La fin du Moyen-âge
Le Moyen Âge tardif ou période médiévale tardive est la période de l’histoire européenne qui s’étend de 1250 à 1500. Le Moyen Âge tardif a suivi le Haut Moyen Âge et a précédé le début de la période moderne (et dans une grande partie de l’Europe, la Renaissance).
Vers 1300, des siècles de prospérité et de croissance en Europe se sont arrêtés. Une série de famines et de pestes, dont la grande famine de 1315-1317 et la peste noire, ont réduit la population à environ la moitié de ce qu’elle était avant ces calamités. La France et l’Angleterre connaissent de graves soulèvements paysans, comme la Jacquerie et la révolte des paysans, ainsi que plus d’un siècle de conflits intermittents, la guerre de Cent Ans. Pour ajouter aux nombreux problèmes de l’époque, l’unité de l’Église catholique a été temporairement brisée par le schisme occidental. Collectivement, ces événements sont parfois appelés la Crise du Moyen Âge tardif.
Malgré les crises, le XIVe siècle est aussi une période de grands progrès dans les arts et les sciences. À la suite d’un regain d’intérêt pour les textes grecs et romains antiques qui s’est enraciné dans le Haut Moyen Âge, la Renaissance italienne a commencé. L’absorption de textes latins avait commencé avant la Renaissance du 12e siècle grâce au contact avec les Arabes pendant les croisades, mais la disponibilité d’importants textes grecs s’est accélérée avec la prise de Constantinople par les Turcs ottomans, lorsque de nombreux érudits byzantins ont dû se réfugier en Occident, notamment en Italie.
À cet afflux d’idées classiques s’est ajoutée l’invention de l’imprimerie, qui a facilité la diffusion du mot imprimé et démocratisé l’apprentissage. Ces deux éléments conduiront plus tard à la Réforme protestante. Vers la fin de la période, l’âge des découvertes commence. L’expansion de l’Empire ottoman a coupé les possibilités de commerce avec l’Est. Les Européens ont été contraints de chercher de nouvelles routes commerciales, ce qui a conduit à l’expédition espagnole de Christophe Colomb vers les Amériques en 1492 et au voyage de Vasco de Gama en Afrique et en Inde en 1498. Leurs découvertes ont renforcé l’économie et le pouvoir des nations européennes.
Les changements apportés par ces développements ont conduit de nombreux chercheurs à considérer cette période comme la fin du Moyen Âge et le début de l’histoire moderne et du début de l’Europe moderne. Toutefois, cette division est quelque peu artificielle, car le savoir ancien n’a jamais été totalement absent de la société européenne. Par conséquent, il y a eu une continuité de développement entre l’âge antique (via l’antiquité classique) et l’âge moderne. Certains historiens, en particulier en Italie, préfèrent ne pas parler du Moyen Âge tardif, mais plutôt considérer que la période haute du Moyen Âge est une transition vers la Renaissance et l’époque moderne.
1520-1530, un tournant dans l’histoire de l’Europe
- En avril 1521, Luther défie le Saint Empereur Charles Quint en refusant de se rétracter devant l’excommunication.
- Cortès a conquis le Mexique.
- Les Turcs ont pris la Hongrie et s’apprêtent à assiéger Vienne
- Henri VIII maintient sa volonté de divorcer ce qui engendrera la naissance de l’Église anglicane
- Les troupes de Charles Quint4 s’enfoncent en Italie et mettent Rome à sac.
Cette période 1520-1530 est donc un tournant crucial dans l’histoire de l’Europe, mettant fin définitivement au Moyen-Âge et la faisant entrer dans la modernité : les débuts de la Réforme, la première grande conquête coloniale européenne, une nouvelle guerre entre la Chrétienté et l’Islam, les bases des États séculiers et la fin de la Renaissance italienne.
