L’identification des professions commerciales

L’identification des professions commerciales

Le statut de commerçant est défini par le code de commerce et il est important d’identifier qui est commerçant dans la mesure où le commerçant est soumis à des droits et obligations qui lui sont propres. Le code de commerce défini un statut unique du commerçant et cela présente un avantage et un inconvénient : l’avantage est la simplicité, car tous les commerçants ont tous les mêmes droits et statut mais l’inconvénient c’est que la catégorie des commerçant n’est pas homogène car cela va du petit commerçant jusqu’à la grande entreprise. La situation des différents commerçants n’a rien de comparable et donner le même statut aux commerçants est difficile.

L’objectif de cette première section est d’identifier qui a la qualité de commerçant et il faut partir de l’article L 121-1 du code du commerce qui dispose que « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ».

§1 la profession habituelle et indépendante

Selon l’article L121-1 le commerçant a rempli des actes de commerce à titre de profession habituelle. Exercer une profession c’est consacrer d’une façon principale et répétée son activité à certaines taches afin d’en tirer profit. Cela veut dire que la profession implique une habitude de certains actes et une répétition. L’individu qui accompli épisodiquement un acte de commerce n’est pas un commerçant car il faut que les actes se répètent. De plus la profession est exercée dans un but lucratif, le commerçant recherche un profit. Cela ne veut pas dire pour autant que le commerce sera la seule source de revenu du commerçant. Cela ne veut pas dire non plus que le commerçant va réellement réaliser un profit.
A côté de cette condition d’habitude, la jurisprudence exige, alors qu’il n’y a rien dans le code, que le commerçant exerce son activité de manière indépendante c’est-à-dire qu’il agisse en son nom et pour son propre compte. Le commerçant agit pour son compte personnel. Cette qualité d’indépendance est très importante car elle permet d’exclure des commerçants des individus qui accomplissent à titre habituel des actes de commerce mais pour le compte d’autrui (le salarié peut être appelé à accomplir des actes de commerce à titre habituel mais il n’est pas commerçant car il n’est pas indépendant puisqu’il agit pour le compte de son employeur). Ceci a une conséquence très forte : le commerçant dans le cadre de son indépendance, engage son patrimoine personnel pour être indépendant.
Cela implique une répétition d’actes dans un but lucratif dans un but personnel et en cas de difficulté, le juge va rechercher au cas par cas si c’est un commerçant.

