Le statut de la femme mariée au Moyen-age et à l’époque moderne

  • Histoire du statut de la femme mariée (L’imbellitas sexus)

En latin imbellitas = celui qui est privé de bâton, celui qui ne peut se défendre seul, celui qui et faible. C’est le sexe faible. On retrouve cette expression dans le digeste. Elle prend son véritable sens au 16ème.

  • La femme mariée au Moyen Age

La femme est placée sous l’autorité de son mari. On disait que « l’homme et le chef de la femme ». Cet adage figure dans plusieurs coutumes.

Pour l’église l’homme et la femme sont égaux face au devoir de fidélité, en pratique seul l’adultère de la femme est considéré comme un crime et donne lieu à une condamnation car cet adultère perturbe l’ordre des familles, il peut introduire un étranger dans la famille.

Dans le sud de la France, les juges laïques, temporels, juge royaux ou municipaux vont très tôt connaitre de l’adultère. Dès le 16ème, seuls ces juges laïques vont connaitre des adultères dans toute la France. Pour éviter tout abus en matière de répression d’adultère, le constat d’adultère était soumis à des règles coutumières. Ces règles parfois rendaient impossible le constat.

Les peines prononcées : fixées par les coutumes et elles variaient d’un ressort à l’autre. Il pouvait s’agir soit d’un bannissement, soit la confiscation totale de ses biens, soit une amende, soit une peine corporelle. La plus connue c’est la peine de la course mais elle a évolué, elle s’est adoucie, ne revient plus à la mise à mort, il s’agit d’une promenade publique suivant un parcours déterminé, les coupables (femme et son complice) devaient faire cette promenade en chemise ou nus, la coupable doit parfois trainer son complice par les parties génitales par une corde. A partir du 13ème cette peine devient de plus en plus rare, les juge permettent aux coupables de se racheter en versant une amende. Cette indulgence est de courte durée, dès le 16ème, avec a 2nde renaissance du droit romain, les juristes vont obtenir l’application des peines prévues dans le droit de Justinien, plus précisément des peines prévues par l’authentique SED HODIE (constitution censée adoptée par Justinien), disposait que la femme adultère est tondue puis conduite dans un monastère, le complice encourt la peine de mort (rare). L’authentique prévoit que le mari a un délai de 3 ans pour pardonner à sa femme et la rappeler auprès de lui. En application de ce texte, jusqu’à la fin de l’ancien régime on parle de femmes authentiquées.

En dehors de ce devoir, la femme a un devoir de respect envers son époux même si ce devoir n’apparait pas dans les textes, sauf dans la coutume de Bretagne. Il n’apparait pas car ce devoir est implicite. Dans les lettres de rémission il n’est pas rare qu’un mari qui a tué sa femme pour manque de respect soit gracié.

L’autorité du mari sur la femme est considérée comme naturelle, par Conséquences tout renversement de situation est considéré comme contraire à l’ordre public, le mari qui se laisse commander par sa femme subissait a peine du Charivari. C’est une peine par le ridicule appliquée par la communauté. Elle consiste en une promenade sur un âne assit à l’envers.

La femme doit obéissance à son mari, c’est à dire doit obéir à ses ordres à condition que ces ordres n’aillent pas à l’encontre des lois divines et des bonnes mœurs. A l’occasion de ce devoir, le mari disposait sur la femme d’un droit de correction. Ce droit était limité par les coutumes, le mari ne pouvait pas arracher un œil, lui riser un membre ou lui porter des coups violant et répétés sans motif valable. De manière générale on considère que le mari ne peut aller jusqu’à infliger un MEHAING à sa femme, c’est à dire une blessure sanglante. Pour les juristes ce droit se justifie par la responsabilité du mari en cas de méfait de sa femme.

La femme ne jouit que d’une capacité juridique réduite, c’est à dire que sa capacité est éclipsée par celle de son mari. L’épouse ne peut accompli aucun acte juridique sans l’accord de son mari en raison de la hiérarchie domestique (position dominante du mari). On disait au moyen âge que le mari est le bail de la femme, c’est un individu qui gère les intérêts d’autrui par délégation, or le mariage est assimilé à une délégation, ainsi l’époux se voit reconnaitre le devoir de veiller sur le patrimoine de sa femme. Par ailleurs, le mari devient le proprio es meubles de sa femme, on moyen âge on considérait que les meubles sont le prolongement de la personne donc c’est naturel que le mari en soit proprio. C’est le mari qui va jouir des fruits produits par les immeubles de la femme, par contre il n’est pas son représentant, par conséquent, il n’est qu’un simple possesseur de ses immeubles et non n proprio, le mari ne peut aliéner le immeubles de sa femme sans son consentement. S’il vend un immeuble de sa femme, l’aliénation est valable tant que le mari est en vie car il garanti l’aliénation. En revanche, s’il décède avant sa femme, l’aliénation disparait en même temps que le mari, la femme rentre en possession de son immeuble et des fruits produits par celui-ci depuis l’aliénation. Concernant les immeubles de la femme, le mari peut agir seul pour les actions possessoires mais il a besoin de son consentement pour les actions pétitoires (relatives à la propriété).

