droit et contentieux de l'UE

Contentieux de l’Union Européenne

Cours de contentieux de l’Union Européenne

Le cours relatif aux contentieux de l’Union européenne s’appuie sur le postulat que l’Union est construite sur les fondements de la légalité, ce qui implique une garantie de l’application du droit de l’Union et des mesures contre ses infractions par un organe neutre.

Le dispositif de surveillance juridique de l’application du droit de l’Union est caractérisé par une répartition des pouvoirs : les tribunaux des États membres ont une compétence générale pour juger des cas faisant intervenir le droit de l’Union, alors que la juridiction de l’Union elle-même a un champ d’intervention limité, réservé à certaines catégories de litiges spécifiques. La particularité du droit de l’Union se manifeste dans son système juridique distinct de celui du droit international traditionnel, notamment en raison de son caractère obligatoire et de sa juridiction exclusive.

Les sujets traités dans ce cours incluent :

  • Le cadre institutionnel de l’Union Européenne
  • La Politique étrangère et de sécurité commune de l’UE
  • La coopération policière et judiciaire en matière pénale au sein de l’UE
  • L’harmonisation des institutions et des actes législatifs européens
  • Les procédures contentieuses et les domaines de droit concernés
  • Les principes et la mise en œuvre du droit de l’Union et du droit européen
  • Des développements récents, incluant les discussions sur une constitution européenne et les efforts pour redynamiser ces débats

Toutefois, le cours ne couvre pas le droit substantiel de l’Union, tel que le droit de la concurrence ou la politique agricole commune.

Chapitre introductif : L’Europe et constitutionnalisation – distinction de l’UE entre ce droit et le droit international de manière générale

L’Union Européenne s’est matérialisée en 1993 à la suite du Traité de Maastricht, se distinguant par le fait qu’elle ne prend pas la relève d’une organisation internationale préexistante. En effet, en 1993, l’UE n’est pas conceptualisée comme une organisation internationale classique.

Évolution de la Personnalité Juridique de l’UE:

  • Jacques Delors a qualifié l’UE d' »Objet Juridique Non Identifié » car initialement, elle n’avait pas de personnalité juridique propre. Cette absence était délibérée car, lors de la signature du traité en 1992, l’efficacité future de l’UE n’était pas assurée.
  • La décision de ne pas doter l’UE de personnalité juridique visait à préserver l’acquis de la construction européenne sans perturber les fondations existantes.

Harmonisation des Structures Communautaires:

  • L’UE visait à harmoniser les structures des trois communautés européennes existantes (EURATOM, etc.) en s’appuyant sur trois piliers :
    • Le pilier communautaire, qui englobe les aspects économiques et sociaux (premier pilier).
    • La Politique Étrangère et de Sécurité Commune (PESC) pour la diplomatie et la défense (deuxième pilier).
    • La coopération en matière de justice et d’affaires intérieures (troisième pilier), mise en place en 1992 pour traiter les questions de sécurité intérieure.

Différenciation des Traités:

  • Le traité sur l’Union Européenne se compose de seulement 53 articles, reflétant directement les négociations de Maastricht. Plusieurs titres y sont consacrés, notamment à la consolidation des trois communautés via des articles spécifiques.

Principes Juridiques et Souveraineté des États:

  • Les communautés initiales étaient conçues comme des ordres juridiques autonomes, permettant l’adoption de normes sans nécessiter l’approbation unanime des États membres.
  • Contrairement à l’ONU, l’UE possédait un « législateur communautaire », capable d’adopter des législations indépendamment.
  • En 1992, la PESC et la coopération judiciaire et interne ont été introduites, abordant la délicate question de la souveraineté étatique.

Nature du Droit de l’UE:

  • L’Union Européenne a créé un droit hétérogène :
    • Le droit communautaire au sens strict est un droit d’intégration.
    • Le droit de coopération suit les principes du droit international classique.
    • Entre les deux se situe le droit intergouvernemental qui nécessite l’unanimité pour l’adoption d’actes unilatéraux.

Caractéristiques du Droit International Général:

  • Basé sur la volonté des États, le droit international général nécessite la signature et la ratification des conventions par les États membres pour être applicable.

Modèle d’Intégration Européen:

  • L’objectif des communautés européennes n’était pas seulement la coopération interétatique, mais aussi la création d’un droit supranational qui pourrait compléter ou remplacer le droit national.

