L’échec de la Deuxième République (1848-1851)

la II ème République et l’échec républicain

Tocqueville dit « Voilà donc la monarchie de Juillet tombé sans lutte en présence que plutôt que sous le coup des vainqueurs aussi étonnés (…)

La révolution de 1848 est aussi surprenante que celle de 1830. Elle surprend tout le monde. C’est une manifestation (banquet) dans laquelle un soldat tire : on a fait couler le sang du peuple, Louis Philippe ne peut plus rester.

Ils ont retenu la leçon de 1830 : il ne faut pas se faire voler la Révolution par les conservateurs.

Ainsi le 24 février 1848 Paris se couvre de barricades, le Roi s’enfuit et à l’Hôtel de Ville, lieu traditionnel des révolutions parisiennes, un gouvernement provisoire se forme et proclame la République.

Paragraphe 1: la méfiance vis à vis de l’exécutif présidentiel

L’article 43 de la Constitution dispose que le peuple français délègue le pouvoir exécutif à un citoyen qui reçoit le titre de Président de la République. (Articles de la Constitution de l’an VIII qui déléguait le pouvoir à 3 consuls)

Comment doit-il être désigné ?

A. Un président élu au suffrage universel direct

Le principe de l’unité de l’exécutif s’est imposé aux constituants en raison de la recherche d’une efficacité d’un pouvoir exécutif. A ceux qui craignent qu’un unique personnage ne puisse devenir monarque (Napoléon) on renvoie à l’exemple américain. En effet, depuis 1787 il y a bien un président de la République qui ne s’est pas transformé en monarque (les américains ont tt fait pour que Georges Washington soit régulièrement humilié pour qu’on lui rappelle qu’il n’était que président).

C’est une rupture avec la collégialité qui est un principe républicain depuis Rome : deux consuls, le collège des pontifes, les Tribuns de la Plaine, toutes ces institutions exécutives traditionnelles sont collégiales. C’est donc la République de l’Ordre qui a besoin d’un président pour l’ordre. Le vrai débat, le vrai enjeu : si l’on nomme un exécutif seul, on a un danger : l pourrait capter le pouvoir. Comment doit-on le désigner ?

Deux possibilités qui donnent lieu à un débat très vif. C’est un enjeu politique bien plus que juridique. Les Républicains demandent, optent pour l’élection du Président par l’Assemblée nationale. En choisissant une seule assemblée législative, les constituants ont rejeté le principe de la balance des pouvoirs au profit d’un principe de subordination, il convient donc que l’exécutif soit subordonné aux représentants du souverain. L’élection du Président par le suffrage universel direct par les électeurs serait permettre au Président d’invoquer une légitimité électorale qui au fond et la même que celle de l’Assemblée. Du coup si sur le plan politique il y a deux organes qui ont la même légitimité politique il sera difficile de faire jouer les principes institutionnels de la subordination. A cela s’oppose les partisans du suffrage universel direct. Un autre élément : les Républicains craignent que l’ignorance politique du peuple ne conduise les électeurs à se laisser séduire par des populistes par des notables : ils ont peur que les électeurs votent pour un nom plus que pour un programme. → Il faut former les citoyens. Au fond les républicains disent même qu’un président élu au suffrage universel aurait plus de légitimité que les derniers Rois qui ont régné en France.

Les partisans du suffrage universel direct ont deux arguments : d’abord relatif à la corruption, une assemblée unique est plus facile à corrompre que l’ensemble des électeurs.

Deuxième argument, celui de la logique démocratique : une assemblée qui ne tire son pouvoir que du peuple, comment peut-elle qu’elle a plus confiance en elle-même que dans le peuple ?

On a bien conscience du péril d’un nouveau Bonaparte.

Lamartine donne deux arguments :

Si les français n’ont pas eu accès à une instruction politique théorique, l’expérience depuis 1789 leur a donné une éducation politique et donc le danger qui s’est concrétisé en l’an 8, n’est plus réellement un danger en 1848

puisque l’on reconnaît le principe démocratique, comment effectivement ne pas croire et ne pas faire confiance à la démocratie

On va décider donc que le président sera élu au suffrage universel direct.