Cette autorité maritale disparait en cas de décès, en cas de mort civile, et en cas de séparation. La femme retrouve une pleine capacité juridique. Si l’époux est empêché c’est à dire s’il perd la raison, s’il doit s’absenter pour une longue période, la femme va prendre sa place à la tète du ménage et va pouvoir gérer seule son patrimoine, les biens du couple et agir en justice sans avoir besoin d’y être autorisée. En dehors de ces cas, l’épouse ne peut être partie à un procès comme demanderesse ou défenderesse sans l’intervention de son mari, se traduit par une habilitation ou autorisation de l’époux. Certaines coutumes exigent la présence physique du mari lors du procès. En cas de procès pénal, la nécessité d’obtenir l’habilitation disparait, la femme est tenu de se rendre au procès sauf dans la coutume de Normandie : la femme ne peut être partie à un procès pénal sans l’accord de son époux.

Pour conclure un acte, il doit y avoir habilitation si elle se passe de son consentement, l’acte non autorisé ne produit aucun effet à l’égard de l’un ou de l’autre des époux tant que le mariage dure. Cas particulier où la femme peut contracter seule : cas de la femme marchande publique, c’est à dire la commerçante car cela suppose des décisions rapides. Les coutumes disposent que le mari qui permet à son épouse à exercer cette profession est censé avoir consenti à l’avance à tous les actes qu’elle ferait dans l’exercice de son commerce. En revanche, les actes qui n’ont pas pour objet ce commerce, restent soumis à autorisation. Les actes auxquels le mari n’a pas consenti ne produisent aucun effet sauf en Normandie où il est admis que ces actes sont nuls de plein droit. Dans le reste d la France, si le mari de son vivant n’a pas réclamé contre ces actes, en cas de prédécès de l’époux, ces actes vont produire leurs effets à l’égard de la femme, elle retrouve une pleine capacité juridique et la veuve doit répondre de ses engagements.

Cette incapacité juridique a été assouplie, ainsi dès le 14ème, les chancelleries délivrent aux femmes qui le demandent des lettres qui permettent aux épouses d’agir en justice sans le consentement du mari. Car il s’agit de permettre à certaines femmes d’intenter une action contre le mari.

A partir du 16ème, cette incapacité juridique qui était relative va devenir absolue.

  • La femme mariée à l’époque moderne

Au Moyen Age il n’existait pas de théorie de l’incapacité juridique de l’épouse. On estime qu’elle ne peut agir seule en raison de la hiérarchie domestique, de la puissance maritale, il ne peut y avoir qu’une direction.

Dès le 16ème on considère que si la femme ne peut agir seule c’est parce qu’elle en est incapable. La situation s’explique par la faiblesse de la femme. Elle et considérée comme un mineur. Selon l’adage de Loisel « la femme vit comme une esclave, elle meurt libre » c’est à dire que tous ces actes non autorisés sont nuls, la femme n’a pas la capacité juridique, elle meurt libre car elle peut librement tester.

Cette évolution du statut de la femme marié se dégrade pour 2 raisons :

  • A partir du 16ème, les juridictions laïques s’immiscent de plus en plus dans le domaine du droit de la famille. Les magistrats favorisent l’autorité du mari, du chef de famille.
  • Le 16ème, la Renaissance est synonyme de dégradation du statut de la femme mariée ou non, abaissement du statut de la femme car le 16ème est le siècle de la chasse aux sorcières.

Dès le 13ème l’église a lutté contre la sorcellerie, cette répression reste modérée u Moyen Age. Dès la fin du 15ème on constate une intensification de la chasse aux sorcières qui prend naissance en Allemagne. Après quelque affaires scabreuses, le pape y envoi 2 inquisiteurs : SPRENGER et INSTITOR aux méthodes brutales et cruelles et la rédaction d’un ouvrage essentiel « le marteau des sorcières » sous entendu le marteau pour écraser les sorcières. Cet ouvrage décrit les caractéristiques physiques des sorcières, leurs activités (anthropophagie, sacrifices), l’ouvrage décrit comment mettre un terme à la sorcellerie c’est à dire le bucher. BODIN et autres juristes vont s’intéresser à la science des démons, rédigent des traités et prônent une chasse aux sorcières. On estime qu’entre le 16ème et le 18ème le parlement de Paris a eut à connaitre de 2000 affaires de sorcellerie. Dans la plupart des cas les accusés sont des femmes (80% sont des femmes).

Cette chasse est un bon moyen pour canaliser les peurs, crainte et sujets de mécontentement du peuple. Les cibles sont donc les femmes car elles seraient plus faibles que les hommes face aux démons.

Cette hantise des sorcières explique une grande méfiance envers les femmes, il faut les surveiller, les mettre sous tutelle.