Influence des Institutions Européennes:

  • Les institutions européennes jouent un rôle crucial dans l’adoption et la mise en œuvre des politiques, affectant ainsi la coopération entre les États.

Permanence et Simplification:

  • La situation actuelle maintient la structure tripartite de l’UE.
  • Les tentatives de fusionner les piliers et d’harmoniser les types de politiques ont été envisagées pour simplifier le fonctionnement de l’UE.

Dynamiques d’Approfondissement et d’Élargissement:

  • L’UE continue d’évoluer avec une volonté d’approfondir ses structures et compétences, et un mouvement géographique d’élargissement.

En somme, l’Union Européenne a su se forger une place particulière sur la scène internationale, évoluant d’une entité sans personnalité juridique

Section 1 : Approfondissement

Évolution organique et matériel de l’Europe

I. le contexte européen pré-communautaire

Le Paysage Européen Avant l’Intégration Communautaire

Dans les années 1950, suite aux séquelles de la Seconde Guerre mondiale, se manifestait un désir fort de mettre en place des systèmes de coopération régionale en Europe dans les domaines économique, politique et militaire, pour prévenir la récurrence de conflits d’une ampleur similaire.

  • Fondements de la coopération militaire européenne :

    • Le Traité de Bruxelles de 1948 instaurait un mécanisme de défense collective, prévoyant une assistance militaire mutuelle en cas d’agression contre l’un de ses membres – la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la France, l’Italie et le Royaume-Uni.
    • Cette entente a abouti à la création de l’Union de l’Europe Occidentale, qui continue d’exister de manière autonome à côté de l’UE et sert de composante militaire à celle-ci.
  • L’OTAN et son lien avec l’Europe :

    • Fondée par le Traité de Washington le 4 avril 1949, l’OTAN est une entité à la fois militaire et politique, conçue non pas pour l’intégration régionale, mais comme une alliance transrégionale incluant l’Europe, les États-Unis et le Canada.
    • L’existence de l’OTAN demeure essentielle et est intrinsèquement liée à l’UE, toute politique commune européenne devant tenir compte de cette alliance.

Coopération Économique et Politique Avant l’UE

  • Des initiatives de coopération économique :

    • L’Organisation européenne de coopération économique (OECE), créée le 16 avril 1948, avait pour mission de gérer l’aide américaine apportée par le Plan Marshall.
    • Une fois cet objectif atteint, l’OECE a évolué en Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), perdant son exclusivité européenne pour devenir une organisation internationale.
  • Ambitions politiques et développement :

    • La période était aussi marquée par des efforts de développement politique à travers l’économie, avec l’objectif d’assister les États à atteindre une stabilité politique via le progrès économique.
  • Le Conseil de l’Europe et la protection des droits de l’homme :

    • Le Conseil de l’Europe, établi le 5 mai 1949, avait pour but explicite de rassembler en une organisation de coopération les États démocratiques et pluralistes, en mettant l’accent sur la promotion et la protection des droits humains.
    • Il est devenu une plateforme essentielle pour coordonner les politiques européennes, notamment en matière de droits de l’homme, comme le montre la Convention européenne des droits de l’homme.

La Scène Politique Divisée Durant la Guerre Froide

  • Coopération à l’Ouest et à l’Est :

    • Pendant que l’Europe de l’Ouest développait ces structures de coopération, l’Est ne restait pas inactif, avec la formation du Conseil d’Assistance Économique Mutuelle (CAEM) en 1949 et le Pacte de Varsovie en mai 1955, cherchant à établir une coopération entre les États satellites de l’URSS durant la Guerre froide.
  • Dimension Transatlantique :

    • La coopération entre l’Europe et l’Amérique du Nord via l’OTAN ajoutait une dimension transatlantique importante à la sécurité et à la politique européenne pendant cette période de tension internationale.

Ces initiatives et traités posaient les fondations d’une Europe interconnectée, où la coopération régionale se développait parallèlement à des aspirations plus larges pour la paix et la stabilité mondiale.

II. la naissance et le développement des communauté européenne (1951-1992)

A. la formation des communauté

L’émergence de la coopération européenne dans les années 1950

  • Dans les années 1950, l’Europe était marquée par la collaboration entre six nations (le Benelux, la France, l’Allemagne, et l’Italie) avec pour objectif la construction d’une paix durable.
  • Cette période a vu l’idée émerger qu’une intégration européenne pouvait empêcher toute nouvelle confrontation militaire entre la France et l’Allemagne.

