Le droit naturel et l’approche des jusnaturalistes et des légalistes

L’OPPOSITION ENTRE LES APPROCHES JUSNATURALISTE ET LÉGALISTE DES DROITS. 

On classe les juristes en 2 catégories : les jusnaturalistes et les positivistes. Tous entendent rendre compte du droit positif, c’est-à-dire du droit voulu et énoncé ou posé par des hommes. Mais les premiers admettent qu’il existe, à côté ou au-dessus de ce droit positif, un autre droit, le droit naturel.

  • A) L’AFFIRMATION DE L’EXISTENCE DE DROITS NATURELS

Jusnaturalistes croient en l’existence de droits inhérents à la personne humaine, à l’Homme, et ce indépendamment du contenu du droit positif.

Idée que le droit élaboré par les pouvoirs publics doit, pour être légitime, respecter ces droits naturels de l’Homme.

Droit positif se contente de reconnaître les droits de l’Homme (conception déclarative) et n’en est pas le créateur (conception créatrice).

Christianisme : terreau pour les droits de l’Homme.

Succès de la foi chrétienne + paradigme de l’individualisme s’imposera sur de nombreux territoires

Avant : holisme (=conception dans laquelle la finalité de l’existence humaine est le groupe auquel appartient l’individu, et non l’individu lui-même, ce qui induit que les droits de l’individu, voire l’individu lui-même, puissent être sacrifié pour le groupe).

Ces droits naturels sont les droits de la personne dans l’état de nature.

Droit naturel classique, DDH se déduisent de l’observation du monde, de la Nature telle que Dieu l’a voulu.

Droit naturel dit « moderne » car laïcisé, DDH sont révélés par la raison humaine et résulte de sa volonté.

 

  • B) LES OBJECTIONS JUSTIFIÉES DES LÉGALISTES ET POSITIVISTES

Approche jusnaturaliste du droit récusée

  •     par les tenants d’une approche légaliste, tels J.Bentham,
  •     par le courant de pensée qualifié de positiviste, apparu au 19ème siècle et qui a parcouru tout le champ de la connaissance pour promouvoir les qualités et la nécessité de la démarche scientifique.

Juristes se réclamant du positivisme considèrent que le seul corpus de règles qui puisse mériter l’appellation de « droit » est le droit positif, c’est à dire droit valablement édicté par les autorités compétentes pour le faire.

Droit = corpus de règles dont le respect est assuré par l’Etat, via des autorités administratives et juridictionnelles. Point de droit sans Etat.

Dans une perspective positiviste, un droit est donc valable s’il est édicté dans le respect des règles de compétence, de procédure, de fond. Aucune autre condition extra-juridique n’est à prendre en compte.

Opposition jusnaturalisme/positivisme a été dépassée par l’émergence d’un courant nommé positivisme sociologique, qui a recours à la notion de conscience collective comme fondement, comme légitimation du droit positif.

Approches positivistes et jusnaturalistes du droit sont complémentaires et la qualité d’un ordre juridique moderne procède assurément d’une réflexion qui les englobe toutes deux. Ceci est confirmé par la présence d’éléments tirés du jusnaturalisme dans le droit positif.

 

  • C) LES MANIFESTATIONS DU DROIT NATUREL.

Le droit naturel : mentionné

  •     dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) de 1789,
  •     dans le Code Civil créé en 1804.

ATTENTION :  Seul le droit positif est considéré comme le vrai droit.

 

Les manifestations du droit naturel sont les suivantes :

1 – donner un fondement au droit positif

Fonction de légitimation du droit est visible par exemple dans la pensée de Portalis (un des rédacteurs du Code Civil)

Ce rôle fondateur du droit naturel est plus ou moins développé.

 

2 – corriger si besoin est les effets néfastes du droit positif

Équité : permet une correction ponctuelle dans le raisonnement juridique, dans une affaire (c’est donc une correction micro juridique).

Idée est visible dans la théorie de l’enrichissement sans cause, les notions d’abus de droit ou de fraude à la loi ou encore le recours à la notion de « bonne foi », par exemple dans l’exécution des contrats.

Sur le plan macro juridique : les principes généraux du droit (PGD) et les standards jouent ce rôle de correction des effets non désirés du droit positif.

La notion d’obligation naturelle participe également de cette logique de recherche d’une solution équitable.

 

 

3 – justifier la désobéissance au droit positif ?

La légitimité du droit pose la question de l’obéissance au droit et du droit de résistance.

DDHC de 1789 consacre le droit de résistance à l’oppression comme un « droit naturel et imprescriptible » (article 2).

Pour les jusnaturalistes, le droit ne doit être obéi que s’il respecte le droit naturel.

L’histoire et l’actualité fournissent des exemples très divers de désobéissances qui peuvent être considérées comme légitimes.

Ex :

  • Antigone, « droit des morts »
  •        Appel du 18 juin 1940, De Gaulle, s’affranchit se son devoir d’obéissance et appelle les Français à désobéir au gouvernement français en place

Autres exemples, volontairement polémiques :

  •      Le fauchage volontaire de cultures d’organismes génétiquement modifiés (OGM) en plein champ, au nom du principe de précaution et de l’état de nécessité ;
  •     le parrainage d’enfants menacés d’expulsion, constitutive d’une infraction (l’aide au séjour irrégulier
  •     intrusions répétées de Greenpeace dans les centrales nucléaires françaises afin de démontrer que la sécurité de ces installations classées n’est pas garantie

La désobéissance civile fait social avéré.

Règle essentielle à la démocratie : minorité doit se conformer à la loi de la majorité-> plaide dans le sens d’une condamnation de principe des « désobéisseurs ».

Autre élément essentiel dans l’appréciation de la désobéissance : ceux qui la pratiquent ne sont pas fondamentalement hors la loi, ils ne se soustraient absolument pas à l’ordre républicain : ils n’agissent pas anonymement, se rendent aux convocations des tribunaux et assument les condamnations qui sont prononcées à leur encontre.

Leur combat-> convaincre l’opinion publique de la justesse de leurs idées, en utilisant la médiatisation de leurs actions et de leurs procès.

L’efficacité de ce mode d’action est évidente en ce qui concerne les OGM.

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