Les modalités de la formation de l’État et de sa reconnaissance

La Formation de l’Etat

La naissance d’un État est une question de Fait. Le droit International ne fixe ni ne limite le nombre des États et le droit international ne contient pas non plus de règles concernant leur naissance. Le critère juridique essentiel qui gouverne la naissance d’un État, est celui de son effectivité.

  • a) Les Modalités de la formation d’un Etat.

Il existe plusieurs faits juridiques à l’origine de la naissance d’un État :

La décolonisation et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. La grande vague de décolonisation postérieure à 1945 a amené les Nations-Unies à affirmer le droit à la Décolonisation et plus particulièrement, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes que l’on retrouve aux Art 1 par 2 et 55 de la Charte des Nations-Unies. Ce principe ne se limite pas à la décolonisation puisqu’il est revenu en Europe avec la chute du système soviétique. Ce principe est également à la base de la réunification de l’Allemagne. En 1960 a été adoptée la « Résolution 15/14 » intitulée « déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux peuples et aux pays coloniaux. » qui présentait le droit de libre détermination comme un principe absolu. En 1961, la « résolution 16/54 » crée un comité spécial de décolonisation chargé de mettre en œuvre la « résolution 15/14 ». Actuellement, il existe encore mais est chargé d’examiner 16 territoires uniquement. En 1966, la « Résolution 21/89 » déclare que la colonisation porte préjudice à la paix et à la sécurité internationale. Dans sa « Résolution 26/25 » l’assemblée générale de l’ONU a déclaré que « Le territoire d’une colonie ou d’un territoire non autonome possède en vertu de la charte, un statut séparé et distinct de l’État qui l’administre » Mais on peut soulever quelques ambiguïtés :

  • la question de sa nature juridique. Quelles sont les obligations contenues dans ce principe ? Et s’il en existe, quels en sont les destinataires ? Qu’entend on par Peuple ?
  • Ce principe vise-t-il une procédure ou un résultat ? Si c’est une procédure doit-elle être internationalement organisée ou restée soumise à des mécanismes internes ?

Pour le droit des peuples à disposer d’eux même, il y eu un avis consultatif du Sahara occidental du 16 OCTOBRE 1975.

  • La Sécession

Se définit comme la séparation d’un État pour former un État indépendant. L’assemblée générale des États-Unis, a précisé que « l’égalité du droit des peuple ne saurait s’interpréter comme autorisant ou encourageant une action quelle qu’elle soit qui démembrerait ou menacerait totalement ou partiellement l’intégrité territoriale ou l’unité politique de tout État souverain et indépendant » Le droit à la décolonisation concerne deux territoires distincts alors que la sécession porte atteinte à l’intégrité territoriale d’un seul État.

Les Nations-Unies exigent qu’il y ai un accord entre l’État préexistant et la collectivité voulant ‘en séparer (ex : N’ont pas été admises les tentatives de sécession du Katanga après l’indépendance du Congo Belge ni celle du Biafra avec le Nigeria. Par contre, ont été admises la sécession du Bangladesh avec le Pakistan en 1971 et l’Érythrée avec l’Éthiopie en 1992. ) Dans tous les cas, le consentement de l’État préexistant a été arraché par la Guerre.

Le cas du Kosovo a déclaré son indépendance vis à vis de la Serbie mais le problème c’est qu’il n’est pas reconnu comme un État indépendant par la totalité des autres États, seuls 90 États le reconnaissent. La cour internationale de Justice (CIJ) a été saisit en OCTOBRE 2008 à l’initiative de la Serbie pour une demande d’avis consultatif sur la légalité de la Déclaration d’indépendance du Kosovo et deux ans plus tard, dans son avis du 22 JUILLET 2008, la cour a conclu que «l’adoption de la déclaration d’indépendance n’a violé aucune règle du droit international ». Pourtant, le Kosovo est membre du FMI et de la banque mondiale depuis Juin 2009.

  • La Dissolution

Se définit comme l’éclatement d’un État en plusieurs États nouveaux (le cas de l’URSS et la Tchécoslovaquie qui donne naissance à deux nouveaux États en 1992 : La République Tchèque et la Slovaquie) Aucun des nouveaux États ne peut prétendre être le successeur de l’ancien État.

