Histoire du droit administratif des biens

HISTOIRE DU DROIT ADMINISTRATIF DES BIENS

Quelle est la nature du droit des collectivités publiques sur les biens quelles détiennent ?? S’agit il d’un droit de propriété, d’un droit d’une autre nature qui assurerait la maîtrise de la chose ?? Si c’est le droit de propriété, est il le même que celui des personnes privées sur leurs biens ?

On a considéré que la maîtrise n’était pas assurée par le Droit de propriété. Ceci a conduit dans la doctrine du 19ème siècle à une grande distinction : Il y a des biens que les personnes publiques approprient comme tous le monde, ou presque ; ce sont les biens du domaine privé, à rattacher à la patrimonialité de l’Ancien Régime. Et il y a d’autres biens que l’on range dans le domaine public et la maîtrise de ces biens ne procèderaient pas de l’exercice du droit de propriété.

Donc si la nature du droit des personnes publiques sur le domaine privé n’a jamais été contestée, une évolution va se produire à la maîtrise des biens du domaine public.

La domanialité publique n’est pas une alternative au régime de propriété mais s’ajoute au droit de propriété.

L’APPARITION D’UN DROIT DE PROPRIÉTÉ DES PERONNES PUBLIQUES SUR LEURS BIENS

Biens du domaines publiques sont caractérisés par la fonction qu’ils remplissent : Ils ont été affecté par une utilité publique.

C’est le critère dominant.

I- Les thèses hostiles à l’idée de propriété

Les auteurs du 19ème siècle qui admettent la propriété de personnes publiques sur les biens du domaine privé, considèrent que le domaine public ne peut pas être considéré comme faisant objet de propriété.

La domanialité exclut la propriété. Elle se substitut à la propriété.

La propriété est une propriété absolue, héritée du droit romain.

Ils rejettent la propriété car ces biens sont insusceptibles de propriété : L’air, l’eau des cours d’eau, les routes etc… (cf. le droit d’histoire du premier semestre)

Donc la fonction de la personne publique est une fonction de garde, de surintendance, pour veiller à ce que ces biens servent.

Pour qu’il y ait propriété : il faut l’USUS, l’ABUSUS, et le FRUCTUS. Or les biens du domaine public ce n’est pas possible. Les fruits ne sont pas perçus par les personnes publiques, l’exploitation est faite par les usagers et en sus, leurs ventes sont impossibles puisqu’ils sont inaliénables !!

Ces analyses sont le fait de privatistes : Epoque de l’école de l’exégèse et le code civil s’impose. La tache de la doctrine est de faire l’exégèse du code civil, d’en faire l’explication à la lettre.

Ces auteurs privatistes trouvent dans le code civil des articles (538 à 541) qui reprennent des dispositions du code domanial de 1790.

L’article 538 du code civil dresse un inventaire de toute une série de dépendance, de biens qui font partie du domaine public. Mais aussi « généralement toutes les portions du territoire français qui ne sont pas susceptibles de propriété ».

Les auteurs publicistes du 19ème siècle, vont dire que les biens visés sont insusceptibles de propriété par leur nature. Mais on va y rajouter ceux qui sont insusceptibles de propriété par leur affectation.

Cette construction est encore écrite à l’article L2 du code du domaine de l’état.

Les dispositions du droit du domaine publique sont très dispersées : En 1957 on a fait un code du domaine de l’état, très mal parce que les dispositions qu’il contient ne correspondent pas à la réalité.

L’article L2 a une ambition, celle de répondre à la question de savoir comment différencier le domaine public du domaine privé.

Il entreprend alors une définition : « Les biens et droits mobiliers et immobiliers, appartenant à l’état, qui ne sont pas susceptibles d’une propriété privée, en raison de leur nature ou de la destination qui leur est donnée, sont considérés comme les dépendances du domaine public national. Les autres biens constituent le domaine privé ».

Mais cette définition ne correspond pas et elle ne correspond pas au droit positif. Le Conseil d’Etat l’a même affirmé.

Le Cours de droit administratif des biens des biens est divisé en plusieurs fiches :

II- L’état du droit positif : la thèse de la propriété

Cette thèse correspond à l’état du droit actuel.

Elle va apparaître dans une période de guerre doctrinale qui opposera Hauriou et Duguit qui rejette la propriété.

Arguments en faveur de la thèse de la propriété :

Hauriou s’emploi dans le développement de sa pensée à réfuter les arguments des autres. Il dit que la propriété n’est plus la propriété absolue du droit romain. Elle remplie une fonction sociale. Le propriétaire est certes maître de la chose mais ne peut pas en faire n’importe quoi !

Thèse Privatiste : « la propriété n’est pas le droit de faire d’une chose absolument ce que l’on veut et les lois lui en font subir de nombreuses modifications »

Hauriou s’appuie sur cette doctrine et sur la fonction sociale du droit de propriété.

De plus les objections peuvent être réfutée !

  • – L’Usus : Il y a utilisation du domaine public par les services publics. Exemple, les compagnies ferroviaires
  • – Le Fructus : On admet sur le domaine public des occupations à titres onéreux et l’occupant doit payer des redevances. Exemple, les émissions hertziennes et l’occupation du domaine des ondes.
  • – L’Abusus : La possibilité d’aliéner. Hauriou dit que si on a besoin d’écrire que le domaine public est inaliénable c’est que par nature on peut l’aliéner ! Il est juste temporairement paralysé. En effet si ce même bien n’est plus du domaine public il revient au domaine privé et peut être aliéner !

