nationalité  Française 
  • Sous-section 1 :   L’Attribution   de   la   Nationalité   Française   en   Raison   de   la  Filiation
  • Paragraphe 1 : 
  • La règle de principe
  • Paragraphe 2 : 
  • La règle corrective
  • Sous-Section 2 :   L’Attribution   de   la   Nationalité   Française   en   Raison   de   la  Naissance en France
  • Paragraphe 1 : 
  • Naissance  en  France  et  prévention  de  l’apatridie
  • Paragraphe 2 : 
  • La règle de la double naissance en France
  • Section 2 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité Française 
  • Sous-Section 1 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité  Française  en  Raison  d’un  Lien  Particulier avec la France
  • Paragraphe 1 : 
  • La   combinaison   d’un   lien   avec   la   France   et   de   la   volonté   de   devenir  français
  • A) L’acquisition  de  la  nationalité  française par naturalisation
  • 1 – Les conditions de recevabilité de la naturalisation
  • 2 – La procédure de la naturalisation
  • 3 – Les effets de la naturalisation
  • B) L’acquisition de la nationalité française par déclaration à raison de la possession d’état 
  • Paragraphe 2 : 
  • La  combinaison  d’un  lien  avec  la  France  et  de  l’absence  de  volonté  de  ne  pas devenir français
  • A) L’évolution  historique
  • B) Les catégories concernées par ce dispositif
  • C)  Le régime juridique actuel
  • 1 – La règle de principe
  • 2 – La règle corrective
  • Sous-Section 2 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité  Française  en  Raison  d’un  Lien  avec un Français
  • Paragraphe 1 : 
  • L’acquisition   par   déclaration   à   la   suite   de   l’adoption   simple   par   un  français
  • Paragraphe 2 : 
  • L’acquisition par déclaration à la suite du mariage avec un conjoint français
  • A) Les  conditions  de  l’acquisition  par  déclaration  à  raison  du  mariage  avec  un  français
  • B) La procédure
  • C) Les  effets  de  l’acquisition  par  déclaration
  • Chapitre 2 :  Ne plus être français
  • Section 1 : La Perte Choisie 
  • Paragraphe 1 : 
  • La perte par déclaration
  • A) A la suite du mariage avec un conjoint étranger
  • B) La perte  par  déclaration  à  la  suite  de  l’acquisition  volontaire  d’une  nationalité  étrangère
  •  Paragraphe 2 : 
  • La perte par décret
  • Section 2 : La Perte Constatée 
  • Paragraphe 1 : La perte par désuétude
  • Paragraphe 2 : 
  • La perte pour comportement
  • Section 3 : La Perte Imposée 
  • Paragraphe 1 : 
  • La perte pour désobéissance
  • Paragraphe 2 : 
  • La perte par déchéance
  • Chapitre 3 :  Etre français ou ne pas  l’être
  • Section 1 : La Preuve de la Nationalité Française
  • Paragraphe 1 : 
  • La charge de la preuve
  • Paragraphe 2 : 
  • L’objet  de  la  preuve  et  des  modes  de  preuve
  • A) La preuve de la nationalité française
  • B)  La  preuve  de  l’extranéité
  • Section 2 : Le Contentieux de la Nationalité Française
  • Paragraphe 1 : 
  • La juridiction compétente
  • Paragraphe 2 :  La procédure
  • Paragraphe 3 : 
  • Les effets du jugement
  • PARTIE 2   LA CONDITION DES ETRANGERS
  • Titre 1 : La Condition des Personnes Physiques Etrangères
  • Chapitre 1 : L’Entrée  et  le  Séjour  des  Etrangers  en  France
  • Section 1 :  L’Accès  au  Territoire  Français 
  • Paragraphe 1 : 
  • Le régime de droit commun
  • A) L’obtention  préalable  d’un  visa
  • B)  L’entrée  sur  le  territoire
  • Paragraphe 2 : 
  • Les régimes particuliers
  • Section 2 : Le Séjour en France 
  • Paragraphe 1 : 
  • La carte de séjour temporaire
  • Paragraphe 2 : 
  • La carte de résidant
  • Paragraphe 3 : 
  • L’activité professionnelle
  • Section 3 :  L’Eloignement  Des  Etrangers  Hors  du  Territoire  Français 
  • Paragraphe 1 : 
  • L’obligation  de  quitter  le  territoire  français
  • Paragraphe 2 : 
  • La reconduite à la frontière
  • Paragraphe 3 :  L’expulsion
  • Chapitre 2 : Les Droits des Etrangers en France
  • Section 1 : Les Droits publics des étrangers en France 
  • Paragraphe 1 : 
  • Les droits de participation à la vie politique
  • Paragraphe 2 : 
  • L’accès  aux  fonctions  publiques
  • Paragraphe 3 : 
  • La participation aux charges publiques
  • Paragraphe 4 : 
  • La  jouissance  des  libertés  publiques  et  l’accès  au  service public
  • Section 2 : Les droits privés des Etrangers en France 
  • Paragraphe 1 : 
  • L’article  11  du  Code  Napoléon  dans  son  interprétation  originelle
  • Paragraphe 2 : 
  • L’interprétation  ultérieure  du  texte par la jurisprudence
  • Paragraphe 3 : 
  • Les  droits  privés  des  étrangers  à  l’époque  contemporaine
  • Titre 2 : La Condition des Personnes morales étrangères
  • Chapitre 1 : La Nationalité de la Société
  • Section 1 : Siège Social et Incorporation
  • Section 2: Siège Social et Contrôle 
  • Chapitre 2 : La Condition des Sociétés Etrangères en France
  • Chapitre 3 : La Loi Applicable sur les Sociétés

 

PARTIE 1   : LE DROIT DE LA NATIONALITE

 

 général indépendamment de ses concrétisations particulières. Il n’y a pas de droit de la nationalité en Ce titre est très gravement ambigu car il pourrait laisser penser qu’il existe un droit de la nationalité en

général parce qu’aucun pays n’a compétence pour légiférer sur une autre nationalité que la sienne.  Voilà une règle de droit international public, qui est l’une des règles de cette discipline les plus solides, les plus constantes et les plus anciennes. Chaque Etat est exclusivement souverain pour ce qui concerne sa propre nationalité et absolument incompétent pour ce qui concerne toutes les autres.  Exemple : le législateur français ne peut légiférer que sur la nationalité française, il n’a aucun pouvoir pour déterminer si telle ou telle personne est espagnole, italienne. Inversement, il n’est aucune autre  de droit de la nationalité générale, mais un droit de la nationalité française dont les règles se trouvent puissance de la Terre, pour déterminer qui n’est ou n’est pas français. Cela signifie aussi qu’il n’y a pas dans le Code civil. 

  

Pourquoi dans ces conditions avoir donné à cet intitulé droit de la nationalité ? 

 

 On peut repérer un certain nombre de règles et de principes communs qui finissent par former une théorie générale de la nationalité.

  

Sous titre 1 :

La théorie générale de la nationalité

                                          

 

On pourrait dire ironiquement que cette théorie générale se réduit à pas grand chose, ce serait un peu sévère puisqu’on observe à la base de la nationalité un accord assez profond de la plupart des pays sur le concept même de nationalité et de ce point de vue, dans tous les pays, le concept de nationalité est au fond à double versant, à double face, il y a en quelque sorte un versant international et il a aussi un versant interne. En d’autres termes, il sert à la fois à répartir la population du monde entre les différentes souverainetés étatiques et il sert aussi à déterminer la population constitutive de chaque Etat pris dans son individualité propre. 

 

Sur la polysémie du mot ordre, le concept de nationalité permet de mettre de « l’ordre » aussi bien dans le champ international, la population mondiale est répartie dans des Etats et dans un chaos distinct et en même temps, il sert à mettre de l’ordre interne car il est capital de savoir qui est son ressortissant. 

 

On retrouve ces deux éléments d’ordre international et interne dans pratiquement tous les pays et en même temps, il y a aussi dans tous les pays du désordre car on observe des conflits de nationalité : 

 

 —>

 soit que certaines personnes aient plusieurs nationalités à la fois ce qui est un phénomène en

expansion 

 

 —>

 soit que certaines personnes n’aient aucune nationalité, c’est le cas des apatrides, ce qui est un phénomène très négatif pour les personnes concernés et qui est un phénomène qui n’est pas en voie de disparition malgré le droit de la nationalité comme droit de l’homme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chapitre 1 : le concept de nationalité dans l’ordre international

 

 

Le concept de nationalité joue un rôle essentiel dans la construction de l’ordre international puisqu’il permet de répartir l’ensemble de la population mondiale entre les différentes souverainetés étatiques. 

 

Cependant, une fois que l’on a énoncé cette constatation qui est d’ailleurs évidente, il est assez difficile d’aller plus loin du point de vue de l’ordre international puisque la seule règle que l’ordre international impose en la matière, c’est le principe de souveraineté exclusive de chaque État pour ce qui concerne sa propre nationalité. Cependant, ce principe connaît quand même quelques atténuations, quelques tempéraments très timides qui ont quand même le mérite d’exister et qu’il faudra signaler.

 

Section 1 : le principe de souveraineté exclusive de chaque Etat

 

Chaque État est exclusivement souverain et donc exclusivement compétent pour tout ce qui concerne sa propre nationalité qu’il s’agisse :

 

 —>  de l’attribution de la nationalité, 

 

 —>  de l’acquisition de la nationalité, 

 

 —>  de la perte de la nationalité. 

 

Il revient exclusivement à l’État français et à ses propres autorités de dire qui est français et qui ne l’est pas :

 

 —>  Dire qui est français :

 

          soit de dire qui est français de naissance, c’est ce qu’on appelle l’attribution de la nationalité française,

          soit pour être devenu français en cours d’existence, c’est ce qu’on appelle l’acquisition de la nationalité française,

 

 —>  Et de dire qui n’est pas français :

 

          soit que la personne concernée ait perdu la nationalité française         soit qu’elle n’ait jamais été française.

 

En revanche, s’il revient à l’État français de dire qui n’est pas français, l’État français n’a strictement aucune compétence pour dire quelle est la nationalité étrangère de la personne qui n’est pas française, cela revient aux États en cause.

 

C’est une règle qui relève de la coutume internationale, beaucoup plus que d’un texte explicite véritablement contraignant. Il existe cependant une convention internationale : Convention de La Haye du 12 avril 1930 relatif aux conflits de nationalité mais cette Convention a été assez peu ratifiée et notamment elle n’a pas été ratifiée par la France. On estime d’un accord général que cette Convention exprime un principe universellement reconnu et qui vaut par lui-même indépendamment de la ratification ou non de la Convention  

Section 2 : les tempéraments au principe

 

Toute la question est de savoir ici s’il existe ou non des règles correctives quand un État abuse manifestement de sa souveraineté exclusive soit pour attribuer ou concéder, soit pour retirer sa nationalité dans des conditions manifestement déraisonnables ou scandaleuses ou contraire à tous les droits humains. La réponse à cette question n’est malheureusement pas évidente. Il y a, il est vrai un arrêt de la Cour International de Justice, rendu le 6 avril 1955, NOTTEBOHM qui, dans une situation de pluri-nationalité a déclaré inopposable aux États-tiers, une des nationalités plurinationales qui étaient en réalité dépourvues de tout rattachement effectif avec l’État concerné. En réalité l’arrêt NOTTEBOHM s’inscrit dans une affaire très particulière puisqu’il s’agit non pas de la nationalité en général mais d’un cas de pluri-nationalité et en l’espèce, la nationalité en cause était manquée de fondements sérieux.  

 

« Ces faits établissent clairement d’une part l’absence de tout lien de rattachement entre Nottebohm et le Liechtenstein, d’autre part l’existence d’un lien ancien et étroit de rattachement entre lui et le Guatemala, lien que sa naturalisation n’a aucunement affaibli. Cette naturalisation ne repose pas sur un attachement réel au Liechtenstein qui lui soit antérieur et elle n’a rien changé au genre de vie de celui à qui elle a été conférée dans des conditions exceptionnelles de rapidité et de bienveillance. Sous ces deux aspects, elle manque de la sincérité qu’on doit attendre d’un acte aussi grave pour qu’il s’impose au respect d’un Etat se trouvant dans la situation du Guatemala. Elle a été octroyée sans égard à l’idée que l’on se fait, dans les rapports internationaux, de la nationalité. Plutôt que demandée pour obtenir la consécration en droit de l’appartenance en fait de Nottebohm à la population du Liechtenstein, cette naturalisation a été recherchée, par lui pour lui permettre de substituer à sa qualité de sujet d’un Etat belligérant la qualité de sujet d’un Etat neutre, dans le but unique de passer ainsi sous la protection du Liechtenstein et non d’en épouser les traditions, les intérêts, le genre de vie, d’assumer les obligations – autres que fiscales – et d’exercer les droits attachés à la qualité ainsi acquise.

Le Guatemala n’est pas tenu de reconnaître une nationalité ainsi octroyée. En conséquence, le Liechtenstein n’est pas fondé à étendre sa protection à Nottebohm à l’égard du Guatemala et il doit être, pour ce motif, déclaré irrecevable en sa demande. La Cour, en conséquence, n’a pas à examiner les autres fins de non recevoir présentées par le Guatemala ni les conclusions des Parties autres que celles sur lesquelles elle statue conformément aux motifs précédemment énoncés. »

 

 —>  Est-ce que cette jurisprudence pourrait aller plus loin ? 

La question est restée en suspend. La question de l’abus de sa souveraineté exclusive par l’État est beaucoup plus grave dans l’hypothèse inverse, quand un État retire abusivement ou scandaleusement sa propre nationalité à un ressortissant. Et là, malheureusement, les exemples sont nombreux dans l’histoire du XXe siècle. 

Exemple : des citoyens allemands d’origine juive qui ont été rapidement déchus de la nationalité allemande sous le nazisme. Ce qui signifiait l’apatride de ces personnes et ensuite leurs exterminations.

 

 —>  Quand est-t-il de cette déchéance de la nationalité pour les Etats-tiers ? Ont-ils considéré que ces retraits fussent scandaleux et attentatoires aux droits de l’homme ? 

Il est difficile de répondre à cette question, suivant la question posée sous le nazisme ou après sa défaite. Dans une situation de ce genre, la déchéance de nationalité n’est pas reconnue par les autres États lorsqu’elle est ouvertement ou manifestement discriminatoire. Ce tempérament a été énoncé plus fermement en 1945 qu’avant.

 

Exemple : La question a été posée avec une pratique de l’ancienne Union Soviétique, après 1945, qui, en règle générale, retirait la nationalité politique aux résidents qui choisissaient de s’exiler dans un pays occidentale. Paradoxalement, ce retrait de nationalité s’accompagnait d’un apparent assouplissement du régime soviétique. Le régime soviétique acceptait de laisser s’exiler certains résidents mais s’accompagnait de la perte de la nationalité fixée à la date même du départ ; ce qui faisait que la personne arrivait apatride sans toujours le savoir. Cette situation n’est pas comparable sous le nazisme mais tout de même attentatoire aux Droits de l’homme, perte de la nationalité à la seule contrainte que ces personnes devaient s’exiler pour vivre sous leurs propres convictions. L’attitude des États tiers a été de considérer comme inopposable ces déchéances scandaleuses de nationalité. Cependant, outre que la réaction des Etats-tiers manque parfois de force et de fermeté, il est à craindre que l’inopposabilité de la déchéance de nationalité par un État oppresseur est un remède un peu illusoire tant que cet État oppresseur subsiste. Le remède le plus efficace dans l’immédiat est d’accorder aux personnes concernées la qualité de réfugiés et aussi sans doute de leurs ouvrir un accès plus facile à la nationalité du pays où ils trouvent refuges. En toute hypothèse, l’inopposabilité de la déchéance de nationalité n’a véritablement d’intérêt pratique qu’après la chute du régime dictatorial ou totalitaire quand la personne concernée peut revenir dans son pays d’origine et qu’elle entend faire établir ses droits fondamentaux et notamment celui d’avoir conserver sa nationalité d’origine malgré les mesures du régime d’oppression.

Chapitre 2 : le concept de nationalité dans l’ordre interne

 

 

S’agissant de ce concept dans l’ordre interne, on s’aperçoit que du point de vue de l’ordre interne la nationalité peut être conçue de deux façons différentes, qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement contradictoires mais qui portent une lumière différente sur la réalité de la nationalité. 

 

 —>  On peut voir dans la nationalité surtout une appartenance, elle est d’ailleurs à la fois la cause et la conséquence de la nationalité française. De ce point de vue, la nationalité est fondamentalement une question d’appartenance. 

 

 —>  Un deuxième point de vue possible, plus strictement juridique et qui voit dans la nationalité, une allégeance (je suis sujet de l’État français, ou souverain français). 

 

On voit bien que les deux approches sont différentes. L’approche d’appartenance est plus horizontale, elle se réfère à l’appartenance à un peuple à une nation. L’autre approche est plus verticale, c’est l’allégeance à un État. Beaucoup de questions de la nationalité dans l’ordre interne relèvent de ces deux points de vue.

 

Section 1 : la nationalité comme appartenance

 

S’agissant de la nationalité comme appartenance, un premier problème peut se poser qui concerne les rapports du droit et du fait. 

 

Incontestablement, la nationalité est un concept juridique, parfaitement constitué. Avoir la nationalité française est une situation juridique tout à fait claire. 

 

Ce concept juridique doit être distingué de la situation de fait de la personne, il se peut que j’ai la nationalité française et que de fait, de surcroît, je me sente tout à fait français, c’est même la situation la plus fréquente. Il se peut à l’opposé que j’ai la nationalité française et que je ne me sente pas français, situation de fait qui est parfois revendiquée. Il peut y avoir distinction dans des cas minoritaires entre ce qu’on appelle la nationalité de droit et ce qu’on appelle la nationalité de fait. 

 

Le plus souvent il y a alliance entre la nationalité de droit et la nationalité de fait. 

 

Il conviendra aussi de s’interroger sur un problème sans doute plus contemporain qui est celui des rapports complexes entre la nationalité et la citoyenneté.

 

Paragraphe 1 :

La distinction de la nationalité de droit et de la nationalité de fait

 

 —>  Pour la nationalité de droit, la définition est très simple, c’est la nationalité qui correspond aux règles d’attribution ou d’acquisition de la nationalité du pays concerné. Cette nationalité de droit existe indépendamment du point de savoir si je me sens ou non réellement français. 

 

 —>  Quant à la nationalité de fait, qui est d’ailleurs une expression ambigüe, c’est plutôt le sentiment qu’a la personne d’appartenir ou non à une nationalité ou à un peuple déterminé. Un certain nombre de personnes peuvent estimer qu’elles n’ont pas la nationalité qu’elles portent juridiquement ou elles peuvent estimer à l’inverse que leur vraie nationalité n’est pas celle qui leur est attribuée. 

 —>  Est-ce que cette distinction de la nationalité de droit et de la nationalité de fait recoupe exactement le débat actuel sur l’identité nationale ? 

 

Lorsque l’on s’interroge sur la distinction de la nationalité de droit et de fait, on s’intéresse essentiellement à ce que ressent intimement la personne concernée et à ce qu’elle dit de son propre sentiment ; Soit qu’elle se revendique de sa propre nationalité ou d’une autre nationalité. 

