L’histoire de l’hypothèque en droit Français

L’histoire de l’hypothèque en droit Français

L’hypothèque est une technique de garantie faisant partie de la catégorie des sûretés réelles. Elle consiste dans la remise en garantie d’un bien immobilier par le débiteur à son créancier. Il s’agit d’une remise juridique et non d’une remise matérielle. Voici l’histoire de l’hypothèque :

§1/ Les sûretés réelles dans l’Ancien droit

En 476, chute de l’Empire romain, cette hypothèque est oubliée. Mais plus tard, la pratique va retrouver au 10e siècle des mécanismes de sûretés réelles sans dépossession. Elles se retrouvent dans le Midi, le Languedoc. Il faut que cette sûreté soit constatée par écrit. Ensuite à partir du 12e siècle, nous voyons les notaires qui inventent une sûreté réelle sans dépossession que l’on appelle l’obligation générale. Elle porte sur tous les biens du débiteur, les biens présents et à venir. Elle porte sur les meubles et les immeubles. Cette obligation est un progrès considérable car à l’époque il paraissait impossible de faire porter la garantie sur les immeubles. Par principe, la famille et le seigneur ont des droits sur les immeubles qui sont supérieurs au droit de l’individu. Les immeubles ne peuvent pas être vendus en principe donc ne peuvent pas faire l’objet d’une hypothèque ou d’une droit comparable. Dans notre droit médiéval, il est décidé qu’il est impossible de saisir les immeubles (fin du 12e siècle). Adage = « Les meubles sont le siège des dettes ». Malgré tout, les notaires vont réussir à faire porter l’obligation générale aussi sur les immeubles. Ils vont se servir de deux exceptions dans le droit coutumier. 2 exceptions : La coutume a admis au 13e siècle que l’individu puisse céder librement les immeubles qu’il avait lui-même acquis (les aquêts). Également, la coutume avait toujours admis que l’individu puisse céder l’un de ses biens propres en cas de nécessité. Les notaires vont utiliser ces deux exceptions pour accroître l’assiette de l’hypothèque (les biens sur lesquels elle porte) et donc autoriser le créancier à saisir tous les biens du débiteur. Elle ne confère pas de droit de suite et pas de droit de préférence. Au 15e siècle, les notaires vont inventer un 3e procédé : l’obligation spéciale. Elle va porter sur un seul bien. Dans le cadre de cette obligations spéciale, on se rapproche beaucoup de l’hypothèque romaine car le créancier va être mis en possession juridique de la chose, immédiatement, dès la naissance de l’obligation spéciale. En revanche, la possession matérielle va rester au débiteur. Il dispose de la saisine, il pourra la faire valoir, saisir le bien entre les mains de n’importe quel détenteur. Il pourra vendre l’hypothèque aussi. Au cours du 15e siècle, fusion avec l’hypothèque romaine.

§2/Les aménagements de l’hypothèque romaine en droit Français

A) L’objet de l’hypothèque

Au 16e siècle, l’hypothèque n’est plus qu’immobilière. Les meubles ne peuvent plus faire l’objet d’une telle garantie. Les immeubles sont de grande valeur, les créanciers préfèrent cela. À cette époque, commencement de fabrication en série des meubles. Cela fait que les meubles se ressemblent tous, on arrive plus à les distinguer, les identifier. Ces meubles circulent énormément, changent de main très facilement donc il apparait trop dangereux de permettre l’hypothèque mobilière, c’est trop dangereux pour le tiers. Le droit Français va forger une nouvelle règle : « Meubles n’ont pas de suite par hypothèque ». 2 sens différents : · dans le Midi, cela signifie que l’hypothèque mobilière est possible mais ne confère pas le droit de suite au créancier · dans le Nord (dans le droit coutumier de Paris notamment), l’hypothèque mobilière est purement interdite Réforme de mars 2006 concernant les hypothèques (article 2398 CC).

B. La constitution et la publicité de l’hypothèque

Les notaires vont imposer la nécessité d’un acte notarié pour l’hypothèque à partir du 16e siècle. À propos de la publicité de l’hypothèque, c’est le Roi de France qui a voulu l’imposer la première fois en 1553. Et là, les notaires n’étaient pas d’accord parce que cette publicité oblige à révéler l’état des fortunes. Les nobles ne voulaient pas révéler l’état de leur patrimoine et les notaires les ont défendu. La Révolution FR va imposer cette publicité et va créer la Conservation des hypothèques. Loi de 1855

C. La réalisation de l’hypothèque

C’est le moment où le créancier va faire valoir son droit sur le bien. Contrairement au droit romain, le droit FR organise une procédure très longue pour cette réalisation. Elle va porter seulement sur les immeubles et elle est très longue pour deux raisons : · il faut que tous les créanciers du débiteur soient informés de la vente de ses biens · il faut que tous les créanciers puissent se déclarer pour qu’ils puissent être payés sur le reliquat. Ceux qui ne se déclareraient pas lors de la procédure, leur créance sera effacée. On attend que le premier acquéreur se présente. Les formalités se font par : · un huissier qui saisit le bien · on déploie sur le bien immeuble une immense étoffe aux armes du Roi · des affiches sont apposées et il y a des criées publiques sur les places de marché et après la messe · le juge intervient pour faire la liste de tous les créanciers qui se sont déclarés et il adjuge l’immeuble au plus offrant lors de 5 audiences successives. À la dernière audience, le juge prononce un décret, c’est-à-dire qu’il attribue la propriété du bien à l’acquéreur qui a offert le meilleur prix. Il opère la purge de l’hypothèque, c’est-à-dire que le bien acquis est purgé, libéré de toutes les sûretés qui pesaient sur lui. Cette purge garantie à l’acquéreur un bien qui n’est plus affecté par aucune hypothèque. · la somme d’argent est partagée d’abord par les créanciers hypothécaires privilégiés, ensuite les créanciers hypothécaires, ensuite les créanciers ordinaires et enfin les débiteurs. Cette purge judiciaire produit des effets très intéressants si bien que les notaires vont imaginer une purge conventionnelle. Au 16e siècle, invention du décret volontaire. Il y a un accord amiable entre le débiteur, le tiers acquéreur et les créanciers déclarés. Il garantit au tiers acquéreur un bien purgé, libéré de toutes les sûretés qui l’affectaient. Réforme du 23 mars 2006 réintroduit la purge par décret volontaire.

Section 3 : Le privilège du vendeur impayé

Inventé au 17e siècle et agit comme une hypothèque sauf que le vendeur n’a pas besoin de constituer une hypothèque pour en profiter. En effet, ce privilège va permettre au vendeur impayé de revendiquer la chose vendue sans avoir besoin d’obtenir la résolution du contrat en justice. Il a été consacré par le Code civil, il existe à l’égard des meubles mais n’offre pas de droit de suite. Il existe aussi à l’égard des immeubles. Ce privilège n’avait pas besoin d’exister en droit romain. Pourquoi? En vertu de la dépendance des obligations qui permettaient au vendeur de conserver la propriété tant qu’il n’avait pas été payé.