  • La Réunification

Des États peuvent décider de se regrouper de manière pacifique pour former un État fédéral ou un État Unitaire (ex : Le cas des USA : la confédération des USA se transforme en État Fédéral en 1797. L’unification Allemande n’a pas entraîné une fusion entre la RFA et la RDA mais l’absorption de la RDA par la RFA)

  • b) L’Effectivité et la Reconnaissance

Ces deux notions posent le problème des conditions juridiques de l’existence de l’État. L’effectivité dépend de qualités substantielles qui tiennent à l’État alors que la reconnaissance tient à l’attitude des autres États à son sujet.

  • L’Effectivité

Le principe d’effectivité signifie que l’État est juridiquement institué lorsque les composantes matérielles qui le constitue sont réunies (territoire, population, gouvernement). Elle détermine donc la naissance de l’État mais elle n’est absolument pas requise pour son existence permanente.

  • La Reconnaissance

La pérennité de l’État dans l’ordre juridique international dépend de la volonté des autres États. La formation d’un État doit être acceptée par les autres États. La reconnaissance se définit comme étant l’acte par lequel l’État admet que lui soit opposable un fait ou une situation juridique auquel il n’a pas participé mais dont il accepte les conséquences. Il existe deux types de reconnaissance :

  • La reconnaissance d’État : L’acte de reconnaissance fait entrer l’État nouvellement reconnu dans l’ordre juridique international en lui donnant des droits et en lui opposant des obligations. Et malgré la réunion des 3 composantes matérielles de l’État les autres États ne sont pas obligés de le reconnaître. C’est donc un acte discrétionnaire. A cet égard, l’Histoire nous apprend qu’il y a eu des reconnaissances tardives ou prématurés (ex : le Royaume-Uni reconnaît tardivement la création de l’État d’Israël, de Même plus de 30 États reconnaissent aujourd’hui la République de Chine, Taiwan. La Russie après le conflit qui l’oppose à la Géorgie au sujet du statut de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud a décidé le 26 AOUT 2008 de reconnaître ces deux États prématurément).

La reconnaissance n’est pas un acte soumis à des conditions particulières. Il existe plusieurs modalités façonnées par la pratique pour reconnaître un État :

  • La reconnaissance peut être individuelle ou collective: très souvent la reconnaissance est accompli par un seul État à titre individuel, ce pendant il arrive qu’un ensemble d’États puissent collectivement procéder à la reconnaissance d’un autre État et dans ce cas, les États sont liés par cet Acte.
  • La reconnaissance peut être express ou tacite: elle est express lorsqu’elle se manifeste par un acte solennel qui sera soit un acte officiel non conventionnel ou un traité. Et la reconnaissance est tacite lorsque l’organe d’un État agit vis à vis de l’entité reconnue de la même manière qu’avec un autre État. (ex : l’établissement de relations diplomatiques)
  • La reconnaissance peut être « de jure »(dedroit) ou « de pacto ». La reconnaissance de jure est définitive, pleine et entière alors que la reconnaissance de pacto est provisoire et révocable.

La reconnaissance de gouvernement est un acte juridique, déclaratif qui a pour seule référence l’effectivité du gouvernement reconnu. Il y a deux objectifs de cette reconnaissance :

  • Etablir le véritable titulaire de la représentation étatique au sein des organisations internationales. C’est le cas des Khmers rouges.
  • Déterminer la responsabilité de ce gouvernement en cas de fait illicite. Si l’État qui vient de changer de gouvernement, pour l’engager devant les tribunaux, il faut le reconnaître.

La reconnaissance de gouvernement est une compétence discrétionnaire. Par exemple, c’est en application du critère d’effectivité que le Royaume-Uni reconnaît en 1950 le gouvernement de Mao Zedong. De la même manière, dès 1973, après le coup d’État du général Pinochet au Chili, les USA, ont reconnu ce nouveau gouvernement. A partir de 1945, la reconnaissance de gouvernement s’est étendue à celle des mouvements de libération nationale. (Ex : cas de l’OLP (organisation de libération de la Palestine), les conséquences du refus de la reconnaissance sont importantes dans la mesure où le refus devient la conséquence de la politique général d’isolement d’un État par les Autres)