 

Dans le débat sur l’identité nationale, le point de vue est différent, on ne se demande ce que ressentent les personnes concernées individuellement mais plutôt ce que ressent collectivement le peuple français dans son ensemble sur ce qui, en réalité, constituerait vraisemblablement l’identité française. L’analyse de ce qui est véritablement ressenti en fait ou de ce qui devrait être pratiqué selon les canons dominants est une analyse extraordinairement complexe et dont les résultats ne peuvent pas être tranchés, c’est un des avantages du concept juridique que d’éviter ce genre d’interrogation.

 

Paragraphe 2 :

L’alliance de la nationalité de droit et de la nationalité de fait

 

C’est la situation souhaitable. Cette situation d’alliance est dans l’intérêt de l’individu et elle est aussi dans l’intérêt de l’État, aucun État n’a intérêt à ce que ces ressortissants ressentent un sentiment de différenciation. Pour autant cette alliance n’est pas toujours réalisée, l’histoire donne de nombreux exemples des difficultés de cette alliance et la période contemporaine aussi.

 

Cette alliance n’est pas toujours réalisée. Il y a au contraire divorce entre la nationalité de droit et le sentiment de la personne, chaque fois la personne relève d’un État qu’il ne sent pas comme le sien :

 

 —>  Soit la personne a disparu,

 

 —>  Cet État n’a pas pu encore s’affirmer.

 

Sur ce terrain, les exemples historiques et contemporains abondent. 

 

Exemple : En Europe, l’un des exemples historiques les plus connus est celui de la Pologne, puisqu’elle a disparu en tant qu’État entre 1795 et 1918. Le territoire de l’ancien royaume de Pologne avait été partagé entre l’empire Russe qui possédait Varsovie, l’empire d’Autriche et le Royaume de Prusse devenu en 1871 l’empire Allemand. Il n’y avait plus de nationalité de droit polonaise mais pourtant la très grande majorité de la population polonaise à continuer à se sentir polonaise de fait. Il y a d’ailleurs eu dans cette période des révoltes très fortes surtout dans la partie russe, réprimées très fortement. Ce divorce de la nationalité de droit et de la nationalité de fait a disparu en 1918 mais par une sorte d’ironie de l’histoire qui est assez fréquente, la République polonaise créée dans les traités de paix en 1918 intégrait des minorités qui ne se sentaient pas du tout polonaise. 

 

Autre exemple : La période contemporaine connaît des situations de ce type : l’exemple le plus connu est celui des kurdes qui ont un sentiment national important dans la grande majorité alors qu’aucun État kurde n’existe. Il y a également l’exemple complexe des palestiniens (pas d’État palestinien au sens complet du terme). Et, sur un terrain différent, dans certains cas les citoyens se sentent nationaux d’une communauté ou d’une province à l’intérieur de celui-ci (Breton, Basque, Corse ; Belgique et flamands).

 

 

 

 

Paragraphe 3 :

Les rapports entre citoyenneté et nationalité

 

Il s’agit d’une question qui est plus récente que celle de la distinction de la nationalité de droit et de la nationalité de fait. Jusqu’aux dernières décennies les deux concepts ont été presque totalement assimilés au profit d’ailleurs du concept de nationalité englobant le concept de citoyenneté. Seul le national était citoyen et la citoyenneté était à l’inverse exclusivement liée à la nationalité. 

 

La situation aujourd’hui est un peu plus complexe pour au moins deux types de raisons : 

 

 —>  d’abord il y a depuis le traité de Maastricht du 7 février 1992, la citoyenneté européenne qui est de plein droit attribuée à tout national d’un pays membre de l’Union Européenne. Cette citoyenneté reste liée à la nationalité mais dans ce cas la citoyenneté et la nationalité ne sont pas sur le même plan. La nationalité concerne un État membre alors que la citoyenneté européenne concerne l’ensemble de l’Union Européenne. 

Aujourd’hui, tout ressortissant d’un État membre de l’Union Européenne a finalement deux citoyennetés : la citoyenneté relative à l’État dont il est ressortissant et la citoyenneté européenne. Par conséquent, on voit aussi que le concept de citoyenneté commence à prendre une certaine autonomie, limitée mais quand même réelle par rapport au concept de nationalité. 

 

Cette citoyenneté européenne a des conséquences pratiques non négligeables sur le terrain de la liberté de circulation et d’installation et aussi sur le terrain du droit de vote aux élections municipales et évidemment aussi aux élections européennes.

 

 —>  Il y a un deuxième facteur de dissociation qui est moins net, plus ambigu. C’est la tendance à reconnaître en France ou à voir reconnaître en France des droits de citoyenneté aux non-nationaux. 

 

Par exemple : le droit de vote au moins aux élections locales. Il existe un courant d’opinions qui est favorable à ce que les étrangers non communautaires aient un droit de vote aux élections municipales s’ils ont leurs domiciles réguliers en France. Si cette réforme était réalisée, il y aurait une grande autonomisation de la citoyenneté à la nationalité.

 

 

Il y a une tendance à poser certains problèmes en termes de citoyenneté en dehors de toute référence au moins directe à la nationalité. 

 

Par exemple : toute la thématique de la citoyenneté des salariés dans l’entreprise. C’est une thématique qui n’a pas de rapport avec le concept de nationalité, et elle a pour conséquence de reconnaître aux salariés étrangers.

 

 

 

 

 

Section 2 : la nationalité comme allégeance

 

Le terme d’allégeance contient une idée d’autorité, de rapport vertical entre l’État qui octroie ou refuse sa nationalité et la personne qui tantôt ressortissant de cet État, tantôt étrangère. 

 

Sur le terrain de l’allégeance, il faut connaître le point de vue de l’État, et la personne elle-même, sujet de ce rapport de nationalité.

 

Paragraphe 1 :

La nationalité du point de vue de l’État

 

Ici, il y a une règle majeure que nous avons déjà abordée plusieurs fois. Seul un État peut conférer, dans le monde d’aujourd’hui, une nationalité. En d’autres termes, il n’y a pas de nationalité sans États. 

 

Même dans le monde d’aujourd’hui très marqué par un phénomène de mondialisation, de globalisation, dans lesquelles les frontières tendent à disparaître, il n’y a pas de nationalité sans aval de l’État, sans États internationalement reconnus, c’est-à-dire par le concert, par la communauté internationale des autres États. 

 

 

L’État ne peut conférer à ses ressortissants une nationalité que d’abord s’il est reconnu par États par les autres États. Toutes les constructions plus ou moins artificielles tendant à créer de faux-États ou ce qu’on appelle des États fantoches ne débouchent en droit international sur aucune nationalité réelle. 

 

Exemple : En Afrique du Sud, à l’époque de la politique de l’apartheid (développement séparé), politique qui séparait de façon rigide les blancs et les noirs sur l’État. Cette politique d’apartheid s’était accompagnée de la création sur le territoire africain d’Etats noirs, réservés aux noirs qui portaient le nom de bantoustan, qui était en réalité des constructions entièrement dans la main du gouvernement sudafricain, et qui n’avait aucune indépendance réelle. Le Gouvernement de l’époque dénigrait leur propre nationalité à leurs ressortissants et donc, aucune reconnaissance de ces États par le concert international. Il y en a d’autres connus. Il est à craindre qu’il y en ait dans l’avenir.

 

 

Sur un terrain maintenant plus apaisé, et plus technique, la question se pose de savoir ce qu’il en est de la nationalité dans les États fédéraux, très nombreux dans le monde (Allemagne, États-Unis) qui sont des constructions fédérant. 

 

 —>  Quel est le véritable niveau de la nationalité dans un État fédéral ?

Les ressortissants d’un État fédéral ont-ils seulement la nationalité d’un État fédéral, ou ont-ils seulement la nationalité d’un État fédéré dont ils relèvent ? Contrairement à ce qu’on peut penser, ce n’est pas la troisième réponse qui est la bonne. Il n’y a pas de cumul d’une nationalité fédérale et d’une nationalité fédérée, d’un point de vue international, seule vaille la nationalité de l’État fédéral.

 

 

Dernier point, en l’état actuel de l’évolution de l’Union Européenne, il n’y a pas de nationalité européenne puisque l’UE n’est pas un État mais il y a une citoyenneté européenne du traité de Maastricht.

 

 

 

Paragraphe 2 :

La nationalité du point de vue de la personne

 

Du point de vue de la personne, trois questions se posent ici :

 

 —>  La nationalité est-elle strictement réservée aux personnes ou peut-elle être concédées à d’autres entités?

 

 —>  La nationalité est-elle attribuée à quelques personnes que se soient ?

 

 —>  La nationalité est-elle un droit pour toute personne ? Est-ce que le droit à une nationalité est un droit de l’homme ?

 

A)    La nationalité est-elle strictement réservée aux personnes ?

 

Ici, la réponse est incontestablement oui. Il n’y a de nationalité que pour les personnes. Il est vrai que dans le langage courant et même dans certaines branches du droit (droit maritime, droit aérien), on parle couramment de nationalité d’un navire (juridiquement il y a une procédure qui s’appelle la francisation d’un navire, aéronef, nationalité d’une automobile). 

 

Toutes ces expressions sont commodes mais n’ont pas de valeur juridique, il n’y a que des personnes qui puissent avoir une nationalité. Pas seulement les personnes humaines. Du point de vue du droit international, il n’y a pas de navires français au sens que ce navire aurait la nationalité française. Navire possédé en majorité par les français, ou immatriculés en France. Ce n’est que par commodité de terme qu’on l’utilise. Il y a une vision personnaliste de la nationalité qui encore une fois ne rime cependant aux seuls êtres humains.

 

B)    La nationalité est-elle attribuée à quelques personnes que se soient ?

 

Toute personne physique quelle qu’elle soit peut avoir une nationalité, même le nouveau-né. La nationalité n’est pas nécessairement un acquis, elle est en majorité attribuée dès la naissance de la personne. 

 

La question est en revanche beaucoup plus discutée pour les personnes morales. C’est oui peut-être, oui mais, oui à l’extrême rigueur… Ce n’est pas oui tout court. Les personnes morales sont des groupements auxquels la loi reconnaît à certaines conditions la personnalité juridique, c’est-à-dire pour l’essentiel la capacité de jouir de droit et d’assumer des devoirs. Ces personnes morales sont de nature et de configurations très diverses, depuis les sociétés aux associations ou personnes morales de droit public. Cela concerne spécialement les sociétés commerciales et dans une moindre mesure les associations.

 

Nous retrouvons cette question plus en détail dans la deuxième partie du cours, puisque la question très importante en droit commercial international de la condition des sociétés étrangères suppose un accord. 

 

L’essentiel de la réponse est le suivant, si la nationalité concerne une personne morale, il faut entendre le même concert, le même concept, qu’en matière de nationalité des personnes, il est clair qu’il n’y a pas de nationalité des personnes morales. 

 

Beaucoup des éléments de la nationalité des personnes physiques sont purement intransposables aux personnes morales. D’ailleurs il suffit de lire les articles 17 et suivants du Code civil sur la nationalité française pour se rendre compte qu’ils ne peuvent de toute évidence s’appliquer qu’aux personnes physiques. Lorsque l’on dit aujourd’hui que la France approche les 65 millions d’habitants, on ne tient évidemment aucun compte du nombre des personnes morales françaises. 

 

Si par nationalité et personne morale, il faut entendre la même chose que nationalité et personne physique, il n’y a pas de nationalité des personnes morales.

 

Si le concept de nationalité des personnes morales est défini de façon autonome, s’il a ses caractéristiques propres, distincts de celle de la nationalité des personnes physiques, alors on peut admettre au moins pour des raisons de commodité, qu’il puisse y avoir une nationalité des personnes morales, qui a sans doute une substance moins riche que la nationalité des personnes physiques, qui est sans doute plus strictement juridique et moins politique que la nationalité des personnes physiques, mais qui peut rendre des services utiles sur le terrain du droit et spécialement dans la détermination de la loi applicable aux sociétés et aux personnes morales.

 

C) Toute personne a-t-elle le droit d’avoir une nationalité ?

 

 —>  Existe-t-il un droit de chacun à la nationalité qui serait un droit de l’homme ?

La pratique internationale semble hélas imposer une réponse négative puisqu’aussi bien l’histoire que le temps présent révèle qu’un grand nombre de personnes dans le monde, des millions de personnes dans le monde sont apatrides, c’est-à-dire dépourvues de toute personnalité. Et, cette situation est d’ailleurs dans la majorité des cas la conséquence inéluctable de la législation des États en ce qui concerne leurs nationalités. Il n’est même pas sûr que le phénomène de l’apatride soit aujourd’hui en régression. 

 

Par conséquent, dans ces conditions, il peut sembler tout à fait illusoire de parler d’un droit de l’homme à la nationalité. Ce droit est manifestement bafoué. Cependant, une analyse plus précise impose de nuancer un peu cette affirmation catégorique.

 

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 proclamée dans le cadre de l’ONU énonce un droit à la nationalité. Cette déclaration n’a pas en elle-même de valeur contraignante mais elle a une valeur d’exemple et de symbole fort. En quelque sorte, elle oblige au moins moralement les États-membres de l’ONU. 

 

Article 15 

Tout individu a droit à une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.

 

 

La législation française en matière de nationalité française est très vigilante dans la prévention de l’apatride. 

 

 —>  Aucun enfant naissant en France ne peut y naître apatride, même si ses parents n’ont pas de nationalité ou ne peuvent pas lui transmettre de nationalité. 

 

 —>  Et, d’autre part, il est pratiquement impossible sauf cas extrêmement particuliers à une personne perdant la nationalité française de la perdre si elle n’a pas déjà une autre nationalité, de telle sorte que la perte de la nationalité française n’entraîne jamais ou pratiquement jamais une situation d’apatride. 

 

C’est dire qu’au moins implicitement le législateur français reconnaît pratiquement un véritable droit à la nationalité puisqu’au fond il n’accepte pas de faire courir à quiconque le risque d’apatride. Et, il est vraisemblable que les législateurs de différents pays sont pour la plupart dans des situations assez voisines.

 

 

 

 

 

Chapitre 3 :

Les conflits de nationalité

 

 

ATTENTION : Précision indispensable : les conflits de nationalité ne doivent pas être confondus avec les conflits de lois même s’ils peuvent avoir les répercussions. 

 

L’expression conflit de nationalité regroupe en réalité deux types de conflits très différentes et que l’on sait mieux distinguer aujourd’hui que dans le passé, et même dans un passé récent. Il faut distinguer en effet les conflits positifs et les conflits négatifs de nationalité. 

 

 —>  Il y a conflit positif lorsqu’une même personne possède simultanément au moins deux nationalités. 

 

 —>  Il y a conflit négatif lorsqu’une personne n’a aucune nationalité soit qu’elle n’en ait jamais eu (ce sont les apatrides de naissance) soit qu’elle est perdue sa nationalité antérieure sans avoir d’autres. 

 

La terminologie de conflits positifs et conflits négatifs est relativement ancienne et ne doit pas tromper, elle ne portait à l’origine aucun jugement de valeurs particulier d’autant que pendant très longtemps le conflit positif de nationalité a été considéré comme presque aussi grave que le conflit négatif. 

 

Aujourd’hui, le regard a très largement changé sur le conflit positif qui n’est plus considéré nécessairement comme un désordre à éviter ou à combattre. En revanche, le conflit négatif reste une situation très mauvaise, particulièrement pour les personnes que cette situation concerne. Aujourd’hui dans la réflexion contemporaine, on lutte énergiquement contre les conflits négatifs.

 

Section 1 : le conflit négatif

 

Il y a conflit négatif quand une personne n’a aujourd’hui aucune nationalité :

 

 —>   soit qu’elle n’en ait jamais eu, 

 

 —>  soit qu’elle est perdue sa nationalité d’origine sans en recouvrer une autre. 

 

Cette situation qui porte le nom d’apatridie, est très mauvaise pour l’intéressé en dépit d’avantages très secondaires qui ont d’ailleurs été en règle générale exagérés. 

 

Cette personne ne bénéficiant en réalité de la protection d’un État et dans les périodes de guerres ou persécutions, c’est une situation extrêmement dangereuse. C’est ainsi que sous le nazisme, entre 1933 et 1945, les premières victimes des persécutions antisémites furent les juifs apatrides après quoi le gouvernement hitlérien retira la nationalité allemande à la plupart des citoyens allemands d’origine juive, ce qui les transformant en apatride, avant d’être exterminés.  De la même façon sous l’occupation en France, les persécutions antisémites dans le cadre du régime de Vichy furent d’abord organisées contre les apatrides.

 

Il ne faut pas imaginer que les dangers des apatrides relèvent de l’histoire et qui font l’objet de persécutions en période de crise grave.

 

L’obligation morale des États démocratiques est de faire en sorte que d’une part la situation d’apatride soit empêchée par une politique rigoureuse et systématique de prévention de l’apatride d’autre part que cette situation puisse être réparée quand malheureusement elle s’est réalisée.

 

Paragraphe 1 :

La prévention de l’apatride

 

S’agissant de la prévention de l’apatride, le législateur français est extrêmement vigilant. C’est un point positif de la nationalité française. 

 

Il l’est pour l’apatridie de naissance puisque tout enfant naissant en France alors que ses parents pour quelques raisons que se soient ne peuvent pas lui transmettre leurs nationalités, tout enfant dans ce cas est français de naissance. La nationalité française lui est attribuée à titre de nationalité de secours, il la gardera pendant toute sa minorité (jusqu’à l’âge de 18 ans) si une autre nationalité ne lui est pas entre temps attribuée et s’il est toujours français à sa majorité, il le restera définitivement. 

 

          C’est donc une protection très efficace qui joue pour l’essentiel dans trois types de situations :  Enfant qui naît en France de parents inconnus (trouver l’enfant sur le sol française…)

           Enfant né en France de parents apatrides

          Enfant né en France de parents qui ont une nationalité mais qui, pour des raisons d’ailleurs diverses, ne peuvent pas lui transmettre cette nationalité. Certains pays n’attribuent pas leurs nationalités aux enfants nés à l’étranger. Certains pays n’attribuent pas leurs nationalités à certains types de filiation (enfants naturels par exemple).

 

En deuxième lieu, le législateur français, sauf dans un cas très exceptionnel, empêche qu’une personne puisse perdre la nationalité française si elle n’a pas déjà une autre nationalité. 

 

Cela vaut même cas où l’on pourrait à l’extrême rigueur comprendre qu’on prenne moins de précaution. Cas de perte par déchéance qui concerne des personnes qui ont acquis la nationalité française en cours d’existence (naturalisation généralement) et dont on s’aperçoit après coup qu’elle s’était antérieurement coupable de crimes très graves. Dans ce cas, peut prendre un décret de déchéance de la nationalité française. On lui a octroyé cette nationalité en méconnaissance d’une infraction commise. Même dans ce cas, il faut que l’intéressé ait une autre nationalité depuis 1998.

 

 —>  Que manque-t-il à la législation française pour être parfaitement opérationnelle en matière de prévention de l’apatride ?

Il manque sans doute à la législation française (à supposer que cela soit souhaitable) une possibilité de naturalisation plus rapide que le droit commun pour les apatrides, parce qu’il ne suffit pas de lutter contre l’apatride de naissance ou contre l’apatride par perte de la nationalité française, il faut aussi permettre aux apatrides qui viennent s’installer en France en cours d’existence de devenir français plus rapidement s’ils le souhaitent. Or, rien dans le droit de la naturalisation ne s’oppose bien sûr à cette naturalisation des apatrides mais rien non plus ne contraint, ne conduit à l’accélérer.

