HISTOIRE DU DROIT
Dans ce cours d’histoire du droit, nous consacrerons une grande partie à la façon dont la France s’est approprié la pensée juridique grecque et la technique juridique romaine pour aboutir à une unification du droit français. Avant d’en arriver à cette conclusion, il convient d’étudier le système l’héritage gréco-romain.
Là où il y a une civilisation, une société, il y a du droit.
Les expériences juridiques les plus reculés sont, par exemple, le code d’Hammourabi, la Torah, le Lévitique ou encore les Dracon, Solon.
- Cours d’Introduction historique au droit
- Cours d’Histoire du droit
- Cours d’Introduction à l’Histoire du droit
- Histoire du droit de l’Antiquité à Napoléon
- Histoire du droit pénal
- Histoire du droit privé et public
- Histoire des sources du droit français
Les grecs sont les premiers à penser le droit. Dans un premier temps, sur un mode mythologique. Ainsi, selon Homère, l’épouse de Zeus, Thémis, est la déesse de la justice. C’est elle qui maintient l’ordre du monde. La fille de Thémis, Dikê, est la déesse du droit qui est envisagé comme les décisions de justice. Le droit chez les grecs c’est la jurisprudence. Cette différence est fondamentale. Elle prouve une chose, c’est que le droit a des origines certes divines mais le droit peut aussi être une œuvre humaine (Dikê). Or chez Aristote, dikê devient une vertu, la justice, et le droit pour Aristote, c’est la mise en œuvre de la vertu de la justice qui consiste à rendre à chacun ce qui lui revient.
Athènes était la patrie de la philosophie du droit mais Rome est la patrie de la technique juridique et de la législation. Voici le plan du cours d’histoire du droit sur www.cours-de-droit.net
- Introduction : l’héritage greco-romain
- I. le système politique grec
- II. le système politique romaine
- Titre premier : La renaissance juridique au IIe millénaire et ses prolongements à l’échelle des nouveaux Etats nationaux
- Chapitre premier : La Renaissance du droit romain et ses étapes
- Rappel historique :
- Chapitre second : Perfectionnement de la coutume
- Chapitre troisième : La récupération de la souveraineté à l’échelle « nationale » (royale française) et ses conséquences juridiques
- Section première : rappel historique : Les Capétiens
- Section seconde : A travers le contexte féodal, récupération de la notion de souveraineté à l’échelle du royaume.
- Une évolution progressive
- 1 indépendance du roi de France vis-à-vis de l’empereur
- indépendance du roi vis-à-vis du pape
- A- L’indépendance du roi de France
- 3 Les prétentions impériales
- Le rejet des prétentions impériales
- B- Le rejet des prétentions pontificales
- 5 La conception chrétienne du pouvoir
- Le rejet des prétentions pontificales par Philippe le Bel
- – Les conflits
- – Les thèses en présence
- la position du pape
- la position du roi de France
- Section troisième : Récupération subséquente par l’Etat royal français du pouvoir normatif et du pouvoir de juger
- Le roi source du nouveau droit Etatique : « si veut le roi, si veut la loi »
- A- Du législateur féodal au législateur souverain
- — Le suzerain législateur
- — L’exaltation du roi législateur
- B- L’exercice prudent de l’autorité législative
- Le contenu de la législation
- 2 Le principe du conseil
- II Les débuts de l’organisation de la justice royale
- A- Les grands principes
- B- L’organisation de la justice déléguée
- Quelques notions sommaires de procédure :
- C- Début de la lutte séculaire contre les autres formes de justice s’exerçant sur le territoire du soutient français.
- Lutte contre la justice seigneuriale
- — Caractéristiques du système de justice seigneuriale :
- — Les moyens de lutte contre cette justice :
- 8 Lutte contre la justice ecclésiastique
- — Caractéristiques des justices ecclésiastiques :
- — Les moyens de lutte contre cette justice :
- Chapitre quatrième : Les temps modernes, évolution vers l’absolutisme et marche vers l’unification du droit français.
- Section première : Rappel historique
- Section seconde : Les étapes de l’unification du droit par l’Etat monarchique
- Moyen Âge
- Époque moderne
- Au 17e
- Au 18e
- Chapitre cinquième : Ceux qui appliquent le droit au nom du roi. Notions sur le statu des juges sous l’ancien régime
- Section première : Les caractéristiques essentielles de la notion d’office et la patrimonialité des offices (se sont les section 1 et 2 du chapitre V dans le cour du prof)
- les officiers sont devenus inamovibles
- La vénalité des offices :
- — la vénalité occulte :
- — la vénalité officielle :
- L’hérédité des offices :
- Section seconde :les effets de la patrimonialité
- l’indépendance des officiers :
- II Une menace politique pour la monarchie française :
- III Réaction du pouvoir royal
- 1 Les commissaires :
- Les fonctionnaires :
- Titre second : L’évolution de la notion de souveraineté royale de la fin du moyen âge à la fin de l’ancien régime.
- Chapitre premier : Un droit spécial pour la couronne
- I La dévolution de la Couronne
- A- La dévolution spécifique de la Couronne
- 1- L’hérédité
- 2- La primogéniture
- 3 – La masculinité
- a- L’exclusion des filles
- b- L’exclusion des descendants par les femmes
- c- La loi salique, constitutio regia
- B- La dévolution immédiate de la Couronne
- 1- Le sacre privé de fonction constitutive
- 2- L’abolition fictive de la minorité royale
- 3- La fiction d’un roi toujours vivant
- C- Une succession indisponible
- 1- Un cas dramatique
- 2- La théorie statutaire de la Couronne
- II Vers l’inaliénabilité du domaine de la Couronne
- D- La composition du domaine
- 1- Au plan territorial, une notion ambiguë
- 2- Un ensemble de droit, de revenus et de prérogatives
- E- Un statut particulier
- 1- L’attribution du domaine à la Couronne
- 2- Un régime exorbitant du droit commun
- Chapitre second : Remise en cause, réaction et renforcement du pouvoir souverain (XVI, XVIIème siècle) et le devenir des lois fondamentales
- Section première : La crise du XVIe siècle
- I Le gallicanisme
- A Les évènements amenant le gallicanisme
- 1) Les prémices
- 2) Le conflit entre Philippe le Bel et Boniface VIII
- B La théorie gallicane
- II Le protestantisme
- A Le temps des troubles et l’édit de Nantes
- 1) Les troubles
- 2) Les idées monarchomaques
- a) Les monarchomaques protestants
- b) Les monarchomaques catholiques
- 3) L’édit de Nantes
- B Le protestantisme après la mort d’Henri IV
- Section seconde : Epanouissement de l’absolutisme au XVIIe siècle avec le correctif des lois fondamentales
- I Dans les faits et en doctrine
- A. La politique de Richelieu
- 1. Déclin des organes de concertation.
- 2. Mise au pas des aristocrates
- 3. Démantèlement du parti protestant
- B. La mise au pas louis-quatorzienne
- 1. La Fronde
- 2. Règne personnel 1661
- C- la remise en cause du pouvoir royal :
- 1 la conception du tyrannicide :
- 2 la conception des monarchomaques :
- D- l’exaltation de la monarchie :
- 1- l’absolutisme :
- la pensée de Jean Bodin :
- le cas des successeurs de Bodin :
- 2- la théorie du droit divin :
- a la conception traditionnelle :
- b Bossuet et droit divin :
- 3- la portée des doctrines :
- a le roi n’a rien gagné à cette doctrine :
- b le grand gagnant, l’état.
- II Le devenir des lois fondamentales
- A- L’existence d’un corps de lois fondamentales
- 1- La dévolution de la Couronne et la règle de la catholicité
- 2- La consécration de la règle d’inaliénabilité du domaine de la Couronne
- 3- Les précisions de la règle d’indisponibilité de la Couronne
- a- L’inconstitutionnalité des renonciations au trône
- b- L’inconstitutionnalité des habilitations royales à la succession
- B- Les déficiences des lois fondamentales
- a- Un domaine limité
- b- L’absence de véritable sanction
- c- Imprécision constitutionnelle
Introduction : L’héritage Greco-romain un droit fait par les hommes
Ces systèmes sont les premiers à introduire l’idée du citoyen. Celui-ci est obligatoirement un homme âgé de plus de 18 ans et ayant 2 parents vivant dans la cité. Le citoyens dans ces 2 systèmes bénéficie du droit civil (c’est a dire l’ensemble des libertés et des droits que possède le citoyen) Un citoyen a des droit politiques c’est-à-dire qu’il peut participer a la vie politique (au pouvoir législatif et exécutif) .
I. Le système politique grec
Les premiers foyers de peuplement se distinguent vers – 2000 av JC .Organisation de citée Etat dotée de système monarchique
Le premier système politique est une monarchie absolue et dure jusqu’en 1500 av JC
Puis vient une monarchie militaire (impérialiste)
Entre -1000 et -700 la monarchie se tempère, le roi délègue ses prérogatives a un Conseil des Compagnons et a une assemblée du peuple.
Le pouvoir est finalement accordé à un tyran c’est-à-dire à un homme élu pour résorber une crise (qui peut être agricole ….) .2 grands tyrans célèbres : Dracon (-620 av JC) et Solon (-590) .C’est pendant la période tyrannique que la démocratie a commencée à émerger.
C’est grâce à Périclès que de nouvelles législations sont nées au 5ième siècle. Il met en place la démocratie (demos = peuple, cratos = pouvoir) ; il créer également l’institution de l’Ecclésia (institution ou les citoyens se regroupent pour voter les lois), mise en place aussi de la Boulée (institution qui aide l’Ecclésia en préparant les projets de lois environ 500 membres) enfin il y a l’aréopage qui détient le pouvoir juridique et qui est constituée de 300 membres ayant participés a la vie politique. Théoriquement 60 000 citoyens sont comptés a l’Ecclésia mais seulement 6000 sont réellement actifs.
A cette époque les magistrats sont des hommes élus pour 1 an par l’ecclésia. Ils s’occupent de toutes les fonctions publiques. Ce sont les dirigeants de la cité qui sont organisés en collège (groupe de personnes qui a une fonction particulière). Les stratèges par exemple sont les chefs militaires.
A cause de leu impérialisme les grecs ont perdu la guerre contre les macédoniens au 4ième siècle et Athènes bascule dans la monarchie macédonienne.
Plusieurs auteurs on analysés les régimes politiques : – Hérodote, Socrate , Platon , et Aristote ont réfléchit a propos des régimes tyranniques et démocratique , ils réalisent chacun une typologie des régimes politiques .Pour les 3 dernier la démocratie a donnée naissance a l’anarchie tandis que pour Hérodote , le mieux est de prendre le meilleur de chaque régimes pour réaliser un régime mixte (c’est-à-dire un régime ou l’on prendrai le meilleur de chaque régime politique , dans la monarchie on grade le roi , pour éviter qu’il soit seul on lui attribut une élite et enfin l’ecclésia est conservée pour gouverner au coté des 2 autres ) Ce régime sera plus tard appelée république démocratique .
II. Le système politique romain :
A Rome l’implantation des populations se fait autour de – 1000, des petites villes. Rome se trouve au milieu des collines, là bas vivaient des familles dites Gentes chacun gouvernées par un chef, le pater. Romulus et Remus, les deux frères veulent obtenir le contrôle de cette fédération de familles. Selon la légende les patres ayant le pouvoir de convoquer les auspices, ils le font, or aucun des deux frères n’est préfère a l’autre. Romulus se proclame donc roi et créer un pomerium autour de Rome (sorte de sortilège sacrée qui empêche les hommes d’entrer dans la ville avec des armes). Les deux frères se battent et Romulus gagne et devient roi des romains.
Les citoyens romains se divisent en deux branches :
– les patriciens (hommes provenant des familles ayant fondées Rome
– les plébéiens (le peuple non aristocratique)
Il existe également ceux qui sont libres mais qui ne sont pas considérés comme citoyens, les pérégrins.
Tout comme Athènes, Rome est envahie par les Etrusques et la ville n’est pas réellement construit .Or la monarchie étrusque ne convient pas au peuple romain et les patriciens décide de faire un coup d’état en 509 av JC. Taquin le Superbe est déchu de son poste de roi et ce sont les patres qui prennent le pouvoir. Les plébéiens n’acceptent pas la suprématie des patriciens et décide donc de quitter Rome en sous cette menace leur est accordée un pouvoir politique.
La démocratie romaine se base sur l’idée que l’Etat est la chose de tous, c’est une chose publique (res publica)
Les citoyens romains vont être divisés en assemblées représentatives. Les commises représentant les patriciens et les conciles de la plèbe représentant les plébéiens.
Chez les romains les fonctions sont mélangées. Il existe 2 roi et 2 consuls pour ne pas qu’il est un abus de pouvoir. Comme chez les grec les magistrats s’occupe de ce qui est administratif (les prêteurs pour la justice, des questeurs pour les impôts, et des censeurs pour les affaires morales) .En cas de crise on prévoit un dictateur qui aura le temps de la résolution de la crise les tout pouvoirs).Au 2ième siècle les romains comme les grecs mènent une politique expansionniste, il conquièrent l’Italie, la gaule jusqu’au 1ier siècle avant JC. Or les structures misent en place ne fonctionnent pas sur de grands espaces. Les patres possèdent les terres et Rome rencontre une grave crise politique, religieuse … On va donc nommer un dictateur . Marius, resté beaucoup plus longtemps que ce qu’il devait on revient a un régime monarchique , avec une succession de dictateurs dont César est le dernier .Le Sénat propose a César de prendre le titre de roi , il le prend mais il est assassiné . En gros on ne voulait pas que la république meure en droit. On met en place le Triumvirat (un gouvernement a 3 personnes qui vise a résorber une crise pendant 5 ans : Octave ; Antoine, Lépide ; Octave fait la guerre contre Antoine, il reprend l’Afrique et l’orient et devient le seul au pouvoir).Il résorbe les crises et est suppliée par le Sénat d’accepter les tout pouvoirs pour deux ans. Le sénat accorde a Octave l’auctodidas (capacité suprême détenu par le sénat qui consiste a lire les volontés de Dieu ) .
Titre premier : La renaissance juridique au IIe millénaire et ses prolongements à l’échelle des nouveaux Etats nationaux
L’Europe est repartie après le plongeon qu’avaient occasionnées les invasions barbares. Les populations se sont civilisées puis christianisées. La population de l’Europe augmente. Les impôts, il y a des registres qui prouvent l’augmentation de la population. Les gens meurent moins de faim. En France, la population a un peu moins augmenter qu’ailleurs, car la France est déjà beaucoup peuplée et les gens ont déjà plus de possibilités de bien manger. Vers l’an 1000 il y avait environ 7 ou 8 millions d’habitants. Vers l’an 1000, l’Angleterre a environ 1 million d’habitant. Vers l’an 1000 on est 7 fois plus peuplés c’est pour cette raison qu’ils ont augmenter plus vite que nous.
On restera les plus peuplés d’Europe jusqu’à la Révolution française. La population de l’Europe augmente très fortement.
Il y a certains progrès techniques. On repend les choses qui existaient déjà auparavant. Les moyens de labourer la terre se répandent. La manière de tirer quand vous labourer. Le travail manuel fait manger les gens. Les animaux, ont les fait tirer la machine à labourer en leur attachant la machine par le cou. Néanmoins ils s’étranglent. D’où le besoin d’atteler par les épaules.
La révolution agricole n’est pas négligeable. Conquête de la terre. Défrichement car ils sont plus nombreux, ils sont plus nombreux car ils mangent mieux. Les terres sont cultivées en plus grand nombre donc la production augmente. Ils partent à la conquête de l’Europe. Ils ont commencé par élargir le paysage. Les petits enfants voyaient la forêt. A partir d’un moment ils déciment la forêt pour élargir leur surface de culture. L’Eglise à jouer un rôle énorme !!!
Au XIII le mouvement de défrichement de l’Europe s’est ralentit. Epidémie, famine… Augmentation car ils peuvent vendre leur production. Il y a des gens qui peuvent vivre sans travailler la terre. Reconquête d’une vie urbaine. Ils achètent et revendent. La nourriture des gens se résume en gros à du pain et des légumes. La vie urbaine est plus rurale que maintenant. Il y une hausse des prix. C’est un cycle qui reprend. Là on fait jusqu’à 400 km pour obtenir du blé pour pouvoir faire le pain. Les Italiens viennent en Provence. La monnaie circule de nouveau. Le prix de la viande monte.
On utilise de moins en moins de bois pour les châteaux. On en vient à faire des châteaux en pierre. Pour la laine il faut des moutons !!!!!!!!!!!!!!!!! L’idéal des gens est de ne pas travailler.
On constate en Europe occidentale une augmentation de la population car il y a une plus grande abondance de nourriture du fait d’un progrès dans les techniques de production. On augmente les terres cultivables en défrichant les forêts et de fait on assiste à une augmentation de la quantité de blé produit. De fait il y a une augmentation générale de la production et l’on tend peu à peu vers un retour à un système commercial, un développement des échanges. La monnaie reprend peu à peu une place centrale dans ce nouveau système qui se développe. Les échanges se font entre des villes de plus en plus éloignés et le commerce extérieur se développe. Il y a une sorte de spécialisation dans le blé, les draps, la laine. On inverse le jeu économique et l’on vend plus que l’on achète contrairement à l’époque romaine ou l’on était déficitaire, là on est excédentaire. On emprunte surtout les vieilles voies maritimes qui existaient déjà sous l’empire romain.
On assiste a un renouveau de villes. Les anciennes villes n’ayant pas disparu, on reconstruit du neuf sur de l’ancien. On assiste à un développement de grandes villes. Les villes sont de plus en plus sécurisé, on ferme les portes la ville et le système féodal s’effilochent. On s’écarte peu à peu du seigneur, et l’on pense de plus en plus à acquérir personnellement de l’argent. L’air de la ville rend libre. On a une sorte de libéralisation des échanges. Certaines villes du Nord acquièrent une certaine indépendance. L’individu qui est dans la ville est mieux traité que le paysan. Des oligarchies se développent ou se maintiennent dans les villes. Dans l’ensemble, la libéralisation de l’individu en ville n’a pas marché, et les villes sont peu à peu dominées par des oligarchies qui oppriment ceux qui sont pauvres, mais cela se passe mal car la gérance et très mal organisée et les villes sont reprisent peu à peu par l’Etat. L’avenir à ce moment là ne tend pas vers un système républicain mais vers une monarchie.
Il y a renaissance démographique, économique et culturelle de l’Europe à partir de l’an 1000. Il y a également une renaissance juridique et un développement de l’Etat. Tout le monde moderne est issu de cette époque.
Chapitre premier : La Renaissance du droit romain et ses étapes
Rappel historique :
Apparition ou plutôt réapparition d’une source de droit privé et public qui va concurrencer et dans certaines régions supplanter la source essentielle du droit au Haut moyen-âge c’est-à-dire la coutume.
Les étapes de la renaissance du droit romain : Le droit romain n’avait jamais été complètement oublié, on se souvient qu’a l’époque franque, la personnalité des lois avait entraîné de la part des rois barbares la publication d’abrégés de droit romain pour leur sujet qui avaient conservé le statut personnel romain. Ces lois s’appellent les lois romaines des barbares (exemple : la loi romaine des wisigoths appelé aussi bréviaire d’Alaric). La loi romaine des barbares à servie également chez les Francs. On avait aussi quelques rares livres de droit plus ou moins complet. La culture s’est éteinte à moitié puis s’est rallumée. Il y a donc un système composé d’abrégés de droit romain et de résumés. Depuis 476 il n’y avait plus d’empereur romain en occident, ce que l’on a comme trace vient surtout de la période de l’avant chute de l’empire d’occident. Le Code théodosien de 438 est pratiquement la seule source du droit en occident. Le code Justinien de 534 ne fût que peut connu en occident. La compilation Justinienne était à peu près ignorée. Peu d’interférences du droit romain oriental sur l’orient. Les Italiens avaient gardé une domination byzantine postérieure à la compilation de justinien. On a pu récupérer les textes de Justinien par le sud de l’Italie.
L’effort intellectuel de la renaissance grégorienne a sûrement joué un rôle. La documentation devient un peu plus abondante. Dès le début du XIIe siècle un auteur comme Yves de Chartres, utilise les textes du Digeste. A partir de là une tradition s’installe et veut que vers 1130, les Pisans aient récupéré en Italie du sud au pillage de la ville d’Amalfi un manuscrit du Digeste, c’est ce que l’on appelle le manuscrit de Florence car conservé dans cette ville depuis le 15e siècle. Comme ils savaient le lire, ils ont compris que cela pourrait bien fonctionner, pour rétablir un droit écrit. Là ils ont un document de base. A partir du premier tiers du 12e siècle, l’étude du droit romain beaucoup plus évoluée que les droits postérieurs qui l’avait remplacé pendant 7 siècle est reprise en Italie.
C’est de Bologne que rayonna cette renaissance du droit écrit par opposition à la coutume qui est en principe orale. Il y a différentes écoles. Développement des universités très sommaire au départ, c’est une personne qui sait lire le droit romain et qui décide de faire part de ce qu’il sait à d’autres car l’homme est un animal pédagogique. C’est les glossateurs. L’école de Bologne à fournit les meilleurs docteur en droit de l’époque. Irnerius un célèbre glossateur, l’un des premiers. Bulgarius, Martinus, Placentinus. Ce dernier introduit le droit romain à Montpellier puis à Orléans. Accurse qui a résumé les travaux de ses prédécesseurs depuis environ un siècle dans la grande glose.
Les glossateurs, car ils glosent, c’est-à-dire qu’ils étudient le droit romain mot à mot. La glose c’est le maître, le docteur qui a un livre et il part du texte. On le lit, et on l’explique mot par mot. Une fois commenté, il résume ce qu’il a dit dans une note souvent en marge du texte. Généralement cela se conclut par une note personnelle. La glose c’est une phrase explicative avec des renvois à d’autres textes lorsque cela est possible. Au début, les gloses sont courtes, puis petit à petit, les gloses deviennent de plus en plus importantes. Les gloses sont devenues plus importantes que le texte lui-même. On arrivait plus à déterminer quel était le texte et quelle était la glose. Il y avait des gloses marginales (marge) mais aussi interlinéaires (entre les lignes). L’avantage de la méthode des glossateurs était de permettre de bien connaître le texte. La base même du droit positif était connue. Malgré tout cela restait restreint, étroit on sortait peu du texte.
Peu à peu, on est sorti du système de la glose vers le 13e. C’est l’époque des post glossateurs. On les appelle aussi les Bartolis, du nom d’un célèbre d’entre eux que l’on appelle Bartoles. Ils sont de moins en moins de Bologne. Montpellier, Pérouse, Pise… Il y a désormais un certain nombre de post glossateurs français notamment à Toulouse. Jacques de Revigny ou Pierre de Belle-perche. Les textes qui se trouvent dans le Digeste ne sont plus très bien adaptés au monde, car il y a eu une évolution. Ils essayent de garder le texte en essayant de l’adapter et essayent de lui rendre une utilité. C’est l’époque dialectique. Ils essayent de tirer des règles générales que l’on peu appliquer à l’époque, raisonnement par analogie. Cela permet d’actualiser le droit romain et cela le positive. Les post glossateurs ont eu tendance à être plus éloignés du texte et on tendance à le déformer et essayent de l’adapter à la réalité. ( beaucoup plus tard on aura vers le 16é siècle, l’école historique, des auteurs qui étudient le droit romain pour lui-même, tel que de l’histoire du droit, on le tue car ils en font une sorte d’étude sociologique… Mais cela n’est pas du droit positif ! Godefroi, Dumas… ).
On assiste à un développement des universités. Il y a des endroits où il y a des étudiants et où des professeurs enseignent. C’est dû notamment aux efforts fait par les Papes. La papauté crée des endroits où l’on enseigne le droit et la théologie. Il y a Paris vers 1200, qui enseigne la vraie science qui n’est autre que la théologie ainsi que la politique et le droit royal refuse le droit romain ce qui impliquerait la reconnaissance d’un empereur romain. La Sorbonne est un collège à la base, créé par Sorbon, chapelain de Saint-Louis. C’est une fondation pieuse pour que les étudiants puissent venir étudier. Oxford, Paris sont des universités qui sont des têtes contre le roi, contre le temporel et pour le spirituel. Il y a Toulouse pour lutter contre les Albigeois. On étudie le droit, la médecine, la théologie. Le droit laïque temporel s’étudie surtout à Bologne. La médecine à Salernes ou à Montpellier. A Oxford ou à Paris la théologie et les idées politiques.
Les conséquences de la renaissance juridique en droit public et en droit privé : Placentin, puis d’autres ont introduit le droit en France, à Orléans, à Montpellier, Toulouse, Bourges. Les étudiant sont par exemple légistes, opposés aux papes. Ils ont été nourrit dans l’idée qu’il y avait un empereur (empire romain germanique ) et ils l’appliquent au roi. Le roi de France est empereur dans son royaume et son pouvoir n’est pas subordonné au pape ! Les magistrats on fait leur étude en droit romain. Après, il y a des régions qui appliquent le droit romain et d’autres le droit coutumier. Le magistrat a appris le droit romain mais après il doit s’adapter aux régions coutumières. Il faut distinguer l’influence du droit privé puis l’influence en droit public.
En droit privé. Il faut distinguer les pays du sud et les pays du nord. Les pays d’influence latine et des régions ou il y avait les invasions barbares. Les régions du midi, le droit romain trouvait un terrain tout préparé. La réception du droit romain s’est effectuée sans difficulté. Dès la deuxième partie du 12e siècle on prend le droit romain comme droit positif. Les usages juridiques méridionaux correspondaient à peu près aux écrits de Justinien. (Exemple du régime matrimonial : la dot or le régime matrimonial romain c’est la dot, dans le nord, c’est le régime de la communauté). Dans le Nord il est plus difficile d’appliquer le droit romain. Dans le sud comme dans la compilation Justinienne droit patriarcal. Cependant même dans ces régions où même le droit écrit correspondait à une matière vivace, matière féodal ne peut être retrouver en droit romain. En outre, les notaires et les patriciens qui rédigeaient les actes ont apporter beaucoup de modifications en faisant refuser aux parties des clauses prévues par le pur droit romain qu’ils ne voulaient pas faire passer dans leur actes. De fait on n’a pas appliqué réellement le droit justinien. Il y avait tout de même 8 siècles de différence. Pratiquement, on a trouvé commode de prendre un droit écrit qui correspondait aux usages c’est une sorte de coutume générale du midi. Quand le roi a contrôlé les régions méridionales, il a gardé le droit romain. Dans les régions du Nord, l’influence du droit romain ne s’est exercée que par les juristes et les patriciens qui exerçaient la coutume mais qui avait étudier le droit romain. A la différence du midi, le droit romain n’a jamais remplacé la coutume. L’influence a été nette en matière de procédure et de droit des contrats parce que là, les systèmes de types barbares étaient trop primitifs.
Ainsi s’est formé dans le royaume une distinction entre les pays de droit écrit du sud et les pays de coutume au Nord. Distinction interne entre le Nord et le Sud. La limite correspondait à peu prés au pays de langue d’oc et langue d’oïl. La limite est assez sinueuse elle va de l’océan en passant par la Charente jusqu’au lac de Genève et ça fait des zigzags. Droit écrit en 1/3 de la France et droit coutumier au 2/3. Dans le Nord coutume de Paris est la coutume presque générale du Nord. Au fond la révolution française a fait un mélange de la coutume de Paris et de droit romain.
Chapitre second : Perfectionnement de la coutume
Perfectionnement de la coutume car la renaissance intellectuelle a fait que du point de vue du droit à connu une certaine renaissance. Au XIIe siècle ces coutumes restent encore peu rédigées officiellement. La coutume est orale au départ. Il faut donc trouver un moyen pour connaître les coutumes d’un endroit. Enquête par turbe.. En même temps, les coutumes restent très nombreuses et très localisées. Cependant, la tendance au XIIe et au XIIIe c’est l’élargissement des coutumes. Il y a une tendance à l’élargissement du détroit puis on arrive à les réunir. Progrès des coutumes qui commencent à se généraliser. Au XIIIe siècle il y a des coutumes mais provinciales, coutume de Normandie, coutume de Champagne, de Bretagne… Toutes les coutumes ont des caractères régionaux, dans le sud c’est la dot dans le Nord régime de communauté. Le système par sa création est morcelé.
Se développe au XIIIe siècle, grâce à l’étude du droit romain et à l’esprit juridique acquis à l’université des personnes écrivent sur la coutume. Au départ, les écrits sont en latin. Malgré tout, dans la rue on ne parle pas latin. On comprend de moins en moins. Petit à petit on délaisse la langue littéraire pour une langue un peut plus triviale. Les premières rédactions coutumières seraient les Assises de Jérusalem fin du XIIé. Cela rédige les coutumes des francs en terre sainte. En France au XIII apparaissent des pratiques ou des styles, se sont des gens qui toute leur vie ont jugé ou appliquer la coutume, qui éprouvent le besoin de la mettre par écrit car ils sont marqués par leurs études marquées par le droit romain. Les premiers sont les coutumiers normands. La Normandie est une région en avance. Très Ancienne coutume de Normandie vers 1200, anonyme en latin. Coutume rédigée, par écrit. Le droit se perfectionne au fur et à mesure. A force d’utiliser l’ancienne coutume ils se sont rendu compte qu’il y avait des erreurs. Vers 1250, ils publient Le Grand Coutumier de Normandie. L’auteur sort un peu de l’anonymat, ils se rôdent. Ils deviennent des juristes lentement. Cela a été considéré comme une sorte de code normand. La coutume de Normandie rédigée à influencer le droit de Paris et le droit anglais. Il en reste des traces dans les îles anglo-normandes. Vers 1250, Pierre de Fontaine, qui était baillis du roi en Vermandois (région de Saint-quentin), rédige en français Les Conseils à un Ami. Il traduira d’ailleurs des passages entiers du digeste qu’il introduira habilement dans Les Conseils à un Ami. 1260 paraît Livre de Jostice et de Plede. 1270, on connaît les Etablissements de Saint-Louis. C’est un ouvrage privé reproduisant des règles privées de la Touraine, de l’Anjou et de l’Orléanais.
L’auteur coutumier le plus important est Philippe de Beaumanoir. Ce dernier à remplit les fonctions de baillis du roi. C’est un bon juriste, c’est l’un des premiers en date qui a un esprit cultivé. Il a une culture générale assez vaste et a des fonctions importantes. La coutume de Clermont en Bauvésie. Il utilise moins de droit romain dans les textes, il l’utilise plus pour comparer.
Coutume de Paris, fin de XIVe siècle. Il y a même une sorte de synthèse des coutumes. Même dans le Nord, il y a une renaissance du droit, le droit coutumier.
Chapitre troisième : La récupération de la souveraineté à l’échelle « nationale » (royale française) et ses conséquences juridiques
Il y a un Etat souverain qui oblige les gens à se soumettre à la justice du roi.
Section première : rappel historique : Les Capétiens
Au début de notre période, au commencement du XIe siècle, Hugues Capet élu roi en 987. La monarchie désormais entre les mains des capétiens, est encore très faible. Le domaine royal est très réduit car tout le reste est vassalisé. On lui obéit directement à Paris, à Orléans, Arpajon, Montreuil sur Mer… Comme roi, Hugues Capet règne théoriquement sur la Francie Occidentale. La frontière de cette France, va du sud, Nord de l’Espagne jusqu’à la Saône… Il est roi des Francs. Mais l’autorité du roi n’est efficace que dans le royaume. Le roi peut difficilement aller de Paris à Orléans car il se heurte à des Barons.
Vers 1300 la situation est transformée. Certes la France va s’agrandir. La monarchie française joue un rôle international. Philippe le Bel se dispute avec le pape. Croissance des grands états européens. Guerre de cent ans. Naissance de l’Etat.
Il n’y a pas d’impôt royal permanent ni l’armée royale permanente. On ne distingue pas le roi de France du duc de Normandie au point de vue des ressources fiscales et de l’armée. Pour l’instant le roi n’a pas le droit de faire la loi. Ce n’est pas lui qui crée la coutume. Il ne crée pas de droit, ce sera plus tard. Il partage le privilège de battre monnaie avec d’autres seigneurs. On peut simplement signaler que contrairement au carolingiens, il a une capitale à peu près fixe. Caractère unique de la monarchie.
Les 1ers capétiens n’avaient pas encore de capitale attitrée et se déplaçaient de villa en villa : il faudra attendre Philippe Auguste pour que Paris devienne capitale du royaume.
Le roi dispose d’un atout majeur qui lui donne de l’autorité sur les autres seigneurs qui sont bien souvent plus puissants que lui : il est couronné et sacré par un évêque, et est ainsi reconnu comme roi de droit divin. Ce sacre religieux lui assure un pouvoir qui le distingue de ses vassaux et lui garantit un prestige incomparable.
Afin d’assurer une monarchie stable et la continuation de la dynastie, Hugues Capet va instaurer deux principes fondamentaux :
– l’association du vivant du roi du fils aîné au trône : cela va permettre de passer en douceur d’une royauté élective à une royauté héréditaire,
– le principe de la primogéniture : la priorité est accordée à l’aîné des enfants du roi, évitant tout conflit au sein de la famille royale (c’est ce qui a en partie causé la fin des dynasties mérovingienne et carolingienne).
Ainsi, cette faible dynastie va pouvoir perdurer sans conflit de succession et s’affirmer progressivement après la mort de Hugues Capet en 996 avec Robert II le Pieux, qui sera roi de 996 à 1031.
Accroissement territorial. Notion de souveraineté très peu utilisée. Rivalité de la maison royale capétienne avec la maison des Plantagenêt. Mariage de Henry Plantagenêt. Henry 2 est mort et Richard Cœur de Lion devient héritier en Angleterre. Prétextant différentes fautes, il a convoqué à la Cour. Jean sans terre. Empereur romain germanique. Grossissement de la monarchie française. Duché de Normandie et son importance. Le droit de Comice.
Politique des pariages, autre exemple de moyen d’expansion qui relève du droit féodal, cela veut dire partage. C’est une sorte de co-seigneurie. Deux seigneurs qui exercent la puissance justicière en indivision sur un territoire. C’est une sorte de co-dominion. Le seigneur se résigne à partager avec le roi. Moyennant l’appui du roi il lui laisse la moitié de sa seigneurie. Les droits seigneuriaux sont partagés. Les seigneuries ecclésiastiques. Le roi en a profité pour imposer aux seigneurs ecclésiastiques des partages. Procédé d’accroissement imparfait. Un seigneur parier est un seigneur qui a partagé sa seigneurie. La tendance du souverain était d’augmenter le territoire du souverain. Le roi pénètre par le droit féodal et le détruit peu à peu. Pariage d’Andorre, entre l’Espagne et la France. Le pariage au départ s’est fait entre l’évêque Urgel et le Comte de Foix. Le roi de Navarre est devenu parier d’Andorre. Le roi de Navarre est devenu roi de France. Le roi de France est devenu co-seigneur d’Andorre. Jusqu’à une époque récente, Andorre était un Etat partagé par l’évêque Urgel et le chef de l’Etat français.