Il y a en plus un éclatement en plusieurs variétés de la propriété : Intellectuelle etc…

La Jurisprudence va très vite rallier cette proposition. Elle va affirmer la propriété des personnes publiques sur leurs biens du domaine public.

L’arrêt du 17/01/1923, PICCIOLI à propos de terrains appartenant au port d’Oran, affectés à la manutention portuaire. L’arrêt dit que ces terrains appartiennent à l’état en visant les dispositions du droit de propriété du code civil.

La Cour de Cassation en 1934 juge que la propriété d’une dépendance du domaine public emporte la propriété du dessus et du dessous et donc applique la théorie de l’accession de l’article 544 du code civil.

Conseil d’Etat, 8/05/74, GIRO à propos d’un passage public dans une commune. On renvoie au juge judiciaire pour trancher la question de savoir si la commune est propriétaire. C’est donc bien le Juge judiciaire, gardien de la propriété qui doit trancher !

L’appel à la propriété permet de savoir qu est responsable de la chose, qui est tenu des travaux d’entretiens, de mise en état etc…

Deviennent disponibles une multitude de droits : Les actions en revendication des propriétaires, les actions pétitoires, ou encore des droits comme l’acquisition de la mitoyenneté, ou encore l’accession, ou encore la possibilité de percevoir les fruits naturels de la propriété ou l’appropriation du trésor trouvéÂ…

Objection tirée d’une construction Jurisprudentielle des mutations domaniales. Arguments différents entre la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat qui admet que l’état conserve une certaine Police des dépendances domaniales, y compris de celles qui ne lui appartiennent pas. L’état va pouvoir utiliser les dépendances d’une autre collectivité publique en lui imposant contre sa volonté une autre utilisation.

A propos de la Station de RER Luxembourg, à l’époque garde d’Orléans. L’état a, d’autorité, modifié l’affectation de la station. A cette occasion les deux juridictions ont admis que quelqu’un qui n’était pas propriétaire, l’état, exerça les attributions de propriétaire.

Réminiscence d’une sorte d’unité des dépendances des domaines publics et prédominance de l’état dans l’affectation du domaine public, des dépendances domaniales.

Objection qui existe contre le droit de propriété et qui existe plus par le résultat quelle poursuit que part les résultats qu’elle vise.

Aujourd’hui, la construction jurisprudentielle domaniale est condamnée par le Conseil d’Etat qui a consacré le droit de propriété des personnes publiques sur leurs biens.

Reste que la thèse de la propriété va se trouver consacrée à l’égard de toutes les dépendances du domaine public. Donc utilisation d’une différence entre le domaine public naturel et l’artificiel.

  • Naturel : Cours d’eau, rivages…
  • Artificiel : Réalisé de la main de l’homme, route, voies ferrées…

Mais la différence est parfois dures à établir : Exemple, le domaine hertzien.

La loi du 24 Vendémiaire An 11 à propos des chemins Vicinaux a déclaré que ces chemins étaient la propriété des communes.

La loi de 1871 crée un domaine routier départemental qui appartient aux départements.

Donc on peut considérer que l’article L2 se trompe et que aujourd’hui, le principe est unanimement reconnu d’une propriété des personnes publiques sur tous leurs biens.

Dans la doctrine du 19ème siècle, l’idée est qu’il faut protéger le domaine public, préserver les droits des usagers contre une conception trop patrimoniale du domaine public.

Mais aujourd’hui, le thème est celui de la valorisation du domaine public. Les collectivités publiques ont un patrimoine, elles doivent l’exploiter, le valoriser, en faire une ressource de revenus. Quoi de mieux adapter alors que le droit de propriété qui est une réalité économique, une richesse virtuelle.

Donc la nouvelle conception est bien adaptée à son époque.

Donc si nous admettons qu’il y a bine un droit de propriété, que vient faire la domanialité ?? Et bien les domanialités publiques sont des régimes d’affectation, liés à l’utilité que le bien en question rempli mais limité dans le temps, dans l’espace, à cette affectation. Dans l’espace car le régime de propriété, c’est la théorie de l’accession :

Mais un département est propriétaire d’une route, donc il est propriétaire du dessus et du dessous. Mais le régime de domanialité ne s’étend pas sans limite au dessus et en dessous. Il doit être limité à l’affectation au public de la route.

Donc il y a certains régimes d’affectations qui corrigent ces attributs : Exemple, le code domanial comprend des régimes d’affectation qui se substitut au droit de propriété de la personne publique sur la foret, par exemple.

La domanialité publique est particulièrement agressive à l’égard du droit de propriété. En effet, elle comporte le principe d’inaliénabilité qui limite ce droit de propriété.

Cette vision est bien entrée dans les esprits et il y a une réforme en cours. On a entrepris de simplifier le droit. Il y a eut une loi d’habilitation du 2 Juillet 2003, donc de l’article 38 de la Constitution qui prévoie toute une série d’ordonnances de l’article 38 dont l’orientation générale est quelles seront des éléments de simplifications.

Délai de 18 mois : Parmi les diverses ordonnances il y en aura une portant code des propriétés publiques qui n’est pas une codification à droit constant.

Mais les choses ne se passent pas simplement et pour le moment, l’Administration prépare l’ordonnance mais on sait déjà qu’il ne changera pas beaucoup les choses.

Le Cours de droit administratif des biens des biens est divisé en plusieurs fiches :