L’impulsion de la France et le « Discours de l’Horloge »

  • Le 9 mai 1950, le ministre français des Affaires étrangères, Robert Schuman, prononce un discours historique connu sous le nom de « Discours de l’Horloge », sous l’influence de Jean Monnet.
  • Schuman y déclare que le contrôle commun du charbon et de l’acier, piliers industriels essentiels et ressources clés pour la guerre, pourrait être la fondation d’une communauté pacifiée et intégrée.

La naissance de la CECA et les traités suivants

  • Le 18 avril 1951, le premier traité communautaire est signé à Paris, établissant la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) entre les six États, qui entre en vigueur le 25 juillet 1952.
  • Cette communauté, destinée à exister pour une période limitée de 50 ans, a atteint sa conclusion prévue en 2002.

Les tentatives de consolidation et l’évolution institutionnelle

  • Deux projets de traité ont été élaborés : la Communauté européenne de défense (CED) et la Communauté politique européenne (CPE). Cependant, le projet de CED a échoué avec le refus de la ratification par l’Assemblée nationale française en 1954.

Le renouveau avec les Traités de Rome

  • La Conférence de Messine en 1955 et le Rapport Spaak qui a suivi ont lancé la création de deux nouvelles communautés : l’Euratom et la CEE.
  • Les Traités de Rome sont signés le 25 mars 1957, marquant un pas supplémentaire vers l’intégration économique et politique.

La question de la souveraineté et le Compromis de Luxembourg

  • L’affirmation de la souveraineté nationale, notamment par la France sous la direction du général de Gaulle, a conduit à la politique de la chaise vide en 1965 et, en conséquence, au Compromis de Luxembourg en janvier 1966.
  • Ce compromis a mis l’accent sur la prise de décision à l’unanimité pour certaines questions clés, ralentissant le processus d’intégration européenne.

La consolidation institutionnelle

  • La fusion des exécutifs en 1967 a été un moment décisif dans la création d’un cadre institutionnel commun pour les communautés européennes.

Les ressources propres des communautés européennes

  • En 1970, une décision sur les ressources propres de la communauté a été prise, permettant aux communautés européennes de fonctionner indépendamment des contributions des États membres, grâce à une partie des impôts nationaux versés directement aux organisations européennes.

Voilà comment les communautés européennes ont été façonnées par des initiatives visionnaires et des compromis politiques. La création de la CECA a jeté les bases d’une collaboration économique qui s’est développée en une intégration politique et institutionnelle plus profonde. Malgré les tensions et les crises, l’engagement envers l’intégration européenne a persisté, établissant les fondations des structures européennes contemporaines.

B. l’émergence de la coopération politique européenne

À l’aube des années 1970, les structures institutionnelles de la Communauté Européenne étaient établies, bénéficiant d’un cadre institutionnel harmonisé et d’une autonomie budgétaire. À cette époque, l’objectif était de renforcer la solidarité politique entre les États membres.

  • Renforcement tacite de la coopération interétatique :

    • Il y a eu un renforcement informel des liens de coopération, dépassant le cadre formel des Traités existants, dont certains aspects seront ultérieurement entérinés.
  • Deux avancées majeures :

    • D’abord, sur l’initiative de dirigeants nationaux, dont Valéry Giscard d’Estaing, s’établit le Conseil Européen. Cette instance, qui se réunit régulièrement (au minimum bi-annuellement), est conçue pour donner une direction politique aux Communautés européennes, sans statut juridique ni pouvoir décisionnel formel, une situation qui restera inchangée jusqu’à son inclusion formelle dans l’Acte Unique Européen de 1986 et l’article 4 du Traité sur l’Union Européenne.

    • La seconde avancée a été de transformer l’Assemblée Européenne en une véritable chambre parlementaire, avec l’élection des députés européens au suffrage universel direct. Cet acte fut adopté le 20 septembre 1976 et appliqué pour la première fois aux élections de 1979.

    • En 1978, le système monétaire européen (SME) a vu le jour, mis en œuvre en mars 1979, il reposait sur l’adoption de taux de change fixes au sein de l’Europe, posant les fondements d’une union monétaire.

Ces développements se sont déroulés sans altérer les Traités fondateurs.

Dans les années 1980, un rapport a introduit le concept d’Union européenne, mais en l’absence d’une définition concrète à cette époque, l’Acte Unique Européen a servi de mesure intermédiaire.

