État de droit, démocratie, séparation des pouvoirs en Belgique

État de droit, démocratie, séparation des pouvoirs en Belgique

La constitution n’est pas un manifeste politique.

Votée par le Congrès national, la Constitution belge est la règle fédératrice de l’État; c’est un ensemble de règles de droit qui définissent le statut des pouvoirs dans l’État, les rapports de ceux-ci entre eux et avec les individus. On peut dégager de la Constitution certains des principes politiques ou philosophiques qu’elle a entendus consacrer juridiquement.

Impact des art. 33, 34 et 35 de la Constitution.

1. l’État de droit en Belgique

Au XIXe siècle, on entendait par État de droit que les pouvoirs publics devaient avant tout (et dans la mesure du possible seulement) veiller au respect des droits des individus et des citoyens vivant dans l’État. Non seulement ces droits devaient être reconnus mais ils devaient être respectés dans le cadre d’institutions judiciaires et gouvernementales indépendantes et elles-mêmes soumises au droit (c’est-à-dire notamment à des contrôles juridictionnels, administratifs et politiques).

La Constitution belge a mis ces principes en oeuvre en garantissant aux Belges mais aussi dans une large mesure aux étrangers vivant en Belgique (art. 191 de la Constitution) des droits fondamentaux.

  • égalité devant la loi et non discriminatoire (art. 10 et 11 de la Constitution)
  • liberté et sécurité individuelles (art. 12 et 14 de la Constitution)
  • liberté d’opinion (art. 19 de la Constitution)
  • liberté des cultes (art. 19, 20, 21 de la Constitution)
  • liberté de l’enseignement (art. 24 de la Constitution)
  • liberté de la presse (art. 25 de la Constitution)
  • liberté de réunion, de manifestation (art. 26 de la Constitution)
  • liberté d’association (art. 27 de la Constitution)
  • liberté de l’emploi des langues (art. 30 Const)
  • le droit de propriété ne figure pas parmi les libertés expressément reconnues par la Constitution. Cependant, celle-ci prévoit qu’aucune expropriation ne peut avoir lieux que pour cause d’utilité publique et moyennant le paiement préalable d’une juste indemnité (art. 16 de la Constitution)
  • l’article 13 de la Constitution garantit qu’en aucun cas on ne puisse faire l’objet d’un procès dans une institution de jugement non prévue par la loi.

Telle est la physionomie de l’État de droit belge en 1831. Depuis, de nouveaux textes constitutionnels ont été adoptés:

  • l’article 22 de la Constitution garantit désormais le droit à la vie privée et familiale
  • l’article 23 de la Constitution protège les droits économiques, sociaux et culturels
  • l’article 10, alinéa (égalité des femmes et des hommes), et l’article 11bis.
  • L’article 14bis qui abolit la peine de mort

Il faut aussi noter que l’interprétation par les juridictions de l’ensemble des textes constitutionnels et une série de lois ont largement étendu la signification des textes adoptés en 1831 au point qu’aujourd’hui, plutôt que de qualifier la Belgique d’État de droit libéral, il faudrait parler d’un État de droit économique et social.

  1. Signature à Rome, le 4 novembre 1950 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et approuvé par la loi du 13 mai 1955 (—> fait partie du droit belge).
  2. Lois qui ont reconnu certaines libertés syndicales, libertés touchant à la protection du travail, de la santé, de l’éducation (libertés – créances).

Voyez aussi l’article 7bis de la Constitution et la poursuite des objectifs de « développement durable »

Au 19ème siècle, on entendait par État de droit que les pouvoirs publics devaient avant tout veiller au respect des droits des individus et des citoyens vivant dans l’État. Ces droits devaient être reconnus mais aussi respectés dans le cadre d’institutions judiciaires et gouvernementales indépendantes et elles-mêmes soumises au droit, C’est à dire à des contrôles juridictionnels, administratifs et politiques.

La constitution belge a mis ces principes en œuvre en garantissant aux belges mais aussi dans une large mesures aux étrangers vivant sur le territoire belge des droits fondamentaux :

  • Égalité devant la loi et non discrimination
  • Liberté et sécurité individuelles
  • Liberté d’opinion
  • Liberté des cultes
  • Liberté des enseignements
  • Liberté de la presse
  • Liberté de réunion, de manifestation
  • Liberté d’association
  • Liberté de l’emploi des langues
  • Le droit à la vie privée et familiale
  • Les droits économiques, sociaux et culturels

Le droit au développement durable n’est pas un droit fondamental. On ne le garantit pas comme tel mais on dit que toutes les autorités publiques doivent faire tout pour rencontrés les objectifs de développement durable.

L’État de droit est garanti par la constitution et d’autre textes de droit publique. Toute institution publique doit respecter les lois. « État de droit » n’apparaît jamais textuellement dans notre constitution dans laquelle il n’y a de place pour de mots théoriques ni de grandes déclarations.