 

Paragraphe 2 :

Le traitement de l’apatride

 

En dépit, des efforts de prévention de l’apatride par un grand nombre de législateurs, le fait est qu’il y a tout de même de nombreux apatrides dans le monde et qu’il faut traiter cette situation lorsqu’on n’a pas pu empêcher qu’elle se réalise. 

 

Par exemple : une personne apatride peut venir s’installer en France et la question est alors de savoir quel est son statut juridique exact. 

 

Cette question se pose sur deux terrains différents :

le terrain de la jouissance des droits

— d’abord  le terrain des conflits de lois

 

A) Traitement de l’apatride et jouissance des droits

 

La question de la jouissance des droits qui est autrement appelée « conditions des étrangers » est de savoir de quels droits et de quels devoirs sont titulaires en France les personnes qui n’ont pas la nationalité française et dont les apatrides puisque par hypothèse l’apatride est un étranger même s’il n’a pas une nationalité étrangère. 

 

Comme on le verra dans la deuxième partie du cours, le droit français tient pour étranger tout sujet tout individu qui n’a pas la nationalité française soit qu’il ait une autre nationalité, soit qu’il n’en ait pas du tout. 

 

Il devrait donc avoir en France les mêmes droits et mêmes devoirs qu’un étranger. En réalité, sa situation est plutôt meilleure que celle d’un étranger ordinaire puisque la France est signataire de la Convention de New-York du 28 septembre 1954 conclu sous l’égide des nations unies et qui rapproche dans les pays signataires la situation des apatrides de celle des réfugiés. Par conséquent les droits et devoirs des apatrides en France, sont pratiquement ceux qui ont la qualité de réfugiés. 

 

Cette protection particulière est justifiée puisqu’à la différence des étrangers ordinaires, l’apatride ne peut compter sur la protection diplomatique d’aucuns États étrangers.

 

B) traitement de l’apatridie et conflit de lois

 

C’est une question plus strictement technique. Dans le système de conflits de lois français, tout ce qui concerne le statut personnel (c’est-à-dire le droit des personnes et de la famille) relève en principe de la loi nationale de l’intéressé. Elle figure à l’article 3 du Code civil et étant d’ailleurs l’une des seules règles de conflits de loi dans le Code civil. 

 

« Article 3 

Les lois de police et de sûreté obligent tous ceux qui habitent le territoire.

Les immeubles, même ceux possédés par des étrangers, sont régis par la loi française. Les lois concernant l’état et la capacité des personnes régissent les Français,  même résidant en pays étranger. »

 

Évidemment cette règle pose un problème très difficile pour les apatrides puisque n’ayant pas de nationalité, ils n’ont pas de lois nationales. 

 

Dans les systèmes européens de conflits de lois depuis la fin du XIXe siècle, du moins dans les conflits de lois attachés à la personnalité, deux solutions se sont dégagées. 

 

 —>  Dans une première solution, on applique au statut personnel de l’apatride la loi de son ancienne nationalité. Cette solution a longtemps été retenue notamment par la jurisprudence allemande. Elle a un avantage, c’est qu’elle ne remet pas en cause le principe de compétence de la loi nationale pour le statut personnel. 

 

Mais elle a deux graves inconvénients :

o   tout d’abord cette solution est impraticable pour les apatrides de naissance.

o   Même pour les apatrides qui ont une autre fois une nationalité, cette solution est fâcheuse car elle ne correspond plus à la situation actuelle.

 

 —>  Il faut donc préférer une autre solution possible de la jurisprudence française : exceptionnellement le statut personnel de l’apatride relève de la loi de son domicile. La jurisprudence française s’est rapidement rangée à cette solution qui a certes l’inconvénient au moins en apparence de ne pas respecter le rattachement du statut personnel à la nationalité mais qui a l’avantage d’être réaliste et sans doute aussi celui d’accélérer l’intégration de l’apatride dans le pays de son domicile.

Section 2 : le conflit positif

 

Il y a conflit positif de nationalités lorsque la même personne possède simultanément au moins deux nationalités différentes. Étant entendu qu’il s’agit de nationalité octroyée par des États internationalement reconnus. 

 

Ce problème a profondément changé de positions au cours des dernières décennies.

 

Paragraphe 1 :

La position actuelle de la question

 

La pluri nationalité a été considérée pendant longtemps comme un désordre grave, à empêcher autant que possible et à combattre aussi énergiquement que possible. Cet état était vu avec suspicion parce qu’on redoutait qu’il manque de loyalisme. On a invoqué à ce propos une phrase fameuse de l’Évangile : « Nul ne peut servir deux maîtres » et on appliquait cette phrase à la nationalité. Cela explique que jusqu’après 1970, les textes internationaux en la matière avaient surtout pour objet d’empêcher ou de faire cesser les cas de pluri nationalités. 

 

Aujourd’hui, la réflexion a changé chez un grand nombre d’auteurs pour des raisons très fortes. 

 

 —>  D’abord, l’idée que nul ne peut servir deux maîtres suppose une vision très autoritaire de la nationalité où l’État est le maître de ses ressortissants (vision assez peu démocratique). 

 

 —>  Ensuite, sur un terrain pratique :

 

Le développement des relations internationales est telle que se sont vus multipliés les couples mixtes et les enfants plurinationaux et cette situation a été accentuée par le principe juridique nouveau de l’égalité des sexes : ce principe a eu un effet considérable en droit de la nationalité française. 

 

 —>  Jusqu’en 1973, le père transmettait sa nationalité française beaucoup plus facilement et beaucoup plus largement que la mère. 

 

 —>  Depuis 1973, la transmission est absolument égale, de telle sorte que : 

Par exemple, un enfant qui naît à l’étranger d’une mère française est français de naissance dans les mêmes conditions qu’un enfant qui naît à l’étranger d’un père français. Il suffit d’avoir un parent français pour que l’on soit français de naissance où que l’on soit né. 

 

Evidemment, la plupart des législations des pays d’Europe ont aujourd’hui exactement la même solution puisque le principe d’égalité des sexes est très fortement reconnu dans les pays européens. Cela signifie comme on le verra que le mariage n’emporte plus aucun effet automatique sur la nationalité des enfants. Par conséquent le nombre de couples de nationalités différentes est de plus en plus important et bien entendu dans la plupart des législations des pays voisins comme chez nous chacun des parents transmet à égalité sa nationalité à ses enfants. Il n’est plus question de dire les enfants n’auront que la nationalité du père. Par conséquent, la pluri nationalité des enfants est une conséquence obligée d’une stricte application de l’égalité des sexes en matière de nationalité et c’est une conséquence qui va de soi. 

 

Il serait donc aberrant dans le cadre de la législation française de pouvoir combattre ce type de pluri nationalité et cette position nouvelle est assez largement partagée dans les pays européens. 

 

Cela nous met dans une situation qui n’a rien à voir avec celle de l’apatridie, il ne s’agit plus d’empêcher le conflit positif donc la question centrale se déporte vers le traitement du conflit positif.

 

 

Paragraphe 2 :

Les droits et obligations du plurinational

 

Sur le terrain d’abord des droits, il est clair que le ressortissant français qui a au moins une autre nationalité jouit en France exactement des mêmes droits ni plus ni moins que ceux de n’importe quel national français. La France traite le plurinational comme un français mono national. Il serait scandaleux de lui retirer certains droits au motif qu’il aurait une nationalité française et il serait extravagant d’en ajouter.

 

 —>  Quand est-il sur le terrain du devoir ? 

La réponse est à priori la même, un plurinational français a en principe exactement les mêmes droits qu’un français sans autres nationalités. Là, encore il serait scandaleux de lui donner des devoirs supplémentaires et extravagants de lui en retirer. 

 

Il y a eu tout de même un cas très particulier avec la question des obligations militaires tant qu’il existait une obligation de service militaire en France (jusqu’en 2001). Normalement, le français plurinational devait accomplir son service militaire français exactement comme le français mono national. Mais évidemment, cette situation pouvait être fâcheuse pour l’intéressé qui risquait de devoir accomplir son service militaire dans un autre pays, risque de cumul très lourd d’obligations militaires. Face à ce problème, il y a eu d’abord un choix à faire entre deux situations différentes :

          soit imposer au plurinational de faire son service cumulativement dans ces deux pays, 

          soit lui proposer un choix avec perte de la nationalité du pays non choisi pour le service national,   soit lui proposer un choix sans perdre la nationalité du pays non choisi. 

 

C’est la troisième solution qui a été le plus souvent retenu dans le cadre de très nombreuses conventions bilatérales conclus entre la France et les pays étrangers. Ces conventions ont suivi selon les cas deux solutions différentes tout en conservant chaque fois d’ailleurs au plurinational le service non retenu :

          Dans le premier cas le plus fréquent, les États se sont accordés sur la règle que le plurinational devait effectuer son service national dans le seul pays de son domicile. 

          Dans un deuxième type de convention, les États ont posé la règle que les plurinationaux auraient le choix du pays de son service national, sans perdre pour autant la nationalité du pays non choisi. 

 

Le premier type de convention est sans doute préférable car dans le deuxième type de conventions, un doute peut surgir sur la sincérité du choix, sur la réalité du choix, puisque le plurinational peut choisir le service dans un pays où il ne réside pas. Il est vrai également qu’un certain nombre de plurinationaux habite dans un pays tiers. 

 

Quoiqu’il en soit ces questions difficiles n’ont plus beaucoup de sens en France, puisqu’il n’existe plus à proprement parlé, une obligation de service national, c’est un peu une précision qui n’est plus d’actualité.

 

 —>  Qu’en est-il des droits et obligations en France de la personne qui a plusieurs nationalités dont aucune n’a la personnalité française ? 

La réponse est simple, cette personne est traitée comme un ressortissant étranger.

 

 

 

 

Paragraphe 3 :

Le statut personnel du plurinational

 

On entend par statut personnel, l’ensemble des règles du droit des personnes et de la famille. Dans notre système de conflit de loi, le statut personnel relève de la loi nationale de l’intéressé selon l‘article 3 du Code civil. 

 

Il se pose ici, pour les plurinationaux un problème qui est un peu symétrique de celui des apatrides. L’application de la loi nationale pose un problème spécifique aux apatrides puisqu’ils n’ont pas de nationalité et donc pas de loi nationale. La même application de la loi nationale pose un problème spécifique aux plurinationaux puisqu’ils ont plusieurs nationalités et donc potentiellement, plusieurs lois nationales. 

 

 —>  Dès lors quelle loi nationale faut-il appliquer à leurs statuts personnels ? 

Étant entendu qu’il est exclu de leurs appliquer toutes leurs lois nationales à la fois. 

 

La jurisprudence française a dégagé une solution constante, à défaut d’être tout à fait convaincante, qui conduit à distinguer deux types de situations suivant que l’intéressé plurinational possède ou non la nationalité française dans ses différentes nationalités.

 

A) Le plurinational non-français

 

Nous supposons qu’un juge français est saisi d’un litige intéressant le statut personnel d’un individu possédant au moins deux nationalités et dont aucune n’est la nationalité française. Il se pose au juge français un problème de conflits de lois. 

 

 —>  Quelle loi appliquer au statut personnel de l’intéressé ? 

 

Ce problème de statut de loi est compliqué par un conflit de nationalité. La règle du conflit de lois français est simple : la loi applicable est la loi nationale. Puisqu’il y a conflit de nationalité, il y a plusieurs lois applicables. 

 

Dans ce type de situation, la jurisprudence adopte de façon constante une solution qui est sans doute satisfaisante et qui consiste à retenir la loi de la nationalité active ou effective de l’intéressé, c’est-à-dire de la nationalité qu’il pratique le plus activement ou le plus effectivement. Objectif qui départage les deux lois nationales en fonction du comportement pratique de l’intéressé. Cette solution part du constat très largement vérifié que les plurinationaux dans leur très grande majorité pratiquent plus activement une nationalité qu’une autre. Il est extrêmement rare qu’un plurinational se comporte de telle façon, et qu’il est impossible de dire dans quels pays sont ses attaches. 

 

Cette solution conduit le juge du fond à faire une analyse d’ensemble de la situation de l’intéressé et dans cette analyse le rôle du domicile de l’intéressé est évidemment important mais il ne peut pas être absolument exclusif et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle les tribunaux français appliquent la loi de la nationalité la plus active, la plus effective et non pas nécessairement la loi de la nationalité qui est corroborée par le domicile de l’intéressé. Il se peut en effet que dans certains cas, l’indice du domicile soit contredit par d’autres éléments du comportement de l’intéressé.  

 

Par exemple : l’intéressé a ses affaires économiques dans l’autre pays, ou bien il se partage de façon égale deux domiciles dans ces deux pays. 

 

Autre exemple : Et il se peut aussi que le plurinational ait établi son domicile dans un pays tiers auquel cas, le domicile ne peut pas départager à lui tout seul les deux nationalités en conflit. 

 

Si l’on réfléchit à la façon dont le problème se pose en pratique, il est assez vraisemblable que dans un assez grand nombre de cas, le juge français sera saisi parce que l’intéressé à son domicile en France, il est à craindre que l’intéressé ait son domicile en France ait la nationalité française dans ces différentes nationalités et le domicile ne pourra donc départager. Cette solution encore une fois est constante, elle est d’ailleurs très généralement la même dans les pays qui comme la France applique la loi nationale au statut personnel. Elle a le petit inconvénient d’une certaine insécurité, tout dépend de l’investigation du juge intéressé mais en pratique, elle fonctionne assez correctement.

 

B) Le français plurinational

 

Dans cette hypothèse, le juge français est saisi d’un litige touchant le statut personnel d’un individu doté de plusieurs nationalités dont la nationalité française. 

 

 —>  Quelle loi doit-il appliquer ? 

La réponse à cette question est en règle très générale d’appliquer la loi française même si la nationalité française n’est pas la nationalité la plus active ou la plus effective. Le professeur Laborde a critiqué cette solution qu’il estime regrettable pour plusieurs raisons : 

 

il y a une critique qu’on ne peut pas faire à cette solution qui consisterait à la taxer de « chauvinisme français », on préférerait la nationalité française de façon partiale, un peu comme on soutiendrait l’équipe de France. La même solution est retenue dans tous les pays comparables. La loi du for est systématiquement préférée.

 

Critique triple : 

 

 —>  c’est une solution irréaliste lorsque la nationalité française n’est pas la plus active ou la plus effective et évidemment cette solution est d’autant plus irréaliste quand la nationalité française est purement formelle.

 

 —>  Cette solution est dangereuse dans la mesure où elle expose le jugement français à n’être pas exécuté dans l’autre pays puisque l’autre pays préférera de la même façon sa propre nationalité et considérera que le juge français n’a pas appliqué la bonne loi au statut personnel de l’intéressé. Cette solution fait courir un risque d’inefficacité et de situations boiteuses (solution reconnue dans un pays et pas dans l’autre).

 

 —>  Cette solution confond de façon inadmissible le terrain des conflits de loi et le terrain de la nationalité. On dit en effet, à l’appui de cette solution que le juge français dans cette hypothèse ne peut pas appliquer une autre loi que la loi française, car le juge est soumis à la loi et la loi dit que l’intéressé est français. En d’autres termes, selon cette justification de la solution : appliquer au français la loi de son autre nationalité reviendrait à lui nier la possession de la nationalité française. Cette argumentation en réalité, pour impressionnante qu’elle soit en apparence, tient parce qu’il ne s’agit pas de savoir si l’intéressé n’est ou n’est pas français. Il est absolument évident que le plurinational est français et qu’elle aura des effets indiscutables. Le problème est de savoir touchant le statut personnel de l’intéressé et non pas l’ensemble de sa situation économique, la loi française est la plus adéquate, la plus adaptée. Or, on ne peut en douter quand la nationalité française n’est pas la nationalité activement appliquée par l’intéressé.  

 

A son sens, il vaudrait mieux donner à ce type de situation, la même solution à l’autre type de situation, c’est-à-dire la préférence à la loi de la nationalité activement ou effectivement appliquée même si la loi n’est pas française. 

 

 

 

 

 —>  Est-ce que cette solution est absolument constante, indéboulonnable ?  

 

Il est arrivé à la Cour de cassation de donner le sentiment (réel ou apparent) qu’elle pouvait commencer à bouger sur ce problème. Il est en effet, le 22 juillet 1987 un arrêt de la 1ère civile de la Cour de cassation, dans une affaire DUJAQUE, qui a retenu une solution très inhabituelle. 

 

En l’occurrence, il s’agissait de savoir si on pouvait donner effet en France à un jugement polonais, qui, touchant le statut personnel d’un double national polonais et français avait évidemment appliqué la loi polonaise à la question litigieuse. Et, contre toute attente, la Cour de cassation a jugé qu’il pouvait avoir effet en France, alors qu’il n’avait pas appliqué la loi française. Cette solution a été approuvée par certains auteurs notamment Paul Lagarde. 

 

Est-ce à dire que dans cet arrêt DUJAQUE, on s’est approché de la solution de la préférence à la nationalité la plus active ? Ce n’est pas du tout certain. L’arrêt DUJAQUE n’a pas eu depuis 1987 de postérité très claire (arrêt d’espèce ?). Il faut observer que dans l’arrêt DUJAQUE, la Cour de cassation ne va pas du tout valider la considération que la nationalité polonaise aurait été la plus active, ce n’est pas parce qu’elle aurait été la plus active qu’elle aurait été retenue, il semble plutôt que la Cour ait considéré s’agissant seulement de donner effet en France à un jugement étranger, on pouvait admettre que le juge étranger ait préféré sa propre nationalité. En revanche, l’arrêt DUJAQUE ne semble pas du tout annoncer l’abandon par le juge français de la préférence à sa propre nationalité quand le juge français est directement saisi. On peut penser que l’arrêt DUJAQUE est en réalité une application d’une solution proposée par le professeur Lagarde consistant à retenir ce que le professeur Lagarde a appelé une « solution fonctionnelle au problème posé », c’est-à-dire une solution variant en fonction de la nature du problème posé. 

 

En d’autres termes, si le juge français est directement saisi d’une question touchant le statut personnel d’un français plurinational, il doit toujours préféré la nationalité française. En revanche, si le juge français est indirectement saisi en exéquatur d’un jugement étranger qui a préféré sa propre nationalité comme le fait le juge français alors le juge français peut dans certains cas, au moins, admettre que le juge étranger ait préféré sa propre nationalité tel est sans doute le sens de l’arrêt DUJAQUE. Il n’est même pas sûr que dans d’autres hypothèses comparables, il y ait la même solution. Ce qui est probable qu’elle donnerait préférence systématique à la nationalité française. 

 

1° L’esprit de la convention franco-polonaise du 5 avril 1967 étant de régler l’ensemble des rapports juridiques de caractère international en matière de droit des personnes et de droit de la famille, il convient de faire jouer cette convention dès lors que le litige concerne des personnes qui ont la nationalité polonaise même si elles ont aussi la nationalité française ; . Et la cour d’appel, qui a justement estimé que la question de la garde et du droit de visite, après le prononcé du divorce des parents, devait être soumise aux dispositions des articles 10 et 11 de la convention aux termes desquels les tribunaux compétents sont, en cas de domicile distinct des parents et enfants, ceux du pays sur le territoire duquel l’enfant est domicilié, a fait une exacte application de l’article 11, alinéa 2, en retenant la compétence des juridictions polonaises, l’enfant résidant avec sa mère en Pologne . 