C. l’acte unique européen

L’Acte Unique Européen représente une étape significative dans l’évolution du droit communautaire, marquant la première révision complète des traités originels de l’Europe communautaire. Signé en février 1986, d’abord par neuf États membres le 14 février et ensuite par trois autres le 27 février, il est entré en vigueur en 1987.

Les objectifs principaux de l’Acte étaient multiples :

  • Il visait à actualiser les Traités fondateurs des années 1950 pour les rendre pertinents face aux réalités contemporaines.
  • Il ambitionnait d’entériner les progrès politiques qui s’étaient développés de manière informelle pendant les années 1970, intégrant ainsi dans le droit formel des avancées jusqu’alors informelles.

Sur le plan institutionnel, l’Acte Unique Européen a introduit des changements significatifs :

  • Il a formellement reconnu l’existence du Conseil européen.
  • Il a limité l’application de la règle de l’unanimité, favorisant les décisions à la majorité qualifiée pour accélérer le processus de prise de décision.
  • Il a renforcé les prérogatives du Parlement européen, notamment par l’introduction du processus de coopération, qui permet au Parlement de jouer un rôle plus substantiel dans l’adoption de la législation, incluant le pouvoir de rejeter certains actes.
  • Il a élargi les compétences de la Commission, en lui conférant un rôle plus affirmé dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques communautaires.
  • Il a permis la création d’un Tribunal de première instance, via une décision de 1988 effective en 1989, qui traitait initialement le contentieux de la fonction publique et dont les compétences se sont progressivement étendues.

Dans le domaine matériel, l’Acte Unique Européen a établi des objectifs clairs :

  • Il a fixé une date limite, le 31 décembre 1992, pour l’achèvement du marché intérieur, visant à abolir les obstacles à la libre circulation des marchandises, des personnes, des capitaux et des services.
  • Il a élargi les compétences communautaires dans des domaines tels que l’environnement, la recherche et l’éducation.
  • Il a introduit un titre spécial consacré à la coopération politique européenne, officialisant des pratiques déjà en cours pour coordonner les États membres dans des domaines dépassant les compétences prévues initialement.

En somme, l’Acte Unique Européen a posé les fondations pour une intégration européenne plus poussée, ouvrant la voie à des développements futurs dans la structure institutionnelle et le champ d’action de la Communauté Européenne.

III. l’Union Européenne

A. la naissance du traité sur l’Union Européenne, Maastricht 1992

Le Traité de Maastricht, signé le 7 février 1992, marque une évolution significative de l’intégration européenne, introduisant des dimensions supplémentaires au-delà de l’économique. Ce traité est le fruit d’une décennie de délibérations et symbolise l’ambition d’accroître l’union entre les peuples d’Europe. Son processus de ratification fut toutefois ardu, son entrée en vigueur ayant été retardée jusqu’au 1er novembre 1993, en partie à cause de la nécessité de révisions constitutionnelles dans certains États membres et des résultats initiaux défavorables d’un référendum au Danemark. Ce contretemps a mené à l’ajout de protocoles spécifiques pour le Danemark, suivi par un second référendum qui a vu le traité finalement ratifié.

Le Traité de Maastricht s’est écarté d’une simple vision économique, marquant le passage de la Communauté Économique Européenne (CEE) à l’Union Européenne (UE) avec un élargissement des domaines de coopération. Il établit un projet concret pour l’Europe, affirmant la création d’une « union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe », appuyée sur les fondations des Communautés européennes et enrichie par de nouvelles politiques et institutions.

Trois principes fondamentaux orientent désormais l’Union :

  • Le principe de subsidiarité, qui stipule que si les États membres et l’Union ont des compétences concurrentes, l’action de l’Union doit être justifiée par sa capacité à mieux atteindre l’objectif visé. La surveillance de cette subsidiarité est maintenant rigoureusement appliquée.

  • La démocratisation et la politisation de l’UE sont renforcées par l’introduction de la citoyenneté européenne, conférant de nouveaux droits politiques et civiques aux citoyens de l’Union.

  • La mise en œuvre de l’Union économique et monétaire, qui vise à établir une monnaie unique, l’euro, et une zone économique homogène à travers les États membres.

Le traité prévoit également, pour la première fois, une clause de révision, requérant les chefs d’État ou de gouvernement à se rencontrer en 1996 pour évaluer le fonctionnement du traité et envisager des améliorations, reconnaissant ainsi implicitement que le Traité de Maastricht, bien qu’innovant, pouvait encore être perfectionné.