§2 Les professions commerciales

Les articles L110-1 et L110-2 du code de commerce donnent ce qu’on appelle la liste des actes de commerce c’est-à-dire d’actes qui relèvent du droit commercial et qui sont accomplis par les commerçants. Cependant, cette qualification d’acte des commerces n’est pas satisfaisante car à ces articles, on trouve des actes juridiques, des faits juridiques et des activités. Mieux vaut donc parler de professions commerciales. Le commerçant est donc celui qui exerce une profession commerciale c’est-à-dire une activité qui relève du droit commercial. Les activités, les professions énumérées par ces articles sont extrêmement variées. La doctrine, à partir de cette énumération, a dégagé 4 grandes catégories de professions commerciales à partir de la liste hétérogène de ces articles. Deux observations : la rédaction de ces articles n’a pas évolué depuis le code de 1807 donc le style est un peu désuète et puis la liste de ces deux articles n’est pas considérée comme limitative par la jurisprudence.
A. Les activités de distribution
Le premier acte de commerce cité par l’article L110-1 c’est l’achat de biens meubles pour les revendre en nature. Cette activité de distribution a une nature toujours commerciale, et on va pouvoir faire plusieurs remarques :
-Aujourd’hui l’achat pour revente concerne tous les biens meubles, ce qui explique que les pharmaciens sont des commerçants même si ils sont soumis à un statut particulier.
-Le code de commerce ne tient pas compte de la forme de la vente. Il peut s’agir de commerce stable ou ambulant. L’article L110-1 sixièmement vise la vente à l’encan.
-Le degré dans lequel on se trouve dans la chaine de distribution n’a aucune importance.
B) Les activités de production
C’est une particularité du droit commercial par rapport à l’économie. En économie on distingue les activités industrielles et commerciales. En revanche, juridiquement, le commerce inclus les activités de production. On trouve d’ailleurs deux références à ces activités dans l’article L-110-1, il répute acte de commerce l’achat de biens meubles pour les revendre après les avoir travaillé, revente après transformation. Et d’autre part l’article L110-1 cinquièmement classe parmi les entreprises commerciales toutes les entreprises de manufactures.
C)les activités des services
On touche une catégorie un peu fourretout. Ces activités de services qui relèvent du commerce sont extrêmement variées et se sont multipliées à l’époque contemporaine. Toutes ces activités ont un point commun : le commerçant offre à sa clientèle l’usage temporel d’un bien ou alors l’exécution de certains travaux. Parmi ces activités de services on trouve les activités de transport, l’article 110-1 cinquièmement vise les activités par terre et par eau. Et l’article L110-2 vise les activités par mer ou l’affrètement. Le code de commerce ne vise que les modes de commerces qui existaient au 19 siècle, mais en réalité toutes les entreprises de transport ont la qualité de commerçant. Ensuite on trouve les entreprises de location de meubles qui sont qualifiées de commercial par l’article L110-1 quatrièmement. La loi ne peut pas être plus générale, peu importe que le locataire soit un autre commerçant ou pas, peu importe que le bien soit loué de nature professionnelle ou non. La troisième catégorie ce sont les entreprises de dépôt et de garde qui ont également une nature commerciale dès lors qu’elles portent sur des biens meubles et la dernière catégorie se sont les entreprises de services relatifs à la vie civile parmi lesquelles on trouve les hôtels, les restaurants…
D) Les activités auxiliaires et intermédiaires
Ces activités sont extrêmement variées, mais elles ont un point commun c’est que ces activités sont destinées à faciliter l’activité d’autrui. Ces activités peuvent se regrouper en deux catégories :
a. Le commerce de l’argent et du crédit et les assurances
Les banquiers ont toujours été considérés comme des commerçants. A présent, l’article L110-1 septièmement classe parmi les actes de commerces toutes opérations de change, banques, courtage et tous services de paiement. L’article L110-1 huitièmement classe parmi les actes de commerces toutes les opérations de banques publiques. En revanche, des difficultés sont apparues pour savoir si les opérations de banques étaient également commerciales lorsqu’elles sont effectuées par des établissements à statuer spécial qui ne poursuivent pas un statut lucratif. Certaines banques en effet sont organisées sous forme de coopératives ou mutuelles. La jurisprudence a décidé qu’une personne morale même si elle a un statut civil peut être reconnue commerçante en raison d’une pratique répété d’acte de commerce. Chambre commerciale de la cour de cassation du 17 juillet 2001, dans cet arrêt la cour de cassation considère que les caisses de crédit agricole effectuent des actes de commerces malgré leur statut de société civile à caractère coopératif. Toutes les opérations de bourses, de crédit, de changes, on tjs une nature commerciale. Par ailleurs, l’assureur lui aussi a la qualité de commerçant alors l’article L110-2 ne vise que l’assurance maritime mais le principe est en réalité général. Mais attention, cette commercialité est moins forte que celle des activités bancaires. En principe pour la jurisprudence toutes les activités d’assurance sont commerciales : le 5 février 1884. Cependant, la jurisprudence a ensuite apporté une exception à ce principe en refusant la qualité de commerçant aux compagnies d’assurance mutuelle parce qu’elles ne recherchent pas de bénéfices mais elles cherchent à proposer à leur adhérant des prix les plus faibles possibles. Elle a été admise par un arrêt du 3 aout 1921 et plus récemment dans un arrêt de la première chambre civile du 23 octobre 1996. On suppose une nouvelle source de contentieux car de plus en plus d’assureurs proposent des activités bancaires alors que des banques proposent elles des activités d’assurance.
b. Les intermédiaires
Ils sont une source de confusions. On parle d’individus qui aident leur client à conclure des opérations qui sont nécessaires à leur activité. Ont ainsi la qualité de commerçant, un intermédiaire en transaction sur les fonds de commerce, une agence de renseignement… mais le code de commerce donne un statut plus précis à certain intermédiaire. En premier lieu l’article L134-1 définit l’agent commercial. L’agent commercial n’a pas la qualité de commerçant même si il a un statut, « c’est un mandataire qui à titre de profession indépendante sans être lié par un contrat de louage de service est chargé de façon permanente de négocier et éventuellement de conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de service au nom et pour le compte de producteur, d’industriel, de commerçants ou d’autres agents commerciaux ». L’agent commercial n’est pas un commerçant car il agit au nom et pour le compte d’autrui, il n’est donc pas indépendant et n’agit pas pour son propre compte. C’est un mandataire qui agit au nom et pour le compte de son mandant et son activité à une nature civile.
Les commissionnaires sont spécialisés, il agit en son nom mais pour le compte d’un commettant qui n’est pas connu des tiers. C’est un commerçant. Cette commercialité est fondée sur l’article L110-1 cinquièmement qui vise les entreprises de commission. Ce commissionnaire est tombé en désuétude et connait ces dernières années un regain d’activité car le contrat de commission bénéfice d’un régime assez favorable au regard des règles de droit de la concurrence.
Le courtier n’est pas un mandataire et se contente de rapprocher les parties pour la conclusion d’opération juridique. Le plus connus c’est le courtier en assurance qui va rapprocher l’assureur et l’assuré. Il a toujours la qualité de commerçant même lorsqu’il rapproche deux non commerçants.