 

2° Elle a de même, à juste titre, estimé que la juridiction étrangère était en droit pour déterminer la loi applicable de prendre en considération la nationalité qui était attribuée à l’enfant par la loi locale, savoir la loi polonaise

 

 —>  Est-ce à dire que le problème en 2010 est décidément tout à fait clôt ?

 

Il y a un autre secteur, une évolution s’est produite, qui est le secteur du droit communautaire. On peut se demander si la remise en cause de la jurisprudence traditionnelle ne viendrait pas plutôt aujourd’hui du droit communautaire. 

 

Le droit communautaire n’a en principe aucune compétence en matière de nationalité des États membres et devrait donc être hors-sujet. 

 

Or, ce n’est pas tout à fait le cas, comme le montre un arrêt de la CJCE du 2 octobre 2003, dans une affaire GARCIA AVELLO, qui a fait pas mal de bruit. 

 

 

La Cour  de  justice  de  l’Union  européenne énonce en effet que la Belgique en l’occurrence ne pouvait pas imposer aux parents d’un enfant à la fois belge et espagnol de suivre exclusivement les règles du droit belge en matière d’attribution du nom patronymique de l’enfant sans tenir aucunement compte des règles différentes du droit espagnol. En l’occurrence, le père était espagnol et la mère était belge et les parents d’un commun accord souhaitaient que l’enfant à la fois belge et espagnol porte en premier, le nom de son père et en second, le nom de sa mère. Les autorités belges compétentes s’y étaient refusées en considérant que le droit belge s’appliquait. Et c’est cette position que la CJCE censure, elle reproche aux autorités belges, pour trancher de la loi applicable au nom de l’enfant, d’avoir donné référence exclusive à la loi belge. 

 

Il est clair que dans l’arrêt GARCIA AVELLO, la CJCE censure une préférence de principe à la nationalité de l’autorité saisie et de ce point de vue, c’est un recul de la solution traditionnelle. 

 

Cependant, ce recul ne doit pas être surestimé :

 —>  d’une part, la CJCE se fonde sur une motivation exclusivement de droit communautaire, elle invoque notamment l’interdiction de toute discrimination relative à la nationalité d’un autre État membre

 —>  d’autre   part,   elle invoque aussi l’atteinte à la liberté de circuler et de séjourner dans un État membre des ressortissants d’un autre membre, l’atteinte que porterait une solution qui ne respecterait en rien la nationalité d’un autre État membre. 

 

En d’autres termes, une famille franco-espagnole ne se verrait pas reconnaître une liberté de circuler en

Europe et en Belgique, si elle ne pouvait pas faire respecter les dispositions du droit espagnol en Belgique. Cette jurisprudence se place sur le terrain des libertés communautaires et cette jurisprudence n’est pas transposable au-delà de l’Union Européenne.

 

 

L’article 18 CE s’oppose à ce que les autorités d’un État membre, en appliquant le droit national, refusent de reconnaître le nom patronymique d’un enfant tel qu’il a été déterminé et enregistré dans un autre État membre où cet enfant est né et réside depuis lors et qui, à l’instar de ses parents, ne possède que la nationalité du premier État membre.

 

 

  

 

Sous-titre 2 : Le droit positif de la nationalité française 

 

Droit positif = droit effectivement applicable. 

 

Il ne s’explique que si on connaît l’évolution historique depuis 1789, dotant que cette évolution a été particulièrement mouvementée.

 

 

Chapitre préliminaire : Évolution historique du droit de la nationalité française

 

 

Cette évolution historique ne commence pas réellement avant 1789 car il est difficile de parler d’un droit de la nationalité française sous l’Ancien Régime. 

 

 —>

 Certes, l’Ancien Régime n’ignorait pas le terme de « nation » mais il ne lui donnait pas exactement notre sens actuel, d’Etat-nation. 

 

 —>

 De plus, ce n’est pas la nation qui était souveraine sous l’Ancien Régime, c’était le Roi et s’il y avait un lien entre le Roi et ses sujets, ce n’était pas un lien de nationalité. 

 

La nationalité n’apparaît sur le terrain juridique qu’à partir de 1789 quand la nation se substitue au Roi comme souverain et quand la nationalité se substitue au lien personnel entre le Roi et ses sujets. 

 

Très vite apparaît alors le concept de nationalité française pratiquement dans les années qui suivent 1789 et ce concept est consacré par le Code civil originel (1804) et souvent appelé Code Napoléon. Les premières dispositions réelles en matière de nationalité française figure dans le Code Napoléon. 

 

Le XIXe sera sur le droit de la nationalité une période de très grand calme, au moins de très grand calme du législateur qui ne portera que des réformes ponctuelles aux dispositions du Code Napoléon. 

 

Le XXe a été actif par la loi du 10 août 1927 et la promulgation de la Code de la nationalité française par l’ordonnance   du   19   octobre 1945, suivi d’une loi très importante du 9 janvier 1973 et avec aussi des modifications très nombreuses et sans doute trop nombreuses depuis les années 80 du XXe siècle.

 

 

 

Section 1 : Le Code Napoléon

 

 —>  Etat originel du Code civil

 

Il désigne le Code civil, dans son état originel. Les dispositions du Code Napoléon ont été remarquées parce que c’était les premières du genre et parce qu’elle s’inspirait d’un esprit manifestement différent de celui de l’Ancien Régime.

 

 —>  S’agissant tout d’abord de l’attribution de la nationalité française dès la naissance : 

 

C’est le droit dit du sang qui se voit reconnaître le rôle essentiel puisque est français depuis sa naissance celui qui naît d’un père français. Le critère essentiel de l’attribution de la nationalité française en 1804, c’est d’avoir un père français. Ce n’est pas la naissance en France qui donne la qualité de français, attribution par le sang et non par le sol. Cette disposition a beaucoup frappé d’autant que l’Ancien Régime donnait beaucoup plus d’importances au droit du sol dans la détermination des sujets du Roi de France. 

 

En même temps, cette prééminence du droit du sang doit être bien comprise, il faut éviter un anachronisme dangereux, aujourd’hui quand on se réfère au droit du sang, quand on retient une conception ethnique de la nationalité, c’est une position assez fortement connotée à droite ou à l’extrême droite. Ce n’est pas la vision du Code napoléon, les rédacteurs n’ont pas eu une vision ethnique de la nationalité. Ils ont plutôt considéré que c’était un honneur d’être né d’un père français non pas parce que la nation française serait ethniquement supérieure aux autres nations mais parce qu’elle aurait été révolutionnairement ou idéologiquement supérieure aux autres nations puisque pour les enfants qui naissent au début du XIXe siècle, ils naissent de pères qui ont fait la Révolution : libérer la nation de ses chaînes. Il faut reconnaître que dans une certaine mesure c’est vrai, puisque dans une certaine mesure, il n’y a pas de nationalité française.

 

C’est une conception tout à fait autoritaire de la famille qui s’impose puisque la mère n’a aucun pouvoir d’attribution de sa propre nationalité à ses enfants. Seule la nationalité du père compte. D’ailleurs, la mère ne peut avoir d’autres nationalités que celle du père, du moins dans la famille légitime puisque le Code Napoléon prévoit aussi que la femme prend systématiquement la nationalité de son mari. Il y a là, une préférence très claire à la nationalité du mari et du père qu’il a encore sans doute tranché un peu avec l’Ancien Régime, l’Ancien Régime était moins ouvertement défavorable aux femmes. La Révolution, et peut être plus encore, la vision napoléonienne de la Révolution est très axée sur la prééminence du mari et du père.

 

 —>  Quant à l’acquisition de la nationalité en cours d’existence :

 

Le Code Napoléon est en retrait par rapport à la période proprement révolutionnaire et sans doute par rapport à la période de l’Ancien Régime (1780-1804), l’idée dominante, très idéologique, est qu’il fallait faciliter l’acquisition de la nationalité française aux étrangers, mais pas à n’importe quel étranger : étrangers qui partagent les idéaux de la Révolution française,  il faut combattre les tyrans. Si les étrangers partageaient ce combat, il pouvait devenir très rapidement français. « Naturalisation » facilitée pour les amis de la Révolution. 

 

Sur ce terrain, le Code de Napoléon rend la naturalisation difficile, méfiance des étrangers.

 

 

 

 

 

 

 

 —>  Bilan du Code napoléon : 

 

Le bilan de nationalité en matière du Code de Napoléon, si on le regarde avec anachronisme est assez négatif : 

          droit du sang, 

          prééminence du mari et du père, 

          trop grande rigueur en matière de naturalisation. 

 

Les premiers pas du droit de la nationalité française sont vu très contestables. 

 

Il faut surtout retenir du Code Napoléon, il donne pour la première fois des règles en matière de nationalité française, des règles qui sont claires et qui ont leurs cohérences dans le contexte de l’époque et du reste des règles qui seront dans la majorité des cas considérées au XIXe et même dans les pays étrangers comme une sorte de modèle en matière de nationalité. 

 

En réalité, le vrai problème au XIXe pour la France est que ces règles vont s’avérer pour certaines d’entre elles, contraires à la situation réelle de la population française et finalement pour certaines d’entres elles contraires aux intérêts français bien compris. 

 

 —>  Il y a une vraie inégalité des sexes car seul compte, le mari ou le père en 1804. 

 

Mr   Laborde   se   demande   s’il   s’agit vraiment   d’une   politique   c’est-à-dire   si   le   législateur   de   1804   s’est  réellement placé intellectuellement devant des choix. Pour lui, sur beaucoup de ces questions, le législateur de 1804 a pensé plutôt que la réponse était évidente : il était évident en 1804 pour le

législateur que naturellement la femme devait suivre la nationalité de son mari, il ne pense pas à la question  d’égalité  des  sexes.  Pour  nous,  c’est  un  choix  politique  car  il  y  a  deux  politiques  possibles  c’està-dire égalité ou inégalité des sexes.

 

 —>  Enfin, est-ce que cette politique était conforme aux intérêts français ? 

 

Notamment, la naturalisation difficile et la perte automatique de la nationalité française par la femme épousant un étranger étaient-elles conformes aux intérêts français ?

 

Ø  Concernant la naturalisation difficile :

 

On  peut  considérer  qu’une  telle  politique  n’est  pas  conforme  aux  intérêts  d’un  pays  quand  ce  pays  est  en  situation  de  baisse  de  la  natalité  ou  quand  ce  pays  fait  l’objet  d’une forte immigration parce que dans ce cas, le pays qui reçoit a plutôt intérêt à naturaliser assez facilement.

 

La France de 1804 est dans une situation démographique très ambigüe. Vers fin XVIIIème et début XIXème, la   France   est   le   pays   le   plus   peuplé   d’Europe après la Russie. La France est vue comme un royaume disposant  d’une  population  relativement  importante.  Par  conséquent ; le fait de rendre la naturalisation plus  difficile  n’est  pas  en  soi  considérée comme dangereux. Or, le législateur ne sait pas que la natalité en France a commencé à baisser au début du XVIIIème et   cette   baisse   propre   à   la   France   va   s’aggraver  pendant tout le XIXème,  au  point  qu’en  1914  la  France  est  dépassée  en  population  par  l’Allemagne  ou  l’Italie.  

 

Les dispositions sur la naturalisation  vont  s’avérer  à  la  longue  défavorable mais  en  1804,  ceci  n’est  pas  évident que cela soit défavorable :  ce  caractère  défavorable  se  verra  avec  l’avancée du XIXème. La France n’est  ni  un  pays  de  forte  immigration,  ni  d’émigration,  les  dispositions  sur la naturalisation restent assez nettes.

 

 

Ø  Perte automatique de la nationalité pour la femme française :  

 

Il en va autrement de la perte automatique de la nationalité française par la femme française épousant un étranger : mesure défavorable aux intérêts français. Pendant tout le XIXème, les femmes françaises épousant des étrangers vont donc perdre leur nationalité française. 

 

Mais  statistiquement,  on  s’aperçoit  que  la  plupart  de  ces  familles  composées  d’une  femme  française  et  d’un  mari étranger sont restées en France car il y a eu une espèce de loi sociologique selon laquelle dans les  mariages,  le  fait  de  s’enraciner  dans  le  pays  de  la  femme  française  est  plus  fort.  S’est  alors  constitué  au fil du temps, une catégorie de population en France particulière avec des familles de nationalité étrangère mais solidement et durablement installées en France et dont la nationalité de fait était vraisemblablement française :  instauration  d’un  cas  de  divorce  de  la  nationalité  de  fait  et  de  droit  causé  par les dispositions du Code de Napoléon entrainant automatiquement la perte de la nationalité française.

 

Cette situation a été aperçue au cours du XIXème et la solution était de faire disparaitre ce cas de perte automatique en permettant à la mère de transmettre sa nationalité française ou la solution pouvait être aussi  d’introduire  dans  l‘attribution  de  la  nationalité  française  une  dose de droit du sol en déclarant par exemple que les enfants nés en France de parents étrangers seraient français. 

 

 —>  XIXe siècle : 

 

Dans le courant du XIXème, par une loi du 7 février 1851 et par une loi de 1874, le législateur ouvre une porte au droit du sol, à coté du droit du sang, en décidant qu’est  français  dès  la  naissance :

          l’enfant    d’un  parent  français

          l’enfant    en  France  quand un de ses deux parents au moins est lui-même né en France dit la règle de « la double naissance ». Cette règle résous le problème d’une   mère   anciennement  française  et  d’un  père  étranger.  

 

Ce   n’est   qu’une   dose   du   droit   du sol   car   selon   ce   droit,   l’enfant   né en France est français. Mais la naissance   en   France   n’est   jamais   suffisante   à   elle   seule   pour   donner   la   nationalité   française, il faut toujours un autre élément.

 

Le législateur du XIXème préfère régler le problème sur le  terrain  de  l’attribution  de  la  nationalité plutôt que sur le terrain de la perte de la nationalité française par la femme car une autre solution aurait pu être que la femme ne perde pas sa nationalité si elle se marie à un étranger : remise en cause de la hiérarchie mari —> femme.

 

Cette remise  en  cause  de  l‘égalité  des  sexes  ne  viendra  qu’au  XXème avec la loi du 10 aout 1927.

 

  

Section 2 : La Loi du 10 Aout 1927

 

Cette loi est particulière : le contenu final ne correspond pas au projet initial car entre temps, les travaux parlementaires ont modifié le projet initial qui l’a fait changer de physionomie. 

 

 —>  L’esprit  au  départ  du  projet  déposé  par  le  gouvernement : 

 

Période dite  de  l’entre  deux  guerres  et  le  gouvernement  français  tient  à  tirer  les  conséquences  d’une  déception des pouvoirs publics quant au comportement des naturalisés français pendant la Première Guerre   Mondiale.   Il   y   a   eu   une   sorte   de   polémique   à   l’époque   sur   le   comportement   au   combat   de  naturalisés  récents  originaire  des  Empires  Centraux  (Hongroie…)  qui  se  serait  révélé dans certains cas déloyal ou insuffisamment dévoué à la cause française. 

 

Il est impossible de savoir si cela est vrai mais le projet de rendre la naturalisation plus difficile du fait du doute  du  sérieux  des  naturalisations  d’avant  1914,  germe  dans l’esprit  du  gouvernement  et  c’est  l’origine  première de la future loi de 1927.

 

 —>  Les travaux parlementaires sont importants sous la IIIe République : 

 

Pendant ces   travaux,   on   s’aperçoit   que   les   parlementaires   prennent   conscience   que   la situation démographique de la France est devenue catastrophique : baisse de la natalité continue depuis la fin du XVIIIème, grosse perte pendant la guerre de 1914 et du fait de cette situation démographique, il devient alors absurde de rendre la naturalisation encore plus difficile. Les parlementaires et le gouvernement réécrivent alors le projet de telle sorte que la loi votée et promulguée le 10 aout 1927 est une loi libérale en matière de nationalité alors  qu’elle avait  été  conçue  pour  être  une  loi  rigoureuse.  C’est  une  loi libérale parce que la situation démographique de la France apparait dangereuse : il faut changer de cap.

 

 —>  Cette  loi  ne  modifie  pas  significativement  l’attribution  de  la  nationalité  française.

 

 —>  Elle se refuse à rendre la naturalisation plus sévère et même elle  l’assouplit  un  peu. 

 

 —>  Quant  au  mariage  de  la  femme  française,  il  n’a  plus  d’effet  automatique  sur  la  nationalité  de  celle-ci. Cette  dernière  réforme  a  fait  le  plus  parler  d’elle  car  la  loi  de  1927  émancipait  la  nationalité  de  la  femme  par rapport à celle du mari. 

 

Ce serait sans doute un anachronisme de considérer que la loi de 1927 aurait été particulièrement sensible  au  thème  de  l’égalité  des  sexes  qui  n’est  pas  encore  un  thème  vraiment  mobilisateur  malgré  les  efforts  de  celle  dite  à  l’époque  « les suffragettes » c’est-à-dire les femmes qui luttaient pour avoir le droit de vote. Cette   loi   de   1927   n’est   pas   une   loi   féministe   mais   une   loi   inspirée   par   la   démographie : le législateur  s’est  rendu  compte  que  les  femmes  françaises  épousant  un  étranger  restaient le plus souvent en France. 

 

Après 1927 : 

          la crise économique mondiale commence en 1929, 

          les années 30 sont difficiles,   le régime de Vichy,           la libération de Vichy…

 

 

  

Section 3 : Le Code de la Nationalité Française

 

Code issu de la période la  libération  et  d’une  ordonnance du 19 octobre 1945. 

 

L’idéologie  du  régime  de  Vichy, sans être absolument ouvertement raciste, était xénophobe et

antisémite  et  bien  entendu,  ces  2  éléments  ont  eu  un  effet  sur  le  droit  de  la  nationalité  française.  L’idée  de Vichy est que les naturalisations depuis 1927 ont été trop faciles : on les accorde trop facilement. La conséquence de cette analyse est redoutable car le gouvernement de Vichy décide de remettre en cause les naturalisations prononcées depuis 1927. 

 

Une commission est instituée et elle a pour mission de reprendre tous les dossiers et de proposer :       soit la confirmation de la naturalisation,          soit son annulation.

 

Les personnes ainsi exposées à la perte de la nationalité française étaient aussi exposée à la persécution nazie. La  commission  travailla  jusqu’à  l’extrême  fin  de  l’occupation.  La  question  des  naturalisations  a  été  une  question  cruciale.  Sur  le  reste,  Vichy  n’a  pas  fait  grand-chose, faute de temps.

 

Lors de la Libération 1944-1945 et la Restauration de la république :  l’idée  du  gouvernement  de 

l’époque  est  qu’il  faut  changer  de  calibre  en  la  matière  de  droit  de  la  nationalité  française.  Il  faut  passer  à  une époque différente et il faut élaborer un vrai Code de la nationalité française complet, exhaustif et scientifique. 

 

On retire les dispositions sur la nationalité du Code civil et on les intègre en les modifiant dans un code nouveau préparé par le ministère de la justice et  qui  est  à  la  base  d’une  ordonnance  du  19  octobre  1945 : on efface toute la législation de Vichy et on revient à la tradition républicaine.

 

L’idée  d’élaboration  d’un  Code  de  la  nationalité  française  est  assez  significative  de  l’époque de traiter la nationalité  d’abord  comme  une  question de droit public avant  d’être  une  question touchant le droit de la personne et des familles.