Politique matrimoniale et familial. Patrimonialité des fiefs. Leur hérédité, leur vente, leur apport en dot. Le droit privé. Acquisition de propriété par mariage. La souveraineté n’est pas parfaite et on ne peut pas encore après avoir appliquer le droit féodal privé refuser de rendre. On ne peut pas après avoir vendu, hérité, on ne peut pas refuser de lui rendre ce que la femme a amené en mariage. Deux poids, deux mesures. La famille capétienne a rendu le moins possible. Pré-carré. Ils ont généralement plus acquis que perdus. C’est un sacrilège que de diminuer le terrain.
Comte de Toulouse et les Albigeois. Le Pape a donné ses biens. Les croisades. Le dernier comte de Toulouse, on a marié l’héritière du Comte de Toulouse au frère du roi de France, Alphonse de Poitiers. Le Comté de Toulouse a hérité au roi de France après la décimation des Albigeois.
Quand on contrôle un territoire, il faut instaurer la paix. De plus, la guerre entre seigneurs était admise. Il y avait une certaine idée anarchiste avec le droit féodal. Développement du concept de devoir souverain et un devoir moral. Il faut de moins en moins admettre la guerre entre les seigneurs. La paix du roi. L’église avait utilisé sa force morale et matérielle pour établir la paix en disant qu’ils devaient se battre contre les incroyants et non entre chrétiens. Il faut que les gens se soumettent à la justice de l’Etat. Pacification partielle, interdiction des guerres privés sous Saint-Louis, mais les guerres privées sont simplement limitées dans le temps, sorte de trêve. Politique de sanction grâce au développement matériel du roi ce qui a permis de limiter les guerres privées. La quarantaine Le Roi (quarantaine du roi) fondée sur l’idée d’un délai avant de se battre, s’apparente à la trêve de Dieu. Il faut qu’ils attendent quarante jours. Si cette période n’est pas respectée, le roi peut sanctionner. Cela date de Philipe Auguste. Cette période permet aux citoyens innocents, dont les gens n’ont pas pour raison d’être la guerre de se mettre à l’abri. Bien souvent, le délai permettait de ne pas faire la guerre. De plus en plus les bon offices du roi permettaient de ne pas faire la guerre.
Exemple de pacification limitée contre personne protégées. L’asseurement sorte de traité de paix entre eux. Ils se jurent la vie et les membres, il y a un serment. S’ils ne respectent pas leur serment, ils ont affaire au roi ainsi qu’à l’Eglise. Système de serment garantit par l’Etat. A partir du XIIIe le roi devient plus fort et peut imposer à l’une des partis l’acceptation du serment. Le roi peut également imposer aux deux parties de faire jurer, de faire un serment. La justice du roi émerge en quelque sorte. Si le serment n’est pas respecté, il y a sanction du roi.
Autre exemple de pacification contre les personnes protégées. Il existe également la sauvegarde. Sous la protection du roi moyennant finance, source de richesse de la part du roi. Si les personnes sont sous sauvegarde et qu’elles sont attaquées alors il y a sanction car on s’attaque directement au roi.
Les fonctionnaires, les agents d’Etat, les percepteurs dans l’exercice de leur fonction… Ils ne sont pas protégés mais s’ils sont attaqués, on attaque physiquement le roi. De fait, les sanctions sont plus importantes. Ce n’est pas la sauvegarde, c’est plus élevé.
Autre exemple de pacification limitée dans l’espace : la garde des églises. Origine très ancienne. Cette protection était assurée au départ par les Carolingiens. L’Etat devait protéger les lieux de cultes. Lorsque l’Etat carolingien s’est écroulé, beaucoup de seigneurs s’étaient emparés des lieux de cultes et de la garde de ses lieux de cultes. Cette garde, accordée au seigneur gardien beaucoup d’avantages. Avantages financiers ainsi que des avantages en nature. Naturellement, la lente construction de l’Etat Capétien, a entraîné l’idée que le roi est gardien de toutes les églises de son royaume et donc seul bénéficiaire des profits. Il y a eu de nombreux conflits entre le roi et les gardiens qui s’étaient emparés de cette garde à la chute de l’empire carolingien. Cette garde de l’Eglise était un moyen de pacifier les guerres car on attaquait pas les églises et les lieux de cultes.
A force de pacifications partielles, on en arrive à l’interdiction de la guerre privée dans le royaume. On peut dater cette interdiction d’une ordonnance de Saint-Louis (Louis IX) ordonnance de 1258. Ordonnance qui abolissait le duel judiciaire et soutenait donc la procédure. Ordonnance prématurée néanmoins. Les guerres privées entre seigneurs ont néanmoins continué après Saint-Louis. Cette interdiction sera plus sérieuse au XIVe siècle car le roi avait acquis des moyens plus étendus pour faire respecter cette interdiction. Le roi envoyé par exemple des sortes de gendarmes au frais des seigneurs qui voulaient se battre. Pour les faire partir, il ne fallait pas se battre.
On passe peu à peu des guerres entre seigneurs à des guerres dynastiques, entre roi. Les croisades ont disparus lentement. On en arrive à des guerres nationales, entre différents états, des guerres idéologiques.
Section seconde : A travers le contexte féodal, récupération de la notion de souveraineté à l’échelle du royaume.
Une évolution progressive
La souveraineté avait était supplantée par la notion de suzeraineté laquelle implique pour l’obéissance une implication personnelle et volontaire. Même à l’époque carolingienne cette notion de suzeraineté n’avait guerre était récupérée. Cette récupération de la souveraineté s’est faite au profit des Etats nationaux et non pas au profit de l’Europe (ancien empire romain). Avant que les juristes réussissent à l’élaboré de manière cohérente et juridique, les capétiens l’avaient construite progressivement grâce au sacre, à l’implantation de la famille, l’extension du territoire. Ils sont de plus en plus fort, de plus en plus gros. Il ne faut pas oublier le rayonnement de certaines individualités royales. Comme par exemple Saint-Louis. Techniquement, la renaissance du droit romain avec les dangers cela présenté pour un pouvoir national, si on interprétait les textes littéralement à quand même joué. A partir de la fin du XIIe, la Cour du roi comprend non seulement des vassaux mais aussi des légistes qui ont par conséquent établit une certaine juridicité du droit. Dans ces textes, l’obéissance au pouvoir n’est pas une volonté personnelle des individus, mais découle de l’autorité étatique. Chacun est sujet du roi et lui doit obéissance. Soumission à une autorité étatique. L’Eglise à eu une importance avec ses théologiens. L’Eglise joue la carte du pouvoir. Ils ont justifié sur le plan chrétien la nécessité du pouvoir souverain en précisant mieux l’importance morale. L’Eglise avait orienté la féodalité ainsi que le nouveau pouvoir en formation. Sur le terrain, les moyens pratiques sont partis du droit féodal, comice, et on l’a transformé en étatisme. Même si le roi a un destin tracé reste un seigneur, mais seigneur suprême. A mesure que l’effort des génération capétienne commence à porter ses fruits, la manière de résoudre un certain nombre de problèmes théoriques dans le cadre initial des usages féodaux vassaliques montre que la nature de son pouvoir est différente.
Exemple premier : Le roi, le souverain en formation peut-il être dans le cas de prêter hommage et de devenir en tant que noble l’homme d’un autre homme, c’est-à-dire vassal. Non, le roi ne peut être l’homme d’aucun homme. Il ne doit obéir à rien, même pas au Pape. Il est souverain absolu. Ici la réponse négative a été assez nette, assez tôt. Elle est déjà dégagée par SUGER XIIe. Suger, abbé de Saint-Denis a été successivement le principal ministre de Louis VI Le gros (1108-1137) et son fils Louis VII Le jeune. Il était directement intéressé à la question puisque le roi de France tenait de l’abbé de Saint-Denis dans le cadre tout à fait normale des relations féodo-vassaliques la région du Vexin Français. Suger ajoute que s’il n’était pas roi. D’une part le souverain peut acquérir en utilisant le droit féodal. Il prend Pontoise mais ne doit pas hommage à l’abbé Saint-Denis. On ne peut pas abandonner sa souveraineté même si l’on en a envie. Les rois sont enterrés à Saint-Denis. L’oriflamme est prise à Saint-Denis. Manteau bleu de Saint martin, Fleur de Lys qui date des capétiens mais on en n’est pas sûr… Le roi Français ne doit obéissance à personne.
Exemple second : Le roi peut-il commander directement à ses arrières vassaux. L’obéissance vassalique est volontaire. Un suzerain par rapport à un arrière vassal commande ceux qui lui ont prêté hommage. Un suzerain = personne qui désigne la personne qui est le seigneur de mon seigneur. L’homme de mon homme n’est pas mon homme. Si le droit peut commander directement, il commande aux individus qui n’ont fait aucun acte de fidélité envers lui. Ils ne sont plus des arrière vassaux mais alors des sujets. Influence des systèmes anglo-normands. Dans le duché de Normandie, la règle « l’homme de mon homme n’est pas mon homme » est moins importante, les ducs sont obéit directement. La Normandie était en avance, l’obéissance directe au duc était beaucoup plus courante. Et lorsque les rois de France se sont emparés du duché de Normandie, ils ont essayé de le transmettre au reste du pays. Au XIIIe siècle, le principe d’obéissance direct est souvent invoqué. Non-application au roi du principe normal. « Duc, comte, vicomte, baron, peuvent tenir fief les uns des autres et devenir homme sauf dignité de roi contre qui hommage ne vaut rien. ».
« Le moi se pose en s’opposant »
La notion de souveraineté vient du droit romain mais en même temps ils ne veulent pas être romains. C’est ici le roi qui gouverne et qui a de l’autorité même sur des gens qui ont autant de pouvoir que lui. Il a défendu ce qui existe à l’extérieur, c’est l’indépendance royale, que les capétiens ne cesseront de proclamer. Premièrement l’empire romain, désormais depuis 962 depuis la fin du 1er millénaire cela repose sur des traces germaniques, sa puissance se situe dans l’empire allemand. La chrétienté, son aire de puissance temporelle se situe en Italie. Etant donné la préservation de l’église elle a des points d’influence sur l’ensemble de l’Europe et notamment en France et est dangereuse par rapport au pouvoir national qui est en train de se créer. Dès que le roi sera plus fort il s’opposera au pape et à l’empereur.
2 indépendance du roi de France vis-à-vis de l’empereur
Cela ne pose pas de problème ce qui pose le plus de difficulté c’est le pape. La renaissance du droit romain a été utilisée par les légistes du roi. Les textes présentaient un danger car tous ceux-ci énonçaient que le pouvoir appartenait à l’empereur hors durant cette période le roi fait tout pour avoir le pouvoir. Toutes les monarchies de cette époque n’acceptent pas que le pouvoir puisse appartenir à l’empereur. En France Philippe II, est le souverain, il ne veut pas que ces sujets trouvent des arguments contre son pouvoir et puisse le contester et demande donc de l’aide au pape avec qui il a des relations et comme celui-ci contrôle tout l’enseignement dans l’Europe il édicte un texte qui interdit l’enseignement du droit romain à l’université de Paris. On étudié donc à Paris la théologie ; pour étudier le droit on allait à Orléans. Le pape dans un texte qui traité d’un problème très éloigné du droit constitutionnel, sur la légitimité des enfants, écrit dans un détail du texte que le roi de France n’a pas de supérieur, cette affirmation a été exploitée en France. Ce que l’on voulait c’était garder la souveraineté romaine, le souverain en France est donc le roi.
2 indépendance du roi vis-à-vis du pape
L’église est très hiérarchisée, elle enterre la vie quotidienne, on va à la messe, on est baptisé et on se mari de manière catholique, enfin on est enterré en terre bénite. On a pas le choix, on doit adhérer à ces croyances. Tout cela est à l’échelle de l’Europe. C’est alimenté par des ressources financières et est hors de portée de l’état. Sa puissance économique qui découle de sa mission, son argent est très anciens et elle a même plus d’argent que l’état. L’église est la principale force de l’Europe mais c’est largement affaiblie en raison de l’opposition avec le roi. Le roi au fur et à mesure augmente cherche à devenir indépendant vis-à-vis du pape. A la fin du 13ème siècle les choses changent. Conflit entre le pouvoir laïc qui augmente et le pouvoir religieux qui est très important. Le roi fait tout pour augmenter sa puissance et fait donc payer les français. Le pape est reconnu comme chef spirituel mais pas comme chef temporel ce qui pose un problème donc ici aussi affrontement entre le roi et le pape. L’église ne paye pas d’impôt et les français doivent donner des sous à l’église mais le gouvernement a besoin d’argent et fait donc payer les français et l’église en cas d’urgence. Le pape n’est évidemment pas d’accord cependant il est obliger de payer en cas d’urgence. Il y a également des conflits personnels.
L’idée d’un peuple chrétien, soumis à la double puissance du pape et de l’empereur, a été une idée dominante durant la période. C’est le concept d’Unitas christianorum : l’on considérait qu’au-delà des ethnies, au-delà des races, les habitants de l’Europe ne formait qu’un seul et même peuple, le peuple chrétien, guidé par le pape et l’empereur. Cette idée n’a pas disparu avec l’Empire carolingien, tous les rois européens devant être soumis à cette double tutelle.
A- L’indépendance du roi de France
Après la chute de l’Empire carolingien, l’idée d’une Europe unie ne disparaît pas.
1) Les prétentions impériales
Otton Ier (ou Othon Ier) avait pour dessein la restauration de l’Empire de Charlemagne afin de nourrir ses prétentions impériales. La domination effective des empereurs germaniques ne s’étendait pas, en effet, à l’ensemble de l’ancien Empire carolingien ni même à la France de l’époque. Au cours de la diète de Ronconglia, quatre grands juristes ont repris les théories juridiques de l’Empire romain notamment en exprimant que l’empereur romain disposait d’un pouvoir législatif illimité. De ce fait, l’autorité de l’empereur germanique devait être considérée comme supérieure à tous les autres pouvoirs d’Europe, cela était traduit dans des maximes juridiques :
– « C’est par toi que les rois règnent et que les princes demeurent ou passent » ;
– « Tout honneur [ici, charge] dans le monde est tenu de toi seul » ;
– « Dominus mundi » => l’empereur est le maître du monde.
Les quatre grands juristes ont affirmé l’universalité du pouvoir de l’empereur sur l’Europe, les autres pouvoirs (ceux des rois) ne sont que des pouvoirs subordonnés => reges provinciales (rois de province). Cela n’était pas du goût des rois, surtout du roi de France.
2) Le rejet des prétentions impériales
L’expression du rejet des prétentions impériales s’est surtout opérée militairement (bataille de Bouvines, 1214) mais aussi intellectuellement, plus précisément juridiquement.
On distingue deux réactions aux prétentions impériales.
D’une part, la réaction de la papauté, en lutte contre l’empereur germanique, qui cherche des soutiens dont le roi de France. Elle procède de deux étapes :
– les papes qui se sont succédé ont affirmé l’égalité entre le roi de France et l’empereur germanique (ce phénomène prenant sa source dans l’histoire de l’Empire carolingien) ; en effet, les rois de France étaient les successeurs de Charlemagne au même titre que les empereurs germaniques suite au partage de Verdun de l’Empire en 843 ;
– cette égalité a été affirmée par le pape Innocent III dans la décrétale Per Venerabilem (1202) => « …étant donné que le roi de France ne reconnaît pas de supérieur au temporel… » ; c’est devenu une maxime de droit.
Les légistes du roi de France sont allés plus loin encore. Ils ont cherché à donner au roi une autre base de légitimité que le droit canonique. Ils ont utilisé le droit romain en poussant très loin le raisonnement historique. Les légistes ont, en effet, développé l’idée que le roi de France était l’héritier des empereurs romains, via Charlemagne, et devait par conséquent disposer de prérogatives similaires à celles de ces derniers. D’où, au début du XIVe siècle, la maxime de droit : « Rex Franciae in regno suo imperator est » (le roi de France est empereur en son royaume). Cette maxime permet au roi d’appliquer toutes les maximes du droit romain et même celles prises à la diète de Ronconglia (1158).
B- Le rejet des prétentions pontificales
À l’instar du pouvoir germanique, le pouvoir pontifical se présentait comme l’héritier du monde romain en ce que la religion chrétienne fut déclarée licite en 313 par Constantin et devint religion d’État en 380 par l’édit de Thessalonique. De ce fait naquirent des conflits, conséquences des prétentions pontificales.
1) La conception chrétienne du pouvoir
La conception chrétienne du pouvoir reposait sur deux idées fondamentales.
– L’Église, se référant aux paroles du Christ, distinguait deux royaumes, le royaume de Dieu et le royaume terrestre et par conséquent deux sortes de pouvoir, le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel. « Rendez à Dieu ce qui est à Dieu, à César ce qui est à César« . L’Église n’a jamais nié la légitimité du pouvoir temporel. Elle considérait cependant qu’il émanait du divin.
– La question des rapports entre les deux pouvoirs s’est souvent posée notamment à la suite du massacre de Thessalonique. En effet, l’empereur romain était soumis à l’Église puisque baptisé. Saint Ambroise – évêque de Milan, en contact avec l’empereur romain – s’est alors prononcé en raison du pêché commis par l’empereur (ratione peccati). Saint Ambroise accusa l’empereur d’injustice. Mais l’empereur dit que Saint Ambroise n’avait pas à s’en mêler car c’était de la politique. A cette opposition de l’empereur saint Ambroise rétorqua que certes il y avait une distinction entre les domaines mais qu’il fallait une distinction entre la personne privée et publique de l’empereur. L’empereur en tant que personne privée est soumis à la puissance de l’église qui intervient en raison du pêché. Doctrine simple à priori car le pouvoir politique a souvent voulu dominer l’église et l’église a souvent voulu s’ingérer dans la gestion politique des royaumes.
2) Le rejet des prétentions pontificales par Philippe le Bel
La réaction aux prétentions pontificales s’est traduite lors de deux importants conflits entre la papauté (incarnée par Boniface VIII) et le roi de France, Philippe le Bel. Ce dernier refusant toutes les prétentions politiques de la papauté, laquelle s’inspirait de la réforme grégorienne (après une importante crise au sein de l’Église, Grégoire VII a souhaité redonner à l’Église une place importante et l’affranchir de l’empereur germanique) et de la distinction établie par Innocent III entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, reconnaissant à ce dernier une autorité supérieure (>>> théocratie). Le triomphe de la papauté fut de courte durée, l’autorité royale (avec Saint-Louis) voulant s’affranchir du pouvoir pontifical. Cette volonté fut profondément exprimée par Philippe le Bel avec la théorie du gallicanisme.
– Les conflits
— le conflit de la décime
Le conflit de la décime naquit du non respect par Philippe le Bel, en 1296, de la procédure usuelle pour la levée de la décime (impôt perçu par le roi de France sur le clergé) en ce qu’il n’en référa pas au pape Boniface VIII – pape autoritaire –. Celui-ci répliqua avec vigueur en lui rappelant la nécessité d’obtenir la « permission du pape » dans la bulle Clericis laicos (février 1296). L’usage du terme permission révélait la supériorité du pouvoir politique de la papauté sur la royauté. La réponse de Philippe le Bel s’est traduite de deux manières :
– théorique, il affirma la supériorité du pouvoir politique de la royauté sur le pouvoir politique de la papauté ;
– pratique, il interdit la sortie de France des biens en or revenant à la papauté, ce qui lui causa un manque de richesses important.
Le pape Boniface VIII dut se ranger à cette argumentation et céder aux moyens de pression dans la bulle Etsi de statu (juillet 1297).
— le conflit de juridictions
Le conflit de juridictions naquit de la décision de Philippe le Bel de juger un ecclésiastique (Bernard Saisset), en 1301, pour acte commis contre le roi. Ce fut la rupture du privilège de for. Ce nouveau conflit opposa Philippe le Bel à Boniface VIII ; il se décompose en quatre étapes.
– En réaction à la décision du roi de France, Boniface VIII le convoqua à Rome dans une bulle afin qu’il y soit jugé.
– 16 avril 1302, une assemblée – composée de prélats, de seigneurs laïques, de bourgeois – se réunit à Notre Dame de Paris pour affirmer que le roi de France tenait sa légitimité de Dieu en conséquence de quoi il ne pouvait être jugé que par Dieu et non par le pape. Cela exprime donc le refus de Philippe le Bel de répondre à la convocation de Boniface VIII.
– Boniface VIII modéra alors ses positions autoritaires, notamment en ne considérant plus le roi de France comme son vassal. Il tint cependant à intervenir auprès du roi de France en invoquant le pêché. Il raidit sa position dans une bulle en sanctionnant le roi ; il reprit en effet à son compte toutes les théories théocrates en menaçant Philippe le Bel de châtiments spirituels.
– Le roi de France et son entourage prirent alors des positions plus extrêmes encore en entendant mettre le pape en accusation devant un concile (assemblée régulière d’évêques et de théologiens qui décident des questions de doctrine ou de discipline ecclésiastique). Guillaume de Noguaret proposa même d’aller chercher Boniface VIII au château d’Amagni (7 septembre 1903) ; il lui assigna sa mise en accusation et le gifla au moyen de son gantelet. Malgré cela, Boniface VIII résista et ne céda pas. Le conflit se résolut par la mort de Boniface VIII, le 11 octobre 1303, ses successeurs ne cherchant plus à rentrer en conflit le roi de France.
– Les thèses en présence
la position du pape
L’allégorie des deux glaives : cette allégorie fut formée par Bernard de Clairvaux, elle se fondait sur l’évangile selon Saint-Mathieu (Jésus fut arrêté par des soldats, Saint-Pierre sortit alors son glaive afin de le défendre, Jésus lui enjoignit de ranger son glaive dans son fourreau) et l’évangile selon Saint -Luc (lorsque les soldats vinrent arrêter Jésus, celui-ci avait en sa possession un glaive qu’il eût pu utiliser pour se défendre mais n’en fit rien). L’interprétation de ces versets n’avait aucune portée politique mais traduisait deux idées : le Christ ne résiste pas par la force ainsi qu’il ne triomphe par la force. Selon Saint-Bernard, les glaives auxquels font référence les évangiles symboliseraient les deux pouvoirs, temporel et spirituel. L’Église disposerait donc, originellement, des deux pouvoirs. Saint-Bernard ajouta dans son interprétation qu’interdiction était faite à l’Église de se battre.
Boniface VIII repris à son compte l’allégorie des deux glaives en allant encore plus loin dans l’interprétation. Il considérait en effet que les deux pouvoirs étaient en possession du Christ et de fait, de l’Église puisqu’il considérait le pape comme le vicaire (celui qui agit à la place d’une autre personne) du Christ. Le pape est, selon lui, le véritable titulaire des deux pouvoirs.
la position du roi de France
Philippe le Bel réfutait point par point les arguments de Boniface 8 et considérait que son pouvoir venait directement de Dieu. 2 arguments :
– Il reprenait en compte toute la doctrine de l’église qui pose une distinction une distinction entre pouvoir temporel et spirituel. Le domaine spirituel étant dirigé par la Pape et le temporel par le Roi.
– Il a justifié l’indépendance des rois par rapport au pape par l’antériorité du pouvoir politique par rapport au pouvoir de l’église. Cette idée a été développée dans une sorte de manifeste rédigée par l’entourage de Philippe le Bel : « avant qu’il n’y ait eu les clercs » ( antequam essent clerici) Avant que l’église ne soit fondée il existait un roi de France qui avait la garde de son royaume. D’un point de vue historique, c’est un argument faux. Néanmoins les idées développées dans ce manifeste marquent une étape importante dans le développement de la pensée politique. Pour l’une des premières fois, Philippe le Bel n’a pas cherché a justifier leur position en s’appuyant sur les évangiles mais se sont aidés d’arguments empruntés sur la philosophie et surtout aristote. L’idée était complétée par St Thomas d’Acquint ( au 13ème siècle ) qui disait que l’homme est naturellement un animal politique. Le fait que l’homme vive en société dans une organisation politique était une règle de droit naturel c’est à dire que c’est une règle commune à toute l’humanité. Les organisations politiques existaient au début même de l’humanité. Partant de cette constatation générale, les légistes de Philippe le Bel débouchaient sur le cas particulier du royaume de France. Ils niaient complètement l’argument de Boniface 8, pas de délégation de l’église à l’autorité politique puisque le royaume de France existait avant l’église. L’argument devenait faut et non valable. Ce faisant, Philippe le Bel ne prêchait pas pour une laïcité de l’état, il reconnaissait le pouvoir du pape dans le seul domaine spirituel et reconnaissait également que le roi avait une origine divine sans passer pour autant par l’église.
Philippe le Bel fut certainement le 1er roi européen a réagir contre les prétentions hégémoniques de la papauté. Au cours de ces deux conflits, il a jeté les bases d’une doctrine qui sera celle des rois de France jusqu’en 1789. cette doctrine galicaniste tournait autour de l’indépendance du roi de France au temporel, et autour du fait que le roi de France est le protecteur des libertés de l’église de France, affirmée dans les états généraux de 1302. idée selon laquelle l’église de France est soumise à l’autorité du roi, lequel roi protège l’église du pape.
Les rois de France sont arrivés à poser l’indépendance du royaume et l’existence même d’un royaume de France singulier sur la scène internationale. Toutefois, cela n’aurait pas été suffisant si le roi de France n’avait pas réussi a poser son autorité dans ce royaume.
Section troisième : Récupération subséquente par l’Etat royal français du pouvoir normatif et du pouvoir de juger
Le roi fait le droit, il est le représentant de la résolution des litiges. C’est lui qui juge et qui dit et fait le droit. Tout le monde est sujet du roi.
I Le roi source du nouveau droit Etatique : « si veut le roi, si veut la loi »
Théoriquement, ce n’est pas le roi qui fait le droit, il n’était pas à la base la source du droit. Le roi ne fait pas de loi, il fait surtout des ordonnances. Le droit romain continue d’être appliqué dans le sud et le droit coutumier perdure dans le Nord. Des que le roi a été souverain, les nouveaux droit c’est lui qui les faisait. Lorsqu’il y avait une ordonnance du roi contraire au droit romain ou au droit coutumier, c’est l’ordonnance qui primait. Le territoire que le roi contrôlait avait un patrimoine juridique antérieur à l’Etat. Le roi va faire un droit français et royal.
Le roi a grignoté du terrain petit à petit sans remettre totalement en question le droit romain ni le droit coutumier. Les juges du roi continuaient à appliquer le droit romain et la coutume. Avec le temps, le nouveau droit c’est le droit royal. Le roi ne fait pas de loi mais des ordonnances, des édits…
L’ordonnance de Saint-Louis à propos de la paix et l’abolition des guerres privés, il a interdit de faire des guerres privées à l’intérieur du pays (1258). S’il y a un litige, il faut s’adresser à la justice du roi vu que la justice privée est interdite.
Le roi promulgue très rarement des textes normatifs applicables dans tout le royaume donc hors de son territoire. Le roi ne reforme pas les coutumes en leur entier.
Dès le milieu du 12e, le roi s’impose à tout le royaume et récupère le pouvoir de légiférer dans tout le royaume. Les ordonnances s’appliquent alors à tout le royaume. Ces ordonnances sont applicables outre son royaume que dans les parties qui les ont acceptés, il faut que les grands seigneurs vassaux les signes en Cour de Baron, il continue prudemment a avoir l’approbation des seigneurs. L’exemple le plus ancienne est une loi de 1155, ordonnance Louis VII le jeune qui décide que la paix de Dieu est applicable sur l’ensemble du royaume pendant 10 ans. Cette ordonnance est signée par le Duc de Bourgogne, Comte de Champagne, Comte de Flandres. L’ordonnance est donc applicable dans le royaume du roi en champagne en bourgogne et en Flandres.
A partir du 13e siècle, l’idée de souveraineté se développe. Le roi impose que l’ordonnance signée par un certain nombre de Baron est applicable même pour ceux qui ne l’ont pas signé.
Plus tard le roi se garde de mettre l’avis du Baron et dit qu’il a pris l’avis de son conseil et les ordonnances sont applicables dans tout le royaume et sont de plus en plus appliquées. Désormais il n’y a plus que le souverain qui décide. La désobéissance a une ordonnance est considérée comme un cas royal.
Le roi de France est empereur dans son royaume. « Ce qui a plus au prince a force de loi ». Le roi a la plénitude du pouvoir exécutif, législatif, et judiciaire. On dit aussi « Si veut le roi, si veut la loi ». Récupération du pouvoir législatif.
A partir du moment où la seule règle normative émane du roi, il faut absolument développer la justice.
A- Du législateur féodal au législateur souverain
La renaissance du pouvoir royal s’est d’abord accomplie par la féodalité. Le roi, suzerain suprême, devient l’ultime maillon d’une hiérarchie qui s’ordonne. Mais il n’en doit pas moins composer avec les grands seigneurs féodaux, dont il reste tributaire quant à l’application de ses décisions. Au XVIIIe siècle, la doctrine s’emploie à dégager le roi des entraves féodales en puisant dans le droit romain le modèle d’un prince législateur souverain.
— Le suzerain législateur
Si la décision du roi s’impose dans le domaine royal, son application se heurte, sitôt franchies les limites du domaine, à la médiatisation féodale. Le seigneur n’avait de prise de direct que sur ses vassaux immédiats, non pas sur ses arrières vassaux, encore moins sur les sujets de ses arrières vassaux. Si le roi veut légiférer pour l’ensemble du royaume, il faut que les princes territoriaux y consentent. L’application de la loi apparaît comme un contrat négocié avec la hiérarchie féodale. Le roi doit réunir une cour plénière où sont convoqués les grands vassaux du royaume. Après avoir participé à la discussion du texte, les chefs féodaux y apposent leur souscription s’ils l’approuvent. C’est une façon de les engager à appliquer la loi. L’ordonnance de 1155 en fourni un bon exemple. Elle énumère les Grands qui, présent à l’assemblée de Soissons, ont accepté de faire observer la paix royale. Seule cette adhésion expresse, garantie par un serment, assure l’application de l’ordonnance dans le fief de ses grands vassaux. « Le roi ne peut mettre ban la terre du baron sans son assentement », dira encore l’auteur des Etablissements de Saint-Louis. Sous le règne de Saint-Louis, cette exigence est pourtant déjà un peu dépassée. Le roi continue, certes, a demandé le consentement de ses barons, mais il lui suffit d’obtenir celui de la majorité d’entre eux. En 1223, une ordonnance souscrite par plus de 20 barons dispose qu’elle s’appliquera également à ceux qui ne l’ont pas jurée. Peu à peu, l’habitude se perd d’énumérer dans les ordonnances le nom des barons présents. Les textes se bornent à indiquer l’adhésion de la majorité.
— L’exaltation du roi législateur
Pour faire totalement obstacle à la médiatisation féodale, le roi devait se réclamer d’un principe d’essence supérieure qui le fonde à intervenir directement, sans intermédiaire, jusqu’au plus bas degré de l’échelle sociale. À partir du modèle romain, s’élabore la doctrine de la souveraineté royale. Le roi, « empereur en son royaume », détient les mêmes prérogatives que l’empereur romain. Il exerce une autorité immédiate sur tous les habitants du royaume, tous sujets quelque soit leur place dans la hiérarchie féodale. Alors que la suzeraineté ne touchait que les chefs, la souveraineté atteint l’ensemble de la population. Comme la loi de l’empereur, la loi du roi, instrument privilégié de sa puissance, s’impose à tous. Les légistes puissent dans le riche arsenal forgé par les Glossateurs pour célébrer le Prince Législateur et chez les canonistes qui ont, dès le XIIe siècle, reconnu au roi de France un pouvoir normatif indépendant. Les auteurs coutumiers reprennent en chœur le fameux passage d’Ulpien : « Ce qui plest au prince a force de loi » (P. de Fontaines) ; « Ce que plest au roi vaut loi » (livre de Jostice et de Plet) ; « Ce qu’il li plest de fere doit estre tenu pour loi » (Beaumanoir). Pour élargir le champ du pouvoir normatif royal, on s’appuie sur la notion d’utilité publique, si souvent invoquée par les empereurs romains. On parle encore d’utilité commune ou de « comme un profit ». Ce fondement autorise le roi à légiférer pour l’ensemble du royaume car il a la charge de son bien commun. Il l’autorise également à passer outre les intérêts parcellaires s’il le faut. Mais si la recherche du bien commun justifie des prérogatives imminentes, l’exercice de ses prérogatives est subordonné à cette satisfaction.
B- L’exercice prudent de l’autorité législative
L’affirmation de la souveraineté législative donne théoriquement au roi toute latitude pour modeler l’ordre juridique. Par la même, elle rompt avec la vision traditionnelle qui se méfiait des « noveletés » et faisait du roi le conservateur d’un ordre préexistant. Cette tension justifie la prudence de l’interventionnisme royal, prudence qui se manifeste tant dans le contenu de la législation que dans les conditions de son élaboration.
1) Le contenu de la législation
Jusqu’au milieu du XIIIe siècle, le roi – comme les barons d’ailleurs – avait donné un support législatif à quelques coutumes de droit privé. Passé le milieu du XIIIe siècle, les ordonnances royales n’interviennent plus que rarement dans ce domaine. Le droit privé, coutumier, devient affaire jurisprudentielle. De cet ordre coutumier, le roi se présente effectivement comme le gardien. Un gardien qui confirme, mais aussi un gardien qui abroge, corrige ou ajoute. Directement ou par l’intermédiaire de ses agents, le roi intervient sur le droit privé de façon sensible, mais avec prudence et sans recourir à la loi.
La législation royale se déploie surtout en matière de droit public. Elle porte sur les finances (pour assurer la primauté de la monnaie royale ou lever certaines impositions), sur le droit pénal (le blasphème, par exemple, devient un thème récurrent). Mais les ordonnances réglementent essentiellement la justice (organisation judiciaire et procédure) et l’administration. Les textes les plus ambitieux se présentent significativement comme un retour au passé, un « bon vieux temps » plus ou moins mythique. Ce sont les ordonnances de réformation, dont le nom affiche l’idée de la restauration d’un ordre établi qu’il appartient au roi, son gardien, de restaurer, de remettre dans sa forme primitive. Mais cette réformation se fait en « mieux », affirme la première ordonnance du genre, prise par Saint-Louis en 1254. Elle fait suite à la grande enquête qu’il a ordonné, à la veille de son départ en croisade, pour recenser les abus des agents royaux. L’échec de la croisade à montrer que le royaume devait être purifié de ses fautes. Par une législation disciplinaire, le roi entend garantir que ces agents s’acquittent de leur tâche avec honnêteté et montrent l’exemple en vivant dans la décense. Cette ordonnance est la première d’une longue série qui se poursuivra jusqu’au XVIIe siècle. Si en 1254, l’initiative est venue du roi seul, les ordonnances de réformation seront ensuite rendues sous la pression plus ou moins formelle de l’opinion. Parmi les plus célèbres figurent une ordonnance de Philippe le Bel en 1303, l’ordonnance « cabochienne » arraché à Charles VI en 1413 et révoquer la même année, ou encore l’ordonnance de Montils-lès-Tours prise par Charles VII en 1454. Sous couvert de restauration, les textes de réforme confortent un pouvoir législatif qui améliore, adapte, innove. Pas forcément avec une grande efficacité comme le laisse deviner la redondance de leurs dispositions.
