Le mineur : incapacité d’exercice, protection juridique

L’incapacité du mineur et sa protection juridique

Deux catégories de personnes sont frappées d’incapacité et méritent, à ce titre, d’une attention toute particulière du droit : le mineur et le majeur placé sous un régime de protection

« Le mineur est l’individu de l’un ou de l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de dix-huit ans accomplis » (article 388 du Code civil). En raison de son âge, la loi organise la protection du mineur (I) et frappe celui-ci d’une incapacité générale d’exercice (II).

I. La protection du mineur

La protection accordée par la loi au mineur concerne à la fois sa personne (A) et ses biens (B.)

A. La protection de sa personne

La protection de la personne du mineur est assurée par ceux qui détiennent l’autorité parentale. L’autorité parentale est destinée à protéger l’enfant dans sa sécurité, sa santé et sa moralité (article 371-2 du Code civil). Pour y parvenir, la loi reconnaît certaines prérogatives (2.) aux titulaires de l’autorité parentale (1.)

1) Les titulaires de l’autorité parentale

Le Code civil de 1804 avait confié au père de famille l’ensemble des pouvoirs à l’égard de ses enfants mineurs. La loi du 4 juin 1970 a substitué le concept d’autorité parentale à celle de puissance paternelle. L’autorité parentale appartient au père et à la mère de l’enfant. Néanmoins, il faut distinguer la titularité de l’exercice de l’autorité parentale. Elles peuvent parfois se trouver dissocier.

A l’égard de l’enfant légitime, l’autorité parentale est exercée par les deux parents en commun s’ils sont mariés (article 372 al. 1er du Code civil). En principe, le divorce ou la séparation de corps des parents ne met pas fin à cet exercice en commun de l’autorité. Cependant, le juge fixera la résidence de l’enfant chez l’un ou l’autre de ses deux parents. Si l’un des père et mère décède ou perd temporairement ou définitivement l’exercice de l’autorité parentale, celui-ci est dévolu en entier à l’autre (article 373-1 du Code civil).

A l’égard de l’enfant naturel, lorsque sa filiation n’est établie qu’à l’égard de l’un de ses deux parents, celui-ci exerce seul l’autorité parentale. Si la filiation est établie à l’égard de ses deux parents, l’autorité parentale est exercée, en principe, par la mère. Toutefois, elle est exercée en commun par les deux parents s’ils en font la déclaration conjointe devant le greffier en chef du tribunal de grande instance (article 374 al. 1 et 2 du Code civil).

L’autorité parentale sera également exercée en commun par les deux parents s’ils ont tous deux reconnu l’enfant avant qu’il ait atteint l’âge d’un an et s’ils vivent ensemble au moment de la reconnaissance concomitante ou de la seconde reconnaissance (article 372 al. 2 du Code civil).

Le gouvernement souhaite modifier cette règle en supprimant la condition de vie commune.

Ainsi, l’autorité parentale serait exercée conjointement, dès lors que la filiation de l’enfant est établie à l’égard de ses deux parents. Il n’y aurait que deux exceptions à cette règle :

lorsque le second lien de filiation est établi plus d’un an après la naissance : le second parent ne se verra pas attribuer toutes les prérogatives de l’autorité parentale ;

lorsque le lien de filiation découle d’un jugement et non d’une reconnaissance volontaire du parent.

Dans tous les cas, le juge aux affaires familiales peut modifier les conditions d’exercice de l’autorité parentale. (article 374 al. 3 du Code civil), y compris si la réforme aboutit, dans le cas des deux exceptions ci-dessus. Celui des deux parents qui n’exerce pas l’autorité parentale bénéficie, sauf motifs graves, d’un droit de visite. Le juge peut lui accorder en outre un droit de surveillance (article 374 al. 4 du Code civil).

A l’égard de l’enfant ayant fait l’objet d’une adoption plénière, les conditions d’exercice de l’autorité parentale sont les mêmes qu’à l’égard de l’enfant légitime. En ce qui concerne l’enfant ayant fait l’objet d’une adoption simple, l’autorité parentale est exercée par l’adoptant.

A l’égard des mineurs qui ne sont pas protégés par l’autorité parentale, la tutelle vise à remplacer celle-ci. Ce régime de protection concerne tant la personne du mineur que ses biens.

2) Les prérogatives de l’autorité parentale

Il ne s’agit pas seulement de pouvoir mais aussi d’autorité, c’est-à-dire un ensemble de droits et de devoirs conférés aux deux parents pour protéger l’enfant. L’article 371-2 al. 2 du Code civil précise qu’ils ont à son égard droit et devoir de garde, de surveillance et d’éducation.

La garde est une notion qui a été officiellement supprimée par la loi Malhuret du 22 juill. 1987. Cependant, il n’en demeure pas moins que les parents ont le pouvoir et même le devoir de retenir leur enfant mineur auprès d’eux (article 371-3 du Code civil).

