Le droit d’être entendu par un juge sur le fond d’une prétention

Le droit d’action en justice : le droit d’être entendu sur le fond d’une prétention

      Article 6-1 CEDH : toute personne a le droit d’être entendu.

      Article 30 CODE DE PROCÉDURE CIVILE :L’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l’adversaire, l’action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.

§ 1 : Motulsky et l’article 30 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE 

A.  Un droit procédural autonome, en demande comme en défense

      Article 30 CODE DE PROCÉDURE CIVILE est la reprise de la définition donnée par Motulsky. C’est une définition car il a la forme et la nature juridique d’une définition.

Le droit d’agir c’est le droit d’être entendu sur le fond (= le droit substantiel) d’une prétention.

Prétention = mot fondamental dans la définition de l’action. C’est la question qu’on pose au juge. C’est la question de droit et de fait.

L’action en justice c’est le droit d’être entendu sur le fond du droit.

Le droit d’action est  de nature procédural, autonome et indépendamment du fait de gagner ou de perdre (du résultat).

Cette définition d’action en justice permet de faire la différence entre la recevabilité qui est le droit d’être entendu, et le bien fondé de l’action.

Le droit d’agir existe des deux côté : en défense et en demande.

Action en justice : droit subjectif, procédural, autonome, par rapport à tous les droits substantiels.

B.  Un « débiteur » : le juge et la question du déni de justice

      Tous a droit d’être entendu par le juge, en contrepartie le juge est obligé de répondre, qu’il donne un avis favorable ou non. S’il ne le fait pas il est coupable d’un manquement à ses fonctions de juge : manquement visé par l’Article 4 du Code Civil. Si manquement alors il sera poursuivi de déni de justice.

Le juge est libre de sa décision mais il a l’obligation de répondre.

      Le déni engage la responsabilité de l’état au titre du fonctionnement défectueux du service public de la justice.

      Le juge doit répondre dans un délai raisonnable : Article  6-1 de la CEDH : assimilation avec le déni de justice (lenteur = déni de justice) => dommages & intérêts pour le justiciable.

§ 2 : Un droit fondamental : l’article 6-1 CEDH

A. Le « droit au juge »

1.   Accès « effectif » :

      La cour de Strasbourg est très influencée, elle adopte une politique très pragmatique. Elle va demander des explications pour savoir comment fonctionne le droit d’agir dans le pays concerné. Elle s’intéresse aux textes, à la jurisprudence et à la pratique judicaire pour savoir si le recours était bien réel.

      Il y a une condition d’accès raisonnable pour saisir le juge.

2.   La question du « juge naturel » :

      Accéder au juge mais lequel ?

      Selon les justiciables, selon la catégorie du contentieux, le sujet de droit doit avoir accès à son juge naturel.

      Avant, le juge naturel était une façon de protéger le justiciable.

      Aujourd’hui, on est plus réticent sur le concept de juge naturel : l’impartialité du juge est devenue une exigence => le juge naturel devient suspect, c’est celui qui est proche du  justiciable.

Aujourd’hui le juge naturel ce peut être le fait que tout le monde ait le même juge.

B. Accès « gratuit » : signification

      Le principe de gratuité de la justice est un principe fondamental. On ne paye pas ses juges, le fonctionnement de l’organisation de la justice.

En 85, les greffes ont été fonctionnarisés.

C’est le contribuable qui paye, pas le justiciable.

 

1.   Les frais de justice : les dépens :

      Article 695 et suivant du CODE DE PROCÉDURE CIVILE relatifs aux dépens. Ce sont les frais du procès.

Ex : frais de traduction des actes, frais liés à l’instruction (recherche de la preuve dans la phase du procès), frais liés à la venue des 1/3 (pas le cas en matière pénale), l’expertise, frais d’honoraires…

Ce sont les parties qui payent l’expert en matière civile.

Article 696 CODE DE PROCÉDURE CIVILE : les dépens sont à la charge du perdant.

2.   Les frais non compris dans les dépens et l’aide juridictionnelle :

      Article 700 CODE DE PROCÉDURE CIVILE : concerne les frais irrépétitibles, que l’on ne peut pas récupérer, qui ne peuvent pas être mis à la charge de l’adversaire.

Les frais d’honoraires ne sont pas dans les dépens.