1 – LA RÉFORME
Le 31 octobre 1517, Luther publie ses thèses de Wittenberg destinée à s’opposer aux indulgences prononcées par le pape Léon X. Pourtant, à ses débuts, Luther n’est pas réellement un opposant au Vatican. En 1510-1511 : pas de discours anti-papiste à mais Luther conteste en fait beaucoup la question des indulgences, une pratique incompatible avec la piété et un détournement des questions de foi. En juin 1520, Rome publie une bulle le menaçant d’excommunication, tandis que ses livres sont brûlés. Luther réagit avec la même violence, brûlant à la fois la bulle papale et le droit canonique. L’excommunication, désormais inévitable, est prononcée le 3 janvier 1521. Luther refuse à nouveau de se rétracter, s’estimant soumis à l’autorité de la Bible plutôt qu’à celle de la hiérarchie ecclésiastique. L’édit de Worms décide alors de mettre Martin Luther et ses disciples au ban de l’Empire. Toutefois, il dispose de divers appuis (le landgrave de Hesse et le prince électeur de Saxe Frédéric III le Sage). La Réforme commence alors à se répandre dans les principautés voisines, créant un embryon d’unité allemande. Charles Quint, pris dans des guerres contre la France, accorde aux princes la liberté d’imposer la religion de leur choix dans leurs États (cujus regio, ejus religio). Il y a un jeu politique extrêmement important de la Réforme sur l’unité politique allemande, puisqu’elle sert les intérêts des Princes dans leur opposition au pouvoir central mais aussi dans leur autorité intérieure. La diète de Spire d’avril 1529 marque l’opposition entre Charles Quint et une bonne partie de l’Empire, qui protestent6 contre la manière dont il gouverne. À l’occasion de la diète d’Augsbourg (1530), le premier successeur de Luther lit la Confession d’Augsbourg qui développe les 26 principes de la Réforme mais aussi les conditions d’équilibre politique entre les princes et l’Empereur.
2 – CORTÈS ET LA CONQUÊTE DU MEXIQUE
Hernán Cortés est né en 1485 et décède le 2 décembre 1547. Il participe à la conquête d’Hispaniola et de Cuba puis, à partir de 1517, suit des troupes dans des expéditions dans le Yucatan, soldées par de rudes défaites pour les Espagnols. En 1519, Cortés passe un accord avec le gouverneur de Cuba et prend alors la tête d’une exploration en Amérique centrale. Le 4 mars 1519, il débarque à Veracruz et rencontre une peuplade locale ainsi que les ambassadeurs de Moctezuma II, l’empereur aztèque. Il prend alors connaissance de l’existence de l’empire aztèque et est marqué par la légende du dieu Quetzalcóatl et de l’homme d’or. Il prend possession de la région au nom de Charles Quint et lui envoie un navire chargé de tout l’or récolté jusqu’à présent. L’empire aztèque se fiait jusqu’ici à l’intimidation face à ses opposants et laissait les dirigeants locaux en place. Cortés sut utiliser cette situation pour s’assurer un appui important dans sa politique de conquête : il s’allia rapidement avec une tribu locale, les Totonac, puis avec les Tlaxcaltec. C’est donc une armée de plus de 2.000 hommes qui marche alors sur la capitale, Tenochtitlan. Le 8 novembre 1519, Cortés arrive à Tenochtitlan. L’empereur Moctezuma l’accueille avec tous les honneurs. Tenochtitlan est une énorme cité – île de 200.000 habitants : sa particularité est d’être connectée à la terre par trois gigantesques ponts. Sentant les relations s’envenimer, Cortés décide de s’emparer de la ville : il capture Moctezuma et le contraint à diriger en sa faveur. Le gouverneur de Cuba, apprenant comment Cortés manoeuvre pour se soustraire à son autorité, dépêche une flotte de 800 soldats et leur donne l’ordre de capturer ce traître. Apprenant cela, Cortés se rend à leur rencontre et les défait.
