LA NOTION DE JUSTICE CONSTITUTIONNELLE
Le contentieux constitutionnel est l’étude de toutes les questions qui forment litiges dans le droit constitutionnel.
Le contentieux constitutionnel est donc l’application concrète du droit constitutionnel, qui est l’ensemble des règles juridiques relatives aux institutions au partir desquels l’autorité de l’état se fonde, s’organise, se transmet et s’exerce.
Aujourd’hui, il est incontestable que la notion de constitution est revenue sur le devant de la scène, le contentieux constitutionnel est une matière rencontrant un grand succès dans les facultés mais aussi dans la pratique des juristes. Ce succès est étroitement lié à la perception générale de la constitution dans les différents Etats et sociétés. Nous sommes passés d’une doctrine de la mort des constitutions à une doctrine de la résurrection.
La notion de « constitution », en tant que texte juridique, norme suprême et fondamental que peut se donner un peuple libre, a été sous les régimes antérieurs, réapparaît sous un jour nouveau et prend une place essentiel dans les sources juridiques en Europe mais aussi en France.
Il y a eu un changement fondamental : la constitution est devenue une norme juridique pleine et entière, fondamentale, suprême.
Depuis une décision de la Cour suprême d’Amérique, Marberry and Madison, les USA font de la Constitution la loi suprême de l’Etat.
Carré de Malberg disait que la loi est l’expression de la volonté générale, alors que la constitution n’était qu’un papier inefficace. L’action du général De Gaulle fut déterminante pour réhabiliter la « notion de pouvoir d’Etat » et la place de la constitution au sein des institutions françaises (cf : discours de Bayeux en 1946).
Cette constitution moribonde à la fin de la IVème est devenue la loi suprême et fondamentale de la République française.
Le Conseil constitutionnel a su garder sa place. DC 16 juillet 1971, le Conseil Constitutionnel estime que certains textes ont une valeur constitutionnelle (DDHC, constitution de 1946, charte de l’environnement de 2004). Le 29 octobre
1974, révision constitutionnelle permettant à 60 députés ou 60 sénateurs de saisir le Conseil constitutionnel, cette saisine étant autre fois permise uniquement au Président de la république, au Premier ministre ou aux présidents du Parlement.
Vient ensuite la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 introduisant la QPC, avec l’article 61-1, qui met en place un contrôle a posteriori. C’est une révolution radicale puisque le contentieux constitutionnel s’ouvre aux particuliers. Ces derniers et leurs conseils peuvent faire de la Constitution, un argument contentieux. Il y a, dans cette constitution, des principes, des droits touchant à la question des libertés et qui sont des principes matriciels (qui peuvent donner application à de nombreux autres principes).
Burdeau avait publié une étude, Une survivance : la notion de constitution, au mélange Mestre. C’est la revanche du droit constitutionnel (Pierre Avril, 1989 revue Pouvoir, p.5)
Cette place de la juridiction constitutionnelle soulève deux questions :
Le contentieux constitutionnel ne peut pas tout, il y a une part des pouvoir publics qui échappent au contentieux constitutionnel, comme les questions relatives aux relations entre le président delà République et le Premier ministre. Le Conseil constitutionnel est compétent en vertu des dispositions constitutionnelles.
Le Conseil constitutionnel est composé de juges non élus, mais nous sommes dans une démocratie qui se définit par l’expression du pouvoir souverain du peuple au sein de l’état, le Conseil doit simplement vérifier qu’une norme législative est conforme à la Constitution, mais il ne peut pas se substitution au pouvoir d’appréciation politique du Parlement.
A) la définition du contentieux constitutionnel
« C’est l’ensemble des litiges portant sur la constitutionnalité d’actes subordonnés à la Constitution ainsi que les procédés et techniques ayant pour objet de résoudre ces contestations« .
Cette définition appelle deux séries d’observations constituant des limites :
B) la notion de justice constitutionnelle
Cette notion entre dans un double cadre qu’est le respect delà démocratie et la séparation des pouvoir. La justice constitutionnelle a pour objet d’assurer la suprématie de la constitution par une procédure juridictionnelle dont la finalité est d’assurer la primauté de la constitution en tant que norme juridique, sur toutes les autres normes.
Comment articuler cette mission de la justice constitutionnelle avec le respect de la démocratie et de la séparation des pouvoir ? En effet, ce qui importe c’est la légitimité de la justice constitutionnelle. Le juge constitutionnel, pour assurer cette suprématie de la constitution, va contrôler la conformité à cette dernière, d’un certain nombre d’actes, dont la loi. Mais la loi est l’expression du peuple souverain. Cette expression va être contrôlée par une instance, un organe non élu, qui au nom de la suprématie de la constitution, va pouvoir abroger ou annuler la loi.
Il y a une question quant à la conciliation entre la démocratie politique et la démocratie constitutionnelle, entre la suprématie de la constitution qui garantie droit et liberté avec l’expression du peuple que garantie le Parlement.
En 1993, il y a eu un affrontement de presse entre le président du Conseil constitutionnel Badinter et le Premier ministre Balladur sur le droit d’asile. Un texte permettait de ne pas étudier toutes les demandes présentées (dispositions de la loi Sheingein). La loi a été déclarée contraire à la constitution, le Conseil constitutionnel jugeant qu’une telle loi méconnaissait le droit fondamental à l’asile permettant à toute personne menacée dans sa vie de demander asile et protection à la France. Le gouvernement est furieux, en estimant d’une part que cette décision mettant en péril les engagements de l’espace Sheingein mais aussi que le Conseil constitutionnel allait trop loin dans l’examen des lois, en s’estimant juge. Le lendemain, Badinter répond que le Conseil constitutionnel n’a fait que protéger la constitution, dire son droit en la matière. Surtout il ajoute que si le gouvernement voulait faire passer sa réforme, il suffisait d’emprunter une autre technique juridique : la théorie de l’aiguilleur du Doyen Vedel. Lorsqu’une loi n’est pas conforme à la constitution selon le Conseil constitutionnel, le gouvernement et le Parlement qui l’ont voté vont indiquer le chemin à suivre qu’est la constitutionnalisation de la norme législative contraire à la Constitution que l’on souhaite adopter.