 

Cette  codification  propre  est  ce  qu’il  y  a  de  plus  important  dans  l’ordonnance  car  pour  ce  qui  est  du  fond,  il  n’y  a  pas  grand  changement  dans  le  Code  de  1945  par  rapport  au  droit  de  la  nationalité  française de la fin de la 3ème République : le  Code  de  1945  n’a  pas  été  particulièrement  inventif.

 

Sur  aucune  des  questions  listées,  il  n‘y  a  de  réel  changement : 

 

 —>  le droit du sang reste primordial car  il  suffit  d’avoir  un  père  français  

 

 —>  pour le droit du sol, il faut une double naissance.

 

 —>  Pour  l’acquisition  de  la  nationalité  française : naturalisation sont reconfirmées et on annule les annulations de Vichy. 

 

 —>  On  ne  rend  pas  pour  autant  la  naturalisation  beaucoup  plus  facile  qu’avant  1939 : on reste sur le dispositif de 1927. On maintient même des dispositions de 1804 qui frappaient les naturalisés récents  de  certaines  incapacités  temporaires  comme  le  fait  qu’un  naturalisé  ne  pouvait  devenir  fonctionnaire  français  qu’au  moins  5ans  après  sa  naturalisation.  

 

 —>  Pour   le   mariage,   le   code   de   1945   n’est   pas   très   bien   inspiré : la loi de 1927 avait posé l’indépendance   de   la   femme   mais   le   code   revient   sur   ce   principe   car   selon   lui,   l’étrangère   qui  épouse  un  français  devient  automatiquement  française  mais  on  permet  à  l’intéressé de faire une déclaration contraire si elle ne veut pas devenir française. 

Cette solution apparait équilibrée et cela laisse une grande place à la volonté de la femme. En fait, c’est   un   système   partial   car   il   favorise   à   tout   les coups la nationalité française : absence de déclaration de la femme alors la femme est française. Cela peut se comprendre du point de vu démographique mais cela ne se comprend pas du fait de la volonté des femmes et surtout on revient à la conception selon laquelle le mariage a des effets sur la nationalité de la femme alors qu’il  n’en  a    aucun  sur  la  nationalité  du  mari.

 

 —>  Le père transmet la nationalité française à ses enfants quel que soit le lieu de naissance de ces enfants alors que la mère ne transmet la nationalité française  à  ses  enfants  que  si  l’enfant  est  de  surcroit né en France : inégalité des sexes. Le père a une incapacité de transmission de la nationalité française qui reste plus forte.

 

Section 4 : La loi du 9 Janvier 1973

 

Cette loi est lune des plus belles lois de la deuxième moitié du XXème : cette loi a transposé en droit de la nationalité française, les évolutions profondes du droit de la personne et de la famille en donnant une signification  nouvelle  et  plus  forte  au  principe  d’égalité  et  de  liberté.

 

 —>  Pour le  principe  d’égalité  de  l’homme  et  de  la  femme, il est poussé dans toutes ces conséquences : 

 

 —>  le  mariage  n’emporte  plus  aucun  effet  automatique  sur  la  nationalité  des  conjoints, c’est-à-dire

de la femme.

 

 —>  le mariage avec un français permet au conjoint étranger  de  devenir  français  s’il  le  souhaite  par  déclaration mais   avec   l’innovation capitale que désormais, cette possibilité est offerte non seulement   à   la   femme   étrangère   d’un   mari   français mais aussi au   mari   étranger   d’une   femme  française : le mariage avec une française permet au mari étranger de devenir français. 

 

La nationalité française de la femme a la même force et le même rayonnement que la nationalité française  de  l’homme.  

 

 —>  La règle est dupliquée en matière de perte de la nationalité française car : la femme française qui épouse un étranger reste française sauf déclaration contraire de sa part et de même, le mari français qui épouse une étrangère reste français sauf déclaration contraire de sa part : symétrie absolue entre la situation du mari et celle de la femme.

 

 —>  Sur  le  terrain  de  l’attribution  de  la  nationalité  française, ce  principe  d’égalité  est  poussé  aussi  dans  toutes ses conséquences car est français quel que soit son lieu de naissance,  l’enfant    d’un  parent français au moins, que ce parent soit le père ou la mère (plus  nécessaire  que  l’enfant  soit  né en France).

 

 —>  Pour le principe de liberté : 

 

 —>  Le  mariage  emporte  de  conséquences  sur  la  nationalité  des  conjoints  que  s’ils  le  veulent. 

 

 —>  Ce principe se trouve aussi dans la disposition selon laquelle   l’acquisition   volontaire   d’une  nationalité  étrangère  n’entraine  plus  la  perte  automatique  de  la  nationalité  française.

 

Depuis  1973,  il  n’y  a  plus  de  frein  vis-à-vis  de  la  plurinationalité  car  ces  principes  de  liberté  et  d’égalité  auront pour conséquences  l’augmentation  des  cas  de  plurinationalité.  

La   seule   réserve   sur   cette   loi   de   1973   est   qu’elle   n’est   pas   allées   jusqu’à   supprimer   les   incapacités  frappant les naturalisés récents, il faudra attendre 1983 pour que ces incapacités disparaissent mais cette loi  fait  entrer  le  droit  de  la  nationalité  française  dans  les  principes  d’égalité  et  de  liberté.

Section 5 :  L’ère  des  turbulences

 

La loi de 1973 est une loi qui a su faire passer dans notre code de la nationalité française, les principes de liberté et d’égalité dégagés en droit des personnes et de la famille.

 

Suivant cette période, notre période a été et reste une période agitée du point de vu des questions de nationalité, tout au moins du point de vu des  questions  d’accès  à  notre  nationalité et plus largement et pout tous les problèmes de  nationalité  liés  aux  questions  d’immigration.

 

Ce  sont  les  questions  de  l’immigration  qui  occupent  le  devant  de  la  scène,  les  débats  publics  bien  plus  que les questions de nationalité. Or, ces questions sont quand même liées et en définitive, le droit de la nationalité  s‘est  ressenti  des  difficultés  liées  à  la  politique  relative  à  l’immigration.  On  est  entré  dans  la  remise   en   cause   de   certains   modes   d’accès   à   notre   nationalité   même   si   aujourd’hui,   le   droit   de   la  nationalité française parait connaitre une certaine accalmie.

 

Paragraphe 1 :

La  remise  en  cause  de  certains  modes  d’accès  à  notre  nationalité

 

Dès le début des années 80, deux modes d’accès  à  notre  nationalité  font  progrès : 

          l’acquisition  de  la  nationalité  à  raison  d’un  mariage  avec  un  français  

          l’acquisition  automatique  de  la  nationalité  à  l’âge  de  la  majorité  par  la  combinaison  de  la  naissance  et de la résidence en France. 

 

Dans  les  deux  cas,  certains  courants  de  l’opinion  publique  trouvent  que  cet  accès  est  trop  facile  ou  qu’il  permet certaine fraude et ils proposent de le rendre plus difficile. Accès à la suite du mariage : les courants vont obtenir satisfaction.

 

A) Polémique  autour  de  l’acquisition  de  la  nationalité  française  à  raison  du  mariage  avec  un français

 

La loi du 9 janvier 1973 a posé des règles nouvelles :  désormais,  l’étranger —> l’étrangère  qui  épouse  une  française ou un français peut devenir français par simple déclaration dès le jour du mariage.

 

Vers 1970 – 1980, une polémique assez vive s’est  élevée  à  propos  de  cette  règle  car  on  a  fait  valoir  qu’elle  permettrait  par  des  mariages simulés ou fictifs avec des français complaisants, de devenir français par simple déclaration dès le jour du mariage quitte à entamer aussitôt après, une procédure de divorce. Des étrangers voulant résider en France pourraient choisir de devenir français par simple déclaration pourvu  qu’ils  réussissent  à  contracter  un  mariage  simulé.

 

On faisait valoir aussi que cette fraude serait organisée à grande échelle est quasiment au grand au jour car on trouvait dans les annonces de certains journaux soit des recherches de français complaisants pour un mariage fictif, soit des propositions de français complaisants à des étrangers. Dans le pire des cas, cette complaisance était écrite comme rémunérée.

 

La  polémique  va  vite  enfler  au  point  qu’une  proposition  de  loi  venant  de  l’opposition,  a  été  déposée  au  Parlement en vu de retarder  la  période  d’acquisition  par  déclaration par rapport au mariage et donc de s’assurer  une  vraie  communauté de vie entre les époux : 

 

è adoption à la quasi majorité du parlement et elle débouche sur une loi du 7 mai 1984, au terme de laquelle  la  déclaration  d’acquisition  ne  pourra  être  faite  qu’au  moins  6  mois  après  la  célébration  du mariage et à condition   qu’au   moment   de   cette   déclaration   les   époux   soient   encore en communauté de vie.

 

 

Cette réforme aurait du résoudre le problème définitivement car elle rendait a priori impossible le mariage simulé. Or après 1984, les craintes sur la fraude resurgissent et   on   fait   valoir   qu’il   n’est   pas  possible dans certains cas de vérifier sérieusement que les époux sont encore en communauté de vie lors de  la  déclaration  de  l’acquisition  de  notre  nationalité.  

 

è Une loi du 22 juillet 1993 porte le délai minimum pour la déclaration de 6 mois à 2 ans après la célébration du mariage. 

 

Cette réforme commence à susciter certaines questions de principe : le délai de 2ans est un délai long. Nous ne sommes pas au délai de 5ans comme pour la naturalisation mais le délai de 2ans rend

l’acquisition  par  déclaration  beaucoup  moins  rapide  et  surtout,  on  peut  se  demander  si  ce  délai  ne  révèle  pas   que   le   législateur   est   en   réalité   devenu   défavorable,   hostile   à   l’acquisition   par   déclaration.   La  stratégie  du  législateur  n’est  pas  de  tarir  au  final,  le  mode  d’acquisition  par  déclaration  au  profit  du  mode  d’acquisition  par  naturalisation,  beaucoup  plus  contrôlé  par  le  gouvernement.

 

La  question  est  devenue  mouvante  et  ce  mode  d’acquisition  est  pris  dans  la  tourmente  législative : une réforme existe à chaque changement de majorité.

 

è En 1998,  la majorité est de gauche : elle vote une loi du 16 mars 1998 qui ramène la durée minimale depuis la célébration du mariage à 1 an. 

 

è En 2002, la majorité est de droite : une loi du 26 novembre 2003 porte le délai minimum depuis la célébration du mariage à 2ans et même dans certains cas à 3ans. 

 

Désormais, le fait que les époux aient en cours de délai un enfant commun ne permet plus de prononcer la  déclaration  d’acquisition  sans plus attendre. 

          Jusqu’en   2003,   si   les   époux   avaient   un   enfant   dans   le   délai   alors   l’étranger   pouvait   faire   une  déclaration immédiate. 

          Dès  2003,  même  si  les  époux  ont  un  enfant  dans  le  délai,  l’étranger  devra  attendre  l’expiration  du  délai :  à  partir  de  2003,  ce  n’est  plus  la  fraude qui est la crainte de ce délai minimum et on voit que le législateur est très réservé  sur  ce  mode  d’acquisition par  déclaration  et  qu’il  incite  les  candidats  à  l’acquisition  à  passer  par  la  naturalisation.  

 

 Ce sentiment est renforcé par la loi du 24 juillet 2006 car le délai est porté à 4ans voire à 5ans dans certains cas. Il faut que les conjoints soient en communauté de vie depuis au moins 4ans dès la célébration de leur mariage :  le  mode  d’accès  à  notre  nationalité  est  devenu  assez  rigoureux  et  il est  contrôle  a  posteriori  par  le  gouvernement  qui   peut  s’opposer  à  l’acquisition  pour  défaut  d’assimilation  ou  indignité.  

 

B) Polémique   autour   de   l’acquisition   automatique   de   la   nationalité   française   à   la   majorité   de  l’enfant  par  la  combinaison  de  la  naissance et de la résidence en France

 

Jusqu’au   début   des   années   80,   l’enfant      en   France   de   parents   étrangers   devenait  automatiquement   français   à   sa   majorité   s’il   établissait   lors   de   sa   majorité,   qu’il   résidait   en   France  depuis au moins 5ans. 

Par hypothèse, aucun  des  deux  parents  étranger  de  l’enfant  n’était    en  France  sinon  l’enfant  serait  français  dès  sa  naissance.  Si  l’enfant  est    en  France  de  parents  qui  ne  sont  pas  nés  en  France  mais  qui  vont   rester   en   France   après   la   naissance   de   l’enfant   car   au   moment où   l’enfant   aura   18ans,   l’enfant  pourra  se  prévaloir  d’une  résidence  d’au  moins  5ans.

 

Ce  mode  d’acquisition  consiste  à  reconnaitre   que   cet enfant est désormais suffisamment intégré à la communauté française car on peut penser que dans la grande majorité des cas, cet enfant aura passé sa minorité en, France et il aura été élevé comme un français. Jusqu’au   début   des   années   80,   ce   mode  d‘acquisition  ne  soulève  pas  de  problèmes particuliers, il parait assez naturel et conforme aux intérêts français. 

Mais dès les  années  80,  ce  mode  d’acquisition  va  être  contestée  pour  des  raisons  diverses, les

critiques sont de portée différentes :

 

 —>  une  critique  porte  sur  l’automaticité 

L’automaticité   ne  respecterait  pas  la  liberté  et  la  volonté  de  l’intéressé  car  ce  dernier automatiquement français  à  sa  majorité.  On  s’étonne  que  l’on  puisse  imposer  la  nationalité  française  à  des  jeunes  qui  peut  être ne voudraient pas devenir français.

 

Cette  première  critique  n’a  jamais  été  très  sérieuse  car  il  a  toujours  été  possible  aux  jeunes concernés de renoncer  à  cette  acquisition  automatique  dans  les  6mois  précédant  sa  majorité  et  dans  l’année  la  suivant. 

 

De   plus,   on,   peut   se   demander   si   cette   critique   est   bien   sincère   car   la   contestation   de   l’acquisition  automatique ne vient pas de la  crainte  d’une  acquisition  forcée  mais  de  la  crainte  d’une  acquisition  trop  facile.

 

 —>  problème de philosophie de la nationalité : 

L’automaticité de  l’acquisition  priverait  les  jeunes  de  la  possibilité  de  faire  un  choix  volontaire,  conscient  et exprimé en faveur  de  la  nationalité  française.  Elle  les  priverait  de  faire  de  l’acquisition  de  la  nationalité  un   moment   d’expression   de   leur   volonté   profonde   de   devenir   français,   il   faudrait   alors   supprimer  l’automaticité  et  la  remplaçait  par  une  acquisition par déclaration à  l’âge  de  la  majorité.

 

On reconnait une conception particulière dite une conception élective de la nationalité selon laquelle la nationalité  devrait  résulter  d’un  choix  vivement  exprimé  par  l’intéressé.  Cette  conception  est  souvent  reliée avec une  vision  citoyenne  de  la  nationalité  et  pour  les  partisans  à  cette  conception,  ils  l’estiment  comme républicaine.

 

Nous pouvons douter que cette conception correspond à la  conception  dominante  mais  elle  n’explique  pas la grande majorité des cas de réalisation  d’acquisition  de  la  nationalité  française.

 

Ce  débat  a  le  mérite  de  faire  avancer  la  réflexion  en  matière  d’accès  à  notre  nationalité  et  sous  la  première cohabitation de 1986 – 1988, une commission des sages a   conseillé   d’abandonner  l’automaticité   au   profit   d’une   déclaration en faveur de la nationalité française, à condition que cette déclaration soit la plus simple possible et la plus facile possible pour les intéressés. 

 

è Les propositions donnèrent lieu à une disposition dans la loi du 22 juillet 1993 qui, en effet, a supprimé  l’automaticité  de  l’acquisition et l’a remplacé par une acquisition par déclaration très simple.

 

Or ce compromis était en définitive praticable car très nombreux furent les jeunes qui ont déclaré vouloir devenir français par la combinaison de la naissance et la résidence en France. Les craintes exprimées se sont révélées en définitive infondées. 

 

è Lors   de   l’alternance   politique   suivante,   une   loi du 16 mars 1998 a rétabli   l’automaticité de l’acquisition  de  la  nationalité  à  la  majorité par la combinaison naissance + résidence.

 

Cette loi semble laisse une certaine perplexité :

          nous  pouvons  penser  que  cette  loi  n’était  pas  du  tout  indispensable  c’est-à-dire pas indispensable de  revenir  à  l’automaticité.  

          les  alternances  suivantes  n’ont  pas  remis  en  cause  l’automaticité  qui  reste  de  droit  positif.  Cela  veut peut-être dire que notre de nationalité française a atteint une période de stabilité au moins relative.

 

Paragraphe 2 :

Une stabilité au moins relative

 

Les dernières années ont montré une certaine stabilité de  notre  droit  de  la  nationalité,  à  l’exception  des  lois  de  2003  et  de  2006  en  matière  d’acquisition  par  déclaration  à  la  suite  du  mariage.  

 

Il   est   vrai   qu’il   y   a   eu   en   1993   un   changement   non   négligeable   tout   au   moins   de   localisation des dispositions en matière de nationalité française car la loi du 22 juillet 1993 a supprimé le code de la nationalité française et a réintégré ces dispositions dans le Code civil : article 17 et suivant.

Ce n’est   pas   un   changement   dans   la   substance des règles c’est-à-dire que le droit de la nationalité française est revenu dans le Code civil, sorti en 1945.

 

Quelle a été la raison de ce déménagement ? Nostalgie  du  passé  d’avant  1945,  mais  c’est  surtout  le  souhait  de manifester que le droit de la nationalité est fondamentalement un droit des personnes,  qu’il  est  lié  à  l’état  des  personnes  relevant  du  Code civil et le souhait de manifester un souci de stabilité de droit de la nationalité française. 

 

Or, le débat porte plus sur la police des étrangers que sur la nationalité française.

 

 

 

 

Chapitre 1  :  Etre Français

 

 

Il  y  a  au  moins  deux  façons  d’être  français : 

 dès la naissance :  on  parle  d’attribution de la nationalité française  en  cours  d’existence :  on  parle  d’acquisition de la nationalité française.

 

Cette distinction est évoquée par le Code civil.   L’attribution   de   la   nationalité   française   concerne   les  français   de   naissance   dit   les   français   d’origine   alors   que   l’acquisition   concerne   ceux   qui   deviennent  français en  cours  d’existence.

 

Aujourd’hui,  il  n’y  a  pratiquement  plus  aucune  différence  de  traitement  entre  les  français  de  naissance  et  ceux  devenus  français  en  cours  d’existence.

 

Section 1 :  L’Attribution  de  la  Nationalité  Française

 

Cette attribution se fait :

 soit par la filiation,   soit par la naissance en France.

 

Quant  il  s’agit  de  filiation,  on  parle  de  droit  du  sang  ou  jus sanguinis.  A  l’inverse,  le  droit du sol correspond le jus soli. 

 

Le législateur français donne une place prééminente au droit du sang c’est-à-dire à  l’attribution  de  la  nationalité  française  en  raison  de  la  filiation  mais  la  place  du  droit  du  sol  n’est  pas  pour  autant  négligée.

 

Sous-section 1 :   L’Attribution   de   la   Nationalité   Française   en   Raison   de   la  Filiation

 

C’est  le  mode  de  transmission de notre nationalité le plus fréquent. La règle de principe en la matière est posée   à   l’article   18   Code Civil mais   cette   règle   est   assortie   d’une   règle   corrective  qui   figure   à   l’article   18-1 Code Civil.  