 

§3 Les professions non commerciales

Toutes les activités économiques n’ont pas une nature commerciale et relèvent du droit civil. Il y a trois catégories :
A. Les exploitations économiques de caractère civil
Il y a assez peu d’exploitation économique qui résistent à la commercialité. Elles relèvent du droit civil car elles sont apparues avant le développement du droit commercial, néanmoins on assiste à un rapprochement de ces activités avec les activités commerciales car le législateur contemporain a tendance à étendre à ces activités de nature civile des règles qui étaient réservées aux commerçants.
a. Les activités agricoles
Elles échappent au droit commercial et l’agriculteur n’a pas la qualité de commerçant alors qu’il peut procéder à des achats pour revendre. Pourquoi ce secteur échappe à la commercialité ? Historiquement, c’est antérieur à l’exploitation commerciale et c’est pour elle, que le droit civil s’est formé. Le droit civil reste applicable aux activités agricoles. Le législateur a dû intervenir pour tenir compte de certaines évolutions du monde agricole. Et cette intervention a été réalisée avec une loi du 30 décembre 1988 qui depuis a été intégrée dans le code rural. Cette loi a précisé que toutes les activités de vente direct exercé par l’agriculteur conservait en principe une nature civile dès lors que ces activités sont bien le prolongement des actes de production et qu’elles ont pour support l’exploitation. De la même façon la loi de 1988 a précisé que les activités d’accueil à caractéristique hôtelier développées par un agriculteur présentes elles aussi un caractère agricole des lors qu’elles sont fondées sur l’exploitation. Cependant un certain nombre de règles réservées aux commerçants ont été étendues aux agriculteurs, par ex la loi de 1988 a créé un registre de l’agriculture qui est aspiré du registre de commerce et de la société. Par ex les procédures de sauvegarde de redressement et de liquidation sont applicables aux agriculteurs en difficulté. Il n’existe aucune incompatibilité entre une activité agricole et commerciale. Le cumul est licite c’est-à-dire qu’un même sujet de droit peut à la fois être agricole et commerçant dès qu’il exerce en plus de son activité agricole une activité commerçante.
b. Les industries extractives
Il y a fort peu de logique s’agissant de la nature juridique de ces extractives, en principe ces activités relèvent du droit civil et la raison qui avancée habituellement est que ces activités sont liées à l’exploitation des immeubles qui échappent à la commercialité. Mais ce raisonnement n’est pas satisfaisant pour deux raisons :
– Ces activités extractives portent sur des produits des immeubles et juridiquement ce sont des biens meubles.
– A partir du moment où l’industrie est assimilée au commerce on ne voit pas pourquoi réserver un sort particulier aux industries extractives.
Malgré ces critiques, ces activités ont une nature civile mais il y a de très nombreuses exceptions. Par ex une loi du 9 septembre 1919 a donné une nature commerciale à l’exploitation des mines. Mais c’est une règle spéciale, par exemple l’exploitation des carrières ou des marais salants ont une nature civile. L’exploitation de l’eau et notamment de l’eau minérale présente elle aussi une nature civile. En revanche, toutes les exploitations pour la jurisprudence, qui utilisent la force hydraulique présente un caractère industriel et sont donc commerciales. Une loi du 18 novembre 1997 a précisé que toutes les activités de pêche maritime pratiqué à titre professionnel et en vue de la commercialisation des produits est réputée commerciale et les pêcheurs sont soumis au RCS. En revanche la pêche fluviale et la pisciculture sont de nature civile.
B. Les fonctions publiques et les professions libérales
Les fonctionnaires publics agissent au nom et pour le compte de l’Etat ou une collectivité territoriale et ils ne réalisent jamais d’opération commerciales dans le cadre de leur fonction. Ils sont soumis à de stricte compatibilité puisqu’ils leur aient défendu d’exercer un commerce séparé. Les professions libérales échappent aux commerces, il y a deux raisons, il existe une relation de confiance avec le client et cette relation doit échapper à la commercialité. La catégorie des professions libérales est déterminée par l’usage, certaines sont règlementées et d’autres ne le sont pas. En ppe elles échappent à la commercialité et relèvent du droit civil et des juridictions civiles.
A l’époque contemporaine, le législateur a étendu aux professions libérales des règles étendues aux commerçants. Les procédures liées aux difficultés d’entreprises sont applicables aux professions libérales et ces professions libérales peuvent être exercées au sein de société. Cette évolution s’est faite en deux temps : une loi de 1966 a permis la création de sociétés traditionnelles mais une loi du 30 décembre 1990 est allée beaucoup plus loin en créant la société d’exercice libérale qui peut être utilisée par les sociétés libérales règlementés dont le titre est protégé. Ce sont des sociétés commerciales qui peuvent faire appel à des capitaux extérieurs.
B. Les salariés, les représentants et les mandataires sociaux
Le salarié est celui qui est lié à son employeur par un contrat de travail, le représentant lui est un mandataire et les mandataires sociaux sont les dirigeants d’une société. Tous peuvent accomplir des actes de commerces néanmoins aucun n’a la qualité de commerçants parce qu’ils ne sont pas indépendants. Ils agissent pour le compte de l’employeur, de mandant ou de la société.

