L’escroquerie : des exemples de tromperie et de manœuvres frauduleuses
L’escroquerie se définit comme l’acte par lequel une personne obtient frauduleusement la remise d’un bien ou d’une valeur, à travers une tromperie. Cette infraction, relevant d’un acte actif de l’escroc, se distingue par plusieurs éléments clés et peut prendre diverses formes. L’article 313-1 du Code pénal établit clairement les fondements matériels de l’escroquerie, incluant l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, l’abus d’une qualité vraie, et l’emploi de manœuvres frauduleuses.
La détermination de l’escroquerie repose sur une preuve claire que l’usage d’un faux nom, d’une fausse qualité, l’abus d’une qualité vraie, ou l’emploi de manœuvres frauduleuses ont joué un rôle déterminant dans la décision de la victime de remettre un bien. Le défi pour le procureur réside dans la capacité à prouver cette causalité et l’intention délictueuse, surtout dans des cas où l’escroc pourrait avoir simplement omis de corriger une fausse impression créée par d’autres.
Les tromperies, un élément constitutif de l’escroquerie
Usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité
- Faux nom : Se réfère au mensonge sur l’identité, impliquant l’utilisation d’un patronyme, prénom, ou pseudonyme qui n’appartient pas réellement à l’individu (ex. Crim., 27 octobre 1999, n° 98-86.017).
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- L’une des méthodes les plus simples d’escroquerie consiste à utiliser un faux nom, prénom, ou pseudonyme, autrement dit, à se présenter sous une identité qui n’est pas la sienne. Ce mensonge peut, dans certains cas, suffire à persuader la victime de remettre l’objet convoité. Peu importe si le nom est réel mais usurpé, ou totalement fictif, l’escroquerie est caractérisée si ce mensonge est déterminant pour la remise du bien.
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- Fausses qualités : L’usage de fausses qualités s’inscrit dans une démarche similaire, impliquant un mensonge sur les attributs personnels ou professionnels d’une personne. Consiste à prétendre faussement détenir une position professionnelle ou un statut juridique spécifique (policier, avocat, agent immobilier, etc.) que l’escroc n’a pas. Cette fausse qualité doit être auto-attribuée; si avancée par un tiers et non démentie par l’escroc, l’élément matériel n’est pas constitué.
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- La jurisprudence adopte une interprétation large des « qualités », englobant aussi bien les éléments d’état civil que les titres professionnels ou académiques. Cependant, certaines affirmations, comme prétendre faussement être propriétaire d’un bien, ne constituent pas en soi une escroquerie selon la jurisprudence.
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Il est important de noter que l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité en lui-même suffit pour constituer l’escroquerie, à condition que ce soit sur la base de cet élément que la victime a procédé à la remise d’un bien.
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Abus d’une qualité vraie
- L’escroquerie peut également résulter de l’abus d’une qualité vraie, où l’individu, souvent un professionnel, exploite sa position de confiance pour tromper et induire la remise d’un bien. Autrement dit, cet aspect fait référence à l’exploitation abusive d’une qualité réelle par l’escroc, lui permettant de sembler avoir davantage de pouvoirs ou d’autorité que ceux réellement conférés par sa profession ou son statut
- Il concerne typiquement des rôles ou des fonctions conférant un certain pouvoir (avocat, notaire, ministre, prêtre, etc.).
- Pour que l’abus de qualité vraie soit caractérisé, il faut démontrer un acte délibérément trompeur commis dans l’exercice de cette fonction.
Manœuvres frauduleuses
- Ne peuvent pas être des manœuvres frauduleuses : Un simple mensonge, qu’il soit verbal ou écrit, ne suffit pas à constituer une escroquerie sans l’appui d’éléments matériels extérieurs renforçant la tromperie
- Peuvent être qualifiées de manœuvres : Les manœuvres frauduleuses nécessitent une action concrète visant à obtenir la remise d’un bien. Ces manœuvres peuvent être variées, allant de la production de documents truqués à l’intervention d’un tiers confirmant les dires de l’escroc.
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- Ces manœuvres exigent la mise en œuvre d’actes positifs, constituant une manipulation ou une mise en scène, visant à obtenir la remise d’un bien. L’exigence de « manœuvres » au pluriel signifie qu’un seul mensonge ne suffit pas à constituer l’escroquerie, mais des mensonges répétés peuvent être considérés comme tels.
- Dans la pratique, cela peut inclure l’utilisation de faux documents (fausses factures, comptabilités truquées)
- L’intervention de tiers dans le but de créer une illusion de crédibilité : L’intervention d’un tiers indépendant, conférant crédibilité aux affirmations de l’escroc, est souvent utilisée dans les escroqueries. Le rôle de ce tiers peut être celui d’un complice, s’il est au courant de la supercherie, ou celui d’un acteur de bonne foi ignorant sa participation à l’acte frauduleux.