Pendant ce temps, Tenochtitlan s’est révolté. Cortés revient alors sur la capitale le 24 juin, avec cette fois 1.300 soldats espagnols et 2000 combattants tlaxcaltecs. Les Aztèques vont alors réussir à couper les ponts, et les Espagnols sont faits prisonniers ; Cortés et menace de tuer l’empereur, mais une émeute éclate et c’est la foule elle-même qui tue son monarque ! Le 30 juin, en pleine nuit et sous des pluies torrentielles, Cortés tente une sortie en comblant les ponts brisés mais son stratagème est découvert et seulement 440 Espagnols parviennent à s’échapper. Un nouvel empereur est élu : Cuitlahua. Une nouvelle menace frappe aussi les Aztèques à partir de la seconde moitié de 1519 : la variole. Elle tue 40 % de la population en un an, dont l’empereur Cuitlahua. Son successeur est Cuauhtémoc, élu au début 1520. De nouvelles composantes du royaume vont se joindre à lui pour se débarrasser de la domination aztèque. Le 28 avril 1521, Cortés attaque Tenochtitlan avec 900 Espagnols et entre 20.000 et 30.000 indiens. Cortés manque d’être capturé, ne devant son salut qu’au sacrifice de l’un de ses lieutenants. Cortés, formidable leader politique et militaire l’emporte le 13 août 1521.
La victoire de Cortés va ouvrir définitivement les portes de l’Amérique à l’Espagne. Il n’y a plus de pouvoir au Mexique capable de s’opposer, et les Incas vont commencer à céder. Pour les Européens, cela montre que personne sur la planète ne peut désormais leur résister : la vague de colonisation et de soumission du reste du monde commence là.
Si Cortés meurt le 30 juin 1521 ? L’Empire aztèque survit et pour l’Europe les choses changent, car il y a désormais un monde avec lequel il faut négocier. La politique de colonisation du Mexique n’est alors plus possible; si l’empire aztèque a survécu, la colonisation n’est plus la même, et ses conséquences aussi.
3 – LE SAC DE ROME
Les troupes de Charles Quint venaient de vaincre leur ennemi principal : la France. Charles Quint obtient de François Ier le traité de Madrid, dans lequel la France renonce à toutes prétentions sur le nord de l’Italie. L’Italie leur est alors ouverte. Les armées de Charles Quint traversent les Alpes en 1526 et cherchèrent de l’artillerie auprès de la famille d’Este, ceux-ci étant en rivalité avec la Papauté (le pape étant un Médicis). En novembre 1526, le dernier commandant militaire des Médicis, Giovanni de Médicis, est tué lors d’une escarmouche avec les troupes impériales. Le pape Clément VII s’allie alors avec François Ier pour espérer contrer les troupes de Charles Quint, mais le roi de France n’interviendra pas.
Le 6 mai 1527, les troupes impériales se lancent à l’assaut de Rome et enfoncèrent rapidement les défenses romaines, misérablement organisées et commandées. Le pape parvient à fuir mais Rome est livré au pillage : les tombes des papes sont violées, tous les objets de valeurs pris dans les églises et environ 12.000 Romains furent tués. Ce fut la destruction d’une vie artistique majeure, des trésors culturels et religieux inestimables perdus à jamais, la fuite dans toute l’Europe d’artistes, de savants, de nobles. Rome et son pouvoir ne seront plus jamais les mêmes, et parallèlement de nouvelles puissance culturelles et politique émergeront en Europe de ce sac, notamment la cour de France ou Venise.
Ce même mois de mai 1527, c’est aussi « The King’s Great Matter » (Grande affaire du Roi). La reine d’Angleterre Catherine d’Aragon apprend de son époux, Henri VIII, qu’il demande le divorce car elle ne lui donne pas d’héritier.. Cela constituait donc a priori un bon motif religieux pour divorcer, sauf que le pape Clément VII est depuis ce printemps 1527 sous le contrôle du neveu de Catherine d’Aragon, Charles Quint : autant dire que la décision papale n’arrivait pas, et n’arriverait sûrement jamais. Aussi, Henri VIII rompt avec le Pape et prononce son divorce en 1531, puis se proclame chef de l’Église anglicane en 1534. La Réforme triomphe et avec elle toute cette nouvelle société du nord de l’Europe qui fera naître la modernité en avançant l’individu contre le collectif.