Ce président puisqu’élu, va d’emblée avoir un statut précaire et être soumis à la responsabilité pour empêcher toute forme d’indépendance vis à vis de l’Assemblée. On ne le désigne pas comme chef de l’État, on n’admet pourtant qu’il a un rôle de représentation symbolique et non pas juridique ou politique. L’article 61 « il préside aux solennités nationales » Il est élu pour 4 ans et n’est pas rééligible. En cas de vacance il y a un vice président qui lui est élu par l’Assemblée Nationale sur proposition de trois candidats par le président et ce vice président doit assurer (?)

En tant que chef de l’exécutif, le président dispose de la force armée mais il ne la commande pas. Le président de la République prête un serment en présence de Dieu et devant le peuple français de rester fidèle à la République démocratique une et indivisible et de remplir tous les devoirs que m’imposent la Constitution. L’une des innovations très curieuses ça va être de prévoir la responsabilité du président de la République.

B. Le statut précaire d’un président responsable

L’article 68 prévoit la responsabilité de l’ensemble des agents dépositaires de l’autorité publique (toute la branche exécutive) et elle implique dedans le président. Si le président dissout l’Assemblée, la proroge ou même met obstacle à l’exercice de son mandat. Il se rend coupable du crime de haute trahison : par ce seul fait il est déchu de ses fonctions, les citoyens sont tenus de lui refuser obéissance, ce sont les garants de la préservation de la République. Cela ne correspond ni à une logique parlementaire ni à une hiérarchisation des organes, c’est une logique complètement contraire à celle de l’évolution du parlementarisme puisqu’elle soumet un organe à un autre organe contre toute idée de balance des pouvoirs.

Du coup, ceux qui ont cru que la Constitution de 48 était inspirée de la Constitution américaine, se trompent. Car la Constitution américaine ne prévoit pas une telle responsabilité même si elle prévoit l’Empechment. La difficulté est que la difficulté du président de la république n’est pas pénale, elle est politique et met obstacle à l’exercice de son mandat.

Cela va créer un triple problème pour le jeu régulier des institutions.

Puisque le Président comme la Chambre sont élus par les électeurs, si la Chambre met en jeu la responsabilité du président, ça veut dire implicitement que la Chambre entre en conflit avec les électeurs. Donc le conflit n’est pas tant entre la Chambre et le Président qu’entre la Chambre et les électeurs or la Chambre est responsable devant les électeurs.

Donc au lieu de renforcer l’autorité de la Chambre, cela la fragilise car ça la met dans la situation de ne pas être réélue. Ce n’est donc pas une modalité institutionnelle d’un règlement d’un conflit, le conflit entre ces deux organes renvoient à un traitement politique qui sera réglé par des élections. Ce qui fait que le ministère a imposé sa politique au Roi d’Angleterre car c lui qui est responsable devant l’Assemblée.

Le président peut donc arguer d’une résistance à l’Assemblée car il se doit en tant qu’élu par le souverain et responsable de l’Assemblée, d’agir en fonction, il n’est plus seulement un arbitre, il est parti prenant au jeu politique. Du coup les ministres qui dans une logique parlementaire apparaissent comme le lieu de rencontre entre le Chef de l’État et l’Assemblée, donc de convergence d’accord entre les deux organes qui ont une légitimité politique, la responsabilité personnelle des ministres perd tout intérêt : car pourquoi irait-on chercher la responsabilité personnelle d’un ministre alors qu’on peut avoir celle du Président ?

Du coup les ministres qui permettaient de résoudre les conflits au sein du jeu institutionnel, ne peut plus.

Et toute la construction du parlementarisme avisé se résume à une chose : que les conflits politiques puissent se résoudre à travers les organes institutionnels, afin de dépassionner les questions politiques → d’écarter le spectre de la Révolution, du coup d’État.

En l’espèce cette responsabilité du président qui a été pensé pour subordonner le président est une grave erreur car elle ne permet plus de résoudre les conflits dans le jeu institutionnel mais politique.

C. Les prérogatives limitées du président

Le président est placé sous la tutelle de l’Assemblée. Il est à la fois impuissant dans la sphère législative et étroitement dépendante dans la sphère exécutive. C’est ainsi, que dans la sphère exécutive, il dispose de la force armée mais ne peut pas la commander, il peut négocier les traités mais ne peut pas les ratifier, il peut faire grâce, il préside le Conseil d’État composé de membres nommés pour six ans par l’Assemblée Nationale. Il nomme et révoque les ministres mais ce, en fonction de la couleur politique de l’Assemblée. Les ministères et leurs attributions sont fixés par le pouvoir législatif. =/= Restauration → l’initiative législative vient uniquement de l’Assemblée même si le Président peut proposer, c’est une initiative partagée comme sous la monarchie de juillet, mais l’essentiel vient de l’Assemblée. Le droit d’initiative est soumis au contrôle du Conseil d’État. Il ne discute pas le contenu des lois, il les promulgue mais il dispose d’un faux véto : il peut demander une nouvelle délibération mais cette nouvelle délibération peut avoir lieu dans l’immédiat et sans nécessité de majorité qualifiée. C’est une capacité dilatoire plus que de véto.