Paragraphe 1 :

La règle de principe

 

Cette règle est simple, elle est prévue à l’article  18: « est  français  l’enfant  dont  l’un  des  parents  au  moins  est français ». 

 

Cette  règle  reprend  pour  l’essentiel  l’ancien  article  17  du  code  de  la  nationalité et dans son esprit, elle est directement issue de la loi du 9 janvier 1973 dont  elle  respecte  l’esprit  de  profonde  et  complète  égalité.  

 

Depuis une ordonnance du 4 juillet 2005,   ce   principe   d’égalité   a   été   poussé   dans   ses   ultimes  conséquences  car  le  texte  de  l’article  18  ne  fait  plus  aucune  référence  à  l’ancienne distinction des enfants légitimes —> naturels. 

 

 

 

En  effet,  l’article  18  est  un  texte  met en avant deux principes : 

 

 —>  le  principe  d’égalité  stricte  des  conjoints  dans  la  transmission  de  la  nationalité  française : 

 

Depuis 1973, la mère transmet la nationalité française dans les mêmes conditions que le père. 

 

Avant  1973,  et  notamment  entre  1945  et  1973,  la  mère  française  ne  transmettait  sa  nationalité  à  l’enfant  que  si  de  surcroit  l’enfant  était    en  France  alors  que  depuis  1973,  la  nationalité  française de la mère suffit quel que soit  le  lieu  de  naissance  de  l’enfant.

 

Cette  règle  n’est  pas  si  ancienne  et  la  règle  actuelle  manifeste  une   ouverture du législateur à la pluri nationalité car il est vraisemblable que chacun des parents peut transmettre sa nationalité, il y aura plus d’enfants  plurinationaux  que  par  le  passé.  La  réforme  de  1973  montre  que  l’attachement  au  principe  de  l’égalité  des  sexes  est  plus  fort que  l’éventuel  crainte  devant  la  pluri nationalité.

 

 —>  le  principe  d’égalité  stricte  des  filiations  dans  l’attribution  de  cette  nationalité : 

 

La  règle  selon  laquelle  la  nationalité  française  d’un  seul  parent  suffit  vaut  pour  toutes les filiations et pas seulement pour la filiation légitime. Depuis 2005, les termes de filiation légitime et de filiation  naturelle ont  disparu  de  nos  codes  et  elles  sont  effacées  de  l’article  18  du  Code civil. 

 

Mais pour la filiation adoptive,  l’expression  reste  utilisée  et  l’article  20  alinéa 2 du Code civil qui dispose qu’en  matière  de  filiation  adoptive,  les règles de transmission de la nationalité française sont les mêmes qu’en   matière   de   filiation   par   le   sang. A   cet   article,   il   s’agit   de   l’adoption   plénière c’est-à-dire qui ressemble  à  l’adoption  par  le  sang :  pour  cette  adoption,  il  suffit  que  l’un  des  adoptants  soit français pour que  l’enfant  soit  français.  En  revanche,  ces  règles  ne  valent  pas  pour   l‘adoption  simple,  on  verre  que  l’adoption  simple  est  un  cas  d’acquisition  de  la  nationalité  française  en  cours  d’existence.

 

La règle de principe ne fait pas de la naissance   en   France   une   condition   d’attribution   de   la  nationalité française.  Il  faut  alors  reconnaitre  que  la  règle  de  l’article  18  du  Code civil peut faire courir le risque  d’une  nationalité  française  purement  formelle  si  l’enfant  n’a  aucun  lien  avec  la  France autre que la nationalité  française  de  ses  parents.  Pour  cela,  l’article  18  est  assorti  d’une  règle  corrective  à  l’article  18-1 du Code civil.  

Paragraphe 2 :

La règle corrective

 

Selon l’article  18-1 du Code civil, l’enfant    à   l’étranger  d’un   seul  parent français aura la faculté de répudier   la   nationalité   française   dans   les   6   mois   précédent   sa   majorité   ou   dans   l’année   suivant   la  majorité.

 

La  situation  de  cet  article  concerne  l’hypothèse    dans  certains  cas  la  nationalité  française  risque  d’être  formelle si  l’enfant  n’est  destiné  à  n’avoir  aucun  contact  réel  avec  la  France  et  si  le  seul  de  ses  parents  qui  soit  français  n’a  pas  l’esprit  de  revenir  en  France.

 

Cette répudiation est une simple faculté :   elle   n’est   pas   imposée   à   l’enfant   c’est-à-dire qu’il peut conserver  la  nationalité  française  même  s’il  n’a  aucun  lien  avec  la  France.

 

A  l’inverse,  cette  faculté  de  répudiation  si  elle  est  exercée,  n’a  pas  besoin  d’être  motivée.  De  plus,  un  enfant qui a des liens avec la France préfère pour des raisons qui le concerne, répudiait sa nationalité française,  il  le  pourra  dès  qu’un  de  ses  parents  est    à  l’étranger :  l’enfant  choisit  de  garder  ou  pas  la  nationalité française.

Cette  faculté  n’est  pas  ouverte  si  l’enfant  est    à  l’étranger  de  deux  parents  français et  l‘article  18-1 précise  que  si  l’enfant    à  l’étranger  dont  un  des  parents  est  français,  il  perd  sa  faculté  de  répudiation  si  en  court  de  minorité  de  l‘enfant,  le  parent  étranger  devient  français.  

 

Répudiation : article 26 et svt, déclaration simple devant les autorités consulaires.

 

 

Sous-Section 2 :   L’Attribution   de   la   Nationalité   Française   en   Raison   de   la  Naissance en France

 

Le droit de la nationalité française fait une place au jus solis mais une place qui reste secondaire par rapport au jus sanguinis. 

 

La naissance en France ne suffit jamais à elle-seule   à   l’attribution   de   la   nationalité   française, il faut toujours  qu’un  élément  s’ajoute  à  la  naissance,  d’où  l’intérêt  du  jus solis par rapport au jus sanguinis : il ne suffit  jamais  d’être   en  France  alors  qu’il  suffit  d’avoir  un  parent  français.

 

La naissance en France peut se combiner avec un souci de prévention   de   l’apatridie pour justifier l’attribution   de   la   nationalité   française.   La   naissance   en   France   de   l’enfant   peut   se   combiner   avec   la naissance  en  France  de  l’un  de  ses  parents  au  moins  dit  la  règle  de  la  « double naissance » en France.

 

Paragraphe 1 :

Naissance  en  France  et  prévention  de  l’apatridie

 

Ce principe est énoncé aux les articles 19 et 19-1 du Code civil :  dès  qu’un  enfant   né en France risque d’être  apatride  de  naissance,  il  est  français  dès  sa  naissance.  La  naissance  se  combine  ici  avec  l’apatridie.   Ces articles énoncent 3 hypothèses répondant à cette situation :

                       l’enfant    en  France  de  parents  apatrides

                       l’enfant    en  France de parents inconnus  —>  l’enfant      en   France   de   parents   connus   ayant   une   nationalité   étrangère   lorsque   les   parents   de  l’enfant  ne  peuvent  en  aucune  façon  lui  transmettre  leur  nationalité.  Cette  hypothèse  se  rencontre  dans deux cas :  o soit le pays des parents  n’accordent  sa  nationalité  qu’aux  enfants  nés  sur  son  propre  territoire,  s’ils  naissant  à  l’étranger  alors  ils  n’auront  pas  la  nationalité  des  parents

o soit  le  lien  de  filiation  entre  l’enfant  et  les  parents  ne  permet  pas  l’attribution  à  l’enfant  de  la nationalité des parents.

 

Dans  ces  hypothèses,  l’attribution  de  la  nationalité  française  est  une  attribution  à  titre des secours pour l’enfant,  pour  lui  éviter  l’apatridie  qui  est  une  situation  toujours  négative.  

 

La nationalité française est elle-même une nationalité de secours, ce qui explique que si en cours de minorité   l’enfant   vient   à   prendre   la   nationalité   d’un   de   ses   parents   alors   l’enfant   perd  automatiquement la nationalité française.  Mais  si  l’enfant  atteint  sa  majorité  sans  avoir  reçu  une  autre  nationalité  que  celle  française  alors  il  garde  la  nationalité  française  s’il  le  veut  jusqu’à  la  fin  de  ses  jours.  

 

 

 

Paragraphe 2 :

La règle de la double naissance en France

 

Est français dès sa naissance, un enfant né en France quand au moins un de ses deux parents est luimême né en France.

 

Cette règle célèbre dans le droit de la nationalité française est une règle de fond et une règle de preuve de la nationalité française. Nous pouvons nous demander si son aspect de règle de preuve n’est  pas  en  fait plus important que son aspect de règle de fond.

 

A)  La règle de fond

 

Cette règle de fond se décompose en une règle de principe et une règle corrective. 

 

1 La règle de principe

 

Selon l’article  19-3 du Code civil : « est  français  l’enfant    en  France  lorsqu’un  de  ses  parents  au  moins  y  est lui-même né ». 

 

Cette  règle  doit  s’entendre  selon  les  mêmes  principes  d’égalité  des  parents  et  des  filiations  que  la  règle  du jus sanguinis de  l’article  18.  Par  conséquent,  peu  importe  que  le  parent    en  France  soit le père ou la mère  et  peu  importe  le  mode  d’établissement  de  la  filiation,  que  les  parents  soient  ou  non  mariés.  La  règle  s’applique  aussi  en  cas  d’adoption  plénière.

 

 —>  La  naissance  de  l’enfant  doit  avoir  lieu  en  France : 

 

Il faut entendre par là :

 le territoire métropolitain,   les  départements  d’outre-mer   les collectivités territoriales de Saint Pierre et Miquelon et de Mayotte. 

 

Dans les dernières décennies du 20ème siècle,  un  problème  s’est  posé : il concernait la situation  d’enfants  nés en France mais dont le parent concerné, était né dans un territoire français mais territoire devenu depuis indépendant.

Exemple :  parent    avant  1960  dans  les  territoires  d’Afrique  noire francophone devenus indépendants  en 1960, ou avant 1962 en Algérie.

 

 —>  La règle de la double naissance était-elle respectée ? 

 

On a cru que oui pendant longtemps car il suffisait que le parent soit né dans un territoire français au jour de sa naissance et on ne pensait pas que ce territoire devait toujours être français lors de la naissance de l’enfant.

 

Puis dans les années 1980, certains ont fait valoir que dans la mesure où le territoire était devenu indépendant,  il  n’y  avait  plus  de  raisons  de  considérer  que  l’enfant  bénéficiait  de  la  règle  de  la  double  naissance en France. 

 

Le législateur du 22 juillet 1993 a  cru  bon  d’écouter  ces  objections  car  il  a  décidé  qu’à  partir  du  1er janvier 1994,  l’enfant    en  France  ne  bénéficierait  de  la  règle  de  la  double  naissance  que  si  le  lieu  de  naissance  du parent était encore sous la souveraineté  française  lors  de  la  naissance  de  l’enfant.

 

 

 

 La  seule  exception  qu’a  consentie  le  législateur  de  1993  a  concerné   l’Algérie car  l’enfant    en  France de parents nés en Algérie avant 1962 continue de bénéficier de la règle de la double naissance.

 

Cette règle  de  1993  n’aura  dans  quelques décennies plus de vrais objets car aucun parent ne sera né avant 1960-1962.

 

2 – La règle corrective

 

L’attribution  de  la  nationalité  française  risque  d’être  formelle  dans  certains  cas  du  fait  du  jus solis comme du jus sanguinis. 

 

Mais  pour  le  législateur,  lorsque  l’enfant    en  France  d’un  seul  parent    en  France  alors  il  se  peut  que  cet enfant ait peu de liens avec la France et donc l’article  19-4 Code civil ouvre  à  l’enfant  une  faculté de répudiation de la nationalité française  dans  les  6  mois  précédent  sa  majorité  et  dans  l’année  la  suivant (soit entre 17,5 ans et 19 ans).

 

L’enfant   n’a   pas   cette   faculté   de   répudiation   si   ses   deux   parents   sont   nés   en   France   et   il   perd   cette  faculté  si  en  cours  de  minorité  de  l’enfant, l’un  des  parents  devient  français.

 

Cette règle de la double naissance est une règle ancienne car elle remonte à une loi de 1861 qui avait permis à traiter la question  des  enfants  nés  en  France  d’une  mère  française  ayant  perdu  sa  nationalité  par  son mariage.

 

B) Le rôle probatoire de la règle de la double naissance

 

Environ 90% des nationaux français par filiation, le sont aussi par la règle de la double naissance. 

 

 —>  Dans  cette  hypothèse,  quand  il  s’agit  de  prouver  la  nationalité  française, comment fait-on pour ceux qui sont français par la naissance ? 

On procède comme si ces personnes étaient françaises par la naissance : il suffit de produire l’extrait  de  son acte de naissance en France et l’extrait  de  l’acte  de  naissance  d’un  de  ses  parents.

 

C’est  la  raison  pour  laquelle  certains  courants  d’opinions  ont  critiqué  la  règle  de  la  double  naissance  et  plus  largement  toutes  les  attributions  de  la  nationalité  française  par  le  sol.  Ces  courants  ont  montré  qu’ils  ne  mesuraient  pas  la  portée  pratique  de  ce  qu’ils  souhaitaient. Mais cela signifiait aussi que la preuve de la  nationalité  française  était  facile  que  si  l’enfant  est    en  France  de  parents  eux-mêmes nés en France. A défaut, la preuve devient plus difficile.

  

 

 

 

Section 2 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité Française

 

L’attribution  concerne  des  hypothèses    la  nationalité  française  est  obtenue  dès  la  naissance  alors  que  l’acquisition  concerne  le  cas    la  nationalité  est  acquise  en  cours  d’existence.

 

 —>  Cette distinction est-elle importante ? 

Il faut distinguer selon  les  effets  et  les  modes  d’acquisitions  

 

Dans une société démocratique, il  n’est  pas  admissible   de  faire   une  distinction  importante  entre   les  français  selon  qu’ils  sont  d’origine  française ou non.  Il  n’y  a  pas  de  raisons  de  diminuer  les  droits des français par acquisition par rapport aux droits des français par attribution. 

 

Mais  il  est  clair  que  les  modes  d’acquisition  de  la  nationalité  française  ne  peuvent  pas  ressembler  aux  modes   d’attribution   et   en   matière   d’acquisition,   les   pouvoirs   publics et le gouvernement peuvent se réserver un droit de contrôle ou de décisions qu’ils  n’ont  pas  en  matière  d’attribution  de  la  nationalité  française.

 

Exemple :   un   enfant      d’un   parent   français   ou      en   France   d’un   parent      en   France,   l’enfant   est  français que cela plaise ou non aux pouvoirs publics. Mais si une personne demande au gouvernement de devenir   français   par   naturalisation   alors   elle   n’obtiendra   sa   naturalisation   que   si   le   gouvernement   est  d’accord.

 

Les  modes  et  cas  d’acquisition  sont  nombreux et divers :

 —>  tout  d’abord,  l’acquisition  de  la  nationalité  française  peut  se  faire  en  raison  d’un  lien particulier avec la France 

 —>  puis  l’acquisition  peut  se  faire  en  raison  d’un    lien particulier avec un français ou une française c’est-à-dire un lien plus personnel.

 

 

Sous-Section 1 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité  Française  en  Raison  d’un  Lien  Particulier avec la France

 

Pour  devenir  français,  il  ne  suffit  pas  d’avoir  un  lien  particulier  avec  la  France  donc  dans  un  certain  cas,  l’acquisition  repose  sur  la combinaison d’un  lien  de  la  personne  avec  la  France et de la volonté de cette personne de devenir française. Il faut alors un élément objectif constatable qui est le lien de la personne avec la France comme le fait de travailler en France et un élément subjectif lié à la volonté de la personne.

 

Egalement, le cas   d’une   personne   qui combine un lien particulier avec la France, lien objectivement fort comme le fait  d’être    en  France. Ce lien est tellement fort que la personne peut devenir française au bout   d’un   certain   temps   automatiquement   mais   cette   automaticité   n’est   pas  imposée à la personne, personne qui peut alors refuser de devenir française :  combinaison  d’un  lien  avec  la   France   et   de   l’absence   de   volonté   de   refuser   la   nationalité. Le lien avec la France est plus fort objectivement  dans  la  seconde  hypothèse  car  il  devient  français  automatiquement  sauf  s’il  demande  de  ne pas le devenir.

 

 

Paragraphe 1 :

La   combinaison   d’un   lien   avec   la   France   et   de   la   volonté   de   devenir  français

 

La volonté de devenir  français  n’est  jamais  à  elle-seule suffisante pour acquérir notre nationalité.  Elle   doit   en   l’occurrence   se   combiner   avec   un   lien fort avec notre pays et avec une décision du gouvernement français dans le cadre de la procédure dite de naturalisation. 

 

Cependant,   il   existe   une   autre   possibilité   d’acquisition,   plus   marginale,      l’intéressé   peut   devenir  français  par  simple  déclaration  lorsqu’il  a  joui  de  la  possession  d’état  de  français  depuis  au  moins  10  ans.

 

A) L’acquisition  de  la  nationalité  française par naturalisation

 

La naturalisation peut se définir comme  l’octroi  par  l’Etat  de  la  nationalité  française  à  un  étranger  qui la demande. 

 

 —>  C’est  le  mode  d’acquisition  de  notre  nationalité  le plus important car il concerne environ 30 000 personnes par an. 

 

 —>  C’est  aussi  un  mode  d’acquisition  qui  dépend  d’une  décision  du  gouvernement et  d’une  décision  discrétionnaire du gouvernement c’est-à-dire que le   gouvernement   n’est   jamais   obligé   de  naturaliser  le  demandeur  même  s’il  remplit  toutes  les  conditions  de  la  naturalisation. La décision de naturalisation  est  toujours  une  décision  en  opportunité  et  le  gouvernement  n‘est  pas  lié  par  le  dossier de naturalisation.

 

Ce   caractère   discrétionnaire   explique   aujourd’hui   la   faveur   qu’a   la   naturalisation   dans   les   cercles   des pouvoirs publics : les gouvernements actuels sont favorables à la naturalisation car le gouvernement peut contrôler complètement le processus de naturalisation. 

 

En même temps et un peu paradoxalement, l’histoire  de  la  naturalisation  depuis  1804  a  été  très perturbée, passant par des phases  d’extrême  sévérité puis par des phases de plus grandes souplesses : il y a eu  des  périodes  très  hostiles  à  la  naturalisation,  tandis  que  d’autres  ont  été  plus  favorables.  

 

 —>  La naturalisation est antérieure à la Révolution puisque, sous l’Ancien  Régime, le Roi de France avait déjà le pouvoir discrétionnaire de conférer à certains étrangers des lettres dites de « naturalité » ou de « bourgeoisie » qui leurs donnaient un statut à peu prés comparables à ceux des sujets du Roi de France. 

 

 —>  Sur ce terrain, la Révolution de 1789 a   voulu   rompre   avec   l’Ancien Régime en accordant des naturalisations largement ouvertes aux étrangers partageant les idéaux de la Révolution française et en fermant la naturalisation aux étrangers adversaires à la révolution. 

 

 —>  De ce point de vu, le Code napoléon revient  à  la  politique  d’Ancien Régime mais il y revient avec une vision plus rigoureuse car la naturalisation est très sévèrement limitée par des conditions rigoureuses et elle reste une décision purement discrétionnaire du gouvernement.