La surveillance donne droit aux parents de contrôler les relations de l’enfant, de lui interdire certaines activités, de s’opposer à sa sortie du territoire, d’autoriser les traitements médicaux ou les interventions chirurgicales, etc.… Elle implique le devoir de veiller à la sécurité du mineur mais aussi le devoir de faire en sorte que l’enfant ne nuise pas aux tiers.

L’éducation de l’enfant doit être assurée par ses parents. Elle concerne l’apprentissage scolaire qui est obligatoire. Elle concerne aussi la connaissance artistique, religieuse ainsi que les activités sportives et de loisirs.

B- La protection de ses biens

L’administration des biens de l’enfant mineur est un attribut de l’autorité parentale. Cependant, la loi institue un régime spécial de protection lorsque le mineur n’est pas protégé par l’autorité parentale.

1) L’administration légale pure et simple

L’administration légale pure et simple concerne le mineur dont les père et mère exercent conjointement l’autorité parentale. Depuis la loi du 23 déc. 1985, les deux parents sont les administrateurs légaux des biens de leur enfant mineur.

Chacun des parents a le pouvoir de faire seul les actes conservatoires et les actes d’administration. En revanche, les actes de disposition nécessitent le consentement des deux parents. En cas de désaccord, le juge des tutelles tranche le conflit parental. En outre, certains actes graves, comme un emprunt ou la vente de gré à gré d’un immeuble, supposent l’autorisation du juge des tutelles.

2) L’administration légale sous contrôle judiciaire

L’administration légale sous contrôle judiciaire concerne le mineur dont les parents n’exercent pas l’autorité parentale en commun ou dont un seul parent est titulaire de l’autorité parentale.

Le parent qui exerce l’autorité parentale est seul administrateur des biens de son enfant mineur. Ce parent peut accomplir les actes conservatoires et d’administration. Les actes de disposition doivent être autorisés par le juge des tutelles.

3) La tutelle

La tutelle concerne le mineur à l’égard duquel aucun parent n’exerce l’autorité parentale.

Les actes les plus courants et les moins graves sont accomplis par le tuteur, sous la surveillance du subrogé tuteur. Les décisions les plus graves sont prises par le conseil de famille, présidé par le juge des tutelles et composé de membres de la famille ou de personnes qui s’intéressent à l’enfant. Le juge des tutelles exerce un contrôle et veille au respect des intérêts du mineur.

II- L’incapacité générale d’exercice du mineur

L’incapacité du mineur est une incapacité d’exercice. Le mineur est titulaire de droits mais il est incapable de les exercer lui-même. L’incapacité du mineur ne concerne en réalité que le mineur non émancipé (A), le mineur émancipé étant, en principe, capable comme un majeur (B).

A – Le mineur non émancipé

Le mineur est frappé d’une incapacité générale d’exercice. Néanmoins, tous les actes accomplis par un mineur seul ne sont pas annulables pour cause d’incapacité.

Les actes que le tuteur ou l’administrateur légal ne peut accomplir seul et qui sont conclu par le mineur seul sont frappés d’une nullité relative. L’action en nullité pour incapacité de son auteur peut être exercée par le représentant du mineur ou par l’incapable devenu majeur. Le délai de prescription est de 5 ans à compter de l’accomplissement de l’acte ou de la majorité de l’incapable protégé (article 1304 du Code civil).

Les actes que l’administrateur légal ou le tuteur pouvait accomplir seul et qui sont accomplis par le mineur seul sont rescindables pour lésion. Cela signifie que l’acte n’est pas nul pour incapacité mais qu’il pourra être annulé s’il est lésionnaire. L’annulation de l’acte est donc subordonnée à la preuve d’une lésion.

Certains actes peuvent être accomplis valablement par le mineur seul. Il s’agit soit d’actes très personnels, comme la reconnaissance d’un enfant naturel ou la rédaction d’un testament à partir de 16 ans portant sur la moitié de ses biens (article 904 du Code civil), soit d’actes peu graves, comme des actes conservatoires, ou des actes de la vie courante autorisés par l’usage (article 389-3 et 450 du Code civil).

B – Le mineur émancipé

Nous verrons d’abord les causes de cette émancipation (1) avant d’en envisager les effets (2).

1) Les causes d’émancipation

La loi prévoit deux causes d’émancipation.

L’émancipation du mineur joue de plein droit en cas de mariage du mineur (article 476 du Code civil). Elle survit à la dissolution du mariage.

L’émancipation du mineur peut être accordée par le juge des tutelles lorsque le mineur a atteint l’âge de 16 ans (article 477 du Code civil). La demande doit émaner soit des parents du mineur ou de l’un d’eux (article 477 al. 2 et 3), soit du conseil de famille si le mineur reste sans père ni mère (article 478 du Code civil). L’émancipation n’est pas de droit. Elle résulte d’une décision souveraine du juge. La loi prévoit l’audition du mineur.

2) Les effets de l’émancipation

Le mineur émancipé est capable comme un majeur. Il peut accomplir tous les actes de la vie civile. Une seule restriction concerne la capacité commerciale : le mineur même émancipé ne peut être commerçant (article 487 du Code civil).

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