L’inexécution des obligations des parties au contrat de vente

  • Droit sénégalais : Sanctions de l’inexécution des obligations des parties au contrat de vente

Il se peut que l’une ou l’autre des parties au contrat de vente ne respecte pas ses engagements ou, de manière plus précise, n’exécute pas les obligations qui résultent pour elle du contrat auquel elle a consenti. Dans ce cas, plusieurs dispositions sont prévues par le législateur de l’acte uniforme portant droit commercial général pour assurer la protection des intérêts de l’autre partie. Parmi ces dispositions, il existe des dispositions qui viennent prévenir toute inexécution, et d’autres qui viennent sanctionner, a posteriori, l’inexécution des obligations.

Une partie peut demander à la juridiction compétente l’autorisation de différer l’exécution de ses obligations lorsqu’il apparaît, après la conclusion du contrat, que l’autre partie n’exécutera pas une partie essentielle de ses obligations du fait d’une grave insuffisance dans sa capacité d’exécution, de son insolvabilité ou de la manière dont elle s’apprête à exécuter ou exécute le contrat. Il s’agit là de l’exception d’inexécution reconnue également en droit commun des contrats. L’exception d’inexécution prévue ne peut se faire que sur autorisation judiciaire.

Au-delà de l’exception d’inexécution, la partie, qui pourrait subir l’inexécution de ses obligations par l’autre partie, peut demander la résolution du contrat. En effet, si avant la date d’exécution du contrat, il est manifeste qu’une partie commettra un manquement essentiel à ses obligations, l’autre partie peut demander à la juridiction compétente la résolution de ce contrat. Le caractère essentiel du manquement est déterminé par rapport à l’importance et à la prévisibilité du préjudice[30]. La résolution du contrat de vente ne peut judiciaire ; elle ne peut être faite de façon unilatérale par l’une des parties au contrat de vente.

Cette possibilité n’est pas seulement reconnue dans le cadre des contrats instantanés. Elle est également prévue pour les contrats de vente à exécution successive. Dans les contrats à livraison successive, si l’inexécution par l’une des parties d’une obligation relative à une seule livraison constitue un manquement essentiel au contrat, l’autre partie peut demander la résolution de ce contrat à la juridiction compétente. Elle peut en même temps le demander pour les livraisons déjà reçues, ou pour les livraisons futures si, en raison de leur connexité, ces livraisons ne peuvent être utilisées aux fins envisagées par les parties au moment de la conclusion du contrat[31]. Ainsi, la résolution judiciaire d’un contrat à exécution successive peut concerner une livraison isolé ou l’ensemble du contrat, même si des livraisons ont été déjà effectuées.

  • 2) Sanctions de l’inexécution des obligations

Il faut ici distinguer selon qu’il s’agit des obligations du vendeur ou de celles de l’acheteur.

  • Sanctions des obligations du vendeur

Si le vendeur n’a pas exécuté l’une quelconque de ses obligations résultant pour lui du contrat de vente, l’acheteur peut exiger du vendeur l’exécution de l’obligation concernée.

En cas de non-conformité, l’acheteur dispose de droits différents selon que le manquement est essentiel ou non. Dans le premier cas, il peut demander le remplacement des marchandises reçues et, dans le second, il ne peut exiger qu’une réparation.

En effet, si les marchandises ne sont pas conformes au contrat, l’acheteur peut exiger du vendeur la livraison de marchandises de remplacement si le défaut de conformité constitue un manquement essentiel au contrat et si cette livraison est demandée au moment de la dénonciation du défaut de conformité, ou dans un délai raisonnable à compter de cette dénonciation. Il peut également exiger du vendeur qu’il répare le défaut de conformité. Dans ce cas, la réparation doit être demandée au moment de la dénonciation du défaut de conformité, ou dans un délai raisonnable à compter de cette dénonciation.

Dans tous les cas de défaut de conformité des marchandises au contrat, l’acheteur peut, que le prix ait été ou non déjà payé, réduire le prix proportionnellement à la différence entre la valeur que les marchandises effectivement livrées avaient au moment de la livraison et la valeur que des marchandises conformes auraient eu à ce moment. Le législateur permet donc à l’acheteur de refaire le contrat de manière unilatérale. Toutefois, il est clair que l’acheteur n’usera de ce droit de réfaction du contrat que s’il lui est favorable, c’est-à-dire, si les marchandises livrées sont conforme à leur utilisation. A défaut, il dispose d’un autre droit, plus efficace, la demande de résolution judiciaire du contrat.

Par ailleurs, le vendeur peut, même après la date de livraison, réparer à ses frais tout manquement à es obligations. Toutefois, l’acheteur conserve le droit de demander des dommages-intérêts.

En cas de défaut ou de retard dans l’exécution de ses obligations, le vendeur peut obtenir de l’acheteur un délai supplémentaire de durée raisonnable. Dans ce cas, l’acheteur ne peut se prévaloir d’aucun des moyens dont il dispose en cas de manquement au contrat, à moins qu’il n’ait reçu du vendeur une notification l’informant que celui-ci n’exécuterait pas ses obligations dans le délai ainsi imparti. L’acheteur peut toutefois demander des dommages-intérêts pour retard dans l’exécution.

Si le vendeur demande à l’acheteur de lui faire savoir s’il accepte l’exécution, l’acheteur doit lui répondre dans un délai raisonnable. A défaut, le vendeur peut exécuter ses obligations dans le délai qu’il a indiqué dans sa demande. L’acheteur ne peut, avant l’expiration de ce délai, se prévaloir d’un moyen incompatible avec l’exécution par le vendeur de ses obligations[32].