Dans ce cadre là, il est possible d’appréhender la notion de justice constitutionnelle en mettant l’accent sur tel ou tel aspect de cette notion. Si l’on parle de justice constitutionnelle, il est possible de privilégier une approche organique, en donnant une définition organique de la justice constitutionnelle. Elle renvoie à l’organe qui va rendre la justice constitutionnelle. L’attention est portée sur l’institution qui est chargée d’assurer la mission. On distinguera le modèle européen de justice constitutionnelle et le modèle américain. On est à l’opposé du modèle américain qui n’est pas un modèle concentré mais décentralisé de justice constitutionnel, tout juge de la suprême court fédérale jusqu’au juge fédéré peut assurer la suprématie de la constitution sur la loi, tous juge peut écarter une loi contraire a la constitution : c’est la justice décentralisée. En Europe, les juridictions doivent surseoir à statue, même s’ils savent que la loi est contraire à la Constitution.
Approche d’ordre fonctionnel, il y a exercice de la justice fonctionnelle chaque fois qu’une procédure ou technique assure la garantie de la constitution, ce qui est en cause est la fonction qu’assure la justice constitutionnelle et donc sa finalité. C’est l’unification du système juridique autour de la constitution afin d’assurer l’effectivité de cette dernière, de ses principes d’organisation politiques et des droits fondamentaux substantiels qu’elle contient.
Une d’instruction doit être faite entre « cour constitutionnelle » et « cour suprême ». Il faut être vigilant sur l’utilisation de ces expressions.
C) les cadres généraux du contrôle de constitutionnalité des lois
Il faut distinguer les différents types de contrôles.
1) les différents types de contrôle
On peut distinguer trois types de contrôle :
2) les modèles de justice constitutionnelle
Le juriste essaye de rendre clair le foisonnement des règles de droits, la diversité des situations juridiques. Lorsqu’il y a des réformes en matière de justice constitutionnalité, les législateurs ne prennent pas en considération la clarté des modèles notamment américains. Cette notion de justice constitutionnelle selon le modèle américain et celle selon le modèle européen, ne permet pas de rendre compte de la complexité du réel.
Le modèle américain est diffus, tout juge fédéral ou fédéré peut examiner la conformité des lois à la constitution. C’est un modèle décentralisé, il prend sa source dans l’article 3 section I de la constitution américaine : »le pouvoir judiciaire des USA sera dévolu à une cour suprême et à telle autre juridiction inférieure, de sorte que le congrès pour le cas échéant ordonner et établir« .
L’affaire Marberry and Madison de 1803 consacre ce pouvoir de judicial review. Marshall considérait que la constitution fédérale est la loi suprême. C’est la responsabilité du juge de garantir la suprématie de la Constitution fédérale. Tout juge doit être son gardien. En France, la révolution française, dans le prolongement de la théorie de Rousseau est centrée autour de la loi, expression de la volonté générale, raison pour laquelle la Constitution ne primait pas sur la loi. L’évolution va se produire progressivement avec DC 16 juillet 1971.
Le judicial review américain : révision constitutionnelle différente de celle en GB.la Cour suprême britannique remplace l’ancien comité judiciaire de la chambre des Lords. Le judicial review est ici une voie de droit pour statuer sur certains contentieux liés à des actes administratifs.
La cour suprême des USA est au sommet de cette pyramide juridictionnelle, elle a une grande autorité juridique, elle rend peut d’affaire puisqu’elle choisit les case sur lesquels elle statuera. Concernant le système du précédent, les USA dépendent de la Common Law, dans lequel se trouve le système de précédent, c’est l’obligation faite au juge de s’interroger sur le fait de savoir si, sur des cas similaires, il y a des déjà eu des décisions de justice.
Ratio decidendi (la raison déterminante de la décision, ce qui justifie la décision du juge) est le cœur du raisonnement juridique, qui s’oppose à obiter dictum (ce qui est surabondant, qui est dans la décision précédent mais n’est pas au cœur de la raison déterminante), c’est tout ce que le juge n’est pas obligé de suivre. Le juge américain va faire plein de distinctions pour se défaire de la contrainte du précédent.
L’autorité de la cour suprême américaine est immense, la constitution américaine est toujours la même depuis 1787, la révision qui s’opère est souvent judiciaire. Quand on regarde les grandes avancées aux USA en matière de droit et de liberté, ce sont des décisions de la Cour suprême qui en sont à l’origine (ex : l’encadrement de la peine de mort).
Dans le cas du modèle européen, nous n’avons pas ce système diffus. Favoreux décrit que la « contentieux constitutionnel dans le cadre européen de juriste constitutionnelle se distingue du contentieux ordinaire et dépend du ressort exclusif d’un tribunal spécifiquement constitué à cet effet et qui peut statuer sans qu’il y ait a proprement parlé de litige, sur la saisine d’autorité politique ou juridictionnelle, voire de particuliers, par des décisions ayant effets absolu de chose jugée. Dans ce modèle européen (dit autrichien ou kelsenien), la juridiction constitutionnelle bénéficie d’un statut constitutionnel organisé dans la constitution. C’est un véritable organe constitutionnel.
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