 

Depuis 1804, il y a eu plusieurs phases différentes: 

 

 —>  de 1804 à 1927, la législation en matière de naturalisation a eu tendance   à   s’assouplir  progressivement et la naturalisation est devenue moins difficiles au fil du temps. La loi du 10 aout 1927 avait été préparée dans un esprit de défaveur à la naturalisation car les pouvoirs publics français   avaient   été   déçus   par   l’attitude   insuffisamment   patriotique   de   certains   naturalisés  pendant la guerre de 1914 – 1918 et  les  travaux  préparatoires  de  cette  loi  ont  montré  que  l’intérêt  de  la  France  voulait  ouvrir  la  naturalisation  mais  la  législation  n’a  pas  été  plus  rigoureuse  par  la  loi  de 1927.

 

 —>  A la fin des années 30, avant la seconde guerre mondiale, un   état   d’esprit assez hostile à la naturalisation commence à se faire sentir  

 

 —>  Sous  l’occupation,  dès  juin —> juillet  1940  et  sous  le  régime  de  Vichy,  l’esprit  est  ouvertement  hostile  aux naturalisations. Ce qui est plus grave c’est que le régime de Vichy entreprend une révision rétroactive   des   naturalisions   prononcées   depuis   927.   L’idée   est   qu’un   certains   nombre de ressortissants   d’Europe   centrale   avaient   été   naturalisés   trop   facilement   et   donc   certaines  naturalisations ont été annulées rétroactivement.

 

 —>  Avec le retour du régime républicain vers 1944, les annulations des naturalisations sont abrogées et   on   revient   à   la   naturalisation   d’esprit   républicain   qui   n’est   pas   particulièrement   souple,   ni  libérale en matière de naturalisation. 

 

 —>  L’ordonnance   de   1945 n’a   pas   abrogé   les incapacités frappant les naturalisés récents. Ces incapacités ont disparu  qu’en  1983.

 

Aujourd’hui, le droit de la naturalisation a assez peu bougé depuis 1945 : la seule réforme qui puisse avoir de  l’importance  pour  la  suite  remonte  à  la  loi du 22 juillet 1993. Cette loi est une loi plutôt rigoureuse en matière de nationalité. Or paradoxalement, cette loi oblige les pouvoirs publics à motiver en toute hypothèse les décisions de refus de naturalisation, ce qui est un peu contradictoire avec le caractère discrétionnaire de la décision de naturalisation. Elle  est  discrétionnaire  donc  elle  n’a  pas  à  être  motivé  donc  si  elle  doit  être  motivée  alors  c‘est  ouvrir  la  voie  à  un  contrôle  contentieux  de  naturalisation.  Pour  autant, la décision de naturalisation reste une décision discrétionnaire, ce qui signifie que les conditions posées par la loi pour la naturalisation sont seulement des conditions de recevabilité de la demande c’est-à-dire que   l’intéressé   doit   remplir   ces   conditions   pour   que   sa   demande   soit   examinée par les pouvoirs publics mais cela ne lui garantie pas une réponse positive donc les conditions sont simplement des conditions de recevabilités.

 

1 – Les conditions de recevabilité de la naturalisation

 

Elles sont au nombre de 4 :   l’âge  du  demandeur,    sa résidence lors de la demande, 

 le  stage  qu’il  doit  avoir  fait  en  France,  

 certaines  qualités  du  demandeur  car  il  doit  être  de  bonne  vie  et  mœurs  et  il  doit  être  assimilé  à  la  communauté française.

 

a)     La  condition  d’âge :  

 

Cette condition est posée à l’article 21-22 Code Civil. Le demandeur doit avoir au moins 18 ans au moment où il  dépose  sa  demande.  C‘est  l’âge  de  la  majorité  civile  en  France  mais  cette  condition  s’applique  à  tous  les  étrangers même à ceux dont la loi personnelle fixerait un âge de majorité civile plus jeune que celui de 18ans.

 

b)     La condition de résidence : 

 

L’étranger doit avoir sa résidence en France aussi bien au jour où il dépose sa demande de naturalisation qu’au   jour   de   la   signature   du   décret   de   naturalisation. Cette condition est logique puisque la naturalisation  est  la  constatation  de  l’intégration  de  l’étranger  dans  la  communauté  nationale. 

 

Mais  l’interprétation  que  la  jurisprudence française fait de cette condition est en fait assez rigoureuse :  il  ne  suffit  pas  que  l’étranger  habite en France, il  faut  qu’il  y  ait  le  centre  de  ses  intérêts et notamment les tribunaux ont à plusieurs reprises   énoncé   qu’un   étranger   ne   disposant   pas   de   revenus   d’origine  française ne résidait pas en France au sens du droit de la naturalisation.  

Exemple : un étudiant étranger ou un jeune chercheur étranger dont le revenu principal proviendrait d’une  bourse  de  son  gouvernement  ne  sera  pas  vu  comme  résident  en  France  même  s’il  y  habite.  

 

La jurisprudence a tendance à interpréter la résidence en France dans un sens propre au droit de la nationalité et qui est plus restrictif que le sens que la résidence a en droit civil.

 

c) La condition de stage : 

 

C’est une condition de durée minimale de la résidence avant le dépôt de la demande de naturalisation. La détermination   de   cette   durée   est   significative   de   l’état   d’esprit   de   l’époque   vis-à-vis de la naturalisation. 

Dans les époques restrictives, cette durée minimale est allongée à savoir 10 ans minimum. 

 

 —>  Aujourd’hui,   l’article   21-17 du Code civil fixe cette durée minimale à 5ans, ce qui reste moins rigoureux mais qui reste exigeant. 

 

Il est vrai que le législateur a prévu dans certains cas soit une réduction de la durée du stage à 2ans, soit une dispense pure et simple de la condition de stage.

 

 —>  Pour la réduction à deux ans, il existe deux cas de réduction énoncés à l’article  21-18 du Code civil

: 

 

 —>  l’étranger  qui  a  accompli  avec  succès  deux  années  d’études  supérieures en  vu  d’acquérir  un  diplôme 

délivré  par  une  université  ou  un  établissement  d’enseignement  supérieur français.

 

 —>  l’étranger  qui a rendu ou qui peut rendre par ses capacités et ses talents des services importants à la France.

 

 —>  Pour les dispenses pures et simples de stages : 

 

Elles étaient assez nombreuses  jusqu’aux  années  1990  mais  elles  ont  été  réduites en nombre par la loi du 22 juillet 1993 et par la loi du 24 juillet 2006. Cependant, même réduits, les cas de dispenses restent au nombre de 5 et ils peuvent être répartis en trois grands groupes : 

 

 —>  les étrangers dits particulièrement méritants ou particulièrement utiles. 

 

 —>  C’est  l’étranger  qui  a  rendu  des  services  exceptionnels  à  la  France  ou  qui  présente  pour  la  France  un  intérêt exceptionnel : article 21-19-6 Code civil.

 —>  C’est   aussi   l’étranger   francophone   qui   contribue   par   son   action   et   mérites   au   rayonnement de la France et à la prospérité de ses relations économiques internationales : article 21-21 du Code civil.

 

Ces   formulations   peuvent   prêter   à   sourire   dont   celle   de   l’article   21-19-6 du Code civil. Certains commentateurs observent ironiquement qu’en  matière  sportive,  les  services  devaient  être  exceptionnels  car  il  est  arrivé  qu’il  y  ait  eu  des  naturalisations  rapides  de  sportifs  étrangers.

 

 —>  la  dispense  prévue  par  l’article  21-2 du Code civil, 

 

« Est dispensé de stage, la personne qui appartient à  l’entité  culturelle  et  linguistique  française  lorsqu’elle  est  ressortissante  de  territoires  ou  d’Etats  dont  le  français  est  la  langue  officielle  ou  une  des  langues  officielles  à  condition  que  le  français  soit  la  langue  maternelle  du  demandeur  ou  qu’il  ait été scolarisé pendant au moins 5ans dans un établissement enseignant en langue française ». 

 

Les  francophones  sont  dispensés  de  stage  s’ils  viennent  d’Etats  francophones.

 

 —>  Personnes qui ont révélé un attachement à la France ou au moins leur confiance dans notre pays :

 

          C’est  celui  ou  celle  qui  a  effectivement  accompli  des  services  militaires  dans  l’armée  française  

          qui  s’est  engagé  en  temps  de  guerre  dans  l’armée  française  

          c’est  aussi  depuis   la loi du 16 mars 1998, de celui ou celle qui a obtenu en France le statut de réfugié.

 

d) La  condition  de  bonne  vie  et  mœurs  et  d’assimilation  à  la  communauté  française : 

 

                 La  condition  de  bonne  vie  et  mœurs  est  posée  à  l’article  21-23 du Code civil car « nul ne peut être naturalisé  s’il  n’est  pas  de  bonne  vie  et  mœurs  ou  s’il  a  fait  l’objet  de  l’une  des  condamnations  visées  à  l’article  21-27 du Code civil ».  

 

Cette   condition   n’est   pas   complètement   anodine   car   il   y   une   sorte   d’enquête   de   moralité,   diligenté  pendant la procédure de naturalisation. 

 

De plus les condamnations à  l’article  21-27 du Code civil ne sont pas à négliger car en toute hypothèse, la condamnation  par  un  tribunal  français  à  une  peine  d’emprisonnement  d’au  moins  6  moins  sans  sursis  rend la demande de naturalisation irrecevable. Pour les condamnations  prononcées  à  l’étranger, elles pourront ne pas être prises en considération mais le décret de naturalisation ne pourra être pris  qu’après  avis  conforme  du  Conseil  d’Etat.

 

                  Sont irrecevables, les demandes de naturalisation formulées alors que l’étranger  fait  l’objet  d’un  arrêté  d’expulsion ou alors que son séjour en France est irrégulier.

 

La   condition   d’assimilation   à   la   communauté   française   (article   21-24   Code Civil)   pose   aujourd’hui   des  problèmes délicats. Selon cet article, « nul ne peut être naturalisé s’il  ne  justifie  de  son  assimilation  à  la  communauté française notamment par une connaissance suffisante selon sa condition de la langue française et des droits et devoirs conférés par la nationalité française ». Ce texte est difficile à interpréter. 

 

Cette  condition  est  dure  à  interpréter  d’autant  plus  que  la  connaissance  de  la  langué  française  n’est  une  condition de cette assimilation. De plus, la connaissance suffisante des droits et devoirs conférés est aussi difficile à interpréter notamment en ce qui concerne les devoirs conférés par la nationalité française qui reste un concept flou. 

 

2 – La procédure de la naturalisation

 

C’est  une  procédure assez longue qui se subdivise en deux étapes, une locale et une nationale :

 

 —>  L’étape  locale :

 

Elle se déroule dans le département de la résidence du demandeur car il doit déposer son dossier en préfecture.  C‘est  alors  la  préfecture  de  son  domicile  qui  diligente  d’abord  la  procédure  et  notamment  en  lien avec la commune de la résidence, la vérification des conditions de recevabilité de la demande dont celles  d’âge,  résidence,  stage,  bonne  vie  et  mœurs.

Cette phase dure environ 6 mois et au terme de cette dernière, le préfet transmet le dossier au ministre chargé des naturalisations avec un avis favorable ou défavorable qui ne lie pas le ministre.  —>  L’étape  nationale : 

 

Le dossier est apprécie par le ministre chargé de la naturalisation et au terme de cette phase qui dure environ 1an, le ministre peut prendre 4 décisions différentes : 

 

 —>  rejeter la demande pour irrecevabilité lorsque  selon  lui  une  des  conditions  de  recevabilité  n’est  pas 

remplie.  Dans  ce  cas,  la  décision  doit  être  motivée  et  elle  peut  faire  l’objet  d’un  recours  devant  les  juridictions administratives 

 

 —>  rejeter la demande pour inopportunité car la décision de naturalisation est discrétionnaire : il constate  que  l’intéressé  remplit  les  conditions  de  recevabilité  de  la  demande  mais  il  estime  qu’il  n’est  pas  opportun  d’accorder  la  naturalisation.  

Depuis la loi de 1993, le rejet pour inopportunité doit être motivé, ce qui permettra dans des cas réduits  un  contentieux  lorsqu’il  apparait  qu’il  y  a  eu  erreur  manifeste  d’appréciation  ou  lorsqu’il  apparait   qu’il   y   a   un   détournement   de   pouvoir.   En   dehors   de   ces   cas,   il   n’y   a   pas   de   contrôle  contentieux.

 

 —>  ajournement de la demande : la demande n’est pas acceptée mais elle n’est pas non plus définitivement rejetée. Le dossier n’est pas nul. L’intéressé est invité à renouveler sa demande un peu plus tard lorsqu’il sera plus opportun de lui donner satisfaction. Cet ajournement a été une création de la pratique ministérielle et aujourd’hui, il est consacré par les textes.

 

 —>  Réponse favorable : c’est-à-dire décision de naturalisation. En réalité, la décision de naturalisation est d’assez loin la plus fréquente. Selon   l’article 21-25-1 du Code civil, la réponse à la demande de l’intéressé doit être donnée dans un délai de 18 mois maximum, délai pouvant être porté à 21 mois si nécessaire. 

 

C’est dans les 18 mois du dépôt de sa demande que l’intéressé est susceptible de bénéficier d’un décret de naturalisation sous la signature du Premier Ministre et avec le contreseing du ministre chargé des naturalisations. Ce décret est publié au Journal Officiel, généralement le JO ne publie pas séparément les décrets.

 

3 – Les effets de la naturalisation

 

S’agissant du demandeur lui-même, il devient français à la date de signature du décret. 

 

Depuis la loi 20 décembre 1983, il n’a plus à souffrir d’aucune incapacité temporaire ni pour la fonction publique, ni pour les fonctions politiques. Il a tous les droits et devoirs des français.

 

Cette naturalisation peut s’accompagner, si l’intéressé en a fait la demande et si la décision apparaît opportune, d’une francisation du nom et du prénom de l’intéressé.

 

La naturalisation de l’intéressé s’étend à ses enfants mineurs dès lors qu’ils sont cités dans le décret de naturalisation, qu’ils résident avec l’intéressé et qu’ils ne soient pas mariés. Par conséquence, il n’y a pas d’effets collectifs de la naturalisation ni pour les enfants majeurs, ni pour le conjoint du naturalisé.

 

B) L’acquisition de la nationalité française par déclaration à raison de la possession d’état

 

L’article  21-13 du Code civil autorise les personnes qui ont jouit de  façon  constante  de  la  possession  d’état  de français pendant au moins 10 ans à réclamer la nationalité française par déclaration. Puisque ces personnes  sont  autorisées  à  réclamer  la  nationalité  française,  c’est  que  par  hypothèse,  elles  n’ont  pas  cette   nationalité   alors   que   cela   fait   au   moins   10ans   qu’elles   sont   considérées comme de nationalité française.  Il  s’agit  donc  de  permettre  à  des  personnes  considérées  à  tord  comme  françaises,  en  quelque  sorte  de  régulariser  leur  situation,  en  devenant  françaises  sur  le  fondement  d’une  possession  d’état  ne  correspondant pas à leur véritable nationalité jusque là.

 

Cette analyse permet de mesurer le caractère particulier de cette situation car il faut que tout le monde se soit trompé sur la vraie nationalité de la personne pendant au moins 10ans. 

La  possession  d’état  suppose  que la personne ait le nom et la qualité correspondant à cet état comme avoir des documents le présentant comme français, puis cette personne doit être traitée par les autorité publique comme un français et elle  doit  être  considérée  comme  telle  par  l’ensemble des personnes qui la connaissent.

 

 —>  Faut-il de surcroit que cette personne soit de bonne foi c’est-à-dire qu’elle   ait   elle-même ignoré en toute  bonne  foi  qu’elle  n’était  pas  française  ? 

 

C’est  une  question  difficile : une personne qui serait purement et simplement de mauvaise foi ne pourrait pas  invoquer  la  possession  d’état  de  français.  Mais  on  ne  peut  pas,  à  l’inverse,  exiger  que  l’intéressé  n’est  jamais  eu  aucun  doute  sur  sa  nationalité  française  et  d’ailleurs,  il  faut  qu’à  un  moment  ou  un  autre,  un  doute apparaisse pour  que  l’on  se  rende  compte  de  l’erreur  commune.  Si  ces  conditions  sont  réunies  et  à  partir   du   moment      l’erreur   commune   est   révélée,   la   personne   concernée   peut,   si   elle   le   veut,  régulariser sa situation par une simple déclaration devant  le  tribunal  d’instance,  déclaration  qui  lui  vaudra  l’acquisition  de  la  nationalité  française.  Normalement,  cette  acquisition  n’est  pas  rétroactive  mais  l’article  21-13 précise   qu’il   y   a   une   sorte   de   rétroactivité partielle car les actes antérieurs de la personne qui supposaient la qualité de français sont validés.

 

Ce cas de l’article   21-13 du Code civil est   significatif   d’un   trait   fondamental   du   droit   de   la   nationalité  française. Les problèmes juridiquement les plus intéressants concernent assez souvent des cas marginaux tandis que les cas plus fréquents posent moins de problème juridique.

 

Paragraphe 2 :

La  combinaison  d’un  lien  avec  la  France  et  de  l’absence  de  volonté  de  ne  pas devenir français

 

 —>  Il  s’agit  d’enfants  qui  sont  nés  en  France  de  parents  étrangers étant entendu que par hypothèse, aucun  des  deux  parents  n’est  lui-même né en France. 

 

 —>  Il   faut   supposer   aussi   que   les   parents   ne   sont   pas   apatrides   et   qu’ils   peuvent   transmettre   leur  nationalité  étrangère  à  l’enfant. 

 

A sa majorité, cet enfant deviendra  automatiquement  français  s’il  a  résidé  en  France   au  moins  5ans  pendant sa minorité :  c’est  la  combinaison  de  la  naissance  et  de  la  résidence  en  France  qui  permet  de  constituer  un  lien  suffisant  avec  la  France  pour  que  l’enfant  devienne  français  automatiquement à 18ans. 

 

Or, cette  automaticité  n’est  pas  imposée  à  l’enfant  car  dans  les  6  mois  qui  précède  sa  majorité  ou  dans  l’année  qui  la  suit,  l’enfant  peut  renoncer  à  l’acquisition  de  la  nationalité  française.  L’enfant  ne  doit  pas  renoncer à cette acquisition c’est-à-dire qu’il  devient  français  que  s’il  n’a  pas  eu  la  volonté  de  ne  pas  le  devenir.

 

Cette question a subi une évolution historique très mouvementée : elle concerne des catégories particulières mais nombreuses de la population et elle obéit à un régime juridique spécifique.

 

 

 

A) L’évolution  historique

 

La  règle  de  l’acquisition  automatique  de  la  nationalité  française  par  la  combinaison  de  la  naissance  et  de  la  résidence  en  France  n’est  pas  une  règle  nouvelle.  Cette  règle  remonte  à  une  loi du 26 juin 1889 c’est-àdire dans les débuts de la IIIe République après la guerre de 1870 – 1871 et dans une période où les relations   avec   l’empire   allemand   restent   très   conflictuelles   (incident   de   frontières   graves).   Cette   loi  poursuit alors des objectifs militaires.