2) Le principe du conseil
Au XIVe siècle, l’autorité législative du roi dans tout le royaume n’est plus discutée. Tous les sujets sont tenus d’obéir à ses ordonnances dont l’application n’a plus à être négociée avec les grands barons. Il n’en reste pas moins que le roi ne prend de décision à portée générale qu’après avoir pris de suffisants avis. Ce principe du conseil se maintiendra jusqu’à la fin de l’ancien régime. Le roi consulte ordinairement les membres de son conseil où siègent toujours davantage de conseiller technique au détriment de l’élément féodal. Il peut aussi consulter certaines autorités statutaires comme le Parlement ou encore recueillir l’avis d’assemblée délibérante. Ainsi les états généraux, que le roi a pour la première fois convoquée en 1302, ont-ils souvent pesé sur les ordonnances de réformation. Mais si le roi est tenu de prendre conseil, il n’est pas lié par l’avis qu’il recueille. La loi émane de lui seul. Même s’il tient le plus grand compte des avis qu’on lui donne, son pouvoir législatif s’exerce sans partage et il s’exprime dans les ordonnances par des formules telles que « il nous plaist » ou « notre plaisir ». Le « bon plaisir » du roi n’a en effet rien à voir avec l’arbitraire, il souligne sa puissance législative en renvoyant à la fameuse expression d’Ulpien.
II Les débuts de l’organisation de la justice royale
A côté de la souveraineté de l’Etat en voie de construction, il y avait une justice européenne plus ancienne : La justice d’Eglise. Dans un état chrétien comme la France, elle restait compétente dans beaucoup de domaines. Lorsqu’il y avait un litige, on s’adresse à l’Eglise.
A côté de ce secteur européen, on voit l’apparition de justices privées, avec les seigneurs justiciers notamment. On pouvait vous pendre au nom d’un seigneur. Justice seigneuriale.
Le roi a constamment lutté contre les justices privées jusqu’à la révolution ou elles seront supprimées. La monarchie a abolit la féodalité.
La justice européenne religieuse a été affaiblit. Elle a été rendue non officielle et facultative. Bien avant 1905, cela était facultatif. Seul le roi peut juger !
A- Les grands principes
Par définition, le roi est sur la terre pour faire respecter le bien commun. Le roi doit la justice à tout le monde quel que soit le rang. Le roi doit être juste. Puisqu’il empêche aux gens de se battre, il leur doit justice. Le roi est grand débiteur de la justice à tous quel que soit son rang.
Le roi étant à l’époque seul titulaire physique de la souveraineté, c’est lui qui rend la justice en dernier ressort. Le terme « rend la justice » prouve qu’il doit la justice. De très nombreuses images et expressions ont été utilisées pour montrer que la justice coule de la souveraineté, coule du roi, coule de l’Etat. Le roi est source de toute justice. Toute justice ne peut être rendue qu’en son nom.
Du principe que le roi est source de toute justice découle une division entre une justice retenue et une justice déléguée.
La justice retenue : En théorie, le roi peut faire ce qu’il veut car c’est lui la justice. Le roi exerce la justice retenue très rarement. Exemple, Saint-Louis, interdit les guerres privées, le duel judiciaire. Il rendait la justice sous un chêne quel que soit le rang. Saint-Louis a condamné des Nobles. Le roi agit pour le bien commun. Si l’on néglige cet aspect de sainteté, le principe de la justice retenue a des applications moins plaisantes. On peut voir l’élimination de certains rivaux sous prétexte qu’ils sont contraires à l’ordre public. L’usage veut que le roi soit bon. Les lettres de cachet, c’est un papier ou le roi mande de garder telle ou telle personne à la Bastille, bâtiment symbole de l’arbitraire du roi. La Bastille était une prison de luxe. Le roi peut faire ce qu’il veut et il ne peut mal faire. Le souverain a droit d’aggraver une condamnation mais il le fait très rarement, il peut également la diminuer ou l’annuler. Le roi peut gracier un condamné à mort. Affaire des poisons. Toutefois les applications directes ou indirectes du roi pour juger étaient tout à fait insuffisantes et l’on avait affaire au juges du roi.
B- L’organisation de la justice déléguée
Justice ordinaire, organisé et le roi est seul titulaire de la souveraineté. Il y a trois degrés de juridictions :
Parlement : il y en a qu’un à paris au début puis cela se développe. C’est un démembrement de la Cour du roi. Quand la Cour siégeait pour juger, on l’appel Cour Du Roi Pour Parler. Parlement est une cour de justice. Le parlement est une sorte de Cour d’appel. Le Parlement n’est pas une assemblée politique. Au début, le roi siège toujours entouré de ses conseillers à la Cour. Le parlement se réduit souvent au Palais du roi, dans l’île de la cité. Le roi a sa chapelle, la sainte chapelle au Palais du roi. Le roi est parti et les conseillers sont restés. Au 13e siècle le roi prend conseil de qui il veut et dresse toujours l’avis de ses conseillers. Les sessions se régularisent doucement. Il y a 3 ou 4 sessions par an. Les sessions commencent à la Toussaints et continue tant que le rôle (rouleau sur lequel sont marqués les affaires en attente d’être jugées) n’est pas épuisé. Après on s’arrête et on reprend à l’épiphanie. Puis on s’arrête et on reprend à Pâques. Puis on s’arrête et on reprend à la Pentecôte. Les sessions étant de plus en plus longue, il n’y en a plus que 2, celle de la Toussaint et celle de Pentecôte. Après il n’y en a plus qu’une seule et apparaissent les vacations. Le roi désigne les conseillers qu’il veut à chaque session. Au départ se sont ses parents, ou ses vassaux…Dès le 13e le nombre de professionnels du droit augmente dans les conseillers du roi. Certains reçoivent des gages. Il n’y a aucune inamovibilité. Généralement ils sont à la merci du roi. Néanmoins, les conseillers restent souvent longtemps mais sont sur un siège éjectable selon le bon vouloir du roi. Le conseiller du roi qui est un vassal on ne le paye pas, il doit le service de Cour.
A la fin du 12e apparaît la cour des Pairs. Ce sont des grands vassaux. Ils sont 12 normalement. Ils siègent au Parlement. Il y a 6 Pairs laïcs et 6 Pairs ecclésiastiques.
Il y a des chambres. Chambre des enquêtes, chambre des requêtes, chambre des plaides. La grande chambre ou chambre des plaides et la seule chambre devant laquelle on peut plaider, c’est la seule chambre qui prononce des arrêts. Les autres chambres sont auxiliaires. La chambre des requêtes examine les demandes des plaideurs, elle filtre les requêtes. Les conseillers du roi peuvent juger nécessaire un complément d’information, ils nomment des commissaires dont le rapport est examiner par une chambre spéciale, la chambre des enquêtes. La tournelle, ou la chambre criminelle ne sera crée qu’à la fin du 14e siècle.
Le parlement juge en dernier ressort exception faite de l’intervention du roi qui peut intervenir. Le parlement connaît beaucoup d’affaire en première instance au départ. Il juge en première instance. Le nombre des affaires augmentant avec la puissance royale, le parlement était trop encombré. Une ordonnance de Philipe le Hardy de 1278 décide que désormais que le Parlement jugera seulement les affaires en appel. Cependant il restait beaucoup d’exception. Certaines justices privées vont directement devant le parlement.
Les juridictions de droit commun |
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Appel |
Baillis |
Parlement Présidiaux à partir de 1552 (transformation de certains tribunaux de baillage |
Conseil du Roi Il intervient uniquement en cas d’erreur, par la procédure de la proposition d’erreur (cassation) |
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I° Instance |
Tribunaux de prévôtés Ils jugent toutes les affaires civiles et criminelles concernant les roturiers, à l’exception des cas royaux
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Tribunaux de bailliage et de sénéchaussée Ils sont compétents dans 2 cas : -1 Les procès entre nobles -2 Les cas royaux
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Parlement Il est compétent dans 3 cas : -3 Les affaires relatives aux douze Pairs de France -4 Les affaires portant sur le domaine et les droits de la Couronne -5 Les affaires concernant les personnes bénéficiant du privilège de committimus |
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Les juridictions d’exception |
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Relevant en appel du parlement |
Juridictions de la Table de marbre : Connétablie (guerre), Amirauté (mer), Eaux et forêts |
Conservateurs de privilèges des universités, foires et marchés |
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Tranchant en premier et dernier ressort (donc souveraines) |
Chambre des Comptes : au XIV° siècle. Elles vérifient la compatibilité royale |
Cours des Aides :au XV° siècle. Elles statuent sur le contentieux des impôts |
Chambre des monnaies : au XVI° siècle. Elle tranche les procès relatifs à la monnaie royale |
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Quelques notions sommaires de procédure :
1 Le duel judiciaire : abolit dans les domaines du roi par l’ordonnance de Saint-Louis. On ne se bat pas, on est juger. Le jugement de dieux à abolit le duel judiciaire. Les guerres privées devant le tribunal sont interdites. Les nobles se battaient à cheval et le roturier se battait avec un bâton. Il y avait une certaine inégalité des chances.
2 Le duel judiciaire est remplacé par la preuve écrite, par témoin. Devant un juge, on fournit un témoin ou un écrit. Coup de Jarnac. Le duel judiciaire s’appauvrit, il devient rare. Les journalistes se battaient en duel jusqu’à la guerre de 1914. Egalement, il y avait des duels dans l’armée. Même si c’était défendu, le duel restait une preuve de sang froid. Il faut deux témoins concordant.
3 Par imitation du droit canonique. La procédure inquisitoire a commencé à s’introduire. Le juge n’attend pas que quelqu’un se présente accusateur, mais il informe d’office même si personne ne se porte accusateur. Il y a donc un progrès, idée bonne dans le principe. Au début du 14e apparaît le procureur du roi qui se portait accusateur pour le roi, pour le bien public. Ce principe a été parfois regrettable, car on est parti de l’idée qu’il fallait aller vite pour être efficace. La procédure est secrète. On cite les témoins mais on ne dit pas ce qu’ils ont dit. Ou alors, on dit ce que les témoins ont dit mais on ne cite pas leur nom.
4 On considère que l’aveu est la meilleure des preuves. L’aveu est mieux qu’une preuve testimoniale ou qu’un écrit. Par cette logique, on essaye souvent d’obtenir l’aveu. On les torture, « la question », c’est une procédure et non une peine, on essaye d’extirper la vérité. Ils estimaient que la question était bonne. Néanmoins, il y avait des restrictions, on ne mettait pas n’importe qui à la question. La question a été abolie officiellement à la fin de l’ancien régime. Louis XVI l’a abolie.
5 Nul ne plaide par procureur. On n’admettait pas de représentation en justice. Lors d’un procès, il faut venir soit même. Au XIIIe siècle, on a commencé à dérogé à la règle nul ne plaide par représentant. Il ne faut pas confondre avec les avocats, là c’est des représentants. Il fallait des lettres spéciales pour obtenir un représentant. Les nobles peuvent plaider par procureur de plein droit sans dérogation, les clercs également, les femmes. Le roi se fait représenter devant sa propre justice par des procureurs. Le parquet = les gens du roi. Le procureur du roi a le droit d’enquêter pour défendre les intérêts publics devant les tribunaux du roi. Il doivent défendre les personnes qui sont sous la protection du roi (les orphelins, les malheureux, les veuves…).
C- Début de la lutte séculaire contre les autres formes de justice s’exerçant sur le territoire du soutient français.
1) Lutte contre la justice seigneuriale
Rien ne servait au roi d’affirmer sa souveraineté si son pouvoir avait déjà été reconnu. Cette affirmation est passée par une justice qui devait s’appliquer à tous les sujets. Mais dans le monde féodal, les princes territoriaux, les seigneurs, faisaient eux aussi leur justice. Le roi a du combattre ces justices seigneuriales. C’est avec une grande souplesse que le pouvoir royal a lutté contre ces justices seigneuriales. Il n’a pas cherché a supprimer directement ces justices mais plutôt à réduire leurs compétences et à les rendre dépendantes de la justice royale.
— Caractéristiques du système de justice seigneuriale :
Ces justices seigneuriales se présentaient comme des justices archaïques :
1 Du fait de leur organisation :
Même les bons légistes du roi étaient absents de ces cours de justices. Ils étaient trop chers pour les petits seigneurs. Le seigneur jugeait lui-même ou déléguait son pouvoir à un de ses agents ( pas brillant juridiquement )
2 En raison de la procédure qu’ils utilisaient le plus souvent :
On se référait traditionnellement au jugement de Dieu soit en soumettant le justicier aux ordalies unilatérales soit par le biais du duel judiciaire qui consiste à organiser un duel entre les 2 parties au procès ou entre les représentants. Le gagnant était considéré comme étant dans son droit. Du fait de cette organisation, ces justices ne connaissaient quasiment pas de possibilité d’appel devant une juridiction supérieure pour deux raisons : la plupart de ces cours étaient réduites et souveraines, de plus l’idée même d’un appel était difficilement conciliable avec les procédures utilisées ( le jugement était la volonté de Dieu. )
il était admis que le jugement soit contesté juste lors de scandales c’est à dire quand le juge s’était mal acquitté de son jugement par exemple le cas de fautes de droit, quand le seigneur avait refusé de rendre la justice. On a admis peu à peu que les mauvaises sentences pourraient être mise en appel.
— Les moyens de lutte contre cette justice :
De manière générale, le pouvoir royal a réussi a triompher car il ne comportait pas les mêmes archaïsmes. Les 3 moyens de cette lutte :
1 L’appel :
C’est par la réunion de 3 circonstances. Les agents du roi se sont inspirés de la procédure des tribunaux d’église ( appel possible devant le pape ). Les légistes royaux se sont inspirés du droit et de la procédure romaine pour faire triompher la justice royale ( hiérarchie d’appel ). Cette idée d’appel a pu triompher de par la volonté même des justiciables car la justice royale n’est pas archaïque. Les justiciables préféraient avoir à faire à une justice plus rationnelle. De plus, l’appel devenait de plus en plus intéressant pour les justiciables. ( appel qui suit la hiérarchie féodale ).
2 La prévention :
Le pouvoir royal s’affirmant, on a admis que le juge royal avait la possibilité de prévenir la justice royale. Cette idée se fondait sur la supériorité politique et judiciaire du roi de France. Venir avant présuppose que l’on est supérieur aux autres pouvoirs. Dans deux cas, la prévention était un argument valables : celui où le juge royal directement saisi par les partis au litige ( fréquent en civil ). Tout plaideur peut préférer la justice royale.
Le second cas est celui où les juges royaux, les baillis, pouvaient en matière criminelle, se saisir d’office. Ils venaient avant en cas de négligence de la part du seigneur. Cependant la notion de négligence a été entendue de manière excessive. Cette technique de la prévention a suscité de nombreux heurts contre les seigneurs et les juges royaux. On saisissait le parlement qui donnait souvent raison au bailli. Parfois, il s’opérait un retour vers la justice seigneuriale sous 3 conditions : que ce retour soit demandé en début de procédure, qu’il soit demandé par le juge seigneurial lui-même et non par une des parties au litige, ou dans le cas d’une affaire peu importante.
3 Les cas royaux :
Apparu au 13ème siècle, la théorie des cas royaux procédait du principe selon lequel les seigneurs justiciers ne pouvaient faire un procès qui touchait le roi. Affaire qui relève de la compétence exclusive du pouvoir royal.
Rentraient dans les cas royaux les atteintes à la personne, aux biens du roi, les atteintes à l’autorité du roi. L’existence de cette catégorie de cas royaux se justifie très facilement. En effet, dans une affaire où le roi est partie prenante, il est logique que cela se passe devant une juridiction royale. Cependant, très rapidement, pour affirmer l’autorité du roi, les légistes royaux ont adopté une notion très excessive de celle de cas royaux. La notion de cas royal est devenue une catégorie très vague : tout ce qui touchait à l’ordre public était recouvert. Ce caractère très vague a été longuement entretenu par les légistes. Les cas royaux ont constitué l’arme la plus solide pour la lutte contre les justices seigneuriales. Au 18ème siècle, toutes les infractions pénales étaient jugées devant une juridiction royale.
L’affirmation de l’autorité et de la souveraineté est en marche étant donné que par ces 3 moyens, la justice royale est le plus souvent seule compétente. Le roi possède alors une emprise directe sur l’ensemble des sujets.
2 Lutte contre la justice ecclésiastique
A partir du 14ème siècle, la lutte contre les justices de l’église se développe.
— Caractéristiques des justices ecclésiastiques :
A partir du 14ème siècle, lutte contre la justice ecclésiastique qui, apparue très tôt dans l’intérêt de l’église, s’est développée au moyen âge avec l’apogée au 13ème siècle.
Appelées au 13ème siècle les officialités, les cours devaient leur développement à la faiblesse de l’autorité royale entre le 10ème et le 12ème siècle, au fait que la procédure suivie était à cette époque beaucoup plus rationnelle que la procédure des cours laïques. Ces cours inspirées du droit romain pratiquaient une procédure d’enquête et connaissaient le système hiérarchique ( contrairement aux cours laïques qui pratiquaient les ordalies et les duels judiciaires. ) elles avaient une double compétence : une compétence en raison des personnes et en raison des matières traitées.
La compétence « ratione persona » est une compétence du fait de la qualité des partis au procès. Deux cas de personnes s’opposent :
7 les clercs : le privilège du for veut que les hommes d’église soient jugés uniquement par leur pairs en matière criminelle comme en matière civile. En ce qui concerne la matière criminelle, aucune condamnation a mort ni aucune mutilation n’est possible. Cependant, dans certaines conditions très graves et pour éviter les révoltes populaires, les officialités procédaient tout d’abord en dégradant le clerc. Ensuite, devenu une personne « normale » et n’étant plus homme d’église, il pouvait être condamné a mort. En matière civile, le privilège était moins important. Les officialités considéraient que le privilège de for se limitait à la matière mobilière et personnelle ( les contrats ) mais ne concernait pas la matière immobilière qui était régie par les tribunaux laïcs.
8 Les « miserabiles personae » étaient des personnes faibles, dignes de pitié que l’église se faisait un devoir de protéger. Les veuves, les orphelins, les croisés … mais ce privilège était différent selon les personnes : en matière civile, le privilège était le même ; cependant en matière criminelle les hommes d’église distinguaient le privilège selon la personne concernée.
Pour le prince il s’agit alors non d’affirmer une quelconque supériorité, mais d’amenuiser au nom du maintien de l’ordre public et au profit de la justice laïque les compétences des cours d’église, les officialités diocésaines. Dès le 13ème siècle, leurs larges prérogatives judiciaires provoquent entre les autorités temporelles et l’église les premières tensions qui se manifestent encore sans éclat particulier. C’est avec la querelle entre Philippe le Bel et Boniface VIII que la confrontation s’élargit. La royauté prend appui sur ses juristes et sur l’opinion publique. Ainsi en 1329, lors d’une assemblée convoquée à Vincennes par Philippe VI, l’orateur du Roi Pierre de Cugnières argumente contre l’extension du privilège de clergie grâce à la tonsuration ( la tonsure étant le cercle rasé au sommet de la tête des ecclésiastiques ) de personnes qui ne mènent pas la vie ecclésiastique, contre les entraves apportées à la justice royale par les officialités, contre les empiètements de ces derniers sous prétexte de juridiction concurrente sur des affaires relevant du juge laïque. Ces thèses consacrées systématiquement dans le célèbre Songe Du Verger sous Charles V pénètrent le milieu des officiers royaux qui se font zélateurs de la juridiction laïque, avec excès parfois chez les juges royaux inférieurs, avec une grande souplesse d’esprit chez les membres du parlement. Sans contester les privilèges de l’église, le roi parvient par une série de théories habiles et par une application persévérante à reconquérir toute cause ayant trait aux intérêts temporels sur lesquels l’église avait compétence. Cette lutte sourde, à l’occasion non dénuée d’attitudes conciliatrices ou brutales, aboutit donc à réduire les compétences des officialités.
— Les moyens de lutte contre cette justice :
Réduire la compétence ratione personae et ratione materiae de l’Eglise, que pour annuler ses sentences et ses actes estimés abusifs.
1 Déclin du privilège de clergie.
Celui qui est en possession d’état de clerc jouit du privilège de juridiction, d’ordre public, qui lui vaut d’être traduit devant les seules cours d’Eglise, mais qui n’a cessé de s’étendre à des personnes de plus en plus nombreuses échappant de ce fait à la juridiction royale et ne correspondant plus, aux yeux de ceux qui la constituent, à l’image du clerc_. Pour battre en brèche ce privilège, la justice royale met au point un arsenal. Ainsi prétend-elle vérifier l’état de clergie : pour être rendu au juge ecclésiastique, le délinquant doit «estre en habit et tonsure de clerc»; si son état est manifeste encore faut-il que le clerc ait un genre de vie compatible avec sa charge, s’il se livre à des occupations séculières, le juge royal réclamera sa réduction à l’état laïque, laquelle peut aussi survenir si l’énormité du crime commis par le clerc a entraîné sa dégradation.
Surtout, les juristes établissent la théorie des cas privilégiés, pendant des cas royaux, qui crée au profit du juge royal un privilège de juridiction, tant au criminel qu’au civil. Au criminel, tout fait délictueux grave commis par un clerc portant atteinte à l’ordre public – il n’est alors que de reprendre la liste des cas royaux est réprimé
par le juge royal. Mais le clerc criminel ne perdant pas ipso facto son privilège de for (puisqu’il procède de son ordination et non de sa personne), ce juge ne peut seul le poursuivre. Le clerc délinquant sera donc d’abord traduit devant l’officialité et jugé pour son délit « commun », puis, en raison du délit « privilégié» qui y est greffé, traduit devant le juge royal qui réprimera le trouble public. Au civil aussi le privilège du for s’amenuise. Au XIIIe siècle déjà, les officialités étaient incompétentes pour tout ce qui concernait les tenures féodales des clercs et leurs causes réelles immobilières. Bientôt, le roi s’immisce dans les causes portant sur les bénéfices ecclésiastiques conférés par l’évêque, au nom de l’ordre public, lorsqu’une contestation s’élève entre deux attributaires d’un même bénéfice, le juge royal s’impose en matière possessoire: jusqu’à ce que l’ordinaire ait tranché le point de savoir lequel des adversaires est le vrai titulaire du bénéfice, il estime de sa compétence d’en attribuer la possession provisoire à l’un des plaideurs. Par là une brèche est ouverte: en droit canonique, le bénéfice n’est pas un objet susceptible de possession par n’importe qui; il ne peut être possédé qu’à un certain titre que le juge royal ne peut manquer d’examiner, intervenant alors dans le débat de fond. Il en alla de même pour les causes personnelles des clercs, notamment des causes plaidées à propos de contrats passés devant notaire qui relèvent du juge royal pour leur exécution.
2 Déclin de la compétence «ratione materiae ».
Dans les matières temporelles criminelles, l’hérésie, la sorcellerie et le sacrilège, auparavant de la compétence exclusive de l’Eglise, sont devenus autant de cas de crimes de lèse-majesté, relevant de la juridiction royale qu’ils soient perpétrés par des clercs ou des laïques. En matière civile, l’Eglise va perdre une à une ses compétences exercées sur les laïques. Il en va ainsi dans le domaine des contrats, où le déclin du serment entraîne la disparition de l’intervention du juge d’Eglise et dans le domaine des testaments, dès les Xve et XVIe siècles ; en matière matrimoniale, les aspects connexes du sacrement (dot, séparation de biens ou de corps) échappent à l’officialité, mais le lien matrimonial lui-même en tant que sacrement continue à lui appartenir.
3 L’appel comme d’abus.
A ces atteintes à la juridiction ecclésiastique s’ajoute un procédé visant à sanctionner des abus reprochés aux clercs. A la fin du XIIIe siècle et davantage encore au XIVe siècle, dans le cas où une officialité empiète sur la juridiction laïque, le Parlement, mais lui seul, cherche à faire annuler l’acte résultant de cet excès de pouvoir, en contraignant la cour d’Eglise à le faire elle-même en exerçant sur elle une pression par la saisie de son temporel, c’est-à-dire des immeubles compris dans les bénéfices ecclésiastiques. Au 15ème siècle, le parlement s’arroge peu à peu le droit d’annuler lui même un acte de l’autorité ecclésiastique sur appel dirigé contre ce dernier. Dès 1448, la cour souveraine connaît de tel cas d’appel, bientôt qualifié « d’arrêt rendu sur appel comme d’abus », aussi bien interjetés par des particuliers que par des procureurs du roi, et aboutissant à une déclaration d’abus et de cassation. Cet appel connaît à partir du règne de François 1er son épanouissement et sa forme définitive puisqu’il commence à s’appliquer, à coté du domaine juridictionnel et administratif, à des matières purement spirituelles.
Les principes dans l’ensemble ne sont pas mauvais. La justice du roi est chronologiquement le premier service public français. La justice reste néanmoins très primitive, en dépit des progrès inspirés par le droit canonique (héritage romain). La justice se montre combative et efficace pour imposer progressivement son monopole sur les justices seigneuriales, sans jamais attaquer de front la justice ecclésiastique.
Chapitre quatrième : Les temps modernes, évolution vers l’absolutisme et marche, vers l’unification du droit français.
Le droit de l’Etat n’est pas unifié. Il y a un droit coutumier dans le Nord, le droit romain dans le sud, à cela s’ajoute les ordonnances du roi. On progresse alors vers une unification dès les temps modernes.
Avec le XVIe siècle, s’ouvrent les temps modernes. À bien des égards cette période marque un tournant. Les grandes découvertes élargissent l’horizon du monde occidental et détrônent la Méditerranée au profit de l’Atlantique. L’implantation des premières dominations coloniales fait affluer les métaux précieux. Les répercussions économiques et sociales sont immenses : les échanges, la production, la spéculation sont stimulés ; l’enrichissement profite surtout à une élite bourgeoise qui peut se poser en rivale de la noblesse traditionnelle.
Arrive d’Italie un nouvel engouement pour la culture de l’Antiquité. La civilisation antique et remise à l’honneur sous toutes ses formes : science, art, lettre. Cette Renaissance se traduit par une nouvelle esthétique, plus proche de l’antiquité païenne, grec ou romaine, que de l’Antiquité chrétienne. Une culture profane renaît. Sur le plan de la pensée, les porte-drapeaux du renouveau sont qualifiés d’humaniste. Comme leurs devanciers du XIIe siècle, ils ressuscitent l’héritage antique, mais l’état d’esprit est profondément différent dans la mesure où ils ne cherchent plus l’interprétation du christianisme avec le savoir venu de l’Antiquité. Indépendamment de leurs sentiments religieux, ils s’intéressent à la nature humaine. L’homme n’est plus un simple élément de l’univers, mais le centre du monde. Sa liberté d’examen est affirmée, passant outre le poids des autorités. L’antiquité païenne peut être saluée comme le modèle des vertus humaines. Ce renouveau culturel est soutenu par la diffusion des livres, grâce à l’adoption de l’imprimerie.
Dans le domaine religieux, se manifeste également un besoin de retour aux sources. Face à une église incapable de satisfaire aux nouvelles aspirations de la vie spirituelle et de remédier à des abus aussi criants que les indulgences, des réformateurs brandissent l’étendard de la révolte. L’unité de fois, ciment du monde médiéval, et rompu. En 1517, le moine Martin Luther lança ses fameuses 95 compositions et ses thèses rencontrent vite une audience considérable en Allemagne aux Pays-Bas. En France, le mouvement réformé est plutôt orienté par la pensée de Jean Calvin dont l’institution chrétienne paraît en 1536. Directement menacée, l’église réagit par la Contre-Réforme. Un concile réuni à Trente (1545 – 1563) refond l’héritage dogmatique de la foi catholique et redresse la discipline ecclésiastique. En France, la querelle religieuse prend une ampleur exceptionnelle en débouchant sur les guerres de religion qui déchire le pays à partir de 1562. Ce conflit ne connaît un terme définitif qu’avec l’édit de Nantes en 1598.
Mais les temps modernes signent aussi l’arrivée à maturité de l’Etat. Libéré de la féodalité, il intervient de plus en plus dans les structure et les activités du pays. Un pays où la guerre de Cent Ans à renforcer le sentiment national. Les progrès de l’autorité royale et le sentiment national ne reste pas sans effet sur les sources du droit. Le pluralisme juridique hérité du Moyen Âge faisait coexister des droits supranationaux, droit romain commun (ius commune) et droit canonique, avec des droits que l’on pourrait qualifier d’infra nationaux, les coutumes locales. Entre les droits cosmopolites et les droits locaux, la législation royale était la seule source, encore timide, d’un droit national. Mais l’histoire des sources du droit suit l’évolution du pouvoir politique et, à partir du XVIe siècle, les souverains vont affirmer la prééminence de leur loi sur les autres sources et s’efforcer de réduire les ordres juridiques préexistants. Formé d’apports composites, s’affirme une tradition juridique nationale qui sera la matrice essentielle des codifications napoléonienne. Les rapports de plus en plus étroits entre l’État et le droit se traduit également par une autonomie accrue du droit public au sein de l’ordre juridique. La monarchie administrative, qui fait de la France l’État le plus centralisé d’Europe, produit des normes sans relâche.
Section première : Rappel historique
Il est vrai que la période des temps modernes a été marquée par une crise en europe. Le 11e siècle, même le 13e avaient été marqué par un accroissement de la production agricole, et de la population. Période dynamique, on est sortit du moyen âge sérieux. Les défrichements portent sur de nouvelles terres. La population rurale qui représente environ 90% de la population. Cette population qui vit de son travail, vit à la limite de l’équilibre. (Trop d’enfant, pas assez d’argent). Dans l’ensemble, la population continue de croître mais on souvent de moins en moins à manger. Lors de mauvaise production c’est la famine.
Les guerres régionales disparaissent peu à peu et on assiste à des guerres nationales. Guerres dynastiques et non plus les guerres privées. Les guerres touchent les campagnes et même les villes. Les paysans sont énormément tués. Il y a des industrie qui se créent (les draps). Tout cela est touché par la guerre. Les gouvernements on besoin d’argent donc il y a des mutations régulières, instabilité monétaire. On assiège les villes. Grande crise en Europe au niveau économique plus une crise alimentaire.
Révoltes sociales. Jacqueries. Révolution qui ne réussit pas. Il fallait payer les rançons du roi et de nombreux seigneurs donc on puisait chez les paysans qui crèvent encore plus de faim. Les jacqueries ont souvent échouées.
Epidémies effroyables. Peste noire qui venait d’orient par les ports. Epidémies de peste. Cela dévaster le 14e siècle. Les gens crevaient de famine, de guerre, de peste. Il y a donc une régression de la nature. La friche réapparaît. On a échappé aux invasions extérieures à ce moment là. Les mongoles on submergé le moyen orient mais ne sont pas arrivés jusqu’à nous.
A force de mourir, ils se sont rétablis. Relèvement à partir des années 1450. la guerre de cent ans est terminée. Les techniques de productions s’améliorent. Effort de repopulation des campagnes. Fin du 15e la prospérité notamment la France est établie. Les prix sont stables car l’afflux des métaux précieux est assez tard.
Ceci n’empêche pas la France d’étendre son territoire et de se lancer dans la conquête de nouveaux territoires : Aux côtés des Anglais ou des Hollandais, le Français Jacques Cartier, sous François ler, découvre en 1534 l’embouchure du Saint Laurent. Un siècle plus tard, sous Louis XIII, Samuel Champlain fonde Québec en Nouvelle-France. Peu après, sous le même roi, les Français s’emparent de la Guadeloupe et de la Martinique, ces îles à sucre qui font la richesse des colons et des négriers français. Le commerce triangulaire et la déportation vers les Amériques des esclaves noirs permettent la mise en valeur des Antilles, placées sous administration directe de la Couronne par Colbert, qui encourage également la création de grandes compagnies de commerce. Sous le règne de Louis XIV et sous celui de son petit-fils Louis XV (1715-1774), les colonies sont l’enjeu de plusieurs guerres entre la France et l’Angleterre. A l’extrême fin de son règne, le Roi-Soleil est contraint de céder à l’Angleterre Terre-Neuve, l’Acadie et la baie d’Hudson. En 1763, Louis XV abandonne aux Anglais le Canada et toute la rive gauche du Mississippi (la Louisiane). Sous Louis XVI, ce qu’on appelle le « premier empire français » ne comprend plus que les Antilles – mais les îles à sucre assurent la prospérité de la grande bourgeoisie négociante des ports négriers de l’Atlantique, de Bordeaux à Nantes -, la Guyane, St Pierre et Miquelon, des comptoirs au Sénégal (Saint-Louis, Gorée) et dans l’Océan Indien (La Réunion)…
La progression territoriale n’empêche pas la grande crise morale qui accable la France au XVIe siècle.
Egalement, l’humanisme et la Renaissance n’empêchent pas d’atroces guerres de religion. La diffusion de la Réforme suscite l’intervention du pouvoir royal. Après une période de répression plus ou moins sévère, mais jamais violente, un régime de tolérance est instauré dans un édit de 1561, inspiré par le chancelier Michel de l’Hospital. Néanmoins, cette période d’accalmie ne dure pas et les guerres de religion éclatent. Deux partis antagonistes s’opposent. D’un côté, les catholiques forment la Ligue sous l’emprise de la famille des Guise. De l’autre, il y a les protestants autours des Châtillon et des Bourbons. Entre 1562 et 1598, la France connaît huit guerres civiles et religieuses, entrecoupées de trêves plus ou moins longues. La première guerre civile débute en avril 1562 par la prise d’armes des protestants sous le commandement de Louis de Bourbon, prince de Condé. Elle est consécutive au massacre perpétré par les soldats de François de Lorraine, duc de Guise, sur les huguenots de Wassy. Ce premier conflit est marqué par la bataille de Dreux, puis par la mort du duc de Guise devant Orléans. Il se conclut par la paix d’Amboise en mars 1563 : le protestantisme n’a pas été abattu et les réformés comprennent qu’ils ne pourront faire basculer le royaume dans le camp protestant. Néanmoins, les réformés obtiennent une liberté de culte, qui est réduite à certains bailliages et certaines villes. Le perdant de ce conflit, c’est le pouvoir royal car il en sort amoindri. La guerre reprend en 1567, puis en 1569. En 1570, malgré leurs défaites militaires, les protestants obtiennent des concessions importantes par la paix de Saint Germain qui irrite les catholiques. Ils bénéficient d’une liberté de culte limitée, mais ils ont obtenu des garanties. Ils ont quatre places de sûreté, à savoir les villes de Montauban, La Charité sur Loire, La Rochelle et Cognac, dans lesquelles ils ont le droit d’entretenir des garnisons. En 1572, les conditions d’une réconciliation nationale semblent à portée de main. Catherine de Médicis organise le mariage de sa fille Marguerite avec Henri de Navarre. L’amiral de Coligny, chef du parti réformé après la mort de Condé à Jarnac en 1569, retrouve sa place au Conseil du roi. Mais, le 24 août 1572, jour de la Saint Barthélemy, c’est le massacre des protestants à Paris, puis par la suite, dans certaines villes du royaume. Cet événement marque le retour à la guerre civile.
En réaction va se développer l’absolutisme afin de stabiliser la situation. Il faut remonter à la fin du Moyen Âge et surtout à la Renaissance pour trouver les fondements de l’absolutisme en France. Le pouvoir royal a en effet renforcé sa légitimité et son administration à partir de la fin de la guerre de Cent Ans. Le domaine royal s’est étendu. Jean Bodin est l’un des théoriciens de la souveraineté royale au XVIe siècle. Mais les guerres de religion voient s’affronter les nobles du parti protestant au roi catholique. Les fils d’Henri II sont contestés et leur autorité reste fragile. Henri IV renforce la situation et fait cesser la guerre civile par l’édit de Nantes en 1598. Il est assassiné par un fanatique religieux en 1610.
