L’interprétation de la loi pénale en droit belge
Le droit pénal est un droit légal et écrit. Le rôle du juge est notamment d’appliquer les termes généraux et abstrait de la loi à un cas concret (ex : dans l’article 473, qu’entend-on au juste par ‘tortures corporelles’ ?)
1. Que signifie ‘interpréter’ ?
C’est comprendre le sens des termes utilisés par la loi et comparer des faits précis à ce sens ainsi dégagé.
Il faut ajouter aussi que n’est sujet à interprétation qu’un texte de loi qui n’est pas clair.
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Une loi interprétative est rétroactive, elle s’applique directement et est considérée comme ayant toujours voulu dire ce qu’elle stipule dans son texte.
2. Qui interprète la loi pénale ?
1) L’interprétation authentique : faite par le législateur
Elle peut intervenir au moment même de l’adoption de la loi ou même ultérieurement.
(ex : il est fait référence à la définition du mot « nuit » mentionnée dans l’article 478 du Code Pénal Belge dans le cadre de l’infraction de vol avec violences : le sens commun est ici écarté puisque « le vol commis pendant la nuit est le vol commis plus d’une heure avant le lever et plus d’une heure après le coucher du soleil).
2) L’interprétation doctrinale : faite par la doctrine
Elle peut être une note sous un arrêt rendu, une étude de jurisprudence commentée, ou une étude d l’évolution de la loi. Cette interprétation n’est pas obligatoire, ça dépend en fait d’un juge à l’autre.
3) L’interprétation judiciaire : faite par les tribunaux
Lorsque le tribunal interprète la loi pénale, il ne le fait que pour un seul cas donné, il ne peut garder une de des interprétations et la ressortir pour toutes les affaires. L’ensemble des décisions des tribunaux constitue la jurisprudence, elle permet de dégager des constantes dans l’interprétation d’une même notion, dans des hypothèses plus ou moins similaires.
3. Comment le juge peut-il interpréter ?
1) Principe de l’interprétation stricte ou restrictive du droit pénal
Les lois pénales doivent être interprétées restrictivement et pas de manière analogique (ex : on ne peut pas appliquer la loi pénale à un fait (qui ne serait pas visé par le Code Pénal Belge) analogue à un autre fait visé par le Code Pénal Belge.
Il faut donc partir des termes de la loi, et ne garder ni plus ni moins que ce qu’elle a voulu dire.
2) Les méthodes respectant le principe de l’interprétation restrictive du droit pénal
Voici les 3 méthodes possibles :
L’interprétation littérale ou grammaticale ou textuelle : elle reste rivée au texte. Il y a donc souvent référence au sens usuel des termes, au sens courant des mots.
Historiquement, la méthode d’interprétation stricte de la loi pénale était la plus courante. Cette méthode consiste pour le juge à rechercher le contenu d’une incrimination dans les termes employés par le législateur, en évitant toute interprétation extensive ou analogique [3]. Cette méthode est considérée comme une méthode rigoureuse, mais elle peut conduire à des interprétations limitées qui ne reflètent pas toujours l’intention du législateur.
Cette méthode est parfois peu satisfaisante, car la loi n’est pas toujours complète, parfaite, ni bien rédigée.
L’interprétation téléologique : cette méthode consiste à rechercher la volonté du législateur, ses buts poursuivis.
Cette volonté peut être connue par la consultation des travaux préparatoires, par la recherche historique et sociopolitique.
L’interprétation téléologique est une méthode d’interprétation qui considère que le sens de la loi doit être recherché en fonction de son but ou de son objet [3]. Cette méthode permet de tenir compte des objectifs poursuivis par le législateur, qui peuvent être plus larges que les termes employés dans la loi elle-même. Cette méthode peut être utilisée lorsque les termes de la loi sont ambigus ou lorsque leur portée est incertaine.
L’interprétation évolutive : elle permet au tribunal de condamner pour des faits que le législateur était dans l’impossibilité de pressentir à l’époque de l’entrée en vigueur de la loi (ex : l’article 487 du Code Pénal Belge ne fait pas référence aux cartes magnétiques de banque, mais en appliquant l’interprétation évolutive, on condamne quelqu’un qui vole une carte et retire les billets de banque).
L’interprétation contextuelle L’interprétation contextuelle est une méthode d’interprétation qui prend en compte le contexte général dans lequel la loi a été adoptée, y compris les débats parlementaires et les autres documents officiels [1]. Cette méthode permet d’identifier l’intention du législateur et de mieux comprendre le sens des termes employés dans la loi. Cette méthode peut être particulièrement utile lorsque les termes de la loi sont vagues ou lorsqu’ils peuvent avoir plusieurs significations.
3) Prohibition en principe, de l’interprétation analogique
Elle consiste à étendre à des cas semblables (non prévus par la loi), la solution donnée par la loi à certaines questions. Cette interprétation permet de combler certaines lacunes, mais est contraire à la sécurité juridique.
Pour éviter une interprétation judiciaire analogique, le législateur intervient parfois en édictant une loi adaptée aux faits non prévus par la loi ancienne.
Par exception au principe de l’interdiction de l’interprétation analogique, voici certaines dérogations qui furent acceptées :
- l’interprétation analogique des dispositions absolutoires, c’est-à-dire qui enlèvent ou diminuent la responsabilité pénale est traditionnellement acceptée (car elle est bénéfique au prévenu)
- l’interprétation analogique est acceptée aussi dans la matière de procédure pénale
4. Le doute profite à l’accusé
C’est en fait le principe de la présomption d’innocence. Bien entendu, cela ne veut pas dire que le tribunal doit donner un sens à la loi pénale et pourrait se retrancher derrière le sens douteux de celle-ci pour, de ce seul fait, acquitter un prévenu.
Le principe « Le doute profite à l’accusé » est un pilier important de la procédure pénale qui est fondé sur la présomption d’innocence. Il s’agit d’un principe qui s’applique dans le cas où le juge n’est pas convaincu au-delà de tout doute raisonnable de la culpabilité de l’accusé.
I. La présomption d’innocence et l’administration de la preuve
La présomption d’innocence est un principe fondamental du droit pénal qui stipule que toute personne est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie au-delà de tout doute raisonnable. Cette présomption d’innocence implique que la charge de la preuve incombe à l’accusation et que l’accusé n’a pas à prouver son innocence.
II. Le doute profite à l’accusé
Le principe « Le doute profite à l’accusé » signifie que si le juge a un doute raisonnable sur la culpabilité de l’accusé, il doit bénéficier de l’acquittement ou de la relaxe. Ce principe vise à protéger les droits de l’accusé en empêchant toute condamnation arbitraire ou injustifiée.
III. L’intime conviction du juge
Bien que le principe « Le doute profite à l’accusé » soit un pilier important de la procédure pénale, il ne doit pas être confondu avec la notion d’intime conviction du juge. L’intime conviction du juge est la conviction personnelle du juge quant à la culpabilité de l’accusé. Cette conviction ne doit pas être basée sur des présomptions ou des conjectures, mais sur des éléments de preuve objectifs.