B. le traité d’Amsterdam du 2 oct. 1997

Le Traité d’Amsterdam, signé le 2 octobre 1997, est entré en vigueur le 1er mai 1999. Ce traité a impliqué des modifications constitutionnelles dans certains pays membres, y compris en France où il a été ratifié par le Parlement, en raison de son caractère moins révolutionnaire.

  • Initié par une Conférence Intergouvernementale débutée en mars 1996 et achevée en juin de la même année, ce traité avait été anticipé par une « clause de rendez-vous » et visait trois grands objectifs :
    • Consolider et donner plus de substance à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).
    • Progressivement établir un espace judiciaire et policier commun, avec l’intention de créer une zone de liberté, d’égalité et de justice.
    • Préparer les institutions pour l’adhésion future de treize nouveaux États membres à l’Union Européenne.

Cependant, le Traité d’Amsterdam a été perçu comme insuffisant, n’atteignant pas les attentes placées en lui, surtout en matière de réformes institutionnelles. Toutefois, il a connu des avancées moins mitigées dans les deux autres domaines :

  • Concernant la PESC, il a été décidé de renforcer cette politique en intégrant les aspects de défense commune.
  • En ce qui concerne le volet de la Justice et des Affaires Intérieures, il y a eu une transition de certains sujets, retirés du troisième pilier intergouvernemental pour être inclus dans le cadre communautaire, notamment pour les visas, l’asile et l’immigration.

En outre, le Traité a modifié la nomenclature du troisième pilier pour devenir la coopération policière et judiciaire en matière pénale, prédécesseur direct de l’espace de justice, de liberté et de sécurité tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Le Traité d’Amsterdam a également entraîné une renumérotation complète des traités existants. Enfin, il comprenait une nouvelle « clause de rendez-vous », servant de fondement aux discussions qui ont précédé le Traité de Nice.

C. Le Traité de Nice (26 fev.2001)

Le Traité de Nice, signé le 26 février 2001, fut précédé d’une clause de rendez-vous fixée en février 2000, laissant un laps de temps réduit pour sa préparation. Durant les pourparlers préalables, le paysage politique a évolué, particulièrement avec la demande des nouveaux États aspirant à rejoindre l’UE, qui souhaitaient une intégration politique plus poussée.

  • Conférence Intergouvernementale (CIG) :
    • La rédaction de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne a été attribuée à une convention spéciale, plutôt qu’à la CIG. Cette convention se distinguait par sa structure unique et son processus transparent et ouvert au public.

En décembre 2000, lors du Conseil Européen de Nice, la Charte des droits fondamentaux a été proclamée, prévue pour être intégrée dans une future constitution européenne. Le contenu du Traité de Nice a été approuvé lors de cette rencontre et a été formellement signé en février de l’année suivante.

Le traité avait pour objectif de s’attaquer aux questions non résolues par le Traité d’Amsterdam. Ces questions étaient substantielles et diverses. Le Traité de Nice a principalement introduit des ajustements relatifs à l’élargissement de l’UE, y compris la réforme des procédures de pondération des voix au sein du Conseil et la modification de la composition future du Parlement Européen. Il offrait aussi une approche concernant le Conseil Européen, mais n’a pas pleinement satisfait les attentes en la matière.

En France, la ratification du traité s’est déroulée sans heurts par voie parlementaire, et sans nécessiter de modification de la Constitution. Cependant, une déclaration annexée au traité exprimait la position des États membres sur ce qu’ils nommaient la déclaration sur l’avenir de l’Union. Dans cette déclaration, les membres de la CIG reconnaissaient que des problématiques essentielles restaient en suspens, signalant la nécessité d’un projet plus ambitieux, ouvrant la voie à la future constitutionnalisation de l’Union.

Néanmoins, l’entrée en vigueur du Traité de Nice a été retardée, prenant effet finalement le 1er février 2003.

D. le traité établissant une constitution pour l’Europe (2004)

Le Traité instaurant une Constitution pour l’Europe, signé le 29 octobre 2004, représente un jalon distinctif dans l’histoire de l’intégration européenne. Contrairement à un simple traité de révision, ce texte avait l’ambition de refonder l’organisation internationale existante en créant une nouvelle Union Européenne qui succèderait aux Communautés européennes et à l’Union telles que connues jusqu’alors.