Dans la première moitié du XVIIe siècle, les périodes de régence constituent des moments difficiles pour le pouvoir royal. Il faut l’action énergique d’un Richelieu pour mater les protestants et pour adopter une politique étrangère offensive. Pendant la minorité de Louis XIV, c’est le cardinal de Mazarin qui affronte le soulèvement de la Fronde (1648-1653). Le peuple accablé d’impôt se soulève dans plusieurs régions et les parlementaires font valoir leurs droits. Les princes de sang tels que Condé attisent la révolte et le peuple parisien s’agite. Le jeune Louis XIV doit subir l’humiliation de la fuite dans la nuit (« la nuit des rois »). Il gardera toute sa vie un profond ressentiment contre la noblesse frondeuse. Il fut aussi éduqué par Mazarin dans l’idéologie absolutiste selon laquelle le pouvoir ne se partage pas.
L’apogée de l’absolutisme : le règne personnel de Louis XIV. À la mort de Mazarin, en 1661, le jeune Louis XIV (il a 22 ans) décide de se passer de premier ministre. C’est le début de la phase absolutiste de son long règne personnel. Il annonce sa volonté affichée le sacre, fait du roi un représentant de Dieu sur terre. Les objets qu’il reçoit au cours de cette cérémonie à Reims sont symboliques de sa puissance. Tous ses sujets doivent lui obéir, comme l’écrit Bossuet. Le régicide est assimilé à un sacrilège. Le roi commande les armées, protège l’Église catholique, rend la justice, fait les lois. Le château de Versailles est l’expression architecturale de l’absolutisme louis-quatorzien. Le roi soleil voulait d’abord construire un palais d’une ampleur inégalée, qui, par ses dimensions et sa décoration, représenterait sa puissance incontestée. Il engagea les meilleurs artistes de son époque afin d’édifier un ensemble classique, emprunt d’ordre et de grandeur. Les jardins créés par André Le Nôtre devaient refléter la domination de la nature. Surtout, Versailles constitua une véritable prison dorée pour la haute noblesse française. Tous les Grands du royaume se devaient d’être présent dans la vie quotidienne de Louis XIV. Celui-ci parvint donc à domestiquer cette noblesse qui était apparue autrefois turbulente (Cf. l’épisode de la Fronde) en distribuant des pensions et en organisant des spectacles fastueux. Pour obtenir l’attention du roi, les aristocrates devaient respecter l’étiquette et multiplier les dépenses somptuaires. Nombre d’entre eux finirent en disgrâce ou ruinés. Échappant au contrôle physique du peuple parisien, le souverain prit le contrôle de l’aristocratie, mais vida les caisses de l’état. Le château de Versailles servit enfin de modèle à de nombreux autres princes européens. Il constitue la vitrine du savoir-faire des artisans et des artistes français. La fameuse phrase « L’état, c’est moi » a été abusivement attribuée au roi soleil. Malgré tout, la politique absolutiste de Louis XIV vise à moderniser les structures de l’état, afin de les rendre plus efficaces, et de faire rayonner la France en Europe. Le gouvernement absolutiste est centralisé à Versailles où sont prises la plupart des décisions. Le roi écoute ses conseils (conseil d’En Haut, conseil des parties, conseil des dépêches …), ses ministres et ses secrétaires d’état mais décide seul. Il n’hésite pas à écarter les personnalités trop gênantes (emprisonnement de Nicolas Fouquet, disgrâce de Vauban …) et choisit son gouvernement parmi les hommes les plus dévoués, dont Jean-Baptiste Colbert représente la figure la plus connue. Dans les généralités, les intendants sont les yeux et les oreilles du roi. Nommés et révocables par le souverain, ils détiennent des pouvoirs étendus à la police, la justice et les impôts. Ils contrôlent l’action des administrateurs locaux et des officiers qui possèdent leurs charges.
Dans le domaine économique, l’absolutisme louis-quatorzien souhaitait que la France fût la plus riche possible. Sur les conseils de son ministre Colbert, il mit en place une politique volontariste destinée à attirer l’argent dans le royaume et à l’y maintenir. Les manufactures royales étaient mises en place pour fabriquer des objets de luxe français. Les tarifs douaniers furent relevés et les compagnies de commerce furent dotées de privilèges et de monopoles. Toutefois, cette politique économique ne donna que des résultats modérés, car les guerres du roi soleil grèvaient considérablement le budget de l’état.
Le roi sacré impose le catholicisme à tous ses sujets : en révoquant l’édit de Nantes en 1685, il force les protestants à se convertir ou bien à quitter le royaume. Plusieurs milliers de Huguenots finiront par émigrer sous des cieux plus tolérants, vers les Provinces-Unies ou l’Amérique du Nord. Dans le domaine économique, Louis XIV s’appuie sur son ministre Colbert et sa doctrine : pour enrichir la France et son roi, il faut empêcher la monnaie de sortir en évitant d’acheter trop de marchandises coûteuse à l’étranger. Il faut développer les manufactures qui produisent des objets de luxe, symboles du raffinement de la civilisation française. Sur le plan international, Louis XIV s’emploie à agrandir les frontières du royaume, essentiellement vers le nord et l’est.
Limites et critiques de l’absolutisme français. Le roi de France doit respecter des règles qui limitent de fait son pouvoir : il doit appliquer les lois fondamentales du royaume. Il lui est interdit de choisir son héritier : il ne peut enfreindre le principe de l’hérédité et de la primogéniture mâle. Monarque sacré à Reims, le roi doit défendre l’Église catholique et ses commandements. Le domaine royal reste inaliénable. En matière judiciaire, il dispose du pouvoir d’envoyer quelqu’un en prison sans jugement. Cependant, le recours aux lettres de cachet fut relativement restreint dans la pratique. Louis XIV gouverne sans premier ministre et décide seul mais il entend les conseils de son chancelier, de ses ministres et de ses secrétaires d’état.
Malgré tous les efforts entrepris par le roi Soleil, la monarchie française du XVIIe siècle ne fut jamais absolue par manque de moyens. Le royaume de France est l’un des plus peuplés d’Europe et l’administration n’est pas suffisante pour imposer un pouvoir sans limite. Les décisions royales se heurtent à la société de corps : pendant l’Ancien Régime, les villes, les corporations et ordres disposent de privilèges que le souverain doit respecter. Le clergé a par exemple ses propres tribunaux et ses propres procédures judiciaires. Depuis le Moyen Âge, les libertés (entendons les franchises et les exemptions collectives) autorisent un grand nombre de Français à disposer de droits particuliers. Les sujets ne parlent pas tous la même langue, n’ont pas les mêmes mesures … Les états généraux et provinciaux sont réunis en temps de crise et sont une tribune pour les représentants des trois ordres. Ces institutions vont à l’encontre des visées absolutistes de Louis XIV. C’est pourquoi les états généraux n’ont jamais été réunis sous son règne.
Au XVIIIe siècle, l’absolutisme est surtout critiqué par les philosophes des Lumières tels que Denis Diderot ou encore Jean-Jacques Rousseau. Montesquieu déclare que les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire ne peuvent être concentrés dans les mêmes mains. Dans l’Encyclopédie, l’article portant sur l’autorité politique critique l’absolutisme. La remise en cause du système politique prend une tournure radicale en 1789 lorsque les députés se déclarent Assemblée nationale et qu’ils rédigent par la suite une constitution, la première de l’histoire du pays. On passe alors à un régime de monarchie constitutionnelle. Le mot « absolutisme » a été forgé sous la Révolution française, de même que l’expression « Ancien Régime« . Il fut alors chargé d’un sens négatif et systématiquement opposé à l’œuvre de la République. Les journées d’octobre 1789 ramènent le roi à Paris ; la cour est déstructurée et Versailles cesse d’être le lieu de l’absolutisme. Quelques années plus tard, les objets du sacre et les symboles royaux sont détruits par les révolutionnaires. La monarchie absolue de droit divin a vécu.
La monarchie absolue dans le reste de l’Europe. Les monarques les plus représentatifs du pouvoir absolu sont Philippe II d’Espagne et Frédéric II de Prusse, ce dernier étant l’exemple le plus fréquemment évoqué de despote éclairé. L’absolutisme relève davantage de la pratique du pouvoir que d’une doctrine politique.
On a parfois présenté le philosophe Thomas Hobbes comme le théoricien du pouvoir absolu. En réalité, il s’est essentiellement attaché à étudier les rapports de l’homme avec le pouvoir, dégageant de là l’idée de droits imprescriptibles qui seront à l’origine de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
En Angleterre, les Stuarts ont essayé de rogner les droits politiques du Parlement. Jacques Ier tente à plusieurs reprises de gouverner sans convoquer le Parlement qui a en principe un droit de regard sur la levée de nouveaux impôts. Dans ses discours et ses écrits, il rappelle que son pouvoir est de droit divin. Son absolutisme s’exprime également dans le domaine de la religion. Il souhaite imposer l’anglicanisme à tous ses sujets, persécutant les puritains et les catholiques. Son fils Charles II continue le projet absolutiste. La guerre civile qui marque la fin de son règne aboutit à la première révolution anglaise : Charles II perd le combat et se trouve décapité. Après la parenthèse républicaine d’Olivier Cromwell, la monarchie est restaurée.
Citation :
« Pour la plupart des hommes du XIXe siècle et aujourd’hui encore absolutisme est synonyme de despotisme, de pouvoir capricieux et illimité. C’est absolument inexact : pouvoir absolu signifie exactement pouvoir indépendant; la monarchie française était absolue dès lors qu’elle ne dépendait d’aucune autre autorité, ni impériale, ni parlementaire, ni populaire : elle n’en était pas moins limitée, tempérée par une foule d’institutions sociales et politiques héréditaires ou corporatives, dont les pouvoirs propres l’empêchait de sortir de son domaine et de sa fonction. Son droit confinait à une multitude de droits qui la soutenaient et l’équilibraient. L’ancienne France était « hérissée de liberté. » Charles Maurras
Section seconde : Les étapes de l’unification du droit par l’Etat monarchique
L’Église, l’institution publique la plus solidement romaine après la disparition de l’Empire, trouve dans le Code théodosien un modèle d’organisation ; elle puise dans son Livre XVI, consacré aux questions touchant à la foi chrétienne, des références qui seront rappelées, du VIe jusqu’au XIe siècle, dans les collections canoniques.
De plus, la réforme grégorienne (au XIe siècle) fait apparaître une nécessité dans le droit de l’Église : celle de rationaliser sa présentation. À des sources disparates et souvent contradictoires, l’on va substituer un ensemble ordonné. L’artisan de cette réforme est Gratien. Même s’il n’est pas le premier à vouloir classer les sources canoniques (avant lui, Anselme de Lucques et surtout Yves de Chartres — spécialement dans sa Panormia — avaient cherché à exposer méthodiquement le droit de l’Église), Gratien jette les bases d’une nouvelle codification. Il procède vis-à-vis du droit de l’Église comme Justinien l’avait fait vis-à-vis du droit romain : recenser des sources disséminées et tenter de les classer à partir de l’opinion qu’il donne sur les questions ainsi présentées. Le titre de son ouvrage est d’ailleurs parfaitement explicite : Concordia discordantium canonum (Concordance des canons discordants). Dès sa parution, au milieu du XIIe siècle, le succès du Décret, comme on le nomme d’ordinaire, est immense : connu non seulement en Italie, mais aussi en France, en Allemagne et en Angleterre, le Décret devient objet d’études et de commentaires de la part des « décrétistes », les spécialistes du Décret, dont le plus célèbre est celui d’Huguccio, intitulé Somme sur le Décret. L’un des intérêts majeurs de la Somme tient au fait qu’elle déclare le droit romain supplétif en cas de silence des sources canoniques. Cette nouveauté scelle l’alliance des deux droits et date l’apparition de ce que l’on nommera ultérieurement le jus commune.
Au siècle suivant, Grégoire IX complète l’oeuvre de Gratien par la promulgation de ses Décrétales, fruit du travail de Raymond de Peñafort et dont l’objet est de rassembler toutes les « extravagantes » (extra decretum vagantes), c’est-à-dire les décrétales survenues postérieurement au Décret — tout comme les Novelles avaient été postérieures aux compilations de Justinien — et qui deviendront à leur tour l’objet de l’étude et des commentaires des « décrétalistes ».
L’apport du droit canonique est capital dans la construction politique européenne méridionale, car ce droit définit sous un jour moderne la notion de res publica : hiérarchie du commandement, relations institutionnelles entre les membres de la chrétienté, pratique de l’élection, théorie du mandat, respect de la volonté et développement du consensualisme.
La hiérarchie du commandement trouve sa source dans le pouvoir renforcé du pape au lendemain de la réforme grégorienne, d’une part, mais aussi, d’autre part, dans la soumission des évêques à ce dernier ; c’est toute une manière de gouverner qui se trouve ainsi redéfinie. L’élection et le mandat font percevoir de manière nouvelle l’exercice du pouvoir politique : les assemblées et les conseils dans l’Église inspirent la société laïque. Les relations des membres de la communauté s’institutionnalisent à travers un droit de mieux en mieux connu, grâce à la codification ; le décret de Gratien, renouant avec la grande tradition romaine, suscite un désir nouveau dans la société civile.
L’apport du droit canonique est donc essentiel dans le phénomène de codification du droit. Non seulement, en effet, il lie codification et organisation politique, mais de plus, il relance la notion de réflexion juridique et accorde une place primordiale à la doctrine, qui sera, à l’avenir, la base même de la codification.
Moyen Âge
Les ROYAUMES ROMANO-GERMANIQUES qui font suite en Occident à l’Empire romain défunt héritent de sa tradition juridique, qu’ils combinent avec l’apport barbare. Rien d’étonnant dès lors à ce que le Code théodosien soit recopié en Gaule à plusieurs reprises. La plus ancienne des lois barbares, à la rédaction de laquelle participent des juristes romains tel Léon de Narbonne, le code d’Euric, promulgué en 476 et reprenant un droit romain vulgaire saupoudré de règles gothiques, a selon toute vraisemblance été remplacé par le bréviaire d’Alaric, comme on le nomme à partir du XVIe siècle, lui-même promulgué à Toulouse en 506 et truffé de dispositions théodosiennes. Son caractère territorial ou applicable aux seules populations romaines demeure un point discuté entre savants. L’apport majeur du bréviaire d’Alaric tient à sa philosophie : il s’agit d’une lex scripta, supérieure à la volonté du prince lui-même.
Roi des OSTROGOTHS, Théodoric se veut législateur. À cette fin, il promulgue un édit, connu sous le nom d’édit de Théodoric et reprenant les principales prescriptions de Théodose II, adaptées aux circonstances nouvelles. Lors de son discours d’intronisation à Rome, en 500, Théodoric aurait prononcé ces mots : « Nous nous réjouissons de vivre sous le droit romain, que nous souhaitons défendre les armes à la main… À quoi bon avoir repoussé le désordre barbare, si ce n’est pour tirer des lois notre règle de vie ? »
Chez les FRANCS, la loi salique fait apparaître des concepts juridiques romains. Si sa datation fait encore, elle aussi, l’objet de discussions entre savants, son but ne fait pas de doute : faire cesser l’enchaînement de la faida, la vengeance privée, et lui substituer, comme cela était tout à fait concevable dans l’esprit des Francs, une composition négociée. La première originalité de la loi tient en cela qu’elle se présente comme un pacte au sens romain du mot, mais qu’elle véhicule l’idée chrétienne de paix. De plus, Clovis n’en est pas la source véritable : il laisse ce soin au peuple franc. En effet, en vertu de la tradition franque, le roi est soumis à la loi. Mais, de même, le peuple tout entier est désormais soumis à la loi et à la justice publique. La loi salique représente bien cette acculturation entre les trois mondes : elle est romaine dans sa nature, chrétienne dans sa philosophie, franque dans son élaboration. Le phénomène de mise par écrit de la loi est concomitant de l’époque de l’installation de la première dynastie des rois francs.
Charlemagne, s’il ne codifie pas la législation, corrige les lois germaniques, reprenant ici la vieille idée romaine de l’empereur source de la loi. Il remanie ainsi la loi salique, qui devient la lex salica emendata. Il adresse aussi des capitulaires aux missi dominici, où il précise les dispositions au respect desquelles ils doivent veiller. En outre, en 785, le pape Hadrien Ier remet à Charlemagne la collection canonique appelée Dionysio Hadriana, qui inspirera les réformes législatives impériales. La volonté législative se poursuit sous la seconde dynastie des rois francs.
Trois siècles plus tard, la recherche de textes canoniques entreprise par les réformateurs grégoriens pour fonder la primauté romaine conduit à retrouver, à la fin du XIe siècle, un manuscrit du Digeste que l’on considère avoir été copié au VIe ou au VIIe siècle. Grâce à cette découverte, renaissent les études juridiques à Bologne, dès 1088, sous l’impulsion d’Irnérius, qui fait du droit civil une discipline autonome, distincte des arts libéraux et dotée d’une technique propre : la glose. Les glossateurs commentent les textes en marge, étudient des cas, les regroupent pour les analyser et dressent une somme. D’Italie, la technique des glossateurs passe en Angleterre et dans le sud du royaume capétien, où se fondent, à Montpellier et à Toulouse, sinon des écoles de droit, du moins des centres d’étude dans l’entourage de maîtres réputés. Cette première école est suivie par celle des postglossateurs qui, contrairement aux glossateurs qui se livraient à une étude littérale des textes, privilégient, eux, l’esprit de la loi. De France, où elle est née, cette manière de penser passe à l’Italie.
Ce droit « savant » fait renaître une doctrine, condition indispensable pour que la codification voie le jour. Ses performances techniques assurent avant tout la prépondérance du droit romain : face à la multiplicité des coutumes et à la quasiinexistence de la législation royale, il faut dire qu’il ne rencontre guère de compétiteur. Mais son accueil n’est pas le même dans le sud du royaume de France, où la tradition romaine est forte, et dans le Nord, moins marqué par le legs antique. Au XIIIe siècle, la différence est si visible qu’on parlera de pays de coutumes pour les régions situées au nord d’une ligne Charente / Genève et de pays de droit écrit pour celles situées au sud.
Certains canonistes, comme Huguccio, trouvent dans le droit romain un fondement à l’action des souverains en matière juridique. En effet, au nom de la potestas, le roi peut supprimer une mauvaise coutume. Les légistes reprennent cette idée et affirment que confirmation des bonnes coutumes ou abolition des mauvaises représente un devoir pour le roi. C’est ainsi que, tout au long du XIIe siècle, le roi rabote, complète, cisèle la coutume et le sens qu’il convient de lui donner, mettant en pleine lumière un pouvoir régalien devenu obsolète : celui de faire la loi et de dire le droit.
Au XIIIe siècle, les répercussions du droit savant sont immenses sur le plan politique. À Orléans, où les théoriciens du droit sont particulièrement brillants, naît une nouvelle vision de l’ordre juridique ; leurs idées se retrouveront dans les Établissements de Saint-Louis ou dans le Livre de Jostice et de Plet. De justicier, le roi est devenu législateur. Car le point de basculement se situe bien au XIIIe siècle. En effet, chez Suger (un siècle plus tôt), l’idée selon laquelle le roi doit conserver un ordre juridique antérieur à la corona ne fait aucun doute ; elle demeure d’actualité tout au long du siècle. Mais au siècle suivant, les légistes affirment le bien-fondé du roi à agir en matière juridique, au nom de l’utilitas publica, qui délimite à la fois le domaine de compétence du roi et lui en assigne les bornes.
De la sorte, au XIIIe siècle, le roi légifère pour tout le royaume, par le biais des ordonnances ; l’idée chemine que ces « établissements royaux » doivent être appliqués. Les rois francs de la troisième dynastie poursuivent l’oeuvre entreprise par ceux des deux premières. Le juriste Philippe de Beaumanoir va plus loin : s’inspirant du droit romain et des canonistes, il affirme que le roi peut faire tout établissement qu’il veut « pour le commun profit ». Intellectuellement, Beaumanoir inscrit cette notion dans celle de « garde générale du royaume », qu’il laisse à l’appréciation du roi. Les temps sont venus où l’on peut dire : « Le roi est souverain par-dessus tous ». Dans la première moitié du siècle, le roi doit encore réunir une cour plénière de vassaux et y obtenir la plus large adhésion possible s’il veut faire adopter une mesure législative à valeur générale ; à partir de la moitié du siècle, une décision acquise à la majorité des vassaux suffit ; au siècle suivant, Philippe le Bel substituera le conseil du roi à la cour des vassaux pour élaborer la norme législative. Et Beaumanoir, toujours, de préciser qu’en temps de paix, le grand conseil est compétent pour faire la loi mais que, en temps de guerre, le roi peut agir seul pour prendre une ordonnance de portée générale. Même si les réalisations sont encore timides, les bases sont jetées : le roi est un prince législateur, en droit public du moins, car la législation royale en droit privé demeure plus limitée.
Le roi y est cependant efficacement secondé par ses agents, notamment baillis et sénéchaux, qui incitent à la rédaction des droits coutumiers : dans le Nord, le Très ancien coutumier normand date de la fin du XIIe siècle, le Grand coutumier normand du milieu du XIIIe siècle, le Conseil à un ami du bailli Pierre de Fontaine pour le Vermandois, le Livre de Jostice et de Plet pour l’Orléanais, les Établissements de saint Louis pour la Touraine et l’Anjou, les Coutumes de Clermont-en-Beauvaisis de Philippe de Beaumanoir ; dans le Midi, les statuts d’Avignon et d’Arles sont du milieu du XIIe siècle et, au XIIIe siècle, on rencontre les coutumes de Montpellier, les statuts de Marseille, les coutumes de Cahors, celles de Toulouse. Les recueils ainsi constitués permettent certes de fixer un droit souvent mal connu, de le rationaliser grâce aux techniques savantes, mais aussi d’orchestrer le tout dans un sens favorable à la royauté. Le roi compte aussi sur la compétence de certains agents formés dans les universités.
Au XIVe siècle, le roi de France dispose du pouvoir législatif par le biais des ordonnances, qui portent sur le droit public et la réformation du royaume. Quant au droit privé, régi par la coutume, le roi cherche à le stabiliser, sinon à le rationaliser ; comme l’écrivent plusieurs spécialistes, la mise par écrit des coutumes découle de cet esprit de méthode qui animait le décret de Gratien. On assiste ainsi à la rédaction de coutumiers de « deuxième génération », toujours d’origine privée, qui comportent des faiblesses de forme et de fond ; il s’agit de la Très ancienne coutume de Bretagne (environ 1330), du Grand coutumier de France (fin du siècle), de la Somme rurale (vers 1392).
Pour pallier les insuffisances du siècle précédent, Charles VII, dans l’ordonnance de Montils-les-Tours (1454), ordonne aux baillis de rédiger les coutumes de leurs ressorts. En effet, en raison des incertitudes de la coutume, les praticiens risquent de lui préférer le droit romain. Or, l’intervention royale porte sur le droit coutumier. Mais cette ordonnance est mal conçue : le projet de rédaction de chaque bailliage doit en effet être renvoyé au roi, lequel doit consulter le Parlement avant promulgation. L’expérience montre que le Parlement, débordé de réclamations, ne peut faire face. Le roi repense donc le système dans l’ordonnance de 1497 : ce sont désormais des commissaires délégués, issus du Parlement, qui rédigent le projet élaboré par le bailli assisté des notables, dans le cadre des bailliages. Certes, le bilan de cette rédaction officielle du XVe siècle est assez décevant, mais il enracine deux tendances : la fixation définitive du droit coutumier et l’espérance d’une unification du droit. Les pays proches de la France suivent une pente comparable : en 1430, par exemple, Amédée VIII de Savoie publie ses Decreta seu Statuta.
Le processus de codification conçu dans l’Empire romain a donc été relayé, en dépit des difficultés, par les rois, qui s’appuient de plus en plus sur une doctrine apparue au sein de l’Église. Ce phénomène, méditerranéen dans sa nature, a trouvé un écho en Scandinavie.
Dans la PÉNINSULE IBÉRIQUE, le droit romain avait été transmis par les Wisigoths et la notion de puissance publique était demeurée, dans les esprits, une évidence que seuls les faits empêchaient de matérialiser. Néanmoins, comme partout, s’étaient multipliés les usages locaux, renforcés par les sentences des juges (fazañas), qui faisaient jurisprudence. Très tôt, les souverains espagnols entreprennent de récoler le droit : ce sont les Usatges de Barcelone, le Fuero General de Navarre, le Fuero Juzgo. Et, comme ailleurs, le droit romain vient influencer le droit espagnol : c’est le Fuero Real et, surtout, les Siete Partidas, rédigées sous Alphonse X de Castille, les Fueros d’Aragon, les Furs de Valence, tous rédigés au XIIIe siècle. Les Leies gerais d’Alphonse II du Portugal sont plus intéressantes, car elles fondent le pouvoir sur le droit naturel. En 1413, les Cortès de Catalogne font une pétition pour obtenir la codification de la législation catalane. Vingt ans plus tard, les Cortès réunies à Madrid demandent au roi Jean II de faire cesser « les mystères du droit ». À la fin du siècle (1484), les Ordenanzas reales de Castille sont publiées, mais elles ne seront pas promulguées.
Au DANEMARK, trois lois, correspondant chacune à une des trois provinces de Scanie, Seeland et Jutland, sont mises par écrit au XIIIe siècle et ultérieurement confirmées par le roi. La plus ancienne des trois est la loi de Scanie, rédigée pour la première fois au XIIe siècle (aujourd’hui perdue), puis de nouveau rédigée en danois, entre 1203 et 1212, et en latin, entre 1206 et 1215, par les soins d’Andres Sunesen, archevêque de Lund. La loi de Seeland est écrite entre 1220 et 1250, en langue danoise, par de simples particuliers ; là encore, il existe deux versions. Quant à la loi du Jutland, elle est publiée à l’initiative du roi Valdemar II, en 1241, à l’assemblée générale du royaume réunie à Vordingborg ; elle sera complétée au XIVe siècle.
Au début du XIIIe siècle, tous les pays de SUÈDE, séparés les uns des autres par d’immenses forêts, possèdent encore leur propre coutume. La loi est mise par écrit à l’initiative du laghman (qui connaît la loi par coeur). La plus ancienne rédaction, remontant aux premières années du XIIIe siècle, est celle de la loi de Vestrogothie ; à la fin du siècle seront rédigées celles d’Ostrogothie, d’Upland et de l’île de Gotland. Sous l’impulsion du roi Eric (1319-1365), toutes ces lois seront regroupées en un code dont l’Église empêchera la promulgation officielle. Ce n’est qu’au XIVe siècle que seront rédigés les lois de Vestmannland, le code d’Helsingie (qui servira de modèle à la législation finlandaise) et la loi de Småland. Enfin, les nobles imposent en 1442 le Codex Christophorianus à la royauté.
Après la royauté de Harald à la Belle Chevelure, la NORVÈGE connaît quatre groupes de coutumes : celui du Nord (Frostathing), avec pour ville principale Nidaros ; celui de l’Ouest (Gulathing), avec Bergen ; celui du centre (Eidsivathing) ; celui du Sud-Est (Borgasthing), entre les actuelles Oslo et Göteborg. Ces quatre lois sont rédigées au XIIe siècle sous l’impulsion, ici aussi, du lögmadr (équivalent du laghman suédois). Deux versions du XIIIe siècle des lois de Frostathing et Gulathing sont bien connues. Le roi Magnus Haakonsson (1263-1280) sera chargé par les assemblées des quatre provinces de réformer leurs lois et de publier un nouveau code (1274), commun à tout le royaume ; ce code n’est qu’une compilation des anciennes lois, avec des modifications de détail.
L’ISLANDE fut d’abord un pays de droit non écrit. L’introduction de l’écriture dans l’île date de 1117 ; c’est à l’althing (assemblée générale des hommes libres) de cette année-là qu’on décide de faire consigner par écrit les lois qui viennent d’être adoptées pendant la session. Pour l’île, nous possédons deux textes : le droit ecclésiastique (datant de 1123) et le Recueil général du droit islandais (Gragas), sorte de coutumier rédigé lorsque l’île se soumet au roi Magnus de Norvège, à la fin du XIIIe siècle. Afin de mieux intégrer l’île à la couronne norvégienne, Magnus veut imposer la Jarnsida, copie des anciennes lois norvégiennes ; devant la réticence des insulaires, le roi Eirik (fils de Magnus) devra accorder le Jonsbok, accepté avec réserve par le peuple et le clergé. Le Jonsbok tire son nom du lögmadr norvégien qui l’introduisit dans l’île : Jon Einarsson ; c’est un compromis entre l’ancien droit islandais et le code de Magnus.
Certains, dans le SAINT-EMPIRE ROMAIN GERMANIQUE, appellent la codification de leurs voeux. Ainsi Nicolas de Cues souhaite que le Reichstag, en utilisant la masse des coutumes, fasse un code unique.
Époque moderne
Ce vaste fleuve de codification cherche un nouveau profil d’équilibre à l’époque moderne. Ce sont tout d’abord les rédactions de coutumiers qui, décidées en FRANCE au siècle précédent, se réalisent alors. La coutume d’Orléans est rédigée en 1509, celle de Paris en 1510. Le mouvement de rédaction des coutumes entraîne une double conséquence contradictoire. D’une part les coutumes d’application géographique restreinte disparaissent, d’autre part les différences entre coutumes, désormais aisément identifiables, se trouvent mises en pleine lumière. Dans un souci d’harmonisation, la monarchie décide donc la « réformation » des coutumes. L’objectif est d’unifier un droit régional autour d’une coutume prépondérante ; ainsi sont réformées les coutumes de Bourgogne (1575), Paris et Bretagne (1580). Ce travail de lissage de la norme juridique permet au roi d’évincer progressivement le droit romain, qu’une partie de la doctrine aurait bien vu s’appliquer en France, et de le remplacer par un droit royal français. Car, tout au long de la période moderne, un double mouvement anime la marche vers la codification : la doctrine d’une part, la législation royale de l’autre.
L’écriture des textes coutumiers fournit la base d’un corpus que la doctrine commente rapidement et abondamment. Dès le XVIe siècle, une doctrine de droit coutumier voit le jour. On retiendra les noms d’Argentré pour la Bretagne, Coquille pour le Nivernais, Dumoulin dans le Discours sur la concorde et l’unification des coutumes de France, Hotman dans L’Anti-Tribonien. Leur oeuvre dépasse le simple commentaire : très souvent, ce sont de véritables ouvrages théoriques dont l’impact sera décisif pour la codification dont nous célébrons cette année le bicentenaire. D’autant plus que les romanistes (Alciat, Cujas) contribuent à couper le droit romain d’une application concrète. L’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), encore appelée ordonnance Guillelmine, d’après le nom du chancelier Guillaume Poyet qui l’a préparée, pose la condition essentielle pour la codification à venir : l’utilisation de la langue française au lieu du latin pour tous les actes judiciaires et notariés ; de plus, elle réforme la procédure, met des limites à la juridiction ecclésiastique, impose aux curés la tenue de registres de baptême, interdit les coalitions « du fait de métier »… C’est dire qu’elle intervient dans de nombreux domaines de la vie juridique. À la fin du siècle, la marche vers la codification se précise : en 1560 à Orléans, puis en 1576 à Blois, les états généraux demandent que soient rassemblées toutes les lois applicables. L’ordonnance de Blois de 1579, dans ses articles 207 et 208, enjoint à des commissaires de collecter de manière ordonnée tous les textes en vigueur en un volume, sous la direction de Barnabé Brisson, président du Parlement de Paris. En février 1587, ce dernier présente au roi de France le code du roi Henri III, divisé en 20 livres, eux-mêmes subdivisés en titres et ces derniers en articles numérotés. Pour devenir exécutoire, le code aurait dû être approuvé par le Parlement mais, deux ans plus tard, Henri III est assassiné, tout comme Brisson, et, même s’il est tenu à jour, réédité de 1601 à 1622, cité en modèle par les rédacteurs de l’Encyclopédie, le code d’Henri III est en fait demeuré à l’état de projet de codification générale.
Au XVIIe siècle, la doctrine connaît de grands noms : Loysel, bien sûr, qui, par facétie peut-être, de manière fort efficace en tout cas, a mis les principes du droit français en adages parvenus jusqu’à nous ; Domat, qui, dans Les loix civiles dans leur ordre naturel (1689-1694), va rechercher le droit naturel derrière le droit romain. Mais on s’applique aussi à rapprocher le droit français du droit romain. Tel est l’objet, par exemple, du Code du roi Henry IV (1602) de Thomas Cormier. Le Code des décisions Forenses (1612) de Brosses est, quant à lui, un recueil de jurisprudence, tout comme l’était le Codex fabrianus (1605) pour celle du Sénat de Savoie. Ce travail doctrinal permet d’affirmer l’existence d’un « droit commun coutumier ». Le premier président du Parlement de Paris, Lamoignon, écrit sous le règne de Louis XIV une série d’articles dont l’ambition est de « réduire toutes les coutumes à une seule ». Dans la première moitié du siècle, la grande ordonnance de réformation du chancelier Michel de Marillac est tenue en échec à cause de l’opposition du Parlement ; par dérision, on la surnomme « code Michaut », du nom de son auteur. Quant au Code de Louis XIII (1628) de Jacques Corbin, il se présente comme un recueil des ordonnances de Louis XIII sur certaines matières de droit public. Colbert est l’artisan de grandes ordonnances auxquelles on donne parfois le nom de code Louis et rédigées par une commission formée de membres du Conseil d’État et de juristes compétents dans chaque domaine abordé en matière de procédure civile (1667) et pénale (1670) ; nous n’avons pas affaire à des codes à proprement parler, mais à des textes qui unifient les styles, c’est-à-dire la procédure, afin de mettre un frein à la malignité de la basoche. Les ordonnances sur les eaux et forêts (1669), sur le commerce terrestre (1673), sur la marine (1681), sur les armées navales (1692) ou sur les Noirs — le Code noir (1685) — concourent à refondre le domaine juridique sur lequel elles agissent ; elles constituent des codifications partielles.