2. La démocratie

L’État de droit se doit de garantir à tous les citoyens la protection des droits politiques. Cela implique que tous les citoyens participent par le biais du droit de vote à la désignation de certains des organes du pouvoir (en Belgique, le pouvoir législatif – le pouvoir décrétal communautaire et régional – le conseil provincial – le conseil communal). Tous les citoyens électeurs prennent part non pas à l’exercice du pouvoir mais à la désignation de ceux qui l’exercent et indirectement, en raison de la périodicité des élections, au contrôle de cet exercice. La démocratie entend aussi que tous les citoyens puissent accéder aux fonctions publiques (administration – magistrature) dès l’instant où ils remplissent les conditions déterminées par la loi de façon générale et abstraite.

Ils doivent être éligibles dans le respect des conditions prescrites par la Constitution et par la loi.

Les autres droits politiques (le droit de payer l’impôt – le droit de prester un service civil ou militaire) doivent pouvoir être exercés par l’ensemble des citoyens.

Le droit de vote est garanti par la loi du 28 mars 1948 à tous les citoyens belges, hommes et femmes. Depuis le 28 juillet 1981, il est reconnu dès l’âge de 18 ans accomplis (art.61 de la Constitution). Chaque citoyen n’a droit qu’à un vote (suffrage universel uninominal).

Il est certain que l’instauration du suffrage universel uninominal a favorisé l’expansion de la démocratie en contribuant à la création de partis politiques, à l’existence de groupes de pression susceptibles d’organiser collectivement les revendications politiques.

En Belgique, le droit de vote implique que tous citoyens participent à la désignation de certains des organes du pouvoir (législatif, communautaire, régional, provincial et communal). Ainsi les citoyens prennent part à la désignation de ceux qui exercent le pouvoir mais aussi au contrôle du pouvoir.

Ce droit de vote est garanti par la loi belge du 28 mars 1948 à tous les citoyens belges, hommes et femmes. Depuis le 28 juillet 1981, il est reconnu dès l’âge de 18 ans accomplis.

3. La séparation des pouvoirs

La philosophie libérale du XIXè s. A associé l’État de droit à un principe d’organisation des pouvoirs inspiré par la philosophie anglaise du XVIIè s. (John Locke) ou française du XVIIIè s.(Montesquieu) et dénommé la séparation des pouvoirs.

Partant de l’idée que trois fonctions doivent être assurées dans l’État (la fonction normative, la fonction gouvernementale, la fonction juridictionnelle), ce courant de pensée suggère que chacune d’elles soit exercées par des autorités (des pouvoirs) distincts : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif, le pouvoir judiciaire. Cependant, la séparation de ces pouvoirs n’implique pas qu’ils s’ignorent. Au contraire, il faut que la Constitution et la loi organisent un contrôle de chacun par les autres.

En Belgique, le Titre III de la Constitution traite des pouvoirs dans l’ordre suivant; le pouvoir législatif, fédéral – le Roi et le gouvernement fédéral – les communautés et les régions – le Cour constitutionnelle – le Conseil d’État – le pouvoir judiciaire – les institutions provinciales et communales.

La constitution belge n’a pas instauré un système de stricte séparation.

Ex: Il y a en communauté flamande et dans les communes à facilité des écoles financée par la communauté flamande qui fonctionnent selon le programme francophone. La communauté flamande a décidé de dépêcher des inspecteurs flamands afin de contrôler la qualité de l’enseignement, ce qui a créé un problème communautaire. Cela montre que les pouvoirs ne s’ignorent pas malgré leur séparation.

4. La structure constitutionnelle de l’État belge : de l’unitarisme au fédéralisme.

  1. En 1831, le Constituant belge a opté pour un compromis entre le mouvement de centralisation caractérisant l’État du XIXè s. Et le souci de respecter l’autonomie provinciale et communale. Il met en place les principes d’une décentralisation politique en créant les collectivités politiques suivants: les provinces et les communes (art. 4 à 7 de la Constitution). La Constitution reconnaît à ces collectivités politiques la personnalité juridique, des institutions propres (art. 41 et 62 de la Constitution) des attributions propres (art. 41, 162 et 164 de la Constitution). Es attributions sont exercées selon le principe de l’autonomie, sous réserve cependant des contrôles de tutelle exercés par les régions. (voy. Toutefois le statut particulier du territoire de la Région de Bruxelles-Capitale qui devient, depuis la scission de la province de Brabant, une zone hors provinces) (modifications apportées dans la loi provinciale).

Rem: Statut des tutelles spécifiques.

La structure constitutionnelle de l’état belge a évolué de manière progressive, sans révolutions (comme en France par exemple). Depuis 1830, nous n’avons eu qu’une seule constitution, même si elle a été révisée à plusieurs reprises. Par comparaison, la France a connus beaucoup de constitutions en peu de temps, à cause de changements de régime. La Belgique a été créée comme monarchie constitutionnelle et l’est toujours. Le Roi est chef de l’État et détient ses pouvoir de la Constitution.

En 1831, le principe de l’unitarité de l’état belge est adopté. Tout était dirigé à un seul niveau mais les gouvernant se sont rendu compte qu’il n’était pas facilement possible de tout gérer en ce centre. Il y a donc eu un phénomène de décentralisation du pouvoir; de plus petits collectivités vont pouvoir exercer certains pouvoirs sous contrôle du centre. (Cela équivaut à la création des communes et des provinces).

