La hiérarchie des sources de la légalité

La hiérarchie des sources de la légalité

La question est de savoir comment les différentes règles qui s’imposent à l’administration s’articulent elles et se combinent elles ?

Question : comment les différentes normes juridiques s’articulent entre elles ?

C’est l’un des points sur lequel le droit administratif a le plus évolué depuis 20 ans.

A priori la question parait simple. En effet tout le monde considère qu’il y a entre les différentes normes de la légalité une hiérarchie dans laquelle chacune de ces normes trouvent une place déterminée. Cette hiérarchie des sources est communément appelée hiérarchie des normes et a été théorisée par un juriste autrichien Hans Kelsen.

Sa théorie a été reprise dans pratiquement tous les pays du monde et en particulier en France.

La théorie est simple dans son principe, à savoir que les différentes normes juridiques s’articulent entre elles selon un enchaînement pyramidal, du sommet vers le bas.

Chaque norme trouve son fondement dans la norme supérieure qu’elle doit appliquer et préciser.

Dans l’ordre juridique français, la hiérarchie des normes se présente en théorie dans l’ordre décroissant suivant :

  • → Au sommet, il y a la constitution
  • → En dessous les traités et le droit communautaire
  • → La loi
  • → Les principes généraux du droit
  • → Les règlements.
  • → Les actes administratifs individuels

 

La constitution de 1958 n’établit pas pour autant cet ordre de manière expresse.

Le seul article qui fixe une hiérarchie est l’article 55 de la constitution qui dit que les traités ont une force supérieure à celles des lois.

Pour le reste l’application de la hiérarchie des normes par le juge administratif s’avère compliqué et nuancé.

La hiérarchie entre les sources administratives de la légalité

A coté des règles qui s’imposent à l’administration de l’extérieur, il en existe d’autres qui émanent d’elle-même et qui constitue une limitation de son action. En effet, l’administration est tenue de respecter les règles qu’elle a elle-même édictées. Toutefois, la soumission de l’administration à ses propres règles n’est pas absolue mais relative. L’administration auteur de ses propres règles peut toujours les modifier. Cependant il ne faut pas exagérer cette relativité. Les autorités administratives ne peuvent pas modifier les règles prises par une autorité supérieure et ne peuvent modifier leur propre acte qu’à condition de satisfaire à des conditions de forme, de procédure et de fond.

Mais surtout, une double limitation pèse sur les autorités administratives :

D’une part, c’est le principe de la supériorité des actes règlementaires sur les actes individuels.

Et d’autre part c’est le principe de la hiérarchie formelle des actes administratifs.

§1. Le principe de la supériorité des actes réglementaires sur les actes individuels
A.Le contenu du principe

Les actes règlementaires sont une source de la légalité. Comme la loi, ils fixent des règles générales et impersonnelles.

Dès lors qu’ils ont été régulièrement édictés, l’administration doit les respecter et toutes les mesures individuelles d’implication doivent les respecter.

Toute décision individuelle doit être conforme à la règle pré établie. Ainsi l’administration est tenue de respecter les règlements en vigueur lorsqu’elle prend une décision individuelle. Cette supériorité ne joue que lorsque les 2 actes relèvent du même champ d’intervention.

 

L’autorité compétente peut toujours modifier un règlement. Il peut l’être à tout moment. Mais tant que le règlement est en vigueur il doit être appliqué. Il s’agit d’un principe fondamental qui s’exprime sous une triple forme :

– la décision individuelle doit être conforme aux règlements lorsque ce dernier règlement a été dicté par une autorité hiérarchiquement supérieure.

Exemple : Le préfet du département prend une décision relative à un agent de l’état. Mais la mesure individuelle qu’il prend ne peut être que conforme au règlement.

– Quand le règlement est édicté par la même autorité que celle qui prend la décision individuelle. C’est à dire qu’une autorité administrative est liée par sa propre réglementation. C’est une règle qui est très souvent enfreinte, notamment par les élus locaux.

– La décision individuelle doit être conforme au règlement même quand la mesure individuelle est prise par une autorité hiérarchiquement supérieure à celle qui a édictée les règlements.

Exemple : en matière d’urbanisme, on a un plan local d’urbanisme qui est un règlement. Les permis de construire sont délivrés par le maire. Mais par exemple pour la construction d’un collège c’est le préfet qui délivre le permis de construire et celui ca doit respecter la règlementation locale.

B.Les limites au principe : les dérogations

La dérogation est un procédé par lequel l’administration fait bénéficier une personne d’un régime plus favorable que celui résultant d’une stricte application de la réglementation.

Les dérogations apparaissent incompatibles avec le principe précédemment énoncé.

Mais le Conseil d’État a toujours considéré que des adaptions étaient nécessaires quand la règle s’avérait trop rigide et que son application aboutissait à une uniformité qui pouvait être préjudiciable.

Cette pratique des dérogations pose des problèmes :

– Problème de la régularité juridique de la dérogation. le Conseil d’État admet que l’auteur d’un règlement puisse prévoir des dérogations à la réglementation qu’il a édictée. En aucune manière il ne peut s’agir de dérogations potestatives c’est-à-dire qui dépendent uniquement de la volonté de l’administration. L’auteur de la réglementation doit préciser les motifs qui justifient la dérogation. Ces dérogations ne peuvent être que conforme à l’intérêt général.

– Les pressions du contrôle exercé par le juge : le Conseil d’État exerce un contrôle très étroit sur l’octroi des dérogations car il y a atteinte au principe d’égalité devant la loi. le Conseil d’État cherche toujours à concilier le respect du principe d’égalité avec la nécessité de prendre en compte certaines situations particulières.

§2. Le principe de la hiérarchie formelle des actes administratifs

Entre les sources internes de la légalité, il y a une hiérarchie qui procèdent d’une subordination des actes administratifs les uns par rapport aux autres .il existe aussi une hiérarchie qui tient à la procédure d’élaboration de l’acte.

A.La hiérarchie en fonction de l’organe administratif

Il y a une hiérarchie entre les organes administratifs. « Il y a des autorités supérieures et subordonnées » CE. Les autorités supérieurs ayant en principe le champ d’application le plus large.

Ainsi les règlements forment entre eux une cascade. Le règlement de l’autorité supérieure s’impose à celui qui est pris par l’autorité subordonnée.

Au sommet de cette cascade on trouve

  • → les décrets présidentiels
  • → les décrets du 1erministre
  • → les arrêtés ministériels
  • → les arrêtés préfectoraux
  • → les arrêtés municipaux.

Chaque autorité ne peut que compléter, adapter sans les contredire, les règlements de l’autorité supérieure.

B.La hiérarchie en fonction de la procédure d’élaboration

Il y a une hiérarchie qui existe en fonction de la procédure d’élaboration de l’acte. Ainsi un décret pris en conseil d’état prévaut sur un décret présidentiel ou ministériel. Il y contradiction entre un décret pris par le Président de la République et un décret pris après avis du conseil d’état, le second prévaut sur le 1er.

Selon la procédure d’élaboration, plus elle est solennelle, puis la place de l’acte est importante.