Le traité avait pour objectif de simplifier le fonctionnement institutionnel de l’UE, lui conférant ainsi une forme constitutionnelle. Cependant, malgré les rejets français et néerlandais, le processus de ratification n’a pas été entièrement suspendu. Ce traité s’écartait des précédents en cela qu’il n’engendrait pas seulement une modification, mais annonçait l’avènement d’une nouvelle structure institutionnelle, marquant un tournant majeur dans la dynamique organisationnelle de l’Union.

Cette transition s’inscrit dans une évolution à la fois structurelle et politique, signalée indirectement par la déclaration relative à l’avenir de l’Union annexée au Traité de Nice.

Les protocoles annexés aux traités possèdent une force juridique équivalente à celle des Traités eux-mêmes et sont contraignants. À l’inverse, les déclarations annexées n’ont pas cette même valeur juridique, car elles sont essentiellement unilatérales et se répartissent en trois catégories : celles rédigées par les auteurs du traité, celles formulées collectivement par les États membres, et celles exprimées individuellement par un État membre.

La déclaration du Conseil Européen à Laeken en décembre 2001 a établi un cadre pour aborder l’avenir de l’Union. Elle posait des questions fondamentales sur la visibilité, la lisibilité et la légitimité de l’Union, tout en suggérant l’émergence possible d’un nouveau traité constitutionnel. Pour répondre à ces interrogations, il a été décidé de mettre sur pied une Convention chargée de rassembler des représentants des États, des institutions communautaires et des parlements nationaux et européens.

La Convention devait se pencher sur des enjeux cruciaux tels que la répartition des compétences entre l’UE et les États membres, la simplification des instruments législatifs de l’Union, l’assurance de la démocratie et de la transparence, ainsi que le renforcement de la stature internationale de l’Union.

Après la présentation d’un premier projet de texte en juin 2003 par cette Convention, des conférences intergouvernementales ont été organisées, débouchant sur la signature du Traité établissant une Constitution pour l’Europe en 2004.

Bien que ce traité n’ait jamais été ratifié suite aux référendums négatifs et ait finalement été remplacé par le Traité de Lisbonne, les efforts déployés pour sa création demeurent un témoignage significatif des aspirations et des défis de l’intégration européenne.

D. les défis de l’Union Européenne : Brexit, crises, élargissement

Traité de Lisbonne (2007):

  • Adoption: Le Traité de Lisbonne, signé en 2007 et entré en vigueur le 1er décembre 2009, a réformé la structure institutionnelle de l’UE après l’échec de la ratification du Traité établissant une Constitution pour l’Europe.
  • Innovations: Ce traité a introduit des changements notables tels que la clarification de la répartition des compétences entre l’UE et les États membres, une plus grande cohérence dans la politique étrangère avec la création du poste de Haut Représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de Sécurité, et a renforcé le rôle du Parlement européen.
  • Charte des droits fondamentaux: La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne a acquis une valeur juridique contraignante avec le Traité de Lisbonne.

Élargissement de l’UE:

  • Adhésions: L’UE a vu l’adhésion de plusieurs nouveaux membres depuis 2004, étendant significativement sa taille et son influence. La Bulgarie et la Roumanie ont rejoint en 2007, suivies par la Croatie en 2013.
  • Candidats et potentiel futur élargissement: D’autres pays sont actuellement candidats à l’adhésion ou sont des candidats potentiels, illustrant l’attrait continu de l’Union européenne.

Crise économique et mesures de réponse:

  • Crise financière globale: La crise financière de 2008 a eu des répercussions majeures sur les économies européennes, entraînant des mesures d’austérité et des plans de sauvetage pour des pays tels que la Grèce, l’Irlande, et le Portugal.
  • Union bancaire: En réponse à la crise, l’UE a mis en place une union bancaire, visant à assurer une surveillance plus stricte et une meilleure coordination entre les banques des États membres.

Crise migratoire:

  • Afflux de réfugiés: L’Union européenne a été confrontée à une crise migratoire sans précédent en 2015, avec un grand nombre de réfugiés et de migrants arrivant principalement du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.
  • Politiques de réponse: Cela a mis à l’épreuve les politiques de l’UE en matière d’asile et de frontières, entraînant des discussions sur la réforme du système de Dublin et la mise en place de quotas de répartition des demandeurs d’asile.

Brexit:

  • Référendum et sortie: Le Royaume-Uni a voté pour quitter l’UE lors du référendum de 2016, et le Brexit est devenu effectif le 31 janvier 2020, marquant la première fois qu’un État membre quittait l’Union européenne.
  • Conséquences: Le Brexit a eu d’importantes répercussions politiques et économiques, et a entraîné la renégociation de nombreux accords entre le Royaume-Uni et l’UE.