De nos jours une distinction qui n’existait pas en 1831 est faite entre les contrôles de tutelle ordinaires et spécifiques.

Tutelles ordinaires: dépend des régions car entrant dans leur compétences.

Tutelles spécifiques: exercée par l’organisme compétant en ces matières. (Ex: tout ce

qui concerne le mariage subit une tutelle de l’état fédéral, les écoles francophones sont sous tutelle de la communauté française,…)

  1. En 1970 et en 1980, le Constituant a opté pour une autre technique de répartition des pouvoirs, qu’il a aménagée en partie et sans supprimer la première.

C’est la technique de répartition qui, s’inspirant du fédéralisme, attribue à des collectivités politiques (les communautés (art. 38 et 127 à 130 de la Constitution) et les régions (art. 3 et 39 de la Constitution) des attributions propres qu’elles exercent à l’exclusion de toute autre collectivité, par l’intermédiaire d’institutions qui leur sont propres (les Conseils ou Parlements de Communauté et les Conseils ou Parlements régionaux aussi que leurs Gouvernements respectifs) et sans qu’il soit exercé de contrôle de tutelle. Le seul contrôle est de nature juridictionnel, a posteriori, et opéré par la Cour constitutionnelle (art. 142 de la Constitution) si l’une ou l’autre des collectivités politiques communautaires, régionales ou nationales n’a pas respecté les règles de compétence matérielle ou territoriale établies par la constitution.

Sans abandonner la technique de décentralisation, l’État belge connais une deuxième phase de son évolution avec en cause les tensions entre les communautés avec entre autre, les problèmes de langue.

La Constitution traite du problème. La Flandre était la région la plus pauvre de Belgique et exclusivement agricole alors que la Wallonie profitait de l’essor de l’industrialisation et de l’extraction du charbon. Un autre motif intervient dans ces tensions, celui de la possession des terres flamandes par des francophones et en découle, le pouvoir est essentiellement dans des mains francophones. (La première université qui dispensait des cours en Flamand a été ouverte en 1930). Autre exemple, les juges siégeaient en français et les jugements était rendus dans cette même langue jusqu’en 1935. Il y a donc des cas d’incompréhension.

Les flamands ont donc fini par demander une reconnaissance d’autonomie culturelle et obtiennent en 1970 que l’on modifie la constitution qui fait état de la création de 3 communautés avec des compétences culturelles.

De nos jours, la Wallonie subit un revers économique. La situation belge s’est donc inversée, et la Constitution modifiée pour créer trois régions, wallonne, flamande et Bruxelles-Capitale, et leur donner les compétences économiques. Il y a aussi une modification qui concerne la manière dont les lois sont votées. Il faudra 10 ans (de 1970 à 1980) pour que la première loi spéciale de réforme soit adoptée définissant les compétences des 3 communautés et des deux régions (Bruxelles-Capitale n’avais pas encore été créée).

  1. Une « troisième étape » intervient dans la réforme de l’État belge par les réformes constitutionnelles adoptées en juillet 1988.

Le 8 août 1988 des modifications sont apportées à la loi spéciale de 8 août 1980 relative aux Communautés française et flamande ainsi qu’aux Régions wallonne et flamande.

Le 12 janvier 1989 est sanctionnée la loi spéciale relative aux institutions bruxelloises, en application de l’article 107quater de la Constitution. Des modification importantes sont apportées par la loi spéciale du 6 janvier 1989 relative à la Cour d’arbitrage concernant les compétences, l’organisation et le fonctionnement de la juridiction constitutionnelle belge.

Le 12 janvier 1989, les compétences de la région Bruxelles-Capitale vont être établies par lois spéciales avec réserves: les règles de droits seront des ordonnances. Quatre jours plus tard la loi spéciale concernant le financement sera votée.

La structure constitutionnelle de l’État:

Organe délibérantOrgane exécutif
Niveau ConstitutionnelPouvoir constituantCour constitutionnelle (+ recours individuels : Titre II de la Const. et art. 170, 172 et 191).
Niveau fédéral

Pouvoir législatif fédéral (Chambre + Sénat + Roi)Gouvernement fédéral (Roi + gouvernement)
Niveau régional

Parlement flamand

Parlement wallon

Parlement bruxellois

Gouvernement flamand

Gouvernement wallon

Gouvernement bruxellois

Niveau Communautaire*Parlement Flamand

Parlement de la Communauté française

Parlement de la Communauté germanophone

Gouvernement flamand

Gouvernement de la Communauté française

Gouvernement de la Communauté germanophone

Niveau provincialConseil provincialGouverneur + Députation permanente
Niveau CommunalConseil CommunalCollège des bourgmestres et échevins
  • Structuration unitaire: contrôle de tutelle ordinaire ou spécifiques
  • Structuration fédérale: contrôle juridictionnel de constitutionnalité.

(*) Statut et compétences de l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune et du Collège réuni institués dans la Région de Bruxelles-Capitale pour exercer certaines compétences communautaires.