Chacun sait que le dernier siècle de l’Ancien Régime s’illustre par le triomphe de l’esprit de raison. C’est dans cette veine-là qu’est publié par Bourjon Le droit commun de la France et la coutume de Paris réduits en principes, en 1747, où l’on retrouve une démarche analogue à celle de Domat, mais portant cette fois sur la coutume de Paris et non plus sur le droit romain. Mais l’oeuvre majeure du siècle est due à Pothier. Professeur de droit français, celui-ci cherche dans ses ouvrages à rapprocher du droit romain les coutumes d’Orléans et de Paris. Certains souhaitent aller plus loin : Linguet (avocat), dans sa Théorie des lois civiles (1767), propose les lois des sultans en contre-modèle de la mosaïque française (le malheureux n’aura pas de chance : embastillé par le roi, il sera guillotiné par la République); Guyton de Morveau, avocat général au Parlement de Bourgogne, appelle de ses voeux en 1771 la réunion d’un comité de jurisconsultes ayant pour mission de synthétiser le droit en une vingtaine de chapitres, ratifiés par l’autorité du roi ; Pétion (avocat lui aussi), dans Les lois civiles et l’administration de la justice (1782-1783), envisage dans leur ensemble le divorce, le droit d’aînesse, le droit successoral ; Picard de Prébois (avocat pareillement) publie en 1788 une Introduction à un seul code de lois. En matière pénale, le Traité des délits et des peines (1764) de Beccaria est souvent présenté comme la source de la codification pénale ultérieure. Parmi les philosophes eux-mêmes, si Montesquieu n’est pas favorable à la codification, Diderot ou Rousseau (dans ses Considérations sur le gouvernement de la Pologne, il envisage la rédaction de trois codes : un politique, l’autre civil et le troisième criminel) la rêvent comme substrat d’un ordre nouveau. À côté de ces oeuvres de doctrine, on rencontre des codifications limitées à un territoire géographique ; tel est le cas du code de Lorraine (aussi appelé code Léopold), qui réunit les édits des ducs de Lorraine dans l’ordre chronologique, ou du Code corse, qui, sur ordre du roi, rassemble les édits intervenus dans l’île depuis son rattachement à la couronne de France (1768) jusqu’à 1789. Le chancelier d’Aguesseau unifie le droit pour tout le royaume en matière de donations (1731), de testaments (1735) et de substitutions (1747). Deux initiatives confirment la marche vers la codification : en 1759, deux magistrats, Laverdy et Langlois, tous deux conseillers au Parlement de Paris, proposent d’unifier les coutumes par voie législative tout en maintenant les « dispositions totalement opposées ». En 1771, le chancelier Maupeou cherche à réduire les spécificités coutumières et fait rédiger en ce sens un travail sur la coutume de Normandie qui n’aboutit pas.
Comme durant la période médiévale, le souffle de la codification se répand dans l’EUROPE ENTIÈRE, et même dans toute la MÉDITERRANÉE. En 1504, Isabelle de Castille réclame une codification dans son codicille testamentaire ; quelques années plus tard, la Catalogne voit fleurir des pétitions dans ce sens. Guillaume IV de Bavière, lui, agit : en 1520, il dote son royaume d’une législation uniforme et réformée, la Gerichtsordnung, et rassemble la législation administrative dans le Buch der gemeinen Landsordnung. Dès 1547, on assiste à la publication du Codex statutum (le code urbain d’Alexandrie), premier d’une longue série d’ouvrages de même nature advenus tout au long du siècle dans les Flandres, en Italie ou en Espagne. Le Danemark de Christian III se signale par le projet de codification du droit danois d’Eric Krabbe, qui n’aboutit pas. Reginald Pole, sous le règne de Henri VIII, voit, dans la codification royale, un moyen de connaître le droit — il va même jusqu’à proposer de remplacer le droit anglais par le droit romain. Édouard VI d’Angleterre, dans son Discours sur la réforme de certains abus (1551), propose une codification. Le Corpus juris canonici, quant à lui, date de 1580.
Au XVIIe siècle, les premières codifications viennent de l’EUROPE DU NORD : Landrecht de Maximilien Ier de Bavière (1616), Landrecht des Herzogthums Preussen (1618), Codex belgicus d’Anselmo (1649), codifications de Danemark (1683) ou de Norvège (1687) ; mais il s’agit plutôt de collections de dispositions normatives mises en ordre, que l’on peut rapprocher de la Recopilación de las Leyes de las Indias (1681), recueil de la législation espagnole pour l’outre-mer, ou de la Recopilación de Guipuzcoa (1696), concernant les dispositions applicables à la province. Tandis qu’en Angleterre, Sir Francis Bacon dans son De augmentis scientiarum et d’autres auteurs dans des ouvrages analogues jettent les prémisses d’une commission de classification des lois, que les événements politiques dramatiques de l’île empêcheront d’aboutir. Quelques codifications urbaines nouvelles voient encore le jour : les privilèges et libertés d’Orange par Philippe Guillaume de Nassau (1607) ou le Codex regularum de Le Mire à Anvers (1638). En 1672, Leibniz projette un Corpus juris.
Dans le seul cours du XVIIIe siècle, le Codex ferdinandeoleopoldinus de von Weingarten est publié en 1701 en Autriche et le Codex austriacus de von Guarient, trois ans plus tard au même endroit ; la même année 1704, est publié aux Pays-Bas un code militaire, d’autres codifications suivent en Hollande (1711 — Codex batavus de van Zurck) et en Zélande (1740 — Codex gelro-Zutphanicus de Schrassert). Victor Amédée II, roi de Piémont-Sardaigne, publie ses Lois et constitutions en 1723 ; le Sveriges Rikes Lag (loi du Royaume de Suède), qui regroupe des dispositions de droit civil, de droit pénal et de droit processuel, voit le jour en 1734, de même que la codification finlandaise. Le Marquis de la Ensenada propose en vain un projet de codification à Ferdinand VI d’Espagne en 1752, l’année même où la Bavière de l’électeur Maximilien III Joseph codifie le droit criminel, tandis que le droit judiciaire est codifié en 1753 et le droit civil en 1756. Le Piémont de Charles-Emmanuel III enregistre la parution des Leggi e Costituzioni de Sua Maesta (1770), le duché de Modène actualise son droit antérieur grâce à un code général, le Codice Estense (1771), la Toscane rassemble son droit dans le Codice della Legislazione toscana (1778), Venise codifie en 1780, de même que les Pays-Bas méridionaux (Codex brabanticus de Verloo en 1781). Le droit maritime sicilien est rassemblé la même année dans le Codice fernandino ; le code pénal toscan, que l’on surnomme « Leopoldina » (1786), du grand-duc Léopold mêle droit matériel et procédure en 119 articles, tandis que le code pénal d’Autriche (1787) de Joseph II en comporte 266. Mais l’oeuvre la plus importante est due à l’inspiration de Frédéric II de Prusse, le roi musicien, ami de Voltaire. Depuis 1714, plusieurs projets de codification se succèdent en vain en Prusse. En 1749-1751, cependant, le Code Frédéric est publié et traduit en français ; le chancelier Carmer procède à une refonte du travail qui ne verra le jour qu’en 1794 sous le nom de Allgemeines Landrecht (ALR) : il s’agit d’une oeuvre gigantesque de 19 000 articles englobant l’ensemble du droit civil, pénal, féodal et ecclésiastique. La France voit fleurir plusieurs codes privés portant sur des points particuliers : le Code de la Librairie de Saugrain (1744), le Code pénal de Laverdy (1752), le Code de la Police de Duchesne (1758), le Code des Seigneurs hautsjusticiers de Henriquez (1761), l’anonyme Code des Terriers (1761), les codes matrimoniaux de Le Ridant (1766) et Camus (1770) et, enfin, le Code des Parlements, anonyme lui aussi (1772).
Précisions du prof sur les auteurs coutumiers :
La rédaction officiel des coutumes avec l’ordonnance de Montils les tours. Le droit coutumier a commencé à faire l’objet de commentaire sérieux à partir du 16e siècle.
Le 16e à une grande importance, les coutumes sont désormais écrites, par conséquent les juristes s’en donnent à cœur joie pour commenter tout cela. Le 16e est le siècle le plus fécond. Les commentateurs, font comme les post glossateurs, ils commentent les textes. Il y a des ouvrages en latin, et un certain nombre ont écrit en français, dialecte vulgaire.
Il y a d’abord Charles DUMOULIN vécut à la moitié du 16e siècle, c’était un grand jurisconsulte, il est connu comme un auteur coutumier. Il a eu une vie très agitée. Il commence sa carrière en tant qu’avocat et comme il bégayait, il abandonne et se tourne vers les commentaires. Il s’adonne au calvinisme. Il a finit par attaqué beaucoup l’église romaine. Il a donné dans le changement, il a attaqué le Pape. Les Parisiens étaient catholiques. Dumoulin voit ainsi sa maison piller. De fait, il est parti en Allemagne, là il a changé. Il est passé au luthérianisme. Il a une carrière politique chaotique, pour les calvinistes d’abord, pour les luthériens ensuite et toujours contre le catholicisme. A la fin de sa vie, il se calme et revient au catholicisme. C’était un juriste imminent. Il a fait des œuvres importantes souvent en latin. C’est tout de même un personnage intéressant, il étudiera le droit canonique, le droit romain…C’est un peu un précurseur de l’article 1134 du code civil. Du point de vue du droit privé il laisse une œuvre considérable car il a travaillé sur le droit coutumier. Il a commenté la coutume de Paris très détaillée. Ses observations ont été prises en considération. La première rédaction = 1510. Dumoulin a commenté et la reforme de la coutume de Paris de 1560 a pris en compte les observations de Dumoulin. Il a cherché à développé une théorie du droit unifiée. Il a essayé comme beaucoup d’autre d’unifier le droit. Il essayé d’adapté le droit coutumier du Nord et le droit romain du Sud. Depuis Beaumanoir qui commenté la coutume du Nivernais, les lois ont mis des siècles à se former.
L’Argenterais, breton a également écrit en latin. Il a été en somme juge en bretagne, présidia de Renne. Il ne cherche pas l’unité, lui il cherche le particularisme, il essaye de garder la coutume de Bretagne, il est plutôt pour la féodalité. En ce sens il va à l’encontre de Dumoulin.
Il y a aussi des auteurs qui commencent à écrire en Français.
Guy Coquille, du Nivernais, il a passé sa vie dans le Nivernais, il a commenté la coutume du Nivernais, c’était un gallican, c’est-à-dire contre l’immixtion du droit religieux dans le droit politique. Traité méthodique de droit coutumier.
Jean Bodin. Il s’occupait aussi de la sorcellerie. Il s’occupait surtout du droit public. Il s’occupe de la manière dont les gouvernement varie, il est un précurseur de Montesquieu et de sa théorie des climats. C’est un précurseur de la souveraineté royale et de l’absolutisme.
Loysel, ses travaux, instituts coutumiers, sont pittoresques. En mariage trompe qui peut, vient de lui. L’habit ne fait pas le moine. C’était des adages.
Ces auteurs ont apportés leur pierre à l’édifice juridique que l’on connaît aujourd’hui.
Au 17e
Côté de stabilisation. Absolutisme, les auteurs sont moins originaux, se sont plus des commentateurs. Ils font un peu de théorie juridique. Après avoir comparé et confronter les coutumes ils ont tenté de faire les théories juridiques.
Domat, auvergnat, auteur de grands ouvrages. « Les lois civiles dans leur ordre naturel ». Traité sur la base du droit romain, du droit coutumier pour faire quelque chose de rationnel sur le droit. Il tente de trouver des règles générales. Il essaye d’accommoder le droit romain au besoin du temps. Il commentait synthétiquement et non comme les post glossateurs. Boileau à dit de Domat qu’il était un « restaurateur de la raison ». On commence à parler beaucoup de la raison.
Au 18e
Pothier, il n’est pas original. Il est né en 1699 et mort en 1772. Il était à Orléans. Il était conseiller au Présidia d’Orléans (juge) et il était professeur à Orléans. Il a travailler toute sa vie. C’est une sorte de monstre juridique. Il a rien crée, il a tout résumé, synthétiser de ce qu’ont fait ses prédécesseurs. Il écrit en français. Pratiquement, il a fait des travaux sur le droit romain et sur le droit coutumier, surtout dans le droit privé, les obligations, la communauté entre époux. Il compare les coutumes. Il travaille dans une perspective d’unité du droit. Les disciples de Pothier, sont les différents auteurs du code civil. Il a fortement contribuer au futur code civil de Napoléon.
Le code civil est une création de longue haleine. Droit romain, 16e, 17e, 18e … concourt au code civil.
Chapitre 5 : Ceux qui appliquent le droit au nom du roi. Notions sur le statu des juges sous l’ancien régime
Section première : Les caractéristiques essentielles de la notion d’office et la patrimonialité des offices
Les officiers sont pourvus d’une fonction ordinaire établie en permanence alors que les commissaires sont pourvus d’une fonction extraordinaire donc temporaire (révocable). (cf. Loyseau).
L’office est une charge publique permanente, donc ordinaire. Les officiers sont nommés par des lettres de provision d’office. (baillis, prévôts, colonels, etc.) L’office avait donc un statut légal indépendamment de la personne. Les successeurs avaient donc exactement la même fonction et les mêmes prérogatives. Le terme office vient du latin beneficium (bienfait, faveur), mais en réalité, l’office vient du droit canonique, du bénéfice ecclésiastique.
Au départ, les officiers étaient révocables, mais inamovibilité des offices dès mi XVe siècle : l’officier était considéré comme inamovible sauf faute grave qu’est la forfaiture. Ordonnance de Louis XI, 1467 qui s’engage à ne conférer aucun office qui ne fut vacant par mort ou démission de plein gré.
En quoi les officiers ont pu constituer une menace pour l’autorité royale ?
Tout réside dans le statut des officiers qui est là pour instituer une véritable indépendance vis à vis du pouvoir royal, à partir du moment où l’office est devenu patrimonial. La menace est donc liée à la patrimonialité des offices, elle-même ponctuée par 3 grandes étapes.
— Officiers inamovibles
— Vénalité des offices
— Offices pleinement héréditaires.
1) les officiers sont devenus inamovibles
à l’origine, ils dépendaient de la seule volonté royale. Malgré ce principe de droit affiché par l’ordonnance de 1360, il est apparu nécessaire pour une bonne administration d’éviter les changements intempestifs. Au 14ème siècle, une stabilité de fait s’installe à la tête des offices mais le roi restait maître. Par exemple : la politique de Louis XI qualifié de remueur d’office, ne se gênait pas pour destituer des officiers (1461 ) .
les officiers ont cherché à acquérir un statut protecteur. Ils se sont appuyés sur les règles de droit canonique. L’institution comparable est le bénéfice ecclésiastique ( fonction spirituelle et gestion des biens rattachés à cette fonction ). Le titulaire de cette fonction ne pouvait être privé de ce bénéfice qu’en cas de faute dûment constatée par un jugement.
Cette revendication fut approuvée par Louis XI dans une ordonnance du 21 octobre 1476 : les offices ne peuvent être vacants que dans 3 cas, la mort du titulaire, une forfaiture, ou une résiliation volontaire de la part de l’officier. Mais en dehors de ces 3 cas prévus, Louis XI a quand même destitué certains officiers en s’appuyant sur sa souveraineté et sur la clause des lettres de provision d’officiers où était mentionné « tant qu’il lui plaira ».
2) La vénalité des offices :
c’est à dire la capacité de vendre et d’acheter un office. Il convient de distinguer la vénalité occulte de la vénalité officielle.
— la vénalité occulte :
c’est le droit canonique qui l’influença car il admettait la possibilité de désigner de son vivant son successeur : « résignatio in favorem »
cependant, ce droit posait 3 conditions cumulatives :
— le candidat proposé devait remplir les qualités requises par la fonction (« candidat idoine »)
— le résignant devait survivre 20 jours après l’acte de résignation, condition qui était imposée pour éviter les résignations de force arrachées à un mourant sur son lit de mort.
— La résignation devait être gratuite.
C’est certainement la 3ème condition qui posait le plus problème. On ne vendait pas l’office en tant que tel, mais un droit de présentation.
A partir du 15ème siècle, la royauté a commencé à tolérer la vénalité occulte tout en posant les 3 mêmes conditions que le droit canonique. A partir du 15ème siècle donc, on peut considérer qu’il existait une vénalité occulte car officiellement, il n’y avait pas de cession de la fonction, mais uniquement une vente du droit de présentation.
Cette vénalité porte à critique, notamment pour tous ceux qui sont favorables à l’autorité royale. Toute cette vision a été critiquée lors des états généraux de 1484 et tout au long du 16ème siècle. Malgré toutes ces critiques, le pouvoir royal laissait faire : le montant des gages des officiers était très faible et la vénalité de la fonction apparaît alors comme pour compenser cette faiblesse, ce qui permet de faire taire les remontrances. Mais le problème était que tout travail dans l’administration commençait, jusqu’à la fin du 16ème siècle, par un faux serment.
— la vénalité officielle :
la vénalité peut être publique si elle est faite par l’autorité royale, ou privée, si elle se fait entre particuliers.
La vénalité publique est apparue dès le 16ème siècle. Le pouvoir royal a compris qu’il pouvait gagner beaucoup d’argent. Les offices les plus importants conféraient aux titulaires la noblesse.
Donc pour faire face aux dépenses de la guerre d’Italie, le roi Louis XII s’est mis à vendre des offices ce qui a évité la création de nouveaux impôts.
Ces ventes ont alors suscité de nombreuses critiques, mais la rentrée d’argent était importante. François 1er généralisa cette vénalité en créant des offices et en l’appliquant aux offices déjà existant et de retour au roi ( par exemple à cause de mort, ou résignation)
Il entendait faire de la vente des offices une vraie action rentable.
La bourse aux offices fut créée sous le nom de « bureau des partis casuels » et les souverains n’ont cessé de multiplier les cessions d’offices
Pour parer aux critiques le pouvoir royal fit valoir une nouvelle fiction juridique. Il souligna qu’il n’y avait pas de vente de l’office mais une cession gratuite d’un office aux bénéfices d’un particulier qui en contre partie consentait un prêt à l’état. Le roi a cherché à s’attaquer à la vénalité privée. En effet le but du pouvoir royal était qu’un maximum d’offices fasse retour à la main du roi.
La vénalité privée a été un des grands intérêts du pouvoir royal. Comme au départ il n’y avait pas de cessions à titre onéreux, l’officier ne pouvait vendre l’office. Le pouvoir royal avait la volonté de limiter le nombre de « résignatio in favorem » mais cette volonté a du faire face à une levée de boucliers des officiers et le pouvoir royal céda. Il céda en adoptant un compromis : le roi reconnut le droit de vendre l’office ( disparition de la cession gratuite ) et en contre partie les officiers devaient payer au bureau des partis casuels une taxe égale au quart du prix de l’office.
3) ’hérédité des offices :
l’office n’était pas héréditaire, et si cette restriction paraît secondaire, pour les officiers des 16 et 17ème siècles cela entraînait des situations délicates.
Lorsque le délais de 40 jours était respecté, il n’y avait pas de problème, mais dans le cas contraire l’office faisait retour de plein droit au bureau des partis casuels. Cette situation était courante du fait de la vie beaucoup plus courte à l’époque.
Le prix de l’office constituait une part essentielle du patrimoine. D’un coté le pouvoir royal avait intérêt à ce qu’un maximum d’officiers meurent sans avoir résigné. C’est pour cette raison que François 1er avait porté le délais de 20 à 40 jours. Or ces intérêts du pouvoir royal étaient en opposition avec l’intérêt des officiers qui entendaient transmettre librement leur office.
Le pouvoir royal se montra faible.
Une ordonnance de Charles IX de juin 1568 prévoyait alors la suppression de la taxe de transmission ainsi que du délais de 40 jours, lorsqu’en une seule fois l’officier versait une taxe égale au 1/3 de l’office : c’est l’institution du 1/3 Denier.
Toutefois, cette mesure qui instaurait l’hérédité fut un succès limité. Le roi relativement faible Henri III se mit à vendre l’hérédité sur certains offices ( des eaux et forêts ) ce qui était également un moyen de récupérer de l’argent.
Sous le règne d’Henri IV, le financier Henri Paulet prit une nouvelle mesure qui mit au point un nouveau régime ( 12 décembre 1604 )
Au terme de ce nouveau régime, le droit de résignation était dû à tous les officiers ainsi que la mise à l’écart du délais de 40 jours contre le paiement d’une taxe égale au 1/60 de la valeur de l’office, et cela tous les ans. C’est ce que l’on appelle le DROIT ANNUEL ou LA PAULETTE.
Ce fut le seul impôt qui connut un accueil favorable.
En 1620, le pouvoir royal réussit a perfectionner le système. Il fut donc décidé que pour être admis à payer la paulette, il fallait au préalable que l’officier ait couvert une autre taxe appelée PRET égale au 1/5 ou au 1/6 de l’office exigible tous les 9 ans, en outre il était possible de la payer en 3 fois.
Par ces deux mesures, de droit, l’état venait de reconnaître la pleine patrimonialité des offices.
On constate qu’il se passe la même chose ici que ce qu’il se passait au moyen âge pour la question des fiefs.
Le pouvoir royal avec Henri IV a cherché a affirmer son absolutisme, cependant il a donné aux officiers l’arme qui leur permet de le contrecarrer .
Section seconde :les effets de la patrimonialité
De manière générale, la patrimonialité des offices eut pour principal effet de remettre en cause le fonctionnement de l’administration royale. En effet a partir du moment ou le pouvoir royal a reconnu la pleine patrimonialité des offices, il leur a reconnu une véritable indépendance ce qui constitue une véritable menace pour la monarchie absolue.
I l’indépendance des officiers :
Par leur statut protecteur, les officiers ont bénéficié d’une certaine autonomie. Les officiers se sont vu reconnaître une autonomie juridique qui s’est traduite par le fait que l’état n’a plus aucun moyen d’action sur ses propres agents. Par ailleurs avec la patrimonialité des offices, le roi abandonna tout contrôle dans le recrutement de ses officiers. Tout comme l’état, le pouvoir royal se retire du processus d’avancement.
Face à cette indépendance la royauté a cherché a garder une parcelle de contrôle.
Les conséquences financières et économiques sont soit positives ( la patrimonialité procure des revenus importants au trésor royal, vente d’offices nouveaux, la paulette, qui varient mais dont les profits représentent au 17ème siècle de 5 à 10% des ressources ) ou négatives :
Dans la mesure ù les offices sont des charges très recherchées, leur prix ne cesse d’augmenter au 16ème et 17ème siècle. Il est multiplié par plus de 5 de 1550 à 1630 tandis que le coût de vie ne semble pas avoir été multiplié par plus de 2 ou 3.
Les conséquences de cette augmentation sont évidentes : les offices sont réservés aux catégories sociales les plus aisées, la haute bourgeoisie en particulier. Les acquéreurs d’offices les payant très chers pour ne bénéficier qu’en contrepartie de rémunérations modestes ont tendance à se rattraper sur les administrés et les justiciables avec le système des épices. Les épices étaient là pour payer un magistrat lorsqu’il devait exercer des actes qui ne relevaient pas de sa charge.
Dans la mesure où les offices se vendaient bien, la monarchie en multiplie la création. Elle ne faisait qu’augmenter les charges budgétaires pour l’avenir en cas de rachat. Rachat auquel elle fut bien incapable de faire face.
Quant aux conséquences politiques et sociales, la patrimonialité a été un moyen efficace d’ascension sociale. On relève ainsi en quelques générations des ascensions remarquables qui permettent souvent un renouvellement, en profondeur, du personnel politique ( souhaitant ainsi sa stabilité )
Le jeu extérieur de recrutement de l’administration a eu pour effet de la rendre très indépendante du jeu des forces politiques et d’assurer une autonomie des grands corps de l’état ( la magistrature )
Par contre, le goût pour l’investissement dans les charges publiques devient rapidement excessif. Ces types d’investissements drainent la plus grande partie des capitaux disponibles, ce qui explique en partie le grand retard de la France dans la révolution industrielle.
De plus, l’indépendance des officiers devient de plus en plus marquée, parfois agressive à l’égard de la royauté. Les officiers prennent conscience qu’ils ont en commun des intérêts a défendre ( formation de « caste » )
Le nombre des officiers devient trop élevé, certes le territoire est mieux encadré, mais les structures de l’administration s’alourdissent et la royauté la contrôle de moins en moins( irresponsabilité des officiers qui ne manquent pas de démissionner, de par leur autonomie financière, pour exprimer leur mécontentement vis à vis du roi et à faire pression ), autant de systèmes qui incitent à développer le système des commissions.
II Une menace politique pour la monarchie française :
Le roi n’a pas toujours le dernier mot. Son autorité a l’époque moderne se trouvait dans les liens d’hommes à hommes ( a rapprocher du rapport de féodalité au moyen âge ) et on constate que dans l’administration, des liens semblables eurent tendance à se développer. En effet, au départ, le roi pouvait entretenir des rapports directs avec ses administrateurs. Or a partir du moment où le nombre d’officiers a augmenté, ce rapport fut médiatisé.
Formation d’un lien de « protecteur à créature ». or le roi ne contrôlait pas tous ces rapports.
III Réaction du pouvoir royal
l’ancien régime était une organisation conservatrice. On ne remettait pas en cause ce qui existait, il fut donc impensable de remettre en cause le statut des officiers. Le pouvoir royal fut amené à développer un autre type d’agents qui dépendaient entièrement de son autorité :
1 Les commissaires :
à la différence des officiers, les commissaires n’étaient pas nommés pour assurer une mission d’administration permanente, mais pour une fonction publique extraordinaire. A la différence des officiers, les lettres de commissions faisaient des commissaires des mandataires du roi, donc révocables par la seule volonté royale.
A partir du moment où le pouvoir royal entendait affirmer son autorité, notamment à partir des années 1630, ce fut grâce à des commissaires que la France fut administrée. En effet, dès qu’une fonction apparaissait essentielle, le pouvoir royal la réservait aux commissaires ( par exemple les secrétaires d’état, garde des sceaux … )
2 Les fonctionnaires :
Cette catégorie d’agents publics n’existait pas au 18ème siècle. Néanmoins dès cette époque est apparue une ébauche du statut des fonctionnaires ; ainsi en était il des ingénieurs des « ponts et chaussées ». Bien qu’ils eussent le statut des commissaires, leur statut n’était pas sans annoncer celui des fonctionnaires. Ils étaient recrutés par concours, formés dans une école (1747 ) et en outre, bénéficiaient d’un statut qui définissait leurs obligations mais aussi leurs avantages. Dès la fin de l’ancien régime, dans toute l’administration on est amené à rencontrer ce qui se préfigure être le statut des fonctionnaires ( par exemple les commis de ministères, d’intendance … ) et à partir du 18ème siècle, le pouvoir royal a cherché à lutter contre les inconvénients du statut des officiers, cependant, il n’a pas remis en cause celui des fonctionnaires. Il a préféré développer une autre catégorie d’agents.
Titre second :
L’évolution de la notion de souveraineté royale de la fin du moyen âge à la fin de l’ancien régime.
Cette notion de souveraineté, s’est transformé sur la tête du peuple français. Souveraineté unique, le souverain ne se partage pas. Le peuple souverain est devenu le roi. Séparation des pouvoirs de Montesquieu, mais le seul souverain est le peuple français. En théorie. Selon Rousseau la majorité à raison. La souveraineté est absolue.
Accroissement territorial, par héritage, par mariage, par assassinat, le pays grossit. Le territoire français, n’a pas beaucoup changé depuis.
Chapitre premier : Un droit spécial pour la couronne
Le droit canonique avait précocement distingué la notion de siège apostolique, personnes morales, de la personne physique du pape. À partir du XIIe siècle, les états monarchiques naissants feront, eux, appel à la notion de couronne. Désignant au départ simplement l’objet matériel que l’on peut sur sa tête du roi, le mot prend progressivement un sens abstrait. La couronne devient une entité autonome préfigurant l’État. Ce concept apparu en Angleterre s’impose ensuite dans d’autres royaumes, notamment en Aragon, en Hongrie et en France.
La notion de couronne, distincte de la personne physique du roi, symbolise la pérennité de l’État. Le pouvoir doit s’exercer sans discontinuité, quelles que soient les contingences humaines qui affectent la personne du roi. Du XIIe au XVe siècle, les événements se chargent amplement d’en démontrer la nécessité : le roi a été absent (St-Louis pour la croisade), prisonnier (Jean le bon), vous (Charles VI) ou encore trop jeune pour gouverner (Charles VI encore, par exemple). Il faut bien qu’au-dessus de lui une entité assure la pérennité du pouvoir.
La couronne arrache progressivement au roi les biens, droits et prérogatives qui, pendant longtemps, lui ont été exclusivement attaché. Au terme de ce processus de dépatrimonialisation et de dépersonnalisation du pouvoir, le roi n’est plus que le dépositaire des attributs de la couronne et le gestionnaire de ses biens. Garante des intérêts supérieurs du royaume, la couronne ne peut être soumise aux règles du droit privé. Elle exige un droit spécial, un droit public. Entité supérieure au roi, elle lui crée des obligations autres que moral. Progressivement, au fur et à mesure des nécessités, souvent à l’occasion d’une crise politique, des règles sont dégagées qui s’imposent au roi en matière de dévolution de la couronne et tendent à rendre inaliénable le domaine de la couronne.
I La dévolution de la Couronne
La succession au trône aux pays à certaines règles qui se sont dégagées, de façon pragmatique, à partir des premiers capétiens. Au XIVe et au XVe siècle, est apparu la nécessité de préciser le caractère de ces règles. Elles ont été détachées de la sphère du droit privé, affirmant la nature spécifique de la dévolution de la couronne. Ensuite, a été proclamé le caractère immédiat de la succession au trône. Enfin, on a dégagé le principe selon lequel le roi lui-même ne pouvait déroger à ces règles. Cette indisponibilité de la couronne à achève d’inscrire les modalités de cette dévolution au rang de norme constitutionnelle
A- La dévolution spécifique de la Couronne
Lorsque Hugues Capet monte sur le trône, en 987, il a été élu. Rien ne laissait alors présager qu’il serait le fondateur d’une dynastie appelée à régner sur la France jusqu’à la Révolution (et même au-delà). C’était sans compter avec l’habileté du roi et de ses successeurs qui parviendront à introduire l’hérédité au profit de leur famille. Mais la succession ne profite qu’à un seul des enfants royaux, l’aîné : c’est la règle de la primogéniture. Ces deux premières règles ne tranchaient guère sur les règles successorales appliquées aux fiefs. La troisième, en revanche, se démarque plus nettement. Il s’agit de la règle de la masculinité.
1- L’hérédité
Pour se libérer du principe électif et introduire l’hérédité au profit de leurs familles, les premiers Capétiens ont procédé de leur vivant à l’élection et au sacre anticipé de leur fils aîné. Cette politique commence dès Hugues Capet. Au moment où il s’apprête à partir guerroyer en Espagne, il réussit à persuader les Grands de la nécessité de faire élire et sacrer son fils Robert, en sorte que le royaume ne reste pas sans chef. Mesuront l’habileté du roi : lui-même a été sacré en juin 987, son fils l’est la même année. Il devient rex designatus, roi désigné. Quand Hugues Capet meurt, Robert est donc déjà sacré et déjà roi. Naturellement il l’est resté. De règne en règne, chaque roi fera sacrer son fils de son vivant. Ainsi associé au trône, le fils continu, à la mort de son père, à exercer les prérogatives royales sans contestation. Ainsi s’est installé une coutume qui a fait disparaître l’élection au profit de l’hérédité. Avec Philippe Auguste, cette pratique de l’association au trône pourra cesser. Philippe Auguste a été le dernier roi sacré du vivant de son père. Notons cependant que le roi n’est encore investi de sa fonction que par le sacre. Il ne prend son titre de roi qu’après la cérémonie. Il faudra attendre encore un siècle pour que le sacre perde de cette fonction juridique de faire le roi.
2- La primogéniture
La primogéniture est, pour le droit public, l’équivalent du droit d’aînesse en droit privé. C’est l’aîné des fils qui montent sur le trône. Ce principe a été adopté dès le règne de Robert le Pieux. Lorsque meurt son fils aîné qu’il avait fait sacrer, Robert a encore deux autres fils. Il choisit d’associer au trône l’aîné des deux, contre le vœu de sa femme qui préférait le plus jeune. Comme celle de l’hérédité, la règle de la primogéniture jouait déjà souvent pour les fiefs : le fils aîné d’un seigneur recevait la totalité du fief paternel, ou, dans certaines coutumes, sa plus grande partie. Cette règle visait à éviter le morcellement du fief, assise de la puissance d’une famille. Il en va de même pour le royaume qui ne doit pas être partagé. Contrairement aux pratiques franques, tout le royaume échoit à l’aîné. Les puînés, n’ont droit à rien. On prendra ensuite l’habitude de les dédommager par des dotations qui devaient leur assurer (très largement), le pain, ad panem, d’où leurs noms d’apanage.
Si le roi était trop jeune pour régner, l’un de ses proches parents exerçait la Régence jusqu’à ce que le roi fut en âge d’exercer ses prérogatives. Là encore, la même pratique existait dans le droit féodal.
3- La masculinité
Au début du XIVe siècle, est posé le principe de masculinité qui exclut de la succession au trône les filles et les descendants par les femmes. Cette fois, on tranche avec les pratiques féodales qui admettaient une fille à la succession de la fief, faute de mâle. Comme ce principe a servi de prétexte à la guerre de Cent Ans, la doctrine s’est employée à le justifier.
a- L’exclusion des filles
L’hérédité en faveur du fils aîné s’est appliquée sans crise jusqu’en 1316. Cette année-là, pour la première fois depuis trois siècles, un roi Capétien meurt sans fils. Il s’agit de Louis X le Hutin, fils de Philippe le Bel, qui laisse une fille âgée de quatre ans, Jeanne, et la reine enceinte. La question est inédite. On décide d’attendre la naissance pour savoir si la reine accouche d’un garçon. En ce cas, il aurait la couronne. La situation s’était déjà produite et les filles avaient été régulièrement écartées en présence d’un fils cadet. Louis VII, par exemple, effrayé de n’avoir que des filles, suppliait Dieu de lui accorder un « enfant appartenant à un sexe plus noble ». Cet enfant du miracle, attendu pendant près de 30 ans et baptisé Philippe Dieudonné, deviendra Philippe Auguste. En 1316, le comte Philippe de Poitiers, aîné des frères de Louis X, doit composer avec les grands seigneurs féodaux dont le plus puissant, Eudes, duc de Bourgogne, est l’oncle maternel et le protecteur de la petite Jeanne. Aux termes de l’accord qui intervient, si la reine accouchait d’un garçon, celui-ci succéderait tout naturellement, mais s’il naissait une fille, on discuterait de la succession lorsqu’elles auraient atteint l’âge du mariage. Dans l’immédiat, Philippe se voit confier la lieutenance générale du royaume. Une assemblée de prélats et de barons, qu’ils a lui-même convoqué, lui confie la régence en précisant qu’il la garderait en cas de naissance d’un enfant mâle. Mais s’il s’agit d’une fille, ajoute-t-on, Philippe deviendra roi.
En novembre 1316, la reine donne le jour un garçon, Jean, qui meurt quelques jours après. Philippe ne perd pas de temps : il prend le titre de roi sous le nom de Philippe V. Pour couper court aux protestations des Grands, notamment du duc de Bourgogne, il se fait sacrer à Reims, dans une ville aux portes verrouillées et sous bonne garde de l’armée. Trois semaines plus tard il convoque une nouvelle assemblée de baron, prélats et bourgeois de Paris qui proclame solennellement que « femme ne succède pas à la couronne de France ». L’Université avait apporté une contribution spéciale en invoquant le degré de parenté unissant le nouveau roi à Saint-Louis, plus proche de celui de Jeanne. Voilà le précédent qui a fixé la coutume que les partisans de Philippe présente comme acquise de longue date. Une fille ne succède pas la couronne qui revient alors au frère le plus âgé du roi défunt (succession en ligne collatérale masculine).