L’Article 700 permet de demander au juge, s’il l’estime équitable, de faire supporter tout ou partie les frais d’avocat par l’autre partie.

Aujourd’hui l’avocat n’a pas à justifier ses honoraires et le juge est dispensé de motivation s’il accepte ou non.

      Toute personne doit pouvoir avoir accès à une défense professionnelle, au droit d’être entendu par un juriste professionnel.

Si on ne peut pas payer les frais d’avocat, on peut demander l’Aide Judiciaire.

Devant chaque TGI il y a un bureau d’Aide Judiciaire qui examine les demandes d’Aide Judiciaire faite par des personnes qui veulent agir en justice et qui n’ont pas les moyens de payer eux-mêmes leur avocat. Un examen sous l’angle de critères financiers est fait. (il existe des ressources plafond)

On peut avoir droit à l’Aide Judiciaire totale ou partielle.

Cela ne porte pas atteinte à la liberté de choix d’avocat. L’avocat peut accepter ou non, et aura des indemnités forfaitaires versées par l’état.

=> Même les plus défavorisés peuvent agir en justice avec un avocat.

C.  Un droit absolu 

Devant la Cour de cassation il existe aussi un bureau d’Aide judiciaire mais sa particularité est qu’il accepte ou non l’Aide Judiciaire seulement sous des critères financiers mais aussi sur la démonstration que le demandeur a un moyen sérieux de cassation et donc un espoir raisonnable d’obtenir le pourvoi.  

1.   Une limite jurisprudentielle : l’abus de droit d’agir

      Article 30 décret 78 sur le droit d’agir : reconnu comme un droit subjectif autonome qui n’est pas absolu => est susceptible d’abus.

      Théorie de l’abus de droit : c’est une construction doctrinale relayée par la jurisprudence qui estime que ce droit peut être utilisée de façon excessive, dilatoire (= exercée uniquement pour faire gagner du temps), dans le but de nuire à autrui.

      Abusive : action fantaisiste c’est-à-dire visiblement dépourvu de tout fondement juridique, totalement prévue comme devant échouer => action fondée sur rien du tout et visée à être rejeté par le juge.

      Cette théorie se retrouve dans le droit de propriété et l’action en justice.

Celui qui invoque l’abus du droit invoque l’abus du  droit d’agir de l’autre partie. Peut se faire en  défense et en demande. Résister à une demande juridiquement certaine c’est abuser du  droit.

Article 1382 du code civil régi l’abus de droit.

Le fondement de l’action ne peut être de type contractuel. Reste donc le délictuel donc cas de responsabilité pour faute.

Celui qui invoque devra prouver l’abus et ensuite le préjudice que cet abus lui a causé, en terme financier ou moral. La victime pourra obtenir des Dommages et intérêts. Sur le fondement de l’Article 1382 du code civil.

      Il est rare que le juge accepte cette demande car la preuve de la faute est difficile à apporter.

      Un décret de 78 qui a été corrigé lors du passage aux €uros prévoie en plus, la possibilité d’une amende civile. Article  32-1 du code de procédure civile « celui qui a agi en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné d’une amende civile d’un montant qui peut varier entre 15 et 1500 € sans préjudice des dommages qui sont réclamés. ».

L’amende civile va au trésor public, elle ne va pas à la victime. => On peut être condamné à des Dommages et intérêts et à une amende civile.

      En cas de pourvoi abusif, la cour peut le rejeter et pourra condamner celui qui a fait le pourvoi abusif à une amende civile.

2.   Les limites admises par la cour de Strasbourg

      Beaucoup d’arrêts qui concernent l’accès au juge et donc beaucoup de limites.

      La cour a toujours admis que le droit d’agir était un abus : le droit d’être entendu par un tribunal n’est pas absolu c’est-à-dire qu’elle admet qu’il puisse exister des limites.

Elle admet la théorie de l’abus de droit à condition que ce soit un abus caractérisé.

A propos de la Belgique, la cour a été saisie d’un recours individuel à propos de l’amende civile : un texte prévoyant cela n’est-ce pas une limitation injustifiée au droit ? Non car un système juridique qui cumule les « dommages et intérêts » et l’amende civile est un système conforme à la convention européenne.

Quand il y a un abus caractérisé ce la produit 2 effets :

          cela cause un préjudice à l’autre partie

          cela cause un préjudice à la justice toute entière

=> 2 entités sont lésées : une privée et une publique

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