- Mise en scène : La mise en scène, impliquant l’orchestration d’une fraude complexe, est l’expression la plus sophistiquée des manœuvres frauduleuses. Elle repose sur l’élaboration d’une stratégie visant à légitimer le mensonge auprès de la victime, pouvant aller de la création d’une entreprise fictive à la simulation d’une situation pour induire en erreur
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La pratique de l’escroquerie adopte des formes extrêmement variées :
- Vente « à la boule de neige » : offre de marchandises à des conditions attractives, liées à des actions de parrainage ou de recrutement.
- Vente « à la sauvette » : commercialisation en marge des circuits légaux, souvent accompagnée d’offres alléchantes.
- Usage de faux bons de commande : pour obtenir indûment des commissions.
- Usage de faux bilans : dans le cadre de la vente de fonds de commerce.
- Traités de cavalerie : émission de traites sans couverture financière, reposant sur des acceptations fictives.
- Escroquerie à l’espagnole, aux bonnes œuvres, aux annonces, au cautionnement : diverses stratégies exploitant la crédulité ou la bonne volonté des victimes.
- Escroquerie à l’assurance : simulation d’incidents pour percevoir des indemnisations.
- Bonneteau : jeu d’adresse servant de couverture à des pratiques frauduleuses.
- Escroqueries spécifiques comme l’escroquerie à l’américaine, aux napolitains, à la trouvaille, la carambouille, aux courses, au fakir, au mariage : chacune exploitant des situations particulières pour tromper la victime.
- Filouterie dans l’hôtellerie ou la restauration : non-paiement de prestations en profitant des services.
Quelques exemples de tromperies ou de manœuvres qualifiées d’escroquerie
Les tribunaux français ont traité plusieurs affaires d’escroquerie notables au fil des ans, reflétant une gamme variée de méthodes et d’impacts sur les victimes et l’économie. Voici quelques exemples d’affaires d’escroquerie avec des détails sur leur résolution judiciaire.
En France :
- L’escroquerie à la TVA sur le marché du carbone
- Description : Une fraude massive à la TVA sur le marché des droits d’émission de CO2, qui a coûté environ 1,6 milliard d’euros au Trésor français entre 2008 et 2009.
- Date du jugement : Plusieurs jugements ont été rendus dans le cadre de cette affaire. Par exemple, en décembre 2017, le tribunal correctionnel de Paris a condamné 10 personnes à des peines allant jusqu’à 8 ans de prison ferme et à des amendes de plusieurs millions d’euros.
- L’affaire Kerviel
- Description : Jérôme Kerviel, un ancien trader de la Société Générale, a été accusé d’avoir engagé la banque dans des opérations boursières risquées sans autorisation, entraînant une perte de 4,9 milliards d’euros en 2008.
- Date du jugement : En mars 2014, la Cour de cassation a confirmé la condamnation de Kerviel à trois ans de prison ferme mais a annulé les dommages et intérêts de 4,9 milliards d’euros qu’il avait été initialement condamné à payer à la Société Générale.
- L’arnaque aux faux placements de la société Aristophil
- Description : Aristophil était une société qui invitait les gens à investir dans des lettres et manuscrits rares, promettant des rendements élevés. La société a été liquidée en 2015, révélant une escroquerie où près de 18 000 investisseurs ont perdu environ 700 millions d’euros.
- Date du jugement : En septembre 2021, le fondateur d’Aristophil, Gérard Lhéritier, et quatre autres personnes ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Paris pour répondre d’accusations d’escroquerie en bande organisée, blanchiment, et pratique commerciale trompeuse.
- L’affaire des « faux Le Drian »
- Description : Cette escroquerie, menée entre 2015 et 2016, impliquait des individus se faisant passer pour Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, pour convaincre des personnalités fortunées et des institutions à transférer de l’argent prétendument pour financer des opérations secrètes de l’État français.
- Date du jugement : En février 2020, le tribunal correctionnel de Paris a condamné les deux principaux accusés à des peines de prison et à payer des millions d’euros de dommages et intérêts aux victimes.
A l’international
- L’affaire Bernard Madoff (États-Unis)
- Description : Bernard Madoff a été l’auteur de la plus grande fraude pyramidale (Ponzi) de l’histoire, avec des pertes estimées à environ 65 milliards de dollars.
- Date du jugement : Le 29 juin 2009, Madoff a été condamné à 150 ans de prison.
- L’escroquerie Theranos (États-Unis)
- Description : Elizabeth Holmes, fondatrice de Theranos, a été accusée d’avoir menti aux investisseurs, aux autorités réglementaires et au public sur la capacité de sa société à effectuer des tests sanguins rapides et précis avec juste quelques gouttes de sang.
- Date du jugement : Elizabeth Holmes a été reconnue coupable de fraude en janvier 2022. Sa condamnation a été prononcée le 17 novembre 2022, où elle a reçu une peine de plus de 11 ans de prison.