Quand Philippe V meurt, en 1322, il laisse quatre filles, mais pas de fils. La succession échoit sans difficulté à son frère, Charles de la marche, qui devient Charles IV. C’est à sa mort, en 1328, qu’un nouveau problème surgit : Charles IV n’avait pas de fils et il n’y a plus de frère. Les filles étant définitivement écartées quel mâle appeler ? Du choix que l’on fit résulta l’exclusion des parents par les femmes.
b- L’exclusion des descendants par les femmes
À la succession de 1328 trois concurrents sont en lice. Édouard, neveu du roi défunt, est son parent au troisième degré. Philippe de Valois et Philippe d’Évreux, cousin germain du roi défunt, n’en sont parents qu’au quatrième degré. La seule proximité de degré donnerait Édouard vainqueur. Mais ce candidat et parent en ligne féminine, par sa mère Isabelle, fille de Philippe le Bel et, surtout, il est roi d’Angleterre. L’assemblée appelée à trancher se prononça pour Philippe de Valois. Les partisans d’Édouard soutenaient qu’une femme pouvait faire « pont et planche », ses adversaires que personne ne pouvait transmettre des droits qu’il n’avait pas : incapable de succéder elle-même, une femme ne pouvait pas transmettre ce droit à ses descendants, même mâle. Pour départager les deux princes français, Philippe de Valois et Philippe d’Évreux, il suffit d’évoquer la primogéniture entre les branches de parenté. Philippe de Valois était l’aîné de la branche aînée par les mâles. Il devint roi sous le nom de Philippe VI, malgré les protestations du roi d’Angleterre. On aurait pu croire l’affaire close quand Édouard prêta l’hommage-lige au roi de France pour les fiefs qu’il possédait dans le royaume. Mais, à partir de 1337, il revendique à nouveau la couronne de France. Ce sera le prétexte à la guerre de Cent Ans. Celle-ci oblige la doctrine française a démontré l’illégitimité des prétentions anglaises et donc à justifier l’exclusion des femmes.
c- La loi salique, constitutio regia
Pourquoi les femmes ont-elles été exclues ? Les considérations politiques ont été déterminantes. En 1316, le royaume est perturbé par la réaction féodale qui a suivi la mort de Philippe le Bel. Admettre à la succession une petite fille de quatre ans – dont on mettait d’ailleurs en doute la légitimité, car sa mère avait été convaincue d’adultère – supposait une longue régence, période toujours propice à l’instabilité. Et que se passerait-il lorsqu’elle se marierait ? En 1328, il n’est pas question de voir la couronne de France passait entre les mains anglaises. Mais il était difficile de justifier l’exclusion des filles pour des raisons politiques. D’autres monarchies d’Europe les ont admis à succéder et sans craindre que leur mariage ne porte au trône un prince étranger. En France, la capacité politique des femmes n’est pas, à l’époque, fortement méconnu : en 1309 la cour des Pairs qui se prononcent sur la succession du comté d’Artois, l’attribut à Mahaut, par référence à Robert, un mâle collatéral. Enfin, pourquoi n’aurait-ce pas été la France qui aurait absorbé l’Angleterre au lieu de l’inverse ?
Dans l’exclusion des femmes, les considérations religieuses ont été essentielles. Si la femme semble inapte à régner sur le trône de France, c’est qu’elle n’est pas admise au sacerdoce. Or la royauté est un ministère comparable au ministère ecclésiastique. Le roi, sacré, n’est pas « pur laïque », il exerce un sacerdoce. Exclue de la prêtrise, la femme doit l’être également de la royauté française. Rappelons-le : on préférait déjà un fils puîné à une fille aînée. L’hérédité masculine était déjà installée, aucune fille n’avait jamais occupé le trône. On fait feu de tout bois, en forçant notamment l’interprétation d’un passage de l’Évangile qui dit « les lys ne fils point » comme la France est le royaume des lys et que filer est une activité féminine, on en conclut que « les lys ne filet point en royaume de France ». Certains n’hésitent pas à verser dans l’antiféminisme, en expliquant que la femme est inapte à tout gouvernement. Les bons arguments n’ont jamais manqué. Au XVIIe siècle, le juriste Cardin le Bret juge l’exclusion des femmes « conforme à la loi de nature laquelle ayant créé la femme imparfaite, faible et débile, tant du corps que de l’esprit, l’a soumise à la puissance de l’homme qu’elle a pour ce sujet enrichi d’un jugement plus fort, d’un courage plus assuré et d’une force de corps plus robuste ».
Au point de vue strictement juridique, il est difficile de se réclamer de la coutume féodale. Non seulement l’argument n’est pas entièrement probant puisque le droit féodal peut admettre des filles à succéder, mais il est dangereux car le royaume ne doit pas être assimilé à un fief. Il valait mieux constater l’existence d’une coutume immémoriale, propre à la succession royale en France. Les femmes en ont été exclues de si longtemps « qu’il n’est mémoire du contraire ». Mais la seule force de la coutume n’a pas paru constituer une défense suffisante face aux Anglais qui reprochaient à leur adversaire de ne pouvoir exhiber « un édit ou un statut ». À force de chercher, l’historiographie royale, Richard Lescot, exhume en 1358 la loi des francs Saliens. Un de ses articles dispose que la terre des ancêtres ne peut être transmise à une femme et doit échoir à un héritier de sexe masculin. Voilà un texte juridique, un texte vénérable ! On ne s’embarasse ni de détail, ni de scrupules. On modifie le texte, qui traitait des successions privées, en y interpolant les mots « in regno » (« dans le royaume ») et on assimile la terre des ancêtres au royaume. On réécrit l’histoire pour attribuer la loi salique, prétendue loi successorale du royaume, au légendaire Pharamond, premier roi des francs. Voilà la loi salique devenue constitutio regia, un acte solennel, édictée par une autorité supérieure, qui de tous temps a exclu juridiquement les femmes de la succession au trône. L’argument connaîtra une immense fortune au point que l’exclusion des femmes à la couronne de France sera baptisée « loi salique ».
B- La dévolution immédiate de la Couronne
Pendant longtemps, le sacre a fait le roi. Mais la disparition du sacre anticipé crée un vide juridique entre la mort d’un roi et le sacre de son successeur. Or il fallait combler ce vide, facteur d’insécurité. Le successeur risquait que les Grands ne profitent de la situation pour lui marchander son sacre et imposer leurs conditions. Aussi a-t-on nié la fonction constitutive du sacre. Mais si l’instantanéité de la succession est consacrée au XIVe siècle, la capacité de l’héritier du trône à exercer l’autorité royale reste soumise à une condition d’âge. Lorsque le roi est mineur, s’ouvre une régence, elle aussi porteuse de danger. Pour les pallier, le roi est réputé, au début du XVe siècle, « toujours majeure ». L’abolition fictive de la minorité royale exclue définitivement l’héritier du trône du champ des héritiers de droit privé. Cette évolution dépasse largement les intérêts dynastiques. En affirmant que la royauté a toujours un titulaire en exercice, quel que soit son âge est indépendamment du sacre, on garantit la continuité de l’État symbolisé par la continuité royale. L’idée que la couronne ne doit jamais être vacante conduira à celle que le roi ne meurt jamais.
1- Le sacre privé de fonction constitutive
Cette idée s’exprime déjà lorsque Philippe III prend le titre de roi à la mort de son père en 1270, un an avant d’être sacré. Depuis lors, les notaires royaux datent les années de règne non plus du jour du sacre d’un roi, mais du jour des funérailles de son prédécesseur. En 1316, le fils posthume de Louis X, qui vécut quelques jours à peine, n’en a pas moins été considéré comme roi. L’histoire l’a retenu comme Jean Ier. Mais les successions de 1316 et 1328 ont bien mis en évidence la nécessité d’un fondement juridique. Et les conditions de l’avènement de Charles V, en 1364, font éclater au grand jour les difficultés résultant de l’absence de règles écrites. Sans remettre franchement en cause son droit au sacre, les grands ne l’en ont pas moins soumis à certaines engagements : poursuivre l’œuvre de son père, conserver l’ordre établi et les hommes en place. Pour épargner semblables marchandages à sa postérité, Charles V prend, en 1374, deux ordonnances. La première, datée du mois d’août, a officiellement pour objet de fixer l’âge de la majorité royale à 13 ans accomplis. Mais sa portée est bien plus large car le roi en profite pour confirmer solennellement les règles de dévolution de la couronne et pour proclamer que l’héritier mâle, sitôt entré dans sa 14e année, à pleine capacité pour agir en vrai roi dès le décès de son prédécesseur, sans devoir attendre le sacre. La seconde ordonnance, datée du mois d’octobre, précise les conditions de la régence, confiant au régent pleine puissance pour gouverner le royaume jusqu’à la majorité royale, dont l’âge avait été abaissé autant qu’il était possible.
Pour renforcer encore le principe de la succession instantanée, la doctrine exploite la coutume de droit privé, dont un adage disait « le mort saisit le vif ». Il signifie que l’héritier est immédiatement saisi de la succession, dès la mort de celui dont il hérite, en dehors de toute formalité de transmission et d’acquisition. Appliquée à la dévolution de la couronne, ce principe justifie l’instantanéité de la succession : le successeur devient roi sans attendre le sacre, à la mort de son prédécesseur.
2- L’abolition fictive de la minorité royale
À la mort de Charles V, en 1380, son successeur, Charles VI, est encore mineur. Les oncles évincés de la régence réduisent à néant le testament politique du roi défunt. Il consacrait le jeune roi, prétendant ainsi l’émancipait pour qu’il puisse gouverner, sous leur contrôle évidemment. À nouveau s’ouvre une période de crise, et les difficultés s’accroissent encore lorsque après avoir personnellement gouverné pendant quatre ans, Charles VI et pris d’accès de démence à partir de 1392. Dans ces intervalles de lucidité, le roi prend la mesure des menaces que les ambitions rivales des princes font peser sur l’héritier légitime et sur le royaume. Aussi décide-t-il en 1403 de lever toute ambiguïté sur le caractère instantané de sa succession à venir. Son successeur deviendra roi immédiatement, « en quelques petit âge qu’il soit ». La minorité du roi est effectivement aboli. Avec elle, disparaît aussi la régence en droit (mais pas dans les faits, car nul n’ignore qu’un enfant ne peut effectivement gouverner). Le sacre n’est plus qu’une cérémonie, essentielle, certes, et qu’il convient d’accomplir aussitôt que possible, mais qui ne fait plus le roi. En 1407, une nouvelle ordonnance, appelé plus tard « édit de suppression des régences », renouvelle ces dispositions et les étend à tous les successeurs à venir des rois de France, et non plus seulement, comme en 1403, à celui de Charles VI. Des adages exprimeront avec force : « le roi de France est toujours majeur » ; « il n’y a pas de régence en France ».
3- La fiction d’un roi toujours vivant
De 1374 à 1407, la législation consacre ainsi l’idée que l’autorité royale ne subit pas la moindre interruption. Les intérêts de la dynastie régnante ne sont pas seuls en jeu. La continuité royale incarne la continuité de l’État. Le roi exerce une fonction qui transcende sa personne. Cette fonction doit être assurée en permanence sans être tributaire du sacre ou de l’âge.
Mais ce principe abstrait ne s’impose pas facilement aux mentalités populaires. Jeanne D’Arc s’adressera encore à Charles VII en l’appelant « gentil dauphin » tant qu’il n’aura pas été sacré. D’où la nécessité de rites propres à frapper les imaginations. Aussi les funérailles royales mettent-elles spectaculairement en scène le caractère immédiat de la succession. Une effigie du roi mort est placée à côté de son cercueil. Elle le représente vivant jusqu’à ce que le corps soit déposé dans la tombe. À ce moment, l’effigie disparaît et le nouveau roi apparaît pendant que le Hérault d’armes s’écrie : « mort est le roi Untel ! Vive le roi Untel ! ». Aux funérailles de Louis XII, en 1515, les prénoms disparaissent : « le roi est mort ! Vive le roi ! ». Le caractère impersonnel de la formule traduit la fiction d’un roi toujours vivant. Cette fiction s’exprimera plus tard par un adage vigoureux : « le roi ne meurt pas en France ». C’est ce que répondra sèchement le chancelier, en guise de condoléances, à Marie de Médicis venu lui annoncer la mort d’Henri IV.
C- Une succession indisponible
Sous le règne de Charles VI, des circonstances dramatiques ont fait surgir un nouveau problème : le roi peut-il disposer de la couronne au détriment de l’héritier désigné par la coutume ? La doctrine est amenée à préciser le caractère impératif des règles de la succession au trône et à formuler une théorie dite « théorie statutaire » pour affirmer le principe de l’indisponibilité de la couronne.
1- Un cas dramatique
Charles VI subit ses premiers accès de démence en 1392 et, durant les 30 ans pendant lesquels il vivra encore, il ne guérira jamais. Sa folie encourage les querelles princières et la France se trouve déchirée entre deux factions rivales dont les passions s’exacerbent après l’assassinat, en 1407, du duc d’Orléans, frère du roi, par son cousin Jean sans peur, duc de Bourgogne. Les partisans du duc d’Orléans se regroupent derrière le comte Bernard d’Armagnac. Le conflit dégénère en véritable guerre civile, marquée de violences atroces, ce qui favorise le retour de la menace anglaise. Après le désastre d’Azincourt en 1415, une parti du royaume est occupée. En 1418, le parti bourguignon se rend maître de Paris. Charles VI, définitivement prostré, n’est plus qu’un pitoyable instrument entre les mains de Jean sans peur qui s’est entendue avec la reine Isabeau de Bavière. Mais le dauphin Charles, futur Charles VII, a pris le titre de régent et a installé un contre gouvernement à Bourges. En 1419, il fit assassiner Jean sans peur. Le nouveau duc de Bourgogne, Philippe le bon, décide alors de venger son père en faisant écarter le dauphin de la couronne. Il n’hésite pas à s’allier aux Anglais et, avec l’aide de la reine Isabeau, fait signer au roi fou le « honteux traité de Troyes » (20 – 21 mai 1420). Charles VI donne en mariage sa fille Catherine à Henri V d’Angleterre et adopte son gendre comme fils et successeur. Le dauphin Charles, qualifié de « soi-disant dauphin de viennois », est exhérédé par son père. Et la régence est confiée à Henri V jusqu’à la mort de Charles VI. Par chance, Henri V meurt à 35 ans, en 1422, suivi de peu par Charles VI. Henri V avait un fils de 10 mois que le parti bourguignon reconnaît comme roi de France. C’est par les armes que Charles VII reconquiert son royaume. Par les armes et avec l’appui d’une intense propagande qui ordonne le sentiment national, merveilleusement illustré par Jeanne D’arc, autour de l’héritier légitime.
2- La théorie statutaire de la Couronne
Pour réfuter les prétentions anglaises, les juristes favorables au droit du dauphin ont dégagé la théorie statutaire et ses conséquences. D’abord Jean de Terrevermeille pour démontrer les droits du dauphin à la régence, puis les défenseurs de Charles VII, telle Jean Juvénal des Ursins, pour prouver la nullité du traité de Troyes. Il s’est forgé, disent-ils, au cours des siècles un véritable statut coutumier de la succession au trône. C’est la coutume qui désigne l’héritier du trône. Il s’agit d’une coutume de droit public et non pas de droit privé. La couronne, en effet, n’est pas un bien patrimonial. Le roi n’en est que le dépositaire, il ne peut en disposer. Son fils aîné n’est pas son héritier au sens du droit privé, il est son successeur, un héritier nécessaire que la coutume désigne et par avance et impérativement. Il ne doit pas la couronne à la volonté de son père : il a un droit formé dès sa naissance à accéder au trône. Personne ne peut l’en priver. Le dauphin a droit à la régence car, du vivant même de son père, il est déjà co-seigneur du royaume et de la couronne. L’exhérédation du dauphin par le traité de Troyes est nulle et l’adoption d’Henri V sans effets sur la succession au trône. Si l’on peut, sous certaines conditions, exhéréder un héritier légitime en droit privé, il n’en va pas de même en droit public. Charles VI ne pouvait pas priver son fils de son droit à la succession pas plus que son fils ne pourrait y renoncer. Le roi ne pouvait pas se constituer de successeur en se fondant sur des règles de droit privé. Charles VI pouvait bien adopter Henri V. Cette adoption était valable en droit privé, mais de nul effet pour la dévolution de la couronne. Le statut de la couronne dépasse les volontés individuelles. Le successeur désigné par la coutume s’impose à tous, y compris au roi régnant. La couronne de France est indisponible.
Les juristes seront amenés à insister encore sur ce principe d’indisponibilité lorsque Charles VII songera à exhéréder son fils, le futur Louis XI, pour ingratitude : l’indignité du successeur, quelle qu’elle soit, n’entame en rien son droit acquis.
II Vers l’inaliénabilité du domaine de la Couronne
Avec l’élection des rois disparaissent les partages successoraux du royaume. Cependant la vieille conception patrimoniale du pouvoir persiste. Les rois disposent du domaine royal, comme les princes territoriaux disposent de leur principauté. Mais au fur et à mesure que le roi étend son autorité, il assure de plus en plus de la satisfaction des besoins d’intérêt général. Le domaine royal, même s’il s’étend régulièrement, doit dès lors subvenir non seulement aux dépenses propres du roi, mais aussi aux dépenses publiques, toujours plus lourdes. Il faut le soustraire à la gestion privée du roi, souvent prodigue. L’émergence de la notion de couronne va permettre de dessiner en corps de règles de droit public conférant un statut particulier au domaine.
A- La composition du domaine
Le domaine est un ensemble hétéroclite formé non seulement de terre, mais aussi de droits, revenus et prérogatives.
1- Au plan territorial, une notion ambiguë
Sur le plan territorial, la notion de domaine connaît deux acceptions. Dans un sens large, elle comprend l’ensemble des terres directement soumises au roi. Au sens strict, elle recouvre l’ensemble des possessions foncières du roi et des biens affectés à l’utilité de tous.
a- L’ensemble des terres directement soumises au roi
Au 11e siècle, le domaine royal, constitué par l’ensemble des terres directement soumises au roi, ne diffère guère de celui des princes territoriaux. Il s’agit de l’ancienne principauté héritée de la maison Robertienne et situé entre Orléans et Senlis dans laquelle maintes enclaves seigneuriales font écran à son pouvoir. Au XIIe siècle, le roi y restaure son autorité, point de départ d’une reprise en main du royaume. Avec Philippe Auguste (1180 – 1223), le domaine a déjà quadruplé sa superficie et le royaume de France est le plus puissant d’Europe. Cette reconquête, menée avec patience et ténacité, s’opère en partie par les armes, mais le plus souvent par le droit et de manière pacifique. Le roi s’appuie sur sa qualité de suzerain suprême qui fait de lui le seigneur direct ou indirect de tous les seigneurs du royaume. Parce qu’elle est suprême, la suzeraineté royale n’encourt pas les dépendances inhérentes à la féodalité. Le roi de France ne peut avoir de supérieur féodal. Le lien féodal devient source de rattachement, mais à sens unique ; il jouera toujours au bénéfice du roi, jamais à son détriment. Le roi usera alors de toutes les possibilités que lui offre le droit féodal pour réunir les grands fiefs au domaine.
Le droit féodal permet au seigneur de prononcer, après jugement en cour féodale, la « commise » du fief — c’est-à-dire sa confiscation — lorsque le vassal a manqué à ses obligations. Cette peine a connu son application la plus célèbre en 1202 contre le roi d’Angleterre, Jean Sans Terre. Le roi d’Angleterre était aussi duc d’Aquitaine et, à ce titre, vassal du roi de France. Accusé par un de ses vassaux d’Aquitaine, Jean sans Terre est cité à comparaître devant la cour de Philippe Auguste. Il refuse de s’y rendre, manquant ainsi gravement à ses obligations. La cour prononça la commise de ses fiefs et le roi entrant en campagne pour faire appliquer la sentence. La Normandie, le Maine, l’Anjou et le Poitou furent réuni au domaine royal.
La royauté use aussi de toutes les ressources que lui offre la patrimonialité des fiefs. Biens patrimoniaux, les fiefs sont susceptibles d’être donnés, vendus, transmis par succession ou apporter en dot. Les mariages royaux ont souvent été très profitables au domaine. Isabelle de Hainaut apporte à Philippe Auguste, par dot ou par héritage, le Boulenois, l’Artois, l’Amienois et le Vermandois. Le mariage resté sans enfants d’Alphonse de Poitiers, frère de Saint-Louis, permet de réunir tout le comté de Toulouse. Le mariage de Philippe le Bel avec l’héritière du comté de champagne s’avérera, à terme, tout aussi fructueux. Par ailleurs, le roi achète des fiefs dans les circonstances le permette. En 1100, Eude Arpin, qui manquent d’argent pour se rendre en Terre sainte, vend sa vicomté de Bourges a Philippe Ier. Philippe le Bel achète le comté de Chartres en 1286, les comtés de la Marche et de l’Angoulême en 1308. Plus vaste encore, le Dauphiné acquis en 1249. Son chef, le dauphin Humbert II, criblé de dettes, doit se résoudre à faire argent de ses droits. Mais le Dauphiné est alors terre d’empire et il n’est pas question que le roi de France prête hommage à l’empereur pour cette principauté. Aussi est-elle cédée non pas directement au roi, mais à un fils aîné de la maison de France, le futur Charles V. Au bout d’un siècle, les liens de dépendance avec l’empire s’étaient évanouis et le Dauphiné sera rattaché au domaine. De la formule transitoire restera le titre de dauphin porté par l’héritier du trône. Enfin, le domaine s’arrondit encore par des acquisitions successorales. La Provence a été léguée au roi de France. L’unique héritière de la Bretagne épousa successivement deux rois de France, Charles VIII est Louis XII. Comme ces unions n’engendraient pas de fils, la fille d’Anne de Bretagne et de Louis XII fut mariée à François Ier. Leur fils, Henri II, hérita du duché de Bretagne.
Le domaine, au sens large de la notion, se dilate dans toutes les directions et encore faut-il y ajouter les extensions qui résultent de conquête. Mais cet espace géographique soumis au roi et qui tend à porter ses limites jusqu’à celle du royaume ne coïncide pas avec la notion juridique de domaine, plus restrictive.
b- Le domaine territorial au sens strict
Au sens strict, le domaine territorial comprend les terres exploitées directement au profit du roi et qui ne font pas l’objet d’une concession en fiefs ou en apanage. En effet, à l’intérieur de chaque unité territoriale globalement rattachée et soumise à l’autorité royale, toutes les terres n’obéissent pas au même régime juridique. Le titulaire de l’ensemble territorial a certes changé, mais ce changement n’a pas d’effet sur le régime juridique des terres. Les fiefs ont conservé leur nature de fiefs. Les terres qui faisaient l’objet d’une détention directe par l’ancien titulaire du duché ou du comté passent naturellement dans la détention directe du roi. Elles seules sont des domaines au sens strict. Elles sont désormais exploitées au profit du roi. À partir du XIVe siècle, les actes royaux comportent des clauses incorporant expressément ces terres au domaine. De ces terres, le roi peut disposer librement, ce qui n’est pas le cas pour les fiefs, les apanages où les villes auquel le roi a concédé la haute justice.
2- Un ensemble de droit, de revenus et de prérogatives
Forme ce que l’on appelle le domaine « incorporel » la somme des droits, revenus et prérogatives que possède le roi, quelle que soit la qualité sous laquelle le roi se manifeste. Il peut les procédés en tant que propriétaire foncier et cette qualité lui vaut, par exemple, des redevances pour l’utilisation des terres ou des loyers d’habitation. En tant que seigneur, il perçoit des droits féodaux ou seigneuriaux. Jusqu’ici, ces droits et les revenus qui en découlent ne sont pas liés à sa qualité de roi. Mais, en tant que roi, il dispose également de droits liés à la souveraineté. C’est ainsi qu’il est titulaire de droits éminents sur des biens qui, par nature, présentent une utilité commune pour tous les sujets. C’est le cas des grands chemins, des cours d’eau navigables, les rivages de la mer ou encore des places fortes.
Ces possessions foncières et ces droits produisent des revenus dits « ordinaires » qui doivent permettre au roi de vivre et d’assurer les charges publiques. Le roi, dit-on, doit « vivre du sien ». C’est pourquoi on a été amené à leur conférer un statut particulier.
B- Un statut particulier
Jusqu’au XIIIe siècle, le roi se comporte en propriétaire du domaine. Héritage de la tradition franque, puis féodale, il en dispose comme d’un bien patrimonial dont il se sert pour récompenser les services rendus, doter ses vassaux ou encore ses fils cadet exclus de la succession au trône (l’opportunité politique conduisait à les dédommager grassement sous la forme d’apanages). Ces aliénations, en amputant le domaine, diminue d’autant les revenus ordinaires. Dès lors, le roi doit faire appel à l’impôt pour subvenir aux besoins grandissants de l’état naissant. Apparaît alors la nécessité de mettre le domaine à l’abri des dilapidations royales. Pour ce faire, il est attribué à la couronne est doté d’un régime juridique exorbitant du droit commun.
1- L’attribution du domaine à la Couronne
Dès le début du XIVe siècle, les conseillers royaux s’élèvent contre les prodigalités du roi. L’idée se fait jour que pour sauvegarder le domaine, il faut le soustraire à la mainmise royale. La doctrine savante apporte une contribution essentielle. Elle s’appuie sur le droit romain pour affirmer la nature particulière des biens affectés aux nécessités publiques et dégager la notion de domaine public qui appartient à une personne publique. En 1343 apparaît l’expression « domaine de la couronne de France » qui atteste que le domaine a changé de titulaire. Attribué à la couronne, le domaine perd sa nature patrimoniale pour prendre une nature publique. Il n’appartient pas au roi qui n’en est que l’administrateur.
Ce domaine public se distingue d’un domaine privé composé par les biens propres du roi, essentiellement constitué de possessions acquises au cours de son règne. De ce domaine privé le roi peut disposer. Le domaine de la couronne, quant à lui, fait l’objet d’un régime juridique qui doit assurer sa protection.
2- Un régime exorbitant du droit commun
La contribution de la doctrine savante est, là encore, fondamentale. Elle façonne un régime juridique propre aux biens publics, un régime d’exception qui les distingue des biens privés. Les biens publics sont indisponibles, inaliénables et imprescriptibles. Le roi ne peut les aliénés et personne ne peut les acquérir par prescription. Cette doctrine rejoint une exigence de l’opinion dont les états généraux se font les porte-parole. Face à l’aggravation de la pression fiscale, les députés demandent au roi de s’engager solennellement à ne plus aliéné de domaine. Après le traité de Brétigny (8 mai 1360), le principe d’inaliénabilité devient urgent pour faire obstacle aux clauses qui prévoyaient la cession, différée, de la Guyenne aux Anglais. C’est pourquoi le roi introduit dans la promesse du sacre une clause par laquelle ils s’engage à n’aliéner ni ne céder les droits et prérogatives de la couronne de France. La formule est ambiguë car le domaine ne s’y trouve pas expressément mentionner. Mais c’est sur cette clause que l’on s’appuiera désormais pour justifier les révocations des aliénations précédemment consenties. Une législation abondante suivra, par laquelle le roi dénonce régulièrement des dilapidations de ses prédécesseurs, les révoques et s’interdit de procéder lui-même à de nouvelles aliénations. Tous les monarques légifèrent dans le même sens. L’inaliénabilité du domaine ne se traduit vraiment dans les faits que pour justifier les révocations.
Plus grave que les aliénations révocables est révoquées, la constitution des apanages ampute le domaine de très grandes fractions. Vestiges d’une conception patrimoniale, les apanages sont constitués au profit des fils puîné du roi, exclus de la succession au trône. Ils sont perçus comme un mal inévitable : en assurant aux cadets royaux un train de vie digne de leur naissance, on prévient de fâcheuses entreprises contre leurs frères. À partir de Louis VIII, les apanages deviennent d’autant plus vaste que le domaine s’est déjà considérablement étendu. Des provinces entières viennent doter les cadets. Le règne le plus coûteux pour le domaine est, de loin, celui de Jean II Le Bon : Berry, Auvergne, Maine, Anjou, Bourgogne, autant de démembrement. Certes, les apanages font retour à la couronne à défaut d’héritier mâle ou lorsque le prince apanagiste est appelé à régner. Mais ces circonstances peuvent se faire attendre longtemps. Le cours des événements en Bourgogne démontrera le grave danger de constituer une nouvelle féodalité de prince apanagiste. Dès Charles V, d’ailleurs, la monarchie devient plus parcimonieuse et les états généraux, les parlements ou même les communautés d’habitants se chargeront de la rappeler régulièrement à la raison.
À la fin du XVe siècle, la mort de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, permet le retour de son apanage la couronne et le mariage royal de la duchesse Anne annonce la réunion de la Bretagne. Disparaissent ainsi les derniers grands représentants de la nouvelle féodalité apanagiste et de l’ancienne féodalité des princes territoriaux. Dans un royaume désormais réunifié, l’autorité royale règne sans partage.
Chapitre second : Remise en cause, réaction et renforcement du pouvoir souverain (XVI, XVIIème siècle) et le devenir des lois fondamentales
Section première : La crise du XVIe siècle
La monarchie française a connu deux crises majeures à propos de la religion. La première consiste en une bataille relative au pouvoir entre le roi et l’Eglise. C’est le problème du gallicanisme. La deuxième correspond à des évènements qui embrasèrent l’Europe : la Réforme.
I Le gallicanisme
Le terme de gallicanisme n’a été créé qu’au XIXème siècle. Le problème gallican n’est pas une hérésie, c’est à dire une affirmation de propositions dogmatiques hétérodoxes, comme par exemple le Jansénisme. De plus, il n’a pas conduit à un schisme comme en Angleterre par exemple. Le gallicanisme ne remet pas en cause l’autorité du pape en matière de foi. C’est sur le plan de la discipline et du temporel que le roi de France et le pape vont s’affronter.
Les capétiens veulent cantonner l’autorité pontificale dans le domaine spirituel. Ils affirment très tôt en tant que roi leur indépendance à l’égard de la papauté. Marqués par l’onction du sacre, « lieutenant de Dieu » pour le royaume, ils ne veulent dépendre que de lui et la formule « Dei gratia rex » devient une affirmation d’indépendance à l’égard du pape.
A Les évènements amenant le gallicanisme
1) Les prémices
La première difficulté se présenta au début du XIIIème siècle. Philippe Auguste, qui avait accepté en 1198 l’intervention du pape Clément III dans sa querelle avec le roi d’Angleterre parce qu’elle lui était favorable, n’admit pas semblable médiation de la part du pape Innocent III. C’est l’époque de l’apogée de la théocratie pontificale. Si le pape avait affirmé dans l’affaire du seigneur de Montpellier, que le roi de France ne reconnaissait pas de supérieur sur le plan temporel, il avait précisé dans le même texte qu’en matière spirituelle, le roi était soumis à son contrôle. La victoire de Philippe Auguste en Normandie mit fin à ce conflit. Par la suite, des querelles fréquentes opposent les rois de France et les papes, mais sans aller jusqu’au conflit car chacun à besoin de l’autre.
2) Le conflit entre Philippe le Bel et Boniface VIII
Au début du XIVème siècle, le conflit entre Philippe le Bel et le pape Boniface VIII éclate sans qu’aucun signe ne le laisse présager. Le roi décida de lever des taxes sur les biens de l’Eglise en 1296. c’est l’affaire des décimes. Normalement, les biens du clergé bénéficient d’une immunité fiscale, mais une assemblée de prélats autorise le roi à pratiquer cette levée. Le pape, qui n’a pas été consulté, condamne cette pratique dans la bulle pontificale « Clericis laïcos », promulguée en 1297. le roi réplique en bloquant l’envoi d’or et d’argent à Rome. Cette mesure a pour effet d’asphyxier financièrement la papauté. Boniface VIII plie. C’est une première victoire pour la royauté.
Le conflit redémarre entre les deux protagonistes en 1301, lorsque Philippe le Bel fait arrêter l’évêque de Pamiers, Bernard Saisset, qui l’avait publiquement insulté. Il souhaite le faire traduire devant sa cour, ce qui est contraire au privilège du for. La réponse pontificale est contenue dans la bulle « Ausculta fili » du 5 décembre 1301 qui rappelle la subordination des princes laïcs et la supériorité du pouvoir spirituel incarné par le souverain pontife mais aussi tous les griefs du pape à l’encontre du roi. Ce dernier cite même le roi à comparaître à Rome devant un concile d’évêques français. Menacé, le roi de France provoque un sursaut national favorable à la monarchie capétienne en convoquant une assemblée de prélats, de barons et de représentants des bonnes villes. Celle-ci se tient en avril 1302, et, est l’occasion pour ses membres d’affirmer leur total soutien au roi, qui pour s’assurer le succès fit circuler un texte falsifié de la bulle pontificale. Cette réunion est la préfiguration des Etats généraux. La riposte pontificale se fait par l’intermédiaire d’une nouvelle bulle : « Unam Sanctam » qui est un rappel pur et simple des arguments classiques de la théocratie pontificale, à savoir que sans distinguer entre temporel et spirituel, le pape est supérieur aux princes. L’envoyé du pape affirme même que cette supériorité doit s’exercer dans le domaine temporel aussi bien que spirituel, car le pape est « maître de toutes choses, temporelles et spirituelles ». Cette bulle repose sur une confusion des deux domaines, le spirituel et le temporel, au profit de la papauté. Le pape y affirme que l’Eglise dispose des « deux glaives ». C’est le résultat d’une utilisation audacieuse d’un texte de Saint Luc, qui a permis d’affirmer que Dieu avait confié au pape le glaive spirituel et le glaive temporel. Si l’Eglise confie le glaive temporel aux princes, c’est pour qu’ils s’en servent pour l’Eglise et sous le contrôle du pape qui peut juger s’ils en font un mauvais usage. La réfutation des thèses pontificales par les légistes royaux donne lieu à une intense propagande en faveur du monarque capétien. On se sert d’ailleurs de la philosophie d’Aristote et de Saint Thomas d’Aquin. Ainsi, dans son De potestate regia et papali écrit en 1303, Jean de Paris utilise l’argument aristotélicien selon lequel l’organisation politique est un phénomène naturel pour justifier la nécessité de la pluralité de pouvoirs, le rejet de toute idée de domination universelle, impériale ou pontificale, et, la légitimité de la royauté, seule forme de pouvoir concevable en France. La fin dramatique de Boniface VIII, acculé à la défensive, trahi par la noblesse romaine, réfugié à Anagni, et, que l’envoyé de Philippe le Bel, Guillaume de Nogaret, ira jusqu’à souffleter, consacre le triomphe du parti de l’Etat.
B La théorie gallicane
La victoire royale inaugure une nouvelle manière d’envisager les rapports de l’Eglise et de l’Etat en France. C’est la théorie gallicane ou gallicanisme. Selon cette théorie, le roi de France tient son pouvoir directement de Dieu et le clergé français relève de lui pour ses biens temporels. Le gallicanisme ne conduit à aucune rupture religieuse. Ce n’est en rien un mouvement schismatique ou hérétique. Le pape reste le gardien de l’orthodoxie religieuse et des dogmes catholiques romains. Le roi ne prétend nullement intervenir sur le plan théologique. Il se veut simplement le garant des libertés et des franchises de l’Eglise de France ou Eglise gallicane. Le gallicanisme sanctionne aussi l’indépendance du royaume par rapport à la papauté et a pour effet de placer de facto l’Eglise gallicane sous l’autorité royale.