Paragraphe 2 : La République démocratique, otage des divisions politiques

L’élection présidentielle a lieu le 10 décembre : les Républicains y vont en ordre divisé, leur favori reste le général Cavaignac qui depuis le mois de Juin assurait l’unité du pouvoir exécutif. Mais il y a aussi Lamartine, Ledru-Rollin, Raspail, le parti de l’ordre lui, n’a pas réellement de candidat solide car ils sont aussi divisés et vont finir par se rallier autour d’un seul candidat dont Adolf Tiers nous dit « c’est un crétin que l’on mènera » c’est Louis Napoléon Bonaparte qui recueille 75% des votes. Victoire du parti de l’Ordre.

Il a d’abord le soutient du parti de l’Ordre, il profite ensuite des divisions des républicains Cavaignac n’obtient que 19% des voix, on ne lui pardonne pas d’avoir massacré les ouvriers parisiens. Louis Napoléon Bonaparte profite de la légende napoléonienne sous la monarchie de Juillet, et souhaitait inscrire son régime dans la continuité historique et pour ce faire il a largement contribué au renouvellement de la légende napoléonienne, il a fait revenir les cendres de Napoléon de St Hélène, on a fait construire l’arc de Triomphe avec toutes les victoires de Napoléon, il a donc profité du mythe bonapartiste. Son nom était connu par tous, surtout dans les milieux ruraux non politisés. Revanche sur la Restauration. Bonaparte c’est les Cents-Jours c’est la gloire de la France. Et puis Louis Napoléon Bonaparte a su se classer au dessus des partis politiques, il a été le candidat des conservateurs, le candidat des mécontents et même le candidat des ouvriers.

→ Extinction du paupérisme.

Il y a une prise en compte de la situation de vide réel du monde ouvrier qui vit dans des conditions sordides et Louis Napoléon se saisit de cette question sociale non pas en terme de revendication socialiste mais en terme d’amélioration de la vie du prolétariat ouvrier ; Victor Hugo, grand ennemi de Napoléon parlera d’un immense qui pro-quo il est élu par des groupes politiques qui ne partagent pas les mêmes opinions.

L’Assemblée Nationale à l’inverse qui sera élu après la proclamation de la Constitution va être dominé par le parti de l’ordre, et cet Assemblée va accumuler les erreurs politiques ex : la loi électoral de Mars 1849. En apparence on maintient le suffrage universel mais on implique que pour voter il faille démontrer une résidence de trois ans dans le lieu de vote, et c’est comme cela que l’on passe de 9 millions d’électeurs à 6. Le Président dans un premier temps ne va pas s’opposer à l’Assemblée, il va les laisser accumuler la rancœur contre elle. Puis une loi sur la presse réduit la liberté de la presse, et une autre en 1850 favorise les congrégations sur l’enseignement.

Louis Napoléon commencera à s’opposer à l’Assemblée en renvoyant un ministre qui a toute la confiance de l’Assemblée mais pas la sienne. A la fin de son mandat, Louis Napoléon qui ne peut pas renouveler son mandat cherche à modifier la Constitution. La réforme de la Constitution est relativement lourde et elle n’échoue en Octobre 1851 que de quelques voix. L’Assemblée craint un coup d’État. Louis Napoléon place son beau frère à la tête de la garnison de Paris et le 2 décembre, anniversaire de la bataille d’Austerlitz, Louis Napoléon fait un coup d’État militaire. Il expose les principes du coup d’État qui sont : souveraineté populaire et suffrage universel rétablissement d’un État efficace avec les institutions de l’an 8 et le principe de l’appel au peuple pour consolider régulièrement l’assise du régime. Un an après, Louis Napoléon qui avait obtenu la présidence pour 10 ans, soumet à plébiscite l’instauration d’un Empire avec 93% de oui (7 millions et demi d’électeurs). Le principe qui dominera tout le second empire sera l’association de l’appel au peuple (démocratique) et de l’autorité (impériale).