L’acheteur peut demander la résolution du contrat au juge compétent :

  • si l’inexécution par le vendeur de l’une quelconque de ses obligations constitue un manquement essentiel au contrat ;
  • en cas de défaut de livraison, si le vendeur ne livre pas les marchandises dans les délais supplémentaires accordés par l’acheteur ; toutefois, en cas de livraison des marchandises par le vendeur, l’acheteur est déchu du droit de considérer le conclu résolu s’il ne l’a pas fait dans un délai raisonnable ;
  • en cas de livraison tardive, à partir du moment où il a su que la livraison avait été effectuée ;
  • en cas de manquement autre que la livraison tardive.

L’acheteur ne peut toutefois obtenir la résolution du contrat ou exiger la livraison de marchandises de remplacement s’il lui est impossible de restituer les marchandises dans l’état où il les a reçues. Cependant, cette interdiction ne s’applique pas lorsque l’impossibilité de restituer les marchandises ou de les restituer dans un état sensiblement identique à celui où l’acheteur les a reçues n’est pas due à un acte ou une omission de sa part.

Les droits ci-dessus reconnus à l’acheteur peuvent également être utilisés lorsque le vendeur ne livre qu’une partie des marchandises ou si une partie seulement des marchandises livrées est conforme au contrat pour la partie manquante ou non conforme. Toutefois, le contrat ne peut être résolu dans sa totalité que si l’inexécution partielle ou le défaut de conformité constitue un manquement essentiel au contrat.

Le vendeur peut effectuer une livraison anticipée ou excédentaire. Dans ces cas, l’acheteur a un droit d’option : refuser ou accepter la livraison. En effet, si le vendeur livre les marchandises avant la date fixée, l’acheteur a la faculté d’en prendre livraison ou de refuser la livraison. Par ailleurs, l’acheteur peut accepter ou refuser de prendre livraison de la quantité excédentaire lorsque le vendeur livre une quantité supérieure à celle prévue au contrat. Dans le cas où l’acheteur accepte d’en prendre livraison en tout ou en partie, il doit payer les marchandises au tarif du contrat.

En dehors des droits qui lui sont reconnus, l’acheteur peut demander des dommages-intérêts pour toute inexécution par le vendeur de ses obligations.

  • Sanctions de l’inexécution des obligations de l’acheteur

Si l’acheteur n’a pas exécuter l’une quelconque de ses obligations résultant du contrat de vente, le vendeur peut impartir à l’acheteur un délai supplémentaire de durée raisonnable pour l’exécution de ses obligations. Dans ce cas, le vendeur ne peut, avant l’expiration du délai imparti, se prévaloir d’aucun des moyens dont il dispose en cas de manquement au contrat, à moins qu’il n’ait reçu de l’acheteur une notification l’informant que celui-ci n’exécutera pas ses obligations dans le délai ainsi fixé. Toutefois, le vendeur ne perd son droit de demander des dommages-intérêts pour retard dans l’exécution.

Comme le vendeur, l’acheteur peut, même après la date de livraison, réparer tout manquement à ses obligations, à condition que cela n’entraîne pas un retard déraisonnable, et ne cause au vendeur ni inconvénient déraisonnable, ni incertitude quant au paiement du prix. Toutefois, le vendeur conserve le droit de demander des dommages-intérêts en réparation de son préjudice.

Si l’acheteur demande au vendeur de lui faire savoir s’il accepte l’exécution, le vendeur doit lui répondre dans un délai raisonnable. A défaut, l’acheteur exécuter ses obligations dans le délai qu’il a indiqué dans sa demande et le vendeur ne peut, avant l’expiration de ce délai, se prévaloir d’un moyen incompatible avec l’exécution par l’acheteur de ses obligations[33].

Le vendeur peut demander la résolution du contrat au juge compétent dans les cas suivants :

  • lorsque l’inexécution par l’acheteur de l’une quelconque des obligations résultant pour lui du contrat constitue un manquement essentiel au contrat[34];
  • lorsque, en cas de défaut de prise de livraison, l’acheteur ne prend pas livraison des marchandises dans le délai supplémentaire proposé par le vendeur.

Dans tous les cas d’inexécution par l’acheteur de l’une quelconque de ses obligations, le vendeur peut demander des dommages-intérêts.

La prescription en matière de vente commerciale est de deux ans ; ce délai commence à courir à compter de la date à laquelle l’action peut être exercée : la date de la production de manquement en cas de manquement au contrat, la date de découverte du défaut de conformité en cas de défaut de conformité ou la date à laquelle le fait a été ou aurait dû raisonnablement être découvert en cas d’action fondée sur un dol commis avant ou au moment de la conclusion du contrat ou résultant d’agissements frauduleux ultérieurs. S’il existe une garantie contractuelle, le délai commence à courir à compter de la date d’expiration de la garantie contractuelle.

Il faut enfin préciser que, quelle que soit la partie à laquelle est imputable l’inexécution, les dommages-intérêts tiennent compte non seulement de la perte subie mais également du gain manqué par l’autre partie. Toutefois, la partie qui invoque un manquement essentiel au contrat doit prendre toutes mesures raisonnables eu égard aux circonstances pour limiter sa perte, y compris le gain manqué résultant de ce manquement. A défaut, la partie en défaut peut invoquer sa négligence pour obtenir du juge compétent une réduction des dommages-intérêts égale au montant de la perte qui aurait pu être évitée.

Par ailleurs, la résolution du contrat libère les deux parties de leurs obligations, sous réserve des dommages-intérêts qui peuvent être dus. Dès que le contrat est résolu, les parties doivent revenir au statu quo ante et donc, la partie qui a exécuté le contrat totalement ou partiellement peut réclamer restitution à l’autre partie de ce qu’elle a fourni ou payé en exécution du contrat.