La royauté va profiter du Grand Schisme d’Occident, de 1378 à 1417, qui met en présence plusieurs papes rivaux, pour établir solidement les bases du gallicanisme. Elle intervient à maintes reprises durant cette période afin de soutenir les assemblées de l’Eglise gallicane contre les prétentions centralisatrices des différents souverains pontifes. Les monarques français rappellent, en effet, dans plusieurs ordonnances successives, en 1385, en 1398 et en 1406, les libertés de l’Eglise gallicane. Quelques années plus tard, en 1431, le Concile de Bâle entreprend la réforme générale de l’Eglise. En 1438, le roi Charles VII réunit à Bourges une assemblée du clergé de France qui entérine certaines des thèses conciliaristes, comme celle de la supériorité du concile sur le siège de Rome et ce malgré l’hostilité du pape Eugène IV. Ces thèses sont reprises dans une ordonnance, enregistrée par le parlement en 1439, et, connue sous le nom de Pragmatique Sanction de Bourges. L’Eglise gallicane y obtient d’être affranchie de la tutelle pontificale sur le plan temporel et disciplinaire. Le pouvoir royal y gagne un droit de regard sur les élections aux fonctions ecclésiastiques supérieures, c’est à dire les évêques et les abbés.
Les rapports entre la royauté et l’Eglise étaient régis, depuis 1438, par la Pragmatique Sanction de Bourges, élaborée dans un climat de tension avec la papauté et dans l’effervescence gallicane. En 1516, François Ier et le pape Léon X signent le Concordat de Bologne, qui accorde au roi le pouvoir de nommer aux bénéfices ecclésiastiques majeurs, c’est à dire les évêchés et les abbayes, les candidats de son choix, le pape se réservant leur investiture canonique, qu’il ne pouvait refuser que pour indignité du candidat. La Pragmatique est ainsi abolie. Le système favorise le pouvoir royal qui dispose de la possibilité de renforcer sa clientèle de fidèles en octroyant les bénéfices. Toutefois, le rejet du système électif déplaît fortement aux milieux gallicans et suscite les réticences du parlement de Paris qui traîne dans l’enregistrement du texte. Il faut toute la force de persuasion du roi et du chancelier Duprat pour que les parlementaires cèdent en mars 1518 et enregistrent le Concordat qui restera en vigueur jusqu’à la révolution. Le pouvoir royal en sort grandi, car le roi apparaît bien comme le chef temporel de l’Eglise de France. A ce titre, le Concordat de Bologne joue aussi en faveur de l’absolutisation de la royauté.
Ce texte ne marque pas la fin des théories gallicanes. En effet, en 1591, lorsque le pape Sixte V déclare l’hérétique Henri de Navarre inapte à succéder en France, les juristes gallicans s’opposent au pape. Ainsi, Pierre de Belloy et Pierre Pithou déclarent que les papes ne peuvent « rien commander ce qui concerne les choses temporelles ». ils ne peuvent donc disposer de la couronne de France. De plus, la suzeraineté spirituelle du pape ne peut s’exercer en France que dans le cadre des canons acceptés dans le royaume et à la condition qu’elle ne porte pas atteinte aux droits de la Couronne. Contre les ingérences papales, parlementaires et juristes gallicans invoquent ainsi les libertés de l’Eglise gallicane. Cette résurgence du gallicanisme se voit aussi à propos de la publication en France des décrets du Concile de Trente comme loi d’Etat. L’affirmation des ces libertés qui, toutes, montrent qu’en France « la puissance absolue du pape n’a point lieu », permet aux parlements de contrôler l’administration et la juridiction d’Eglise par le système de l’appel comme d’abus.
L’affaire de la Régale provoqua entre Louis XIV et le pape Innocent XI un conflit qui entraîna la réaffirmation des principes gallicans. En 1682, l’édit dit de la Déclaration gallicane des quatre articles pose les principes du gallicanisme. Ce texte, pris par une assemblée extraordinaire du clergé, a été rédigé par Bossuet. Cette déclaration réaffirme que « les rois et les princes ne sont soumis par l’ordre de Dieu à aucune puissance ecclésiastique sur les choses temporelles ».
II Le protestantisme
La Réforme protestante, en brisant l’unité de foi, a soulevé dans le royaume à partir du XVIème siècle, de délicats problèmes sociaux et politiques. Les solutions ont varié suivant les tendances du pouvoir royal et de l’opinion, ce qui permet de distinguer plusieurs phases.
A Le temps des troubles et l’édit de Nantes
1) Les troubles
La diffusion de la Réforme suscite l’intervention du pouvoir royal. Après une période de répression plus ou moins sévère, mais jamais violente, un régime de tolérance est instauré dans un édit de 1561, inspiré par le chancelier Michel de l’Hospital. Néanmoins, cette période d’accalmie ne dure pas et les guerres de religion éclatent. Deux partis antagonistes s’opposent. D’un côté, les catholiques forment la Ligue sous l’emprise de la famille des Guise. De l’autre, il y a les protestants autours des Châtillon et des Bourbons. Entre 1562 et 1598, la France connaît huit guerres civiles et religieuses, entrecoupées de trêves plus ou moins longues.
La première guerre civile débute en avril 1562 par la prise d’armes des protestants sous le commandement de Louis de Bourbon, prince de Condé. Elle est consécutive au massacre perpétré par les soldats de François de Lorraine, duc de Guise, sur les huguenots de Wassy. Ce premier conflit est marqué par la bataille de Dreux, puis par la mort du duc de Guise devant Orléans. Il se conclut par la paix d’Amboise en mars 1563 : le protestantisme n’a pas été abattu et les réformés comprennent qu’ils ne pourront faire basculer le royaume dans le camp protestant. Néanmoins, les réformés obtiennent une liberté de culte, qui est réduite à certains bailliages et certaines villes. Le perdant de ce conflit, c’est le pouvoir royal car il en sort amoindri. La guerre reprend en 1567, puis en 1569. En 1570, malgré leurs défaites militaires, les protestants obtiennent des concessions importantes par la paix de Saint Germain qui irrite les catholiques. Ils bénéficient d’une liberté de culte limitée, mais ils ont obtenu des garanties. Ils ont quatre places de sûreté, à savoir les villes de Montauban, La Charité sur Loire, La Rochelle et Cognac, dans lesquelles ils ont le droit d’entretenir des garnisons. En 1572, les conditions d’une réconciliation nationale semblent à portée de main. Catherine de Médicis organise le mariage de sa fille Marguerite avec Henri de Navarre. L’amiral de Coligny, chef du parti réformé après la mort de Condé à Jarnac en 1569, retrouve sa place au Conseil du roi. Mais, le 24 août 1572, jour de la Saint Barthélemy, c’est le massacre des protestants à Paris, puis par la suite, dans certaines villes du royaume. Cet événement marque le retour à la guerre civile.
2) Les idées monarchomaques
Au plus fort des guerres de religion, la seconde partie du XVIème siècle est marquée en France par l’émergence d’un fort courant d’opposition doctrinale à l’édification de la monarchie absolue : les monarchomaques, « ceux qui combattent le gouvernement d’un seul » selon l’écossais Barclay, qui est le premier à utiliser l’expression. Les premiers monarchomaques sont calvinistes. Les catholiques ne resteront pas en reste.
a) Les monarchomaques protestants
Entre 1573 et 1579, trois œuvres éclairent la démarche des monarchomaques protestants. : la Franco Gallia de François Hotman, Du droit des magistrats sur leurs sujets de Théodose de Bèze, et, les Vindiciae contra tyrannos de Junius Brutus. Concernant ce dernier, il s’agit d’un pseudonyme utilisé par deux auteurs, Hubert Languet et Philippe Duplessis-Mornay. Le massacre de la Saint Barthélemy est un révélateur de la conscience politique des réformés français, mais les idées monarchomaques existaient auparavant, puisqu’un libelle de 1570 de Jean Coras anticipe les idées développées par les textes postérieurs. C’est l’occasion du renouvellement de l’idée de la scolastique médiévale d’un pacte ou contrat originel entre le peuple et les gouvernants. Dès lors, il est manifeste que les monarchomaques protestants s’opposent à la monarchie héréditaire française.
Selon Jean Coras, le peuple doit obéissance au prince et celui-ci doit gouverner en équité, respectant les droits de ses sujets et la loi de Dieu.
Junius Brutus va plus loin en imaginant la théorie du double contrat. Un premier contrat unit Dieu, le peuple et le roi. Un second unit le peuple au roi. Dieu est en quelque sorte le garant de l’accomplissement de leurs obligations respectives par les parties. Concernant le second contrat, Junius Brutus adapte dans le domaine politique le concept juridique romain de la stipulation. Le peuple est ainsi placé dans une position supérieure au roi.
François Hotman, dans sa Franco Gallia, utilise et réoriente l’histoire constitutionnelle de la France pour faire de l’élection des rois par le peuple le principe légitime de la royauté contre l’hérédité qui ne serait qu’une usurpation. De même, à ses yeux, les Etats généraux, représentation du peuple, doivent jouer un rôle politique de premier plan et partager le pouvoir avec le prince. Par la voix d’Hotman, les monarchomaques protestants proposent ainsi une véritable théorie de la monarchie tempérée.
Les persécutions subies vont amener les monarchomaques protestants à envisager et à définir cette dérive de la puissance royale qu’est la tyrannie et à admettre la légitimité d’un droit de résistance. Leur réflexion est intéressante car ils font de la tyrannie, davantage qu’un comportement immoral ou oppresseur, le renversement d’un ordre politique, constitutionnel et légal dont le fondement est le contrat social. La tyrannie devient l’antithèse de la souveraineté. A la suite des anciens, ils distinguent le tyran d’origine, usurpateur et oppresseur, du tyran manifeste, prince légitime dont le pouvoir s’est mué en tyrannie. Si la voie de la résistance est alors ouverte, il n’appartient cependant pas aux individus de se rebeller contre le tyran. Seuls leurs représentants légitimes, ou certains corps comme les Etats généraux ou la noblesse, peuvent user du droit de résistance. A cet effet, Théodore de Bèze renoue avec l’idée calviniste de magistrat inférieur. Certaines des idées des monarchomaques protestants seront reprises par les ultra catholiques de la Ligue, effrayé, à partir de 1584, par la perspective de l’accession au trône d’Henri de Navarre, prince protestant.
b) Les monarchomaques catholiques
L’accession au trône d’Henri IV marque la fin des monarchomaques protestants, et, le début des monarchomaques catholiques. Les leaders de ces derniers sont Guillaume Rose, auteur de « De justa reipublicae in reges impios authoritate » en 1590 et Jean Boucher, auteur de « De justa Henrici tretii abdcatione » en 1589. C’est un courant très radical. Les monarchomaques catholiques vont eux aussi envisager le tyrannicide contre le roi. Ils estiment notamment que lorsque le roi commande contre Dieu, la foi, la vraie religion, les sujets doivent résister par les armes. Jean Boucher considère Henri III comme l’archétype du tyran. Jacques Clément, l’assassin d’Henri III en 1589, sera « déifié », les ligueurs le considère comme la main de Dieu. Mariana, qui est jésuite, s’intéresse lui aussi à cette problématique. Il est favorable au tyrannicide, dans la lignée des ligueurs.
Les monarchomaques catholiques vont aussi contester l’amplitude des prérogatives conquises par les rois de France, en s’appuyant sur l’arsenal théocratique du Moyen-Age, c’est à dire sur l’idée de l’existence de deux pouvoirs, la théorie des deux glaives.
3) L’édit de Nantes
L’Edit de Nantes, pris le 30 avril 1598, par Henri IV, aménage dans le royaume la situation des protestants français et réalise pour un temps la tolérance civile, vieux rêve du chancelier Michel de L’Hospital. Ce texte est déclaré irrévocable dans son préambule. Il assure une situation exceptionnelle aux protestants français : la liberté de culte est relativement importante, liberté de circulation, l’accès aux charges publiques est garanti, un nombre élevé de places de sûreté est consenti au parti huguenot. Face à ces concessions, les protestants ont des obligations. Ainsi, ils doivent permettre le rétablissement du culte catholique là où ils sont les maîtres, les biens de l’Eglise doivent lui être restitués.
Outre ce texte, Henri IV prend deux autres textes, appelés brevets. Le premier accorde des ressources financières aux Réformés. Le second leur offre des garanties militaires : ils conservent pour une période de huit ans, renouvelable, plus d’une centaine de forteresses dans le royaume, et, reçoivent une subvention particulière à cette fin.
B Le protestantisme après la mort d’Henri IV
L’assassinat d’Henri IV entraîne de nouvelles agitations et la guerre civile reprend en 1622. En 1628, après la prise de La Rochelle, les protestants perdent le bénéfice de l’édit de Nantes qui n’est maintenu que par une grâce spéciale de la monarchie. A partir de là, les protestants renoncent à former un parti, c’est à dire une faction, et, servent la royauté de façon exemplaire.
Louis XIV décide de rétablir l’unité religieuse du royaume, en prenant toute une série de mesures visant à limiter les droits des protestants issus de l’édit de Nantes. En 1685, l’édit de Fontainebleau révoque l’édit de Nantes. Cela a pour effet une fuite d’un grand nombre de protestants vers l’étranger. Ceux qui restent dans le royaume subissent des poursuites criminelles du fait de leur religion, la perte de leur état civil par exemple. Le culte protestant devient dès lors clandestin.
A partir du milieu du XVIIIème siècle, la rigueur des sanctions attachés au culte protestant s’atténue. L’édit du 19 novembre 1787, dit édit concernant ceux qui ne font pas profession de la religion catholique modifie le statut des protestants. Ils sont admis en France, et peuvent y posséder des biens et exercer toutes les professions, sauf celles de la fonction publique. Leur état civil est reconnu et peuvent se marier. Certes, l’édit affirme qu’il ne peut exister dans le royaume d’autre culte public qu le culte catholique, mais le culte réformé privé devient licite et le culte public est toléré.
Section seconde : Epanouissement de l’absolutisme au XVIIe siècle avec le correctif des lois fondamentales
I Dans les faits et en doctrine
près l’assassinat d’Henri IV, les successeurs ont des bases fragiles donc nécessité de passer de la souveraineté à l’absolutisme.
On a vu que la souveraineté appartient à l’état, le roi n’en a que l’exercice. Pas de confusion donc. Mais essor de l’absolutisme, paroxysme sous Louis XIV. Mais Louis XIV n’a jamais dit « l’état c’est moi » car il n’y a jamais eu confusion entre l’état et le roi, même dans la théorie de la monarchie absolue. Il a dit « Je m’en vais mais l’état demeure toujours ». L’état transcende la personne du roi, mais le roi est le seul curateur de l’état, donc il a l’exercice de la souveraineté seul, il décide souverainement, le roi détient donc un pouvoir absolu, renforcé, au XVIIe siècle, par la théorie du droit divin de Bossuet (cf. section 4), i.e. tout pouvoir vient de Dieu, mais ce pouvoir est donné directement au roi, sans passer par le pape ou par le peuple. Le roi a le pouvoir absolu, aucun partage, pas même avec la reine, tous les sujets sont soumis au roi. L’état étant un et indivisible, la souveraineté étant une et indivisible, l’exercice, le pouvoir du roi, est indivisible.
Les différents organes de l’état (parlement, conseil du roi) n’ont de pouvoir que ceux que le roi a bien voulu leur déléguer et le roi a toujours le dernier mot.
Mais absolutisme ne signifie pas despotisme car le roi se veut être considéré comme une autorité paternelle. Différentes limites (cf. infra).
A. La politique de Richelieu
Louis XIII (1610-1643).
Régence de Marie de Médicis, appel à Richelieu (cardinal) en 1624 (à la majorité du roi) qui devient principal ministre. Le projet de Richelieu est de réduire tous les sujets du roi à leur devoir (raison d’état).
1. Déclin des organes de concertation.
Dernière réunion des états généraux en 1614 et de l’assemblées des notables en 1627.
Pression fiscale : augmentation.
Déclin des états provinciaux et essor des pays d’élection.
Le mot province n’a pas de signification juridique sauf en droit canonique (ensemble d’évêchés réunis sous l’autorité d’un archevêque métropolitain). Superposition de cadres.
Les pays d’État : ont conservé leurs États particuliers (États provinciaux) qui sont une assemblée regroupant les représentants des trois ordres (assemblée provinciale). Ces représentants le sont ès qualité et non élus : évêque, maire, baron, etc. Assez nombreux, ces pays d’État sont diminués en nombre. Après Louis XIV, il ne reste plus que trois grands pays d’État : la Bourgogne, la Bretagne et le Languedoc (en Provence, il y a des assemblées de communautés qui ont le même type d’attributions). Réunion solennelle deux ou trois fois par ans, présidée par un ecclésiastique en général. Entre les sessions, ils désignaient parmi les membres des commissions intermédiaires qui administraient le pays. Les attributions : établir les doléances, décident du montant de l’impôt versé par le pays (impôt appelé don gratuit). Il y a donc le principe de consentement à l’impôt ce que n’ont pas les pays d’élection. Les assemblées participent également à l’administration de la province concurremment avec l’intendant et les parlements, d’où les conflits. Ils votaient l’impôt dont une partie est pour le roi et l’autre partie pour le pays d’État. Participent à la gestion de la circonscription.
Les pays d’élections (2/3 du royaume au XVIIIe s) : terme provenant des élus, officiers royaux (pas élus, mais titulaire de leur charge) chargés des questions fiscales, sous l’autorité des bureaux de finance et des trésoriers généraux. Ces pays ne disposaient de presque aucune autonomie, pas de privilèges.
Les pays de conquête ou d’imposition : statut particulier, ce sont des régions tardivement rattachées au royaume (Alsace en 1648 puis La Comté, l’Artois, le Roussillon, la Lorraine et la Corse). Les impôts sont ici à la discrétion du roi (sans être plus élevés qu’ailleurs sinon conflit). L’intendant a tout pouvoir.
2. Mise au pas des aristocrates
Répression des complots aristocratiques.
Déclin des châteaux-forts, Richelieu en fait raser un certain nombre car vestige de la féodalité.
Mise au pas des gouverneurs de provinces. Les gouvernements ont à leur tête le gouverneur (commissaire). Apparaissent pendant la guerre de Cent Ans pour l’organisation des commandements militaires. Ces gouvernements vont très vite représenter un danger pour la monarchie (notamment pendant les guerres de religion) car ce sont de très vastes commandements notamment pendant la Ligue contre Henri IV (la Ligue est une alliance espagnole catholique). Donc, au XVIIe s, on leur enlève certains de leurs pouvoirs en les mettant en concurrence avec d’autres fonctionnaires, les commandants en chef et les lieutenants généraux. Le titre de gouverneur n’est plus qu’honorifique (recrutement uniquement dans la haute noblesse).
Mise au pas des officiers, Richelieu les cantonne dans leurs prérogatives.
3. Démantèlement du parti protestant
à côté de l’édit de Nantes, Henri IV avait accordé le maintien d’une organisation militaire aux protestants, qui avaient des places fortes, des garnisons et une assemblée politique, il y avait un état dans l’état, un état huguenot.
Révoltes des protestants, siège de La Rochelle 1627-1628. L’édit d’Alès (1629) pardonne la révolte, maintient la liberté du culte, mais ordonne la destruction des fortifications et des assemblées politiques.
B. La mise au pas louis-quatorzienne
1. La Fronde
Régence d’Anne d’Autriche et du cardinal italien Mazarin (principal ministre depuis la mort de Richelieu en 1642) car Louis XIV le Grand a moins de 5 ans en 1643.
Impopularité car deux étrangers à la tête de l’état et relations on ne peut plus étroites entre les deux (amant voire son mari !). La cour est très hostile.
Mouvements d’opposition violente entre 1648 et 1653 : c’est la Fronde contre la politique de Mazarin qui veut augmenter les impôts (guerres) notamment en suspendant le système de la « paulette ». Les parlements voulant plus de pouvoir politique, en profitent pour contester Mazarin.
La Fronde commence avec « l’arrêt d’union » (13 mai 1648) : les cours se solidarisent entre elles et exigent des réformes dans l’état et l’administration. Cette solidarité entraîne la révolte de la « Basoche » i.e. des auxiliaires de justice (avocats, huissiers, avoués) et aussi la révolte de la majorité du peuple de Paris, barricades à Paris. Louis XIV, la reine et Mazarin doivent s’enfuir, les deux premiers à Saint-Germain, Mazarin à l’étranger.
ébranle les fondements de la monarchie. Mazarin triomphe sur cette révolte en 1653, il revient à Paris, se fait acclamer et impose par un lit de justice, une réforme qui interdit au parlement de s’occuper d’affaire d’état et de la direction des finances.
2. Règne personnel 1661
Mazarin meurt en 1661. Louis XIV décide de ne plus prendre de principal ministre ; règne personnel. C’est à cette date qu’il fait arrêter Fouquet (cf. supra). Le roi veut gouverner seul. Il écarte sa famille du pouvoir, les ministres deviennent de simple exécutants. La noblesse est réduite à des fonctions honorifiques, sans réel pouvoir. Il écarte les princes de sang des conseils.
Louis XIV portera l’absolutisme jusqu’à son paroxysme. Il développe une sorte de mystique du pouvoir absolu, du « Roi-Soleil », incarné en un personnage presque supraterrestre, dont le culte est consacré à Versailles, où il s’installe définitivement en 1672, avec toute la cour afin de mieux la surveiller car la cour devait obligatoirement résider à Versailles (très coûteux financièrement pour le roi, prodigalités, etc.)
Centralisation : intendants (justice, police, finances).
Les généralités ont à leur tête les trésoriers généraux et l’intendant. Apparaissent à la fin du MA, circonscription exclusivement financière afin de faciliter la gestion des finances. Quatre généralités qui regroupent les élections. Les intendants arrivent beaucoup plus tard et sont généralisés sous Louis XIV.
Origine des intendants dans les chevauchées des maîtres de requêtes pratiquées surtout à partir de mi XVIe, envoyés par le roi chargés d’une mission particulière, ponctuelle. Les intendants sont très critiqués (cf. Fronde parlementaire sous Louis XIV qui demandait notamment leur suppression).
Ce sont des commissaires C’est un représentant du roi. Trois axes : la justice, la police et la finance. Ces attributions empiètent sur celles de presque toutes les anciennes institutions : les tribunaux, les États, les parlements. L’intendant caractérise le développement de la centralisation qui reste malgré tout inachevée car elle se heurte aux résistances locales (parlements, officiers, compagnies, etc.), une des grandes causes de la Révolution.
Attributions judiciaires des intendants. Mission d’intervenir dans certains tribunaux : présider au nom du roi, se substituer au nom du roi aux tribunaux ordinaires pour rendre la justice au nom du roi : principe de la justice retenue. Règle une partie du contentieux administratif.
Attributions de police des intendants. Sous l’AR, la mot police est pris dans un sens large, la cité, la polis. Donc concerne l’administration de la cité en entier. Information du pouvoir central (surveillance de la circonscription), maintien de l’ordre, répression des soulèvements populaires, des délits aux passages de troupes, contrôle du recrutement militaire, tutelle des corps (corporations), tutelle des communautés villageoises, tutelle des ville (perdent leur autonomie au XVIIe s).
Attributions financières des intendants. Veille à la répartition de l’impôt, surveille les rôles d’imposition et de perception.
Côté économie, Colbert (mort en 1683), devient contrôleur général des finances (cf. supra) et Colbert développe une théorie appelée colbertisme fondée sur le mercantilisme et l’interventionnisme étatique. Le pouvoir royal est considéré comme le protecteur du peuple, garant du bien commun, il lui incombe donc d’intervenir dans l’économie du pays.
Mercantilisme : doctrine des économistes des XVIe et XVIIe fondant la richesse des états sur l’accumulation des réserves en or et en argent.
Colbert veut donc enrichir la France et donc augmenter le stock monétaire pour obtenir ce qu’il appelait « l’abondance d’argent ». Or, la quantité de monnaie qui circulait en Europe était alors insuffisante parce que l’Amérique espagnole fournissait moins de métaux précieux qu’auparavant. Plus que jamais, donc, il fallait empêcher l’argent de sortir de France et y attirer l’argent étranger. La France doit ainsi devenir un grand pays industriel, afin d’éviter d’importer ce dont elle a besoin et également devenir un pays exportateur.
L’économie de cette période est dans l’ensemble une économie subordonnée à l’état. C’est l’état qui doit orienter la population vers l’activité économique, qui doit fournir les capitaux, réglementer l’économie et l’utiliser au profit des desseins politiques.
Développement des industries existantes et création des manufactures en leur octroyant des privilèges, des monopoles, des exemptions d’impôts et un apport de main-d’œuvre. Très forte réglementation pour assurer la qualité des produits. Protectionnisme très fort avec taxation élevée des produits étrangers manufacturés, à tel point que cela entraîne une guerre avec la Hollande.
Pour le commerce maritime français, volonté d’être au même niveau que celui de la Hollande et de l’Angleterre. Il donne des primes et subventions pour armer des navires. Comme Richelieu, il crée des compagnies de commerce et favorise la colonisation et bien sûr la traite des noirs et l’esclavage aux Antilles françaises. La compagnie est vassale du roi, et agit envers les colons en tant que suzeraine. Elle est propriétaire des terres qu’elle concède aux colons contre redevance. [primes, subventions, incite les noble en faisant une exception à la dérogeance.] [généralement, échec par manque de capitaux.]
1685, Code noir, édit de Colbert régissant le statut de l’esclave, un bien meuble… Le droit ne reconnaît pas à l’esclave la qualité de personne juridique. Les esclaves n’existent pas, ils n’ont pas d’état civil, pas de nom, ne peuvent donc rien posséder, tout ce qu’ils obtiennent par leur travail ou par des dons, revient au maître. Par contre, l’esclave est assimilé à une personne quand il s’agit de le baptiser ou de les marier. Une des justifications de l’esclavage était effectivement de christianiser ces païens. Quelques protections de l’esclave guère appliquées d’ailleurs : en cas de marronnage (fuite des esclaves), le Code noir prévoit que l’esclave fugitif aura les oreilles coupées et sera marqué d’une fleur de lys sur une épaule ; en cas de récidive, il aura le jarret coupé et sera marqué sur l’autre épaule ; la troisième fois, il sera puni de mort. Le Code noir autorise également les maîtres, sans jugement préalable, ‘‘lorsqu’ils croiront que leurs esclaves l’auront mérité, les faire enchaîner et les faire battre de verges ou de cordes’’. Cependant, il leur est interdit de leur donner la torture, ni de leur faire de mutilation de membre (définition de la torture était sous-entendue ?!).
Pour le commerce intérieur, système de taxe et de douane très lourd pour chaque pont, ville ou village. Amélioration du réseau routier et des canaux entre 1630 et 1680. Douanes, règlements, etc. Une partie du commerce intérieur est encore plus sévèrement réglementée, c’est le commerce des denrées et surtout des grains. Le but poursuivi par les autorités est d’assurer le ravitaillement qui est toujours plus ou moins précaire. Il existe pour chaque denrée une « police spéciale », réglementation de la production et du commerce (viande, poisson, légumes, vin…). Spécialement pour le pain la royauté poursuit une politique du pain à bon marché : interdiction de l’exportation des grains (sauf avec une permission expresse du roi en temps de grande abondance). Le commerce des grains est en outre interdit d’une province à une autre. En cas de famine, réquisition des greniers, incitation de l’importation par des subventions, voire achats directs par le pouvoir royal et distribution gratuite de blé aux indigents.
Louis XIV entend faire respecter l’ordre public.
Grands Jours d’Auvergne (1665-1666). Les Grands Jours sont des sessions extraordinaires des commissions des parlements pour accélérer les appels. Mais là, utilisation pour réprimer les seigneurs locaux considérés comme coupables de tyrannie envers le peuple depuis la Fronde : 360 morts, 38 guillotinés.
Contre les protestants, il tente de forcer les conversions au catholicisme par les armes ! En 1685, édit de Fontainebleau qui révoque de l’édit de Nantes par Louis XIV qui abroge toutes les concessions et tolérances vis-à-vis des protestants. Les protestants (et les autres minorités religieuses) ne peuvent pas pratiquer légalement leur culte et ils n’ont pas d’état civil, puisque c’est l’église qui le faisait : ils n’ont donc pas de droits tant qu’ils ne se présentent pas devant un prêtre catholique. Entre 200 et 300 000 protestants ont fuit la France (perte économique très grande d’ailleurs), résistance dans le Midi.
Louis XIV va museler les parlements par l’ordonnance de 1673 en imposant l’enregistrement préalable pour exercer le droit de remontrance.
Le testament de Louis XIV prévoit qu’en cas de décès du jeune fils, ce sont les bâtards légitimés qui monteraient sur le trône, ce qui écarte la branche des Orléanais. à la mort de Louis XIV (1715), c’est la régence de Philippe d’Orléans qui a besoin des parlements pour le testament de Louis XIV. Philippe d’Orléans va demander au Parlement d’annuler la disposition testamentaire car contraire aux lois fondamentales du royaume (indisponibilité de la couronne). Les parlements acceptent en contrepartie du retour du droit de remontrance préalable. L’opposition parlementaire reprend de plus belle.
C- la remise en cause du pouvoir royal :
Entre 1588 et 1589, les états généraux jugèrent bon de faire respecter le principe de catholicité. Mais les états généraux ne siègent pas d’une manière régulière. Mis à part eux, et le parlement, il n’existait pas dans cette société des institutions qui puissent permettre aux sujets de s’exprimer légalement ( pas de recours à la violence )
Les mécontents prenaient les armes pour alerter l’opinion publique et pour permettre l’instauration d’une monarchie mixte.
2 la conception du tyrannicide :
Elle doit beaucoup à saint Thomas d’Acquint mais avant de se prononcer sur les modalités il commençait par faire valoir les 3 arguments contre le tyrannicide :
— le 5ème commandement « tu ne tueras point »
— à la suite de tous les honneurs chrétiens, il fit valoir les écrits de saint Paul « quiconque résiste à l’autorité résiste à l’ordre voulu par Dieu »
— il considérait que le recours au tyrannicide était délicat, car en cas d’échec la répression est toujours sanglante et en cas de réussite les anciens conspirateurs s’opposaient sur le nouveau régime à installer.
Le tyrannicide c’est soit la guerre civile, soit une tyrannie plus importante.
Malgré ces 3 arguments, saint Thomas d’Acquint acceptait ce principe. Néanmoins il n’admettait le recours au tyrannicide qu’avec réserve. En effet il distinguait le tyran d’origine et le tyran d’exercice.
Le tyran d’origine s’est emparé du pouvoir par la force, c’est à dire usurpé un pouvoir qui ne lui avait pas été donné. Quant au tyran d’exercice il a accédé au pouvoir légalement, mais une fois au pouvoir, il exerce ses prérogative de manière tyrannique c’est à dire en violation des lois divines et du droit naturel.
Saint Thomas d’Acquint poursuivait en réservant un sort différent a chacun d’eux :
Pour le tyran d’origine, il estimait que toute personne a le droit de l’éliminer. En effet celui qui s’empare illégalement du pouvoir ne peut se prévaloir du 5ème commandement.
Pour le tyran d’exercice il commençait par proscrire toute action individuelle, car il estimait qu’en présence d’un tyran d’exercice, il ne s’agissait pas de constater un fait matériel mais plutôt de porter une appréciation morale sur une conduite donnée. 3 remèdes existaient :
— la prière qui est censée changer le cœur du tyran
— l’intervention du Pape : en effet on a vu depuis la doctrine de Saint Ambroise que le Pape a le droit d’intervenir
— la déposition du roi : étant donné qu’il s’agit d’un tyran d’exercice cet acte doit être déposé par un groupe de personnes pour apprécier les actes du dirigeant politique.
Au 16ème siècle les monarchomaques reprendront cette conception.
3 la conception des monarchomaques :
ils vont commencer par reprendre les idées déposées par Saint Thomas d’Acquint. Cependant ils s’intéressaient peu à la question du tyran d’origine car ils avaient à faire avec le roi de France qui était un éventuel tyran d’exercice.
Ils ont très vite affiché beaucoup moins de prudence que Saint Thomas d’Acquint. En effet, ils acceptaient parfaitement les 3 remèdes mais contrairement à Saint Thomas d’Acquint, ils ne réagissaient pas par rapport à la théorie.
De contre le tyran d’exercice les monarchomaques préconisaient deux autres remèdes :
— lorsque la personne était reconnue comme tyran, le peuple avait le droit de faire appel à une puissance étrangère ( par exemple les protestants qui firent appel aux Anglais )
— ils estimaient que pour lutter contre le tyran la communauté devait prier Dieu pour qu’il envoie un héros manifeste c’est à dire un personnage qui agirait seul au nom de la communauté ( en qualité de bras armé de Dieu ) — par exemple l’assassinat de Henri III par Jacques Clément
une lassitude de l’immense majorité des français se ressent. Cette remise en cause du pouvoir royal des monarchomaques débouchent alors sur l’exaltation de la monarchie.
D- l’exaltation de la monarchie :
on n’insiste jamais assez sur la part fondamentale des hommes du tiers état dans l’exaltation de la monarchie. Tous les grands doctrinaires étaient issus de familles roturières. Ainsi les théoriciens du droit divin comme Bossuet étaient des hommes d’église d’origine roturière.
1- l’absolutisme :
a la pensée de Jean Bodin :
au 16ème siècle il lui revient d’avoir fondé le concept moderne : en effet la souveraineté est une puissance perpétuelle et absolue.
1 la souveraineté est une puissance :
république = Res Publica c’est à dire la chose publique, l’état. La souveraineté serait cette puissance suprême qui permet à l’état d’agir.
La forme de la respublica dépendait des titulaires ; ainsi il distinguait lorsqu’une personne possédait le pouvoir, lorsque plusieurs l’avaient, ou lorsque c’était au peuple d’en user.
On constate que dès l’antiquité grecque il y avait cette classification. A la différence d’Aristote, Jean Bodin considérait qu’il ne pouvait pas y avoir de régime mixte. Il considérait que dans un certain régime il pouvait y avoir un partage de fonctions, mais jamais de partage de souveraineté.
2 une puissance perpétuelle :
Jean Bodin estimait que le pouvoir de l’état est continu et illimité dans le temps. La puissance préexiste au roi et ne s’éteint pas avec lui. Il reprenait l’exemple du dictateur romain : il existait une procédure par laquelle on confiait les pleins pouvoirs a un dictateur pour faire face à la crise ( Jules César ) cependant il n’était pas titulaire de la souveraineté car ce pouvoir ne lui avait été confié que pour un certain temps.
3 un pouvoir absolu :
c’est là le point essentiel de sa doctrine : en effet absolu n’est pas synonyme d’illimité.
ABSOLU vient du mot latin « absolvere » qui signifie détacher, dégager, délier. C’est un pouvoir totalement indépendant que ce soit dans l’ordre interne ou international.
Par ailleurs pour Jean Bodin cette puissance absolue se manifestait par le pouvoir de faire la loi, certes il considérait que la puissance souveraine avait un grand nombre de prérogatives : « quod principi placuit habet legis vigorem » cet adage est a rapprocher de la maxime « car tel est notre bon plaisir ». lorsque le roi indique cette maxime, il s’agit de ce que le roi et son conseil trouvent juste.
La conséquence de cette conception, c’est que le roi est celui qui peut faire la norme de droit. Jean Bodin considère que cette autorité doit être déliée des lois ( que le roi n’a pas à être soumis aux lois ).