§4 les artisans :

Le code de commerce en 1807 était muet à propos des artisans et se contentait de placer les industriels parmi les commerçants. Mais ces artisans n’ont jamais disparus et tout au long du 19 siècle, ils ne bénéficiaient d’aucun statut particulier et relevaient du droit civile et après la première guerre mondiale, ils ont obtenus un certain nombre d’avantages fiscaux … qui étaient empruntés soit aux commerçants soit aux salariés. Et puis des lois éparpillées ont donné des statuts originaux à l’artisan qui a été regroupé dans le code de l’artisanat. Même si les artisans relèvent du droit civil, leur statut a perdu leur originalité dans la mesure où de nombreuses règles leur ont été étendues.
A. La qualité d’artisan
La difficulté c’est qu’en réalité deux définitions coexistent : légale et jurisprudentielle de l’artisanat. La loi du 5 juillet 1996, loi Raffarin a précisé la définition de l’artisan et plus précisément l’article 19 énumère les entreprises qui ont la qualité d’artisan. Deux critères ont été utilisés pour délimiter l’obligation d’immatriculation au répertoire des métiers :
– La taille de l’entreprise artisanale qui en effet ne doit pas employer plus de 10 salariés ou apprentis, et le texte ajoute qu’elles doivent exercer leur activité en toute indépendance.
– L’artisan doit exercer une activité qui relève du secteur des métiers et plus précisément ces métiers ont été énumérés par un décret du 2 avril 1998. Il vise quatre secteurs artisanaux : les métiers de l’alimentation, métiers du bâtiment, métiers de fabrication, métiers de service. L’artisan doit exercer impérativement l’une des activités prévue par le décret.
La jurisprudence ne s’en tient pas à l’article 19 de la loi du 5 juillet 1996 lorsqu’il s’agit de qualifier un sujet de droit. La première remarque c’est qu’en cas de contentieux, le juge ne se contente jamais de rechercher si l’intéressé est matriculé au RCS ou au répertoire des métiers. En réalité le juge va rechercher au cas par cas quelle est l’activité de l’intéressé et dans quelles conditions elle est exercée. Pour effectuer cette recherche, la jurisprudence utilise le critère de la spéculation. Dans un arrêt du 22 avril 1909. L’arisant se distingue du commerçant en ce que ses revenus professionnels proviennent essentiellement de son travail manuel. Il ne spécule ni sur le travail d’autrui ni sur les matières premières. Le juge recherche au cas par cas si l’intéressé est artisan ou commerçant.
B. Le statut de l’artisanat
En principe l’artisan est soumis au droit civil et est justiciable devant les juridictions civiles et leur statut se distingue de celui des commerçants. Par ex : l’accès aux professions artisanales n’est pas libre car l’artisan doit justifier soit d’un diplôme, soit d’un titre soit d’une expérience minimale. Différence avec le commerçant, tout le monde peut être commerçant, pas besoin de justification. En réalité le statut de l’artisan s’est rapproché de celui du commerçant. Ex : même régime de retraite qui s’applique aux professions commerciales et artisanales. D’un point de vue juridique, de nombreuses règles imaginées au départ pour le fonds de commerce s’applique pour le fonds artisanal. L’artisan bénéficie de la protection sur le bail commercial. Et les procédures de sauvegardes s’appliquent aussi aux artisans.
Les règles de droit civil qui s’appliquent toujours aux commerçants : la preuve, prescription, les règles de capacité, la compétence juridictionnelle, la transmission du fonds artisanal ne relève pas des règles de la transmission du fonds de commerce.