- L’affaire OneCoin (International)
- Description : OneCoin a été une des plus grandes escroqueries de cryptomonnaie, présentée comme une monnaie numérique révolutionnaire mais qui était en réalité une fraude pyramidale.
- Date du jugement : Plusieurs personnes impliquées ont été jugées à des moments différents. Par exemple, Konstantin Ignatov, le frère de la fondatrice Ruja Ignatova, a plaidé coupable en novembre 2019. Ruja Ignatova reste en fuite et figure sur la liste des dix fugitifs les plus recherchés par le FBI depuis 2022.
La répression contre l’escroquerie
L’escroquerie, définie comme un délit dans le cadre du droit pénal français, peut être imputée tant aux personnes physiques qu’aux personnes morales. Cette infraction se voit attribuer une sanction de base de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende, ce qui la positionne comme étant plus sévèrement punie que le vol simple. Toutefois, la législation prévoit des circonstances aggravantes pouvant entraîner une augmentation des peines.
Les circonstances aggravantes de l’escroquerie sont notamment identifiées dans quatre hypothèses spécifiques, dont une est l’escroquerie réalisée par appel public pour l’émission de titres ou la collecte de fonds à but humanitaire ou social. Les notions d’« émission » et de « titres » sont interprétées de manière extensive, sans considération pour la méthode employée (publicité mensongère, publication de comptes annuels inexacts, etc.). De plus, l’escroquerie commise au préjudice d’une personne vulnérable est expressément reconnue comme circonstance aggravante, soulignant le lien avec l’abus de faiblesse.
- Conséquences des circonstances aggravantes : La présence de circonstances aggravantes entraîne l’augmentation des peines encourues, avec un emprisonnement porté à sept ans et une amende élevée à 750 000 euros.
- Peines complémentaires pour les personnes physiques : Outre les sanctions principales, des peines complémentaires peuvent être imposées aux individus, telles que l’interdiction d’émettre des chèques ou de participer à des marchés publics pour une durée pouvant aller jusqu’à cinq ans, ainsi que des restrictions professionnelles spécifiques.
- Sanctions applicables aux personnes morales : Les entités juridiques reconnues coupables d’escroquerie, qu’elle soit simple ou aggravée, sont sujettes à une amende quintuplée par rapport à celle des personnes physiques, en plus de peines spécifiques adaptées à leur statut.
Question fréquentes : Définition et éléments constitutifs de l’escroquerie
L’escroquerie, définie par l’article 313-1 du Code pénal, repose sur l’utilisation d’un faux nom, de fausses qualités, l’abus d’une qualité vraie, et les manœuvres frauduleuses pour obtenir frauduleusement un bien. Elle nécessite une tromperie active, où l’escroc induit la remise d’un bien par la victime, souvent à travers une mise en scène complexe ou l’exploitation de sa position de confiance. Cette infraction peut se manifester de diverses manières, incluant l’usage de faux documents, l’intervention de tiers, ou encore la simulation d’une situation pour légitimer le mensonge.
Qu’est-ce que l’escroquerie selon le Code pénal français ?
L’escroquerie est définie comme l’acte par lequel une personne obtient frauduleusement la remise d’un bien ou d’une valeur, à travers une tromperie. Selon l’article 313-1 du Code pénal, elle est caractérisée par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, l’abus d’une qualité vraie, et l’emploi de manœuvres frauduleuses.
Comment l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité constitue-t-il une escroquerie ?
L’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité dans le cadre de l’escroquerie implique un mensonge sur l’identité ou les attributs personnels/professionnels de l’escroc. Que le nom soit fictif ou usurpé, ou que la qualité prétendue soit professionnelle ou statutaire, cela suffit à caractériser l’escroquerie si cela a induit la victime à remettre un bien.
Qu’est-ce que l’abus d’une qualité vraie en matière d’escroquerie ?
L’abus d’une qualité vraie se réfère à l’exploitation abusive d’une position de confiance ou d’autorité réelle par l’escroc pour induire en erreur et obtenir la remise d’un bien. Cela concerne souvent des professionnels qui détournent leur rôle légitime à des fins frauduleuses.
Quelles actions sont considérées comme des manœuvres frauduleuses dans le contexte de l’escroquerie ?
Les manœuvres frauduleuses impliquent une action concrète et une mise en scène élaborée visant à tromper la victime pour obtenir la remise d’un bien. Cela peut inclure l’utilisation de faux documents, l’intervention de tiers pour renforcer la crédibilité de l’escroc, ou toute autre stratégie complexe destinée à légitimer le mensonge.
Un simple mensonge est-il suffisant pour caractériser une escroquerie ?
Non, un simple mensonge, qu’il soit verbal ou écrit, ne constitue pas en soi une escroquerie sans l’appui d’éléments matériels extérieurs renforçant la tromperie. L’escroquerie exige une mise en œuvre d’actes positifs de manipulation ou de mise en scène.