« princeps legibus solutus est »
l’emploi de cette formule a souvent prêté a confusion. En effet en application de cet adage, on a parfois considéré que le prince souverain pouvait interdire différentes choses à ses sujets mais que cette règle ne s’appliquait pas au souverain, au prince.
C’est alors le cas d’un pouvoir tyrannique. Cette conception est excessive pour deux raisons :
Pour les théoriciens politiques de l’époque moderne, certes le prince est absous, cependant il est tenu par les lois divines, le droit naturel et les lois fondamentales. Par cette maxime empruntée au droit romain, on souligne le fait que le prince est celui qui doit créer les normes de droit, car s’il était lié par le droit existant il ne pourrait pas le changer.
Cette conception sera reprise ai 17ème et 18ème siècle.
Comme le dit Jean Bodin, même si le roi va suivre l’avis des états généraux et du parlement, le pouvoir absolu est un pouvoir délié de toute autorité supérieure.
La théorie absolutiste même poussée à l’extrême par Bodin de distingue de la tyrannie : un régime tyrannique ne connaît pas de limites, alors que le pouvoir absolu est un pouvoir qui connaît une certaine limite : la loi de Dieu, le droit naturel, et les lois fondamentales.
Il est intéressant de constater que l’idée de Bodin marque une étape importante dans la pensée politique. En effet au moyen âge le roi était avant tout un justicier alors que pour Bodin il est surtout un législateur.
Cette différence marque un profond changement dans l’idée que l’on se fait de la pensée royale. Le roi est un juge, un grand ordonnateur, en revanche à l’époque moderne on va estimer qu’il est avant tout celui qui exprime et impose sa volonté. L’exception devient la volonté.
La poursuite du bien commun n’est dans la pensée de Bodin que l’accessoire. Entre le moyen âge et la période moderne, il y a eu une inversion des articulations.
b le cas des successeurs de Bodin :
aucun élément nouveau n’est apporté a la démonstration de Bodin, cependant ils ont su morceler les formules promptes à leurs idées notamment l’idée selon laquelle la souveraineté souffre d’être partagée.
G. Coquille : « le roi est monarque et n’a pas de compagnon en sa majesté royale » — le roi exerce à lui seul toute la puissance de l’état. Il est le seul tuteur et curateur de la respublica.
Cardin le Bret, 1632 : « la souveraineté n’est non plus divisible que le point en géométrie »
Loyseau estime que s’il manquait un seul des attributs on ne pourrait parler de souveraineté de même que l’on ne peut parler de couronne …« elle ne peut estre si son cercle n’est pas entier ».
Néanmoins, il serait erroné de croire que ces auteurs du 17ème 18ème siècle se soient contentés de recopier Bodin. Tous ont été amenés à préciser, à compléter sa théorie.
Guy Coquille bien que favorable à l’absolutisme royal donne une place considérable aux états généraux. De même Charles Loyseau a été pendant longtemps un agent administratif, et dans ses écrits il va chercher à ménager les droits des grands seigneurs c’est à dire préserver les droits du roi.
D’Aguesseau affirme alors que le roi doit se lier aux lois qu’il édicte lui même.
Beaucoup d’auteurs au 17ème et 18ème siècle se sont montrés favorables à l’absolutisme royal sans pour autant adopter tous les points de vue de Jean Bodin.
2- la théorie du droit divin :
Elle procède de la conception chrétienne du pouvoir, et selon laquelle tout pouvoir vient de Dieu.
b la conception traditionnelle :
l’idée du droit divin part du principe que tout pouvoir vient de Dieu. Alors les partisans considéraient que dieu donne directement son pouvoir au roi. Le roi était censé n’avoir de compte à rendre qu’à dieu lui seul. Il apparaît alors deux conséquences :
— dans l’ordre international :
le roi est indépendant. En effet comme le roi recevait son pouvoir directement de dieu, a contrario il ne le recevait ni du pape, ni de l’empereur. Aucune de ces deux autorités ne pouvait s’ériger en juge du roi.
— C’est une conception contractualiste du pouvoir développé par les monarchomaques :
dire que le roi recevait son pouvoir de dieu condamnait la théorie « per populum » et par voie de conséquences c’était condamner toutes les théories des monarchomaques.
L’origine de la théorie de droit divin se trouve au moyen âge. Au 17ème siècle c’est une théorie qui est passée comme un dogme. Au moyen âge, le pouvoir royal pouvait tolérer que certains auteurs politiques ou religieux n’adoptent pas cette théorie directement. Mais à partir du moment ou la France va être victime des guerres de religion, les opposant au pouvoir royal, la théorie du droit divin va s’affirmer en tant que dogme.
c Bossuet et droit divin :
Bossuet était le précepteur du fils d’Henri IV ; il rédige de 1670 à 1679 « la politique tirée des propres paroles de l’écriture sainte. » qui consacre et explique la théorie du droit divin ( influence la déclaration gallicane de 1682 )
« Dieu lui même gouverne tous les peuples et donne a tous des rois ».
il pose le principe selon lequel le trône royal est différent du trône d’un homme quelconque. Car c’est le trône de Dieu lui même. Le roi de France est un lieutenant de Dieu sur terre ce qui provoque deux conséquences :
— le roi est délégataire de toute la puissance divine :
le droit divin s’ajoute à l’absolutisme : pouvoir tout puissant du roi en tant que Dieu sur terre.
— toute opposition au roi est une opposition à Dieu
les hommes sont soumis au roi comme ils sont soumis à Dieu. Ils obéissent au souverain et le respectent. C’est un devoir sacré.
Dans la théorie du droit divin, Bossuet développe donc la question de la soumission due par les sujets au roi.
En 1682 la déclaration gallicane précise qu’aucune autorité ne peut dispenser les sujets de cette obéissance. C’était ici l’autorité pontificale qui était visée car lorsque la papauté voulait sanctionner un dirigeant politique, elle estimait que les sujets n’avaient plus à obéir.
Mais il ne faut pas croire que le devoir d’obéissance ne connaît aucune limite. Les lois sont conformes au droit naturel, à la raison et à la religion.
Bossuet exclut toute résistance active : si le gouvernement se conduit en tyran, les sujets doivent faire des « remontrances respectueuses sans mutinerie et des prières pour leur conversion ».
3- la portée des doctrines :
Très largement amplifiée par des auteurs politiques du 19ème siècle qui caricaturent l’ancien régime, la porte exacte de cette doctrine n’a pas été si importante que ça.
J. Harouel : « le roi n’a rien gagné à ces doctrines, le grand gagnant c’est l’état »
b le roi n’a rien gagné à cette doctrine :
les profits sont plus apparents que réels :
— quant au droit divin :
à l’époque, ça n’est pas une doctrine nouvelle. Elle découle de la conception sacrée du pouvoir au moyen age. Au 17ème siècle, il n’y a rien à ajouter à la dimension sacrée du roi. Depuis le moyen age, on considère que le roi est sacré donc choisi par Dieu pour régner. La doctrine ne bouleverse pas la conception générale du pouvoir politique.
Bossuet lie le phénomène politique au religieux. Cependant, en liant trop étroitement ces deux domaines, des personnes comme lui ont rendu tributaire le pouvoir royal du sentiment religieux. Une poussée de l’irréligion se fait sentir au 18ème siècle ce qui entraîne des conséquences désastreuses sur le pouvoir politique.
— quant à l’absolutisme :
la portée réelle de cette doctrine, c’est que c’est au roi à décider en dernier ressort car c’est le seul titulaire de la souveraineté ( cf. Bodin ). Le juriste Merlin le qualifie comme étant « le dernier degré du pouvoir ».
la conception même du pouvoir n’a pas changé depuis le moyen age ( affirmation de l’autorité royale et hiérarchie des pouvoirs ) car la situation de subordination du roi à l’époque féodale a toujours été une situation de fait, mais jamais de droit. Les juristes ont considéré que le roi était au sommet de la hiérarchie des pouvoirs. L’absolutisme est l’affirmation d’un principe ancien mais pas une véritable innovation politique.
c le grand gagnant, l’état.
Comme l’affirment de nombreux historiens, c’est l’état l’héritier de la respublica ( la chose publique ) pour 2 raisons :
— lorsque l’on aborde ces doctrines, on a toujours tendance a considérer le seul cas du roi ou du
« Prince Souverain » ( cf. Bodin ) mais dans la conception absolutiste du pouvoir, la souveraineté à l’origine appartient à l’état. Cf. Loyseau « la souveraineté est inséparable de l’état » « elle se communique soit au peuple tout entier, soit à une élite, soit à une seule personne » ce qui souligne ici qu’originellement, la souveraineté appartient bien à l’état. La souveraineté, c’est le moyen dont dispose l’état pour agir. Il est nécessaire qu’elle soit attribuée à un ou plusieurs dirigeants politiques. Cette théorie est développée par Bossuet dans l’angle religieux, en affirmant que Dieu accorde le gouvernement à tout organe politique. Mais tout ce qui compte, c’est l’état. Le roi est simplement le 1er des serviteurs de cet état. Louis XIV est le symbole de cet absolutisme, il parle du métier de roi. Il se place dans ses mémoires comme serviteur de l’état.
— étant donné que l’état est le titulaire de la souveraineté, il n’appartient pas au roi.
Souvent, par une sorte d’abus de langage, les dirigeants parlaient de « mon état » mais tous les juristes considéraient que l’état est confié au roi pendant la durée de son règne. Louis XIV n’a jamais dit « l’état c’est moi » mais sur son lit de mort, il a prononcé une phrase significative : « je m’en vais mais l’état demeurera toujours ».
Force est d’admettre que la monarchie a besoin de l’état pour exister mais l’autre sens n’est pas nécessaire. L’état peut être servi par un autre régime politique.
III Le devenir des lois fondamentales
Dès le Moyen Âge, avait émergé un droit spécial régissant la couronne. À partir du XVIe siècle, les règles en sont précisées. Pour autant, l’ordre constitutionnel n’échappe pas à une certaine ambiguïté car il est loin de faire l’objet d’une clarification d’ensemble.
À la fin du XVIe siècle, les guerres de religion engendrent des doctrines qui visent à subordonner le pouvoir royal. Ces doctrines valent à leurs promoteurs l’appellation de monarchomaques, littéralement adversaires du pouvoir d’un seul. Elles émanent d’abord de Huguenots, vite relayés par des extrémistes catholiques tenant de la Sainte Ligue. En réaction contre ces thèses, les publicistes légitimistes dégagent la notion de monarchie pure qui exclut tout partage du pouvoir. Trois noms dominent : Jean Bodin qui publie en 1576 les six livres de la république ; Charles Loyseau dans le traité des seigneuries paraît en 1608 ; Cardin le Bret qui écrit un traité de la souveraineté du roi, de son domaine et de sa couronne publiée en 1632. Au cœur de ses ouvrages, se trouve une analyse de la souveraineté dont Bodin donne la définition suivante : « la souveraineté est puissance absolue et perpétuelle d’une république ». À l’image de l’État qu’elle constitue, la souveraineté ne connaît pas de supérieur, pas plus qu’elle ne connaît de limites dans la durée. En outre, elle est indivisible : « non plus divisible que le point en la géométrie » précise Cardin le Bret. Son exercice appartient entièrement et sans partage à celui qui détient le pourvoir dans l’État. Dans un État démocratique, l’exercice de la souveraineté appartient à la multitude ; dans un état aristocratique, à une minorité. Dans un État monarchique, l’exercice de la souveraineté revient au roi seul : « le roi est monarque et n’a point de compagnon en Sa Majesté royale » écrit Guy Coquille. Le roi détient tous les pouvoirs, que l’on évite d’ailleurs souvent d’énumérer. L’absolutisme traditionnel sera renforcé au XVIIe siècle par la théorie du droit divin. À la fin du XVIIIe siècle, le juriste Merlin pourra résumer le régime politique en ces termes : « un seul roi, indépendant, absolu, qui ne tient que de Dieu un pouvoir dont il ne doit compte qu’à lui seul, pouvoir qu’il ne peut ni diviser, ni détruire et qu’il transmet nécessairement à son successeur légitime dans toute sa plénitude ».
Mais les théoriciens de la monarchie absolue ont toujours pris soin de la distinguer du despotisme en mettant l’accent, outre les devoirs moraux, sur les règles constitutionnelles que le roi doit respecter et qui reçoivent en 1575 l’appellation de lois fondamentales. Auparavant on parlait plutôt des lois du royaume, terminologie qui ne sera d’ailleurs pas abandonnée. Cet ordre constitutionnel connaît cependant des limites qui seront dénoncées au XVIIIe siècle.
A- L’existence d’un corps de lois fondamentales
À la différence de lois ordinaires, les lois fondamentales s’imposent au roi. Il y a une véritable hiérarchie des normes juridiques qu’Achille de Harlay, premier président du parlement, rappelle à Henri III en 1586 : « nous avons, Sire, deux sortes de loi : les unes sont les lois et ordonnances des rois qui se peuvent changer selon la diversité des temps et des affaires ; les autres sont les ordonnances du royaume, qui sont immuables et inviolables, par lesquelles vous êtes montés au trône royal, et cette couronne a été conservée par vous ».
Parmi ces règles figurent celles qui régissent la dévolution de la couronne : la couronne est dévolue, nous l’avons vu, à celui qui satisfait aux conditions d’hérédité, de primogéniture et de masculinité que l’on complète au XVIe siècle par l’exigence de catholicité. Au XVIe siècle, encore, est solennellement consacré la règle d’inaliénabilité du domaine de la couronne. Enfin, les circonstances ont donné l’occasion de préciser la règle d’indisponibilité de la couronne.
1- La dévolution de la Couronne et la règle de la catholicité
Depuis Clovis, les rois de France ont tous étés catholiques. Mais un problème inédit survient après la Réforme, lorsque les lois fondamentales désignent comme successeur à Henri III, qui n’a pas d’enfant, un prince protestant : Henri de bourbon, roi de Navarre. Les états généraux de 1576 s’en émeuvent et prennent acte de l’existence de la loi fondamentale de catholicité attestée par une longue tradition. Mais les Guises, à la tête du parti armé de la Sainte ligue, font pression sur Henri III pour qu’il en proclame solennellement les principes. C’est l’objet de l’Edit d’Union, promulguée en juillet 1588 : « je suis d’avis, dit le roi, que pour la rendre plus stable nous en fassions une des lois fondamentales du royaume ». Les états généraux réunis à Blois proclament en octobre loi fondamental la nécessité pour le roi de France d’être catholique. La procédure était maladroite pour l’autorité royale car il suffisait de reconnaître, comme en 1576, l’existence de la coutume constitutionnelle au lieu de donner l’impression que les états généraux pouvaient faire des lois fondamentales. L’assassinat d’Henri III, en 1589, ouvre une crise de succession. La ligue refuse de reconnaître Henri de Navarre et proclame roi, sous le nom de Charles X, le cardinal Charles de bourbon, plus proche collatéral du roi défunt après le roi de Navarre, cardinal qui meurt l’année suivante avant d’avoir été sacré. Dès lors, le chef des ligueurs, le duc de Mayenne, est proclamé « lieutenant général de l’État et couronne de France » et, comme il faut bien trouver un roi, il convoque les états généraux en 1593. Aveuglés par la passion religieuse, les ligueurs soutiennent, au mépris de la règle de masculinité, la candidature de l’Infante Claire-Isabelle, fille de Philippe II d’Espagne et petite fille d’Henri II par sa mère. Le parti modéré provoque l’intervention du Parlement de Paris qui rend, le 28 juin 1593, L’arrêt Lemaistre (du nom du président du parlement) encore appelée « arrêt de la loi salique » car il rappelle la règle intangible de masculinité tout en réaffirmant celle de catholicité. La seconde ne saurait primer sur la première. L’arrêt invite également Henri de Navarre, devenu « roi de droit » à la mort d’Henri III, à et la religion réformée, pour devenir « roi d’exercice ». L’abjuration a lieu en juillet 1593 et au mois de février suivant, Henri IV est sacré à Chartres. La règle de catholicité prend définitivement rang parmi les lois fondamentales.
2- La consécration de la règle d’inaliénabilité du domaine de la Couronne
Depuis le XIVe siècle, la législation royale tente, avec plus ou moins de succès, d’assurer la conservation du domaine. Ce n’est donc pas un principe nouveau qu’introduit le fameux édit de Moulins, pris par Charles IX en février 1566. Cependant, il se distingue des précédentes ordonnances par la solennité dont il est empreint et par son caractère général. C’est l’édit de Moulins qui donne son expression définitive à la loi fondamentale, inviolables, d’inaliénabilité du domaine de la couronne et en précise les exceptions.
a- L’étendue de la règle d’inaliénabilité
En raison de son affectation perpétuelle aux nécessités de l’État, le domaine, corporel et incorporel, est juridiquement inaliénable. Les juristes en ont tiré un corollaire, celui de son imprescriptibilité : les particuliers ne peuvent acquérir par prescription une portion du domaine. Gestionnaire du domaine, le roi doit le conserver intact à son successeur. On distingue cependant le domaine fixe et le domaine casuel. Le premier inclut tout ce qui est définitivement uni à la couronne et il est inaliénable. Le domaine casuel est, quant à lui, composé des acquisitions faites depuis moins de 10 ans et le roi peut en disposer. Quant aux biens que le roi possède au jour de son avènement, ils sont de plein droit incorporé au domaine de la couronne : le domaine à un pouvoir absorbant. De même que la personne du roi il y a l’État (on évoque un mariage « Saint et Politique » entre le roi et la couronne), de même sa fortune est absorbée par le patrimoine de l’État. Ce principe triomphe lorsque, après avoir tergiversé en raison de sa situation périlleuse, Henri IV incorpore en 1607 au domaine toutes ses seigneuries qui relevaient directement de la couronne. Ces territoires souverains (Béarn, Navarre) seront annexés à la couronne par Louis XIII lorsqu’il en héritera de son père.
b- Les exceptions à l’inaliénabilité
L’édit de Moulins prévoit cependant deux exceptions, les apanages les engagements. L’histoire a démontré que la pratique des apanages, compensation donnée au fils puîné du roi, était dangereuse pour la monarchie. À partir du XVIe siècle, les domaines concédés en apanages, tout en procurant de solides revenus aux princes bénéficiaires, sont choisis en sorte de ne plus pouvoir servir de support à une influence politique. À défaut de descendant mâle direct, l’apanage retourne à la couronne : cette clause de reversion était insérée dans les actes constitutifs d’apanage. La deuxième exception concerne les engagements. En temps de guerre (on admettra plus tard d’autres graves éventualités), le roi peut, contre argent comptant, affecté à un engagiste la jouissance d’une partie du domaine. Il ne s’agit pas d’une vente : l’engagiste perçoit les revenus du domaine à titre d’intérêts de la somme versée au roi. Les lettres patentes d’engagements doivent être enregistrés par les cours souveraines et le roi dispose d’une faculté perpétuelle de rachat.
3- Les précisions de la règle d’indisponibilité de la Couronne
À l’occasion du traité de Troyes, le principe avait été posé que le roi ne pouvait exhéréder l’héritier nécessaire et se choisir un successeur. À partir du XVIe siècle, d’autres implications de la règle d’indisponibilité sont dégagées à l’occasion de circonstances concrètes : le roi ne peut renoncer à la couronne et même si aucun successeur légitime n’est écarté, le roi ne peut habiliter personnes à succéder à la couronne.
a- L’inconstitutionnalité des renonciations au trône
Le roi ne peut abdiquer et pas plus qu’il ne peut renoncer lui-même à la couronne, il ne peut faire renoncer d’avance l’un de ses descendants légitimes.
— La nullité de l’abdication
La question s’est posée pour François Ier. Après la défaite de Pavie, le roi se trouve prisonnier de Charles-Quint à Madrid. En novembre 1525, il envoie secrètement en France des lettres patentes « pour faire couronner roi de France le jeune dauphin ». Ce stratagème aurait permis au roi captif de ne pas signer le traité désastreux qu’exiger son vainqueur, ou tout au moins de le signer sans engager la France. Le Parlement refusa de recevoir l’acte d’abdication au motif qu’il était contraire au principe d’indisponibilité : renoncer à la couronne reviendrait en disposer. François Ier signa donc le traité de Madrid qui cédait, notamment, la Bourgogne a Charles-Quint. Ce traité, cependant, sera cassé comme contraire à la règle d’inaliénabilité du domaine de la couronne.
— La nullité des renonciations par avance
En 1700, l’un des petits-fils de Louis XIV, le duc d’Anjou, est appelé au trône d’Espagne par le testament de Charles II. Après quelques hésitations, Louis XIV accepte le testament pour son petit-fils qui devient roi d’Espagne sous le nom de Philippe V, tout en conservant le droit de succéder à la couronne de France. Redoutant l’éventuelle réunion des deux couronnes sur la même tête, les puissances étrangères déclarent la guerre dite « de succession d’Espagne ». Cette guerre ne se terminera qu’au prix de la renonciation expresse de Philippe V, pour lui et pour ses descendants, au trône de France, signé à Madrid le 5 novembre 1712. Le 19 novembre, à Paris, le duc de Berry et le duc d’Orléans renoncent solennellement, pour eux et pour leurs descendants, à la couronne d’Espagne. En mars 1713, des lettres patentes de Louis XIV admettent les renonciations, qui seront insérés dans le traité de paix d’Utrecht (avril 1713). Le principe d’indisponibilité de la couronne, toutefois, rendait ses renonciations radicalement nulles. Louis XIV n’avait pas le droit de faire renoncer son petit-fils, pas plus que Philippe V ne pouvait légalement renoncer à ses droits, encore moins à en priver ses descendants. Dès 1712, le marquis de Torcy, secrétaire d’État aux affaires étrangères, l’avait d’ailleurs vigoureusement signifié aux puissances adverses. Celles-ci tentèrent de tourner la difficulté : constatant que les renonciations des ducs de Berry et d’Orléans avait été ratifié par les Cortès d’Espagne et se souvenant que les états généraux de 1588 avaient proclamé la loi de catholicité, les Anglais réclamèrent la ratification des renonciations de Philippe V par les états généraux. Devant le refus de Louis XIV ils durent se contenter de l’enregistrement Parlement.
Les renonciations n’en étaient pas moins inconstitutionnelles. Philippe V resta successible aux yeux de l’opinion française et aux siens propres : lorsqu’en 1728 le bruit courut de la mort de Louis XV, Philippe V s’apprête à partir pour la France. Au moment du départ, un courrier apporta la nouvelle de la convalescence de Louis XV.
La question des renonciations reste de nos jours encore agités. Quoi que le débat soit désormais académique, deux partis monarchique s’opposent sur ce point : les tenants de la famille d’Orléans, descendants de Louis-Philippe, arguent de leur validité pour soutenir la vocation du comte de Paris à la couronne de France, face aux légitimistes qui se réclament de leur inconstitutionnalité pour appuyer les droits du duc d’Anjou, descendant de Philippe V.
b- L’inconstitutionnalité des habilitations royales à la succession
Portent le titre de prince de sang ce qui ont vocation à succéder à la couronne. Le groupe qu’ils forment est strictement hiérarchisé en fonction de l’ordre de succession fixée par les lois fondamentales : au premier rang figure le fils aîné du roi régnant, puis son propre fils aîné s’il en a un, sinon son premier frère puîné et ainsi de suite. Une stricte hiérarchie des préséances souligne le rang que chacun occupe dans l’ordre de succession : « plus ils s’en sont proches, plus ils sont illustrés des rayons de la souveraineté » (Loyseau). Leur vocation successorale leur vaut à tous des privilèges dont le plus évident est celui de ne pas être exécuté en cas de condamnation à mort. Même dans cette hypothèse, le roi ne peut supprimer un successible, sinon il enfreindrait la règle d’indisponibilité. Mais la liste des successibles n’est pas extensible à l’infini. Dès le XVIe siècle, la capacité à succéder au trône est devenue le monopole de la maison des Bourbons. Il ne suffit pas d’être capétien légitime issu de mâle pour prétendre à la couronne. La famille des Courtenay multipliera en vain les tentatives pour faire admettre sa vocation.
Par deux fois, Louis XIV à procéder à des habilitations successorales à la couronne qui, sans écarter de successeur légitime, n’enfreignait pas moins le principe d’indisponibilité : lors du traité de Montmartre, en faveur de la maison de Lorraine et par l’édit de Marly, en faveur des deux enfants qu’il avait eus d’une de ses maîtresses.
— L’habilitation de la Maison de Lorraine
Le 6 février 1662, est conclu le traité de Montmartre. Pour amener le duc Charles IV de Lorraine à lui céder ses états, Louis XIV habilite la maison de Lorraine à succéder à la couronne de France après les Bourbons. Le roi déclare agréger les principes lorrains à la famille royale en les adoptant. Comme tels, ils jouiront des prérogatives des princes de sang. Ce traité est un marché de dupes, Louis XIV ne voyant dans cette concession qu’un expédient sans importance, provisoirement consenti pour faire une belle acquisition et qu’il serait toujours loisible de remettre en cause. Le tollé n’en est pas moins général et le Parlement fait savoir qu’il n’enregistrera pas le traité. L’enregistrement pourtant a bien eu lieu le 27 février, Louis XIV étant aller tenir un lit de justice, en costume de guerre et escorté de 4000 hommes ! La mauvaise foi des deux parties, cependant, met rapidement un terme à l’affaire qui se réglera par des opérations militaires. Un nouveau traité signé à Metz en 1663 ne fera plus l’allusion à la précédente concession et fondera l’acquisition de la Lorraine sur le droit de conquête.
— L’habilitation des bâtards légitimés
À partir de 1709, les Bourbons sont durement éprouvés. Une véritable hécatombe fait disparaître 7 successibles, dont trois dauphins, en l’espace de six ans. En juillet 1714, Louis XIV promulgue, à Marly, un inédit habilitant de deux de ses bâtards légitimés et leurs descendants – légitimes, ceux-ci – à succéder à la couronne en l’absence de prince du sang légitime. Il s’agit du duc du Maine du comte de Toulouse, enfants que le roi avait eus avec Mme de Montespan. Tous deux étaient de naissance adultérine, mais leur père les avait légitimés. Le parlement de Paris enregistre sans résistance l’édit de Marly, le 2 août, « parmi l’abattement et le silence le plus morne et le plus expressif des sentiments de tout le monde » (Saint-Simon). Quelques mois plus tard, le roi accorde à ses princes la qualité de prince du sang, prenant rang après le dernier des princes du sens légitime (déclarations du 23 mai 1715). Pour justifier ces mesures, Louis 14 invoque ses inquiétudes quant à l’avenir de sa race dont l’extinction serait préjudiciable au bien de l’État. Mais on peut aussi penser qu’à l’approche d’une régence (le futur Louis XV à quatre ans), le roi veut épargner à la France les ambitions rivales des princes du sang dont il se méfie et qu’il confère au légitimés le plus haut rang possible pour en faire les plus solides alliés du petit roi, seul garant de leur fortune.
Sitôt la mort du roi, s’engage une « guerre de la constitution » qui aboutit à l’annulation de ces actes par un arrêt en forme d’édit rendu en juillet 1717, enregistré au Parlement le 8 juillet. Louis XIV avait outrepassé ses droits sur trois points :
30 Il ne pouvez disposer de la couronne en habilitant quiconque à y succéder. Il ne pouvait se constituer de successeur en se fondant sur des règles de droit privé. Si le roi pouvait légitimer ses bâtards, c’était une affaire de droit privé. En tirer argument pour asseoir un droit de naissance à la succession (fût-elle de second ordre, après des princes légitimes) était inopposable aux droits publiques de la couronne.
31 En outre, la coutume écartait les enfants naturels de la succession au trône. Leur légitimation était de nul effet en droit public et la qualité de prince du sang, corrélative à la capacité de succéder, ne pouvaient leur être accordé. Un roi de France, selon le compte de Saint-Pol, « ne pouvait faire de prince du sang qu’avec la reine ».
32 Enfin, il avait porté atteinte aux droits de la nation de se choisir un roi en cas d’extinction de la race régnante. En révoquant l’édit de Marly, celui de 1717 se garde bien de préciser les fondements et les modalités d’exercice du droit de la nation, rappelant qu’il est inutile de la consulter avant l’heure.
B- Les déficiences des lois fondamentales
Les lois fondamentales sont des normes supérieures et intangibles auxquelles les rois eux-mêmes sont soumis. Ils se reconnaissent d’ailleurs dans « la bienheureuse impuissance » de les enfreindre. Et, dans une déclaration du 26 avril 1723, Louis XV parle à leurs propos de « constitution » de la monarchie. Mais une constitution règle le mode de désignation, l’organisation et le fonctionnement du pouvoir politique. Les lois fondamentales ne répondent que partiellement à cet objet. Elles ont un domaine limité. Ensuite, il s’agit de norme impérative, elle reste pourtant largement dépourvue de véritables sanctions juridiques. Enfin, elle participe de l’imprécision propre au droit public de l’ancienne France.
a- Un domaine limité
Les monarques de la doctrine officielle n’ont reconnue qu’un nombre limité de lois fondamentales. Seules méritent cette dénomination les dispositions qui règlent la dévolution de la couronne et impose l’inaliénabilité de son domaine. Ces règles ont en commun d’être établi dans l’intérêt exclusif de l’État qui transcende celui du monarque. C’est la raison pour laquelle il se doit de les respecter. Ces règles visent à assurer la permanence de l’État, sa stabilité et son intégrité. La loi de succession, en écartant les conflits au sein de la famille royale et les intrigues des ambitieux, préserve la stabilité du royaume. La continuité de la fonction royale, garantie par la loi de dévolution, symbolise la continuité de l’État. L’inaliénabilité du domaine de la couronne conserve l’intégrité du patrimoine de l’État. Ce principe joue d’ailleurs aussi bien à l’intérieur du royaume que vis-à-vis de l’extérieur. C’est grâce à lui que l’intégrité du territoire national a été préservée après la signature du traité de Madrid. Ce traité, signé par François Ier pendant sa captivité, c’était, notamment, la Bourgogne à Charles-Quint. Après sa libération, et la consultation de l’Université et d’une assemblée de notables, un arrêt du parlement de Paris, en date du 20 décembre 1526, cassa le traité comme contraire aux lois fondamentales : le roi ne pouvait céder une portion du territoire français, du moins sans le consentement des populations.
b- L’absence de véritable sanction
L’intérêt de l’État commande le respect des lois fondamentales. Cet intérêt supérieur ne doit pas cesser devant les circonstances politiques. Or qui l’en garantie ? La sanction demeure des plus précaires. Certes, lorsque le roi transgresse les lois fondamentales, son successeur rétabli l’ordre constitutionnel : pour être tardive, la sanction n’est pas inexistante. Mais, si l’on en juge par les infractions régulières à la règle d’inaliénabilité du domaine, c’est plus souvent l’intérêt du successeur qui guide le retour à l’ordre constitutionnel. Le parlement, cependant, revendique la mission de gardien des lois fondamentales. Le comportement de certains régents n’y est pas étranger. Sachant leurs jours comptés et ne laissant pour successeur qu’un enfant en bas âge, Louis XIII, puis Louis XIV prennent soin d’organiser la future régence. Le premier se méfie des capacités politiques de sa femme, Anne d’Autriche, le second de celle de son neveu, Philippe d’Orléans. Les deux rois instituent un conseil de régence en choisissant ses membres et limitent la liberté d’action des dirigeants. À leur mort, Anne d’Autriche, puis Philippe d’Orléans s’adressent au parlement pour faire casser les testaments comme contraire aux lois fondamentales. Cette sollicitation ne pouvait que renforcer le Parlement dans sa conviction qu’il était le gardien des lois fondamentales dont il professait d’ailleurs une conception des plus extensives aux dépens du roi. Jamais pourtant la monarchie ne lui a reconnu cette fonction. Tout au plus a-t-elle utilisé le parlement lorsqu’elle en a eu besoin. Le plus sûr rempart des lois fondamentales tenait à l’intérêt de la monarchie elle-même : elle tournait à l’avantage du roi qu’il était par conséquent guère tenté de les remettre en cause.
c- Imprécision constitutionnelle
Les lois fondamentales ne concernent pas l’exercice du pouvoir. Ce qui ne veut pas dire que, hors des lois fondamentales, l’exercice du pouvoir soit abandonné à l’arbitraire. C’est là toute l’ambiguïté de la constitution de l’ancienne France. Si les lois fondamentales sont les seules limites intangibles au pouvoir royal, d’autres règles viennent tempérer l’exercice de ce pouvoir sans que la monarchie et leur ai jamais reconnu le titre et le caractère de lois fondamentales. Il s’agit pourtant de tradition contraignante que le roi respecte même si théoriquement il n’y est pas tenu. Selon l’heureuse formule de Montesquieu, « le roi ne peut pas faire tout ce qu’il peut ». Il faut d’abord tenir compte de l’absence d’autonomie du droit constitutionnel par rapport à la religion et à la morale chrétienne. La monarchie française s’est épanouie dans une atmosphère religieuse. Le roi tient son pouvoir de Dieu et les conséquences sur le droit public sont considérables. Le roi n’est responsable que devant Dieu : « on ne contrôle pas l’Oint du seigneur ». Inversement, la plus solide garantie des sujets contre l’arbitraire réside dans la conscience chrétienne du roi. Celui-ci doit, dans l’exercice de son pouvoir, respecter les lois divines. Cardin le Bret parle de la « Prud’hommie » du roi, cet art de gouverner qu’il résume en trois prix : justice, modération, discrétion. D’autres limites tiennent à l’architecture de la nation, composé de multiples collectivités souco-juridiques ou socio-politiques (ordre, corps, État, communauté…) dotées de privilèges que le roi hésite à remettre en cause. Enfin, et surtout, le roi gouverne par conseil, pratique qui se maintiendra jusqu’à la fin de l’ancien régime.
L’imprécision en matière constitutionnelle ne présentait pas que des inconvénients. Elle autorisait les adaptations nécessitées nouvelles et elle permettait de concilier deux pôles apparemment contradictoires : concentration des pouvoirs au profit du roi et limite à l’exercice de ses pouvoirs. Ces deux facettes ne pouvaient coexister à condition qu’on ne les pousse pas jusqu’à leur extrême logique : « le roi est absolu, certes, mais à suivre cette maxime sans tempérament, il serait devenu un tyran ! Le pouvoir du souverain est limité, ce n’est pas douteux, mais en précisant ou en étendant ses limites, on n’en ferait un roi fainéant ! » (M. Antoine).
Ce manque de rigueur dans la définition des principes constitutionnels affecte aussi les lois fondamentales. Jamais elles n’ont fait l’objet d’une liste officielle, encore moins d’une codification systématique. Cela se retourne parfois contre la monarchie. Cette idée de règles inviolables qui sont par-là même autant de limites au pouvoir royal a été exploitée par les opposants à l’absolutisme. À commencer par le parlement, chacun érige en lois fondamentales ce qu’il a intérêt à promouvoir à cette dignité. Leur liste varie selon l’époque et selon les auteurs. Si ces tentatives d’expansion sont restées purement doctrinales elles n’en mettent pas moins en évidence les incertitudes propres à une constitution largement coutumière. Alors que le droit privé, sans être unifié, est fixé par écrit et donc certain, le droit constitutionnel accuse un véritable retard. Au XVIIIe siècle, on n’en viendra à dire que la France n’a pas de constitution.