A   l’époque,   la   situation   démographique   de   la   France   est   mauvaise,   et   il   s’agit alors de conférer la nationalité française au plus grand nombre possible de jeunes vivants en France notamment pour augmenter le nombre des jeunes appelés sous les drapeaux.

 

Cette   politique  est   gênée   par   la   règle  de   l’époque   selon   laquelle   la   française   qui   épouse   un   étranger  devient étrangère et ses enfants aussi. On répond à cette situation par la règle de la double naissance en France en 1851. Mais il reste le cas des jeunes nés en France de parents étrangers mais qui vivent en France pendant leur minorité alors le législateur de 1889 trouve la solution de l’acquisition  automatique  de la nationalité française à la majorité par la combinaison de la naissance et de la résidence en France. L’objectif  est  alors  militaire avant  d’être  un  objectif  d’intégration  ou  d’assimilation.  

 

Or,  avec  le  temps,  la  règle  a  changé  de  signification  car  aujourd’hui,  les  objectifs  militaires  de  1889  n’ont  plus aucun sens mais la règle a un sens civil et qui est de permettre l’intégration   totale   dans   la  communauté nationale de jeunes issus de parents immigrés,  ce  qui  laisse  penser  qu’ils  sont  français  de  fait. Cette règle a complètement changé de sens et ses racines ont aussi changé de nature,  d’où  le  fat  que cette règle a   fait   l’objet   de   débats   au   cours   des   dernières   décennies   qui   paraissent   aujourd’hui  apaisés même leur virulence vers 1980 – 1990. 

 

Cette  règle  s’est  vue  reprocher  deux  points :

 

 —>  reproche de ne pas respecter la volonté des jeunes   concernés   en   leur   imposant   l’acquisition  automatique de la nationalité française. Or, il existe une faculté de renonciation  d’où  une  critique  peu avouable.

 

 —>  reproche  selon  lequel  il  vaudrait  mieux  que  l’acquisition  de  la  nationalité  française  dépende  non pas d’un  acte  négatif  c’est-à-dire le  fait  de  ne  pas  renoncer  mais  d’un  acte  positif   c’est-à-dire le fait de déclarer vouloir devenir français.   C’est   ici   la   mise   en   avant   de   la   conception   dite   élective   de   la  nationalité française selon laquelle fondamentalement,  la  nationalité  française  devrait  résulter  d’un  choix  de  la  personne  et  d’un  choix positif.

 

Dans ce débat, la conception élective a un sens que pour ceux qui ne sont pas français de naissance car pour ceux français de naissance, il est théorique de  prétendre  qu’ils  sont  français  par  choix.  Elle  concerne  alors  l’acquisition  de  la  nationalité  et  non  l’attribution  de  la  nationalité.  Par  conséquent,  elle  finit  par  être  un peu gênante car elle tend à distinguer en réalité entre les français de naissance et ceux qui sont devenus  français  en  cours  d’existence.  

 

Au-delà du souhait qui est lui-même légitime, que le jeune exprime une volonté particulière, peut se profiler  le  souhait  qu’il  n’y  ait  pas  trop  d’acquisition  de  ce  type  et  que  l’accès  à  notre  nationalité reste limité.

 

Le législateur a pris conscience de ce débat et en 1988, une commission des sages réunie par M. Chirac avait  conclu  qu’en  effet,  il  vaudrait  mieux  abandonner  l’automaticité  de  l’acquisition  à  la  majorité  pour  une acquisition par déclaration mais à condition que cette acquisition par déclaration soit la plus facile et la  plus  souple  possible.  C’était  une  solution  de  compromis  intéressante  mise  en  œuvre  par  la   loi du 22 juillet 1993 et qui a donné des résultats significatifs car entre 1993 et 1998, le nombre de déclarations volontaires a été élevé. 

Or la loi du 16 mars 1998 est  revenue  à  l’automaticité  de l’acquisition  sans  toutefois  reprendre  purement  et  simplement  l’état  de  la  législation  antérieure  à  1993.  La  loi  de  1998  n’a  pas  totalement effacé la loi de 1993  même  si  l’acquisition  est  à  nouveau  automatique.  Depuis  1998,  l’état  du  droit  est  resté  stable,  peut  être parce que la loi de 1998 a su garder certains aspects de la loi de 1993. 

 

B) Les catégories concernées par ce dispositif

 

Il  s’agit  d’enfants  nés  en  France  de  parents  étrangers  qui  ne  sont  pas  nés  en  France. Par hypothèse, ces enfants  se  voient  transmettre  la  nationalité  étrangère  d’au  moins  un  de  deux  parents  et  aucun  des  deux  parents  n’est  devenu  français  en  cours  de  minorité  de  l’enfant  car  si  cela  avait  été  le  cas,  l’enfant  serait  lui-même  devenu  français  par  effet  collectif  de  l’acquisition  de  la  nationalité  française  notamment  par  naturalisation. 

 

Il  s’agit  d’enfants,  du  point  de  vu  de  l’intégration  dans  la  communauté  française, sont dans une situation complexe  car  concernant  l’enfant,  son lien avec la France est évident (naissance, résidence pendant au moins  5ans)  tandis  que  s’agissant  de  sa  famille  le lien avec la France est plus flou car si ces parents sont installés en  France,  ils  ne  sont  pas  nés  en  France  et  ils  n’ont  pas  demandé  la  nationalité  française.  Le  degré  d’intégration  est  plus  élevé  du  coté  de  l’enfant  que  du  coté  des  ses  parents.

 

C’est  aussi  l’une  des  raisons  de  la  réforme  de  1993  qui  demandait  à  l’enfant un acte positif de volonté car le  lien  avec  la  France  concerne  surtout  l’enfant.

 

C)  Le régime juridique actuel

 

Il y a une règle de principe et une règle corrective.

 

1 – La règle de principe

 

C’est  une  règle  à  double  détente  car  elle  prévoit  aussi  bien  l’acquisition automatique de notre nationalité à  la  majorité  de  l’enfant, qu’une  possibilité  d’acquisition  anticipée  par  déclaration  ou  par  réclamation.  On  peut  se  demander  si  aujourd’hui  cette  faculté  d’acquisition  anticipée  qui  peut  paraitre  marginale  n’est pas le vrai centre de gravité de la règle.

 

a) L’acquisition  automatique  à  la  majorité :  

 

Article 21-17 alinéa 1 du Code civil. Selon  cet  article,  l’enfant    en  France  et  qui  réside  encore  au  jour  de  sa majorité, acquiert automatiquement la nationalité française  à  ce  jour  de  sa  majorité  s’il  a  résidé  sur  notre sol au  moins  5ans  depuis  l’âge  de  11ans. 

 

Ainsi,  jusqu’à  11ans,  la  résidence  de  l’enfant  n’a  pas  d’importance  pour  le  dispositif  d’acquisition  mais  dès  11ans, cette résidence devient importante et il   faut   que   dans   la   période   de   7ans,   l’enfant   ait   eu   sa  résidence habituelle en France pendant 5ans.

 

Ce dispositif peut surprendre puisqu’il  semble  ne  donner  aucune  importance  à  la  période de  l’enfance  alors   que   c’est   la période capitale pour la formation de la personnalité et il semble concentrer l’importance  de  la  réflexion  sur  l’intégration,  à  la  période  de  l’adolescence  et  de  la  pré-majorité.

 

Ce  qu’il  faut  comprendre  en  réalité  c’est  que  le  législateur  part  de  l’hypothèse  que  la  très  grande  majorité  des enfants nés en France et ayant résidé en France pendant au moins 5ans en fin de minorité auront passé toute leur minorité en France. 

 

Cela  est  si  vrai  que  le  législateur  n’omet  pas  de  traiter  la  question  des  enfants  qui  atteindrait  ces  5ans  de  résidence en France avant les 18ans.

L’acquisition  anticipée  par  déclaration  ou  par  réclamation :  on  parle  d’acquisition  par  déclaration  quand  c’est  l’enfant  qui  déclare  vouloir  devenir  français  et  on  parle  d’acquisition  par  réclamation  lorsque  ce  sont  les parents qui  réclament  la  nationalité  française  pour  l’enfant.

 

b)     l’acquisition  anticipée  par  déclaration : 

 

C’est une demande   de   l’enfant   avant   18ans. Selon l’article   21-11 al1 du Code civil, il est possible à un mineur  d’âgé  au  moins  16ans  de  déclarer  vouloir  devenir  français  sans  attendre  l’âge  de  sa  majorité  dès  lors  qu’il  remplit  les  conditions  de  5ans  minimum  de  résidence  en  France  depuis  l’âge  de  11ans.

 

Exemple :  à  16ans,  il  peut  remplir  une  déclaration  et  il  devient  alors  français  et  s‘il  ne  le  fait  pas  alors il deviendra français à 18ans.

 

c)      l’acquisition  par  réclamation : 

 

L’enfant  à  moins  de  16ans  mais  il  réside  en  France  depuis  au  moins  5ans  avec  ses  parents  et  il  est    en  France. Les parents vont pouvoir par déclaration réclamer la nationalité française pour leur enfant. Sur ce point c’est-à-dire l’enfant  de  moins  de  16ans,  que  la  loi  de  1998  n’est  pas  revenu  à  l’état  exact  du  droit  antérieur à 1993. 

 

Avant 1993, les parents pouvaient effectuer cette réclamation quel que   soit   l’âge   de   l’enfant et ils pouvaient aussi effectuer cette réclamation dès  la  naissance  de  l’enfant  en  France  si  eux-mêmes avaient au jour de la naissance au moins 5ans de résidence en France.  La  réclamation  des  parents  n’était  pas  liée  à  aucune  condition  d’âge  minimum  de  l‘enfant  et   la condition de résidence pouvait être réuni par les parents  à  la  place  de  l’enfant.  

 

La loi de 1998 est plus restrictive car la réclamation des parents peut être faite que si  l’enfant  a  au  moins  13ans et si lui-même réside en France depuis au moins 5ans à partir de 8ème anniversaire.  Dans  l’état  actuel  du  droit,  jusqu’à  de  13ans  les  parents  ne  peuvent  pas  faire  de  réclamation  mais  ils  peuvent  faire  quelque chose c’est-à-dire demander   par   naturalisation   la   nationalité   française   pour   eux   et   s’ils  l’obtiennent  alors  l’enfant  deviendra  français  par  effet  collectif.

 

Où est la vraie réforme de 1993 ?  On  s’est  centré  sur  acquisition  automatique  ou  pas  à  la  majorité  mais  le  problème n’est-il pas avant la majorité ? La loi de 1998 a imposé un âge limite de 13ans mais cet âge est-il justifié ou pas ?  Ce  point  est  très  discuté  et  il  ne  faut  pas  négliger  la  difficulté  qu’il  peut  susciter  car  des  enfants  qui  résident  en  France  restent  étrangers  au  moins  jusqu’à  13ans  même  s’ils  sont  scolarisés.  Pour  que   l’enfant   devienne français avant 13ans, les parents doivent demander la nationalité française. L’acquisition  anticipée  doit-elle avoir ou pas un âge minimum ?

 

2 – La règle corrective

 

Dans  l’hypothèse    l’enfant  arrive  à  la  majorité  sans  être  encore  français,  l’article 21-8 du Code civil lui  permet de renoncer  à  l’acquisition  automatique  de  la  nationalité  française  à  18ans  dans  les  6  mois  qui  précède  sa  majorité  et  dans  l’année  qui  la  suit.

La  renonciation  dans  l’année  qui  suit  est  absurde  car  s’il  y  a  acquisition  automatique à la majorité et si on souhaite permettre la renonciation, il parait logique que la renonciation ait lieu avant les 18ans. Le

législateur règle le problème en   énonçant   que   si   l‘enfant   renonce   à   l’acquisition   automatique   dans  l’année  qui  suit  la  majorité,  il  sera  réputé  n’avoir  jamais  été  français.  

 

Cette faculté de renonciation exprimé devant le Tribunal  d’instance ou  l’autorité  consulaire n’a  pas  à  être   motivée   mais   il   faut   que   l’enfant   ait   une   autre   nationalité   c’est-à-dire il   doit   prouver   qu’il   a la nationalité  d’un  autre  état  étranger  et  il  faut  aussi  qu’il  n’est  pas  déjà  souscrit  un  engagement  dans  les  rangs  de  l’armée  française,  sinon  il  sera  réputé  français  dès  son  engagement.

Sous-Section 2 :  L’Acquisition  de  la  Nationalité  Française  en  Raison  d’un  Lien  avec un Français

 

Sur ce terrain, il y a deux cas de portée très différente :  l’un  qui  est  l’acquisition  par  déclaration  à  la  suite  de  l’adoption simple par un français   l’autre  qui  est  l’acquisition  par  déclaration  à  la  suite  du  mariage avec un français.

 

Dans cette sous-section,  l’acquisition  se fait par déclaration alors que dans la naturalisation, elle se fait par  décret.  Du  point  de  vu  du  demandeur,  l’acquisition  par  déclaration  se  fait  plus  facilement  que  par  décret car dans ce dernier cas,  c’est  le  gouvernement  qui  décide  et  il  décide  ce  qu’il  veut.  Normalement  le lien avec un  français en particulier semble être considéré par le législateur comme plus intense que le lien avec la France en général car dans le lien avec la France,  il faut un décret alors que dans le lien avec un  français,  il  suffit  d’une  déclaration.

 

Paragraphe 1 :

L’acquisition   par   déclaration   à   la   suite   de   l’adoption   simple   par   un  français

 

L’adoption  simple  à  des  effets  moins  important  que  l’adoption  plénière  et  est  devenue très marginale, elle est usée plutôt à des fins successorales.  L’adoption  simple  a  alors  des  effets  moins  importants  en  matière de nationalité française. 

 

Alors  que  l’adoption  plénière  est  un  cas  d’attribution  de  la  nationalité  française  dès  la  naissance  (c’est  automatique),  l’adoption  simple  est  un  cas  d’acquisition  de  notre  nationalité  en  cours  d’existence. Exemple : si un français adopte par adoption simple un étranger, il peut devenir français par déclaration et non devenir français dès la naissance.

 

L’article  21-12 du Code civil rend  ce  cas  plus  limité  car  il  déclare  que  l‘enfant adopté simple par un français pourra  faire  une  déclaration  d’acquisition  de  la  nationalité  française  mais  seulement  jusqu’a  sa  majorité. C’est  une  règle  restrictive  car la plupart des cas concernent des majeurs.

 

Cet article du Code civil assimile  à  l’enfant  adoptif  deux  catégories  d’enfants  dont  on  peut  penser  qu’elles  donneront  plus  de  cas  de  déclaration  par  acquisition  que  l’adoption  simple :

 —>  est  assimilé  à  l’enfant  adoptif,    l‘enfant  recueilli  en  France  depuis  au  moins  5ans  et  élevé  par  une 

personne de nationalité française   —>  ou  l’enfant  confié  depuis  au  moins  3ans  au  service  de  l’aide  sociale  à  l’enfance    —>  ou  l’enfant  recueilli  en  France  et  élevé  dans  des  conditions  lui ayant permis de recevoir pendant 5années au moins une formation française. 

 

Ces enfants ne sont pas adoptés par un français mais ils sont recueillis en France et qui sont élevés dans des conditions françaises. Ce sont alors des situations de fait qui risquent  d’être  plus nombreuses que l’adoption  simple.

 

Dans la 3ème assimilation,  il  y  a  une  référence  implicite  à  la  scolarisation  en  France  qui  montre  l’influence  de plus de la scolarisation sur la nationalité française.

 

L’acquisition  prend  effet  à  la  date  de  la  déclaration  et  elle  peut  avoir  un  effet  collectif  si  l’adopté  a  lui-même un ou plusieurs enfants mineurs.

 

 

 

Paragraphe 2 :

L’acquisition par déclaration à la suite du mariage avec un conjoint français

 

Le Code de Napoléon avait tranché la question de façon radicale : la française qui épousait un étranger perdait   la   nationalité   française   et   l’étrangère   qui   épousait   un   français,   devenait   automatiquement  française.

 

C’est  une  question  qui  a  beaucoup  évolué  mais  qui,  entre  1804  et  aujourd’hui,  a  changé de sens. De 1804 jusqu’à  1973, c’est  l’aspect  perte  de  la   nationalité  française  par  la  française  épousant  un  étranger  qui  retient   l’attention.   L’acquisition   automatique   de   la   nationalité   française   par   l’étrangère   épousant   un  français ne pose aucun problème, du moins pour le législateur. En revanche, la perte de la nationalité a posé certains problèmes car  c’était  contraire  aux  intérêts  français.

 

Aujourd’hui,  on  peut  considérer  que  la  perte  de  notre  nationalité  à  la  suite  du  mariage  avec  un  étranger  ou une étrangère ne fait plus de problème car  il  n’y  a  plus aucune influence automatique du mariage sur la nationalité française et parce que le français ou la française qui épouse un étranger et veut perdre la nationalité française doit faire une déclaration en ce sens.

 

Depuis 1973, le versant de la question fait problème c’est   l’acquisition   de   notre   nationalité   par   le  conjoint  étranger  d’un  français  ou  d’une  française. 

 

Jusqu’en  1973,  dans  un  souci  d’égalité, la loi de 9 janvier 1973 a fait du mariage avec un français un cas d’acquisition   de   notre   nationalité   par   déclaration   par   l’intéressé   et   elle   a   ouvert   cette   possibilité   de  déclaration  à  la  femme  étrangère  d’un  mari  français  mais  aussi  désormais,  au  mari  étranger  d’une  femme  française.

 

Or, la situation se dégrade assez vite :  on  découvre  en  effet  que  ce  mode  d’acquisition  par  déclaration  permet des fraudes par la célébration de mariage fictif permettant au prétendu conjoint étranger de devenir français par simple déclaration dès la jour du mariage, quitte à se séparer dès la fin de la cérémonie.  Cette  situation  serait  fréquente  et  serait  entourée  d’annonces  par  journaux.

 

Il  y  a  deux  interopérations  possibles  de  cette  crise  de  ce  cas  d’acquisition :      —>  il  y  a  une  fraude  par  mariage  fictif  qui  n’est  pas  contestable mais  dont  il  s’agit  de  savoir  quelle est son importance avérée.

 —>  on  peut  se  demander  si  cette  inquiétude  sur  la  fraude  par  mariage  fictif  n’est  pas  davantage  lié  par  le  fait que le législateur de 1973 a ouvert la possibilité de déclaration aussi bien  au  mari  étranger  qu’à  la  femme  étrangère  parce  qu’avant  1973,  personne  ne  se  demandait  si  certains  mariages  entre  un  mari  français et une femme étrangère était ou non réel. Dès 1973, on se pose rapidement et systématiquement cette question comme si la fraude de la part du conjoint étranger pouvait venir plus facilement du mari que de la femme : la possibilité que le mariage avec une femme française donne la nationalité française est plus suspecte qu’un  mariage  avec  un  homme  français  permettant  de devenir  française.  Au  final,  n’y-a-t-il  pas  une  résistance  inconsciente  à  l’égalité  des  conjoints ? 

 

Mais depuis 1984, le  législateur  n’a  cessé  de  rendre  cette  déclaration  de  plus  en  plus  difficile  ce  qui  est  contradictoire  avec  l’idée  d’acquisition  par  déclaration et  aujourd’hui  on  est  arrivé  à  un  état  du  droit  tel  que   l’on   peut   se   demander   si   l’acquisition   par   déclaration   a   encore   un   intérêt   et   si   la   stratégie   du