4 – SOLIMAN LE MAGNIFIQUE, LA BATAILLE DE MOHÁCS ET LA CONQUÊTE DE VIENNE
L’Empire ottoman est fondé en 1299 par une tribu turque, les Oghouz1, ouvrant ainsi une nouvelle ère de conquête pour l’Islam. En 1389, les Ottomans du sultan Mourad Ier défont les armées des royaumes albanais et serbes à la bataille du champ des merles. Finalement, Constantinople tombe dans le camp de l’Islam en 1453. L’Empire ottoman de l’époque est un empire vaste et cosmopolite qui comprend aussi des Musulmans, des Juifs, des Chrétiens… Au XVème siècle, le sultan obtiendra le titre de calife, lui donnant ainsi autorité sur l’ensemble des musulmans. Il va connaître son apogée au début du XVIème siècle, sous le règne de Soliman, dit le Magnifique. Soliman devient sultan en 1520 et se lance rapidement dans des conquêtes territoriales : en 1521, il conquiert la Serbie ; en 1522, il prend l’île de Rhodes. Il se lance alors vers une conquête de l’Europe centrale. Géographiquement, Vienne constitue un point de passage obligé dans une conquête de l’Europe centrale et orientale. Charles Quint, lancé dans sa conquête de Rome, est obligé de composer avec les princes électeurs qui se rebellent autour du protestantisme. Soliman est capable de rallier certains princes du Saint Empire qui préféreront s’allier aux Turcs qu’à l’Empereur, et la menace de l’invasion les oblige de toute façon à faire un choix.
Le 29 août 1526, Soliman défait les troupes du roi Louis II de Hongrie à Mohács (30.000 soldats européens massacrés dont le roi Louis II et une bonne partie de l’aristocratie hongroise). Ferdinand de Habsbourg, frère de Charles Quint, revendique ce qui reste de la couronne de Hongrie contre Jean Zápolya. Soliman, victorieux, place Jean Zápolya sur le trône, ce dernier acceptant de se constituer vassal de Soliman. Mais ce n’est que 3 ans plus tard, le 10 mai 1529, le sultan quitte Constantinople avec une armée composée d’environ 75.000 hommes. C’est le temps qui va jouer contre Soliman et ses troupes (été très humide, averses torrentielles…). C’est avec beaucoup de retard, et sans canons qu’ils parviennent à Vienne le 27 septembre 1529. Sans sa puissante artillerie, les troupes ottomanes sont incapables de faire tomber la cité et s’épuisent dans plusieurs assauts. Finalement, le 12 octobre 1529, Soliman se retire et ne cherchera plus à prendre la cité. Cette victoire des Européens sur les Ottomans va marquer la limite de l’expansion des sultans en Europe orientale et centrale.
Et si Soliman avait bénéficié d’un temps plus clément ? Il aurait pu profiter d’un contexte politique largement favorable. Les Habsbourg sont en effet une famille largement honnie dans toute l’Europe ; aussi, en 1526, la Papauté + la France + plusieurs principautés italiennes ont formé la ligue de Cognac. Or Venise et la France feront alliance avec l’Empire Ottoman. Il semble tout à fait probable qu’avant 1530, la ligue de Cognac aurait passé des accords avec l’Empire ottoman contre les Habsbourg, surtout si les armées du Sultan avaient continué leur avancée sitôt après leur victoire à Mohács. Cependant, repousser la menace ottomane dans cette décennie cruciale permet à la Réforme de survivre car elle montre que même religieusement divisés, les Européens restent des chrétiens capables de s’opposer aux musulmans.