Défis climatiques et énergétiques:

  • Accord de Paris: L’UE a joué un rôle de premier plan dans la négociation de l’Accord de Paris sur le climat en 2015, s’engageant à réduire considérablement ses émissions de gaz à effet de serre.
  • Pacte vert pour l’Europe: En 2019, la Commission européenne a lancé le Pacte vert pour l’Europe, un ensemble d’initiatives politiques visant à rendre l’UE climatiquement neutre d’ici 2050.

Défis sanitaires – COVID-19:

  • Pandémie et réponse: La pandémie de COVID-19 a déclenché une crise sanitaire mondiale en 2020, obligeant l’UE à coordonner des réponses en matière de santé publique et à faciliter le développement et la distribution de vaccins.
  • Fonds de relance: En réponse aux impacts économiques de la pandémie, l’UE a adopté un plan de relance massif, le « NextGenerationEU », doté de centaines de milliards d’euros pour la reprise économique des

Section 2 : composition et élargissement de l’Union Européenne

I. Procédure d’élargissement

I. Processus d’Intégration de Nouveaux États Membres

  • Cadre légal de l’adhésion à l’Union Européenne :
    • Avant la création de l’Union Européenne, il existait trois procédures distinctes d’adhésion en fonction de chacune des Communautés. Avec la formation de l’Union Européenne, une procédure unifiée a été établie par l’article 49 du Traité sur l’Union Européenne (TUE).
  • Critères d’adhésion :
    • Les conditions d’éligibilité pour les états candidats sont relativement limitées mais rigoureusement appliquées :
      • L’état candidat doit être géographiquement situé en Europe.
      • Il doit adhérer aux principes démocratiques et à l’état de droit, comme le stipule l’article 6 du TUE.
  • Le processus décisionnel d’adhésion :
    • La demande d’adhésion d’un état est soumise au Conseil de l’Union Européenne, qui doit statuer à l’unanimité, après avoir consulté la Commission Européenne et le Parlement Européen. Ce mécanisme implique les trois piliers de légitimité de l’UE : la légitimité communautaire, intergouvernementale et démocratique.
  • Convention d’adhésion :
    • Les détails pratiques de l’entrée d’un nouvel État membre sont formalisés dans une convention d’adhésion qui doit être ratifiée par tous les États membres actuels de l’UE, à la manière d’un traité international classique.

II. Exigences Préalables à la Candidature

  • Étapes préliminaires au statut de membre :

    • Au-delà de la simple candidature, il y a généralement une reconnaissance du statut de candidat avant qu’un état puisse devenir membre de l’Union.
    • Un état peut aspirer à l’adhésion sans pour autant obtenir l’intégralité des pouvoirs associés à ce statut.
  • Critères de Copenhague :

    • Ces critères, définis lors du Conseil européen de Copenhague, bien qu’ils ne soient pas explicitement mentionnés dans l’article 49 du TUE, sont intégrés dans le processus d’adhésion :
      • Adhésion aux principes de la démocratie, des droits de l’homme et au modèle de l’état de droit.
      • Existence d’une économie de marché viable ainsi qu’un certain niveau de développement économique.
      • Capacité juridique d’intégrer l’acquis communautaire dans le droit national, reconnaissant la primauté et l’effet direct du droit de l’Union.
  • Évaluation et aide pré-adhésion :

    • L’évaluation de l’admissibilité d’un état candidat est effectuée par les institutions européennes, qui peuvent proposer une assistance, financière ou technique, pour aider l’état à s’aligner sur les exigences de l’Union.
    • La Commission Européenne établit un calendrier pour l’achèvement du processus d’adhésion, traitant chaque cas de manière individuelle.

III. Acceptation de l’Acquis Communautaire

  • Adhésion à l’acquis de l’Union :

    • Un élément crucial pour l’entrée dans l’Union est la capacité d’un nouvel état membre à adopter intégralement l’acquis communautaire et de l’Union Européenne.
    • L’Union produit continuellement du droit qui constitue l’état de droit actuel que le nouvel état membre doit être prêt à intégrer.
  • Processus d’adhésion étendu :

    • Le processus d’adhésion va bien au-delà de l’article 49, comprenant une série de mesures d’accompagnement conçues pour préparer l’adhésion à long terme.
    • Des exemples incluent les négociations en cours avec la Croatie, et la Macédoine du Nord, qui sont toutes engagées dans ce processus d’évaluation par la Commission Européenne.
    • Attention, les négociation avec la Turquie sont interrompus : en Juin 2019 le Conseil de l’UE note “que la Turquie continue de s’éloigner un peu plus encore de l’Union européenne”. “Les négociations d’adhésion avec la Turquie sont par conséquent au point mort”.