Avant le 16ème l’indépendance de femmes était mal perçue, à partir du 16ème avec la chasse, toute revendication allant dans le sens de la libération de la femme est perçue comme une menace. Dans ce contexte les juristes DUMOULIN et TURAQUEAU vont se pencher sur le droit romain et ils le réinterprètent. Le droit romain contenait 2 dispositions relatives à la capacité juridique de la femme :

  • Le senatus consulte « veléien » adopté en 46, qui interdit à toute femme de s’engager pour autrui.
  • L’authentique « si qua mumier » frappe de nullité toute intercession de l’épouse au profit de son mari.

Les juristes fusionnent ces dispositions et affirment que si la femme ne peut s’engager seule, c’est parce qu’elle est trop faible pour cela. Fondement de cette argumentation : l’imbecilitas sexus, ils fondent l’incapacité juridique de l’épouse sur la faiblesse congénitale de la femme. Dès lors, tout acte non autorisé par le mari est nul d plein droit. La femme n’est pas tenue par les engagements non autorisés, même si elle devient veuve, si elle décède avant son mari, ses héritiers ne seront pas tenus non plus.

Le seul auteur qui s’oppose à cette nullité de l’acte non consenti : Guy COQUILLE qui estime que la nécessité d’obtenir le consentement du mari s’explique par la puissance maritale et pas par la faiblesse de la femme. Ces arguments sont rapidement balayés et la coutume de Paris réformée en 1580 (qui est le droit commun coutumier, en cas de lacune d’une coutume on applique la coutume de Paris) reprend la règle de l’incapacité juridique de l’épouse. Cette incapacité ne concerne que la femme mariée, ni la veuve ni la célibataire. La nécessité d’obtenir le consentement apparait avec le mariage.

De manière exceptionnelle, cette nécessité apparait dès les fiançailles. Cette autorisation et délivrée par le mari quelque soit sa propre capacité juridique, c’est à dire que si le mari est mineur et la femme majeure, elle doit obtenir le consentement du chef de famille. Dans ce cas, l’incapacité de la femme découle du mariage, donc l’accord de l’époux suffit à remédier à cette incapacité. Mais si l’aliénation du bien de la femme se révèle défavorable au mari devenu majeur, il peut faire annuler cette aliénation.

Si les deux époux sont mineurs, le mari ne peut autoriser sa femme que pour des actes de gestion et non d’aliénation. L’incapacité de la femme est double : elle résulte du mariage et de a minorité. Pour aliéner un de ses biens, la femme doit obtenir l’accord de l’époux et celui du tuteur.

Si le mai est majeur et la femme mineure, l’accord du mari est suffisant car le mari joue le rôle de tuteur.

Il existe un cas où le mari ne peut autoriser sa femme : quand il est condamné à une peine ayant pour Conséquences la mort civile. La femme peut alors librement s’engager.

De même si la femme est séparée de son mari, séparation de biens ou de corps. En revanche, si le mari est frappé de démence, au moyen âge la femme prenait sa place, à partir du 16ème elle doit obtenir une autorisation de justice. La femme mariée peut contractée seule pour les besoins du ménage. Elle peut également librement établir ses enfants. La femme marchande publique peut accomplir seule tous les actes ayant pour but son commerce à condition que son activité soit distincte de celle de son mari.

La forme de l’autorisation :

Au Moyen Age, l’autorisation pouvait prendre différentes formes : soit avant la conclusion de l’acte, soit après (ratification). L’écrit n’était pas obligatoire, le mari pouvait se contenter d’être présent lors de la conclusion de l’acte.

Dès le 16ème on estime que l’autorisation doit été expresse et spéciale c’est à dire que toute autorisation générale est sans effet, elle doit être délivrée dans l’acte lui même ou dans une procuration rédigé à cet effet. Si ces conditions ne sont pas respectées, l’acte et nul.

La femme ne peut recevoir aucune donation (entre vifs) sans l’accord de l’époux. Quand la femme est autorisée par son mari, elle s’engage et elle engage la communauté c’est à dire la communauté de biens entre époux. En revanche, quand l’autorisation émane d’un magistrat, la communauté n’est engagée qu’à hauteur du bénéfice tiré de l’acte de la femme.

L’acte non autorisé est nul de plein droit (la nullité n’a pas à être demandée en justice). La femme qui contracte sans autorisation est totalement à l’abri de ses créanciers. Elle n’est pas tenue du dol occasionné par l’acte alors même qu’elle a menti et qu’elle se savait être dans l’incapacité de contracter. Limite : la prohibition de l’enrichissement sans cause. Si la femme emprunte de l’argent pour acheter un bien affecté à la communauté, celui-ci peut être vendu au profit des créanciers. Cette situation est protectrice de la femme mariée car on considère qu’elle est faible.

Les rapports entre époux sont marqués par cette incapacité. Ces rapports diffèrent quant i est question de régime matrimonial. La France va connaitre 2 types de régimes matrimoniaux :

  • La communauté de biens entre époux dans le nord
  • Le régime dotal dans le sud de la France.