Ce cadre d’élargissement démontre la complexité et l’exigence du processus d’intégration dans l’Union Européenne. L’adhésion à l’UE ne se limite pas à un simple accord politique ou à une reconnaissance diplomatique; elle exige un engagement profond et durable envers les principes, les valeurs et les lois qui fondent l’Union. Cela comprend l’adhésion aux normes démocratiques, l’alignement sur les standards économiques et juridiques, ainsi que l’adoption de l’acquis communautaire dans son intégralité.

II. Les élargissements successifs de l’UE

Les élargissements successifs de l’Union européenne (UE) ont été des étapes clés dans son développement et dans l’augmentation du nombre de ses États membres. Ces élargissements ont permis non seulement l’expansion territoriale mais également l’intégration économique et politique de nouveaux membres.

  • Premier élargissement : Ce premier élargissement a eu lieu en 1973, intégrant le Royaume-Uni, l’Irlande et le Danemark. Cette expansion est survenue après une période initiale de 20 ans durant laquelle seuls les six États fondateurs étaient membres, ce qui a contribué à la stabilisation des institutions et des processus décisionnels européens.

    Pour le Royaume-Uni, l’adhésion fut complexe en raison de sa réticence initiale à s’engager pleinement dans les processus communautaires. Après des tentatives infructueuses dans les années 1960, marquées notamment par le veto du président français de l’époque, Charles de Gaulle, le Royaume-Uni a finalement pu rejoindre la Communauté économique européenne (CEE) lorsque les opposants à son adhésion ont quitté la scène politique.

    En ce qui concerne la Norvège, bien qu’elle ait candidaté, elle n’a finalement pas adhéré à la Communauté, les citoyens ayant rejeté l’adhésion par référendum.

    L’Association européenne de libre-échange (AELE), fondée en 1960, comprenait initialement le Royaume-Uni, l’Autriche, la Finlande, la Norvège, la Suède et la Suisse.

  • Deuxième élargissement : En 1981, la Grèce est devenue le dixième État membre de la CEE, marquant le premier élargissement où une aide financière substantielle fut mise en place, en raison de l’association préalable de la Grèce avec les communautés européennes.

  • Troisième élargissement : En 1986, avec l’entrée de l’Espagne et du Portugal, le nombre d’États membres de la CEE est passé à douze, ce qui a marqué une accélération du processus d’élargissement avec un doublement du nombre de membres en moins de vingt ans.

  • Quatrième élargissement : En 1995, l’Autriche, la Finlande et la Suède ont rejoint l’UE, ce qui a pratiquement signifié la fin de l’AELE en tant qu’entité significative. L’accord sur l’Espace économique européen (EEE) a consolidé la coopération entre l’UE et les pays de l’AELE.

    Bien que la Norvège ait réengagé les négociations d’adhésion, une fois de plus, l’adhésion n’a pas été ratifiée à la suite d’un référendum national.

  • Cinquième élargissement : Le plus significatif à ce jour a eu lieu en 2004, avec l’adhésion de dix nouveaux membres, suivi en 2007 par la Bulgarie et la Roumanie, portant le nombre d’États membres à vingt-sept.

Avec ces élargissements, l’Union s’est trouvée confrontée à des structures initialement conçues pour un nombre plus restreint de membres, soulevant des questions quant à l’adaptation de ses institutions à ses nouvelles dimensions et ambitions.

Quant aux dispositions juridiques relatives à l’élargissement et au retrait, le Traité établissant une Constitution pour l’Europe a innové en incluant explicitement la possibilité d’un retrait d’un État membre. Cependant, ce traité n’est jamais entré en vigueur, remplacé par le Traité de Lisbonne qui est entré en vigueur le 1er décembre 2009. C’est dans le cadre de ce dernier que l’article 50 du Traité sur l’Union européenne (TUE) établit le mécanisme légal pour qu’un État membre puisse se retirer volontairement de l’Union, disposition invoquée pour la première fois par le Royaume-Uni pour le Brexit.